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b) Doses cardiaques Les doses de rayonnement absorbées par le coeur et les différentes sous-structures cardiaques sont détaillées dans le Tableau 13. Pour les patientes atteintes d'un cancer du sein gauche, la dose moyenne au coeur et la dose moyenne en ventricule gauche étaient respectivement de 3,05 ± 1,31 Gy et de 6,68 ± 3,36 Gy. Ainsi, la dose moyenne reçue par le ventricule gauche était plus de deux fois plus élevée que la dose moyenne reçue par le coeur entier (p = <0,0001). Les doses aux artères coronaires chez les patientes atteintes d'un cancer du sein gauche étaient respectivement de 16,41 ± 7,41 Gy, 1,65 ± 0,82 Gy et 0,71 ± 0,37 Gy pour l'IVA (les doses les plus élevées), la CX et la CD (les doses les plus faibles). De manière générale, les doses absorbées étaient beaucoup plus faibles chez les patientes atteintes d'un cancer du sein droit, à l'exception des doses concernant l'artère coronaire droite où celles-ci étaient en moyenne de 1,53 ± 0,80 Gy. Plusieurs paramètres classiques d'HDV ont été explorés afin de détecter les meilleurs d'entre eux pour la relation dose-réponse (V1, V2, V5, V10, V20 et V30 qui sont ici présentés sont les paramètres classiquement utilisés en radiothérapie). 127 c) Comparaison des mesures échographique et de strain à l'inclusion et 6 mois post RT Aucune toxicité clinique aigue sur le plan cardiaque n'a été observée au cours du suivi (ex : péricardite). Les résultats issus des échocardiographies pour cette partie sont résumés dans les Tableaux 14 et 15. Par rapport aux mesures lors de l'inclusion avant la radiothérapie, une légère diminution non significative de la FEVG a été observée (62% avant radiothérapie à 60% 6 mois après la fin de la radiothérapie, p = 0,0570). Cependant, ces valeurs restant dans une moyenne considérée comme normale (supérieur à 54%), aucun impact de la radiothérapie sur la FEVG n'a été relevée 6 mois après l'irradiation. Concernant les autres mesures échocardiographiques, aucun changement significatif n'était apparu (masse du VG, onde protodiastolique E, onde télédiastolique A, le TAPSE, etc) à l'exception du ratio E/A chez les patientes atteintes d'un cancer du sein gauche dont la réduction restait limitée (1,03 vs. 0,96 ; p = 0,02). Concernant le strain longitudinal, le GLS présentaient des valeurs significativement plus faibles 6 mois après la radiothérapie pour les patientes atteintes d'un cancer du sein gauche (16,0 ± 2,7 % au départ contre -15,0 ± 3,1 % 6 mois après radiothérapie, p = 0,02) avec une diminution moyenne de 6 %. Cependant, les différences observées tendaient à disparaitre après correction. En considérant spécifiquement le GLS de la couche mid-myocardique, nous avons défini un évènement infraclinique pour le ventricule gauche, caractérisé par une réduction du GLS supérieure ou égale à 10%. Cet évènement était présent chez 37 patientes (47%) : 48% des patientes atteintes d'un cancer du sein gauche (n = 31) et 40% des patientes atte d'un cancer du sein droit (n = 6). Tableau 14 : Paramètres d'échocardiographies à l'inclusion et 6 mois après la radiothérapie FEVG (en %) Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value Masse du ventricule gauche (en g) Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value E Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value A Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value Ratio E/A Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value ESPAT Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value S Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value Tous n = 79 Sein droit n = 15 Sein gauche n = 64 62 ± 7 60 ± 9 0,0570 64 ± 8 63 ± 8 0,5150 61 ± 7 60 ± 9 0,0725 142 ± 45 141 ± 48 0,7714 147 ± 56 123 ± 33 0,1701 141 ± 43 145 ± 50 0,2422 0,68 ± 0,14 0,64 ± 0,13 0,1030 0,69 ± 0,11 0,66 ± 0,16 0,7832 0,67 ± 0,15 0,64 ± 0,13 0,0970 0,68 ± 0,17 0,68 ± 0,16 0,9610 0,64 ± 0,12 0,63 ± 0,12 0,5013 0,69 ± 0,18 0,70 ± 0,17 0,7168 1,04 ± 0,29 0,99 ± 0,29 0,0967 1,11 ± 0,25 1,09 ± 0,34 0,5105 1,03 ± 0,30 0,96 ± 0,27 0,0241 2,48 ± 0,44 2,41 ± 0,38 0,4482 2,55 ± 0,38 2,44 ± 0,32 0,6689 2,46 ± 0,45 2,41 ± 0,39 0,5300 0,14 ± 0,03 0,15 ± 0,03 0,4656 0,16 ± 0,04 0,16 ± 0,04 0,9414 0,14 ± 0,03 0,15 ± 0,03 0,4092 VTI Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie 0,21 ± 0,04 0,22 ± 0,05 0,21 ± 0,04 0,21 ± 0,03 0,22 ± 0,04 0,20 ± 0,03 p-value 0,1934 0,8008 0,1711 Note. FEVG : Fraction d'Ejection du Ventricule Gauche ; E : Onde protodiastolique positive E ; A Onde télédiastolique A ; ESPAT : Excursion systolique du plan de l'anneau tricuspide ; S : Onde S ; VTI : Vitesse-Temps-Intégrale. Tableau 15 : Strain longitudinal à l'inclusion et 6 mois après la radiothérapie GLS (en %) Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value GLSR (en s-1) Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value Tous N = 79 Moyenne ± EC Sein droit N=15 Moyenne ± EC Sein gauche N=64 Moyenne ± EC -16,06 ± 2,67 -15,05 ± 3,22 0,0096 -16,21 ± 2,83 -15,15 ± 3,97 0,2617 -16,03 ± 2,66 -15,03 ± 3,05 0,0212 -0,9 ± 0,1 -1,0 ± 0,2 0,0896 -1,0 ± 0,1 -1,1 ± 0,3 0,3763 -0,9 ± 0,1 -1,0 ± 0,2 0,1514 Note. GLS : Global Longitudinal Strain ; GLSR : Global Longitudinal Strain Rate ; EC : Ecart-Type. 129 d) Relation dose au coeur et au ventricule gauche et réduction du GLS >10% Dans l'analyse univariée (Tableau 16), la latéralité du cancer du sein n'était pas associée de manière significative à l'événement « réduction du GLS supérieur à 10% » (p = 0,56), contrairement à la dose moyenne administrée au coeur et au ventricule gauche : Odds Ratio = 1,37, p = 0,04 pour la dose moyenne au coeur ; OR = 1,14, p = 0,03 pour la dose moyenne au ventricule gauche. En outre, une association a été observée pour le V20 du ventricule gauche (OR = 1,08, p = 0,02). Tableau 16 : Associations univariées concernant le dysfonctionnement infraclinique du ventricule gauche (baisse relative du GLS > 10%) 6 mois après la radiothérapie Analyse univariée OR (95% IC) p-value Latéralité du cancer (Gauche vs. Droit) Coeur Dmean (Gy) D2 (Gy) V5 (%) V10 (%) V20 (%) V30 (%) Ventricule gauche Dmean (Gy) D2 (Gy) V5 (%) V10 (%) V20 (%) V30 (%) 1,41 (0,45 – 4,42) 0,56 1,37 (1,01 – 1,86) 1,02 (0,99 – 1,05) 1,07 (1,00 – 1,15) 1,12 (1,00 – 1,25) 1,20 (1,01 – 1,43) 1,23 (0,98 – 1,55) 0,04 0,13 0,05 0,05 0,04 0,08 1,14 (1,02 – 1,29) 1,02 (0,99 – 1,04) 1,04 (1,00 – 1,08) 1,06 (1,01 – 1,12) 1,08 (1,01 – 1,14) 1,06 (1,00 – 1,13) 0,03 0,22 0,03 0,01 0,02 0,07 Note : IC : Intervalle de confiance ; Gy : Gray ; D2 : dose minimale reçue par les 2 % les plus irradiés du volume de la structure ; VX (en %) est le volume relatif de la structure exposée à au moins X Gy. Parmi les facteurs associés à une réduction du GLS de plus de 10%, de nombreux paramètres ressortaient des analyses univariées avec une p-value inférieure à 0,20, tels que le poids, la taille l'IMC, le taux de cholestérol HDL, le taux de triglycérides, l'hypocholestérolémie et l'hormonothérapie (Tableau 17). L'association significative avec l'hormonothérapie (OR = 3,20 (1,02 - 1,30), p = 0,04) était particulièrement significative pour les patientes traitées par anti-aromatase (OR = 4,52 (1,32 - 15,53)). 130 Tableau 17 : Facteurs pouvant être associés avec la réduction du GLS (réduction du strain supérieure à 10%) 6 mois après radiothérapie OR (95% IC) p-value Âge en année 0.98 (0.93 – 1.04) 0.52 Poids en kg 1,03 (0,99 – 1,07) 0,15 Taille en cm 0,93 (0,86 – 1,00) 0,06 IMC en kg/m2 1.15 (1.02 – 1.30) 0.02 PAS en mmHg 0,99 (0,96 – 1,03) 0,74 PAD en mmHg 0,99 (0,95 – 1,04) 0,75 Cholestérol LDL en mmol/L 1,21 (0,73 – 2,02) 0,45 Cholestérol HDL en mmol/L 0,33 (0,12 – 0,91) 0,03 Cholestérol total en mmo/L 1,08 (0,69 – 1,68) 0,74 10,60 (2,12 – 52,96) * 0,004 * Statut tabagique Ancienne vs. Non fumeuse Actuelle vs. Non fumeuse 0.59 (0.20 – 1.68) 1.98 (0.57 – 6.91) 0.31 0.28 Hypertension 1.03 (0.37 – 2.89) 0.95 Diabètes 1.77 (0.28 – 11.19) 0.55 1.95 (0.74 – 5.15) 0.18 Triglycérides * en mmol/L Hormonothérapie 0.045 3.20 (1.02 – 10.01) Anti-aromatase 0.02 4.52 (1.32 – 15.53) Tamoxifène 0.27 2.05 (0.57 – 7.41) Protocol de radiothérapie 0.91 (0.33 – 2.51) (Hypo fractionné vs. Standard) Note : OR : Odds Ratio ; IC : Intervalle de Confiance ; IMC : Indice de Masse Corporelle ; PAS : Pression artérielle systolique ; PAD : Pression artérielle diastolique.* mesure obtenue dans un second temps après la construction du premier modèle dose-réponse Les variables avec une p-value <0.20 ont été considérées pour l'ajustement en analyse multivariée et plusieurs modèles ont été testés. Nous avons retenu deux modèles dans le cadre de ces analyses multivariées. i. Modèle 1 Concernant l'analyse multivariée, le modèle 1 reposait sur l'ajustement des différentes doses par l'hormonothérapie, l'IMC et l'hypercholestérolémie (Tableau 18). Tableau 18 : Associations entre les doses et le dysfonctionnement infraclinique du ventricule gauche (baisse relative du GLS > 10%) 6 mois après la radiothérapie Analyse univariée Latéralité du cancer (Gauche vs. Droit) Analyses multivariées* OR (95% IC) pvalue AUC OR (95% IC) pvalue AUC 1,41 (0,45 – 4,42) 0,56 0,526 - - - Coeur 0,750 Dmean (Gy) 0,2603 1,37 (1,01 – 1,86) 0,629 1,22 (0,87 – 1,71) 0,04 0,748 D2 (Gy) 0,4269 1,02 (0,99 – 1,05) 0,585 1,01 (0,98 – 1,04) 0,13 0,746 V5 (%) 0,2796 1,07 (1,00 – 1,15) 0,05 0,616 1,04 (0,97 – 1,13) 0,05 0,746 V10 (%) 0,2602 1,12 (1,00 – 1,25) 0,615 1,07 (0,95 – 1,21) 0,04 0,751 V20 (%) 0,2285 1,20 (1,01 – 1,43) 0,620 1,13 (0,93 – 1,37) 0,08 0,748 V30 (%) 0,2300 1,23 (0,98 – 1,55) 0,603 1,16 (0,91 – 1,49) Ventricule gauche 0,745 Dmean (Gy) 0,1537 1,14 (1,02 – 1,29) 0,630 1,10 (0,97 – 1,25) 0,03 D2 (Gy) 1,02 (0,99 – 1,04) 0,595 0,22 0,754 V5 (%) 0,2063 1,04 (1,00 – 1,08) 0,03 0,651 1,03 (0,99 – 1,07) 0,752 0,01 V10 (%) 0,1220 1,06 (1,01 – 1,12) 0,645 1,04 (0,99 – 1,10) 0,02 0,755 V20 (%) 0,1194 1,08 (1,01 – 1,14) 0,648 1,05 (0,99 – 1,12) 0,07 0,745 V30 (%) 0,2028 1,06 (1,00 – 1,13) 0,605 1,05 (0,98 – 1,12) Note : OR : Odds Ratio ; IC : Intervalle de Confiance ; D2 : dose minimale reçue par les 2 % les plus irradiés du volume de la structure ; VX (en %) est le volume relatif de la structure exposée à au moins XX Gy ; *Ajusté sur l'hormonothérapie, l'IMC et l'hypercholestérolémie. ii. Modèle 2 Le modèle 2 se composait d'une dose ajustée sur l'hormonothérapie et le taux de triglycérides, une fois l'ensemble de mesures obtenues. En analyse multivariée, l'ensemble des associations précédemment observées se retrouvait renforcé après l'ajustement sur l'hormonothérapie et les triglycérides (Tableau 19). Tableau 19 : Associations entre les doses de radiation cardiaque et le dysfonctionnement infraclinique du ventricule gauche (baisse relative du GLS>10%) 6 mois post RT Analyse univariée Latéralité du cancer (Gauche vs. Droit) Analyses multivariées* OR (95% IC) pvalue AUC OR (95% IC) pvalue AUC 1,41 (0,45 – 4,42) 0,56 0,526 - - - Coeur Dmean (Gy) 1,37 (1,01 – 1,86) 0,629 1,51 (1,07 – 2,15) 0,04 0,0205 0,769 D2 (Gy) 1,02 (0,99 – 1,05) 0,585 1,03 (1,00 – 1,06) 0,771 0,13 0,0714 V5 (%) 1,07 (1,00 – 1,15) 0,05 0,616 1,09 (1,01 – 1,19) 0,0317 0,766 0,05 V10 (%) 0,0239 0,771 1,12 (1,00 – 1,25) 0,615 1,16 (1,02 – 1,32) 0,04 0,0173 0,776 V20 (%) 1,20 (1,01 – 1,43) 0,620 1,27 (1,04 – 1,55) 0,0322 0,773 0,08 V30 (%) 1,23 (0,98 – 1,55) 0,603 1,32 (1,02 – 1,71) Ventricule gauche Dmean (Gy) 1,14 (1,02 – 1,29) 0,630 1.18 (1.03 – 1.35) 0,03 0.0141 0,778 D2 (Gy) 1,02 (0,99 – 1,04) 0,595 0,22 V5 (%) 1,04 (1,00 – 1,08) 0,03 0,651 1,05 (1,01 – 1,10) 0,0179 0,765 0,01 V10 (%) 0,0083 0,779 1,06 (1,01 – 1,12) 0,645 1,08 (1,02 – 1,14) 0,02 0,0085 0,779 V20 (%) 1,08 (1,01 – 1,14) 0,648 1.09 (1.02 – 1.17) 0,0402 0,764 0,07 V30 (%) 1,06 (1,00 – 1,13) 0,605 1,07 (1,00 – 1,15) Note : OR : Odds Ratio ; IC : Intervalle de Confiance ; D2 : dose minimale reçue par les 2 % les plus irradiés du volume de la structure ; VX (en %) est le volume relatif de la structure exposée à au moins XX Gy ; *A é sur l'hormonothérapie et les triglycérides. En analyse univariée, la latéralité de cancer n'était pas associée de manière significative avec notre évènement (réduction du GLS > 10% ; p = 0,56). C'était en revanche le cas des doses moyennes au coeur et au VG (OR = 1,37 ; p = 0,04 pour le coeur et OR = 1,14 ; p = 0,03 pour le VG). En outre, une association a été observée pour les différentes valeurs V5, 10 et V20 (OR = 1,08 ; p 0,02 pour la V20). En analyse multivariée, pour le premier modèle, aucune de ces associations n'est restée significative après ajustement sur l'hormonothérapie, l'IMC et l'hypercholestérolémie. La V20 du VG présentait le meilleur AUC (= 0,755). Le second modèle, plus pertinent grâce à l'ajout de la variables « triglycérides », nous a permis de mettre en évidence des résultats significatifs en analyses multivariées, ajustées sur l'hormonothérapie et les triglycérides, notamment pour les doses moyennes et les doses « VX » qui présentaient les meilleurs indicateurs au niveau de la dose moyenne et de la V20 (AUC V20 VG = 0,779 ; p = 0,0085). Nous avons ainsi pu mettre en avant un OR de 1,18 par Gy au niveau de la dose moyenne du ventricule gauche, ainsi qu'un OR de 1,09 par Gy au niveau de la V20 du VG. 133 2. Variations globales et régionales du strain multicouche 6 mois post RT Un gradient a été observé sur les différentes couches du strain à la fois lors de l'inclusion des patientes et lors de la visite à 6 mois post-radiothérapie, avec une diminution de la valeur du strain allant de la couche endocardique à la couche épicardique. Une diminution significative a été observée pour chaque couche, mais le changement relatif moyen le plus élevé entre la valeur à l'inclusion et la valeur à 6 mois a été observé dans la couche endocardique (-4,7%, p=0,05) alors que pour les autres couches, le changement relatif moyen était légèrement inférieur (Tableau 20). Tableau 20 : Strain longitudinal par couche à l'inclusion et 6 mois après la radiothérapie Strain endocardique longitudinal (en %) Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value Strain mid-myocardique longitudinal (en %) Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value Strain épicardique longitudinal (en %) Avant radiothérapie Six mois post-radiothérapie p-value Tous n = 79 Sein droit n = 15 Sein gauche N = 64 Moyenne ± EC Moyenne ± EC Moyenne ± EC -20,12 ± 3,25 -18,93 ± 3,98 0,0081 -20,46 ± 3,39 -19,29 ± 4,83 0,2770 -20,04 ± 3,24 -18,85 ± 3,80 0,0169 -16,06 ± 2,67 -15,05 ± 3,22 0,0096 -16,21 ± 2,83 -15,15 ± 3,97 0,2617 -16,03 ± 2,66 -15,03 ± 3,05 0,0212 -12,39 ± 2,51 -11,38 ± 2,85 0,0054 -12,63 ± 2,56 -11,29 ± 3,35 0,1397 -12,34 ± 2,52 -11,40 ± 2,75 0,0197 Note : EC : Ecart-Type. Ces résultats significatifs de la couche ocardique nous ont ensuite conduit à poursuivre les analyses sur le strain de la couche endocardique pour les 64 patientes atteintes d'un cancer du sein gauche (afin de garantir une certaine homogénéité des doses). Parmi les trois niveaux régionaux du ventricule gauche, une diminution significative du Strain n'a été observée que dans le niveau apical (-26,3 ± 6,0% contre -24,2 ± 7,1%, p = 0,03). Tout en séparant les patientes en deux groupes selon leur exposition au ventricule gauche (Tableau 21), l'analyse régionale a montré que le strain diminuait significativement après la RT au niveau apical dans le groupe fortement exposé correspondant aux 22 patientes avec une dose au VG > 66e percentile = 8,6 Gy (-25,5 ± 6,3 à V0 à -22,7 ± 6,9 à V6 ; p = 0,04). au Faibles doses au VG n = 42 V0 V6 Niveau Basal, % Niveau Mid, % Niveau Apical, % Moyenne ± EC p-value Moyenne ± EC p-value Moyenne ± EC p-value -16,7 ± 5,6 Fortes doses au VG n = 22 V0 V6 -17,1 ± 5,0 -19,0 ± 3,5 -17,0 ± 5,2 -17,6 ± 3,4 -25,0 ± 7,2 -25,5 ± 6,3 0,52 -18,6 ± 3,0 0,10 0,06 -26,7 ± 5,8 0,18 -17,8 ± 3,2 -17,5 ± 4,7 0,90 -22,7 ± 6,9 0,04 Note : VG : Ventricule gauche. Les faibles doses au VG correspondent aux patientes ayant reçu < 8,6 Gy au VG (66th percentile de la distribution des doses parmi les 64 patientes). Les fortes doses au VG correspondent aux patientes ayant reçu >8,6 Gy. Plus précisément, l'analyse segmentaire des valeurs de déformation (Figure 21 ) a montré une diminu tion dans tous les segments du niveau apical (en orange), avec des dé tériorations significativ es dans le segment apical inférieur (segment 15 – en rouge). Le segment midantero sept al (segment a également subi une détérioration significative. Les segments n'ayant pas présenté de changements sont en bleu. Figure 21 : Moyennes des 16 segments du strain endocardique. L'analyse territoriale des artères coronaires n'a pas montré de diminution significative pour l'artère Cx et l'artère CD. Cependant, une altération du strain a été observée pour le territoire IVA (-22, 8 ± 4, 0% contre -21,4 ± 4,8%, p = 0,03 ). En séparant les patientes en deux groupes 135 selon leur exposition au ventricule gauche (Tableau 22 ), une altération du strain a été observée pour le territoire de l'artère IVA dans le groupe for tement expos é correspondant aux patientes recevant > 8,6Gy au VG (-22,7 ± 3,4 à V0 à -20,7 ± 4,5 à V6 ; p = 0,05). Tableau 22 : Analyse territoriale du GLS endocardique Faibles doses au VG n = 42 V0 V6 TLS - IVA, % TLS - CX, % TLS - CD, % Moyenne ± EC p-value Moyenne ± EC p-value Moyenne ± EC p-value -22,9 ± 4,3 -21,8 ± 5,0 Fortes doses au VG n = 22 V0 V6 -22,7 ± 3,4 0,20 -19,0 ± 4,9 -17,5 ± 5,1 -19,5 ± 3,8 -16,2 ± 5,2 -16,9 ± 4,8 0,10 -16,2 ± 4,7 -20,7 ± 4,5 0,05 -17,9 ± 5,5 0,25 0,97 -15,6 ± 5,1 0,35 Note : VG : Ventricule Gauche; TLS: Territorial Longitudinal Strain; IVA: artère Interventriculaire Antérieure; CX: Artère circonflexe; CD: artère Coronaire Droite. Les faibles doses au VG correspondent aux patientes ayant reçu < 8,6 Gy au VG (66th percentile de la distribution des doses parmi les 64 patientes). Les fortes doses au VG correspondent aux patientes ayant reçu >8,6 Gy. De plus, la diminution du strain longitudinal dans le territoire de l'artère IVA pourrait être associée au niveau de dose reçue par l'artère IVA : une diminution significative a été observée dans le groupe fortement exposé correspondant aux 22 patientes ayant reçu une dose à l'IVA > 66e percentile = 19,9 Gy (p=0,02), alors qu'aucune différence significative n'a pu être observée chez les patientes moins exposées, correspondant à une diminution du strain de 22,3 % à V0 à -19,5 % à V6 (Figure 22). Cependant, il est a noté que ces résultats n'étaient plus significatifs après nos corrections pour tests-multiples, à l'exception des résultats correspondant aux 22 patientes ayant reçu une dose à l'IVA > 66e percentile = 19,9 Gy (p=0,04). 136 Figure 22 : Répartition des doses à l'artère Interventriculaire Antérieure pour la couche endocardique En comparaison, aucune différence significative n'a pu être observée pour l'artère CX et l'artère CD aux expositions les plus élevées, même en tenant compte de la dose précise à ces sous-structures (Figures 23 et 24). 137 Figure 23 : Répartition des doses à l'artère circonflexe pour la couche endocardique Figure 24 : Répartition des doses à l'artère coronaire droite pour la couche endocardique 138 3. Analyse de la variabilité intra-opérateur Une comparaison des valeurs obtenues a été réalisée pour 15 échocardiographies, afin d'étudier la variabilité des mesures. Ces échographies avaient été codées une première fois en 2018 puis ont été recodées par le même observateur 18 mois plus tard en 2019. La machine et la version du logiciel étaient restées identiques. Les différences en termes de pourcentages entre les deux valeurs de global longitudinal strain ( ) sont représentées sur la Figure 25 et la Figure 26. Figure 25 : Analyse de la variabilité intra-opérateur - Graphique de Bland et Altman 139 Figure 26 : Analyse de la variabilité intra-opérateur - Graphique de Bland et Altman enrich Chaque point représente la différence entre deux valeurs pour une même échographie : plus le point est éloigné de la « No diff line », plus l'écart est important. Ces éléments bruts nous permettent également de calculer le Coefficient de corrélation intraclasse (Intraclass Correlation Coefficient ou ICC en anglais). Notre ICC était ici de 0,24. L'ICC peut être utilisé pour mesurer le degré d'accord entre plusieurs mesures dans une situation où l'échelle de l'évaluation est continue ou ordinale, que ce soit plusieurs mesures d'un même individu ou des mesures provenant d'observateurs différents. Ainsi, l'ICC détermine la fiabilité des évaluations en comparant la variabilité des différentes évaluations à la variation totale de l'ensemble des évaluations :  Un ICC élevé (proche de 1) indique une grande similitude entre les valeurs ;  Un ICC faible (ICC proche de zéro) signifie que les valeurs ne sont pas similaires. 140 Ces résultats montrent que des écarts particulièrement importants existent entre les valeurs de 2018 et de fin 2019, mettant en avant un potentiel biais intra-observateur. La variabilité inter-observateur n'a pu être évalué compte tenu de l'absence d'échographie mesurée à la fois par l'observateur principal et le second observateur. Néanmoins, il est a noté que moins de 15% des échographies avaient été codés par le second observateurs. D . Conclusion et éléments de discussion 1. Association entre dose cardiaque et dysfonction infraclinique du ventricule gauche Les données de l'étude BACCARAT ont permis d'observer une baisse du strain longitudinal 6 mois après la RT mais également une augmentation du risque de dysfonction infraclinique du VG définie par une baisse relative du GLS d'au moins 10% en fonction de la dose absorbée par le coeur et plus particulièrement le VG. a) Baisse du global longitudinal strain Une diminution du GLS avait déjà été observée chez des patientes atteintes d'un cancer du sein du côté gauche, avec un suivi allant de quelques jours à 14 mois après la radiothérapie [63,79,77,174] et une diminution relative moyenne du strain longitudinal global allant de 5% à près de 15% [64]. Dans notre étude, la diminution moyenne des différents strains longitudinaux était d'environ 6% six mois après la radiothérapie, ce qui est dans l'intervalle des diminutions observées précédemment malgré un pourcentage relativement faible. L'absence de diminution significative du strain chez les patientes atteintes d'un cancer du sein du côté droit a également été observée précédemment dans ces études, même si la taille limitée du groupe de patientes atteintes d'un cancer du sein du côté droit pourrait expliquer en partie ces résultats non significatifs. Comme la plupart des autres études précédentes [64,75,77,79,174], aucune diminution significative réelle (faisant état d'une altération) de la FEVG n'a été observée 6 mois post-radiothérapie chez nos patientes. Par ailleurs, l'absence de diminution significative du GLSR pourrait s'expliquer par l'échelle et l'entendu des mesures, rendant plus difficile la mise en évidence d'une baisse significative compte-tenu des effectifs limités par rapport au GLS. 141 b) Evènement infraclinique et association avec la dose cardiaque Nous avons considéré un dysfonctionnement infraclinique du ventricule gauche défini comme une réduction du GLS d'environ 10% qui a été jugé cliniquement pertinent [85] et qui a également été prise en compte dans d'autres études antérieures [84,175]. Cet évènement précoce de cardiotoxicité a été observé chez 48% de nos patientes atte d'un cancer du sein du côté gauche 6 mois après radiothérapie, ce qui est supérieur aux 28% observés ailleurs avec un suivi plus court limité à la fin de la RT [79]. Ce type de dysfonctionnement infraclinique peut nécessiter un suivi plus long pour se développer. Même si toutes les études précédentes ont conclu que le strain longitudinal était réduit après la radiothérapie pour les patientes atteintes d'un cancer du sein gauche et non pour celles atteintes d'un cancer du sein droit, on sait peu de choses sur l'association entre les doses cardiaques et la diminution du strain longitudinal. 142 c) Prise en compte des autres facteurs de risque La contribution de facteurs autres que la dose de rayonnement sur le risque de maladie cardiovasculaire à long terme, tels que l'âge, l'hypertension, le diabète ou les maladies cardiaques préexistantes, a été précédemment observée car ils avaient un effet additif à la radiothérapie sur le risque de survenue de complications [50]. À l'échelle du dysfonctionnement infraclinique du ventricule gauche, quantifié par le GLS, il était important de considérer leur contribution sur les associations avec la dose au coeur. Parmi les différents facteurs que nous avons examinés, l'hormonothérapie était associée au dysfonctionnement infraclinique du VG (OR = 3,20, IC à 95 % (1,02 - 10,10)), en particulier pour les inhibiteurs de l'aromatase (OR = 4,25, IC à 95 % (1,32 - 15,53)) qui sont des facteurs de risque connus de maladie cardiovasculaire [176]. Une association entre une réduction du GLS et l'utilisation d'inhibiteurs de l'aromatase a également été observée précédemment [79]. L'association entre l'hormonothérapie et l'altération de la contractilité s'apparente donc à une association causale. Enfin, la cardiotoxicité de la chimiothérapie, comme pour les anthracyclines ou le trastuzumab, est connue pour modifier le GLS [1,177]. L'un des points forts de notre étude a été d'inclure des patients n'ayant jamais subi de chimiothérapie, ce qui a permis d'évaluer plus précisément l'association avec l'exposition aux radiations sans interférence due à la chimiothérapie. 2. Approche multicouche et régionale du GLS a) Approche multicouche Il est communément admis que l'endocarde est la couche du myocarde la plus sensible aux lésions ischémiques [178,179]. De plus, il a été démontré que le strain longitudinal de la couche endocardique était supérieur aux autres couches pour identifier les maladies coronariennes importantes [89]. D'autre part, des recherches antérieures ont mis en évidence une relation entre la localisation des sténoses coronaires et la dose de radiation absorbée lors d'une RT, principalement au niveau de l'IVA [54,55,57,180]. La différence de strain longitudinal selon les couches myocardiques que nous avons rapportées ici, entre les valeurs à l'inclusion et les valeurs 6 mois post-radiothérapie, avec 143 des valeurs plus élevées dans la couche endocardique et des valeurs plus faibles dans la couche épicardique, a été précédemment observée pour la chimiothérapie [181]. Dans un coeur sain, la contraction est plus importante dans la couche endocardique que dans la couche épicardique [182] et cette différence d'amplitude de la contraction du myocarde est liée à l'orientation des fibres myocardiques dans le coeur, car le sous-endocarde est principalement composé de fibre myocardique longitudinale. De plus, le fonctionnement du ventricule gauche est principalement régi par la couche endocardique du myocarde, ce qui peut expliquer la diminution significative simultanée du strain longitudinal global dans les trois couches. Cependant, avec une contraction plus importante et des besoins énergétiques plus élevés, la couche endocardique est plus susceptible de montrer un forme de cardiotoxicité qui se caractériserait par une diminution relative du strain est légèrement plus importante dans la couche endocardique. b) Différences d'altération du strain en fonction de la localisation Contrairement à la chimiothérapie, dont l'impact sur la fonction myocardique peut être considéré comme global à l'échelle du ventricule gauche, la radiothérapie affecte le coeur de façon plus localisée car le niveau apical du ventricule gauche est particulièrement exposé aux faisceaux tangentiels de la 3D-CRT [86]. Cela peut expliquer la plus forte diminution du strain de la couche endocardique au niveau apical comme observé précédemment [63]. En outre, dans une étude antérieure sur des patientes atteintes d'un cancer du sein du côté gauche [80], les segments présentant une réduction significative du strain longitudinal juste après la RT et 3 ans après la RT étaient similaires à ceux trouvés dans notre étude, en particulier en ce qui concerne le segment mid-antérolatéral et le segment apical-inférieur. Cependant, l'association entre la diminution du strain et la dose cardiaque est loin d'être claire et nos corrélations entre la diminution du strain et les doses aux différentes structures cardiaques étaient extrêmement faibles, quelle que soit la couche myocardique considérée, comme cela a été observé précédemment dans plusieurs autres études [63,77,79]. Certaines études ont examiné plus précisément les changements de strain longitudinaux sur la base de l'évaluation segmentaire du ventricule gauche [92]. Lo et al. ont détecté un 144 dysfonctionnement régional du myocarde lié à la dose reçue lors de la radiothérapie, avec la plus grande réduction dans la partie apicale du ventricule gauche, qui a reçu la plus forte dose de rayonnements [77]. Dans une étude de Erven et al. [63], les changements étaient plus prononcés dans la paroi du ventricule gauche recevant la plus forte dose de radiothérapie (paroi antérieure). Concernant l' territoriale du strain relatif aux artères coronaires, nous avons constaté une détérioration significative du strain endocardique pour l'artère IVA et l'artère circonflexe, qui était plus importante pour l'IVA (changement relatif moyen = 4,6% pour l'IVA et -3,9% pour la CX). L'impact plus important sur le territoire de l'IVA pourrait s'expliquer par le fait que les segments liés à cette artère coronaire ont reçu des doses de radiation bien plus élevées [86]. Nos résultats ont indiqué que l'impact de la radiothérapie sur le strain longitudinal pouvait être observé en particulier sur la couche endocardique, notamment sur le territoire de l'IVA, ce qui est conforme aux précédentes publications. Limites Si l'évaluation du strain longitudinal devient de plus en plus fréquente dans les études s'appuyant sur l'échographie cardiaque, en particulier celles portant sur l'évaluation précoce de l'effet de la radiothérapie sur la fonction cardiaque, cette technique reste néanmoins discutable. D'une part des variations dans la mesure du strain entre constructeurs existent, rendant la mesure absolue du strain difficilement interprétable. Néanmoins, dans notre étude, les résultats s'appuient essentiellement sur l'évolution relative du strain entre la mesure faite avant radiothérapie et 6 mois après radiothérapie sur les mêmes échographes. D'autre part, la reproductibilité de cette méthode d'analyse du strain est encore vivement 145 critiquée [183], notamment le strain multicouche, Par conséquent, l'une des principales limites de ce travail concerne la nature même des données de strain. En effet, l'analyse de la variabilité intra-observateur a montré une faible reproductibilité des mesures concernant les valeurs issues des échocardiographies avec un effet du temps entre les valeurs les plus anciennes présentant globalement des valeurs plus basses (donc plus dans des gammes de strain dits « normaux ») que les mesures faites plus récemment. On peut donc suspecter dans le codage des échographies de BACCARAT un effet d'apprentissage, et nous sommes donc confrontés à un possible biais de codage. Cette limite, trop peu souvent rapportée quant aux difficultés d'homogénéisation des critères pour le codage des échographies de strain et l'obtention des mesures de strain, est également rencontrée dans l'étude européenne EARLY-HEART avec des variabilités importantes entre centres. Il est actuellement envisagé de recoder toutes les échographies de l'étude par un « core-lab » qui appliquera les mêmes critères pour tout les échographies et devrait permettre de gagner en termes de reproductibilité. Un autre point, qui n'est pas spécifique à notre étude, constitue une limite générale du strain pour savoir comment les changements pourraient se traduire en évènements cliniques cardiaques (morbidité/mortalité). Dans le contexte de la chimiothérapie, il a été démontré qu'il existe une corrélation et une valeur prédictive de la diminution du GLS sur la présence ultérieure de dysfonction (Cancer Therapeutics-Related Cardiac Dysfunction - CTRCD) défini par une diminution de la FEVG d'au moins 10% à une valeur <53% [1]. Toutefois, ces CTRCD peuvent être réversibles dans certains cas et ne se traduisent pas toujours par une morbidité cardiaque clinique. 147 CHAPITRE V 148 V. Evolution précoce d'un panel de biomarqueurs sanguins et risque de dysfonction cardiaque infraclinique 6 mois après radiothérapie A. La prise en compte des modifications biologiques et des changements fonctionnels qui surviennent après la radiothérapie, par l'évaluation de biomarqueurs sanguins et l'utilisation de l'imagerie cardiovasculaire, pourrait contribuer à améliorer la connaissance des mécanismes potentiellement impliqués dans la cardiotoxicité radio-induite. En effet, dans la majorité des études précédentes sur le dysfonctionnement myocardique précoce après une RT, une diminution statistiquement significative du strain a été observée chez les patientes avec un cancer du sein gauche à différents moments après la RT [63,75,78,79]. Comme les pathologies cardiovasculaires radio-induites combinent de nombreux mécanismes physiologiques encore mal connus, allant du dysfonctionnement endothélial à la fibrose, l'analyse de différents biomarqueurs sanguins (capables de mesurer des variations biologiques telles que l'inflammation, les dysfonctionnements endothéliaux ou les dommages cardiaques [129]), et leur relation avec nos résultats échocardiographiques pourrait nous permettre de mettre en évidence une relation entre l'évolution de certains biomarqueurs et les conséquences possibles sur la contractilité du myocarde, qui a déjà été observée sur certains biomarqueurs sanguins spécifiques [130,131]. En effet, les précédentes analyses du Chapitre IV ont permis de mettre en évidence une association entre les doses au coeur et au VG et le risque de dysfonction cardiaque infraclinique définie par une baisse relative du GLS d'au moins 10%. Les processus biologiques impliqués dans la survenue possible d'évènements cardiaques plusieurs années après la radiothérapie mettent en jeu des mécanismes biologiques en cascade, encore mal connus. En s'appuyant sur l'événement infraclinique défini pour les patientes de BACCARAT, étudier un large panel de biomarqueurs potentiellement impliqués dans cette forme de 149 cardiotoxicité, leur évolution en fin de par rapport au niveau avant RT et leur potentiel de prédiction de l'évènement infraclinique, pourrait permettre d'identifier certains biomarqueurs dont l'évolution précoce permettrait de prédire le risque de séquelles infracliniques et donc améliorer le suivi et la prise en charge des patientes. A partir d'un large panel de biomarqueurs potentiellement impliqués dans la cardiotoxicité, l'objectif de cette partie était d'identifier des marqueurs dont l'évolution précoce était associée à la survenue à 6 mois post RT d'un dysfonctionnement cardiaque infraclinique et évaluer leur caractère prédictif pour cet évènement. B. Matériels et Méthodes 1. Compte tenu de l'objectif, la population considérée ici était constituée des patientes chez qui la survenue à 6 mois post RT d'un dysfonctionnement cardiaque infraclinique avait pu être évaluée, soit 79 patientes (décrites dans le chapitre précèdent). De plus, parmi ces 79 patientes, pour 4 patientes, la mesure de certains biomarqueurs n'a pu être évaluée (retard lié à la situation sanitaire de 2020). Ainsi, les analyses ont porté sur 75 patientes pour lesquelles nous disposions des concentrations avant RT et en fin de RT des biomarqueurs suivants :  Marqueurs classiques d'atteintes cardiaques : Protéine C réactive (CRP, de l'anglais CReactive protein), Troponine I (TnI), B-type natriuretic peptide (NT-ProBNP), Bêta-2 Microglobuline (B2) ;  Cytokines inflammatoires : Interleukine 6 (IL6), Interleukine 8 (IL8), Interleukine 18 (IL18), Facteur de nécrose tumorale α (TNF-α);  Activation et dysfonction endothéliale : Protéine d'adhésion cellulaire sVCAM-1 (VCAM1), Protéine d'adhésion cellulaire s-ICAM-1 (ICAM1), E-selectin (ESELEC), Pselectin (PSELEC), Facteur de von Willebrand (vWF), Inhibiteur de l'activateur du plasminogène 1 (PAI-1), Fibrinogène (FIBR), Thrombomoduline (THROMBO), Facteur de croissance transformant Bêta 1 (TGF-β1). 150 2. Les échantillons de sang ont été prélevés sur des tubes de collecte (EDTA ou héparine), centrifugés et conservés à -80°C jusqu'à l'analyse. Les échantillons de sang ont été obtenus avant la radiothérapie (V0) (7-13 jours avant le traitement), à la fin de la radiothérapie (V1) (2-7 jours après la dernière fraction d'irradiation). Avant l'analyse, les aliquots de plasma EDTA décongelé ont été mélangés par vortex à faible vitesse jusqu'à ce qu'elles soient visiblement homogènes, puis ont été centrifugés selon les recommandations du protocole utilisé (1000 G pendant 15 min, 2000 G pendant 10 min ou 3000 G pendant 10 min). Les surnageants clairs ont ensuite été transférés dans de nouveaux tubes avant d'être analysés. Sur les 17 biomarqueurs sélectionnés, certains ont été traités par test multiplex, d'autres par test ELISA. Pour les tests multiplex, nous avons utilisé des kits sur mesure de R&D Systems (fournisseur de Bio-Techne) pour le TGF-β1 (1 plex), β2-microglobuline (1 plex), CRP/PAI-1 (2 plex) et ICAM-1 / VCAM-1 / E-selectin / P-selectin / Thrombomodulin / IL6 / IL8 / IL18 / TNF-α (9 plex). Les niveaux de tous ces analytes ont été mesurés en double avec un système luminex 200 (Bio-Rad) dans lequel les concentrations de chaque analyte ont été déterminées à partir d'une courbe d'étalonnage multipoint (régression 5PL) obtenue à partir d'une solution mère avec le logiciel de gestion Bio-Plex. Pour le TGFβ1 : les échantillons de plasma EDTA ont été préactivés puis dilués à un facteur de dilution final de 1:15 avant d'être analysés. Pour la β2-microglobulin les échantillons de plasma EDTA ont été dilués à un facteur de dilution final de 1:4000 avant le test. Pour le panel de 2 plex : les échantillons de plasma EDTA ont été dilués à un facteur de dilution final de 1:200 avant le test. Pour le panel de 9 plex : les échantillons de plasma EDTA ont été dilués à un facteur de dilution final de 1:2 avant l'analyse. Pour les tests ELISA, kits de R & D Systems (fournisseur de Bio-Techne) ont été utilisées pour le NT Pro-BNP, des kits d'Abcam pour la Troponine I et des kits d'Abnova (fournisseur de Bio-Techne) pour le Fibrinogène et le VWF. Alors que les échantillons de plasma EDTA ont été utilisés non dilués pour le test NT Pro-BNP, ceux utilisés pour les tests de fibrinogène et de VWF ont été dilués au 1:500 avant le test. 3. Une analyse descriptive des caractéristiques de base des patientes a été effectuée. Les variables continues sont présentées avec leur moyenne et l'écart-type associé ou la médiane et l'intervalle interquartile, tandis que les valeurs catégorielles sont décrites avec des pourcentages. L'évolution du biomarqueur a été représentée par le pourcentage de changement de sa concentration entre sa mesure à la fin de la radiothérapie (V1) et sa mesure au moment de l'inclusion (V0) (PC=V1-V0/V0). Des régressions logistiques univariées ont permis d'évaluer l'association entre dysfonction cardiaque infraclinique et évolution des biomarqueurs. Les biomarqueurs présentant une association significative avec l'événement, quantifiés par un OR > 1 avec une valeur de p<0.20 ont ensuite été retenus pour la phase d'évaluation du caractère prédictif de ces biomarqueurs. Pour cela, des régressions logistiques ont été construites prenant en compte différentes doses cardiaques (dose moyenne et doses issues des HDV (Vx) du coeur et du ventricule gauche) et les covariables précédemment identifiées comme facteur d'ajustement du risque d'évènement de dysfonction cardiaque infraclinique (Hormonothérapie et taux de triglycérides à l'inclusion). Les biomarqueurs précédemment identifiés en analyse univariée ont ensuite été ajoutés aux modèles. Les modèles ont été résumés avec les valeurs d'OR (et leur IC), les p-values et l'aire sous la courbe (AUC). Chaque modèle a été validé par une validation croisée à 5 niveaux et répétée 30 fois. Les taux d'erreur de classification, les sensibilités et les spécificités ont été calculés en prenant la moyenne des répétitions. Toutes les analyses statistiques présentés dans cette partie consacrée aux échocardiographies ont été effectuées à l'aide logiciel statistique SAS (Version 9.4 TS1M4 – SAS Institute, Cary, NC) et du logiciel statistique R (R Core Team – Vienne, Autriche) sous Windows 10. 152 C.Résultats 1. Les caractéristiques générales des patientes sont résumées dans le Tableau 23. Ainsi, soixante-quinze patientes ont été retenues pour ces analyses, dont 62 patientes atteintes d'un cancer du sein du côté gauche et 13 patientes atteintes d'un cancer du sein du côté droit. Sur ces 75 patientes, l'âge moyen était de 57,8 ans. Dix-huit patientes (24 %) souffraient d'hypertension, douze patientes (16 %) étaient des fumeuses actuelles, cinq patientes (7 %) étaient diabétiques lors de l'inclusion et 22 patientes (29 %) souffraient d'hypercholestérolémie. Une hormonothérapie a été utilisée chez 76 % des patientes, dont 32 sous anti-aromatase (43 %). Tableau 23 : Caractéristiques de base des patientes Toutes N=75 Age (en année) Poids (en kilogrammes) Taille (en centimètres) IMC (kg/m2) Hypertension Oui Non Statut tabagique Ancien fumeur Fumeur Non-fumeur Diabètes Oui Non Ménopause Oui Non 57,8 ± 8,6 64,3 ± 11,5 162,2 ± 5,8 24,4 ± 4,1 18 (24%) 57 (76%) 23 (31%) 12 (16%) 40 (53%) 5 (7%) 70 (93%) 52 (69%) 23 (31%) Glucose sanguin (mmol/L) Urée (mmol/L) Créatinine (μmol/L) Hypercholestérolémie Oui Non 5,2 ± 1,0 5,5 ± 1,5 63,8 ± 8,9 LDL (mmol/L) HDL (mmol/L) Cholestérol total (mmol/L) Triglycérides (mmol/L) 3,6 ± 0,9 1,8 ± 0,5 5,9 ± 1,0 1,1 ± 0,6 22 (29%) 53 (71%) 153 Sein Gauche Droit Histologie du cancer In situ Invasif 62 (83%) 13 (17%) 13 (17%) 62 (83%) Taille de la tumeur (en mm) Grade 1 2 3 Type de chirurgie Chirurgie conservatrice Mastectomie 12,2 ± 12,5 31 (41%) 35 (47%) 9 (12%) 72 (96%) 3 (4%) Atteintes des aires ganglionnaires, n (%) Chaîne Mammaire Interne seule Sus-claviculaire seule Irradiation double Irradiation des aires ganglionnaires, n(%) Sus-claviculaire 47 Gy 50 Gy Chaîne Mammaire Interne 47 Gy 50 Gy 2 (9%) 2 (9%) 19 (82%) 4 (19%) 17 (81%) 4 (19%) 17 (81%) Hormonothérapie Oui 57 (76%) Non 18 (24%) Type d'hormonothérapie 32 (43%) Anti-aromatase 25 (33%) Tamoxifène 18 (24%) Boost Oui 71 (95%) Non 4 (5%) Dose prescrite 50 Gy 56 (75%) 47 Gy 19 (25%) Note : IMC : Indice de Masse Corporelle ; LDL : Low Density Lipoprotein; HLD : High Density Lipoprotein; Gy : Gray. 2. Changements du niveau des biomarqueurs entre la mesure avant RT et en fin de RT Toutes les concentrations de troponine étant en dessous du seuil de détection (0,156 ng/mL), ce biomarqueurs n'est pas présenté. Les concentrations de CRP, IL18, ESELEC et PAI ont augmenté au cours de cette période (respectivement +3,0 %, +6,7 %, +1,0 % et +6,9 %) tandis que les concentrations de B2, IL6, IL8, TNF-a, FIBR, THROMBO, TGF-B1 et vWF ont diminué (respectivement -1,7 %, -4,9 %, -3,4 %, -3,9 %, -0,7 %, -3,3 %, -4,1 % et -8,1 %). Le Tableau 24 détails ces différents résultats. 154 Les autres biomarqueurs (NT Pro-BNP (0,35 %), ICAM1 (0,30 %) et VCAM1 (0,38 %)) n'ont montré pratiquement aucun changement entre V0 et V1.
31,203
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French-Science-Pile
Open Science
Various open science
null
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7,934
13,183
Authors contribution Jens Rassmann, Bruno Lansard, Frédéric Gazeau, Lara Pozzato, Samir Alliouane, Bruno Bombled and Christian Grenz were implied to set up the experiment and in sampling and analyzing the T0 samples. The incubation and the current sample analyses of DIC, TA, O2 and pH were conducted by Jens Rassmann, Frédéric Gazeau and Samir Alliouane. Frank Petit contributed to collect the water samples for the flux measurements. Bruno Lansard helped for the final porewater extraction and analyses. Laurence Guidi-Guilvard processed the meiofauna samples and interpreted the corresponding data. Jens Rassmann, Bruno Lansard, Frédéric Gazeau, Christophe Rabouille, Christian Grenz and Laurence Guidi-Guilvard contributed significantly to the manuscript of the article. 6.6 We would like to thank Jean-Pascal Dumoulin and Nathalie Vigier for their technical help with the experimental setup, sampling and analyses. We also thank the captain of the Sagitta 2 and the divers for sediment core sampling and the deployment of the in situ benthic lander. We thank Patrick Raimbault for the nutrient analyses and Céline Liourzou and Marie-Laure Rouget for the ICP-AES analyses. We also like to thank Serge Miska for his help with the 6.7. APPENDIX 173 DRX analyses and Stéphanie Duchamp-Alphonse who let us use her manocalcimeter. We gratefully acknowledge Stéphane Gasparini for his assistance with the statistical analyses of the meiofauna data. This work was financed by the Institut Pierre Simon Laplace (IPSL) through the ACIBIOS project. 6.7 6.7.1 Appendix Meiofauna taxa and densities Table 6.2 – Densities of the different meiobenthic taxa/groups (and total) enumerated in the 11 syringe cores (2.9-cm inner diameter and 5-cm deep) collected at the start (in situ and T0 ), and at the end of the experiment in the non-acidified (Tf -NAC) and the acidified (Tf -AC) cores. Mean densities and standard deviations (s.d.) were calculated for each treatment (T0, non-acidified and acidified). Individual taxa are copepods (COP) and their nauplii (NAU), nematodes (NEM), annelids (ANN), ostracods (OST), tanaids (TAN), cumaceans (CUM), bivalves (BIV), tardigrades (TAR), kinorynchs (KIN). Turbellarians were pooled with gastrotrichs and gnathostomulids (TUR+), and others (OTH) include halacarid mites, sipunculids, priapulids, rotifers and nemertines. Metazoan meiofauna numbers (individuals * 10 cm−2 ) Syringe core ID COP NAU NEM ANN OST TAN CUM BIV TUR+ TAR KIN OTH TOTAL in situ-1 259 665 1791 95 5 36 6 0 170 3 48 3 3087 in situ-2 339 746 2151 132 11 0 2 2 117 2 42 18 3561 in situ-3 348 725 2068 160 11 3 5 0 164 2 30 35 3550 T0 -1 338 840 3145 141 23 0 2 0 159 0 61 62 4288 T0 -2 182 513 1459 121 35 0 0 3 173 17 45 30 2578 Tf -NAC1-1 29 101 474 35 0 0 0 0 89 2 3 5 737 Tf -NAC2-2 36 136 545 30 2 0 0 0 138 0 3 12 902 Tf -NAC3-3 192 500 1438 118 9 0 2 0 148 3 18 29 2457 Tf -AC1-6 121 357 1191 58 2 2 0 2 136 2 17 26 1912 Tf -AC2-7 179 495 1653 39 9 3 0 0 94 2 11 14 2498 Tf -AC3-8 167 424 1173 82 11 0 0 0 62 0 Table 6.3 – Mean densities per 10 cm−2 ± standard deviation (% variation to the mean) of total meiofauna and the dominant meiobenthic taxa/groups in the top 5 cm of sediment, at the start (in situ and T0 ), and at the end of the experiment in the non-acidified and the acidified cores. The reduction in numbers of individuals (% loss) in the non-acidified and acidified cores compared to the start, is indicated in italics. See legend of Table 6.2 for abbreviations. Taxon/ Treatment group Start (in situ and T0 ) Non acidified cores (NAC) Acidified cores(AC) TOTAL 3413 ± 634 (19%) 1366 ± 949 (69%) 2116 ± 331 (16%) % loss - 60 38 COP 293 ± 72 (25%) 86 ± 92 (108%) 155 ± 30 (20%) % loss - 71 47 NAU 698 ± 121 (17%) 246 ± 221 (90%) 425 ± 69 (16%) % loss - 65 39 NEM 2028 ± 446 (22%) 819 ± 537 (66%) 1339 ± 272 (20%) % loss - 60 34 ANN 130 ± 24 (19%) 61 ± 49 (81%) 60 ± 21 (36%) % loss - 53 54 TUR+ 156 ± 23 (15%) 125 ± 31 (25%) 97 ± 37 (38%) % loss - 20 38 KIN 45 ± 11 (24%) 8 ± 9 (108%) 12 ± 5 (40%) % loss - 82 74 Chapitre 7 7.1 Influence de la diagenèse précoce sur le système des carbonates à l'interface eau-sédiment L'objectif principal de cette thèse était d'analyser l'impact des différentes voies de minéralisation de la matière organique (MO) sur la chimie des carbonates dans les sédiments côtiers. La minéralisation de la MO produit du CO2, qui libère des ions H+, et fait ainsi baisser le pH et affecte l'état de saturation des eaux par rapport aux carbonates de calcium (Ω). Pour cette raison, la minéralisation de la MO dans les sédiments cause une acidification des eaux de fond et transforme des environnements avec des forts taux de minéralisation benthique, comme les deltas, en source de CO2 pour l'atmosphère. En contrepartie, de nombreuses réactions diagénétiques produisent également de TA, ce qui contrebalance les effets de la production du DIC métabolique et augmente la capacité de l'eau de mer à stocker du CO2. En conséquence, une question traitée dans cette thèse était de savoir si les sédiments du prodelta du Rhône sont des sources de TA pour l'eau de fond. 7.1.1 Les sédiments du prodelta du Rhône : un fort gradient biogéochimique de l'embouchure vers le large Les sédiments du prodelta du Rhône sont caractérisés par de forts gradients biogéochimiques à des échelles spatiales différentes. Got and Aloisi (1990) ont défini trois zones différenciées par leur proximité à l'embouchure du Rhône, la vitesse de sédimentation et par leur pente bathymétrique : Le domaine proximal, le domaine prodeltaı̈que et le domaine distal. Proche de l'embouchure, la vitesse de sédimentation est la plus élevée ainsi que l'apport de matière 175 176 organique au sédiment. Par conséquent, la minéralisation y est la plus intense. Vers le large, la fraction organique dans le sédiment diminue et, avec elle, l'intensité de la minéralisation. Au sein d'un même domaine, les gradients biogéochimiques dans les sédiments se ressemblent (e.g. les gradients de DIC), mais peuvent montrer des fortes hétérogénités à l'échelle de quelques mètres. 7.1.2 La diagenèse oxique La respiration aérobique et la réoxydation des espèces réduites diminuent le pH de 0.6 à 0.8 unités. Ainsi, ces processus diminuent Ω et peuvent mener à la dissolution des carbonates de calcium (Burdige et al., 2010). Par la forte production d'ions H+, la réoxydation d'espèces réduites baisse TA. En même temps, la minéralisation oxique de la MO produit du DIC. En conséquence, la diagenèse aerobique contribue à une acidification locale des eaux de fond (Cai, 2011). 7.1.3 La pompe anaérobique dans le prodelta du Rhône Les sédiments du prodelta du Rhône sont une source d'alcalinité pour les eaux de fond comme le démontrent les profils de TA et surtout les mesures in situ. En effet, l'intensité des flux de DIC et de TA dépasse les flux d'oxygène à travers l'interface eau-sédiment. Cette différence indique que les processus anaérobiques sont très intenses dans cette zone. Ces processus sont à l'origine de la pompe anaérobique qui caractérise ces sédiments et seront discutés par la suite. La dissolution et la précipitation des carbonates Pour chaque mole de carbonate dissous, une mole de DIC et deux moles de TA sont produites. En conséquence, le pH augmente et pousse la spéciation du DIC vers les ions carbonates ce qui augmente Ω et la capacité tampon de manière importante. A l'inverse, la précipitation des carbonates consomme deux moles de TA une mole de DIC, et par conséquent, le pH, Ω et le facteur de Revelle baissent. Nitr ification et dénitrification La dénitrification est connue pour être une source d'alcalinité anaérobique. En effet, la minéralisation de la MO par dénitrification produit du DIC et de TA dans un rapport 1/0.8, alors que ce rapport est de 1/0 pour la minéralisation aérobique (Krumins et al., 2013). Les produits de cette voie diagénétique sont N2 et CO2 qui n'interagissent plus avec l'oxygène, donc la quantité de TA produite par la dénitrification contribue à 100 % au flux net de TA à travers la SWI. Dans le cas où la dénitrification est couplée à la nitrification, le bilan + change de manière importante : Pour chaque mole de NO− 3 produite à partir de NH4, TA est réduite de deux moles. Ainsi le bilan d'un couplage nitrification - dénitrification devient négatif concernant la production de TA. Pastor et al. (2011a) a estimé l'importance de la dénitrification dans les sédiments du prodelta du Rhône. Proche de l'embouchure, 4.0 mmol C m−2 d−1 sont minéralisées par dénitrification et 134.0 mmol C m−2 d−1 par les autres processus anaérobiques. Ce rapport augmente vers le large pour atteindre 0.5 :2 mmol C m−2 d−1 à la station F. Par consé quent, la dénitrification contribue très peu aux flux de TA au large de l'embouchure. Réduction du manganèse et du fer La réduction du manganèse et la réduction du fer produisent beaucoup de TA, mais leur réoxydation dans la couche oxique consomme l'équivalent de ce qui a été produit au moment de leur réduction (Burdige, 2011). Néanmoins, ces réactions peuvent avoir un impact non négligeable sur le bilan de TA si le fer et le manganèse réduits réagissent avec d'autres espèces réduites, par exemple pour former des sulfures de fer (Mucci et al., 2000). Les microprofils de pH suggèrent que la dénitrification et la réduction du fer et du manganèse dominent seulement dans une très fine couche entre la couche oxique et la couche sulfidique dans les sédiments du prodelta du Rhône. Mais des mesures montrent que du fer réactif est présent au moins jusqu'à 30 cm de profondeur dans les sédiments (Pastor et al., 2011a) et qu'il continue de jouer un rôle dans la minéralisation de la MO. La disponibilité du fer réactif est nécessaire pour précipiter des espèces réduites dans les couches anaérobiques du sédiment. Le rapport de production de DIC et TA par sulfato-réduction dépend de l'état d'oxydation de la MO qui est minéralisée. Burdige and Komada (2011) ont définit un paramètre rC:S comme étant le rapport entre DIC produit et sulfate consommé par la réaction : rC:S = − ∆DIC DC * ∆SO42− DS (7.1) rC:S est également dépendant de l'état d'oxydation de la MO : rC:S = 8 4 − ox (7.2) ou ox peut prendre des valeurs entre 0 (MO labile) et -4 (MO totalement réduite) et ainsi rC:S peut prendre des valeurs entre 1 et 2. Plus la MO est réduite, plus les sulfates sont nécessaires la minéralisation de la MO. Dans le cas extrême où rC:S = 1, la réaction est l'oxydation anaérobique du méthane (AOM). En prenant ceci en compte, on peut formuler la sulfato-reduciton en fonction de rC:S : rC:S CH 4 rC:S OrC:S −1 + SO42− → rC:S HCO3− + HS − + rC:S H (rC:S −1)+ 2 rC:S O2−rC:S (7.3) et en déduire le rapport entre DIC et TA produit par unité de MO minéralisée : 3 − rC:S ∆ T A = ∆ DIC 1 (7.4) Dans les sédiments proches de l'embouchure du Rhône, la sulfato-réduction est la voie dominante de la minéralisation anaérobique et responsable de la majorité des flux de TA (chapitres 3 et 4). Précipitation de FeS et FeS2 Le Rhône est une source majeure de fer pour la Méditerranée. En conséquence, les sédiments proche de l'embouchure sont riches en fer. Les ions HS− peuvent réagir avec du fer réduit ou avec des phases de Fe(III) réfractaires qui auraient qui auraient été préservés lors de la réduction des minéraux réactifs ferriques, pour former du FeS et FeS2 solides. Cette précipitation empêche les ions HS− de s'accumuler dans les eaux interstitielles et de diffuser vers la zone oxique où ils seraient oxydés en consommant du TA. Ainsi la précipitation des sulfures de fer est un processus influencant les flux de TA de manière significative. En fonction du minéral formé, de l'alcalinité supplémentaire peut être produite ou consommée. La formation de FeS consomme de TA. Si les sulfures réagissent avec du Fe2+, TA est réduite de deux moles pour une mole de FeS produite (R14). Si le fer qui réagit a été réduit par une réaction avec de la MO, deux moles de TA ont été produites pour une mole de fer réduite (R10). Ainsi le bilan de TA et DIC produit par ce couplage anaerobique est 2 :2.25 : − − + 2CH2 O + SO2− 4 → 2HCO3 + HS + H R11 R10 1 4 CH2 O 2+ + + Fe(OH)3 + 74 H + → 41 HCO− 3 + Fe 10 4 H2 O Fe2+ + HS− → FeS + H+ R14 9 4 CH2 O − 9 1 + + SO2− 4 + Fe(OH)3 → 4 HCO3 + 4 H + FeS + 10 4 H2 O ∆ TA ∆ DIC +2 +2 +2 + 41 -2 0 +2 + 49 CHAPITRE 7. SYNTHÈSE ET PERSPECTIVES Dans le cas de la formation de FeS à partir d'hydroxides de fer, la consommation de TA par mole de FeS produite est moins importante, mais au final le bilan est le même : − − + 2CH2 O + SO2− 4 → 2HCO3 + HS + H R11 R15 8 9 Fe(OH)3 + HS− + 97 H+ → 98 FeS + 19 SO2− 4 + 20 9 H2 O − 8 2 + 2CH2 O + 89 SO2− 4 + 9 Fe(OH)3 → 2HCO3 + 9 H + FeS + 20 9 H2 O ∆ TA ∆ DIC +2 +2 - 92 0 + 16 9 +2 Seulement si la réaction mène à la précipitation de pyrite, un lèger excès de TA est créé par le couplage : − − + 2CH2 O + SO2− 4 → 2HCO3 + HS + H R 11 R16 8 15 Fe(OH)3 2CH2 O + 2− 16 15 SO4 +HS− + + 2− 1 15 SO4 8 15 Fe(OH)3 + + 17 + 15 H 2 + 15 H → 8 15 FeS2 → 2HCO− 3 + + 28 15 H2 O 8 15 FeS2 + 28 15 H2 O ∆ TA ∆ DIC +2 +2 2 + 15 0 32 + 15 +2 La réaction des sulfures de fer avec des sulfures pour former de la pyrite mais n'impacte pas le bilan TA/DIC. a figure 7.1 représente une partie des cycles du fer et des sulfates. Leur utilisation anaérobique pour minéraliser de la matière organique produit des grandes quantités de TA qui diffusent vers les sédiments oxiques en même temps que le Fe2+ et les HS−. Dans la couche oxique, ces espèces réduites réagissent avec l'oxygène en consommant de l'alcalinité. En revanche, les flux de TA sortant du sédiment sont faibles. La figure 7.2 représente une situation où les cylces du fer et des sulfates se combinent par la précipit de sulfures de fer. Dans cette situation, Fe2+ et HS− restent dans les sédiments anoxiques et l'alcalinité produite par cette interaction peut être exportée vers l'eau de fond. Le rapport entre DIC sortant du sédiment et O2 consommé est un indice pour estimer le pourcentage d'espèces réduites qui ont précipité (Glud, 2008; Lansard et al., 2009). (7.5) et pour la production de TA en fonction de l'accepteur d'électron utilisé pour la minéralisation d'une mole de MO : 2− Prod.(TA) = + 0.8NO− 3 + 2MnO2 -red. + 2Fe(OH)3 -red. + 2SO4 -red. + 2AOM − 2M n2+ reox − 2F e2+ reox − 2HS − reox − 2N H4+ reox 2 + 2CaCO3 dissol. + FeS2 precip. 8 2 − 2CaCO3 precip. − FeS precip. 8 ( 7.6 ) De fait, il y a trois possibilités qui peuvent générer une source de TA par des sédiments : 1. La dissolution de carbonates de calcium. 2. La dénitrification. 3. La minéralisation anaérobique couplée à la précipitation des produits réduits. La part de DIC et TA qui peut s'échapper du sédiment vers la colonne d'eau dépend notamment des dynamiques de transport dominants dans le sédiment. Dans des sédiments cohésifs, comme dans le prodelta du Rhône, les mécanismes de transport dominants sont la 184 diffusion moléculaire et l'advection verticale due à l'accumulation du sédiment. Pour expliquer les forts flux de TA et DIC observés à travers l'interface eau-sédiment dans le prodelta du Rhône, il est possible qu'il y ait soit de la dissolution massive de carbonates, soit une forte minéralisation anaérobique couplée avec de la précipitation d'espèces réduites. L'état de saturation (Ω ≫ 1) des eaux porales et des eaux de fond par rapport aux carbonates de calcium et la diminution des concentrations de Ca2+ dans les sédiments indiquent que la dissolution de carbonates peut être exclue. Sans la précipitation des espèces réduites dans les couches anaérobiques du sédiment, la consommation d'oxygène augmenterait au même niveau que les flux de DIC et l'alcalinité seraient consommées par la réoxydation des espèces réduites (Fe2+, Mn2+, HS− ). La dénitrification contribue aux flux de TA dans cette zone, mais seulement de manière mineure (Pastor et al., 2011a). Comme l'a montré le rapport entre DIC produit et sulfates consommés dans les sédiments du prodelta du Rhône, la grande majorité de DIC et TA est produite par la sulfato-réduction et par l'oxydation anaérobique de méthane. Conséquences des flux de TA et de DIC L'ensemble des réactions anaérobiques produit des quantités importantes de TA et de DIC et genère des flux de TA et DIC vers l'interface eau-sédiment. Les processus dans la couche oxique peuvent diminuer les flux de TA de manière significative si les espèces réduites restent mobiles. Comme la respiration oxique ajoute du DIC, les flux de DIC nets sont plus forts que les flux de TA. En conséquence, le pH dans les eaux surnageantes diminue, et le facteur de Revelle augmente. Avec un facteur de Revelle plus élevé, la capacité tampon des eaux de fond envers une augmentation du CO2 atmosphérique diminue. L'effet des flux de TA est d'atténuer ces effets par rapport à une situation où seulement du DIC sort du sédiment. Un autre effet de cette forte production de TA est que les eaux interstitielles sont sursaturées par rapport aux carbonates de calcium dans toute la zone malgré la forte production de DIC et l'acidification associée. 7.2. TRAÇAGE DES SOURCES DE MATIÈRE ORGANIQUE L'importance de la production primaire fluviale dans le cycle du carbone L'analyse du ratio C :N et de la signature en δ 13 C et ∆14 C du DIC dans les eaux interstitielles donne des informations sur l'origine de la matière organique qui est minéralisée dans les sédiments. Le chapitre 5 a montré que la MO minéralisée proche de l'embouchure est un mélange de MO d'origine terrestre, de la production primaire fluviale et de la MO marine autochtone. La proportion de MO importée par le Rhône est elevée proche de l'embouchure et diminue vers le large. La signature isotopique du DIC est en contraste avec la signature du carbone particulaire, ce qui indique que la minéralisation est très sélective. La MO ≪ jeune≫ et réactive est minér d'abord, surtout celle d'origine fluviale proche de l'embouchure très appauvrie en 13 C (δ 13 C = -25 à -27h) enrichie en 14 C (∆14 C = 400 à 500 h) et plutôt d'origine marine au large avec des valeurs de δ 13 C proche de -22 h. Dans le sédiment, les signatures en δ 13 C sont proches, mais significativement plus basse en ∆14 C. Les sols du bassin versant du Rhône sont également plutôt appauvris en ∆14 C. 7.3 Les sédiments du prodelta du Rhône - constamment en état non stationnaire? 7.3.1 Le chapitre quatre a démontré que les sédiments proche de l'embouchure du Rhône se trouvent constamment hors de l'état d'équilibre. La fréquence des perturbations (évenements de résuspension, crues etc.) est trop elevée pour que leurs effets soient 'éffacés' par la diffusion et les réactions dans le sédiment. De plus, cette zone est soumise à des variations saisonnières de température et de l'apport de matériel fluvial. La figure 7.4a montre la situation à la station Z entre Juin 2014 et Septembre 2015 pour les concentrations de DIC dans les eaux 186 (a) (b) Figure 7.4 – (a) Profils de concentrations de DIC dans les sédiments de la station Z entre Juin 2014 et Septembre 2015 ; (b) Photo de la carotte prise en Décembre 2014. Les niveaux de l'interface eau-sédiment sont marqués par des lignes horizontales. La graduation verticale correspond à l'interface eau-sédiment initiale. porales. Après deux mois avec un faible débit du Rhône (débit moyen de 960 m3 s−1 ), nous avons échantillonné la première carotte en Juin 2014. Le gradient apparaı̂t lisse et montre une forte croissance avec la profondeur. La situation a drastiquement changée en Octobre 2014 après une crue importante du Rhône (débit jusquà 5360 m3 s−1 ). Antonelli et al. (2008); Cathalot et al. (2010) ont montré qu'une couche de sédiment de plus que 10 cm peut être déposée durant une seule crue. Le dépôt de sédiment a provoqué la rupture du profil de DIC. L'ancien gradient est toujours bien visible en bas du profil, mais pas dans la couche de surface où un nouveau gradient est en train de se former. En Novembre, deux autres crues ont eu lieu avec des pointes de débits jusqu'à 7120 m3 s−1. Nous avons pu obtenir un profil de DIC en Décembre 2014 qui montre des fortes variations de concentrations. En haut, les concentrations sont fortes, mais elles montrent un minimum vers 40 cm de profondeur pour ré-augmenter en dessous. Sur la photo de la carotte prise en Décembre 2014 après la crûe à la station Z, on peut reconnaitre les différents dépôts grâce à une différence de couleur entre l'ancien sédiment et le nouveau dépot (fig.7.4a). Apparemment, la dernière crue aurait déposé plus de 20 cm de sédiment. Il est possible que le matériel organique transporté par la crue d'Octobre soit moins réactif que le matériel transporté en Novembre. En Février 2015, . le profil de DIC est revenu à un aspect 'classique', mais avec des concentrations plus faibles qu'au début de l'été. Le profil mesuré en Septembre 2015 montre le plus fort gradient DIC, qui résulte probablement de l'accumulation de MO réactive (= du phytoplancton) pendant tout l'été. Sur l'année, on peut en retenir que des larges apports de sédiment on eu lieu pendant la période hivernale. Pendant l'été, les apports étaient plus limités, mais sans doute plus réactifs. 7.3.2 Caractéristiques biogéochimiques permanentes Malgré les fortes variations saisonnières et intra-anuelles, les résultats des campagnes Carbodelta-II, DICASE et AMOR-B-Flux montrent les mêmes tendances générales. Par exemple, le rapport TA/DIC mesuré dans les eaux interstitielles pendant les trois campagnes de terrain au prodelta du Rhône reste toujours proche de 1 avec de très bonnes corrélations (r2 > 0.99, Figure 7.6). Il est donc probable qu'il n'y a pas de changement quali- CHAPITRE 7. SYNTHÈSE ET PERSPECTIVES Table 7.1 – Estimation des flux diffusifs de DIC anaérobiques (FDDICa) pour les trois campagnes Carbodelta-II, DICASE et AMOR-B-Flux, des flux totaux de la campagne AMORB-Flux (FDICt) et des éstimations de taux d'oxydation de POC par Lansard et al. (2009), se basant sur des flux d'O2, Pastor et al. (2011a), se basant sur une étude de modélisation et Toussaint (2013), se basant sur des flux d'O2. Tous les flux sont exprimés en mmol m−2 d−1. Type de flux Domaine proximal Domaine deltaique Domaine distal FDDICa 42.3±28.7 13.7±5.7 3.0±0.9 FDICt 54.9±37.6 10±1.0 Lansard et al. (2009) 39.2±3.2 20.7±4.3 17.4±4.2 Pastor et al. (2011a) 150 20 7.3 88.0±14.1 32.5±16 Toussaint (2013) estimations de flux de carbone minéralisé faites par Lansard et al. (2009); Toussaint (2013); Pastor et al. (2011a). Alors que les estimations de Lansard et al. (2009); Toussaint (2013) se basent sur des flux d'oxygène multipliés par un facteur de DIC :O2 de la littérature, l'étude de Pastor et al. (2011a) prend explicitement la respiration anaérobique en compte. Cette comparaison est affectée par des techniques utilisées différentes (mesures in situ de FDIC, de DOU ou de TOU, calcul à partir de gradients dans les eaux interstitielles, modélisation) et montre également la forte variabilité du système dans le temps. Par exemple, les mesures de DOU sur dix ans montrent que des variations d'un facteur 3 entre les années sont tout à fait possibles (Toussaint, 2013). Dans les sédiments proches de l'embouchure, le système diagénétique se trouve constamment en état de transition entre une perturbation et l'état stationnaire. 7.4 La réponse des sédiments carbonatés à l'acidification des océans La diagenèse précoce influence le pH dans les eaux interstitielles et dans l'eau de fond, mais il pourrait également être sensible aux changements de pH dans l'eau surnageante causés par l'acidification des océans. Les scénarios actuels prévoient une baisse de pH de 0.06 à 0.32 unités dans l'océan de surface d'ici la fin du XXIème siècle (Orr et al., 2005; IPCC, 2013). Dans l'océan côtier, cette baisse de pH peut être accentuée à cause des eaux peu profondes, et par l'euthrophisation et l'hypoxie (Cai et al., 2011; Hagens et al., 2015). Cette problèmatique très importante au regard de l'augmentation du CO2 atmosphérique et son transfert vers l'océan a pu être abordée par une expérience effectuée au LOV. Cette expérience se place dans le cadre du projet ACIBIOS qui a eu lieu dans la rade de Ville- 7.5. PERSPECTIVES 191 franche sur Mer et consistait en une incubation de sédiments avec de l'eau de mer acidifiée. Ces sédiments sont carbonatés, riches en matière organique et soumis à une vitesse de sédimentation de 1 mm yr−1. Dans les sédiments, les gradients de pH causés par la diagenèse précoce peuvent atteindre plus que 0.6 unité sur quelques millimètres (voir chapitres trois et cinq). L'acidification accroit le phénomène de baisse de pH déjà présent à la surface du sédiment. L'expérience a montré que la dissolution de carbonates à la surface du sédiment tamponne le pH du système diagénétique de manière quasi instantannée. Cette dissolution génère également des flux de TA importants vers la colonne d'eau. Si le pouvoir tampon peut être maintenu sur une longue durée, cela dépend surtout du contenu et de l'apport de carbonates de calcium à la surface du sédiment. Dans un système comme le prodelta du Rhône, où la majorité des carbonates proviennent des sources terrestres, il est fort probable que l'apport de carbonates soit suffisament élevé pour maintenir une forte concentration dans les sédiments de surface, même si le pH de l'eau de fond baisse. Aux stations proches de l'embouchure, l'acidification aurait comme conséquence probable de renforcer les flux d'alcalinité naturellement forts par dissolution de carbonates. La situation change quand on s'éloigne de l'embouchure et de la source de carbonates allochtones (Rhône). Dans ce cas, l'acidification des eaux de fond sera attenuée du moins pendant tout le temps nécessaire pour dissoudre les carbonates disponibles. 7.5 Perspectives Cette thèse repond à un certain nombre de questions : – La diagenèse anaérobique dans un environnement riche en fer réactif produit des forts flux de TA, ce qui mène à une forte sursaturation des eaux interstitielles par rapport aux carbonates de calcium. – Ces flux de TA jouent également un rôle important dans le cycle du carbone en tant que pompe anaérobique. – Dans le prodelta du Rhône, les processus anaérobiques dominants de minéralisation de la MO sont la sulfato-réduction et l'AOM. – Le phytoplancton fluvial est la source préférentielle de MO minéralisée par les microorganismes vivants dans le sédiment. CHAPITRE 7. – L'effet de l'acidification des océans cause ou renforce la dissolution de carbonates à la surface des sédiments, ce qui tamponne le reste du système sédimentaire. 7.5.1 Ma thèse et les traveaux précédents ont été montré que le système diagénétique dans le prodelta du Rhône est très variable dans le temps. Pour mieux comprendre les dynamiques du sytème et si on souhaite quantifier son rôle dans le cycle du carbone, il faudrait effectuer un programme de monitoring. Ce programme peut consister en l'utilisation de la station benthique qui mesure des profils d'oxygène pendant plusieurs mois et pourra être completée par des séries temporelles de carottage à une même station. 7.5.2 FeS ou FeS2 L'intensité de la pompe anaérobique est dépendante de la non-réoxydation des espèces réduites dans la couche oxique et elle fonctionne si ces espèces précipitent dans les couches anaérobiques. Néanmoins, certaines réactions de précipitation peuvent consommer du TA alors que d'autres peuvent en produire. Alors que la précipitation de FeS consomme du TA, la formation de FeS2 en produit. L'intensité de ces précipitations et leur relation peuvent jouer un rôle dans la production ou consommation de TA dans les śediments anaérobiques et modifier le rapport TA/DIC. Il faudrait donc estimer la stoichiométrie et la suite de ces réactions pour compléter la compréhension sur les origines des flux de TA et de DIC. 7.5.3 ACIBIOS-II combinaison de paramètres et du cycle journalier L'expérience ACIBIOS fût conçue comme une expérience d'exploration pour estimer la réponse des sédiments côtiers à l'acidification des eaux surnageantes. Les moyens et le temps disponibles pour cette expérience étaient malheureusement limités, mais les résultats sont très explicites. Pour mieux contraindre la réponse des sédiments à l'acidification, il serait souhaitable de répéter l'expérience sur une durée plus longue (plusieurs mois) avec plusieurs niveaux de pH différents, de préférence en faisant varier également la température dont l'augmentation accompagne l'acidification (à cause de l'effet de serre). Il a été démontré que des organismes réagissent de manière différente au changement d'un stresseur ou à des changements multiples . de plusieurs stresseurs. Concernant la réponse de la faune, il serait important de maintenir un cycle jour-nuit. A 20 m de profondeur, la lumière penètre jusqu'au fond et rend la photosynthèse possible. En fonction de la disponibilité de lumière, ces eaux sont dominées par la respiration ou par la photsynthèse. Cox et al. (2016) a mis en évidence que les variations journalières de pH dans l'eau autour les herbiers Posidonies peuvent atteindre 0.2 unité de pH, ce qui s'approche de l'acidification moyenne des océans projetée d'ici la fin du siècle. 7.5.4 Un piégage de CO2 dynamique? Dans les sédiments du prodelta du Rhône, le DIC peut migrer par diffusion moléculaire sur environ 18 cm (± 2 cm en fonction de la température) par année. A l'embouchure, les taux d'accumulation de sédiment peuvent atteindre jusqu'à 40 cm yr−1. Par conséquent, le DIC produit en dessous de 20 cm ne pourra jamais s'échapper de ce sédiment tant que le taux de sédimentation reste aussi élevée et en absence de resuspension majeure. La vitesse de migration du DIC peut être augmentée de manière significative, si le sédiment est irrigué par l'activité de la macrofaune et temporairement par du mélange induit par des vagues, des événements d'érosion lors des tempêtes et par le chalutage. A l'heure actuelle, il existe peu de données sur les mécanismes de transport dans les sédiments du Rhône, mais il est fort probable que l'approche 'classique' de réduire les mécanismes de transport à la diffusion moléculaire et à la biodiffusion près de la surface est insuffisante pour décrire ce système particulier. Le mélange du sédiment et de l'eau interstitielle peut aussi avoir un impact important sur la réoxydation des espèces réduites et le recyclage du fer et du soufre dans les sédiments (van Velde and Meysman, 2016). Il faudrait donc réussir à mesurer les flux de DIC et de TA in situ pendant un évènement de mélange ou d'érosion. 7.5.5 Modélisation de la diagenèse précoce avec le modèle BRNS Nos données sur la diagenèse précoce dans les sédiments du prodelta du Rhône sont assez conséquentes, mais il y a certains paramètres qui restent difficiles à estimer. D'un côté, les incertitudes sur les flux de DIC et de TA restent elevées et de l'autre côté, le flux de matière 194 organique reste assez incertain. Une possibilité pour estimer ces paramètres est d'utiliser l'outil de la modélisation. Il est également nécessaire d'avoir recours aux modèles pour obtenir des projections sur l'évolution du sytème dans le futur. La diagenèse précoce du prodelta du Rhône a été l'objet de modélisation avec le modèle OMEXDIA (Pastor et al., 2011a) initié par Soetaert et al. (1996). Ce modèle se focalise sur la minéralisation de la matière organique de manière générale, mais regroupe les processus anaérobiques et leurs produits réduits comme consommateurs d'oxygène (oxygen demand units, ODU) et n'est pas bien adapté pour l'estimation des flux de TA. Avec l'aide de Sandra Arndt et Valdis Krumins, j'ai commencé à utiliser le ≪Biogeochemical Reaction Network Simulator≫ (BRNS) presenté dans (Krumins et al., 2013). La force de ce modèle diagénétique en 1D est d'être capable d'estimer les flux de TA et de DIC à travers l'interface eau-sédiment. Sa performance a été démontrée et testée dans une étude sur la sensibilité des flux de TA et DIC aux changements globaux. Par rapport aux particularités du prodelta du Rhône, il est possible dans ce modèle d'imposer une sédimentation discontinue et d'augmenter la résolution temporelle pour s'approcher de l'état -stationnaire permanent observé dans cette région. A l'aide de ce modèle, on pourra quantifier les flux de DIC et TA à travers l'interface eau-sédiment pour certaines stations. Vu que nous avons mesuré ces flux durant la campagne AMOR-B-Flux, le modèle peut être bien contraint. En même temps, la modélisation permet de quantifier des flux et réactivités du POC incorporé dans les sédiments et d'estimer la quantité de POC enfoui. Faire une telle étude avec des pièges à particules sera très difficile dans un tel environnement. Finalement, le modèle permet également d'étudier les impacts de l'acidification des océans sur les sédiments côtiers en variant les conditions aux limites et en confrontant les résultats aux mesures de l'expérience ACIBIOS. 7.5.6 Les pressions anthropiques sur les systèmes estuariens Les régions estuariennes se trouvent exposées à de multiple stresseurs anthropiques : Le échauffement climatique, l'acidification des océans, l'euthrophisation, l'augmentation de l'apport de matière organique, l'hypoxie etc. Ces stresseurs peuvent interagir et se renforcer ou s'affaiblir mutuellement en changeant les écosystèmes côtiers. Il est donc important d'inclure ces interactions dans les recherches sur le futur des écosystèmes marins côtiers et de mener 7.5. PERSPECT 195 des comparaisons entre des systèmes contrastés comme le prodelta du Rhône (environnement bien oxygéné) et d'autres régions estuariennes comme le delta du Mississippi ( environnement avec hypoxie saisonnière). A cause du fort couplage pélagique benthique, les flux d'échange entre les sédiments et la colonne d'eau peuvent potentiellement renforcer ou contrebalancer ces pressions anthropiques. Mais à l'heure actuelle, la réponse des sédiments à ces stresseurs multiples est mal connue. L'élaboration d'un projèt focalisé sur le rôle des sédiments dans un contexte d'hypoxie et d'acidification pourrait faire progresser les connaissances dans ce domaine. ANNEXES 7.10 Les paramètres du titrateur d'alcalinité (TIM) pour 3 ml mode : IP dynamique température : saisie mode : IP dynamique température : saisie nombre d'essais : 1 mise à terre : référence blanc : non electrode : pHC3359-8 réactif : Hcl 0,01M mode précoulé : pH/mV précoulé jusqu'à : 0,0mV Tempo. de départ : 00min30s Volume max : 30,000ml sens titrage : mV croissant point d'arrêt : 210mV trage en retour : non dose dynamique : 10 dose max : 0,10ml Filtre incrémentiel : 0 Rejet d'inflexion : 10 vitesse : 0,50ml/min stabilité : 18,0mV/min acceptation : 0min30s nombre P.I. : 1 arrêt après dernier P.I. : non sortie auxiliaire : non coordonnées du point d'inflexion min : 80mV max : 200mV ANNEXES 201 Figure 7.12 – Interférence de rayons-X sur un réseau cristallin 7.11 Interférences de rayons-X sur un réseau cristallin Un cristal est un arrangement réguliér d'atomes, molécules ou d'ions. Sous arrangement régulier, on comprend la répétion d'un motif (maille). Chaque maille est définie par trois vecteurs de base qui définissent trois séries de plans cristallins. Ces plans sont nommés selon les indices de Miller (hkl). La distance entre ces plans est de l'ordre de quelques Å. On peut donc voir un cristal comme une grille d'interférences pour des longueurs d'ondes inférieures à 10−10 m. Préparation d'un échantillon de poudre pour l'analyse DRX La résolution d'un diffractogramme de rayons-X dépend du temps d'acquisition, de la taille et de la qualité des cristaux. Plus les cristaux sont petits et mieux ils sont cristallisés, plus les pics sont fins. Pour diminuer la taille des cristaux, les sédiments ont été broyés à une taille de grain inférieure à 20μ sous éthanol et avec peu de pression pour éviter de transfomer des éventuels cristaux d'aragonite en calcite. Si on dispose de suffisament de poudre de l'échantillon, on peut preéparer un volume de poudre qui va ensuite être analysé en DRX. Il est important que la surface de l'échantillon soit plane et que les échantillons soient tassés de la même manière ce qui influence la profondeur de pénétration du rayon-X dans la poudre. Sur la figure 7.13, on voit le matériel utilisé pour la préparation d'un échantillon de poudre et la suite des photos sur la figure 7.14 montre les étapes de préparation. La plaque de surface est posée à l'envers sur l'appui de portoir (7.14a). La surface de l'appui doit être plane et propre, car elle va former la surface de l'échantillon à la fin. Le trou de la plaque de surface est ensuite rempli avec l'échantillon (7.14b) et le tout est tassé avec le piston (7.14c). On peut s'aider d'une spatule ou d'une lame de rasoir pour placer la poudre au bon endroit. S'il y a des vides trop importants dans le bulk, l'échantillon pourrait s'éffondrer pendant l'analyse et changer l'orientation des cristaux. Une fois tassé (7.14d), on fixe le portoir de l'échantillon sur la plaque de surface (7.14e) et retourne l'emble à l'orientation e (7.14f). 7.13 Comparaison de la mesure de porosité par pesée et par résistivité Nous avons systématiquement mesuré la porosité avec les deux techniques, par pesée et par résistivité, lors de nos campagnes au prodelta du Rhône. La difficulté avec le calcul à partir des mesures de résistivité et du facteur de formation est la détermination des deux constantes numériques C et k qui dépendent beaucoup de la nature locale du sédiment. Pour les déterminer, nous avons ajusté la courbe de porosité calculée au profil de porosité obtenu par pesée, donc les deux techniques ne sont pas vraiment indépendantes dans ce cas. La figure 7.15 montre les profils de porosité obtenues par pesée et par calcul à partir des mesures de résistivité pour deux stations au prodelta du Rhône. A la station K, on réussit bien d'accorder les deux profils (fig.7.15a), mais à la station AK, les profils divergent en profondeur (figure 7.15b). Cette divergence peut être liée à l'hétérogénieté et à la dynamique du sédiment. La diminution de porosité en profondeur peut signifier la présence d'un terrier, ou potentiellement un dépôt de crûe différent. On observe également que C et k varient beaucoup. 7.14 Mesures de calcium dissout et de pCO2 dans la couche oxique Une des grandes difficultées à l'interprétation des résultats de l'expérience ACIBIOS était le fait que les flux de DIC et TA ont augmentées dans les carottes acidifiées, sans que nous soyons capables de mettre une variation des concentrations de calcium dissout en évidence. En plus nos calculs montrent une sursaturation des eaux interstitielles par rapport aux carbonates de calcium. La seule explication à ce phénomène était une dissolution de carbonates dans la ANNEXES 205 couche oxique du sédiment. Des mesures de Ca2+ et de pCO2 dans la couche oxique auront pu confirmer (ou casser) cette hypothèse. Pendant une visite dans le groupe de travail de Dirk de Beer au Max Planck Institut à Bremen, j'ai pu voir des microsensors de type Liquid Ion Exchange (LIX) pour mesurer des concentrations de Ca2+ à l'échelle sub-millimétrique. Le fonctionnement de ces capteurs se base sur l'échange d'ions à travers un liquide hydrophile situé dans une cpillaire en verre dont la pointe mesure que quelques μm (Amman, 1986). Il existent également des microcapteurs de pCO2, mais ils sont compliqués à l'application (de Beer et al., 1997; Boudreau and Jorgensen, 2001). Un grand desavantage de ce type de capteurs est leur courte durée de vie de seulement quelques jours. En revanche, il y a encore beaucoup de développement en cours dans le domaine des microcapteurs, notament dans les développements des micro-optodes, on observe parfois des démonstrations de performances prometteuses. 7.15 FTIR - une méthode rapide pour déterminer la minéralogie du sédiment Une méthode très élegante pour identifier et quantifier des composantes solides est la spectroscopie infrarouge á transformé de Fourier (Fourier Transform InfraRed spectroscopy, FTIR). Cette analyse se base sur le principe de la spectroscopie de Raman. Avec du rayonnement infrarouge monochromatique, on excite des liaisons moléculaires dans l'échantillon et mesure la réponse d'une molécule (nommé rayonnement de Raman). Une liason moléculaire a plusieurs degrés de liberté, décrit par son Hamiltonien moléculaire, dans lequel elle peut être exité. Ainsi chaque molécule à un spectre de résonance caractéristique. La différence de chemin entre le rayonnement émis et reçu est mesuré dans une configuration qu'on apelle Michelson interféromètre. Il s'agit de couper le rayon émis avec un mirror semi-transparent. Puis les deux parties du rayon sont relfechies avec des mirroirs pour revenir au point de départ. Un des deux rayons va traverser l'échantillon, ce qui le retarde par rapport à l'autre. On enregistre cette différence de temps et applique une transformation de Fourier au signal. Ainsi, on obtiens les modes de résonnance de la molécule. Pour l'analyse, on ne se restraint pas à une longeur d'onde, mais balaye l'échantillon avec du rayonnement infrarouge et enregistre la réponse pour chaque longeur d'onde. Le temps d'analyse par échantillon est inférieur à 5 minutes. La rapidité est un grand avantage de cette technique d'analyse qui est non de- structive et ne nécessite pas des grandes volumes d'échantillon. En plus, elle est applicable á tout état de matiére. Avec l'aide de Julius Nouet, j'ai effectué une série de tests sur des échantillons de sédiment de campagne DICASE au laboratoire des Geosciences à l'université de Paris Sud (Geops). Les spectres étaient bien définis, mais le Geops ne possède pas le logiciel (très couteuse) nécessaire pour déconvuluer les spectres pour la calcite et l'aragonite, donc je n'ai pas poursuivie cette technique d'analyse très prometteuse. Bibliographie Aguilera, D. R., Jourabchi, P., Spiteri, C., and Regnier, P. (2005). A knowledge-based reactive transport approach for the simulation of biogeochemical dynamics in Earth systems : Earth System Dynamics. Geochemistry, Geophysics, Geosystems, 6(7) :1–18. Ahn, J.-W., Kim, J.-H., Park, H.-S., Kim, J.-A., Han, C., and Kim, H. (2005). Synthesis of Single Phase Aragonit Precipitated Calcium Carbonate in Ca(OH)2 -Na2 CO3 -NaOH Reaction System. Korean Journal of Chemistry, 22(6) :852–856. Aller, R. and Aller, J. (1992). 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Détection de défauts sur la surface de chaussées par système de vision Tien Sy Nguyen, Pascal Vrignat, Manuel Avila, Stéphane Begot, Florent Duculty VRIGNAT1, M. AVILA1, S. BEGOT1, F. DUCULTY1 Laboratoire Vision et Robotique, IUT de l'Indre, 2 av. F. Mitterrand, 36000 CHATEAUROUX 2 VECTRA, 36500 BUZANCAIS [email protected] AMAC® est un appareil de mesures de l'état des chaussées à grand rendement. L'une des fonctions de l'appareil est d'acquérir des images de l'état de surface de la chaussée afin d'expertiser cette chaussée par la détection et le positionnement d'éventuels défauts. Les caractéristiques minimales de détection sont : fissure de largeur de 2mm et de longueur 1m. Les dégradations sont qualifiées et quantifiées en linéaire et en état de surface. Actuellement le traitement des données est entièrement effectué, en différé, par un opérateur qui fait défiler les images des kilomètres de chaussées à analyser sur des écrans. Lors des campagnes de mesures, l'appareil effectue des mesures sur plusieurs dizaines de kilomètres. Les dizaines de milliers d'images collectées représentent quelques téraoctets stockés dans une baie de disques durs. L'analyse des a montré qu'environ 60 % des images ne présentent aucun défaut. Notre travail vise, dans un premier temps, à réduire le nombre d'images présentées à l'opérateur en détectant la présence ou plus exactement l'absence de défauts dans l'image. Afin d'augmenter l'autonomie du véhicule, nous étudions une méthode simple qui s'exécutera en temps réel sur le véhicule, en phase d'acquisition des images. Notre traitement nous permettra de garantir l'absence de défaut dans certaines images afin d'éviter la sauvegarde de ces images. C'est l'objet du travail présenté. Abstract – AMAC® is a measuring device for road characteristics. One of the functions of the device is to acquire images of the surface quality of the roadway in order to appraise this roadway using the detection to locate possible defaults. The minimal characteristics of detection are: fissure width of 2mm and 1m in length. Currently the data processing is entirely postponed before being carried out. An operator watches the images of roadways on screen and analyzes them. During the acquisition phase, the device takes measurements on several dozens of kilometers. Dozens of thousands of collected images amounting to several tera-bytes stored in a bay of hard disks. The analysis of the images showed that approximately 60% of the images do not present any default. Initially, our work aims at reducing the number of images presented at the operator by detecting the presence or more exactly the absence of defaults in the image. In order to increase the autonomy of the vehicle, we study a simple method which will be carried out in real time on the vehicle during the acquisition phase of the images. Our treatment will enable us to guarantee the absence of default in a large number of images in order to avoid the storage of these images. This is the object of presented work. 1. Introduction La programmation de travaux de rénovation de chaussées nécessite de disposer d'éléments précis concernant l'état des couches d'usure en surface et des couches profondes de la chaussée. Afin de faciliter la gestion de ces infrastructures, les gestionnaires des autoroutes françaises utilisent le véhicule AMAC® (Appareil Multifonction d'Auscultation des Chaussées). Cet appareil a été conçu pour mesurer plusieurs caractéristiques de la chaussée : - profil transversal, profil longitudinal, - caractéristiques géométriques, - bruits de roulement, - images d'environnement, - état de surface, C'est cette dernière caractéristique qui fait l'objet de cette étude. L'objectif est d'automatiser l'ensemble ou une partie du traitement effectué, aujourd'hui, par un opérateur. Il est également envisagé d'augmenter la capacité de mesure du véhicule en limitant le nombre d'images stockées par le système. Après une présentation succincte du véhicule, nous présentons notre méthode. Les résultats de notre méthode sont comparés avec ceux fournis par un opérateur. 2. Le d'images système d'acquisition Le sous-système état de surface (dégradation de surface) (FIG. 1) permet l'acquisition d'images numériques de très haute résolution de la surface de chaussées indépendamment des conditions d'éclairement (diurne ou nocturne) afin de qualifier et quantifier a posteriori les dégradations de surface. Le capteur est constitué d'une caméra linéaire associée à un laser d'éclairement. La largeur de chaussée visualisée est de 3,9m. Des images 2D sont reconstituées pour former une image de 4m de longueur. 4.1 FIG. 1 : Dispositif d'acquisition d'images de surface de chaussées. 3. Quelques défauts Ils existent de nombreux types de défauts qui doivent être détectés et caractérisés sur les chaussées. Les échantillons d'images suivants en présentent quelques-uns. (a) Des méthodes de seuillage adaptatif ont été utilisées sur des textures aléatoires comme les nôtres ([6] et [7]). Dans le cadre de cette étude, nous avons opté pour une méthode plus simple à seuil fixe choisi « automatiquement » afin de limiter le temps de calcul. Les études suivantes ([2] et [3]) ont montré que l'on peut retrouver la géométrie (hauteur) de la surface de la chaussée en prenant en compte le niveau d'éclairement (niveau de gris des pixels) dans le cas où l'on connaît l'angle d'incidence de la source de lumière. Nous avons donc utilisé comme hypothèse que les fissures (plus profondes) sont caractérisées par des niveaux de gris voisins (ombres), proches du noir. En effet, dans notre cas, le système d'acquisition embarqué sur le véhicule utilise une source laser pour éclairer la zone de prise de vues de la caméra linéaire. Cette hypothèse se vérifie donc puisque l'angle d'incidence du plan laser est fixé. Afin de déterminer automatiquement le seuil de séparation des zones sombres, l'histogramme des niveaux de gris est utilisé afin d'améliorer les contrastes (FIG 3). (b) (c) (d) FIG. 2 : Quelques défauts : (a) fissure longitudinale, (b) fissure transversale, (c) faïençage, (d) ressuage. Cette première étude se limite à la recherche de défauts de type fissures (FIG. 2 (a) et (b)). 4. (b) amélioration des contrastes (c) histogramme image (a) (d) histogramme image (b) FIG. 3 : Amélioration des contrastes. Les images suivantes (FIG. 4 (b) et FIG. 5 (b)) sont obtenues après seuillage. Notre méthode La méthode proposée est assez proche du traitement décrit dans l'article [1]. Cette étude concerne la détection de fissures dans des images de porcelaines. Les traitements effectués consistent à améliorer les contrastes dans l'image en utilisant l'histogramme de répartition des niveaux de gris. Après un seuillage, des opérateurs morphologiques sont utilisés pour filtrer les objets « trop petits ». Plusieurs méthodes d'identification des différents défauts sont mises en oeuvre pour conclure sur la présence ou non de défauts. Notre méthode se décompose en trois étapes : seuillage adaptatif, filtrage par opérateurs morphologiques, recherche d'alignements. (a) image avec fissure (b) après seuillage Colloque GRETSI, 11-14 septembre 2007, Troyes 4.3 Recherche d'alignements La technique que nous utilisons est similaire à celle présentée dans la thèse [4]. Elle consiste à projeter les pixels sur 8 axes (à 22.5°). Si l'image ne contient pas de défauts, la répartition des régions est aléatoire. Les profils obtenus, suivant les différentes orientations, ne présentent pas de pics très élevés. Par contre, si l'image contient un défaut de type fissure, au moins un des profils présentera au moins un pic élevé, caractéristique d'un alignement de pixels. Nous limitons la recherche d'alignements dans 8 directions, ceci afin de minimiser le temps de traitement. Les figures (FIG. 4 (d) et FIG. 5 (d)) montrent des profils obtenus pour deux images avec et sans défauts. Le défaut apparaît clairement sur le profil. (c) après morphologie (d) projection des pixels FIG. 4 : Image avec fissures. (a) image sans fissure Tests sur bases d'images 5.1 Tests sur fissures uniquement Dans un premier temps, nous avons effectué des tests sur une base d'images, ne comportant que des défauts de type fissure, ayant été traitée et étiquetée par un opérateur. Nous disposons de deux jeux d'images (2000x2000 pixels), l'un est composé de 222 images sans défaut, l'autre est composé de 81 images comportant des fissures (verticales, horizontales ou autres orientations). (b) après seuillage (c) après morphologie (d) projection des pixels FIG. 5 : Image sans fissure. 4.2 Filtrage par opérateurs morphologiques Lorsque les images ne présentent pas de défauts, les régions sombres sont réparties aléatoirement dans l'image. Ces régions apparaissent comme du bruit dans l'image. En présence de fissures, les régions sombres forment des alignements de taille plus importante. Nous appliquons une fermeture afin de connecter des morceaux de fissures voisins. De même, nous appliquons une ouverture afin d'éliminer les bruits : régions de tailles non significatives. Les figures (FIG. 4 (c) et FIG. 5 (c)) montrent les images obtenues après cette étape. Le tableau 1 suivant présente les résultats obtenus par la méthode. Le tableau montre les pourcentages de défauts détectés sur les deux jeux d'images avec et sans défauts. Le pourcentage d'erreurs commises donne la proportion d'images mal classées, cependant c'est la proportion de défauts non détectés qui doit être minimisée afin de garantir qu'aucune image de défauts sera écartée lors de la phase d'acquisition sur le véhicule. Ce chiffre doit être mis en correspondance avec le taux d'images filtrées. Ces résultats ont été obtenus avec une valeur de seuillage fixée. Une variation de la valeur de seuillage de moins deux niveaux de gris fait monter le pourcentage de nondétection de défauts à 7,6% pour plus de 80% d'images filtrées. Dans ce cas, nous choisissons de privilégier les zones très sombres, ce qui réduit la détection de masses sombres dans l'image et donc les petites fissures ne sont plus assez significatives pour être détectées. TAB. 1 : Résultats obtenus sur les jeux d'images avec ou sans défauts Base Pourcentage d'images classées en défauts Pourcentage d'images classées sans défaut Base d'images avec fissures 90,1% 9,9% Base d'images sans défaut 1,8% 98,2% Pourcentage d'erreurs commises 4,0% Pourcentage non-détection de défauts 2,6% Pourcentage d'images filtrées 74,6% 1100 Une variation de plus deux niveaux de gris fait baisser le pourcentage de non-détection à 2,3% c'est à dire un gain de 0,3% de mieux par rapport aux résultats du tableau pour 51,8% d'images filtrées. Dans cet autre cas, nous favorisons la détection d'objets plus clairs. Nous détectons donc plus de formes ou leur taille devient plus importante. Si ces formes sont regroupées sous forme d'alignement, nous favorisons la détection de défauts. En réduisant le nombre d'erreurs commises, nous réduisons également le nombre d'images filtrées. Il en reste, dans ce cas, environ la moitié à conserver et à stocker pendant la phase d'acquisition. 5.2 Tests sur un segment de chaussée Cette base est constituée d'images d'un segment de chaussée d'environ 12 kilomètres consécutifs. Cette base contient plus de 3000 images de 4 x 4 m. L'analyse des résultats nous a conduits à visualiser les images lorsque des erreurs de classification sont commises. Dans de nombreux cas, la visualisation de l'image ne permet pas d'identifier le défaut. Soit le défaut est très discret, soit la base comporte quelques erreurs d'étiquetage. De plus l'étiquetage est parfois imprécis, comme pour les fissures transversales ou joints identifiés avec un même code. Nous n'avons pu effectuer une analyse précise, image par image. Dans le tableau 2, nous voyons que les fissures longitudinales sont très bien classées avec moins de 1% d'erreurs. Les fissures transversales sont moins bien détectées avec 27% de non détection, peut-être dû à l'étiquetage commun avec les joints. Notre objectifs étant de filtrer les images sans défauts, les erreurs commises sur ces images ne sont pas gênantes. Les résultats sur les autres types de défauts montrent les limites de notre méthode. En effet, si les défauts ne sont pas localisés dans les zones sombres, notre méthode ne les détecte pas. TAB. 2 : Résultats obtenus sur une base « tous types de défauts » Nombre d'images Erreurs Pourcentage d'images classées en défauts Pourcentage d'images classées sans défaut Autres défauts 2318 516 170 72 286 5 46 63 12,3 99,0 72,9 12,5 87,7 1,0 27,1 87,5 TOTAL 3076 400 13,0 87,0 Type de défauts Sans défaut Fissure longitudinale Fissure transversale ou joint 6. Conclusion Notre méthode permet d'obtenir de bons résultats sur les défauts de type fissures. La méthode fonctionne bien si les hypothèses initiales se vérifient, c'est à dire si le plan laser génère une ombre au niveau de la fissure. Dans certaines conditions, le plan laser peut éclairer la fissure en fonction de la position de celle-ci, ce qui explique une partie des erreurs commises. D'autres défauts peuvent être détectés par cette méthode mais il est alors impossible d'identifier le type du défaut détecté. Nous souhaitions pouvoir filtrer les images sans défauts des autres images. Les résultats obtenus, dans ce sens, sont satisfaisants. Le comportement de la méthode sur d'autres défauts ne permet pas de généraliser le traitement sur l'ensemble des défauts. Il nous faudra associer d'autres méthodes en parallèle, par exemple, pour localiser les défauts présents sur des niveaux de gris proches du blanc (reflets des joints ou du ressuage)..
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193 Ph OH Ts HN Ph R4 Ts N R4 FeCl3.6H2O (10 mol %) CH2Cl2, 40 °C, 2 h O O 2.39 Ph Ts N 2.41 Ph i-Pr Ts N Ph Ph Ts N O O O 2.41c (78%, cis/trans = 93:7) 2.41d (70%, cis/trans = 83:17) 2.41e (60%) Schéma 146 II.3.3 Mécanisme Lors de l'optimisation des conditions réactionnelles pour la formation de morpholines 2,6- ou 3,5-disubstituées (Tableau 25 et Tableau 27), l'évolution au cours du temps du rapport diastéréoisomérique des morpholines formées évoque la présence d'un équilibre thermodynamique menant au diastéréoisomère le plus stable de façon majoritaire. Par ailleurs, les résultats présentés au Tableau 26 montrent que de meilleurs résultats sont obtenus lorsque l'alcool allylique est substitué par un groupe R1 électro-donneur tel qu'un phényle. En effet, dans le cas où R1 = Me, il a fallu chauffer la réaction à 110 °C pour atteindre un bon rapport diastéréoisomérique de 92:8. Avec R1 = H, aucune diastéréosélectivité n'a été obtenue, même à 110 °C. Un intermédiaire chargé positivement tel qu'un carbocation, dont la stabilité dépend de sa substitution, se forme donc probablement lors de la synthèse des morpholines. Ainsi, en se basant sur les précédentes synthèses d'hétérocycles catalysées au Fe(III) 130, un mécanisme commun permettant de rationnaliser la formation des morpholines 2,6- ou 3,5-disubstituées peut être proposé. L'activation des alcools allyliques 2.B et 2.D par FeCl3 provoquerait la perte d'une molécule d'eau et la formation des carbocations intermédiaires 2.V et 2.X, stabilisés par le substituant en position allylique (Schéma 147). L'attaque nucléophile intramoléculaire de l'alcoolate secondaire ou de l'amidure mènerait aux morpholines 2.A et 2.C, sous la forme d'un mélange cis/trans. Ce mélange s'équilibrerait ensuite, par un processus de réouverture/fermeture catalysé par FeCl3, vers la formation majoritaire du composé 194 thermodynamiquement le plus stable. Cet équilibre serait d'autant plus facilité que le carbocation serait stabilisé par un groupe donneur. C'est pourquoi on observe, à température équivalente, une meilleure diastéréosélectivité si l'alcool allylique est substitué par le groupe phényle plutôt que par un groupe méthyle. Ts N Ts N Ts N O Ts N Ph [Fe] HO Ph HO R2 O H [Fe] Ph OH 2.B O R2 - H O 2 R2 [Fe] O 2.U 2.V Ph Ph [Fe] Ph OH Ts HN Ph R4 [Fe] trans-2.A Ts N [Fe] Ph R2 R2 cis-2.A Ts N R4 H O Ts HN O O 2.D 2.W Ph [Fe] R4 N - H2O O 2.X O Ts R4 trans-2.C [Fe] Ph Ts N R4 O cis-2.C Schéma 147 A chaque fois, le composé formé majoritairement lors de l'équilibre thermodynamique est le composé de configuration relative cis. Les stabilités relatives des deux diastéréoisomères cis et trans peuvent être évaluées en fonction de la position des substituants. Dans le cas des morpholines 2,6-disubstituées, le diastéréoisomère cis, qui possède les deux substituants en position équatoriale, est plus stable que le diastéréoisomère trans dont l'un des deux groupes (R2 ou styrényl) se trouve en position axiale, à cause d'interactions 1,3-diaxiales défavorables. 195 O Ph R2 6 2 H H cis-2.A favorisé [Fe] N Ts O Ph H 2 H 6 R2 N Ts ou O H R2 2 trans-2.A défavorisé 6 H N Ts Ph interactions 1,3 diaxiales Schéma 148 De la même manière, la stabilité relative des deux diastéréoisomères cis et trans des morpholines 3,5-disubstituées peut s'expliquer par la position axiale ou équatoriale des substituants sur le cycle. Cependant, il faut aussi prendre en compte les interactions stériques dues au groupe tosyle porté par l'amine. Kleinpeter et ses collaborateurs ont montré, par analyse de la diffraction de rayons X, que le groupe sulfonyle d'une morpholine N-tosylée se trouvait en position équatoriale137. Ce positionnement semble entraîner une "hyperconjugaison négative" par délocalisation des électrons du doublet π de l'azote vers l'orbitale σ* de la liaison N-S. Ainsi, cette liaison acquerrait un caractère partiel de double liaison. En conséquence, les substituants en α de l'azote ont tendance à être en position axiale pour minimiser les interactions 1,3-allyliques avec le groupe tolyle, comme cela a été supposé de nombreuses fois pour les morpholines comme pour les pipéridines 138. Les deux diastéréoisomères cis et trans peuvent être représentés comme dans le Schéma 149 où le substituant R4 prendrait la position axiale pour échapper aux contraintes stériques dues au groupe Ts. Selon la position axiale ou équatoriale du motif styrénique, la morpholine cis ou trans est formée (le même raisonnement est valable avec le groupe styrènique en position axiale, et le groupe R4 en position équatoriale ou axiale). Bien qu'il y ait une interaction 1,3-diaxiale défavorable dans la structure du diastéré isomère cis, celui-ci semble tout de même favorisé par rapport à au diastéréoisomère trans qui présente une interaction allylique. Cependant, il est envisageable que la différence d'énergie entre les deux diastéréoisomères soit plus faible que dans le cas des 2,6-morpholines. Ceci expliquerait les rapports diastéréoisomériques un peu moins bons observés dans le cas des morpholines 3,5-disubstituées que dans le cas des morpholines 2,6-disubstituées. 137 Modarresi-Alam, A. R.; Amirazizi, H. A.; Bagheri, H.; Bijanzadeh, H.-R.; Kleinpeter, E. J. Org. Chem. 2009, 74, 4740–4746. 138 Par exemple : (a) Cariou, C. A. M.; Snaith, J. S. Org Biomol Chem 2006, 4, 51–53., Toumieux, S.; Compain, P.; Martin, O. R.; Selkti, M. Org. Lett. 2006, 8, 4493–4496. (b) Matlock, J. V.; Svejstrup, T. D.; Songara, P.; Overington, S.; McGarrigle, E. M.; Aggarwal, V. K. Org. Lett. 196 interaction 1,3-diaxiale Ph Ph R4 O [Fe] O H R4 H O ou R4 N Ts N Ts N Ts cis-2.C favorisé trans-2.C défavorisé Ph interaction 1,3-allylique Schéma 149 II.3.4 Transformations ultérieures Des transformations fonctionnelles des N-Ts morpholines ont ensuite été réalisées. Ainsi une N-Ts morpholine 2,6-disubstituée a été déprotégée par coupure du groupe tosyle, en présence de magnésium en poudre dans le méthanol et sous activation par ultra-sons139, pour obtenir 2.42a avec un bon rendement de 88%. On pourra noter que le rapport diastéréoisomérique reste inchangé pendant ce processus (Schéma 150). Une séquence coupure oxydante/réduction appliquée à 2.40b a permis d'obtenir l'alcool 2.42b avec un rendement de 82% sur trois étapes. Dans ce cas, le rd n'a pas pu être mesuré à cause d'un recouvrement des signaux sur le spectre RMN 1H. H N Mg (10 équiv.) O O MeOH, ))), 1 h Ts N 88% Ph 2.42a (cis/trans = 95:5) n-C6H13 Ph 2.40b (cis/trans = 94:6) Ts N 1) OsO4 (20 mol %), NMO t-BuOH/H2O 2) NaIO4 (5 équiv.), H2O/Et2O 3) NaBH4 (3 équiv.), EtOH n-C6H13 HO O n-C6H13 2.42b 82% sur 3 étapes Schéma 150 Les morpholines 3,5-disubstituées peuvent également être déprotégée dans les mêmes conditions que précédemment (Mg/MeOH, ultrasons). Ainsi, la morpholine 2.43a a été obtenue avec un rendement de 66% et un rapport diastéréoisomérique inchangé [cis/trans = 139 Nyasse, B.; Grehn, L. , U. 1997, 11, 18. 197 91:9140] (Schéma 151). La coupure oxydante de la double liaison du motif styrènique a également été possible. Dans les mêmes conditions que précédemment (OsO4, NaIO4 puis NaBH4), le morpholinol 2.43b a été obtenu avec un rendement de 67% sur les trois étapes, et avec un rapport diastéréoisomérique identique à celui de la morpholine 2.41b de départ (cis/trans = 90:10). Ph H N Mg (10 équi v.) Ph MeOH, ))) , 1 h Ts N 66% n-C6H13 O 2.41b (cis/trans = 90:10) O 2.43 a ( cis/trans = 91:9) 1) OsO4 (20 mol %), NMO t-BuOH/H2O 2) Na IO4 (5 équiv.), H2O / Et2O 3) NaBH4 (3 équiv.), EtOH 67% sur 3 étapes n-C6H13 HO Ts N n-C6H13 O 2.43b (cis/trans = 90 :10 ) Schéma 151 II.4 RÉSUMÉ DES HÉTÉROCYCLISATIONS La formation de morpholines substituées par hétérocyclisation catalysée par FeCl3 a donc été réalisée. En présence de 10 mol % de FeCl3.6H2O dans le dichlorométhane à 50 °C, des morpholines 2,6- ou 3,5-disubstituées ont été obtenues avec de bons rendements (6090%) et de bonnes diastéréosélectivités (jusqu'à 95:5), toujours en faveur du composé de configuration relative cis. Un équilibre thermodynamique mettant en jeu la réouverture puis la fermeture de l'hétérocycle permet d'expliquer la formation majoritaire du diastéréoisomère le plus stable. Cette méthode est avantageuse car elle permet la formation de morpholines, soit par création de la liaison C-O, soit par création de la liaison C-N, sans que les conditions réactionnelles ne do être modifiées. Cependant, cette méthode, comme beaucoup d'autres précédemment rapportées dans la bibliographie, souffre de la longueur des synthèses des précurseurs de cyclisation. Dans notre cas, 5 à 6 étapes sont nécessaires, parfois avec des rendements parfois modestes. De plus, le fait de devoir synthétiser chaque substrat ne permet pas de moduler facilement les substituants 140 Mesuré par analyse GC-MS du brut réactionnel 198 présents sur le cycle et constitue un frein pour accéder à une bibliothèque de morpholines, ou pour effectuer des études de relation structure/activité. Une approche plus flexible serait donc souhaitable. Celle-ci devrait être aussi convergente que possible, et devrait mettre un point d'honneur à réduire autant que possible les déchets produits, par exemple en limitant le nombre d'étapes, en réalisant des réactions monotopes ainsi qu'en utilisant des procédés catalytiques. III Synthèse monotope de morpholines A l'heure actuelle, développer une nouvelle méthode de synthèse signifie aussi prendre en compte un certain nombre de facteurs environnementaux. L'économie d'atomes et de solvant ainsi que l'utilisation de réactifs peu toxiques et/ou peu coûteux par exemple sont des éléments importants à prendre en compte lors de la conception d'une méthode de synthèse. Pour répondre à ces exigences, de nombreuses méthodes utilisant des espèces métalliques en quantité catalytiques ont été mises au point. Ces méthodes permettent de construire de nombreux types de liaisons (C-C, C-N, C-O etc.) tout en minimisant la quantité de déchets par rapport aux méthodes utilisant des réactifs en quantité stoechiométrique. Comme nous l'avons abordé dans la partie bibliographique de ce chapitre, il existe une grande variété de méthodes pour synthétiser des morpholines utilisant des catalyseurs métalliques. Certaines d'entre elles permettent de former plusieurs liaisons dans le même pot, conduisant ainsi à des économies d'atomes, de solvants et d'argent. L'utilisation de sels de fer, non toxiques et abondants, pour l'accès à des morpholines comme présenté dans la partie précédente répond à ces problématiques environnementales. De plus, le seul sous produit de cette réaction est l'eau. Cependant les nombreuses étapes de synthèse nécessaires à l'obtention des substrats sont un frein conséquent au développement de cette méthode à plus large échelle. Une voie de synthèse plus rapide, mettant en jeu des procédés catalytiques et offrant la possibilité de faire facilement varier la substitution des substrats de départ était donc nécessaire. III.1 APPROCHE RÉTROSYNTHÉTIQUE Une nouvelle approche rétrosynthétique a été envisagée, tout en conservant la cyclisation catalysée au fer(III) comme étape clé. Le bilan de la méthode précédente montre que la difficulté majeure de la synthèse des précurseurs 2.B et 2.D est l'introduction de l'alcool allylique. L'utilisation d'un vinyloxirane 2.Y, en réaction avec un amino-alcool 2.S pourrait permettre de contourner ce problème (Schéma 152). Ainsi, les morpholines 2,6-disubstituées 2.A pourraient être obtenues à partir des amino-alcools 2.S par une séquence permettant la construction d'une liaison C-N puis d'une liaison C-O, les deux étapes étant idéalement catalysées par un complexe métallique (Schéma 152, eq. 1). Les morpholines 3,5-disubstituées 2.C seraient de la même manière formées à partir des amino-alcools 2.S' par construction d'une liaison C-O puis d'une liaison C-N (Schéma 152, eq. 2). (1) Synthèse de morpholine par construction des liaisons C-N puis C-O Ts N O Ts N [ F e] R 2 HO R1 R1 2. A [M] R2 N-allylation H O R1 Ts N HO R2 OH 2.B 2. Y 2. S (2) Synthèse de morpholine par construction des liaisons C-O puis C-N R1 Ts N R1 R2 [Fe] OR Ts HN R2 O O 2.C 2.D [M] R1 O O-allylation H Ts N R2 HO 2.Y 2.S' Schéma 152 Cette approche synthétique implique de procéder à une N- ou O-allylation chimio- et régiosélective en utilisant un vinyloxirane 2.Y comme partenaire réactionnel. L'allylation par ouverture de vinyloxiranes catalysée par des sels métalliques s'apparente à une allylation de Tsuji-T 141 lors de laquelle un intermédiaire π-allylique 2.Z se forme par addition oxydante du palladium(0) et ouverture de l'époxyde (Schéma 153). Ce complexe π-allylique, électrophile, peut ensuite réagir avec un nucléophile pour former le 141 Trost, B. M.; Fullerton, T. J. J. Am. Chem. Soc. 1973, 95, 292–294. 200 produit d'allylation sous sa forme branchée (2.AAb) ou linéaire (2.AAl). La régiosélectivité de l'addition peut varier selon le système catalytique utilisé ou selon les nucléophiles. Ces nucléophiles peuvent être des espèces carbonées142, oxygénées143 ou azotées144. O O [Pd(0)] R OH NuH R PdLn OH Nu R R Nu 2.Y 2.Z 2.AAb 2. AA l Schéma 153 Tsuji et al. ont par exemple montré qu'il était possible de réalis er une N-allylation de la pyrrolidine, en la faisant réagir avec l'octylvinyloxirane 2.44 en présence de Pd(PPh3)4 en quantité catalytique145 (Schéma 154). Le produit linéaire 2.45 possédant un alcool allylique a été isolée avec un rendement de 92%. O 7 2.44 H N Pd(PPh3)4 (5 mol %) THF, 65 °C, 12 h. 92% OH N 7 2.45 Sch éma 154 Kobayashi et al. ont pour leur part effect ué l'ouverture du vinyloxirane 2.46 par de l'acide acétique pour former le produit d'allylation 2.47 correspondant en utilisant du Pd(PPh3)4 comme catalyseur146 (Schéma 155). 142 Voir par exemple : (a) Kimura, M.; Mukai, R.; Tamaki, T.; Horino, Y.; Tamaru, Y. J. Am. Chem. Soc. 2007, 129, 4122–4123. (b) Tsuji, J.; Yuhara, M.; Minato, M.; Yamada, H.; Sato, F.; Kobayashi, Y. Tetrahedron Lett. 1988, 29, 343–346. 143 Voir par exemple, pour l'addition d'acides carboxyliques : (a) Zhang, P.; Morken, J. P. J. Am. Chem. Soc. 2009, 131, 12550–12551. (b) Tortosa, M. Angew. Chem. Int. Ed. 2011, 50, 3950–3953. Pour l'addition d'alcools : (c) Ueno, S.; Hartwig, J. F. Angew. Chem. Int. Ed. 2008, 47, 1928–1931. (d) Kim, H.; Lee, C. Org. Lett. 2002, 4, 4369–4371. 144 Voir par exemple : (a) Pettersson-Fasth, H.; Riesinger, S. W.; Baeckvall, J. E. J. Org. Chem. 1995, 60, 6091– 6096. (b)Löfstedt, J.; Pettersson-Fasth, H.; Bäckvall, J.-E. Tetrahedron 2000, 56, 2225–2230. (c) Gómez, A. M.; Pedregosa, A.; Valverde, S.; López, J. C. Chem Commun 2002, 18, 2022–2023. (d) Li, G.; Feng, X.; Du, H. Org. Biomol. Chem. 2015, 13, 5826–5830. 145 Tsuji, J.; Kataoka, H.; Kobayashi, Y. Tetrahedron Lett. 1981, 22, 2575–2578. 146 Yoshida, S.; Asano, M.; Kobayashi, Y. Tetrahedron Lett. 2005, 46, 7243–7246. 201 OH OH HO AcOH Pd(PPh3)4 (10 mol %) C5H11 O C5H11 C5H11 AcO 2.46 C5H11 2.47 Schéma 155 La formation de morpholines de façon monotope par une séquence allylation/hétérocyclisation semble donc possible. Une telle méthode offrirait l'avantage de pouvoir accéder à des morpholines diversement substituées, en se contentant de changer les substrats de départ, sans modifier les conditions réactionnelles. III.2 SYNTHÈSE DES VINYLOXIRANES ET DES AMINO-ALCOOLS III.2.1 Synthèse de vinyloxiranes Il existe de nombreuses méthodes pour synthétiser des vinyloxiranes de type 2.Y147 (Schéma 156). Trois principales stratégies ont été rapportées : l'époxydation de diène 2.AB (Méthode A), l'oléfination d'époxycarbonyles 2.AC (Méthode B), et l'homologation d'aldéhydes 2.AD ou 2.AE en époxydes (Méthode C). O Méthode A Méthode B O R1 R1 2.AB H O R1 2.Y 2.AC Méthode C H H ou O R1 O 2.AD 2. AE Schéma 156 Pour notre part, nous avons privilégié la Méthode C, car elle nous semblait la plus souple, de nombreux aldéhydes étant commercialement disponibles. La transformation d'aldéhydes en époxydes peut se faire par une réaction de type Corey-Chaykovsky. Cette réaction met en jeu un aldéhyde et un partenaire halogéné en 147 He, J.; Ling, J.; Chiu, P. Chem. Rev. 2014, 114, 8037–8128. présence d'une base et est généralement catalysée par un dérivé soufré (Schéma 157). L'addition du produit soufré sur le partenaire halogéné engendre le sulfonium 2.AF. Après déprotonation de ce sulfonium par la base présente dans le milieu, l'ylure 2.AG formé attaque l'aldéhyde pour donner la bétaïne 2.AH. L'alcoolate peut ensuite déplacer le sulfonium pour régénérer le catalyseur et aboutir à l'époxyde 2.AI souhaité. Si la réaction fonctionne bien de manière monotope, il peut parfois s'avérer utile de préformer le sulfonium pour pouvoir l'utiliser en excès. BrR1 base S Br S R1 R1 S 2.AF 2.AG H O R2 2.AE S R2 R2 O S R1 O R1 2.AI 2.AH Schéma 157 Si l'un ou l'autre des partenaires est porteur d'une double liaison, le produit obtenu est un vinyloxirane (Schéma 158). S R1 R1 Br O O R2 R2 vinyloxirane S R 2 R1 Br O O R2 R1 Schéma 158 III.2.1.1 Préparation de vinyloxiranes à partir d'un aldéhyde et d'un bromure d'allyle En suivant une procédure décrite par Tang et al.148, plusieurs vinyloxiranes ont été préparés à partir d'un aldéhyde de type 2.48 et du bromure d'allyle (Schéma 159). En présence 148 Li, K.; Deng, X.-M.; Tang, Y. Chem. Commun. 2003, 16, 2074. 203 de trois équivalents de bromure d'allyle, cinq équivalents de carbonate de potassium en poudre et 10 mol % de tétrahydrothiophène dans le t-butanol à 85 °C, les vinyloxiranes porteurs d'un motif aromatique 2.50a-c ont été synthétisés avec des rendements variant de 52% à 85%. Ils ont été obtenus à chaque fois sous la forme d'un mélange de diastéréoisomères avec des rapports cis/trans de l'ordre de 30:70. Lorsque des aldéhydes substitués par des groupes hétéroaromatiques tel que le thiophène ou la 2-chloropyridine ont été impliqués dans cette réaction, aucune conversion de l'aldéhyde n'a été observée. En revanche, l'utilisation du phénylpropanal a permis de former le vinyloxirane 2.50f substitué par une chaine alkyle avec un bon rendement de 80% et sous la forme d'un mélange équimolaire des deux diastéréoisomères. K2CO3 (5 équiv.) tétrahydrothiophène (20 mol %) O Br H R 2.48 O R t-Bu OH , 12 h, 85 ° C 2.49 2.50 (3 équiv.) O O F O MeO 2.50a (85%) cis/trans = 30:70 2.50b (83%) cis/trans = 30:70 O S 2.50d (0%) 2.50c (52%) cis/trans = 40:60 O N O Cl 2.50e ( 0%) 2.50f ( 80% ) cis /trans = 50:50 Schéma 159 Le remplacement du carbonate de potassium par de la soude aqueuse149 a permis de former le vinyloxirane 2.50d avec un bon rendement de 82% et avec un rapport cis/trans de 37:63 (Schéma 160). Par contre, le vinyloxirane porteur d'une 2-chloropyridine 2.50e n'a toujours pas été obtenu en utilisant ces conditions réactionnelles. , J.; Lamazure, D.; Minière, S.; Reboul, V.; Metzner, P. J. Org. Chem. 2002, 67, 9083–9086. 204 NaOH (2 équiv.) tétrahydrothiophène (20 mol %) O Br R H 2.48 O R t-BuOH/H2O (9:1), 12 h, t.a. 2.49 2.50 (3 équiv.) O O S Cl N 2.50e (0%) 2.50d (82%) cis/trans = 37:63 Schéma 160 L'obtention de vinyloxiranes possédant une double liaison substituée a ensuite été étudiée. Ainsi, le benzaldéhyde a été mis en réaction avec du bromobutène 2.51a (R = Me), en présence de trois équivalents de carbonate de potassium et 20 mol % de tétrahydrothiophène (Schéma 161). Malheureusement, une faible conversion du benzaldéhyde a été observée et le vinyloxirane 2.50g souhaité n'a pas pu être isolé. De même, l'utilisation du bromure de cinnamyle 2.51b (R = Ph) n'a pas permis de former l'oxirane 2.50h substitué par un groupe phényle. O Br Ph R K2CO3 (3 équiv.) tétrahydrothiophène (20 mol %) H t-BuOH, 12 h, 85 °C 2.48a Ph 2.51 O R 2.50 (3 équiv.) O O Me Ph 2.50g (0%) 2.50h (0%) Sch éma 161 Face à ces échecs, les partenaires réactionnels ont été modifiés. Il est possible d'utiliser un bromure d'alkyle et un énal 2.AJ pour obtenir les vinyloxiranes 2.54 (Schéma 162). Le substituant présent sur la double liaison de l'énal se retrouve alors sur le motif vinyle du vinyloxirane. R2 Br R1 O R1 R2 H 2.AJ O base, (R3)2S 2.50 2.AK Schéma 162 205 III.2.1.2 Préparation de vinyloxiranes à partir d'un énal et d'un bromure d'alkyle • Synthèse d'énals En plus des produits commercialement disponibles, certains énals ont été synthétisés. Une réaction de métathèse croisée entre le crotonaldéhyde et divers alcènes en présence du catalyseur de Grubbs-Hoveyda de 2nde génération (GH-II) a été utilisée (Schéma 163). Ainsi en présence de trois équivalents de crotonaldéhyde et de 5 mol % du complexe de ruthénium dans le dichlorométhane à température ambiante, trois oléfines 2.AL ont été transformées en énals 2.52 avec de bons rendements de l'ordre de 80%. O R CH2Cl2, t.a., 12 h H 2.AL O GH-II (5 mol %) 2.52 crotonaldehyde (3 équiv.) O HO 8 O H Bn2N 2.52a (85%) O H 2.52b (75%) Mes N GH-II = H R Ph3Si H 2.52c (86%) N Mes Cl Ru Cl O Schéma 163 • Synthèse des oxiranes Pour accéder aux vinyloxiranes dont la double est substituée par un phényle, le cinnamaldéhyde 2.52d et le bromure de benzyle 2.53 ont été traités par 20 mol % de tétrahydrothiophène, trois équivalents de carbonate de potassium dans le t-butanol à reflux. Cependant, la formation du vinyloxirane souhaité n'a pas été observée. L'examen du spectre RMN 1H du brut réactionnel montre un signal à 2,40 ppm qui peut correspondre au déplacement des protons méthylique d'un groupe tolyle. Ceci laisse penser que l'ylure 2.55 intermédiairement formé se serait transformé selon un réarrangement sigmatropique [2+3] de 206 type Sommelet-Hauser150 (Schéma 164). En effet, après déprotonation du sulfonium 2.54, l'ylure 2.55 peut exister sous deux formes en équilibre, 2.55a et 2.55b. L'intermédiaire 2.55b pourrait se réarranger pour donner 2.56 et finalement aboutir au 2-tolyltétrahydrothiophène 2.57 après réaromatisation. O Br K 2 CO 3 (3 é quiv.) tétrahydro thi oph ène (20 mol %) H O t - BuOH , 12 h, 85 ° C 2.53 2.52d 2.50h S S Br base S S S S -HBr 2.54 2.55a 2.56 2.55b 2.57 Schéma 164 Pour pallier cette réaction parasite, un excès de sulfonium 2.54 serait donc nécessaire. Ce sulfonium est facilement synthétisé en mélangeant le tétrahydrothi phène et le bromure de benzyle dans l'acétone (Schéma 165). Le précipité formé a été filtré pour obtenir 2.54 avec un rendement de 71%151. Br S Acétone, 19 h S Br 71% 2.54 Schéma 165 Lorsque deux équivalents de ce sulfonium ont été mis en réaction avec du cinnamaldéhyde et deux équivalents de 1,8-diazabicyclo[5.4.0]undéc-7-ène (DBU) dans le dichlorométhane151, le vinyloxirane 2.50h dont la double liaison est substituée par un phényle a été isolé avec un rendement de 65%, majoritairement sous la forme du diastéréoisomère trans (cis/trans = 4:96, Schéma 166). En utilisant le crotonaldéhyde comme énal de départ, le 150 151 Kantor, S. W.; Hauser, C. R. J. Am. Chem. Soc. 1951, 73, 4122–4131. Phillips, D. J.; Kean, J. L.; Graham, A. E. Tetrahedron 2013, 69, 6196–6202. 207 vinyloxirane 2.50i a été isolé avec un faible rendement de 14%. En changeant de base et en optant pour le 1,5,7-triazabicyclo[4.4.0]déc-5-ène (TBD), le rendement en 2.50i a été augmenté jusqu'à 46%. A partir de l'hexadiénal, le vinyloxirane 2.50j a été obtenu avec un rendement de 73% et un rapport cis/trans de 13:87. Des vinyloxiranes porteurs de groupes fonctionnels comportant des hétéroatomes ont également été obtenus. A partir de l'hydroxyundécènal 2.52a, le vinyl oxirane 2.50k a été obtenu avec un rendement de 51% sans qu'il soit nécessaire de protéger la fonction alcool. Le vinyloxirane 2.50l comportant une amine dibenzylée a été formé à partir de l'énal 2.52b avec un rendement de 55%. Malheureusement, le groupe triphénylsilane n'est pas compatible avec les conditions basiques de la réaction puisque le oxirane 2.50m correspondant n'a pas pu être obtenu : des traces du vinyloxirane 2.50i ont été observées dans l'analyse du spectre RMN 1H du brut réactionnel, laissant penser qu'une réaction parasite de désilylation a lieu en milieu basique. O S Br H O base (2 équiv.) R R CH2Cl2, 12 h, t.a. 2.52d 2.54 (2 équiv.) 2.50 O O O Me 2.50h (DBU : 65%) (cis/trans = 4:96) Me 2.50i 2.50j (DBU : 14%) (TBD : 46%) (cis/trans = n.d.) (TBD : 73%) (cis/trans = 13:87) O O OH O NBn2 SiPh3 8 2.50k (TBD : 51%) (cis/trans = 12:88) 2.50l (TBD : 55%) (cis/trans = 20:80) 2.50m (TBD : 0%) Schéma 166 III.2.2 Synthèse d'amino-alcools Divers amino-alcools ont été préparés pour servir de partenaires réactionnels aux vinyloxiranes précédemment synthétisés. Tout d'abord, trois amino-alcools différant les uns des autres par la taille de leur chaine carbonées ont été N-tosylés (Schéma 167). Ainsi, en 208 partant de l'amino-éthanol (n =1) et de l'amino-propanol (n = 2), les amino-alcools N-tosylés 2.58a et 2.58b correspondants ont été obtenus de manière quantitative. Dans les mêmes conditions, l'amino-butanol (n = 3) a été N-tosylé pour former 2.58c avec un rendement de 65%. TsCl (1,2 équiv.) Et3N (2 équiv.) H2N HO Ts HN HO 2.58a, n = 1 (quant.) n CH2Cl2, t.a. Ts HN HO 2.58b, n = 2 (quant.) Ts HN HO 2.58 n Ts HN HO 2.58c, n = 3 (65%) Schéma 167 Par la suite, des 1,2-amino-alcools diversement substitués, en α de l'alcool ou en α de l'azote ont été synthétisés. III.2.2.1 Préparation de 1,2-amino-alcools secondaires et tertiaires La préparation des 1,2-amino-alcools substitués en α de l'acool a été envisagée selon une séquence en trois étapes : réaction de Henry/réduction du NO2/tosylation de l'amine à partir de dérivés carbonylés commerciaux 2.59 (Schéma 168). En présence de 10 mol % de t-BuOK, le nitrométhane introduit en excès s'additionne sur le dérivé carbonylé pour fournir le nitroalcool 2.60 correspondant, qui a été immédiatement réduit par hydrogénation catalytique (Pd/C, 80 °C) en utilisant un système H-Cube®. L'amine 2.61 résultante de l'étape de réduction a ensuite été N-tosylée pour fournir l'amino-alcool 2.62 souhaité. Dans ces conditions, trois amino-alcools substitués par des groupes alkyles ont été synthétisés avec des rendements de 10% à 20% sur les trois étapes. 209 MeNO2 (2 équiv.) t-BuOK (0,1 équiv.) R' O O2N R THF / t-BuOH, t.a. H2 R' R Pd/C, H-Cube EtOH, 80 °C HO H2N HO 2.60 2.59 Et3N (1,2 équiv.) CH2Cl2, t.a. 2.61 Ts HN HO TsCl (1,2 équiv.) R' R n-C5H11 2.62a (19%) Ts HN HO R' R 2.62 Ts HN Ts HN HO HO 2.62c (10 2.62b (20%) Schéma 168 L'acétate de 1-cyanoallyl 2.63 a quant à lui été réduit en présence de LiAlH4 puis l'amine résultante a été tosylée pour donner l ' alcool allylique 2.62d avec un rendement de 18%. N O Me O 2.63 1) LiAlH4 (4 équiv.) TH F , 0 °C à t . a. Ts HN 2) TsCl ( 1,1 é qui v.) Et3N (1.2 é quiv .) CH 2 Cl 2 , t . a . HO 2.62d 18% Schéma 169 Finalement, le 2-amino-phényléthanol 2.64 commercialement disponible a été simplement N-tosylé pour fournir 2.62e avec un rendement de 54%. H2N TsCl (1,1 équiv.) Ts HN HO Et3N (1.2 équiv.) HO 2.64 CH2Cl2, t.a. 54% 2.62e Schéma 170 III.2.2.2 Préparation de 1,2-amino-alcools substitués en α de l'azote De manière similaire aux amino-alcools 2.26 et 2.27 synthétisés précédemment (Schéma 131, page 180), l'amino-alcool 2.63a portant un groupe méthylbenzyloxyle a été préparé par réduction de l'acide puis N-tosylation de l'acide aminé correspondant (Schéma 171). L'amino-alcool 2.63a a été obtenu avec un rendement de 39% sur les deux étapes. 210 H2N O OBn OH LiAlH4 (3 équiv.) THF, 0 °C à t.a. H2N OBn TsCl (1,1 équiv.) Et3N (2.5 équiv.) CH2Cl2, t.a. HO Ts HN OBn HO 39% (2 étapes) 2.63a Sch éma 171 A partir de produits commercialement disponibles, les amino-alcools 2.63b et 2.63c substitués en α de l'azote par un groupe éthyle ou phényle respectivement ont été synthétisés par N-tosylation et ont été isolés, respectivement, avec des rendements de 78% et 59% (Schéma 172). L'amino-alcool 2.63d porteur d'une fonction ester a été formé à partir de l'ester méthylique de la sérine et isolé avec un rendement de 59%. H2N R HO TsCl (1,2 équiv.) Et3N (2 équiv.) CH2Cl2, t.a. Ts HN R HO 2.63 Ts HN Ts HN Ts HN HO HO HO 2.63b (78%) 2.63c (59%) COOMe 2.63d (59%) Schéma 172 III.2.2.3 Préparation de 1,2-amino-alcools disubstitués Pour obtenir des morpholines polysubstitués, des alcools portant deux substituants ont été synthétisés. Le bicycle 2.65a a été préparé par N-tosylation du (1R,2S)-1-amino-2-indanol commercial 2.64 avec un rendement de 54%. H2N (R) HO (S) TsCl (1,2 équiv.) Et3N (2 équiv.) CH2Cl2, t.a. 2.64 54% Ts HN HO 2.65a Schéma 173 Un autre amino-alcool disubstitué a été synthétisé à partir du 2,3-cis-époxybutane 2.66152. En solution dans l'ammoniaque pendant trois jours, l'époxyde a été transformé en 152 Bruenker, H.-G.; Adam, W. J. Am. Chem. Soc. 1995, 117, 3976–3982. 211 1,2-diméthylamino-alcool qui a ensuite été protégé sous forme de tosylamide pour fournir 2.65b avec un rendement de 29% sur les deux étapes (Schéma 174). Me NH4OH O Me 3 jours, t.a. H2N Me HO Me T sCl (1,2 équiv.) Et3N (2 équiv.) CH2Cl2, t.a . 2.66 29% sur deux étapes T s HN Me HO Me 2.65b Schéma 174 III.3 SYNTHÈSE DE MORPHOLINES PAR LA SÉQUENCE ALLYLATION/HÉTÉROCYCLISATION La formation de morpholines par une séquence réactionnelle monotope allylation de Tsuij-Trost/hétérocyclisation a ensuite été étudiée. Cette séquence permettrait de synthétiser les morpholines 2.C par construction de la liaison C-O (O-allylation) puis de la liaison C-N [hétérocyclisation] (Schéma 175, eq. 1). En adaptant les conditions réactionnelles, la séquence C-N (N-allylation), C-O (hétérocyclisation) serait également envisageable pour former les morpholines 2.A (Schéma 175, eq. 2). De plus, la modularité de ces séquences pourrait permettre d'obtenir des morpholines diversement substituées. (1) Formation de liaison C-O puis C -N R 1 R1 Ts HN R4 HO R2 O R3 Ts HN R4 [M]cat. O-allylation R3 O 2.S 2.Y R1 OH [Fe]cat. R3 R2 Ts N R4 O 2 2.C 2.D (2) Formation de liaison C-N puis C-O R3 Ts HN R4 HO R2 O R1 2.Y R3 [M]cat. N-allylation R1 Ts N R4 HO R2 OH 2.S 2.B R3 [Fe]cat. Ts N R4 O R2 R1 2.A Schéma 175 212 III.3.1 Séquence monotope O -Allylation/Hété ro cycli sation . A ce jour, peu de réactions d' ouverture régiosélective en position C4 de vinyloxiranes par des alcools aliphatiques ont été rapportées dans la bibliographie. Ceci peut être en partie expliquée par la faible nucléophilie des alcools. On peut néanmoins citer les récents travaux de McDonald et Setterholm qui ont développé la synthèse stéréosélective de pyranes par ouverture intramoléculaire de vinyloxiranes par un hydroxyle (Schéma 176)153. HO OTBDPS Pd(PPh3)4 (5 mol %) P(O-iPr)3 (30 mol %) Ph2 P ( O )OH (10 mol %) O OTBDPS CH2Cl2 O Me HO Me 84% 2.67 2.68 (rd = 88:12 ) Schéma 176 Di-Bussolo, Cro ti et al. ont par ailleurs montré que, en milieu acide, un vinyloxirane dérivé du cyclohexène pouvait être attaqué par le méthanol pour former un mélange équimolaire des alcools allyliques 2.70a et b (Sch éma 177 ). MeOH (6 équiv.), APTS BnO CH2Cl2 O BnO OMe HO HO 2.69 BnO OH 2.70a (47%) 2.70b (47%) Schéma 177 On peut noter que les réactions de O-allylation d'acides carboxyliques ou de phénols sont plus courantes154. Dans ces cas là, le véritable nucléophile est le carboxylate (ou le phénolate) formé par déprotonation de l'acide (ou du phénol) par l'alcoolate formé au cours de l'ouverture du l'oxirane. Dans notre cas, l'allylation de l'alcool d'un amino-ethanol nécessiterait tout d'abord de désactiver l'amine en la protégeant, par exemple, sous forme de carbamate155. 153 Setterholm, N. A.; McDonald, F. E. J. Org. Chem. 2018, 83, 6259–6274. Voir par exemple , B ASF AG, Process for the preparation of butenediol monocarboxylate, DE4429690 ; Zhang, P.; Morken, J. P. J. Am. Chem. Soc. 2009, 131, 12550–12551.,Kobayashi, Y.; Yoshida, S.; Asano, M.; Takeuchi, A.; Acharya, H. P. J. Org. Chem. 2007, 72, 1707 – 1716 155 On peut relever qu'un amino-éthanol N-tosylé a été sélectivement O-allylé en utilisant un vinylcarbonate comme partenaire réactionnel. Cependant la régiosélectivité est l'inverse de celle recherchée ici. Khan , A . ; Khan, S.; Khan, I.; Zhao, C.; Mao, Y .; Chen , Y .; Zhang, Y . J . J. Am. Chem. Soc. 2017, 139, 10733–10741. 154 213 Ainsi le N-Boc amino-éthanol 2.71 a été mis en réaction avec le vinyloxirane 2.50a en présence de Pd(PPh3)4 comme catalyseur dans le dichlorométhane. Cependant, aucune conversion de 'amino-alcool n'a été observée (Schéma 178). Lorsque le dimère [Pd(allyl)Cl]2 a été utilisé comme source de Pd(0), dans le THF à reflux156, le produit 2.73 résultant de la O-allylation puis d'une seconde allylation de l'alcool libéré par l'ouverture de l'oxirane a été obtenu avec un rendement de 25%, mais le produit d'allylation souhaité n'a pas été observé. Ph Boc HN HO CH2Cl2 Ph 2.71 Boc HN Pd(PPh3)4 (5 mol %) O OH O 2.72 2.50a OH Ph Boc HN [Pd(allyl)Cl2] (5 mol %) O Ph Ph 2.71 Boc HN THF, 65 °C HO O O 2.50a 25% 2.73 Schéma 178 La même réaction a ensuite été appliquée à la N-Boc glycine 2.74. Cependant, en utilisant le Pd(PPh3)4 comme catalyseur, en présence ou non de K2CO3, le produit de O-allylation 2.75 n'a pas été détecté (Schéma 179). Ph Boc HN HO 2.74 O O Ph 2.50a Pd(PPh3)4 (5 mol %) K2CO3 (0 ou 1,2 équiv.) CH2Cl2 OH Boc HN O O 2.75 Schéma 179 Finalement, pour vérifier si le NH du carbamate était le facteur limitant de la réaction d'allylation, la glycine N-Ts, N-Boc 2.78 a été synthétisée à partir de l'ester méthylique de la glycine 2.76 avec un rendement de 39% sur deux étapes. 156 Zumpe, F. L. Synthesis 1999, 1785–1791. 214 H2N O Me 2.76 1/ TsCl, K2CO3,MeCN Ts 2/ Boc2O, DIPEA DMAP, CH2Cl2 O Boc N LiOH O O Me 2 .77 66% Ts H2O / MeOH Boc N HO 59% O 2.78 Schéma 180 Cet acide aminé N,N-diprotégé 2.78 a ensuite été mis en réaction avec le vinyloxirane. En présence du complexe de Pd(0) et de triéthylamine, le produit d'allylation 2.79 a été obtenu avec un faible rendement de 13% (Schéma 181). Ts Ph Boc N HO Pd(PPh3)4 (5 mol %) O O 2.78 Ph OH Ts N Boc Et3N (1,2 équiv.) CH2Cl2 O 13% 2.79 2.50a O Schéma 181 Il a été montré dans la bibliographie que le trichlorure de fer pouvait permettre la monodéprotection sélective d'amines diprotégées de type N-PG, N-Boc par coupure du groupe Boc157. A température ambiante et en présence de 20 mol % de FeCl3 dans le dichlorométhane diverses amines RNHPG ont ainsi été formées. Nous avons alors envisagé la possibilité de déprotéger l'adduit 2.79 pour libérer l'amine tosylée, pour accéder à la morpholine de façon monotope. L'amino-ester 2.79 a donc été traité par 1 équivalent de FeCl3.6H2O, mais la formation de la morpholinone 2.80 n'a pas été observée, bien que le groupe N-Boc ne soit plus visible lors de l'analyse des spectres RMN 1H. (Schéma 182). Ph OH Ts N Boc O O FeCl3.6H2O (1 équiv.) Ph CH2Cl2 Ts N O 2.79 O 2.80 OH Ts N H O Ph O 2.81 Schéma 182 Nous nous sommes alors tournés vers l'allylation de composés phénoliques. En effet, à partir du 2-aminophénol, la séquence O-allylation/hétérocyclisation pourrait mener à des benzoxazines. Le N-Boc 2-aminophénol 2.82 a donc été mis en réaction avec le vinyloxirane 2.50a en présence de Pd(PPh3)4 dans le THF au reflux (Schéma 183). pendant aucune conversion de l'amino-alcool n'a été observée. Ph Boc HN OH THF, 65 °C HO 2.82 Boc HN Pd(PPh3)4 (5 mol %) O O Ph 2.50a 2.83 Schéma 183 Pour vérifier l'impact de la protection de l'amine, l'aniline protégée sous la forme d'un phthalimide 2.84 a été testé dans les conditions précédentes (Schéma 184). Aucune conversion de 2.84 n'a été obtenue. L'encombrement stérique autour du phénol pourrait être invoquée pour expliquer cette absence de réactivité. O N O HO 2.84 Ph O OH NPhth Pd(PPh3)4 (5 mol %) Ph 2.50a THF, 65 °C O 2.85 Schéma 184 Face à ces échecs, les essais de formation de morpholines par une séquence O-allylation/hétérocyclisation n'ont pas été poursuivis. Nous nous sommes alors intéressés à la séquence N-allylation/hétérocycliation. III.3.2 Séquence monotope N-allylation/hétérocycli sation . Dans sa version originelle, ainsi que dans la plupart des méthodes développées, la réaction de Tsuji-Trost est catalysée par un complexe métallique de Pd(0). Depuis lors, de nombreuses variantes ont été décrites, et d'autres métaux se sont révélés capables de catalyser 216 cette réaction. On peut notamment citer l'iridium158, le titane159, ou encore le cobalt160. De manière intéressante, l'utilisation de complexes de fer(0) a également été rapportée pour réaliser des réactions d'allylation par les groupes de Roustan, de Nakanashi et plus récemment de Plietker161. L'utilisation de ce métal peu toxique et peu onéreux a été envisagée pour la synthèse du précurseur de cyclisation 2.B. Cependant, nous n'avons pas été capables de reproduire les travaux de Plietker et nous avons finalement opté pour une catalyse à base de palladium. III.3.2.1 N-Allylation de l'amino-éthanol catalysée par le Pd(0) Le N-Ts amino-éthanol 2.58a a été mis en réaction avec le vinyloxirane 2.50a en présence de 10 mol % de Pd(PPh3)4 dans le THF (Schéma 185). Le produit de N-allylation a alors été obtenu avec un rendement de 70%. On notera que l'ouverture du vinyloxirane s'effectue de manière totalement régio- et chimio-sélective puisque 2.86 est le seul produit observé par analyse du spectre RMN 1H du brut réactionnel. Par ailleurs, la mesure des constantes de couplage des protons oléfiniques (3JH-H = 15,5 Hz) montre que la double liaison de l'alcool allylique est de configuration (E). Ainsi on peut supposer, comme l'ont proposé Hayashi et ses collaborateurs, que l'attaque nucléophile de l'amine tosylée est plus rapide que l'équilibre syn/anti du complexe π-allylique 2.87 intermédiairement formé. Ceci suppose que le π-allyle de palladium syn-2.87 est exclusivement formé à partir du vinyloxirane 2.50a. En revanche, le fait que l'époxyde soit introduit sous la forme d'un mélange cis/trans ne semble pas avoir d'effet sur le déroulé de la réaction. 158 Leitner, A.; Shu, C.; Hartwig, J. F. Org. Lett. 2005, 7, 1093–1096. Walker, W. K.; Anderson, D. L.; Stokes, R. W.; Smith, S. J.; Michaelis, D. J. Org. Lett. 2015, 17, 752–755. 160 Nayyar, N. K.; Madhava Reddy, M.; Iqbal, J. Tetrahedron Lett. 1991, 32, 6965–6968., Qian, X.; Auffrant, A.; Felouat, A.; Gosmini, C. Angew. Chem. Int. Ed. 2011, 50, 10402–10405. 161 Roustan, J. L. A.; Houlihan, F. Can. J. Chem. 1979, 57, 2790–2791., Itoh, K.; Otsuji, Y.; Nakanishi, S. Tetrahedron Lett. 1995, 36, 5211–5214., Plietker, B. Angew. Chem. Int. Ed. 2006, 45, 1469–1473. 159 217 O Ts HN HO 2.50a Ts N Pd ( PP h3) 4 (10 mol %) HO THF, t.a., 1 h Ph 70% 2.58a OH 2.86 Pd(Ln )+ O rapide syn -2.87 lent O Pd(Ln)+ anti-2.87 Schéma 185 Après s'être assuré de la faisabilité de la N-allylation de l'amino-éthanol, l'enchainement des deux réactions allylation/hétérocyclisation a été étudié. III.3.2.2 Optimisation de la séquence monotope allylation/hétérocyclisation En partant des conditions établies précédemment pour la réaction de N-allylation de 2.58a, le vinyloxirane 2.54a (1.3 équiv.) a été mis en réaction avec l'amino-éthanol 2.58a en présence de 10 mol % de Pd(PPh3)4 dans le THF. Après 1 h, l'adduit de Tsuji-Trost a été formé et une conversion totale de l'amino-alcool a été observée. Suite à cette transformation, 10 mol % de FeCl3.6H2O ont été rajoutés au milieu réactionnel. Malheureusement, aucune conversion de 2.86 n'a été observée (Tableau 28, entrée 1). En augmentant la quantité de fer jusqu'à un équivalent, la morpholine 2.37a a été formée à hauteur de 10% (Tableau 28, entrée 2). Cette faible conversion de l'intermédiaire 2.86 pourrait être la conséquence d'une désactivation du FeCl3 par le THF. En effet, en remplaçant le THF par le dichlorométhane, la réaction de Tsuji-Trost fonctionne toujours très bien avec une conversion totale de l'amino-alcool en 1 h, et lorsque 10 mol % de FeCl3.6H2O ont été ajoutés à la réaction, une conversion de 50% de l'alcool allylique 2.86 en morpholine 2.37a a été observée (Tableau 28, entrée 3). La faible activité catalytique du complexe de fer pourrait également s'expliquer par 218 la formation du complexe FeCl3(R)2 (R = PPh3 ou OPPh3)162 qui est un acide de Lewis plus faible que FeCl3. En diminuant la quantité de Pd(PPh3)4, la quantité de triphénylphosphine présente dans le milieu serait plus faible et, par conséquent, la quantité de complexe de fer(III actif serait plus importante. En abaissant la quantité de Pd(0) à 1 mol %, 12 h ont été nécessaires pour obtenir la formation de l'intermédiaire 2.86. Après ajout de 10 mol % de Fe(III), une conversion totale de l'alcool allylique intermédiaire a été observée et la morpholine 2.37a a été isolée avec un rendement de 81% (Tableau 28, entrée 5). Pour comparaison, lors de l'approche linéaire décrite dans la partie précédente, cette morpholine avait été obtenue avec un rendement de 80% mais la synthèse du précurseur 2.86 avait nécessité quatre étapes. On peut noter qu'en dessous de 1 mol % de Pd(0), les résultats de la réaction d'allylation deviennent peu reproductibles. De même, l'utilisation d'autres complexes de Pd(0) n'a pas mené à une amélioration des résultats. Tableau 28 O Ts HN HO Ts N [Pd(0)] (x mol %) solvant, t.a., t h HO Ph (1,3 équiv.) 2.50a 2.58a FeCl3.6H2O (y mol %) 1 h, t.a. Ts N O Ph OH 2.86 2.37a Entrée [Pd] (x mol %) Solvant t τ (2.58a) [Fe] (y mol %) τ (2.86) 1 Pd(PPh3)4 (10) THF 1h 100 10 0 2 Pd(PPh3)4 (10) THF 1h 100 100 10 3 Pd(PPh3)4 (10) CH2Cl2 1h 100 10 50 4 Pd(PPh3)4 (1) CH2Cl2 12 h 100 10 100 (81)[a] 5 Pd(PPh3)4 (0,5) Pd2(dba)3 (1) PPh3 (2) PdCl2 (1) PPh3 (2) CH2Cl2 24 h 100[b] - - CH2Cl2 24 h 92 - - CH2Cl2 3h 0 - - 6 7 [a] Rendement isolé entre parenthèses. [b] Non reproductible III.3.2.3 Formation de morpholines mono-substituées Avec ces conditions optimisées [Pd(PPh3)4 (1 mol %), 12 h, t.a. puis FeCl3.6H2O (10 mol %), 1 h, t.a.], l'influence du substituant présent sur le vinyloxirane sur la formation des morpholines a été étudiée. Lorsque le phényle de l'oxirane est substitué par un groupe méthoxy en para la morpholine 2.88a a été formée avec un bon rendement de 81% (Schéma 186). De même, lorsqu'un atome de fluor se trouve en position ortho sur le noyau aromatique, la morpholine 2.88b a été isolée avec un rendement de 85%. On peut noter qu'un groupe thiophène est également compatible avec les conditions réactionnelles, la morpholine correspondante 2.88c ayant été obtenue avec un rendement de 82%. De manière intéressante, on peut noter qu'un vinyloxirane portant un groupe alkyle peut être utilisé de l'étape de N-allylation. Cependant, la cyclisation n'a pas eu lieu à t.a. et un chauffage du milieu réactionnel à 50 °C pendant 1 h a été nécessaire pour former la morpholine 2.88d avec un excellent rendement de 93%. O R (1,3 équiv.) 2.50 Ts HN 1/ Pd(PPh3)4 (1 mol %) CH2Cl2, t.a., 12 h. HO 2/ FeCl3.6H2O (10 mol %) t.a., 1 h. Ts N R O 2.58a 2.88 Ts N F O O O 2.88a (81%) S Ts N 2.88b (85%) Ts N Ts N O O 2.88c (82%) 2.88d (93%) cyclisation à 50 °C Schéma 186 III.3.2.4 Synthèse de morpholines poly-substituées : optimisation des conditions réactionnelles Pour évaluer la diastéréosélectivité de la réaction, l'amino-alcool secondaire 2.61e possédant un groupe phényle a été choisi comme partenaire réactionnel du vinyloxirane 2.50a. Lorsque les deux substrats ont été mis en réaction dans les conditions précédemment optimisées [Pd(PPh3)4 (1 mol %), 12 h, t.a. puis FeCl3.6H2O (10 mol %), 1 h, t.a.] la 220 morpholine disubstituée en C2 et C6 2.37d a été formée, mais un rapport diastéréoisomérique cis/trans de seulement 55:45 a été mesuré (Tableau 29, entrée 1). En augmentant la température du milieu lors de l'étape de cyclisation (50 °C pendant 2 h), le rapport diastéréoisomérique a évolué jusqu'à 66:34 en faveur du composé de configuration relative cis (Tableau 29, entrée 2). La désactivation d'une partie du catalyseur de fer(III) par la triphényphosphine présente dans le milieu, comme cela a été déjà invoqué précédemment, est probablement la cause de ce rapport diastéréoisomérique relativement faible. Ainsi, en augmentant la charge catalytique en FeCl3.6H2O à 15 mol %, le composé cis est devenu majoritaire (79:21), mais c'est avec 20 mol % de Fe(III) qu'un excellent rapport diastéréoisomérique de 95:5 a été atteint, après 4 h de chauffage à 50 °C. La morpholine 2.37d alors été isolée avec un bon rendement de 89% (Tableau 29, entrée 4). Tableau 29 O Ph (1,3 équiv.) 2.50a Ts HN 1/ Pd(PPh3)4 (1 mol %) CH2Cl2, t.a., 12 h. HO 2/ FeCl3.6H2O (x mol %) T, t Ts N Ph O 2.61e 2.37d Entrée Fe(III) (x mol %) T (°C) t (h) Rdt (%) rd (cis/trans) [a] 1 10 t.a. 2 - 55:45 2 10 50 2 - 66:34 3 15 50 2 - 79:21 4 20 50 4 89 95:5 1 [a] Le rapport cis/trans a été mesuré par analyse RMN H du brut réactionnel. Les deux diastéréoisomères ont été identifiés par analyse NOESY. Ce résultat se compare également très favorablement à celui obtenu lors de la cyclisation de l'alcool allylique 2.21d. La morpholine avait été obtenue avec le même rendement de 89% et avec un rapport cis/trans de 95:5. Cependant, le précurseur 2.21d avait été synthétisé en cinq étapes avec un faible rendement global de 22% (Schéma 187). 221 Méthode linéaire Ts N H2N MeO Ts N 5 étapes OMe FeCl3.6H2O (10 mol %) HO 22% Ph O CH2Cl2, 50 °C, 2 h Ph OH 2.21d 89% Méthode monotope O Ph Ts N Ts HN 1/ Pd(PPh3)4 (1 mol %) CH2Cl2, t.a., 12 h.
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c) Fonction des récepteurs kaïnate dans l'hippocampe Les souris knockout pour la sous-unité GluK2 présentent une altération de la mémoire de peur conditionnée (Ko et al., 2005), mais ne présentent pas de déficit majeur de comportement lors de batterie classique incluant le labyrinthe aquatique de Morris (Mulle et al., 1998). - 67 - Introduction! Les récepteurs kaïnate dans les cellules pyramidales de CA3 Les rKA peuvent être localisés dans les compartiments pré- et post-synaptiques des synapses formées sur les cellules pyramidales de CA3. Dans ces neurones, les rKA post-synaptiques sont exclusivement localisés à la synapse formée entre les fibres moussues et les cellules pyramidales de CA3 (Vignes et Collingridge, 1997 ; Castillo et al., 1997 ; Mulle et al., 1998). A cette synapse, il est possible d'isoler pharmacologiquement des courants médiés par les rKA après stimulation électrique de fibres moussues en utilisant un antagoniste spécifique des rAMPA n'affectant par les rKA comme le GYKI 53655. Ces courants médiés par les rKA sont de faible amplitude en comparaison des courants médiés par les rAMPA, et présentent une cinétique de décroissance lente. Ces courants sont totalement absents chez les souris knockout pour la sous-unité GluK2 (Mulle et al., 1998). En l'absence de la sous-unité GluK2, les sous-unité GluK4 et GluK5 ne peuvent pas s'assembler pour former des rKA fonctionnels. Néanmoins les sous-unités GluK4 et GluK5 jouent elles aussi un rôle déterminant dans la fonctionnalité des rKA à cette synapse. En effet, en absence de la sous-unité GluK5, les courants médiés par les rKA présentent une cinétique de décroissance plus rapide que chez les souris c ontrôle (Contractor et al., 2003). Chez les souris knockout pour la sous-unité GluK4, les courants médiés par les rKA sont également altérés et présentent une amplitude plus faible et une cinétique de décroissance plus lente (Fernandes et al., 2009). Finalement, chez les souris double-knockout pour les sous-unités GluK4 et GluK5, les courants médiés par les rKA sont totalement abolis (Fernandes et al., 2009). Il est toutefois intéressant de noter qu'en l'absence des sous-unités GluK4 et GluK5, bien que les courants médiés par les rKA soient abolis, la sous-unité GluK2 est toujours exprimée à la membrane (Fernandes et al., 2009). Néanmoins, le nombre de rKA à la synapse est altéré dans les compartiments préet post-synaptiques. Ces résultats suggèrent que les sous-unités GluK4 et GluK5 sont nécessaires à la localisation synaptique des rKA à la synapse FM-CA3. Les rKA post-synaptiques possèdent également une fonction métabotropique à cette synapse. En effet, l'activation des rKA post-synaptiques à la synapse FM-CA3 entraine une inhibition des courants sAHP et mAHP (Fisahn et al., 2004 ; Chamberlain et al., 2013 ; Ruiz et al., 2005). Cette fonction métabotropique implique des canaux potassiques importants dans la phase de post-hyperpolarisation (afterhyperpolarization : AHP) des potentiels d'action (PA). Les courants sAHP (slow AHP) suivent de brèves bouffées de potentiels d'action et sont générés par des courants potassiques dépendants du Ca2+. Ces courants peuvent se maintenir plusieurs secondes et leur activation est dépendante de la fréquence et du nombre de PA de la bouffée. Ils agissent ainsi comme un mécanisme de feed-back négatif pour limiter la genèse répétée de bouffées de PA durant une hyperexcitabilité de la cellule (Traub et al., 1993). Ces courants peuvent être inhibés par l'activation de récepteurs couplés aux protéines G (RCPG) après la libération de neurotransmetteurs comme la noradrénaline, l'acétylcholine ou le glutamate (Nicoll, 1988). Cette fonction métabotropique est indépendante de la fonction ionotropique des rKA puisque l'utilisation d'un antagoniste spécifique pour les rKA hétéromériques postsynaptiques, l'UBP 310, n'altère pas cette fonction (Pinheiro et al., 2013). Cette inhibition des courants AHP est dépendante des rKA contenant la sous-unité GluK2 (Fisahn et al., 2005 ; Ruiz et al., 2005 ; Fernandes et al., 2009). Mais la participation des sous-unités GluK4 et GluK5 reste encore discutée (Ruiz et al., ; Fernandez et al., 2009). Cette inhibition des courants sAHP est altérée chez les souris KO pour la protéine N ETO 1, sous - unité auxiliaire des rKA à la synapse FM-CA3 (Wyeth et al., 2014). De plus, la DLT des r KA, entraine une diminution de l' inhibition des courants sAHP par les rKA (Cham ber lain et al., 2013 ). Ce mécanisme de plasticité synaptique a alors pour conséquence fonctionnelle la régulation de l'excitabilité cellulaire dans CA3. Ainsi de courts trains de stimulations de cellules granulaires entrainent, d'une part, une dépolarisation de la membrane post-synaptique, et d'autre part une augmentation de l'excitabilité neuronale pendant plusieurs secondes. La fonction métabotropique des rKA intervient également dans la modulation de l'excitabilité des interneurones de l'hippocampe lors des 2 premières semaines de vie postnatale. En effet, durant cette période, les rKA exprimés dans les interneurones de CA3 sont activés de manière tonique par le glutamate ambiant, conduisant à une inhibition tonique des courants AHP, et à une augmentation de l'excitabilité de ces interneurones - 69 - Introduction (Segerstrale et al., 2010). Cette modulation fait intervenir des rKA composés de la sousunité GluK1. Aux synapses formées sur les cellules pyramidales de CA3, les rKA sont également présents dans les boutons pré-synaptiques où ils modulent la libération de glutamate en agissant comme des autorécepteurs. Les rKA peuvent être activés par un évènement unique de libération de glutamate entrainant une facilitation de la transmission synaptique en moins de 10 ms (Contractor et al., 2001 ; Lauri et al., 2001 ; Schmitz al., 2001 ; Pinheiro et al., 2007). A la synapse FM-CA3, les sous-unités GluK2, GluK3, GluK4 et GluK5 sont des sous-unités des rKA critiques pour la modulation de l'excitabilité axonale et des plasticités pré-synaptiques à court-terme (Contractor et al., 2000, 2001, 2003 ; Pinheiro et al., 2007 ; Fernandes et al., 2009). En effet, les souris knockout pour la sous-unité GluK2 présentent un déficit de la facilitation à court-terme à cette synapse, incluant la facilitation en fréquence et la facilitation en paire (Contractor et al., 2001). De même, des déficits similaires des plasticités pré-synaptiques à court-terme ont pu être observés à la synapse FM-CA3 chez les souris knockout pour la sous-unité GluK3 (Pinheiro et al., 2007). Chez les souris double knockout pour les sous-unités GluK4 et GluK5, la facilitation en paire est également érée tandis que la facilitation en fréquence reste intacte (Fernandes et al., 2009). La délétion génétique des sous-unités GluK4 et GluK5 déstabilise la localisation pré-synaptique des rKA à proximité des sites de libération du glutamate, les délocalisant ainsi à distance de ces sites où ils restent capables de répondre à des long trains de stimuli entrainant une libération de glutamate soutenue. En participant à ces phénomènes de plasticité synaptique à court-terme à la synapse FM-CA3, les rKA agissent comme des amplificateurs de la transmission synaptique entre les cellules granulaires et les cellules pyramidales de CA3. Ils permettent de réduire le délai entre le début d'une décharge d'activité du gyrus denté et l'activation du neurone de CA3 cible, réduisant ainsi le seuil nécessaire pour le transfert de l'information du gyrus denté vers les cellules pyramidales de CA3 (Sachidhanandam et al., 2009). En plus de moduler les phénomènes de plasticité à court-terme à la synapse FMCA3, les rKA participent à la PLT pré-synaptique à cette synapse (Contractor et al., 2001). En effet, chez les souris KO pour la sous-unité GluK2, la PLT pré-synaptique est diminuée (la PLT résiduelle étant dépendante de l'activation de récepteurs métabotropiques mGluR1). L'activation de rKA pré-synaptiques est responsable d'une augmentation de Ca2+ intracellulaire dans le bouton, après libération des stocks intracellulaires (Scott et al., 2008 ; Nistico et al., 2011). Le blocage de l'activité des rKA entraine une augmentation du seuil d'induction de la PLT pré-synaptique à la synapse FM-CA3 (Schmitz et al., 2003). Cette diminution du seuil d'induction de la PLT par l'activation des rKA serait nécessaire à la coopérativité entre différentes afférences sur CA3. En effet, l'application d'un bref tétanus incapable à lui seul d'induire une PLT en association à un tétanus plus fort aux synapses A/C ou à une fibre moussue voisine, permet l'induction d'une PLT. Cette coopération est dépendante de l'activation de rKA pré-synaptiques. Les mécanismes moléculaires qui sous-tendent le rôle des rKA dans cette PLT sont mal connus. Mais il a été suggéré que la facilitation synaptique induite par l'activation de rKA pré-synaptiques serait la conséquence d'une dépolarisation pré-synaptique qui engendrerait un élargissement du potentiel d'action par l'inactivation de canaux potassiques permettant une augmentation de l'entrée de Ca2+ dans la terminaison synaptique (Geiger et Jonas, 2000 ; Schmitz et al., 2003). La fonction pré-synaptique des rKA joue un rôle important lors du développement post-natal précoce des réseaux de neurones de l'hippocampe (Lauri et al., 2005). Les rKA pré-synaptiques participent alors au contrôle de la l'activité spontanée des réseaux de neurones de l'hippocampe. Lors de la première semaine postnatale, les rKA présynaptiques sont activés de façon tonique par le glutamate ambiant. Ils permettent alors d'inhiber la libération vésiculaire du glutamate aux synapses formées sur les cellules pyramidales de CA3 (Lauri et al., 2005). Durant cette même période postnatale, ces rKA pré-synaptiques sont également présents dans les interneurones du stratum lucidum de CA3, où leur activation par le glutamate ambiant à cette fois ci pour conséquence de faciliter la libération vésiculaire du glutamate. Ainsi, lors des premières semaines postnatales, les rKA participent au contrôle des patrons d'activité des réseaux de neurones en développement en régulant la balance entre transmission GABAergique et glutamatergique (Lauri et al., 2005) en faveur d'une inhibition de l'activité du réseau. Cette régulation est dépendante de la sous-unité GluK1. - 71 - Introduction Une meilleure compréhension du rôle des rKA dans l'activité du circuit de CA3 nécessite de prendre en considération l'expression des rKA par les interneurones GABAergiques de CA3, ces derniers jouant un rôle majeur dans l'établissement de l'activité oscillatoire du réseau. Il n'a pas encore été bien établi si des rKA fonctionnels peuvent être activés dans des conditions physiologiques dans différentes classes d'interneurones de CA3, comme dans CA1, en particulier ceux contactés par les fibres moussues.! Les récepteurs kaïnate dans les cellules pyramidales de CA1 Dans CA1, bien que la sous-unité GluK2 soit exprimée dans les cellules pyramidales (Egebjerg et al., 1991 ; Bureau et al., 1999), il est impossible de mesurer des courants synaptiques médiés par les rKA dans ces cellules (Frerking et al., 1998). La fonction des rKA dans les cellules pyramidales de CA1 est principalement une fonction métabotropiques indépendante de la fonction de canal du récepteur. L'activation des rKA des cellules pyramidales de CA1 après application de kaïnate en bain, ou après stimulation synaptique tétanique, entraine, comme dans les cellules pyramidales de CA3, une inhibition des courants sAHP dans les neurones pyramidaux de CA1 (Melyan et al., 2002 ; 2004). Cette inhibition passe par l'activation de protéine G et est dépendante de la PKC. Chez l'adulte, l'activation pharmac ologique des rKA peut entrainer une inhibition de la transmission glutamatergique à la synapse collatérale de Schaffer-cellules pyramidales de CA1 (Frerking et al., 2001). Cette inhibition ne serait pas liée à l'activation de rKA exprimés par les interneurones de CA1 augmentant ainsi la transmission GABAergique, mais à l'activation de rKA pré-synaptiques directement à la synapse collatérale de Schaffer-CA1 qui inhiberaient la probabilité de libération de glutamate de manière dépendante de l'activation de protéine G sensible à la toxine pertussique. Lors de la première semaine postnatale, des rKA pré-synaptiques sont exprimés dans certaines populations de synapses situées entre les collatérales de Schaffer et les cellules pyramidales de CA1. Contrairement aux neurones de CA1 où des rKA post-synaptiques sont exprimés mais où aucun courant médié par ces récepteurs ne peut être mesuré, l'activation des rKA postsynaptiques dans les interneurones de CA1 permet d'activer des courants présentant une cinétique de décroissance lente, comme dans les cellules pyramidales de CA3. Les courants médiés par l'activation de ces rKA augmente l'excitabilité de ces interneurones (Frerking et al., 1998 ; Wondolowski et Frerking, 2009). En effet, l'activation des rKA postsynaptiques dans les interneurones de CA1 entraine une dépolarisation et une augmentation de leur fréquence de décharge (Frerking et al., 1998 ; Cossart et al., 1998). Cette augmentation de l'excitabilité a pour conséquence de favoriser l'inhibition des cellules pyramidales de CA1 qu'ils innervent. En modifiant l'excitabilité de ces neurones, les rKA participent ainsi à la modulation de l'activité de réseau et de l'activité rythmique dans l'hippocampe (Goldin et al., 2007 ; Yang et al., 2007 ; Huxter et al., 2007). Ainsi l'inhibition des rKA contenant la sous-unité GluK1 par l'UBP 310 et l'UBP 316 in vivo sur le rat éveillé entraine un ralentissement des oscillations theta dans toutes les couches de - 73 - Introduction l'hippocampe sans affecter l'amplitude des oscillations (Huxter et al., 2007). En raison de l'expression sélective de la sous-unité GluK1 dans les interneurones de l'hippocampe, cela suggère un rôle de l'activation endogène des rKA exprimés par les interneurones dans la régulation du rythme theta. Néanmoins, il faut tout de même not que les antagonistes des rKA contenant la sous-unité GluK1 peuvent également inhiber les rKA hétéromériques GluK2/GluK5 exprimés à la synapse FM/CA3 de l'hippocampe (Pinheiro et al., 2013). Ainsi l'utilisation des ces antagonistes dans cette étude a pu affecter l'activité des cellules pyramidales de CA3. Certains interneurones de CA1 expriment également des rKA pré-synaptiques. Si les rKA post-synaptiques participent à la dépolarisation des interneurones par une action dépendante des propriétés de canal du récepteur, de nombreuses études ont au contraire montré que des rKA pré-synaptiques peuvent être responsables d'une inhibition de la libération vésiculaire de GABA (Rodriguez-Morino et al., 1997 ; Cunha et al., 1997 ; Rodriguez-Morino et al., 2000). In vivo, cette levée de l'inhibition (ou désinhibition) est responsable d'une augmentation de l'excitabilité des neurones pyramidaux dans CA1 qui adoptent alors un profil de décharge semblable à celui observé lors d'activités épileptiques induites par l'exposition à des drogues convulsivantes responsables d'un blocage de l'inhibition par le GABA. Figure 16 : Role des rKA pré-synaptiques dans la desinhibition par les interneurones GABAergiques de CA1. Dans le stratum lucidum, les synapses excitatrices et inhibitrices sont étroitement liées (A). Lors de l'arrivée d'un train de potentiels d'action à la terminaison synaptique de la collatérale de Schaffer, la glutamate libéré active des récepteurs mGluR qui permet la synthèse et la libération de 2-AG. (B) Du fait de la proximité de la synapse excitatrice et inhibitrice , le 2-AG active les rCB1 de la terminaison GABAergique et en parallèle le glutamate diffuse et active des r KA pré-syna ptiques à la terminaison GABAergique qui vont faciliter la signal isation médiée par l' activation des rCB1 permettant l'inhibition de la libération de GABA. (C) En absence de rCB1 à la terminaison GABAergique, la stimulation des rKA pré-synaptiques potentialise la libération vésiculaire de GABA. Il existe également une population de terminaisons GABAergiques où les récepteurs CB1 sont absents (Figure 16-C). A ces synapses, l'activation des rKA par le - Introduction spillover de glutamate potentialise la libération de GABA dans la fente synaptique (Jiang et al., 2001 ; Lourenço et al., 2010). Les rKA pré-synaptiques peuvent également favoriser ou inhiber la libération de GABA à des synapses entre un interneurone et un autre interneurone GABAergique en fonction de la présence ou de l'absence de récepteurs CB1 à la terminaison synaptique (Cossart et al., 2001 ; Lourenço et al., 2010). Les rKA peuvent également être exprimés à certaines synapses formées entre les collatérales de Schaffer et interneurones de CA1 dans le stratum radiatum. A certaines de ces synapses, les rKA sont présents au niveau pré-synaptique et agissent comme autorécepteurs en facilitant la libération de glutamate (Sun et Dobrunz, 2006). Ces synapses excitatrices entre collatérales de Schaffer et interneurones GABAergiques présentent des propriétés de transmission synaptique différentes en fonction de la catégorie à laquelle appartient l'interneurone. En effet, les synapses impliquant des interneurones positifs à la somatostatine présentent une importante facilitation à courtterme tandis que les interneurones non positifs à la somatostatine ne présentent qu'une faible facilitation voir une dépression de la transmission à court-terme (Sun et Dobrunz, 2006). L'activation des rKA exprimés par les interneurones positifs à la somatostatine permet d'augmenter transitoirement la probabilité de libération de glutamate de manière similaire à ce qui est observé à la synapse FM-CA3. Ces rKA sont composés des sousunités GluK1 et GluK2 seraient perméables au Ca2+ (Sun et al., 2008). Les synapses excitatrices situées sur les interneurones positifs à la somatostatine dans le stratum oriens lacunosum moléculaire (O-LM) présentent également des propriétés de facilitation importantes, celle-ci est atténuée en présence de NS102, un antagoniste spécifique de la sous-unité GluK2 (Sylwestrak et Ghosh, 2012). Notons par ailleurs que la protéine Elf1 (extracellular leucin-rich repeat fibronectin-containing 1) est spécifiquement exprimée dans cette dernière catégorie d'interneurones et régule la formation de ces synapses présentant une forte facilitation ((Sylwestrak et Ghosh, 2012). De ce fait, il pourrait être intéressant de chercher à déterminer si ce mécanisme trans-synaptique participerait au recrutement et à la stabilisation des rKA à cette synapse. ! Les récepteurs kaïnate dans le gyrus denté, implications dans l'épilepsie Des les cellules granulaires du gyrus denté, les ARNm codant pour les sous-unités GluK2, GluK3, GluK4 et GluK5 sont exprimés (Wisden et Seeburg, 1993). Ces quatre sous-unités sont exprimées dans les boutons pré-synaptiques des fibres moussues aux synapses FM-CA3. Si la fonction de ces rKA pré-synaptiques a été largement - 76 - Introduction caractérisée, le profil d'expression et la fonction de rKA dans les compartiments somatodendritiques des cellules granulaires du gyrus denté dans des conditions physiologiques sont beaucoup moins bien établis. En effet, aucun courant médié par les rKA ne peut être évoqué par des stimulations des afférences glutamatergiques dans la couche moléculaire du gyrus denté dans des conditions physiologiques, de plus, tout les courants excitateurs miniatures sont médiés par les rAMPA (Epsztein et al., 2005). Le kaïnate est une neurotoxine connue pour provoquer des convulsions aigües. Néanmoins, il reste encore à déterminer si les rKA jouent un rôle dans la physiopathologie de l'épilepsie du lobe temporal (Vincent et Mulle., 2009). Dans un contexte d'épilepsie temporale chronique, chez des modèles animaux et chez les patients, des connexions anormales sont établies entre des fibres moussues récurrentes et les cellules granulaires (Patrylo et Dudek, 1998 ; Nadler, 2003). Cette reconnexion ectopique, appelée bourgeonnement des fibres moussues, constitue un mécanisme de compensation de la mort cellulaire des cellules moussues situées dans l'hilus du gyrus denté qui a pour conséquence une perte d'afférences au niveau de la couche moléculaire du gyrus té. Chez des patients souffrant d'épilepsie du lobe temporal, que le niveau d'expression des ARNm codant pour la sous-unité GluK5 est augmenté dans le gyrus denté (Mathern et al., 1998). Chez ces patients, le marquage au kaïnate radioactif peut être corrélé au bourgeonnement des fibres moussues dans le gyrus denté (Represa et al., 1987). L'implication des rKA dans la génèse d'activités épileptiques chroniques chez le rongeur a été établie. En effet, la formation de fibres moussues aberrantes sur les cellules granulaires du gyrus denté dans un modèle d'épilepsie du lobe temporale déclenche l'expression de rKA post-synaptiques fonctionnels à ces synapses ectopiques (Epsztein et al., 2005, 2010 ; Artinian et al., 2011). Des courants médiés par les rKA peuvent alors être évoqués par stimulation de ces fibres moussues récurrentes, et ils peuvent également être enregistrés au cours de l'activité spontanée du neurone. Ces courants médiés par les rKA présentent une cinétique de décroissance lente, comparable à celle observée lors de l'activation des rKA à la synapse FM-CA3. Cette lente cinétique de décroissance est responsable de l'apparition de courants sodiques persistants élargissant la fenêtre temporelle pour l'intégration synaptique des signaux arrivant sur les cellules granulaires (Epsztein et al., 2010 ; Artinian et al., 2011). Ceci entraine une modification du profil de décharge des cellules granulaires, qui passe de décharges espacées à un rythme de décharge anormalement soutenu. Le blocage des rKA permet de diminuer de manière - 77 - Introduction significative l'activité de réseau impliquant les fibres moussues récurrentes (Epsztein et al., 2005 ; Epsztein et al., 2010 ; Peret et al., 2014). A ces synapses récurrentes, la composante médiée par les rKA représente la moitié de la transmission glutamatergique. De manière intéressante, dans ces synapses, les rKA et les rAMPA ne semblent pas être colocalisés à la même synapse mais forme plutôt deux populations de synapses bien distinctes (Epsztein et al., 2005 ; Peret et al., 2014). En conclusion, les rKA ectopiques jouent un rôle dans l'activité épileptique chronique dans l'hippocampe dans un contexte d'épilepsie du lobe temporal. d) Autres fonctions des récepteurs kaïnate dans le système nerveux central! Le cortex somato-sensoriel Au cours du développement, les rKA peuvent être exprimés à la pré et la post-synapse aux synapses thalamo-corticales du cortex somatosensoriel (Kidd et al., 1999 ; Kidd et al., 2002). A ces synapses, les rAMPA et les rKA ne semblent pas être colocalisés aux même synapses (Kidd et al., 1999). Il existe ainsi des synapses présentant des CPSE purement médiés par les rKA et d'autres purement médiés par les rAMPA. Les rKA pré-synaptiques sont exprimés au cours du développement aux synapses thalamo-corticales du cortex somato-sensoriel où ils régulent la transmission synaptique durant la première semaine de vie postnatale (Kidd et al., 2002). En effet, à ces synapses, l'activation des rKA pré-synaptiques est responsable d'une dépression de la transmission synaptique lors de stimuli à hautes fréquences (100 Hz), correspondant à l'activité évoquée lors d'une stimulation sensorielle. En prenant en compte les fréquences de stimulation mises en jeu dans ce mécanisme, la fonction des rKA devrait être imputable à la fonction ionotropique du récepteur et non métabotropique. Toujours à ces synapses, les rKA peuvent moduler l'efficacité de la transmission synaptique de façon bidirectionnelle (Jouhaneau et al., 2011). L'application de faible concentration de kaïnate en bain (3 μM) entraine une potentialisation de la transmission synaptique tandis que l'application d'une plus forte concentration de kaïnate (10 μM) est responsable d'une dépression de la transmission synaptique à cette même synapse. Cette facilitation de la transmission synaptique par les rKA pré-synaptiques est également présente chez l'adulte et dépendante de l'activation d'une voie de signalisation cellulaire impliquant l'adenylate cyclase, l'AMP cyclique et la PKA (Andrade-Talavera et al., 2013). L'activation de ces rKA entrainerait une augmentation du Ca2+ intracellulaire par des rKA perméables au Ca2+, qui activerait un mécanisme Ca2+ induce-Ca2+ release entrainant l'activation d'une adenylate cyclase dépendante du Ca2+ par un complexe Ca2+calmoduline. Les synapses thalamo-corticales sont sujettes à une régulation du développement à long-terme dépendante de l'activité. La PLT de ces synapses implique une rapide diminution du nombre de rKA synaptiques en faveur d'une transmission synaptique médiée par les rAMPA. Ceci suggère que les rKA sont régulés en réponse à des phénomènes de plasticité synaptique durant le développement (Kidd et Issac, 1999).! Le cervelet Comme dans l'hippocampe, les rKA sont exprimés de manière spécifique dans différents types de neurones du cervelet. Les ARNm codant pour les sous-unités GluK2 et GluK5 sont exprimés dans les cellules granulaires. Les ARNm codant pour mes sousunités GluK1 et GluK4 sont exprimés dans les cellules de Purkinje et l 'ARNm codant pour la sous-unité GluK3 est exprimé par des interneurones de la couche moléculaire (Wisden et Seeburg, 1993). Ils peuvent être localisés dans les compartiments pré- et postsynaptiques. Dans les cellules de Golgi, une population d'interneurones GABAergiques située dans la couche de cellules granulaires du cervelet, des rKA post-synaptiques composés de la sous-unité GluK2 ont été observés (Bureau et al., 2000). Ces rKA sont localisés à la synapse formée entre les fibres parallèles des cellules de Purkinje et les cellules de Golgi. Les courants médiés par l'activation de ces rKA présentent une cinétique de décroissance plus lente que les courants médiés par l'activation des rAMPA. - 79 - Introduction Dans les cellules de Purkinje, la présence de rKA fonctionnels a pu être détectée (Renard et al., 1995). Aux synapses formées entre les fibres parallèles des cellules granulaires et les cellules de Purkinje ou les cellules étoilées, les rKA pré-synaptiques sont responsables de phénomènes de dépression ou de facilitation de la transmission synaptique (Delaney et Jahr, 2002). Comme aux synapses thalamo-corticales dans le cortex somato-sensoriel, l'application de faibles concentrations d'agoniste des rKA entraine une potentialisation de la transmission synaptique, tandis que l'application de fortes concentrations provoque une dépression de cette transmission modulant ainsi la force de la transmission glutamatergique. La stimulation à faible fréquence des fibres parallèles entraine une facilitation des deux synapses tandis que des stimulations à haute fréquence entraine une dépression des synapses formées entre fibres parallèles et cellules étoilées et une facilitation des synapses formées entre fibres parallèles et cellules de Purkinje. Ces différences de plasticité pourraient s'expliquer par une plus grande densité de rKA ou par une plus grande sensibilité au glutamate des rKA exprimés aux synapses formées entre fibres parallèles et cellules étoilées. IV- Approches méthodologiques Nous avons cherché à déterminer quels sont les mécanismes moléculaires mis en jeu dans la compartimentation des rKA à la synapse FM-CA3. L'étude de la localisation subcellulaire des rKA en tranche fait face à de plusieurs difficultés techniques. D'abord, les techniques d'immunohistochimie sur tranches d'hippocampe couplées à l'imagerie confocale ne permettent pas d'avoir la résolution suffisante pour distinguer les rKA natifs localisés dans les compartiments pré-synaptiques de ceux localisés dans les compartiments post-synaptiques. De plus il existe peu d'anticorps dirigés contre les différentes sous-unités des rKA disponibles sur le marché et ceux-ci ne sont pas toujours spécifiques pour une sous-unité uniquement. Nous avons choisi d'étudier la localisation des rKA par une cartographie fonctionnelle subcellulaire des rKA dans CA3. Pour ce faire, nous avons opté pour la technique de décageage focalisé de glutamate afin d'étudier la localisation subcellulaire des rKA le long de l'arborisation dendritique des cellules de CA3. - Introduction A. Cartographie fonctionnelle des récepteurs du glutamate : décageage de glutamate Le concept à la base de la technologie de décageage repose sur la création d'une molécule d'intérêt rendue biologiquement inerte par l'ajout d'un groupement chimique protecteur photolysable. L'irradiation de ce composé cagé par la lumière induit une libération de molécules piégées, leur permettant alors de devenir biologiquement actives et d'agir sur leurs cibles. Ainsi, le faisceau lumineux servant à décager localement une molécule, se transforme en outil puissant pour stimuler des cibles biologiques de manière précise dans le temps et l'espace. La technologie du décageage de molécules cagées peut être utilisée en association avec d'autres technologies comme la technique de patchclamp pour mesurer en parallèle l'activité électrique de la cellule d'intérêt, ou des techniques d'imagerie pour observer des changements morphologiques des cellules. En principe, tout type de molécules de signalisations, de seconds messagers ou de neurotransmetteurs peut être cagé (Mayer et Heckel., 2006). Il existe déjà une grande variété de ces molécules, comme des neurotransmetteurs, le Ca2+, des inositols, des nucléotides, des peptides, des enzymes et des molécules d'ADN ou d'ARN (Ellis-Davies et al., 1994 ; Milburn et al., 1989 ; Wieboldt et al., 1994 : Matsuzaki et al., 2001 ; Matsuzaki et al., 2010). La majeure partie de ces molécules sont cagées à l'aide d'une liaison covalente à un chromophore photosensible. La technologie de photolyse de ces composés cagés peut être utilisée en culture de cellules en monocouche, en tranche de tissu et même in vivo. Une illumination uniforme de la préparation permet de libérer le composé cagé dans un grand volume mais le décageage peut également être beaucoup plus focalisé et restreint en modulant la taille du faisceau lumineux et/ou le mode d'illumination. En effet, l'utilisation de lasers, permet de contenir la photolyse sur un petit volume de la préparation. Ainsi, le décageage de neurotransmetteur dans l'espace extracellulaire d'une tranche de cerveau ou dans une préparation de neurones en culture permet de stimuler un grand nombre de neurones simultanément par une illumination globale de la préparation, ou permet de stimuler quelques synapses par une illumination plus précise de l'arborisation dendritique d'un neurone. Les propriétés photochimiques des composés cagés sont déterminées par leurs propriétés d'absorption de la lumière. Ces composés peuvent être décagés dans un système utilisant comme source d'illumination un laser ayant une longueur d'onde - 81 - Introduction d'excitation proche de l'ultraviolet (320-360 nm). Certains composés cagés peuvent également être décagés par une excitation 2-photons. L'excitation 2-photons nécessite l'emploie d'un laser à une longueur d'onde proche de l'infrarouge, faiblement énergétique (>720 nm). Le principe de l'excitation 2-photons consiste à exciter l'échantillon d'intérêt de manière pulsée à une longueur d'onde élevée. Lors d'une excitation classique à une longueur d'onde fortement énergétique, l'état d'excitation atteint par l'absorption d'un photon unique par le chromophore se produit dans une échelle de temps de l'ordre de 1015 s-1. Si deux photons d'énergie deux fois plus faibles entrent en collision avec le chromophore à un intervalle de temps de l'ordre de 10-18 s, alors l'absorption « virtuellement simultanée » des deux photons est permise. La microscopie 2-photons consiste donc à illuminer l'échantillon avec un laser infrarouge pulsé à très haute fréquence afin de permettre cette coïncidence d'absorption. Dans ces conditions, la probabilité que deux photons soit localisés aux mêmes coordonnées de l'espace et au même instant est très faible et cet évènement ne peut avoir lieu que dans le flux dense de photons situés au plan focal du faisceau du laser. L'excitation est ainsi extrêmement focalisée en z, les photons dispersés en z n'étant alors pas capables de photolyser les composés cagés en dehors du plan focal (Oheim et al., 2001) (Figure 17). Ce type 'excitation offre la possibilité de décager plus en profondeur dans les tissus du fait de leurs relatives transparences à ces hautes longueurs d'onde et permet un meilleur confinement axial du décageage. Cette méthode présente tout de même certaines limites. A de faibles puissances de laser non toxiques pour les cellules, la conversion des composés cagés dans la zone restreinte de décageage représente moins de 10% de la concentration initiale de composés (Brown et al., 1999 ; Matsuzaki et al., 2001 ; Kiskin et al., 2002). Pour cette raison, le décageage en microscopie 2-photons est réalisé en utilisant des puissances de laser proches de la limite de phototoxicité, et des concentrations de composés cagés très importantes (plusieurs millimolaires pour du glutamate cagé) (Kiskin et al., 2002 ; Koester et al., 1999 ; Hopt et Neher, 2001 ; Ji et al., 2008). Figure 17 : Résolution spatiale des techniques de microscopie 1-photon et 2-photons. (A) Diagramme de Jablonski simplifié : l'excitation non linéaire en microscopie 2-photons est basée sur l'absorption simultanée de 2 photons (hv) de faible énergie et de longueur d'onde élevée émis par un laser pulsé pour atteindre l'état d'excitation d'un fluorophore (S*), ou dans le cas du décageage, la photolyse du chromophore. (B) Image dans les plans x et z de billes fluorescentes de 3 μm de diamètre en microscopie 1photon (excitation à 488 nm) et 2-photons (excitation à 720 nm). (Adapté de Matsuzaki et al., 2008). Le glutamate cagé est un des neurotransmetteurs cagés les plus largement utilisés dans la littérature. De nombreuses molécules de glutamate cagé synthétisées à partir de différents chromophores et de différentes stratégies de cageage ont été développées, mais peu d'entre elles ont satisfait tous les critères d'exigence des neurobiologistes pour photolyser ces molécules dans des tissus complexes tels que des tranches de cerveau ou dans le cerveau in vivo. Le groupe α-carboxy-ortho-nitrobenzyl (CNB), de la famille des cages dérivées des nitrobenzyls, fut le premier groupe de protection utilisé pour cager des neurotransmetteurs avec succès (Wiebolt et al., 1994). Le glutamate est libéré de sa cage CNB rapidement et avec une importante efficacité lors de la photolyse (demi vie, 25 μs) et permet ainsi d'activer des rAMPA avec une cinétique d'activation rapide. La principale limite d'utilisation du composé cagé CNB-glutamate, est sa faible sensibilité aux longueurs d'onde élevées proches de l'infrarouge et donc sa faible efficacité pour du décageage en microscopie 2-photons. Une autre forme de glutamate cagé disponible dans le commerce, le 4-methoxy-7nitroindolinyl-glutamate (MNI-glu) (Figure 18), de la famille des cages dérivées des nitroindoniles, peut quant à elle être utilisée à la fois à des longueurs d'onde proches de l'ultraviolet et de l'infrarouge, lui permettant ainsi d'être employée en microscopie 2photons. Le MNI-glu constitue de ce fait le glutamate cagé le plus utilisé dans la littérature (Losonczy et al., 2006 ; Nikolenko et al., 2007 ; Matsuzaki et al., 2008). L'utilisation du glutamate cagé a joué un rôle important dans l' e de la physiologie synaptique. La possibilité de modifier les concentrations de neurotransmetteurs de manière rapide et précise dans l'espace présente un grand intérêt dans l'étude de la fonction des récepteurs à une échelle subcellulaire (Callaway et Yuste, 2002). Le glutamate cagé a notamment été employé dans l'étude des propriétés biophysiques des récepteurs du glutamate dans différents types neuronaux. Le décageage de glutamate peut être utilisé pour mimer des réponses synaptiques et pour obtenir une cartographie fonctionnelle des récepteurs ionotropiques du glutamate le long de l'arborisation dendritique des neurones en cultures primaires, en tranches de cerveau ou in vivo (Matsuzaki et al., 2001 ; Shoham et al., 2005 ; Chen et al., 2011). Ces cartographies fonctionnelles des récepteurs ont principalement été utilisées dans l'étude des rAMPA, alors qu'une seule étude a employé cette technique dans l'étude de la localisation subcellulaire des rKA (Eder et al., 2003). Figure 18 : Structure chimique et photolyse du MNI-glutamate. Afin d'étudier la localisation subcellulaire des rKA le long de l'arborisation dendritique des cellules pyramidales de CA3 et les mécanismes moléculaires - 84 - Introduction impliqués dans leur stabilisation synaptique à la synapse FM-CA3, nous avons choisi d'utiliser la technique de décageage focalisé de glutamate à 405nm. Le décageage de glutamate peut être effectué sur un poste d'électrophysiologie classique. Il nécessite simplement l'installation d'un système de LED et un laser à 405 nm (Trigo et al., 2009). Cette installation est ainsi beaucoup moins onéreuse qu'une installation 2-photons. Bien calibré, avec un laser aligné de sorte à obtenir un point de diffraction limité de diamètre minimum, le spot de décageage situé au plan focal mesure environ 2 microns de diamètre pour notre objectif 60X. Les cellules sont systématiquement transfectées avec une protéine fluorescente cytosolique (EGFP ou tomato) afin d'avoir un marqueur morphologique du neurone et de pouvoir identifier les différentes domaines subcellulaires comme les excroissances épineuses. Le déplacement du spot de décageage d'une région d'intérêt à l'autre est permis en déplaçant directement le microscope sur la préparation. B. Mécanismes de transfert de gènes en neurosciences Dans le but d'étudier les déterminants moléculaires nécessaires à la stabilisation et à la ségrégation synaptique des rKA le long de l'arborisation dendritique des cellules pyramidales de CA3, nous avons réexprimé des sous-unités mutantes des rKA dans ces cellules afin d'interférer avec certaines interactions protéiques. Il existe une grande variété de techniques permettant d'introduire un ADN d'intérêt dans des neurones et de le faire exprimer par ces cellules. Chaque technique possède un certain nombre d'avantages et de limites expérimentales. Ces méthodes présentent différentes caractéristiques comme : l'efficacité de transfection, du niveau d'expression protéique, de la toxicité, la reproductibilité, le coût, la pertinence pour une expérience donnée. Certaines techniques sont plus appropriées pour la transfection de progéniteurs neuronaux et d'autres pour des neurones post-mitotiques. Il est donc important de prendre tous ces critères en considération lors du choix de la technique de transfection pour un modèle expérimental précis. Une des limitations majeures rencontrées lors du travail sur des neurones de mammifères est leur fragilité et leur sensibilité aux stress physiques et aux changements - 85 - Introduction de température, de pH ou d'osmolarité. Il est donc primordial de les manipuler avec la plus grande précaution lors de la procédure de transfection. 1) Transfection basée sur l'utilisation de virus recombinants L'utilisation de virus recombinants comme vecteur, a représenté une avancée majeure dans la transfection d'ADN dans des neurones post-mitotiques (Geller et Breakefield, 1988). Cette méthode de transfection est aujourd'hui largement employée notamment pour la transfection d'ADN in vivo où son efficacité est très importante en comparaison d'autres techniques de transfection non virale. La transfection basée sur l'infection virale repose sur la capacité intrinsèque du virus à infecter son hôte en insérant son matériel génétique, ARN ou ADN, dans la cellule pour le faire exprimer. Cette prédisposition pour l'infection rend l'utilisation des virus relativement aisée que se soit dans le tissu jeune ou adulte et dans différents modèles comme les cultures primaires de neurones, les tranches organotypiques ou directement in vivo. Les vecteurs viraux recombinants utilisés pour des expériences de transfection de gènes sont incapables de se répliquer et leur utilisation reste relativement sûre. Les vecteurs viraux recombinants peuvent être appliqués localement en culture ou injectés précisément in vivo dans un groupe de neurones d'une structure d'intérêt par stéréotaxie afin de permettre une expression très localisée du gène d'intérêt. L'utilisation de vecteurs viraux présente tout de même un certain nombre de limitations (Slack et Miller, 1996 ; Simonato et al., 2000 ; Ehrengruber et al, 2001 ; Janson et al., 2001) : l'usage de virus peut présenter une certaine toxicité pour les neurones, la construction du vecteur viral nécessite plus d'étapes que d'autres types de vecteurs, la taille des inserts pouvant être transfectés est limitée et varie d'un vecteur viral à l'autre. L'utilisation de vecteurs viraux nécessite la mise en place de procédures de sécurités non négligeable pour les xpérimentateurs. Il existe une grande variété de vecteurs viraux pouvant être utilisés pour transfecter des neurones. Ces vecteurs viraux diffèrent par leur efficacité d'infection, le niveau d'expression protéique qu'ils permettent, leur toxicité cellulaire et la taille de l'insert qu'ils peuvent contenir (Washbourne et McAllister, 2002) (Tableau 2). a) Amplicon dérivé de l'Herpes simplex virus (HSV) Le virus de l'herpes ou Herpes simplex virus (HSV) est le premier virus à avoir été utilisé comme vecteur viral pour la transfection de gènes dans des neurones (Geller et - 86 - Introduction Breakefield, 1988). Les neurones représentent des cellules hôtes naturelles pour ce virus. Le vecteur viral amplicon de l'HSV est un vecteur viral recombinant dérivé du HSV natif qui a été rendu incapable de se répliquer (De Silva et Bowers, 2009 ; Epstein, 2009). Ce vecteur présente la particularité de pouvoir contenir des transgènes de grandes tailles (supérieur à 150 kilo-bases (kb)) ce qui représente un grand intérêt pour la transfection de nombreuses protéines synaptiques telles que des sous-unités de récepteurs aux neurotransmetteurs codés par de longues séquences, ou de protéines sous le contrôle de séquences régulatrices de grande taille. Néanmoins ce vecteur présente l'inconvénient majeur d'être difficile à produire en routine pour des titres forts. b) Adénovirus Les adénovirus peuvent infecter de manière efficace des neurones post-mitotiques, mais infectent de manière préférentielle les cellules gliales, d'où la nécessité d'employer des promoteurs neuronaux spécifiques pour ce type de virus (Karra et Dahm, 2010). De plus, à l'instar de l'amplicon dérivé de l'HSV, l'insert ne s'intègre pas dans le génome de la cellule hôte et n'est donc pas stable pour des cellules en division. Son utilisation est préférentiellement limitée aux neurones post-mitotiques. Contrairement à l'amplicon dérivé de l'HSV, les adénovirus ne permettent pas de transfecter d'importantes séquences d'ADN (maximum 15 kb). c) Adeno-associated virus (AAV) Les adeno-associated virus (AAV) présentent un grand intérêt pour le transfert de gènes en neurosciences. Contrairement aux HSV et aux adénovirus, les AAV permettent l'intégration stable de l'insert dans le génome de la cellule l'hôte. Chaque sérotype d'AAV exprime différents récepteurs de surface pour l'entrée dans la cellule hôte leur conférant ainsi la possibilité d'infecter de manière spécifique différentes types de neurones (Büning et al., 2008). Néanmoins, comme les adénovirus, la taille du transgène qui peut être inséré dans les AAV est très limitée (< 5 kb). De plus, l'expression du transgène après l'infection prend plus de temps que pour les autres virus (environ 2 semaines). d) Lentivirus Les lentivirus sont des rétrovirus ayant la capacité d'infecter des cellules postmitotiques. Ils s'inserent également de manière stable dans le génome de l'hôte et présentent une importante efficacité d'infection et une faible toxicité cellulaire (Karra et - 87 - Introduction Dahm, 2010). Ce vecteur viral est très utilisé en neurosciences, il est facile à produire mais comme les AAV, la taille du transgène qu'il peut intégrer est limitée (6kb). Tableau 2 : Vecteurs viraux utilisés en neurosciences Amplicon de l'herpes simplex virus (HSV) Adénovirus Adenoassociated virus (AAV) Lentivirus Sindbis Efficacité de la transfection neuronale élevée modérée élevée élevée très élevée élevé modéré élevé élevé élevé Onset d'expression quelques heures, expression se réduisant au cours des premières semaines quelques jours, expression pouvant durée plusieurs semaines ≈ 2 semaines ≈ 2 semaines Ratio d'expression neurone/glie élevé Faible (pallier par l'emploi de promoteurs spécifiques) variable en fonction du sérotype variable élevé Expression ciblée oui oui oui oui oui Expression sur cellule unique non non non non non Intégration dans le génome de l'hôte non non oui oui non Taille de l'insert maximale > 150 kb ≈ 15 kb ≈ 5 kb ≈ 6 kb ≈ 10 kb faible élevée avec des titres importants faible faible très élevée Application en culture neuronale dissociées oui oui oui oui Application en culture organotypiques oui oui oui oui Oui Application in vivo oui oui oui oui oui Précautions pour la sécurité de l'utilisateur oui oui oui oui oui oui e) Virus Sindbis Les virus Sindbis sont des virus à ARN permettant une expression très rapide (en quelques heures) et très efficace des transgènes qu'ils transportent (Washbourne et McAllister, 2002). L'efficacité de l'infection par les virus Sindbis est très importante mais ils sont également responsables de l'inhibition de la synthèse protéique des cellules hôtes en seulement quelques heures les rendant ainsi très toxiques pour les cellules infectées. - Introduction 2) Transfection chimique Les techniques de transfections chimiques permettent de transfecter des neurones grâce à protocoles expérimentaux relativement simples, néanmoins, ces méthodes sont principalement destinées aux cultures de neurones dissociés. a) Co-précipitation Ca2+-phosphate/ADN La méthode de transfection par co-précipitation de phosphate de Ca2+ et d'ADN est l'une des méthodes de transfection chimique les plus anciennes et des plus couramment utilisées pour transfecter des cultures primaires de neurones (Dahm et al., 2008). Cette méthode est facile à mettre en place et ne nécessite pas d'équipement spécifique. Le principe physique de cette méthode est de former des cristaux d'ADN avec des ions Ca2+ dans un tampon phosphate, l'ADN peut ainsi pénétrer dans la cellule sous cette forme. 89 - Introduction Comme la méthode de co-précipitation au phosphate de Ca2+, cette méthode de transfection ne nécessite pas d'équipement particulier et est peu toxique pour les cellules. Elle possède également une efficacité de transfection relativement faible en cultures primaires de neurones dissociés, située entre 5 et 10% et pouvant atteindre 30% dans le meilleur des cas (Dalby et al., 2004). 3) Transfection physique En plus de l'utilisation de vecteurs viraux et de méthodes chimiques pour faire pénétrer le matériel génétique dans la cellule cible, il existe également 2 méthodes de transfections physiques de l'ADN dans les neurones : la micro-injection et la transfection biolistique. a) Micro-injection La micro-injection consiste à introduire le matériel génétique directement dans le cytoplasme en utilisant une fine pipette de verre. Cette méthode permet de cibler les cellules à transfecter très précisément et permet, si nécessaire, de transfecter une cellule unique dans une préparation. Néanmoins, la micro-injection inflige un stress physique à la cellule en rompant la membrane plasmique (Zhang et Yu, 2008). Cette méthode a préférentiellement été utilisée dans des neurones d'invertébrés, plus grands et plus résistants que les neurones de vertébrés, mais a déjà été employée dans des neurones chez le murin, avec néanmoins une plus faible efficacité et un plus fort taux de mort neuronale après transfection (Kohara et al., 2001). b) Transfection biolistique La transfection biolistique a initialement été employée pour le transfert de matériel génétique dans les cellules végétales puisque cette méthode permet de passer la membrane squelettique de ces cellules (Klein et al., 1987 ; Christou et al., 1988). Cette technique de transfection consiste à recouvrir des billes de métal (en or ou en tungstène) de quelques micromètres de diamètre, plasmides contenant une séquence d'ADN d'intérêt. Ces billes sont ensuite placées dans des cartouches puis dans un pistolet à gaz comprimé appelé Gene Gun. Grace à ce pistolet, les billes recouvertes d'ADN sont propulsées à grande vitesse sur la préparation et peuvent ainsi pénétrer dans certaines cellules. Cette technique de transfection est beaucoup utilisée dans le domaine des neurosciences pour transfecter des neurones en cultures organotypiques (O'Brien et Lummis, 2006). La transfection biolistique présente ainsi l'avantage de pouvoir être - Introduction utilisée dans un système neuronal où les connections sont préservées mais elle présente aussi un certain nombre d'inconvénients. Cette méthode peut endommager de manière importante les tissus transfectés. La transfection biolistique ne permet pas de cibler un type neuronal en particulier et entraine la transfection de beaucoup de cellules gliales. L'efficacité de la transfection est faible irrégulier d'une préparation à l'autre. 4) Transfection par électroporation Le principe de l'électroporation est de rendre une cellule compétente pour la réception d'un ADN d'intérêt en perméabilisant transitoirement la membrane plasmique par la délivrance d'une stimulation électrique. Ainsi au cours de la stimulation électrique, l'ADN peut pénétrer dans le cytoplasme des cellules d'intérêt. L'électroporation est longtemps restée une technique de transfection limitée aux cultures de neurones dissociées et aux progéniteurs neuronaux in vivo. Ces dernières années, cette technique s'est développée et permet aujourd'hui la transfection de neurones post-mitotiques en cultures organotypiques et in vivo. La méthode de délivrance du champ électrique varie en fonction du stade de développement et du type de système étudié. a) Electroporation de cultures primaires dissociées La nucléofection est une forme d'électroporation utilisant une série d'impulsions électriques à fort voltage permettant aux plasmides de pénétrer directement dans le noyau, donnant lieu ainsi à une bonne efficacité de transfection (60% à 80%) (Zeitelhofer et al., 2007 ; Zeitelhofer et al., 2009). Cette technique de transfection peut être utilisée à la fois sur des progéniteurs neuronaux et sur des neurones post-mitotiques (Knöll et al., 2006), mais reste tout de même plus efficace si la transfection est effectuée à un stade précoce de différentiation. b) Electroporation in-utero L'électroporation peut être employée in vivo chez l'embryon par la technique d'électroporation in utero. Cette technique consiste à électroporer des progéniteurs neuron chez l'embryon de rongeur in utero à un stade précoce de développement par l'injection d'un ADN d'intérêt dans les ventricules cérébraux et par l'utilisation d'électrodes à la surface de l'embryon pour délivrer le champs électrique nécessaire à la pénétration de l'ADN dans les cellules (Shimogori et Ogawa, 2008). L'électroporation in utero a beaucoup été utilisée dans l'étude de structures cérébrales comme le cortex, la rétine, le thalamus ou le cervelet (Dixit et al., 2011 ; Petros et al., 2009 ; Matsui et al., 2011). - 91 - Introduction c) Electroporation focale in vivo L'électroporation peut également être effectuée après la naissance in vivo sur des neurones post-mitotiques. Pour cela une pipette contenant la solution à électroporer est placée dans la région cérébrale d'intérêt, l'ADN est en suite injecté localement puis une stimulation électrique permet l'électroporation d'une population de neurones à proximité de l'électrode. Souvent, cette technique ne permet pas de transfecter un grand nombre de neurones (Mizuno et al., 2010 ; Ohmura et al., 2014). Récemment une nouvelle technique de transfection électrochimique a été développée : la iontoporation (De la Rossa et Jabaudon, 2015). Cette technique permet de transfecter localement un grand nombre de neurones post-mitotiques (de 10 à plus de 500). La iontoporation combine l'application d'un champ électrique par le biais de deux électrodes situées à la surface du crâne avec l'injection dans la structure d'intérêt d'une solution contenant un plasmide et une molécule amphipathique, le trans-cyclohexane-1,2diol (TCHD). Le TCHD permet d'inhiber la sélectivité du complexe de pore nucléaire, autorisant ainsi la diffusion passive de macromolécules, comme l'ADN plasmidique, dans le noyau (Liashkovich et al., 2010 ; Vanderbroucke et al., 2007). d) Electroporation sur cellule unique L'électroporation sur cellule unique, aussi appelée single cell electroporation (SCE), permet de transfecter cellule par cellule, un faible nombre de neurones d'intérêt dans une préparation. L'électroporation sur cellule unique est de plus en plus employée en tranches organotypiques et in vivo dans des couches de cortex superficielles (Zhang et al., 2012 ; Judkewitz et al., 2009). Cette méthode de transfection nécessite l'acquisition de compétences techniques plus longues à acquérir que d'autres méthodes précédemment citées. Elle nécessite notamment d'être à l'aise avec la micromanipulation de pipettes de patch c sous microscope (Rathenberg et al., 2003). La SCE nécessite de remplir une pipette de patch clamp avec une solution intracellulaire contenant le ou les plasmides d'intérêt. Sous microscope, la pipette est positionnée au contact d'une cellule à transfectée. Un train de stimulations électriques est alors appliqué à la cellule à travers l'électrode en contact avec la solution d'électroporation de la pipette. Cette stimulation électrique permet de perméabiliser transitoirement la membrane plasmique du neurone et de diffuser l'ADN dans la cellule pour qu'il soit ensuite exprimé. Une fois la cellule transfectée, la pipette est lentement rétractée et une autre cellule peut alors être transfectée avec cette même - Introduction pipette. En tranches organotypiques, il est ainsi possible de transfecter plus d'une dizaine de neurones par tranche avec une bonne efficacité de transfection. Figure 19 : Electroporation sur cellule unique. Le protocole employé dans cette étude pour effectuer des électroporations sur cellules uniques de cellules pyramidales de CA3 consiste à approcher le soma d'une cellule d'intérêt avec une pipette de patch-clamp remplie d'une solution intracellulaire contenant les plasmides codant pour les gènes d'intérêt. Une fois en contact avec la cellule, un train de stimulations électriques est délivré pour perméabiliser transitoirement la membrane de la cellule et pour permettre à l'ADN de diffuser dans la cellule. Une fois l'électroporation effectuée, la pipette est délicatement rétractée et peut être réutilisée pour électroporer plusieurs cellules dans la même tranche. A. Problématique Dans les cellules pyramidales de CA3 de l'hippocampe, les rKA post-synaptiques sont spécifiquement ségrégués à la synapse formée entre les fibres moussues et les cellules pyramidales de CA3 où ils participent à la réponse synaptique. Ils sont par contre totalement absents des autres afférences glutamatergiques sur ces neurones. Nous avons voulu déterminer quels mécanismes moléculaires pouvaient être mis en jeu dans la stabilisation et la compartimentation des rKA à la synapse FM-CA3. A cette synapse, les rKA sont composés des sous-unités GluK2, GluK4 et GluK5, la sous-unité GluK2a étant une sous-unité obligatoire pour la formation de rKA fonctionnels. Dans cette étude, nous nous sommes tout particulièrement intéressé au DCT de la sous-unité GluK2a des rKA car ce domaine est connu pour être la cible de nombreux interacteurs protéiques et de nombreuses modifications post-traductionnelles. B. Résultats Afin d'étudier les mécanismes moléculaires impliqués dans la ségrégation des rKA post-synaptiques à la synapse FM-CA3 des cellules pyramidales de CA3, nous avons utilisé principalement des cultures organotypiques d'hippocampe. Ce système in vitro permet de conserver l'organisation des connexions de l'hippocampe tout en pouvant réaliser des manipulations génétiques de manière aisée en utilisant la technique d'électroporation sur cellule unique. Ce modèle a d'abord été validé en comparant la composante médiée par les rKA des CPSE à la synapse FM-CA3 dans des tranches aigües et dans des cultures organotypiques chez les souris contrôle (wt). La composante médiée par les rKA après - 94 - Résultats-Discussion stimulation électrique minimale d'une fibre moussue a été isolée pharmacologiquement en utilisant un antagoniste spécifique des rAMPA, le LY303070 à 25 μM. Nous avons pu montrer que le rapport rAMPA/rKA est similaire en tranches aigües et dans des cultures organotypiques d'hippocampe. Aucune composante de courants médiés par les rKA ne peut être mesurée par une stimulation électrique des voies associatives et commissurales. Pour évaluer plus précisément la localisation des rKA nous avons utilisé la technique de décageage de glutamate pour effectuer une cartographie fonctionnelle des rKA le long de l'arborisation dendritique dans des cultures organotypiques provenant de souris wt. Ce décageage a été effectué en utilisant un laser à 405 nm pour décager le MNI-glutamate présent dans la solution extracellulaire à une concentration de 500 μM (Trigo et al., 2009). Trois jours avant l'expérimentation, les tranches ont étés transfectées avec un plasmide codant pour la GFP afin de révéler la morphologie dendritique des neurones de CA3 qui seront patchés. Lors de l'expérience de décageage, le spot laser est positionné sur différents compartiments du neurone patché. Nous avons ainsi cartographié les rAMPA et les rKA dans différents compartiments des cellules pyramidales de CA3 : le soma, les excroissances épineuses, le tronc dendritique des dendrites proximales et les dendrites distales. Par cette technique, nous avons montré que les courants médiés par les rKA étaient détectables uniquement lors du décageage de glutamate sur les excroissances épineuses. Ces courants sont en effet absents des compartiments somatiques des dendrites distales. Dans ces conditions, quelque soit le compartiment cellulaire, aucun courant médié par les rKA n'est enregistré chez les souris GluK2-/-. Chez les souris wt, les courants médiés par les rAMPA peuvent quant à eux être enregistrés dans tous les compartiments où le décageage de glutamate a été effectué. Ces résultats confirment la compartimentation subcellulaire des rKA dans les cellules pyramidales de CA3. Nous nous sommes alors intéressé aux mécanismes moléculaires mis en jeu dans la stabilisation synaptique et la compartimentation des rKA à la synapse FM-CA3. Notre attention s'est tout particulièrement portée sur le DCT de la sous-unité GluK2a, cible de nombreux interacteurs protéiques. Pour cela nous avons utilisé une stratégie de r moléculaire afin de pouvoir manipuler aisément le DCT de la sous-unité GluK2a. Nous avons d'abord transfecté des tranches de souris GluK2-/- avec un plasmide exprimant la sous-unité GluK2a wt. La technique d'électroporation sur cellule unique nous a permis de transfecter des cellules pyramidales de CA3 avec différentes concentrations d'ADN dans la pipette d'électroporation (de 3 à 80 ng/μL) afin de déterminer les conditions optimales pour réexprimer les rKA dans CA3 de manière comparable au wt. Nous avons pu observer que l'amplitude des courants mesurés était dépendante de la concentration d'ADN transfectée dans les cellules. Après l'électroporation de fortes concentrations d'ADN codant pour la sous-unité GluK2a, l'amplitude des courants médiés par les rKA mesurés après décageage de glutamate sur les excroissances épineuses est supérieure à celle observée chez le wt. Par ailleurs, dans ces conditions, des courants ectopiques médiés par les rKA peuvent être mesurés lors du décageage de glutamate sur le soma ou sur les dendrites distales des cellules pyramidales de CA3. Il faut également noter que les courants induits par le décageage de glutamate sur les excroissances épineuses après la réexpression d'une forte concentration d'ADN présente également une cinétique de décroissance bien plus rapide que chez les souris wt. Ceci peut s'expliquer par la formation préférentielle d'homomère GluK2 dans ces conditions. La réexpression de la sous-unité GluK2a à une plus faible concentration (3 ng/μL) nous a permis de récupérer des courants médiés par les rKA comparables au wt en terme d'amplitude et de cinétique de décroissance après le décageage de glutamate sur les excroissances épineuses. De plus, comme chez le wt, aucun courant n'est enregistré lors du décageage de glutamate sur le soma ou sur les dendrites plus distales. Il est donc important de contrôler finement les paramètres de transfection pour pouvoir être en mesure de conserver des courants médiés par les rKA comparables au wt et pour reproduire la compartimentation des rKA observée chez les souris wt. Nous avons également mesuré les CPSE médiés par les rKA après stimulation des fibres moussues ou de la voie associative et commissurale dans ces différentes conditions afin de mesurer la composante purement synaptique des rKA. De manière intéressante, lors de la stimulation des fibres moussues, quelque soit la concentration d'ADN testée, le rapport rKA/rAMPA est le même et est comparable au wt, de plus aucun CPSE médié par les rKA ne peut être mesuré lors de stimulation des voies associatives et commissurales. Ce résultat ère qu'il existerait un nombre limité d'emplacements où les rKA peuvent être stabilisés à la synapse FM-CA3 lors de la réexpression ou de la surexpression des rKA dans les cellules pyramidales de CA3. Il y aurait ainsi une mécanisme moléculaire permettant réguler de manière spécifique la quantité de rKA pouvant être présent à la synapse. Après avoir déterminé les conditions de transfection optimales pour réexprimer dans des cultures organotypiques de souris GluK2-/- un niveau de rKA comparable au wt, nous avons réexprimé des sous-unités GluK2a présentant différents niveaux de troncation du DCT. Distinct subtypes of ionotropic glutamate receptors can segregate to specific synaptic inputs in a given neuron. In CA3 pyramidal cells (PCs), kainate receptors (KARs) are present at mossy fiber (mf) synapses and absent from other glutamatergic inputs. Using functional mapping of glutamate receptors by focal glutamate uncaging we show that KARs display a strictly confined expression on thorny excrescences, the postsynaptic elements of mf-CA3 synapses, being excluded from extrasynaptic somatodendritic compartments, at variance with AMPA receptors. We combined quantitative molecular replacement with electrophysiology and focal glutamate uncaging to show that the faithful reinstatement of KAR segregation in CA3 PCs critically depends on the amount of GluK2a protein. We have identified a sequence in the GluK2a C-terminal domain necessary for restricted expression of KARs which is responsible for GluK2a interaction with N-Cadherin. Targeted deletion of N-Cadherin or overexpression of a dominant negative N-Cadherin in CA3 PCs greatly reduces KAR-EPSCs at mf-CA3 synapses. Our findings suggest that multiple mechanisms combine to control the compartimentalization of KARs at mf-CA3 synapses, including a stringent control of the amount of GluK2 subunit in CA3 PCs, a limited number of slots for KARs, and the recruitment/stabilization of KARs by NCadherins. Key words: Synapse specification/subcellular segregation/kainate receptors/CA3/NCadherin INTRODUCTION The function of the brain critically depends on highly specific connectivity between neuronal populations. There is an extreme anatomical and functional diversity of types of synapses that form between different populations of neurons. At the level of a single neuron, different excitatory and inhibitory synaptic inputs generally follow precise subcellular targeting. The segregation of different excitatory connections onto a single neuron is particularly striking in laminated structures such as the hippocampus (Williams et al., 2010). As an example, CA3 pyramidal cells (PCs) receive three main types of glutamatergic afferents which are precisely positioned along the apical and basal dendrites, from the entorhinal cortex (perforant path), from recurrent CA3 collaterals (associational/commissural, A/C fibers) and from the dentate gyrus (DG) through mossy fibers (mf). In addition to their subcellular topography, glutamatergic synapses from these different inputs greatly vary in their structural and functional properties.
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Quand droits des pêcheurs et frontières marines interfèrent
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Lorsque plusieurs parties font caume commune, ellea ne comptent, pour l'application dea dispositions qui précèdent. que pour une seule. Bn cJ. de doute, le Tribunal décide. ,. Le. membres désignée conformément aux paragraphe. 2, l et 4 doivent lIIaUafaire aux pre8Cdptions delll articlelll 2, Il et 11 de .. la pré.ente annexe. Il. participent ~ la décision dans des conditiona de oompl~te 6galité avec leura , collèquee. '-rUcle 18 Rémunération 1. Chaque membre élu du Tribunal reçoit un traitement annuel ainai qu'une allocation spéciale pour chaque jour où 11 exerce se. fonctiona, pourw que, pour chaque année, le montant total de son allocation spéciale ne dépaaa. paa le montant de son traitement annuel. 2. Le Pré.ident reçoit une allocation annuelle spéciale. l. Le Vice-Président reçoit une allocation spéciale pour chaque jour CL il exerce les fonctions de président. 4. Les membres désignés en application de l'article 17 de la préaente annexe. autres que les membres élus du Tribunal, reçoivent une indemnité pour chaque jour où ils exercent leurs fonctions. 5. Ces traitements, allocations et indemnités sont fixés de temps à autre lors de réunions des Etats Parties compte tenu du volu.. de travail du Tribunal. Ils ne peuvent être diminués pendant la durée des fonctions. 6. Le traitement du Greffier est fixé lora de réunions des Btats Parties sur proposition du Tribunal. 7. Des règlements adoptés lors de réunions des Btats Parties fixent les conditions dans lesquelles des pensions de retraite sont allouéea aux membres du Tribunal et au Greffier, ainsi que les conditions de remboursement de leurs frais de voyage. S. Ces traitements, allocations et indemnités sont exempts de tout imp&t. Article 19 Frais du Tribunal 1. Les frais du Tribunal sont supportés par les Btats Parties et par l'Autorité dans les conditions et de la ma~i~re arratées lors de réunions dea Btats ParUes. 2. Si une entité autre qu'un Btat Partie ou l'Autorité eat partie à un différend dont le Tribunal est saisi, celui-ci fixe la contribution de cette partie aux fraiB du Tribunal. Vol. 1834, 1-31363 1994 United Nations - Treaty Series • Nations Unies - Recueil des Traités 165 Article 20 Accès au Tribunal 1. Le Tribunal est ouvert aux Btats Parties. 2. Le Tribunal est ouvert l d•• entités autres que les Etats Parti•• dans toua le. ca. expre••ément prévus l la partie XI ou pour tout différend souais en vertu de tout autre accord conférant au Tribunal une compétence acceptée par tout•• le. partie. au différend. Article 21 1.. Le Tribunal e.t ~tent pour toua différends et toutes les demande. qui lui sont .ouai. confor.éaent l la Convention et toutes les fois que cela est expre••'-ent prévu dan. tout autre accord conférant compétence au Tribunal. Article 22 Souai •• ion au Tribunal de différends relatifs l d'autres accords Si toute. le. partie. l un traité ou à une convention déjà en vigueur qui • trait lune que.tion vi... par la pré. ente Convention en conviennent. tout différend relatif l l'interprétation ou l l'application de ce traité ou àe cette convention peut Itre .oumi. au Tribunal conformément l ce qui a été convenu. Article 23 Droit applicable Le Tribunal .tatue aur tous le. différends et sur toutes les demande. oonforméaent'l l'article 293. SECTION 3. PROCEDURE Article 24 Introduction de l'instance 1. Le. différends sont portés devant le Tribunal, selon le cas, par notification d'un compromis ou par requ@te, adressées au Greffier. Dans le. deqx ca., l'objet du différend et les parties doivent @tre indiqués. 2. Le Greffier notifie immédiatement le compromis ou la requ@te à toua le. intére•••• 3. hrUe •• Le Greffier notifie également le compromis ou la requ@te l toua le. Btat. Article 25 Me.ures con.ervatoire. 1. Conformément à l'article 290, le Tribunal et. la O1aJ1bre pour le r6tl.....t d.. différend. relatifs aux fonds marina ont le pouvoir de prescrire de. . . .ure. ' oonaer"atoire•• Vol. 1834, 1·31363 166 United Nations - Treaty Series • Nations Unies - 1994 Recueil des Traités 2. Si le Tribunal n. si~e pas ou si le nombre d•• a.~re. di~ibl•••• t inféri.ur au quorum, 1. . . .sures conservatoires .ont prescrite. par la .a..bre .. proc6dur. SOEMair. constituée conforaé•• nt A l'article 15, par..r~. 3, . . la pc_nte ann•• e. NOnob.tant l'article 15, paragraphe 4, de cette .... ___è, c .. ..aur•• con.ervatoires pauvent Atre prescrite. l la d.mande ~. toute partie ~u 'ifférend. Bll.. sont sujette. A appr4ciation et A révi.ion par 1. Trib~lt Article 26 1. Le. débats sont dirigés par le Président ou, .'il •• t e~cbé, par 1. Vice-Pré.id.nt, .i l'un et l'autre sont eapAché., l.s débats sont dirigé. par le plua ancien de. juge. pr4aents du Tribunal. 2. L'audience est publique, A Rloins que le TriDunal n'en déci.d. autre..nt ou. .... 1•• parUe. ne d_ndent le bui.-clo.. Article 27 COnduite du proc~s Le Tribunal rend de. ordonnance. pour la conduite du precis et la "'er.ination 15•• forae. et délais dan. lesquels chaque partie doit. finaleaent. _lure, 11 prend toute. les ....ure. que cOIIIpOrte ltadaini.traUon de. pr.u;,. •• · Article 28 ~ LKllqu'lIftIt ae. parti•• au cUff6(end n. Ille préunte palll ou ne fait pa. valoir ... ..,..., l'autre parti. peut d.mana.r au Tribunal de continuer la prooidure et . . ~ u éI4oi.ion. Z,'abae_ d'une pal'titll ou la fait, pour ... parU•• ,.. f.ir. valoir ••• aGy.na ne fait pa. obstacl. au d'roul....nt de la prociSur•• ..... de ren4r. sa éI4oision, la Tribunal doit .'a.8urer non aeuleaent qu'il. _l'Iall108 pour coMaltr. dù diff6rend. _il/l que la de_rade e.t fondée en rait et . . . . .t. '.111& Article 29 Najo~itér!iUi •• pou~ 1. la priee de décisions LI. G6ei.ion. du Tribunal sont pri.e. l la aajorité de. ~r.1/I prlee.ta. 2. lin cr•• cie partage 6gal de. voix. lavoi. cJu P~'sident ou d. son IIIIIJe;ant •• t pr~raJlt•• Article 30 3. IIi le jllge..nt n'expd... pas, on tout ou on ..~U •• l'opinioll unaniae ... ...aItce. cJu TrlbuMll, tout ~ ...e III le droit cI'y joindre l'expoa' de son opinion laI1.iduel1e ou di ••id.nt•• c. Le j~nt ••t signé par 10 pré.ident et par 1. G....ffi.r. . . . _11'111., 1•• parti•• ayant: été ~nt prévenu••• VoL 1834, 1-31363 Il •• t lu .D 1994 United Nations - Treaty Series • Nations Unies - 167 Recueil des Traités 1. Lor"u'un Et.t P.rtie e.ti.. que, d.n. un différend, un int,~at d'ordre ,urldltye •• t pour lui en cau•• , il peut .dr••••r au Tribun.l un. r.qulte aux fina .'IIlt:.ftIltion. 2. r. Tribunal •• prononc••ur 1. r.qult•• 3. .i 1. Tribunal" f.it droit l 1. requate, .a d4oi.ion concernant le .lff6r.nd •• t oblig.toire pour l'Et.t interv.nant dan. l . . . .ur. o~ .lle DO rappect:e .ux point. fai ••nt l'objet de l'intervention. ArtiCle 32 Droit a'intervention l propo. de que.tiona 4'interprét.tion ou d'applloation 1. Lorsqu'une que.tion d'interprétation ou d'.pplic.tion 4e la convention .. po.. , le Greffier en avertit .ana délai tous le. Btat. Parti... 2. Lorsque, 4ans le c.dre de. article. 21 et 22 de la pr4.ente annexe, une que.tion d' interprétation ou a' application d' un accord international .. poee," l, Greffier en avertit toute. les pertie. l cet accord. 'ut... 3. Ch.que partie vi.ée aux paragraphe. 1 et 2 • le droit d'intervenir .u prool., .i elle exerce cette f.cult'. l'interprét.tion contenue dan. le nt e.t ".lement obligatoire l .on "ard. Article 33 caract.re 44finitif et force oblig.toire 4e. d4eiaiOPa 1. La décision du Tribunal e.t 44finitive et toute. le. partie••u diff6rend doivent .'y conformer. 2. La dioi.1on du Tribunal n'est obligatoire que pour les partie. et dan. 1. ca. qui a ét' d6c1dé. 3. BD ca. de contestation sur le sens et la portée de 1. déciaion, il appartient au Tribunal de l'interpréter, l la dem.nde de toute partie. Article 34 Frais de procédure A moins que le Tribunal n'en décide autrement, chaque partie aupperte ... frais de procédure. SECTION 4. CHAM8RE POUR LE REGLEMBNT DES DIFFERENDS RELATIFS AUX FONDS MARINS Article 35 composition 1. La Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins vi", l l'article 14 de la présente annexe se compose de 11 membres choisis par le Tribunal "parmi ses membtes élus, à la majorité de ceux-ci. VoL 1834, 1-31363 168 United Nations - Treaty Series • Nations Unies - Recueil des Traités 1994 2. Dans le choix des membres de la Chambre, la représentation des principaux ayatimea juridiques du monde et une répartition géographique équitable sont aaaurées. L'Assemblée de l'Autorité peut adopter des recommandations d'ordre général concernant cette représentation et cette répartition. 3. Les membres de la Chambre sont choisis tous les trois ans et leur Mandat ne peut @tre renouvelé qu'une fois. '4. La chàmorè élit son Président parmi ses membres, le Président reste en fonction pendant la durée du, mandat de la Chambre. 5. Si des affaires étaient en instance à la fin de toute période de trois ans pour laquelle la Chambre a été choisie, celle-ci achève d'en connaitre dans sa coaposition initiale. 6. Lorsqu'un siège devient vacant à la cnambre, le Tribunal Choisit parmi aes membres élus un successeur qui achève le mandat de son prédécesseur. 7. un quorum de sept des membres chols1spar le Tribunal est requis pour conatituer la Chambre. Article 36 Chambres ad hoc 1. La Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins constitue une chambre ad hoc, composée de trois de ses membres, pour connattee d'un différend déterminé dont elle est saisie conformément à l'article 188, paragraphe l, lettre b). La composition de cette chambre est arrêtée par la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins avec l'assentiment des parties. 2. Si les parties ne s'entendent pas sur la composition d'une chambre ad hoc, chaque partie au différend nomme un membre et le troisièmeme~re est nomœ6 ~omaun accord entre elles. Si les parties ne peuvent s'entendre ou si une partie ne nomme pas de membre, le Président de la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins nOlIIIIIe sanS délai le ou les membres manquants. qui sont choisie parmi les membres de cette Chambre, après consultation des parties. 3. Lae . .abre. d'une chambre ad hoc ne doivent atr. au a.rviee d'eucune ... ni 'tr. res.orti.~ant. d'aucune d'entre ell••• ~tl•• eu dlff6rend, ArUcle37 LI Cbaabre eet ouverte aux Etat. Partie., l l'Autorit"et aux aatr.. entlt6e OU "nonne. vill6o. l 111 aectionS de la parUe XI. Article 38 Drolt appllcable OUtre l'article 293, la Chambre applique : ., le. règl•• , règlements et procédure. de l'Autorit6 aaoptéa'èon!ora6aent l 111 QIn".ntlon, et b) 1•• clau.ea de tout contrat relatif l de. activitia . .nie. daft8 la 10... 1 propos d. tout•• questions se rapportant l ce contrat. VoL 1834, 1-31363 1994 United Nations - Treaty Series • Nations Unies - Recueil des Traités 169 Article 39 Bx6autioft des décisions de la Ch!!bre Lea d6cialons de la ,Chambre sont e~cutoir.s sur le territoire de. Btata au .... titre que 1•• arrats ou ordonnances da la plu. hauta in.tanae ''''=iaire de l'Etat Partie sur le territoire duqual l'a-'cution •• t d~. "~tie. Article 40 Application des autres lIIection. de la F'.ente annexe 1. Le. disposition. de. autres .ection. de la pr4.enta annaxe qui ne sont pe. incoapatible. avec la présente section s'appliquent. la Chaabre. 2. DIna l'exercice ae se. attribution. con.ultative., la Ob"'re .'in.pire des dispo.itions de la pr'.ente annexe relative•• la proc6dùre .uivie devant le !Tibunal, dan. la ..aure o~ elle 1•• reconnatt applic.ble•• ArUcle n 1. Le. ...nde..nt. l 1. pr'••nte .nn.x. .utre. que c.ux rel. tif. l 1• • ection • ne peuvent 'tre .dopté. que conforméaant l l'article 313 ou par con.en.u. au .ein d'une conférence convoqu'. c:onformi..nt l 1. COnv.ntion. 2. Les ...nde..nts l 1. section • ne peuvent Itre .dopté. que confor....nt l l'article 31•• 3. Le '1'ribunal peut. par voie de ca.lunic.Uons 6c:rites. BOWiettr. ~ l' .....n d•• at.t. '.rti.s 1•• proposition. d'aœend...nts l la pr'••nt••nn.x. 'qu'il jute n6c •••• ir•• , confor._nt .ux p.ragr.phe. l .t 2. VoL 1834, 1-31363 170 United Nations - Treaty Series • ANNBXB VII. Nations Unies - Recueil des Traités 1994 ADlftAGB Articl. pr!!1er Ouverture d. la RE0c!4ur. Sous réserve de la partie XV, toute parti. à un différend peut soumettre celui-ci à la procédure d'arbitrage prévue dan. la pré.ente annexe par notification écrite adre ••ée à l'autre ou aux autre. parties au différend. ~ notification e.t accompagnée de l'exposé des conclusion. et de. motifs .ur le.quels elles s. fondent. Article Z Li.te d'arbitres 1. Le Secrétaire général de l'Organisation de. Nations uni.s dr •••• et ti.nt une liste d'arbitre.. enaque Etat Partie peut désigner quatre arbitres ayant l'expértence de. question. maritimes et joui.sant de la plu. haute r'putation d'impartialité, de compétence et d'intégrité. Le nom de. per.onne. ain.i dé. ignée. est inscrit sur' la liste. 2. Si, à un moment quelconque, le nombre de. arbitre. dé. ignés par un Etat Partie et figurant sur la liste est inférieur • quatre, cet Btat peut procéder aux désignations supplémentaires auxquelles il a droit. 3. Le nom d'un arbitre reste sur ·la liste jusqu'. ce qu'il en soit retiré par l'Etat Partie qui l'a dé.igné, étant entendu que cet arbitre continue de siéger au sein de tout tribunal arbitral auquel il a été nommé jusqu'à ce que la procédure devant ce tribunal soit achevée. Article 3 Constitution du tribunal arbitral Aux fin. de la procédure prévue dans la pré.ente annexe, le tribunal arbitral, à moins que les parties n'en conviennent autrement, est con.titué de la façon suivante al membres, sous r.iserve de la lettre g), le tribunal arbitral s. cOlllpose de cinq b) la partie qui ouvre la procé:lure nOllll1l. un m.mbre qui e.t choisi de préférence sur la liste vi"e à l'article 2 de la pré•• nt. annexe et qui peut 'tre de ses ressortissant.. Le nom du membre ain.i nommé figure dan. la notification vi.ée à l'article premier de la présente annexe, cl l'autre partie au différend nOllll1le, dans un délai de 30 jours a compter de la réception de la notification visée a l'article pre.ier de la présente annexe, un membre qui e.t choisi de préférence .ur la li.te et qui peut atre d. ses ressortissants. si la nomination n'intervient pa. dans ce délai, la partie qui a ouvert la procédure peut, dans les deux semaines qui .uiv.nt l'expiration du délai, demander qu'il soit procédé à cet·te nomination conformé_nt à la lettre e), dl les trois autres membres sont nommés d'un commun accord par les parties. rls sont choisis de préférence sur la liste et sont ressortissants d'Etats tiers, à moins que les parties n'en conviennent autrement. LeS partieE nomment le préSident du tribunal arbitral parmi ces trois membres. Si, dans un délai de 60 jours à compter de la réception de la notificati9n visée à l'article premier de la présente annexe, les parties n'ont pu s'entendre sur la nomination d'un ou de plusieurs des membres du tribunal à désigner d'un commun accord, ou sur celle du président, il est procédé à cette nomination ou à ces nominations conformément à la lettre el, à la demande de toute partie au différend. Cette demande est présentée dans les deux semaines qui suivent l'expiration du délai précité, VoL 1834, 1-31363 1994 United Nations - Treaty Series Nations Unies - Recueil des Traités 171 el à moins que les parties ne conviennent de charger une personne ou un Etat tiers choisi par elles de procéder aux nominations nécessaires en application des lettres cl et dl, le Président du Tribunal international du droit ~e la mer y procède. Si celui-ci est empêché ou est ressortissant de l'une des parties, les nominations sont effectuées par le membre le plus ancien du Tribunal qui est disponible et qui n'est ressortissant d'aucune des parties. Il est procédé à ces nominations en choisissant sur la liste visée à l'article 2 de la présente annexe dans un délai de 30 jours à compter de la réception de la demande et en consultation avec les parties. LeS membres ainsi nommés doivent être de nationalités différentes et n'être au service d'aucune des parties au différend, ils ne doivent pas résider habituellement sur le territoire de l'une des parties, ni être ressortissants d'aucune d'ellesl fI il est pourvu à tout siège vacant de la mani~re prévue pour la nomination initialel gl les parties qui font cause commune nomment conjointement un membre du tribunal d'un commun accord. Lorsqu'il y a en présence plusieurs parties qui font cause séparée, ou en cas de désaccord sur le point de savoir si elles font cause commune, chacune d'entre elles nomme un membre du tribunal. Le nombre des membres du tribunal nommés séparément par les parties doit toujours @tre inférieur d'un au nombre des membres du tribunal nommés conjointement par les parties, hl les lettres al à f) s'appliquent dans toute la mesure du possible aux différends opposant plus de deux parties. Article 4 Fonctions du tribunal arbitral Un tribunal arbitral constitué selon l'article 3 de la présente annexe exerce ses fonctions conformément à la présente annexe et aux autres dispositions de la Convention. Article 5 Procédure A moins que les parties n'en conviennent autrement, le tribunal arbitral arr@te lui-même sa procédure en donnant à chaque partie la possibilité d'être entendue et d'exposer sa cause. Article 6 Obligations des parties Les parties au différend facilitent la tâche du tribunal arbitral et, en partiCUlier, conformément à leur législation et par tous les moyens à leur disposition , al lui fournissent tous les documents, facilités et renseignements pertinents et b) lui donnent la possibilité, lorsque cela est nécessaire, de citer et d'entendre des témoins ou experts et de se rendre sur les lieux~ Article 7 A moins que le tribunal arbitral n'en décide autrement en raison des circonstances partiCUlières de l'espèce, les frais du tribunal, y compris la rémunération de ses membres, sont supportés à parts égales par les parties au différend. VoL 1834, 1-31363 172 United Nations - Treaty Series • Nations Unies - Recueil des Traités 1994 Article 8 Majorité reguise pour la prise de décisions Les décisions du tribunal arbitral sont prises à la majorité de ses membres. L'absence ou l'abstention de moins de la moitié de ses membres n'empêche pas le tribunal de statuer. En cas de partage égal des voix, la voix du président est prépondérante. Article 9 Lorsqu'une des parties au différend ne Se présente pas ou ne fait pas valoir ses moyens, l'autre partie peut demander au tribunal de poursul'vre la procédure et de rendre sa sentehee. L'absence d'une partie ou le fait pour une partie de ne pas faire valoir ses moyens ne fait pas obstacle au déroulement de la procédure. Avant de rendre sa sentence, le tribunal arbitral doit s'assuret non seulement qu'il a compétence pour connaltre du différend, mais que la demande est fondée en fait et en droit. Article 10 Sentence La sentence du tribunal arbitral est limitée à l'objet du différend, elle est motivée. Elle mentionne les noms des membres du tribunal arbitral qui y ont prls part et la date à laquelle elle est rendue. Tout membre du tribunal peut joindre à la sentence l'exposé de son opinion individuelle ou dissidente. Article 11 Caractère définitif de la sentence La sentence est définitive et sans appel, à moins que les partie. au différend ne .oient convenues à l'avance d'une procédure d'appel. TOutes le. partie. au différend doivent s'y conformer. Article 12 Interprétation ou exécution de la sentence 1. TOute contestation pouvant .urgir entre les partiea au différend en ce qui concerne l'interprétation ou la .anière d'exécuter la sentence peut Itre sau.i.. par l'une ou l'autre des parties à la décision du tribunal arbitral qui a prononcé la sentence. A cet effet, il est pourvu aux sUges devenus vacants .elon la a6thode prévue pour la nomination initiale des .embres du tribunal. 2. Si toutes le. parties au différend en conviennent, toute contestation de ce genre peut Itre soumise à une autre cour ou à un autre tribunal, confora6. .nt 1 l'arUcle 287. Article 13 APplication à des entités autres que les Etats Parties La présente annexe S'applique mutatis .utandis à tout différend . .ttant en cau.e de. entités autres que les Etats Parties. Vol. 1834, 1-31363 1994 United Nations - Treaty Series Nations Unies - Recueil des Traités ANNEXE VIII. ARBITRAGE SPECIAL 173 Article premier Ouverture de la procédure Sous réserve de la partie XV, toute partie à un différend relatif à l'interprétation ou à l'application des articles de la Convention concernant 1) la plche, 2) la protection et la préservation du milieu marin, 3) la recherche scientifique marine ou 4) la navigation, y compris la pollution par les navires ou par immersion, peut soumettre ce différend à la procédure d'arbitrage spécial prévue dans la présente annexe par notification écrite adressée à l'autre ou aux autres parties au différend. La notification est accompagnée de l'exposé des conclusions et des motifs sur lesquels elles se fondent. Article 2 Listes d'experts 1. Une liste d'experts est dressée et tenue pour chacun des domaines suivants : 1) la pêche, 2) la protection et la préservation du milieu marin, 3) la recherche scientifique marine, 4) la navigation, y compris la pollution par les navires ou par immersion. 2. En matière de pêche, la liste d'experts est dressée et tenue par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, en matière de protection et de préservation du milieu marin par le Programme des Nations Unies pour l'environnement, en matière de recherche scientifique marine par la Commission océanographique intergouvernementale, en matière de navigation, y compris la pollution par les navires ou par immersion, par l'Organisation maritime internationale, ou, dans chaque cas, par l'organe subsidiaire approprié auquel l'organisation, le programme ou la commission en question a délégué cette fonction. 3. Chaque Etat Partie peut désigner, dans chacun de ces domaines, deux experts qui ont une compétence juridique, scientifique ou technique établie et généralement reconnue en la matière et qui jouissent de la plus haute réputation d'impartialité et d'intégrité. Dans chaque domaine, la liste est composée des noms des personnes ainsi désignées. 4. Si, à un moment quelconque, le nombre des experts désignés par un Etat Partie et figurant sur une liste est inférieur à deux, cet Etat peut procéder aux désignations supplémentaires auxquelles il a droit. 5. Le nom d'un expert reste sur la liste jusqu'à ce qu'il soit retiré par l'Etat Partie qui l'a désigné, étant entendu que cet expert continue de siéger au sein de tout tribunal arbitral spécial auquel il a été nommé jusqu'à ce que la procédure devant ce tribunal soit achevée. Article 3 COnstitution du tribunal arbitral spécial Aux fins de la procédure prévue dans la présente annexe, le tribunal arbitral ap&cial, l moins que les parties n'en conviennent autrement, est constitué de la façon suivante a) sous réserve de la lettre g), le tribunal arbitral spécial se compose de cinq _libres, Vol. 1834, 1-31363 174 United Nations - Treaty Series • Nations Unies - Recueil des Traités 1994 bl la partie qui ouvre la procédure nomme deux membres, qui sont choisis de préférence sur la ou les listes visées à l'article 2 de la présente annexe se rapportant à l'objet du différend, et dont l'un peut Itre de ses ressortissants. Le no. des membres ainsi nommés figure dans la notification visée à l'article premier de la présente annexe, cl l'autre partie au différend nomme, dans un délai de 30 jours à compter de 1. réception de 1. notification visée à l'article premier de la présente annexe, deux . .mbres qui sont choisis de préférence sur la liste ou les listes se rapportant à l'objet du différend, et dont l'un peut atre de ses ressortissants. Si 1. nomination n'intervient pas dans ce délai, la partie qui a ouvert la p~ure peut, dans les deux semaines qui suivent l'expiration du délai, demonder qu'il soit procédé à cette nomination conformément à la lettre el, dl le. parties nomment d'un commun accord le président du tribunal arbitral spécial, qui est choisi de préférence sur la liste appropriée et est ressortissant d'un Btat tiers, à moins que les parties n'en conviennent autrement. Si, dans un délal de 30 jours à compter de la réception de la notification visée à l'article premier de 1. présente annexe, les parties n'ont pu s'entendre sur la nomin.tion du pré. ident , il est procédé à cette nomination conformément à la lettre el, à la d...nde de toute partie au différend. cette demande est présentée dans les deux .... ines qui suivent l'expiration du délai précité, el à moins que les parties ne conviennent d'en charger une personne ou un Etat tiers cnoisi par elles, le Secrétaire général de l'Organisation des Mations Unies procède aux nominations nécessaires dans un délai de 30 jours à compter de la réception d'une demande faite en application des lettres clou dl. Il est procédé à ces nominations en choisissant sur la ou les listes d'experts visées à l'article 2 de la'présente annexe qui sont appropriées, en consultation avec les parties au différend et avec l'organisation internationale appropriée. Le. membres ain.i nommés doivent ftre de nationalités différente. et n'atre au service d'aucune des parties, au différend, ils ne doivent pas ré.ider habituellement sur le territoire de l'une des parties, ni ftre ressorti ••ant. d'.ucune d'elles, fI il est pourvu à tout siège vacant de la manière prévue pour la nomination initi.le, 91 les partie. qui font cause commune nomment conjointement deux membre. du tribunal d'un comaun accord. Lorsqu'il y a en pré.ence plu.ieur. partie. qui font c.u.e .éparée, ou en cas de dés.ccord sur le point de .avoir si elle. font c.u.. commune, chacune d'entre elle. nomme un membre du tribun.l, h) le. lettre • •1 à f) .'appliquent dans toute la me.ure du po•• ible .ux différend. oppo.ant plu. de deux partie •• Article 4 Dispositions génér.le. , Les .rticle. 4 à 13 de l'annexe VII .·appliquent mut.ti. mutandis à 1. procédure d'.rbitrage spécial prévue dans la pré.ente annexe. Article 5 Et.blissement des fait. 1. Le. partie. ~ un différend relatif à l'interprétation ou A l'applic.tion d •• di~.itlon. de 1. Convention qui concernent 1) la plche, 2) 1. protection et la préserv.tion du milieu marin, 3) la recherche scientifique marine ou 4) 1. navig.tion, y compris la pollution p.r le. n.vire. ou par immer.ion, peuvent à tout aaaent convenir de demander l un tribun.larbitr.l spéCial con.titué confor-'..nt l l'.rticle 3 de 1. pré.ente annexe de procéder lune enquite et à l·ét.bli .....nt d •• faita à l'origine du différend. VoL 1834, 1-31363 1994 United Nations - Treaty Series • Nations Unies - Recueil des Traités 175 2. A 80ins que le. partie. n'en conviennent autrement, le. faits constat's par le tribunal arbitral .p4cial en application du paragraphe 1 .ont considérés Co.Me établis entre le. partie •• 3. Si toute. le. partie. au différend le demandent, le tribunal arbitral spécial peut for.uler de. recommandation. qui n'ont pa. valeur de d'ci.ion et con.tituent .eulement la ba.e d'un réexamen par le. partie. de. que.tion. l l'origine du différend. 4. Sou. ré.erve du paragraphe 2. le tribunal arbitral .pécial •• confor•• l la pré••nte annex., l moine que 1•• partie. n'.n conviennent autrement. Vol. 1834, 1-31363 176 United Nations - ANNEXE IX. Treaty Series • Nations Unies - Recueil des Traités 1994 PARTICIPATION D'ORGANISATIONS INTERNATIONALBS Article premier Emploi du terme ·organisation internationale" Aux fins de l'article 305 et de la présente annexe, on entend par ·organisation internationale" une organisation intergouvernementale con.titu" d'Bt~ts qui lui ont transféré compétence pour des matières dont traite la Convention, y compris ia compétence pour conclure des traités sur ces meti~re•• Article 2 Signature Une organisation internationale peut signer la Convention si la . . jorité de ses Etats membres en sont signataires. Au moment où elle signe la Convention, une organisation internationale fait une déclaration spécifiant les metières dont traite la Convention pour lesquelles ses Etats membres signataires lui ont transféré compétence, ainsi que la nature et l'étendue de cette ccap6tence. Article 3 Confirmation formelle et adhésion 1. Une organisation internationale peut déposer son instrument de confirmation formelle ou d'adhésion si la majorité de ses Etats membres d~sent ou ont déposé leurs instruments de ratification ou d'adhésion. 2. L'instrument déposé par l'organisation internationale doit contenir le. engagements et déclarations prescrits aux articles 4 et 5 de la présente anne.e. Article 4 Etendue de la participation, droits et obligations 1. L'instrument de confirmation formelle ou d'adhésion dépo" par une organisation internationale doit contenir l'engagement d'accepter, en ce qui concerne les matières pour lesquelles compétence lui a été transférée par ... at.ta membres Parties A la Convention, les droits et obligations prévus par la Convention pour les Etats. 2. Une organisation internationale est Partie à la Convention dan. le. liaites de la compétence définie dans les déclarations, communications ou notifications visées à l'article 5 de la.présente annexe. 3. En ce qui concerne les matières pour lesquelles ses Etats . ..are• •arti.. à la Convention lui ont transféré compétence, une organisation internationale exerce les droita et S'acquitte des Obligations qui autrement .eraient ceux de c •• Etata en vertu de la Convention. LeS Etats membres d'une organisation internationale n'exercent pas la compétence qU'ilS lui ont transférée. 4. La participation d'une organisation internationale n'entralne en aucun cas une représentation supérieure à celle à laquelle ses Etats membres Parties à la Convention pourraient autrement prétendre; cette disposition s'applique notamment aux droits en matière de prise de décisions. 5. La participation d'une organisation internationale ne confère à ses Etats membres qui ne sont pas Parties à la Convention aucun des droits prévus par celle-ci. Vol. 1834, 1-31363 1994 United Nations - Treaty Series Nations Unies - Recueil des Traités 177 6. En cas de conflit entre les obligations qui incombent à une organisation internationale en vertu de la Convention et celles qui lui incombent en vertu de l'accord instituant cette organisation ou de tout acte connexe, les obligations découlant de la Convention l'emportent. Article 5 Déclarations, notifications et communications 1. L'instrument de confirmation formelle ou d'adhésion d'une organisation internationale doit contenir une déclaration spécifiant les matières dont traite la Convention pour lesquelles compétence lui a été transférée par ses Etats membres parties à la Convention. 2. Un Etat membre d'une organisation internationale, au moment où il ratifie la Convention ou y adhère, ou au moment où l'organisation dépose son instrument de confirmation formelle ou d'adhésion, la date la plus tardive étant retenue, fait une déclaration spécifiant les matières dont traite la Convention pour lesquelles il a transféré compétence à l'organisation. 3. Les Etats Parties membres d'une organisation internationale qui est partie à la Convention sont présumés avoir compétence en ce qui concerne toutes les matières traitées par la Convention pour lesquelles ils n'ont pas expressément indiqué, par une déclaration, communicat~on ou notification faite conformément au présent article, qu'ils transféraient compétence à l'organisation. 4. L'organisation internationale et ses Etats membres Parties à la Convention notifient promptement au dépositaire toute modification de la répartition des compétences spécifiée dans les déclarations visées aux paragraphes l et 2, y compris les nouveaux transferts de compétence. 5. Tout Etat Partie peut demander à une organisation internationale et aux Etats membres de celle-ci qui sont Parties à la Conventton d'indiquer qui, de l'organisation ou de ces Etats membres, a compétence pour une question précise qui s'est posée. L'organisation et les Etats membres concernés communiquent ce renseignement dans un délai raisonnable. Ils peuvent également communiquer un tel renseignement de leur propre initiative. 6. La nature et l'étendue des compétences transférées doivent être prec~sees dans les déclarations, notifications et communications faites en application du présent article. Article 6 Re sponsabil ité 1. Les parties ayant compétence en vertu de l'article 5 de la présente annexe sont responsables de tous manquements aux obligations découlant de la Convention et de toutes autres violations de celle-ci. 2. Tout Etat Partie peut demander à une organisation internationale ou à ses Etats membres parties à la Convention d'indiquer à qui incombe la responsabilité dans un cas particulier. L'organisation et les Etats membres concernés doivent communiquer ce renseignement. S'ils ne le font pas dans un délai raisonnable ou .'ils communiquent des renseignements contradictoires, ils sont tenus pour conjointement et solidairement responsables. Vol. 1834, 1-31363 178 United Nations - Treaty Series • Nations Unies - Recueil des Traités 1994 Article 7 Règlement de différends 1. Lorsqu'elle dépose son instrument de confirmation formelle ou d'adhésion, ou à n'importe quel moment par la suite, une organisation internationale est libre de choisir, par voie de déclaration écrite, un ou plusieurs des moyens visés à l'article 287, paragraphe l, lettres al, cl et dl, pour le règlement des différends relatifs à l'interprétation ou à l'application de la Convention. 2. La partie XV s'applique mutatis mutandis à tout différend entre des Parties à la Convention dont une ou plus~eurs sont des organisations internationales. 3. LOrsqu'une organisation internationale et un ou plusieurs de ses Etats membres font cause commune, l'organisation est réputée avoir accepté les mêmes proc~ures de règlement des différends que ces Etats; au cas où un de ces Etats a choisi uniquement la Cour internationale de Justice en application de l'article 287, l'organisation et cet Etat membre sont réputés avoir accepté l'arbitrage selon la procédure prévue à l'annexe VII, à moins que les parties au différend ne conviennent de choisir un autre moyen. Article 8 APplication de la partie XVII La partie XVII s'applique mutatis mutandis aux organisations internationales, sous réserve des dispositions suivantes 1 al l'instrument de confirmation formelle ou d'adhésion d'une organisation internationale n'entre pas en ligne de compte pour l'application de l'article 308, paragraphe 1; b) c) il une organisation internationale a la capacité exclusive d'agir au titre des articles 312 à 315 si elle a compétence, en vertu de l'article 5 de la présente annexe, pour l'ensemble de la matière visée par l'amendementl ii) lorsqu' une organisation internationale a compétence en vertu de l'article 5 de la présente annexe pour l'ensemble de la matière visée par l'amendement, son instrument de confirmation formelle ou d'adhésion concernant cet amendement est considéré, pour l'~plication de l'article 316, paragraphes l, 2 et 3, comme constituant l'instrument de ratification ou d'adhésion de chacun ds sss Btats membres Partie à la Convention, i11) l'instrument de confirmation formelle ou d'adhésion d'une organisation internationale n'entre pas en ligne de compte pour l'~plication de l'article 316, paragraphes 1 et 2, dans tous l.s autrss cas, i) aux fins de l'article 317, une organisation internationale qui coapts parmi ses membres un Etat Partie à la Convention et qui continue de remplir les conditions prévues à l'article premier de la présente annexe ne peut pas dénoncer la Convention, ii) une organisation internationale doit dénoncer la Convention si elle ns compte plus parmi ses membres aucun Etat Partie ou si elle a csssé de remplir les conditions prévues à l'article premier de la préssnts annexe. La dénonciation prend effet immédiatement. Vol. 1834, 1-31363.
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French-Science-Pile
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Courant (fA) Temps de réponse mesuré (s) Temps de réponse (s) (Held et al. 2007) 10 000 40 000 100 000 400 000 14,8 ± 0,8 3,7 ± 0,3 1,6 ± 0,1 0,6 ± 0,1 14,2 ± 0,3 3,8 ± 0,2 1,6 ± 0,1 0,7 ± 0,1 Tableau II.1 : Comparaison des temps de réponse mesurés avec la littérature suivant la sensibilité des électromètres Pendant les campagnes de mesure, la sensibilité de l'ELPI a donc due être adaptée en fonction de la concentration d'aérosol ou de la stabilité atmosphériques. Néanmoins, le réglage des électromètres sur 100 000 fA, et dans une certaine mesure 40 000 fA est un bon compromis entre un temps de réponse assez rapide et les faibles concentrations d'aérosols observables dans l'environnement. II.2.3 Limite de détection des appareils de mesure La détermination de la limite de détection des appareils de mesures permet, si nécessaire, d'éliminer des mesures en dessous de cette limite. Les limites de détections sur la mesure du nombre de particules sont calculées comme étant trois fois l'écart type du niveau de bruit obtenu sur chaque étage alors qu'aucune particule n'est présente dans l'appareil. Pour cela on utilise l'inversion du flux d'air dans la colonne à impaction. L'ensemble de ces mesures est présenté dans le Tableau II.2 et Figure II.6. D'une manière générale, on observe que les diamètres des particules les plus grands ont les limites de détections les plus faibles. De plus, la sensibilité la plus précise est aussi celle dont la limite de détection est la plus faible. Toutefois, excepté sur les trois derniers plateaux (10, 11 et 12), les concentrations mesurées lors des campagnes d'observation dépasseront largement les limites de détection (Cf. Annexe A). Etage Limite de Limite de Limite de Limite de Diamètre détection détection détection détection (μm) (particules.cm-3) (particules.cm-3) (particules.cm-3) (particules.cm-3) à 400 000 fA à 100 000 fA à 40 000 fA à 10 000 fA 1 0,014 819,30 245,10 72,83 20,00 2 0,041 169,50 62,29 20,84 6,34 3 0,074 76,25 22,06 7,54 4,06 4 0,122 29,82 7,34 4,35 1,22 5 0,202 20,02 6,41 2,88 1,00 6 0,316 11,32 3,29 1,33 0,74 7 0,484 6,38 2,56 0,82 0,31 8 0,762 3,47 1,11 0,40 0,25 9 1,231 2,13 0,44 0,32 0,10 10 1,956 1,12 0,31 0,19 0,05 11 3,092 0,68 0,20 0,07 0,02 12 6,309 0,22 0,08 0,03 0,01 Tableau II.2 : Limite de détection de l'ELPI en fonction du diamètre des particules pour différentes sensibilités des électromètres 66 1000 400 000 fA -3 Sensibilité (particules.cm ) 100 000 fA 100 40 000 fA 10 000 fA 10 1 0,1 0,01 0,01 0,1 1 10 Diamètre géométrique (μm) Figure II.6: Evolution de la limite de détection de l'ELPI en fonction du diamètre des particules pour différentes sensibilités des électromètres La gamme des mesures de la vitesse du vent et de la température à l'aide de l'anémomètre YOUNG 8100 est de 0 à 40 m.s-1 pour la vitesse du vent de de -50 à 50°C pour la température avec une précision de 0,01 dans les deux cas. II.3 Méthodes de traitements des données Cette partie regroupe l'ensemble du traitement de données nécessaire au calcul de la vitesse de dépôt sec des aérosols. Ce traitement des données est rendu nécessaire afin de respecter les limites d'utilisation (Cf II.1) de la méthode d'analyse par corrélation turbulente mais aussi de diminuer les incertitudes sur les résultats obtenus. Dans un premier temps, sont décrites les étapes permettant l'exploitation des données et en particulier les principaux tests de qualités des données. Ensuite, une méthode originale, basée sur l'analyse spectrale, a été développée dans l'optique d'identifier et de corriger les perturbations en haute et basse fréquences du flux vertical d'aérosol. La méthode contraignante à mettre en oeuvre, car nécessitant l'analyse de chaque cospectre (environ 12000 dans 67 cette étude), est une approche physique de la nature des flux par similitude spectrale dans la couche de surface (Kaimal, 1994). Cette démarche permet ainsi une diminution des incertitudes sur les mesures de flux. Ce dernier point sera particulièrement discuté et confronté aux méthodes classiquement utilisées dans la littérature. II.3.1 Etape du traitement de données La Figure II.7 synthétise chronologiquement l'ensemble de la chaîne de traitement des données permettant d'obtenir les vitesses dépôts sec des aérosols. La correction hautes et basses fréquences est établie à partir de la similitude spectrale dans la couche de surface. Cette méthode a été mise au point en se basant sur les travaux de Lamaud et al. (1994b). Le choix de cette méthode est discuté à la fin de cette partie (II.3.4), notamment en la confrontant à une méthode classique d'évaluation de la stationnarité des signaux (Foken et al. 1996). Traitements Acquisitions des mesures brutes ELPI et Anémomètre Valeurs aberrantes et calage temporel à 10 Hz Routine FORTRAN Décalage temporel Rotation trigonométrique w = 0 Correction de la tendance linéaire sur c et T Logiciel EdiRe Calcul des paramètres turbulents Calcul spectral Test : couche à flux constant Correction haute et basse fréquences basée sur la similitude spectrale Macro Excel Vd Finales Figure II.7: Chaîne de traitement des données utilisées pour calculer la vitesse de dépôt Le logiciel ELPIVI V3.1 (Dekati Ltd.) est utilisé pour l'acquisition des données de concentration d'aérosols tandis que les vitesses de vent sont exploitées par un logiciel développé par le CORIA de Rouen. L'anémomètre et l'ELPI sont connectés au même ordinateur pour avoir un horodatage synchronisé. Pour 68 les deux appareils l'acquisition numérique des données est proche de 10 Hz. Des programmes développées en FORTRAN sont utilisées pour que les vitesses de vent et les concentrations soient échantillonnées à 10 Hz exactement en même temps. Si la fréquence d'acquisition dépasse les 10 Hz la mesure est rejetée. Le logiciel EdiRe développé par l'université d'Edinburgh (Clement, 1999) est utilisé pour calculer les spectres et les cospectres ainsi que tous les paramètres turbulents sur des périodes de 30 minutes. Le temps de retard (ou time lag) entre la mesure de concentration et la mesure de vent est environ égale à 3,5 secondes, il est déterminé par le logiciel par la meilleure corrélation entre les deux signaux. Toutefois, lorsque le temps résultant de la meilleure corrélation n'est pas compris entre 2 et 5 secondes la valeur de 3,5 secondes est prise par défaut. Cette valeur a été définie par des tests en laboratoire : un dirac très court de concentration d aérosols est généré et détecté instantanément par l'anémomètre et avec un délai par l'ELPI. La différence entre les deux mesures est prise comme temps de retard, le résultat de 3,5 secondes correspond à une moyenne sur plus d'une dizaine d'essais. Avec le logiciel EdiRe, deux rotations trigonométriques sont appliquées aux composantes du vent pour annuler la vitesse verticale moyenne et permettre ainsi la mesure des fluctuations turbulentes sans un biais de vitesse verticale. Dans la même optique, un filtre permettant de s'affranchir des tendances linéaires (ou filtre detrend) est appliqué aux mesures de concentrations et de température. Ce filtre permet d'enlever les contributions basses fréquences. Ensuite les covariances peuvent être calculées. σw z = c1.( ) c2 U* L Équation II .11 Les constantes c 1 et c2 sont donné s dans le Tableau II.3 Paramètre σw U* z/L C1 C2 1 > z/L > 0,032 2 1/8 0,032 >z/L> -0,032 1,3 0 -0,032 > z/L> -1 2 1/8 Tableau II.3 : Paramètre de la modélisation de σw U* suivant les conditions atmosphérique (Foken et al., 2005) 69 Si la différence entre les mesures et le modèle est supérieure à 30 %, les données sont rejetées. Ce modele empirique est basé sur la similarité entre le flux et la variance (Flux-variance similary). Il s'agit d'une déclinaison de l'équation générale de l'énergie cinétique turbulente permettant d'exprimer dans la couche de surface les écarts types normalisés suivant les cas de stabilités atmosphérique. Les mesures pour établir ces lois empiriques sont faites à partir de mesures des fluctuations par des anémomètres disposés à différents hauteurs dans la couche de surfaces et au dessus d'un terrain horizontalement homogène (Pal Arya, 2001). Une démarche similaire est réalisée sur le signal de la température. Paramètre z/L C1 C2 1 > z/L > 0,02 1,4 -1/4 σT 0,02 >z/L> -0,062 0,5 -1/2 T* -0,062 > z/L> -1 1 -1/4 -1 > z/L 1 -1/3 Tableau II.4 : Paramètre de la modélisation de σT T* suivant les conditions atmosphérique (Foken et al., 2005) Une analyse spectrale a été développée dans deux objectifs. D'une part vérifier la forme spectrale de façon à ce qu'il n'y ait que la turbulence atmosphérique qui soit le moteur du flux, d'autre part corriger la valeur du flux en se basant sur la théorie des similitudes dans la couche de surface (Kaimal 1972, II.3.2 Analyse des données dans le domaine spectrale La turbulence créée à la surface terrestre par les forces de flottabilité et le cisaillement du vent, est une superposition de tourbillons dont les échelles caractéristiques sont variées. L'analyse spectrale des fluctuations va permettre de déterminer les échelles caractéristiques de la turbulence et de développer une méthode de correction sur les fluctuations de concentrations en particule, correction nécessaire à cause du temps de réponse de l'appareil ELPI. Le spectre d'énergie d'un paramètre turbulent représente l'énergie S(n) associée aux fluctuations de cette variable en fonction de la fréquence de ces fluctuations. Dans la couche limite atmosphérique, le spectre d'énergie d'une variable turbulente se décompose en trois parties : Le domaine d'apport de l'énergie (faibles et moyennes fréquences), le domaine inertiel, qui correspond à un transfert d'énergie vers les hautes fréquences, le domaine dissipatif où l'agitation turbulente se dissipe en agitation moléculaire. La zone inertielle du spectre se caractérise par une décroissance de l'énergie en fonction de la fréquence suivant une loi en n–5/3, ce qui se traduit en représentation logarithmique par une pente de coefficient -5/3 (Kaimal et Finningan, 1994). La représentation du spectre d'énergie couramment utilisée est de la forme log(nS(n)) en fonction de log(n), le domaine inertiel étant alors représenté par une droite de pente -2/3. En effet, cette représentation présente l'avantage de faire apparaître plus nettement la limite inférieure de la zone inertielle puisqu'elle correspond alors au maximum de la courbe. De plus, les spectres normés à la variance du scalaire étudié ; ici, la vitesse verticale du vent, la température et la concentration d'aérosols atmosphériques se superposent lorsqu'ils sont tracés en fonction de la fréquence adimensionnée f (Kaimal et al. 1982) : f = n( z − d ) u Équation II.12 Avec n la fréquence naturelle, z la hauteur de mesure, d la hauteur de déplacement et u la vitesse moyenne du vent. Cette normalisation est utilisée dans le but de comparer l'allure des spectres de différents paramètres turbulents. Sur la Figure II.8 les cour des cospectres théoriques des flux de quantité de mouvement (uw) et du flux de chaleur sensible (wT) dans la couche de surface décrits par Kaimal et Finnigan (1994). On remarque que le cospectre du flux de chaleur présente une zone fixe en conditions instables (en hachuré sur la figure) alors qu'il se décale vers les hautes fréquences adimensionnées quand les conditions deviennent de plus en plus stables. Figure II.8: Cospectres théoriques de la quantité de mouvement et du flux de chaleur sensible dans la couche de surface atmosphérique (Kaimal et Finnigan, 1994). Les spectres de la vitesse verticale du vent, de la température et de la concentration d'aérosols normalisée à leurs variances respectives et tracés en fonction de la fréquence adimensionnée sont présentées Figure II.9, les données correspondent au mesures du 16 juin 2007 (11h30-12h) au dessus d'un champ de maïs (z - d = 5 m) et avec u = 0,5 m.s-1. On retrouve les p entes en -2/3 pour w, T et c (respectivement a), b) et c) sur la figure). Cependant dans le cas de la concentration atmosphérique un bruit blanc apparaît dans la zone des hautes fréquences (évolution tracée en pointillés). Cet artéfact est dû à au temps de réponse de l'ELPI mesuré précédemment, et qui conduit à une atténuation des fluctuations aux hautes fréquences. A hauteur de mesure constante, les variations de vitesses de vent et de stabilité atmosphérique ont un impact sur la taille des tourbillons mesurées, ce qui se traduit par un déplacement du spectre dans l'espace fréquentiel. L'atténuation du signal provoquée par le capteur ne dépendant que de l'appareil de mesure est relevée par la fréquence d'atténuation (natt et fatt en fréquence adimensionnée), qui reste la même quelles que soient les conditions micrométéorologiques. Lorsque le vent moyen et la stabilité atmosphérique augmentent, le spectre se déplace vers les hautes fréquences augmentant ainsi la perte spectrale. 72 n*S w / variance de w 10 a) 1 0,1 0,01 Vitesse du vent Pente en -2/3 0,001 n*S T / variance de T 10 b) 1 0,1 0,01 Temperature Pente en -2/3 0,001 n*S c / variance de c 10 1 Bruit blanc Pente =1 0,1 0,01 Concentration Pente en -2/3 0,001 0,001 0,01 0,1 1 Fréquence normalisée f = n(z-d)/u 10 100 f att =n att (z-d)/u Figure II.9: Spectres de la vitesse verticale du vent (a), de la température (b) et de la concentration d'aérosol (c) 73 Si nous notons CowX(n) la covariance spectrale de la vitesse verticale du vent et de la quantité scalaire, le flux réellement observée peut être mis sous la forme : nf F = w' X'= ∫ CowX (n) dn Équation II.13 n0 n0 est la fréquence la plus faible pouvant être mesurée sur un échantillonnage d'une durée t. Dans notre cas la durée des échantillons traités est d'une demi-heure, n0 est donc d'environ 10-3 Hz. De même nf correspond au seuil de réponse spectrale des appareils de mesure. Si l'on porte dans un diagramme le terme ncowx(n) en fonction du logarithme de la fréquence n, la covariance wX est représentée par la surface comprise sous la courbe comme le montre l'Équation II.14. log( n f ) F= ∫ nco wX (n)d (log(n)) Équation II.14 log( n0 ) Un exemple de cospectre est représenté Figure II.10 pour les corrélations w'T' et w'C'. Les cospectres ont été normalisés par leurs flux associés et tracés en fonction de la fréquence adimensionnée f. Pour la représentation de log(nCo(n)) en fonction de log(n), le domaine inertiel des cospectres est caractérisé par une pente en -4/3. Si elle est bien observable dans le cas de w'T', elle est moins évidente pour w'c' en raison de la perte spectrale observée précédemment sur le spectre de C' 74 a) n*Cospectra w'T' / flux 1 0,1 0,01 0,001 0,0001 Valeurs négatives de w'T' 0,00001 Valeurs positives de w'T' Pente en -4/3 0,000001 10,001 0,01 0,1 1 10 100 b) n*Cospectra w'c' / flux 0,1 0,01 0,00 1 0,00 01 0,00 001 Valeurs négatives de w'c' Valeurs positives de w'c' Pente en -4/3 0,000001 0,001 0,01 0,1 1 Fréquence normalisée : f = n(z-d)/u 10 100 Figure II.10: Cospectres correspondant au flux de chaleur (a) et au flux vertical d'aérosol (b) Le temps de réponse de l'ELPI ne permet pas d'atteindre une fréquence de mesure de 10 Hz qui permettrait de prendre en compte l'ensemble des échelles temporelles des tourbillons (pour des mesures à 6 m), nous avons été conduits à développer une correction fréquentielle du flux verticale d'aérosols. Les valeurs des cospectres pouvant être à la fois négatives et positives, la même représentation que Buzorius et al (2001) a été choisie : la valeur absolue des valeurs des cospectres est calculée et classée suivant son signe de départ (négatif en noir et positif en blanc). II.3.3 Correction fréquentielle du calcul de flux Dans le passé, la correction à appliquer à la valeur mesurée du flux, due au temps de réponse des capteurs était estimée par intégration numérique d'un modèle des cospectres. Ces résultats ont été illustrés sous forme graphique en utilisant de multiples courbes suivant les différentes conditions atmosphériques et les caractéristiques des capteurs (Moore, 1986; Wesely et al., 1989, Horst, 1997). De façon différente, les résultats illustrés Figure II.11 proposent une correction uniquement basée sur les mesures de cospectres et sur la similarité des comportements fréquentiels des scalaires dans la couche à flux constant. Lamaud et al. (1994b) ont observé une bonne similitude des profils sur l'ensemble de la gamme de fréquences pour les cospectres du flux de chaleur sensible, d'aérosol, d'ozone ou de vapeur. Néanmoins, les flux verticaux d'aérosols mesurés par Lamaud et al. correspondent à l'ensemble des particules de tailles comprises entre 0,05 et 1 μm, alors que notre appareil (ELPI) discrétise cette gamme de tailles. En vue de reprendre les résultats de Lamaud et al. (1994b), les comportements spectral de chaque étage sont confrontés à ceux de l'ensemble de ces étages. Des cospectres moyens ont été réalisés à partir d'une vingtaine de cospectres normalisés issue des journées 26 et 29 Juin 2008 (Landes 4 Cf III.4) et respectant les critères de qualité évoqués plus haut (stationnarité, intégrale turbulence caractéristique). Ces cospectres ont été choisis pour illustrer ces similarités car ils regroupent des statistiques de mesures validées sur une même journée et donc avec des normalisations en fonction des paramètres micrométéorologiques comparables. Toutefois, ils sont représentatifs des autres données l'ensemble des campagnes. La moyenne de ces cospectres correspondant au flux vertical d'aérosol (pour deux tailles différentes et pour la somme des neufs tailles mesurées par l'ELPI) est comparée à la moyenne des cospectres du flux de chaleur sensible Figure II.11. Les cospectres moyens des flux verticaux d'aérosols montrent des formes similaires pour les diamètres aérodynamiques des particules de 0,07 μm (étage 3), de 1,2 μm (étage 9) et pour l'ensemble des diamètres entre 0,007 μm et 1,6 μm (étages 1 à 9). Cette caractéristique prouve que la forme des cospectres de flux verticaux des aérosols normalisée ne dépend pas de la gamme de taille (entre 0,07 et 1,2 μm) dans la couche de surface. 76 1 n*Cospectre/flux 0,1 0,01 flux vertical d'aérosol étage 3 flux vertical d'aérosol étage 9 0,001 flux vertical d'aérosol étages 1 à 9 flux de chaleur sensible flux de chaleur sensible avec une perte spectrale 0,0001 0,001 0,01 0,1 1 10 100 Frequence normalisée : f = n (z-d )/u Figure II.11: Comparaison entre les différents cospectres moyens de flux vertical d'aérosol suivant plusieurs tailles et de flux de chaleur (Damay et al. 2009) Pour vérifier que cette différence est uniquement due à l'appareil, nous avons utilisé l'inverse de la fonction de transfert définie par Moore (1986, Équation II.15) pour simuler une perte spectrale pour le flux de chaleur sensible. Tτ (n) = 1 1 + (2πnτ ) 2 Équation II.15 Avec Tτ la fonction de transfert définie par Moore, τ le temps de réponse du capteur et n la fréquence. Les cospectres des flux verticaux d'aérosols ont alors la même forme que les flux de chaleur dont une perte à haute fréquence à été simulée, ce qui confirme la similarité spectrale dans la couche de surface (cf. Figure II.11). Pour tenir compte de la perte haute fréquence, une méthode de correction a été développée. Elle est basée sur la comparaison des cospectres normalisés des flux verticaux d'aérosol et de chaleur. La Figure II.12 représente la superposition des cospectres, normalisés par le flux et pondérés par la fréquence naturelle, correspondant au flux de dépôt (w'c') et au flux de chaleur sensible (H = ρ.Cp.w'T', noté w'T' et mesuré par l'anémomètre). Avec la représentation semi-logarithmique, l'aire sous la courbe correspond au flux. Par conséquent, en 77 normalisant les données des cospectres par leurs flux respectifs et compte tenu des similitudes spectrales, les formes des deux cospectres devraient être les mêmes. Il est alors possible de mettre en place une correction du flux. Le pourcentage perdu par le flux vertical d'aérosol est calculé, à partir de la partie non-atténuée du cospectre de flux de chaleur qui est mesuré avec une fréquence suffisante. Cette atténuation est mise en exergue par un cercle vert sur la Figure II.12. 0,3 w'T' n *Cospectre / flux. w'c' 0,2 Perte du au temps de réponse du capteur 0,1 0 0,001 0,01 0,1 1 10 100 Fréquence normalisée : f = n (z -d ) /u Figure II.12: Exemple de pertes spectrales pour les hautes fréquences du Cospectre du flux vertical d'aérosols (16/06/2007 11h00-11h30, étage 3) Outre le fait d'avoir la certitude que le cospectre a une forme régulière, l'avantage de la correction basée sur l'observation des cospectres, est qu'elle permet de corriger aussi les perturbations basses fréquences, comme cela sera détaillé ci-dessous. La Figure II.13 est la même forme de représentation que la figure précédente. Il y est décrit la correction en fréquence dans sa globalité. 78 f n =n p ( z -d ) /u 0,4 w'T' n *Co spectre / flux. 0,3 w'c' 0,2 0,1 F 0 -0,1 f att=n att(z -d )/u -0,2 0,0001 0,001 0,01 0,1 Fréquence normalisée : f = n (z -d )/u 1 10 Figure II.13: Exemple de correction spectrale dans les hautes et basses fréquences du cospectre du flux vertical d'aérosols, devant être appliquées pour obtenir un cospectre similaire à celui du flux de chaleur sensible (16/06/2007 16h00-16h30, étage 3) La perte spectrale dans les hautes fréquences due au temps de réponse du capteur est clairement observable. Une perturbation à basse fréquence, due à une source ponctuelle d'aérosols (passage de véhicules, etc.) vient modifier le cospectre de flux vertical d'aérosol. Dans ces deux cas, une correction du flux vertical de particules est nécessaire (Lamaud et al., 1994b). Le flux non perturbé se calcule en intégrant le cospectre entre les fréquences np et natt, (définies sur la Figure II.13 ) soit : natt Fwc − non− perturbé = ∫ cow'c'(n)dn Équation II. 16 n p np est la fréquence à laquelle finit la perturbation basse fréquence et natt celle où débute l' atténuation haute fréquence. La correction appliqu ée est calcul ée à partir du flux de chaleur sensible qui n'est pas perturbé en haute et basse fréquences, soit : np n0 correction = ∫ co w 'T'∫ co (n)dn natt FwT + w 'T'(n)dn nf Équation II.17 FwT n0 et nf représentent respectivement les valeurs maximales et minimales des fréquences (comme dans l'Équation I.14). 79 Finalement le flux vertical de particules corrigé est : Fwc −corrigé = Fwc−non− perturbé ⋅ 1 (1 − correction) É quation II.18 Dans la majorité des cas les corrections spectrales en basses fréquences sont aux maximum de 30 % et les corrections spectrales en hautes fréquences au maximum de 20 % ce qui permet de garder un cospectre non perturbé de 50 % du cospectre total. II.3.4 Discussion Classiquement, la méthode de mesure par corrélation turbulente requiert que les séries soient stationnaires sur la durée de l'échantillonnage (30 minutes). Foken et wichura (1996) montre que ce critère est satisfait lorsque la différence entre le calcul du flux sur 30 minutes et la moyenne de six calculs de flux sur des segments de 5 minutes est inférieure à 30 %. Dans certain cas le test de stationnarité ne suffit pas pour avoir un cospectre correctement établi et donc un flux vertical uniquement généré par la turbulence atmosphérique. Par exemple la Figure II.13 montre la superposition des cospectres du flux vertical de particules et du flux de chaleur sensible. Les cospectres sont fortement perturbés alors que le critère de stationnarité est égal à 17 %, la méthode de similitude spectrale permet de rejeter de telles données. 80 2 w'T' n*Cospectra / flux 1,5 w'c' 1 0,5 0 -0,5 -1 0,001 0,01 0,1 1 10 fréquence normalisée : f = n (z -d )/u 100 Figure II.14: Exemple de cospectre du flux vertical d'aérosols et du cospectre du flux de chaleur sensible (le 28/06/2008 01h30-2h00, étage 4) A l'inverse il arrive que le test de stationnarité exclue des données qui peuvent être corrigées, notamment comme évoqué plus haut, à cause d'une perturbation basse fréquence. Le cospectre du flux vertical d'aérosols de la Figure II.15 présente un critère de stationnarité très supérieur à 100 %, il est donc rejeté par la méthode classique. Une correction sur les premiers points des basses fréquences permet de s'affranchir de la perturbation est de trouver une valeur de flux cohérente. 0,8 w'T' n*Cospectra / flux 0,6 w'c' 0,4 0,2 0 -0,2 -0,4 -0,6 -0,8 0,0001 0,001 0,01 0,1 1 fréquence normalisée : f = n (z -d )/ u 10 Figure II.15: Exemple de cospectre du flux vertical d'aérosols et du cospectre du flux de chaleur sensible (le 28/06/2008 01h30-2h00, étage 4) 81 Les pourcentages sur l'ensemble des données validées par notre méthode, pour lesquels la méthode classique ne coïncide pas avec celle-ci, sont présentés dans le Tableau II.5 suivant deux cas. Le cas A correspond aux mesures ayant un critère de stationnarité en dessous 30 % alors que les cospectres sont fortement perturbés. Le cas B correspond aux mesures ayant un critère de stationnarité supérieur à 30 % mais pour lesquelles une correction basses et hautes fréquences à permis de déterminer la valeur du flux. En d'autre terme le cas A permet d'écarter des données erronées et le cas B représente le pourcentage de mesures valides mais rejetées par la méthode classique. Diamètre Maïs Herbe Sol nu Etage (μm) Cas A Cas B Cas A Cas B Cas A Cas B 1 0,014 9% 7% 2% 3% 7% 2% 2 0,041 9% 7% 4% 4% 8% 5% 3 0,074 7% 8% 4% 5% 6% 3% 4 0,122 8% 6% 5% 5% 8% 5% 5 0,202 7% 8% 7% 3% 5% 7% 6 0,316 4% 8% 5% 5% 5% 6% 7 0,484 9% 9% 7% 4% 8% 6% 8 0,762 8% 3% 15 % 1% 13 % 2% 9 1,231 12 % 2% 17 % 1% 15 % 1% Tableau II.5 : Pourcentage sur l'ensemble des données validées des mesures pour lesquelles la méthode classique et la méthode développée ne coïncident pas. Les critères des deux méthodes coïncident à 85% puisque la sommes des cas A et cas B n'excède pas 15% la plupart du temps. Etant donné le faible nombre de données validées sur certains étages, il nous a semblé essentiel d'appliquer la méthode développée au cours de ce travail (II.3.3), afin d'avoir une meilleur quantification de la vitesse de dépôt sec. De plus cette technique de correction spectrale par comparaison des cospectres permet de rejeter les cas durant lesquels le cospectre du flux de chaleur (w'T') n'est pas établi. Ce qui peut entraîner une erreur non négligeable sur les paramètres qui en dérivent directement, comme la longueur de Monin-obukhov. La méthode de mesure par corrélation turbulente à l'aide d'un ELPI et couplée à la méthode de correction par similitude spectrale a été comparée avec deux autres méthodes ; l'une utilisant un autre 82 appareil de mesure de la concentration d'aérosols et l'autre utilisant une technique de traçage par fluorescéine. II.4 Validation de la méthode II.4.1 Comparaison entre des résultats obtenue par ELPI et par CNC Dans le Chapitre I.4.2 sont évoquées les mesures par corrélation turbulente fait par Lamaud et al. (1994a). Elles ont la particularité de fournir des vitesses de dépôt sans tri granulométrique sur une large plage de tailles (de quelques nanomètres à plusieurs micromètres). L'appareil était un prototype mis au point pendant la thèse d'El Bakkali (1991). Au dessus d'un couvert forestier, Buzorius et al. (1998) réalisèrent des mesures avec une méthode similaire sur une gamme d'aérosols équivalente, mais en utilisant un compteur de noyaux à condensation (CNC). Dans le cadre de la validation de la méthode développée dans cette étude avec l'appareil ELPI, les mesures de vitesses de dépôt ont été comparées aux mesures faites en utilisant un CNC (3010, TSI). Ce dernier permet de compter des particules ayant des diamètres s'étendant de 10 nm à 3 μm. Cette comparaison est importante car le principe de comptage des particules est totalement différent dans un ELPI et un CNC. Pour ce dernier, une solution de butanol se condense autour des particules prélevées pour ensuite être mesurées par un compteur optique à faisceau laser. L'appareil transmet un signal en tension à l'anémomètre ultrasonique avec une fréquence numérique de 10 Hz. L'anémomètre échantillonne ces signaux avec les mesures de vent de manière synchronisée. Les prélèvements d'aérosols sont faits à environ un mètre de ceux de l'ELPI pour que les deux appareils soient perpendiculaires à la direction préférentielle du vent. La chaîne de traitement des données décrite au-dessus est ensuite appliquée aux mesures du CNC. Le temps de réponse effectif de l'appareil est d'environ une seconde (Buzorius et al., 1998). La même méthode de correction spectrale a été appliquée. Les résultats seront comparés à somme des flux donnés en utilisant les neufs étages de l'ELPI, qui couvrent la même gamme de taille que le CNC. Cette somme est faite en amont du traitement, les concentrations brutes et acquises à la fréquence de 10 Hz, sont directement additionnées, ensuite le signal résultant est traité de la même manière que celui du CNC. Le Tableau II.6 permet de comparer les résultats des mesures issues des deux appareils. Il s'agit de vitesses de dépôt moyennées sur toute la campagne Landes 1 (Cf. Chapitre III.1), normées à la vitesse de frottement du vent et en conditions atmosphériques neutres et stables. La normalisation et le choix des 83 conditions atmosphériques pour obtenir des résultats qui puissent être comparés sont détaillés dans le Chapitre IV.2.1. Appareils Gamme de taille Vd en neutre et stable, Landes 1 U* Ecart type (nombre de valeurs) ELPI de 0,007 à 1,2 μm 2,0 10-3 (9) 5,8 10-4 CNC 3010 de 0,01 à 3 μm 1,3 10-3 (9) 1,0 10-3 Tableau II.6 : Vitesses de dépôt, moyenne et écart type, mesurées par covariance turbulente avec un ELPI et avec un CNC au dessus d'un champ de maïs (Landes 1). Les valeurs sont normées par la vitesse de frottement du vent U* Au regard des incertitudes de mesure, cette comparaison indique que les CNC et l'ELPI donne des résultats similaires en terme de vitesse de dépôt. Il y a moins d'un facteur deux entre les mesures faites avec l'ELPI et celles réalisées à l'aide d'un CNC, pour une gamme de taille comparable. Les écarts types sont cohérents avec ceux présentés au Chapitre III qui regroupe l'ensemble des résultats des campagnes expérimentales. II.4.2 Comparaison entre des résultats obtenue par ELPI et par traçage d'aérosols de fluorescéine La technique de traçage permet de déterminer les vitesses de dépôt sec des aérosols à partir de fluorescéine sodée (uranine). Celle-ci est émise sous forme d'aérosols secs poly-dispersés dont la concentration est mesurée dans l'air et sur de l'herbe. Cette granulométrie est proche du spectre granulométrique de l'aérosol atmosphérique. Figure II.16: Principe de la génération de fluorescéine par pulvérisation (d'après Nérisson, 2008) Les aérosols sont émis par un générateur de fluorescéine à fonctionnement pneumatique (GTCN THE 28, SETRA) émettant des aérosols de diamètre aérodynamique médian en masse de 0,3 μm (écart type géométrique : 2), dont le schéma de principe est présenté Figure II.16. Les aérosols de fluorescéine sont prélevés de part et d'autre de l'axe du vent à des distances allant de 15 à 30 m de la source . Les aérosols de fluorescéine présents dans l'air sont collectés par des High Volume Samplers (HVS) avec un débit de 30 m3.h-1. Des carrés (18x18 cm) d'herbe synthétique sont utilisés comme substrats pour accéder au flux surfacique de dépôt. L'herbe synthétique présente l'avantage d'avoir des caractéristiques géométriques facilement reproductibles et un bruit de fond fluorescent plus bas que l'herbe naturelle. L'émission de fluorescéine dure 60 minutes avec un débit de 30 mg.h-1. Ensuite les filtres des HVS et les carrés d'herbe sont collectés, une photographie de l'expérience est présentée Figure II.17. Les fractions de fluorescéine déposée sur l'herbe et sur les filtres sont mesurées par spectrophotomètre UV (Horiba Fluormax). La longueur d'onde d'excitation est fixée à 490 nm, et la mesure de l'émission est effectuée à 512 nm. Les filtres sont coupés en morceaux, immergés dans une solution d'ammoniaque à pH = 9, et agités mécaniquement durant 20 minutes. Les échantillons d'herbes sont lavés dans 200 ml de solution d'ammoniaque à pH = 9. Ce pH permet une meilleure stabilité de la mesure de fluorescence. Les solutions de lavage sont filtrées à 0,45 μm avant de procéder à la mesure par spectrophotométrie. High Volume Sampler Vent échantillons d'herbe synthétique Générateur de Fluorescéine Figure II.17: Dispositif de traçage par émission de fluorescéine (campagne Landes 2) Comme pour la comparaison entre différents appareils de mesures de concentration d'aérosol faite précédemment : le rapport de la vitesse de dépôt normalisée par la vitesse de frottement du vent et en conditions neutres et stables sont calculés pour les deux méthodes afin d'être confrontés. La comparaison est rendue possible si les données de vitesse de dépôt obtenues à l'aide de l'ELPI sont appliquées au spectre granulométrique de la fluorescéine (Cf.Figure II.18). En effet, la vitesse de dépôt de la fluorescéine correspond à un spectre en masse alors que celle de l'ELPI à un spectre en nombre. Les vitesses de dépôt divisées par la vitesse de frottement du vent et mesurées sur chaque étage de l'ELPI, (au dessus l'herbe et en conditions atmosphériques neutres et stables, Lande 2, Chapitre IV.3) sont pondérés par la concentration massique correspondant au spectre de la fluorescéine. DC/Dlog(dae) 1000000 500000 0 0,01 0,10 1,00 Diamètre Aérodynamique (μm) 10,00 Figure II.18: Spectre granulométrique issue du générateur de fluorescéine 86 Méthode de mesure Vd en neutre et stable Landes 2 U* Ecart type ELPI De 0,014 à 1,2 μm 2,2 10-3 (moyenne pondérée sur le spectre de la fluorescéine) 1,1 10-3 Traçage par fluorescéine De 0,014 à 1,2 μm 3,9 10-3 (9 valeurs) 2,8 10-3 Tableau II.7 : Résultat de mesure par covariance turbulente avec entre un ELPI et un CNC au dessus d'un champ de maïs Les résultats regroupés sur le Tableau II.7 montrent un écart d'un peut moins d'un facteur 2 entre les mesures de vitesse de dépôt par corrélation turbulente et celles faites par traçage. Les incertitudes sur les vitesses de dépôt étant de l'ordre de 50 %, il apparait que les deux méthodes donnent des résultats très proches. Dans ce chapitre, nous avons décrit la théorie sur laquelle repose le calcul des flux par corrélation turbulente, puis les appareils utilisés, à savoir un anémomètre ultrasonique et un impacteur électrique à basse pression (ELPI). Leurs modes de fonctionnement et les limites de détection liées à leurs mesures ont été abordés. Un soin particulier a été apporté à la mesure du temps de réponse de l'ELPI, car ce paramètre conditionne la nécessité d'appliquer une correction spectrale. La description de la chaîne de traitement des données a permis de lister l'ensemble des corrections et des tests de qualités nécessaires à la méthode ainsi que la façon dont ils ont été appliqués. Une critique du critère de stationnarité a ensuite été menée par sa confrontation avec la méthode développée au cours de cette étude et faisant appel à l'analyse spectrale. Le résultat de la discussion sur ces deux méthodes, a permis d'établir les inconvénients et les avantages pour finalement quantifier l'impact sur l'ensemble des données. Le critère de stationnarité (Foken et al., 1996) est moins rigoureux que l'analyse spectrale mais cette dernière est beaucoup plus fastidieuse à mettre en place. Dans 15% des cas, le diagnostique de la méthode classique par critère de stationnarité est erroné : Soit des flux pouvant être corrigés et validés sont écartés, soit des flux ne présentant pas un cospectre relatant la turbulence atmosphérique sont entérinés. 87 Enfin, la méthode de mesures a été comparée avec une méthode utilisant un appareil au mode de fonctionnement différent, puis avec une méthode de mesure par traçage. La confrontation des résultats a permis d'estimer la valeur de la méthode développée et ainsi de la valider. 88 CHAPITRE III. RESULTATS DES CAMPAGNES LANDES 1, 2, 3 ET 4 Ce chapitre détaille l'application in situ de la méthode décrite et validée au cours du Chapitre II. Il s'organise en quatre parties retraçant les quatre campagnes réalisées entre juin 2007 et juillet 2008. Il s'agit d'un inventaire des données permettant l'analyse la plus complète possible, c'est-à-dire : les données météorologiques, les données inhérentes à la concentration d'aérosols atmosphériques ainsi que les évolutions des vitesses de dépôt sec. Chronologiquement parlant, ces mesures ont été réalisées en juin 2007 (Landes 1), octobre 2007 (Landes 2), mars 2008 (Landes 3) et fin juin début juillet 2008 (Landes 4). Deux sites de mesures ont été utilisés pour les campagnes « Landes », ils sont établis à quelques kilomètres d'écart sur une exploitation agricole de la commune de Mano, située dans le département des Landes à environ 70 km au sud de Bordeaux (Cf. Figure III.1). Cette région se caractérise par un climat océanique. Elle est constituée principalement de forêt de résineux, et depuis les années 90 de nombreuses zones ont été déboisées pour l'exploitation céréalière, en particulier celle du maïs. Ces sites de mesures ont été choisis pour des raisons d'homogénéité du couvert, mais aussi pour des raisons micrométéorologiques (fortes variations de la stabilité atmosphérique lors d'un cycle diurnenocturne). Enfin, cette zone est faiblement peuplée et éloignée de toute activité industrielle, permettant ainsi d'obtenir la stationnarité de la concentration en aérosols nécessaire à l'application de la méthode. L'évolution saisonnière des pratiques agricoles a permis de faire des mesures au dessus de trois types de couverts : du ïs, de l'herbe, et du sol nu. 90 Forêt des Landes Figure III.1: Localisation du site expérimental en France, puis dans la forêt des Landes. Dans l'optique d'obtenir des valeurs de vitesses de dépôt pour différents paramètres turbulents et différents couverts, il a été mis en place une stratégie d'enchaînement des campagnes. Le but étant que les quatre campagnes forment un ensemble cohérent et logique. Ainsi la campagne Landes 1 correspond à la première mise en place de la méthode sur un champ de maïs, durant le mois de Juin. Puis la campagne Landes 2 s'est déroulée au même endroit mais au dessus d'un autre type de couvert (de l'herbe) et avec des conditions climatiques quelque peu différentes (octobre). Le deuxième site expérimental a été utilisé pour les campagnes Landes 3 et 4. Ce changement est dû principalement à des prérogatives liées à l'exploitation agricole (installation de pivot d'arrosage incompatible avec des mesures sur un mat de 6 m). Les vitesses de dépôt issues de la campagne Landes 3 ont été obtenues au dessus d'un sol nu, correspondant à l'état d'un champ pendant le labour. De plus durant cette campagne les conditions climatiques sont très différentes de celles observées dans les campagnes précédentes. Enfin la campagne Landes 4 intervient un an après Landes 1 sur un couvert de maïs et permet de confronter les résultats des deux sites sur le même couvert et dans des conditions climatiques quasi-similaires. 91 Nom Lieu date Type couvert (hauteur) Météo globale Objectif Landes 1 Cape sud site 1 Juin 2007 Maïs (1,3 m) Ensoleillé Mise au point Landes 2 Cape sud site 1 Octobre 2007 Herbe (20 cm) Variable venteux Nouveau substrat Landes 3 Cape sud site 2 Mars 2008 Sol nu (5 cm) Couvert et venteux Condition neutre et stable Landes 4 Cape sud site 2 Juin 2008 Maïs (1,3 m) Ensoleillé Reproductibilité de Landes 1 Tableau III.1 : Récapitulatif des quatre campagnes de mesures Des flux de dépôt mais aussi d'émission d'aérosols ont été observés pendant les expérimentations, pour plus de clarté, l'ensemble des flux verticaux d'aérosols normalisés par la concentration sont appelés vitesses de transfert. Les vitesses de transfert négatives sont les vitesses d'émission (Ve en m.s-1) et les vitesses de transfert positives sont les vitesses de dépôt (Vd en m.s-1). Les diamètres représentant nos mesures sont les diamètres géométriques moyens (Cf.I.2.1)des diamètres de coupures de chaque étage de l'ELPI. Pour les mesures au dessus du maïs un changement de technologie des plateaux a eu lieu en milieu de campagne (Landes 4). En effet, les plateaux habituellement graissés, pour éviter le rebond des aérosols les plus petits, ont été remplacés par des plateaux poreux. Les diamètres de coupure liés à chaque technologie sont globalement du même ordre de grandeur. Toutefois, pour les mesures au dessus du maïs, il a été choisi de considérer les diamètres géométriques moyens entre les diamètres de coupures des plateaux poreux et ceux des plateaux graissés. La présentation de chaque campagne suivra la structure suivante : une description du site de mesure et du dispositif expérimental, puis le détail des conditions météorologiques observées durant la campagne, et enfin résultats des vitesses de transferts. III.1Campagne Landes 1 – Juin 2007, Maïs III.1.1 Site de mesure et dispositif expérimental La campagne Landes 1 s'est déroulée du 13 au 17 juin 2007, au sein d'une exploitation agricole de la commune de Mano (latitude : 44,24030 longitude : -0,38382). Le site de mesure est une parcelle de maïs, entourée de forêt composée principalement de pins des Landes. La hauteur du maïs est d'environ 1,5 m et le champ est plat quelque soit la direction. Le camion laboratoire ainsi qu'un mat d'une hauteur de 6 m sont installés au milieu de la parcelle (Figure III.2), de façon à avoir une surface plane et homogène la plus grande possible dans les directions préférentielles du vent. Zones Forestières Figure III.2: Le site expérimentale pour les campagnes Landes 1 et Landes 2 Les appareils de mesure de concentration des aérosols atmosphériques (CNC TSI inc. et ELPI Dekati inc.) sont placés dans le camion laboratoire, tandis que les têtes de prélèvement des aérosols et les anémomètres soniques (Young 81000) sont placés au sommet du mât. Les anémomètres sont fixés à plus 93 d'un mètre de distance sur un portant en acier inoxydable perpendiculaire à la direction principale du vent, afin d'éviter que la turbulence généré par un anémomètre ne perturbe la mesure de l'autre. Le schéma du dispositif expérimental utilisé pour l'ensemble des campagnes est présenté Figure III.3, tandis que la Figure III.4 est une photographie illustrant l'installation pendant la campagne Landes 1. L'anémomètre placé à un mètre du sol, n'a été mis en place qu'à partir de la campagne Landes 2. Les têtes de prélèvement sont reliées aux appareils de mesure de concentration par des tubes d'une longueur de 4 m conducteurs siliconés (TSI) qui permettent d'éviter un dépôt électrostatique des aérosols lors de leur parcours à l'intérieur des tubes. w u Vent v Tube de prélèvements Camion Laboratoire Anémomètres 6m Appareil s mesurant la concentration en particul es Figure III.3: Schéma global de l'installation Lors de cette campagne une attention particulière a été apportée à l'étalonnage quotidienne des appareils, en vue de mettre en place une méthodologie reconductible dans les campagnes suivantes. En effet, il est nécessaire de s'affranchir d'un éventuel offset survenu sur les électromètres de l'ELPI. Pour cela, un flux d'air traverse la colonne d'impaction en passant en premier lieu par un filtre parfait, le logiciel corrige alors les courants des électromètres pour qu'ils soient le plus proche possible de zéro, puisque l'appareil n'est sensé mesurer aucune particule. Il est parfois nécessaire de nettoyer l'aiguille du chargeur à effet couronne de l'appareil, cela dépend fortement de la concentration moyenne et de la nature des aérosols mesurés. Les impuretés se déposent sur la pointe de l'aiguille et modifient sa tension globale au-delà des limites de calibration (entre 4 et 6 KeV). Figure III.4: Dispositif de mesure lors de Landes 1 Pour éviter toute turbulence parasite, le camion est placé sous le vent par rapport au mât. Pour respecter cette configuration le mât a été déplacé en milieu de campagne lorsque le régime de vent dominant a changé de direction.
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Finalement, il y a aussi des autres codes comme celle de la couleur. Pendant un repas italien à Paris, j'ai pu déguster un plat de pâtes représentant la tricolore italienne (cf. image ci-dessous). Bien que ce genre de combinaisons sont aussi possibles en Italie, les couleurs du drapeau surlignent l'italianité du repas, au delà des ingrédients typiques comme le basilic ou la tomate. Figure 28: Tris di pasta à Paris Les sauces de pâtes rappellent le drapeau italien (M. Schlichtling, le 12.10.2015 à Paris). Par contre, les hôtes en Italie n'ont pas besoin de ces stratégies, car l'authenticité est déjà impliquée dans le contexte du repas. Plusieurs hôtes mentionnent dans leurs profil être originaires de différentes régions italiennes ou que la personne leur ayant appris à cuisiner (souvent la grand-mère) venait d'une autre part de l'Italie. Il serait ainsi plus « authentique » de proposer des recettes familiales faisant partie de leurs traditions et histoire personnelles. Est-ce que ce discours convient aux invités à la quête du Graal de l'authenticité? Au regard des évaluations positives, il semblerait que les attentes d'utilisateurs sont effectivement satisfaites. Cette constatation est également vraie pour les trois Italiens qui ont participé au repas à Milan, bien que leur jugement portait sur un autre élément, à savoir le lien social. 2) L'authenticité du rencontre : « La table est le premier réseau social » « Je pense que l'expérience a été authentique quant au fait que nous nous sommes installés en nous intéressant avec sérénité pour la vie des autres », « c'était 100% comme un dîner chez l'ami d'un ami : tu y vas et comme tu ne connais personne, tu es encouragé à parler beaucoup afin de connaître des autres personnes » - se lisent les verdicts des Italiens ayant assisté à la soirée repas à Milan (cf. Annexe 6-7). Mais peut-on vraiment considérer l'expérience d'un repas entre inconnus comme équivalente à celui d'un repas entre amis? Un repas entre restauration et dîner chez des amis En comparaison avec un dîner au restaurant, le facteur sociale joue indubitablement un rôle supérieur chez VizEat : les hôtes accueillent dans leur « chez soi » et servent leurs plats accompagnés de leur histoire agrémentée d'anecdotes personnelles. Comme le prix est fixé avant l'événement et le règlement se fait automatiquement par le site internet, les formalités financières ne viennent pas troubler la convivialité de l'expérience. A l'heure du repas, tout est déjà préétabli et les deux parties peuvent ainsi se rencontrer comme des amis, nouveaux ou anciens. Simultanément, les guests sont désorientés: comme il s'agit d'un service payant, doivent-ils porter des petits cadeaux comme un bouquet de fleurs ou une bouteille de 61 vin à l'instar d'un repas entre amis? Ayant réalisée un stage dans le Community Management de VizEat, une de mes missions principales était de créer du contenu pour le blog qui faisait office de guide pour les invités comme pour les hôtes. Le tone subjacent était d'encourager ce genre de comportement associé à l'hospitalité et de faire oubli er qu'il s'agissait d'un service payant, en mettant en avance les valeurs de « convivialité », d'« ouverture d'esprit » et de « partage ». Ce positionnement flou entre « service payé » et « dîner chez des amis (ou amis d'amis) », suscite un certain trouble pour les invités : peut-il se plaindre ouvertement du repas? S'il ne s'entend pas bien avec l'hôte, peut-il interrompre le dîner et se faire rembourser? Quel est le comportement adéquat à adopter avec l'hôte? En somme, alors que la restauration connaît de plus en plus de problèmes liés aux plaintes de clients, comment faut-il se comporter face à un hôte qui invite à la table dans sa propre maison? Le seuil psychologique est-il trop important pour exprimer son mécontentement? Pour l'instant, ce ne semble pas encore être un point important, mais considérant la croissance rapide de VizEat, ce genre de questions pourrait devenir essentiel dans un avenir proche. Bien que le caractère pécunier ne soit pas primordial pour les hôtes, on ne peut pas écarter le fait qu'il s'agit ici d'un service payant – avec des prix souvent égaux à ceux d'un restaurant, bien que les hôtes n'ont pas les mêmes dépenses de loyer, licence ou de frais de manutention. Cependant, les deux hôtes participant aux entretiens ont insisté sur le fait qu'ils ne gagnent pas ou peu d'argent, également en présence des invités. Concernant le calcul de son prix, l'hôte à Bologne explique : « Alors, dans le cas des lasagne, je connais déjà le prix, parce que je l'ai fait très souvent. Au prix du matériau brut je rajoute plus ou moins un 20% pour les frais de main d'oeuvre et pour la consommation d'énergie pour la préparation. Dans le cas des autres plats, j'ai parfois d'abord essayé avec ma famille, je l'ai fait pour trois ou pour quatre, j'ai regardé combi en du temps je prends pour me donner plus au moins le valeur. Je dois dire que quand on regard les prix de ce que j'ai préparé comme menu, en comparaison avec un restaurant, ils sont un peu élevés. Parce que je les ai mis sur la trentaine, mais je dois te dire que j'ai gagné peu d'argent. En effet, un restaurant réussit mieux à amortir certains frais. Ils font des grandes quantités, donc je ne crois pas être de la concurrence pour ce motif, je ne pourrai jamais avoir des prix concurrentiels, jamais. Je casse les oeufs, impossible de faire les choses comme ça, ce ne me plairait même pas. »16 La plupart des hôtes (82%) explique qu'ils calculent le prix à base des frais qu'ils ont pour acheter les ingrédients, tandis qu'un 41% mentionne qu'ils calculent les frais sur les heures de travail dédiées à la préparation du menu. Seuls 9% indiquent qu'ils adaptent leurs prix en fonction de l'offre concurrentielle dans leur ville. Cependant, l'aspect financier ne semble pas jouer un rôle primordial face à l'interaction : c'est l'échange interpersonnel qui donne la valeur essentielle à l'expérience. Le rencontre à table pour faciliter les échanges Un des facteurs les plus importants durant le repas VizEat et l'élément qui différencie l'expérience d'un dîner dans un restaurant est le lien social entre les hôtes et les invités, bien que ce soit un contact créé dans un but en partie commercial. Le positionnement de VizEat joue aussi sur ce côté : lors d'un entretien avec BFM Business, Camille Rumani définit le service en présentant le repas comme prétexte pour la rencontre entre personnes de différentes cultures : « En effet, VizEat c'est un site qui permet à des voyageurs et à des hôtes de se retrouver et de se rencontrer autour d'un repas à la maison. Parce que, voilà, on se disait que c'était, en effet, de faire de rencontres, qui pouvaient vraiment permettre à des voyageurs d'entrer dans la culture d'un pays et pour nous le premier réseau social, c'est pas Facebook ni Twitter, c'est vraiment la table. » 16 «Allora, nel caso delle lasagne, lo so già, l'ho fatto già il prezzo, perché lo ho fatto tante volte. Al prezzo della materia prima aggiungo più o meno un 20% per le spese di mano d'opera e di consumo di energia per farlo. Nel caso degli altri piatti magari io prima ho testato con la mia famiglia, l'ho fatto per 3, per 4, ho guardato quanto tempo ci metto, di darmi un valore più o meno. Devo dire che quando si guarda i prezzi quello che ho fatto per i menu secondo un paragono con un ristorante sono un po' alti, secondo me. Perché ho messo sulla trentina pero se devo dirti non ho guadagnato tanto. Perché un ristorante riesce a ammortizzare di più certe spese. Fai grandi quantità, quindi non credo che sia concorrenza per questo motivo, non potrò mai avere un prezzo concorrenziale, mai. Per devo fare poche quantità, io quando compro non posso avere gli stessi avantaggi che un ristorante, poi tendenzialmente io compro tutto fresco, io non uso nulla di già preparato, di confezionato, che magari un ristorante si può permettere di fare un dolce con il tetra pack di uovo. Io rompo l'uovo, impossibile che faccia le cose così, non mi piacerebbero neanche» (Annexe 4, traduit de l'italien par l'auteur de ce travail). Effectivement, 17% des guests et 17% des hosts soulignent leur envie de rencontre dans les sondages menés. Cet échange personnel est l'élément clé pour donner de valeur dans le tourisme de partage en générale : les expériences sont vécues comme plus personnalisées et différentes des activités destinées au tourisme de masses. En général, le contact avec les locaux peut avoir un impact considérable sur la satisfaction des touristes pendant leurs vacances (Forno & Garibaldi, p.205). Entrer dans une maison, voir comme les locaux habitent et parler en dégustant une cuisine fait maison avec des recettes traditionnelles sont le gage d'une expérience unique et « authentique ». Dans le témoignage de la co-fondatrice Camille Rumani cité précédemment, il devient clair que le véritable intérêt de ce type de formules n'est pas lié directement au repas ou à la qualité des ingrédients, mais bien à la promesse d'une immersion dans une culture étrangère souvent difficlie à assimiler, notamment sur un temps court. Pénétrer chez des particuliers donne l'impression d'accéder à une back region non banalisée. Ce genre de rencontres permet également de « voyager comme un local », hors des sentiers battus, en évitant les pièges touristiques et en demandant aux résidents les lieux ils fréquentent et ainsi vivre une expérience plus gratifiante, moins artificielle et, par conséquent, plus « authentique ». Comme l'indique la figure ci-dessous, les étrangers profitent de cette opportunité pour acquérir plus de connaissances sur la culture italienne en générale, sans se limiter aux sites touristiques. 64 Figure 29: Les sujets abordés entre hosts et guests lors des repas Les sujets de conversation 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Aucun Autre Sites La recette du Alimentation touristiques menu italienne -10% Italiens étrangers Culture italien ne total Malgré le fait que l'expertise locale des hôtes est mise en avant dans la promotion du service, seulement 36% des utilisateurs échangent sur les sites touristiques (Réalisation M. Schlichtling, 2016). Les sujets regroupés dans « autre » couvrent la politique, les voyages et la vie personnelle des participants du repas. 5% des utilisateurs ont donné la réponse « aucune de ces options », car, étant invités à une soirée spectacle, ils n'ont finalement pas eu l'opportunité d'échanger directement avec leur hôte. À la demande ouverte « comment pourriez-vous décrire les réactions de vos invités? », la plupart des hosts constate la curiosité des étrangers pour la culture italienne, et notamment pour le quotidien. Si le repas et les recettes demeurent des sujets de curiosité, c'est plutôt dans le contexte de la cuisine italienne en tant qu'élément emblématique de la culture du pays. Prenant en considération la figure ci-dessous, on remarque que les écarts entre les différentes motivations sont minimes, la curiosité pour ce nouveau type de service en premier place. 65 Figure 30: Les raisons principales pour choisir un repas VizEat au lieu d'aller au restaurant Motivations pour la réservation d'un repas VizEat Ne pas manger seul(e) 8% Prix 9% Endroit Rencontrer des habitants de la ville Repas Rencontrer des nouvelles personnes Une nouvelle expérience 14% 16% 16% 17% 20% Bien que le prix ne soit pas concurrentiel à la restauration, la curiosité motive une grande partie des invités (Réalisation M. Schlichtling, 2016). Durant le repas ayant lieu à Milan, deux des invités italiens, originaires respectivement de Turin et de Bologne, reconnurent qu'il était difficile pour eux de rencontrer des nouvelles personnes à Milan, une grande ville au rythme de vie accéléré. Cette forme de repas représente ainsi pour eux l'occasion idéale de se rencontrer dans une atmosphère plus intime. Les deux hôtes confirment que dans les deux cas, ils sont restés en contact avec leurs invités locaux. En dehors de ces exemples particuliers, les liens créés sont-ils amenés à s'inscrire dans la durée? Autrement dit, l'hospitalité peut-elle créer l'illusion d'une amitié qui ne dépassera finalement pas ce moment particulier? Un des hôtes témoigne ainsi: « J'ai continué à voir ces personnes [les invités italiens]. C'est une chose incroyable! Nous nous sommes vus à d'autres occasions que lors de dîners VizEat et continuons à nous voir de temps à autres. » Malgré la distance géographique, la constatation est la même pour des touristes issus de pays étrangers: « Les étrangers m'ont laissé leurs coordonnées parce que ma fille va probablement aller étudier en Belgique pour son Master. Donc quelques uns ont 66 laissé leur carte de visite, genre, pour qu'elle aille leur rendre visite. Non, ils sont vraiment très cordiaux je dois dire que avec Airbnb c'est la même expérience de personnes qui bougent et qui ont l'envie de connaître, de voir ce que est différent à leur vie quotidienne, ils sont très gentils, très ouverts sans compter la nationalité. C'est comme s'ils faisaient tous partie d'une seule nation, celle du voyage, je ne sais pas»17. Camille Rumani confirme que les hôtes reçoivent souvent des cadeaux, et ce même après le retour de leur invité dans son pays d'origine: » Ça va du vin, des glaces du Canada aux pistaches iraniennes, du moule à Kouglof aux pots de confitures maison. Un invité Saoudien a diné récemment chez Pétra à Amsterdam. À son retour chez lui, il lui a envoyé 2kg [sic] de dattes. Je crois qu'elle en a pour quelques mois « (Arot). Si on regarde les motivations principales des hôte s, on remarque que le rencontre n'est pas la raison primordiale pour ouvrir leurs portes et accueillir des inconnus à leur table. Il s'avère qu'ils s'intéressent plus pour le partage de leur culture et leur cuisine et adoptent ainsi un véritable rôle d'ambassadeur. Selon un hôte : « Je m'oblige aussi un peu de savoir ce qui ce passe dans la ville. Je ne suis plus tellement souvent dehors lorsque j'étais jeune, j'avais un peu oublié de m'informer sur ma ville. 67 d'ailleurs, parfois mélangées avec les recettes ou ingrédients découverts à l'occasion de leurs propres voyages. Naturellement, les avis sur le site parlent de la qualité du repas, mais une impression d'un « chez soi » ressort régulièrement : « Paola and her husband are wonderful hosts, friendly and easygoing. Eating with them is like being at home even away from home » « Fred has been a real gentleman, he knows how to put at ease the diners!! The cookery was really good and plentiful, The house was nice and comfortable, I really felt at home. strongly recommended!! [sic ]» « my first VizEat dinner was a real treat thanks to Andrea and his lovely family! you can feel real passion for cooking in each bite, almost every ingredient on the table has a story to tell, and the overall atmosphere is warm and welcoming. don't miss the chance to exchange life, art and travel stories with them - they'll make you feel at home» (accent rajouté par l'auteur). Dans l'enquête, les guests soulignent également l'appréciation de leur rencontre et l'expérience enrichissante qui va bien au-delà d'un simple acte d'hospitalité : « Nous avons prévu de nous revoir lors d'un prochain voyage », annonce un utilisateur, tandis qu'une américane exclame : « My Vizeat experiences in Italy were some of the best travel experiences I've had in 20 years of visiting Europe. Unforgettable. And, I've made friends for life! ». Et une invitée d'origine française termine de conclure : « Même les locaux devraient vivre une expérience aussi enrichissante. » Un autre indicateur de l'importance et de la force des liens sociaux créés est l'organisation de Gnammo, concurrent italien de VizEat, de dîners en collaboration avec Meetic, un site de rencontres amoureuses. Depuis mai 2016, la start-up propose ainsi des repas qui facilitent l'entrée en contact avec des autres célibataires car selon le co-fondateur Gian Luca Ranno « amitiés, amour, travail : se passe à travers les relations, et les relations se construisent à table (Cosimi, 2016)». Bien qu'il n'y ait pas de garantie d'alchimie amoureuse ou platonique entre les participents, il semble que les repas partagés sont un champ idéal pour créer les liens sociaux. Cela est facilité par la communauté d'intérêts des utilisateurs, à savoir, les voyages et la cuisine, ainsi qu'une certaine ouverture d'esprit qui les encourage à participer à ce genre d'événements et à voyager différemment. L'authenticité de l'expérience, telle que perçue par la communauté, est par conséquent en grande partie liée à l'échange sociale, les discussions ouvertes et le partage interculturel. Ainsi, 93% des invités souhaitent répéter l'expérience VizEat. La start-up semble donc remplir ses promesses d'authenticité aux yeux de sa communauté. Mais est-ce que VizEat peut influencer la perception et expérience d'authenticité? Quel rôle joue l'authenticité dans son positionnement et comme estce que la start-up incorpore cette notion dans son offre? 3) L'influence de VizEat : le succès au coût de l'authenticité? Bien qu'à première vue il semble que VizEat soit une plateforme pour passionés de la cuisine désirant partager leurs repas, la réalité est plus complexe. Naturellement, la start-up a ses propres intérêts économiques, notamment de faire fonctionner son modèle et de se distinguer de la concurrence internationale pour renforcer sa position comme leader européen. Quelles sont donc les mesures dans lesquelles la start-up essaie d'influencer l'offre sur leur site, toujours en phase avec le slogan promettant de l'authenticité? Liée à la forte croissance de la communauté, comme le confirme la co-fondatrice Camille Rumani, la gestion et le suivi de leur communauté d'utilisateurs sont parmi les préoccupations principales de la jeune start-up. Il faut donc d'abord comprendre quelles particularités caractérisent la communauté en Italie. La communauté italienne à la base de l'offre VizEat Seulement deux ans après la création de la start-up, l'offre s'est spontanément diversifiée, englobant à ce jour des cours de cuisine par des particuliers ou professionnels ainsi que des food tours ou des événements spéciaux comme des piqueniques. En Italie particulièrement, les invités montrent un grand engouement avec l'apprentissage des recettes de la cuisine faite maison italienne – surtout la sfoglia, la préparation de la pasta faite maison. Bien que le recrutement de nouveaux hôtes s'est effectué plus vite qu'en France, notamment grâce à la culture d'hospitalité et l'enthousiasme pour la cuisine en Italie, 69 VizEat a dû s'adapter à ce marché bien différent. L'activité principale en France se concentre à Paris, ville où la start-up a vu le jour en 2014. La présence des médias diffusant l'information du service ainsi que la possibilité d'organiser des rencontres au siège facilitent considérablement le recrutement. Par conséquent, VizEat comptait plus de 500 hôtes sur Paris en juin 2016, soit l'équivalent de la totalité des hôtes dans les dix principales villes en Italie au même moment. En outre, la ville de Paris est composée par une population cosmopolite, ce qui a tendance à encourager un autre type de positionnement : « Voyagez dans votre ville! » devient ainsi le slogan pour les utilisateurs de la capitale, qui peuvent vivre des moments enrichissants avec leurs voisins de l'autre bout du monde tout en découvrant des plats absents sur les menus des restaurants ethniques. Ce phénomène n'est toutefois pas possible en Italie, où la quasi-totalité des hôtes est d'origine italienne et offre des repas italiens. En conséquence, afin d'inciter la population locale à participer à ces repas, il faut donc adopter une autre stratégie de positionnement. Cependant, il s'avère que les Italiens ne cherchent pas à manger chez des autres résidents, probablement parce qu'ils ne désirent pas particulièrement un repas fait maison. Bien que la plupart des guests en Italie sont encore des touristes, l'objectif est de recruter des nouveaux hôtes afin de leur faire découvrir l'expérience VizEat. De plus, cela les inciterait à réserver des repas chez l'habitant à l'occasion de leurs voyages à l'étranger. Repas chez l'habitant ou restauration à domicile? Confrontée aux accusations de menacer la gastronomie locale avec l'offre de VizEat, Camille Rumani répondait dans un entretien de 2015 : « Nous chefs sont des amateurs et quand ils s'inscrivent ils prévoient [d'offrir ce service] occasionnellement. L'idée est que les gens qui visitent une ville ou 70 qu'y habitent peuvent chercher une expérience plus authentique, qui leur permet un vrai échange avec les locaux et de faire des nouvelles amitiés. Ce n'est pas une concurrence pour les restaurants. C'est un nouveau marché que nous ouvrons » 19. Néanmoins, un an plus tard, les chefs professionnels représentent un pilier fondamental de la communauté d'hôtes. Bien que l'ADN à la base de VizEat est le repas chez l'habitant, on constate trois types d'hôtes différents, que VizEat classifie selon sur leur niveau de professionnalisation et leur disponibilité pour accueillir des invités. Figure 31: Typologie des différents hôtes VizEat Type d'hôte Disponibilité food lovers 1-2 fois par mois, surtout weekend casual hosts 1-2 fois par semaine, surtout weekend chefs professionnels Déjeuner et dîner, plusieurs jours par semaine Les chefs, n'ayant pas ou peu d'activité professionnelle à part de VizEat sont plus prêts d'accueillir des invités aux créneaux d'horaire plus variés (Réalisation M. Schlichtling, 2016). Comme mentionné dans l'analyse SWOT, un autre problème important est l'absence d'hôtes pendant le mois d'août quand la plupart des Italiens prennent leur vacances. VizEat n'étant qu'une source de revenue supplémentaire, les hôtes travaillent dans des diverses secteurs (cf. Figure 6) et profitent de leurs vacances pour quitter leur domicile. Dans ce contexte, le recrutement des chefs professionnels s'inscrit dans une certaine logique, l'offre pouvant être assurée pendant le pic d'activité touristique en Italie, ainsi qu'en semaine. Considérant que seules les femmes à foyer peuvent se permettre d'offrir des déjeuners aux heures de repas dans leurs maisons, les chefs professionnels entrent eux aussi dans cette niche et élargisent le créneau horaire des repas. Afin de garantir un influx constant des guests, VizEat collabore également avec des agences de voyage qui apprécient la fiabilité des cuisiniers profes- 19 "Our chefs are amateurs, and when they sign up they undertake to do this on an occasional basis [] The idea is that people visiting a city - or indeed people living there - can search out a more authentic experience, one in which they can have a proper exchange with local people and make new friends. It is not competition for restaurants. It is a new market we are opening up" (Schofield, traduit de l'anglais par l'auteur de ce travail). 71 sionnels grâce à leur formation et à leur flexibilité quant aux dates et quantités de nourriture qu'ils peuvent préparer dans un court laps de temps. Cependant, ce développement se distancie de la philosophie originelle du « repas chez l'habitant ». Les autres hôtes critiquent ce choix et ne se retrouvent pas dans les valeurs du site : « Par contre, j'ai vu qu'il y avait beaucoup de restaurants qui recourraient à VizEat à Bologne. Cela me semble aussi bizarre. Il y a des photos et menus proposés sur VizEat, ce qui ne correspond pas à l'idée que je me fais de la plateforme. Pour moi, c'est comme si un hôtel se proposait sur Airbnb. »20 En effet, Ester Giacomono, Country Manager Italie, explique qu'elle essaye de rencontrer tous les chefs professionnels afin de voir s'ils correspondent bien à la philosophie de la start-up. Bien que leur compétence culinaire ne peut être a priori qu'un atout, il est important de leur faire comprendre la différence entre le service en restaurant (formel) et l'expérience recherchée par les utilisateurs de VizEat. Dans le but de rendre l'expérience plus conviviale, il est, par exemple, impératif de dîner avec l'invité et de s'asseoir à table avec lui, ce que font 80% des hôtes selon le sondage. L'adaptation de l'offre pour recruter les locaux Selon Ester Giacomoni, il faudrait proposer un argument supplémentaire pour inciter les locaux à opter pour un repas chez l'habitant au lieu d'aller au restaurant pour environ le même prix ou à la maison chez des amis, où ils aurant la même qualité de repas et l'expérience de convivialité : « Pour faire participer les Italiens, il faut que ce ne soit pas qu'un dîner, il faut avoir quelque chose de plus. C'est ça qu'est compliqué pour les marchés locaux, parce que « locals meet locals », si c'est seulement un dîner, c'est pas quelque chose vient à l'esprit. Soit que c'est une chose exceptionnelle, soit c' est pas vraiment une chose qu 'on fait . On a organisé des choses, des c onférence s o ù les gens ont participé parce que c'était un peu un événement, mais sinon, c'est un peu compliqué franchement [] On cherche toujours l'exceptionnel, je pense que c'est dans la mentalité italienne. » «Invece ho visto che ci sono molti ristoranti che fanno VizEat a Bologna. Mi sembra così strano. Ci sono delle foto e dei menu proposte su VizEat, che per me non è così. Afin d'éveiller l'intérêt des guests locaux, qui sont également des hôtes potentiels en Italie, VizEat opte sur trois stratégies : - Les dîners dans les endroits spéciaux : par exemple, dans des châteaux ou des jardins secrets dans le centre ville. - Les soirées à thème ou spectacles : par exemple, les soirées Game of Thrones ou avec un concert. - Les dîners à grande échelle en coopération avec des conférences ou autres entreprises de l'alimentaire ou du tourisme : par exemple, avec la « Ruche qui dit oui » à Rome. Ces démarches expliquent que 31% des repas choisis par les guests ayant participé au sondage étaient du type « dîner spectacle » (cf. figure 16) et il n'est pas étonnant que tous les invités, ayant opté pour cette formule, étaient des Italiens. Les événements dans les endroits normalement inaccessibles ou avec une belle vue donnent une touche d'exclusivité, et la promesse d'une expérience mémorable. Effectivement, ce sont plus de deux tiers des Italiens qui confirment que le facteur de l'endroit a joué un rôle dans leur décision. La professionnalisation des hôtes par VizEat Concernant hôtes déjà inscrits sur le site, VizEat donne beaucoup d'importance à leur suivi. La start-up peut conseiller de baisser les prix, proposer des dîners spéciaux pour les mettre en avant dans les réseaux sociaux. Les hôtes mêmes tendent à contacter VizEat afin de recevoir des conseils quant à leur positionnement. Ils souhaitent souvent mieux connaître la concurrence de leur quartier ou comment ils peuvent mettre en valeur les atouts de leur maison, entre autres. Dans un entretien, un hôte qui offre également son service sur Airbnb exprime son souhait de soutien par VizEat : « Avec Airbnb, j'ai une idée très claire de qui arrive [sur mon profile]. Parce que Airbnb me l'annonce aussi, me communique même des graphiques, c'est très bien fait le site Airbnb. Il me conseille d'augmenter ou baisser le prix selon les demandes. Après, avec VizEat je n'arrive pas à savoir combien de personnes me consultent pour voir mon menu. Selon moi, je n'ai pas encore 73 beaucoup d'informations de VizEat, c'est maigre. Airbnb m'aide à voir combien des personnes ont regardé mon profil, à quel moment, à quel période. Sur ma page il y a même une graphique et tu peux voire, par exemple, de ces trois, cinq, dix visites combiens m'ont effectivement passé commancde, ou lesquels m'ont regardé sans franchir le pas. Pour moi c'est important pour adapter l'offre. Alors, par exemple, quand j'ai commencé il y avait peu de propositions bolognaises et donc, je n'avais pas beaucoup de concurrents. Maintenant, je la moyenne de visites. Et cela manque chez VizEat. Une chose que manque beaucoup est que quand je propose un nouveau menu ceux qui m'ont déjà visité devraient le voir. Au moins, ceux qu'ont laissé un avis positif. Pour moi, cela est important.»21 Alors que VizEat ne possède pas les mêmes moyens que le géant de l'économie collaborative, Airbnb, il y a déjà des stratégies en place pour aider les hôtes. Comme nous pouvons le constater sur le site internet, VizEat envoie également des photographes professionnels aux repas pour prendre des images pour les profils des hôtes et aide à traduire leurs descriptions en ligne pour s'adresser à une clientèle plus internationale. Une autre démarche pour la professionnalisation des hôtes est de les former grâce à des utilisateurs de la communauté plus expérimentés. 74 sonnes en déplacements professionnels, la start-up a annoncé en avril 2016 qu'elle s'ouvrait également sur le marché MICE (Meetings, Incentives, Conferencing, Exhibitions) : « Le social dining (repas partagé) a une réelle fonction socialisante et émotionnelle. Nous pensons pouvoir apporter une réponse aux nouveaux enjeux MICE en proposant des expériences fédératrices fortes autour de moments d'échanges, authentiques et conviviaux » explique co-fondateur Jean-Michel Petit (www.tendancehotellerie.fr). Les réservations de professionnels augmentant de 20% chaque mois, la start-up essaye de les attirer avec la promesse « d'authenticité, en proposant des découvertes conviviales et des rencontres spontanées ». Dans le tourisme culinaire, elle permettrait de vivre la richesse de la culture alimentaire sur place autrement. En plus, VizEat se propose d'organiser des événements, étant « le seul acteur européen du social dining dimensionné pour des évènements de plus de 500 personnes tout en garantissant la flexibilité attendue par les organisateurs d'évènements (choix des dates, lieux, nombre de personnes, thématiques et formules) ». Après seulement deux ans, on voit que les guests potentiels ainsi que la typologie des hôtes se sont bien diversifiés. Quant aux guests, la cible est devenue plus large, ne visant plus que le tourisme, mais également les professionnels ainsi que la population locale. Mais est-ce que ce changement de placement impacte également le positionnement de la start-up? Une offre « authentique » versus une offre diversifiée? Du fait de sa croissance rapide, VizEat n'englobe pas seulement un nombre plus élevé d'utilisateurs, mais aussi une communauté plus complexe. Le défi est de gérer le groupe d'hôtes avec des différentes attitudes, langues et habitudes alimentaires, dans des pays aux législations différent es ainsi que des différents types de hôte. Il est également difficile de répondre aux attentes et besoins de chaque groupe d'utilisateur en conservant les valeurs au coeur de la start-up. Vu que VizEat est une start-up à but lucratif, il est important pour elle de diversifier et d'élargir son offre afin de cibler le maximum de clients potentiels. Mais est-ce que ce choix de stratégie est encore en lien avec l'exigence d'authenticité? Quelle serait la différence entre un dîner au restaurant et un dîner préparé par un chef professionnel dans sa maison? Quelle est la valeur ajoutée de cette offre? Peut-on vraiment parler d'une offre authentique si les hôtes sont encouragés à diversifier leur offre en fonction de ce que les autres cuisinent? Comment peut-on appliquer l'exigence d'authenticité à des événements de spectacle ou des soirées à thème? Si les repas ne se font plus dans les maisons des particulières mais ont lieu dans des endroits exclusifs, quelle serait l'authenticité? Bien que à la base, le service de VizEat se voulait à l'origine destiné aux voyageurs – aussi dans leur propre ville – pour faire découvrir l'authenticité, il semble que, en lien avec l'évolution du marché ciblé, l'exigence d'authenticité n'adresse plus à toute la communauté. La balance recherchée entre l'incorporation de nouveaux et la conservation des valeurs à la base du service pose aujourd'hui un vrai défi à la jeune start-up. Conclusion Pour reprendre la question de Claude Fischler, « mangerons-nous encore ensemble demain? », la réponse claire et nette donnée par les acteurs du Social Dining est affirmative. L'acte de manger a toujours été social, la table toujours la scène parfaite pour mettre en scène tout un éventail des relations humaines. En même temps, l'acte de manger est également identitaire et donne le cadre idéal pour expérimenter la propre appartenance à un groupe en entrant en contact avec l'Autre, c'est-à-dire l'inconnu. Dans le cadre de ce travail, se posait notamment la question de l'authenticité : la manière comment celle-ci se crée et est vécue par les différents participants du tourisme de partage fondé sur le repas chez l'habitant. Après présentation du service VizEat et de la méthodologie de recherche appliquée, l'analyse de l'évolution de la notion d'authenticité dans le tourisme a permis d'identifier trois types différents : l'authenticité adhérente à un objet, l'authenticité en tant que construction sociale et enfin l'authenticité existentielle. L'usage et le rôle de l'authenticité dans le tourisme de partage comme dans le tourisme culinaire montrent qu'avec son slogan « Authentic food, authentic people », VizEat a repris le fil conducteur de ces deux types de tourisme en vogue. Ensuite, il était important de se dédier à la question de la construction d'authenticité par la communauté de VizEat, en se concentrant sur les aspects de l'alimentation et du lien social. Cependant, au cours de la recherche, il s'est avéré que le objet de recherche était plus complexe, car les typologies des hosts et guests n'étaient pas que des particuliers locaux ou des touristes étrangers. D'un côté, l'authenticité alimentaire n'est pas la motivation centrale de tous invités, les guests locaux basant leur choix sur des autres facteurs, liés en partie à la particularité du marché et à la mentalité de la population italienne quant au repas. D'un autre côté, les touristes peuvent vivre cette authenticité, omniprésente dans le tourisme de partage, de diverses manières. Premierement, ils expérimentent l'authenticité existentielle, en s'identifiant comme voyageurs qui évitent les sentiers battus pour s'immerger dans la culture locale, ce qu'est perçu comme expression de leur propre personnalité. Deuxièmement, du fait qu'ils entrent dans la maison des locaux, une back region, ils sont amenés à goûter des recettes qu'ils ne trouvent pas dans les 77 restaurants ethniques de leur pays ou dans les pièges à touristes de leur destination de voyage. Au contraire, ils ont l'impression de vivre une expérience authentique. Bien qu'ils ne sont pas toujours dans la mesure d'identifier ce qui est véritablement « authentique », cela n'empêche pas leur satisfaction avec l'expérience, car l'illusion et la mise en scène d'une forme d'authenticité correspondent à leurs attentes. Quant aux hôtes, on remarque qu'ils ont tendance à banaliser leur offre de manière consciente pour répondre aux attentes de leurs clients potentiels. Plutôt que de préparer des véritables dîners comme pour des amis, il choisissent de servir des plats horssaison ou sans respecter les modalités de leur culture alimentaire. Néanmoins, certains hôtes utilisent la plateforme de VizEat pour soigner leur patrimoine alimentaire et pour diffuser une image plus diversifiée de leur cuisine locale. Quant à l'aspect social de la start-up, il s'avère que des liens sociaux se créent, qui vont au delà du simple acte d'hospitalité. L'impression d'être « chez soi » dans un autre pays, d'avoir des conversations ouvertes entre personnes partageant des passions communes et la possibilité de voir une autre culture « de l'intérieure » sont des facteurs enrichissants tant pour les invités que pour les hôtes. Le service des repas partagés est encore assez récent et il revient aux futurs chercheurs de répondre à des questions de banalisation ou d'adaptation des habitudes alimentaires et sociales des utilisateurs. Il est possible, si ce genre de consommation venait à s'élargir et à se banaliser, qu'elle finisse par être perçue comme trop touristique, et que les membres de la communauté seront alors attirés par de nouvelles formes, dans une quête éternelle d'une inatteignable authenticité. 79 Annexes Annexe 1 : Les dix villes italiennes plus touristiques Annexe 2 : Sondage guests Annexe 3 : Sondage hosts Annexe 4 : Entretien avec l'hôte Marzia à Bologne Annexe 5 : Entretien avec l'hôte Fulvio à Milan Annexe 6 : Entretien avec l'invité Lodovico Annexe 7 : Entretien avec l'invitée Eleonora Annexe 8 : Entretien avec Ester Giacomoni, Country Manager Italy de VizEat Annexe 9 : Observations pendant des repas VizEat à Paris et Milan 80 Annexe 1 : Les dix premières villes italiennes pour nombre de touristes (en mil) entre 2007 et 2012 Source: Osservatorio Nazionale del Turismo Italiano (www.ontit.it), consulté le 9 août 2016 81 Annèxe 2 : Sondage guests Questionnaire en français (également envoyé en version anglaise, italienne et espagnole) : 82 83 84 Annexe 3 Sondage hosts Résultats : 85 86 87 88 Annexe 4 Entretien avec host Marzia à Bologne, 14/07/2016 Quando hai cominciato a usare VizEat? L'iscrizione mi sa un anno fa, più o meno. Come hai conosciuto il servizio? Non lo so, l'ho visto. Avevo conosciuto prima Gnammo, però poi ne ho visitato vari e mi sono messa a produrre menu in VizEat. Non so perché mi ha dato più fiducia. Mi è piaciuta di più come piattaforma, poi sembrava più simile a Airbnb. E gli altri ti hanno contattato, dall'ufficio di Parigi? Sì, quando ho fatto il primo evento mi hanno chiamato per avere informazioni sia prima che dopo. E questo funziona anche così per Airbnb o era una cosa nuova per te? No, Airbnb non mi ha mai contattato, a parte quando ho avuto dei piccoli problemi. E più tramite mail, cose molto informali, per telefono mai. Sei di origine bolognese? I sono nata e cresciuta qua in via del Pratello. Il mio babbo è pugliese, però anche lui è qua fino da quando era bambino, quindi è come se fosse bolognese. Dunque il primo passo per te è stato lavorare su Airbnb. Che cosa significa per te l'ospitalità? Ma guarda, io ho iniziato così, un po' per gioco, perché le mie figlie hanno iniziato a studiare fuori Bologna e quindi avevo il secondo piano della mia casa, la parte sopra, che era praticamente sempre vuota. E le spese per coprire la loro università erano alte, dunque mi sono detta, "facciamo questa cosa", ma un po' per gioco quasi. Ho visto che Bologna è sulla lista delle 10 città più visitate dell'Italia e mi ha colpito. Il turismo è aumentato tanto in questi ultimi anni, soprattutto nell'ultimo anno c'è stata un'impennata piuttosto forte. Per me è una cosa positivissima. Al di là dalla parte economica, ho scoperto che mi piace tantissimo prendermi cura di queste persone. È una cosa che ho scoperto facendolo. Non avevo idea di avere questa vocazione e mi piace proprio tanto. Poi vabbè, c'è il turista che si fa più coccolare, il turista che invece ti mette subito dei fermi e vuole più autonomia. E nel mio caso è possibile perché abbiamo due piani distinti dunque se vuole stare per i fatti suoi abbiamo solo le scale in comune. Invece quelli a cui piace condividere magari mi chiedono un itinerario che farei io a Bologna, oppure con alcuni sono anche uscita, siamo stati insieme, è più bello. Il mio inglese non è ottimo, purtroppo, ma delle volte un po' con le mie figlie o insomma pian piano devo dire che quando c'è unione comunque d'intenti la lingua diventa una cosa insomma non fondamentale. Ed è nato anche così il mio interesse per VizEat, perché mi è capitato di ospitare ed anche di dare da mangiare. Quelli che avevano più confidenza con me sono scesi ed io ho fatto da mangiare e ho spiegato come si fanno alcune cose bolognesi di nonna, e allora lì è nata un po' l'idea di dire ma proponiamo anche pranzi e cene insomma. E cosa prepari per gli invitati VizEat? La prima proposta era una proposta buffet. Perché quando ho iniziato ho pensato al fatto di non legarmi troppo a quanti mettere a tavola, per potermi impegnare di meno. Dunque i primi menu ho preparato sono stati a buffet, vari tipi di cose fingerfood, cose magari anche bolognesi, legati, non so, a cose qua locali però tutte a buffet in modo che se fossero arrivate 10 o 2 persone, bastava solo aggiustare la quantità. Non sapevi quante persone sarebbero arrivate? Beh, lo sapevo, ma entro 24 ore possono anche rinunciare, quindi sai non volevo preparare per perché per un ristorante è forse più facile, non so, gestire chi c'è in più o in meno. Ma per una casa è importante sapere il numero. Quindi l'ho testato prima con queste cose a buffet. E quante cene hai fatto nel frattempo? Ho fatto con VizEat usando proprio il portale, ho fatto due pranzi, due pranzi di 8 persone ciascuno. E anche l'evento di San Remo Quello era all'inizio, era buffet però. C'erano solo italiani lì. Una parte erano delle persone che avevo comunque già visto in altri eventi simili. Lo avevo promosso su facebook, quindi alcuni li conoscevo già e altri sono venuti perché erano curiosi. Devo dire che il fatto del buffet forse è interessante quando le persone non si conoscono. Perché è meno impegnativo, no? Non c'è questo concetto di dialogo allora si creano tanti gruppi, e quando uno invece ha un momento in cui può studiare il cibo e non parlare insomma è più libera la scelta di come comportarsi in un ambiente che non conosci. E invece nel caso di quei due pranzi le persone si conoscevano tutte tra di loro e quindi è diverso, è più bello perché ma quando ci sono tutti sconosciuti fra loro devo dire che il buffet aiuta molto. E per te come ospite Anche per me è meno impegnativo. Dunque per te è non solo il cibo che è importante, diresti che lo è anche il mettere tutti a proprio agio, il creare una connessione gli uni con gli altri. Sì! E qual è l'elemento che ti piace più in tutto questo, dell'invitare degli sconosciuti a casa tua? Perché è anche una questione di fiducia verso altre persone no? La cosa che mi piace di più devo dire è l'attenzione che danno al mio cibo. Il fatto che sono curiosi di sapere come l'ho fatto. Diciamo che quando s'invitano persone che conosci danno un po' più per scontato forse ciò che hai preparato. Non so se è una cosa solo , però gli stranieri sono molto curiosi. Mi piace questa cosa del loro l'interesse su quanto tempo ho impiegato, come lo faccio cioè, danno molta importanza a quello che gli sto proponendo. Dunque ti domandano molte cose sulla preparazione del cibo. E quando sai chi viene a casa per pranzare o cenare, nel caso degli stranieri, adatti un po' la cucina, come hai detto nel caso della lasagna? Per dire questa è una cosa Prima che loro arrivino però, nel senso nella scelta del menu. Io lo propongo in anticipo, loro scelgono. E allora quando la prima volta ho visto questa predilezione per le cose con più formaggio, queste cose qua, dopo l'ho aggiustato e ho fatto un'altra proposta che fosse più sempre di cose italiane, cioè, io non ho modificato le mie ricette, ho messo cose che ho capito che posso piacere di più. E così, loro hanno provato anche questa cosa qua, l'hanno scelto con il menu. Ma prima che arrivassero sapevano già che il menu era quello 91 E ti sembra che loro si aspettino qualcosa di preciso da te? Per esempio, i piatti che già conoscono come "spaghetti bolognese" come dicono all'estero? Io non faccio spaghetti bolognese. Voglio sfatare questo mito perché a Bologna è una cosa che non esiste. Esiste il ragù alla bolognese ma noi, è una cosa che è nata in altra città quella di abbinarlo allo spaghetto, ma Bologna non si è mai fatto lo spaghetto alla bolognese. Chi lo fa, lo fa per motivi turistici, perché all'estero sono famosi. E loro alcune cose ad esempio non sapevano nemmeno cosa fossero quando sono arrivati. Un esempio, io faccio una cecina con le verdure, da vedere sembra quasi una frittata, ma in realtà è un impasto fatto con la farina di ceci e in mezzo le verdure. Loro non sapevano minimamente cosa aspettarsi (ride) anche se hanno tradotto gli ingredienti però non sapevano minimamente cosa sarebbe arrivato. Quindi anche buffa questa cosa che non sanno cosa arriverà, sono curiosissimi e chiedono com'è fatto eccetera. Dunque questo è il tuo scopo? Presentare qualcosa di diverso dallo stereotipo? Certo! È una cosa a cui tengo tantissimo. Bello! E com'è la reazione degli invitati, italiani come stranieri? Ti dico sono molto curiosi, mi piace questa cosa. (Ride La cosa che ho notato è che mangiano un po' di meno di noi italiani. Cioè, noi italiani forse quando usciamo per mangiare è come se dovessimo mangiare il doppio di ciò che mangiamo a casa (ride). Invece vedo che gli stranieri sono più morigerati, però mangiano tutto anche se sono strapieni vogliono assaggiare fino all'ultima pietanza e mi piace molto quello interesse per il cibo. Non so se è solo perché sono cose molto diverse da quello che mangiano normalmente o se perché sono cose che hanno già conosciuto per nome e vogliono vedere la tua versione, non lo so, però mi piace questa cosa che sono curiosi. E dunque, secondo te, la loro motivazione principale per fare un evento VizEat in Italia è veramente il cibo o anche il creare una rete sociale? Allora, gli è piaciuto molto venire a casa mia e vedere un interno. La casa, secondo me – ma anch'io farei così all'estero, mi piace molto vedere come sono le case, vedere cosa si vede dalle finestre, e poi, per quanto riguarda il cibo, qualcuno che ti spieghi come ha fatto questa cosa non in una maniera di ristorazione, in modo massivo, in modo grande, ma come potrebbe spiegarglielo, non so, un amico, in modo semplice. Penso che cerchino questo, vedere la casa e qualcuno che gli spieghi il cibo in modo casalingo, non industriale insomma. Per te – che sei una persona alla quale piace invitare gente a casa sua – tra gli amici e, diciamo, gli invitati della piattaforma VizEat, ci sono grandi differenze in generale? Quali sono le cose che cambi, sia per gli italiani, sia per gli stranieri? 92 No, perché non è che cambio tanto. Magari ai miei amici non farei mai le lasagne alla bolognese perché è una cosa che mangiamo spesso e allora forse non abbiamo tanta voglia di mangiarle da noi. Però no, del resto delle cose che faccio per gli stranierei le faccio anche per i miei amici. Sì, non cambia. Magari gli abbinamenti, c'è stato il caso in cui mi hanno chiesto, nel primo pranzo che ho fatto con questi del Belgio, un bis di primi, oltra la lasagna che amano molto, ho deciso di mettere per dire delle trofie al pesto con i carciofi che forse se fosse un piatto per me, non li abbinerei insieme, però loro erano curiosi di vedere questi due piatti, allora va bene Hai detto che hai fatto il buffet, ma normalmente in Italia avete una linea, no? L'antipasto il primo, il secondo. Rispetti anche questa modalità italiana? Sì! Pensi che gli invitati stranieri sanno di questa, non so come dire, Scaletta. Esatto. Pensi che la conoscano o magari arriva il secondo e si sorprendono? Dicono sempre che è tantissimo. Per loro è molto e non sono abituati a mangiare così tanto, effettivamente. Ma la generosità è anche una cosa positiva Sì, infatti! Loro sono contenti, però allora io mi rendo conto che è diverso per uno straniero. Ricordi di dov'erano gli stranieri che hai ricevuto? Per l'evento di San Remo erano tutti italiani. Invece per gli altri due eventi erano del Belgio, di Brugge e di Bruxelles. Per quanto riguarda gli italiani ti è sembrato avessero altre motivazioni per venire qui? Erano anche di altre città italiane? No, no, erano magari di altre città ma che abitano a Bologna. Erano curiosi dell'evento e poi, diciamo che San Remo che è una cosa abbastanza popolare anche se un po' trash, però molto diffuso. Sì, la cosa bella secondo me nel caso di questi italiani è come si sono integrati subito, non so se è perché c'era il traino di questa visione collettiva, ma si sono integrati con le persone che già conoscevo, le mie figlie, tutti quelli che già erano un nucleo conosciuto sono integrati dopo poco benissimo e sono quelli che hanno lasciato commenti più positivi sul sito. Per diversi motivi sono contenta, infatti. E poi ho continuato a vedere queste persone. La cosa incredibile è questa! Abbiamo fatto un' altra cena al di fuori di VizEat e poi ogni tanto ci vediamo. Bello! E sei anche rimasta in contatto con gli stranieri? 93 No, gli stranieri mi hanno lasciato i loro dati perché probabilmente una mia figlia andrà a studiare in Belgio gli ultimi due anni per la magistrale. Dunque alcuni hanno lasciato il loro biglietto da visita, tipo quando è là, lei può andare a trovarli. No, sono tutti molto cordiali devo dire che anche in questa esperienza con Airbnb cioè le persone che si spostano e che hanno piacere di conoscere, di vedere quello che è al di fuori della loro quotidianità, hanno in comune di essere gentilissimi, molto aperti a prescindere dalla nazione. E come se facessero tutti parte di 'unica nazione che è quella che viaggia, non lo so (ride). Quindi è un certo tipo di persona che ha un'affinità per questo servizio Sì. Io ci trovo un'affinità tra loro, anche se vengono da paesi diversissimi vabbè, quegli che vengono per il lavoro magari sono particolari, ma quelli che viaggiano per piacere hanno qualcosa in comune secondo me. Come descriveresti la tua cucina in tre parole? Allora, genuina ; bella, perché quando non sono belli i piatti, non mi piace. Magari cerco di passare questi messaggi che per uno straniero che è là per pochi giorni è difficile da trovare. E vedi la stessa curiosità tra gli invitati stranieri Airbnb e VizEat? Sì. Devo dire che quelli di VizEat sono più hanno già un loro programma, un percorso già studiato. Probabilmente perché sono appoggiati da queste agenzie turistiche. Invece quelli che vengono con Airbnb spesso arrivano senza sapere minimamente vagamente sanno che ci sono cose storiche, ma non sanno quasi nulla di Bologna. Quindi, lì è più facile fare da guida e fargli vedere un po' qualcosa fare. A volte vai con loro? Sì, è capitato. E poi questo mi obbliga anche un po' a sapere cosa succede nella città. Non sto spesso fuori come magari facevo da giovane, avevo un po' dimenticato come informarmi sulla mia città. Adesso invece col fatto che faccio un po' da mediatrice per i turisti, m'informo di più e alla fine scopro delle cose che probabilmente non avrei trovato senza di loro perché non sto sempre fuori. Sei dunque un'ambasciatrice di Bologna (ridiamo). Mi sembra interessante il nuovo tipo di turismo, il vivere una città come fanno i suoi abitanti. È proprio una cosa di cui abbiamo bisogno. Secondo me Airbnb ha permesso di vedere delle cose interessanti su come vive un bolognese, più di quanto facesse il turismo classico. Infatti io non credo di fare concorrenza ad un hotel, perché le persone che vengono da me difficilmente andrebbero in un hotel. Infatti, anche il fatto che la maggioranza delle persone che vengono qui siano donne non so se è un caso, ma secondo me si sentono anche più tranquille ad avere comunque una famiglia, qualcuno che in caso di bisogno, di necessità, comunque è presente. Per VizEat i più uomini o donne? Nel caso di San Remo erano delle coppie, invece gli altri erano turisti che si conoscevano, però turisti. Pensi che VizEat possa diventare una minaccia per i ristoranti? Questo non lo so, infatti me lo chiedo. Un grosso problema secondo me è che i soldi di VizEat non so come dichiararli. Con Airbnb so come fare, con VizEat è strano. Perché in Italia non c'è proprio una legge chiara, e quindi non lo so.
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Frodobert s'enferme alors dans une cellule et s'inflige un jeûne quasi total durant deux ou trois carêmes de suite. Certains le soupçonnent de tricher, ou de vouloir mettre fin à ses jours. Mais l'évêque a confirmation de sa sainteté. - chap. 9 : Il chasse les démons miraculeusement. - chap. 10 : Il fait profiter autrui de ses pieux exemples, tout en conservant l'humilité. - chap. 11 : Il veut fonder une communauté monastique sans se mettre sous la dépendance de la noblesse locale. Il obtient du roi Clovis [II] une terre marécageuse dans les faubourgs de Troyes, nommée Insula Germanica. A la mort de Clovis, Frodobert s'adresse à son fils Clothaire [III], duquel il obtient, avec le concours de la reine-mère Bathilde, une confirmation de la donation. - chap. 12 : Frodobert transforme ce lieu inhospitalier en un endroit propre à la vie monastique. - chap. 13 : Il fait don de tous ses biens propres à sa communauté, et ses proches font de même. Le monastère s'accroît et prospère. Plusieurs de ses abbés deviendront évêques de Troyes ; parmi eux Aldobertus, 24e évêque, et Bobinus, 29e. - chap. 14 : Dans le monastère féminin de Saint-Quentin, où il avait fait déposer deux récipients de vin à distribuer aux visiteurs, se produit un miracle : une flaque de vin répandue sur le sol lui révèle que les récipients se remplissent à mesure qu'on y puise. - chap. 15 : Il vénère particulièrement les fêtes des saints. - chap. 16 : L'abbesse Roccula l'invite à une célébration solennelle en l'honneur du martyr saint Quentin, dans le monastère même nom, dont il assure la direction spirituelle. Après l'office, il s'attarde à prier seul dans l'église. L'abbesse et les soeurs l'admirent en cachette. Le diable renverse le candélabre, mais ce geste est sans effet sur Frodobert, en qui brille la lumière intérieure. - chap. 17 : Dans la basilique de Saint-Aventin le diable s'adresse à lui à travers un possédé, qui lui reproche de l'avoir privé de lumière tandis qu'il disait les vigiles. - chap. 18 : Teudecharius, abbé d'un monastère suburbain, a témoigné de ce que Frodobert avait un jour perçu la voix des anges. - chap. 19 : Il guérit une folle de la région d'un signe de croix. - 20 : Il tombe malade, reçoit la révélation du jour de sa mort, s'y prépare et console les siens. - 21 : A Noël, Léon et Lupelmus (ou Lupellus), deux disciples de Frodobert, envoient quérir en hâte l'évêque Abbon pour la consécration d'un oratoire dédié à saint Pierre, destiné à remplacer l'église primitive, devenue trop petite. L'évêque refuse, en disant que les consécrations ne se font pas à Noël, et qu'il est occupé chez lui. Frodobert reconnaît le bien-fondé de sa réponse, mais craint de ne pas vivre assez longtemps pour voir consacrer l'église. Dieu lui accorde alors une semaine de sursis. - chap. 22 : Au seuil de la mort, Frodobert fait venir Lupelmus pour qu'il lui lise l'Evangile. Le violent mal de tête dont souffrait ce dernier disparaît miraculeusement. Frodobert meurt, et sa sainte âme monte au ciel en présence de tous. - chap. 23 : Son neveu Waldinus lui succède. Il fait prévenir Gibitrude, l'abbesse de Saint-Quentin, qui se précipite aux funérailles du saint. Elle s'inquiète de sa sépulture, et apprend qu'un notable nommé Walbert a fait préparer un tombeau de pierre. Malheureusement, il ne pourra contenir le corps, qui s'avère d'une taille exceptionnelle. Un miracle substitue à la tombe prévue une sépulture plus grande. - chap. 24 : Le 1er janvier, le saint est enterré dans la nouvelle basilique, consacrée par l'évêque le même jour. - chap. 25 : Des miracles se produisent aussitôt sur sa sépulture, et les donations abondent. - chap. 26 : Au fil des ans culte tombe en déshérence, et l'église où il repose s'effondre. L'évêque de Troyes Prudence est appelé à en consacrer une nouvelle, construite sur la précédente. Il fait enlever préalablement toutes les sépultures, et on trouve celle de Frodobert, totalement inconnu à l'évêque. - 27 : Après la dédicace, Prudence retourne chez lui et se renseigne. Il organise la translation du corps de Frodobert, mais meurt avant d'avoir pu la célébrer. - chap. 28 : La translation solennelle ne se fit donc pas avant 872, sous l'évêque Otulfus. Jusque-là ses reliques étaient simplement entretenues par les frères du lieu, dans l'église. Mais des miracles survenus sur sa tombe les décident à le tirer de cette obscurité. - chap. 29 : L'abbé et les moines vont trouver Otulfus pour lui demander une translation. - chap. 30 : Celle-ci a lieu le premier jour du Carême, accompagnée par deux miracles : la dalle s'ouvre sans qu'on ait besoin de la forcer ; on trouve des gouttes d'or dans un os du saint. - chap. 31 : Miracle de la guérison de Ratbert. Originaire du pagus de Melun, celui-ci bat sa mère dans un mouvement de colère. En punition il perd son oeil gauche et le bras qui a frappé est pris de mouvements incontrôlables ; en outre il perd la raison, et sa mère meurt trois jours plus tard. Il est conduit devant l'archevêque de Sens Eigil et emprisonné durant trois ans. Comme la famine fait rage, on le relâche pour lui épargner de mourir de faim. - chap. 32 : Ratbert se rend alors à l'église Saint-Michel, au lieu dit Les deux tombes, puis à Rome, où le pape Adrien [II], intrigué par son infirmité, le fait appeler. Il lui ordonne de retourner à l'église Saint-Michel et de revenir ensuite auprès de lui. Sa route le mène dans le pagus de Troyes, et il fait un songe qui lui prescrit de se rendre dans l'église Sainte-Marie de Fouchères, et d'y porter un cierge aussi grand que lui. Empêché de le faire en raison de son infirmité, il délègue quelqu'un, et poursuit sa route jusqu'au monastère Saint-Pierre, où sont vénérées les reliques de Frodobert. C'est le dimanche après l'Ascension, et le prêtre dit la messe. Tandis qu'il prie devant la porte de l'église, Ratbert voit venir un clerc, qui se jette sur lui et le terrasse. Il tombe à demi-mort, mais l'instant d'après il est guéri de son infirmité. Durant son sommeil, le clerc lui apparaît pour lui ordonner d'aller suspendre son habit de pénitent au seuil de Frodobert. Il demande où se trouve l'église du saint, et il apprend que c'est celle-là même où il a recouvré la santé : il comprend que son crime lui a été pardonné. Il retourne alors au sanctuaire de saint Michel, selon l'ordre du pape. D'autres guérisons ont lieu durant la préparation de la translation. - chap. 33 : La fête de Frodobert, qui tombe le 1er janvier, souffre de la concurrence de la Circoncision. Aussi l'évêque, l'abbé et les moines de la Celle la déplacent-ils d'un commun accord le 8 janvier. Afin de donner plus d'éclat à la translation, ils conduisent d'abord le corps dans l'église voisine dédiée à saint Michel. - chap. 34 : L'hiver est pluvieux et rend difficile l'accès à cet endroit marécageux. On prie donc pour qu'il gèle et qu'il neige, ce qui ne manque pas de se produire durant la nuit. - chap. 35 : L'évêque procède à l'enlèvement du corps et le conduit solennellement de Saint-Michel à Saint-Pierre ; près du chef de Frodobert on consacre un autel en l'honneur des Saints Innocents. L'évêque inscrit le jour de sa translation au nombre des obligations du calendrier. - chap. 36 : L'auteur remercie Frodobert pour tous les bienfaits qu'il vient de mentionner. Notes de la Vita Frodoberti Prologue Le poème liminaire en distiques élégiaques à rimes léonines (ou internes) présente avec celui de la Vita Mansueti des analogies non seulement formelles (par exemple la richesse des moyens rhétoriques et prosodiques mis en oeuvre), mais aussi fonctionnelles et structurelles, les vers offrant une sorte de compendium de la Vie en prose préalable à la demande de protection traditionnelle. D'une adresse au lecteur (v. 1-4) on passe à une invocation à Frodobert (v. 5-24) et à l'évêque Bobin (v. 2532), puis à une évocation du monastère et des miracles qui s'y produisent, avant de revenir à la traditionnelle prière propitiatoire adressée au saint patron (v. 53-56). Pour les problèmes posés par la fonction de ces distiques, voir notre annotation de la V. Mansueti (« metrum »). 1/9 L' antithèse entre l'élévation du sujet (grandia, magna) et la pauvreté du discours (paucis verbis parvo libro) appartient à la topique de l'exorde. On en trouve une expression voisine dans le prologue de la Vita Basoli, liée comme ici à l'opposition entre l'Antiquité profane (antiquos fastos) et la nouveauté chrétienne (hoc novitatis opus). Dans les deux cas le contraste se double d'une antinomie profonde entre les saints et les héros antiques : contrairement au héros gréco-latin, loué soit pour sa ruse et son savoir-faire, soit pour sa force physique, Frodobert, qui est « totalement dépourvu d'astuce » (chap. 7, l. 197-198), est célébré, de façon récurrente, pour son innocence, voire sa naïveté (l'astutia est traditionnellement la vertu du démon, opposée à l'innocence de la colombe) ; d'autre part ce n'est qu'à sa mort que sa dépouille s'avérera trop grande pour le cercueil prévu. On peut comparer avec Basle, saint de si petite taille qu'un noble se moque de lui. 12 Sur la présentation qu'Adson fait du monastère de Luxeuil à l'époque mérovingienne, voir infra, chap. 5, ainsi que Vita Waldeberti, chap. 1, et Vita Bercharii, chap. 6. 14 Trecassinam urbem] Troyes, dép. Aube. 18 cella] la celle de Frodobert donnera naissance à Montier-la-Celle. 20/25 Nouvel usage systématique de l'antithèse (cf. l. 1-10), opposant cette fois symboliquement l'exiguïté, la fixité et la clôture de la cellule à l'immensité du séjour céleste, la mortification terrestre à la gloire éternelle. Sur l'évêque Bobin, qui restaura la fondation de Frodobert et lui laissa son nom, voir infra, chap. 13. l. 26 Sur les extrapolations chronologiques auxquelles a donné lieu ce vers, voir notre Introduction générale. 32 stabiles - stant] la figure étymologique, soulignée par le rejet du verbe, en même temps qu'elle évoque les qualités de résistance requises par la militia monastique, souligne également le devoir de stabilité du moine. 36/45 Evocation, sous forme d'un « sommaire », des miracles qui s'accomplissent sur le tombeau de Frodobert : guérisons physiques et morales, délivrance de possédés, effacement des péchés. 46/53 L'incapacité du livre à tout dire, et la nécessité de faire fond sur quelques témoignages seulement (pauca fidem faciant) ressortissent à la topique traditionnelle des prologues ou des épilogues : la foi n'est pas affaire de nombre, et ce n'est pas l'accumulation des témoignages qui convaincra l'incrédule. Vita 1, 63 L'expression parentibus quidem mediocrib ortum inspire confiance, car elle est rare en comparaison des mentions de saints aux origines nobles, ou tout au moins à la médiocrité masquée derrière une litote, comme dans la Vie de Saint Martin (non infimis : éd. J.Fontaine, t. II, p. 434-436). Mais elle s'inscrit aussi dans la volonté de faire de Frodobert un anti-héros, ou plus exactement le héros des gens simples. 69/70 Sur la charte de donation [perdue] de Clovis II (639-657), fils de Dagobert, et sa confirmation octroyée par Clothaire III (657-673) en 658/659, qui attestent le floruit de Frodobert, voir infra, chap. 11, Levison, MGH, SRM V, p. 77, n. 1, et en dernier lieu Th. Kölzer, Die Urkunden der Merowinger, p. 237-239 (n° 92), et t. 2, p. 595 (Dep. 226). Levison fait remarquer que le surnom iunior est donné à Clothaire III dans la Vita Eligii, II, l. 32. 73/75 La liste épiscopale de Troyes, dont nous avons un exemplaire du XIIe s., fournit la succession suivante à partir de Ragnegisel, le 17 évêque : Leuconius, Berthoaldus, Wanmirus, Abbo Felix, Vulfredus, Ragembertus, Aldebertus, Fredebertus, Gaucherius, Arduinus, Censardus, Bobinus, Amingus, Adelgarius, Osulfus vocatus, Beltulfus, Elyas, Adalbertus, Prudentius, Fulcherius, Otulfus, Bodo, Rihtueus, Othbetus, Anseius, Gualo, Milo, Manasses (L. Duchesne, Fastes, II, p. 448). 72 L'évêque Ragnegisel, qui a co-signé en 637/638 un privilège pour Rebais, est mort avant 643 (Levison, p. 74, n. 5). 74 natione aquitanus] comme l'évêque Nivard dans la Vita Bercharii, et comme saint Basle, Frodobert est suposé être l'un de ces nombreux Aquitains qui gagnent le Nord de la Gaule aux VIe-VIIIe siècles. Voir E. Ewig, « L'Aquitaine et les pays rhénans au haut Moyen Age », CCM, 1 (1958), p. 37-62. 75/76 Sur l'église Sainte-Savine, dont on n'a pas d'autre mention pour l'époque qui nous intéresse, voir Topologie chrétienne, t. V, p. 80 (le culte de la sainte n'étant pas attesté avant le IXe siècle, il est possible que ce ne soit pas là la dédicace originelle de l'église, mais celle du temps d'Adson). 79 Abbon-Felix est attesté par une signature en 667 (Levison, p. 75, n. 2). 2, 81/94 Le thème de la protection du futur moine par l'évêque, qui pourvoit directement ou indirectement à son éducation, se retrouve dans les Vies de Basle proté- gé de l'évêque de Reims Egidius, et de Berchaire, confié à Remacle par l'évêque de Reims Nivard. Sur le rôle moteur de l'évêque dans l'organisation de l'éducation dans la cité, voir M. Heinzelmann, « Studia sanctorum. Education, milieux d'instruction et valeurs éducatives en Gaule jusqu'à la fin de l'époque mérovingienne », dans Haut Moyen Age : culture, éducation et société, Etudes offertes à Pierre Riché, coord. M. Sot, Paris X-Nanterre, 1990, p. 105-138, p. spéc. p. 124128. L'éducation est une partie de la biographie antique : après le genos la paideia (M. Heinzelmann, « Studia sanctorum », p. 108), au même titre que les catalogues de vertus, dont on a l'équivalent dans les inscriptions romaines (M. Heinzelmann, Bischofsherrschaft in Gallien, Munich, 1976 (Beihefte der Francia, 5), p. 33-59. Voir aussi L. E. von Padberg, Heilige und Familie. Studien zur Bedeutung familiengebundener Aspekte in den Viten des Verwandten- und Schülerkreis um Willibrord, Bonifatius und Liudger, 2e éd. revue et augmentée, Mayence, 1997 (Quellen und Abhandlungen zur mittelrheinischen Kirchengeschichte, 83). Le coeur de la formation spirituelle de Frodobert est l'imitation des modèles bibliques et patristiques. L'accent est mis d'une part sur l'action (sur la devise res, non verba, voir M. Heinzelmann, « Studia sanctorum », p. 109, qui renvoie à G. Strunk, Kunst und Glaube in der latienischen Heiligenlegende, Munich, 1970, p. 16-19) et d'autre part sur les prières et les jeûnes, armure contre le mal. Ce thème fait la transition avec le chap. 3, consacré aux tentations qui assaillent Frodobert dès son plus jeune âge : la vita est le récit d'une série de mises à l'épreuve. 4, 119/135. Bien que les guérisons de cécités soient un type de miracle courant en hagiographie, il est plus rare qu'un enfant l'exerce sur sa mère (voir néanmoins la Vie de Sainte Geneviève, chap. 5, AASS, Janv. I, p. 138, où le miracle s'accomplit dans des circonstances fort différentes). La mère est la bénéficiaire privilégiée des miracles de la période prénatale (annonciations, prophéties) et infantile. Ici la précocité du pouvoir de Frodobert tient lieu de certificat de sainteté. En outre le triomphe remporté sur l'obscurité signifie nettement la « pureté » et la « candeur » de Frodobert, développées au chap. 5, et reprises tout au long du texte, dès le chap. 6 (l. 144-146). Toute la vita illustre la parole biblique (I Cor. 1, 20-27) auxquelles font allusion les l. 149-153 : ce qui semble stupidité dans le monde est sagesse au regard de Dieu. 5, 137 et 148 Les qualités dominantes de Frodobert ici désignées (animi puritatem, animi candor et praeclara simplicitas), fondent la suite du récit, entièrement structuré par l'in ence du saint. Hormis ce court passage, n'y a pas à proprement parler de catalogue de vertus dans cette vita. 144 Walbert fut abbé de Luxeuil de 629 à 670 (voir notre introduction à la Vita Walberti). Nombreux sont les fondateurs de monastères de la Gaule du Nord censés avoir été éduqués à Luxeuil (par exemple Amé, fondateur de Remiremont, selon la Vita Amati, BHL 358). A supposer que ce ne soit pas un topos justifié par la notoriété exceptionnelle de l'établissement, ou un « coup de chapeau » d'Adson au lieu de son enfance, l'affirmation peut se justifier par la position dominante de Luxeuil en Gaule du Nord durant l'époque mérovingienne (voir G. Moyse, « Les origines du monachisme dans le diocèse de Besançon, Ve-Xe siècle », BEC , 131 , 1973 , 21-204 , 369 - 485 ). 6, 159 L'évêque de Langres Bertoald a souscrit avec Ragnegisel le privilège pour Rebais daté de 637/638 et les décrets d'un concile tenu à Chalon en 650 ; il est encore mentionné dans une charte de Clotaire III de 664/665 (Levison, p. 76, n.1). 160 coenobio - Sequani] Saint-Seine-l'Abbaye, dépt. Côte-d'Or, arr. Dijon. 7, 176/213 Theudolenus, déjà abbé de Saint-Seine apparemment, à moins qu'il ne faille comprendre « futur abbé », vient à Luxeuil pour parfaire son instruction (erudicionis gratia), envoyé là par l'évêque de Langres. Dans cet épisode il a l'ambiguïté des personnages qui ne sont que les instruments de la main divine, médiatisée par celle de l'évêque : il est celui qui met le saint à l'épreuve, et qui lui permettra de triompher une fois vérifiée la sincérité de son innocence. F. Brunhölzl , Histoire de la littérature latine du Moy en Age , t . 2, « De la fin de l'époque carolingienne au milieu du XIe siècle », Turnhout , 1996, p . 137 commente ainsi l'épisode : « [L'évêque de Langres] le fait provoquer par un moine, mais Frodobert soutient brillamment cette épreuve. » L'épreuve du compas est conçue comme un martyre (dérisoire!). Frodobert présente les vertus christiques de la patience et de l'indulgence face aux quolibets : l'assimilation de la meule à la Croix est simplement suggérée aux l. 205-206, mais le rapprochement avec la Passion du Christ devient explicite aux l. 210-213, jusqu'au moment de la mort, où le saint se fait lire ce passage des évangiles. D'autre part la meule étant généralement mue par un âne (mola asinaria), l'épisode renvoie à l'« ânerie » apparente de Frodobert. Mutatis mutandis, Adson a pu aussi être influencé par le poème VII du Peristephanon de Prudence, dans lequel le martyr Quirinus meurt noyé, une meule autour du coup (« In praeceps fluvio datur,/ Suspensum laqueo gerens/ Ingentis lapidem molae. »). Jeûne et calomnie, soufferts au chapitre 8, sont également des thématiques christiques. 11, 274/284 Nous ne possédons plus la charte de fondation délivrée par Clovis II, et apparemment Adson lui-même ne connaissait que la confirmation de Clotaire III, conservée dans les archives du monastère (« quod quia in archivis coenobii nostri usque hodie continetur »). Le texte de la confirmation est le suivant : « Igitur Frodobertus monachus ad nostram accessit presentiam, clementiae regni nostri suggessit, eo quod bonae memoriae domnus et genitor noster Chlodoveus quondam rex per suam auctoritatem sua manu subscriptam locello nuncupato Insula Germano, qui paludis esse videtur in suburbano Trecassium civitatis, ipsi Frodoberto monacho, ubi monachi sub sancta regula [deservire videntur], ad cellulam, quam suo opere inibi construxit, bonocrea decem de ipsa insula, quod pars fisci esse videtur, eidem concessisset. » (Kölzer, p. 238-239, n.92). Bonocrium est employé pour bunuarium, un « bonnier », ou 1⁄4 d'acre. Le document, qui n'est pas daté, contient le signum de la reine Bathilde. L'expression annuente uenerabili Bathilde regina, employée par Adson à la l. 279 n'est pas mérovingienne ; de deux choses l'une : ou bien Adson a devant les yeux un faux carolingien qu'il reprend littéralement, soit il paraphrase librement un document authentique. 282 C'est une habitude littéraire d'Adson de parler au nom de la communauté pour laquelle il écrit (cf. V. Basoli, chap. 4, V. Mansueti, I, chap. 13, II, chap. 19. Voir l'introduction générale, p. XXIV) : ici cenobii nostri. 12, 285/295 Voir supra la charte de Clotaire : de ipsa insula, quod pars fisci esse videtur. 13, 312 Aldebertus/Aldobertus figure en 24e position sur la liste épiscopale de Troyes, et Bobinus en 29e place (Duchesne, Fastes, II, p. 448). 14, 325 Sur le monastère féminin de Saint-Quentin, qui n'est attesté que dans la Vita Frodoberti, et qui devint ensuite un prie masculin dépendant de Molesme, voir Topographie chrétienne, t. V, p. 75-76. On notera l'importance, dans la Vita Frodoberti, de ce monastère dont Frodobert assurait apparemment une direction plus que spirituelle (l. 330 : « eiusque constitucioni ac regimini peculiariter mancipatus »). Il coiffait ainsi de son autorité l'abbesse Roccula (chap. 16, l. 363-368). 325/353 Destiné à illustrer deux des vertus du saint (largitas et affluentia karitatis, l. 324), le miracle du tonneau est explicitement symbolique, comme l'indique la phrase « quanto hauriebat propensius karitas, tanto benigna creatoris largitas hausta profusius reformabat » : la générosité de Frodobert, motivée par les relations de karitas qu'il entretient avec les moniales, appelle de façon intarissable la générosité divine. Le mot karitas est un leitmotiv dans tout le paragraphe (l. 323, 328, 336, 343), et la mention de la largitas humaine du début du récit (l. 323) se transforme, à la fin, en une évocation de la largitas divine (l. 344 et 350) : par le miracle, le geste humain s'est transformé en opération divine. 15, 359-361 Topos hagiographique du « martyre virtuel » : tout se passe comme si Frodobert était déjà avec les martyrs au premier rang des bienheureux ; le mode potentiel n'aura plus qu'à s'actualiser dans la suite du récit. 16, 363 Saint Quentin, martyrisé dans le Vermandois sous Maximien, et fêté le 31 octobre, fait l'objet de plusieurs Passions, Inventions, Miracles et Sermons (BHL 6999 à 7021). 383/390 La ruse employée par le démon pour distraire le saint de sa prière se trouve dans plusieurs récits de miracles ; destinée à illustrer l'impuissance de la noirceur du diable devant le rayonnement de la piété du saint, qui puise à la source de toute lumière, elle a un sens symbolique explicité par l'hagiographe. 17, 392 La basilique Saint-Aventin, dans le suburbium oriental de Troyes. Aventin, disciple de l'évêque de Troyes Loup, fut inhumé au début du VIe s. dans une basilique construite par Vincent, le 2e successeur de Loup (Topographie chrétienne, t. V, p. 77). 18, 406/430 Le don de perception des voix célestes est un miracle récurrent des Vies de saints ; comme ici il se produit généralement en présence de témoins. chap. 19, 431/449 Autre miracle topique : la guérison d'une démente, par la prière et par l'imposition du signe de la croix. 436 L'expression uisceribus pietatis est très répandue dans les textes patristiques (Paulin de Nole, Augustin, Jérôme, Grégoire le Grand, etc. Voir la V. Mansueti, l. 328. Le motif – topique lui aussi – de la révélation faite au saint du jour de sa mort n'est pas développé ici, alors qu'il fait souvent l'objet d'un récit assez long. 21, 489 L'abbé Léon a succédé à Romain (devenu évêque de Reims) au début du VIe siècle, à la tête du monastère de Mantenay-sur-Seine (Mantiniacensis) [aujourd'hui Saint-Lyé (arr. et canton de Troyes)] : voir BHL 4843, et AASS Maii VI, 73 sqq. Pour Lupelmus/Lupellus, auteur présumé des vite et conversationis [Frodoberti] insignia, voir supra, notre introduction à la Vita Frodoberti. l. 492 : Adson cite certainement le topos de la brevitas présent dans son modèle ; il y a une autre allusion à l'hypotexte à la l. 529-530 (ut ipse postmodum retulit). Ces chapitres forment un obitus ou un transitus. On a d'abord la scène de mort traditionnelle, en présence des disciples du saint (d'abord deux, puis tous), accompagnée par la lecture de l'évangile ; les miracles attendus se manifestent : guérison de la migraine de Lupelmus, montée de l'âme au ciel, à la vue de tous. Les miracles post mortem sont attendus également, qu'il s'agisse des guérisons multiples autour de la tombe, rapidement évoquées, ou, développé davantage, de l'épisode de l'inversion des tombeaux, variante du motif de l'ajustement miraculeux de la sépulture aux dimensions de la dépouille, fréquent dans les récits hagiographiques. Le don de la sépulture par un noble est à rapprocher du geste de Joseph d'Arimathie, qui donne son tombeau au Christ. Aux lignes 591/593, la structure de la phrase (Quis enim?) évoque Sulp. Sev., V. Martini, epist. 2, 12/13 (éd. J. Fontaine, t. 1, p. 330, et commentaire t. 3, p. 1235 sqq.), qui a servi de modèle rhétorique à tant d'hagiographes du haut Moyen Age. 26, 623 : Avant de devenir évêque de Troyes vers 843, Prudence, né en Espagne comme le dit Adson, devint chapelain de Louis le Pieux. Il prit plusieurs fois parti dans la querelle sur la prédestination allumée par Gotteschalk d'Orbais, et rédigea plusieurs traités sur le sujet, ce qui lui vaut ici le qualificatif in divinis rebus undecumque non mediocriter eruditus. Il rédigea, entre autres, les Annales de SaintBertin pour la période 835-861, oeuvre que poursuivit Hincmar (éd. G. Waitz, MGH, SRGerm. in usum schol., 5, 1883, p. 55-154), et une Laudatio de sainte Maure de Troyes (BHL 5725, AASS, Sept. VI, p. 275-278). Il mourut en 861. 628/631 Prudence se conforme là à une disposition du 1er concile de Braga : ut corpora defunctorum nullo modo intra basilicam sanctorum sepeliantur. Mais Théodulf, évêque d'Orléans, ne voulait pas que l'on sorte les corps quae antiquitus in ecclesiis sepulta sunt (PL 105, c.194), et le concile de Meaux de 845 interdisait ossa cuiuslibet mortui de sepulcro suo eicere (MGH, Capitularia, II, 415, chap. 72). Sur cette question, voir M. Lauwers, « Le cimetière dans le Moyen Age latin. Lieu sacré, saint et religieux », Annales HSS, septembre-octobre 1999, n. 5, p. 1047-1072. 631/635 et 27, 636/650 Sur les problèmes posé s par la mention d'une source hagiographique ancienne relative à Frodo bert , voir notre introduction. A la l. 638, le substantif revolutio semble prendre le sens de « lecture (par déroulement d'un parchemin) » ; si cette valeur est fréquente pour le verbe revolvere, elle est rare pour le substantif. Cette interprétation est confirmée par 29, 689/690 : prae manibus gesta ferentes. 27, 636 Sur la dédicace on a le témoignage de deux manuscrits interpolés du martyrologe d'Adon (texte dans Levison, p. 82, n. 2). Ils situent la dédicace le 17e jour des calendes de novembre (16 octobre) 850. Levison fait remarquer que ce jour est un jeudi (quinta feria) et non un dimanche, jour habituel pour ce genre de cérémonie. 28, 651/655 Plutôt que la 13e année, comme le dit le texte, 872 est la 32e année après la mort de Louis le Pieux, mort le 20 janvier 840. Prudence est mort en 861, son 1er successeur Fulcherius en 869-870, et le 2e, Otulfus, est encore attesté en 878. 665/670 L'audition de voix suaves, la présence d'une lumière étincelante et la présence d'une colombe sur la tombe d'un saint au moment des funérailles sont des topoi hagiographiques. Voir, par exemple, la V. Waldeberti, chap. 8, et la V. Bercharii, chap. 10. 29, 694/695 abbatem] d'après le Carmen de Elevatione s. Frodoberti, p. 61, v. 6, il s'agit de l'abbé Bodon, attesté dans plusieurs sources entre 880 et 890. 30, 700/701 Le premier jour du Carême est aussi la date que donne, de façon contournée, le Carmen de Elevatione, v. 24-29. 711/716 L'idée de la présence de gouttes d'or pur dans les ossements de Frodobert a pu naître de l'étymologie symbolique du mot thesaurus : d'après Isidore, il serait formé de theca et aurum : thecha est employé aux l. 710-711, auri à la l. 713, et thesaurum à la l. 715. 31, 730 Le pagus Miledunensis est le pagus de Melun (dépt Seine-et-Marne). 745 : Ygil, Egil ou Egilon fut archevêque de Sens de 865 à 871. 747/748 Une grave famine, qui ravagea la France et l'Allemagne, est attestée en 868. Pour la région de Sens, voir les Annales de Sainte-Colombe, a. 868. 32, 750 Ad Duas Tombas est le nom du sanctuaire primitif du Mont-Saint-Michel. Ratbert fait donc le voyage de Rome et du sanctuaire de la Manche, mais c'est à Troyes qu'il est guéri : le prestigieux Mont-Saint-Michel devient ainsi un fairevaloir de la modeste église troyenne, Frodobert un émule de l'archange. On peut néanmoins se demander si ce récit ne porte pas la trace d'une confusion entre deux titres homonymes : l'église Saint-Michel où sera enterré Radbert (dans la région de Troyes) et le prestigieux sanctuaire de la Manche. 751 Le pape Hadrien II a siégé de 867 à 872. 760/761 Felcarias, Fouchères, dépt. Aube, arr. et canton Bar-sur-Seine, est attesté dans une charte de la comtesse Willa, en 967/986 ; Sainte-Marie est attestée en 1237 (Levison, p. 86, n. 3). 766 L'Ascension tombe un 8 mai en 872. 33, 798-806 Dans le calendrier de Montier-la-Celle édité par Camuzat, Promptuarium, fol. 38v, au 1er janvier figure la mention : transitus sancti Frodoberti, et au 8 janvier la mention : festivitas gloriosi confessoris Christi Frodoberti. 815 Entre Montier-la-Celle et l'église Saint-André se trouvait une église SaintMichel, détruite au XVIe siècle (Levison, p. 87, n. 2). 35, 846/847 La fête des saints Innocents a lieu le 28 décembre. Vita Walberti Introduction à la Vita Walberti (BHL 8775) Walbert ou Waldebert (Walbertus, Waldebertus), fêté le 2 mai, fut le 3e abbé de Luxeuil après Colomban et Eustase, au milieu du VIIe siècle. Le texte que lui consacre Adson porte le titre de vita dans les manuscrits conservés, mais c'est en réalité un recueil de miracles, comme le dit le prologue260, ce qui explique que ce soit sous le titre Miracula que les éditeurs anciens le désignent souvent. Une partie importante du texte est consacrée à l'histoire de Luxeuil et à la succession des abbés jusqu'à Mélinus, dernier sur la liste qu'utilise Adson. D une certaine manière l'hagiographe continue l'histoire des abbés de Luxeuil écrite par Jonas de Bobbio261, et il y puise un certain nombre d'informations relatives aux débuts du monastère. Pour la période ultérieure, ses affirmations coïncident en général avec les autres sources narratives, comme la Chronique des abbés de Fontenelle pour l'abbatiat d'Anségise ; il a d'ailleurs pu s'en inspirer. En revanche Adson commet des confusions importantes dans le domaine de la chronologie des Carolingiens262. Assez proche du genre des gesta abbatum, cette oeuvre hagiographique est donc la seule d'Adson qui prenne la forme biographique dans quatre chapitres seulement : Walbert meurt dès le chap. 8, et l'essentiel du texte relate les interventions miraculeuses du saint dans des circonstances diverses : guérisons (les trois derniers chapitres), mais aussi restitutions de terres (chap. 14 à 18). On y constate que les moines luxoviens ont fort à faire face aux pouvoirs séculiers, en particulier pour défendre leurs possessions lointaines du Nord de la France ou de Bourgogne. La dispersion extrême des lieux où se déroulent les miracles cartographie en quelque sorte la zone d'influence du monastère. A n'en pas douter Adson a pour but de rédiger un de ces recueils qui faisaient effet sur l'auditoire populaire et aristocratique, et qui venaient souvent accompagner la mise au net des archives et les campagnes de rédaction de textes diplomatiques. Malheureusement, pour le Luxeuil du Xe siècle - qui commençait à subir une éclipse tant de l'aura de sa vie religieuse que de sa prospérité temporelle, et qui se heurtait à la concurrence du modèle de Cluny et à ses ambitions en Bourgogne - nous ne possédons pas de dossier diplomatique qui puisse clarifier les intentions d'Adson sur ce plan. L'histoire du monastère est très obscure à partir de cette époque263. Malgré la différence littéraire qui vient d'être signalée, la Vita s. Walberti est néanmoins tout à fait caractéristique de la manière d'Adson. Fidèle à une tradition populaire de l'hagiographie, il exploite les filons qui ont fait leurs preuves : reliques agissant au cours de leur translation, bras armé arrêté par une paralysie soudaine, barque apparaissant miraculeusement pour faire traverser le fleuve Il ne prétend pas être original, bien au contraire : il écrit ce qu'attend son public. Les 260 - " Ut [] ea que per egregios Christi domini confessores [] Eusthasium uidelicet atque Waldebertum etiam nostra aetate gesta esse diuina gratia noscuntur, stilo commendarem. [] Ea itaque que idem prefati patres uel in uita uel que paulo post decessionis sue tempore operati sunt, nequaquam tangimus, sed quod post longe succedentis aetatis excursum, nobis scilicet intuentibus, diuina clementia per eos declarare uoluit, ex pluribus que memoriae mandari potuerunt. " (l. 11-15 et 31-36.) 261 - Ionae Vitae sanctorum Columbani, Vedasti, Iohannis, éd. B. Krusch, MGH, SRGerm. in usum schol., 37, 1905. 262 - Voir la n. au chap. 11. 263 - D'après la Gallia christiana, XV, c. 147, l'établissement aurait été donné au diocèse de Metz en 941, puis son histoire reste quasi vide jusqu'au début du XIIIe siècle. récits du même genre fleurissent tout au long du Xe et du XIe siècle, comme l'avait montré jadis B. De Gaiffier pour la Belgique264, mais comme on le voit aussi partout ailleurs. Manuscrits et éditions Manuscrits De ce texte il subsiste trois manuscrits médiévaux, datant des X/XIe-XIIe siècles. London, BL Add. 21917 (= L) a été copié à la fin du Xe s. selon le Catalogue of Additions to the Manuscripts in the British Museum (1854-1860), Londres, 1875, réimp. 1965, p. 557265, mais Levison, SRM, VII, p. 608, le date du XIe. Une mention, portée par une main du XVe siècle au dos du dernier folio266, fait apparaître que le codex a appartenu à Saint-Pierre de Luxeuil267. Le manuscrit est mutilé au début et à la fin. D'après la table qu'en donne Levison268, il comprend deux grandes parties. La première (fol. 6-71v) constitue un bloc luxovien, avec la Vie de Colomban et de ses compagnons (fol. 6-26), écrite par Jonas, suivie par la Vie de Walbert par Adson, (fol. 26r-34r269), puis par des textes hagiographiques liés d'une façon ou d'une autre à Luxeuil et au mouvement colombanien : Philibert (fol. 34-41), Taurin (fol. 41-51) et (fol. 51-71v) Desle (Deicolus), fondateur de Lure (Haute-Saône, diocèse de Besançon), monastère proche de Luxeuil. Le colophon du dernier folio marque la fin de ce premier bloc : Haec Stephanus scripsit per precepta Archimberti magistri270. La table de Levison marque ensuite une lacune entre les fol. 72r et 95r, vraisemblablement parce qu'ils ne contiennent pas de textes hagiographiques. Le deuxième bloc de vitae est constitué ainsi : Vie de Grégoire le Grand par Paul Diacre (fol. 95v-104), Gestes du pape Silvestre (fol. 104-131), Vie de al de Limoges par le Pseudo-Aurélien (fol. 202-229v), Passion des martyrs d'Agaune (fol. 262-265) et Vie de Brice (Briccius) par Grégoire de Tours (Hist., II, 1). Il y a donc tout lieu de croire que le manuscrit rassemble artificiellement deux unités primitivement indépendantes. Le début de la 264 - B. De Gaiffier, " Les revendications de biens dans quelques documents hagiographiques du XIe siècle ", Analecta Bollandiana, 50 (1932), p. 123-138. 265 - La notice du catalogue du British Museum est très lapidaire : " Vitae sanctorum, auctore Adsone Abbate Luxoviensi. A short history of the Abbey of Lune to the year 990 occurs after the life of s. Deicolus, f. 57. Imperfect, and some of the leaves torn. Vellum. Small Folio ". Elle est également inexacte en ce sens que le seul texte d'Adson que contienne le manuscrit est la Vita s. Walberti ; en outre on aura compris que " Lune " est une coquille pour Lure. Ces approximations font peser la suspicion sur la datation proposée. 266 - Levison, Conspectus, n° 314, p. 608. 267 - On ne sait pas grand chose de la bibliothèque de Luxeuil, le monastère ayant été victime de plusieurs incendies. P. Salmon, Le lectionnaire de Luxeuil, Rome, 1944, p. XLIV-XLIX publie le catalogue moderne de dom Vautherot, sur lequel notre codex porte le n° 11 (p. XLVII) et s'intitule " Vies des saints par Adso, abbé de Luxeuil, v. 990 ". 268 - Ibid. ; Calmet, Histoire ecclésiastique et civile de la Lorraine, I, Nancy 1728, preuves, c. 83-84, affirme qu'un manuscrit de la Vie de Walbert se trouvait encore à Luxeuil à son époque ; ce peut être celui-ci. 269 - Il y a une double foliotation, en chiffres arabes et en chiffres romains ; nous avons reporté les deux systèmes dans notre édition. 270 - Levison, Conspectus, p. 608 ; le colophon est " codé " : la lettre a est remplacé par b, e par f, etc Vie de Walbert est divisée en leçons (n° VIII en marge, en face de " Monstratur adhuc ", l. 150). Le manuscrit's- Gravenhage, Koninklijke Bibliotheek X 73 (= H) est décrit par les Bollandistes comme un codex de très petit format (20,5 cm / 14 cm) comportant 143 folios, à longues lignes tracées à la pointe, écrit par plusieurs mains, au XIe siècle apparemment. Titres et majuscules sont rubriqués. Au fol . 84v se trouve un anathème (XIVe s.) avec indication de l'origine : Saint-Bertin. La table ancienne du fol. 1, très endommagée, a été recopiée par une main moderne sur un folio additionnel. La composition de ce légendier se rapproche de celle du manuscrit de Londres, car il est formé d'un premier bloc luxovien, suivi de Passions de martyrs et de Vies de confesseurs. La Vie de Walbert, qui se trouve aux fol. 1v-12v, est suivie par des Vies d'abbés de la mouvance colombanienne : extraits de la Vie d'Eustase par Jonas, centrés sur la querelle d'Agrestius (fol. 13v-16v) ; Vies de Columban et d'Attale abbé de Bobbio par Jonas (fol. 17v-52v et 53r-58v), de Fare abbesse d'Evreux (fol. 271 - La présence d'un ensemble de textes liés à Luxeuil dans une abbaye aussi importante que SaintBertin n'a rien d'extraordinaire, et ne nécessite aucune explication particulière. On peut suggérer toutefois que l'intérêt des moines de Saint-Bertin pour la Vie de Walbert a pu être accru par la place qu'y tient le diocèse de Thérouanne : Walbert est possessionné dans la région, et un miracle s'y déroule (chap. 7) ; qui plus est ce miracle met en scène des oies, qui depuis Pline passent pour originaires du pays des Morins (le Pas-de-Calais actuel). Enfin il n'est pas totalement à exclure qu'une confusion se soit produite à Saint-Bertin entre l'abbé de Luxeuil et un comte Walbert dont le fils devint le filleul de saint Bertin (Vita s. Bertini, BHL 1292). Le troisième témoin, München, Bayerische Staatsbibliothek Clm 2546 (= M), tout comme le Clm 2552, est une section du légendier de l'abbaye cistercienne bavaroise d'Alderspach272, datant de la première moitié du XIIe s. ; les deux manuscrits étaient autrefois cotés respectivement Ald. 16 et 22, le Clm 2546 contenant le sanctoral du 1er mai à la fin d'août. La Vita s. Walberti se trouve aux fol. 14r-21r du Clm 2546. BIBLIOGRAPHIE. O. Holder-Egger, " Aus Münchener Handschriften ", Neues Archiv, 13 (1888), p. 574 -582273 . D . Frioli, Lo scriptorium e la biblioteca del monasterio c isterciense di Aldersbach , Spolète , 1990, p . 52. On possède enfin une copie moderne partielle, Paris, BNF lat. 11774 (fonds de Saint-Germain-des-Prés)274, fol. 148-152v (= P). L'origine du modèle est donnée fol. 152v, par la mention : " Haec de archiviis luxoviensis abbatiae delecta ". Comme l'indique le participe delecta, il s'agit d'une sélection et non de l'oeuvre complète : le prologue manque, et les chap. 11, 12 et partiellement 13 (juqu'à la ligne 303) ont été excisés ; ils couvrent le début de la partie carolingienne de l'histoire du monastère. Deperdita *Münster, Univ. Monasteriensis 22 Ce tome de mai du grand légendier de Böddeken (XVe siècle)275 a été détruit en 1945. Les fol. 9-12 contenaient la Vie de Walbert, avec quelques variantes par rapport aux copies que nous avons conservées276. *Saint-Bertin (?) Henskens dit avoir vu un manuscrit de Saint-Bertin qui contenait également la Vie de saint Germain de Grandval par Bobolenus (BHL 3467)277. Nous ne possédons plus de manuscrit correspondant à cette description. Or, comme le fait remarquer Holder-Egger278, il n'y a, dans l'édition d'Henskens, aucune trace d'une quelconque utilisation d'un manuscrit supplémentaire par rapport à celle de Mabillon. Etant donné la quasi absence de variantes entre H et L, on peut alors être tenté d'identifier ce manuscrit de Saint-Bertin avec notre manuscrit H. Le problème est 272 - Au fol. 180v, une main du XIIIe siècle (?) a écrit : " Iste liber sancte marie in alders[p]ach " (D. Frioli, Lo scriptorium, p. 52) 273 - Holder Egger, p. 575, notait la pauvreté de la tradition manuscrite de la V. Walberti, en soulignant que ce manuscrit était le seul témoin connu de lui. 274 - Les manuscrits BNF latins 11760-11774 forment un recueil de 15 tomes de Vies de saints classées par ordre alphabétique. Il s'agit de collations et de transcriptions modernes utilisées par les Bénédictins de Saint-Germain-des-Prés pour leurs travaux hagiographiques : voir F. Dolbeau, " Fragments métriques consacrés à saint Melaine de Rennes ", Analecta Bollandiana, 93 (1975), p. 115-125. 275 - H. Moretus, " De magno legendario Bodecensi ", Analecta Bollandiana 27 (1908) p. 301, n° 6 ; Staender, Catal. 1889, n°214, III. 276 - " Verba aliquando mutata sunt. Inc. prol. Luxoviensium coenobitarum - Heinricus nomine - Des. et usque ad ultimum vitae suae tempus in eodem loco peregit. " 277 - AASS, Feb. III, p. 263-266. 278 - MGH, SS, XV, p. 1171. que ce dernier ne comporte pas la Vie de Germain de Grandval, qui est pourtant un saint de la mouvance colombanienne, et qui ne détonnerait pas dans ce sanctoral. On peut émettre deux hypothèses : soit le texte dont disposait Mabillon provenait d'un légendier copié d'après le nôtre et complété ; soit la Vie de Germain de Grandval a été détachée de H à une date inconnue. Class ement des manuscrits Il y a extrêmement peu de lieux variants dans la tradition manuscrite de la Vita Walberti. H ne présente que neuf divergences avec L ; cinq fois H et M concordent contre L, quatre fois L et M concordent contre H : l. 19 obsorbuit HM l. 58 dagoberto H l. 103 letiora HM l. 109 frequenti irruptione HM l. 144 indeptus HM l. 183 unico H l. 191 utriusque H l. 193 competentius H l. 377 iniqua HM absorbuit L sigeberto LM letiorum L frequenti ruptione L adeptus L uno LM utrisque LM competentis LM inique L - Parmi ces variantes, ruptione est une erreur, car le scribe ayant d'abord écrit frequentiir ruptione, -ir a été gratté par le réviseur, qui ne l'a pas ajouté en préfixe279. Utriusque280, dagoberto281 et letiorum282 ont de très fortes chances de ne pas représenter le texte original ; ces fautes étant partagées entre H et L, cela exclut que l'un de ces manuscrits dépende de l'autre. Dans les trois cas le manuscrit M a la bonne leçon, ce qui implique qu'il remonte au modèle de H et L, lequel avait donc les bonnes leçons obsorbuit, sigeberto, letiora, irruptione, indeptus, uno, utrisque, competentis et iniqua. - Les variantes propres de M sont totalement insignifiantes, affectant en grande partie la seule orthographe des noms propres. A la l. 179, il y a cependant une addition dans une énumération de domaines : et uuandanam uillam, qui n'est ni dans H ni dans L. Peut-être s'agit-il de l'introduction, dans le corps même du texte, d'une glose marginale ou interlinéaire émanant d'un rédacteur qui connaissait la région ou qui avait accès à des textes diplomatiques. - P transcrit des additions portées sur L par une main moderne : l. 176, ecclesiae luxoviensi ; l. 177-178 tarnensi (aut morinensi) ; il reproduit les fautes de L et l'hésitation, à la l. 313, de L entre peruasorum et peruersorum. Il a donc été copié 279 - Ruptio est attesté chez le seul Ulpien (Dig 9, 2, 27), jurisconsulte actif sous Septime Sévère, avec le sens qui convient ici (" effraction "). 280 - Le mot ne peut sémantiquement se rapporter à pacti. Il s'agit vraisemblablement d'une malencontreuse correction normalisante de utrisque, employé au pluriel au lieu du singulier, ce qui est courant dès l'antiquité (Hofmann-Szantyr, Lateinische Grammatik, II, p. 200). 281 - Le texte Sigiberto est celui de la source d'Adson : Jonas, Vie de Colomban (MGH, SRM, IV, p. 72, l. 9). 282 - letiora lucra est une hyperbate qui ménage une assonance supplémentaire à côté de la rime popularis/ incolumitatis, tandis que si l'on construit turba popularis letiorum, on détruit du même coup les deux homophonies. directement sur L, duquel il a excisé la préface et un passage narratif283. 283 - Les variantes de P par rapport à L sont les suivantes : 55 abbatis] luxouiensis add. P 56-57 igitur] om. P ut liber indicat] om. P 63 multitudinem] multitudine P 108 uocant] uocitant P 118 quam] qua P 136 deliberans] deliberat P beati] om. P 204 cripta] scripta P 296-297 hinc defuncto] itaque decentibus usque ad haec nostra tempora pastoribus, defuncto P 301 peruaduntur] peruadunt P 313 peruasorum] peruersorum P sed -a super -er scr. 331 facultate] facilitate P 335 uiuens] iuuenis P 340 quoddam] quod clam (?) P 396 eruitur] exuitur P 431-432 tremente] tremere P 444 quoque alii duo] alii duorum P 459 lacrimis] cum lacrimis P 489 solatio] om. P. 284 - Elle est reproduite dans PL 137, c. 687-700. 285 - AASS OSB, III, t. 2, p. 451. 286 - A cette catégorie appartiennent les variantes suivantes : quo tenus/ quatenus (l. 22), idem/iidem (l. 31), normalisations de l'éditeur. 287 - Voir notre apparat. On remarquera que l'omission de immunis par Mabillon a entraîné le rétablissement d'un synonyme - intacta - par Henskens, apparemment plus vigilant. 288 - Ainsi et prediis (l. 106-107), terrarum (l. 140), sibi (l. 401), et (l. 410, 443 et 476). 289 - Ainsi, l. 311, diuine (Mabillon) contre diuina (L) ; l. 377, iniqua (Mabillon) contre inique (L) ; l. 406, prorumpente (Mabillon) contre prorumpenti. Destinauerit (l. 25) est une correction de destinauerat, peut-être pour la rime avec potuit ; discessionis, leçon de L avant correction médiévale en decessionis, a été préféré par Mabillon à ce dernier lemme (l. 32) ; l. 64, exigua peut être une mélecture de tigua ; à la l. 112, dans L, intimare rime avec abigere, mais le lemme de l'édition de Mabillon, intimari, s'explique aisément par une distraction du transcripteur et/ou par la rime intimari/domi (phrase suivante) ; iacenti (Mabillon) au lieu de iacentis (l. 213) s'explique par la proximité de debito honore, avec lequel le participe est malencontreusement accordé ; quum (l. 253) est abrégé en qm (avec tilde) dans L et a pu être lu qui ; l. 329, impulsu - leçon de L avant correction médiévale -, appelé par l'adjectif diuino qui se rapporte en réalité à remige, a été préféré à tort à impulsa par Mabillon. La graphie aberrante de l'édition de Mabillon, mantne au lieu de materne pour désigner la Marne, accompagnée d'une glose marginale : l<ege> Materna, va dans le même sens, quand on considère que le mot est abrégé sous la forme ma ne dans L : le transcripteur a mal résolu l'abréviation. Restent des cas un peu plus difficiles, mais qui ne mettent pas en cause l'idée que le manuscrit L serait le modèle de Mabillon : - le texte compleuit opere (l. 94-95) donne un équivalent plus courant de la leçon impleuit in opere, et évite la répétition -im/in ; - desiderat au lieu de deliberans (l. 136) peut résulter d'une double confusion, encouragé par l'appel de la rime avec erat, d'autant que dans L la finale -ns est constituée d'un -s suscrit dans le jambage du n (insatisfait par l'asyndète, Henskens corrige d'ailleurs desiderat en desiderans, ce qui étaie la remarque d'Holder-Egger selon laquelle il n'aurait même pas regardé le manuscrit de Saint-Bertin dont il dit posséder une copie ; H donne en effet le lemme deliberans) ; - l. 270, reparabat est un synonyme de reformabat que l'on peut attribuer à un défaut de mémorisation du transcripteur ; - membra pour uiscera (l. 393) est-il la trace d'une édulcoration par souci de la " bienséance " propre au XVIIe siècle? En tout cas il s'agit là encore d'un synonyme qui ne figure dans aucun autre témoin manuscrit survivant, et qui peut donc s'interpréter comme une correction d'éditeur ; - à la l. 472 le remplacement de sufficiens et contentus par esse contentus après uidebatur permet d'éliminer un doublon de contentus, souvent appliqué à une chose, mais pas exclusivement. La seule divergence inexplicable a priori est l'omission, dans la dédicace, du nom Adso, écrit en petites capitales bien lisibles, entourées de deux points, dans le manuscrit L. Dans l'édition de Mabillon, ce nom est remplacé par des points de suspension, sans que l'origine de la lacune soit indiquée (omission ou incompréhension de la part du collationneur?). Une note de l'éditeur dit ceci : " Supple Adso. Is enim decessorum suorum seriem et breve chronicon descripsisse memoratur, aequalis Adsonis abbatis dervensis ". Pour Mabillon, l'auteur de la Vita Walberti est donc un homonyme et contemporain d'Adson de Montier-en-Der, qui en tant qu'abbé de Luxeuil donna à son monastère une chronique et des Gesta abbatum. Nous avons donné dans notre introduction générale les raisons pour lesquelles nous pensons qu'il n'y a pas eu deux hagiographes du nom d'Adson291. L'édition de G. Henskens, AASS Mai. I, 1680, p. 277-282, ne diffère quasiment pas de la précédente. Celle d'O. Holder-Egger, MGH, SS XV, 1887, p. 1171-76, serait une excellente édition critique si elle n'était pas tronquée : il manque les deux miracles relatés aux chapitres 5 et 21 de notre édition, ce qui est davantage une profession de foi positiviste qu'un gain de place. Holder-Egger a tra- 290 - Ainsi l. 123, le remplacement de intelligit par intelligens peut se justifier par un refus de la parataxe ; l. 143 la correction de addicitur en adiit peut s'expliquer par une inattention du transcripteur à l'abréviation de la désinence -ur dans le manuscrit, addicit ayant ensuite été corrigé en addit ; l. 200 ac ianuam est devenu et ad ianuam. 291 - Voir supra. vaillé d'après les manuscrits H et M, et les éditions de Mabillon et Henskens. Il n'a pas utilisé le manuscrit L. La présente édition Nous avons choisi L comme manuscrit principal, en le corrigeant quand H et M convergeaient contre lui292, ainsi qu'au chap. 19, l. 453, où il convient de rétablir ad<eo> à partir de la graphie ad, comme l'a fait le scribe de H (celui de M omet ad). La seule graphie inattendue est ptyrocinii pour tirocinii à la l. 7, mais le phénomène phonétique est connu : le groupe pt s'étant peu à peu assimilé en t(t), par hypercorrection on a for la fausse dissimilation inverse, et ramené t(t) à pt293 ; H donnant tyrocinii et M tirocinii, nous avons conservé la graphie du manuscrit L. Dans ce manuscrit le texte présente trois grandes parties : le prologue et la vita, tous deux annoncés par un titre, et les miracula, qui ne sont pas à proprement parler détachés de la vita, mais qui contrairement à elle sont divisés en chapitres marqués par de grandes capitales, aux chap. 13, 14, 15, 16, 18, 19, 20 (au début et à la l. 475), 21. Pour faciliter la lecture, nous avons conservé la capitulation des AASS. Synopsis de la Vita Walberti - chap. 1. 2. : dans une dédicace de forme épistolaire, l'abbé Adson, alias Hermericus, se propose de relater les miracles récents opérés par les deux abbés de Luxeuil, Eustase et Walbert. 293 sions. En dépit de la mort de plusieurs moines, le monastère est miraculeusement préservé des incursions. - chap. 10 : le successeur de Walbert fut Ingofredus, et dans la liste des abbés de Luxeuil certains furent promus à l'épiscopat. Le dernier est Mélinus, et l'hagiographe en vient à présent aux miracles de Walbert. - chap. 11 : Drogon, fils de Charlemagne, est placé sur le siège épiscopal de Metz et reçoit la charge de Luxeuil, qu'il fait prospérer. Au cours d'une partie de pêche, il est englouti par les eaux de l'Ognon, et on l'enterre à Saint-Arnoul de Metz. Sous Louis le Pieux, une vague de sécularisation touche les monastères, contre laquelle l'empereur lutte comme il peut. - chap. 12 : pour protéger Luxeuil, Louis nomme Anségise, qui fait d'importants travaux. - chap. 13 : à sa mort, Fulbert puis Gibardus lui succèdent, et après la disparition de Richard, duc de Bourgogne, commence une période difficile pour le monastère, livré aux usurpateurs. Mais Walbert veille. - chap. 14 : pour récupérer leur possession d'Herlin, sise en bord de mer [Pasde-Calais], les moines y transportent les reliques du saint. Une barque miraculeuse leur fait traverser la Marne, et les conduit d'abord à Nant, où une foule nombreuse les accueille avec des offrandes. Un jeune homme qui veut détourner une coupe de bois réservée au saint est puni par le ciel. Les moines parviennent à Herlin, récupèrent leurs biens, et rentrent chez eux. - chap. 15 : à Provenchères, le saint contraint de même un chevalier à la restitution d'une terre. - chap. 16-17 : en l'an 960, au moment où le roi Lothaire reprend Dijon, récupération miraculeuse de deux terres dans les pagi de Dijon et de Beaune. - chap. 18 : récupérations dans le pagus Alsgodiensium aux dépens du chevalier Hubald, grâce aux reliques d'Eustase et Walbert. Celles-ci sont exposées sur le tronc d'un chêne et déclenchent signes miraculeux et guérisons. - chap. 19 : guérison d'un " contracté "294 dans la région de Montbéliard. - chap. 20 : autre guérison d'un " contracté " dans le pagus Warascum. - chap. 21 : guérison d'une " contractée ", qui rechute néanmoins tant qu'elle ne s'attache pas au monastère où elle été guérie. 294 - Sur cette maladie neurologique, proche de la paralysie, voir P.-A. Sigal, L'homme et le miracle dans la France médiévale, Paris, 1985, p. 240. Notes de la Vita Walberti Prologue, 1/54 Sont mis en oeuvre ici un certain nombre des topoi d'ouverture des textes hagiographiques : le devoir dû à la mémoire des saints patrons, dont la louange se reporte sur Dieu ; l'interdiction de la paresse et l'obligation d'obéissance ; la récompense divine attendue pour le devoir rempli ; l'utilité de l'oeuvre hagiographique, l'écrit seul perpétuant vraiment la mémoire ; l'humilité affectée, avec ses composantes : le manque d'éloquence de l'auteur, l'appel à l'émulation, le souhait qu'un écrivain meilleur refasse l'ouvrage, la dévotion comme compensation du manque de talent. L'Y pythagoricien, évoqué l. 8 et suivantes, est un thème important de l'hagiographie médiévale, qui a fait l'objet de plusieurs études ; entre autres M. A. Dimier, « La lettre de Pythagore et les hagiographes du Moyen Age », Le Moyen Age, 60 (1954), p. 403-418, et W. Harms, 'Homo viator in bivio ' . Studien zur Bildlichkeit des Weges , Munich, 1970, avec des compléments dans H. Silvest re , « Pour le dossier de l'Y pythagoricien. Nouveaux témoignages », Le Moyen Age, 84 (1978 ), p. 201-210 . Rappelons que la voie de droite, malaisée, mène à la contemplation, tandis que celle de gauche, qui est facile, mène à la perdition. L'image symbolise le choix qui s'offre au moment de la puberté. Le modèle est l' ologue de Prodicus sur Hercule (Xénophon, Mémorables, II, 1, 21-33), repris par Cicéron (De officiis, I, 32) et Virgile (Enéide, VI, 540-543), puis par les Pères de l'Eglise et quantité d'auteurs jusqu'à Isidore, Etym., I, III, 7. Il semble que la comparaison de ce bivium avec la lettre Y remonte à Pythagore lui-même. Le seul apparemment à employer, comme Adson, l'adjectif bicornis pour qualifier l'Y est le poète Maximin (IXe s.), qui n'est connu que par un poème de 12 vers, attribué d'abord à Virgile puis à Ausone (éd. Riese, Anthologia latina, fasc. 2, n° 632, p. 98) : « Littera Pythagorae discrimine secta bicorni/ Humanae vitae speciem praeferre videtur ». 38 Le pluriel voluminibus propriis suggère qu'à côté de la Vie d'Eustase, Adson connaissait une Vie de saint Walbert que nous n'avons plus. En effet même si, dans la dédicace qu'il fait à Bobolenus de Bobbio et à Walbert de la Vie de saint Colomban et de ses disciples, Jonas explique qu'il a divisé son livre en deux parties pour ne pas lasser le lecteur, l'expression voluminibus propriis ne peut pas concerner cette bipartition : seul Eustase fait l'objet d'une vita, Walbert, encore vivant au moment de la rédaction, étant simplement mentionné. Vita 3, 56/57 Le liber historie de uita et uirtutibus eius désigne la Vita s. Columbani par Jonas (BHL 1898). Adson suit ici Jonas et se trompe avec lui. Car Sigebert, roi d'Austrasie seulement, mourut en 575, laissant le royaume à son fils Childebert. Quand Colomban débarque en Gaule en 590, le roi de Bourgogne n'était pas Sigebert mais Gontran, mort le 28 mars 592, à qui succédèrent Childebert, mort en 596, puis, sous la tutelle de Brunehaut, les fils de Childebert, Thierry en Bourgogne et Theutbert en Austrasie. Sur les problèmes posés par la date d'arrivée de Colomban dans les Vosges, voir G. Moyse, « Les origines du monachisme dans le diocèse de Besançon, Ve-Xe siècle », Paris, 1973 (extrait de la BEC, 131, 1973), p. 63-64 : le nom du roi Sigebert, mort en 575, est en outre incompatible avec la date de l'exil de Colomban, située par Jonas vingt ans après son arrivée, et qu'il faut placer éga- lement trois ans avant la réunion des royaumes de Neustrie et d'Austrasie sous le sceptre de Clotaire en 613. 60 Sur Luxeuil, fondé par Colomban après Annegray, et sur les autres monastères du diocèse de Besançon, voir G. Moyse, op. cit. l. 56-57. Voir également la Vita Fro ti, chap. 5, la Vita Bercharii, chap. 6, et la Vita Romarici secunda (BHL 7323), éd. M.A. Guinot, Etude historique sur l'abbaye de Remiremont, Paris, 1859, p. 378. 69 Sur les démêlés entre Brunehaut et Colomban, voir la Vita Columbani, MGH, SRM, 4, p. 86-90, et notre annotation au chap. 6 de la Vita Bercharii. On trouve la même vision hostile à Brunehaut dans les deux Vitae s. Romarici. Sur l'amitié entre Luxeuil et la royauté mérovingienne, et, partant, son hostilité au parti burgonde, voir G. Moyse, op. cit., p. 183-189. 72/73 Sur l'abbatiat d'Eustase, voir la Vita Columbani, MGH, SRM, 5, p. 119-130. Eustase accède à l'abbatiat de Luxeuil en 614 et meurt le 29 mars 625. 4, 79-80 Le besoin de préciser qu'un saint récent n'est pas inférieur à un saint antique découle de l'idée que les naissances de ces saints hommes ont été programmées par la providence divine avant même la création du monde ; la postériorité pourrait être alors interprétée comme un signe d'infériorité. Voir à ce sujet l'exposé contenu dans le prologue de la Vie de Léon IX : « Nec praejudicium incurrit ex posteritate qui ante saecula divinitus praefixo destinatus est tempore » (La Vie du pape Léon IX, éd. M. Parisse, Paris, 1997, p. 3). 83 in pago - dicitur] le Ponthieu, en Picardie occidentale. 5, 98 Nant serait Nanteuil-lès-Meaux, d'après une conjecture très vraisemblable de Mabillon. En effet à la l. 333 on voit les moines arriver à Nant après une traversée miraculeuse de la Marne. On n'a pas d'autre attestation du lieu de naissance de Walbert. Jonas raconte le passage de Colomban à Meaux (V. Columbani, I, 26, MGH, SRM, 2, p. 99-100), et le nom de Walbert figure à côté de celui de l'évêque de Meaux Burgondofare dans un récit de miracle (ibid., II, chap. 21a, p. 142, l. 2) : cela s'arrête là. 107/134 Dans la Vita prima Pharaildis (BHL 6791, AASS, Ian. I, p. 172, chap. 13), la sainte rassemble les os et les plumes d'une oie déjà cuisinée et consommée, et la ressuscite, mais peut-être n'est-ce là qu'un parallèle. Au chap. 10 de la Vie de Wereburge (BHL 8855, écrite par Goscelin au XIe s. d'après les Bollandistes [AASS, Feb. 1, p. 389]) on lit : agros depopulabatur infinita aucarum, quas gantas vocant, multitudo : tout comme Walbert, Wereburge les attire à elle et rend au troupeau une oie isolée qui avait été volée. Un miracle mettant en scène des oies sauvages figure aussi dans la Vie (difficile à dater) de saint Lumier (Leodemirus), évêque de Châlons du VIe siècle (G. Philippart, « Manuscrits hagiographiques de Châlons », AnalBoll 89 (1971), p. 89), ainsi que dans les Miracles de Gengoul (XIe s., AASS, Ian. II, p. 106). Le commentaire étymologique d'Adson (« anseres agrestes, quas a candore uel sonitu uocis more rustico gantas uocant ») est pris en compte par le Glossaire de Du Cange (t. IV, p. 25), qui renvoie à Pline pour candor, mais s'avoue battu pour sonitu uocis. Adson semble amalgamer deux sources : 1) Selon Pline l'Ancien (Hist. Nat. X, 27, 53, éd. E. de Saint-Denis, Paris, Belles Lettres, 1961, p. 46), les oies que l'on fait venir de Germanie sont les plus blanches et les plus réputées pour la qualité de leur duvet : « Mirum in hac alite a Morinis [voir supra, note à la l. 180] usque ad Romam pedibus venire ; fessi proferuntur ad primos ; ita ceteri stipatione naturali propellunt eos. () ; [pluma] e Germania laudatissima. Candidi ibi, verum minores ; gantae vocantur. » ; 2) Isidore de Séville (Etym., XII, éd. J. André, Paris, Belles Lettres, 1986, p. 265) fait dériver le mot anser d'anas (le canard), parce qu'il y a ressemblance entre les deux animaux, dit-il, ou bien parce que, comme le canard, l'oie nage (natat) beaucoup. Le cri des oies n'entre pas pour lui dans l'explication étymologique ; il signale néanmoins l'épisode du Capitole, qui illustre l'idée selon laquelle l'oie serait un animal qui veille la nuit : « Iste [= anser] uigilias noctis assiduitate clangoris testatur. Nullum autem animal ita odorem hominis sentit ut anser ; unde et clangore eius Gallorum ascensus in Capitolio deprehensus est. » Isidore s'inspire là de Varron (Ling. 5, 75), selon qui l'oie domestique (anser domesticus) devait son nom à ses cris, qui en faisaient la gardienne de la maison. Adson transpose cette étymologie de l'oie domestique à l'oie sauvage (anser agrestis). L'indo-européen *ghans- a donné le grec χην (thème χανσ-), le latin anser et son t d'origine germanique ganta, l'allemand gans, etc 6, 137 Sur les difficultés qu'il y a à mesurer les changements introduits à Luxeuil par le départ de Colomban, en particulier dans l'usage de la règle monastique, voir G. Moyse, op. cit., p. 110-113. Quant à l'importance de la communauté monastique de Luxeuil, le nombre de six cents est devenu un lieu commun. 7, 153 In descriptione actuum ipsius désigne la Vie d'Eustase par Jonas (cf. n. l. 36). 155 celeste capitolium ingreditur] dans la littérature hagiographique, le Capitole désigne généralement le siège des dieux païens par opposition à l'ecclesia chrétienne. Contre cette connotation traditionnellement péjorative, Adson christianise le mot capitolium, peut-être sur le modèle de la celestis curia. 178 Herleius - Tarnensi] Herlin-le-Sec, dépt. Pas de Calais, ar. Arras, c. Saint-Polsur-Ternoise. Dans le manuscrit de Londres, une addition moderne supralinéaire, que la copie moderne P intègre dans le texte, glose tarnensi en morinensi, terme qui désigne la population de la région côtière des Flandres (Morini est attesté dans César, G., 2, 4, 9). 8, 190/205 Selon Adson, la 2e église de Luxeuil, dédiée à saint Martin, aurait donc été construite par l'évêque de Besançon Nicétius sur la sépulture de Walbert, après un accord d'amitié passé entre eux deux. L'hagiographe suit une fois de plus Jonas, qui fait de Nicétius le prédécesseur de Protadius (BHL 6974), et il se trompe avec lui. Car il semble bien qu'il faille rétablir, au lieu de Nicetius (sur le « vrai » Nicetius, qui a vécu au début du VIIe s., voir la Vita Nicetii BHL 6093), le nom de Mi- gétius, successeur de Donat, après 670 : c'est d'ailleurs ce qu'a fait, avant G. Moyse (op. cit., p. 108, n. 5), un annotateur de notre manuscrit L : le fol. 29r porte en marge, en face de sancto Nicetio episcopo, « aliter migetio ». L'écriture est différente de celle des gloses suivies, que nous avons pensé pouvoir attribuer à Constant Gravelle. La tradition fait d'Eustase l'avunculus ou le patruus de Migétius (ou Métius), devenu évêque de Langres en 595 et mort vers 618. L'existence de cette église n'est attestée que vers 820, par la Chronique des abbés de Fontenelle, qui affirment qu'Anségise, devenu abbé de Luxeuil, « fit refaire à neuf le passage qui va de l'église Saint-Pierre à Saint-Martin, et, l'ayant recouverte, y fixa des bardeaux avec des clous de fer. (éd. et trad. P. Pradié, Paris, Belles Lettres, 1999, p. 160-161 [Classiques de l'histoire de France au Moyen Age, 40]). Pour Anségise, voir infra, n. à la l. 273. 10, 226 On ignore la date de la mort de Walbert. Au chap. 3 de la Vita s. Adelphii (BHL 73), Ingofredus est mentionné comme abbé de Luxeuil, sans qu'on sache s'il fut le successeur immédiat de Walbert (629-670). La Gallia christiania (XV, c. 150) cite deux abbés entre Walbert et Ingofredus : Vindologus (« e veteri catalogo, quem Sammerthanis P. F. Chiffletius notum fecit ») et Bertoaldus (« ex eodem ») ; elle souligne le fait qu'Adson les omet. Ingofredus est le co-dédicataire de la Vita Germani Grandivallensis (BHL 3467) 231 in catalogo] les listes abbatiales de Luxeuil que nous possédons sont toutes de l'époque moderne. La Gallia christiana (XV, p. 150) classe Mellinus en 17e position sur la liste abbatiale, et affirme qu'un catalogue luxovien note à son propos : « Tempore istius venerunt Wandali, id est Comani et Hungari, et interfecerunt tres conventus et abbatem ; nec abbas fuit intus per quindecim annos ». L'invasion eut lieu en 731 d'après Gallia Christiana, XV, c. 146. 11, 239/264 Adson met sur le même plan les deux premières générations de carolingiens en confondant Louis le Germanique et Charles le Chauve, petits-fils de Charlemagne et frères de Lothaire, avec Louis (le Pieux) et Charles, fils de Charlemagne et frères de Pépin. Il fait de la bataille de Fontenoy (25 juillet 841) et du traité de Verdun un épisode de la succession de Charlemagne, au terme duquel le royaume franc aurait été partagé en quatre. Warinus (Guarin ou Guérin) est présenté comme un fidèle de Charles le Chauve par Nithard, Histoire des fils de Louis le Pieux (éd. Ph. Lauer, Paris, 1926, p. 23, 51, 57, 133). Selon Adson, Drogon, cinquième fils de Charlemagne (et en réalité déjà évêque depuis 823!), aurait alors revendiqué le pouvoir, et en représailles aurait été tonsuré et placé sur le siège épiscopal de Metz. Adson fournit ici un témoignage unique sur la mort de Drogon, qui se serait noyé au cours d'une partie de pêche au bord de l'Ognon (Ligno). 264/270 Louis le Pieux fut couronné à Reims en septembre 813 par Charlemagne, et en octobre 816 par le pape Etienne IV. 12, 273 Anségise, issu du palais impérial, fut mis en place par Louis le Pieux à la tête de Luxeuil, dont il fut l'abbé dès 817-818 (Chronique des abbés de Fontennelle, XIII, 2, éd. Pradié, p. 152). Il dirigea Fontenelle à partir de 823. A Luxeuil il joua un rôle considérable dans la reconstruction du temporel et dans l'agrandissement et la décoration de l'église Saint-Pierre ; il laissa un legs important en objets précieux : le témoignage d'Adson concorde sur ce point avec la Chronique des abbés de Fontenelle (éd. Pradier, p. 159-161, et Moyse, op. cit., p. 143). C'est aussi Anségise qui réunit la collection des Capitula regum Francorum, achevée en 827, et comportant pour l'essentiel les capitulaires de Charlemagne et Louis le Pieux (éd. Boretius, Capit. regum Franc., MGH, 1883). 13, 288/290 Holder-Egger voit dans la mention de ces invasions l'attaque normande de 888, qui dispersa également les moines de Bèze (MGH, SS XV, 1887, p. 1174, n. 9). 293 Martini villa] Martinvelle (Haute Saône). 297 Richard, duc de Bourgogne, dit Le Justicier, est le père de Raoul, roi de France. Il mourut en 921 d'après Flodoard, Ann., MGH, SS III, p. 369 et les Annales de Sainte-Colombe, MGH, SS I, p. 104. 14, 320 : Herleium] voir supra, l. 178. 325 Materna] la Marne 333 Nant] voir supra, l. 98. 15, 359/360 Provincherias] Provenchères, dép. Vosges, arr. Mirecourt (HolderEgger, p. 1175, n. 1). 16, 375 Caciacum - uiniferam] d'après l'Orbis Latinus de Graesse, il y a plusieurs Chaciacum (villa) ; ce pourrait être Chassey en Côte d'Or, arr. Montbard, ou Cessey-sur-Tille, Côte d'Or, cant. Genlis. 376 et 400 Molisiacus villa] Meloisey, aujourd'hui dans le canton de Beaune en Côte d'Or. 377/383 Lothaire avait repris Dijon à la Bourgogne en 960. Letoldus comte de Bourgogne est attesté aux côtés de Louis IV d'Outre mer, malade en 951 (Flodoard, Ann., MGH, SS III, p. 405). 18, 405/406 in pago Alsgodiensium] l'Ajoie, en Franche-Comté (dans la région de Montbéliard). 409/410 D'après Henskens, une partie des reli d'Eustase étaient encore conservée à Luxeuil à son époque, le corps ayant été transféré à l'abbaye SaintEustase de Vergaville en Moselle, fondée en 986 (près de Vic-sur-Seille, ar. Château-Salins, cant. Dieuze). 412 apud villam - dicitur] Holder-Egger propose Sainte-Marie-en-Chaux, cant. Luxeuil (p. 1175, n. 5). 413 locus - dicitur] peut-être l'actuel Champagney (Haute-Saône, à 30 km environ de Luxeuil). 417 abbas - Aaloncus] voir la charte de l'année 984, dans A. Bruel, Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny, II, p. 725 sqq. (Holder-Egger, p. 1175). 19, 452 Montem Biliarde] Montbéliard. 20, l. 466 in pago - nuncupato] les Warasci, peuplade alémanique établie dans le diocèse de Besançon, ont été évangélisés par Eustase en 614-615, dès que ce dernier fut revenu de Bobbio (V. Columbani, II, 8). C'est à cette occasion que fut fondé le monastère de Cusance : voir G. Moyse, op. cit., p. 74-75.
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Le ant Valéry Didelon Le postmodernisme mort-vivant Valéry Didelon L'exposition Postmodernism : Style and Subversion, 1970-1990 qui s'est tenue au prestigieux Victoria and Albert Museum à Londres à la fin de l'année 2011 a largement participé au retour sur le devant la scène du postmodernisme, et cela à l'issue une éclipse d'une vingtaine d'années. Les publications qui ont accompagné (Adamson et Pavitt, 2011 ; « Radical », 2011) cette exposition et les nombreuses recensions qui lui ont été consacrées ont contribué à réhabiliter auprès du grand public ce mouvement aussi international que pluridisciplinaire dans lequel l'architecture joue un rôle de premier plan. Au cours des années précédentes, un certain nombre d'historiens et de critiques avaient en la matière déjà multiplié les travaux sur ce qu'ils envisagent aujourd'hui pour la plupart comme un style ou une période historique. Pour les uns et les autres en tout cas, le postmodernisme appartient clairement à un passé révolu, est un sujet clos depuis le tournant des années 1990, et à ce titre peut faire l'objet de rétrospectives et pourquoi pas de revivals. Que peut-on penser de cet examen post-mortem des réalisations, projets et discours du postmodernisme? Et qu'est-ce que cela nous dit des enjeux et méthodes de l'histoire de l'architecture d'aujourd'hui? Obsolète, le postmodernisme l'était déjà pour certains dans le monde littéraire dans les années 1970 (Barthelme, 1975), mais dans le milieu architectural il faut encore attendre un quart de siècle pour voir entériner sa disparition – la revue américaine Architecture fait sa Une sur un hypothétique postpostodernism en 2001. Néanmoins, dès 1987 la critique, notamment étatsunienne, pronostique régulièrement la fin du postmodernisme. Dans les colonnes du New York Times, Paul Goldberger affirme alors par exemple que pour les trentenaires, ce mouvement est devenu aussi institutionnel que ringard, tandis que le modernisme jouit d'un certain retour en grâce, certes «en tant que mode et non en substance» (Golberger, 1987). Roger Kimball, témoigne peu après dans The New Criterion du fait que leurs aînés les plus illustres annoncent même la disparition du mouvement. Il rend compte en l'occurrence de deux symposiums à l'Université de Princeton et à la Parson School of Design à New York durant lesquels les architectes Robert Maxwell, Anthony Vidler, Peter Eisenman, Robert Venturi et bien d'autres ont spéculé sur la « mort du postmodernisme » et sur l'avènement d'une « nouvelle mode architecturale» («The death and resurection», 1988 : 21). Nombreux sont ceux qui pensent en réalité à ce moment-là que l'exposition Deconstructivist architecture, qui doit se tenir au MOMA pendant l'été 1988, marquera le début d'une nouvelle ère. Dans la recension qu'il y consacre dans House & Garden, le critique Charles Gandee assure d'ailleurs avec ironie que désormais «le postmodernisme c'est le passé » (Gandee, 1988 : 37). Indépendamment du fait que cette fin du postmodernisme soit avérée ou non, il convient en tout cas de prendre au sérieux ces annonces parfois péremptoires, et d'examiner les arguments que les uns et les autres mobilisent. L'analyse de ce moment historique présenté comme terminal et fondateur est en effet utile pour mieux comprendre l'architecture qui s'est imposée à partir de la fin des années 1980, et que l'on qualifie laconiquement de contemporaine. Audelà, se pencher sur la soi-disant fin du postmodernisme permet d'éclairer un nouveau rapport au temps qui se présente comme un défi pour les architectes et pour les historiens de l'architecture. Le procès du postmodernisme À la fin des années 1980, le postmodernisme architectural est d'abord paradoxalement menacé par son succès. Attaqué depuis ses débuts sur un plan théorique, il l'est à ce momentlà surtout à travers ses réalisations, lesquelles sont désormais omniprésentes dans les publications spécialisées. Annoncé dès 1985 par un collage éponyme de Nils Ole Lund, le triomphe du postmodernisme 'éloigne notamment des références grassroots de ses origines comme Las Vegas et Levittown, et en fait indubitablement selon l'historienne Mary McLeod le « nouveau style corporate » (Mc Leod, 1989 : 29) – ses héros sont en ce sens exposés à la galerie IBM à New York à l'automne 1987. Devenu progressivement hégémonique, le mouvement trahit donc pour nombre d'observateurs la promesse de pluralisme voire de démocratisation de l'architecture qui l'animait à ses débuts. Dans The New York Review of Books, le critique Martin Filler assure ainsi qu'« il est maintenant largement admis que le postmodernisme, qui a commencé il y a deux décennies comme un rejet populiste de la rigidité et de la répétitivité du modernisme tardif, est devenu tout aussi formaliste et schématique que le style qu'il prétendait remplacer » (Filler, 1990). Conséquemment, le postmodernisme semble pour beaucoup avoir perdu de son pouvoir de subversion, de sa capacité à bousculer l'ordre établi. En passant du Camp au Kitsch, c'est-àdire de la parodie au pastiche (Jameson, 1983 : 113-115), le mouvement serait devenu nostalgique sinon réactionnaire. Le critique Douglas Davis note ainsi que des architectes comme Robert Stern, Quinlan Terry ou Léon Krier font désormais preuve d'une « une rhétorique plus dure », laquelle confine au dogmatisme et peut même être qualifiée de « néoconservatrice » (Davis, 1987). La publication du numéro d'Architectural Design intitulé «Le postmodernisme en procès» veut en témoigner à travers la présentation de plusieurs projets réalisés pour le compte de la compagnie Disney par Michael Graves : Swan and Dolphin Hotels (1990) et Walt Disney Headquaters (1990), ou par Robert Stern : Casting Center (1989). Enfin, pour certains comme l'historien et critique Christian Norberg-Schulz, « il ne fait guère de doute que les oeuvres postmodernes apparaissent souvent comme superficielles et arbitraires.» (Norberg-Schulz, 1988: 11). Dans les colonnes de la revue Assemblage, l'historien Alan Colqhoun souligne en particulier l'usage désinvolte du langage classique de l'architecture que font les promoteurs et les grandes firmes : « Le problème que nous rencontrons avec l'immeuble de bureau américain typiquement postmoderne, c'est le manque de relation entre la destination du bâtiment et les associations historique qu'implique sa forme artistique » (Colquhon, 1988 : 14). James Gardner est encore plus implacable lorsqu'il note qu'« il faut être aveugle pour ne pas voir que l'usage postmoderne des ordres classiques tient de l'illettrisme et de l'incompétence» (Gardner, 1989). Échouant à mettre en oeuvre sa promesse fondatrice de redonner du sens aux formes architecturales, le postmodernisme semble ainsi avoir perdu sa principale raison d'être. La fin du style et l'avènement des modes Au gré des arguments qu'ils avancent, ces commentateurs de la scène architecturale américaine s'entendent donc au tournant des années 1990 pour assimiler le postmodernisme à un style hégémonique, réactionnaire et superficiel, lequel est à ce titre par eux jugé moribond. Que peut-on d'abord penser de cette condamnation du postmodernisme en tant que style, paradigme qui domine d'ailleurs aujourd'hui encore l'historiographie? Il semble qu'ici cette notion prend en fait un sens particulier. Tout au long du vingtième siècle nous explique l'historien et critique Peter Collins, le style fut considéré comme « l'expression usuelle, dominante ou authentique de la vision du monde contemporain par les artistes qui ont le mieux perçu la nature de l'aventure humaine de leur époque» (Collins, 1967: 62). En ce sens, le postmodernisme s'est voulu dans les années 1970 un style propre à la société postindustrielle, consumériste et informationnelle, en rupture avec la société machiniste et hiérarchique qui la précéda. C'est précisément en ce sens que le «hangar décoré» des bords de routes commerciales a été présenté par Robert Venturi et Denise Scott Brown comme l'architecture la plus adaptée à son époque (Venturi, Scott Brown, Izenour, 1972). Deux décennies plus tard, le style dont parlent les critiques correspond plutôt à une série de traits formels, historicistes et classicistes, parfaitement étrangers à l'environnement technique, économique et social dans lesquels ils surgissent – l'Amérique hypermoderne plus que jamais émancipée de l'héritage européen. Ce style apparaît alors davantage comme une signature ou une griffe qui permet à un architecte ou un groupe d'architectes de se distinguer, notamment de ceux qui cultivent l'esthétique moderniste. Tel que l'entendent les commentateurs, le postmodernisme est donc une mode qui en remplace une autre, et qui à son tour est destinée à être supplantée à plus ou moins court terme, par exemple par le déconstructivisme. Philip Johnson décrit d'ailleurs ce dernier non pas comme un «nouveau style» au sens où l'étai selon lui le modernisme, mais comme un ensemble de «ressemblances formelles» (Johnson, 1988). Cela posé, comment comprendre alors l'annonce de la fin du postmodernisme en architecture au tournant des années 1990? Celle-ci apparaît pour le moins paradoxale. Désormais affranchi de tout ancrage dans le temps et dans l'espace en dépit de l'invocation récurrente du contexte, de toute nécessité d'exprimer un quelconque zeitgeist, le mouvement semble en effet libre de se déployer sous de multiples apparences formelles. C'est notamment ce que suggère Mary McLeod lorsqu'elle souligne la continuité et non la rupture qui s'opère avec le déconstructivisme (Mc Leod, 1989), et c'est aussi ce que Charles Jencks affirme avec malice quand il interprète cette prétendue mort du mouvement comme un signe de renouveau, au nom précisément du regain de pluralisme qu'elle augure (Jencks, 1990). Une logique culturelle bien vivante Au vu de cette acception du postmodernisme architectural comme mode – ou plutôt comme succession de modes – et non en tant que style, on pourrait donc faire ici l'hypothèse que sa fin annoncée au tournant des années 1990 marque en réalité son véritable avènement. C'est en tout cas ce que semblent penser à ce moment-là un certain nombre d'intellectuels marxistes qui le théorisent hors du champ de l'architecture et de son histoire. Le philosophe Fredric Jameson fait du postmodernisme « la logique culturelle du capitalisme tardif » (Jameson, 1991), et le géographe David Harvey l'associe à une «condition historique » (Harvey, 1990) caractérisée par une nouvelle forme d'accumulation flexible du capital. Pour ces universitaires qui prennent singulièrement l'architecture en exemple, le style est instrumental ; la finalité du postmodernisme est pour eux de répondre à la demande croissante de différenciation des produits immobiliers dans une économie concurrentielle, désormais plus tournée vers l'optimisation de la consommation que de la production. Pourvoyeuses d'un fort capital culturel, les formes historiques et classiques trouvent facilement preneur sur le marché de l'immobilier. Le sociologue James Mayo fait d'ailleurs valoir que, « les hommes d'affaires se sont aussi approprié la déconstruction comme capital esthétique comme ils l'ont fait avec d'autres styles. » (Mayo, 1991 : 72). La critique Ada Louise Huxtable évoque quant à elle « un nouveau de promoteurs qui ont rénové la ville à coup de bâtiments signés, un phénomène qui allie marketing et consumérisme » (Huxtable, 1987). En architectures comme dans tous les arts, le postmodernisme semble donc plus que jamais participer à la « destruction créatrice » (Harvey, 1990) indissociable du développement du capitalisme depuis ses origines. Tandis que l'avènement de la ville moderne s'appuyait beaucoup sur une économie matérielle basée sur la démolition physique de la ville ancienne, la croissance de la ville postmoderne repose de plus en plus sur une économie des signes qui dépend de leur renouvellement constant. Ainsi replacé dans une perspective plus large et moins disciplinaire, le postmodernisme en architecture parait au début des années 1990 moins finissant qu'animé d'une grande vitalité, laquelle reflète celle du capitalisme américain alors libéré de toute entrave. La fin de quoi? Si ce n'est pas la fin du postmodernisme qui se joue au tournant des années 1990, à quoi assiste-t-on alors? Peut-être à la « fin de l'histoire » (Fukuyuma, 1989) comme le suggère Francis Fukuyama dans un texte qui fait à ce moment-là beaucoup débat. Le philosophe américain y avance que la démocratie libérale et le capitalisme ont triomphé des idéologies rivales, constituent le « point final de l'évolution idéologique de l'humanité », et par conséquent aboutissent à la « fin de l'histoire ». C'est dans un présent perpétuel – une stase – que seraient alors immergées les sociétés occidentales. C'est en effet dans un flux constant de modes et de tendances vouées à se remplacer à un rythme de plus en plus accéléré que l'architecture est désormais plongée. On pourrait ajouter qu'en ce qui la concerne on assiste à la « fin du début » et à la « fin de la fin », c'est-à-dire l'abandon de toute finalité comme le suggérait déjà l'architecte Peter Eisenman plusieurs années auparavant (Eisenman, 1984). À partir du début des années 1990, l'architecture ne se reconnaît plus d'origine et ne suit plus aucune direction – la dernière ayant été celle du retour en arrière. Les édifices relevant du néoclassicisme, du déconstructivisme et plus tard du minimalisme semblent ainsi procéder d'une pure immanence. On pourrait ainsi voir dans l'avènement véritable du postmodernisme en architecture, un moment où l'articul ation entre passé, présent et futur perd toute évidence. Avec l'historien François Hartog il serait possible de parler de « crise du temps » et d'entrée autour de la date symbolique de 1989 dans un nouveau « régime d'historicité », en l'occurrence celui du « présentisme » (Hartog, 2003). Par-delà les enjeux que cela soulève pour les architectes, ce basculement interroge dramatiquement les historiens de l'architecture – et pas seulement ceux qui travaillent sur le postmodernisme. Peuvent-ils encore faire l'histoire après la fin de l'histoire? C'est la question notamment posée par le critique Anthony Vidler à travers sa réflexion sur la notion de « posthistoire ».
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FOCAS : un canevas extensible pour la construction d'applications orientées procédé
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L’événement associé à l’arrivée de données dans le port destination d’un dataflow d’une sous-activité proxy doit être écouté pour le composant ODC afin de capturer les données et les envoyer vers la « vraie » sous-activité. Pour notre exemple, le port « intercepté » par le composant ODC est le port begin de la sous-activité SubAct1_Proxy dans le nœud N1, ces données sont envoyées vers le port begin de la sous-activité SubAct1 du nœud N2. Le composant ODC est configuré avec la table de routage pour réaliser cette fonction, la table de routage générée par l’algorithme pour le nœud N1 est présentée dans la Figure 78. Activité Port Comp/SubAct1_ Proxy begin Figure 78. Nœud N2 Comp_Context_N2/ SubAct1 begin Table de routage pour le nœud N1. Cas 2 : Un dataflow d’une sous-activité vers une l activité composite Ce cas se présente lorsqu’une sous-activité possède un dataflow vers son activité composite qui s’exécute dans un nœud différent. Du fait que l’activité composite et la sousactivité s’exécutent sur différents nœuds, une activité de contexte est produite par l’étape 1 de l’algorithme comme contexte d’exécution de la sous-activité. Ainsi, il n’est pas nécessaire de créer une activité proxy car l’activité de contexte peut être utilisée à sa place. Finalement, un dataflow reliant la sous-activité et l’activité de contexte est créé. Pour illustrer ce cas, considérons l’exemple de base mais en ajoutant un dataflow de la sous-activité SubAct3 vers l’activité composite Comp. Les annotations indiquent que l’activité Comp et la sous-activité SubAct2 seront exécutées dans le nœud N1, pendant que les sousactivités SubAct1 et SubAct3 seront exécut dans le nœud N2. L’exemple est présenté à gauche de la Figure 79 et les activités contextes produites sont présentées à droite. N 1 N2 Comp Capture ODC Comp N2 Comp _ Context _ N 2 Figure 79. Résultat de l’algorithme : dataflow d’une sous-activité vers l’activité composite. Pour ce cas, rien n’est ajouté aux modèles de contrôle dans la deuxième étape de l’algorithme, cependant étant donné que l’activité de contexte est un clone de l’original, le 8.3 EXTENSIONS DE FOCAS POUR L’ORCHESTRATION REPARTIE 144 composant ODC capture l’arrivé des données à ses ports et les envoi vers la « vraie » activité. La table de routage permet de spécifier la capture de données dans les ports de l’activité de contexte. Pour notre exemple, le port end de l’activité de contexte Comp_Context_N2 est intercepté et ses données envoyées ver le port end de la « vraie » activité Comp qui s’exécute dans le nœud N1. La Figure 80 montre la table de routage pour le nœud N2 pour le cas et l’exemple analysés. Activité Port Comp_Context_N2 end Figure 80. Nœud N2 Comp end Table de routage pour le nœud N2. Cas 3 : Un dataflow entre activités du même niveau Ce cas se présente lorsque deux sous-activités exécutées dans des nœuds différents et qui ont un dataflow qui les relie. Dans ce cas, l’algorithme suit la même stratégie que pour le cas 1, c’est-à-dire la création d’une sous-activité proxy pour représenter la « vraie » sousactivité s’exécutant dans l’autre nœud. La sous-activité proxy correspond à la sous-activité destination du dataflow et elle est incluse dans l’activité contexte de la sous-activité origine du dataflow. Pareillement, la sous-activité proxy est nommée de la même façon que la sous-activité originale plus le suffixe Proxy. Finalement, un dataflow reliant la sous-activité et la sousactivité proxy est créé. Pour illustrer ce cas, considérons l’exemple de base mais en ajoutant un dataflow de la sous-activité SubAct1 à la sous-activité S2, et un autre de la sous-activité SubAct2 à la sousactivité SubAct3. Les annotations indiquent que l’activité Comp et la sous-activité SubAct1 seront exécutées dans le nœud N1, la sous-activité SubAct2 dans N2 et la sous-activité SubAct2 dans N3 comme est présenté à gauche de la Figure 81. Capture ODC N1 Comp N2 Capture ODC Comp N3 Comp_Context_N2 Comp_Context_N3 Figure 81. Résultat de l’algorithme : dataflow entre activités du même niveau. La première étape de l’algorithme produit les trois activités de contexte, Comp, Comp_Context_N2 et Comp_Context_N3. Dans l’activité de contexte Comp est incluse la sousactivité proxy SubAct2_Proxy et dans l’activité de contexte Comp_Context_N2 est incluse la sous-activité proxy SubAct3_Proxy comme est présenté à droite dans la Figure 81. Les tables de routage générées pour les nœuds N1 et N2 sont présentées dans la Figure 82. 145 L’ORCHESTRATION REPARTIE Activité Port Comp_Context_N2 end Nœud N2 Comp end Activité Port Comp_Context_N2 end Nœud N3 Comp end Figure 82. Tables de routage pour les nœuds N1 et N2. Division du modèle de l’application d’itinéraire Nous allons maintenant montrer le résultat de l’application de l’algorithme au notre exemple d’orchestration pour le calcul d’itinéraire. L’étape de détermination du contexte d’exécution de l’algorithme donné trois activités de contexte, comme suivent : L’activité ActivityROOT est l’activité contexte pour le nœud N1. A l’intérieur sont situées les activités Hotels et AddressH et le data qui les relie. L’activité ActivityROOT_Context_N2 est l’activité contexte pour le nœud N2. A l’intérieur sont placés les activités Restaurants et AddressR et le dataflow qui les relie. L’activité ActivityROOT_Context_N3 est l’activité contexte pour le nœud N3. A l’intérieur sont placés les activités Maps et SendMail et le dataflow qui les relie. Ensuite, l’étape d’analyse des dataflows reparties ajoute des activités proxies comme suit : Dans l’activité ActivityROOT (nœud N1) est incluse une sous-activité proxy Maps_Proxy pour représenter l’activité Maps (nœud N3). Dans l’activité ActivityROOT (nœud N1) est incluse une sous-activité proxy Maps_Proxy pour représenter l’activité Maps (nœud N3). Dans la Figure 83, sont présentés les trois modèles de contrôle générés par notre environnement, en utilisant les annotations proposées pour notre exemple d’application de calcul d’itinéraire. ActivityROOT ActivityROOT_Context_N3 ActivityROOT_Context_N2 Figure 83. Modèles générés pour l’application d’itinéraire. Les tables de routage générées pour chacun des nœuds sont présentées dans la Figure 84. Nœud N1 ActivityROOT_Context_N3/Maps begin Activité Port ActivityROOT/Maps_Proxy begin Activité Port Nœud N2 ActivityROOT_Context_N2/Maps_Proxy ActivityROOT_Context_N3/Maps begin begin Figure 84. Tables de routage générées pour l’application d’itinéraire. 8.3 EXTENSIONS DE FOCAS POUR L’ORCHESTRATION REPARTIE 8.3.3 Déploiement des orchestrations reparties 146 Le fait d’utiliser une architecture repartie pour l’exécution d’une orchestration impose de nouveaux défis en termes de déploiement des orchestrations. Bien qu’une technique de déploiement ah-doc puisse être utilisé lorsqu’il s’agit d’une exécution centralisée, cette technique n’est plus envisageable lorsque nous devons déployer l’infrastructure FOCAS et les fragments d’orchestrations dans plusieurs machines d’un réseau. Afin de couvrir ce besoin, nous avons utilisé une extension de la machine SAM permettant de déployer des composants OSGi et des ressources dans différentes machines d’un réseau. Cette extension, que nous allons nommer SAM-Deployer connaît toutes les machines SAM qui sont déployés dans le réseau. Le SAM-Deployer utilise des primitives proposées par la SAM afin de déployer des artefacts dans chaque machine du réseau. En plus, lorsqu’une nouvelle machine SAM arrive, un protocole de découverte permet de souscrire la machine au le SAM-Deployer. Le SAM-Deployer exécute un plan de déploiement qui à une liste de machines SAM, et pour chacune de ces machines, une liste de ressources et de composants à déployer. Les composants sont installés sur la même plate-forme OSGi sur laquelle s’exécute la machine SAM (la machine SAM est un composant OSGi). Les ressources sont copiées dans les répertoires indiqués pour le plan de déploiement dans les machines distantes. Les composants correspondant à l’infrastructure d’exécution FOCAS sont génériques, c’est-à-dire que les mêmes composants sont déployés dans chaque nœud du réseau. Ces composants génériques sont le moteur simple de procédés, ODC et IDC. Le moteur simple de procédés a été adapté pour être exécuté sur une plate-forme OSGi ; les composants ODC et IDC ont été développés directement pour cette plate-forme. Le fragment d’orchestration à déployer dans chaque nœud correspond au modèle d’orchestration, formé par les trois modèles de base (contrôle, données et services) et ses relations. En plus, il faut déployer une table de routage pour configurer le composant ODC dans chaque nœud. Les modèles de contrôle et données et leurs relations sont déployés en tant que ressources, ainsi comme la table de routage, car ils sont des fichiers XML. Le modèle de services est empaqueté en tant qu’un composant OSGi, ce composant contient les fichiers binaires résultats de la compilation des interfaces Java utilisées pour spécifier le modèle de services. Finalement, le composant de liaison est adapté pour être exécuté dans la plate-forme OSGi. Toutes ces tâches d’empaquetage et adaptation de composants est réalisé de façon systématique pour le CADSE-FOCAS, finalement il génère aussi le script du plan de déploiement. produces CADSE-FOCAS Artefacts N1 Artefacts Nn Control Model Control Model Data Model Data Model Routing Table Routing Table Services Model Services Model Binding Binding Net Model Deployment Plan SAM Simple Engine Data Model N1 ODC IDC executes uses OSGi Platform – Node 1 Figure 85. uses ODC SAM-Deployer Simple Engine deploys Routing Table N1 Services N1 SAM uses IDC deploys Control Model N1 Generic Component Repository generates Binding N1 Control Model N2 SAM Simple Engine Data Model N2 ODC IDC Routing Table N2 Services N2 OSGi Platform – Node n Génération et exécution d’un plan de déploiement. Binding N2 147 L’ORCHESTRATION REPARTIE Dans la Figure 85 est présenté comment le déploiement est réalisé, pour une orchestration déterminée. L’environnement CADSE-FOCAS produit un ensemble d’artefacts pour chaque machine du réseau et un plan de déploiement. Pour l’outil SAM-Deployer, les artefacts produits sont de deux types, des ressources (modèle de contrôle et de données et la table de routage) et des composants OSGi (modèle de services et composant de liaison). En plus, un dépôt contenant les composants génériques (SAM, IDC, ODC et le moteur simple de procédés) est aussi accédé pour l’outil SAM-Deployer. SAM-Deployer lit l’information physique du réseau et envoie les artefacts à déployer dans les nœuds pertinents. 8.4 SYNTHESE Dans ce chapitre nous avons présenté la mise en place d’une architecture pour l’exécution distribuée d’une orchestration de services. Afin d’implémenter la distribution pour ce type d’application, nous avons repris la facilité d’expression fourni par l’approche d’orchestration de services, ainsi que l’architecture d’exécution proposé par l’approche de chorégraphie de services. L’objectif de notre approche est d’améliorer la performance de l’exécution des orchestrations de services et d’assurer le passage à l’échelle. Nous considérons que la capacité d’exécution repartie de l’orchestration est un apport de cette thèse à l’état de l’art de la technologie d’orchestration de services. Bien qu’il existe des approches visant l’exécution distribuée des orchestrations comme nous l’avons présenté, nous considérons que les avantages de notre approche sont: la réutilisation du runtime utilisé pour l’exécution centralisée de l’orchestration. En fait, tous le composants du runtime ont été repris sans aucune modification et seulement un paire de composants (ODC et IDC) on été ajoutés à notre architecture. nous n’utilisons pas de nouveaux formalismes lors de l’expression de ce type d’applications. Plutôt, nous avons profité des certaines caractéristiques du langage APEL et de la technique des annotations pour exprimer la distribution d’une orchestration. l’aspect de la distribution suit aussi une approche de remontée du niveau d’abstraction et de séparation de préoccupations. Ainsi, au moment de la spécification, le modèle d’orchestration est annoté de façon abstraite avec des identificateurs des nœuds logiques. Au moment du déploiement, des machines physiques sont mappés aux nœuds logiques et des protocoles de communications sont établis. Nous n’essayons pas de déterminer la meilleure distribution pour une orchestration, la méthode de détermination de la distribution est laissée au choix de l’utilisateur. L’exécution repartie de l’orchestration est en soi-même un résultat important de nos travaux, cependant nous considérons que la mise en place de cette technologie est aussi une façon de valider les propriétés d’extensibilité de notre canevas FOCAS. Tout d’abord, nous avons étendu le runtime du canevas pour inclure les composants de communication IDC et ODC afin d’assurer la liaison entre les nœuds participant à l’exécution repartie d’une orchestration. L’implémentation de ces composants est réalisée d’une façon nonintrusive, c’est-à-dire qu’elle n’implique pas de modification des autres composants de l’architecture. Ensuite, une extension au niveau de l’environnement CADSE-FOCAS est effectuée. Comme toute extension non-fonctionnelle réalisée dans le CADSE-FOCAS, nous avons spécifié le méta-modèle de la distribution, ensuite nous avons créé un composant pour spécifier la distribution d’une orchestration, ainsi le modèle de contrôle est annoté avec cette information. Puis, le point ’extension pour ajouter de générateurs de code a été utilisé pour implémenter le générateur chargé d’appliquer l’algorithme de division du modèle global pour produire les fragments (sous-modèles) à être exécuté dans chaque nœud de l’architecture. 8.4 SYNTHESE 148 Finalement, un autre apport de notre approche est le mécanisme de déploiement utilisé. La machine SAM nous permet de déployer l’infrastructure ainsi comme les modèles à exécuter dans chacune de machines pour participer à l’exécution d’une orchestration. 9. VALIDATION ET EVALUATION Les chapitres précédents ont permis de détailler l’approche et la mise en œuvre d’un canevas extensible pour la construction d’applications orientées procédés. Puis, en utilisant cette technologie, nous avons mis en place une approche pour l’exécution repartie d’une orchestration de services. Dans ce chapitre, nous allons détailler le contexte dans lequel le canevas FOCAS a été mis en place, celui des projets européens ITEA, S4ALL et SODA. Dans la première partie de ce chapitre, nous allons présenter quel a été le rôle de notre canevas dans ces projets, les besoins de chacun des projets et notre apport pour procurer une solution à ces besoins. Nous considérons que la solution fournie par notre canevas dans ces contextes d’utilisation est un moyen de valider nos travaux autour des applications orientées procédé. Ensuite, nous estimons pertinent de faire une évaluation des performances obtenues lors de l’utilisation de l’exécution répartie de l’orchestration. Ainsi, la deuxième partie de ce chapitre est dédié à la réalisation d’une expérience pour évaluer l’intérêt d’utiliser l’approche d’exécution répartie pour les orchestrations. 9.1 LE PROJET S4ALL Le projet S4ALL a comme objectif de mettre en place une vision d’un environnement où des services peuvent facilement être créés, partagés et consommés. Pour mette en place cette vision des nouvelles technologies pour la création, la personnalisation, le déploiement et la prestation de services doivent être introduites. Ainsi, les technologies à services doivent faciliter l’exploitation des services, trois opérations sont ainsi visées : la création facile de services. Dans la vision de S4ALL les services doivent être faciles à implémenter, même par de non spécialistes. Ces services peuvent potentiellement utiliser des infrastructures technologiques robustes, et des dispositifs mobiles. Les services doivent être créés en utilisant des outils graphiques permettant facilement l’intégration de fonctionnalités; la mise à disposition facile de services. Une infrastructure doit permettre de mettre facilement à disposition d’une communauté les services créés. La création des services doit être découplée de cette infrastructure afin de faciliter, ou même automatiser la tâche de déploiement ; la consommation facile des services. Les services doivent être catégorisés dans une taxonomie avec d’information sémantique pouvant améliorer leur recherche. L’idée est de retrouver le service le plus adapté aux besoins de consommateur. Nous avons participé dans la partie qui cible la création facile de services. Notre objectif était la mise à disposition d’un environnement de spécification et d’exécution d’orchestrations de services. Cet environnement devait disposer de niveaux d’abstraction 9.2 LE PROJET SODA 150 supérieurs aux canevas existants, l’idée était de permettre la composition de services par des acteurs qui ne sont pas des experts de la technologie des services. Les besoins du projet S4ALL pour cet environnement étaient : utiliser des formalismes de haut niveau d’abstraction, évitant l’inclusion de détails technologiques lors de la spécification d’une composition de services ; l’environnement devait être intuitif pour permettre l’expression et la composition de différentes préoccupations à prendre en compte ; l’approche devait prendre en compte diverses technologies de services, et faire abstraction de ces technologies au moment de spécifier l’orchestration ; la possibilité d’ajouter dans l’architecture des mécanismes d’adaptation afin de consommer différents services qui n’ont pas été conçus pour être utilisés dans une composition spécifique. Pour faire face à ces besoins, nous avons d’abord préconisé l’utilisation d’une approche IDM pour mettre en place des formalismes d’haut niveau d’abstraction. Chaque formalisme exprimait une préoccupation différente de la composition. Afin de résoudre les problèmes d’hétérogénéité de technologies et d’alignement de services nous avons introduit une architecture en trois couches qui utilise le concept de service abstrait. Finalement, nous avons agrégé dans un environnement tous les outils (éditeurs, composeurs, générateurs de code) permettant spécifier et rendre exécutable une application de services. Bien que notre participation dans le projet S4ALL, a permis valider les idées autour de la composition de domaines et de l’architecture en trois couches, nous avons observé que notre environnement de spécification ne fournissait pas le support adéquat. En fait, plutôt qu’intégrer les différents outils, ils étaient agrégés dans l’environnement, mais un mécanisme permettant une intégration aisée des outils n’existait pas à l’époque. Par conséquent, des travaux ont été repris afin de produire notre environnement CADSE-FOCAS. 9.2 LE PROJET SODA Le travail de cette thèse a en partie été réalisé dans le cadre du projet européen ITEA SODA (acronyme de Service Oriented Device and Delivery Architecture). L’objectif du projet est de créer un écosystème à services offerts par divers dispositifs. Ces dispositifs doivent interagir en utilisant une infrastructure qui fournit des mécanismes de communication de haut niveau. Cet écosystème comportera un ensemble d’outils permettant la création d’applications qui utilisent les services offerts par les dispositifs, ainsi que de services pourvus par des applications métiers. La vision du projet est présentée dans la figure ci-dessous, à gauche sont schématisées les tâches du cycle de vie logiciel supportées par un ensemble d’outils. A droite, nous trouvons l’environnement d’exécution des applications. Des applications métier et de contrôle utilisent les services fournis par les divers dispositifs. Ces dispositifs agissent sur un environnement physique. 151 VALIDATION ET EVALUATION Figure 86. Ecosystème de services SODA . Le projet a été réalisé en partenariat avec plusieurs organismes de recherche publiques et privés, tels que l’équipe Adèle du Laboratoire Informatique de Grenoble, et des industriels comme Schneider Electric, PSA et Thales. Plusieurs domaines d’application sont visés dans le projet SODA, parmi eux : l’automation industrielle, l’automobile, la domotique, la télémesure, etc. Pour atteindre son but, SODA a divisé les efforts en quatre type de mécanismes présentés par la suite : mécanismes de base permettant la présentation en fonction des dispositifs en tant que services. Donc, un canevas est nécessaire pour la description de services et dispositifs. En plus, des mécanismes de communication et contrôle ainsi que de découverte des dispositifs doivent être fournis. mécanismes de composition de services pour construire applications qui utilisent les services fournis par les dispositifs et services offerts par des métiers. Donc, il s’agit des langages de spécification de composition de haut niveau d’abstraction et d’outils pour la spécification, le déploiement et l’exécution des applications. mécanismes pour assurer la qualité de services. Des propriétés comme la messagerie fiable, la propagation d’événements, la communication sécurisée et le monitoring et gestion de services doivent être ajoutés aux mécanismes de base. mécanismes pour améliorer le cycle de vie des applications. Deux stratégies sont envisagées. Tout d’abord, la combinaison d’une approche top-down, permettant de décomposer une application en divers services, avec une approche bottom-up pour réutiliser les services disponibles et offerts par l’environnement. Ensuite, la mise en place d’une approche pour séparer la vue logique des applications de l’architecture physique qui les supporte. L’équipe Adèle du laboratoire LIG, que nous avons représenté dans le cadre de ce projet, a été chargée de fournir les langages et les outils pour supporter la spécification et l’exécution d’applications basés sur les services exposés par des dispositifs ainsi que les services métiers et techniques disponibles. Le canevas FOCAS a été utilisé pour remplir cet objectif. Dans le cadre de notre participation, un cas d’utilisation proposé par le partenaire Thales a été implémenté et a servi comme moyen d’expérimentation de nos mécanismes d’extension. Par la suite, nous allons présenter le cas d’utilisation, sa mise en œuvre et ensuite des expériences que nous avons réalisées en profitant cette application. 9.2 LE PROJET SODA 152 9.2.1 Cas d’utilisation : système de surveillance Le cas d’utilisation concerne la mise en place d’une application de surveillance d’une usine de production. L’application utilise un ensemble de capteurs pour récupérer des données de l’environnement physique de l’usine, ensuite les valeurs récupérées sont analysées. Le résultat de l’analyse est stocké dans une base de données afin de garder un historique. En fonction du résultat de l’analyse, des actions pour modifier le comportement des équipements de la chaîne de production peuvent être exécutes. De même, un mail ou un SMS est envoyé vers un responsable de la chaîne de production. Application Remontée des mesures Dispositifs controleurs Consommation métier Figure 87. de services Environnement d’exécution de l’ application de surveillance d’usine. Dans la Figure 87, est présenté l’environnement d’exécution de l’application de surveillance de l’usine de production. Dans cet environnement existent trois types de services : tout d’abord, les services qui font la remonté de mesures, ils sont fournis par les divers capteurs. Ensuite, les services chargés du contrôle des équipements de l’usine, fournis par des dispositifs contrôleurs. Finalement, les services métiers (ou techniques) de l’entreprise pour supporter le stockage et le service de messagerie. Les besoins de l’application L’application à construire comporte des besoins spécifiques : gestion de l’hétérogénéité. Les dispositifs utilisés pour l’application sont très hétérogènes. Ils peuvent implémenter les services en utilisant différentes technologies (langages de description, représentation de données). En plus, ils peuvent utiliser plusieurs protocoles de communication comme UPnP et DPWS ; gestion de l’évolution. L’application doit supporter l’évolution de différents services. Par exemple, un capteur peut être remplacé par autre et l’application continuer à fonctionner. gestion de la sécurité. Etant donné l’environnement d’exécution de l’application, la sécurité est un aspect crucial, afin d’éviter la lecture ou modification des informations sensibles ainsi que la manipulation malintentionné des machines de l’usine. Donc, il s’agit de garantir l’authentification et le contrôle d’accès aux services, ainsi que de garantir la confidentialité et l’intégrité des communications. Pour faire face à ces défis nous avons spécifié l’application en utilisant une technologie d’orchestration de services, la spécification est présentée par la suite. 153 VAL IDATION ET EVALUATION Spécification de l’orchestration L’application de surveillance d’usine a été spécifiée comme est schématisé dans la Figure 88. Figure 88. Spécification de l’application comme une orchestr ation . Les détails de la spécification sont les suivants : la première partie est l’acquisition de données qui sont de températures et de taux d’humidité pour une machine ; ensuite, les données récupérées sont agrégées par lots de dix valeurs, puis une analyse est effectuée sur les lots de données. Cet analyse consiste en calculer la moyenne de températures et de taux d’humidité ; finalement, les données analysées sont stockées et traitées. Le stockage permet de garder l’historique des valeurs. Le traitement consiste en évaluer les valeurs de moyenne pour déterminer si elles dans les intervalles attendus. Si nécessaire, l’orchestration envoie un message au responsable du site (mail ou SMS), et envoi un commande sur la machine (arrêt, ralentissement...). 9.2.2 Mise en œuvre de l’application de surveillance dans FOCAS Nous allons par la suite, montrer comment l’application de surveillance d’usine a été implémentée dans notre canevas FOCAS. L’application a été divisée en deux parties, la partie abstraite conforme par les modèles de base et leurs relations, et la partie concrète qui fait référence à la technologie d’implémentation. Nous allons présenter dans cette section, les trois modèles de base (et leurs relations), et ensuite la mise en place de la partie concrète de l’application. Modèle de contrôle Le modèle de contrôle pour l’application de surveillance est présenté dans la Figure 89. L’activité Acquisition est chargée de récolter les données des capteurs. Elle est décomposée en quatre sous-activités, deux qui se chargent des capteurs de température (Temperature1 et Temperature2) et autre du capteur d’humidité (Humidity). La quatrième activité Aggregator est chargée d’attendre une mesure prise par chacun des capteurs, et ensuite envoyé un triplet avec les trois mesures par le port asynchrone out. Puis, l’activité Analysis est chargée d’agréger dix triplets de mesures et ensuite, de calculer une moyenne des vingt mesures de température et une moyenne des dix mesures d’humidité. Le résultat de ce calcul est envoyé à l’activité Storage qui est chargée de stocker ces moyennes dans une base de données. De façon parallèle, l’activité Processing se charge de prendre des actions selon les valeurs observées pour les mesures. L’activité Processing, est divisée en trois sous-activités, ProcAnalysis détermine si les mesures prises se trouvent dans leurs valeurs normales, si c’est le cas l’activité finalise par son port none. Par contre, si les mesures se trouvant dans un premier intervalle considéré anormal, l’activité Processing finalise par son port mail ayant comme conséquence l’exécution de l’activité SendNotification qui envoie un message au responsable de 9.2 LE PROJET SODA 154 la chaîne de production. D’autre part, si les mesures sont dans un deuxième intervalle anormal, en plus d’envoyer le message au responsable, l’activité exécute des commandes pour modifier le comportement des machines en utilisant l’activité Action. A cquisition Figure 89. Processing Modèle de contrôle pour l’application de surveillance. Modèle de services Le modèle de services de l’application de surveillance est présenté dans la Figure 90. Le service GetData est invoqué pour les activités de collection de données chaque n secondes. Il contient deux opérations, une pour récupérer une mesure de température et l’autre pour récolter une mesure d’humidité. Ensuite, le service DoAverage est invoqué par l’activité Analysis pour calculer la moyenne de mesures. De sa part, le service de Storage est chargé de la persistance de mesures, il est invoqué par l’activité Storage. Le service SendNotification est chargé d’envoyer le message de notification au responsable, il est invoqué par l’activité SendNotification. Finalement, le service SendCommand est invoqué pour l’activité Action pour agir sur les machines. public interface GetData { public DoubleA getTemperature(); public DoubleA getHumidity(); } public interface DoAverage { public Average doAverage(LotMeasures triplets); } public interface Store { public BooleanA storeData(Average average); } public interface SendNotification { public BooleanA sendMail (MessageData mail); public BooleanA sendSMS (MessageData sms); } public interface SendCommand { public BooleanA runAction (IntegerA id); } Figure 90. Modèle de services de l’application de surveillance. 155 VALIDATION ET EVALUATION Modèle de données Le modèle de données utilisé par l’application de surveillance est résumé dans le tableau ci-dessous. Pour faciliter la composition du modèle de contrôle avec celui de données, nous avons crée un type de produit dans le modèle de contrôle correspondant avec chaque type du modèle de données, en plus les types ont les mêmes noms dans les deux modèles. Type DoubleA Measure LotMeasures MessageData BooleanA Description Type complexe pour représenter un double. Ce type est utilisé pour garder les valeurs de mesures de température et humidité. Type complexe conforme par un triplet de DoubleA. Il sert a agréger deux mesures de températures et une de humidité. Type contenant une collection de Measure. Il est utilisé par le service Average pour calculer la moyenne de 10 mesures. Type qui encapsule l’information pour envoyer un message (adresse, sujet, texte du message). Type complexe pour représenter un booléen. Il est utilise par le service sendCommand pour indiquer que l’action sur la machine a été effectuée. Figure 91. Modèle de données de l’application de surveillance. Partie concrète de l’application Les modèles présentés auparavant et leurs relations font partie de la définition abstraite de l’application. Mais, pour rendre cette application fonctionnelle, il est nécessaire de faire une liaison avec les services fournis par les dispositifs ainsi que les services métiers de l’entreprise. Bien que la première partie de l’application soit faite avec une approche top-down, une approche bottom-up est utilisée afin de récupérer les services déjà existants, et ainsi implémenter la partie concrète de l’application. Nous avons ainsi intégré un générateur de code dans CADSE-FOCAS permettant à partir de la description DPWS d’un dispositif, de générer le code nécessaire pour invoquer leurs services, c’est-à-dire de générer les proxies d’invocation. Même si la technologie de services est connue (DPWS), les instances des services peuvent être déterminées à l’exécution, nous avons alors développé deux cas différents, le premier avec une liaison statique, comportant dans le code de liaison l’adresse de réseau de services par défaut. La deuxième implémentation utilise le mécanisme de liaison dynamique pour retrouver les instances de services à l’exécution. En plus, nous avons généré une série de médiateurs pour permettre d’adapter les données utilisés dans notre modèle d’orchestration aux données utilisées par les services offerts par les dispositifs. Cette génération des médiateurs est partielle, c’est-à-dire les classes de médiation sont générées, mais la logique de médiation est à remplir par le développeur. Une fois spécifié tous les modèles et leurs relations, et générés les proxies des services à invoquer, le composant de liaison peut être généré afin de lier les parties abstraite et concrète de l’application. Le composant de liaison est responsable pour instancier les proxies et invoquer les services qui sont associées aux activités en utilisant les médiateurs. 9.2.3 Mise en œuvre de l’aspect de la sécurité La section précédente a montré comment nous avons développé l’application de surveillance d’usine partant du cas d’utilisation. Cependant, ce cas possède une partie dédiée à la sécurité de l’application. Nous allons par la suite présenter comment l’aspect de la sécurité a été ajouté à l’application de surveillance d’usine. Les besoins de sécurité exposés par le cas d’utilisation sont : Les données récoltées par les capteurs doivent être confidentielles. Les services DoAverage et SendCommand possèdent un mécanisme de control d’accès, donc une authentification préalable à l’exécution est nécessaire. 9.2 LE PROJET SODA 156 Les données échangées avec les services SendNotification et Storage doivent maintenir leur intégrité. En fait, différents mécanismes sont fournis par les services pour assurer les propriétés de sécurité. Le service DoAverage supporte l’authentification en utilisant une technique de certificat, tandis que le service SendCommand le fait en utilisant une paire utilisateur/mot de passe. Pour assurer la confidentialité les services de collection de mesures échangent leurs données en les chiffrant. Finalement, un mécanisme de signature digitale est utilisé par les services métier SendNotification et Storage afin de prouver que les messages n’ont pas été modifiés pendant la communication. Dans un premier essai pour ajouter les aspects de sécurité dans l’application, nous l’avons ajouté manuellement. Ainsi, le composant de liaison a été modifié pour mettre en place les propriétés de sécurité. Donc, le code d’invocation des services DoAverage et SendCommand à été modifié pour inclure la logique d’authentification avant l’invocation. D’autre part, le code d’invocation du service GetData a été modifié pour déchiffrer les données provenant de capteurs. Finalement le code d’invocation des services SendNotification et Storage a été modifié pour ajouter la signature avant l’invocation et pour vérifier la signature de services après l’invocation. Pour implémenter la consommation sécurisée des services, nous avons utilisé la plateforme Apache Axis pour la communication avec des services DPWS et services Web en utilisant le protocole SOAP. Cette plate-forme fournit le composant WSS4J qui est chargé d’implémenter la spécification WS-Security. Cette spécification propose des extensions du protocole SOAP pour procurer une communication sécurisée entre les services et leurs clients. L’implémentation manuelle des aspects de sécurité dans l’application n’a pas été appropié, car les changements des besoins de sécurité ou des mécanismes fournis par les services, entraînent des modifications dans le code de bas niveau écrit pour supporter les propriétés. Par conséquent, nous avons étendu le canevas FOCAS pour supporter les aspects de la sécurité dans les orchestrations de services, l’extension sera présentée par la suite. Extension du canevas FOCAS pour ajouter l’aspect de la sécurité L’extension faite pour supporter la sécurité suit l’approche d’extension nonfonctionnelle du canevas FOCAS présentée dans les chapitres de proposition et mise en œuvre. Ainsi, d’abord nous avons défini le méta-modèle de sécurité, contenant les concepts pertinents. Ensuite, les relations entre ce méta-modèle et celui de l’orchestration ont été établies. Puis, nous avons étendu l’environnement de spécification CADSE-FOCAS pour permettre la spécification des propriétés sur les orchestrations de services. Finalement, un template est ajouté au générateur de code, pour étendre le comportement du composant de liaison afin d’inclure le support des propriétés de sécurité. L’environnement de spécification CADSE-FOCAS a été étendu pour ajouter le composant de spécification des propriétés de sécurité. Le point d’extension fourni par le canevas a été utilisé, donc nous avons ajouté des onglets dans l’éditeur de contrôle permettent d’exprimer les propriétés de sécurité d’une application. En plus, différents niveaux d’abstraction sont utilisés, d’abord un onglet permet de spécifier les propriétés à respecter pour les activités de l’orchestration, et un autre onglet permet de donner les détails techniques des mécanismes utilisés pour assurer la propriété. 157 VALIDATION ET EVALUATION Figure 92. Extensions du CADSE-FOCAS pour l’expression des aspects de sécurité. Par exemple, l’activité Analysis est annotée pour indiquer qu’une authentification doit être utilisée lors de l’invocation de son service associé DoAverage, cette information décrit la propriété de l’authentification sans rien dire par rapport au mécanisme à utiliser. Ensuite, des détails comme le nom de l’utilisateur, son mot de passe ainsi que l’emplacement du fichier de certificat sont ajoutées dans les détails techniques. La Figure 92 présente pour l’activité Analysis, à gauche l’onglet de propriétés de sécurité, et à droite l’onglet de détails techniques du mécanisme utilisé. L’ autre partie de l’ extension consiste en fourni r un générateur responsable de produire le code qui assure la propriété de la sécurité. En effet, un générateur du code supportant l’aspect non-fonctionnel a une dépendance vers la plate-forme utilisée pour assurer l’aspect. Ainsi, notre générateur de code de la sécurité a une dépendance vers la plate-forme Axis et son composant de sécurité WSS4J. Le template utilisé pour générer le code responsable d’assurer les aspects de sécurité est une extension faite sur un template utilisé pour générer le composant de liaison. Notamment, l’extension faite consiste à générer un fichier de configuration (WSDD Web Service Deployment Descriptor) afin d’indiquer comment le proxy (généré par la partie bottom-up) doit gérer les propriétés de sécurité. En plus, la classe de liaison chargée d’écouter l’événement associé au changement d’état de l’activité et d’invoquer le service associé, doit être aussi modifié pour indiquer l’utilisation de ce fichier de configuration à la création de l’instance du proxy. L’information technique permettant de générer le fichier de configuration est retrouvée dans la spécification de détails techniques des mécanismes de sécurité. Dans la Figure 93 est présente l’architecture du code généré pour supporter l’aspect de la sécurité dans le canevas FOCAS. A gauche est schématisé l’architecture simple de la première version de l’application, la classe de liaison est responsable d’invoquer le service associé à une activité. Elle écoute l’événement produit par le moteur indiquant que l’activité devient activé, ensuite, elle crée une instance du proxy Axis et fait l’invocation du service DPWS en utilisent le proxy. A droite dans la figure, est montré l’architecture lorsque les propriétés de sécurité doivent être assurées. Dans ce cas, la classe de liaison utilise l’archive de configuration pour créer l’instance du proxy Axis. Ce fichier indique les opérations à réaliser lors de l’invocation du service, ces opérations peuvent être : inclure une entête d’authentification pour le message SOAP, signer le message ou le chiffrer. Ainsi, lorsqu’une 9.2 LE PROJET SODA 158 invocation doit être réalisée, le proxy lit sa configuration s’il a besoin, demande au composant WSS4J de réaliser les opérations de modification du message SOAP requises. FOCAS Engine FOCAS Engine Binding Class Binding Class Axis Proxy WSDD File Axis Proxy SOAP Message WSS4J Secure SOAP Message DPWS Service Figure 93. DPWS Secure Service Architecture du code généré pour assurer la propriété de la sécurité. La mise en place de l’extension de sécurité a permit de valider nos idées autour des extensions non-fonctionnelles du canevas FOCAS. Pour notre cas d’utilisation elle a fourni un mécanisme de haut niveau pour résoudre le problème de l’ajout de propriétés de sécurité à l’application. Il permet l’évolution des besoins (autres ou différentes propriétés de sécurité) ainsi que des évolutions technologiques (utiliser autre plate-forme pour supporter l’aspect). 9.2.4 Métriques de l’application de surveillance d’usine Du développement de l’application pour le cas d’utilisation proposé nous avons pris un certain nombre de métriques afin d’évaluer la capacité du canevas aider les développeurs. Donc, nous avons mesuré combien de lignes de code sont générées par le canevas dans le cas d’une l’orchestration simple et ensuite lorsque nous lui ajoutons les propriétés de sécurité. Nous avons aussi réalisé une expérience pour déterminer l’impact de l’utilisation du canevas pour supporter l’aspect de la sécurité. Nous allons par la suite présenter ces métriques. Gé nération du code La première métrique sert à mesurer combien lignes de code sont générés par l’environnement CADSE-FOCAS pour implémenter l’orchestration et combien sont écrites par les développeurs. Nous avons classé le code (généré ou écrit) dans quatre groupes, présentés dans le tableau ci-dessous : Type de code Logique de l’orchestration Implémentation de données Composant de liaison Médiation de données Description Correspond au code ajoute pour les développeurs pour compléter la logique de l’orchestration. Par exemple, le code correspondant à l’agrégation de mesures dans l’activité Analysis, ou le code pour évaluer les actions à prendre dans l’activité ProcAnalysis. Correspond au code généré par le canevas pour cacher le format dans lequel le données sont traites par le moteur. Cette génération fournit des interfaces Java pour manipuler ces données. Correspond au code implémentant la logique d’invocation du service. Il est charge d’instancier le proxy et d’invoquer ses opérations. Correspond aux classes générées pour implémenter un médiateur des données par défaut. Par contre, le code de médiation doit être rempli par le développeur. 159 VALIDATION ET EVALUATION Code de proxies Correspond au code généré par la partie bottom-up du canevas pour créer les proxies de services existants. Figure 94. Types de code généré par le canevas pour l’ orchestra tion . Les mesures sont prises dans quatre scénarios : le deux premiers correspondent à l’implémentation de l’orchestration sans les aspects de sécurité. Dans le premier scénario, une liaison statique est utilisée, tandis que pour le deuxième, il s’agit d’une liaison dynamique. Les autres deux scénarios correspondent à l’orchestration avec les aspects de sécurité, avec la même variation dans la liaison. Les tableaux ci-dessous présentent le nombre de lignes de code pour chacun des scén arios . Logique de l’orchestration Composant de liaison Implémentation de données Médiation de données Total Figure 95. Orchestration Dynamique Total Générées Ecrites 255 125 130 611 607 4 347 347 0 154 136 18 1367 1215 152 Code généré pour l’orchestration sans les propriétés de sécurité. Logique de l’orchestration Composant de liaison Implémentation de données Médiation de données Total Figure 96. Orchestration Statique Total Générées Ecrites 255 125 130 541 537 4 347 347 0 154 136 18 1297 1145 152 Orchestration Statique Total Générées Ecrites 255 125 130 864 860 4 347 347 0 154 136 18 1620 1468 152 Orchestration Dynamique Total Générées Ecrites 255 125 130 935 931 4 347 347 0 154 136 18 1691 1539 152 Code généré pour l’orchestration avec les propriétés de sécurité. Du nombre des lignes générées nous pouvons faire certaines réflexions. D’abord, notre approche permet d’inclure une partie de la logique de l’application en tant que code Java, nous avons appelé cette logique modèle de comportement (voir section 7.1.1 du chapitre de mise en œuvre). L’idée d’est éviter de créer des services pour des calculs simples (c’est le cas d’approches comme WS-BPEL) ainsi que de compléter la logique métier. Pour notre cas d’utilisation, 255 lignes de code sont utilisées pour exprimer cette logique, le canevas en a généré 125 et le développeur en a ajouté 130. En fait, le canevas génère les classes correspondant au comportement d’une activité, et le développeur doit compléter les méthodes pour exprimer la logique. En plus, le code généré pour l’implémentation des données vise à faciliter la tâche du développeur lorsqu’il écrit le code de la logique d’application, car des classes Java simples (Beans) cachent le traitement des données de la part du moteur d’exécution. Ce code est complètement généré par le canevas et correspond à 347 lignes. Ensuite, le code de médiation permettant de faire un alignement de types de données abstraits avec les types utilisés par les services. Ce code contient 156 lignes, desquels 18 ont été écrites par le développeur. En fait, normalement le code de médiation comporte une partie générée inferieure à celle écrite, mais dans notre cas d’utilisation l’approche bottom-up utilisée fait que les services abstraits ont un pourcentage élevé de compatibilité. Finalement, le code du composant de liaison correspond à 541 lignes du total du code de l’application. Donc, il fait approximativement le 42% du code de l’application. Ce code est responsable de l’instanciation des proxies, l’invocation de médiators avant et après de consommer le service et de l’invocation du service en utilisant le proxy. En plus, lorsqu’une liaison retardée est utilisé le nombre de lignes augmente à 611, car le composant de liaison code doit en plus, invoquer le composant de sélection de services. 9.2 LE PROJET SODA 160 D’autre par, de l’analyse de lignes de code ajoutées pour supporter les propriétés de sécurité, nous remarquons qu’elles correspondent à 323 lignes, dans le deux cas liaison statique et dynamique. Ces lignes sont ajoutées seulement dans le composant de liaison, les autres types de code restent constants. Nous ne pouvons pas évaluer le nombre de lignes générées comme une mesure de la qualité du canevas. Cependant, intuitivement nous pouvons dire que le canevas aide de façon significative le travail du développeur. Par exemple, dans la première version de l’application comportant les propriétés de sécurité, nous avons développé le code assurant ces propriétés à la main. C’était une tâche complexe et de bas niveau, avec l’extension faite, le canevas génère tout le code et aucune modification de ce code n’est nécessaire Expérience d’ajout de la sécurité Afin de valider le niveau d’opérabilité de l’extension de sécurité nous avons réalise une expérience. Pour la réalisation de cette expérience, trois scenarii de sécurité ont été définis, chaque scenario comporte des propriétés de sécurité différentes définies pour l’application. Le point de départ de chaque scenario est l’application de surveillance d’usine complètement fonctionnelle, mais sans aucune propriété de sécurité établie. Un ensemble de développeurs seront chargés de définir les propriétés de sécurité pour l’application. Ces développeurs ne connaissent pas le canevas FOCAS au moment de définir les propriétés de sécurité, et ils ne sont pas non plus des experts dans les technologies de sécurité. Les temps de spécification pour chaque scenario seront mesurés. Puis, les mêmes utilisateurs vont à nouveau réaliser l’expérience, cette fois-ci avec un niveau d’expertise supérieur puisqu’ils l’ont fait déjà une fois. Les scénarios sont résumés dans le tableau de la Figure 97. Pour chaque paire activitéservice une propriété de sécurité (ou aucune) a été définie. Le développeur doit spécifier cette propriété en utilisant l’extension du canevas présentée auparavant (voir section 9.2.3). Nous avons donnée les détails techniques associés à chaque propriété de sécurité dans le document du protocole à suivre pour réaliser l’expérience, une introduction au canevas FOCAS est aussi ajoutée dans ce document afin de préparer ce développeur à son utilisation. Activité Acquisition Temperature1 Temperature2 Humidity Analysis Storage Processing SendNotification Action Service GetData GetData GetData DoAverage Store Scenario 1 Scenarii Scenario 2 Scenario 3 Confidentialité Aucune Confidentialité Authentification Intégrité Confidentialité Aucune Confidentialité Authentification Aucune Aucune Aucune cune Authentification Intégrité SendNotification Intégrité Intégrité SendCommand Authentification Confidentialité Figure 97. Aucune Authentification Scenarii de sécurité à spécifier. Les temps utilisés par les développeurs pendant la première session de l’expérience sont présentés dans le tableau de la Figure 98. Scénario 1 2 3 D1 07:20 05:07 01:55 D2 17:58 09:42 04:08 Figure 98. D3 14:39 08:39 04:08 Développeurs D4 D5 17:10 11:24 09:25 07:37 03:00 02:28 D6 14:45 09:01 04:39 D7 13:30 07:34 04:38 D8 Moyenne 09:59 13:20 05:32 07:49 02:06 03:22 Temps résultat de l’expérience niveau débutant. 161 VALIDATION ET EVALUATION Les temps utilisés par les développeurs pendant la deuxième session de l’expérience sont présentés dans le tableau de la Figure 99 Scénario 1 2 3 D1 03:40 04:05 01:27 D2 06:20 06:19 02:51 Figure 99. D3 05:45 04:53 02:28 Développeurs D4 D5 05:14 05:40 04:48 07:02 02:25 01:53 D6 05:53 07:13 02:27 D7 05:43 05:58 02:31 D8 Moyenne 04:34 05:21 04:10 05:33 01:18 02:10 Temps résultat de l’expérience niveau expert. D’après les résultats nous pouvons observer que les temps mis pour la deuxième session ont diminué significativement par rapport à la première. Ainsi le temps moyen pour réaliser le premier scénario était de 13 minutes 20 seconds pour la première session, et de 5 minutes 21 secondes dans la deuxième, une diminution d’approximativement 60% du temps employé est obtenue. Pour le scénario 2, la réduction du temps moyen a été de 29% approximativement, tandis que pour le scénario 3 elle a été de 35%. Afin d’avoir un point de référence permettant d’évaluer les temps utilisé pour mettre en place les scénarii dans FOCAS avec l’extension de sécurité, nous avons mesuré le temps mis par deux experts dans la technologie de sécurité pour implémenter les scénarios manuellement. La démarche a consisté à prendre le code de l’application et à le modifier pour ajouter le support des propriétés de sécurité. Les temps moyens pour les trois scenarios ont été de 23 minutes, 24 minutes et 15 minutes respectivement. Si nous comparons ces temps, avec ceux obtenues par les développeurs pendant la première session, la diminution a été de 44%, 71% et 80% pour les trois scénarios. Ensuite, pour la deuxième session cette diminution a été de 79%, 79% et 86% respectivement. Nous pouvons conclure, que notre extension fourni un support qui réduit significativement le temps de développement des orchestrations sécurisés. 9.2.5 Synthèse L’utilisation de notre canevas dans des projets européens, nous a permit d’une part de valider notre proposition, mais aussi nous a apporté des idées par rapport aux lignes de recherche à suivre. Etant donné que de vrais besoins sont identifiés, au niveau recherche nous visons à résoudre ce type de problèmes, plutôt que d’essayer de les identifier. La participation conjointe de partenaires industriels et académiques dans ce type de projets fournit un moyen de réaliser une recherche apportant des solutions aux problèmes présents dans le milieu industriel. Pour sa part, l’utilisation des prototypes de recherche dans des contextes industriels permet de valider les approches proposées par les académiques. Notre canevas a été utilisé dans les deux projets ITEA. Du projet S4ALL nous avons récupérer des besoins qui nous ont guidé dans l’amélioration de notre environnement de spécification CADSE-FOCAS. Du projet SODA, nous avons profité du cas d’utilisation pour mettre en place une orchestration avec des besoins particuliers. Ainsi, pour valider nos mécanismes d’extension, l’aspect de sécurité a été ajouté à notre canevas. Des expériences ont montré la pertinence de la alisation de l’extension.
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d9139e4762bd817d98f53dd9529535f9_12
French-Science-Pile
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Contenu en importations des exportations
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SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 163 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 1. Emploi 2. Liens entre services et secteur manufacturier 3. Taille et dynamique des entreprises 4. Spécialisation sectorielle 5. Filiales étrangères 6. Ouverture aux échanges 7. Contenu en importations des exportations 8. Spécialisation en R-D 9. Spécialisation technologique 10. Diffusion du commerce électronique 11. Entreprises déposant des brevets 12. Secteurs à forte intensité d’innovation 13. Performance technologique : qualité des brevets 14. Performance technologique : incidence des brevets Notes Références Aujourd’hui, les économies du savoir sont de plus en plus axées sur les services et s’appuient sur un nombre restreint de secteurs pour croître et soutenir la concurrence mondiale. Ce chapitre présente tout d’abord les caractéristiques des économies en termes de structure de l’emploi, l’influence des services dans la production manufacturière et le rôle des entreprises multinationales et des entreprises plus petites. De nouveaux indicateurs de spécialisation sectorielle sont également publiés, ils déterminent les secteurs qui contribuent le plus à une économie donnée. Les indicateurs du contenu en importations des exportations illustrent quant à eux la dépendance d’un pays envers d’autres économies pour subvenir à sa consommation et rivaliser sur les marchés d’exportation. Une série d’autres indicateurs examine en détail la spécialisation dans la R-D, l’importance du commerce électronique dans l’économie et la spécialisation technologique dans de nouveaux secteurs de croissance. Soutenir la concurrence dans l’économie mondiale suppose également l’existence d’entreprises dynamiques et innovantes. Ce chapitre met l’accent sur les entreprises qui déposent des brevets, y compris les plus jeunes, et inclut des indicateurs expérimentaux qui rapprochent les dépôts de brevets des données sur l’entreprise. Les secteurs innovants sont au cœur des économies compétitives ; une méthode d’élaboration d’une nouvelle taxonomie sectorielle est proposée ci-après, elle est basée sur l’innovation technologique et non technologique. Pour finir, de nouveaux indicateurs expérimentaux utilisant les données relatives aux brevets sont présentés sous la forme d’indices de la qualité et de l’impact des brevets en termes d’inventions radicales. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 165 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 1. Emploi L’emploi manufacturier et dans la construction a durement souffert de la crise récente, néanmoins les services ont connu un essor dans plusieurs pays de l’OCDE. En 2009, ils représentaient plus de 72 % de l’emploi dans la zone OCDE et près de 80 % au Royaume-Uni, aux Pays-Bas et aux États-Unis. L’emploi dans les services publics demeure important en 2009, atteignant en moyenne 30 % dans l’OCDE et dépassant 35 % en Scandinavie. Dans les pays fortement industriels ou agricoles comme la Pologne, la Slovénie et la Turquie, les services sont moins prépondérants bien qu’ils concentrent plus de la moitié de l’emploi total. Emploi dans les services, 2009 En pourcentage de l’emploi total Services du “secteur marchand” Services publics Industrie GBR NLD USA BEL Tous les secteurs créent ou exploitent de nouvelles technologies et connaissances, à divers degrés d’intensité technologique ou de savoir. Ce sont les principaux producteurs de biens et d’activités de haute technologie (notamment les services) qui utilisent intensément les technologies de pointe et/ou qui emploient une main-d’œuvre très qualifiée pour exploiter pleinement les innovations technologiques. NZL CAN FRA DNK ISR De 2000 à 2008, la part de l’emploi dans les services à forte intensité de savoir a généralement progressé principalement grâce aux services aux entreprises (informatiques, juridiques, d’ingénierie et autres services techniques) et à l’essor des secteurs financiers. Dans quelques pays, ces secteurs génèrent plus de 20 % de l’emploi. LUX NOR SWE AUS Par contraste, la part de la production manufacturière de haute et moyenne-haute technologie dans l’emploi des pays de l’OCDE est en constant recul, en raison des gains de productivité et du transfert de ces activités vers des pays non membres, y compris la délocalisation des entreprises multinationales. Cette baisse est très marquée en Irlande et au Royaume-Uni, tandis que la République tchèque, la République slovaque, la Hongrie et la Pologne enregistrent une hausse. ISL CHE DEU IRL OCDE AUT ESP FIN JPN GRC KOR Définitions ITA CHL Les services du secteur marchand correspondent aux divisions 50 à 74 de la CITI Rév. 3 ; les services du secteur public aux divisions 75 à 99 : Administration publique (75), Éducation (80), Santé (85), Autres activités de services collectifs, sociaux et personnels (90-93) et Ménages privés (95) ; l’industrie comprend les divisions 10-41 : Activités extractives (10-14), Activités de fabrication (15-37) et Électricité, gaz et eau (40-41). EST SVK HUN MEX PRT « Services marchands » à forte intensité de savoir : Postes et télécommunications (64), Intermédiation financière (65-67) et Activités de services aux entreprises (71-74). CZE SVN POL TUR 0 20 40 60 80 100 % Source : OCDE, Base de données sur les comptes nationaux annuels, juin 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491105 166 P ro d u it s m a n u fac t u r é s d e h a u te e t m oye n n e - h a u t e technologie : Produits chimiques (24), Machines et matériel n.c.a. (29), Équipement électrique et optique (30-33) et Matériels de transport (34-35) – déterminés par analyse de l’intensité sectorielle de R-D (dépenses de R-D rapportées à la production) pour un ensemble de pays de l’OCDE. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 1. Emploi L’emploi dans les services « marchands » à forte intensité de savoir, 2008 En pourcentage de l’emploi total % 30 Activités de services aux entreprises hors immobilier Intermédiation financière Postes et télécommunications Part totale dans l’année 2000 25 20 15 10 5 T C ES N GR K HU SV ES P E N FI CZ T AU N L JP IR N SV R IT A E NO L K SW DN NZ U DE 6) E AU S (2 00 CH US A N A CA FR L R GB BE D NL LU X 0 Source : OCDE, Base de données pour l’analyse structurelle (STAN), mai 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491124 L’emploi dans les industries manufacturières de haute et moyenne-haute technologie, 2000 et 2008 En pourcentage de l’emploi total 2008 % 12 2000 10 8 6 4 2 X C GR N CA LU D NL A US R GB A FR L BE P T ES ES L IR K L PO DN T AU IT A N FI E SW N JP E CH N SV K U DE SV N HU CZ E 0 Source : OCDE, Base de données pour l’analyse structurelle (STAN), mai 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491143 Mesurabilité Si l’on utilise une définition sectorielle, la distinction entre services marchands et services publics est approximative. Dans les pays de l’OCDE, des services privés d’éducation et de santé sont disponibles à des degrés divers, tandis que certains services postaux et de transport demeurent dans la sphère publique. Il existe des méthodes reconnues pour classer les activités de fabrication selon leur intensité technologique (par exemple, en mesurant les dépenses de R-D directes et indirectes, ou incorporées, par rapport à la production), mais il s’avère plus difficile de déterminer les secteurs de services « à forte intensité de savoir ». Étant donné que de nombreux services mènent des activités assez limitées de R-D formelle, il faut utiliser d’autres indicateurs, comme la structure de compétences de la maind’œuvre et l’intensité de l’investissement dans les équipements de TIC. Des travaux récents ont porté sur l’utilisation de données issues d’enquêtes sur l’innovation. L’élaboration de ces classifications doit également tenir compte du niveau de désagrégation sectorielle des données réunies pour analyse. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 167 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 2. Liens entre services et secteur manufacturier Les emplois liés aux services dans le secteur manufacturier, 2000 and 2008 En pourcentage des salariés du secteur manufacturier 2000 2008 USA (2003, 2008) GBR CHE DNK NLD FRA Ces dernières décennies ont vu décliner la production manufacturière dans de nombreux pays de l’OCDE. Désormais, les services représentent en moyenne près de 70 % du PIB de l’OCDE. Aux États-Unis et au Royaume-Uni, l’emploi manufacturier est inférieur à 10 % de l’emploi total. Dans ce contexte, la nature et la portée des activités de fabrication ont changé dans de nombreux pays, et les secteurs autrefois dominés par des métiers spécialisés – conducteurs de machines, ouvriers de chaîne de montage, etc. – sont de plus en plus dépendants des métiers de service et de la consommation intermédiaire des services. Cette évolution reflète l’utilisation croissante de la technologie dans la production, de l’approvisionnement international d’intrants intermédiaires plus complexes et des facteurs sociaux (comme les changements de la structure des compétences des populations). Il est difficile de mesurer l’interdépendance des services et du secteur manufacturier. Toutefois, les indicateurs présentés ici donnent à penser que pour de nombreux pays, la part des activités de service nécessaires à la production manufacturière a augmenté au cours des dernières années. BEL NOR DEU Les données relatives aux professions montrent une constante augmentation, depuis dix ans, de la part des salariés du secteur manufacturier occupant des emplois liés aux services - les gestionnaires, entrepreneurs, financiers et juristes. En 2008, leur part dans la zone OCDE atteignait en moyenne 35 %, avec des variations allant de 18 % (la Pologne) à 52 % (les États-Unis). AUS IRL FIN Les estimations fondées sur les tableaux d’entrées-sorties « harmonisés » de l’OCDE peuvent mesurer les services intégrés dans une unité de demande finale de produits manufacturés. La contribution de la valeur ajoutée des services nécessaire pour satisfaire la demande de biens manufacturés varie entre 10 % et 30 %, ce qui montre là encore la nature symbiotique de ces deux secteurs. Entre 1995 et 2005, la Pologne, la Turquie et les États-Unis ont enregistré une hausse substantielle du total des services incorporés dans la production manufacturière. De telles évolutions peuvent traduire une réorientation de la structure industrielle d’un pays vers des produits manufacturiers à plus forte intensité de service. SWE (2000, 2007) AUT ITA JPN (2003, 2008) CZE SVN (2000, 2007) ISL GRC ESP CAN Définitions HUN Les emplois liés aux services comprennent les classes CITP88 suivantes : 1, « Membres de l’exécutif et des corps législatifs, cadres supérieurs de l’administration publique, dirigeants et cadres supérieurs d’entreprise » ; 2, « Professions intellectuelles et scientifiques » ; 3, « Professions intermédiaires », 4, « Employés de type administratif » ; et 5, « Personnel des services et vendeurs de magasin et de marché ». Le secteur manufacturier recouvre les divisions 15 à 37 de la CITI Rév. 3 (NACE Rév. 1). SVK LUX EST TUR PRT POL 0 10 20 30 40 50 60 % Source : Calculs de l’OCDE à partir de données empruntées à différentes sources : Enquête de l’Union européenne sur la population active, Current Population Survey des États-Unis, enquêtes australienne, canadienne et japonaise sur la population active, mai 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491162 168 SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 2. Liens entre services et secteur manufacturier Valeur ajoutée du secteur des services incorporée dans la production manufacturière, 1995 et 2005 En pourcentage de la valeur ajoutée totale des produits manufacturés dans la demande finale 2005 % 40 1995 30 20 10 A N AU S ZA F IN D DE U IT A PO L CH L GB R SW E GR C BR A TU R NO R ES P DN K BE L NL D M EX AU T PR T FI N CA N CH N TW N KO R CZ E SV N ES T IS R ID N LU X HU N SV K TH A IR L JP FR US A 0 Source : OCDE, Base de données STAN des entrées-sorties, mai 2011. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491181 Mesurabilité Dans une analyse des entrées-sorties, les services nationaux indirectement incorporés dans des biens manufacturés produits pour la demande finale peuvent être calculés comme suit : v( I  A) 1 y  Où v est un vecteur 1 × n ayant pour composantes vj (la valeur ajoutée rapportée à la production du secteur j, pour les industries de services et zéro pour les autres), y’ est le vecteur 1 × n de la demande finale satisfaite par des biens produits dans le pays, les produits non manufacturés comptant pour zéro, et A est une matrice de coefficients décrivant le rapport entre les intrants de l’industrie i utilisés pour la production de l’industrie j. De même, les services importés incorporés dans des biens manufacturés sont égaux à : m( I  A) 1 y  où m est un vecteur 1 x n ayant pour composantes le ratio d’importation pour les industries de service et zéro pour les autres. Ainsi, le pourcentage de demande finale de produits manufacturés correspondant à la valeur ajoutée du secteur des services d’origine nationale et des importations se calcule comme suit : v( I  A) 1 y  /  y  et m( I  A) 1 y  /  y  L’examen distinct des services d’origine nationale et des services importés révèle une augmentation générale des services importés incorporés dans la production manufacturière nationale, malgré un faible niveau de départ, à environ 2 %. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 169 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 3. Taille et dynamique des entreprises La dynamique des entreprises détermine fortement la croissance de la productivité globale d’une économie et influe sur la capacité d’un pays à soutenir la concurrence mondiale. L’observation des liens entre la taille et la dynamique des entreprises donne des résultats contrastés, mais dans tous les pays, les petites et moyennes entreprises (PME) jouent un rôle essentiel et sont des moteurs de l’emploi et des revenus. Dans la zone OCDE, les PME emploient plus de la moitié de la main-d’œuvre du secteur privé. Dans l’Union européenne, elles représentent plus de 99 % de l’ensemble des entreprises. Dans la plupart des pays de l’OCDE, les PME de 1 à 9 salariés, également appelées micro-entreprises, concentrent plus de 80 % des entreprises. Micro-entreprises, 2007 En pourcentage du nombre total d’entreprises GRC AUS (2006) MEX (2003) POL CZE PRT ITA Malgré la forte présence des micro-entreprises, les sociétés comptant plus de 250 salariés génèrent une part considérable de la valeur ajoutée du secteur des entreprises. En 2007, ces firmes ont créé plus de 70 % de la valeur ajoutée au Brésil et au Luxembourg. HUN SWE NZL Toute forme d’entrepreneuriat constitue un facteur essentiel à l’économie, soit par l’exercice d’une activité indépendante, soit par la création de PME, mais les entreprises à forte croissance contribuent le plus à la productivité, à la croissance économique et à la création d’emplois. Elles sont également une source d’innovation radicale et à forte incidence, et un acteur incontournable de l’écosystème de l’entrepreneuriat. Elles contribuent directement à la croissance par l’introduction et l’adoption de nouvelles technologies, et indirectement par les pressions concurrentielles qu’elles exercent sur les entreprises en place. FRA FIN SVN ESP BEL ISL (2005) NLD Malgré leur importance dans l’économie, les entreprises à forte croissance (mesurées d’après leurs effectifs) représentent en moyenne une petite fraction de la population totale des entreprises. En 2007, et dans la plupart des pays pour lesquels on dispose de données, leur part était plus forte dans les services que dans les industries de fabrication. NOR GBR AUT DNK EST DEU USA (2006) ISR Définitions LUX Les micro-entreprises ont entre 1 et 9 salariés. Les entreprises à forte croissance, mesurées d’après leurs effectifs, affichent une augmentation annuelle moyenne du nombre de salariés de plus de 20 % sur une période de trois ans, et comptent au moins 10 salariés au début de la période d’observation. La part des entreprises à forte croissance correspond au nombre d’entreprises à forte croissance en pourcentage de la population des entreprises d’au moins 10 salariés. Pour définir les entreprises à forte croissance, le Programme d’indicateurs de l’entrepreneuriat de l’OCDE fixe le seuil de taille à 10 salariés au début de la période d’observation afin d’éviter le biais induit par une petite classe de taille que la définition d’une forte croissance implique inévitablement. BRA SVK KOR (2006) IRL JPN 0 20 40 60 80 100 % Source : OCDE (2011), Panorama de l’entrepreneuriat 2011, Éditions OCDE, Paris. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491200 170 SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 3. Taille et dynamique des entreprises Valeur ajoutée par classe de taille, 2007 1-9 employés % 100 10-19 employés 20-49 employés 50-249 employés 250+ employés 80 60 40 20 L X IR A LU N BR K JP N SV 6) HU R (2 M KO R EX S AU 00 U IS 3) DE R 00 T AU (2 (2 E CZ GB L BE N E FI D SW T NL L ES A PO K FR N T DN SV P PR 6) ES 00 R NO GR IT A C 0 Source : OCDE (2011), Panorama de l’entrepreneuriat 2011, Éditions OCDE, Paris. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491219 Entreprises à forte croissance (en termes d’effectifs), 2007 En pourcentage de la population des entreprises ayant au moins 10 salariés Secteur manufacturier % 12 Secteur des services 10 8 6 4 2 IT A T PR D (2 R NO R IS NL 6) X LU 00 P L NZ ES E N CA SW N SV K DN N HU 8) E CZ 00 (2 T ES A US A BR (2 00 SV 6) K 0 Source : OCDE (2011), Panorama de l’entrepreneuriat 2011, Éditions OCDE, Paris. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491238 Mesurabilité Le Programme d’indicateurs de l’entrepreneuriat (PEI) de l’OCDE s’appuie sur des données provenant des registres nationaux d’entreprises. Ces registres ont pour objectif de couvrir la totalité des entreprises dans un pays, cependant des différences existent en termes de couverture, dues à des circonstances nationales et au manque de données. Pour préserver la comparabilité internationale de ses indicateurs, le PEI coopère étroitement avec les offices nationaux des statistiques. On évalue généralement la croissance des entreprises en fonction de leurs ventes et de leurs effectifs. Les mesures fondées sur les effectifs sont moins problématiques que celles calculées à partir des ventes, lesquelles subissent notamment des variations de prix. Les effectifs devraient être comptabilisés en équivalents temps plein plutôt qu’en nombre de salariés, mais de nombreux pays ne collectent pas cette information dans leurs registres d’entreprises. En outre, les variations des données relatives aux ventes et aux effectifs ne reflètent pas toujours la croissance organique des entreprises ; ces changements peuvent être induits par des événements tels que des fusions ou des acquisitions. Pour établir des statistiques comparables sur la démographie des entreprises, le PEI procède, dans la mesure du possible, à des corrections qui tiennent compte de ces facteurs endogènes. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 171 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 4. Spécialisation sectorielle Spécialisation sectorielle, 1998 et 2008 Indice Hannah-Kay calculé pour un thêta égal à 2 2008 1998 x > 10 : Diversification 6 < x < 10 : Diversification modérée x < 6 : Spécialisation modérée KOR CZE SVK SVN Une économie est dite « spécialisée » si un petit nombre de secteurs génère une part relativement élevée du PIB de ce pays, et « diversifiée » si chacun des secteurs relativement nombreux représente une faible part du PIB. Les schémas de spécialisation ou de diversification sectorielle d’une économie sont liés à sa productivité de long terme, sa résilience face à une crise, ses caractéristiques d’investissement, sa capacité d’innovation et les performances de ses entreprises et branches d’activité. L’indice de diversification Hannah-Kay (HK) reflète la composition des secteurs d’un pays et l’influence des plus grandes branches d’activités. Un HK faible dénote une spécialisation sectorielle croissante. L’indice de concentration indique la part de la valeur ajoutée créée par les quatre plus grands secteurs de l’économie. Ces dix dernières années, la majorité des pays est devenue davantage spécialisée. Les économies diversifiées affichent un indice HK supérieur à 10 (République tchèque et Corée en 1998 et 2008) ; les moins diversifiées un indice entre 6 et 7 (France, Luxembourg et États-Unis en 1998 et 2008 ; Norvège, Israël, Belgique, Allemagne et Royaume-Uni en 2008). De 1998 à 2008, la Norvège a connu la plus forte spécialisation sectorielle (l’indice HK baissant de près de 40 %). En 2008, seule la Pologne est un peu plus diversifiée qu’en 1998, tandis qu’en Corée, l’indice HK a fluctué mais est resté pratiquement inchangé entre 1998 et 2008. MEX POL (2007) AUT CAN (2007) HUN ESP CHE Le Commerce de gros et de détail et les Activités de services aux entreprises figurent invariablement parmi les quatre principaux secteurs par rapport à la valeur ajoutée créée. La taille des deux premiers secteurs varie selon les pays : en Norvège, le secteur des activités extractives est trois fois plus grand que le deuxième secteur, alors qu’en Espagne, les principales branches d’activité sont de taille plus homogène. Dans les pays du G7, le ratio de concentration s’est accru ces 30 dernières années ; les quatre premiers secteurs représentent en moyenne 55 % de la valeur ajoutée totale. FIN IRL EST GRC JPN DNK ITA SWE NLD GBR (2007) DEU Définition BEL USA ISR NOR FRA LUX 0 2 4 6 8 10 12 Indice de diversification Source : OCDE, Base de données pour l’analyse structurelle (STAN), mai 2011, Paris. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491257 172 Le HK (2) est calculé pour un  (thêta) égal à 2, valeur pour laquelle il est égal à l’inverse de l’indice de Herfindahl.  détermine dans quelle mesure l’indice est influencé par les plus grands secteurs. L’indice HK(2) est calculé pour 20 branches d’activité et sa valeur varie de 1 à 20. Un pays peut être diversifié si le HK(2) est supérieur à 10, modérément diversifié si le HK(2) est compris entre 10 et 6, modérément spécialisé si le HK(2) est compris entre 6 et 4 et spécialisé si le HK(2) est inférieur à 4. Le ratio de concentration sectorielle CR(4), calculé pour les quatre principaux secteurs d’une économie, correspond à la part cumulée de ces secteurs en pourcentage de la valeur ajoutée créée. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 4. Spécialisation sectorielle Part de la valeur ajoutée des quatre plus grands secteurs, 2008 En pourcentage de la valeur ajoutée totale (hors immobilier et secteur public) 50-52 : Commerce de gros et de détail – réparation 71-74 : Activités de services aux entreprises hors immobilier 60-64 : Transports, entreposage et communications 45 : Construction 65-67 : Intermédiation financière 23-25 : Prod. chimiques caoutchouc plastiques et pétroliers % 80 10-14 : Activités extractives 55 : Hotels et restaurants Somme en 2000 60 40 20 R E N KO CZ T HU AU IT A 7) U (2 00 N DE K FI N SV N JP EX SV P ES M K E DN R SW 7) 00 N (2 CA IR L (2 R GB (2 R NO IS D E NL T CH 7) ES A 00 C US L GR BE A FR 00 LU X 7) 0 Source : OCDE, Base de données pour l’analyse structurelle (STAN), mai 2011, Paris. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491276 Part de la valeur ajoutée des quatre plus grands secteurs, 1980-2009 En pourcentage de la valeur ajoutée totale (hors immobilier et secteur public) % 65 Canada France Allemagne Italie Japon Corée Royaume-Uni États-Unis 60 55 50 45 40 09 9 19 9 20 8 19 9 08 7 19 9 20 6 19 9 07 5 19 9 20 4 19 9 06 3 19 9 20 2 19 9 05 1 19 9 20 0 19 9 04 9 19 8 20 8 19 8 03 7 19 8 02 6 19 8 20 5 19 8 01 4 19 8 20 3 19 8 00 2 19 8 20 1 19 8 20 0 19 8 0 Source : OCDE, Base de données pour l’analyse structurelle (STAN), mai 2011, Paris. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491295 Mesurabilité Compte tenu des contraintes de disponibilité et de couverture des données, et pour garantir la comparabilité entre les pays et dans la durée, les secteurs sont pris en compte individuellement (ex. 45 désigne le secteur de la construction) ou à un niveau agrégé (ex. 65-67 désigne le secteur de l’intermédiation financière). Les indicateurs HK(2) et CR(4) englobent 20 principales branches d’activité. La valeur ajoutée est mesurée aux prix courants et les secteurs non marchands sont exclus des calculs. Des niveaux différents d’agrégation sectorielle, d’autres périodes de référence, mesures de la valeur ajoutée et paramètres modifieraient les résultats. Une désagrégation sectorielle plus poussée améliore la capacité des indicateurs HK et CR à cerner les principaux secteurs et les grandes tendances. Les indicateurs doivent être considérés comme étant à un stade expérimental. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 173 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 5. Filiales étrangères Les filiales étrangères contribuent à la compétitivité internationale du pays qui les accueille de diverses manières. Elles permettent aux fournisseurs et acheteurs nationaux d’accéder à de nouveaux marchés et à de nouvelles technologies, diffusent du savoir dont profitent les entreprises du pays hôte et investissent une grande part de leurs recettes dans la R-D. Elles génèrent une part importante de l’emploi, du chiffre d’affaires et de la valeur ajoutée du pays hôte. En 2008, la part de l’emploi sous contrôle étranger dans les pays de l’OCDE allait de 5 % à 35 % ; la part des filiales étrangères dans la valeur ajoutée était encore plus élevée. Cela est dû, en partie, au fait que les entreprises multinationales sont souvent présentes dans des secteurs à haut potentiel d’économies d’échelle et à forte intensité de capital. Les entreprises sous contrôle étranger sont davantage implantées dans de petits pays comme la République tchèque, la République slovaque et la Hongrie, où leur présence a beaucoup augmenté depuis une dizaine d’années, tandis qu’elles représentent une part beaucoup plus faible de l’activité totale aux États-Unis et en Italie. Répartition de l’emploi sous contrôle étranger par grande catégorie sectorielle, 2008 Secteur manufacturier Autres secteurs Secteur des services SVK (2007) HUN (2007) POL CZE (2007) SVN EST En 2008, dans la plupart des pays de l’OCDE, la part de l’emploi sous contrôle étranger était la plus élevée dans le secteur des services. Cette importance croissante s’explique par la réorientation des activités de fabrication des économies les plus développées vers des activités de services, l’essor du commerce des services grâce aux progrès des TIC et la mise en place de politiques plus ouvertes concernant l’investissement étranger dans les services. FRA ISR (2007) DEU CHE L’emploi des filiales étrangères dans le secteur manufacturier est beaucoup plus important dans les pays d’Europe centrale. Ces dix dernières années, de nombreuses entreprises d’Europe occidentale ont délocalisé leurs unités de production en République slovaque, République tchèque, Hongrie et Pologne, notamment après l’adhésion de ces pays à l’Union européenne. JPN (2007) USA ITA SWE PRT AUT FIN ESP Définitions GBR (2007) DNK (2007) NLD NOR 0 20 40 60 80 100 % Source : OCDE, Bases de données sur les activités des filiales étrangères (AFA), sur le commerce des services des filiales étrangères (FATS) et sur l’activité des entreprises multinationales (AMNE), mai 2011 ; Base de données NewCronos d’Eurostat, avril 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491314 174 Les « filiales étrangères » désignent uniquement les filiales sous contrôle étranger. Le contrôle repose sur la capacité de nommer une majorité d’administrateurs habilités à diriger une entreprise et à déterminer sa stratégie. Très souvent, cette capacité peut être exercée par un investisseur unique détenant plus de 50 % des actions avec droits de vote. L’ensemble des activités d’une entreprise (chiffre d’affaires, effectifs, valeur ajoutée) peut ainsi être attribué à l’investisseur qui contrôle la société. Un investisseur (société ou particulier) est considéré comme exerçant le contrôle ultime s’il est à la tête d’une chaîne de sociétés et contrôle directement ou indirectement toutes les entreprises de la chaîne, sans être lui-même contrôlé par aucune autre entreprise ou aucun autre particulier. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 5. Filiales étrangères Part de l’emploi national contrôlé par les filiales étrangères, 2000 et 2008 2008 % 40 2000 30 20 10 A US 1) IT A (2 20 00 07 ) 3) R (2 ES 00 P 2, (2 00 00 3) 3) (2 T PR SV CH N E (2 (2 00 00 3) 3) 00 (2 A D NL FR N FI (2 (2 00 00 3) 3) ) 07 U 4, (2 IS R GB HU SV 20 DE 4) DN 00 T AU K (2 (2 00 00 3) R E SW NO L PO ) 07 ) 00 K N (2 (2 00 00 (2 E CZ 20 3, 20 07 2, 3, 20 00 (2 T ES 07 ) 3) 0 Source : OCDE, Bases de données sur les activités des filiales étrangères (AFA), sur le commerce des services des filiales étrangères (FATS) et sur l’activité des entreprises multinationales (AMNE), mai 2011 ; Base de données NewCronos d’Eurostat, avril 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491333 Part de la valeur ajoutée nationale contrôlée par les filiales étrangères, 2000 et 2008 2000 2008 % 50 40 30 20 10 A US 1) 00 (2 (2 (2 P IT A 00 00 3) 3) ) 07 N ES (2 R IS SV 2, (2 00 T PR 3, 00 N (2 20 00 07 20 00 (2 FI A FR 3) ) 3) 7) 00 K DN T (2 (2 00 00 3) 3) ) D AU (2 R GB NL 3, 00 T ES (2 20 DE 07 U E SW L R NO 00 (2 PO 3) ) 07 20 3, 00 SV K (2 (2 E CZ HU N (2 00 00 2, 3, 20 20 07 07 ) ) 0 Source : OCDE, Bases de données sur les activités des filiales étrangères (AFA), sur le commerce des services des filiales étrangères (FATS) et sur l’activité des entreprises multinationales (AMNE), mai 2011 ; Base de données NewCronos d’Eurostat, avril 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491352 Mesurabilité La part des filiales étrangères dans l’emploi du pays hôte peut traduire l’importance de l’investissement direct étranger pour le maintien et/ou la création d’emplois dans un pays déclarant, mais elle ne permet pas d’évaluer la création nette d’emplois attribuable à l’investissement étranger dans le pays. La valeur ajoutée désigne la part de la production d’une entreprise créée par l’entreprise elle-même. Elle constitue donc un meilleur indicateur que le chiffre d’affaires car les filiales étrangères acquièrent l’essentiel de leurs biens intermédiaires au sein de leur réseau multinational. Les données proviennent de la Base de données sur l’activité des entreprises multinationales (AMNE), qui réunit des données comparables sur les performances des filiales étrangères et des sociétés mères dans le secteur des services aux entreprises. Elle contient 17 variables ventilées par pays d’origine (investissement entrant) ou d’accueil (investissement sortant) et par secteur d’activité (fondé sur la CITI Rév. 4). Ces données mesurent l’incidence de l’investissement direct étranger sur les économies des pays de l’OCDE. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 175 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 6. Ouverture aux échanges L’impact de la crise économique sur les échanges internationaux peut se mesurer en comparant les exportations et les importations en pourcentage du PIB, entre 2008 et 2009. Si le PIB a été durement touché dans de nombreux pays, le commerce international a davantage souffert. Après une hausse généralisée du ratio échanges/PIB de 2000 à 2008, tous les pays de l’OCDE (hormis l’Irlande et l’Islande) et les BRIICS (Afrique du Sud, Brésil, Chine, Fédération de Russie, Inde et Indonésie) ont vu ce ratio baisser en 2009, du fait de la chute du commerce des marchandises, pour parfois atteindre un niveau inférieur à celui du début de la décennie. Moyenne des exportations et des importations en pourcentage du PIB, 2000, 2008 et 2009 2009 2000 2008 IRL HUN SVK BEL CZE NLD Pour le Canada, l’Estonie, l’Irlande et la Nouvelle-Zélande, ainsi que l’Indonésie et la Fédération de Russie, la baisse de l’importance relative des échanges est antérieure à 2008 et en partie due à l’expansion et aux transformations de leur économie nationale. EST SVN ISL AUT En 2009, le ratio moyen échanges/PIB dans la zone OCDE était d’environ 41 %, près du double de celui des BRIICS ; ce qui s’explique en partie par le fait que l’OCDE compte beaucoup d’économies relativement petites. Si l’on analyse l’OCDE comme une moyenne unique, avec une pondération supérieure pour les États-Unis et le Japon, on obtient un ratio plus proche de 20 %, analogue à celui des BRIICS. KOR CHE DNK SWE OCDE POL Malgré une baisse sensible en 2009, le commerce des biens demeurent la principale voie d’intégration économique pour de nombreux pays. Il représente en moyenne trois fois la valeur des échanges de services dans les pays de l’OCDE, et plus de quatre fois celle des BRIICS. La crise a toutefois beaucoup moins pénalisé les échanges de services que ceux de biens ; rares sont les pays à avoir enregistré une chute du ratio échanges de services/PIB. DEU FIN CHL NOR ISR PRT CAN Les échanges internationaux de services continuent de croître. Des pays comme l’Irlande et l’Inde sont particulièrement actifs dans ce domaine. GBR MEX ZAF NZL CHN ESP GRC ITA Définitions RUS FRA TUR IND IDN BRIICS AUS USA JPN BRA 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 % Source : OCDE, Base de données sur les comptes nationaux annuels, juin 2011 ; Fonds monétaire international, Perspectives de l’économie mondiale et balance des paiements, mai 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491371 176 Le ratio échanges/PIB est utilisé pour mesurer l’importance des transactions internationales vis-à-vis des transactions nationales. Pour chaque pays, cet indicateur est la moyenne simple du total des échanges (somme des exportations et des importations de biens et de services) rapporté au PIB. Ce ratio est souvent appelé degré d’ouverture des échanges, bien que le terme « ouverture » soit trompeur car un ratio faible ne signifie pas nécessairement que le pays a dressé des barrières douanières élevées (tarifaires ou non tarifaires) à l’encontre du commerce extérieur. Il peut être imputable à la taille du pays et à l’éloignement géographique de ses éventuels partenaires commerciaux. Pour l’OCDE et les BRIICS, les moyennes non pondérées des ratios nationaux illustrent la part d’un pays type de l’OCDE plutôt qu’une part globale et déséquilibrée notamment par les États-Unis et le Japon. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 6. Ouverture aux échanges Moyenne des exportations et des importations de biens en pourcentage du PIB, 2000, 2008 et 2009 2009 % 80 2008 2000 70 60 50 40 30 20 10 SV K HU N CZ E BE L NL D SV N ES T KO R IR L AU T CH E PO L DE U SW OC E DE IS L CH L DN K M EX FI N NO R PR T CA N IS R ZA F CH N NZ L RU S TU R ID N GB R IT A FR BR A IIC S ES P IN D GR C AU S JP N US A BR A 0 Source : OCDE, Base de données sur les comptes nationaux annuels, juin 2011 ; Fonds monétaire international, Perspectives de l’économie mondiale et balance des paiements, mai 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491390 Moyenne des exportations et des importations de services en pourcentage du PIB, 2000, 2008 et 2009 % 2009 2008 2000 45 40 35 30 25 20 15 10 5 IT A ZA F RU S AU S TU BR R IIC S ID N US A CH N BR A JP N M EX FI N SV N CZ OC E DE IS R NO R GB R SV K GR C KO R ES P DE U IN D PR T NZ L PO L CH L CA N FR A IS L ES T DN K BE L NL D SW E HU N CH E AU T IR L 0 Source : OCDE, Base de données sur les comptes nationaux annuels, juin 2011 ; Fonds monétaire international, Perspectives de l’économie mondiale et balance des paiements, mai 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491409 Mesurabilité La valeur des échanges internationaux de biens et de services des pays reflète leur degré d’intégration dans l’économie mondiale. Les petits pays sont généralement mieux intégrés : leurs exportations se concentrent généralement dans un petit nombre de secteurs et ils ont besoin, pour satisfaire leur demande intérieure, d’importer davantage de biens et de services que les grands pays. La taille n’est toutefois pas l’unique déterminant de l’intégration commerciale. D’autres facteurs contribuent à expliquer les différences entre pays : la géographie, l’histoire, la culture, la politique commerciale, la structure de l’économie (et notamment le poids des services non exportables) et l’intégration dans les chaînes de production mondiales, dans lesquelles les échanges mesurés peuvent comporter une fraction importante de réexportations et d’échanges intra-entreprises liés à la présence d’entreprises multinationales. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 177 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 7. Contenu en importations des exportations Contenu en importations des exportations, 1995 et 2005 En pourcentage du total des exportations 2005 1995 LUX HUN EST IRL SVK Le « contenu en importations des exportations » (proposée par Hummels et al., 2001) illustre la fragmentation internationale grandissante des processus de production. Les tableaux « harmonisés » de l’OCDE sur les entrées-sorties montrent les schémas des transactions intersectorielles ; combinés au commerce bilatéral par secteur, ils permettent d’estimer la valeur des biens et services intermédiaires incorporés aux exportations. Cet indicateur illustre les importations nécessaires pour satisfaire la demande d’exportations, mais ses variations traduisent aussi l’évolution de la valeur ajoutée nationale créée par les activités exportatrices. La part des importations incorporée aux exportations est souvent plus élevée dans les petites économies. L’existence d’une grande variété de biens intermédiaires nationaux permet aux grands pays de moins importer de produits intermédiaires, comme les biens de base, pièces et composants, pour produire des biens exportés. Les exportations de pays dotés de vastes ressources naturelles, comme l’Australie, la Norvège, l’Afrique du Sud et la Fédération de Russie, ont un plus faible contenu en importations, car les activités extractives nécessitent moins de biens de consommation intermédiaire. Les biens d’équipement importés, comme les machines et matériels, ne sont ici pas analysés. CZE SVN BEL PRT KOR FIN ISR MEX De 1995 à 2005, le contenu en importations a augmenté dans la plupart des pays observés dû à l’augmentation du taux de pénétration des importations de nombreux biens intermédiaires. Toutefois, selon l’analyse des facteurs réalisée par Meng et al. (2011), les variations dans la composition des biens exportés ont également influé sur l’évolution du contenu en importations ; les exportations des secteurs à forte intensité de main-d’œuvre et de ressources ont notamment reculé au profit de l’industrie mécanique destinée à l’assemblage. DNK NLD AUT ESP SWE POL ITA Une méthodologie analogue permet d’estimer les importations directes et indirectes de biens intermédiaires destinés à la consommation finale des ménages. La part du contenu en importations de la consommation des ménages a généralement augmenté de 1995 à 2005, réduisant la contribution de la valeur ajoutée nationale. Comparés aux pays de l’OCDE, la Chine, l’Inde et le Brésil ont une part du contenu en importations indirectes relativement élevée dû à une moindre pénétration des importations de biens et services finaux pour à la consommation des ménages. CAN CHN DEU FRA GRC TUR GBR IND IDN NOR Définitions JPN Le contenu en importations des exportations (parts de spécialisation verticale) représente la part des importations totales de biens intermédiaires utilisée dans la production des exportations totales d’un pays. L’agrégat de spécialisation verticale est ventilé par pays d’approvisionnement des importations à l’aide des échanges bilatéraux de biens et services. ZAF BRA AUS USA NZL RUS 0 10 20 30 40 50 60 70 % Source : OCDE, Base de données STAN des entrées-sorties, mai 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491428 178 SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 7. Contenu en importations des exportations Contenu de la consommation finale des ménages en importations, 1995 et 2005 En pourcentage de la consommation finale des ménages % 60 Consommations intermédiaires, 2005 Importations directes, 2005 Consommations intermédiaires, 1995 Importations directes, 1995 50 40 30 20 10 IT A ZA F CH N AU S TU R M EX IN D US A JP N BR A NZ L RU S FI N CA N PO L GR C ES P KO R FR A DE U ID N IS R PR T AU T SW E GB R X IR L HU N BE L NO R DN K NL D SV LU K ES T CZ E SV N 0 Source : OCDE, Base de données STAN des entrées-sorties, mai 2011. Voir notes de chapitre. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932491447 Mesurabilité Le contenu en importations des exportations se calcule en utilisant les coefficients d’intrants nationaux et les matrices d’importations de la Base de données des entrées-sorties harmonisées de l’OCDE. Contenu en importations des exportations = u Am (I − Ad)−1 Ex u Ex où Am et Ad sont les matrices des coefficients d’intrants (n secteurs x n secteurs) respectivement des produits et services importés et des produits et services nationaux ; Ex est le vecteur d’exportations ; et u est un vecteur (1 x n) dont tous les éléments sont égaux à 1. Contenu de la consommation finale des ménages en importations = u (CPm) + u Am (I − Ad)−1 CPd u (CPd + CPm) où CPd et CPm sont respectivement les vecteurs de la consommation des ménages de produits et services nationaux et de produits et services importés. SCIENCE, TECHNOLOGIE ET INDUSTRIE : TABLEAU DE BORD DE L’OCDE 2011 © OCDE 2011 179 6. SOUTENIR LA CONCURRENCE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE 8. Spécialisation en R-D Pour comparer l’intensité totale de recherche et développement des entreprises (dépenses de R-D rapportées à la valeur ajoutée ou au PIB) entre pays, il faut tenir compte des différentes structures industrielles. D’importants écarts d’intensité de R-D existent au sein des secteurs, mais les caractéristiques inhérentes à certains secteurs peuvent bouleverser la structure industrielle du pays souhaitant accroître son intensité de R-D. L’indicateur ci-après montre comment des différences structurelles engendrent des différences d’intensité globale de R-D, et ce que serait l’intensité globale de R-D d’un pays s’il avait la même structure industrielle que la moyenne de l’OCDE.
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C‐ Création de la diversité de jonction La coupure des structures en épingles par Artemis va permettre à une autre protéine, exprimée spécifiquement par les lymphocytes, d'intervenir, la TdT (pour terminal deoxynucleotidyl transferase) (Figure 10 étape 3). TdT est une ADN polymérase qui interagit avec les protéines Ku au niveau de son domaine BRCT (pour BRCA1 C Terminus) (Mahajan et al. 1999) et ajoute de manière aléatoire des nucléotides aux extrémités 3' libres des séquences codantes. Ces nucléotides non génomiques sont appelés N‐nucléotides. Cette addition nucléotidique aux extrémités des séquences codantes augmente la diversité du répertoire TCR et BCR. Une étude a montré que des souris knock‐out pour TdT présentaient une diminution de la diversité du TCR d'environ dix fois par rapport aux souris contrôles (Cabaniols et al. 2001). Ce résultat montre l'importance de l'addition de N‐nucléotides par la TdT pour la création d'un répertoire TCR diversifié. L'activité de TdT est visible au niveau des jonctions V‐D et D‐J de la chaîne β ainsi qu'au niveau de la jonction V‐J de la chaîne α du TCR, même si son activité diminue fortement lors du réarrangement de la chaîne α (Cabaniols et al. 2001). En revanche TdT n'agit pas au niveau des jonctions des chaînes légères des Ig, l'enzyme intervient uniquement au niveau des jonctions V‐D et D‐J de la chaîne lourde des Ig (Benedict et al. 2000). Globalement, les activités des enzymes RAG, Artémis et TdT vont permettre d'augmenter la diversité au niveau des jonctions entre segments géniques, permettant ainsi de créer un répertoire naï de récepteurs à l'Ag déjà très diversifié. En revanche, il est important de souligner qu'en raison de la nature imprécise des enzymes intervenant dans ce processus, il est susceptible de produire des chaînes TCR/BCR non fonctionnelles. En effet, l'activité même des enzymes RAG, Artemis et TdT, qui aboutit à la délétion ou à l'insertion de nucléotides au niveau des jonctions, peut conduire dans deux tiers des cas à un décalage du cadre de lecture (Malu et al. 2012). Ce décalage du cadre de lecture est susceptible d'engendrer l'apparition d'un codon stop prématuré ou de modifier la séquence en acide aminé des régions constantes, aboutissant ainsi à la synthèse de chaînes non fonctionnelles. A. Seg. Jβ Seg. Jβ Segments Vβ (sous‐groupe 1) (sous‐groupe 2) Dβ1 Dβ2 Cβ1 Segments VH Segments JH Segments DH C C Cβ2 Cβ2 Réarrangement d'un segment D avec un segment J C C C Réarrangement d'un segment V avec les segments DJ recombinés Transcription et épissage V D J Cβ2 PV D J C FR3 CDR2 FR2 CDR1 FR1 V FR4 B. PV PC CDR3 PV PC V D J Cμ PC Figure 9: Schéma de la recombinaison V(D)J et du transcrit final d'une chaîne lourde de récepteur à l'antigène. A. Recombinaison V(D)J de la chaîne lourde du TCR (schéma de gauche) et de la chaîne lourde du BCR (schéma de droite). La chaîne lourde est la première chaîne a être réarrangée lors de la lymphopoïèse. La recombinaison débute par l'association aléatoire d'un segment D (pour diversité) avec un segment J (pour j onction). Un segment V (pour variable) est ensuite associé aléatoire ment à l'ensemble DJ pour former la partie variable du récepteur (PV ). Le transcrit synthétisé lors de la recombinaison V(D)J correspond à l'association des segments recombinés V‐D‐J et contient également le segment C qui compose la partie constante (PC) du récepteur. La traduction de l'ARN messager génère la chaîne lourde du récepteur. Les étapes sont identiques pour la recombinaison des chaînes légères sauf qu'il n'y a pas de segment D. B. Représentation des régions hypervariables CDR1, 2 et 3 d'une cha îne lourde de récepteur à l'Ag. La partie variable contient trois régions hypervariables CDR, aussi appelées régions déterminant la complémentarité, séparées par des régions dites « framework » (FR1 à 4) ou région charpente qui permettent un maintien de la structure. INTRODUCTION D‐ Finalisation de la réparation des brins d'ADN et expression des récepteurs à l'antigène La recombinaison V(D)J se termine par le recrutement d'une polymérase de la famille des pol X suivis du complexe de ligation XRCC4‐DNA ligase IV pour finaliser la ligation des segments géniques V, D ( les chaînes lourdes) et J (Figure 10 étape 4). Le segment C codant la partie constante des récepteurs est associé par épissage aux segments géniques en dehors du processus de recombinaison. Pour le BCR, les deux premiers gènes C transcrits sont Cμ, dans la majorité des cas, et Cδ, plus rarement du fait de leur localisation sur le locus IgH en aval des segments JH (Figure 8). Ceci implique que les premiers isotypes exprimés sur le LB sont les IgM en majorité et les IgD plus rarement (Geisberger, Lamers, and Achatz 2006). Les autres isotypes seront exprimés après rencontre avec l'Ag par le processus de commutation de classe (Kracker and Radbruch 2004). 1.2.2.4‐ Régulation de la recombinaison V(D)J Même si la recombinaison V(D)J est un mécanisme essentiel assurant la mise en place du SI adaptatif et de la diversité des récepteurs antigéniques, il reste cependant un mécanisme potentiellement dangereux en raison de la génération de cassures double brins de l'ADN. Les défauts de la recombinaison V(D)J sont à l'origine d'un large éventail de maladies allant des déficits immunitaires à l'apparition de lymphomes (Craig H. Bassing, Swat, and Alt 2002). Dans le but d'éviter au mieux les erreurs liées au processus de recombinaison V(D)J, il existe différents niveaux de régulation. A‐ Règle 12/23 et séquences RSS La recombinaison V(D)J est un processus finement régulé. En effet, il existe différents mécanismes qui vont influencer le recrutement des protéines RAGs et leur activité. Le premier niveau de régulation de la recombinaison V(D)J est lié à la règle 12/23 de Tonegawa qui implique que seuls deux segments ayant des RSS différentes (espaceur de 12 et 23 pb) peuvent 26 1 Reconnaissance des séquences signales (RSS) par RAG1 et 2 RAG1‐RAG2 D CACAGTG ACAAAAACC Nonamère Heptamère ACAAAAACC CACAGTG 23 12 RSS 12 Clivage simple brin de l'ADN par RAG1/2 et attaque nucléophile du brin opposé. J RSS 23 Formation de structures en épingle à cheveux et d'une boucle d'excision. Recrutement du système NHEJ. GG CC 12 23 AC TG 3'OH D J 3'OH ACGT 2 Clivage simple brin des têtes d'épingle par Artemis. Apparition de nucléotides palindromiques. 3 Addition de nucléotides par la TdT ACGT TC AGGGCC 4 Réparation par le système NHEJ ACGT TC CCGG TGCA AGGGCC GGCC Figure 10: Représentation schématique des différentes étapes de la recombinaison V(D)J. Le processus de recombinaison V(D)J fait intervenir des séquences appelées'séquences signales de recombinaison' ou RSS situées au niveau de l'extrémité 3' des segments V, de part et d'autre des segments D et à l'extrémité 5' des segments J. Ces dernières sont constituées d'un heptamère et d'un nonamère séparés par un espaceur de 23 (RSS 23) ou 12 nucléotides (RSS 12). Les protéines RAG 1 et RAG 2 vont réaliser une coupure simple brin de l'ADN entre la séquence codante des segments à réarranger et les heptamères des RSS (1). Cette coupure engendre la formation d'une extrémité 3'OH libre qui participe à la réaction de trans‐ estérification sur le brin opposé et forme ainsi des structures en épingle à cheveux aux extrémités des segments et des bouts francs au niveau des RSS. La cassure double brin de l'ADN causée par les protéines RAGs induit le recrutement du système de réparation de l'ADN NHEJ (pour Non Homologous End Joining). Artemis est recrutée et coupe les structures en épingles à cheveux créant ainsi des séquences palindromiques libres (2). Ensuite, intervient l'ADN polymérase TdT qui catalyse l'addition aléatoire de nucléotides aux extrémités 3' libres des segments (3). Le système NHEJ recrute ensuite des polymérases de la famille des pol X suivis du complexe de ligation XRCC4‐DNA ligase IV pour finaliser le réarrangement en liant les segments codant entre eux (4). INTRODUCTION être réarrangés (Tonegawa 1983). Cette restriction permet de prévenir les réarrangements aberrants en forçant la reconnaissance de deux segments géniques compatibles. Cependant la règle 12/23 n'est pas à elle seule responsable du choix correct des segments géniques à recombiner. En effet, l'étude du réarrangement d'un mini‐locus transgénique, introduit dans des cellules non lymphoïdes, et composé d'un segment Vβ associé à un RSS‐23, un segment Dβ associé à un RSS‐12 en 5' et un segment Jβ également associé à un RSS‐12, a montré que la RSS‐12 du Dβ, et non la RSS‐12 du Jβ, était capable d'effectuer un réarrangement avec la RSS‐23 du Vβ malgré la compatibilité avec la règle 12/23 entre les segments Vβ et Jβ (Sleckman et al. 2000; C. H. Bassing et al. 2000). B‐ Régulation transcriptionnelle des protéines RAGs Les protéines RAGs sont des facteurs hautement régulés au cours du développement lymphocytaire ce qui constitue une autre ligne de régulation de la recombinaison. En effet, les protéines RAGs sont exprimées de façon différentielle durant le développement des lymphocytes. Le taux de transcription des RAGs est élevé durant le réarrangement des chaînes constituant le TCR et le BCR mais diminue lorsque le processus de recombinaison est terminé (Nagaoka, Yu, and Nussenzweig 2000). Il a également été montré que les protéines RAGs Cassure double brin D'après Brandsma and Gent 2012 Figure 11: Intervention du système de réparation NHEJ lors de la recombinaison V(D)J La cassure double brin de l'ADN générée par les protéines RAGs engendre le recrutement du système de réparation NHEJ. Ce système débute par la fixation de deux protéines, Ku70 et Ku80, au niveau des extrémités de la cassure de l'ADN permettant de les protéger. La présence des dimères Ku va engendrer le recrutement de deux DNA‐PKcs (pour DNA‐ dependent protein kinase) à chaque extrémité de la cassure qui vont activer le complexe de ligation XRCC4/Ligase IV et le recrutement de la protéine XLF (pour XRCC4‐like factor) afin de permettre la ligature des extrémités. Les structures en épingle à cheveux générées au niveau des extrémités codantes vont être prises en charge par le complexe Artemis/DNA‐PK qui va cliver ces structures. Le recrutement d'une polymérase de la famille des pol X suivi du complexe de ligation XRCC4‐DNA ligase IV permet de finaliser la ligation des extrémités d'ADN. INTRODUCTION étaient exprimées différemment durant le cycle cellulaire pour éviter d'insérer des mutations dans l'ADN qui pourraient être délétères à l'organisme. C'est pourquoi l'expression des protéines RAGs est élevée durant la phase G0/G1 (phase de quiescence/croissance des cellules) avant de fortement diminuer (de 5 et 20 fois pour RAG1 et RAG2 respectivement) avant l'entrée des cellules en phase S (duplication du génome) jusqu'en phase M (division cellulaire) (Lin and Desiderio 1994). De plus, différents acteurs impliqués dans la régulation de l'expression des RAGs ont été décrits dans la littérature. Parmi eux se trouve un élément régulateur du locus RAG nommé Erag. Erag est activé uniquement dans les cellules B et sa délétion entraîne un blocage du développement des cellules B au stade pro‐B (Hsu et al. 2003). Erag active le promoteur de RAG1/2 et permet leur expression lors de la lymphopoïèse B. C‐ Accessibilité du locus et remodelage de la chromatine Dans la cellule, l'ADN est présent sous forme de chromatine, c'est‐à‐dire d'ADN et de protéines qui lui sont associées. La compaction de l'ADN sous forme de chromatine est permise grâce aux complexes histones. Ceux‐ci sont composés de 8 sous‐unités correspondant à 4 histones différents présents en 2 exemplaires chacun (H2A, H2B, H3 et H4). L'association histones‐ADN est stabilisée par l'histone linker H1 (Figure 12 A) (Füllgrabe, Hajji, and Joseph 2010; Henikoff 2008), l'ensemble formant le nucléosome. Les histones ont une structure centrale globulaire par laquelle ils interagissent entre eux, tandis que leurs extrémités N et C terminales, aussi appelées queues d'histones, sont libres. Ces dernières sont soumises à de nombreuses modifications post‐traductionnelles (acétylation, méthylation, phosphorylation et ubiquitination) mais la majorité de ces modifications sont situées sur les queues N‐ terminales des histones (Spivakov and Fisher 2007; Shukla, Vaissière, and Herceg 2008). L'ensemble de ces modifications forme le code histone qui intervient dans la régulation du degré de compaction de la chromatine pour aboutir à l'état actif ou répressif de la 28 A. Histone H4 Hi stone H 1 Queues des histones ADN Histone H2B Histone H2A Histone H3 D'après Füllgrabe, 2010 et d'après Henikoff, 2008 B. Région distale V Région distale V Région proximale V Segment constant (C) Segment junction (J) Segment diversité (D) Segment variable (V) Facteur de liaison (CTCF) Celulle B précoce Régions C, J et D Celulle Pro‐B Régions C, J et D Figure modifiée d'après Bossen et al, 2012 Figure 12: Représentation schématique d'un nucléosome et exemples de modifications post‐traductionnelles des histones A. Représentation schématique d'un nucléosome composé de 8 sous‐unités de 4 histones différents, H2A, H2B, H3 et H4. L'association histones‐ADN est stabilisée par l'histone linker H1. Les histones ont une structure centrale globulaire par laquelle ils interagissent entre eux, tandis que leurs extrémités N et C terminales sont libres. B. Schéma des principales modifications post‐traductionnelles des histones retrouvées sur le locus IgH et décrites comme intervenant dans la régulation de la recombinaison V(D)J. Le locus IgH se compose de trois structures multi‐boucles en forme de rosette distinctes dans les cellules B précoces. Au cours de la différentiation cellulaire, ces structures se compactent sur elles‐mêmes, notamment grâce à la régulation du remodelage de la chromatine via les modifications post‐traductionnelles des histones, permettant ainsi un rapprochement des régions du locus les plus éloignées durant le processus de recombinaison V(D)J. INTRODUCTION transcription (Lennartsson and Ekwall 2009). Certaines de ces modifications sont connues comme étant des marques répressives de la transcription comme la tri‐méthylation de la lysine 27 de l'histone H3 et d'autres comme des marques actives de la transcription comme la tri‐méthylation de la lysine 4 de l'histone H3 (Lennartsson and Ekwall 2009). Ces modifications sont également des signaux né aires au recrutement de complexes protéiques et jouent le rôle de plateforme pour ces derniers (Mariño‐Ramírez et al. 2005; Hu et al. 2018). Dans le cas de la recombinaison V(D)J, la régulation de la structure chromatinienne participe notamment au rapprochement des régions du locus les plus éloignées (Bossen, Mansson, and Murre 2012) et les modifications post‐traductionnelles ont été associées au choix des segments lors de la recombinaison (C.‐R. Xu et al. 2008; Subrahmanyam et al. 2012) (Figure 12 B). De plus, des études ont montré que les modifications post‐traductionnelles des histones influençaient l'accessibilité des protéines RAG sur le locus à recombiner. D‐ Exclusion allélique A la surface de chaque lymphocyte est exprimé un récepteur spécifique et unique. De ce fait, les chaînes lourdes et légères des récepteurs TCR et BCR sont produits à partir d'un seul chromosome. Ce phénomène est assuré par le mécanisme d'exclusion allélique. Il a été montré que le choix de l'allèle soumis à la recombinaison V(D)J n'est pas lié à l'origine maternel ou paternel de l'allèle, éliminant ainsi l'empreinte génomique en tant que régulateur potentiel pour ce processus étroitement régulé (Gebert et al. 2017). Lors du réarrangement des chaînes lourdes, une première recombinaison est tentée sur l'un des deux chromosomes pris au hasard. Si la recombinaison est réussie, c'est‐à‐dire si une chaîne lourde fonctionnelle est synthétisée, le second chromosome ne sera pas recombiné et ne sera pas exprimé. Si au contraire, la tentative de recombinaison conduit à la synthèse d'une chaîne non fonctionnelle, une nouvelle recombinaison est tentée sur l'autre chromosome. Si ce dernier réarrangement conduit à nouveau à un produit non fonctionnel, le lymphocyte mourra par apoptose. En revanche, si le réarrangement est productif, la cellule reçoit un signal de survie, prolifère et le même scénario se reproduira avec les chromosomes codant les chaînes légères. Ce processus est en fait permis par la diminution et l'accessibilité des protéines RAG sur le deuxième chromosome empêchant ainsi la recombinaison V(D)J de redémarrer (Brady, Steinel, and Bassing 2010). L'exclusion allélique permet donc à chaque lymphocyte de posséder à leur surface un seul type de récepteur exprimé en plusieurs exemplaires (c'est‐à‐dire que les ocytes expriment plusieurs récepteurs ayant une chaîne lourde et une chaîne légère identique). Ceci a effectivement été montré pour les LT qui expriment à leur surface des TCR formés d'un seul réarrangement productif de la chaîne β (Casanova et al. 1991). En revanche, l'exclusion allélique lors de la recombinaison de la chaîne α ne semble pas être aussi précise puisque plus d'1/3 des LT périphériques exprimeraient à leur surface deux TCR différents, associant une même chaîne β à deux chaînes α différentes suite à la recombinaison des deux allèles α (Padovan et al. 1993; Alam, Crispe, and Gascoigne 1995). Il est intéressant de souligner que pour les LB, qui peuvent exprimer différentes classes d'immunoglobulines ou isotypes, il existe un phénomène, appelé l'exclusion isotypique, qui permet à chaque LB d'exprimer des BCR formés d'un seul type de chaîne légère (chaîne  ou ) ainsi que d'un seul type de classe ou sous‐classe de chaîne lourde. 1.2.3‐ Origine et maturation des lymphocytes 1.2.3.1‐ Origine embryonnaire des lymphocytes Le développement des cellules souches hématopoïétiques (CSH) chez l'Homme et la souris débute dans le sac vitellin à partir du 16ème et du 7ème jour de vie foetale respectivement. Les cellules souches hématopoïétiques apparaissent ensuite dans l'aorte dorsale de la région Aorte-Gonades-Mésonéphros (AGM) au 11ème jour de développement chez la souris (E. Taylor, Taoudi, and Medvinsky 2010) et entre le 27ème et le 42ème jour de développement chez l'Homme (Tavian et al. 2010). Le sac vitellin et l'AGM sont à l'origine de lignées cellulaires du sang différentes. En effet, les précurseurs du sac vitellin généreraient des érythrocytes, des cellules myéloïdes et des cellules NK alors que les progéniteurs de la région AGM génèreraient à la fois des cellules B et des cellules T (Grzywacz, Miller, and Verneris 2010). Les précurseurs hématopoïétiques vont ensuite coloniser le foie foetal à partir du 23ème jour de grossesse chez l'Homme et du 10ème jour de gestation chez la souris (Houssaint 1981; Fontaine‐Perus et al. 1981; Tavian and Péault 2005). Les CSH vont ensuite migrer vers la moelle osseuse à partir de la 11ème semaine chez l'Homme et à partir du 17ème jour embryonnaire chez la souris (Chotinantakul and Leeanansaksiri 2012). C'est dans la moelle osseuse qu'aura lieu durant toute la vie de l'individu, la maturation des lymphocytes B naïfs. À partir de la 9ème semaine embryonnaire chez l'Homme (Haynes et al. 1988) et du 12ème jour de gestation pour la souris, les précurseurs des cellules T, ou ‐thymocytes, migrent dans le thymus via la circulation sanguine (Amagai, Itoi, and Kondo 1995). La migration des pro‐ thymocytes de la moelle osseuse vers le thymus est permise grâce à des chémokines telles que CXCL12 et CCL25 dont les récepteurs sont sous l'influence des protéines kinases JAK (Janus Kinase) (Soldevila et al. 2004). Ces cellules finiront leur maturation à l'intérieur du thymus et conduiront à la production des cellules matures T naïves. Moelle osseuse Progéniteur myéloïde Progéniteur lymphoïde pLT Macrophage Neutrophile Basophile Eosinophile LB Erythrocyte NK Plaquettes Figure 13: Représentation schématique de l'hématopoïèse L'hématopoïèse correspond au développement de l'ensemble des cellules sanguines. Au cours de l'hématopoïèse, les cellules souches hématopoïétiques se différencient en deux types de progéniteurs, les progéniteurs myéloïdes et les progéniteurs lymphoïdes. Les progéniteurs myéloïdes sont à l'origines des érythrocytes, des autres leucocytes (neutrophiles, macrophages, basophiles et éonisophiles) et des plaquettes. Quant aux progéniteurs lymphoïdes, ils donnent naissance aux cellules natural killer (NK) et aux lymphocytes T (LT) et B (LB). Seules les NK et les LB continueront leur maturation au sein de la moelle osseuse. En revanche pour les cellules T, les précurseurs (pLT ou pré‐thymocytes) provenant des progéniteurs lymphoïdes, vont quitter la moelle osseuse pour rejoindre le thymus où ils finiront leur maturation pour donner des lymphocytes T matures. INTRODUCTION 1.2.3.2‐ Lieu de développement des lymphocytes : Organes lymphoïdes primaires Les lymphocytes T et B acquièrent leurs fonctions effectrices dans les organes lymphoïdes primaires avant de rejoindre les organes lymphoïdes secondaires dans lesquels ils vont exercer leur pouvoir de défense contre les pathogènes. Les organes lymphoïdes primaires (OLP) sont composés de la moelle osseuse, du thymus ainsi que du foie foetal durant le développement embryonnaire (Figure 2). Dans ces organes, les lymphocytes prolifèrent et se différencient à partir des progéniteurs lymphoïdes dans le but d'acquérir leur immunocompétence et d'être capable de reconn itre les Ag (Hirose et al. 2002). Le processus de maturation dans les OLP est appelé lymphopoïèse. Les progéniteurs lymphocytaires sont issus des CSH présentes dans la moelle osseuse. Ces progéniteurs vont ensuite se différencier en LB ou en LT. Dans le cas des LT, la lymphopoïèse s'effectue au sein du thymus tandis que pour les LB, la lymphopoïèse s'effectue dans la moelle osseuse. Suite à leur maturation dans les OLP, les lymphocytes vont migrer vers les organes lymphoïdes secondaires (OLS) via la circulation sanguine (Stevens, Weissman, and Butcher 1982). A‐ La moelle osseuse La moelle osseuse se présente sous deux formes, la moelle rouge et la moelle jaune. La moelle rouge situe dans les os plats (côtes, vertèbres, bassin, etc) et dans la partie épiphysaire des os longs. Le rôle majeur de la moelle rouge est la production des cellules sanguines, ou hématopoïèse, à partir des cellules souches hématopoïétiques (CSH). La moelle jaune se situe quant à elle à l'intérieur des os longs au sein de la cavité médullaire. Elle est essentiellement composée d'adipocytes. Avec l'âge, la moelle jaune remplace peu à peu la moelle rouge mais son rôle est encore peu connu (Prabhakar, Ershler, and Longo 2009). La moelle osseuse renferme un microenvironnement médullaire constitué d'un ensemble de cellules non hématopoïétiques comme des adipocytes, des ostéoblastes, des ostéoclastes et des cellules endothéliales. Ce microenvironnement est organisé sous forme de niches hématopoïétiques à l'intérieur desquels se déroule les différentes étapes de maturation des cellules sanguines (Isern and Méndez‐Ferrer 2011). Ces niches assurent la maintenance et la régulation des fonctions des cellules souches grâce à la sécrétion par les cellules stromales de facteurs de croissance ou cytokines essentiels au développement des CSH comme la chimiokine CXCL12 32 Figure 14: Organisation générale d'un lobule thymique Les lobules sont séparés par des travées conjonctives. Ils contiennent deux zones, le cortex en périphérie qui contient des petits thymocytes immatures dans une trame de cellules épithéliales et la médulla au centre qui contient des thymocytes matures dans un réseau moins dense de cellules épithéliales et de cellules dendritiques. D'après Berrih‐Aknin et al, 1999 RODUCTION (ou SDF‐1 pour « stromal cell derived factor 1 ») sécrétée par les cellules stromales, qui va se lier au récepteur CXCR4 présent à la surface des CSH et jouer un rôle dans la rétention et la différentiation des progéniteurs hématopoïétiques (Panaroni and Wu 2013; Nagasawa 2015). Au cours de l'hématopoïèse, les CSH se différencient en deux types de progéniteurs, les progéniteurs lymphoïdes, qui donneront après maturation les cellules NK, les lymphocytes T et B et les progéniteurs myéloïdes qui sont à l'origines des érythrocytes, des autres leucocytes (granulocytes, monocytes, macrophages) et des plaquettes (Figure 13). Au sein de la moelle osseuse a lieu la maturation des lymphocytes B qui se développent à partir des précurseurs lymphoïdes communs. B‐ Le thymus Le thymus est une glande endocrine située dans la partie supérieure du thorax. Chez l'Homme, le thymus est complètement formé à la naissance alors que chez la souris sa structure définitive n'est atteinte que vers la 4ème semaine après la naissance. Il est constitué de deux lobes reliés entre eux par du tissu conjonctif et chacun divisés en lobules (Figure 14). La partie périphérique constitue le cortex et la partie interne constitue la médulla (Figure 14). La maturation des cellules T débute dans le cortex et se termine dans la médulla avant que les cellules matures rejoignent la circulation sanguine (Berrih‐Aknin and Eymard 1999). La migration cortex‐medulla des cellules T en développement est notamment permise via le récepteur de chimiokine CCR7, présent à leur surface, qui se lie aux molécules CCL19 et CCL21 sécrétés par les cellules stromales du thymus (Ueno et al. 2004). 1.2.3.3‐ La lymphopoïèse T A‐ Les stades de développement Durant la lymphopoïèse T, les cellules vont acquérir et perdre certains marqueurs de surface, ce qui rend possible leur distinction au cours du développement. Les progéniteurs T (ou pré‐ thymocytes) sont issus du même progéniteur commun à l'origine des cellules B et siègent donc au sein de la moelle osseuse avant de rejoindre la partie corticale du thymus où se déroulera Chaîne β Pseudo chaîne α Chaîne α SP4 (CD8‐/CD4+) Précurseurs T DN1 DN2 DN3 DN4 (CD25‐/CD44+) (CD25+/CD44+) (CD25+/CD44‐) (CD25‐/CD44‐) DP (CD8+/CD4+) SP8 (CD8+/CD4‐) CD8‐/CD4‐ B. DN4 Cortex Vaisseaux sanguins Médulla Figure modifiée d'après Klein et al., 2014 Figure 15: Représentation schématique de la lymphopoïèse T. A. La lymphopoïèse T est la maturation, à partir de cellules souches hématopoïétiques, des LT helper CD4+ et des LT cytotoxiques CD8+. Les précurseurs T vont se différencier en cellules doubles négatives (DN) pour les marqueurs CD4 et CD8 où débute la recombinaison V(D)J de la chaîne β du TCR. La chaîne β va s'associer avec une pseudo chaîne α qui sera ensuite remplacée par une vraie chaîne α. Ces cellules vont ensuite se différencier en cellules doubles positives (DP) pour les marqueurs CD4 et CD8. A ce stade, le réarrangement de la chaîne légère est terminé et le TCR est mature. Au cours de la dernière étape de maturation, les cellules vont exprimer l'un ou l'autre des marqueurs CD4/CD8, elles sont alors au stade simple positif CD4+ ou simple positif CD8+ (SP) et vont rejoindre la circulation périphérique. B. Au cours de la lymphopoïèse, les progéniteurs T provenant de la moelle osseuse arrivent dans le thymus au niveau de la partie corticale via la circulation sanguine. Les progéniteurs se différencient en cellules DN où va s'effectuer la β sélection permettant de sélectionner les LT avec une chaîne β fonctionnelle. Les cellules DN passant la β sélection se différencient ensuite en cellules DP qui vont être soumises à la sélection positive Cette dernière consiste à sélectionner les cellules T capables de reconnaître les molécules du CMH à la surface des cellules épithéliales corticales thymiques (cTEC) qui sont associées à un peptide du soi. Les cellules DP survivantes vont ensuite rejoindre la partie médullaire du thymus et vont cette fois subir la sélection négative. Cette sélection négative fait intervenir les cellules épithéliales médullaires thymiques (mTEC) et les cellules dendritiques (DC) qui vont présenter aux LT des antigènes du soi afin qu'ils acquièrent la tolérance vis‐à‐vis du soi. Au final, seulement 5% des cellules T en développement passeront l'ensemble des sélections thymiques et deviendront des cellules matures SP qui quitteront ensuite le thymus pour rejoindre les organes lymphoïdes secondaires via la circulation sanguine. INTRODUCTION l'ensemble des étapes de maturation des LT. Ces progéniteurs T vont tout d'abord se différentier en cellules dites double négatives (DN). B‐ Les sous‐populations doubles négatives et l'évolution de leur phénotype au cours de la lymphopoïèse T Les cellules DN peuvent être subdivisées en quatre grandes sous‐populations cellulaires (DN1 à DN4), différenciables grâce à l'expression des marqueurs CD25 (récepteur à l'IL2) et CD44 (impliqué dans la migration et la différenciation cellulaire) (Föger, Marhaba, and Zöller 2000). La transition DN1‐DN2 est visualisée par l'expression du récepteur à l'IL2 impliqué dans la prolifération et la protection contre l'apoptose des cellules DN (Cong et al. 2016). Les cellules DN1 (CD44+/CD25‐) et DN2 (CD44+/CD25+) constituent les cellules pro‐T qui se différencient ensuite en cellules DN3 (CD44‐/CD25+) puis DN4 (CD44‐/CD25‐) constituant les cellules pré‐T. Par ailleurs, chaque sous‐population négative peut être subdivisée en différents sous‐groupes de cellules DN en fonction de l'expression de différents marqueurs. En effet, les cellules DN1 peuvent être subdivisées en 5 sous‐groupes (DN1a à DN1e) en fonction du niveau d'expression de c‐kit et CD24 : DN1a (c‐kit+/CD24−), DN1b (c‐kit+/CD24+), DN1c (c‐kitint/CD24−), DN1d (c‐ kit−/CD24+) et DN1e (c‐kit−/CD24−). Les cellules DN1a et DN1b donnent naissances aux cellules T alors que les cellules DN1c, d et e donnent naissances à des cellules non T comme les NK et les DCs thymiques (Braunstein and Anderson 2012). Parmi les cellules DN2 se distinguent deux sous‐groupes, DN2a (lck−/c‐kithi) et DN2b (lck+/c‐kitint) différen ables par l'expression de lck et c‐kit. Les cellules DN2a donnent naissances à des cellules non T (NK, DC) alors que les cellules DN2b se différencient uniquement en cellules T (Braunstein and Anderson 2012). Les cellules DN3 et DN4 ont, quant à elles, 3 niveaux de maturations différenciables grâce à l'expression différentielle des marqueurs CD25 et CD28 (Teague et al. 2010): DN3a (CD25hi/CD28lo), DN3b (CD25hi/CD28int), DN3c (CD25int/CD28int), DN4a (CD25lo/CD28int), DN4b (CD25lo/CD28hi) et DN4c (CD25lo/CD28‐ ou lo). C‐ Les étapes de la recombinaison V(D)J au cours de la lymphopoïèse T Comme nous l'avons dit précédemment, la recombinaison V(D)J se déroule au stade DN de la lymphopoïèse T. Plus précisément, c'est au stade DN2 que débute le réarrangement de la chaîne β du TCR par l'association du segment Dβ avec Jβ. L'association du segment Vβ avec DβJβ s'effectue quant à elle au stade DN3 (Outters et al. 2015). Le stade DN3 correspond également à la formation du complexe CD3, qui débute dans le réticulum endoplasmique avant de s'associer à la chaîne β du TCR (Alarcon et al. 1988). Ensuite, la chaîne β réarrangée va s'apparier avec le complexe CD3 et un substitut de chaîne α (pTα ou pseudo‐chaîne α) pour former le pré‐TCRβ (H. von Boehmer and Fehling 1997). Entre le stade DN3a et DN3b s'effectue la « β sélection » qui correspond à un événement permettant uniquement la survie des cellules T possédant une chaîne β de TCR fonctionnelle. Si la chaîne β est fonctionnelle, le pré‐TCR va émettre un signal de survie à la cellule T, lui permettant de se différencier en cellule DN4 (Haks et al. 1999). Puis, les cellules DN4 vont se différencier en cellules ISP8 puis DP. C'est au stade DP que s'effectue le réarrangement la chaîne α du TCR (Harald von Boehmer 2005). Une fois le TCR formé, les cellules DP donnent naissance aux cellules SP4/SP8 qui vont rejoindre la circulation sanguine. D‐ Les régulateurs de la lymphopoïèse T 35 Molécule Fonction Notch1 Signalisation Kit Signalisation IL‐7R Récepteur à l'IL‐7 facteur de croissance E2A/HEB CD3 Signalisation CD44 Molécule d'adhésion CD25 Récepteur à l'IL‐2 facteur de croissance et d'activation Progé‐ niteur T DN1 DN2 DN3 DN4 DP SP4/ SP8 CD4 Co‐récepteur CD8 TCRβ TCRα Reconnaissance antigénique Figure 16: Expression de molécules de surface et de gènes impliqués dans le développement des lymphocytes T La maturation des cellules T implique l'expression différentielle de nombreux régulateurs dont les fenêtres d'expression sont indiquées en orange. INTRODUCTION Un certain nombre de régulateurs sont reconnus pour jouer un rôle déterminant dans l'engagement et la différentiation des cellules T (Figure 16) (Van de Walle et al. 2016; Longabaugh et al. 2017). Seulement quelques‐uns d'entre eux sont décrits dans le paragraphe suivant. Au cours de la maturation précoce des cellules T intervient la chimiokine CXCR4 (exprimée à la surface des cellules T) et son ligand CXCL12 (exprimé par les cellules thymiques stromales dans le cortex) qui jouent un rôle important dans la migration des progéniteurs T de la moelle osseuse vers le thymus (Figure 15 B). En effet, l'étude de Plotkin et ses collègues a montré que la mutation de CXCR4 empêchait la migration des progéniteurs T sanguins vers la partie corticale du thymus ce qui entraîne un blocage des cellules T au stade DN1 (Plotkin et al. 2003). De plus, d'autres études ont montré que la maturation précoce des LT était également sous l'influence de la signalisation par Notch‐1. Le récepteur Notch est une glycoprotéine membranaire qui, après avoir lié son ligand ( ‐like ou Jagged), va subir un clivage libérant son domaine intracellulaire (Deftos and Bevan 2000; Yang, Jeremiah Bell, and Bhandoola 2010). Ce domaine va ensuite migrer vers le noyau des cellules et former, avec d'autres facteurs, un complexe transcriptionnel capable de réguler l'expression d'un grand nombre de gènes cibles tel que Hes1, essentiel à la maturation des cellules T aux stades DN et au réarrangement du TCR (Tomita et al. 1999) et l'IL7R, indispensable à la maturation et aux étapes de sélections des LT fonctionnels (González‐García et al. 2009). La voie de signalisation Notch‐1 joue également un rôle essentiel dans l'inhibition du développement des cellules non‐ T pour promouvoir l'engagement des CSH vers la lignée T (Rothenberg 2017). E‐ Les phases de sélections Le processus de recombinaison V(D)J à l'origine de la formation du TCR n'est pas infaillible, il est susceptible de produire des TCR non productifs ou même autoréactifs. Pour pallier ces erreurs, l'organisme a mis en place différents points de contrôle durant la lymphopoïèse T, on parle de sélections thymiques. E.1‐ La  sélection Après formation du pré‐TCR au stade DN3, les cellules vont subir une première phase de sélection appelée la β‐sélection. Cette sélection consiste à éliminer par apoptose les cellules possédant une chaîne β de TCR non fonctionnelle. Les cellules ayant une chaîne β fonctionnelle complexée à une pseudo‐chaîne α (pTα) et au complexe CD3 seront dans la capacité de générer un signal autonome qui va conduire à leur survie et à la possibilité de progresser vers le stade DN4 (Yamasaki and Saito 2007). Les éléments constituants le pré‐TCR jouent un rôle différent dans le processus de β sélection. Des études ont montré que chez des souris pTCRα ‐/‐ (ne possédant pas la pseudo chaîne α) le développement des cellules T est altéré et les LT sont partiellement bloqués au stade DN3, montrant ainsi l'importance de la pseudo chaîne α dans le développement des cellules DN3 (Fehling et al. 1995). De plus, le pré‐ 37 Pré‐TCR TCRβ SDF‐1 ou CXCL12 pTα CD3 εγ p85 p110δ CXCR4 ζζ ZAP70 Gγ Gβ p101 p110γ ShcA Grb2 PIP3 Signalisation via PI3K SOS Ras PIP3 Signalisation via PI3K Voie de signalisation MAPK Prolifération Survie Migration Différentiation Exclusion allélique Figure 17: Voies de signalisation mises en place lors de la β sélection. La signalisation coopérative entre le pré‐ CR et CXCR4, qui empruntent les voies de signalisation PI3K et MAPK, sont nécessaires à la survie des cellules T lors de la β sélection. La signalisation PI3K du pré‐TCR est médiée par l'isoforme de classe IA p110δ et la sous‐unité p85. La phosphorylation de CD3 ε et de la tyrosine kinase ZAP70 conduit à la phosphorylation de la molécule adaptatrice ShcA. Une fois la molécule ShcA activée, cette dernière s'associe avec Grb2 et le facteur SOS pour initier la signalisation Ras / MAPK. La liaison de la chimiokine SDF‐1, ou CXCL12, à son récepteur CXCR4 initie également les voies de signalisation MAPK et PI3K. CXCL12 stimule l'association physique de CXCR4 et du TCR et utilise les domaines ITAM de liaison ZAP‐70 du TCR pour la transduction du signal. La signalisation médiée par PI3K de CXCR4 est principalement médiée par l'isoforme p110γ de classe IB et sa sous‐unité régulatrice p101 qui se lie aux sous‐unités Gβγ qui sont libérées lors de l'activation de CXCR4. L'ensemble de ces voies permettent la différenciation continue des lymphocytes T, leur prolifération, la survie cellulaire, la migration cellulaire ainsi que l'exclusion allélique au locus TCRβ. INTRODUCTION TCR joue un rôle important dans le processus d'exclusion allélique puisqu'il a été montré qu'en absence de pTα, le nombre de thymocytes portant deux réarrangements productifs était multiplié par 7 (Aifantis et al. 1997). En revanche la pseudo‐chaîne α n'est pas impliquée dans la signalisation pré‐TCR puisque l'administration d'un anticorps anti CD3ε chez des souris double KO pTα‐/‐ x RAG ‐/‐ suffit à restaurer le développement des cellules T (H. J. Fehling et al. 1997). Une autre étude a montré le rôle essentiel du complexe CD3 dans la survie et la différentiation des cellules DN en DP. Pour cela, Jacobs et ses collègues ont traité des souris RAG1‐/‐ (dont le TCR n'est pas réarrangé) avec un anticorps dirigé contre la chaine ε du CD3 et ont observé que les cellules T étaient capables de passer la β sélection et de se développer en cellules DP (Jacobs et al. 1994). Cette étude montre que la signalisation intra‐cellulaire via le complexe CD3 est primordiale pour la survie des LT au cours de la β sélection. Les voies de signalisation activées à partir du pré‐TCR sont extrêmement complexes et diversifiées, on trouve notamment la voie des MAP kinase et celle de la Phosphoinositide 3‐kinase (PI3K) (Figure ) dont l'activation correcte va aboutir à la survie, à la prolifération et à la différentiation des cellules DN3 (Michie and Zúñiga‐Pflücker 2002; Janas and Turner 2010). D'autres molécules sont également impliquées dans les signaux de survie des LT lors de la β sélection comme la chimiokine CXCL12 (exprimée par les cellules épithéliales corticales du thymus) qui après fixation à son récepteur CXCR4 (exprimé à la surface des cellules T immatures) va activer l'enzyme PI3K et d'autres molécules de la voie MAPK (Kumar et al. 2006; Janas and Turner 2010) (Figure 17). E.2‐ Les sélections positive et négative Pour éviter que les lymphocytes ne s'activent en présence des molécules du soi au sein de l'organisme, provoquant ainsi la survenue de maladies auto‐immunes, l'organisme a mis en place un système permettant de sélectionner uniquement les cellules T ayant acquis une tolérance au soi. Pour cela, les cellules T vont subir deux sélections successives, la sélection positive suivie de la sélection négative. Sélection positive Sélection négative Affinité trop faible Mort par négligence (Apoptose) Affinité intermédiaire Affinité trop forte Survie <5% Apoptose Affinité du TCR pour les molécules du soi Figure 18: Modèle d'affinité du TCR lors des sélections thymiques L'affinité du TCR pour les complexes CMH‐peptide du soi retrouvés à la surface des cellules épithéliales thymiques est déterminant lors des processus de sélections thymiques. Les cellules DP portant un TCR avec une faible affinité pour le complexe CMH‐peptide mourront par négligence car aucun signal intracellulaire de survie ne sera transmis à la cellule. En revanche, les cellules portant un TCR d'affinité intermédiaire pour le complexe recevront un signal de survie et continueront leur maturation, c'est la sélection positive. Cependant, dans le cas où l'affinité des TCR pour les complexes est trop forte, les cellules mourront par apoptose afin d'éviter qu'elles ne soient par la suite autoréactives, c'est ce que l'on appelle la sélection négative. INTRODUCTION E.2.1‐ Sélection positive La sélection positive s'effectue au niveau de la partie corticale du thymus qui abrite les cellules épithéliales corticales thymiques (cTEC) et va entrainer la mort par apoptose d'environ 75‐ 80% des cellules T (Yates 2014). La sélection positive consiste à sélectionner les cellules T capables de reconnaître les molécules du CMH à la surface des cTEC qui sont associées à un peptide du soi (pCMH). A ce jour, les mécanismes impliqués dans la sélection positive ne sont pas totalement élucidés. Il est d'ores et déjà connu l'importance des cTECs dans ce processus de sélection. Ces dernières agissent en tant que CPA et expriment une variété de complexes pCMH lors de la sélection positive. L'importance des cTECs dans la sélection a été montrée par l'équipe de Justin Van De Wiele qui a travaillé sur des souris transgéniques ne présentant que des molécules de CMHI au niveau des cellules corticales du thymus (de ce fait, aucune cellules de la partie médullaire du thymus ne possédaient de molécule de CMHI à leur surface) (Capone et al. 2001). Cette étude a montré que la sélection positive des cellules T CD8+ des souris transgéniques était normale mais hautement autoréactive. Ces résultats indiquent que les cTECs peuvent induire la sélection positive des LT mais ne sont pas capables d'induire la tolérance du soi, suggérant ainsi que la sélection négative s'effectuerait exclusivement au niveau des cellules de la partie médullaire du thymus (Capone et al. 2001). Des résultats similaires ont été constatés pour les cellules CD4+ (Laufer et al. 1996). Le destin d'un LT au stade DP, lors de la sélection positive, dépend du degré d'affinité/avidité de son TCR pour un pCMH (Ludger Klein et al. 2009) (Figure 18). Les DP ayant un TCR de faible affinité pour son pCMH sont éliminés (mort par négligence). Il en est de même pour ceux possédant une affinité trop grande (délétion clonale ou sélection négative), car ils sont susceptibles d'être d'autoréactifs face au soi. Seuls les LT avec une affinité intermédiaire reçoivent un signal de survie et peuvent poursuivre leur maturation. Il est à noter qu'au stade DP les lymphocytes T n'expriment ni le récepteur à IL‐7 (Yu et al. 2006), ni le facteur de survie Bcl‐2 (Gratiot‐Deans et al. 1994) ce qui les prédestinent fortement à la mort. Seul un signal de survie permettrait aux cellules DP d'échapper à l'apoptose et de continuer leur maturation. La sélection positive fait intervenir de nombreuses protéines impliquées dans la signalisation intracellulaire comme les chaînes δ et ζ du complexe CD3, ou encore les molécules appartenant à la voie ERK (Starr, Jameson, and Hogquist 2003). D'autres facteurs, comme E2A et HEB, ont été montrés comme étant impliqués dans le blocage des cellules DP jusqu'à ce qu'elles reçoivent un signal de sélection positive via leur TCR (M. E. Jones and Zhuang 2007). En effet, la déficience en E2A entraîne un passage des cellules DP vers le stade SP avec des TCR non fonctionnels, aboutissant au développement d'un lymphome à cellules T (Bain et al. 1997; M. E. Jones and Zhuang 2007). Il est important de noter que le peptide associé au CMH à la surface des cTECs n'induit pas la sélection d'un TCR spécifique à ce peptide mais permet la sélection de TCR différents structurellement, capables de reconnaitre différents Ag. En effet, des études menées sur des souris transgéniques possédant des molécules de CMH‐I (B. Wang et al. 2009) ou II (Ignatowicz, Kappler, and Marrack 1996) liées de façon covalente à un peptide défini, ont montré que les TCR des LT périphériques présentaient une diversité de répertoire normale en termes d'usage des segments Vβ et qui plus est, étaient capables de reconnaitre d'autres peptides. Finalement, la sélection positive s'accompagne d'une séparation entre les cellules SP4 restreintes aux molécules de CMH‐II et SP8 restreintes aux molécules de CMH‐I. E.2.2‐ Sélection négative La sélection positive est donc une étape cruciale qui permet de ne garder que les LT capables de reconnaître les complexes CMH/peptide exprimés à la surface des cTECs. Cependant, lors de cette étape des LT autoréactifs peuvent être générés ce qui représente un danger pour l'organisme. La sélection négative va permettre de neutraliser ces cellules autoréactives et ainsi à mettre en place un premier niveau de tolérance appelée tolérance centrale. Les thymocytes positivement sélectionnés vont migrer vers la médulla où va s'effectuer la sélection négative. Cette migration est permise par la signalisation faisant intervenir le récepteur aux chimiokines CCR7 et ses ligands (Ueno et al. 2004). Selon le modèle classique d'affinité vu précédemment, les LT possédant une affinité trop forte pour le pCMH meurent par apoptose (délétion clonale). Les molécules impliquées dans la signalisation intracellulaire du TCR induisant la mort des LT autoréactifs sont nombreuses. Certaines voies de signalisation sont indispensables à la fois à la sélection positive et à la sélection négative comme la voie ERK. En revanche, certaines molécules de signalisations ont été montrées comme étant exclusives à la sélection négative comme Grb2 (Starr, Jameson, and Hogquist 2003). Par ailleurs, plusieurs types cellulaires sont impliqués dans la sélection négative. Parmi eux on trouve les cellules médullaires épithéliales thymiques (mTEC), les cellules dendritiques (DC) et les cellules B thymiques. L'origine et le mode de fonctionnement des cellules B thymiques soulèvent encore beaucoup de questions (Perera and Huang 2015) mais leur rôle dans la présentation antigénique induisant la sélection négative des cellules T a été démontré (Inaba et al. 1991). En revanche, le mécanisme d'action mTECs et des DCs a été le sujet de nombreuses études. Ces cellules présentent sur leurs molécules du CMH, des Ag du soi exprimés au niveau des organes périphériques dans le but d'éliminer les LT qui répondent à des Ag du soi extérieur au thymus. L'expression ectopique de ces Ag par les mTECs est sous le contrôle de la protéine AIRE (AutoImmune REgulator) qui régule la transcription des gènes tissus‐spécifiques dans le thymus, telle que l'insuline, qui sont généralement exprimés exclusivement dans des organes périphériques spécifiques (Anderson et al. 2002). La déficience d'AIRE chez l'Homme engendre un syndrome auto‐immun appelé l'APECED (Autoimmune PolyEndocrinopathy Candidiasis Ectodermal Dystrophy) (Finnish‐German APECED Consortium 1997). F‐ La tolérance périphérique Certains thymocytes autoréactifs ne sont pas éliminés au niveau du thymus et réussissent à rejoindre la périphérie. La raison principale de l'échappement des thymocytes à la tolérance centrale est que certains Ag du soi exprimés en périphérie ne seraient pas ou peu exprimés au niveau thymique (L. Klein and Kyewski 2000). Pour pallier à ce défaut de sélection, plusieurs mécanismes existent en périphérie : l'anergie (inactivation du LT autoréactif), la délétion clonale, l'ignorance (le LT autoréactif ne s'active pas soit parce que l'Ag du soi est présent en trop petite concentration, soit parce que l'Ag du soi est séquestré dans des organes non vascularisés comme au niveau de la chambre antérieur de l'oeil (Niederkorn 2003)) et la régulation par les LT régulateurs (inhibent la prolifération et la fonction des LT autoréactifs) et par les DC tolérogènes (induisent l'anergie des LT naïfs autoréactifs) (Schietinger and Greenberg 2014; Xing and Hogquist 2012). Il existe également un autre phénomène pour pallier les TCR autoréactifs appelé « editing ». Cet événement consiste à internaliser le récepteur TCR défectueux et à débuter le réarrangement génique d'un autre récepteur (Wagner 2007). Re combinaison V(D)J Pré‐BCR Chaînes lourdes Pseudo chaînes légères IgM IgM IgD CSH PM PLM PLC Pro‐B Pré‐B B immatures B matures Figure 19: Représentation schématique de la lymphopoïèse B. La lymphopoïèse B correspond à la maturation, dans la moelle osseuse, des cellules B à partir de cellules souches hématopoïétiques (CSH). Ces CSH vont donner naissance aux progéniteurs multipotents (PM) puis aux progéniteurs lymphoïdes multipotents (PLM) qui se différencient en cellules progénitrices lymphoïdes communes (PLC). Ces PLC vont se différencier en cellules pro‐B où s'effectue le réarrangement des chaînes lourdes via le processus de recombinaison V(D)J. Les cellules pro‐B se différencient en cellules pré‐B où les chaînes lourdes s'associent à des pseudo chaînes légères pour former le pré‐BCR. Au stade B immature, les pseudo chaînes légères sont remplacées par de vraies chaînes légères et donnent naissance à une IgM de surface. Les cellules B immatures se différencient ensuite en cellules B matures qui se caractérisent par la co‐expression membranaire d'une IgM et d'une IgD. Ces cellules B matures vont ensuite rejoindre la circulation périphérique. INTRODUC TION Comme nous l'avons vu précédemment, les CSH donnent naissance à deux grandes lignées cellulaires, la lignée lymphoïde et la lignée myéloïde. La lignée lymphoïde donne naissance aux LT, qui maturent dans le thymus et aux LB qui eux maturent au sein de la moelle osseuse. La maturation des LB (ou lymphopoïèse B) dans la moelle osseuse, s'effectue à partir des cellules souches hématopoïétiques (CSH) qui capables de s'auto‐renouveler, de reconstituer l'ensemble du système hématopoïétique (Figure 19) et de maintenir la production des cellules sanguines à l'état d'équilibre (Laurenti and Göttgens 2018). Ces CSH vont se différencier en cellules progénitrices multipotentes (PM). Ces cellules ont la capacité de se différencier soit en cellules progénitrices lymphoïdes communes (PLC), soit en cellules myéloïdes progénitrices. Les PLC sont restreints à la lignée lymphoïde et peuvent donner naissance aussi bien à des cellules B qu'à des cellules T (Kondo 2010). Du côté de la lignée B, les PLC vont donner naissance aux cellules pro‐B. Le stade pro‐B peut se diviser en deux sous‐stades, le stade pré‐pro‐B et le stade pro‐B tardif. Au stade pré‐pro‐B débute le réarrangement DH‐JH de la chaîne lourde des Ig. Le stade pro‐B tardif se caractérise par le réarrangement VH‐DJH de la chaîne lourde. B‐ Modification du phénotype au cours de la lymphopoïèse B Au cours de la lymphopoïèse, les cellules acquièrent et/ou perdent l'expression de certaines protéines membranaires qui jouent un rôle dans l'acquisition des différentes fonctions lymphocytaires. Les CSH (Lin‐/ Sca‐1hi/ c‐kithi/ CD34+/ IL7Rα‐/ Flt3‐) se caractérisent par l'absence de marqueurs de surface spécifiques des cellules matures, appelés « lineage » (ou Lin, qui regroupe un ensemble de marqueurs comme CD2, CD3, CD11b, CD11c, CD14, CD16, CD19, CD24, CD56, CD66b et la glycophorine A). Les PLC (Lin‐/ Sca‐1lo/ c‐kitlo/ CD34+/ IL7Rα+/ Flt3+) se distinguent des CSH, entre autre, par l'expression du récepteur à l'interleukine 7 (ou IL‐ 7Rα), qui est essentiel à la survie et à la prolifération des cellules progénitrices B mais également indispensable à la maturation des cellules pro‐B et qui se trouve impliqué dans le réarrangement des chaînes lourdes et légères des Ig (Bertolino et al. 2005; Clark et al. 2014). Au stade pro‐B (B220lo/ CD19+/ CD43+/ IgM‐), les cellules vont exprimer d'autres marqueurs de surface tels que B220 (ou CD45R, impliqué dans la modulation de la transduction du signal via le BCR (Justement 2001)), CD19 (jouant un rôle important dans la différentiation et la prolifération des cellules B (de Rie et al. 1989)), CD43 (impliqué dans l'adhésion et la survie cellulaire (Rosenstein, Santana, and Pedraza‐Alva 1999)) et CD79a/CD79b (ou Igα/Igβ, constituant le module de transduction du signal). Au stade pré‐B (B220lo/ CD19+/ CD43‐ IgM‐ ), les cellules vont perdre l'expression de CD43 mais vont exprimer d'autres protéines de surface comme CD20 (dont le rôle est d'agir comme un canal à ions calciques qui va permettre de réguler l'activation des cellules B (Walshe et al. 2008)). Le passage du stade pré‐B au stade B immature (B220lo/CD19+/ CD43‐/ IgM+) se traduit par l'expression de l'IgM de surface nouvellement formée. Le stade B mature (B220hi/CD19+/ CD43‐/ IgM+) se traduit, quant à lui, par une augmentation de l'expression de B220 ainsi que par l'apparition de l'expression 44 CSH Molécule Fonction Flt3 Signalisation Kit Pro‐B Pré‐B B immature B mature Signalisation IL‐7R Récepteur l'IL‐7 facteur de croissance E2A/EBF CD19 Signalisation B220 Signalisation CD43 Adhésion/survie CD79 Signalisation Lin Marqueurs des cellules matures IgM Reconnaissance antigénique Ikaros Pax5 Figure 20: Expression des molécules de surfaces et de gènes impliqués dans le développement des lymphocytes B La maturation des cellules B implique l'expression différentielle de nombreux régulateurs dont les fenêtres d'expression sont indiquées en orange. C‐ Les différents régulateurs de la lymphopoïèse B Comme pour la lymphopoïèse T, un grand nombre de régulateurs spécifiques intervient au cours de la lymphopoïèse B dans le but de contrôler les différentes étapes de maturation (Figure 20) (Laurenti et al. 2013). L'étape de différenciation des CSH en cellules PM fait intervenir différentes protéines comme des chimiokines et des facteurs de transcription. En effet, le microenvironnement médullaire sécrète la chimiokine CXCL12 (ou SDF‐1 pour « Stromal cell Derived Factor 1) qui va se lier au récepteur CXCR4 présent à la surface des CSH et va ensuite va agir comme un facteur de croissance pour les précurseurs B (Nagasawa 2015). D'autres facteurs nécessaires au développement des CSH existent. Parmi eux se trouvent les facteurs de transcriptions PU.1 et Ikaros. La concentration de PU.1 influence l'engagement des CSH vers le lignée lymphoïde ou la lignée myéloïde (Hosokawa et al. 2018) et est essentielle pour le développement des progéniteurs multipotents au cours de l'hématopoïèse (Pang et al. 2018). Un taux d'expression faible de PU.1 corrèle avec l'entrée dans la voie lymphoïde, tandis qu'une expression élevée est associée à une entrée dans la voie myéloïde (DeKoter and Singh 2000). De plus, il a été montré que l'absence d'expression de PU.1 dans des embryons murins (viables jusqu'à 18 jours de gestation seulement) engendre la perte d'expression des transcrits RAG1/RAG2 et de gènes spécifiques de la lignée B (comme VpréB) ainsi que l'absence de progéniteurs des lymphocytes B dans le foie foetal (Scott et al. 1994). Quant à Ikaros, son rôle majeur dans la différenciation lymphoïde a été mis en évidence principalement grâce aux m s d'invalidation du gène chez la souris, dont la conséquence observée fut l'absence de cellules pro‐B et pré‐B dans la moelle osseuse, un blocage de la lymphopoïèse et une diminution des effecteurs de la recombinaison V(D)J (J. H. Wang et al. 1996; Kirstetter et al. 2002; Heizmann, Kastner, and Chan 2018). D'autres facteurs de transcription ont été montrés comme étant nécessaires à la différenciation des cellules progénitrices en PLC. Parmi eux, Hoxa9 et Flt3, qui agissent en synergie. Par ailleurs, il été mis en évidence que l'inhibition d'un de ces 2 facteurs diminue de manière drastique le nombre de PLC ainsi que l'ensemble des cellules B qui en découle (Gwin et al. 2013). La différenciation des PLC en cellules pro‐B requiert plusieurs régulateurs comme l'IL‐7, E2A et EBF. En effet, l'interaction de l'IL‐7, sécrété par les cellules stromales de la moelle osseuse, avec son récepteur IL‐7Rα (ou CD127), présent à la surface des lymphocytes B, est indispensable à la survie, à la différentiation et à la prolifération des cellules B (Corfe and Paige 2012). L'IL‐7 va également réguler l'activité de régulateurs de transcription tels que E2A et EBF (pour early B cell factor) essentiels à la maturation des PLC en cellules pro‐B (Singh, Medina, and Pongubala 2005). Une étude a montré que E2A et EBF sont capables d'induire les réarrangements Vκ‐Jκ et Vλ‐Jλ, ainsi que le réarrangement DH‐JH, dans une lignée de cellules non‐B lorsqu'ils sont en présence des recombinases RAG‐1 et RAG‐2, suggérant ainsi que ces deux facteurs participent activement au réarrangement des Ig (Bain et al. 1994; Romanow et al. 2000). Il a également été démontré que le facteur de transcription C/EBPα est requis pour la maturation des PLC en cellule pre‐pro‐B (H. Guo et al. 2018). Pour finir, un autre régulateur de la lymphopoïèse B a été mis en évidence, appelé Pax5. L'expression de Pax5 est observée du stade pro‐B jusqu'au stade B mature mais est absente dans les cellules plasmatiques différenciées (Barberis et al. 1990). Son expression dans les cellules pro‐B est notamment permise par les facteurs E2A et EBF et est essentielle au maintien des cellules pro‐B dans leur voie de différenciation (Cobaleda et al. 2007). D'ailleurs, son invalidation chez la souris engendre un blocage de la lymphopoïèse B au stade pro‐B (Nutt et al. 1997). Pax5 va également réprimer des s non spécifiques de la lignée B comme CD33 (exprimé à la surface des cellules myéloïdes) et activer les gènes spécifiques de la lignée lymphoïde comme CD79a, CD19 et CD21 (Cobaleda et al. 2007). Par ailleurs, son rôle dans le processus de recombinaison V(D)J a été montré dans différentes études. En effet, l'étude des associations VH‐DH‐JH chez des souris Pax5 ‐/‐, a montré que ces souris présentent une diminution des réarrangements des segments VH‐DJH de 50 fois comparées aux témoins (Nutt et al. 1997). Cependant, aucune altération dans les réarrangements DH‐JH n'a été observée (Nutt et al. 1997). De plus, il a été montré que Pax5 pouvait induire le réarrangement des VH distaux en modifiant la conformation spatiale du locus IgH qui, en se contractant, rapproche les VH distaux des segments DH/JH réarrangés (Fuxa et al. 2004). D‐ Les sélections positive et négative des LB D.1‐ Sélection positive via le pré‐BCR De la même manière que pour les LT, différents points de contrôle durant la lymphopoïèse B ont été décrits pour éviter la production de BCR non productifs ou autoréactifs. Le premier point de contrôle est effectué au stade pré‐B, après formation du pré‐BCR, dans le but d'éliminer les cellules B ayant réarrangés les segments de chaînes lourdes de façon non productive. Cette sélection est notamment permise par la transduction du signal passant par le complexe Igα/Igβ, qui engendre un blocage de la différentiation des cellules B au stade pré‐ B lorsqu'ils sont absents, sans affecter le réarrangement de la chaîne lourde (Pelanda et al. 2002). Un blocage au stade pré‐B est également observé chez les souris présentant une mutation dans la partie constante de leur chaîne μ, montrant ainsi son importance pour la prolifération des cellules pré‐B et le passage au stade B immature (Kitamura et al. 1991). La déficience en protéines λ5 et VpréB chez la souris diminue aussi fortement le nombre de cellules pré‐B dans la moelle osseuse mais influence peu le développement final des cellules B qui sont présentes en nombre normal en périphérie et dont la réponse immunitaire est similaire à celle observée chez les souris contrôles (Shimizu et al. 2002). Cependant, chez l'Homme, la déficience de λ5 engendre une déficience sévère en cellules B dans le sang menant à une agammaglobulinémie (déficit en Ig dans le sang) (Minegishi et al. 1998). L'ensemble de ces résultats montre que les éléments constituant le pré‐BCR sont indispensables pour la maturation des cellules pré‐B. Le mécanisme qui conduit à la sélection positive des cellules B n'est pas totalement élucidé. Selon travaux du groupe de Melchers, le signal de sélection serait « tonique », c'est‐à‐dire délivré indépendamment de la reconnaissance d'un quelconque ligand exogène par le pré‐BCR et il dépendrait de la queue riche en arginine au niveau de la protéine λ5 (Ohnishi and Melchers 2003). D'autres groupes ont montré que ce signal de sélection pourrait être fourni par la reconnaissance d'un ligand exprimé par le stroma médullaire comme l'héparane sulfate (Bradl et al. 2003) ou la galactine‐ 1 (uniquement chez l'Homme) (Gauthier et al. 2002).
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Transgresser pour déconstruire. Deborah de Robertis : l’impertinence contre le pouvoir. Savoirs en Prisme, 2019, 11, pp.145-161. &#x27E8;hal-03768376&#x27E9;
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Transgresser pour déconstruire. Deborah de Robertis : l’impertinence contre le pouvoir Cet article analyse la production artistique de Deborah de Robertis, qui fait polémique depuis 2014 lorsqu’elle a exposé son sexe devant l’Origine du monde de Gustave Courbet au musée d’Orsay. Afin de renverser le regard masculin exercé sur l’œuvre, l’artiste incarne le modèle de tableaux célèbres sans autorisation des musées dans lesquels elle performe, donnant lieu à plusieurs gardes à vue et procès. Il s’agit de montrer comment l’artiste dépasse la simple provocation pour formuler un discours artistique et politique, tout en se concentrant sur son impertinence prenant des risques quant à l’autorité. Cette étude pose d’abord la question d’un certain conformisme face à la création d’artistes femmes des années 1970, avant d’examiner le caractère subversif de ses œuvres qui entrent en rupture avec l’ordre moral. L’étude analyse enfin les rapports de pouvoir qu’entretiennent l’artiste et l’institution muséale afin d’obtenir une vue d’ensemble des occurrences que prend l’audace dans sa production artistique. This article analyzes the artistic production of Deborah de Robertis, who has been controversial since 2014 when she exposed her sex in front of Gustave Courbet’s Origine du monde at the Musée d’Orsay. In order to reverse the male gaze on works of art, the artist embodies the model of famous paintings without permission of the museums where she performs, giving rise to several police custodies and trials. The question is about showing how the artist goes beyond simple provocation to formulate an artistic and political discourse, while focusing on her impertinence, taking risks with authority. This study first asks the question of some conformism to the creation of women artists of the 1970s, before examining the subversion of her works of art which break with traditional moral values. Finally, this study analyzes the relations between the artist and museums in order to obtain a general idea of the number of occurrences that daring takes in her artistic production. Mots clés : féminisme, genre, censure, musée, art Keywords: Feminism, Gender, Censorship, Museum, Art Le scandale de la performance de Deborah de Robertis au musée d’Orsay le 29 mai 2014 l’a fait connaître du grand public. Intitulé Miroir de l’origine, son geste clandestin, lors duquel elle écarte son sexe avec les doigts devant l’Origine du monde de Gustave Courbet, révèlerait une sorte de hardiesse qui consiste à dévoiler ce qu’elle a de plus intime ainsi que de mettre son corps au service de son art, prenant le risque de se faire arrêter par les autorités et de subir plusieurs gardes à vue et procès. Cette sorte d’audace pourrait être prise à première vue comme de la pure provocation, mais elle ne semble pourtant pas être voulue de manière systématique ni opportuniste. On constate en effet que les institutions muséales et les galeries sont assez réticentes à sa production1 et lui apportent peu de profit financier2. Il est également observable que l’artiste tire peu de bénéfice en termes d’image sociale puisque les médias peinent, pour la plupart, à dégager le point de vue artistique de ses performances, livrant parfois une image erronée ou dévalorisante de l’artiste3. Depuis cette première action, De Robertis a répété son geste, entre autres, devant l’Olympia en 2016, la Joconde en 2017, des expositions de la photographe Bettina Rheims en 2016 et 2017 et au sanctuaire de Lourdes en 2018, révélant ainsi son souci de construction de l’image doublée d’un discours féministe. Malgré son étroite accointance avec les médias, la production artistique de Deborah de Robertis fait l’objet d’une bibliographie scientifique récente et très peu étoffée, qui s’explique en partie par sa reconnaissance institutionnelle difficile. Le seul travail notable sur l’artiste s’avère être en effet un article de Luc Schicharin, publié dans la revue en ligne Genre, sexualité & société en 2018 (Schicharin, 2018), dans lequel l’auteur se concentre surtout sur la première performance de De Robertis. Schicharin y pose la question des minorités de genre et de la « féminité hégémonique »4 de De Robertis qui, selon lui, limite son propos féministe et délaisse les problématiques liées aux femmes handicapées, transgenres ou racisées, par exemple. Tandis que l’artiste affirme « je suis toutes les femmes » dans Miroir de l’origine, son corps devenant alors symboliquement représentatif de la pluralité des femmes, Schicharin insiste sur le fait qu’elle n’interrogerait pas sa féminité mais se focaliserait exclusivement sur la déconstruction du regard masculin qui s’opère dans les œuvres d’art. L’intérêt de la recherche sur De Robertis étant en voie de développement, il ne s’agit pas ici de mettre en relief la problématique de Schicharin mais de l’enrichir par une réflexion menée sous le prisme de l’audace. Si l’artiste use de la provocation, cette dernière ne sert en effet ni sa publicité ni sa cote marchande. L’audace serait appréhendée ici comme un geste de résistance associé à une recherche Luc Schicharin affirme d’ailleurs que les musées n’y voient qu’un « trouble à l’ordre public » (Schicharin, 2018 : en ligne § 7). Un article de Libération fait mention de « son petit studio du nord parisien » (Gallot, Luc Schicharin prend, entre autres, l’exemple de l’émission radio diffusée à laquelle Deborah de Robertis fut invitée (Goumarre, 2016) et où l’artiste exprime sa frustration dans son entretien avec Éloïse Bouton en 2016. Luc Schicharin définit cette « féminité hégémonique » comme « une forme de féminité idéalisée dans un contexte historique, social, politique donné », désignant ainsi une femme « hétérosexuelle, blanche, jeune, valide, correspondant aux canons de beauté de son époque » (Schicharin, 2018 : en ligne §28). L’audace : vertu, valeur? Deborah de Robertis : l’impertinence contre le pouvoir artistique et poétique, et non pas comme une volonté médiatique de faire scandale. Comme l’annonce l’historienne de l’art Isabelle de Maison Rouge en 2017, « le provocateur est celui qui révèle [...], il amène à s’interroger, à regarder le monde autrement » (De Maison Rouge, 2017 : 172). Il est alors légitime, afin de pallier la lacune historiographique concernant De Robertis, de poser la question de la manière dont l’artiste dépasse la simple provocation pour formuler un discours artistique et politique. En s’appuyant sur des sources textuelles de première main, telles que le chapitre « #MeToo, l’émancipation par le regard » rédigé par De Robertis dans l’ouvrage collectif Cours petite fille! #metoo #timesup #noshamefist, publié en 2019, et son entretien avec l’ex-Femen Éloïse Bouton en 2016, cette étude tend à analyser et recontextualiser une œuvre en particulier : Olympia, droit de réponse, réalisée le 16 janvier 2016, pendant laquelle l’artiste lit un texte adressé au directeur du musée devant l’Olympia d’Édouard Manet. Il s’agit de la deuxième performance de De Robertis, effectuée aussi au musée d’Orsay, et qui constitue, comme l’annonce son titre, un droit de réponse à la plainte du musée suite à sa première action artistique. Cette œuvre se décompose en trois temps, avec d’abord la conception d’une photographie5, puis la performance elle-même qui est, enfin, montée en vidéo. L’étude de cette œuvre est justifiée ici en ce qu’elle rend explicite la prise de risque de De Robertis quant à l’autorité pour transgresser et déconstruire le regard masculin normatif. Après avoir posé la question d’un certain conformisme, les différentes performances de De Robertis se référant, volontairement ou non, à plusieurs artistes féministes des années 1970 et 1980, il s’agit d’examiner le caractère subversif de ses œuvres qui établissent une rupture avec l’ordre moral. Les rapports de pouvoir qu’entretient l’artiste avec l’institution muséale sont enfin étudiés afin d’obtenir une vue d’ensemble des occurrences que prend l’audace dans sa production artistique. S’inscrire dans la lignée des artistes féministes des années 1970 : un conformisme dans la forme? Si l’audace peut être appréhendée comme le courage de formuler quelque chose de nouveau et d’original, il serait possible d’affirmer a priori que la production de Deborah de Robertis manifeste une sorte de conformisme dans la forme, en ce qu’elle s’inscrit dans une histoire d’une certaine pratique artistique. Lorsque l’artiste se dénude et s’allonge devant l’Olympia de Manet, son action serait comparable à la pratique du tableau vivant qui date de la seconde moitié du XVIIIe siècle, consistant en la reconstitution performative d’un tableau déterminé (Ramos, 2014 : 124). De Robertis s’éloigne pourtant de la mimesis en ce 5 Cette photographie est visible au début de la vidéo de la performance, qui est disponible sur le compte officiel Viméo de Deborah de Robertis (De Robertis, 2016). qu’elle prend une distance par rapport à la composition du tableau de 18636 : il ne s’agit en fait pas d’une reconstitution fidèle mais d’une réinterprétation, c’est-à-dire que très peu dans l’exécution renvoie au sujet de la peinture initiale. Son œuvre se rapprocherait donc davantage de la pratique du re-enactment, pouvant être traduite par « reconstitution jouée », qui s’avère être une reprise par un artiste d’une œuvre antérieure dont il est l’auteur ou non. Comme l’annonce Aline Caillet dans son article « Le re-enactment : refaire, rejouer ou répéter l’histoire? », publié en 2013, le re-enactment « se déploie dans un espace et un temps qui lui sont propres [...] et semble destituer par là même le couple modèle/copie » (Caillet, 2013 : en ligne § 5). L’exactitude n’est donc pas l’effet désiré, puisqu’il s’agit d’une réactivation du tableau pour le temps présent. Quant à la création qui s’est effectuée autour du tableau de Manet suivant la même pratique artistique qu’avaient employée Robert Morris et Carolee Schneemann en 1964 ou Yasumasa Morimura en 1988 par exemple, Deborah de Robertis affirme dans « #MeToo, l’émancipation par le regard » qu’elle « [s]’autorise un pas de plus dans l’histoire » (De Robertis, 2019 : 112), rendant compte de sa volonté de dépasser le geste artistique qui la précède. Pour ce faire, elle conçoit un travail de terrain, investissant les lieux au plus près de l’œuvre ciblée pour lui donner une corporalité concrète. De Robertis s’inscrit ainsi dans une histoire de l’art façonnée à partir des années 1960 par des artistes femmes utilisant en public leur corps comme instrument radical de contestation sociale. Dans son texte de 2019, elle fait consciemment référence à plusieurs noms : avec ses premiers films Le modèle à la caméra et Les hommes de l’art, l’artiste s’inscrit « dans la lignée d’Andrea Fraser » (De Robertis, 2019 : 110), sa série photographique Mémoire de l’origine précédant sa performance devant le tableau de Courbet « [se] rapproche alors de l’artiste féministe Valie Export » (De Robertis, 2019 : 111), « [son] dispositif renverse les rôles préétablis qui puisent leur source dans une histoire de l’art où ‘les femmes doivent être nues pour entrer au musée’ [Guerrilla Girls, 1989] » (De Robertis, 2019 : 113). Il est donc possible de rapprocher la production de De Robertis de celle des Guerrilla Girls, un groupe de femmes artistes anonymes fondé aux États-Unis au milieu des années 1980, qui fait le constat de l’inégalité historique eu égard au manque d’artistes féminins dans les collections des musées, dans lesquelles les femmes sont le plus souvent présentes nues dans les œuvres peintes. Pour le Public Art Fund de New York, soutenant les projets artistiques et publics dans la ville, les Guerrilla Girls réalisent l’affiche Do women have to be naked to get into the Met. Museum? en 1985. Sur un fond jaune vif, elles donnent à voir la Grande Odalisque d’Ingres en noir et blanc avec un masque de gorille sur la tête, faisant référence à celui qu’elles portent lors de leurs interventions publiques afin de garder l’anonymat. Telle une enquête, l’affiche démontre par des statistiques les inégalités et la discrimination de l’institution muséale. En effet, les femmes y sont des objets d’exposition, peints et souvent nus, mais pas des artistes. Comme 6 Deborah de Robertis performe seule, sans « servante noire », avec pour seuls accessoires un bouquet de fleurs, sa caméra GoPro et son texte adressé au directeur du musée d’Orsay qu’elle lit. L’audace : vertu, valeur? Deborah de Robertis : l’impertinence contre le pouvoir l’affirme Jennifer Blessing, le Public Art Fund refuse l’affiche à cause de la forme phallique de l’éventail que tient l’Odalisque et non de la nudité. Les Guerrilla Girls ont alors placardé leur affiche sur des espaces publicitaires loués à une compagnie de bus de New York qui, après avoir reçu de nombreuses plaintes, finit par les enlever (Blessing, 2016 : 193)7. Deborah de Robertis et les Guerrilla Girls procèdent ainsi à une reprise, par le vocabulaire performatif ou publicitaire, de tableaux de maîtres avec une intervention au sein de la représentation, que ce soit avec une perruque et du maquillage ou avec un masque de gorille. Il s’agit néanmoins de deux approches différentes : si les Guerrilla Girls utilisent des faits chiffrés et le texte dans une visée militante contre la discrimination sexuelle, De Robertis réalise davantage un travail visuel et performatif afin de se légitimer en tant qu’artiste tout en incarnant le modèle. Il est donc question d’une formulation à la fois théorique et plastique sur l’instrumentalisation traditionnelle des femmes dans l’art ainsi que de leur manque de place dans l’institution muséale. Dans la mesure où les artistes femmes citées par De Robertis sont institutionnalisées, c’est-à-dire qu’elles ont été légitimées par des expositions monographiques ou groupées, les citer revient à convoquer leur protection en ce qu’elles rentrent dans l’histoire de l’art. En effet, De Robertis rappelle que sa production s’appuie sur une histoire tangible, ce qui révèle donc une certaine volonté de légitimation afin de pallier sa faible reconnaissance institutionnelle8 et médiatique9. Les conférences et entretiens offrent à Deborah de Robertis des espaces pédagogiques et de diffusion dans lesquels elle peut faire exister son discours, prolongeant ses œuvres et faisant valoir son autorité d’artiste. Sa prise de parole sert en effet moins sa promotion qu’elle ne sert à permettre au public de saisir les enjeux théoriques et artistiques de sa production. Cette pratique est d’ailleurs analysée, à travers l’étude d’artistes comme Daniel Buren et Robert Smithson, entre autres, par Laurence Corbel dans son article de 2009 dégageant la figure de « l’artiste-historien » qui ferait « en même temps que l’Histoire de l’art, de l’histoire de l’art » (Corbel, 2009 : en ligne § 1). L’auteure affirme que ces artistes remettraient en question son cloisonnement disciplinaire en révélant notamment le caractère social de l’art et la position politique des œuvres. Proposer de nouvelles analyses subjectives se rapprocherait également de la pratique théorique des artistes femmes des années 1970, qui, selon Elvan Zabunyan, leur permettrait de « combler un vide critique les concernant » (Zabunyan, 2011 : 136) dans le contexte d’un monde de l’art sexiste qui les écarte. Zabunyan insiste sur le fait que leur prise de parole revêt une fonction politique, puisqu’elles tendent à déconstruire la domination masculine dans ce milieu. De Robertis s’inscrirait 7 8 9 De nouvelles versions de l’affiche ont été par la suite éditées en 2005 et 2012 lors de plusieurs expositions, présentant des donnés chiffrés actualisés. L’artiste affirme, par exemple, que « le rapprochement de mon travail avec celui d’artistes telles qu’Annie Sprinkle, Valie Export ou avec le tableau de Courbet était pour eux [galeristes et critiques d’art totalement inexistant » (De Robertis, 2019 : 111). Deborah de Robertis fait référence « aux idées reçues » sur son travail (De Robertis, 2019 : 110). alors davantage dans cette pratique théorique et politique, dans la mesure où elle relève plus d’une volonté de prendre place dans l’histoire de l’art et de changer sa trajectoire que de la refaire dans son fondement. Tandis que Luc Schicharin dégage une « esthétique Femen-iste » chez l’artiste, qui selon lui, utilise la nudité de la même façon que le groupe militant des Femen10 mais dans une dimension artistique (Schicharin, 2018 : en ligne § 25), De Robertis cite, dans son texte de 2019, une référence politique qui entretient un lien étroit avec l’art : « À la manière de Fontana mais aussi de Mary Richardson, j’ai ouvert mon sexe pour déchirer la toile. Mon geste est à la fois pictural et radicalement contestataire » (De Robertis, 2019 : 110). Tout en créant une analogie entre l’acte politique et l’acte créateur qui rend compte du fait que l’artiste doit agir dans la société, la mention de cette suffragette, figure historique qui attaqua en 1914 la Vénus à son miroir de Vélasquez avec un couperet, en protestation contre l’arrestation de sa consœur Emmeline Pankhurst, lui confère un sens d’affiliation. Ainsi, lorsque l’artiste annonce « pour #Noustoutes en tant qu’artiste je me ré-approprie l’histoire de l’art à la manière dont les femmes se ré-approprient la rue » (De Robertis, 2019 : 113), elle s’associe à une histoire visuelle et politique qui aujourd’hui est reconnue de manière collective. Les références politiques et artistiques faites de manière consciente par Deborah de Robertis s’avèrent être encore plus légitimes au regard du contexte historique et social, révélant une continuité des problématiques féministes. À partir de la fin des années 1960, les femmes acquièrent plus d’indépendance dans la vie sociale dans leurs rapports avec les hommes. La libéralisation sexuelle de 1968 se voit, par exemple, concrétisée par l’adoption de la loi Veil en 1975, qui donne le droit à la contraception et à l’avortement (Porhel, Zancarini-Fournel, 2009 : 12). Cependant, la fin des années 1970 est marquée par le capitalisme intégré, contre lequel les artistes revendiquent le corps par la performance, en particulier, puisque celui-ci est en effet non achetable par le marché de l’art et la société bourgeoise. Dans les années 1980, l’idéologie néolibérale, procède, comme avec Thatcher en Angleterre ou Reagan aux États-Unis, à un retour en arrière, notamment en ce qui concerne la valorisation corporelle. Après les crises du néolibéralisme dans les années 2000, selon la philosophe féministe Nancy Fraser, les inégalités économiques et sociales entre les sexes se retranscrivent au niveau politique, dans lequel il manque une représentation institutionnelle (Diter, 2012 : en ligne § 2). Il s’agirait alors d’un féminisme en quête de reconnaissance dans une justice sociale qui tente de combattre les disparités économiques et culturelles. Par exemple, la loi relative à l’égalité entre les femmes et les hommes dans la sphère professionnelle, publique et privée, prévoyant notamment des actions de lutte contre la précarité des femmes est promulguée le 4 août 201411, année de la première performance de De Robertis au musée d’Orsay qui s’inscrit ainsi dans son environnement historique. 10 L’artiste reprend d’ailleurs, avec ses performances Naked Pussy en 2017 et Bloodwar en 2018, des œuvres de Bettina Rheims qui avait photographié les Femens. 11 Loi n° 2014-873 L’audace : vertu, valeur? Deborah de Robertis : l’impertinence contre le pouvoir L’artiste concilie l’acte artistique et l’acte militant, qui sont d’ailleurs deux des composants de la représentation de soi, comme le formule Abigail SolomonGodeau. En effet, cette critique d’art américaine rappelle que dans la langue allemande, deux termes sont utilisés pour exprimer l’acte de représenter : d’abord, « Darstellen », qui peut être traduit par « représenter » dans le sens de construire une image plastique, puis « Vertreten » qui signifie le fait de prendre la parole pour défendre une cause (Solomon-Godeau, 2016 : 231). De Robertis se met alors en scène afin de donner forme plastiquement et intelligiblement à l’histoire de la création artistique féminine et féministe. Il est donc observable, au niveau de la forme, que la production de l’artiste relève d’un certain conformisme dans un souci de légitimation, par des références aux artistes féministes des années 1970 et 1980 qui se justifient par la continuité des problématiques politiques. De Robertis s’en détache néanmoins de par le caractère clandestin de ses performances réalisées sans l’autorisation des institutions, mais aussi du point de vue conceptuel. Son œuvre, au niveau de l’idée, ne semble en effet pas moins audacieuse, puisque sa recherche plastique et théorique, notamment sur le regard, tend à remettre en question le système de genre produisant des rapports de pouvoir entre homme et femme. Une déconstruction subversive des inégalités de genre par le regard Deborah de Robertis semble faire de l’audace un impératif moral selon lequel elle se fait une responsabilité d’artiste d’examiner le conditionnement qui façonne le savoir, et plus particulièrement celui de l’histoire de l’art en interrogeant les œuvres fondamentales qui la constituent, dans lesquelles les femmes sont représentées d’une certaine manière. Pour ce faire, l’artiste réalise une photographie peu avant sa performance du 16 janvier 2016, dans laquelle elle reprend la position de l’Olympia, portait d’une femme qui, d’après son titre, serait une prostituée parisienne. De Robertis engage alors sa propre nudité qui, selon elle, s’avèrerait être « un trompe-l’œil, un vêtement qui fait référence aux nus féminins » (De Robertis, 2019 : 115). Son corps renvoie ainsi au déguisement et au maquillage, qui est d’ailleurs usité dans sa photographie avec l’emploi de la perruque, du blanchiment de la peau, du noir autour des yeux et du rouge à lèvres. Elle parodie également la sensualité et la séduction de l’Olympia en reprenant son orchidée et son bijou autour du cou. Il est donc possible d’affirmer que l’artiste ne s’oppose pas à, mais fait le constat de la femme dépeinte par l’homme comme un simulacre et une projection. La figure de la femme est alors appréhendée ici telle la « femme-comme-représentation » qu’Abigail SolomonGodeau définit comme un signe évacuant « toute notion de féminité authentique, telle qu’elle existe en dehors de la représentation » (Solomon-Godeau, 2016 : 234 ; 236). En d’autres termes, l’image n’établirait plus de correspondance avec la réalité. Sur sa photographie, Deborah de Robertis dissimule avec son bouquet de fleurs ce qu’elle a dévoilé au musée d’Orsay deux ans plus tôt et ce qu’Olympia cache avec sa main : le sexe féminin, motif artistique auquel plusieurs cultures attribuent, en différents temps, certaines qualités et fonctions. En effet, les sculptures britanniques souriantes de Sheela-na-gig12 écartant leurs vulves à deux mains soit revêtent un caractère apotropaïque (qui éloigne le mal) soit constituent un avertissement contre la luxure. De la même manière, les statuettes Dilukai13 des îles Carolines, qui représentent une femme les jambes écartées, devaient soit éloigner les hommes bannis en ce qu’elles représentaient la figure de la sœur dont ils ne peuvent voir la nudité, soit mettre en garde les femmes pour qu’elles restent chastes (Blessing, 2016 : 144 ; 200). Ainsi, lorsque l’artiste justifie l’expression « je suis toutes les femmes » en annonçant que « [son] sexe devient un sexe public, politique, plastique, le sexe de l’origine » (De Robertis, 2019 : 111), elle formule une sorte de dénonciation du fait que les œuvres de l’histoire de l’art, mais aussi de la société dans son ensemble, font du sexe féminin une allégorie, c’est-à-dire que le corps des femmes constitue un lieu de fiction. L’historien de l’art Jean Clair établit d’ailleurs un parallèle entre la vulve féminine et la figure mythologique de Méduse (Clair, 1989 : 121), analogie reprise par Pascal Quignard, en 1994, qui fait du sexe de la femme l’endroit où se mêlent la beauté et l’effroi (Quignard, 1994 : 103). Selon lui, la vénération de la peur renvoie en effet au verbe « méduser », qui, lui-même, évoque le regard pétrifiant de la gorgone, dont il rend manifeste l’érection statuaire du sexe masculin. À l’instar de Persée, il faudrait un miroir, un renversement du regard pour vaincre la créature mythologique et être sauvé du danger. Deborah de Robertis reprend à son compte ce système de renversement en miroir et use de son regard objectivant gorgonien dans une visée ironique, parodiant ces idées fixes masculines en ce qui concerne le corps féminin. Si, effectivement, l’Olympia de Manet a fait scandale, notamment à cause du regard de la prostituée qui vise frontalement l’observateur, l’artiste affirme que « c’est en prenant la caméra [qu’elle a] pris le pouvoir » (De Robertis, 2019 : 109). Autrement dit, son œuvre consiste à conférer un regard au modèle, dont il est rendu compte plastiquement par la caméra GoPro fixée sur son front sur la photographie ainsi que pendant la performance. L’artiste conçoit ce que Sophie Delpeux nomme en 2010 un « corps-caméra », c’est-à-dire que le corps, en tant que « nouveau ‘plan de représentation’ » (Delpeux, 2010 : 20) peut devenir image tout en produisant des images. Le « corps-caméra » de De Robertis s’avère être alors un corps-enregistreur, qu’il est possible ici de comparer à l’œuvre Adjungierte Dislokationen que réalise Valie Export en 1973 : l’artiste autrichienne se fait filmer portant en mouvement deux caméras, l’une sur sa poitrine et l’autre sur son dos, toutes ces images enre Les sculptures de Sheela-na-gig, dont une datant de vers 1140 dans l’église des saints Marie et David à Kilpeck, dans le Herefordshire au Royaume-Uni, sont le plus souvent positionnées sur une corniche d’église de campagne britannique et sont généralement appréhendées comme des divinités de la fertilité. Ces statuettes de pignon, dont une datée entre le XIXe et le début du XXe siècle conservée au Metropolitan Museum of Art à New York, étaient positionnées au-dessus de l’entrée d’une maison réservée aux hommes. L’audace : vertu, valeur? Deborah de Robertis : l’impertinence contre le pouvoir gistrées étant ensuite projetées simultanément et plan par plan. Cette réflexion sur la démultiplication des points de vue créée par un corps considéré comme médium (Delpeux, 2010 : 144) rend compte de la caméra comme prolongement du corps mais aussi de la possibilité du médium vidéographique de monter et de prolonger le temps de l’action, par essence éphémère. Cependant, contrairement à Valie Export, et comme le remarque Schicharin, De Robertis « observe la manière dont elle est observée, elle objective l’objectivation » (Schicharin, 2018 : en ligne § 18). Dans la photographie, le miroir positionné derrière l’artiste sert à montrer ce qu’enregistre la caméra GoPro, c’est-à-dire la photographe elle-même, tandis que les images enregistrées en performance donnent à voir les visit eurs, les gardiens de salle et les policiers si le musée en appelle à l’aide. Néanmoins, en performance, ce n’est pas tant la réaction du public qui intéresse l’artiste, car « il s’agissait de repenser une Olympia contemporaine qui à travers l’objectif de la caméra GoPro renverse radicalement le point de vue occidental traditionnel » (De Robertis, 2019 : 112). Ce renversement de point de vue passerait par ce que Magali Nachtergael appelle le « déplacement de l’obscène » (Nachtergael, 2016 : 56). Il s’agit en fait de donner à voir un nu féminin banalisé qui ne serait plus objet de désir et qui permettrait aux femmes, en cela, de reprendre le pouvoir de leur corps et de son image. Pour ce faire, il est question d’« [ôter] au male gaze le privilège de ses passe-partout visuels » (Nachtergael, 2016 : 56). Il faudrait ici analyser plus spécifiquement ce « male gaze » afin de bien appréhender la stratégie de représentation de l’artiste. Dans l’article pionnier « Visual Pleasure and Narrative Cinema » publié en 1975 (Mulvey, 1975)14, la critique et réalisatrice Laura Mulvey distingue trois types de regards : celui de la caméra, celui du public et celui des personnages. Il est possible de retranscrire ce schéma dans le champ de l’art plastique, avec le regard de l’artiste, remplaçant celui de la caméra, puis celui du spectateur et celui des personnages du tableau. Selon l’auteure, le cinéma hollywoodien assemblerait les regards de la caméra et du public afin d’orienter le regard du spectateur. Cependant, Laura Mulvey part du postulat que le masculin actif, porteur de l’action et qui correspondrait à un moi idéal, projette son fantasme sur le féminin passif. Ainsi, la femme est avant tout caractérisée par le désir masculin et devient un objet érotique à la fois pour les personnages du film ou du tableau mais aussi pour le spectateur. Le cinéma d’Hollywood tendrait donc à un plaisir visuel dont l’érotisme est orienté dans le sens du patriarcat dominant, que le grand public doit suivre pour avoir un sentiment de satisfaction. Compte tenu de la réflexion de Mulvey, Deborah de Robertis procèderait à un retournement du système traditionnel de l’appréhension de l’œuvre d’art. Elle devient spectatrice du regard porté sur elle, disposant d’un pouvoir d’objectivation. L’érotisme n’est ainsi plus orienté dans le sens du patriarcat dominant, avec le fantasme de la possession des corps féminins, mais bien dans celui 14 Le titre de l’article peut être traduit par : « Plaisir visuel et cinéma narratif ». Laura Mulvey y dénonce le sexisme dans les films hollywoodiens, en faisant une analyse psychanalytique du désir du spectateur afin de procéder à une déconstruction du regard masculin [le male gaze] sur la femme au cinéma. d’une artiste femme qui met en scène son propre corps. Avec la caméra GoPro en tant que signe plastique matérialisant son point de vue, l’artiste se rapprocherait d’un art phénoménologique qui propose une réflexion sur la manière dont on est perçu et dont on perçoit. Il est alors possible d’affirmer qu’elle pense le monde selon la formule du philosophe George Berkeley « Esse est percipi aut percipere »15 (Berkeley, 1710), c’est-à-dire qu’elle s’avère être réceptrice, témoin du regard qui s’opère sur elle et qui tend à l’objectiver. Néanmoins, comme l’indique Schicharin, il est possible d’interroger le renversement établi par De Robertis comme un effet de miroir (Schicharin, 2018 : en ligne § 18), puisque les images enregistrées sont retravaillées au montage et semblent, en cela, être davantage un point de vue subjectif qu’un constat objectif. Cette question qui mériterait d’être plus développée donne tout de même à voir fait que l’artiste créée ellemême de l’idéologie par l’image, mais qu’elle reste dans une visée dénonciatrice et critique de ce conditionnement que les représentations façonnent. Cessant d’être un objet passif pour devenir un sujet actif, Deborah de Robertis fait basculer le statut du modèle : « je repense le modèle, et de ce point de vue, mon geste se rapproche davantage de celui du peintre que de celui du modèle » (De Robertis, 2019 : 111). Elle révèle alors une hiérarchie traditionnelle des regards, avec, d’une part, celui dominé de la femme qui est modèle, et d’autre part celui dominant de l’homme qui est artiste. De Robertis convoque d’ailleurs le statut du modèle de Manet, Victorine Meurent « qui, au-delà du rôle de modèle, était peintre elle-même » (De Robertis, 2019 : 112). Même si celle-ci a seulement la fonction de modèle dans le cas d’Olympia, cette mention par l’artiste lui permet de rappeler que, conceptuellement, le modèle participe à l’œuvre grâce à son corps qui s’engage dans la représentation. Dans sa photographie réalisée au même moment que l’exposition Qui a peur des femmes photographes? 1839 à 1945 qui a lieu au musée de l’Orangerie et au musée d’Orsay16, Deborah de Robertis repense la position des deux femmes dans le tableau de Manet, la servante noire étant substituée par Rim Battal, photographe marocaine et amie de l’artiste. Dans le miroir à l’arrière de l’artiste, il est possible de remarquer que le bouquet de fleurs est remplacé par l’objectif de l’appareil photographique de Battal, qui a alors le rôle du peintre qui capture la scène. Néanmoins, il s’agirait ici moins d’avoir une position supérieure d’homme que de donner à voir les rapports entre deux femmes artistes. Sans pour autant conférer un rôle d’objet à Rim Battal, cette collaboration semble en effet être conceptuelle : la photographe est formellement auteure technique de l’image, mais c’est bien De Robertis qui la dirige et la conçoit, restant d’ailleurs seule à performer au musée d’Orsay. Comme elle l’annonce, « non seulement [son] corps [lui] appartient mais les images créées par celui-ci sont [sa] propriété » (De Robertis, 2019 : 112). La question de la propriété intellectuelle du 15 16 Cette expression peut être traduite par : « être, c’est être perçu ou percevoir ». Le président du musée, Guy Cogeval affirme d’ailleurs que « le musée d’Orsay doit s’interroger sur sa politique culturelle et scientifique, [...]. En réalité, la place des femmes artistes n’y a jamais été véritablement évaluée jusqu’ici » (Cogeval, Galifot, Pohlmann, 2015 : 12), inscrivant cette exposition dans une mouvance institutionnelle correspondant à la reconnaissance d ’une histoire de l’art incluant les femmes. L’audace : vertu, valeur? Deborah de Robertis : l’impertinence contre le pouvoir droit d’auteur, posée plus particulièrement lors de sa performance Ma Chatte Mon Copyright devant la Joconde en 2017, renforce donc cette idée. Cette photographie rend ainsi compte d’une tentative d’inversion des rapports de forces qui s’exercent à la fois dans l’image et dans sa conception. En mettant en scène sa propre nudité, Deborah de Robertis conçoit donc dans une posture analytique un corps allégorique qui exprime un regard, révélant une certaine hiérarchie traditionnelle entre le modèle et l’artiste sur laquelle se fonde l’histoire de l’art. Il est alors audacieux pour une artiste de repenser le système dans lequel elle cherche à se définir et qui est en même temps considéré comme acquis. Son audace semble ainsi prendre la forme d’une sorte d’irrespect, son impertinence pouvant être appréhendée, dans d’autres contextes, comme de la grossièreté, comme lorsqu’elle donne à voir les rapports de forces avec l’institution muséale. La mise en scène des rapports de forces : l’ambivalence de la censure institutionnelle Sa réflexion politique prédominant sur son goût du risque, l’audace de Deborah de Robertis ne relève pas de la spontanéité, comme le démontrent les deux années qui séparent sa performance devant l’Origine du monde en 2014 et celle de l’Olympia en 2016. Sa démarche consiste en effet à attendre une exposition ou un évènement culturel qui explicite son discours pour se manifester, puis à étudier sa communication et à l’analyser pour, enfin, jouer avec son égérie. Olympia étant l’œuvre phare de l’exposition du musée d’Orsay Splendeurs et misères. Images de la prostitut ion , 1850-1910 qui s’est tenue du 22 septembre 2015 au 17 janvier 2016, l’artiste l’incarne ainsi afin de constituer un « droit de réponse » à la plainte de l’institution qui suivit sa première performance. Olympia, droit de réponse relève donc d’une volonté de se faire justice, de rentrer en lutte contre le musée d’Orsay qui, selon De Robertis, a porté atteinte à son œuvre. L’artiste rend compte de l’institution muséale comme lieu idéologique fondé sur le capitalisme et porteur d’une certaine histoire de l’art. D’ailleurs, plus récemment avec les sacs Vuitton de Jeff Koons reprenant la Joconde, elle affirme que celle-ci est « vendue et revendue comme une marchandise [...], devenue une femme-sac et la marque d’un des plus grands musées du monde » (De Robertis, 2019 : 113). Deborah de Robertis insiste alors sur le fait que ce lieu de culture au rayonnement mondial et qui exerce une influence sur la société, perd de sa qualité pédagogique initiale en s’inscrivant dans le système marchand. Si dans sa série photographique Mémoire de l’origine elle s’attaque à des artistes de renom dont les œuvres font la spéculation du marché de l’art en s’emparant ironiquement de leur nom et du logo des galeries, De Robertis interroge ici l’institution qui exerce une domination sur l’œuvre : avoir À ce propos, il est intéressant de faire un parallèle avec « Olympia », que j’ai ré-interprétée dans le contexte d’une exposition explicitement racoleuse parmi d’autres, qui, rappelons-le, s’intitulait Splendeurs et misères de la prostitution et qui utilisait le modèle du tableau de Manet comme tête d’affiche. Le modèle féminin associé à une communication chère au musée d’Orsay à l’époque, qui s’apparente à une forme de proxénétisme institutionnel, indiquait : « Venez au musée voir des gens tout nus. » De Robertis, 2019 : 114) L’artiste renverse alors le discours proposé par l’exposition sur la prostitution, les tableaux pouvant être considérés comme des femmes mises en vitrine. Les modèles deviendraient des prostituées et les spectateurs des voyeurs attirés par une communication qui relèverait d’une logique capitaliste dévalorisant les œuvres et les artistes exposés. De Robertis formule donc une critique envers l’institution muséale qui tendrait à présenter les modèles féminins comme des objets sexuels et pornographiques. Il est possible de dresser un parallèle entre ce discours et l’histoire des objets montrés lors de l’exposition. Dans son étude sur les photographies pornographiques du milieu du XIXe siècle, publiée dans le catalogue de l’exposition en 2015, Marie Robert indique en effet que le contrat qui relie les modèles, qui pour la plupart étaient des prostituées, au photographe s’apparentait justement à celui qui relie la prostituée à son proxénète. L’auteure mentionne même qu’en matière de justice, les modèles purgeaient leur peine dans la prison de SaintLazare réservée aux prostituées, mais aussi que les ateliers des photographes se rapprochaient des maisons closes plus précisément avec le dispositif de voyeurisme de la camera obscura. Marie Robert annonce enfin qu’une association était faite entre le photographe et le racolage lorsque celui-ci promouvait ses photographies (Bakker, Cogeval, Pludermarcher, 2015 : 71-78). Guy Cogeval, alors président du musée d’Orsay, mentionne d’ailleurs dans le catalogue d’exposition qu’il s’agit d’une « politique de programmation audacieuse » avec des expositions telles que Degas et le nu, Masculin / Masculin, ou encore Sade. Attaquer le soleil, qui sont ainsi portées sur la nudité et la sexualité. Il indique aussi que cette exposition « montre que l’entrechoquement du sexe et de l’argent est au cœur de la puissance créatrice » (Bakker, Cogeval, Pludermarcher, 2015 : 9-10). L’analogie qu’établit De Robertis entre le musée et le proxénétisme ne s’avère donc pas être sans fondement, et elle renvoie, peut-être involontairement, à une certaine imagerie qu’a la société du XIXe siècle concernant les relations qu’entretient le modèle avec le photographe dans le cas des représentations pornographiques. Olympia, droit de réponse s’avère être une œuvre pensée pour le musée et qui anime l’exposition. Comme l’indique Mélanie Boucher, la programmation des performances dans les institutions muséales est l’occasion de porter une nouvelle vision sur le musée qui prend en compte de nouvelles formes artistiques mais qui « [instrumentaliserait la performance] à des fins évènementielles » (Boucher, 2017 : en ligne § 17). Cependant, Deborah de Robertis s’éloigne ici de cette tendance en ce que ses œuvres se servent des murs de l’insL’audace : vertu, valeur? Deborah de Robertis : l’impertinence contre le pouvoir titution sans son autorisation, renversant ainsi l’instrumentalisation. Pour son action, l’artiste engage des complices qui filment son geste, ainsi que le public, l’autorité et les éléments expographiques. Le musée est alors considéré comme un lieu de création artistique, une sorte de nouvel atelier, ce qui est comparable aux performances d’Andrea Fraser. Dans Museum Highlights: A Gallery Talk en 1989 au musée d’art de Philadelphie, cette artiste américaine se grime en guide conférencière, menant des visites dans lesquelles elle déconstruit et critique le discours de l’institution muséale (Creissels, 2017 : en ligne § 10). Même si Fraser ne subit pas de censure, Deborah de Robertis reprend comme elle les éléments matériels du musée et adopte une position tout aussi ironique. Elle apporte en effet un bouquet de fleurs destiné au directeur du musée d’Orsay et lit un texte lui étant adressé qui justifie sa présence, rendant dans le même temps son discours accessible au public. Cependant, Guy Cogeval n’apparait jamais lors de la performance, l’artiste s’adressant alors à une absence substituée par les gardiens de salle du musée. Ces derniers personnifient l’ordre établi et reflètent en cela la position de l’institution. Prévenus sans doute du comportement à adopter en cas de nudité suite à la première performance de De Robertis, les gardiens de salle s’opposent physiquement à elle en la couvrant d’un drap. Afin de les confronter, l’artiste adopte la posture de l’Olympia, qui est celle non pas d’une prostituée, mais de l’œuvre maitresse de l’exposition. De Robertis devient ainsi virulente, telle une sorte de diva qui réagit à l’autorité comme avec l’expression « de toute façon, j’attends le directeur » [00m50s]. Lorsqu’elle affirme « ce n’est pas vous qui décidez » [1m40s], l’artiste semble s’adresser indirectement à l’institution et tente d’annuler toute position de pouvoir, c’est-à-dire de retirer l’autorité qui s’opère sur elle afin que sa performance puisse durer dans le temps, celle-ci s’étalant d’ailleurs sur presque deux heures. Le montage de sa vidéo rend compte du fait que De Robertis joue un rôle et qu’il s’agit avant tout d’une représentation. Ce film de neuf minutes s’avère en effet être élaboré comme un court-métrage, s’ouvrant sur l’indication « un film de Deborah de Robertis » et se terminant par un générique de fin, tandis que toute la vidéo est scandée par une musique de fond reprenant un extrait de O Fortuna de la cantate Carmina Burana composée par l’allemand Carl Orff. Ce fond sonore est mixé avec des percussions rythmées, révélant donc un mélange de genre underground et épique, à l’instar de la rencontre entre la performance et la peinture classique.
25,056
2015GREAT038_5
French-Science-Pile
Open Science
Various open science
2,015
Commande collaborative pour la recherche de sources
None
French
Spoken
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12,266
Contributions de la thèse L’originalité de la solution de localisation de source proposée réside dans le calcul du gradient à partir de l’intégrale de Poisson : en opposition à d’autres solutions publiées dans la littérature, d’une part il ne nécessite 118 Intégrale de Poisson et calcul du gradient pas de connaissances spécifiques de la solution du processus de diffusion, et il peut calculer la direction du gradient à partir des échantillons de concentration avec une petite charge de calcul ; d’autre part il ne nécessite pas l’utilisation d’un signal de test, et évite ainsi les oscillations nécessaires par les techniques extremum seeking. En outre, un tel procédé est facilement adaptable à toute dimension, et du fait que les dérivées sont calculées en utilisant les intégrales, la méthode est peu sensible au bruit de mesure, étant donné que ce calcul filtre intrinsèquement les hautes fréquences. Cette méthode représente une formalisation théorique de solutions antérieures proposées dans la littérature [11, 12, 55] ; en outre, il permet également le calcul des dérivées d’ordre supérieur (comme la matrice hessienne), ce qui permet de concevoir des lois de commande plus complexes. Un tel procédé est appliqué de manière centralisée dans des scénarios en 2D ou en 3D, avec une preuve théorique de sa convergence ; nous proposons un algorithme distribué, dont l’efficacité est également prouvée théoriquement, qui diffère des précédentes contributions dès lors que nous supposons ne pas avoir des informations de position complètes (qui peuvent ne pas être disponibles dans différents environnements d’exploitation tels que les véhicules sous-marins ou à l’intérieur, ou dans des applications où les systèmes de navigation inertielle sont trop coûteux ou pas suffisamment précis), mais nous ne supposons que les capteurs autonomes sont capables de mesurer l’angle ré par rapport à leurs voisins. Intégrale de Poisson et calcul du gradient Modèle du processus de diffusion Nous allons examiner, tout au long de notre mémoire, un processus de diffusion où la source est isotrope et la diffusion homogène ; cela signifie que les propriétés de la source, ainsi que le processus de diffusion lui-même, sont indépendants de la direction spatiale considérée. Cette diffusion est décrite par la célèbre équation aux dérivées partielles parabolique linéaire Collaborative Source-Seeking Control 119 French Summary avec des coefficients constants ∂f (x, t) − c∇2 f (x, t) = 0, ∂t ∀x ∈ D, t ≥ 0, (1) où f est la fonction de concentration, c est le coefficient de diffusion isotrope et D est un ouvert de Rn (voir [31]). Une telle équation est appropriée pour décrire divers phénomènes de diffusion : par exemple, f peut représenter la distribution de la température dans un environnement ou la concentration d’un produit chimique (polluant, salinité... ). Dans ce travail, nous supposons que le processus de diffusion est assez rapide, de sorte que notre intérêt est à étudier le comportement à l’état stable résultant de l’équation (1) ; par conséquent, nous limitons notre attention aux solutions de l’équation suivante, connue sous le nom d’équation de Laplace : ∇2 f (x) = 0, ∀x ∈ D. (2) Notre intérêt se concentre sur le cas où l’état d’équilibre a été atteint, mais une source émet toujours quelque part à un taux constant (cela se produit dans de nombreux cas d’intérêt pratique, par exemple dans un processus de chauffage ou dans la dispersion d’une substance chimique), ou que les variations possibles de la source sont lents dans l’échelle de temps d’intérêt, et notre objectif est de trouver l’emplacement de la source. En tant que modèle pour une telle source, nous supposons que la source occupe une partie de l’espace n’appartenant pas à D, et elle affecte les valeurs de f dans D en imposant une condition limite. Plus précisément, nous considérons un domaine ouvert D = D̃ Ds, où D̃ ⊆ Rn est un ensemble connexe représentant la région dont l’étude nous intéresse, et Ds est un petit sousensemble connexe de D̃ qui représente la zone occupée par la source. Ainsi, la limite de D est formée par une partie intérieure, égale à la limite de la région de source Ds et notée ∂Din, et peut-être une partie externe, égale à la limite de D̃ et notée ∂Dex (figure 4). Nous allons examiner ci-dessous un exemple explicatif. EXEMPLE (CONDITIONS AUX LIMITES MIXTES DE DIRICHLET-NEUMANN). 120 Intégrale de Poisson et calcul du gradient ∂Din D Ds D̃ ∂Dex Figure 4. Représentation des domaines d'intérêt pour notre modèle de la source. Dans certains cas, une fonction harmonique ne peut pas être écrite en forme fermée, mais elle peut être exprimée comme la solution d’un problème aux derivées partielles. À titre d’exemple, nous considérons un plan rectangulaire : un réchauffeur circulaire Ds est placé au milieu, et impose une condition à la limite constante f (x) = fs pour toutes x ∈ ∂Din ; sur les frontières, la condition limite est imposée non pas sur f, mais sur le dérivée de f dans le sens de l’unité extérieure normale n̂ : nous supposons que ∇f (x) · n̂ = 0 au long des frontières, qui modélise des frontières parfaitement isolantes ; au milieu de l’une des plus longues frontières il y a une grande ouverture, qui impose une condition limite constante f (x) = fex en raison de la température extérieure plus froide. Le profil de température à l’état d’équilibre est obtenu par la solution du problème aux conditions mélangées de Dirichlet-Neumann f (x) = fs sur ∂Din = ∂Ds f (x) = fex sur [a3, a1 − a3 ] × a2 ∇f (x) · n̂ = 0 ∇2 f (x) = 0 sur ∂Dex [a3, a1 − a3 ] × a2 dans D = [0, a1 ] × [0, a2 ] Br (xc ), où a1 est la longueur du côté le plus long, a2 la longueur des plus courts, et l’ouverture extérieure a pour longueur a1 − 2a3 ; le réchauffeur est représenté par Br (xc ), avec r ≪ a22. La figure 5 montre la température obtenue en résolvant le problème décrit ci-dessus par l’intermédiaire d’une méthode des éléments finis en utilisant le logiciel FreeFem++ (voir [38]), pour un domaine de 10 m de large et 6 m de long ; la fenêtre est de 6 m de large Collaborative Source-Seeking Control 121 French Summary fext ❽ [ ] 45 38 fs 31 24 17 10 Figure 5. Solution du problème dans l'exemple ; les taches blanches sont dues à la solution obtenue par l'intermédiaire d'un approximation discret par éléments finis. et le dispositif de chauffage occupe un cercle avec un rayon de 50 cm ; la température du réchauffeur est fs = 45 °C et la température extérieure est fex = 10 °C. Les solutions de l’équation de Laplace (2) sont appelées harmoniques, et ont de nombreuses propriétés intéressantes que nous rappelons cidessous1. Corollaire 1 (Principe du maximum). Soit D ⊂ Rn un ouvert borné, et soit f : D̄ → R continue dans D̄ = D ∪ ∂D et harmonique dans D. Alors, la valeur maximale de f sur D̄ est atteinte sur ∂D. • Ce corollaire implique que sur un domaine borné une fonction harmonique est déterminée par ses valeurs limites, nous permettant ainsi de résoudre le problème de Dirichlet pour la boule, comme expliqué dans le paragraph prochain. Proposition 1 (Principe du maximum local). Soit D ⊆ Rn un ouvert connexe, et soit f : D → R une fonction harmonique sur D. Si f a un maximum local dans D, alors f est constante. • 1 Pour une étude plus détaillée des propriétés des fonctions harmoniques nous renvoyons à [3, 31], d’où certaines des déclarations suivantes sont prises. 122 Intégrale de Poisson et calcul du gradient Parce que dans notre scénario le domaine intérieur ∂Ds représente la source, nous supposons que les valeurs de f sur ∂Din sont plus élevées que les valeurs de f sur ∂Dex (ou à l’infini) ; dans cette hypothèse, le principe du maximum garantit que la valeur maximale de f sur D̄ est atteinte sur ∂Din. Par conséquent, le problème de trouver la source peut être décrit comme le problème de trouver la valeur maximale de f sur D̄ ; plus précisément, ayant assumé une valeur constante pour f long ∂Din, nous allons considérer que le problème de recherche de la source est résolu si un point quelconque long ∂Din a été atteint. En outre, le principe de maximum local assure que nous avons pas de maxima locaux à l’intérieur de D, ce qui rend possible l’utilisation d’une technique d’algorithme du gradient pour localiser la source sans se faire piéger dans des maxima locaux. L’intégrale de Poisson Considérons un domaine borné A et le problème de Dirichlet à condition limite homogène f (x) = f ̄(x) ∇2 f (x) = 0 on ∂A in A. Grâce au corollaire précédent, la solution du problème de Dirichlet est unique ; pour toute fonction f qui est harmonique sur A et continue sur sa fermeture, f (x) aux points à l’intérieur de A peut être calculée avec une formule impliquant uniquement les valeurs de la restriction de f à la limite ∂A et le noyau de Poisson, comme suit pour A = Br (xc ) = { x : kx − xc k < r }. Théorème (Intégrale de Poisson pour la boule générique). Soit f : B̄r (xc ) → R continue sur B̄r (xc ), harmonique sur Br (xc ). Alors : 1 f (x) = Ωn r Z PBr (xc ) (x, x̄)f (x̄) dSBr (xc ) (x̄), (3) ∂Br (xc ) Collaborative Source-Seeking Control 123 French Summary où x ∈ Br (xc ), et PBr (xc ) est le noyau de Poisson pour la boule générique, défini comme PBr (xc ) (x, x̄) = r2 − kx − xc k2. kx − x̄kn • (4) En particulier, lorsqu’il est évalué dans le centre de la boule sur laquelle l’intégrale est calculée, le noyau de Poisson en (4) se réduit à PBr (xc ) (xc, x̄) = r2 1 = n−2, n r r et l’expression de f (x) de (3) devient beaucoup plus simple : 1 f (x ) = Ωn rn−1 c Z f (x̄) dSBr (xc ) (x̄). (5 A ) ∂ Br (xc ) Calcul des dérivées La formule de l’intégrale de Poisson donnée dans (3) donne également une technique pour calculer les dérivées (gradient, matrice hessienne etc.) de f en tout point à l’intérieur de la boule Br (xc ) avec une intégrale impliquant seulement les valeurs de f au long du cercle ∂Br (xc ), comme indiqué dans la proposition suivante. Proposition 2. Soit D ⊆ Rn un ouvert, et soit f : D → R harmonique sur D. Pour tout xc ∈ D, pour tout r > 0 tel que B̄r (xc ) ⊆ D, pour tout x ∈ Br (xc ), et pour tous entiers non-négatifs g1, g2,..., gn tels que Pn i=1 gi = g, 1 ∂ g f (x) Qn gi = Ωn r i=1 ∂xi Z ∂Br (xc ) ∂ g PBr (xc ) (x, x̄) Qn f (x̄) dSBr (xc ) (x̄). gi i=1 ∂xi • En applicant cette proposition il est facile d’obtenir l’expression du gradient ∇f (xc ). Le gradient du noyau de Poisson peut être calculé à partir de (4), ce qui donne l’expression du gradient 124 Localisation de sources sur le plan 1 ∇f (x ) = Ωn r c Z ∂Br (xc ) ∇PBr (xc ) (xc, x̄)f (x̄) dSBr (xc ) (x̄) = Z n r̂f (x̄) dSBr (xc ) (x̄). (5 B) = Ωn rn ∂Br (xc ) De même, nous pou vons calcul er la matrice hessienne de f au centre H(xc ), en ob tenant 1 H(x ) = Ωn r c Z ∂Br HP (xc, x̄)f (x̄) dSBr (xc ) (x̄) = Z n+2 = (nr̂r̂ T − I)f (x̄) dSBr (xc ) (x̄). (5 C) Ωn rn+1 ∂Br (xc ) (xc ) Localisation de sources sur le plan Véhicules mobiles planaires Nous considérons des robots mobiles, chacun doté d’un ou plusieurs capteurs fournissant des mesures ponctuelles de concentration. La dynamique des robots peut être modélisée de différentes manières, en fonction de l’application à portée de main : à titre d’exemple, nous considérons des véhicules sous-actionnés modélisés comme des monocycles non holonomes avec la dynamique " cos θ(t) ẋ(t) = v sin θ(t) # (6) θ̈(t) = u(t), commandé par le couple de torsion u(t). La position du véhicule dans le plan est décrite par x(t), et θ(t) représente l’angle de position ; la vitesse d’avancement v est supposée ici constante par simplicité, même si différentes stratégies peuvent être élaborées. Le point central est de concevoir le contrôle u(t) en utilisant des informations provenant des capteurs pour atteindre l’emplacement de la source. Idéalement, nous aimerions que chaque robot soit capable de calculer le Collaborative Source-Seeking Control 125 French Summary r Figure 6. Possible déploiement des capteurs sur un véhicule autonome planaire : un réseau circulaire de capteurs avec des angles équidistants est fixé sur le robot. gradient à sa position centrale x(t) en utilisant la formule de Poisson (5 B), avec xc = x(t) ; pour atteindre cet objectif, il a besoin de recueillir des mesures sur un cercle ∂Br (xc ) et de calculer l’intégrale de Poisson. Pour en obtenir une bonne approximation, un dispositif de détection efficace, décrit en figure 6, consiste en N capteurs disposés au long d’un réseau circulaire de rayon r, centré à la position centrale x(t) avec des angles équidistants ; c’est-à-dire, le ième capteur est en position " # cos γi xi (t) = x(t) + r, sin γi (7) où γi = 2π (i−1). Le réseau de capteurs est solidement connecté au véhicule, N et il tourne avec l’angle de position du robot ; par conséquent, le robot calcule le gradient dans le système de coordonnées local où sa position a une valeur fixe. Ensuite, l’intégrale est approchée par la somme de Riemann en utilisant les N valeurs mesurées . Approximation des dérivées Nous pouvons rapprocher les intégrales (5) par la somme de Riemann des N valeurs fournies par les capteurs disposés au long du cercle (voir figure 6). En utilisant les coordonnées polaires r = r(cos γ, sin γ ), avec γ ∈ 126 Localisation de sources sur le plan [0, 2π), dS = r dγ et la mesure du cercle unitaire égal à Ω2 = 2π, les formules de Poisson (5) en deux dimensions deviennent 1 f (x(t)) = 2π 1 ∇f (x(t)) = πr Z 2π f (x̄(γ)) dγ Z 2π " 0 2 H(x(t)) = 2 πr (8 A) 0 Z 0 # cos γ f (x̄(γ)) dγ sin γ 2π " # 2 cos2 γ − 1 2 cos γ sin γ f (x̄(γ)) dγ. 2 cos γ sin γ 2 sin2 γ − 1 (8 B) (8 C) En notant la mesure du capteur i au temps t par fˆi x(t), t = f xi (t) + ei (t), où xi, défini dans l’équation (7), est la discrétisation de x̄ et ei (t) est l’erreur due au bruit de mesure blanc gaussien affectant le capteur i, nous pouvons maintenant calculer l’approximation des équations (8) comme N 1 Xˆ fˆ x(t), t = fi x(t), t N i=1 N 2 X ˆ c r̂i fi x(t), t ∇f x(t), t = N r i=1 N 4 X Ĥ x(t), t = H̃i fˆi x(t), t, 2 N r i=1 (9 A) (9 B) (9 C) où r̂i = (cos γi, sin γi ) et, après quelques simples calculs trigonométriques sur la matrice dans (8 C), il vient " # cos 2γi sin 2γi H̃i =. sin 2γi − cos 2 γ i Collaborative Source-Seeking Control 127 French Summary Nous notons que toutes les intégrales et les sommes de quantités vectorielles ou matricielles sont conçues comme des intégrales ou sommes des entrées simples. Conception de la rétroaction La stratégie de l’algorithme du gradient peut être mise en œuvre en définissant une référence d’orientation θr (x) dans la direction du gradient de la fontion de diffusion au point x, en utilisant la formule (9 B) et la matrice hessienne (9 C). Grâce à la facilité de calcul des formules précédentes, nous pouvons utiliser une loi de contrôle impliquant la matrice hessienne, par exemple en incluant un terme d’amortissement, utile puisque le système est du second ordre, impliquant les dérivées temporelles soit de l’angle de cap soit de sa référence θr ; ce terme peut être calculé à partir du gradient approximé (9 B) et de la matrice hessienne (9 C). La rétroaction proposée est r r u(t) = k1 θ x(t), t − θ(t) + k2 θ̇ x(t), t − θ̇(t), avec la référence et sa dérivée temporelle données par (10) c x(t), t θr x(t), t = arg ∇f T c x(t), t ẋ (t) Ĥ x(t), t R ∇f θ̇r x(t), t =, c x(t), t k2 k∇f c x(t), t et Ĥ x(t), t sont définies par les équations (9 B) et (9 C), où ∇f et R est la matrice de rotation d’un angle égale à π2, définie comme " # 0 −1 R=. 1 0 128 Localisation de sources sur le plan Résultats des simulations À titre d’exemple de simulation, on considère un plan chauffé correspondant à l’exemple décrit précédemment. En particulier, nous proposons d’avoir un espace rectangulaire de 10 × 6 m de large, avec un radiateur circulaire de 5 cm de rayon dans son milieu et une ouverture sur le côté arrière. Le réchauffeur impose la condition f (x) = fs ; les frontières sont parfaitement isolantes, de manière à imposer la condition limite de Neumann ∇f (x)· n̂ = 0, tandis que l’ouverture latérale, de 6 m de large, impose la condition frontière sur la valeur de la température f (x) = fex. La figure 7 montre les trajectoires d’un ensemble de robots tels que ceux décrits dans la figure 6, décrits par la loi de mouvement (6), à partir de différentes positions initiales aléatoires et avec différentes orientations initiales. La température de l’élément chauffant est fs = 45 °C, tandis que celle externe est égale à fex = 5 °C, et chaque robot se déplace avec une vitesse constante de v = 0, 2 m/s et avec des capteurs disposés sur une circonférence de rayon r = 10 cm ; les paramètres de contrôle dans l’équation (10) sont choisis comme k1 = 49 et k2 = 14. Dans ce premier cas, nous supposons des mesures parfaites ; les véhicules sur la gauche sont dotés de N = 3 capteurs, tandis que ceux sur la droite en ont N = 12. Nous pouvons observer qu’un nombre inférieur de capteurs à pour résultat une trajectoire qui n’est pas exactement orientée avec le gradient de f, mais les robots sont néanmoins capables d’atteindre rapidement la source. Une simulation avec les mêmes conditions et paramètres initiaux et le même nombre de capteurs pour chacun des deux sous-ensembles de véhicules, mais avec chaque mesure corrompue par un bruit blanc gaussien d’écart-type σ = 0, 75, est représentée sur la figure 8. Comme nous pouvons le voir, tous les véhicules atteignent la source, avec des trajectoires presque perpendiculaires aux lignes de contour de la température, qui ont un petit tramage à cause du bruit dans les mesures ; nous pouvons également remarquer le meilleur filtrage réalisé par les robots à 12 capteurs. Collaborative Source-Seeking Control 129 French Summary Figure 7. Trajectoires des véhicules cherchant une source thermique équipées de capteurs sans bruit ; les véhicules sur la gauche ont 3 capteurs chacun, les uns sur la droite 12 capteurs. Figure 8. Trajectoires des véhicules cherchant une source thermique équipées de capteurs avec bruit ; les véhicules sur la gauche ont 3 capteurs chacun, les uns sur la droite 12 capteurs. 130 Localisation de sources sur le plan Mise en œuvre expérimentale Dans le cadre d’un projet de stage de fin d’études d’un étudiant de master (Yvan Gaudfrin) de l’université de Bristol (Angleterre, Royaume-uni), nous avons développé un prototype de robot planaire pour tester la loi de contrôle de localisation de source que nous avons décrite précédemment. Le projet a eu lieu au GIPSA-lab, sous la supervision de l’ingénieur Jonathan Dumon et de Ruggero Fabbiano. Description du projet et conception du robot Dans cette expérience, dont l’objectif est de valider par une mise en œuvre pratique notre algorithme de recherche de source en 2D, la tâche sera effectuée par un robot planaire équipé d’une caméra, se déplaçant sur le dessus d’un large tableau représentant un réel processus de diffusion, c’est-à-dire une source de rejets d’eau chaude qui se répand dans la mer (figure 10). L’ensemble circulaire de capteurs qui fournissent des mesures ponctuelles sera obtenu, dans ce cas, en sélectionnant des pixels appropriés sur une forme circulaire de la vue de la caméra. En utilisant ces capteurs, le robot doit se déplacer sur cette photo et rouler vers la source. Nous notons que, comme dans toutes les applications de la vie réelle, les hypothèses théoriques en vertu desquelles nous avons développé notre loi de contrôle ne sont pas satisfaites : en effet la fonction décrivant le processus de diffusion que nous pouvons voir dans figure 10 est non harmonique et a également des maxima locaux ; par conséquent, un autre objectif du projet est de voir comment ce système peut fonctionner dans la pratique, lorsque le processus de diffusion réelle ne correspond pas complètement aux hypothèses du cas idéal. Les deux prototypes finaux du robot réalisés, avec leur deux caméras utilisées, sont présentés dans figure 9. Collaborative Source-Seeking Control 131 French Summary (a) Première conception : caméra GigE Vision®. (b) Deuxième conception : caméra sans fil avec convertisseur USB. Figure 9. Les robots construits pour le cas d'étude pratique. Figure 10. Reproduction des trajectoires suivies par le robot cherchant la source ; le véhicule blanc indique la position initiale, le gris la position finale. Tests finaux Le prototype planaire pour la recherche de sources a démontré être pleinement efficace dans le scénario utilisé, même compte tenu de son non harmonicité. Si les conditions initiales étaient telles qu’il pouvait obtenir des mesures significatives, il a toujours réussi à atteindre la zone de l’image qui représente la source de la diffusion, comme le montre la figure 10, qui montre une approximation de la voie tracée par le robot pendant quelques expériences de validation. Pour une meilleure compréhension du comportement du robot, nous nous référons au site web de l’équipe NeCS2 pour les vidéos du robot au travail. 2 132 http ://necs.inrialpes.fr/pages/platforms.php#sourceLoc Recherche tridimensionnelle de sources Recherche tridimensionnelle de sources Dynamique du véhicule et conception de la rétroaction Nous considérons un véhicule sous-actionné, décrit par la loi de mouvement cinématique   cos θ1 (t) sin θ2 (t)   ẋ(t) = v  sin θ1 (t) sin θ2 (t)  cos θ2 (t) " # θ̇1 (t) = u(t), θ̇2 (t) (11) où x indique la position du centre de masse de l’agent, et θ1 et θ2 sont les angles de lacet et de tangage respectivement ; l’angle de cap est contrôlé par la commande u qui dirige la vitesse angulaire. Un tel choix pour la dynamique du véhicule peut représenter, en trois dimensions, un modèle simplifié d’un véhicule sous-marin autonome. Nous aimerions réaliser un algorithme du gradient en utilisant les formules de Poisson obtenus dans la section précédente. Notre objectif est de suivre le gradient de la fonction du signal ∇f (x(t)), mais nous considérons le cas où il est possible de contrôler la vitesse angulaire seulement, et non pas changer instantanément l’orientation du véhicule. Ainsi, nous définissons les références de la commande comme les orientations donnés par la direction du gradient estimé à l’actuel centre de masse du véhicule x(t) : θ1r (x(t)) = arctan g2 (x(t)) g1 (x(t)) θ2r (x(t)) = arccos g3 (x(t)), kg(x(t))k c (x(t)) est l’approximation du gradient, de sorte que les où g(x(t)) = ∇f références sont des approximations des angles du gradient. Ensuite, nous Collaborative Source-Seeking Control 133 French Summary définissons une loi de commande avec une terme impliquant la dérivée temporelle des références : " # " # θ̇1r (x(t)) θ1r (x(t)) − θ1 (t) u(t) = k r + r. θ2 (x(t)) − θ2 (t) θ̇2 (x(t)) (12) De manière analogue au cas 2D, les expressions de la dérivée des références de cap peuvent être calculés comme B Ĥ x(t) Ag x(t) · ẋ(t) = kAg x(t) k2 g3 x(t) Ĥ x(t) g x(t) − kg x(t) k2 Ĥ x(t) a r, θ ̇2 ( x(t )) = kAg x(t) k θ̇1r (x(t)) (13) où A, B et a sont les matrices suivantes :   0 −1 0   A = 1 0 0 , 0 0 0   1 0 0   B =  0 1 0, 0 0 0   0   a = 0. 1 Détails d’implémentation Calcul des dérivées Les expressions de l’approximation du gradient g et de l’hessienne Ĥ de la fonction f utilisée dans les équations (13) peuvent être obtenues à partir des équations (5), considérant que, en utilisant les coordonnées sphériques   cos γ sin φ   r = r  sin γ sin φ , cos φ où γ ∈ [0, 2π) et φ ∈ [0, π] sont respectivement l’azimut et l’angle d’altitude, nous avons n = 3, Ω3 = 4π et dS = r2 sin φ dγ dφ, de sorte que les 134 Recherche tridimensionnelle de sources équations (5) prennent la forme 1 f x(t) = 4π Z 3 ∇f x(t) = 4πr π sin φ 0 Z 5 H x(t) = 4πr2 où Z π sin φ 0 Z 2π f (x̄(γ, φ)) dγ dφ 0 Z π sin φ 0 2π r̂(γ, φ)f (x̄(γ, φ)) dγ dφ (14) 0 Z 2π HP (γ, φ)f (x̄(γ, φ)) dγ dφ, 0 HP (γ, φ) = 3r̂(γ, φ)r̂ T (γ, φ) − I =   3 cos2 γ sin2 φ − 1 3 cos γ sin γ sin2 φ 3 cos γ cos φ sin φ   = 3 cos γ sin γ sin2 φ 3 sin2 γ sin2 φ − 1 3 sin γ cos φ sin φ . 3 cos γ cos φ sin φ 3 sin γ cos φ sin φ 3 cos2 φ − 1 Dispositif de détection Pour le calcul des intégrales, nous considérons une approximation convenable avec une somme discrète d’un nombre fini de mesures. Compte tenu d’un nombre total de capteurs N, nous voulons les placer le long de bandes circulaires avec une égale largeur angulaire ζ, d’une manière qui nous donne un maillage de la surface i la sphère avec des éléments h √ de πN parallèles centrées à des latipresque réguliers ; il en résulte Np = 2 tudes φi = (i − 0.5)ζ, i = 1, 2,..., Np, où les crochets indiquent l’arrondi à l’entier le plus proche et où ζ = π. Tout au long de chaque parallèle on place un certain nombre Ni de Np capteurs qui diminue avec la distance à l’équateur, de manière à éviter une accumulation de capteurs proches des pôles ; ainsi, chaque capteur a une position azimutale de 2π γi,j = j∆γi = j, Ni Collaborative Source-Seeking Control 135 French Summary (a) N = 6 capteurs (qui correspond à ζ = 90°). (b) N = 64 capteurs (qui correspond à ζ = 25, 7°). Figure 11. Placement des capteurs sur l'appareil sphérique. où Ni = 2Np sin φi. Comme le montre la figure 11 pour deux valeurs différentes de ζ (plus précisément, pour N = 6 et N = 64), chaque capteur occupe le centre d’un élément dans une position xi,j = xc + ri,j   cos γi,j sin φi   = xc + r  sin γi,j sin φi . cos φi Approximation des dérivées Pour un tel choix de la position des capteurs, il est maintenant possible de calculer les valeurs approximatives pour (14) : désignant la mesure du capteur (i, j) avec (f ) (f ) fˆi,j x(t), t = f xi,j (t) + ei,j (t), où ei,j est l’erreur de mesure affectant le capteur (i, j) au temps t, nous pouvons proposer les formules approximatives suivantes : N p Ni ζ XX ˆ f x(t), t = fˆi,j x(t), t 4Np i=1 j=1 136 Recherche tridimensionnelle de sources N p Ni 3ζ X X c r̂i,j fˆi , j x ( t ), t ∇ f x(t), t = 4Np r i=1 j=1 Np Ni 5ζ X X T (3r̂i,j r̂i,j − I)fˆi,j x (t), t. Ĥ x ( t ), t = 2 4Np r i =1 j =1 Analyse de convergence Dans ce qui suit nous étudions la convergence de notre algorithme. Nous considérons le problème résolu, et parlons de convergence, si le véhicule touche la frontière de la source, ou l’approche pour t → ∞, comme indiqué dans la définition suivante. Definition (Convergence à la source). Soit l’emplacement de la source un point xs ∈ Ds, avec Ds : f (x) = fs = max f (x), x∈D̄ ∀x ∈ ∂Ds. Une trajectoire x(t) est dite convergente à la source si l’une des conditions suivantes est vraie : ∃ts < ∞ tel que x(ts ) ∈ ∂Ds lim dist(x(t), ∂Ds ) = 0. t→∞ • Nous pouvons prouver la convergence de notre loi de contrôle de localisation de source indiquée ci-dessous. Proposition 3 (Convergence globale de l’algorithme de localisation de source). Soit D = R3 D̄s, et soit f une fonction harmonique dans D, continue sur D̄ et à sous-niveaux compacts Dg = x ∈ D̄ : f (x) ≤ g. Considérons le système (11) sous la loi de contrôle (12), où les références sont données par les orientations de ∇f (x(t)). Alors, le système converge vers la source dans le sens de la définition précédente. • Le résultat de la proposition tient également si θ1r et θ2r sont des esti Collaborative Source-Seeking Control 137 French Summary mations perturbées des angles de gradient, c’est-à-dire, (∇f ) θ1r x(t), t = θ1 x(t) + eθ1 (t) (∇f ) θ2r x(t), t = θ2 x(t) + eθ2 (t), avec eθ1 et eθ1 étant les incertitudes, continues sur D̄ et différentiables dans D, et telles que |eθ1 (t)| + |eθ1 (t)| ≤ ẽ < π2. Résultats de simulation L’algorithme proposé a été simulé sur un scénario donné par la diffusion d’une source isotrope émettant à une vitesse constante dans un domaine non borné, un modèle simplifié d’une fuite de polluant sous-marine, dans laquelle un dispositif de détection est à la recherche de la source dont le signal se dégrade selon l’expression f (x) = a, kx − xs k2 où xs est la position de la source, et a est un coefficient dont le choix influe sur l’amplitude du signal. Le véhicule, qui n’a pas de connaissances sur f (x), a une vitesse constante v = 0, 1 m/s, et le paramètre de commande est réglé à k = 0, 95 ; (0) et θ2 (0) = son orientation initiale est choisie telle que θ1 (0) = arctan xx12 (0) x3 (0) arccos kx(0)k, et les vitesses angulaires initiales telles que θ̇1 (0) = θ̇2 (0) = 0. L’amplitude de la fonction de signal est a = 25. La figure 12 A montre un exemple des trajectoires, pour le même point de départ et trois valeurs différentes de N. Nous considérons maintenant le cas où chaque capteur donne une mesure du signal émis corrompu par le bruit. Nous pouvons voir sur la figure 12 B les trajectoires résultantes d’une simulation avec N = 12, r = 1 m et quelques différentes valeurs de σ. Nous pouvons voir que, excepté l’oscillation due au bruit, les véhicules s’installent sur une petite boule centrée sur la source. 138 Recherche de sources distribuée 8 8 6 6 x3 x3 initial position N = 12 N = 46 N = 82 source 4 2 initial position σ=0 σ = 0.5 σ=1 σ=2 source 4 2 0 0 0 0 −2 6 −4 x2 −2 6 −4 4 2 −6 −8 x1 4 x2 (a) N variants 2 −6 0 −8 x1 0 (b) N = 12, σ variante Figure 12. Trajectoires du véhicule de recherche de sources 3D pour nombres différents de capteurs et valeurs différentes de l'écart type du bruit. Recherche de sources distribuée Nous présentons ici une loi de contrôle distribuée pour diriger un groupe de capteurs communicants autonomes vers la source d’un processus de diffusion, sur la base des mêmes hypothèses définies précédemment. Nous supposons avoir un ensemble de capteurs (tous les capteurs sont autonomes en mouvement, et ils ne sont pas organisés de façon fixe comme dans les sections précédentes), et supposons que chaque capteur est capable de mesurer, en plus de la quantité de diffusion d’intérêt, seulement l’angle de gisement par rapport à son voisin, mais n’a pas d’informations de position absolue, et ne connaît pas la distance relative ; les capteurs peuvent communiquer les uns aux autres, et le graphique décrivant les liens de communication a une topologie en anneau invariant dans le temps. Formulation du problème Nous considérons un groupe de N capteurs autonomes communicants qui se déplacent dans une région D ⊂ R2 où un processus de diffusion se Collaborative Source-Seeking Control 139 French Summary i+1 αi θi i Figure 13. Représentation graphique de l'angle de gisement rélatif αi. déroule. La dynamique de chaque capteur est décrite par le modèle non linéaire monocycle " # cos θi (t) ẋi (t) = vi (t) sin θi (t) # " (15) vi (t) = ui (t); θ̇i (t) où xi représente la position du capteur dans le plan, et θi (t) est son angle de cap. Les capteurs, qui pe uvent prendre des mesures pon ctuelles de la quantit é émise , ne possèdent aucune information de position , mais connaissent la valeur de N et sont capables de mesurer l’angle de roulement par rapport à leur voisin suivant, c’est-à-dire l’angle entre l’orientation d’un agent et le vecteur liant sa position à celle de son voisin, comme expliqu é dans la figure 13, défini par αi (t) = arg xi+1 (t ) − xi (t ) − θi (t). (16) Conception de la rétroaction Nous devons développer un algorithme qui est capable à la fois d’orienter les capteurs vers la direction du gradient, et de les amener sur une 140 Recherche de sources distribuée formation circulaire, de sorte que le gradient lui-même est estimé correctement. Nous introduisons une loi de commande en supposant que chaque capteur i est capable de calculer la différence θ̃i (t) = θr (t) − θi (t), où θr est une référence commune (nous discuterons après comment l’obtenir). Soient vc > 0 et vr > vc, avec = vvcr, des paramètres fixes ; nous proposons la loi de commande suivante : ui (t) = où " #  q vr2 vc2 2  vc cos θ̃i (t) + − sin θ̃i (t) vi (t) , = r θ̇i (t) bi (t)θ̇ (t) + 1 − bi (t) ωi (t) vc cos θ̃i (t) vi (t) ωi (t) = k αi (t) + arcsin sin θ̃i (t), bi (t) = (17 A) (17 B) (17 C) k > 0 est une constante de gain positive, et α i est défini comme dans (16) . Nous notons que cette loi de commande ne concerne que des variables locales, car elle est fonction seulement de l’angle de gisement mesuré et de l’angle θ̃i, qui est une différence d’angles et donc indépendant du système de coordonnées. Nous donnons par la suite des propositions, que nous fournissons ici sans démontration, qui montrent comme cette loi de commande est effectivement capable d’amener les capteurs vers une formation circulaire qui bouge à sa fois vers la source en suivant le gradient du processus de diffusion. Proposition 4. Le système en boucle fermée avec dynamique (15) et loi Collaborative Source-Seeking Control 141 French Summary de commande (17 A–17 B) est équivalent au système ẋi (t) = vc " # " # cos θr (t) cos ηi (t) + vr sin θ r ( t) sin η i (t) η̇i (t) = ωi (t). (18) • Convergence à la formation et mouvement de l’algorithme du gradient du centroïde de la formation Prenons une flotte de véhicules sous-actionnés autonomes décrits par la dynamique (18). Par un changement adéquat de coordonnées, chaque sous-système peut être décrit par les nouvelles variables d’état di (t) = kxi+1 (t) − xi (t)k α̃i (t) = arg xi+1 (t) − xi (t) − ηi (t) (19) β̃i (t) = ηi (t) − ηi+1 (t) − π. Proposition 5. Pour le système (18), avec ωi (t) comme dans (17 C), la dynamique dans les variables d’état (19) est d ̇i (t) = −vr cos α̃i (t) + cos α̃i (t) + β̃i (t) vr sin α̃i (t) + sin α̃i (t) + β̃i (t) − k α̃i (t) α̃ ̇ i (t) = di (t) β̃ ̇ i (t) = k α̃i (t) − α̃i+1 (t). • (20) Corollaire 2. Chaque système (19) a 2N − 1 points d’équilibre, parmi lesquels les deux localement asymptotiquement stables décrits par 2vr sin ᾱ d ̄i =d ̄ = k ᾱ ̄ i = ᾱ = ± π α̃ N β̃ ̄ =β̄ = π − 2 ᾱ . i 142 (21) • Recherche de sources distribuée i+1 i α̃i + ζi κi i−1 α̃i−1 + ζi−1 + π α̃i−1 + ζi−1 Figure 14. Représentation de l'angle interne κi entre capteurs consécutifs. Proposition 6. Aux équilibres (21), les positions relatives xi+1 (t) − xi (t) dessinent un polygone régulier ordinaire (figure 14). • Proposition 7. Si les conditions initiales des agents sont tels que le système correspondant (20) est dans le bassin attrayant de l’un des deux équilibres localement asymptotiquement stables (21), alors arg ẋc (t) − θr (t) → 0. • Mise en œuvre distribuée Nous discutons ici comment mettre en œuvre la loi de contrôle proposée précédemment. L’algorithme est conçu pour utiliser les informations recueillies par chaque capteur et produire, de manière distribuée, une approximation discrète de la formule intégrale (8 B), c’est-à-dire pour calculer la somme de Riemann N 2 X c c c ∇f x (t) = f x (t) x (t) − x (t), i i N r2 i=1 qui est équivalent à la (9 B), et puis obtenir la différence θ̃i (t) = θr (t) − θi (t), c (xc (t)) (la difficulté réside dans le fait que le où idéalement θr (t) = arg ∇f vecteur xi (t) − xc (t) n’est pas directement disponible, comme nous avons Collaborative Source-Seeking Control 143 French Summary supposé ne pas avoir toute information de position) ; nous proposons la technique suivante. Au cours de chaque intervalle de temps (t, t+∆t), avec ∆t suffisamment long, chaque capteur i effectue h = 1, 2,..., N − 1 itérations qui impliquent un échange de messages avec ses voisins précédant et suivant : chaque capteur i reçoit la valeur actuelle calculée par ses prédécesseurs, la tourne d’un angle 2π, ajoute sa propre mesure f (xi ) et l’envoie à son successeur. N Les détails sont présentés dans l’algorithme ci-dessous. Dans la suite nous supposerons par simplicité d’être dans la région attractive de l’équilibre avec ᾱ > 0, c’est-à-dire une rotation dans le sens antihoraire (cette hypothèse est justifiée par la propriété de stabilité locale des équilibres, ce qui justifie aussi le choix d’une topologie en anneau invariant dans le temps pour le graphique de la communication), par conséquent nous allons utiliser un angle de λ = − 2π. De toute manière, une mise N en œuvre générale serait d’avoir un angle de rotation en fonction de l’angle. de gisement courant mesuré, c’est-à-dire λi (t) = − sign αi (t) 2π N Algorithme Recherche de sources distribuée f (xi ) {initialisation} gi (0) = 0 for h = 1, 2,..., N − 1 do gi (h) ← gi−1 (h − 1) {nœud i − 1} i reçoit de f (xi ) cos λ sin λ {mise à jour} g (h) + gi (h) ← 0 − sin λ cos λ i end for θir = arg gi (N − 1) vc cos θir δi = − arctan vr +v r c sin θ i θ̃i = θir − δi − π 2 Nous allons montrer, dans la proposition suivante, l’efficacité de l’algorithme proposé si les capteurs sont déjà à l’équilibre. Proposition 8. Si les N capteurs décrits par la dynamique (20) sont à l’équilibre (21) avec ᾱ > 0, alors θ̃i calculé avec l’algorithme précédant 144 Recherche de sources distribuée correspond à la différence c (xc (t)) − θi (t). θ̃i (t) = arg ∇f • Comme on peut le remarquer, cet algorithme ne donne l’argument de l’approximation de gradient correcte que lorsque les capteurs sont en formation ; autrement, non seulement θir n’est pas assuré d’être une bonne approximation de l’argument du gradient, mais il n’est même pas une référence commune, c’est-à-dire θ̃i (t) + θi (t) n’est pas le même pour tous les i. Cela contredit l’hypothèse que nous avons faite sur la référence θr identique pour tous les capteurs ; néanmoins, nous avons proposé cette mise en œuvre pour sa simplicité, car elle montre un bon comportement dans les simulations (et il est facile de fournir un autre algorithme pour assurer une référence commune θr pour chaque capteur i). Simulations Pour valider notre algorithme nous considérons la recherche d’une source de chaleur dans un espace à 2 dimensions 20 × 12 m de large ; les frontières sont considérées comme parfaitement isolantes, et nous supposons avoir une ouverture qu’impose une température extérieure de fex = 5 °C, et un réchauffeur circulaire de fs = 50 °C au milieu. Nous considérons un ensemble de N = 5 capteurs avec une dynamique (15) et la loi de contrôle décrite dans (5.3), partant de positions initiales aléatoires et avec des orientations initiales aléatoires, et des vitesses de vr = 0, 5 et vc = 0, 1 m/s ; la valeur de la constante de commande est choisie de telle sorte à avoir un rayon de formation de r = 50 cm, c’est-à-dire k = Nπrvr ≈ 1, 5915. La figure 15 montre le résultat de certaines simulations. Nous pouvons voir les trajectoires des capteurs ainsi que l’une de leurs centroïdes (en noir) ; les triangles bordés de blanc représentent les conditions initiales de chaque capteur, tandis que ceux bordés de noir montrent leur position et l’orientation lorsque la formation a atteint le réchauffeur (le cercle rouge Collaborative Source-Seeking Control 145 French Summary Figure 15. Résultats de simulations pour conditions initiales aléatoires ; les triangles bordées de blanc représentent les conditions initiales, ceux bordées de noir les conditions définitives. au milieu). Les capteurs atteignent rapidement une configuration circulaire, puis continuent à se déplacer vers la source qui suit le gradient du champ. Les trajectoires des centroïdes des formations ne sont pas exactement alignées avec l’argument du gradient en raison de l’approximation discrète en arrière de la dérivée temporelle de la référence θ̇r . La figure 16 montre des simulations pour les mêmes conditions initiales, avec à la fois les mesures de température et de l’angle de roulement corrompues par un bruit blanc gaussien d’écart type σ = 0, 5. De l’analyse des résultats de simulations nous pouvons remarquer aussi que, même si la convergence théorique est locale, l’algorithme a démontré être efficace aussi pour des conditions initiales aléatoires ; en outre, malgré la demande théorique d’avoir la même référence commune pour chaque capteur, il n’y a pas de différence pratique entre les deux algorithmes : comme nous pouvons le voir, les centroïdes de la formation suivent le gradient (même avec l’écart introduit par l’approximation discrète et le bruit) même en utilisant l’algorithme qui ne satisfait pas cette hypothèse. 146 Recherche de sources distribuée Figure 16. Résultats de simulations pour conditions initiales aléatoires et mesures bruitées ; les triangles bordées de blanc représentent les conditions initiales, ceux bordées de noir les conditions définitives. Collaborative Source-Seeking Control 147 Bibliography [1] K. B. Ariyur and M. Krstić, Real-Time Optimization by Extremum-Seeking Control ; Wiley-Interscience, John Wiley and Sons, 2003. [2] K. J. Åstrom and B. Wittenmark, Adaptive Control ; Addison Wesley, 1995. [3] S. Axler, P. Bourdon and W. Ramey, Harmonic Function Theory; SpringerVerlag, New York (USA), 2001. [4] R. Bachmayer and N. E. Leonard, “Vehicle Networks for Gradient Descent in a Sampled Environment”, Proceedings of the 41st IEEE Conference on Decision and Control (CDC), pp. 112–117; Las Vegas (USA), December 2002. [5] H. Bai, M. Arcak and J. Wen, Cooperative Control Design; Springer, 2011. [6] D. Baronov and J. 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Briñón Arranz, Cooperative Control Design for a Fleet of Autonomous Underwater Vehicles under Communication Constraints; PhD thesis, Université de Grenoble, Grenoble (France ), November 2011.
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Simulation aux Grandes Echelles de l'allumage de moteurs fusées cryotechniques Guilhem Lacaze Disciplin ou spécial : Dynamique des fluides P soutenue par Guilhem LACAZE Le 20 mai 2009 Titre : Simulation aux Grandes Echelles de l'allumage de moteurs fusées cryotechniques E.MASTORAKOS J . RÉVEILLON M. OSCHWALD S. DUCRUIX D. SAUCEREAU M. THERON T. POINSOT JURY Prof. à l'Université de Cambridge Prof. à l'Université de Rouen Chargé de recherche au DLR, Hardthause Chargé de recherche à l'EM2C, Paris Ingénieur à la SNECMA, Vernon Ingénieur au CNES, Evry Directeur de recherche à l'IMFT, Toulouse Rapporteur Rapporteur Examinateur Examinateur Examinateur Membre invité Directeur de thèse Ecole doctorale : Mécanique, Energétique, Génie civil, Procédés Unité de recherche : CERFACS Directeur de Thèse : Thierry POINSOT Co-Directeur de Thèse : Bénédicte CUENOT. s'il n'y a pas de solution, c' est qu'il n'y a pas de problème Jacques Rouxel 2 Table des matières Table des matières 3 Remerciements 9 11 1.1 Contexte historique......... 17 1.2 Le contexte spatial mondial et l'Europe.......................... 19 1.3 VINCI : les enjeux d'un moteur rallumable........................ 20 1.4 Objectifs de l'étude et choix méthodologiques....................... 22 1.5 Organisation du manuscrit................................. 27 I Équations et modèles pour les écoulements turbulents diphasiques réactifs 29 2 Équations de conservation pour les écoulements gazeux réactifs 35 2.1 Équations et variables conservatives............................ 35 2.2 Variables thermodynamiques................................ 37 2.3 Équation d' état des gaz parfaits............................. 2.4 Diffusion moléculaire multi-espèces............................ 38 2.5 Diffusion de la chaleur................................... 39 2.6 Coefficients de transport diffusif.............................. 39 TABLE DES MATIÈRES 2.7 3 4 5 6 Cinétique chimique..................................... 40 Équations de conservation pour la phase dispersée 43 3.1 43 3.2 Equations de conservation eulériennes........................... 45 3.3 Modèles de fermeture.................................... 52 Équations pour la LES diphasique réactive 59 4.1 Équations LES pour la phase gazeuse........................... 59 4.2 Modèles de sous-maille................ 63 4.3 Équations LES pour la phase dispersée........................... 65 4.4 Modèles de sous-maille pour la phase dispersée...................... 68 4.5 Modèle de combustion turbulente.............................. 68 77 5.1 Discrétisation Cell-Vertex.................................. 77 5.2 Schémas numériques.................................... 79 5.3 Modèles de viscosité artificielle............................... 80 5.4 Traitement des chocs.................................... 82 5.5 Conditions aux limites.... 88 Cinétique chimique hydrogène-oxygène 91 6.1 Les trois cinétiques testées................................. 92 6.2 Températures de fin de combustion............................. 94 6.3 Vitesse de flamme laminaire................................ 95 6.4 Dépendance en pression.................................. 96 6.5 Délais d'auto-allumage................................... 99 6.6 Structure de flamme prémélangée. 100 6.7 Structure de la flamme de diffusion. 103 4 TABLE DES MATIÈRES 6.8 II 7 8 III Epaississement dynamique et cinétique chimique. 106 Allumage par dépôt d'énergie 111 Phénoménologie et théorie 113 7.1 Introduction. 113 7.2 Systèmes d'allumage. 114 7.3 Phénoménologie de l'allumage par dépôt d'énergie. 116 7.4 Paramètres influençant l'allumage. 122 7.5 Conclusion. 128 Modélisation de l'allumage 131 8.1 Introduction. 131 8.2 Model de dépôt d'énergie. 132 8.3 Validation. 134 8.4 Couplage avec le modèle de combustion de flamme épaissie. 144 8.5 Conclusions. 150 Allumage d'un jet turbulent non prémélangé 151 Introduction 153 LES of spark ignitions in a turbulent non-premixed jet 153 Compléments 197 Evaluation des modèles LES. 197 Modèle TFLES et flamme triple. 202 Conclusions. 205 5 TABLE DES MATIÈRES IV Séquence d'allumage d'un moteur fusée expérimental 207 Introduction 209 LES of laser ignition and compressible reacting flow in a rocket-like configuration 210 Compléments 247 Déroulement de l'étude. 247 Condition d'injection de l'oxygène. 249 Influence du raffinement aux murs. 255 Conclusions. 256 V 9 Allumage moteur VINCI 259 Introduction 261 10 Procédure d'allumage du moteur VINCI 263 11 Temps caractéristiques de la combustion dans les moteurs fusées 267 12 Atomisation d'un jet liquide par un jet gazeux coaxial 269 12.1 Mécanismes d'atomisation. 269 12.2 Atomisation primaire. 270 12.3 Atomisation secondaire. 273 12.4 Autres paramètres importants pour la modélisation. 274 12.5 Dard liquide. 274 12.6 Angle du spray. 274 12.7 Conclusion. 275 13 Modèle de l'injection coaxiale 277 13.1 Détermination des caractéristiques d'écoulement dans un injecteur VINCI. 278 6 TABLE DES MATIÈRES 13.2 Injection d'hydrogène. 278 Injection de l'oxygène liquide. 278 13.4 Paramètres du modèle d'injection d'oxygène liquide. 278 14 Cas tests 2D 279 14.1 Domaine et maillage. 281 14.2 Paramètres numériques. 281 14.3 Résultats non réactifs. 282 14.4 Résultats réactifs. 284 14.5 Conclusion. 286 15 Allumage 3D en configuration simplifiée 287 15.1 Géométrie et maillage. 287 15.2 Paramètres numériques. 288 15.3 Conditions initiales, séquence d'injection et conditions aux limites. 288 15.4 Analyse de la séquence d'allumage. 290 15.5 Analyse globale. 290 15.6 Description générale de la séquence d'allumage. 291 15.7 Position de la zone de réaction. 294 15.8 Régimes de combustion et interaction flamme/jet liquide. 298 15.9 Mécanismes de propagation. 303 15.10Stabilisation. 310 15.11Coût d'un calcul plus complexe. 311 16 Conclusions et perspectives 313 7 TABLE DES MATIÈRES 317 Bibliographie 319 Annexes 337 A Termes du modèles de dépôt d'énergie 337 A.1 Intégrale du dépôt de densité de puissance dans un cas 3D. 337 A.2 Définition de σs et σt. 337 B Procédure 0D pour le calcul de l'allumage du banc M3 339 B.1 Calcul de la variation de la masse et de l'énergie. 340 C Validation des paramètres diphasiques du Lox 343 D Traitement du jet sous-détendu de l'allumeur de VINCI 345 Résumé 347 8 Remerciements Ce manuscrit ne reflète que la partie tangible de mes travaux de recherche. D'un point de vue personnel, la grande richesse de cette thèse provient surtout des rencontres et des amitiés qui se sont liées pendant les trois années passées au Cerfacs. Je tiens donc à remercier toutes les personnes avec qui j'ai eu le grand plaisir de travailler et de profiter de la vie toulousaine. Je remercie Bénédicte Cuenot et Thierry Poinsot pour leur disponibilité, leur dynamisme et pour les discussions passionnantes et passionnées sur la combustion. Je remercie Didier Saucereau pour son intérêt pour mes travaux et sa constante implication dans les activités de coopération entre la Snecma et le Cerfacs. Je souhaite remercier Michael Oschwald de m'avoir accueilli au centre du DLR de Lampoldshausen et de toujours avoir pris le temps de discuter et de répondre à mes questions concernant la propulsion spatiale. je lui suis très reconnaissant d'avoir accepté de travailler avec moi sur le projet de l'ouvrage intitulé Alternative Ignition systems. Ma gratitude va aussi à Epaminondas Mastorakos ainsi qu'à Edward Richardson avec qui j'ai eu beaucoup de plaisir à parler d'allumage. Je remercie chaleureusement toutes les personnes du Cerfacs qui permettent nos thèses se déroulent dans les meilleurs conditions : Jean-Claude André directeur du Cerfacs, les "fées" de l'administration et les "magiciens" de l'ordre CSG qui veillent à la sérénité et à la stabilité de la Sphère Informatique. J'exprime mon amitié à tous les thésards et stagiaires du Cerfacs d'abord parce que la qualité de la recherche du Cerfacs repose sur les interactions fortes entre tous ces individus et ensuite parce qu'un certain nombre d'entre eux sont devenus des amis. Mes amitiés à Thomas Schmitt, Anthony Roux, Florent Duchaine, Matthieu Leyko, Nicolas Lamarque, Jean-Mathieu Sénoner, Olivier Cabrit et Claude Sansiau pour les grands moments de philosophie, de poésie et autre rouboulesqueries. Je salue la sagesse des anciens : Matthieu Boileau, Eléonore Riber, Olivier Vermomo et Simon Mendez. Sans les anciens on ne serait rien! Je salue aussi la fraîcheur cosmopolite des p'tits jeunes : Marlène Sanjose, Kerstine Wieczorek, Benedetta Giulia Franzelli, Felix Jaegle et notre cher Baby-soupape Benoît Enaux. Enfin je remercie la Famille, les petits Frères, Martial et Christiane et Cécile, pour leur soutien et leurs encouragements. R EMERCIEMENTS 10 Liste des symboles Lettres romaines d10 diamètre arithmétique moyen des gouttes αk,j efficacité de troisième corps de l'espèce k dans la réaction j Dij coefficient de diffusion binaire Dk diffusivité moléculaire dans le mélange ṁ débit massique Dth Q̇ terme source du modèle d'allumage ED par dépôt d'énergie E fonction d'efficacité (section 4.5) E variation par les collisions particulaires énergie totale massique (non chimique) C transport par la vitesse décorrélée Ei T Ea Mkj réactif ou produit k de la réaction j es énergie sensible Qj taux d'avancement Etot énergie totale de l'allumeur R F facteur d'épaississement ST vitesse de flamme turbulente fp fonction densité de présence de particules A constante pré-exponentielle gij gradient de vitesse résolu Al surface de la flamme laminaire At surface de la flamme turbulente hs,corr terme de correction d'enthalpie hs,l enthalpie sensible liquide aT, a taux d'étirement hs enthalpie sensible du mélange c vitesse du son Io facteur d'étirement Ck Concentration molaire de l'espèce k k énergie cinétique turbulente gazeuse Cp,l capacité calorifique liquide Keq Cp capacité calorifique à pression constante Kf,j constante de la réaction directe CS constante du modèle de Smagorinsky Kr,j constante de la réaction inverse Cv capacité calorifique à volume constant L longueur du dard d'un jet liquide Cw constante du modèle WALE Lv enthalpie latente d'évaporation Cd coefficient de décharge lt échelle intégrale de la turbulence d diamètre de goutte M nombre de réactions L ISTE DES SYMBOLES N X nl densité volumique de particules Y P pression z fraction de mélange Pc, Pcc pression chambre zst fraction de mélange stoechiométrique Pi pression totale ou pression génératrice cp vitesse dans l'espace des phases Pcc pression de Clausius-Clapeyron F tenseur des flux Pk pression partielle de l'espèce k f 1ère composante du tenseur des flux qp énergie cinétique turbulente des particules Fd terme de traînée eulérien Fp force de traînée particulaire r constante du gaz g 2ème composante du tenseur des flux S senseur du modèle d'épaississement dynamique (section 4.5) h 3ème composante du tenseur des flux Jk flux diffusif de l'espèce k s entropie sensible (chapitre 2) q s rapport stoechiométrique s vecteur des termes sources gazeux Sc vitesse de consommation sc vecteur du terme source chimique Si,j tenseur des vitesses de déformation sg-l SL, SL0 vitesse de flamme laminaire vecteur du terme source du gaz vers le liquide T température sl-g t temps vecteur du terme source du liquide vers le gaz Ti température totale ou température génératrice u us vecteur vitesse relative gaz-particule Twb température d'équilibre (humide) Vc vitesse de diffusion corrective Tcc température de Clausius-Clapeyron Vk vitesse de diffusion de l'espèce k Teb w vecteur des variables conservatives Tref température de référence pour l'enthalpie liquide x position dans l'espace des phases ṁp taux d'évaporation particulaire u 1ère v 2ème Vcell composante de vitesse composante de vitesse α constante de la fonction d'efficacité volume de la cellule αl fraction volumique de liquide W masse molaire β constante de la fonction d'efficacité w Liste des symboles e taille du filtre utilisé dans le modèle TFLES 00 νkj coefficient stoechiométrique des produits 0 νkj coefficient stoechiométrique des réactifs νkj coefficient stoechiométrique global νt viscosité turbulente de sous-maille Ω fonction de présence du modèle TFLES (section 4.5) δi épaisseur de la couche limite gazeuse ∆s diamètre du noyau de dépôt d'énergie (modèle ED) δs distance moyenne inter-gouttes ∆t durée du dépôt d'énergie (modèle ED) Ω paramètre de mélange diphasique δi,j Φ flux thermique eulérien par conduction δL, δL0 épaisseur thermique de la flamme φ richesse δL1 épaisseur de la flamme épaissie φi flux thermique particulaire dans la phase i Ω̇F taux de réaction intégral du carburant ρ ω̇kj taux de réaction de l'espèce k dans la réaction j Σ densité de surface de flamme ω̇k taux de réaction de l'espèce k σ ω̇T σ taux de dégagement de chaleur tension de surface liquide/gaz ηK Γ taux d'évaporation eulérien Γ étirement de sous-maille (section 4.5) γ rapport des capacités calorifiques τe temps global d'évaporation Γu variation de quantité de mouvement mésoscopique par évaporation τi,j κ charge massique de liquide τmel temps caractéristique de mélange κ viscosité de volume Θ variable d'avancement Λ flux thermique eulérien par évaporation θ angle d'injection des gouttes λ 4 taille du maillage et du filtre LES λl longueur d'onde de l'instabilité de Kelvin-Helmholtz ε taux de dissipation εi longueur d'onde de l'instabilité de Rayleigh-Taylor énergie totale déposée par le modèle d'allumage ED Ξ facteur de plissement μ ζp température dans l'espace des phases μp masse dans l'espace des phases ν BM λrt τc, τchem temps caractéristique chimique τp temps de relaxation particulaire τε échelle de temps des grandes structures τev, τv temps d'évaporation 13 nombre de Spalding L ISTE DES SYMBOLES Da nombre de Damköhler 1 valeur dans les gaz frais J rapport des flux de quantité de mouvement 2 valeur dans les gaz brûlés ∞ à une distance infinie de la goutte ζ à la surface de la goutte F relatif au carburant i composante dans la direction i j relatif à la réaction j k relatif à l'espèce k l relatif à la phase liquide (grandeur eulérienne mésoscopique) Le M nombre de Mach Nu Pr P rt nombre de Prandtl turbulent Re Red nombre de Reynolds moyen des gouttes Rel nombre de Reynolds liquide O relatif à l'oxydant Rep nombre de Reynolds particulaire p Ret nombre de Reynolds turbulent relatif à la particule (grandeur lagrangienne) Sck nombre de Schmidt de l'espèce k ev relatif à l'évaporation Sctk nombre de Schmidt turbulent rms Sh écart-type des fluctuations (root mean square) St We Exposants 0 relatif à la fluctuation 00 relatif au mouvement décorrélé 0 c relatif à la conduction thermique I partie non diffusive M relatif au mouvement mésoscopique m valeur molaire sat état saturé t contribution de sous-maille U relatif au mouvement décorrélé V partie diffusive ev relatif à l'évaporation ~ valeur tabulée Opérateurs de moyenne / filtrage h*iΩ moyenne spatiale sur le volume Ω h*il moyenne d'ensemble massique sur les réalisations particulaires (moyenne mésoscopique) {*}l moyenne d'ensemble sur les réalisations particulaires f ̆ idem h*il f filtrage LES au sens de Reynolds fb filtrage LES au sens de Favre pour la phase dispersée fe filtrage LES au sens de Favre pour le gaz Indices 0 état initial Abréviations 14 Liste des symboles DNS DTF Dynamically Thickened Flame ED Energy Deposition modèle FDP Fonction Densité de Présence LES LW Lax-Wendroff NSCBC Navier-Stokes Characteristic Boundary Condition PDF RANS Reynolds Averaged Navier-Stokes SGE Simulation aux Grandes Echelles (synonyme de LES) SGS Sub-Grid Scale TF Thickened Flame TFLES TF model for LES THI Turbulence Homogène Isotrope TP-TFLES TFLES model for Two-Phase flames TTGC Two-step Taylor-Galerkin version C 15 L ISTE DES SYMBOLES 16 Chapitre 1 Introduction générale Ce travail de recherche est consacré à la simulation numérique de la phase d'allumage du moteur fusée cryotechnique VINCI alimenté en oxygène et hydrogène liquides. 1.1 L'origine des premières fusées est mal connue mais c'est probablement en Chine que la "flèche de feu" fut inventée vers 200 av. J.C. [48, 210]. Des tubes en bambou remplis de poudre noire servaient de divertissement lors des fêtes mais aussi d'arme de guerre contre les envahisseurs japonais. Plus tard, les marchands arabes et mongols ont apporté ces fusées en Europe. Ce n'est qu'au début du XXème siècle que de réelles avancées sont réalisées en matière de propulsion spatiale. Les théories sur les vols spatiaux sont développées de façon indépendante par trois scientifiques I NT RODUC TION GÉNÉRALE Russe , Américain et A llemand . Le premier est Konstantin Tsiolkovski (1857-1935) : ce professeur de mathématiques russe publie en 1903 un article décrivant en détail les rapports entre la vitesse d'une fusée, sa masse et la nature du carburant à employer, pour l'arracher de l'attraction terrestre. Un peu plus tard il décrit les concepts théoriques des fusées à ergols liquides, les satellites artificiels et les fusées à étages sans toutefois avoir recours aux expériences. Aux Etats-Unis, Robert Goddard (1882-1945), professeur de physique dépose plusieurs brevets en 1914 sur des prototypes de fusées à carburants liquides, des chambres de combustion et des tuyères. Il lance le 16 mars 1926 la première fusée (5 kg) alimentée en carburants liquides (oxygène liquide et kérosène) [210]. En 1919, il publie l'article "A method of reaching extreme altitudes", dans lequel il développe très précisément la théorie de la propulsion spatiale ainsi que les principaux résultats des ses expériences. Le troisième scientifique et peut être le plus influent est Hermann Oberth (1894-1989). Cet Allemand d'adoption qui voit sa thèse de doctorat portant sur les fusées jetée par l'Université de Heidelberg, décide de la publier comme ouvrage. Ce livre devient rapidement très populaire et contribue à la formation de plusieurs associations de modélisme sur les fusées comme la Verein für Raumschifffahrt dont fut membre Wernher von Braun. En 1929, Hermann Oberth met au point un modèle réduit de fusée pour le film "Une femme sur la Lune" (Frau im Mond). Le succès du film conduit la compagnie cinématographique UFA à financer les expériences d'Hermann Oberth sur les fusées à propulsion liquide permettant des avancées technologiques conséquentes. A la fin de la Première Guerre Mondiale, le Traité de Versailles interdit l'Allemagne d'utiliser des canons longue portée. Les dirigeants militaires prennent conscience du potentiel qu'offrent les fusées pour contourner cette interdiction. 1.2 1.2.1 Le contexte spatial mondial et l'Europe Contexte spatial mondial En 2008 un total de 69 lancements spatiaux (contre 66 en 2006) ont été effectués à travers le monde [102]. En termes de nombre de lancements, la Russie reste la première puissance spatiale avec 26 lancements réussis (Fig. 1.1). Au second rang se trouvent les Etats-Unis avec 19 lancements puis vient la Chine avec 11 tirs. L'Europe n'est qu'en quatrième position avec 6 lancements d'Arianespace. La fin du peloton est constitué de l'Inde, du Japon et d'Israël. Ce bilan révèle une tendance majeure : depuis 2003 l'Asie (Chine, Inde, Japon) comptabilise plus de lancements que l'Europe et l'écart se creuse en 2008 (15 tirs pour l'Asie contre 6 pour l'Europe). F IG. 1.1 - Bilan des lancements effectués par les différentes puissances spatiales [102]. La Chine en particulier possède une politique spatiale très ambitieuse. Elle réussit son premier vol habité en 2003 (Yang Liwei), se lance dans l'exploration planétaire en 2007 avec l'envoi de la sonde lunaire Chang'e1, réalise sa première sortie extra-véhiculaire le 28 septembre 2008 et prévoit d'assembler sa propre station orbitale type Mir vers 2020 [105]. Les avancées concrètes réalisées par la Chine semblent indiquer qu'elle va devenir dans les prochaines décennies un acteur majeur de la scène spatiale internationale. L'Inde aidée comme la chine par une très forte croissance économique débute un programme de vol habité pour un premier lancement en 2014. Par ailleurs, les Etats-Unis continuent d'occuper une place centrale dans le domaine spatial international avec de nombreux projets scientifiques d'observation de la Terre, du Cosmos et d'envois de sondes sur la Lune et sur Mars. Une part importante des lancements sera tout de même dédiée à la mise sur orbite de différents satellites militaires et commerciaux en 2009. Bien que l'arrêt de l'exploitation de la Navette soit programmé fin 2010, les Etats-Unis sont en train de développer de nouveaux lanceurs (Ares I et V) 19 I NTRODUCTION GÉNÉRALE et une capsule habitable (Orion) pour relancer vers 2020 la "conquête" de la Lune avec le programme Constellation dont le but est d'installer une base lunaire permanente [27]. En parallèle, la station orbitale ISS est mise à contribution pour étudier l'effet de l'apesanteur sur le corps humain en préparation de missions habitées vers Mars. La Russie, bien qu'étant la première puissance en nombre de tirs ne possède pas de politique spatiale aussi "ambitieuse" que la Chine et les Etats-Unis. Son nombre de lancements diminue depuis le début des années 1990 et son calendrier de tirs pour les prochaines années est ement constitué de lancements de satellites civils et militaires [101]. 1.2.2 Position de l'Union européenne Les deux dernières années (2007-2008) sont synonymes de succès pour l'Europe spatiale d'abord parce que plus de la moitié des lancements de satellites commerciaux ont été réalisés par Ariane-V [101]. A cela s'ajoute le lancement du laboratoire européen Columbs (par la Navette américaine) qui a été rattaché à la station orbitale (ISS) ainsi que le succès du lancement le plus complexe jamais réalisé avec une fusée Ariane-V : celui de l'ATV (Automated Transfer Vehicle en anglais). L'ATV est un module automatique de plus de 19 tonnes, permettant notamment de ravitailler la station orbitale. Ce lancement est particulier, d'abord parce que c'est la première fois que la station ISS est desservie par le lanceur européen, et ensuite parce que l'étage supérieur est propulsé par un moteur rallumable : le moteur Aestus. Ce moteur fournit une poussée d'environ 3 tonnes grâce à la combustion du couple hypergolique N2 O4 /M M H (hypergolique signifie que la combustion se déclenche dès que les deux molécules sont en contact). Pour le futur, Arianespace compte pérenniser le programme de lancements en direction de la station orbitale internationale et étendre ses capacités de lancement en termes de masse embarquée (il a été constaté que la masse des charges utiles augmentait de 125 kg par an en moyenne [103]) et de nombre de satellites par tir [103] pour notamment mettre en place la constellation de satellites de géopositionnement Galileo. Les améliorations du lanceur européen sont donc nécessaires. Il y a besoin en particulier de mettre au point un nouveau moteur pour l'étage supérieur : le moteur VINCI. 1.3 VINCI : les enjeux d'un moteur rallumable Le programme VINCI, piloté par la SNECMA, a débuté en 1999 pour une mise en service vers 2015 [103]. Le but est de concevoir un nouveau moteur d'une poussée de 18 tonnes, possédant la capacité de se rallumer. L'intérêt du rallumage est d'abord de pouvoir embarquer plusieurs charges utiles mais aussi de placer les satellites sur des orbites plus proches de leurs orbites finales permettant ainsi de supprimer les systèmes de propulsion chimique des satellites et de les remplacer par des dispositifs électriques moins lourds et moins volumineux [103]. La maîtrise des phases d'allumage et de rallumage reste une tâche délicate qui peut causer la perte du lanceur complet ou de la charge utile. Un retard d'allumage peut conduire à l'accumulation de combustibles dans la chambre et donc à une violente surpression une fois la combustion initiée. Cette forte élévation : les enjeux d'un rallumable de pression peut détruire la chambre ou générer des instabilités de combustion dégradant fortement les performances du moteur (Fig. 1.2). A l'inverse une avance à l'allumage peut par exemple perturber la F IG. 1.2 - Chambre détruite suite à une instabilité de combustion (avec la permission de la NASA). séquence globale d'une mise à poste d'un satellite et entraîner sa perte. Le 18ème vol d'Ariane s'est soldé par un échec suite à un problème d'allumage du moteur de l'étage supérieur HM7 [67]. Plus récemment (le 15 mars 2008) l'étage supérieur d'une fusée Proton n'est pas parvenu à placer son satellite sur l'orbite désirée après une anomalie dans la séquence de rallumage [104]. Pour palier le manque de connaissances dans le domaine de l'allumage et plus globalement de la combustion dans les moteurs cryotechniques (utilisant des ergols liquides stockés à très basses températures), le CNES, l'ONERA, la SNECMA et le CNRS ont formé en 1993 un groupe de recherche "combustion dans les moteurs fusées" dont les résultats finaux ont été publiés en 2001 [39]. Ce groupement de recherche visait à développer les trois axes théorique, expérimental et numérique. Les résultats de ces travaux ont permis de nombreuses avancées dans la compréhension de l'atomisation, de la combustion, des transferts thermiques et des phénomènes haute pression [39]. Actuellement, le programme VINCI en est à la moitié de son développement. Les essais de la phase de démonstration de rallumage se sont terminés en 2008 [103]. Les travaux présentés dans cette thèse sont dans la continuité de ces recherches. Les différents objectifs fixés pour ce projet sont présentés dans la section suivante. I NTRODUCTION GÉNÉRALE 1.4 1.4.1 Objectifs de l'étude et choix méthodologiques Contexte expérience / numérique En Allemagne, le site du DLR (Agence spatiale allemande) de Lampoldshausen possède dix bancs moteurs fusées permettant d'effectuer un panel très large de diagnostics sur des moteurs cryogéniques ou à ergols solides dans conditions terrestres (pression atmosphérique) ou de haute altitude (faibles pressions). Dans le même centre, le banc M3 permet d'étudier les phénomènes d'injection, d'allumage et de combustion dans une micro chambre de combustion qui posséde de larges fenêtres en quartz permettant une analyse optique de la combustion (cf. Partie IV). Ce dispositif expérimental a fait l'objet de nombreuses publications [179, 181, 76, 49, 130, 129]. En France, le banc Mascotte de l'ONERA est dédié à l'étude de la combustion dans les moteurs cryotechniques à des pressions sub- et supercritiques et a aussi permis de multiples contributions scientifiques [199, 28, 89, 29, 194]. Les tests expérimentaux dans le domaine de la propulsion spatiale sont très onéreux et relativement complexes à instrumentaliser. Les différentes approches numériques En mécanique des fluides numérique, trois approches principales peuvent être identifiées : la méthode RANS (pour Reynolds averaged Navier-Stokes en anglais) dans laquelle l'impact de toutes les échelles de la turbulence est modélisé. Le résultat d'une simulation RANS correspond à une moyenne sur un nombre important de réalisations du champ fluide [36, 158]. Cette approche est communément utilisée dans l'industrie car elle permet des temps de restitution courts. En revanche, elle ne permet pas de simuler des phénomènes instationnaires ou transitoires. La seconde méthodologie est la simulation aux grandes échelles (SGE) [158, 176] (ou LES, pour large eddy simulation en anglais). Le concept de cette approche est différente de la première dans le sens ou le filtrage des équations de Navier-Stokes est spatial et non temporel. Ce type de simulation résout explicitement les grosses structures de l'écoulement alors que l'effet des petits tourbillons est modélisé (Fig. 1.3). Cette approche couplée à des algorithmes performants de parallélisation est très prometteuse pour simuler des phénomènes instationnaires comme l'allumage ou les instabilités de combustion dans des géométries complexes. Son coût de calcul important fait qu'elle ne supplante pas l'approche RANS classique dans de nombreuses situations. L'approche DNS (pour Direct Numerical Simulation en anglais) n'a besoins d'aucun modèle et toutes les échelles de la turbulence sont résolues. Cette approche permet d'atteindre des niveaux de précision supérieurs à toute expérience (les calculs DNS sont parfois appelés "expériences numériques") mais son domaine d'application se limite à des configurations simples pour des raisons de coût de calcul. Dans de nombreuses applications industrielles, le comportement macroscopique du fluide est piloté par grosses structures de l'écoulement. La formulation LES présente l'avantage de ne pas faire d'hy22 1.4 Objectifs de l'étude et choix mét hodologiques − 5/3 Echelles modélisées a. Champ résolu Domaine fréquenciel LES Energie Energie RANS − 5/3 Echelles résolues b. Echelles modélisées Domaine fréquenciel F IG . 1.3 - Rep résent ation concept uelle des méthodes RANS ( a .) et LES (b.) appliquées à une turbulence homogène isotrope pothèse sur ces échelles contrairement à la méthode RANS qui les modé lise. Des approch es hybrid es ont été développées comme l'approche DES ( pour Detached-Eddy Simulation en anglais) qui permet de combiner les avantages des méthodes RANS et LES pour simuler des écoulements fortement décollés (à très haut nombre Reynolds) sur des configurations complexes comme des profils d'avion ou d'automobile [204]. Les zones de proche paroi sont simulées par l' approch e RANS et les autres région s de l 'éco ulement , par méthode LES. Les principaux travaux numériques pour la combustion dans les moteurs fusées Pour des raisons de maturité des méthodes numériques, la plupart des travaux de simulation sur les moteurs fusées a été réalisée avec l'approche RANS. Une part importante de ces études a été consacrée à la modélisation de l'atomisation du jet d'oxygène liquide et de son évaporation [73, 15, 195], à la combustion diphasique [160, 161, 226, 8, 159, 86], à la modélisation des effets gaz réels et la combustion à hautes pressions [140, 86, 51, 236]. L'intérêt majeur de l'approche RANS est son coût de calcul raisonnable. Cependant, dans un contexte de prédiction de phénomènes instationnaires comme l'allumage ou les instabilités de combustion, la méthodologie RANS est mal adaptée. La simulation par approche LES des écoulements réactifs dans les moteurs fusées n'est que très récente. Les complexités numériques et physiques de ces configurations expliquent qu'aujourd'hui peu de travaux ont été entrepris [143, 144, 127] et que de nombreuses améliorations sont encore à réaliser. Les travaux présentés dans ce manuscrit sur l'allumage des moteurs fusées cryotechiques et en particulier sur le moteur VINCI ont été réalisés avec le code de calcul (AVBP) du CERFACS. Ce code parallèle est basé sur l'approche LES résolvant les équations de Navier-Stokes compressibles réactives. I NTRODUCTION GÉNÉRALE 1.4.2 Difficultés de modélisation Un moteur fusée cryotechnique se compose d'une chambre de combustion avec à l'extrémité avale la tuyère de sortie, et à l'autre extrémité la plaque d'injection composée de nombreux injecteurs coaxiaux (plus d'une centaine pour le moteur VINCI et d'un allumeur qui fournit la source de chaleur nécessaire pour déclencher la combustion (Fig. 1.4). Au niveau des injecteurs, l'oxygène liquide est atomisé par l'hydrogène gazeux très rapide. Dans le cas du VINCI, l'allumeur est une petite chambre de combustion à haute pression située en amont, qui produit un jet sous-détendu de gaz brûlés contenant un réseau de chocs. exit nozzle Coaxial injector Igniter Combustion chamber F IG. 1.4 - Schéma d'un moteur fusée cryotechnique. Les difficultés en terme de modélisation peuvent être répertoriées de la façon suivante : – Combustion turbulente dans différents régimes (prémélangé/partiellement prémélangé/diffusion) ; – Cinétique chimique hydrogène/oxygène ; – Effets diphasiques à basses pressions et effets supercritiques à hautes pressions ; – Mélange et dynamique de jet turbulent ; – Traitement des écoulements supersoniques ; – Modélisation de l'allumeur. Certains de ces aspects de modélisation ont déjà fait l'objet d'études au CERFACS. 1.4.3 Etat des connaissances du CERFACS Depuis plusieurs années, le CERFACS, en collaboration avec l'IFP, développe le code de calcul AVBP qui a fait l'objet de plusieurs applications en combustion turbulente gazeuse sur des géométries complexes [69, 175, 186, 187, 188]. Le modèle de combustion (modèle de flamme épaissie) a été ultérieurement adapté pour la combustion turbulente partiellement prémélangée [183, 125, 114]. En 2004, les travaux de thèse de A. Kaufmann [90] ont permis d'implanter un module diphasique (appelé TPF ) capable de traiter les écoulements à phase dispersée dans un contexte de simulation numérique directe. En 2008, la thèse de M. Boileau [17, 18] montre la capacité de l'outil AVBP TPF à traiter la combustion diphasique en configuration réaliste dans un cas d'allumage d'un foyer aéronautique. 24 1.4 Objectifs de l'étude et choix méthodologiques En 2006, la thèse de A. Dauptain [48] consacrée à la combustion dans les moteurs fusées, a permis de mettre en place une méthode de traitement des chocs et des écoulements supersoniques. Enfin en parallèle de la présente thèse, les travaux de T. Schmitt [184] sont consacrés à l'adaptation du code AVBP aux conditions supercritiques. L'introduction d'une thermo-chimie de gaz réels a permis de simuler plusieurs régimes de combustion du banc Mascotte (hydrogène gazeux et oxygène dense) à des pressions supérieures à 60 bar (la pression critique de l'oxygène est de l'ordre de 50 bar). Les questions toujours ouvertes au début de cette thèse concernent donc : 1. La cinétique chimique hydrogène/oxygène ; 2. La modélisation de l'allumage ; 3. Le mélange et la dynamique de jet turbulent ; 4. effets diphasiques de l'oxygène pendant la phase d'allumage. 1.4.4 L'objectif final de ces travaux est de simuler avec le code AVBP l'allumage du moteur cryotechnique VINCI. Pour cela, les quatre questions restées ouvertes de la section précédente sont étudiées, les adaptations numériques nécessaires sont réalisées et testées et une méthodologie de calcul optimale est établie. 1.4.5 Stratégie et méthodes La méthode la plus efficace pour répondre aux questions précédentes est de simplifier les problèmes pour en isoler les différents aspects. La première étape de ce travail de thèse a donc consisté à choisir des cas tests expérimentaux bien documentés permettant d'évaluer chacun des quatre points que sont : (1) la cinétique hydrogène/oxygène, (2) la modélisation de l'allumage, (3) la capture de jet turbulent non-prémélangé et (4) l'impact du diphasique sur l'allumage. Quatre expériences ont été choisies pour valider les points (1), (2) et (3). La stratégie employée dans ce travail de thèse a été d'utiliser le code AVBP pour reproduire chacun de ces cas de référence en partant de la configuration la plus simple à valider et en augmentant progressivement la complexité pour terminer l'étude par une simulation d'allumage du moteur VINCI. La première étape consiste à définir une cinétique réduite hydrogène/oxygène et à la valider par comparaison à des cinétiques complexes comme celle de O'Conaire et al. [42] sur des cas tests laminaires. Dans un second temps, un modèle d'allumage est défini et validé sur le cas de l'expérience de Erard et al. [57] dans laquelle un mélange homogène propane/air laminaire est allumé par une étincelle électrique conduisant à la formation d'une flamme sphérique. La troisième étape est caractérisée par la simulation d'allumage d'un jet turbulent de méthane débouchant dans un co-courant d'air, permettant la validation des points (2) et (3). Cette configuration a été étudiée expérimentalement par Ahmed et Mastorakos [3]. RODUCTION ÉNÉRALE Dans une quatrième partie, le calcul du régime transitoire d'allumage du banc expérimental M3 [180] permet de réaliser une validation comportant les trois aspects (1) (2) et (3). La chambre M3, consacrée à l'étude optique de l'allumage dans les moteurs fusées est composée d'un unique injecteur coaxial injectant l'hydrogène et l'oxygène sous forme gazeuse (similaire aux injecteurs du moteur VINCI), allumé par un laser. Deux vitres de quartz permettent un accès optique au volume complet de la chambre rendant possible l'analyse de la propagation de la flamme par caméra rapide. Enfin, la simulation d'allumage du moteur VINCI intègre les quatre points (1), (2), (3) et (4). Les cinq étapes de simulation marquant le déroulement de la thèse sont présentées Fig. 1.5. F IG. 1.5 - Déroulement de la thèse. 1.5 Organisation du manuscrit 1.5 La première partie décrit les approches théorique et numérique employées pendant cette thèse. Les équations de conservation pour la phase gazeuse et la phase liquide sont présentées dans un contexte d'écoulements diphasiques, compressibles et réactifs. Ces équations sont ensuite filtrées pour aboutir aux relations LES, les différentes fermetures des termes non résolus sont présentées ainsi que la validation d'un schéma cinétique réduit pour la combustion hydrogène/oxygène. Enfin, la dernière section décrit l'approche numérique de façon générale. La seconde partie est dédiée à la mise en place d'un modèle d'allumage par dépôt d'énergie pour simuler les allumages par laser ou par bougie électrique. Après une introduction phénoménologique, le modèle est défini puis validé dans un cas de DNS reproduisant l'expérience de Erard et al. [57]. Le modèle est ensuite couplé au modèle de combustion turbulente pour pouvoir être appliqué dans un contexte LES. La troisième partie présente la simulation LES de l'allumage du jet de méthane turbulent étudié expérimentalement par Ahmed et Mastorakos [3]. Cette troisième partie montre que les différentes étapes de l'allumage d'un jet, identifiées à partir des résultats numériques, sont en très bon accord avec les observations expérimentales. La quatrième partie est consacrée à l'allumage de la chambre expérimentale M3 dans le cas d'un allumage retardé conduisant à une violente élévation de pression. Le but de cette partie est de rassembler les différents aspects validés dans les parties précédentes dans une configuration proche d'un moteur fusée réel. Cette étude montre notamment que les résultats LES permettent une analyse critique des résultats expérimentaux et conduisent à une interprétation différente du scénario d allumage. La cinquième et dernière partie présente la simulation d'une séquence d'allumage du moteur VINCI dans une configuration simplifiée. Les résultats numériques soulignent l'importance des effets diphasiques sur l'initiation de la combustion et la phase de propagation de la flamme avant la stabilisation. I NTRODUCTION GÉNÉRALE Équations et modèles pour les écoulements turbulents diphasiques réactifs Table des Matières 2 3 Équations de conservation pour les écoulements gazeux réactifs 2.1 Équations et variables conservatives.............. 2.2 Variables thermodynamiques.................. 2.3 Équation d'état des gaz parfaits................. 2.4 Diffusion moléculaire multi-espèces.............. 2.5 Diffusion de la chaleur..................... 2.6 Coefficients de transport diffusif................ 2.7 Cinétique chimique.......................................................................................................... 35 35 37 37 38 39 39 40 43 43 43 44 45 45 46 46 46 47 48 48 48 49 49 49 50 50 51 52 TABLE DES MATIÈRES Description du modèle........... Taux de transfert de masse......... Taux de transfert de chaleur........ Valeur de référence pour l'enthalpie liquide Coefficients de transport diffusif...... 4 5................................................................. TABLE DES MATIÈRES 5.3.1 5.3.2 Cinétique chimique hydrogène-oxygène 6.1 Les trois cinétiques testées ............ 6.2 Températures de fin de combustion........ 6.3 Vitesse de flamme laminaire........... 6.4 Dépendance en pression............. 6.5 Délais d'auto-allumage.............. 6.6 Structure de flamme prémélangée........ 6.7 Structure de la flamme de diffusion........ 6.8 Epaississement dynami que et cin étique chimi que 91. 92. 94. 95. 96. 99. 100. 103. 106 5.4 5.5 6 Introduction............... Senseurs ................ Senseur de Jameson.......... Senseur de Colin............ 5.3.3 Opérateurs............... Traitement des chocs.............. 5.4.1 Position du problème.......... 5.4.2 Méthodes numériques....... .. 5.4.3 Viscosité de volume .......... Modèle de Von Neumann et Richtmeyer Modèle de Cook et Cabot....... Application à un tube à choc...... Conditions aux limites.............
11,989
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French-Science-Pile
Open Science
Various open science
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1,611
AMU lie , 2016, p. : 978-2- -06614-9. 19 € 1 Mary Shelley, Les Aventures de Perkin Warbeck 1 Il est des textes si remarquables qu'ils éclipsent les autres productions de leur auteur : on a longtemps associé le nom de Mary Shelley au seul Frankenstein (1818), laissant dans l'ombre les nombreux essais et nouvelles publiés par cette écrivaine prolifique ainsi que les six romans qui parurent à la suite de son chef-d 'oeuvre, entre 1819 et 1837. Ceci explique en grande partie qu'il ait fallu attendre près de deux siècles pour que The Fortunes of Perkin Warbeck, a Romance (1830) soit traduit en français par Anne Rouhette-Berton, Maître de Conférences au département d'anglais de l'Université Blaise Pascal, ClermontFerrand. 2 Si le nom de Perkin Warbeck peut sembler romanesque, il se réfère pourtant à un personnage historique, qui chercha à conquérir le trône d'Angleterre à la fin du XVe siècle, au lendemain de la bataille de Bosworth, par laquelle la guerre des Deux-Roses s'acheva au profit de la maison de Lancastre. Perkin Warbeck prétendait en effet être Richard d'York, fils d'Édouard IV, jeune prince dont on avait perdu la trace dans la Tour de Londres et qui faisait son retour quelques années plus tard, sous un nom d'emprunt, pour réclamer la couronne dont il avait été dépossédé. Soutenu par d'influents alliés, il fit peser sur le souverain Henri VII une menace certaine : son entreprise se solda par son emprisonnement et son exécution en l'an 1499. 3 Mais alors que la plupart des historiens l'ont toujours considéré comme un imposteur, Mary Shelley voyait dans le jeune prétendant au sort funeste le véritable Richard d'York, héritier légitime du trône d'Angleterre, « le dernier bouton de la Rose Blanche déracinée » (p. 122). Le premier des trois volumes qui constituent ce foisonnant roman est donc en partie consacré au récit de l'enfance d'un prince sauvé de la Tour par son cousin, le comte de Lincoln, avant d'être contraint de s'exiler en Flandre puis en Andalousie sous une fausse identité. Malgré cette entorse manifeste aux faits avérés, Mary Shelley n'en fait pas moins preuve d'une remarquable connaissance de la période dépeinte. Dans l'introduction qui accompagne sa traduction, Anne Rouhette-Berton rappelle que la romancière s'était plongée dans une méticuleuse préparation documentaire afin de rédiger son texte, inspirée par son père, William Godwin, assistée par son mari, Percy Bysshe Shelley, mais surtout mue par un goût personnel pour l'Histoire et pour le sujet qu'elle avait choisi. Réalité et fiction se mêlent d'autant plus volontiers dans Les Aventures de Perkin Warbeck que les tribulations du jeune prétendant, fidèlement retracées par l'intrigue, évoquent déjà les péripéties d'un texte fictionnel, comme l'indique Mary Shelley dans sa préface, soulignant la « dimension romanesque de son histoire » (p. 49). Une rubrique de la bibliographie sélective proposée dans cette édition montre d'ailleurs la postérité tant historiographique que fictionnelle de cette histoire, qui en fait selon Anne Rouhette-Berton l'équivalent anglo-saxon de la légende du Masque de Fer. Exils, combats sanglants, complots, trahisons, emprisonnements et évasions se succèdent au fil 2 Mary Shelley, Les es de Perkin Warbeck d'une intrigue habilement conduite, qui demeure toujours limpide malgré son rythme trépidant et le grand nombre de personnages mentionnés. Les émotions fortes se mêlent aux grands sentiments pour offrir au lecteur une ode ardente à l'amour (conjugal, filial, amical) ainsi que de fines études de caractères. La prose sensible de l'auteur, tantôt ample et élégiaque, tantôt vive et percutante, demeure toujours soignée et élégante. Vanter les qualités de ce roman revient, lorsque l'on a en main cette édition française, à louer les mérites de la traduction qui nous y est présentée : s'appuyant sur un travail entamé pour sa thèse de doctorat, Anne Rouhette-Berton fournit un texte fidèle et inspiré, restituant les archaïsmes choisis par la romancière pour plonger son lecteur dans une époque lointaine, respectant le raffinement du texte de Shelley sans pour autant verser dans la préciosité. Indices du soin porté par la traductrice au moindre aspect de son texte, les épigraphes disposées au début de chaque chapitre sont judicieusement rendues, quand cela est possible, par des extraits d'oeuvres traduites : il s'agit là de respecter le souci qu'avait Mary Shelley de conférer à son roman un certain prestige culturel, l'emploi d'épigraphes nombreuses témoignant déjà d'une volonté de rattacher son texte à la tradition littéraire du roman historique et à celle du roman gothique. De manière plus générale, l'appareil critique fournit les informations nécessaires avec concision, sans érudition inutile, le but manifeste étant de faciliter la compréhension et l'appréciation d'un texte riche et complexe. Le dictionnaire des personnages historiques placé en annexe et comprenant plus de quatre-vingt-dix références aide à identifier les personnes impliquées dans la conspiration de Perkin Warbeck et donne l'occasion de juger de la fidélité ou de la liberté avec laquelle Mary Shelley rend compte de leur participation. 4 Cette traduction repose donc sur une lecture très attentive du texte anglais, dont les spécificités sont résumées dans une introduction claire et nuancée : selon Anne RouhetteBerton, malgré leur souci de précision historique, malgré leur dette envers Walter , grand maître du roman historique, Les Aventures de Perkin Warbeck n'ont pas pour objet premier une reconstitution historique fidèle du Moyen Âge tardif. Elles visent plutôt à confronter deux « systèmes de valeurs » : celui de la chevalerie, incarné par le héros éponyme, à la fois pur et dévoré par une ambition qui le voue à la disparition, et celui, moins idéaliste mais synonyme de prospérité économique et de stabilité politique, représenté par son ennemi, le roi Henri VII. 5 Roman historique gothique et romantique, Perkin Warbeck dépeint un être ambivalent, héroïque et dangereux : Perkin/Richard n'est pas, comme Victor Frankenstein, un Prométhée moderne, mais il brûle d'une passion excessive qui fera sa gloire avant de répandre le malheur autour de lui et sur lui-même. Si ce roman n'est pas le plus abouti de Mary Shelley, ses qualités, pleinement restituées par cette traduction, méritent de toucher un plus large public et de compléter sa connaissance d'une oeuvre dont la noirceur est traversée de vibrants éclats de lumière..
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Le terme « immobilier », dans son emploi le plus courant, désigne ce qui a trait au bâti en général et à sa production. Il se distingue alors du « foncier », relatif aux terrains. Dans une acception plus large, « immobilier » sert à qualifier des biens « immeubles », caractérisés par une immobilité à la fois spatiale (fixité) et temporelle (durabilité), englobant aussi bien les terrains que les bâtiments. Le vocabulaire financier oppose dans ce sens les actifs immobiliers aux actifs « mobiliers » (actions, obligations). La fixité d'un bien immobilier en fait un bien économique fondamentalement infongible, dont le prix est fortement déterminé par sa situation – par définition unique – dans l'espace. Un bâtiment est également un bien durable qui fixe une quantité importante de capital sur longue période et induit, tout au long de son existence, l'usage qui sera fait du terrain qu'il occupe. Ces propriétés, dans une logique d'investissement, rendent les actifs immobiliers particulièrement illiquides, les destinant a priori à une gestion de type patrimoniale. La logique actuelle de financiarisation tend néanmoins de plus en plus à les assimiler à des actifs mobiliers. Le bâti urbain hérité constitue une contrainte matérielle majeure, qui induit fortement l'orientation des futurs flux d'investissements immobiliers. La théorie du rent-gap, en soulignant le rôle primordial de la production immobilière dans la captation de la rente foncière, analyse ainsi les dynamiques de périurbanisation et de gentrification au sein des grandes métropoles comme des résultantes d'un cycle de désinvestissement-réinvestissement des centres-villes (Smith, 1982). La question de l'articulation entre immobilier et foncier s'avère essentielle pour comprendre les dynamiques urbaines : le foncier constitue le facteur de production indispensable à toute production immobilière et, en règle générale, la propriété immobilière suppose la propriété du terrain sous-jacent. Bibliographie Renard V., 2003, « Les enjeux urbains des prix fonciers et immobiliers », p. 95-108, in Prager J.-C., Villes et économie, La documentation française, Paris. Smith N., 1982, « Gentrification and uneven development », Economic Geography, 58-2, p. 139-155. Topalov C., 1974, Les promoteurs immobiliers : contribution à l'analyse de la production capitaliste du logement en France, éd. Mouton, Paris-La Haye, 316 p. Financiarisation La financiarisation désigne un processus de renforcement du rôle des marchés et des acteurs financiers (en particulier des investisseurs institutionnels) dans la production et l'exploitation du bâti urbain. Cette évolution s'inscrit dans la lignée des réformes économiques néolibérales initiées dans les années 1970-1980. Cependant, l'implication du capital financier dans les secteurs fonciers et immobiliers, ainsi que la création de sociétés d'investissement dédiées, sont bien antérieures (Lescure, 1980). Se pose alors la question de la spécificité de la situation contemporaine. Outre un champ d'action de plus en plus mondialisé et un saut quantitatif en termes de capitaux mobilisés, le coeur du processus de financiarisation réside dans un changement du mode de gestion privilégié des actifs immobiliers, d'une logique patrimoniale vers une logique financière (Nappi-choulet, 2009). Les biens immobiliers ont longtemps été considérés par les investisseurs comme un placement refuge générateur de rentes sur le long terme. La financiarisation tend au contraire à les assimiler à des actifs financiers mobiliers, ce qui suppose de résoudre le problème fondamental de leur illiquidité. La principale solution a consisté dans le recours généralisé à de nouveaux « véhicules » d'investissement immobilier, intermédiaires financiers (souvent cotés) ayant pour fonction de permettre des investissements indirects dans le secteur à une prise de participation (Theurillat, 2011). Les actifs immobiliers peuvent ainsi être soumis à des critères d'évaluation (cash-flows, taux de rendement) et à des méthodes de gestion de portefeuille auparavant réservés aux actifs dématérialisés. L'emploi croissant de techniques financières complexes (effet de levier, titrisation) a eu pour effet de renforcer l'opacité des structures de propriété sur le marché immobilier. À cet égard, la crise des subprimes de 2007 est une conséquence de la financiarisation. La financiarisation touche inégalement les différents segments du marché immobilier : l'immobilier tertiaire, et notamment de bureaux, constitue son périmètre privilégié, tandis que son impact sur le secteur du logement est plus variable selon les pays. Ses retombées sur les marchés fonciers sont plus indirectes, principalement au travers de transactions spéculatives. Bibliographie Crouzet É., 2003, « Le marché de bureaux et les territoires métropolitains : vers un renforcement de la discrimination territoriale », L'Espace géographique, 2003/2, p. 141-154 Lescure M., 1980, Les sociétés immobilières en France au XIXe siècle. Contribution à l'histoire de la mise en valeur du sol urbain en économie capitaliste, Paris, Publications de la Sorbonne, 82 p. Nappi-choulet I., 2009, Les Mutations de l'immobilier. De la finance au développement durable, éd. Autrement, 291 p. Theurillat T., 2011, « La ville négociée : entre financiarisation et durabilité », Géographie, économie, société, 2011/3, vol.13, p. 225-254 Investissement Un investissement, ou placement, désigne l'achat d'un bien immobilier ou d'un terrain, non pas (ou pas uniquement) à des fins de consommation (pour sa valeur d'usage : résidence ou production), mais dans l'optique des revenus qu'il sera à même de générer dans le futur (pour sa valeur d'échange : loyers, plus-value, gains fiscaux). Étant donnée l'incertitude inhérente aux cycles économiques, un placement est toujours associé à un couple rendement / risque. Du fait de leurs spécificités (durabilité, infongibilité, illiquidité), la pierre et la terre sont souvent considérées comme des placements refuges de long terme (patrimoniaux). Cette place à part dans les portefeuilles d'actifs est cependant remise en question par le processus actuel de financiarisation, l'évaluation et la gestion des biens immobiliers et fonciers tendant de plus en plus à être calquées sur celles des actifs mobiliers. L'utilisation de biens fonciers ou immobiliers comme objets de placement résulte d'un long processus historique qui a vu la progressive intégration de ces biens au système d échanges capitalistes, avec la mise en place de marchés fonciers et immobiliers structurés (Topalov, 1987). Le développement de produits immobiliers et fonciers destinés à servir d'outils de placement a ainsi été au coeur du système du rentier au XIXe siècle, principalement sous la forme de logements locatifs (la « pierre-papier ») et de terrains à lotir. Si cette logique d'investissement a longtemps été l'apanage des seules classes supérieures rentières et des investisseurs institutionnels, elle tend cependant à se généraliser à travers la mise en place de dispositifs fiscaux destinés prioritairement aux investisseurs individuels, avec pour résultat une segmentation de plus en plus nette des marchés entre biens destinés aux investisseurs et biens destinés à la propriété occupante (Vergriete et Guerrini, 2012). Bibliographie Henderson J. et Ioannides Y., 1983, « Owner occupancy : investment vs consumption demand », Journal of urban economics, vol. 21, p. 228-241 Topalov C., 1987, Le Logement en France, histoire d'une marchandise impossible, éd. Presses de la fondation nationale des sciences politiques, 421 p. Vergriete P. et Guerrini S., 2012, « Stratégies d'investissement locatif et défiscalisation », Études foncières, n°158, p. 19-25 Lotissement À l'origine opération spécifiquement foncière, le lotissement désigne l'action de « lotir », c'est-à-dire de diviser un terrain en lots distincts destinés à être bâtis. En droit français, le terme renvoie plus précisément à une opération d'urbanisme encadrée par un « permis d'aménager », où la division foncière et la vente des lots créés précèdent la construction du bâti, les divisions a posteriori renvoyant à un autre cadre réglementaire (« permis groupé »). Néanmoins, le terme s'applique aujourd'hui plus communément à l'ensemble des formes d'habitat individuel groupé résultant d'un découpage foncier planifié. Le critère d'appréciation privilégié est alors la morphologie du bâti et non plus le cadre juridique de la division foncière (IAU-IdF, 2012). Pris dans ce dernier sens, la création de lotissements est généralement le fait d'acteurs privés et peut s'inscrire dans deux processus de production distincts selon la manière dont s'articulent les fonctions d'aménagement foncier et de construction immobilière. Si les deux étapes peuvent être prises en charge par un seul acteur (un promoteur), une division des tâches peut également s'opérer entre un aménageur-lotisseur pour la partie foncière et des maîtres d'ouvrage extérieurs pour la construction. Ces derniers peuvent être particuliers, qui auront alors recours à un constructeur de maisons individuelles « sur catalogue » – à moins de faire le choix de l'auto-construction –, ou bien un promoteur qui se portera acquéreur de l'ensemble des lots produits (Bourdieu, 2000). Forme intermédiaire entre l'individuel diffus et le collectif, le lotissement a des problématiques en commun avec les deux domaines. Au coeur de l'expansion des banlieues en France dans l'entre-deux-guerres, puis du processus de périurbanisation à partir des années 1960, les lotissements sont aujourd'hui critiqués comme consommateurs d'espace, ainsi que pour les coûts que génèrent pour les collectivités leurs localisations souvent périphériques en termes de connexion aux différents réseaux urbains (viabilisation, voirie) (Castel, 2006). En tant qu'habitat "collectif horizontal", ils supposent aussi la mise en place et la gestion d'équipements communs.
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Cet « espace de la situation » [ibid. : 25] participe ainsi des « ensembles pratiques » des individus, concept emprunté par Michel Lussault à Michel Foucault et qui désigne le vaste ensemble de ce que font les individus (leurs pratiques) et de la façon dont ils le font (qui révèle leurs représentations). Cet ensemble est si vaste qu'il ne peut être étudié, selon Michel Lussault, qu'au travers de situations d'interactions fortes qui le condensent, organisées autour d'un « événement initial à valeur collective, finalisée, tendue vers (au moins) un but explicite ». Ici, l'événement initial est l'élection de « présidents de région » du CNMF le 21 novembre 2004 et le but explicite est l'élection parmi ces élus des membres du nouveau bureau du CNMF, censé représenter les « Marocains de France » dans leur ensemble. Mais, nous le verrons, les protagonistes accordent à cet événement initial et à cet objectif des significations différentes. Pour les faire prévaloir, ils témoignent dans l'espace de la situation d'une « capacité d'initiative stratégique », au sens où ils peuvent changer les règles du jeu socio-spatial du collectif concret, voire remettre en cause celles de la société que ce collectif médiatise [ibid. : 24]. L'élection du nouveau bureau du CNMF se déroule le samedi 18 décembre 2004 dans un hôtel parisien haut-de-gamme, situé à proximité de la gare de Lyon, car plusieurs participants rejoignent Paris par cette gare, en provenance de Dijon, Grenoble ou Marseille par exemple. La grande salle réservée au rez-de-chaussée, qui compte une soixantaine de places, et le salon du hall de l'hôtel, adjacent à la salle, sont les deux lieux qui composent l'espace de la situation et où se manifest , dans la seconde partie de la réunion (de 14h à 17h), une condensation identitaire particulièrement forte.531 La description du cadre matériel de cet espace doit tout d'abord insister sur la rareté des marques de marocanité telle que je la définis, ou de la « franco-marocanité » telle que souhaite la promouvoir le CNMF. Son sigle et sa signification figurent sur une banderole tendue au mur derrière la tribune de la grande salle et la tribune est ornée de deux petits drapeaux français et marocain. Chaque personne présente, moi y compris, se voit attribuer un badge de couleur rouge pour les membres du CNMF et verte pour les invités. Ce marquage de la marocanité est donc pour le moins discret, jusque dans les aliments et boissons mis à disposition dans le hall (thés, cafés et croissants le matin, sandwichs et sodas le midi). Le 530 Pour Michel Lussault, l'intentionnalité de l'acteur s'accompagne d'une « fragmentation », c'est-à-dire de l'adoption de registres contradictoires au cours d'une même action et de sa vie entière. L'individu se présente tour-à-tour comme acteur, agent et opérateur. Ce « bricolage efficace » n'empêche pas l'intentionnalité, y compris sur le mode de l'improvisation [ibid. : 18-21]. 531 Les première et troisième parties de cette réunion ont été décrites au chapitre 8 (section II, paragraphe 2B). 529 collectif ne s'en approprie pas moins l'espace, en occupant tout le hall d'entrée au-delà des limites horaires prévues (ce dont se plaint auprès de moi une employée de l'hôtel), puis toutes les chaises de la grande salle. L'appropriation prend un tour religieux, lorsqu'après un rapide repas pris dans ce hall, une vingtaine de personnes déroulent un tapis dans un coin de la grande salle et se mettent à prier avec un imam en direction de la Mecque (cf. cartes 26 et 27). La réunion reprend ensuite entre 30 des 35 personnes désignées, non sans mal, comme membres du CA le matin.532 Sept membres du bureau provisoire sont installés derrière la tribune, les trois autres étant assis dans la salle aux côtés de 20 des 22 « présidents de région » auto-désignés. Ce collectif de 30 personnes, qui semble incarner à lui seul le CNMF, élit un nouveau bureau de sept membres, dans des conditions déjà décrites et marquées par une forte compétition (19 des 30 personnes étant candidates à au moins un poste) et certaine cordialité dans les échanges. Pendant l'heure et demie que dure cette élection, une vingtaine de la trentaine des participants de la matinée qui ne sont ni élus, ni organisateurs, attend les résultats dans le hall. J'ai pu observer alternativement les deux scènes, respectivement pendant une heure et une demi-heure (cf. carte 26, positions en t1 et t2). Dans le hall, 16 des 23 personnes présentes sont assises en cercle dans les fauteuils du salon. Les autres, qu'on présumera « neutres », se tiennent debout et devisent entre eux ou au téléphone. L'agencement spatial contraste donc fortement avec celui de la grande salle, où des rangées de chaises font face à la tribune. 532 Pour rappel, ces 35 administrateurs sont les 10 membres du comité d'organisation, les 15 « relais » originaires de 12 régions (celles qui n'ont aucun élu) et 10 autres élus du 21 novembre. Parmi ces 35 personnes, 22 ont été désignés « présidents de régions » par le comité d'organisation (dont certains de ses membres). 752 Ectvg"48"<"Nc"uekuukqp"fw"eqnngevkh"Å"EPOH"Ç"fcpu"nÓgurceg"fg"nc"ukvwcvkqp " v4 3" v3" " Nfiigpfg" NÓgurceg"ocvfitkgn" Ngu"cevgwtu" " "" " " " " " " " ucnqp" " "vtkdwpg" " " "Ogodtg"fw"dwtgcw" rqtvg" " "Rtfiukfgpv"fg"tfiikqp"" " ejckug," " " nkgw"fg"rtkfltg" " " "Qdugtxcvgwt"*gp"v3"gv"gp"v4+" " "Å"rtqvguvcvcktg"Ç" " "Å"pgwvtg"Ç" " ugpu"fg"nc"rtkfltg","R " Lorsque la porte entre les deux lieux s'entrouvre et que la rumeur parvient qu'« ils ont reconduit le même bureau », l'ambiance se tend et la quasi-totalité des contestataires (13 sur 16) et des personnes « neutres » (trois sur sept) rejoignent rapidement la grande salle, où ils sont chaleureusement accueillis par le président (« vous êtes les bienvenus »), qui n'a pas quitté la tribune. Le second vice-président, qui est aussi l'imam, s'avance à la gauche de la tribune (cf. carte 27) pour réciter la fatiha (prière musulmane au défunt) en hommage à Abdelkader Temsamani, initiateur du CNMF, décédé le 8 août 2003 au Maroc. Suivent quelques phrases du président, précisant que le bureau élu s'appelle « bureau Temsamani ». Ainsi, immédiatement, la légitimation du bureau du CNMF mêle le registre religieux et historique, par l'intermédiaire d'une figure, dont l'esprit semble alors planer sur le lieu. Ce n'est qu'ensuite que le président « s'excuse pour ceux qui étaient dehors [], on s'excuse si vous avez été abandonnés à côté ». Puis le bureau élu se présente et il s'avère vite que seuls deux de ses sept membres ont été renouvelés.533 Certains des contestataires, concentrés au fond de la salle, restent debout et les bras croisés, non par manque de chaises mais pour signifier leur volonté de s'opposer au nouveau bureau et de quitter la salle en même temps que le projet. L'un d'entre eux insiste, lors de la présentation du bureau, pour que chacun de ses membres précise sa région d'origine (en France), afin de savoir laquelle il représente. Le président, sentant la situation lui échapper, rappelle que les journalistes invités ne vont pas tarder à arriver et qu'il faut donc se dépêcher de fixer des activités précises et de créer des commissions pour les réaliser. 533 Il s'agit du secrétaire général et de son adjointe. Le premier, âgé de 35 ans, est originaire de Montbéliard (Doubs), où il travaille comme « coordinateur » de la politique de la ville et où il a été élu par 145 voix le 21 novembre. La seconde a le même âge ; originaire de Normandie, elle n'a pas été élue le 21 novembre et a rejoint récemment le projet. Elle prévient d'ailleurs qu'elle le quittera si elle constate des dérives. 532 Singulièrement, la critique porte sur le caractère perçu comme non démocratique du Conseil, non sur les relations entretenues avec les consulats marocains534 ou le « communautarisme » dont ferait preuve le CNMF, contrairement à ce qui a été observé lors des réunions préparatoires locales et nationales en 2003 et 2004. Le discours des contestataires sollicite donc l'espace à double titre et à deux échelles différentes : l'exclusion des futurs contestataires de la salle signifie leur exclusion du CNMF lui-même, via le lieu qui en condense l'identité, tandis que la présence perçue comme faible à la tribune d'élus régionaux signifie la non-représentativité du CNMF à l'échelle nationale. Le président du CNMF a alors beau jeu d'expliquer que cinq régions sont représentées au sein du bureau535 et de me prendre à témoin (en vain), tandis qu'un président de région déclare : « moi qui représente la Lorraine, je peux dire que ce fût un vote démocratique » : personne ne conteste que le nouveau bureau est quasiment le même que l'ancien. L'ambiance se détériore, lorsque les uns accusent les autres (et sans qu'il soit possible d'identifier les premiers aux contestataires) de raviver les pratiques des amicales des années 1980. Finalement, certains quittent bruyamment la salle, dont ceux venus de Normandie et du Nord-Pas-de-Calais. L'espace n'est pas seulement mobilisé par le discours : il est aussi une ressource dans l'action. Aux expressions du visage correspondent des mouvements du corps et des positions de l'espace : faire miner de quitter le lieu, se tenir bras croisés au fond de la salle, se lever brusquement en se dirigeant vers la tribune, tous ces comportements en partie improvisés sont autant de manières de signifier aux autres acteurs des sentiments, des opinions, et des moyens d'obtenir la parole. De fait, à certains moments, tout le monde parle en même temps et les propos tenus au micro ne sont plus audibles : ces mouvements du corps sont alors les seuls moyens de se faire entendre. Il s'agit bien ici d'une véritable « polyphonie énonciatrice », décrite par Michel Lussault [ibid. :26], qui permet la circulation, dans l'espace de la situation, de significations très différentes, voire contradictoires, de l'événement et du projet qui réunit le collectif. Les individus eux-mêmes adoptent des attitudes contradictoires selon le moment de l'interaction. C'est le cas par exemple d'un responsable associatif de Tourcoing, accepté comme administrateur, qui est candidat aux postes de secrétaire général, de secrétaire général adjoint et de trésorier (sans succès) et se plaint ensuite, lorsque contestataires et « neutres » sont à nouveau dans la salle, des personnes qui « vampirisent les postes » Enfin, l'espace n'est pas seulement une ressource ou un produit des actions, mais bien un enjeu de ces actions, via les valeurs sociales qu'il symbolise. Ainsi, en un sens, être membre du bureau c'est siéger derrière la tribune, et vice versa. Il en va de même de l'attente dans le salon, ressentie comme une exclusion par des acteurs ayant cru – ou feignant de croire – qu'il 534 Ainsi, Nawal, président de France-Maroc dialyse, élu à Reims (avec 11 voix) et administrateur à ce titre, est applaudi lorsqu'il déclare : « j'ai été floué. J'ai vraiment l'impression aujourd'hui qu'on pouvait se passer de moi » ; les réactions seront plus contrastées lorsqu'il affirmera peu après « ne rien attendre du gouvernement marocain ». De même, Abdelhakim, jeune président d'Immigration é mémoire (ISM, Lille) et non-élu, peut être inclu dans le groupe des contestataires, même s'il se sent proche politiquement de l'AMF. 535 Bourgogne, Franche Comté, Haute-Normandie, Ile-de-France (Yvelines) et Provence-Alpes-Côté d'Azur. A l'exception de la Haute-Normandie, il s'agit des seule régions qui ont compté plus d'une centaine d'électeurs au scrutin du 21 novembre 2004. De ce point de vue, l'argument du président est recevable. 533 s'agissait d'une assemblée générale ouverte à tous. Le fait que l'espace soit un enjeu de l'action est encore plus lisible dans le comportement du porte-parole des contestataires qui, alors qu'il a le micro pour s'exprimer, se tient le plus près possible de la tribune, à la place d'où justement est venue la légitimation historico-religieuse du bureau, pour contester celuici. L'ESPACE RELATIONNEL DES ASSOCIATIONS : RESEAUX ET CONFIGURATIONS L'espace relationnel d'une association de migrants marocains est constitué des relations spatialisées que ses membres entretiennent entre eux (soit l'espace de vie) et celles qu'elle entretient avec d'autres groupes (associatifs ou non, marocains ou non) et d'autres individus que ses membres. La notion est quelque peu tautologique, si on considère que l'espace est toujours relationnel et que « ce sont les rapports entre les objets spatialisés qui produisent l'espace » [Di Méo ; Buléon, 2005 : 23-25]. Le principal intérêt de cette définition est qu'elle sous-entend que « les faits géographiques sont par leur nature même des faits relationnels » [Gottman, 1952 : 15], ce qui permet de saper l'idée d'un déterminisme des lieux de l'action, au sens où les caractéristiques matérielles de ces lieux détermineraient les logiques de l'action qui s'y déroule. Par exemple, s'associer entre habitants d'une cité d'habitat social enclavée ne conduit pas nécessairement à agir uniquement dans les limites de ce lieu. De manière générale, je pense avoir démontré l'inverse au cours de cette thèse, par exemple en expliquant dans les pages qui précèdent comment un lieu fonctionnel pouvait aussi devenir symbolique. Si je conserve l'expression d'espace relationnel dans le titre de cette section, c'est pour souligner que l'espace associatif étudié, « en étroit rapport avec l'espace réel », désigne « un « espace abstrait » symbolique lié à l'action des organisations. C'est en quelque sorte l'espace relationnel « inventé » par les hommes et dont la permanence s'inscrit dans des échelles de temps différentes de l'espace réel « donné » » [Raffestin , 1980 : 41-42]. Ainsi comprise, cette notion permet de réfléchir simultanément, d'une part aux réseaux associatifs, qui sont les structures de la circulation étudiée plus loin, d'autre part aux configurations associatives, dans lesquelles s'inscrivent les lieux de l'action et les réseaux associatifs. Enfin, cette notion m'évite d'employer le mot de territorialité associative, dont l'existence reste une hypothèse à ce stade. A - Les réseaux associatifs Ainsi défini, l'espace relationnel des associations étudiées est composé des réseaux dans lesquels elles s'inscrivent. Peut-on pour autant parler de « réseau associatif »? Ce terme prête à confusion. Est-ce un réseau spatial, au sens d'« un ensemble de lignes interconnectées qui permettent la circulation des flux, et donc le fonctionnement de l'interaction spatiale » [Brunet ; Dollfus, 1990 : 400]? Et si oui, se confond t-il avec un réseau social? Au-delà de l'engouement des sciences sociales pour la notion de réseau [Hily ; Berthomière ; Mihaylova, 2006], il convient de distinguer deux types de réseau sociaux : ceux, informels, basés sur une origine familiale, religieuse, voire nationale, qui vont de soi pour l'individu ; et ceux, formels, basés sur l'adhésion volontaire de l'individu. Si les associations de migrants relèvent plutôt de ce second type, leur originalité (partagée avec d'autres associations) est qu'elles combinent réseaux sociaux formels et informels [Catani ; Palidda, 1987]. Elles ont des partenaires associatifs et institutionnels dans l'espace d'installation, mais aussi des 536 contacts avec les réseaux basés sur l'entraide et la solidarité et nés du processus migratoire lui-même. Enfin, elles peuvent être connectées avec des réseaux consulaires et des institutions de l'Etat d'origine. Ces réseaux sociaux informels ne sont pas toujours en concurrence avec les associations de migrants et une complémentarité peut aussi exister [Danese, 2000 : 543547]. Je pense l'avoir montré dans la troisième partie, s'agissant des amicales, des néoamicales, des associations professionnelles, d'originaires d'un même village et de celles du pôle progressiste et de la nébuleuse militante qui en est issue. J'avais précédemment montré que ces réseaux informels alimentaient le capital social des migrants associés et que ceux qui disposaient d'un fort capital social tenaient un rôle central dans l'association, transformant leur capital social en ressource stratégique pour celle-ci.536 Le réseau associatif tel que je l'entends peut donc être fortement hiérarchisé. Il est en cela semblable aux réseaux urbains, de transport ou de télécommunication, plus fréquemment étudiés en géographie et dont Roger Brunet souligne qu'ils « sont souvent très fortement centrés, et même agis par les centres » [Brunet, 2001 : 129].537 En paraphrasant une formule du même auteur, citée plus haut, le réseau associatif est alors un ensemble d'individus associés, d'associations et de partenaires associatifs et institutionnels (consulats, préfectures, etc.) qui permettent la circulation des flux, donc le fonctionnement associatif. Enfin, comme plusieurs exemples l'ont déjà illustré, les migrants associés articulent, par leur engagement, leur capital social et leur capital spatial. Pour toutes ces raisons, leurs réseaux associatifs ont donc, par nécessité, une dimension spatiale. Mais une question demeure : celle des significations, pour les migrants associés, de cette circulation des flux permise par les réseaux associatifs. Les acteurs de ces réseaux ne sont pas tous, loin s'en faut, des migrants marocains associés : ils s'inscrivent dans d'autres espaces de vie et de référence. Les relations alors nouées entre les uns et les autres ne viennent-elles pas infléchir les significations spatiales de la marocanité associative, à l'image de ce qui a été observé pour ses significations politiques, à propos du militantisme post-colonial? En particulier, la hiérarchisation et la centralisation de certains réseaux associatifs, qui ont jusqu'ici été postulées, ne sont-elles pas décelables dans une égale hiérarchie des lieux symboliques de la marocanité associative? A ces questions, une approche en termes de réseau ne suffit plus. Pour englober cet ensemble d'acteurs et de lieux, il nous faut maintenant réfléchir en termes de configuration associative. B - Les configurations associatives Je définis la configuration associative comme un agencement spatial d'associations à une échelle (locale, nationale, transnationale) et selon une métrique (territoriale, réticulaire) données. Jacques Lévy souligne que la notion de configuration spatiale témoigne d' « une 536 Se reporter au chapitre 4 (section I, paragraphe 2C). « N'opposons pas réseau à territoire, même si la mode des réseaux fait croire à des « délocalisations » et autres « déterritorialisations » qui n'en sont pas. On s'aperçoit vite que les réseaux ont des bases territoriales, mettent en liaison des lieux, constituent souvent d'autres territoires, et en tout cas ramènent au territoire. C'est là un thème puissant de la géographie de demain. » [ibid.]. 537 537 certaine abstraction car, en raison du principe d'interspatialité, les unités fonctionnelles sont plus complexes » [Lévy, 1994 : 52]. Il en va de même pour la notion de configuration associative, dont l'emploi et les effets sur les significations de la marocanité doivent être spécifiés selon l'échelle. a) La diversité des configurations associatives locales La localisation des associations de migrants marocains procède de plusieurs facteurs, dont beaucoup ont déjà été décrits, notamment la présence de migrants marocains et leur degré de concentration dans l'espace du quartier, de la ville ou au sein d'une même entreprise. Je reviendrai sur ces facteurs démographiques dans la troisième section, à propos des relations entre territorialité associative et territorialité migrante. Ici, c'est sur les effets (et non plus les causes) de leur localisation sur les associations que je souhaite insister et plus précisément sur les effets de la diversité des configurations associatives locales sur leurs actions. Dans cette perspective, la réunion du CNMF du 18 décembre 2004, comme de nombreuses réunions nationales de l'AMF, de l'ATMF ou d'associations « beurs » par exemple, peut être comprise comme une tentative (qui a échoué) de transcender à l'échelle nationale les particularités locales. Une part des conflits lors de cette réunion peuvent s'expliquer, outre par des significations différentes du projet du CNMF, par la diversité des configurations associatives locales. D'une part, plusieurs acteurs mentionnent dans et justifient leur discours par des éléments tirés de la configuration locale dans laquelle se situe leur association. Par exemple, lorsque le débat s'envenime, les élus de Strasbourg et le représentant non élu de l'association Maroc Lorraine citent de manière confuse les spécificités du droit associatif en Alsace et en Lorraine en matière de culte musulman. D'autre part, les acteurs transposent dans cette réunion nationale des conflits qui les opposent à l'échelle locale. C'est notamment le cas des militants associatifs originaires de Basse et de Haute-Normandie et de ceux du Nord-Pasde-Calais. Dans ce dernier cas, l'opposition est forte entre le vice-président de la Maison des associations de Tourcoing et le président d'ISM de Lille, qui s'accusent mutuellement de promotion personnelle et de rétention de l'information. Enfin, les scores obtenus par les élus le 21 novembre précédent connaissent des écarts considérables, jusqu'à plusieurs centaines de voix. Cette inégale mobilisation des migrants à l'échelle locale se retranscrit, en toute logique, dans conflits de légitimité de leurs « représentants » à l'échelle nationale. Les effets des configurations associatives locales sur les actions des associations étudiées est particulièrement lisible sur le terrain de mon enquête. J'en donnerai quelques exemples. Une distinction fondamentale, qui fût à l'origine de mon choix de Nantes et de Gennevilliers, est celle entre les villes où s'implantent durablement l'AMF et l'ATMF (Angers, Argenteuil, Gennevilliers, Paris, Saint-Denis, Saint-Nazaire, Vauréal) et les autres (Carrières-sous-Poissy, Nantes, Pontoise, Pré-Saint-Gervais, Versailles). Parmi les premières, figurent des villes « ouvrières » à forte composante communiste (Gennevilliers, Saint-Denis, Saint-Nazaire) où l'existence d'un vaste tissu associatif permet la multiplication des partenariats. Quant aux villes qui n'ont connu ni l'AMF, ni l'ATMF, trois d'entre elles (Carrières-sous-Poissy, 538 Pontoise, Versailles) comptent à la fois des associations musulmanes marocaines, parfois soutenues par la Mairie (Versailles)538 et des associations d'élites socio-économiques. Au PréSaint-Gervais, la configuration associative locale est marquée par l'activité partisane en France ou orientée vers les pays d'origine, ici, le Maroc (JDME). Enfin, le registre de l'interculturel domine largement la configuration associative nantaise, comme l'illustre la vitalité des associations culturelles (dont l'ACMSB, l'ACMB et Averroès). Cependant, ces activités interculturelles, centrées sur les pays d'origine des migrants, sont exclues du champ « culturel » et rattachées à celui du « social » dans l'organigramme municipal, ce qui rend « inclassable » certaines associations, tel le CID, et en fragilise d'autres en diminuant leur visibilité [Gotman, 2004 : 461-464]. b) La difficile articulation des échelles locale, nationale et européenne Toute l'histoire de l'AMF et de l'ATMF est parcourue par l'idée de coordonner à l'échelle nationale un maximum d'associations de migrants marocains, puis maghrébins pour l'AtmF, existantes à l'échelle locale. Plusieurs exemples pourraient être relevés de relations conflictuelles entre les instances nationales et les sections locales de ces deux associations, qui témoignent de la difficulté de l'entreprise. Comment expliquer alors que ces deux associations – et surtout l'AtmF pour la période récente – y soient tellement attachées? Il ne s'agit pas seulement d'une quête de représentativité ou de légitimité, mais aussi, de plus en plus, d'une recherche d'efficacité. En effet, si on considère avec Jacques Lévy que « même lorsqu'on se limite à une échelle apparemment cohérente, [] on constate que les relations avec les échelles supérieures ou inférieures influent sur la situation spatiale » [Lévy, 1994 : 54-55], l'efficacité des associations ne dépend alors plus seulement de leur accès à certaines ressources ou de leur prise en compte des spécificités des configurations associatives locales, mais aussi et surtout de leur capacité à articuler les échelles locale, nationale et européenne. Pour des associations axées sur la défense et l'égalité des droits des migrants, l'échelle nationale a longtemps semblé dominer l'échelle locale, car ces revendications portaient sur la législation nationale et son exécution par le gouvernement. Les relations entre ces deux échelles étaient alors, pour ces associations, caractérisées par une « transcendance », au sens de Jacques Lévy.539 Lorsqu'il est apparu que la décentralisation et la politique de la ville renforçaient les pouvoirs politiques locaux, certaines des sections de l'AMF et de l'ATMF se sont tournées vers l'échelle locale, ce qui a conduit, entre autres facteurs déjà explicités, à la fin de la bipolarisation associative en France. Le désinvestissement des militants vis-à-vis des instances nationales a ainsi été le principal facteur du déclin de l'AMF dans les années 1990 : si les lieux d'implantation et d'action se sont alors diversifiés, la centralité parisienne est 538 André Damien, maire de Versailles, fût conseiller pour le culte musulman des ministres de l'intérieur Charles Pasqua et Jean-Louis Debré. Il a facilité l'ouverture de plusieurs salles de prière à Versailles. 539 L'auteur propose une classification des relations entre échelles, ou « relations interscalaires », selon trois types. « Soit chaque échelle est autonome et possède ses substances [ici, les associations] et ses métriques propres sans emprise extérieure : il y a auto-organisation. Soit, au contraire, on observe un basculement de processus d'une échelle sur une autre : si c'est l'échelle supérieure qui intervient, on parlera de transcendance ; si c'est l'échelle inférieure, d'immanence » [ibid. : 55]. J'y reviendrai dans la section III. 539 restée, jusqu'à aujourd'hui, un problème pour l'AMF nationale, dont les responsables déploraient en 1992 déjà que « chaque fois que des activités dépassent le cadre d'une ville et concernent l'ensemble de l'Ile-de-France, c'est 'AMF [nationale] qui est sollicitée et les associations membres attendent que celle-ci prenne des mesures et des initiatives ».540 En outre, les associations progressistes se sont engagées dans deux stratégies d'articulation des échelles nationale et européenne. La première est caractérisée par une instrumentalisation de l'échelle européenne selon des logiques toutes nationales. Cette stratégie « par le bas » relève de l'immanence, au sens de Jacques Lévy [ibid.]. Elle a conduit l'AMF et l'ATMF (pour la France) à la création de deux coordinations européennes d'associations progressistes (CADIME en 1976 et CEDAM en 1982).541 La seconde stratégie, dite « par le haut » et relevant de la transcendance, s'incarne durant la décennie 1990 dans l'expérience du Forum des migrants. Ces deux stratégies échouent pour des raisons déjà évoquées.542 A propos du Forum des migrants, un responsable de l'ATmF déclare en 2000 qu'« on ne peut pas être ami à Paris et ennemi à Bruxelles », signifiant que l'apaisement des relations entre AMF et ATmF à l'échelle nationale française est contradictoire avec les rivalités entretenues entre les deux associations à l'échelle européenne. Il est possible d'interpréter plus finement ce conflit entre AMF et AtmF à Bruxelles, qui se prolonge depuis plus de vingt ans. Le propos cité du militant de l'AtmF sous-entend que les deux capitales, Paris et Bruxelles, participent d'une même configuration associative, dans laquelle les relations AMF-AtmF se seraient pacifiées. Or, rien n'est moins vrai, si on considère que les enjeux sont très différents dans ces deux villes : Paris est le centre fonctionnel et symbolique d'un territoire national (français), voire, à l'échelle de l'Ile-de-France, un espace local de militantisme historique, tandis que Bruxelles est le centre fonctionnel et symbolique d'un espace transnational (européen), où la métrique qui prévaut est davantage réticulaire et dominé par un militantisme de lobbying mal maîtrisé par ces deux associations. Ces deux configurations associatives divergent donc. Ce que le militant signale ainsi, c'est la prégnance dans les représentations de ce que Bernard Debarbieux nomme un « invariant d'échelle », c'est-à-dire une correspondance formelle et pratique laissant à penser que, d'une échelle à l'autre se retrouve les mêmes configurations. Et l'auteur cite justement la « valorisation symbolique du centre, centre géométrique ou fonctionnel, [qui] se retrouve à toutes les échelles territoriales au sein de l'espace français » Debarbieux, 1996 : 31] et, pourrait-on ajouter, qui se prolonge au sein de l'espace européen, quand il est investi par des Français, quelle que soit leur origine. Pourtant, selon Bernard Debarbieux, cette « invariance des structures n'entraîne pas l'invariance des significations. Au contraire, la conscience collective que les individus ont de s'inscrire simultanément dans plusieurs territoire emboîtés conduit à une démultiplication des significations des lieux en fonction des territoires de référence » [ibid.]. Comment cette démultiplication influe t-elle sur 540 Bureau exécutif de l'AMF du 23 mars 1992. Se reporter au chapitre 6 (section I, paragraphe 2Bb). 542 Se reporter au chapitre 6 (section III, paragraphe 3A). 541 540 la territorialité de la marocanité associative? Je tenterai d'y répondre dans la troisième section. Pour le moment, il me faut poursuivre l'illustration et l'explication de ces difficultés des associations à articuler, dans leurs actions, les échelles locale, nationale et européenne. La création du Congress en 2001 est encore symptomatique de ces difficultés, car il s'agit d'une structure créée « par le haut », sans la participation d'associations locales ou nationales. Cependant, j'ai expliqué comment, en 2006, l'ATmF participe au collectif Al Monadara, visant à regrouper les associations de migrants marocains en Europe dans le but de peser sur la politique migratoire du Maroc. Les liens entre associations progressistes ne sont donc pas rompus à l'échelle européenne ; pour autant, ils semblent peu suivis d'actions communes et efficaces.543 A en juger par la visibilité de leurs activités et leurs résultats, les deux coordinations européennes pour la défense des droits de l'Homme544 réussissent mieux, sans doute parce que leurs objectifs participent d'un processus politique entamé au Maroc, celui de la « réconciliation nationale ». Logiques ascendante et descendante convergent donc dans ce mouvement transnational en faveur des droits de l'Homme. Quant à la CDME, elle est confrontée au même problème d'articulation des échelles locale, nationale et européenne, très sensible lors de sa réunion du 18 octobre 2003, à laquelle j'ai assisté. En effet, la CDME a noué, dès sa création en 2001, des liens avec les progressistes marocains en Europe dans le but de faire écho au processus d'unification – inachevé – de la gauche au Maroc (au sein de la GSU). Lors de la réunion citée, chacun s'accorde à constater l'épuisement de cette « convergence » en Europe. La réunion européenne précédente est qualifiée d'« c » et la prochaine, prévue à Bruxelles, d'inutile (« On ne va pas découvrir un truc en allant en Belgique »). Très critiques envers des partenaires qui se trouveraient à Lyon, en Espagne et aux Pays-Bas, les participants pensent reconstruire une coordination à partir des liens entre Paris et Bruxelles, par exemple en publiant un bulletin qui définirait des axes politiques. Là encore, on retrouve l'« invariant d'échelle » concernant la centralité parisienne en France et bruxelloise dans l'Union européenne. La déception semble d'autant plus vive que les actions à l'échelle locale semblent efficaces : ainsi, un débat aurait attiré 400 personnes dans un amphithéâtre avec plusieurs prises de parole ; le stand de la CDME à la fête de Saint-Denis à également été très fréquenté et a permis un bénéfice de 892 Euros. Cette difficulté des associations de migrants à se mobiliser à l'échelle européenne a déjà fait l'objet de nombreux travaux. Riva Kastoryano en particulier a montré que « l'intégration de leur action dans le jeu national rend difficile la définition des intérêts communs, l'identification commune de la part des acteurs », sans compter les « relations historiques privilégiées entre les anciennes colonies et les pays d'installation » [Kastoryano, 1994 : 174]. De son côté, Catherine Neveu a insisté sur les distorsions introduites, au sein du Forum des migrants, par la coexistence de catégorisations difficilement compatibles des populations étrangères [Neveu, 1994]. Dans un registre plus géographique, le travail de Gaia Danese sur les associations de migrants marocains et sénégalais en Espagne et en Italie a montré la 543 544 Sur le Congress et Al Monadara, se reporter au chapitre 8 (section I, paragraphe 1Ac). Se reporter au chapitre 7 (section I, paragraphe 2B et section II, paragraphe 3B). 541 complexité de l'articulation des échelles, en les distinguant selon qu'elles se rapportent à l'action concrète, à l'espace public investi ou au type d'action sociale. L'auteur aboutit ainsi à cinq cas : soit l'échelle locale prime pour ces trois critères ; soit c'est l'échelle nationale (du pays d'installation) ; l'action peut aussi se dérouler au pays d'origine à l'échelle nationale locale (ville ou village d'origine) ; enfin, l'action et l'espace public investi peuvent être européens ou supranationaux. Dans ces trois derniers cas, il s'agit d'une « action sociale de type transnational » [Danese, 2000 : 129-130]. Les configurations associatives locales, nationales545 et européenne ne sont donc pas aisément superposables, ni les logiques d'action aisément transposables d'une échelle à l'autre. Les deux principales explications ont trait à la multiplicité des significations accordées aux lieux et aux espaces par les migrants associés, qui diffèrent selon l'échelle, et à l'inégale efficacité pratique des associations à mobiliser les ressources d'un lieu pour agir dans un autre lieu. 545 Française, belge, etc. mais aussi marocaine, comme je l'ai montré dans le cas des actions de développement des lieux d'origine. Se reporter au chapitre 7 (section II, paragraphe 1Ab). 542 II - LA CIRCULATION ASSOCIATIVE La circulation associative a été définie en introduction comme l'ensemble des déplacements initiés par des associations en vue d'atteindre la plus grande efficacité possible, compte tenu des ressources disponibles au sein des configurations associatives existantes. Ces déplacements sont donc des actions qui permettent d'articuler les échelles locale, nationale et internationale (franco-marocaine ou européenne, par exemple), d'utiliser des ressources tirées d'un espace pour mener une action sur un autre espace. Qu'ils soient humains, matériels ou immatériels, ces déplacements peuvent être considérés comme des ressources du militantisme des migrants marocains associés. Cette section s'attache à dégager les figures de l'articulation entre la circulation et le militantisme associatifs, pour mieux la distinguer, par exemple, de la circulation migratoire. La circulation peut être considérée par les associations comme un moyen ou comme une fin, c'est-à-dire comme un élément du répertoire d'action collective (figure du « circuler pour militer ») ou comme une revendication (figure du « militer pour circuler »). Dans le premier cas, les associations participent à la transformation du « savoir circuler » de leurs militants en « savoir militer ». Ces déplacements sont ceux de militants, mais aussi de biens, d'argent, d'idées, de valeurs et d'informations. Dans le second cas, les associations remettent en cause, plus ou moins radicalement, le fonctionnement du champ migratoire franco-marocain par des revendications classiques (le droit au retour dans la dignité, par exemple) et d'autres plus récentes (la baisse du coût des déplacements entre la France et le Maroc, par exemple). La fin de cette interroge les limites de la circulation associative, en évoquant les troisième et quatrième figures de son articulation avec le militantisme (« militer sans circuler », « circuler sans militer »), qui sont les plus fréquentes, vu le faible nombre de migrants marocains qui s'associent entre eux, incomparable au nombre de ceux qui circulent chaque année entre la France et le Maroc. J'examine alors la manière dont les associations investissent les lieux de la circulation migratoire marocaine et plus généralement ceux que les migrants marocains fréquentent en France (marchés, mosquées, commerces ethniques, etc.). 1. CIRCULER POUR MILITER De nombreuses associations utilisent la dispersion spatiale de leurs adhérents comme ressource pour leurs actions collectives. Pour elles, la mobilité devient un mode de fonctionnement, un élément de leur répertoire d'action. Si l'on excepte les déplacements démonstratifs, c'est-à-dire les manifestations de rue, telles les « caravanes » des droits des femmes ou des anciens exilés, les « marches » des jeunes issus de l'immigration et des sanspapiers, on peut distinguer dans le fonctionnement des associations les déplacements réguliers et d'autres plus exceptionnels. Parmi les premiers, plusieurs ont déjà été cités, telles les visites de responsables de l'ATMF nationale aux sections locales ou la « tournée nationale » du comité d'organisation du CNMF. Ces déplacements visent essentiellement à maintenir les liens malgré la distance, à faire « remonter » les informations de l'échelle locale à l'échelle 543 nationale et inversement, comme lorsque les responsables de l'ATMF viennent trancher des conflits locaux en s'appuyant sur les orientations statutaires nationale de l'association. Les déplacements exceptionnels, à l'occasion d'une mobilisation, sont plus chargés de significations quant à la marocanité des migrants associés C'est pourquoi j'insiste, dans le premier paragraphe, sur ce second type de déplacements, en prenant l'exemple de ceux réalisés dans le cadre de deux mobilisations associatives, en faveur des victimes du séisme d'Al Hoceima en 2004 et des anciens combattants marocains depuis 2003. Le second paragraphe revient ensuite sur le premier type de déplacements, plus routiniers, et montre que ceux-ci ne se limitent pas aux hommes : ils s'étendent aux biens, à l'argent, aux informations, aux idées et aux valeurs, de sorte que l'on peut dire que la circulation associative consiste, pour les militants, à se déplacer et à déplacer des éléments matériels et matériels qui participent, à des degrés divers, aux significations associatives de la marocanité. A - Les déplacements de militants. L'exemple du collectif SOS Al Hoceima Les militants de l'ATmF sont de ceux qui se déplacent régulièrement dans un cadre associatif. Cela s'explique par la diversité des actions et des revendications de l'ATmF, mais aussi par le fort capital spatial de certains de ses militants. L'exemple de Mehdi, déjà présenté, illustre la capacité de ces militants à transformer leur « savoir circuler » en « savoir militer », c'est-àdire d'accumuler un capital spatial. 546 Se reporter au chapitre 4 (section I, paragraphe 2E). 544 Cependant, ces deux types de déplacements militants peuvent converger dans le temps et l'espace, dans des situations d'exception, telles que des catastrophes naturelles. Ainsi, lorsque, le 24 février 2004, un séisme dans la province d'Al Hoceima (Rif central) cause la mort de 740 Marocains et détruit une quarantaine de villages, des dizaines d'associations de migrants marocains se mobilisent dans les villes françaises pour faire parvenir une aide financière et matérielle aux sinistrés. Cet exemple illustre l'intensité des déplacements de militants et, plus largement, de la circulation associative à différentes échelles. Le premier point à souligner est la diversité des associations mobilisées au sein du collectif « SOS Al Hoceima », formé à l'échelle nationale sous l'impulsion de l'ATmF et d'une vingtaine d'autres associations. Parmi celles enquêtées figurent l'AMF, l'ASDHOM, IDD, la JDME et les Amis du Maroc. Les autres agissent surtout dans le domaine du développement, comme Act Agir (Clamart) ou Wartas solidarité développement (Nancy). Dès la création de ce collectif, on note la présence d'associations qui participent – depuis peu – au processus de création du CNMF : outre les Amis du Maroc, il s'agit du centre socioculturel Convergence547 (Cholet), de l'Association des Marocains de l'Isère (ASMI, Grenoble), de l'Association des Marocains du Bas Rhin (AMBR, Strasbourg) et des Deux rives (Tourcoing). D'autres associations de migrants agissent hors de ce collectif, soit par méconnaissance, soit par incapacité humaine et matérielle à accéder à ce réseau (via internet, par exemple) et à se déplacer aux réunions nationales. A Nantes, une e et une soirée de solidarité est ainsi organisée par l'ACMSB et Orthopédie sans frontières. A Rennes, la mobilisation se traduit par la création d'un collectif de six associations de migrants maghrébins et de musulmans, qui organise le 13 mars 2004, avec l'aide de la municipalité socialiste, une soirée ponctuée de danses berbères et bretonnes, dont les profits sont destinés à la reconstruction d'une école détruite par le séisme. A l'échelle nationale, le collectif SOS Al Hoceima doit permettre de rationaliser les collectes et les envois d'argent et de matériel. Pour cela, un compte bancaire est ouvert, qui recevra environ 30 000 Euros. Malgré l'émotion de la population marocaine de France, les collectes d'argent sont difficiles : selon Nasser, « même dans les marchés, on a senti la méfiance vis-àvis des associations ». Des dons de couvertures, de vêtements et de tentes sont effectués. En Ile-de-France, le collectif met en place cinq lieux de collecte à Colombes, Gennevilliers, Nanterre, Saint-Ouen et Vigneux-sur-Seine. Les militants de l'ATmF et de l'ASDHOM tiennent une grande place dans les trois premières villes et dans quelques-unes de province. Par rapport aux autres collectifs locaux en France, les spécificités de SOS Al Hoceima et de l'ATmF sont la prise en compte de la topographie de cette région montagneuse marginalisée [Naciri, 1997 ; Troin, 2002] et l'envoi de militants sur place en mars, avril et août : « Chaque ATmF a envoyé ses propres camions, je pense à Nancy, à Strasbourg Il y avait une collecte rassemblée au national [] On a envoyé deux camions làbas. Nous, ce qu'on a essayé de viser en fait, c'est des endroits, des environnements d'Al Hoceima. On a essayé de viser des endroits où personne n'a 547 A ne pas confondre avec la Convergence des démocrates marocains à l'étranger (CDME). 545 été. C'est pour ça qu'on a plus travaillé là-dessus : dans les montagnes, où il n'y a pas d'accès, ni par hélicoptère, ni par transport, ni par rien[] Il y a des endroits, même à pied, c'était impossible. Là, c'était plus des ânes ou des chevaux qui allaient monter dans les montagnes. » [Mehdi, ATmF Gennevilliers] Afin de suivre la distribution des dons, deux membres de l'ATmF, dont Nasser, se rendent dans la région durant quinze jours. Ils y constatent le décalage entre les de la télévision marocaine et les défaillances, voire les abus de l'Etat. Ainsi, la Fondation Mohamed V tente de monopoliser les dons qui parviennent au port de Nador et à l'aéroport d'Al Hoceima en provenance des pays à forte immigration rifaine (Allemagne, Belgique, France, Pays-Bas). Ainsi, dans un courriel du 8 mars, Nasser apprend aux militants restés en France que les autorités locales (gendarmerie, gouverneur) n'ont autorisé qu'à 3 heures du matin l'ouverture des deux camions de Gennevilliers. Douze heures plus tôt, les douaniers de Nador en ont plombé les portes et confisqué les passeports des trois conducteurs qui ont dû signer, pour sortir du port, un bon de livraison de leur chargement à la Fondation Mohamed V. Les critiques à son égard, non dénuées d'humour noir, sont constantes dans les courriels, le rapport de mission et les réunions publiques de l'ATmF sur le sujet : « Les voitures 4x4 de la fondation M5 arrivent uniquement pour faire les 100 m de pistes praticables []. Souvent la 4x4 a encore la plaque de transport touristique d'une société de location de Marrakech ou de Zagoura, le chauffeur habitué au transport de touristes fait une gueule de dromadaire enragé. C'est cela l'accompagnement des victimes façon makhzeniène d'un Maroc nouveau. [] Tous les hôtels sont quotidiennement réservés par les autorités afin d'exclure tous les journalistes, internationaux, bref les nuisibles. Voilà l'utilisation concrète de l'argent récolté au niveau international et sur le compte 101 numéro bancaire de solidarité au Maroc.548 Nous apprenons aussi que l'Etat marocain ignore complètement les autorités locales du petit bourg jusqu'à la ville d'Elhouceima, tout est canalisé par l'armée et la fondation M5, on se croit dans un régime stalinien avec babouche et cravate Hermès. »549 La critique s'exerce aussi à l'encontre d'« une minorité qui n'a de marocaine que son acharnement à voler non seulement les richesses du pays mais aussi l'aide apportée aux sinistrés » et à l'encontre de certaines ONG présentes sur place, pour leur bons rapports avec le Makhzen et la faible implication des habitants dans la distribution.550 Dénier la marocanité de cette « minorité » est alors le moyen de souligner les significations de la marocanité des associations de migrants, celles d'une solidarité avec – et d'une égalité entre – les victimes. Les associations locales, très nombreuses dans le Rif, semblent très sollicitées par le collectif SOS Al Hoceima. Regroupées dans la commission Al Amal aux côtés d'associations marocaines nationales, ces associations villageoises aident les deux militants de l'ATmF à identifier les villages les plus touchés et c'est par leur intermédiaire qu'est distribuée la majorité de l'argent collecté par SOS Al Hoceima, auprès de 153 familles. Pour ces raisons, 548 Un bon mot circule dans la région sur ce compte 101 : « ils prennent 100 et ils nous donnent un! » Courriel de Nasser du 15 mars 2004. 550 Z'migri news, n°12, octobre-décembre 2004. 549 546 les deux militants, de retour en France, prônent une présence durable des associations de migrants dans le Rif, comme « garde fou pour contrôler, témoigner, dénoncer les détournement organisés, [] préparer et accueillir les acteurs de la solidarité internationale pour qu'ils ne soient pas découragés. » Pour Nasser, la présence des associations de migrants sur place permet aussi de « dire les choses que eux [les Rifains] ne peuvent pas dire » car ils seraient accusés de séparatisme.551 Cette mobilisation favorise donc la convergence, certes limitée dans le temps et l'espace, de circulations de militants issus de différentes associations. Elle aboutit à un emboîtement des significations qu'ils accordent à leur marocanité : motivée par leur attachement aux lieux d'origine, cette mobilisation permet de relier dans l'espace français des associations dont les pratiques isolées (festives, humanitaires, etc.) ne prennent sens que dans un ensemble de pratiques semblables se déroulant dans d'autres lieux en France, voire en Europe. Au Maroc, cette mobilisation revêt une signification plus large que celle de l'aide humanitaire des autres ONG. A la recherche d'efficacité, les migrants associés se confrontent aux pratiques clientélistes et arbitraires de l'administration marocaine. Les lieux sinistrés deviennent les symboles, à l'échelle régionale (celle du Rif), d'un enclavement et d'une marginalisation au sein du territoire marocain, auxquels les associations de migrants tentent de répondre en recensant les besoins des associations locales et en tissant avec elles des réseaux translocaux. B - Les associations, vectrices de nouvelles circulations? Les exemples cités au paragraphe précédent concernent surtout les militants associatifs. Mais les associations suscitent-elles des déplacements de migrants non militants (et non adhérents), en tant que b énéficiaires de leurs actions? Quelques associations, qui disposent de locaux identifiés, constituent des pôles d'attraction indéniables. Parmi celles étudiées, c'est le cas de l'ATmF de Gennevilliers, dont la permanence quasi quotidienne accueille des migrants – pas tous marocains – qui viennent de Bobigny, de Poissy, voire de Mantes-la-Jolie (Yvelines). Lorsqu'on pénètre dans le local de l'association au moment d'une permanence, c'est d'abord le nombre de personnes qui attendent d'être reçues qui impressionne. Certaines discutent en arabe, en berbère ou en français dans la salle adjacente au couloir d'entrée, autour d'une table et d'un thé ; d'autres se tiennent dans le couloir, leurs dossiers administratifs à la main, attendant d'être reçues par un bénévole dans un des deux bureaux du fond. Cette attractivité du pôle gennevillois de l'ATmF est également vivement ressentie par les militants euxmêmes. Ainsi, Mehdi continue de militer à Gennevilliers, même s'il n'y réside plus : « Entre temps, j'avais eu des conflits avec la mairie de Gennevilliers, ils se sont opposés à un appartement ici. Il y avait des bricoles comme ça. Je m'en fous, moi, si on m'en donne un à Nantes, ça me dérangera pas! S'il faut venir à Gennevilliers, je viendrais! Il n'y a pas de frontières! Si tu veux militer à Gennevilliers, tu milites à Gennevilliers! Tu prends ton billet [de train], comme les gens qui viennent ici pour leurs problèmes. » [Mehdi, ATmF Gennevilliers] 551 Ré union de soutien aux victimes du séisme d'Al Ho ce ima, 30 mars 2003, Olympic café, Paris 18ème. 547 En dehors de ce cas précis, il existe toutefois peu de déplacements de non militants initiés par l'action des associations. Historiquement, de 1980 à 1987, les déplacements les plus massifs ont été ceux des familles marocaines d'Europe, qui participaient aux moussems organisés par l'ATMF et ses homologues belge et hollandaise à Argenteuil, Amsterdam ou Bruxelles. L'association louait à l'époque jusqu'à cinq cars au départ de Gennevilliers. Dans les années 1990, je n'ai trouvé aucune trace de déplacements aux effectifs comparables. Par contre, dans les années 2000, la mobilisation de l'ATmF et d'autres associations (Washma à Nantes, par exemple) a suscité des déplacements assez nombreux, quoique difficiles à quantifier, ceux d'anciens combattants marocains vers la France.552 Ces personnes, diminuées physiquement et parlant peu français , sont devenus une nouvelle catégorie de migrants, dont le départ vers la France est motivé par une possible revalorisation des pensions militaires, dont la rumeur se diffuse au Maroc, ou, à défaut, par l'obtention du RMI et de la CMU (créée en 1998). Dans la pratique, environ 3 % des 30 000 anciens combattants marocains émigrent en France et d'abord à Bordeaux, où siège le tribunal des pensions. Devant les difficultés, les pouvoirs publics locaux les répartissent à travers la France et trente d'entre eux arrivent ainsi à Nantes, le 30 juin 2002, où ils sont accueillis dans un foyer Sonacotra, en partie par des associations de migrants marocains. Selon Djemila Zeneidi-Henry, leur émigration vers Bordeaux est accélérée par le travail d'une de leurs associations au Maroc, celle de Kenitra, ce qui provoque « un effet d'homogénéisation des origines géographiques des migrants [dont la plupart] proviennent de la région de Fez et Khemiset, zone d'implantation de l'association » [Zeneidi-Henry, 2001 : 179]. Ce sont donc au départ certaines de ces 156 associations contrôlées par l'Etat marocain et non les consulats français qui encouragent les anciens combattants à émigrer. Puis, comme je l'ai expliqué, l'ATmF lance en 2003 une campagne d'information envers ces anciens combattants et les encourage à venir en France faire valoir leurs droits. Nasser effectue pour cela une mission d'un mois au Maroc, en décembre 2003 : « On n'est pas d'accord avec certaines associations de solidarité française, notamment des associations caritatives, qui nous disent : oui mais les anciens combattants, ils vont toucher le minimum vieillesse ou le RMI. Alors les gens disent : oui, les pauvres, ils viennent du Maroc jusqu'ici pour se retrouver dans un foyer Sonacotra, etc. Mais nous, connaissant la réalité des anciens combattants au Maroc, on préfère qu'ils soient dans un foyer Sonacotra que rester dans des gourbis ou en train de faire la charité dans les fins fonds du bled au Maroc! A la limite, pour nous, il faut qu'ils viennent, pour se défendre. C'est pas un problème. Au moins ils auront un suivi médical, même dans un foyer Sonacotra Donc voilà notre approche : au moins passer l'information aux gens. On n'a pas à décider à leur place, quoi. » [Nasser, ATmF nationale] La réunion du 23 décembre 2003 à Taza, organisée par la CDT et à laquelle participe Nasser, regroupe une centaine d'anciens combattants, qui expriment leurs difficultés à se déplacer jusqu'à Casablanca au bureau d'aide sociale et à obtenir un visa pour la France auprès du consulat de Fès. Au cours de sa mission, Nasser réunit 164 délégations de pouvoir, qui 552 Sur la dimension post-coloniale de cette mobilisation, se reporter au chapitre 9 (section II, paragraphe 2C). 548 alimentent la plainte déposée par l'ATmF, le CATRED et le GISTI devant la justice française. L'absence de mobilité des anciens combattants vers la France est ainsi compensée en partie par l'action associative en France et au Maroc. Les cas de migrations directement initiées par les associations de migrants marocains sont rares sur mon terrain d'enquête. Certes, des victimes du séisme de 2004 ont souhaité émigrer en Europe où elles ont de la famille et le collectif SOS Al Hoceima a soutenu quelques demandes de visa Schengen.553 Mais cet exemple est exceptionnel, l'action des associations relevant alors de l'urgence humanitaire. Les associations étudiées n'apparaissent donc pas comme des vecteurs de déplacements massifs en France ou de migrations nouvelles du Maroc vers la France. Le cas des Marocains diffère à cet égard d'autres populations pour lesquelles il semblerait que « le maillage associatif très dense [] permet d'organiser des filières d'entrée ».554 Les associations étudiées agissent en France à l'échelle locale pour aider un migrant à régulariser sa situation, à trouver un emploi ou un logement, mais elles ne sont pas à l'origine de son émigration. L'exemple du collectif SOS Al Hoceima montre que les déplacements de militants s'accompagnent de circulation de biens, d'argent, mais aussi d'idées et de valeurs : celles de l'association (ici, la relation critique de l'ATmF à l'égard de l'Etat marocain, par exemple), celles issues du champ associatif français (l'association comme contre-pouvoir autonome, par exemple) et celles de la société française dans son ensemble. Ainsi, il a été démontré que les migrants marocains sont des vecteurs de la norme occidentale de la famille restreinte.555 Cette diffusion de valeurs est observée chez les associations de migrants marocains, notamment celles de développement des lieux d'origine et de défense des droits de l'Homme. L'AREDF, par exemple, remet chaque année un diplôme et un cadeau aux meilleurs élèves du village, lors du « festival culturel de Rechida » (cf. photo 27). La diffusion de cette idée de l' ducation comme instrument de promotion sociale est observable aussi en France, lors des « journées de la réussite » organisées par l'ATmF d'Argenteuil pour récompenser les jeunes du quartier du Val d'Argent qui ont fait des progrès scolaires. La circulation associative n'est donc pas limitée aux déplacements des militants ou des bénéficiaires des actions. D'autres exemples pourraient être sollicités : l'envoi d'argent ou de matériel médical par des associations de développement, le rapatriement de corps financé par les associations de migrants illustrent le fait que la circulation associative s'étend sur les deux espaces nationaux à différentes échelles, selon une métrique réticulaire le plus souvent. 553 Il s ' agit d'un jeune qui émigre en France et de deux familles qui rejoignent l'Espagne et la Belgique . Source : AtmF. 2004. Bilan intermédiaire et synthétique de la mission de l'ATMF à El Hoceima. Paris. 25 p., p. 5-6. 554 Extrait du chapitre sur les mobilités humaines du manuel de géographie de classe de Première, aux éditions Nathan (2004). La généralité de cette affirmation illustre les difficultés auquelles se heurte le passage du savoir savant au savoir scolaire dans l'enseignement des migrations internationales [Dumont, 2004]. 555 Se reporter au chapitre 7 (section II, paragraphe 1 A a ). 549 Photo 27: Attestation de l'AREDF remise aux meilleurs élèves de Rechida (Oriental, Maroc) Traduction : « Attestation de félicitation. L'AREDF a l'honneur de récompenser l'élève pour les efforts qu'il a fait durant toute l'année scolaire 2002-2003, en lui délivrant cette attestation de félicitation. » Parmi toutes les valeurs que diffusent les associations, via ces déplacements, figure en retour celle de la liberté de circulation ou du droit à la mobilité. La circulation n'est alors plus seulement un élément du répertoire d'action de ces associations, un ensemble de pratiques spatiales visant à une meilleure efficacité, elle modifie en réalité les représentations spatiales associatives elles-mêmes. C'est la figure du « militer pour circuler ». 2. MILITER POUR CIRCULER : LE DROIT A LA MOBILITÉ Dans tous ces déplacements, les associations sont confrontées à des obstacles matériels et légaux. Pour les contourner, elles développent des stratégies diverses, faisant appel aux différents capitaux dont leurs militants disposent. En cas de blocage de matériel humanitaire aux frontières marocaines par exemple, les s peuvent diffuser l'information auprès des médias, contacter des intermédiaires locaux, informer les autres associations en France afin qu'elles procèdent différemment à l'avenir, etc. Les obstacles aux déplacements suscitent donc des discours nouveaux, qui justifient ces déplacements et disqualifient ces obstacles en dénonçant leurs responsables présumés ; autrement dit des discours de légitimation de l'action associative, témoignant de la transformation, de la connexion ou de l'extension des cadres de perception préexistants, ce travail de mobilisation sollicitant très souvent la catégorie des « droits à » [Neveu, 1996 : 89-91]. Concernant la circulation associative, il s'agit du droit au retour au Maroc dans des conditions dignes, une revendication associative déjà ancienne, et du droit à la circulation, aux allers-retours, ce qui est plus nouveau. Ces deux revendications, étudiées ici l'une après l'autre, sont adressées aux Etats français et marocain et aux acteurs privés du champ migratoire franco-marocain. Elles se fondent toutes deux sur un « droit à la 550 mobilité » qui excède la législation existante dans les deux pays mais structure les significations associatives de la marocanité, car participant à une réappropriation par les migrants associés de la signification de la frontière franco-marocaine. A - Le droit au retour L'AMF et l'ATMF ont défendu jusqu'en 1986 le droit au retour des migrants au Maroc « dans la dignité » : elles s'opposaient, dans un même mouvement, aux expulsions et aux aides au retour forcé proposées par l'Etat français et à la dégradation des conditions de vie au Maroc, qu'elles imputaient au régime marocain. La fin du mythe du retour, entre autres facteurs, explique l'abandon de cette revendication.556 Dans les années 1995-2005, ce droit au retour réapparaît au sein des associations d'anciens exilés, pour lesquelles il s'agit désormais de contester l'application partielle de l'amnistie de 1994 qui leur accorde, en théorie, le droit d'aller et venir entre la France et le Maroc. Dans les faits, chaque année est ponctuée d'interpellations et d'interrogatoires illégaux aux frontières marocaines.557 C'est contre ces pratiques que le collectif Al Haqiqa, déjà présenté, se constitue dans plusieurs pays européens, à travers des communiqués, des listes de diffusion sur internet, des conférences et des manifestations. Il bénéficie au Maroc du soutien de l'IER et d'associations de défense des droits de l'Homme (AMDH, OMDH, FVJ). En décembre 2004, une délégation du collectif rencontre au Maroc les ministres de l'intérieur et de la justice et leur l'arrêt des « intimidations » aux frontières, ce qui implique la destruction des fichiers les concernant et l'obtention d'attestations individuelles d'amnistie : « Ces intimidations prennent diverses formes qui vont de l'interpellation à l'aéroport, sous prétexte de vérification de l'identité, aux arrestations, en passant par les interrogatoires Nombreux sont ceux qui ne rentrent plus au pays quand ils le souhaitent. Ils se trouvent acculés à rester en situation d'exilés plutôt que de subir les effets psychologiques graves qui leur font revivre les persécutions des années de plomb. Ils sont également sujets à des intimidations au cours de leur séjour au Maroc. Ils sont filés, convoqués aux commissariats. Parfois, même leurs proches subissent ces mêmes tracasseries. 556 Se reporter au chapitre 6 (section II, paragraphe 2Aa). Par exemple, le communiqué Stop au fichage policier des militants aux postes frontaliers!, du 28 avril 2004, cite le cas d'un ancien exilé dont le passeport est confisqué pour quelques minutes par des agents en civil à l'aéroport de Casablanca. Ce militant était venu au Maroc participer à des réunions avec des membres de l'IER. 558 Extraits du mémorandum remis par la délégation aux ministres cités. 559 « Le père de notre camarade [] a vu l'irruption, au domicile familial à Derb Sultan à Casablanca, d'un agent de l'autorité locale qui s'est présenté à deux reprises pour enquêter sur l'activité et la situation de notre camarade. » Source : communiqué de presse, Intimidations policières envers la famille du président de l'ASDHOM, 7 janvier 2005. 557 551 B - Les revendications liées à la circulation migratoire La circulation migratoire est source de revendications associatives depuis la déclaration de l'AMF, en 1964, critiquant la convention franco-marocaine de main d'oeuvre de 1963, en matière de transports, de sécurité sociale ou de délivrance des passeports.560 Quarante ans plus tard, ces revendications renouvelées constituent le noyau autour duquel se forme le CNMF. Les obstacles à la circulation migratoire naissent souvent d'un vide, d'un conflit ou d'un flou juridiques. D'autres obstacles naissent d'une mauvaise application des lois : par exemple, les douaniers peuvent adopter des comportements discriminatoires à l'égard des jeunes d'origine marocaine lorsque ceux-ci franchissent la frontière ; ils peuvent également demander un bakchich (pot-de-vin) pour un passage de marchandises. C'est pourquoi les revendications liées à la circulation migratoire s'adressent d'abord aux Etats. Mais, comme l'ont montré les travaux de l'équipe Migrinter sur la circulation migratoire marocaine [Charef, 1999, 2000], une multitude d'acteurs privés intervient aux côtés ou à côté des Etats : sociétés de transport par autocar, compagnies maritimes et aériennes, banques (transferts, investissements), assurances (rapatriement des corps), entreprises de télécommunication (site internet, télévision par satellite, etc.). Les revendications associatives se tournent de plus en plus vers ces acteurs. C'est sur celles-ci que l'attention se porte ici, plutôt que sur celles adressées aux Etats, dont de nombreux exemples ont été donnés tout au long de cette thèse. Depuis sa création, l'ATMF proteste contre des acteurs privés, des « marchands de sommeil » aux banques marocaines. Plus récemment, en juin 2005, elle dénonce les prix pratiqués par les compagnies maritimes et la suppression de la remise de 20 % accordée auparavant aux Marocains pour la traversée Alméria-Nador.561 L'association dresse des tableaux comparatifs de prix et impute la cause de cette augmentation à l'Etat marocain : « La communauté marocaine est en droit de se poser certaines questions : quel est l'objectif réel de cette augmentation vertigineuse? Quel est le but recherché par les compagnies et les autorités responsables? Veut-on dissuader l'utilisation de ce port dans une région sinistrée et enclavée, tel que le Rif et l'Oriental? Que font les autorités marocaines, responsables à garantir les conditions favorables de la traversée? [] L'ATmF dénonce avec force cette prise d'otage [et] demande aux autorités marocaines d'intervenir pour ne pas tuer cette poule aux oeufs d'or qu'est l'immigration. »562 Certaines associations ont des visées explicitement politiques (défendre les droits, en obtenir de nouveaux, etc.) et remettent en cause les logiques de fonctionnement du champ migratoire. D'autres associations cherchent à regrouper des migrants selon leurs intérêts personnels (circuler à moindre coût, se faire rembourser un vol annulé, etc.), par exemple à propos de la 560 Se reporter au chapitre 5 (section II, paragraphe 1Ca). Selon l'association, une famille de deux adultes et deux enfants de moins de 12 ans avec voiture paie, en 2005, 63,7 % de plus qu'en 2004 pour un aller-retour en cabine, soit 688 Euros au lieu de 420 Euros. 562 qué de / Nador. « Bienvenue chez vous » est le slogan de la campagne d'information sur le transit estival menée par la Fondation Mohamed V. 561 552 qualité du service de la compagnie aérienne publique Royal Air Maroc (RAM). Ainsi, le 5 juillet 2004, des passagers d'un vol Bruxelles-Tanger ayant subi un retard de 18 heures se constituent en association 1901 sous le nom de « Collectif des passagers du 29 juin ». Son communiqué de presse développe un argumentaire juridique offensif, mobilisant le registre de l'expertise en se référant à la convention de Montréal concernant la responsabilité civile des compagnies aériennes et en menaçant de porter l'affaire devant les tribunaux. Il dénonce « la gestion irresponsable des conséquences du retard sur les passagers, leur santé, leurs activités professionnelles » et exige « des explications, excuses et dédommagements suite [au] manquement de prise en charge des passagers (information, hébergement, appels téléphoniques etc.). » Ce collectif des passagers du 29 juin a eu une brève existence, tout comme le collectif Un avion pour tous, constitué par une dizaine de néo-amicales en 2001.563 Cela peut s'expliquer par la nature de ses revendications : une fois celles-ci atteintes, le collectif cesse d'exister, à moins que ce soit développée, à travers la mobilisation, une identité collective, voire militante, qui transcende les intérêts particuliers et les objectifs initiaux. L'échec du CNMF a justement été expliqué, entre autres facteurs, par son incapacité à mobiliser durablement sur la base d'une identité collective « franco-marocaine ». Mais dans son cas, les revendications, presque toutes liées à la circulation migratoire, étaient globales et ne pouvaient être satisfaites par une médiation ou un travail de lobbying, aussi intensif soit-il. Dès lors, son échec ne s'explique t-il pas aussi par la contradiction de son projet? Plus largement, est-il possible de militer durablement au sein d'une association fondée pour favoriser la circulation? Les travaux de Mehdi Alioua [2005] permettent de répondre à cette question. Etudiant les mobilisations de migrants subsahariens irréguliers au Maroc, l'auteur les décrit comme fondées sur des complémentarités individuelles, l'auto-attribution d'une identité « d'aventurier » et un bureau élu ou autoproclamé. L'auteur qualifie ces collectifs d' « associations temporaires », sans local ni statuts écrits. Cela les oppose aux associations étudiées ici, parmi lesquelles seule l'ATmF564 semble pouvoir combiner circulations militantes et revendications liées à la circulation. L'une des raisons de ce succès est sans doute que ses militants peuvent se référer à une identité collective, voire militante, constituée de longue date au cours de mobilisations. Quant aux autres associations, il semble qu'elles aient besoin, pour être efficaces, d'un minimum d'ancrage local. Par exemple, lorsque des démissionnaires du CNMF critiquent son absence de contact avec la « base », le mot est à comprendre au sens de base populaire (les migrants marocains) mais aussi de base territoriale (ici, des lieux d'action strictement circonscrits). Ainsi, les déplacements humains, matériels et immatériels et les discours de légitimation qui peuvent les accompagner ne garantissent pas à eux seuls l'efficacité des actions associatives. Celle-ci peut être atteinte en ayant recours à d'autres ressources, acquises sans déplacement physique et, en particulier, par l'inscription dans un territoire, au sens d'un espace produit et approprié par le groupe, qui lui garantit sa reproduction et accorde aux lieux et à leur agencement des significations collectives. La question qui se pose est de savoir dans quelle 563 564 Se reporter au chapitre 7 (section II, paragraphe 2Bb). Qui a d'ailleurs entamé une campagne de soutien aux migrants subsahariens au Maroc. 553 mesure la circulation associative peut susciter une territorialisation spécifique, soit une mise en réseaux des lieux d'action des associations [Di Méo, 1998 : 41]. Les travaux d'Alain Tarrius autour de la notion de « territoire circulatoire » ont montré que réseaux et circulation n'étaient pas antinomiques du territoire, à condition de définir celui-ci selon un paradigme de la mobilité, c'est-à-dire non pas comme un espace support de réseaux et de mobilités, mais comme un espace produit par la circulation migratoire et producteur de mémoires, de hiérarchies et de reconnaissances sociales spécifiques [Tarrius, 2001]. Avant de raisonner en ces termes et de chercher les convergences entre circulation associative et circulation migratoire dans leur rapport au(x) territoire(s) et à la territorialité, il convient de conclure cette section en soulignant que la circulation associative est contrebalancée par la nécessité, pour les associations, de s'inscrire dans des territoires, ne serait-ce que pour en tirer des ressources matérielles (locaux, subventions, etc.) et immatériels (reconnaissance, accessibilité, etc.). La circulation associative puise donc des ressources dans les territoires, par exemple marocain, puisqu'elle nécessite d'utiliser certains axes et noeuds de transport et de connaître le maillage territorial de l' concerné. L'espace de la circulation associative des migrants marocains, composé de lieux d'action et de lieux de transit, apparaît difficile à appréhender – à partir du terrain choisi – dans sa totalité, car produit par un ensemble d'articulations multiscalaires entre les configurations associatives et migratoires marocaines. Dans ce contexte, peut-on encore parler de territorialité de la marocanité associative? On retrouve ainsi la seconde partie de l'hypothèse de la territorialité de la marocanité associative, selon laquelle celle-ci ne ressortirait pas uniquement des pratiques et des représentations spatiales des associations, objets de ces deux sections, mais aussi des pratiques et des représentations spatiales des autres acteurs des champs associatif et migratoire, la plupart d'entre eux étant fortement territorialisés. III - LA TERRITORIALITÉ DE LA MAROCANITÉ ASSOCIATIVE Comme toute autre circulation, la circulation associative hiérarchise les lieux et différencie les espaces investis par les associations étudiées. Ce double processus, qui vise à l'efficacité des actions, est porteur de significations spatiales de la marocanité. C'est à ce titre qu'il peut entrer en contradiction avec deux processus observés en France : d'une part, celui de la territorialisation de l'action publique, à travers une politique de la ville qui valorise l'échelle du « quartier » ; d'autre part, celui de logiques résidentielles marquées par la sédentarité et la ségrégation socio-spatiale, voire l'assignation à résidence. Cette contradiction expliquerait que les injonctions politiques à l'égard des associations, décrites dans le chapitre 9 par leur marginalisation dans l'espace public et leur dépendance à l'égard d'autres acteurs pour l'accès aux ressources, s'accompagne d'injonctions géographiques. L'échelle à laquelle j'observe ces injonctions, dans le premier paragraphe, est celle du quartier et de la ville en France, car c'est là qu'elles se manifestent le plus. L'enquête de terrain révèle deux tendances apparemment contradictoires. D'une part, les associations étudiées tendent à s'inscrire dans l'échelle locale, en fondant leurs actions sur la proximité spatiale qu'elles nourrissent avec ceux, adhérents ou non, qui en bénéficient. D'autre part, et dans la mesure où ces associations étudiées ont été choisies pour leur orientation, directe ou non, vers le Maroc, elles tendent à réduire la distance spatiale qui les sépare du pays d'origine. Comment parviennent-elles à concilier ces deux tendances? En appuyant l'interprétation de ces observations du terrain sur les résultats de la sociologie associative, sur celle des migrations et sur les travaux de géographes sur la territorialité, il est possible de penser l'autonomie des associations en termes dialectiques. L'autonomie est en effet à la fois une norme du champ associatif français et un mode de fonctionnement des collectifs migrants, lisible dans les stratégies mises en oeuvre par les associations pour réduire la distance avec le Maroc. Explorer ces stratégies est l'objet du second paragraphe. Celui-ci décrit les rares exemples de marqueurs territoriaux ou de « hauts lieux » implantés par les associations étudiées, afin de territorialiser l'espace d'installation d'une manière autonome, à la manière des diasporas.
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2009PA066296_8
French-Science-Pile
Open Science
Various open science
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Etude théorique des réactions d'oligomérisation des oléfines catalysées par des complexes du fer
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À partir de ces définitions, deux nouveaux descripteurs sont introduits : %( MH ago ) = 100d1 et ∆% MH ago = 100(d1 + d 2 − 1) . Ce dernier permet de mesurer l'éloignement du BCP par rapport à la ligne MH ago : en effet, ∆% MH ago = 0 revient à affirmer que M, H ago et le BCP sont alignés, tandis que de hautes valeurs ∆% MH ago impliquent que le BCP est loin de la ligne MH ago. Finalement, un paramètre géométrique clé est utilisé, lequel mesure les distances relatives des liaisons C-H, avec C un atome de carbone donné : ∆ C − H = Max d (C − H i ) − Min d (C − H i ). H i lié à C H i lié à C Les unités atomiques sont utilisées dans ce chapitre et seules les distances sont reportées en angströms. VII.3.Résultats et discussion VII.3.1. Définitions possibles de l'agosticité 23 complexes ont été optimisés. Les structures optimisées sont reportées en annexe C (p 247). Dans le but de les identifier, la nomenclature suivante est utilisée : ils sont tous labellisés par M ixyz où M désigne le métal, i son degré formel d'oxydation (par convention écrit en nombre romain) et x , y , z prennent les indices α , β , γ , δ ou δ ' et indiquent quel type AIM d'hydrogène agostique a été trouvé dans le complexe. Enfin le symbole ^ informe que deux atomes H ago ont été observés sur le même atome de carbone (celui qui est impliqué dans la plus courte distance de liaison C-H est alors qualifié de "secondaire"). Par exemple, le label ˆ TiIIαβ fait référence à un complexe au titane où l'atome de métal a un degré d'oxydation égal à 2, supportant une "liaison" δ agostique et deux liaisons α agostiques. Cependant, une telle définition devient effective dans la mesure où l'on peut déterminer si un atome d'hydrogène est agostique ou non : une convention est donc requise. Le choix le plus intuitif revient à prendre un critère géométrique. Ainsi, un atome d'hydrogène (sur un carbone) sera dit agostique si la distance de liaison C-H correspondante est supérieure à 1,100 Å. Un tel choix est bien sûr arbitraire, mais on montrera par la suite qu'il est cohérent, ou tout au moins non contradictoire. Il est fondamental d'observer qu'une telle convention fait intervenir uniquement des noyaux (via leurs positions) et n'a intrinsèquement aucune connection directe avec le concept de liaisons agostiques. On précise donc que l'objet de cette étude n'est pas d'investiguer les imbrications de tels concepts. Pour rendre les choses plus claires, et suivant le vocabulaire QTAIM, une liaison agostique existera si et seulement s'il existe un BP entre le métal et un atome d'hydrogène donné. Il doit être précisé que dans cette définition, il n'est pas dit si l'atome H est agostique ou non (dans le sens de la définition géométrique précédente). Ces définitions font naturellement émerger les problématiques suivantes : - Est-ce que l'existence d'une liaison agostique implique l'existence d'un H agostique ? - Est-ce que l'existence d'un H agostique induit l'existence d'une liaison agostique ? Comme un corrolaire, la définition suivante est introduite : une interaction agostique est trouvée quand un atome H agostique existe sans liaison agostique. En utilisant cette terminologie, notre question peut être reformulée ainsi : - Existe-t-il des interactions agostiques ? VII.3.2. Géométries et BCPs 40 types d'atomes H agostiques ont été obtenus, avec 7 atomes de métal différents (Ti, V, Cr, Mn, Fe, Co et Ni), obéissant à la distribution suivante : 8 α , 9 β , 5 γ , 9 δ et 9 δ ' . Un atome H α agostique a été trouvé pour tous les métaux excepté Ni, un β agostique a été Les configurations électroniques d pour le métal s'étendent sur un intervalle large, car d0, d2, d3, d4, d5 et d6 sont présentes dans notre liste. Il peut être conclu que notre base de complexes inclut une variété importante de situations qui sont, de notre point de vue, suffisamment représentatives même si la base de complexes n'est pas exhaustive. Par ailleurs, le cas de 2 atomes H agostiques sur un même atome de carbone a seulement été rencontré pour α̂ , δˆ et δˆ ' et aucun pour β et γ . Le nombre maximal de types d'atomes H ˆ agostiques dans un complexe est 4 (pour CrIIαβδ ). Il n'a pas été possible de localiser un minimum avec des atomes H agostiques simultanément α , β , γ et δ (') . Enfin, aucun cas d'agosticité δ et δ ' simultanés n'a été observé. Ce fait peut être expliqué par le raisonnement qualitatif suivant : si un atome H δ (ou H δ ' ) est agostique, cela implique que le groupe aryle correspondant a nécessairement tourné pour approcher l'atome H en question vers le métal. La gêne stérique dans la sphère de coordination du métal générée par cette rotation d'un des cycles aryles empêche l'autre cycle de tourner et ainsi de créer l'autre H agostique de type į. Concernant les relations entre les agosticités géométriques et QTAIM, le premier point de divergence est qu'aucun BCP n'a été identifié pour les atomes H α agostiques. Une telle remarque a déjà été faite pour des complexes d0.8,28 Nous avons ici étendu son domaine d'application, en montrant qu'elle peut être généralisée à de nombreux complexes des métaux de transition. Nous nous focalisons maintenant sur le type H β agostique : dans 67 % des cas, un BCP est obtenu. Dans le but d'acquérir davantage de précision descriptive sur les facteurs qui peuvent gouverner l'existence ou non d'un BCP, une fois qu'un H agostique a été identifié, nous introduisons les intervalles suivants : I xnoBCP , où x ∈ {α , β , γ , δ , δ '} , traduit l'ensemble des valeurs de longueurs de liaisons C x -H x pour les complexes où aucun BCP n'a été localisé pour l'atome H x agostique. En revanche, I xBCP collecte les valeurs C x -H x pour les complexes possédant un BCP entre le métal et H x . Deux autres intervalles, labellisés IxnoBCP et IxBCP , dérivent de manière similaire des deux intervalles précédents en substituant la distance C x -H x par celle entre le métal et H x agostique considéré. Pour H β agostique, on trouve (où l'unité Å est omise pour plus de lisibilité) : I βnoBCP = [1,139 ; 1,147 ] et I βBCP = [1,147 ; 1,173] . Une caractéristique intéressante est que ces intervalles sont séparés. En d'autres termes, si la longueur de liaison Cβ -H β est supérieure à 1,147 Å, un BCP existe, et la réciproque tient. On peut conclure que la longueur manifeste de la liaison Cβ -H β est due au métal qui interagit fortement avec l'atome H agostique, et ainsi qu'une liaison peut exister entre eux. Cependant, un tel argument qualitatif ne tient plus si l'on observe maintenant les intervalles correspondants pour M -H β . En effet, IβnoBCP = [1,893 ; 2, 036] et IβBCP = [1,828 ; 2,077 ] , l'intersection entre eux étant large. Notre précédent raisonnement impliquerait que, dans le cas des atomes H agostiques les plus éloignés du métal, un BCP n'existerait pas et qu'il y aurait alors une présence d'interactions agostiques. Mais, un BCP est trouvé pour Ti-H β = 2, 077 Å dans TiIVβδ ' tandis qu'aucun n'est localisé pour MnIIβ où Mn-H β = 1,893 Å. Ainsi, on constate qu'il n'est pas possible de prédire l'existence ou l'absence d'un BCP impliquant un H β agostique en raisonnant seulement sur la distance au métal. Bien sûr, une analyse plus subtile pourrait être faite en déterminant IxBCP et IxnoBCP pour chaque métal de transition; mais une telle procédure nécessiterait une base de complexes considérablement plus importante. Concernant le type H γ agostique, 80 % ont un BCP entre le métal et l'atome d'hydrogène. Les intervalles sont : I γnoBCP = [1,120] , I γBCP = [1,127 ; 1,135] , IγnoBCP = [ 2,134] , IγBCP = [1, 794 ; 2,086] . Dans ce cas, il y a une tendance claire : il existe un BCP si et seulement si Cγ -H γ > 1,120 Å et M -H γ < 2,134 Å. Cependant, l'échantillon de H γ est sans doute trop réduit pour faire de ce constat une règle. Néanmoins, il est instructif de noter que le critère pour la non-existence d'un BCP obtenu à partir des cas H β (c'est-à-dire : si Cβ -H β < 1,147 Å alors il n'y a pas de BCP) n'est pas valide pour H γ , puisque toutes les valeurs Cγ -H γ pour lesquelles un BCP a été trouvé sont inférieures à ce seuil. Immédiatement, il devient clair qu'il est définitivement illusoire de trouver un critère géométrique simple qui permettrait de prédire s'il y a ou non un BCP et ce indépendamment du type d'agostique. Concernant les atomes H δ et H δ ' agostiques, 33 % des cas ont un BCP (44 % pour δ et 22 % pour δ ' ). Les intervalles d'intérêt sont : IδBCP = [1,121 ; 1,132] , IδnoBCP = [1,101 ; 1,131] , IδBCP = [1,101 ; 1,128] , IδnoBCP = [1,100 ; 1,126] . On précise que nous ne discuterons pas des ' ' intervalles I correspondants puisque, dans le cas de β et γ , ils ne nous ont pas fourni davantage d'information. On relève l'intersection de chaque intervalle avec les autres. La plus remarquable caractéristique est que IδBCP et IδnoBCP sont presque équivalents (la même conclusion s'appliquant aussi au cas δ ' avec encore plus d'équivalence entre les deux intervalles). Cela implique qu'aucun critère fondé sur la valeur de la longueur de liaison Cδ (') -H δ (') ne peut prédire l'existence ou l'absence d'un BCP. Il n'y a pas de BCP entre V et H δ dans VIIIβδ ' , où Cδ -H δ = 1,131 Å, tandis qu'il y en a un dans CoδIII où la longueur de liaison a la même valeur (1,132 Å). Par ailleurs, quelque soit le type d'agostique secondaire considéré, aucun BCP n'a été localisé, même s'il n'apparaît pas possible de rationaliser géométriquement ce fait. Pour l'intérêt de la ˆ comparaison, l'agostique secondaire δ ' dans VIIIαδˆ ' est caractérisé par Cδ ' -H δ ' = 1,111 Å. Mais, cet H δ ' n'est pas impliqué dans un BP avec le métal, tandis qu'il existe un BCP relatif à un βδ ' H δ ' dans FeIII , même si la liaison C-H correspondante n'est que faiblement allongée par rapport aux liaisons C-H non agostiques : 1,101 Å. C'est pourquoi il n'apparaît pas nécessaire de modifier (en fait d'augmenter) le seuil géométrique choisi dans le but de supprimer ces atomes agostiques secondaires. En effet, de notre point de vue, une telle modification serait préjudiciable parce qu'elle ferait disparaître des cas d'agosticité qui traduisent l'existence d'une βδ ' liaison agostique, comme dans FeIII , ou une forte distorsion géométrique. Pour l'instant, ˆ ' Cα -Hα = 1,101 Å dans Mnαδ avec un angle MnCα Hα égal à 97,7° suggère ainsi une II interaction non négligeable entre H α et Mn . Nous précisons que le terme "agostique" employé par la suite fera référence à l'atome agostique principal (c'est-à-dire celui qui possède la plus forte élongation de la liaison C-H). En conclusion, dans 40 % des cas d'atomes H agostiques, un BCP a été trouvé. Pour H α agostique, seules des interactions (et non des liaisons) agostiques ont été identifiées. L'existence d'un BCP peut être clairement prédit sur la base des longueurs de liaison C-H seulement pour le cas H β agostique. Pour tous les autres cas, aucun critère suffisamment robuste peut être obtenu, même en utilisant la distance au centre métallique. Par ailleurs, pour un groupement CH2 ou CH3 donné, portant un (ou plus) H agostique, le nombre maximal de BCP impliquant des atomes agostiques et le centre métallique est égal à 1. En définitive, il doit être précisé qu'il n'y a aucun exemple de liaison agostique sans H agostique. Ce résultat constitue, selon nous, un point de satisfaction quant à la cohérence de notre définition géométrique (et de la valeur seuil qu'elle implique) pour un atome d'hydrogène agostique. Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM VII.3.3. Une relation entre des paramètres géométriques et les propriétés locales de BCPs ? L'objectif de cette section est de vérifier s'il existe une correspondance entre l'information donnée par des paramètres géométriques et celle issue de l'analyse QTAIM. Pour ce faire, toutes les caractéristiques des BCPs pour les liaisons M-H sont reportées en Tableau 1 ( β ) Tableau 2 ( γ ) et Tableau 3 ( δ et δ ' ). Plus spécifiquement, trois distances ont été retenues impliquant un H x agostique donné : C x -H x , M-H x et ∆ Cx -H x. Dans le même temps, nous avons considéré six descripteurs QTAIM : %( MH x ) , ∆ % MH x , ρ ( rc ) , L(rC ) , ε ( rc ) et K ( rc ). & & & & M dn Cβ-Hβ ∆C β H β M-Hβ MCαCβ %( MH β ) ∆ % MH β ρ ( rc ) & & ∇2 ρ ( rc ) ε ( rc ) & & K ( rc ) TiIVβδ ' 0 1,147 0,052 2,077 88,4 56,0 1,0 0,0399 0,1407 3,258 0,0014 ˆ 2 1,149 0,055 1,918 84,6 57,4 1,1 0,0470 0,2017 0,487 0,0031 3 1,144 0,050 2,031 86,6 - - - - - - 4 1,139 0,044 2,036 87,1 - - - - - - 4 1,159 0,062 1,828 81,8 69,2 0,1 0,0882 0,1306 1,283 0,0113 5 1,147 0,054 1,893 83,6 - - - - - - 5 1,173 0,079 1,794 79,9 58,1 5,9 0,0623 0,2449 21,820 0,0077 6 1,169 0,076 1,756 80,8 65,9 3,2 0,1218 0,1332 0,412 0,0196 6 1,170 0,075 1,770 80,9 62,9 1,4 0,1117 0,1385 0,216 0,0192 VIIIβδ V IIβ CrIIβδ ˆ CrIIαβδ Mn IIβ βδ ' FeIII βδ ' CoIII NiIVβδ ' Tableau 1 : Paramètres géométriques et descripteurs locaux QTAIM pour les 9 complexes ȕ-agostiques ; toutes les distances sont en Å et les angles en degrés. Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM M dn Cγ-Hγ ∆Cγ H γ M-Hγ CαCβCγ %( MH γ ) ∆ % MH γ ρ ( rc ) & & ∇2 ρ ( rc ) ε ( rc ) & & K ( rc ) γδ ' Ti IV 0 1,128 0,034 2,086 119,8 62,8 2,9 0,1033 0,0992 0,745 0,0056 V IIIγδ ' 2 1,120 0,026 2,134 110,2 - - - - - - ' Mn γδ II 5 1,127 0,031 1,928 108,3 67,4 2,8 0,0407 0,0871 1,265 0,0060 Fe γII 6 1,135 0,044 1,794 107,3 63,5 3,0 0,0777 0,1029 0,762 0,0153 Co γIII 6 1,130 0,045 1,824 110,9 64,6 1,5 0,0869 0,1037 0,2901 0,0150 Tableau 2 : Paramètres géométriques et descripteurs locaux QTAIM pour les 5 complexes Ȗ-agostiques ; toutes les distances sont en Å et les angles en degrés. ∆ Cδ (') Hδ (') MHδ(’) C1(’)NC2(’) %( MH δ (') ) ∆ % MHδ (') ρ ( rc ) & & ∇2 ρ ( rc ) ε ( rc ) & & K ( rc ) 0 Cδ(')Hδ(') 1,128 0,033 2,153 131,9 55,9 2,1 0,0304 0,1139 0,580 -0,0010 γδ ' Ti IV 0 1,101 0,008 2,773 129,8 - - - - - - Ti IIα̂δ 2 1,122 0,029 2,153 131,9 55,8 1,4 0,0303 0,1197 0,741 -0,0015 VIIIαˆδ ' ˆ 2 1,126 0,031 2,011 126,6 - - - - - - ˆ 2 1,131 0,036 1,986 127,1 - - - - - - 2 1,110 0,018 2,421 123,6 - - - - - - 4 1,114 0,021 2,107 126,8 - - - - - - 4 1,121 0,028 2,039 125,4 57,5 0,1 0,0299 0,1198 2,242 0,0016 ˆ 4 1,118 0,025 2,012 124,6 - - - - - - Mn αIIδ ' ˆ 5 1,120 0,027 1,976 126,9 - - - - - - ˆ 5 1,121 0,027 1,969 127,5 - - - - - - 5 1,100 0,008 2,833 120,4 - - - - - - 5 1,101 0,009 2,642 121,2 - - - - - - 5 1,101 0,009 2,556 122,4 60,0 0,6 0,0127 0,0355 0,927 0,0000 5 1,130 0,036 1,857 128,1 62,8 3,9 0,0992 0,1369 2,165 0,0133 6 1,101 0,009 2,548 121,5 - - - - - - 6 1,132 0,038 1,800 127,9 62,5 4,8 0,1072 0,1437 1,759 0,0161 6 1,112 0,020 2,253 124,8 - - - - - - M dn TiIVβδ ' VIIIβδ V IIIγδ ' ˆ CrIIαˆδ CrIIβδ CrIIαβδ Mn αIIˆδ ' Mn γδ II Feαδ III βδ ' FeIII ˆ FeδIII βδ ' CoIII ˆ CoδIII NiIVβδ ' Tableau 3 : Paramètre s géométriques et descripteurs locaux QTAIM pour les 18 complex es į-agostiques ; toutes les distances sont en Å et les angles en degrés ; seulement les Hį ago stiques les plus allongés sont considérés. Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM La première étape consiste à chercher si toutes ces quantités sont indépendantes. La Figure 2 montre les variations de ∆ Cx H x et M-Hx par rapport à Cx-Hx. Immédiatement, il apparaît qu'il n'y a pas de corrélation linéaire entre ces deux dernières distances. Ces graphiques mettent aussi en évidence la particularité du type Hȕ agostique : en effet, toutes les longueurs de liaison Cβ -H β données sont supérieures à 1,139 Å, tandis que toutes les autres longueurs C x -H x (pour x = α , γ et δ (') ) sont plus courtes que cette valeur. Cependant, une telle dichotomie ne tient pas pour M-Hx. En effet, les intervalles sont les suivants : [1,952 ; 2,509] pour α , [1, 756 ; 2,077] pour β , [1, 794 ; 2,134] pour γ et [1,800 ; 2,773] pour δ et δ ' . Il y a d'importants domaines d'intersection entre eux, et donc il n'y a pas de valeur spécifique MHx pour un type d'agostique donné. 0.08 α 2.75 α β 0.07 β γ γ () δ' () δ' 0.06 ∆Cx-Hx (in Å) ̈Cx-Hx (en Å) M-Hx (in Å) M-Hx (en Å) 2.50 2.25 2.00 0.05 0.04 0.03 0.02 0.01 1.75 1.10 1.11 1.12 1.13 1.14 1.15 1.16 1.17 0.00 Cx-Hx (in Å) Cx-Hx (en Å) Figure 2 : Variations de M-Hx (x=α,β,γ,δ(’)) (gauche) et de 1.10 1.11 1.12 1.13 1.14 1.15 1.16 1.17 Cx-Hx (in Å) Cx-Hx (en Å) ∆ Cx H x (x=α,β,γ,δ(’)) (droite) par rapport à Cx-Hx pour tous les complexes. Seules les distances C-H agostiques les plus longues pour chaque type de complexes sont considérées. En revanche, il existe une forte corrélation entre ∆ Cx H x et Cx-Hx. Mais, quelques points sortent de cette tendance ; ils correspondent aux cas α̂ : en effet, pour ce type secondaire, il n'y a pas de H non-agostique sur l'atome CĮ, ce qui implique que l'élongation ∆ Cx H x est nécessairement plus petite. Une telle situation ne peut pas être rencontrée pour les autres types d'agostiques, parce que, même pour δˆ , il y a toujours un H non-agostique sur le même atome de carbone. 207 Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM Par conséquent, ∆ Cx H x est défini de manière non ambiguë pour β , γ et į('). Comme cette section est consacrée aux relations entre paramètres géométriques et BCPs, et qu'il n'y a pas de BCP pour α , il est raisonnable d'exclure les agostiques HĮ de cette étude particulière. Dans ces conditions, une droite peut être tracée (Figure 3) et on obtient : ∆ Cx − Hx = −1, 0545 + 0, 9656*(C x -H x ). (7.1) Le coefficient de régression linéaire R2 est égal à 0,992, ce qui prouve un haut degré de corrélation. Il est important d'insister sur le fait que cette relation est valide quelque soit le type d'agostique considéré. Il semble donc que l'élongation relative dépend directement de la longueur de liaison maximale, selon une loi qui est indépendante de la distance à l'atome de métal, de la nature du métal et de l'atome de carbone qu'elle implique. 0.12 0.08 ̈Cx-H∆Cx-Hx x (en(in Å) Å) 0.07 0.10 0.06 r) ρAIM(ρr(model ) c &&c 0.05 0.08 (in a.u.) 0.04 AIM modèle (en u.a) 0.03 0.06 0.04 0.02 0.02 0.01 0.00 0.00 0.02 0.04 0.06 ρ(rc&) 0.08 0.10 0.12 & 1.10 1.11 1.12 1.13 1.14 1.15 1.16 1.17 C x- Hx (in Å) Cx-Hx (en Å) Figure 3 : Variations de ρcalc( rc ) (in a.u.) calc (en u.a) ∆ Cx H x (x=β,γ,δ(’)) par rapport à Cx-Hx et régression linéaire correspondante en rouge pour tous les complexes (gauche) (seules les distances C-H agostiques les plus longues pour chaque type de complexes sont considérées) ; et vue de la meilleure régression linéaire avec des descripteurs QTAIM locaux pour ρ (rc ) & (droite). En conclusion, seules deux quantités géométriques sont indépendantes. Ainsi, nous retiendrons par la suite seulement Cx-Hx et M-Hx. La même étude peut maintenant être menée pour les 6 descripteurs QTAIM avec l'objectif de vérifier que chaque descripteur est bien indépendant des cinq autres. Ainsi, on recherche si l'un d'entre eux peut être écrit comme une combinaison (multilinéaire) des cinq autres, ρ ( rc ) = −0, 0566 + 0, 0011% ( MH x ) + 0, 0045∆% MH − 0,1876 L ( rc ) − 0, 0020ε ( rc ) + 3, 2017 K ( rc ). & & & & x ( 7.2 ) Le coefficient de régression linéaire est égal à 0,844. Cette valeur indique qu'il n'y a pas de réelle corrélation entre les descripteurs QTAIM considérées. Donc, nous pouvons les considérer indépendants les uns des autres. Cela indique que chacun des six descripteurs peut être corrélé aux deux paramètres géométriques retenus (Cx-Hx et M-Hx). C'est-à-dire, nous pouvons maintenant nous intéresser à la recherche de possibles régressions monolinéaires entre ces six quantités QTAIM et chacun des paramètres géométriques indépendants. Les premiers exemples de cette procédure sont notés en Figure 4 et Figure 5. Il est obtenu que %(MHx) se trouve toujours dans l'intervalle [55 ; 63] et ̈%Cx-Hx dans l'intervalle [ 0 ; 6] . Ce dernier implique que le BCP reste toujours plutôt proche de la ligne M-H. De la corrélation des deux séries de données, il suit aussi que le BCP est toujours plus proche de l'atome agostique que de l'atome du métal, sans aucune exception. Néanmoins, ces quantités ne peuvent pas discriminer le type d'agostique : les intervalles de variation pour chaque type ne sont pas séparés les uns des autres. Par ailleurs, aucune corrélation significative n'a pu être obtenue avec les paramètres géométriques. Aucune tendance n'est même possible puisqu'aucun comportement monotone n'a pu être identifié. β β γ γ () δ' () δ' 70 70 65 %(MH ) %(M-Hx ) 60 x x %(MH ) %(M-Hx) 65 55 60 55 50 50 45 45 1.110 1.125 1.140 1.155 Cx-Hx (in Å) Cx-Hx (en Å) 1.170 1.80 1.95 2.10 2.25 2.40 2.55 M-H (in Å) M-H x (en Å) x Figure 4 : Variations de %(MHx) (x=β,γ,δ(’)) par rapport à Cx-Hx (gauche) et à M-Hx (droite) pour tous les complexes possédant un BCP agostique. Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM β β γ γ () () δ' δ' 12 8 MHx ∆% ̈%Cx-Hx MHx ∆% ̈%Cx-Hx 12 4 0 8 4 0 1.10 1.11 1.12 1.13 1.14 1.15 1.16 1.17 1.80 1.95 2.10 Cx-Hx (en Å) 2.25 2.40 2.55 M-Hx (en Å) Cx-Hx (in Å ) M-Hx (in Å) Figure 5 : Variations de ∆%Cx-Hx (x=β,γ,δ(’)) par rapport à Cx-Hx (gauche) et à M-Hx (droite) pour tous les complexes possédant un BCP agostique. La Figure 6 traite des densités électroniques aux BCPs. En effet, il a été montré que leurs valeurs mesurent les forces des liaisons correspondantes.29 En référence 8, Popelier a proposé le domaine [ 0,04 ; 0,05] pour les liaisons métal-H agostiques et montré que l'intervalle des densités électroniques aux BCPs pour des liaisons hydrogènes est alors différent : [ 0,002 ; 0,035] .30 Dans les deux cas, ils sont inférieurs aux densités typiques des liaisons covalentes (environ 0,25 pour une liaison C-C ou C-H). β β γ 0.16 () δ' & ρ ( rc ) ρ ( rc ) & & (in a.u.) (en u.a) () δ' 0.12 0.12 & ρ ( rc ) ρ ( rc ) γ 0.16 (in a.u.) 0.08 (en u.a) 0.08 0.04 0.04 0.00 0.00 1.110 1.125 1.140 1.155 Cx-Hx (in Å) Cx-Hx (en Å) Figure 6 : Variations de ρ (rc ) & 1.170 1.80 1.95 2.10 2.25 2.40 2.55 M-Hx (in Å) M-Hx (en Å) (x=β,γ,δ(’)) par rapport à Cx-Hx (gauche) et à M-Hx (droite) pour tous les complexes possédant un BCP agostique. Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM Dans notre étude, l'intervalle restreint proposé par Popelier a été étendu vers des valeurs plus & faibles et plus élevées, puisque nous avons obtenu que ρ (rc ) ∈ [ 0, 01 ; 0,13] . L'intersection avec l'intervalle des liaisons hydrogènes est donc non évitée, mais demeure ténue ( [ 0, 01 ; 0, 035] ). Par ailleurs, la densité peut être du même ordre de magnitude (la moitié) que βδ ' celles de quelques liaisons covalentes : pour l'instant, 0,12 pour la liaison Co-H β dans CoIII. Mais, une telle observation ne peut pas être généralisable, puisque, pour l'instant, la densité au BCP pour Ti-H β dans TiIVβδ ' est égale à 0,04, ce qui est cohérent avec la valeur que Popelier et Logothetis ont proposé pour leur complexe au titane étudié. Une telle remarque suggèrerait que plus le nombre d'électrons d est important dans le métal, plus la densité au BCP est haute. βδ ' Mais, l'exemple du BCP pour Fe-H δ ' dans FeIII (d5) vient infirmer une telle suggestion, puisque la densité relative est égale à 0,013. Un autre fait montre qu'une tendance générale ne peut pas être obtenue : pour δ et δ ' , il existe autant de cas de BCPs pour lesquels la densité s'étend au-dessous ou au-dessus de l'intervalle proposé en référence 8. Comme il est possible de le voir sur les graphiques, pour chaque type d'agostique, l'intervalle est large, et ainsi aucune rationalisation utilisant la nature du métal ou le type d'agostique n'est possible. & La même conclusion tient aussi pour L(rC ) , comme le prouve la Figure 7 : aucune corrélation n'est trouvée entre cette quantité QTAIM et nos deux paramètres géométriques. Rappelons & que L(rC ) traduit l'accumulation (ou la disparition) locale moyenne de la densité de charge au & BCP. Une valeur négative de L(rC ) indique une perte locale de densité de charge (cas des liaisons ioniques, des liaisons hydrogènes ou encore de type Van der Waals), tandis qu’une & valeur positive de L(rC ) indique une accumulation (cas des liaisons covalentes). Toutes nos valeurs sont négatives. Cela confirme un caractère ionique de la liaison agostique. Popelier et & Logothetis ont proposé l'intervalle suivant pour L(rC ) : [ -0, 25 ; -0,15] . Notre base de complexes nous a permis d'étendre cet intervalle vers des valeurs plus faibles (en valeur absolue) : [ -0, 25 ; -0,03] . De plus, la distribution des valeurs est moins aléatoire que dans le cas de la densité : en effet, toutes les valeurs de Laplacien pour les cas γ , δ et δ ' sont inférieures à 0,144, tandis que toutes les valeurs pour le cas β sont supérieures à 0,130. Ce n'est pas une divergence nette mais, une fois de plus, le cas β se démarque des autres cas par une perte de charge plus forte au niveau des BCPs agostiques. Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM β 0.1 β 0.1 γ γ () δ' () δ' 0.0 && L (rLc(r)) c 0.0 && L (rLc(r)) -0.1 c (in a.u.) -0.1 (in a.u.) -0.2 -0.2 -0.3 -0.3 1.110 1.125 1.140 1.155 1.170 1.80 1.95 2.10 C x-Hx (in Å) C x-Hx (en Å ) 2.25 2.40 2.55 M-Hx (en Å) M-Hx (in Å) Figure 7 : Variations de L ( rc ) (x=β,γ,δ(’)) par rapport à Cx-Hx (gauche) et à M-Hx (droite) pour tous les & complexes possédant un BCP agostique. & En référence 8, il a été avancé que l'intervalle L(rC ) des liaisons hydrogènes30, [ -0,14 ; -0,024] , & n'a pas d'intersection avec l'intervalle L(rC ) des liaisons agostiques. Au contraire, nous avons trouvé que cet intervalle [ -0,14 ; -0,024] est presque en totalité inclus dans celui des liaisons agostiques ( [ -0,25 ; -0,03] ). De tels constats appellent une question de plus : les intervalles proposés pour les liaisons hydrogènes peuvent-ils être étendus en direction des intervalles des liaisons agostiques, c'est-à-dire vers des valeurs de densité et de laplacien plus hautes aux BCPs ? Pour répondre à cette question, deux systèmes dimériques (I et II), représentés en Figure 8, ont été étudiés au même niveau de théorie. Les densités obtenues sont : 0,053 (composé I) et & 0,062 (II), et les valeurs L(rC ) : -0,146 (I) et -0,157 (II). Ces valeurs sont typiques des liaisons agostiques. O H O H O H H O H O I O F F O H O II Figure 8 : Les deux systèmes étudiés comportant des liaisons hydrogènes. Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM La Figure 9 traite de l'ellipticité au BCP ( ε (rc ) ) : sa valeur est toujours plutôt importante, & βδ ' est exclu. Comme il a été suggéré en référence 8, cela est même si le cas "pathologique" FeIII probablement lié à la possible instabilité structurale des complexes. Un cas intéressant est constitué par les liaisons agostiques M-Hȕ, parce qu'une BHE sur ces complexes génèrerait du propène. Le fait que la valeur moyenne de l'ellipticité pour ce groupe est conséquente (1,13 βδ ' quand FeIII est exclu) pourrait être un indice pour une barrière d'activation BHE faible. Enfin, comme il peut être vu sur les graphiques, la distribution des valeurs forme un nuage diffus, donc l'ellipticité ne peut pas être retenue comme un critère pour l'agosticité et ne peut pas être utilisée pour des corrélations avec des paramètres géométriques. β β 25 25 γ γ () δ' () δ' 20 20 15 &ε(r& ) ε (rc ) &ε(r& ) ε (rc ) 15 c c 10 10 5 5 0 0 1.110 1.125 1.140 1.155 Cx-Hx (in Å) Cx-Hx (en Å) Figure 9 : Variations de ε (rC ) & 1.170 1.80 1.95 2.10 2.25 2.40 2.55 C -H (in Å) M-H x (en Å) x x (x=β,γ,δ(’)) par rapport à Cx-Hx (gauche) et à M-Hx (droite) pour tous les complexes possédant un BCP agostique. & La Figure 10 concerne maintenant la densité d'énergie cinétique ( K (rC ) ). Cette quantité n'a pas été rapportée en référence 8. L'intervalle des variations est [ -0,002 ; 0,020] . Pour les & composés I et II (Figure 8), nous avons trouvé respectivement 0,0026 et 0,0070, donc K (rC ) ne peut pas être un facteur discriminant entre les liaisons agostiques et les liaisons hydrogènes. Ces valeurs peuvent être comparées à celles obtenues pour des liaisons covalentes comme C-C et C-H : 0,20 et plus. En conclusion, il existe une grande différence (un ou deux ordres de magnitude) entre liaisons covalentes d'un côté et liaisons hydrogènes et agostiques de l'autre, ces dernières semblant caractérisées par des valeurs faibles de la densité 0.030 β 0.030 γ β () δ' 0.025 γ () 0.025 0.020 & K (Kr(cr&)) δ' 0.020 0.015 & K (Kr(cr&)) c (in a.u.) 0.015 c (in a.u.) 0.010 0.010 0.005 0.005 0.000 0.000 1.110 1.125 1.140 1.155 1.170 1.80 Cx-Hx (en Å) Cx-Hx (in Å) 1.95 2.10 2.25 2.40 2.55 M-Hx (en Å) M-Hx (in Å ) Figure 10 : Variations de K ( rC ) (x=β,γ,δ(’)) par rapport à Cx-Hx (gauche) et à M-Hx (droite) pour tous les & complexes possédant un BCP agostique. En définitive, comme aucune régression monolinéaire n'est convaincante, la possibilité d'une régression multilinéaire a été explorée (en considérant la totalité de la base des 23 complexes et de tous les types d'agostiques), obtenant (cf Figure 11) : & & & & C x -H x = 1,1465 − 0, 0007 % ( MH x ) + 0, 0018∆ % MHx − 0, 0522 ρ ( rc ) − 0,14529 L ( rc ) − 0, 0004ε ( rc ) + 1, 7130 K ( rc ) (7.3) M -H x = 2, 8618 − 0, 0119% ( MH x ) + 0, 0884∆% MHx & & & & + 1, 5119 ρ ( rc ) + 0, 3063L ( rc ) + 0, 0096ε ( rc ) + 7, 0871K ( rc ). (7.4) Les co efficients de régression linéaire R2 sont respectiv ement égaux à 0,576 et 0,482. Il apparaît donc qu'il n'existe pas de relations linéaires entre des quantités QTAIM (aux BCPs) et les principales distances géométriques. Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM 2.6 1.17 2.5 M-Hx M-H modèle AIM AIM model ((en in Å)Å) x Cx-HxCmodèle AIM(in(en -Hx AIM model Å) Å) x 1.16 1.15 1.14 1.13 1.12 1.11 1.10 1.10 2.4 2.3 2.2 2.1 2.0 1.9 1.8 1.7 1.11 1.12 1.13 1.14 1.15 1.16 1.17 1.8 Cx-Hx calc (in Å) Cx-Hx calc (en Å) 2.0 2.2 2.4 2.6 M-Hx calc (in Å) M-Hx calc (en Å) Figure 11 : Vues des régressions multilinéaires réalisées à partir des seuls descripteurs QTAIM locaux pour CxHx (gauche) et M-Hx (droite). Face à cet "écueil", une autre stratégie a été explorée, qui peut être appliquée pour des liaisons agostiques et des interactions agostiques. Elle consiste à exploiter les BCPs des liaisons C-H. Pour Q une quantité QTAIM donnée, on définit la déviation ∆Q suivante : ∆Q = Q ( BCP pour C -H Ago ) − Q ( BCP pour C -H nonAgo ) , où nonAgo fait référence à la plus courte distance de liaison C-H. Six nouveaux descripteurs sont définis : ∆%(CH x ) , ∆∆%CH x , ∆ρ , ∆∇ 2 ρ , ∆ε et ∆K . Ces valeurs ∆Q ne sont plus locales puisque chacune exprime une différence entre deux valeurs obtenues à deux BCPs différents. L'idée sous-jacente est que les différences topologiques entre les liaisons C-H agostiques et non-agostiques peuvent conduire aux différences géométriques. La Figure 12 présente la régression multilinéaire obtenue pour ∆ Cx -H x . Le modèle correspondant (incluant tous les agostiques β , γ , δ et δ ' , qu'il y ait ou non un BCP avec le métal) est donné par l'équation suivante : Cx − Hx = 0, 0097 − 0, 0039∆ % ( CH x ) − 0, 0682∆∆% CHx − 0, 4038∆ρ − 0, 0170∆L − 0, 0204∆ε − 0, 2187 ∆K . (7.5) La valeur du coefficient de régression linéaire (R2 = 0,748) montre que cette autre stratégie d'approche pour caractériser la liaison agostique, fondée sur des valeurs relatives (et non absolues comme précédemment), n'est pas concluante. En conclusion, l'élongation relative C-H a été corrélée avec succès à la longueur maximale de la liaison C-H, mais aucune autre corrélation de ce type n'a pu être établie entre des quantités QTAIM, ou entre des paramètres géométriques et des quantités QTAIM, en utilisant des valeurs absolues ou relatives. Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM 0.08 ∆Cx-Hx AIM model (in Å) ̈Cx-Hx modèle AIM (en Å) 0.07 0.06 0.05 0.04 0.03 0.02 0.01 0.01 0.02 0.03 0.04 0.05 0.06 0.07 0.08 ∆Cx-Hx calc(en (in Å) Å) ̈Cx-Hx calc Figure 12 : Vue de la régression multilinéaire obtenue à partir des seules quantités QTAIM ∆Q (voir texte pour les détails) pour ∆Cx-Hx. Par ailleurs, le statut particulier des atomes d'hydrogène ȕ agostiques a été mis en exergue. De plus, nous avons montré qu'il n'est pas possible de différencier des liaisons hydrogènes et des liaisons agostiques, en utilisant seulement des descripteurs QTAIM locaux, les intervalles proposés en référence 8 ayant été considérablement étendus pour les deux types de liaisons. Enfin, la faiblesse particulière des valeurs de densité d'énergie cinétique aux BCPs, pour des liaisons hydrogènes ou agostiques par rapport à des liaisons covalentes, a été soulignée. VII.3.4. Les BCPs métal-méthyl agostiques La quantité de BCPs métal-hydrogène trouvée précédemment, en présence d'un H agostique, n'est pas élevée. Dans cette section, nous exposons un élément d'explication à cela. Dans quelques cas où il n'y a pas de BCP entre le métal et l'hydrogène agostique, un BCP entre le métal et le carbone qui porte cet hydrogène a été identifié. Cela est corroboré par deux ˆ ˆ exemples de liaisons agostiques ( Cr -Cδ dans CrIIαδˆ et V -Cδ dans VIIIβδ ) représentés sous la forme de graphiques, dits graphiques moléculaires, en Figure 13. Un tel cas a aussi été ˆ ˆ ˆ ' αδ rencontré pour les complexes suivants : Mn-Cδ ' dans Mnαδ et V -Cγ II , Mn-Cδ dans MnII dans VIIIγδ ' . Les BPs correspondants sont parfois particulièrement non rectilignes (spécialement pour V -Cγ dans VIIIγδ ' ). Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM ˆˆ αδ Figure 13 : Graphiques moléculaires pour CrII (gauche) et ˆ VIIIβδ (droite). Le BCP entre le métal et l'atome C est noté par un carré noir et le BP est représenté par une ligne épaisse noire et continue. Il y a aussi un BCP entre C et H (carré noir). Les noyaux qui se trouvent dans le plan de la projection sont représentés par des cercles noirs pleins, ceux qui sortent de ce plan sont représentés par des cercles noirs vides ; dans les deux cas, tous les points qui sont à une distance du plan inférieure à 0,3 bohr ont été considérés comme appartenant au plan . Plus intéressant, les principales propriétés QTAIM locales trouvées à ces BCPs sont proches de celles obtenues aux BCPs des liaisons métal-hydrogène : pour l'instant, les densités pour ˆ ˆ Cr -Cδ dans CrIIαδˆ et V -Cδ dans VIIIβδ sont respectivement égales à 0,053 et 0,041, tandis que & les valeurs L(rC ) sont -0,022 et -0,148. Plus généralement, pour tous les BCPs métal-carbone & reportés dans cette section, les valeurs de densités et de L(rC ) s'étendent dans les intervalles définis en section VII.3.3. La principale caractéristique qui les distingue des BCPs métalhydrogène est que leur position est particulièrement éloignée de la ligne métal-hydrogène (leur valeur ∆ % MH x est supérieure à 5,9). Ainsi, une autre catégorie apparaît : des interactions agostiques (puisqu'il n'y a pas de BCP entre le métal et l'hydrogène agostique) avec un BCP entre le métal et le carbone. Il existe aussi des interactions agostiques sans BCP : une telle situation est caractéristique des cas agostiques.31 Comme il peut exister un BCP entre le métal et l'hydrogène ou entre le métal et le carbone, nous sommes tentés d'introduire ces deux cas dans un seul et même groupe : celui des liaisons agostiques métal-méthyl. Il doit être ajouté qu'aucune situation n'a été trouvée pour laquelle il existe simultanément un BCP entre le métal et l'hydrogène et un BCP entre le Chapitre VII de l'agost par des AIM métal et le carbone correspondant. Il doit aussi être précisé que nous n'avons pas observé de cas où un BCP agostique existe entre le métal et le carbone sans hydrogène agostique.32 (Rappelons aussi qu'il n'y a pas de BCP entre un hydrogène et un métal sans atome H agostique). Ces définitions établies, une topologie complète de l'agosticité peut être obtenue, qui est représentée en Figure 14. r (C-H) > 1,100 Å ? non oui BCP M-H ? pas d'agosticité non oui BCP M-C ? BCP M-C ? non oui non oui interaction agostique liaison agostique liaison agostique pas de cas trouvé interaction métal-méthyl agostique liaison métal-méthyl agostique Figure 14 : Schéma qui décrit notre proposition de classification des agosticités possibles. Finalement, il est intéressant de remarquer que pour des cas H β agostiques, seulement le cas M-H peut exister. Pour γ , δ et δ ' les deux modalités de liaisons agostiques métal-méthyl peuvent se produire. Cette dernière catégorie permet de rassembler un nombre plus important de complexes que ceux appartenant à la sous-classe des liaisons M-H agostiques. Pour l'instant, 100 % des H γ agostiques ont une liaison métal-méthyl ; ce pourcentage égale 66 % pour les cas H δ et H δ ' agostiques ; en d'autres termes, une majorité est obtenue (58 %) quand on considère tous les types d'agostiques. Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM VII.4.Conclusions Par cette étude, nous avons étendu le travail de Popelier et Logothetis8 sur la caractérisation de l'agosticité par des calculs QTAIM, en élargissant le choix des métaux, incluant les métaux de transition tardifs, et des types multiples d'agosticités possibles. Nous avons trouvé qu'aucun critère simple ne peut être proposé pour prédire l'existence ou l'absence de BCPs, ou pour différencier, de manière non équivoque, les types d'agostiques. Par ailleurs, les critères locaux proposés en référence 8 ont été élargis. Ils ont révélé leur inefficacité à pouvoir créer un pont entre des quantités géométriques et topologiques. Cependant, une nouvelle classification a été élaborée, faisant émerger le concept de liaisons métal-méthyl agostiques. Néanmoins, les quantités locales étudiées dans ce chapitre constituent seulement un aspect d'une analyse QTAIM complète. Récemment, des travaux réalisés à l'ENSCP par Vincent Tognetti et al.§ ont permis de désigner de nouveaux descripteurs QTAIM qui pourraient être utiles à une meilleure description de l'agosticité et à la résolution des problèmes qu'elle soulève. De plus, comme il est établi en référence 8, des propriétés intégrées sont probablement plus adaptées pour la description d'un tel problème chimique. Popelier et Logothetis ont notamment montré le rôle de la population électronique et de la stabilisation de l'énergie atomique. Ces deux caractéristiques pourraient permettre de différencier liaisons hydrogènes et liaisons agostiques. Enfin, l'influence du protocole computationnel (qui inclut le choix de la fonctionnelle d'échange-corrélation) doit aussi être considérée.33 § Vincent Tognetti, Laurent Joubert et Carlo Adamo, article en préparation. 219 Chapitre VII : Caractérisation de l'agosticité par des calculs AIM Références bibliographiques 1 Brookhart, M.; Green, M. L. H. J. Organomet. Chem. 1983, 250, 395. 2 Vogt, D. in Applied homogeneous catalysis with organometallic compounds, Vol 1; B. Cornils and W.A. Hermann, Eds.; Wiley: Weinheim, 1996; pp 245-.258. 3 Pantazis, D. A.; McGrady, J. E.; Besora, M.; Maseras, F.; Etienne, M. Organometallics 2008, 27, 1128. 4 (a) Haaland, A.; Scherer, W.; Ruud, K.; McGrady, G. S.; Downs, A. J.; Swang, O. J. Am. Chem. Soc. 1998, 120, 3762. (b) Scherer, W.; Sirsch, P.; Shorokhov, D.; Tafipolsky, M.; McGrady, G. S.; Gullo, E. Chem. Eur. J. 2003, 9, 6057. 5 Eisenstein, O; Jean, Y. J. Am. Chem. Soc. 1985, 107, 1177. 6 (a) Scherer, W.; McGrady, G. S. Angew. Chem. Int. Ed. 2004, 43, 1782. (b) Clot, E.; Eisenstein, O. Struct. Bonding (Berlin) 2004, 113, 1. 7 (a) Bader, R. F. W. Atoms in Molecules: A Quantum Theory; Oxford University Press: Oxford, U.K., 1990.
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3.2.2 Transversalité numérique et décisionnelle Comme déjà exprimé, il serait judicieux que la DGRH et le Pôle Doc renforcent leurs liens et leurs échanges précisément sur la question du suivi des carrières et des trajectoires des agents. La situation décrite du Pôle Doc offre aux deux services l'occasion toute trouvée de se rapprocher, dans la concertation avec leurs partenaires des budgets et de l'informatique. Ce serait là une mise en application de cette transversalité - déjà énoncée dans la première partie - que les RH, les DG et les élus appellent régulièrement de leurs voeux. Le trio techno-socio-politique cher à bien des analystes des structures professionnelles se retrouve là logiquement au complet. 41 Remarquons que la fonction RH a une facette documentaire importante dans le sens où elle consigne son expertise sous des formes variées de documents et s'appuie au long cours sur ceux-ci ainsi que sur d'autres qu'elle collationne au titre du suivi du personnel. En tant que fonction de gestion de flux de personnels et de situations professionnelles, qu'elle documente à proprement parler, elle agrège des documents, leurs contenus et mêle des aspects de communication, d'information et de documentation. Ce constat nous évoque le récent essor des serious games. Nous avons identifié au moins un jeux sérieux dédié aux responsables RH et proposant de fait, à l'intention des impétrants, une mise en situation ludique visant à expliciter les difficultés d'exercice du métier. A partir de cet exemple, qui aide à comprendre une activité par la simulation, le numérique peut être envisagé comme à la fois comme un outil de gestion somme toute classique, relevant de la bureautique pourrait-on dire et, potentiellement, sous des formes à préciser, comme un outil perfectionné d'aide à la décision. 3.2.3 Modélisation des ressources et des parcours L'accès aux savoirs nécessite leur modélisation. C'est aussi de plus en plus le cas des trajectoires professionnelles. En ce sens, le remplacement d'Alexandrie, primordiale pour l'accès aux bonnes sources documentaires, croise techniquement et valorise la question RH de l'évolution professionnelle au sein de la FTP, dans une relation de complémentarité. Il nous semble même qu'une relation d'équivalence dans le processus de réflexion peut apparaître. Les MOOC (15, Skyvington), COOC et autres CPOC remplissent désormais une part de ce travail de scénarisation des carrières, côté candidat et côté recruteur, en proposant leur propre structure décisionnelle. Ils pourraient déstabiliser la fonction RH qui elle aussi devrait s'adapter à la restructuration de son rôle (10, Sia Partners). A ce chapitre, nous mentionnerons aussi Keycoopt, une plateforme de recrutement qui entend marcher sur les brisées des cabinets de recrutement. Le paysage RH est donc lui aussi globalement en voie de restructuration dans le secteur privé. Le secteur public y échappera-t-il? En l'occurence, à RM, dans le cas qui nous occupe, il s'agirait pour l'instance numérique de "participer" à la réflexion de sa propre implémentation et à ses conséquences en termes de RH. Et, paradoxe, il en résulterait peut-être le diagnostic, "assisté par ordinateur", par la simulation, la modélisation, que le renouvellement d'un outil nécessite l'action dédiée d'un agent, malgré un contexte budgétaire défavorable. Soit une proposition opposée à la logique "comptable". La fonction RH, la fonction documentaire et le fait numérique doivent user de leur caractéristique, voire de leur vertu commune de transversalité. Celle-ci fait partie des mots d'ordre, des injonctions structurant les "scripts de l'e-organisation" (36, Carmès, p. 4), qui scénarisent, organisent les échanges entre les actants humains et non humains des ecosystèmes numériques, le "travailler-ensemble" en quelque sorte, modelé par le primat technique. Il en résulte un jeu de coïncidences et d'écarts - comme des feuilles de calque superposés, entre structuration 42 technologique, dynamique social et stratégies de management co-construisant la gestion de processus d'information stabilisés. L'occasion est donnée aux responsables RH de RM, me semble-t-il, d'observer la centralité de cette notion de transversalité pour un service, le Pôle Doc, dont la raison d'être est de l'illustrer le mieux possible et qui leur est lié sur le plan structurel et hiérarchique. Le numérique créant du lien. Analyse des besoins du Pôle Documentation Le second volet de notre mission de stagiaire consistait en une analyse des besoins du Pôle Documentation. Nous nous penchons ici sur les contextes de cette attente puis sur les perspectives dégagées par notre travail. 4.1 Contextes : A en croire de nombreux avis, depuis quelques années, le catalogue est en crise. Au fur et à mesure des évolutions informatiques, le coeur des activités de la bibliothéconomie se voit projeté dans les méandres du web et promis à s'ouvrir à toutes les consultations. La littérature professionnelle, de papier et d'octets, constate que la mue du catalogue se poursuit à vitesse accélérée, passé si vite du papier aux disques durs puis aux flux de données. Le web devient un catalogue universel. La pertinence des outils de gestion traditionnels de bibliothèque en est interrogé, il est nécessaire de faire un état de lieux de la question. 4.1.1 Contexte documentaire 4.1.1.1 Vu d'une instance étatique : le Ministère de la Culture et de la Communication, la conduite d'un projet de SIGB « Après les premières informatisations des bibliothèques au cours des années 1980 à 1990, le mouvement de ré-informatisation entamé lors de la décennie suivante se poursuit en fonction de l'avancée des technologies et des procédures bibliothéconomiques() L'évolution des systèmes d'information (en termes d'architecture, de formats), mais en premier lieu l'obsolescence, voire la disparition du produit et/ou son coût de maintenance conditionnent la nécessité de changer d'outil. Le changement de SIGB s'inscrit désormais dans une démarche globale compte tenu de ses interactions avec d'autres applications. Une ré-informatisation réussie, tant en ce qui concerne les améliorations escomptées que la mise en place proprement dite du SIGB, s'inscrit dans un processus de conduite de projet. Il s'agit pour la bibliothèque de procéder par étapes, de l'analyse de l'existant à la mise en place du nouvel outil, en associant de nombreux acteurs et en étant guidée par des objectifs de performance et de maîtrise des délais et des coûts, dans le respect du cadre juridique. » (48, Groupe de travil Boîte à outils du numérique) 4.1.1.2 Vu d'une instance professionnelle : problématiques territoriales « Les collectivités territoriales sont traversées de problématiques informationnelles et documentaires comparables à celles qui se posent à la société tout entière et qui sont autant de défis à relever : accéder à l'information, à la connaissance, gérer, diffuser, libérer les données, l'information, les documents et les connaissances, collecter et conserver la mémoire territoriale, etc. » (45, Uroz). 44 4.1.2 Contexte technique Le moins que l on puisse dire est que le contexte technique qui conditionne le choix d'un SIGB est riche. Pour le néophyte que nous sommes, il y a là matière à de nombreuses découvertes au gré de véritables catalogues d'abréviations. Deux sources nous semblent incontournables, sûres et se complétant : la Direction générale des médias et des industrie culturelles du MCC, pour sa Boîte à outils du numérique, citée plus haut et le Bulletin des Bibliothèques de France. Dématérialisation des ressources, accès mobile et e-books évoqués par notre correspondant de la DSI restent des questions en suspens. Elles sont pourtant prioritaires et obligent à se projeter vers ce qui influence l'évolution technique des SIGB et va jusqu'à interroger leur pérennité. Dans presque tous les cas, la complexité des bibliothèques numériques tient a" l'articulation avec le reste des collections de la bibliothèque, physiques ou numériques. Souvent hébergées sur des sites à part, les bibliothèques numériques ne sont pas toujours bien répertoriées dans les portails documentaires. L'implantation de moteur de recherche fédérée ou de métacatalogue reste encore souvent à faire. D'autre part assurer la manipulation, la gestion et dans la mesure du possible la conservation des fichiers numériques reste complexe et peut nécessiter des outils de suivi que ne proposent pas les SIGB." (43, Groupe de travail Boîte à outils du numérique) La fonction documentaire implique une action de veille du domaine via par exemple la lecture régulière de "Documentaliste - Sciences de l'information" de l'ADBS Association des professionnels de l'information et de la documentation, reçu par le Pôle Doc, ou du Bulletin des Bibliothèques de France. Celui-ci, en date du 21 novembre 2014, fait ainsi état du succès à méditer de la médiathèque en ligne du Loiret : Loiretek8. 4.2 Analyse des besoins Notre travail d'analyse des besoins du Pôle Documentation décrit les activités du service et propose des pistes pour leur renforcement, en termes documentaires et en termes d'actions. 4.2.1 Enoncé des besoins du Pôle Documentation En janvier 2014, le Pôle Documentation du service CoProD de Rennes Métropole a fait le constat définitif d'une impossibilité de faire évoluer son outil de gestion documentaire Alexandrie V6, lequel fonctionne de plus en plus de manière erratique. Le Pôle Documentation n'attend plus de la société GB Concept, l'installateur et le développeur d'Alexandrie, qu'elle procède aux améliorations de fonctionnement souhaitables et exigibles selon un coût raisonnable, et envisage encore moins de passer à la version 7 du logiciel. Par conséquent, le Pôle Documentation décide de procéder à une migration de ses données sur un nouvel outil, qui garantira évolutivité et facilité de maintenance, dans des limites d'investissement cohérentes avec les possibilités offertes. En ce sens, le choix définitif pourra se porter plutôt, en accrod avec la DSI, sur un logiciel libre qui aura fait ses preuves et dont l'évolution sera garantie au moins par le recours à une communauté active d'utilisateurs. 4.2.2 Description des activités et premières propositions Nous distinguons quatre types d'activités au sein du Pôle Documentation. Pour chacun d'eux, nous faisons quatre premières propositions de renouvellement et de développement. Acquisition de sources d'information Informationcommunication Accès au fonds Politique d'acquisition du Pôle Doc Consultation de documents sur place Par l'Intradoc : interface du Pôle Doc Bibliographies thématiques (concours) Acquisition à la demande : commande d'autres services de RM Emprunts de documents au moment d'une visite au Pôle Doc Par L'intra : intranet de RM, VdeR et CCAS Veilles documentaires, dossiers documentaires à la demande Gestion des abonnements de tous les services de RM Prêts de documents par courrier interne inter-services Midis de la Doc : rencontres entre agents inscrits aux concours Panorama de presse Proposition : accroissement des ressources numériques et de la part du multimédia. Proposition : appropriation par les agents des items : réservation, emprunt, recommandation, commentaire. Proposition : développement d'actions de médiation et de l'accès mobile. Proposition : élargissement et approfondissement de l'offre de produits documentaires. Tableau 8 – Description des activités du Pôle Documentation Le Pôle Doc a trois types de problèmes : - en termes de fonctionnement autour d'un outil obsolète qui conduit à l'alternative : soit remplacement de celui-ci soit creusement du différentiel technique et d'autonomie avec L'intra. - en termes d'efficacité de la partie consultation et prêt, fragilisée dans sa perception ; - en termes de positionnement et d'image : au sein de CoProd et de Rennes Métropole. 4.2.3 La question du public et de ses attentes Ici, il est large et inatteignable rapidement et simplement : pour environ 2000 agents sur 5000 à RM n'ont pas d'accès personnel professionnel direct à L'intra. A notre connaissance, il n'y a pas de sondage disponible ni d'enquête réalisée. Nous réservons donc nos entretiens aux membres de CoProD et à quelques conversations informelles avec les agents venus emprunter un ouvrage. Lors des Midis de la Doc, quelques échanges également sur la question. 47 En fait, la question semble plutôt inversée : le Pôle Doc a besoin d'abord d'un outil performant, récent, qui lui permette d'atteindre tous les agents, d'être en phase avec eux selon leur catégorie et leurs attentes. Ce préalable est connexe au préalable de la possibilité d'accession à L'intra donnée aux agents en interne et de l'extérieur. Or, la question reste épineuse et toujours débattue, principalement au sein de la DSI, en termes de points de vue sur la sécurité des accès. Ce point a également un aspect politique. C'est d'ailleurs une priorité énoncée par l'élu écologiste délégué aux TIC à la mairie de Rennes, lorsque nous l'avons rencontré le 25 juillet 2014 à notre demande. En tant que stagiaire, nous avons considéré que nous devions rencontrer un responsable susceptible d'appuyer un projet de SIGB. Soucieux du service public, de part sa délégation en relation directe avec la DSI, il nous a fait part de son souhait de voir Rennes se doter d'un datacenter municipal garantissant la confidentialité des données personnelles des citoyens. Que L'intra soit fermé à toute consultation d'un terminal extérieur au système municipal, même avec mot de passe professionnel, lui semble dépassé ; bien d'autres villes n'ont pas cette réticence. Dans le même esprit, l'impossibilité pour 2000 agents d'accéder à un ordinateur dans leur service ou sur un terminal mobile est pour lui à lever le plus tôt possible. On le voit, ses projets recoupent précisément les éléments du tryptique équipement, accès, formation. Ce n'est pas étonnant pour un responsable informatique au rectorat. Concernant le Pôle Doc, il nous posera une question simple et directe : "Quel est le projet du service?" Spontanément, il lui semble qu'il ne serait pas saugrenu de l'ouvrir au public puisqu'il s'agit d'un centre de ressources ayant trait à la formation et aux carrières de la fonction publique territoriale. 4.3 Expression fonctionnelle du besoin A ce point de notre travail, et l'ayant annoncé à deux reprises, nous entrevoyons l'expression d'une comparaison entre des SIGB qu'il nous faut échafauder. De fait, sur ce sujet, nous avons compulsé de nombreux sites, feuilleté de nombreux livres, pris de fort nombreuses notes en juillet-août. C'était sans compter avec certaine réunion du 4 septembre où deux interrogations majeures ont perdu tout leur "mystère". Ce rebondissement a abouti au travail remis à la responsable du service le 17 septembre 2014, dernier jour de notre stage, et intitulé "Pour un cahier des charges - travail d'étape". Rappelons que l'obligation du compte-rendu que nous avons produit à l'intention de à la responsable du service était de coller à la réalité de la situation, au contexte en évolution de ce changement d'outil. En tant que travail en cours, il pointait la part d'incertitude qui compliquait ce projet. 48 Ce faisant, il a traduit aussi la part d'étonnement du stagiaire-rédacteur que nous étions et notre déstabilisation face à l'évolution voire aux rebondissements d'une mission très classique dans son énoncé de départ. 4.3.1 "Pour un cahier des charges – travail d'étape" "Objet du cahier des charges : la mention "travail d'étape" en tête de ce document mérite précision. De fait, elle signale une évolution importante dans les attentes et le déroulé de la mission telle que décrite plus haut. A la date de remise de ce travail, la perspective première de remise d'un cahier des charges complet et en quelque sorte prêt à l'emploi a été modifiée par les derniers échanges entre le Pôle Documentation et ses interlocuteurs de la DSI au début du mois de septembre. Dans un contexte métropolitain contraignant d'économies budgétaires, le chiffrage de ce projet est à ce jour très incertain à l'horizon 2015, même a minima, et ne serait que vaine conjecture. Par ailleurs, cette recherche croissante d'efficacité va affecter la gestion globale des effectifs. Elle est défavorable au remplacement de tout poste qui s'avèrerait vacant : la documentaliste à mi-temps du Pôle Doc, enceinte, ne passera donc le témoin à personne. Dans ces conditions - remplacement d'un outil et non-remplacement de la documentaliste, le Pôle Doc et la DSI doivent trouver en interne les ressources nécessaires à la conduite du projet initié. Ainsi, il est demandé au Pôle Doc de réfléchir au redéploiement de ses compétences-métiers. Mais il se trouve que les réflexions des deux services convergent vers le possible choix du SIGB open source PMB. Une présentation du logiciel a été faite en juillet par le directeur de la société PMB Services, développeur-installateur du produit, et elle a été jugée concluante. Par ailleurs, cet outil est bien connu d'un membre de la DSI qui l'a installé sur les postes des deux espaces de lecture rennais Carrefour 18 et Saint-Martin. Il est donc jugé possible par la able de CoProD que le Pôle Doc, même à effectif réduit, en association avec la DSI, parviennent à procéder à ce changement d'outil, en recourant notamment aux nombreuses ressources de la communauté d'utilisateurs de PMB. En conséquence, une ébauche de calendrier a été retenue lors de la réunion du 4 septembre 2014 : • fin 2014 : installation de PMB par la DSI sur un poste du Pôle Doc • reprise des données (export, import) : cette partie de migration est décrite dans le détail par plusieurs sources disponibles • paramétrage-métier • consultation d'utilisateurs au CG 35 et au Rectorat de l'Académie de Rennes • personnalisation • formation. 4.3.2 Note de cadrage méthodologique Cette note de cadrage a été rédigée courant août, avant que ne se précisent formellement les derniers attendus du projet. Son contenu n'en reste pas moins valable. 4.3.2.1 Cadre juridique Nous énoncions dans notre note le cadre juridique de ce type de projet, selon les points suivants : • objet du contrat • lieux d'exécution et de livraison • durée du contrat/marché • caractéristiques principales • critères d'attribution du marché : le Code des marchés publics exige le choix de « l'offre économiquement la plus avantageuse », (42, Collignon, p. 6) • appel d'offres ouvert (52 j) • appel d'offres restreint • dialogue compétitif • remarque : dans le cas d'un marché public, la mention nominale d'un logiciel libre peut être portée au cahier des charges. 4.3.2.2 Cahier des charges Outre sa destination première d'outil de décision, l'objectif assigné à ce travail préparatoire à un cahier des charges était d'être bâti de façon à répondre aux critères généraux définis dans la littérature la plus reconnue sur le le sujet (42, Collignon). Dans l'optique de l'élaboration du document final, nous donnions une définition autorisée d'un cahier des charges : « Le meilleur cahier des charges sera sera toujours l'expression d'un compromis entre les besoins et objectifs du service et la faisabilité technique et financière, basé sur un partenariat bien compris entre utilisateur et prestataire ». (42, Collignon, p. 9) Sous les auspices d'une définition faisant autorité, selon les termes de celle-ci, il s'efforce d'être : - précis - prospectif - concis - réaliste Il s'attache à prendre en compte les recommandations les plus suivies et les mieux illustrées, au premier des s la norme Afnor nf X50-151 devenue nf 16271 du 16/02/2013." 50 Par la suite, nous avons repris cet argumentaire pour introduire à PMB : "Comme déjà exprimé, le rédacteur du présent document est confronté à la récente concomittance de décisions en conflit sinon contradictoires. Alors que les termes initiaux de la mission appelaient à la rédaction d'un cahier des charges, c'est-à-dire la proposition d'un outil visant à expliciter une mise en situation concurrentielle de prestataires potentiels, il est désormais établi qu'il s'agit de vérifier l'offre fonctionnelle fondamentale d'un unique SIGB : PMB donc. 4.3.3 Fiche d'identité de PMB SIGB open source, full web, sous licence CeCILL, téléchargeable gratuitement, code source disponible, multilingue, module de GED. Développé par PMB Services depuis 2002. Eric Robert est le directeur de la société. Forte commun auté : AMC, CITEDOC, PMB-BUG, Espace éducatif9, Edith Boulo10, Fulbi11. L'environnement technique de PMB a été validé par les référénts de la Doc à la DSI. Son interopérabilité vér ifiée, d' abord avec T YPO3 , dédié à L' intra . Dernière version : 4.1, juillet 2014. Les fonctionnalités des tableaux ci-après sont principalement celles de la version 3.4, complétées par des apports des versions suivante. Nous renvoyons à l'annexe 4 détaillant en tableaux descriptifs les fonctionnalités de PMB. 9 ac-rennes.fr/ http://pmb.biblio.free.fr 11 http://www.fulbi.fr/ 10 51 Propositions Nos propositions pour le Pôle Documentation sont orientées selon l'axe majeur de la médiation, du contact avec le public et de l'attention aux nouvelles pratiques numériques, autonomes et mobiles. 5.1 Une meilleure accessibilité La question de l'accessibilité doit être traitée de façon centrale dans le remplacement d'Alexandrie. 5.1.1 Le Pôle Documentation hors les murs A l'évidence, il faut pour le service alléger la charge de gestion du fonds et du prêt pour aller vers l'usager. Symétriquement aux "Midis de la Doc", qui font se déplacer des agents de différents services sur leur pause de midi, le Pôle pourrait faire l'inverse et aller à la rencontre des autres services, dans leurs murs. Retrouver, stimuler le public, aller au-devant de lui, l'accompagner, opérer des décloisonnements. C'est une question de maïeutique, de pédagogie ; une place est à investir. D'où la nécessité d'un espace d'échanges et d'expression : une "agora/carrefour documentaire" où se croisent attentes et idées, où les coups de sondes nécessaires sont données régulièrement par le Pôle Doc. Il y a un parallèle, un comparatif à faire avec les CDI, qui deviennent des centres de formation également pour les adultes des communautés éducatives, profs et encadrants, à en croire l'inspecteur d'académie Jean-Pierre Véran (17, Véran). Un autre exemple est donné par l'association de la "27ème Région" et sa réflexion sur les nouveaux usages d'une médiathèque, dans ses murs et hors de ses murs, en l'occurence dans une logique de développement culturel territorial dans l'Allier. Cette proposition relève du programme Territoires en résidences, soutenu notamment par la Caisse des dépôts et consignations.12 Sur ce point comme les autres, le Pôle Doc doit avoir le temps de faire pour lui-même un important travail de documentation, de recherche. C'est aussi l'occasion de voir comment les autres métiers du document aménagent leur adaptation à l'évolution de la donne numérique. Le 10 avril 2014, à Rennes justement, s'est aux archives départementales d'Ille et Vilaine une journée d'étude intitulée frontalement : "Bibliothécaire aujourd'hui, est-ce encore un métier?". Le slideshare qui la résume est intéressant ; il y est question du déplacement du centre de gravité du métier vers la médiation et le lien social.13 12 http:// fr .slideshare.net/27eregion/residencelesnouveauxusagesdelamediathequelight?next_slideshow=1 13 http://fr.slideshare.net/retiss/bibliothcaires-du-futur-et-futur-des-bibliothques?related=1 52 5.1.2 Appropria tion Déjà, dans un document daté du 7 mars 2007 et intitulé "Note sur l'évolution de la fonction documentaire", la responsable du service proposait : "Travail collaboratif avec les services (Web saisie) : les utilisateurs contribuent à enrichir le contenu de l'intr@doc pour en faire un véritable outil métier. 5.1.3 Accroissement des ressources numériques La responsable du service n'envisage pas d'évolution significative sur ce point en raison d'un manque de moyens. Malgré cet état de fait, il importe, à nos yeux, de contacter dans un premier temps la médiathèque d'Ille &Vilaine, les bibliothèques de Rennes, d'échanger avec elles sur le coeur du problème : la dématérialisation est un fait majeur, historique, industriel. Il serait dommage de ne pas participer à cette évolution. Un rapport émanant d'Idate Consulting & Research, observatoire indépendant de l'économie numérique, et remis en mars 2013 au Ministère de la Culture et de la communication, intitulé : "Etude sur l'offre commerciale de livres numériques à destination des bibliothèques de lecture publique", donne des éléments d'appréciation précis sur ces questions aux nombreuses facettes, qui concernent toute structure de gestion documentaire. 53 "Téléchargement, consultation en ligne ou sur site traduisent en fait trois visions de la place de l'offre de livres numériques dans la bibliothèque : ● une vision de consultation sur place : l'accès aux livres numériques est possible uniquement dans l'enceinte de la bibliothèque ● une vision d'Extranet : la consultation des documents est étendue hors de l'enceinte de la bibliothèque, par connexion à son réseau ● une vision du prêt : les livres numériques peuvent être prêtés, selon des modalités dérivées du livre imprimé. " (45, Idate, p. 55) Ici aussi, à Rennes, se pose la question de l'ouverture ou non à la consultation extérieure du système d'information municipal-métropolitain. Ces points interrogent aussi le choix de tout SIGB et de ses possibilités actuels et à venir comme je l'ai déjà relevé : interfaçage avec les plateformes, accueil de fichiers numériques. "Nous voyons en effet trois modèles s, certes combinables, mais qui peuvent orienter les priorités d'approvisionnement numérique d'une bibliothèque : ● un modèle de réplication : l'ensemble des ouvrages papier a vocation a être disponible en format numérique; la priorité est ici d'acquérir systématiquement les versions papier et numérique. ● un modèle de substitution : certains ouvrages du fonds ne sont plus disponibles qu'en numérique. La priorité est dans ce cas d'arbitrer entre version papier et version numérique. ● un modèle d'extension : le numérique permet avant tout d'étendre les collections via des versions uniquement numériques. La priorité est alors de développer un fonds spécifique en numérique." (50, Idate, p. Ce serait l'occasion de mettre en valeur le service : le e-book serait le "pendant" technique du Pôle Doc au Typo3 de L'intra : à chacun sa solution technique, et de participer à la réflexion générale sur le numérique. 5.2 Des échanges à développer Le Pôle Documentation doit à nos yeux renouveler ses liens avec les sturctures internes et externes à Rennes Métropole qui conditionnent et complètent son action. 5.2.1 Des liens avec le SRC et la DGRH-Formation à renforcer En écho à un développement de la médiation, des échanges plus étroits entre le Pôle Doc et le Service Relation Citoyen (SRC) et la DGRH-Formation sur des questions spécifiques seraient les bienvenus : • contours numériques de l'information délivrée au grand-public (aspect pédagogique de la datavisualisation, de l'histoire municipale officielle et approche wiki) • formation et carrières des agents. • une suggestion de piste de travail : l'illetrisme, Grande cause nationale 2013, porté par le CNFPT et l'ANLCI, qui touche 15% des fonctionnaires de cat. C des trois FP. J'ai parlé de cet axe de travail avec deux agents du service, prêtes à s'investir. 5.2.2 Le CNFPT, référence pour toute collectivité territoriale Quelques pistes possibles à développer avec le CNFPT nous semblent prometteuses : • wiki territorial (avec notamment des lettres d'information documentaire, des dossiers thématiques irrigués notamment par viepublique.fr, ladocumentationfrancaise.fr), dont la devise est « informer, c'est déjà former » • Centres de ressources documentaires des délégations régionales du CNFPT et des INSET, • e-réseaux pour l'émergence d'une culture professionnelle commune • espaces collaboratifs régionaux (Accueil/S'informer) : rien en Bretagne • Service public territorial et magazine du CNFPT (en plus de Localtis), qui exemplarisent la vaste reconfiguration en cours de l'accès à l'information et au savoir. Il en faut la trace sur le possible portail de la Doc à travers une newsletter, dotée d'une ligne éditoriale précise, ainsi que sur L'intra. • autre source importante de données et d'infos : le CNFPT Première couronne IDF qui compte 120 personnes et 2 sites : cnfpt.fr/content/delegation-regionale-premiere-couronne-du-cnfptpartenaire-votre-collectivite 5.3 Médiation Comme nous l'annonçons en titre de ce mémoire, la question de la médiation oriente le renouvellement des activités et propositions du Pôle Documentation. En particulier, l'information literacy représente l'axe privilégié de la consolidation de 55 l'action documentaire au sein de Rennes Métropole. Elle peut être associée à une politique métropolitaine de knowledge management. 5.3.1 En attendant PMB : information literacy et knowledge management Nous avons constaté que la mise en service effective de PMB allait prendre du temps, qu'elle allait nécessiter la formation des agents qui l'utiliseraient et que PMB Services serait sans doute sollicité pour des opérations de paramétrage. Si ce nouvel outil doit à coup sûr favoriser un meilleur fonctionnement du Pôle Doc, il n'est pas la seule condition pour que celui-ci augmente son audience et son influence auprès des autres services. Dans l'intervalle de temps - au moins un semestre - correspondant à cette mise en oeuvre, il nous semble qu'il serait judicieux pour le Pôle Doc de lancer des actions de sensibilisation autour de l'information literacy auprès des services. Elles gagneraient même à ne pas être axées dans un premier temps sur la question de la compétence numérique mais sur la formulation des besoins et des attentes des agents et des services entermes d'accès à des catégories spécifiques d'informations. Cette première étape comporte déjà une part de déstabilisation et d'inconfort. Elle requiert la définition d'une approche générale, déclinée suivant les spécificités des agents et de leurs métiers. C'est un premier contact qui conditionne la suite, il est donc primordial de se pencher sur ses termes, en concertation avec les hiérarchies concernées. Ces actions pourraient se greffer à des formats d'intervention existant et efficaces : • "Un jour, un métier" qui valorise régulièrement une pratique professionnelle parmi les 250 de Rennes Métropole ; le Pôle Doc pourrait y associer sa fonction médiatrice de mise à disposition de ressources documentaires et donc l'intérêt de la notion d'information literacy comme questionnement de pratiques et de savoirs en évolution. • L'intra s'est rendu auprès des 400 agents de la Direction des Jardins pour une revue de détail de leurs prérogatives et de leur organisation ; le Pôle Doc pourrait à sa manière, identifiable, se projeter vers les autres services et leur proche avenir numérique probable, où l'information literacy aura toute sa place. Après quelques-uns de ces temps d'approche, le Pôle Doc pourrait entamer une politique claire de sensibilisation à cette notion fédératrice de questionnements et d'évolutions incontournables. 5.3.2 La médiation comme positionnement "Dans une société ou les besoins d'accompagnement et de proximité se renouvellent sans cesse, nous devons installer des médiations durables qui 56 s'appuient sur le numérique". La recommandation n°4 du rapport "Citoyens d'une société numérique" (33, Peugeot, p. 26) détermine l'action de médiation comme consubstantielle pourrait-on dire à la vie digitale et citoyenne à venir, une routine au sens de l'informatique. Chaque usage sera automatiquement accompagné d'un projet de médiation. Il y a donc redoublement du fait "médiatif" puisque le numérique se propose comme intermédiaire universel, intermédiation générale. Puisque la société s'annonce à elle-même ce programme, il ne peut qu'en être de même au sein de toute structure qui se pose comme transmetteuse d'information, c'est-à-dire de documents et de sources mais aussi d'un apprentissage de la recherche autonome de ceux-ci. Des media à la médiation : l'info-doc et l'info-com sont de fait des relais de la sphère (voire hypersphère) médiatique en cours de refonte globale du papier aux data et retour. Les bibliothèques publiques ont entamé cette transition. Ainsi, "placé sous la responsabilité des Bibliothèques de Rennes, l'Espace Lecture a pour mission de contribuer à élargir l'offre de lecture publique sur Rennes, afin de diversifier les propositions, les modes d'approche du livre et de la lecture. Un SIGB (PMB) a été choisi et installé pour permettre cette évolution de fonctionnement, cette proposition d'appropriation d'un espace et de sa fonction."15 Nous retrouvons donc, à l'oeuvre en quelque sorte, PMB, en tant qu'outil opensource permettant la mise en place d'une médiation poussée puisqu'elle s'apparente, de fait, une délégation d'action et d'autorité, du bibliothécaire vers l'abonné, moyennant la formation de celui-ci et l'aménagement d'un espace. C'est un bouleversement qui s'opère là. La figure du bibliothécaire en est redessinée. La Responsable de la médiation pour les bibliothèques de Rennes, en convient. Nous avons pu la questionner à ce propos le 10 septembre 2014. Cette professionnelle a connu depuis les années 80 toute les évolutions de ces métiers du livre. Elle constate les réticences des bibliothécaires à aller vers leurs publics et vers la médiation numérique. Il lui apparaît que les documentalistes y sont moins rétifs et sont plus facilement portés à la médiation. 5.4 Vers l'information literacy Le passage pour le Pôle Doc à la valorisation de l'information literacy est en soi une décision d'ordre stratégique, dans un cadre perceptif que nous approchons ici. 5.4.1 Affects et affectations Nous faisons le constat que le travail de constitution d'un comparatif d'applications, sans être inutile, a un temps caché le plus important : l'évolution du service vers l'adaptation assumée et non subie aux évolutions en cours au sein des métiers du document. Ainsi, dans le cadre de CoProD, la doc et la com illustrent, dans la cordialité, la mise en concurrence historique de leurs prérogatives. Ce sont des zones d'influences balisées par un périmètre technique, l'agent-fonctionnaire devenant l'agent (agi) de la technique, son "porte-parole" et son défenseur. Dans cette perspective, un nouvel outil, avec OPAC et fonctions personnalisables trouve d'autant mieux sa raison d'être. Il donne de l'autonomie au Pôle Doc et une reconnaissance visuellement identifiable par tous les agents. Ce dont L'intra bénéficie tous les jours. La demande de reconnaissance professionnelle est une demande d'affection, donc d'affectation professionnelle précise. Affect, affectation, désaffec(ta)tion, les situations et les mots se répondent. La technique affecte les rapports humains et l'humain affecte le rapport à l'outil. De l'affection à l'infection, au virus, au viral : la métaphore clinique dit la "prophylaxie" informatique et numérique. Ici, nous sommes, aussi, dans les affects et cette aspect des choses doit être pris en compte. 5.4.2 Outils et missions En tout cas, nous croyons c'est un troisième terme qui peut mieux coordonner la Doc et la Com : l'autonomie informationnelle, sous deux angles, selon deux facettes. A la com la digital litteracy - si elle le souhaite, à la doc l'information literacy. Dans les deux cas, il y a transmission à un public d'une compétence, plus pratique pour la première, plus analytique pour la seconde. Pédagogie et complémentarité - se servir d'un ordinateur pour faire quelque chose de précis : ou comment rééquilibrer les rayonnements et les périmètres de deux 58 services. Après tout, la doc fournit veilles, dossiers et panoramas à L'intra, qui les met en valeur. En retour, la digital literacy peut servir l'information literacy. La responsable de L'intra nous a d'ailleurs entretenu de son projet de former les agents en demande (ou pas) au B.A.-BA numérique. Cette attente se réduit parfois à une formation à la bureautique courante. A noter que le service de communication interne répond aux multiples sollicitations des agents usagers du numérique, au coup par coup, au gré de leurs difficultés, d'où son constat d'un large besoin de formation. Dans ce contexte, nous n'irons pas jusqu'à dire que nous "incarnons" l'information literacy, nous nous en faisons en quelque sorte le médiateur. Nous accompagnons son "implémentation" possible en tant que notion fédératrice et pouvant rééquilibrer les activités d'un service et leur perception. Il faut rappeler que l'acceptation de la mise en oeuvre d'un nouvel outil n'était pas acquise dans les faits au début du stage, si elle était cependant acquise dans le principe. La responsable du service a été soulagée d'entendre la confirmation de la DSI prononcée de vive x. Au final, nous nous apercevons que c'est le choix définitif de PMB, pragmatique de la part de la DSI - pas de budget - et justifié par un savoir-faire maison, qui a décidé, en sous-texte, à une distance de presque un mois, du constat renouvelé que nous venons de faire de la complémentarité entre doc et com et de leur possible rééquilibrage à travers la notion d'information literacy. Comme nous l'avons exprimé, ce ne fut pas un coup de théâtre - quoique mais un petit rebondissement, la fin d'un suspens, positive. Environnement d'une transition Nous mettons ici l'accent sur des aspects de l'environnement documentaire territorial dans lequel l'information literacy doit s'imposer comme une proposition fédératrice. 6.1 Un paradoxe et une constante Les activités de veilles et de panorama de presse du Pôle Doc s'adressent directement à L'intra et sont prioritaires car leur public est très large et leur contenu lié à l'actualité quotidienne. Aussi, elles donnent l'impression de passer avant le catalogage, le service de prêt et de consultation. Le service est desservi, si l'on peut dire, par cette différence de visibilité. Historiquement, l'activité documentaire a toujours dû se défendre vis à vis d'évaluations trop rapides de son apport. Cette fragilité est perceptible à Rennes dans l'absence d'une vision globale et fédératrice des centres de ressources de la part des instances dirigeantes. Par ailleurs, à ce jour, il apparaît que les services documentaires de la ville et de la métropole n'ont pas pu se fédérer et faire valoir leur synergie potentielle. Françoise Noët, chargée d'un projet de gouvernance documentaire16 au sein du Conseil général de Seine-Saint-Denis, ne dit pas autre chose : « Il faut sans cesse promouvoir, et surtout prouver la valeur apportée par l'expertise documentaire, afin de défendre les moyens à y consacrer. Dans la période actuelle, il faut innover pour que cette valeur ajoutée soit en adéquation aux nouveaux besoins, donc faire évoluer nos pratiques professionnelles. » (4O, Noët, p. 47) Le changement d'outil attendu peut et doit être un outil de changement pour le Pôle Doc. 6.2 D'un projet ouvert à l'imposition d'une solution technique Notre mission a donc connu une évolution soudaine sous la contrainte d'un resserrement budgétaire global. Ce fut un aléa pas une mauvaise ni une réelle surprise. D'autant que la solution PMB rapproche le Pôle doc à la fois de deux espaces de lectures rennais et de l'Education nationale-Rectorat-Académie de Rennes où il est déployé : un outil rassemble des visées pédagogiques différentes et complémentaires. Il documente des activités et 16 Sur ce sujet central : La gouvernance documentaire dans les organisations françaises. Livre blanc. SerdaLAB. Ce livre blanc présente les enjeux liés à la gouvern ance document aire , les problématiques qui y sont associées et les attentes en la ma tière à partir des résultats d'une en quête menée en 2012 auprès de 230 organisations publiques et privées françaises. Il montre que le concept de gouvernance documentaire est encore dans sa phase de conception dans beaucoup d'organisations et que le fonctionnement à travers l'éclatement des structures documentaires commence à être remis en cause. 60 attribue/redéploie des compétences, en documentation et en bibliothèque-espace de lecture, rapprochant des pratiques-métiers se tenant parfois à distance les unes des autres. Les entretiens, extérieurs précisément, au service, l'ont montré, avec l'élu délégué aux TIC puis la Responsable de la médiation pour les bibliothèques de Rennes, deux professionnels portant un regard critique et une action volontariste ; avec à la clé les constituants de la séquence politique-technique-social. Un paradoxe cependant, constaté mais n'appelant pas plus de commentaires : le remplacement d'un outil et le non-remplacement d'agent. Enfin, signalons un point connu des professionnels, qui aura un impact sur l'installation de PM : même si celui-ci est largement installé dans des structures publiques car outil open source, PMB Services est une entreprise privée qui se sait presque incontournable pour son paramétrage. 6.3 Hiérarchies et accès Le Pôle Doc doit tourner à son avantage ces contraintes, ces mises en tension, ces changements autour de l'info-doc, de l'info-com, des RH et de la puissance de la matrice digitale. La question de l'"autonomie numérique" des agents, technique et informationnelle, qui agglomère ces données, constitue un problème d'envergure qui peut devenir un levier. Nous l'avons relevé, l'histoire du Pôle Doc est aussi traversée par la question des échelons et du statut de cadre A ou B. Le numérique fournit lui-même un cadre, objectif, technique, opère des recadrages qui n'épargne pas le principe de hiérarchie des catégories. Entre paradigme des échelons et des rôles et syntagme des flux d'informations, l'éventail de leurs échanges et de leurs croisements est large. Une instance technique peut-elle à elle seule générer des décadrages, des décloisonnements assez significatifs qu'ils puissent travailler de l'intérieur, les rapports et les échanges entre catégories d'agents? L'enjeu pour les "agents C" non-connectés est important, en tant que "discriminés numériques" pour 2000 d'entre eux. Le numérique est potentiellement "dé-discriminant". Mais il faut que ce potentiel soit investi par une volonté hiérarchique d'améliorer la socialisation professionnelle des agents. Cela est vrai au sein d'une collectivité territoriale telle que Rennes Métropole comme sur le plan de la communauté nationale. Cette question de l'accès au numérique et aux compétences qui l'accompagnent y atteint aussi un point critique, au sens où elle nécessiterait un état des lieux approfondi et des actions vigoureuses et pertinentes pour compenser les écarts constatés. C'est l'une des origines ces trois dernières années de la floraison de rapports et d' études sur le déploiement du numérique et ses conditions politiques. L'information literacy est au coeur de ces questionnements, elle nous semble être un espace à conquérir pour et par les documentalistes et les agents des collectivités territoriales. C'est à cette perspective d'ouverture voire d'émancipation que nous allons consacrer le troisième temps de ce mémoire. 61 Porteuse d'une réévaluation et d'une valorisation du métier de documentaliste, l'information literacy pourrait même dans le contexte territorial, susciter l'esquisse d'un écosystème documentaire rennais et métropolitain. Elle est directement reliée à ce constat de Valérie Peugeot, Vice-présidente du Conseil national du numérique, dans son rapport "Citoyens d'une société numérique" (33, Peugeot, p. 3) : " Nous sommes entrés dans une phase permanente d'apprentissage collectif et de remise en cause personnelle ". Troisième partie Information literacy et médiation documentaire L'Information literacy : contours et enjeux Nous développons dans cette troisième partie l'intérêt majeur à nos yeux de l'information literacy comme axe de médiation documentaire en général et pour le Pôle Documentation de Rennes Métropole en particulier. Nous la relions aux questions citoyennes qui traversent la société démocratique en mal de renouvellement. 7.1 Dé finition (s) Nous revenons ici à la définition l'information literacy et à ses facettes. Celles-ci en font un concept opératoire, un outil de pensée propre à étayer toute réflexion sur l'évolution de la fonction documentaire. 7.1.1 Littératies(s) Intitulée "La culture de l'information en reformation", la thèse d'Olivier Le Deuff parcourt les déclinaison du terme literacy (29, Deuff, p. 200) : Tableau 9 – Les différents types de literacy selon O. Le Deuff 64 Olivier Le Deuff indique (29, Deuff, p. 15) : " notre but est également de montrer l'importance d'une culture technique qui ne peut être dissociée d'une véritable culture de l'information ". Il propose que, pour parler de la culture de l'information, il faille en être soi-même détenteur (ainsi plus haut quand nous disons "incarner" l'information literacy, en tant qu'intermédiaire). L'évolution de la notion de "culture de l'information", selon une enquête-métier (professeur-documentaliste, bibliothécaire, documentaliste), se fait de la formation à des outils de recherche d'information à une formation plus large reposant une culture de l'information. La dimension technique est centrale. Elle réclame la mémoire des techniques intellectuelles. De son côté, Valérie Peugeot (33, Peugeot, p. 39) bâtit son propos autour d'une notion plus instrumentale, celle de la littératie numérique : c'est "l'aptitude à comprendre et à utiliser le numérique dans la vie courante, à la maison, au travail et dans la collectivité en vue d'atteindre des buts personnels et d'étendre ses compétences et capacités". Il s'agit d'un "bouquet de compétences et de connaissances", d'un "concept évolutif". Le point de discussion se trouve bien là, dans la part de savoirs et la part de savoirs-faire en quelque sorte, on le verra par la suite. Valérie Peugeot définit quatre grands axes de développement : accès étendu, littératie, pouvoir d'agir, médiation ; ils doivent aussi permettre de faire diminuer l illetrisme numérique au sein de la société. Le propos de Le Deuff est de montrer (29, Deuff, p. 45) une équivalence entre culture de l'information et information literacy. Il consacre beaucoup de pages (29, Deuff, p. 138) à des questions de traduction, d'aires culturelles : difficile de s'entendre sur les mots entre toutes ces langues. Justement, celles-ci ont été porteuses de visions du monde, de cultures avant d'être les canaux de la notion d'information, terme dont la forme sonore et scripturale est compréhensible dans la plupart des langues occidentales. Le Deuff pointe le lien entre culture et information. De fait, tout fait culturel devient donnée informationnelle par l'action du code informatique. La gangue des langages de programmation fait information de tout. 7.1.2 Information literacy On le constate, l'information literacy a une existence en tant que principe d'autonomie intellectuelle avant le numérique et hors de lui. Mais désormais, et cela sera de plus en plus vrai, elle s'appuie sur une familiarité avec le monde numérique qui relève aussi d'une autonomie identifiable et mesurable. Nous considérons que l'information est le terme le plus générique et le plus souple pour englober tout type de document en tant que donnée susceptible d'un traitement intellectuel et numérique. Nous entendrons dans la suite de notre travail l'information literacy comme une compétence, une pratique et une attitude exercées et adoptée de façon autonome par un individu dans la sphère professionnelle et privée. L'introduction à l'information literacy est à la fois une médiation à l'information et une médiation aux outils de la médiation informationnelle en tant que recherche, collecte, analyse et ordonnancement de l'information. Elle nécessite chez le documentaliste-formateur une réflexion sur sa responsabilité et son positionnement pédagogique vis à vis de son public. Celui-ci, en retour, doit pouvoir préciser son attente, sur un mode participatif, et éprouver les termes de son apprentissage et de ses progrès. Il apparaît que la mise en place d'une politique de formation ambitieuse à l'information literacy comme espace d'acquisitions et d'échanges revêt un enjeu managérial important qu'il convient dans chaque cas de délimiter. Elle réclame donc la participation des différentes instances de la structure professionnelle concernée. Elle a est susceptible d'y opérer une remise en question voire une recomposition des processus décisionnels. Lorsqu'elle intervient comme une modalité de la formation tout au long de la vie, elle y reprend le fil interrompu des apprentissages scolaires et universitaires, aux 66 retentissements si personnels en chacun de nous ; à ce titre, ses contours doivent être soigneusement définis. 7.2 Les recommandations officielles et leurs applications Très utilisée dans le milieu universitaire, la notion d'information literacy l'est également dans la sphère des instances officielles pour la description détaillée de son champ sémantique et de ses traductions pratiques. 7.2.1 Unesco Emanant des travaux d'un Sommet mondial sur la société de l'information de 2013 organisé par l'Unesco, un document intitulé Concept Relationship of Information Literacy and Media Literacy in Knowledge Societies (35, Unesco) donne la parole à des chercheurs détaillant les rapports, la complémentarité et la convergence entre information literacy et media literacy dans la société dite de la connaissance. Il est détaillé dans ces articles (35, Unesco, Lau, p. 80) que ces deux types de literacy, une fois acquises, doivent permettre à tout individu d'exercer face à l'information sous toutes ses formes son autonomie de jugement, sa capacité critique dans la société démocratique et d'économie de marché. Nous renvoyons à un tableau qui synthétise cet intéressant comparatif (annexe 6). Nous le considérons comme un document à retenir pour l'énonciation et l'explicitation auprès de son public d'un projet de formation à l'information literacy. Il est également mis en évidence que trois groupes de compétences sont attendues du "travailleur de la connaissance" (35, Unesco, Drucker, p. 29) : conceptuellles, pratiques, humaines. Information literacy et media literacy sont définies ici comme des compétences d'ordre pratique. 7.2.2 European e-Competence Framework Issu du Comité européen de normalisation (CEN) - dont l'Afnor est membre de droit, le Guide d'utilisation pour l'application du référentiel européen des compétences informatiques 2.0 (e-CF) s'adresse aux professionnels de l'informatique, responsables RH, partenaires éducatifs et sociaux en Europe. Aligné sur sur les catégories EQF (European Qualification Framework), il se présente comme "un outil de référence commun susceptible d'être mis en oeuvre conformément aux besoins des acteurs informatiques et des individus." (28, CEN, p. 8) Nous en retenons notamment qu'il a permis l'élaboration d'un outil gratuit de création de profils e-CF18, dans le champ de l'emploi comme dans celui de l'éducation. Son utilisation explicite l'intérêt du référentiel, par la génération d'un profil pour chaque utilisateur, notamment selon cinq domaines identifiés d'ecompétences : • planifier • développer • utiliser 18 ecompetences.eu : http://www.ecompetences.eu 67 • faciliter • gérer. Le tableau des niveaux e-CF européens qu'il présente (annexe 7), croisés avec la description des niveaux EQF (éducation et formation tout au long de la vie), suggère la nécessité d'une réflexion approfondie et précise sur les objectifs à atteindre par une projet de formation autour des compétences en digital literacy, media literacy et information literacy. Il nous apparaît que ce guide doit constituer une base d'échange avec toute DSI et toute DGRH susceptibles d'y être associées. 7.2.3 Le numérique comme support de formation : l'exemple du Cefrio Le Cefrio est au Québec le Centre facilitant la recherche et l'innovation dans les organisations ; il regroupe des universitaires, des industriels et des responsables gouvernementaux autour de l'appropriation et l'utilisation du numérique dans la société civile et les entreprises. Il a produit en 2014 un Guide de bonnes pratiques pour le développement des compétences par le numérique (annexe 8) : une façon d'acclimater une personne en formation au numérique tout en lui permettant d'acquérir les savoirs visés. (27, Beaudoin, p. 12) C'est envisager le numérique comme support de formation et comme support à la formation au numérique lui-même. On retrouve là le principe de réflexivité qui le caractérise et s'exprime dans la réversibilité des expressions créées à partir de lui. Cette approche est une forme de "détour" pédagogique. Il est ainsi évité un abord frontal, intimidant voire bloquant pour l'apprenant. Ce point nous semble très intéressant à retenir pour structurer une proposition de dispositif de formation s'adressant à tout type de structure professionnelle, du privé ou du public. Le propos du Cefrio est fondé sur le constat que tous les métiers sont ou vont être impactés par le numérique et que l'enjeu de formation concerne de plus en plus les métiers du secteur industriel ou à dimension opératoire, technique, où intervient souvent la manipulation d'appareillages et d'outils, dont le fonctionnement et l'usage demandent des compétences globales liés au numérique. A ce sujet, nous pensons aux nombreux métiers dits de terrain représentés à Rennes Métropole. 7.3 L'information literacy et le Pôle Documentation Nous proposons ici de mesurer les conditions d'acceptation et d'intégration de l'information literacy au sein du Pôle Documentation et à destination des autres 7.3.1 Vision du Pôle Documentation Il convient d'abord de faire le point sur la représentation que se font les autres membres de CoProD du Pôle Doc et leur perception de l'information literacy, en lien avec la question de l'évolution professionnelle des agents de la FTP. 68 7.3.1.1 Un rôle classique "Apprentissage collectif et remise en cause personnelle" : ce constat en forme de dyptique fait par Val érie Peugeot, cité en fin de deuxième partie , à usage généraliste des évolutions en cours, résonne comme une caractérisation de la problématique-métier des documentalistes aujourd'hui et de biens d'autres sphères professionnelles. Ainsi, relevons, dans cette déstabilisation générale, celle du journalisme sous toute ses formes. La réponse donnée est celle des web documentaires qui mêlent tous les médias, avec bonheur, ampleur ; complémentarité entre média employés, force de l'information et centralité du document : un exemple de complémentarité entre communication et documentation. (32, Le Monde) La notion d'apprentissage est présente dès notre introduction à ce mémoire : à l'occasion de la reconfiguration organisationnelle possible du Pôle Doc, comment accompagner, planifier la projection de celui-ci vers l'information literacy comme un des axes du travail de médiation du service à destination des agents? Cette nouvelle tâche demanderait elle-même au service une phase d'apprentissage, sans doute de formation. Mais, nous l'avons vu, les seuls choix et mise en place d'un nouvel SIGB ouvrant à plus de médiation sont aussi tributaires du nonremplacement d'un agent pour raison budgétaire. Ce renouveau des activités du Pôle Doc est cependant bien vu comme indispensable par les membres de CoProD avec chacun desquels nous avons eu un entretien individuel en dernière partie de stage. Comme nous l'avons dit, leurs propos ont constitué un ensemble de références, de points de vue que nous avons eus à l'esprit pendant la rédaction de ce mémoire sans forcément les citer. Mais il convient d'y revenir plus précisément à ce moment de notre travail - à ses deux tiers, tandis que notre stage était alors à ses trois-quart. Au cours de chaque entretien, nous avons abordé avec eux la question de la culture générale, dans l'optique des concours de la fonction publique mais aussi dans l'idée qu'une structure publique doit être soucieuse d'un accès facilité à la culture, en général, pour ses agents. Des visites de structures culturelles – musées, opéra – notamment sont organisées pour eux pendant les pauses-déjeuner.
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Les théories du nationalisme et du fait national, dans leur immense majorité, sont dominées par une dichotomie conceptuelle entre nations civiques et nations ethniques. Cette opposition, qui a trouvé sa modélisation la plus explicite dans l'oeuvre de Hans Kohn [notamment Kohn, 1944], au milieu du vingtième siècle, veut qu'il y ait des nations et des nationalismes dont le ressort essentiel serait un lien civique qui unirait les citoyens dans une communauté politique tandis qu'à l'opposé existeraient des nations et des nationalismes dont le ressort serait essentiellement ethnique. Cette dichotomie conceptuelle se double, de plus, d'une distinction géographique et empirique entre les nations et nationalismes d'Europe de l'Ouest et des Etats-Unis, qui seraient les incarnations du nationalisme civique, et les nations et nationalismes d'Europe de l'Est qui seraient, pour leur part, les produits de la conception ethnique de la nation. Bien qu'elle fasse l'objet, depuis une quinzaine d'années, de débats et de remises en questions [Dieckhoff, 1996 ; Yack, 1999 ; Kaufmann, 2000 ; Kuzio, 2002 ; Shulman, 2002], on constate que cette opposition reste très présente dans le champ des sciences sociales et politiques. Notre propos, dans les pages qui suivent, sera, dans un premier temps, de montrer que cette opposition repose très largement sur des a priori idéologiques. En effet, nous verrons que cette dichotomie analytique est l'héritière d'une opposition, classique dans la pensée politique occidentale, entre deux conceptions du lien social et politique : l'une que l'on peut qualifier de « communautaire » et l'autre que l'on peut qualifier de « sociétaire ». Nous soutiendrons que, tout comme sa matrice, la variante qui oppose nation ethnique et nation civique est une opposition très marquée idéologiquement et que, par conséquent, il convient d'être 1 prudent quant à sa valeur analytique. Dans le même sens, nous soulignerons que cette opposition, avant d'être reprise pour l'analyse du fait national, a d'abord été opposition idéologique entre des nationalismes. Ces deux conceptions de la nation semblent en effet s'être polarisées l'une contre l'autre, notamment dans le débat franco-allemand. A travers l'analyse de certains textes et auteurs tenus pour être fondateurs de chacune des deux conceptions de la nation, nous montrerons que ces deux « traditions » sont très largement « inventées », notamment par des lectures tronquées et partielles de ces textes. Notre attention portera plus particulièrement sur les « traditions nationalistes » françaises et allemandes qui sont généralement retenues comme les incarnations « idéales », ou du moins les plus accomplies, de ces deux conceptions de la nation. Par cet examen, nous verrons qu'en France comme en Allemagne, les deux dimensions, civique et ethnique, sont présentes. Cette critique de l'opposition nation civique/nation ethnique nous conduira a adopter l'idée qu'il n'existe pas deux mais une seule idée moderne de nation. Mais faire le constat d'une combinaison d'ethnique et de civique dans l'idée moderne de nation n'est pas suffisant, à moins d'admettre qu'elle est le fruit du hasard ou d'une ruse (encore une!) de l'Histoire. En soulignant cette dualité de l'idée moderne de nation, nous soulevons la question de l'explication à donner à la combinaison de ces deux dimensions. Comment se fait leur articulation? Et à quelle logique répond-t-elle? La seconde partie de ce texte sera précisément consacrée à l'examen de certains aspects de cette relation complexe mais néanmoins étroite entre dimension ethnique et dimension civique dans l'idée moderne de nation. Pour comprendre le sens de ce double fondement de la nation moderne, nous ferons un détour par cette réalité, indissociable de la nation moderne, qu'est l'État. En effet, la nation moderne ne peut être comprise si l'on ne la réinscrit pas dans le contexte historique et empirique qui l'a vue émerger : celui de l'État moderne. L' ère du nationalisme est celui d'un précepte : « une nation, un État », à moins que ce ne soit « un État, une nation »? [Gellner, 1989] 2 Or, en Europe de l'Ouest, le processus de construction étatique débute bien avant l'ère du nationalisme. Nous nous demanderons, par conséquent, si l'explication à la dualité fondamentale de l'idée moderne de nation – à fois communauté civique et communauté ethnique – n'est pas à rechercher dans le tournant démocratique qui a façonné l'État moderne. A travers, le cas de la France, nous verrons comment dans l'État monarchique le terme « nation » en est progressivement venu à désigner, non plus un groupe ethnolinguistique, mais la population du royaume. I. Nation civique/nation ethnique : une opposition idéologique Mais revenons d'abord sur la distinction entre nations civiques et nations ethniques. Comme le remarque Bernard Yack, « la dichotomie civique/ethnique est parallèle à une série d'autres oppositions, ce qui devrait tirer le signal d'alarme : pas seulement Ouest/Est, mais aussi rationnel/émotionnel, volontaire/hérité, bon/mauvais, nôtre/leur » [Yack, 1999, p. 109]. Cette superposition des dichotomies doit nous rendre prudents et attire l'attention sur les enjeux idéologiques qui ont participé à donner forme à cette opposition « conceptuelle ». Comme souvent, l'analyse politique et sociologique semble très largement « polluée » par le réel qu'elle est sensée décrire [voir Simon, 2002]. Au niveau théorique, les enjeux idéologiques de cette opposition transparaissent dans les similitudes qu'elle présente avec l'opposition, paradigmatique dans la l'histoire de la pensée moderne, entre deux conceptions du lien social : la communauté et la société. La liste d'oppositions donnée par Yack – rationnel/émotionnel, volontaire/hérité, bon/mauvais et nôtre/leur – pour caractériser l'opposition civique/ethnique est en effet également applicable à l'opposition générique entre communauté et société. L'opposition conceptuelle apparaît donc comme étant partie prenante d'une opposition idéologique entre deux conceptions de ce qu'est et de ce que doit être le lien social. Au niveau empirique, nous considérerons que si l'opposition conceptuelle ethnique/civique se double d'une dichotomie géographie entre nations de l'Est et nations de l'Ouest, c'est qu'elle a largement été construite à partir de l'observation des États-nations européens – notamment français et allemand – et des argument nationalistes qui 4 s'y sont formés. Alors, que l'on pourrait estimer que ce fondement empirique constitue un gage de validité de l'opposition conceptuelle, nous considérerons qu'elle est bien d'avantage une seconde source de « pollution » idéologique. Mais avant d'aborder les relations entre ces trois oppositions – nation ethnique/nation civique, communauté/société, Est/Ouest – quelques remarques préliminaires s'imposent sur les fondements théoriques à partir desquels nous allons les aborder. Les imaginaires sociaux Dans un ouvrage éclairant, Benedict Anderson parle des nations comme de « communautés imaginées », soulignant ainsi que « même les membres de la plus petite des nations ne connaîtront jamais la plupart de leurs concitoyens, » et ce « bien que dans l'esprit de chacun vive l'image de leur communion » [Anderson, p. 19]. 5 Doit-on conclure des approches d'Anderson et Weber que les nations sont des faits totalement subjectifs, relevant uniquement de la croyance? Certainement pas. Car dans ce cas, on devrait parler de communautés imaginaires. Parler de communautés imaginées indique, au contraire, que si les nations sont les fruits d'imaginaires nationaux, elles n'en ont pas moins une existence objective. Comme l'expriment si clairement Peter Berger et Thomas Luckman dans La construction sociale de la réalité, toute réalité subjective s'incarne, s'actualise dans des institutions qui relèvent pour leur part de la réalité objective, tandis qu'en retour elle est déterminée et produite par la réalité objective [Berger et Luckman, 1986]. Ces relations dialectiques entre réalités subjectives – ici, les imaginaires nationaux – et réalités objectives – les États-nations historiques – doivent être au coeur de toute approche du fait national. Et partir de la réalité subjective ou des imaginaires sociaux ne signifie aucunement qu'un primat ou quelque primordialité théorique soit accordée à ces aspects de la réalité sociale. Simplement que, d'un point de vue méthodologique, nous pensons que pour saisir une réalité donnée dans sa totalité – à la fois dans ses aspects objectifs et subjectifs – il est préférable de partir des représentations et des catégories des acteurs sociaux. Cette approche de la réalité à partir des représentations sociales permet notamment d'analyser les enjeux idéologiques liés à cette réalité et donc d'éviter de les reprendre à son compte dans l'analyse. La compréhension des représentations sociales liées à un fait social donné permet ainsi de diminuer le risque d'imprégnation de l'analyse par les idéologies. En déconstruisant les prénotions et évidences utilisées par les acteurs eux-mêmes dans le jeu social, il est plus a isé de reconstruire des outils et concepts détachés des enjeux idéologiques. Mais, outre qu'elle met l'accent sur les imaginaires sociaux, l'expression « communautés imaginées » met en évidence le fait que ces unités que l'on qualifie de « communautés » sont, tout autant que celles que l'on qualifie de « sociétés », des construits sociaux. En effet, le terme « société » désigne une collectivité fondée par la volonté et le consentement mutuel de ses membres, ce qui fait qu'une « société » est, par essence pourrait-on dire, imaginée, construite par les acteurs sociaux. La société est fondamentalement une collectivité artificielle. A l'inverse, derrière le terme « communauté » sont classées des collectivités humaines qui seraient fondées soit sur la tradition, soit sur la nature ou encore sur la religion. Mais qui, en aucun cas, ne sont les produits de la volonté des hommes. Parler de « communautés imaginées » permet de rompre avec cette dichotomie simpliste et de souligner que ce que l'on nomme des « communautés » comme ce que l'on nomme des « sociétés » sont, d'un point de vue sociologique, des collectivités socialement construites ou « inventées », même si elles le sont sur la base de « visions du monde » – ou imaginaires sociaux – différentes. Dès lors, l'opposition qui nous intéresse ne se situe pas entre des groupes sociaux de type communautaire et des groupes de type sociétaire, mais entre des imaginaires sociaux différents : des imaginaires de type communautaire et des imaginaires de type sociétaire [Patez, 1998]. Mettre ainsi l'accent sur les imaginaires sociaux permet de se positionner dans une perspective constructiviste des collectivités humaines qui accorde toute sa place à la façon dont les groupes se construisent en référence à la vision qu'ils ont d'eux-mêmes et du lien qui unit leurs membres. Mais surtout, cette approche permet de se prémunir contre la tendance à réifier les « groupes sociaux », dont Weber avait déjà compris qu'ils n'existent que dans l'esprit des acteurs sociaux et des observateurs qui collent trop aux représentations de ces derniers. Seules les relations sociales – réelles et imaginées – constituent le monde social objectif. Les catégorisations en « groupes sociaux » n'existent dans la réalité objective que lorsqu'elles s'actualisent dans des relations sociales concrètes. Or, ce déplacement, du point de vue essentialiste des groupes sociaux – qui ne fait que coller celui des acteurs sociaux – vers une approche qui met l'accent sur les relations sociales, permet également de voir que, dans la plupart des relations sociales, les motifs de type sociétaire et de type communautaire se trouvent mêlés. Mais dire que les nations sont des « communautés imaginées », c'est-à-dire un groupe dont les membres n'entreront jamais tous en relations sociales les uns avec les autres, ne règle pas la question des deux types d'imaginaires sociaux. Ces prémices conceptuels nous permettent 7 simplement de reformuler la question qui nous occupe ici dans des termes plus rigoureux. Il s'agit de savoir s'il existe deux types d'imaginaires nationaux – l'un civique et l'autre ethnique – ou si, à l'inverse, on peut considérer qu'il existe un seul et unique type d'imaginaire national, c'està-dire une seule et même idée moderne de nation. Précisons immédiatement, qu'il ne s'agit pas de remettre en question les différences observables évidentes entre les différents processus de construction des identités nationales. On ne peut nier que, suivant les époques et les contextes particuliers, les idéologies nationales ont pris des formes variées. Cependant, nous devons nous dégager des observations historiques et leur nécessaire diversité pour voir si, à un niveau plus paradigmatique, il n'existe pas une matrice commune de l'idée moderne de nation. La diversité apparente des formes sociales est en effet souvent un voile qui obscurcit la vision et empêche de saisir les régularités et tendances plus fondamentales communes. A trop coller aux représentations et aux imaginaires sociaux des acteurs, les sciences sociales prennent le risque de voir leur regard déformé ou plutôt informé par ces visions du monde et manquer de saisir l'unité derrière la diversité apparente. Communauté et société Précisément, l'opposition entre nations ethniques et nations civiques semble très clairement prise et mise en forme par l'opposition idéologique entre ces deux types génériques d'imaginaires sociaux que sont la communauté et la société. Ces deux conceptions du lien social s'affrontent dans la philosophie politique européenne depuis le XIVe siècle. En effet, après qu'au siècle précédent, la pensée chrétienne ait redécouvert la conception aristotélicienne de l'homme comme être naturellement social et donné un fondement naturel à la communauté, les théories du droit positif envisagent l'organisation de la s comme conventionnelle, c'est-àdire produite par les hommes eux-mêmes. Ainsi, très tôt, la pensée européenne est marquée par une opposition entre une conception 8 naturaliste et une conception artificialiste du social. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, la philosophie rationaliste accentue la critique des conceptions holistes et naturalistes issues de la théologie thomiste et récuse la communauté au profit de la société, fondée sur des principes individualistes [Dumont, 1983]. Les théories contractualistes, dans leurs différentes expressions, illustrent cette conception artificialiste du lien social, pensé comme un pacte volontairement consenti entre des individus naturellement libres et rationnels. Pourtant, dès la seconde moitié du XVIIIe siècle, s'amorce une « redécouverte de la communauté » [Nisbet, 1984, p. 69-79] qui annonce la philosophie du siècle suivant. Rousseau, s'il est une figure importante de la philosophie contractualiste, incarne également ce renouveau des conceptions communautaires du social. Son problème était de trouver un principe d'organisation qui concilie les valeurs de l'individualisme avec le souci de la cohésion sociale. Ce problème de l'articulation entre les principes individualistes et holistes devient central dans la pensée politique du XIXe siècle. La Révolution française semble avoir remis en question l'idéal d'une société, purement artificielle, fondée sur un lien purement rationnel et volontaire. Dans ce doute, la romantique se développe en Europe et propose un autre point de vue sur l'individu moderne : il le réinscrit dans son historicité et sa sensibilité [Hollis et Lukes, 1982]. Cette question de la nature du lien social se retrouve évidemment chez des fondateurs de la sociologie comme Tönnies, Weber et Durkheim qui se rejoignent, au-delà des différences terminologiques et théoriques, pour distinguer deux types généraux d'organisations sociales et pour les insérer dans un schéma évolutionniste similaire : la société, fondée sur la volonté individuelle et la rationalité, est « moderne » ; tandis que la communauté, fondée sur la contrainte collective et la subjectivité, est « traditionnelle ». Ces quelques éléments sur l'opposition entre les conceptions communautaires et sociétaires du social, nous permettent d'y réinscrire l'opposition entre nation civique et nation ethnique. La nation civique est par excellence une société ; la nation ethnique, une communauté. Et les critiques que l'on peut opposer à la division des groupes humains en 9 communautés et sociétés semble valoir également pour la dichotomie ethnique/civique. La première limite de l'opposition communauté/société réside dans le fait qu'elle procède à une simplification abusive du social en définissant deux types idéaux de collectivités humain qui seraient antithétiques. Elle tend à réifier ces « groupes sociaux » au lieu de s'intéresser aux relations sociales dont Weber [Weber, 1971 ; Patez, 1997] a très bien vu qu'elles peuvent être, au sein d'une même collectivité, dans certains cas, de type sociétaire et, dans d'autres, de type communautaire. Bien qu'il reprenne la distinction entre deux grands types de relations sociales – rationnelles et non-rationnelles – Weber avait bien compris qu'il n'existe pas de groupes sociaux qui fonctionneraient uniquement sur des relations communautaires, pas plus qu'il n'existe de groupes fonctionnant exclusivement sur des relations sociétaires. De la même manière, nous soutiendrons qu'il n'y pas d'imaginaires nationaux fonctionnant uniquement sur le registre ethnique ou sur le registre civique, mais qu'au contraire ces deux types d'imaginaires sociaux sont mêlés dans l'idée moderne de nation. La seconde critique que l'on doit adresser à l'opposition entre communauté et société est qu'elle divise l'histoire des sociétés humaines en deux catégories : d'une part, la société caractérise le monde occidental tel qu'il s'est formé depuis le XVIe siècle environ, d'autre part, la catégorie « communautés » regroupe toutes les autres formes de collectivités humaines : non-occidentales et non-modernes. La communauté semble ainsi être définie comme le négatif de la société. Par ce fait même, cette dichotomie révèle qu'elle est le produit d'une pensée politique qui cherche à penser la « modernité » des sociétés européennes. Mais cette opposition, comme tout processus de différenciation, est inévitablement chargée d'une hiérarchisation des termes entre eux. [Simon, 1997]. La société – fondée sur l'adhésion volontaire, libre et rationnelle – est par excellence la forme moderne et donc « bonne » de l'organisation sociale. A l'inverse, la communauté est la forme pré-, voire anti-moderne, des collectivités humaines. L'opposition prend la forme de « Nos Bonnes Sociétés, Rationnelles et Volontaires » contre « Leurs 10 Mauvaises Communautés, Emotionnelles et Contraignantes ». Cette opposition, produit d'un l'Occident convaincu de l'originalité et de la supériorité de sa modernité, est donc comme profondément ethnocentrique. Ce même ethnocentrisme se retrouve dans la dichotomie civique/ethnique, dont Bernard Yack a bien vu qu'elle prend également la forme de : « nos bonnes nations civiques de l'Ouest » opposées à « leurs mauvaises nations ethniques de l'Est ». Ouest/Est L'opposition conceptuelle civique/ethnique se double en effet d'une opposition géographique entre les nations de l'Ouest et les nations de l'Est, dont les incarnations les plus abouties seraient respectivement France et l'Allemagne. Cette inscription géographique s'explique par le fait que l'opposition conceptuelle a très largement été forgée à partir de l'observation des États-nations et des nationalismes européens. Ce fondement empirique, s'il semble de prime abord un gage d'objectivité, présente en fait le défaut de reprendre pour l'analyse les argumentaires et les catégories utilisés par les acteurs eux-mêmes. En effet, avant de devenir une opposition conceptuelle, l'opposition nation ethnique/nation civique a très largement été incarnée dans les débats idéologiques qui ont accompagné les rapports franco-germaniques. Dès le XVIIIe siècle, l'opposition à la France, à sa philosophie et son impérialisme culturel, a joué un rôle central dans la formation de l'imaginaire national allemand. En 1774, dans Une autre philosophie de l'Histoire, Herder vante la richesse des « caractères nationaux » en réaction au cosmopolitisme qu'incarnait en particulier la France. Il déplore que « tous les princes européens déjà, et nous tous bientôt, nous parlerons français! » et craint à travers cela que ne s'impose l'ère où « tous les caractères nationaux sont effacés! nous nous aimons tous, ou plutôt aucun d'entre nous n'a besoin d'aimer les autres ; nous nous fréquentons, nous sommes complètement égaux entre nous, - policés, polis, heureux! » [Herder, 2000, p. 128]. De la même manière, au début 11 du XIXe siècle, la première génération des théoriciens nationalistes allemands formulera clairement sa définition de la nation en opposition à la France. Quand en 1807, Johann Gottlieb Fichte prononce ses Discours à la nation allemande, la Prusse a été défaite par les troupes napoléoniennes. Ces discours visent, selon les mots de leur auteur, à dévoiler « la nouvelle époque, qui peut et doit suivre immédiatement la destruction du règne de l'égoïsme par une puissance étrangère » [Fichte, 1992, p. 43]. Mais l'opposition de Fichte à la France est plus circonstancielle qu'essentielle. Il met l'accent sur la responsabilité de la nation allemande dans la défaite et sur la nécessaire régénération des forces vives de la nation. A l'inverse, Arndt fonde son nationalisme sur une opposition systématique aux caractères supposés du peuple français [Lüsebrink, 1995, p. 117]. « Au caractère français marqué par la sensibilité [], la sociabilité [] et la vivacité [] et l'esprit, mais aussi le manque de profondeur [] et un goût pour les futilités et le luxe, Arndt oppose une mythologie du caractère national [marqué par] sa capacité pour les grandes actions créatrices [], sa profondeur de l'esprit [], sa sincérité [] et sa force mâle et vigoureuse » [Lüsebrink, 1995, p. 123]. Une anthropologie fortement imprégnée des « acquis » de la philologie prend forme pour opposer le caractère national allemand, d'origine germanique, au caractère national français. A l'inverse, l'Empire germanique, la Prusse puis l'Allemagne ont été un pôle important – avec l'Angleterre – contre lequel s'est construit l'imaginaire national français. Dans les relations entre ces deux puissances, la question de l'Alsace-Lorraine a été un enjeu majeur autour duquel s'est formalisé, du côté français, l'argumentaire de la nation-pureassociation contre les arguments allemands. Déjà en 1790, Merlin de Douai légitimait la dépossession des princes allemands en Alsace, affirmant aux citoyens que « il n'y a entre vous et vos frères d'Alsace d'autre titre de légitime d'union que le pacte social formé l'année dernière entre tous les Français anciens et modernes » [Soboul, 1981, p. 259]. Un siècle plus tard, l'Alsace est plus que jamais au coeur des relations francogermaniques quand, en 1882, Renan prononce sa célèbre conférence sur la nation et qu'il déclare que la nation est « un plébiscite de tous les jours ». Ce texte consiste d'ailleurs essentiellement en une réfutation des 12 arguments ethniques – notamment linguistiques et raciaux – que développent les théoriciens nationalistes allemands pour légitimer l'annexion. De la même manière, lorsque Fustel de Coulanges estime que « ni la langue ni la race ne fait la nationalité », c'est en réponse à l'argumentaire de Théodore Mommsen. Ainsi, il est apparaît que c'est très largement à travers son opposition à l'argumentaire ethnique des nationalistes allemands que s'est développé l'argumentaire français de la nation comme produit d'un acte de volonté. L'opposition nation civique/nation ethnique apparaît donc, au moins pour une part, comme le produit d'une polarisation idéologique qui s'est faite en France et en Allemagne au cours des relations entre ces deux États et leurs nationalismes respectifs. Les deux argumentaires semblent avoir été repris par les analystes qui ont cru pouvoir distinguer une conception française de la nation, archétype de la nation civique, et une conception mande, incarnant la conception ethnique de la nation, sans tenir compte de la vision tronquée de la réalité inhérente à chacune d'entre elle. En reprenant des catégories formées au cours d'un débat idéologique, l'opposition conceptuelle nation civique/nation ethnique reste prisonnières des formes de mystifications performatives, inhérentes à tout discours idéologique. « L'invention des traditions » Enfin, la prégnance du débat idéologique dans les analyses apparaît encore plus clairement lorsque l'on constate les simplifications auxquelles il est procédé dans la lecture des prétendues « traditions nationales » française et allemande. La pollution idéologique qui frappe l'opposition ethnique/civique se manifeste en effet par les versions caricaturales qui sont données des textes et auteurs tenus pour être les pères fondateurs de ces « traditions ». Ainsi, présenter Herder comme l'emblème d'une vision ethniste voire raciste des peuples, comme cela a souvent été fait, est réducteur. Sa critique de l'universalisme des Lumières l'amène à rejeter l'ethnocentrisme européen qui tient pour acquise la supériorité de « La 13 Civilisation » européenne sur l'ensemble de l'humanité. Il défend, au contraire, l'idée d'une l'égale valeur de cultures. En refusant toute supériorité à la civilisation européenne, il remet également en question la légitimité de « l'oeuvre de civilisation » que sont sensés être l'esclavagisme et la colonisation : « En Europe, l'esclavage est aboli parce qu'on a calculé combien ces esclaves coûteraient davantage et rapporteraient moins que des hommes libres ; il n'y a qu'une chose que nous nous soyons permise : utiliser comme esclaves trois continents, en trafiquer, les exiler, dans les mines d'argent et les sucreries » [Herder, 2000, p. 126]. « Système du commerce! Ce qu'il y a de grand et d'unique dans cette organisation est manifeste : trois continents dévastés et policés par nous, et nous par eux dépeuplés, émasculés, plongés dans l'opulence, l'exploitation honteuse de l'humanité et la mort » [Herder, 2000, p. 127]. Comme l'a montré Louis Dumont, Herder ne rejette pas l'universalisme et l'égalitarisme, simplement il déplace leur champ d'application de l'individu à ces êtres collectifs historiques que sont les peuples ou nations [Dumont, 1986]. L'égalité, il la place entre les peuples et les cultures, ce qui l'amène à condamner et rejeter l'impérialisme européen. On notera que dans ces considérations sur les peuples, Herder s'inspire très fortement de l'anthropologie de Rousseau, qui lui aussi rejetait vivement l'hégémonie culturelle française et accordait une place centrale aux « caractères nationaux », comme nous le verrons plus loin. Cette influence de Rousseau n'a pas touché que les préromantiques du Sturm und Drang comme Herder. Elle a aussi fortement marqué la première génération des nationalistes allemands, non seulement pas ses vues en matière d'éducation, mais aussi par sa définition de la souveraineté du peuple [Lüsebrink, 1995]. Cette influence est particulièrement perceptible chez Fichte, qui n'a jamais abandonné les principes égalitaristes et contractualistes qu'il avait développés dans Fondement du droit naturel (1796-1797). Dans ses Discours à la nation allemande, loin de se jeter à corps perdu dans une définition purement ethnique de la nation, il reste fidèle à l'idée que « le peuple est en fait et en droit le pouvoir suprême qu'aucun ne dépasse, qui est la source de tout autre pouvoir et qui est responsable de Dieu seul » [Fichte, 1992, p. 195]. Le mouvement de renouveau national auquel il appelle doit donc 14 nécessairement inclure toute la nation, partant du constat que « jusqu'à maintenant tout le progrès accompli dans le sens de l'humanité par la nation allemande est parti du peuple, et que c'est en premier lieu à lui que les grands intérêts nationaux ont toujours été confiés » [Fichte, 1992, p. 70-71]. Le peuple est placé comme acteur principal de l'histoire allemande et Fichte demande qu'il soit associé au mouvement de régénérescence qui doit « former à nouveau la nation ». Pour justifier cette fusion des « couches sociales » dans la nouvelle nation allemande, Fichte brandit – discrètement – la menace de la révolution. Car si les « couches cultivées » ne prennent pas l'initiative de cette refondation égalitaire, « celle-ci est déjà presque prête et mûre pour que la charge en soit transférée au peuple, elle est menée à bien sur des membres issus du peuples, lequel, sous peu, pourra se tirer d'affaire lui-même []; [] de ce qui a constitué jusqu'ici le peuple, émergera une nouvelle couche cultivée, supérieure à la précédente » [Fichte, 1992, p. 70]. La théorie de la nation de Fichte n'est donc aucunement exclusive des principes égalitaires et démocratiques, qui, bien au contraire, sont au coeur du projet de refondation nationale. De la même manière que l'on oublie souvent la dimension civique et démocratique de 'imaginaire national allemand, la lecture des textes fondateurs de la prétendue « tradition civique » française est souvent partielle. Ainsi, pour Renan, la nation n'est pas qu'un « plébiscite de tous les jours ». « Une nation, nous dit-il, est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n'en font qu'une, constituent cette âme, ce principe spirituel : L'une est dans le passé, l'autre dans le présent. L'une est la possession en commun d'un riche legs de souvenirs ; l'autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l'héritage qu'on a reçu indivis » [Renan, 1997, p. 31]. A côté du « plébiscite de tous les jours », il y a donc un long legs de souvenirs communs. Plus précisément, il semble que l'unité politique et l'unité ethnique se superposent. Ce qui caractérise « ces différents États [que sont la France, l'Allemagne, l'Angleterre, l'Italie, l'Espagne]? C'est la fusion des populations qui les composent » [Renan, 1997, p. 31]. La question ethnique n'est donc pas absente des préoccupations de Renan. Elle est simplement résolue dans l'idée d'une assimilation ancienne des 15 populations qui composent les États. Renan évacue, du même coup, la question de l'origine franque ou gauloise de la nation française, laquelle est aussi ancienne que l'apparition des Gaulois aux côtés des Francs dans l'historiographie française, au XVIe siècle [Pomian, 1997]. Gaulois, Romains et Francs ont fusionné dans le creuset de l'État, d'abord dynastique puis moderne. Très lucide, sur la nécessaire fiction historique qui entoure la mémoire d'une nation, Renan peut soutenir que, « l'oubli, je dirai même l'erreur historique, sont un facteur essentiel de la création d'une nation » et qu'à l'inverse, « le progrès des études historiques est souvent pour la nationalité un danger » [Renan, 1997, p. 13] car il « remet en lumière les faits de violence qui se sont passés à l'origine de toutes les formations politiques », violence d'ailleurs inévi tables puisque « l'unité se fait toujours brutalement » [Renan, 1997, p. 14]. Renan avait bien senti le rôle de ce que nous appellerions aujourd'hui l' « invention de la tradition » [Hobsbawm et Ranger, 1983], et le rôle qui joue l'oubli. Dans l'invention des traditions civique et ethnique aussi, l'oubli semble avoir joué un rôle crucial. D'abord, l'oubli des débats idéologiques qui ont précédé et participé à former cette opposition analytique. Ensuite, l'oubli de parties entières de texte tenus pour être fondateurs de chacune des « traditions ». Enfin, l'oubli des nombreux échanges et emprunts réciproques qui ont contribué à forger les imaginaires nationaux français et allemands. Nous avons donc plusieurs bonnes raisons d'être prudents face à l'opposition nations civiques / nations ethniques. D'une part, parce qu'elle présente de très nombreuses similitudes avec l'opposition communauté/société dont nous avons dit qu'elle est une émanation idéologique et ethnocentrique des sociétés européennes tentant de penser leur modernité. De la même manière, on peut dire que le mythe de la nation civique est entaché de la prétention des nations d'Europe occidentale, sorties vainqueurs des deux conflits mondiaux, à incarner les « bonnes nations ». Tandis que le mythe concomitant de la nation ethnique sert de repoussoir comme le mauvais type de nation. Ce n'est 16 certainement pas un hasard si Kohn formule sa distinction au sortir de l'expérience Nazi. Ainsi, la distinction empirique entre nationalismes de l'Ouest et nationalismes de l'Est, sensée légitimer l'opposition conceptuelle entre nations civiques et nations ethniques, est en fait ce qui la disqualifie le plus. La distinction conceptuelle entérine simplement la polarisation idéologique telle qu'elle s'est formée dans l'histoire des États nationaux et des nationalismes et de ce fait s'interdit de saisir l'in-pensé de chaque imaginaire national. Elle laisse la place à des lectures simplificatrices de certains penseurs sensés incarner l'une ou l'autre conception de la nation. Lectures tronquées qui participent à l'invention de deux « traditions nationales », avec la part d'erreur et de falsification que cela implique. Ces quelques éléments, s'ils ne sont pas exhaustifs, nous semblent suffisants pour montrer la charge idéologique dont est porteuse la distinction nation civique / nation ethnique et remettre en question sa valeur analytique. Rejetant cette distinction, nous adopterons la perspective inverse suivant laquelle tout imaginaire national comprend nécessairement à la fois des éléments ethniques et civiques. Cette est aujourd'hui admise par de nombreux analystes. C'est notamment la position d'Anthony Smith, pour qui, « tout nationalisme contient des éléments civiques et ethniques » [Smith, 1991, p. 13]. Il considère, en effet, qu'il n'y a qu'une seule définition idéal-typique de la nation – « une population humaine nommée occupant un territoire historique et possédant des mythes et souvenirs partagés, une culture publique, une économie unique et des droits et devoirs égaux pour tous les membres » [Smith, 1997, p. 10]. Or, pour Smith, affirmer « le profond dualisme qui est au coeur de tout nationalisme » [Smith, 1991, p. 13], n'est pas dire qu'il peut y avoir des éléments ethniques et des éléments civiques dans toute nation mais bien plutôt qu'il doit nécessairement y avoir à la fois de l'ethnique et du civique. Les deux éléments sont présents dans la définition idéal-typique qu'il donne de la nation : une population « possédant des mythes et souvenirs partagés » et « des droits et devoirs égaux pour tous les 17 membres ». Chez Smith, ces deux dimensions ne sont ni exclusives, pas plus qu'elles ne sont facultatives. Elles sont nécessairement incluses dans toute conception de la nation. Nous dirons, pour notre part, que la nation est une communauté doublement imaginée. Imaginée à la fois comme un peuple, un groupe ethnique – que nous définirons avec Weber comme fondé sur « la croyance en une origine commune » [Weber, 1971] – et imaginée comme le peuple, communauté politique composée d'individus naturellement libres et égaux. La nation moderne est imaginée à la fois comme une communauté ethnique – le peuple ethnos - et comme une société moderne et démocratique – le peuple demos. C'est en ce sens que l'on peut dire qu'elle est une communauté ethno-démocratique. Mais, pour Smith, l'opposition civique/ethnique n'est pas totalement à rejeter. Elle reste pertinente pour distinguer différentes « conceptions » de la nation. Il considère en effet que, s'il n'y a qu'une seule définition de la nation, il existe « différentes conceptions de la nation [qui] vont mettre l'accent sur des éléments différents dans l'idéaltype de la nation ainsi définie » [Smith, 1997, p. 10]. La nation ethnique et la nation civique sont, dans cette perspectives, des variantes de la définition idéale-typique : si « tout nationalisme contient des éléments civiques et ethniques », c'est « à des degrés différents et dans des formes différentes » [Smith, 1991, p. 13]. On ne peut en effet que constater que, suivant les contextes historiques, ces deux registres définition de la nation sont des ressources inégalement disponibles. Ainsi, dans un contexte comme la France où l'État unitaire est déjà largement constitué au moment de l'émergence du l'idée moderne de nation, la définition politique (étatique) de la nation tient un place importante dans la formation de l'imaginaire national. De même, dans ce contexte, la préexistence d'un État territorial permet de recourir à une définition territoriale de l'origine ethnique. A l'inverse, dans des contextes historiques comme celui de l'empire germanique, l'appartenance à la nation ne peut être définie par l'appartenance à un État et son territoire, encore inexistants. Mais bien plus que l'existence de deux conceptions de la nation, ce sont les conditions, propres à chaque contexte historique, dans lesquelles s'est formé le couple État-nation qui permettent de comprendre les différentes variantes historiques de l'idée moderne de nation. II La souveraineté ethno-démocratique C'est là que prenons nos distance avec Smith. Pas parce qu'il oublierait de penser l'État, mais parce qu'il l'intègre à la nation. En effet, si l'on soustrait les dimensions ethnique et civique de la définition qu'il donne de la nation, que reste-t-il? « Une population humaine nommée occupant un territoire historique et possédant [] une culture publique, une économie unique [] ». Or, qu'est-ce que cette définition si ce n'est celle de d'un État. Derrière toute nation, il y a donc nécessairement un État. Ceci n'est pas faux. Mais intégrer ainsi l'État à la nation présente un danger majeur : reprendre un des postulats du nationalisme. En effet, si l'on suit Gellner pour considérer le nationalisme comme « une théorie de la légitimité politique qui exige que les limites ethniques coïncident avec les limites politiques » [Gellner, 1989, p. 12], on comprend que l'assimilation voire la fusion de la nation et de l'État est un des ressorts importants des idéologies nationalistes. C'est pourquoi, du point de vue de l'analyse, il nous semble important de clairement distinguer l'État, comme institution et territoire, de la nation, comme population, pour s'attacher aux relations qu'entretiennent ces deux réalités et leurs définitions respectives et, notamment, l'assimilation de l'un et l'autre à laquelle procèdent volontiers les différents nationalismes. Chez Renan, cette assimilation de la nation et de l'État est évidente. Il ne fait aucun doute, pour lui, qu'un État (une unité politique) est au fondement de toute « nation moderne » dont, nous dit-il, « tantôt l'unité a été réalisée par une dynastie, comme c'est la cas pour la France ; tantôt elle l'a été par la volonté des provinces, comme c'est le cas pour la 19 Hollande, la Suisse, la Belgique ; tantôt par un esprit général, tardivement vainqueur des caprices de la féodalité, comme c'est le cas pour l'Italie et l'Allemagne » [Renan, 1997, p. 15]. « La nation moderne est donc un résultat historique amené par une série de faits convergeant dans le même sens ». Et cette série de convergence est essentiellement le fait de l'État. Au point que Renan « ose dire » que le roi de France est « le type idéal d'un cristallisateur séculaire ; le roi de France, qui a fait la plus parfaite unité nationale qu'il y ait » [Renan, 1997, p. 14]. Le réel ciment d'une nation moderne est un État, qu'il soit l'émanation de la volonté d'un souverain, de la volonté de provinces ou de celle de citoyens. Renan est donc très lucide sur le rôle central que joue la structure étatique dans la formation des nations, même si l'État n'est que rarement nommé dans sa conférence de 1882. Et son analyse est d'autant plus juste qu'elle prend comme référent la nation française, qui très tôt a été circonscrite dans les frontières de l'État territorial. Voyons comment s'est faite cette assimilation précoce de la nation à l'État. L'assimilation de la nation à l'État Dans la France du Moyen Âge comme dans l'ensemble de l'Europe, conformément à l'étymologie latine natio, une nation désigne un peuple caractérisé par une origine commune, le plus souvent repérable par une langue commune. La Faculté de Paris classe les étudiants et professeurs en nations selon leur langue : nations Française, Picarde, Normande et Angloise (remplacée ensuite par Allemande). Et encore à la fin du XVIe siècle, la nation n'a pas nécessairement à voir avec l'État. Jean Bodin, dans les Six livres de la République (1583), pouvait ainsi considérer que « de plusieurs citoyens,[qu'ils] soient naturels, ou naturalisés, ou esclaves affranchis [] se fait une République, quand ils sont gouvernés par la puissance souveraine d'un ou plusieurs seigneurs, encore qu'ils soient diversifiés en lois, en langues, en coutumes, en religions, en nations » [Bodin, 1993, p. 94]. Dans le cadre de l'État monarchique naissant, il est donc possible de voir cohabiter plusieurs nations au sein de l'unité politique Les nations sont définies comme des 20 groupes ethniques essentiellement linguistiques, indépendamment des circonstances politiques. Pourtant, déjà, Bodin est très précautionneux pour définir qui sont les « citoyens » d'une République, c'est-à-dire d'un État. Il prend notamment soin de distinguer la qualité de sujet de celle de citoyen : « on peut dire que tout citoyen est sujet, étant quelque peu de sa liberté diminué, par la majesté de celui auquel il doit obéissance ; mais tout sujet n'est pas citoyen, comme nous avons dit de l'esclave, et se peut dire aussi de l'étranger » [Bodin, 1993, p. 94]. La question de la définition du cercle des citoyens est donc déjà importante pour l'État monarchique. Et dans cette définition du cercle des citoyens, la question de l'origine n'est pas totalement absente. Bodin distingue, en effet, clairement le « citoyen naturel » lié à la République par « son origine » [Bodin, 1993, p. 99], de « l'étranger qui a obtenu lettres de naturalité » et devient de ce fait citoyen, en sachant qu'il lui faut de surcroît « demeurer le temps préfixé en ce Royaume ». On voit donc que ce qui deviendra plus tard le droit de la nationalité est déjà en cours de formation. L'État monarchique, en même temps qu'il affirme ses prétentions absolutistes, doit avoir une maîtrise accrue sur ses membres. Mais cette communauté politique, dont les membres sont déjà définis par leur origine notamment territoriale, ne se conçoit pas encore comme nécessairement ethniquement homogène. L'unité ethnique n'est pas encore un attribut central de l'État. L'État n'a pas encore constitué ce monopole [Elias, 1975] culturel et ethnique qui caractérise l'ère des nations modernes. Le processus de nationalisation des États monarchiques est pourtant déjà commencé. Avec l'affirmation des prétentions absolutistes des États monarchiques, apparaissent des cultures d'État qui, si elles ne sont pas proprement nationales parce qu'elles ne prétendent pas monopoliser le référent ethnique, sont des souches pré-nationales. Le développement des langues vernaculaires, véhiculées par la presse et promues au rang de langues officielles [cf. Anderson, 1996], favorise la diffusion de ces cultures d'État et la formation de ce que l'on peut appeler des « consciences proto-nationales ». Là, commencent notamment à s'écrire les histoires nationales. Car la Renaissance est aussi celle des 21 recherches historiques. En Italie, puis en France, en Angleterre et en Allemagne, les travaux historiques sont convoqués par les pouvoirs politiques pour attester de l antiquité des États. En France, il s'agit de trouver une origine plus ancienne et moins arbitraire au royaume que le traité de Verdun (843) qui délimitait la Francie occidentale. Dans ses Recherches de la France (1560), Etienne Pasquier cherche à montrer la continuité entre « l'ancienne Gaule et nostre nouvelle France » et donc, « l'ancienneté de nostre France » [Vivanti, 1997, p. 768-769]. Ce travail de Pasquier indique que, déjà, l'histoire ne s'écrit plus de la même manière. Plutôt que de rechercher une continuité historique du pouvoir politique comme l'avaient fait jusque là les chroniqueurs des rois de France [Guenée, 1997], il recherche cette continuité dans les moeurs des Gaulois. Pour lui, le peuple français est le descendant du peuple gaulois. Bodin adopte implicitement le même point de vue lorsqu'il argumente que la « distinction des citoyens en trois états » est légitime, non seulement parce qu'elle est répandue dans toute l'Europe, mais aussi parce qu'elle est conforme aux usages de « nos anciens Gaulois [qui] avaient les druides, les gens de cheval, et le menu peuple » [Bodin, 1993, p. 101]. Or, en prenant ainsi parti pour l'origine gauloise du peuple de France, Pasquier comme Bodin apportent un soutien précieux aux élites bourgeoises dans leurs revendications émergentes. En effet, l'histoire des origines de la France avait jusque là fait de la noblesse un ordre descendant des conquérants Francs, tandis que le tiers état était l'ordre des vaincus, les Gaulois. Affirmer l'origine gauloise du peuple français, revient donc à accorder au tiers état un rôle fondateur dans ce que l'on n'appelle pas encore la nation française. L'émergence des Gaulois comme référence historique coïncide avec l'émergence du peuple sur la scène politique. Plus précisément, elle semble accompagner et cautionner les revendications émergentes des élites du tiers état en faveur de plus d'égalité entre les citoyens du royaume, à quelque ordre qu'ils appartiennent. Si, pour Pasquier, la France est essentiellement héritière de la civilisation gauloise, il estime également qu'elle a été fortifiée par les apports successifs des Romains et des Francs. Plus que de défendre une 22 origine exclusivement gauloise de la France, il affirme la fusion des apports romain et franc avec le fond gaulois. Ce faisant, il exprime très tôt l'argument de l'assimilation des différentes populations qui ont constitué la France. Cet argument de l'assimilation qui deviendra une constante de l'imaginaire national français parce qu'il permet de contourner la difficulté qu'il y a à faire cohabiter différents ancêtres fondateurs et d'affirmer une unité – au moins relative – des différentes composantes du royaume. L'histoire officielle de la France commence à affirmer l'homogénéité ethnique de la population, en même temps qu'elle intègre une conception plus égalitaire de la société. Déjà l'argument ethnique semble intimement lié aux luttes sociales et politiques, même s'il n'est pas encore aussi central qu'il le deviendra à l'ère nationale. Le principal critère de définition de la nation reste l'État (monarchique) qui semble en fait s'être approprié le terme nation et l'avoir redéfini comme la population résidant sur son territoire. La définition du terme nation s'infléchit ainsi vers une définition sinon démocratique, du moins déjà démographique. Cette assimilation de la nation à l'État semble aboutie à la fin du XVIIe siècle. Dans le dictionnaire de Furetière, paru en 1690, la nation est définie comme « un grand peuple habitant une certaine étendue de terre, renfermée en certaines limites ou même sous une même domination ». Le critère géographique tient ici une place centrale. La nation est une population définie par sa situation géographique. L'unité géographique, le territoire, est donc centrale, qu'elle soit définie comme une unité naturelle comme l'affirment les théories des « limites naturelles » [Nordman, 1998] ou comme une unité artificielle, produite par un pouvoir politique. Dans un cas, l'unité géographique est naturelle et doit par conséquent être soumise à un même pouvoir ; dans l'autre, l'unité géographique est le produit de l'unité politique. Mais dans les deux cas, c'est bien l'État territorial qui détermine les contours de cette population qu'est la nation. Cette définition souligne mieux que toute autre l'appropriation du terme nation par l'État. Une nation est une population habitant un certain territoire, lequel territoire est lui-même défini par un pouvoir. C'est dans ce contexte mental qu'apparaissent, notamment chez les économistes, des 23 expressions comme « consommation nationale » ou « industrie nationale » [Soboul, 1981]. Dans la première édition du Dictionnaire de l'Académie Française, parue en 1694, la nation est définie comme : « Tous les habitants d'un même État, d'un même pays, qui vivent sous mêmes lois et usent de même langage ». Le critère linguistique fait ici son apparition à côté du critère stato-territorial. Ce qui ne doit pas étonner de la part d'une institution dont le rôle est précisément de promouvoir la langue et la culture dominantes. Mais ce critère de vient quand dernier lieu, comme un complément au critère central qu'est « l'État » ou le « pays ». En France, avant l'entrée dans l'ère démocratique proprement dite, le couple État-nation est donc déjà formé. La nation est définie comme la population du royaume, à la fois institution de pouvoir et territoire sur lequel s'exerce ce pouvoir. Et c'est précisément cette équation « nation = État » qui va donner au terme nation sa charge polémique. En effet, par le fait même qu'il englobe dans une seule catégorie l'ensemble de la population sans distinction d'ordres, il porte en lui-même un potentiel de revendications égalitaires. Pour le tiers état et ses promoteurs, c'est déjà une façon d'affirmer une forme d'égalité. Même si les privilèges subsistent, l'idée d'une nation comprise comme l'ensemble de la population d'un État territorial est la reconnaissance d'une égalité minimale entre les sujets. De la part de l'État monarchique, la reconnaissance de cette égalité minimale ne doit pas surprendre. Elle est un moyen de plus pour minimiser les prétentions politiques des ordres privilégiés, et notamment de la noblesse. Cette définition étatique et large de la nation illustre en fait l'alliance objective qui s'est faite, durant « la première modernité politique » française, entre l'absolutisme monarchique et le tiers état, contre les privilèges et prétentions de la noblesse [Elias, 1975]. La nation démocratique Avec l'entrée dans l'ère des revendications proprement démocratiques, le terme « nation » devient le référent incontournable de 24 tout discours prônant plus d'égalité politique. La nation - entendue comme l'ensemble de la population de l'État, du royaume - permet, plus que jamais, d'effacer les différences entre les ordres ; elle fusionne l'ensemble des catégories sociales dans une seule. Cette charge politique du terme nation est particulièrement bien illustrée par le pamphlet de Sieyès, paru en 1789 sous le titre Qu'est ce que le tiers état? L'objectif de Sieyès est de revendiquer le vote par tête au-lieu du vote par ordre aux États généraux convoqués par Louis XVI. Pour fonder cette revendication, il argumente que le tiers état est, d'un point de vue quantitatif, la majorité au sein de la nation et, poussant la logique majoritaire à l'extrême, il affirme que « le Tiers état est une nation complète » [Sieyès, 1988, p. 31]. À la question titre « qu'est-ce que le tiers état? » – sous-entendu, dans la nation –, il répond « tout ». Certains ont pu croire que Sieyès entendait réduire la nation au tiers état et en exclure la noblesse. En fait, cette assimilation de la nation au tiers état a pour but d'appuyer les revendications politiques qu'il formule pour cet ordre statutairement mineur. D'ailleurs, si le premier chapitre de son texte affirme que « Le Tiers état est une nation complète », le troisième nous dit ce « que demande le Tiers état? A devenir quelque chose ». Pas tout. Comme chez la plupart des philosophes libéraux, le terme nation est utilisé pour revendiquer l'égalité des droits politiques : « Une loi commune et une représentation commune, voilà ce qui fait une nation » [Sieyès, 1988, p. 45]. C'est l'unité de la nation qui est en jeu. Et celle-ci passe par l'unité et l'égalité politique : la suppression des privilèges. « Les privilégiés, loin d'être utiles à la nation, ne peuvent que l'affaiblir et lui nuire » [Sieyès, 1988, p. 38]. Poussée à son extrême, cette définition politique de la nation conduit Sieyès à l'affirmation provocante que l' « étranger non naturalisé » [Sieyès, 1988, p. 62] n'est pas nécessairement plus étranger à la nation qu'un membre d'un ordre privilégié, car, contrairement à ce dernier, estime-t-il, il n'a pas nécessairement un intérêt opposé à l'intérêt commun. De même, Sieyès se veut provocant, lorsqu'il répond aux arguments de la théorie des deux races en se demandant pourquoi ne pas renvoyer « dans les forêts de la Franconie toutes les familles qui 25 conservent la folle prétention d'être issues de la race des conquérants et d'avoir succédé à des droits de conquête. La nation, alors épurée, pourra se consoler, je pense, d'être réduite à ne plus se croire composée que des descendants des Gaulois et des Romains » [Sieyès, 1988, p. 44]. Il nous propose d'ailleurs plus loin une autre hypothèse, qui semble mieux lui convenir, selon laquelle, « si tout est mêlé, si le sang des Francs [] coule confondu avec celui des Gaulois, si les ancêtres du Tiers état sont les pères de nation entière, ne peut-on espérer de voir cesser un jour ce long parricide qu'une classe s'honore de commettre journellement contre toutes les autres? » [Sieyès, 1988, p. 44-45]. Dans cette deuxième argumentation, est reprise l'idée de l'assimilation par le mélange des populations franque et gauloise. Et même si les privilèges de la noblesse sont des « droits séparés du grand corps des citoyens » et que « ses droits en font un peuple à part dans la grande nation » [Sieyès, 1988, p. 40], ce n'est pas un peuple hors de la grande nation. Ainsi, au-delà des effets de rhétorique, qui consistent à retourner l'objet de la revendication - l'égalisation des droits politiques au sein de la nation - en ramenant les limites de la nation au cercle des égaux (le tiers état), on voit bien que les limites de l'entité nation ne sont pas au centre des préoccupations de Sieyès. La « nation entière » est bien la population de « France ». Certes, une nation dans laquelle les droits politiques sont égaux est une nouvelle forme d'association : elle forme une « Nation » moderne. Mais ni l'unité de l'État, ni la « grande nation » – qui ne font qu'un – ne sont en question : seule l'égalité de droits politiques à l'intérieur de la société est en jeu. La nation composée de citoyens naturels, clairement différenciés des étrangers, est l'horizon intellectuel du temps que Sieyès bouscule pour revendiquer l'égalité des droits politiques. Horizon intellectuel qui, à aucun moment pendant la Révolution, ne semble avoir été ébranlé. Dans la constitution de 1791, la définition des citoyens passifs reste très proche des critères utilisés précédemment par l'État monarchique pour circonscrire ses sujets naturels ou naturalisés. L'article 2 de la constitution précise que « sont citoyens français : ceux qui sont nés en France d'un père français ; ceux qui, nés en France d'un 26 père étranger, ont fixé leur résidence dans le royaume ; ceux qui, nés en pays étranger d'un père français, sont venus s'établir en France et ont prêté le serment civique ; enfin ceux qui, nés en pays étranger, et descendant à quelque degré que ce soit d'un Français ou d'une Française expatriés pour cause de religion, viennent demeurer en France prêtent le serment ». On est loin de la définition de la nation comme une communauté formée par la libre association d'individus qui veulent vivre ensemble. La communauté des citoyens est en grande partie définie sur le critère de l'origine. Tantôt, cette origine est identifiée par les ascendants (ce que l'on appelle le droit du sang), tantôt elle l'est par le territoire de naissance. Dans le meilleur des cas (le premier listé par l'article), elle répond aux deux critères : père français et naissance en France. Le critère de résidence permet de réintégrer au corps des citoyens ceux qui n'ont qu'un lien de sang, mais il doit s'accompagner du serment civique. Et les révolutionnaires français n'ont jamais perdu de vue l'horizon indépassable que constituait le cadre de l'État territorial et de sa population. Seulement ils ont voulu que cette nation soit quelque chose de plus que la simple population d'un État : qu'elle soit une population unie et indivisible. La nation ethno-démocratique Rousseau a précédé les Révolutionnaires et avait déjà pensé au moyens d'assurer l'unité des peuples. Il avait perçu que la fiction contractualiste – qu'il a lui-même formulée –, si elle est stimulante et motrice dans l'histoire, est inopérante pour un État qui a besoin d'avoir une connaissance et une maîtrise accrue de sa population. Les État et les nations existants constituent le cadre de référence à partir desquels Rousseau pense l'application du Contrat social. Le passage à l'état civique n'est donc pas le moment fondateur d'une nation mais une étape possible dans la vie d'un peuple. Il y a, nous dit-il, « dans la durée des États des époques violentes [] où l'État, embrasé par les guerres civiles, renaît pour ainsi dire de sa cendre, et reprend la vigueur de sa jeunesse ». Mais, précise-t-il, « ces événements sont rares ; [et] ne sauroient avoir lieu deux fois pour le même peuple : car il peut se rendre libre tant qu'il n'est que barbare, mais il ne le peut plus quand le ressort civil est usé ». Ainsi, les nations ne sont pas égales devant l'état civique : « Tel peuple est disciplinable en naissant, tel autre ne l'est pas au bout de dix siècles » et « mille nations ont brillé sur la terre, qui n'auroient jamais pu souffrir de bonnes lois tels « les Russes [qui] ne seront jamais vraiment policés, parce qu'il l'ont été trop tôt ». Les spécificités de chaque peuple sont telles, selon Rousseau, que « le sage instituteur ne commence pas par rédiger de bonnes lois elles-mêmes, mais il examine auparavant si le peuple auquel il les destine est propre à les supporter » [Rousseau, 1963, Livre II, Chap. VIII]. Non seulement Rousseau prend en compte la préexistence de nations, mais il considère qu'elles sont la condition nécessaire pour que puissent être établies de « bonnes institutions ». Dans ses Considérations 28 sur le gouvernement de la Pologne [Rousseau, 1990, p. 170-177], il regrette que les caractères nationaux « s'abâtardissent journellement par la pente générale en Europe de prendre les goûts et les moeurs des Français » qui a pour résultat, selon lui, qu'il « n'y a plus aujourd'hui de Français, d'Allemands, d'Espagnols, d'Anglais même, quoi qu'on en dise ; il n'y a que des Européens ». Contre le danger que représente cette uniformisation, il considère qu'il faut donner aux « âmes [des Polonais, en l'occurrence] une physionomie nationale qui les distingue des autres peuples. » Pour Rousseau, le caractère national n'est donc pas seulement un donné, c'est aussi un matériau que l'on peut façonner. Tout peuple « doit avoir un caractère national, et s'il en manquait, il faudrait commencer par le lui donner » [Rousseau, 1990, p. 118], estime-t-il dans son Projet de constitution pour la Corse. Et, dans les Considérations sur la Pologne, il donne quelques indications sur moyens par lesquels il est possible d'assurer l'existence d'un tel caractère. Le premier est de « maintenir, rétablir les anciens usages » [Rousseau, 1990, p. 171]. Mais surtout, considérant que si « tous ont les mêmes goûts, les mêmes passions, les mêmes moeurs, [c'est] parce qu'aucun n'a reçu de forme nationale par une institution particulière », il propose qu'une institution particulière soit consacrée à l'éducation des citoyens. Car c'est bien « l'éducation qui doit donner aux âmes la forme nationale » [Rousseau, 1990, p. 177]. Il faut qu'en « apprenant à lire, [un Polonais] lise des choses de son pays, qu'à dix ans il en connaiss toutes les productions, à douze ans toutes les provinces, tous les chemins, toutes les villes, qu'à quinze il en sache toute l'histoire, à seize toutes les lois ». Et pour que l'éducation soit proprement nationale, les Polonais « ne doivent avoir pour instituteurs que des Polonais ». Par l'institution d'une telle éducation nationale, « la nation [polonaise] datera sa seconde naissance » et « elle reprendra dans ce nouvel âge toute la vigueur d'une nation naissante ». Il s'agit donc de former chaque citoyen pour qu'il apprenne à aimer sa nation. Les révolutionnaires de 1793 vont tenter de mettre en pratique les préceptes de Rousseau. Ils tâcheront, à leur façon, de donner à la nation française « un caractère proprement national » en menant une politique 29 d'homogénéisation culturelle contre les particularismes. Pour les nationalistes allemands, quelques années après, l'enjeu est différent. Leurs revendications démocratiques prennent forme alors que le cadre étatique n'est pas encore défini. La nation et l'État unitaire sont tous les deux à construire. Et les théoriciens nationalistes vont commencer par définir la nation. Mais le postulat de base est le même : construire une nation (ethno-démocratique) et un État lui correspondant. On ne doit donc pas s'étonner que les vues éducatives de Rousseau et des révolutionnaires français aient joué un rôle central dans la formation du nationalisme allemand. Fichte est particulièrement instructif à cet égard. Ses Discours sont presque intégralement consacrés à la présentation de ce qu'il appelle « la nouvelle éducation » et qui doit permettre de régénérer et donner une seconde vie à la nation allemande. Le caractère novateur de l'éducation qu'il conçoit réside, selon lui, d'une part, dans le fait qu'elle s'adresse à l'ensemble de la nation allemande, mais aussi, d'autre part, dans ceci que « tandis que jusqu'ici l'éducation avait surtout à former quelque chose en l'homme, celle-ci doit former l'homme lui-même » [Fichte, 1992, p. 67]. Et c'est par là qu'elle sera régénératrice. C'est en formant l'homme, en suscitant son amour pour la patrie, que l'on fait ou que l'on maintient une nation. De Rousseau, en passant par Révolutionnaires français et les nationalistes allemands, jusqu'aux radicaux de la IIIe République, une anthropologie de l'éducabilité de l'homme sous-tend donc l'idée moderne de nation comme communauté ethno-démocratique. La souveraineté ethn o- démocratique Mais si nous avons une idée plus claire sur s'est formée cette conception ethno-démocratique de la nation, nous n'avons pas encore dit pourquoi ces deux dimensions se trouvent aussi intimement mêlées dans l'idée moderne de nation. « Nous voulons, grâce à la nouvelle éducation, faire des Allemands une collectivité, qui dans tous ses membres, soit dynamisée et animée par les mêmes intérêts » [Fichte, 1992, p. 68], nous dit Fichte. L'homme est malléable et Fichte veut, par l'éducation, l'amener à 31 rechercher l'intérêt général. En affermissant les « caractères nationaux » – objectifs et subjectifs – chez chaque citoyen, il s'agirait donc de s'assurer qu'existe une volonté générale. Mais pourquoi est-il si nécessaire de forger une volonté générale à partir des volontés paritculières? Parce que le principe le principe de souveraineté impose cette unité. Ce principe de souveraineté a été formé au profit de l'État monarchique et des ses prétentions absolutistes [Mairet, 1997]. A la fin du XVIe siècle, Bodin en donne la première définition : « la souveraineté n'est limitée, ni en puissance, ni en charges, ni à certains temps » [Bodin, 1993, p. 113], elle est la « puissance absolue et perpétuelle ». Dire que la souveraineté est absolue, c'est dire que « le Prince est absous de la puissances des lois » car « il faut que ceux-là qui sont souverains ne soient aucunement sujets aux commandements d'autrui, et qu'ils puissent donner lois aux sujets, et casser ou anéantir les lois inutiles, pour en faire d'autres : ce que ne peut faire celui qui est sujet aux lois ». En fait, le Prince souverain « n'est tenu de rendre compte qu'à Dieu », aux « lois divines et naturelles ». Ces lois, « tous les Princes de la terre y sont sujets, et il n'est pas en leur puissance d'y contrevenir. Mais hormis cette limitation, la souveraineté est donc absolue car non soumise aux « commandements d'autrui ». Elle est aussi « perpétuelle » dans le sens où elle ne peut être transférée. En effet, « s'il se peut faire qu'on donne puissance absolue à un ou plusieurs à certain temps [], ils ne se peuvent appeler Princes souverains, vu qu'ils ne sont que dépositaires, et gardes de cette puissance, jusqu'à ce qu'il plaise au peuple ou au Prince de révoquer, qui en demeure toujours saisi ». Ainsi, le détenteur de la souveraineté, qu'il soit un prince ou un peuple en demeure « toujours saisi ». Les lieutenants en charge de l'exécution de la veraineté n'en sont que dépositaires. La souveraineté, dira-t-on plus tard, est inaliénable. « Absolue » et « inaliénable » sont précisément des attributs que Rousseau donne à la souveraineté deux siècles plus tard. « Le pacte social donne au corps politique un pouvoir absolu sur tous les siens ; et c'est ce même pouvoir, qui dirigé par la volonté générale, porte, comme j'ai dit, le nom de souveraineté » [Rousseau, 1963, Livre II, Chap. IV]. La souveraineté n'a donc pas de borne et elle doit permettre à la volonté 32 générale de s'imposer aux volontés particulières. Mais, par ordre d'apparition, Rousseau affirme d'abord « que la souveraineté est inaliénable » : « si donc le peuple promet simplement d'obéir, il se dissout par cet acte, il perd sa qualité de peuple ; à l'instant qu'il y a un maître, il n'y a plus de souverain » [Rousseau, 1963, Livre II, Chap. I]. A l'état civil, la souveraineté n'est pas transférable, elle est un attribut indéfectible du souverain qui est le peuple. Enfin, Rousseau ajoute une troisième qualité à sa définition de la souveraineté : elle est indivisible. « La volonté est générale, ou elle ne l'est pas ; elle est celle du corps du peuple, ou seulement d'une partie » [Rousseau, 1963, Livre II, Chap. II]. Ici, est le coeur du problème de l'unité politique moderne : comment s'assurer de l'unité d'une volonté générale constituée par l'agrégation de volontés particulières (ou individuelles)? Pour Bodin, la souveraineté n'était pas moins indivisible, seulement cela allait sans dire. En effet, le souverain était un monarque, donc une personne. Le souverain était d'emblée incarné dans une personne physique et morale : l'indivisibilité de la souveraineté et l'unité de sa volonté étaient ainsi assurées par la personne du souverain. A l'inverse, dès lors que l'on désigne le peuple, donc une multitude, comme souverain, il devient nécessaire d'affirmer ce principe d'indivisibilité de la souveraineté et de trouver une origine à la formation d'une volonté générale. Comment former une volonté unique à partir d'une multitude? [Mairet, 1997] Par l'association de volontés individuelles ? Rousseau et Fichte comme les révolutionnaires français semblent avoir compris que la fiction du contrat d'association ne constituait pas un lien suffisamment fort pour cimenter une multitude. Le maintien et l'affermissement des caractères nationaux sont donc les seuls vecteurs d'unité possible. En éduquant la nation, il s'agit, nous dit Fichte, de donner forme à un « Moi général et national » qui défende « l'intérêt du Tout » contre l'égoïsme individuel [Fichte, 1992, p. 65]. Réduire la diversité à l'unité nécessaire à toute souveraineté, tel est l'enjeu de la définition ethno-démocratique de la nation. Notre hypothèse est que le principe de souveraineté constitue la clef de voûte de l'idée moderne de nation comme communauté ethno- 33 démocratique. En entrant dans l'ère démocratique, le principe de souveraineté se trouve confronté au problème de la délimitation de son étendue et à celui de l'unité de la volonté. Conclusions Quelles conséquences principales pouvons nous tirer de l'hypothèse que nous venons de formuler quant au caractère de nécessité que présente la nation ethno-démocratique pour l'État souverain moderne? La première est d'abord de nous positionner dans le débat entre thèses modernistes et thèses pérennialistes. Dès lors que nous prenons l'acclimatation du principe de souveraineté aux principes démocratiques comme déterminant dans la formation de la nation ethno-démocratique, nous ne pouvons que nous situer dans une perspective moderniste. Mais comme nous l'avons vu pour dans le cas français, la formation de ce concept ethno-démocratique est amorcée dès la première modernité politique. Alors que l'absolutisme monarchique progresse, prend forme la figure du peuple et de nation, à laquelle sont très tôt attachés les argumentaires ethniques et égalitaires. Déjà, dans cette première modernité politique, l'émergence des références ethniques est liée à l'affirmation du tiers état comme acteur de l'histoire et la formulation des principes égalitaires. Le peuple, à la fois ethnos et demos, fait sont entrée sur la scène politique dès Bodin, en même temps que le principe de souveraineté. C'est là la seconde, et sans doute la plus importante, des implications de ce travail exploratoire : relever les relations anciennes et complexes qu'entretiennent registres ethnique et démocratique dans 34 l'histoire des nations et nationalismes. Ces relations soulèvent un grand nombre de questions. D'abord celle des rapports entre la démocratie représentative et l'idée moderne de nation. Le principe national qui veut qu'une nation ne soit pas gouvernée par des non-nationaux a en effet souvent prévalu sur le principe proprement démocratique. Dans certains cas, on peut même considérer que les idéologies nationalistes ont constitué des versions minimales de la démocratie. La représenta tivité ethnique des gouvernants primant souvent leur représentativité politique et sociale. Dans les nationalismes les moins démocratiques qu'ait connu la France – ceux des nationalistes de la fin du XIXe et du début du XXe – le registre ethnique tient une place centrale. Comme si registre démocratique et registre ethnique étaient inversement proportionnels. Moins on accorde de place au registre démocratique, plus il est impératif de s'appuyer sur le second pilier de la nation : son origine ethnique. De là à dire que l'introduction du registre ethnique à côté du registre civique dans la définition de la nation moderne a été une façon d'escamoter les idéaux égalitaires politiques et sociaux, il y un pas que nous ferons pas.
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Cultes et sanctuaires du centre et de l'ouest de la Gaule Lyonnaise : Des antécédents gaulois à la fin des dieux (IIe s. av. n. è. - Ve s. de n. è.). Archéologie et Préhistoire. Université de Nantes, 2021. Français. &#x27E8;NNT : 2021NANT2029&#x27E9;. &#x27E8;tel-04046539&#x27E9;
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Espérandieu N° Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Commune ND ND Jardins à la Croix-Verte La Fette/La Frette ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND Jardin Faivre ou fouilles du chemin de fer Maison des Caves Joyaux (?) ND Jardin Debeaumarché ND ND Jardin de la Grange Vertus ou dans les fouilles du chemin de fer La Frette ND ND Fouilles du chemin de fer Jardin Bardoux Contexte Précision localisation Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau Marbre 20 25 20 Marbre d’Italie Calcaire 13 Calcaire 25 17 Marbre blanc Grès 75 14 16 46 6 Grès Marbre Marbre Calcaire Calcaire 19 24 Calcaire à oncolithiques Calcaire 24 17 32 30 27 14 Hauteur conservée (cm) Calcaire Calcaire oolithique Marbre d’Italie Calcaire coquillier Calcaire Calcaire oolithique Précision matériau Buste ou statue Statuette Statuette Rondebosse Rondebosse Statue Rondebosse Rondebosse Statue Petite statue Rondebosse Rondebosse Hermès bicéphale Rondebosse Statue Hermès bicéphale Rondebosse Rondebosse Autel Haut-relief Statuette Statuette Rondebosse Rondebosse Statuette Stèle Rondebosse Haut-relief Statuette Statue Rondebosse Rondebosse Statuette Statuette Rondebosse Rondebosse Statuette Précision type de représentation ou de support Rondebosse Technique de réalisation Dieu indéterminé Déesse indéterminée Dieu indéterminé Divinité indéterminée Dieu indéterminé Minerve Déesse indéterminée Mercure ; divinité indéterminée Dieu indéterminé? ; déesse indéterminée? Hercule ; Vénus ; dieu indéterminé Dieu indéterminé Dieu indéterminé? Déesse indéterminée Dieu indéterminé Déesse indéterminée Apollon? Déesse indéterminée Déesse indéterminée Dieu indéterminé Divinités onfirmation épigraphique Éduens Éduens Éduens 71.212 71.213 71.214 71.216 71.217 XIII, 8211 III, 1846 III, 1890 R.190 R.191 R.192 R.193 R.194 Éduens 71.202 71.204 71.224 71.199 71.209 III, 1861 III, 1830 III, 1828 III, 1823 R.200 R.201 R.202 R.203 R.204 Éduens 71.164 III, 1813 R.199 Éduens Éduens Éduens Éduens 71.280 III, 1838-2 R.198 Éduens Éduens 71.254 R.197 Éduens 71.225 III, 1849 R.196 Éduens 71.218 III, 1841 R.195 Éduens Éduens 71.210 III, 1865 R.189 Éduens Éduens 71.200 R.188 R.185 Éduens Éduens Cité 71.198 Autres R.187 Tremel, 2010 (Carnutes) Éduens 71.188 Lamy, 2015 (Éduens) 71.197 CAG R.186 NEsp. Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Autun Commune ND Près de la Porte Saint-André ND ND Près de la porte Saint-André Quartier SaintJean ND Près de la porte Saint-Andoche ND ND Près de la gare de marchandises, au fond d’un puits Près du théâtre ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND Contexte ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND Précision localisation Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau 27 Calcaire grossier 23 14 Marbre d’Italie Calcaire 60 48 28 87 8 Calcaire Grès Marbre blanc Calcaire Calcaire 17 27 Calcaire tendre Marbre 14 12 Calcaire Calcaire 14 52 Calcaire 15 Calcaire tendre 16 Marbre blanc Calcaire 25 10 25 21 20 Hauteur conservée (cm) Calcaire Marbre Calcaire Calcaire Calcaire Précision matériau Statuette Statuette Statuette Statuette Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Statuette Rondebosse Haut-relief Rondebosse Haut-relief Rondebosse Rondebosse Stèle Statuette Stèle Statuette Statuette Autel? Statue Rondebosse Haut-relief Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Stèle Statuette Rondebosse Haut-relief Précision type de représentation ou de support Technique de réalisation Epona Déesse indéterminée? Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Déesse indéterminée? Diane ; Junon (?) ; Mercure Déesse indéterminée? Déesse indéterminée? Dieu indé terminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé Dieu indéterminé? Déesse indéterminée? Dieu indéterminé Vénus? Tutela? Hercule Dieu indéterminé Dieu indéterminé Déesse indéterminée Déesse indéterminée Déesse indéterminée Divinités Tableau B 89.16 89.21 89.14 89.94 89.27 IV, 2884 IV, 2892 IV, 2882 IV, 2891 IV, 2885 R.219 R.220 R.221 R.222 89.20 R.216 R.218 Éduens 89.19 R.215 89.22 Éduens 89.15 R.214 IV, 2878 Éduens 71.219 III, 1832 R.213 R.217 Éduens 71.207 III, 1844 R.212 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 71.195 III, 1856 R.211 Éduens Éduens 71.182 R.210 Éduens 71.220 III, 1837 R.209 Éduens Éduens Éduens Éduens Cité 71.222 Blanchard, 2015, annexe 10, n° 11 Autres III, 1836 71.257 Tremel, 2010 (Carnutes) R.208 71-1, p. 178 71. 158 III, 1829 R.206 R.207 71.223 Lamy, 2015 (Éduens) III, 1827 CAG R.205 NEsp. Espérandieu N° Beaune Beaune Beaune Beaune Beaune Beaune Beaune Beaune Bazarnes Baubigny Barizey Avril-sur-Loire Avallon Auxerre Auxerre Auxerre Auxerre Auxerre Auxerre Commune ND Rue de Coulanges, dans les fondations d’un vieux mur ND ND ND ND Environs de Beaune Faubourg SaintJacques Le Moulin des Chartreux? Le Moulin des Chartreux? Montremenot ND ND ND Environs de Beaune Les Maladières ND Environs de Beaune ND La Fontaine du Chêne ND ND Champ de la Tour ND Villa? ND A 30 m de l’abside de l’église Centre-ville ND ND Près de l’écluse du Bâtardeau Rue Gérot ND ND ND Contexte ND ND Le Verger Précision localisation Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau 65 32 Calcaire grossier Calcaire tendre 43 Calcaire tendre 24 21 40 Calcaire tendre Calcaire coquillier 26 78 29 22 Calcaire tendre Calcaire Calcaire oolithique Calcaire Calcaire oolithique 105 55 Pierre commune Calcaire 27 34 Calcaire coquillier Calcaire 36 36 Calcaire tendre Calcaire 30 Pierre commune 60 98 Pierre commune Pierre commune Hauteur conservée (cm) Précision matériau Haut-relief Haut-relief Haut-relief Bas-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Haut-relief Bas-relief Rondebosse Stèle Stèle Stèle Bloc Stèle Stèle Stèle Statue Statuette Stèle Stèle Statue Stèle Statuette Rondebosse Haut-relief Statuette Chapiteau Statuette Stèle Statue Précision type de représentation ou de support Rondebosse Haut-relief Rondebosse Haut-relief Rondebosse Technique de réalisation Dieu indéterminé ; déesse indéterminée 3 déesses indéterminées Dieu indéterminé Diane 3 dieux indéterminés Dieu indéterminé Minerve Dieu indéterminé Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé Genius? Jupiter? Dieu indéterminé Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Mercure ; Apollon ; Mars ; déesse indéterminée Dieu indéterminé Déesse indéterminée Déesse indéterminée Divinités Tableau B Éduens 58.18 71.440 71.464 71.460 71.468 71.469 71.456 XIII, 8277 IX, 7093 et 7566 III, 2136 III, 2146 III, 2132 X, 7638 R.255 R.256 R.257 R.258 R.259 R.260 R.261 Éduens 58.17 III, 2449 R.254 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 21.231 X, 7515 R.253 Éduens Éduens 71.424 R.252 Éduens 71.423 III, 2019 R.251 Éduens Éduens 71.421 71.422 Éduens Éduens 21.227 71.420 III, 2187 IX, 7079 71-3, p. 91, fig. Espérandieu N° Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Bussières Brinon-sur-Beuvron Brèves Brazey-en-Plaine Bourbon-Lancy Bourbon-Lancy Bourbon-Lancy Bois-Sainte-Marie Bligny-lès-Beaune Champs de la Tour? Bissey-sous-Cruchaud ND ND ND ND ND ND Clocher de l’église SaintJean-des-Vignes Dans un bastion de la citadelle Eglise SaintVincent En remploi dans la muraille du castrum En remploi dans un mur ND En remploi dans un mur ND ND ND Champs-Vernois/Pré Vernoi ND ND ND ND ND ND ND Chatelot ND Le Betoté/Bétop En remploi dans l’église ND Villa Parc du château de Bièrre, le Pré des Joncs Bièrre-les-Semur Source ND ND ND ND Contexte Bassin de la source de l’Aigue Moulin des Chartreux? Précision localisation La Roche Beuvron Beaune Beaune Beaune Commune Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau Calcaire Calcaire tendre Calcaire oolithique ND Calcaire 27 81 136 90? 130 71 33 Pierre de Liais? Calcaire 22 30 Calcaire Calcaire 10 125 Marbre blanc Marbre ND ND 25 45 Calcaire ND Calcaire Calcaire 20 52 Calcaire oolithique Calcaire 10 38 67 Hauteur conservée (cm) Calcaire oolithique ND Calcaire Précision matériau Rondebosse Bas-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Statue Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Statuette Rondebosse Haut-relief Statue Autel Stèle Stèle Stèle Statuette Statuette Petite statue Autel Statue Précision type de représentation ou de support Rondebosse Bas-relief Bas-relief Haut-relief Bas- relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Bas-relief Rondebosse Technique de réalisation Déesse indéterminée 3 déesses indéterminées Mercure Déesse indéterminée Mercure Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Epona Dieu indéterminé Dieu indéterminé Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Déesse indéterminée Tutela Déesse indéterminée Epona Déesse indéterminée Déesse indéterminée Dieu indéterminé Jupiter? Divinités « Deo Mercurio », CIL XIII, 2606 = I.100 « Deo [Mercurio] »?, CIL XIII, 2607 = I.101 Confirmation épigraphique - 49 71.461 71.465 71.481 71.466 71.462 71.467 71.480 71.463 71.457 71.470 71.484 71.485 58.21 58.22 58.23 III, 2157 III, 2137 III, 2144 III, 2141 X, 7507 XIII, 8249 III, 2145 XV, 9085 XIII, 8240 III, 2129 III, 2133 III, 2134 III, 2228 III, 2230 III, 2232 R.266 R.267 R.268 R.269 R.270 R.271 R.272 R.273 R.274 R.275 R.276 R.277 R.278 R.279 71.458 R.265 71-3, p. 152 71.459 III, 2142 R.263 R.264 71.455 Lamy, 2015 (Éduens) III, 2143 CAG R.262 NEsp. Autres Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens duens ens ens Éduens Cité Champallement Champallement Champallement Chamilly Chamilly Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Chalon-sur-Saône Commune Compierre Compierre Compierre ND ND ND ND ND ND ND Travaux au Châtelet ND ND Rue Garibaldi ND ND Fouilles effectuées entre la place de Beaune et la rue SainteCroix Rue du Général Giraud ND Fouilles à l’ouest du clocher de l’église SaintJean-des-Vignes ND ND Fouilles à l’ouest du clocher de l’église SaintJean-des-Vignes Rue des Minimes, dans le rempart du castrum ND Fouilles à l’ouest du clocher de l’église SaintJean-des-Vignes ND ND Fondations de la citadelle La Teppe Salomon ND En remploi dans une porte ND ND En remploi dans une porte La Californie Contexte Précision localisation Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau Calcaire 28 43 58 Calcaire coquillier Calcaire 24 28 38 20 52 45 26 78 25 94 137 34 ND ND ND Hauteur conservée (cm) Calcaire ND Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire coquillier Calcaire Calcaire Marbre blanc Calcaire de Givry Calcaire de Givry Calcaire ND ND ND Précision matériau Autel Statuette Statuette Rondebosse Rondebosse Stèle Stèle Haut-relief Haut-relief Haut-relief èle Statuette Rondebosse Haut-relief Stèle Autel Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Statue Précision type de représentation ou de support Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Technique de réalisation Déesse indéterminée Déesse indéterminée Dieu indéterminé Dieu indéterminé Mercure Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé? Mercure Mars Dieu indéterminé Mercure Mercure Hercule Mercure Déesse indéterminée Déesse indéterminée Déesse indéterminée Vénus? Divinités Confirmation épigraphique 50 Tableau B 71.495 Éduens R.299 XI, 7812 Éduens 21.251 R.298 R.300 Éduens 21.248 X, 7567 Éduens Éduens 21.245 21.246 III, 2082 R.297 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens R.296 58.43 21.244 III, 2121 R.293 58, p. 107, fig. 66 21.235 III, 2047 R.292 R.295 71.491 III, 2166 R.291 58.42 21.234 III, 2033 R.290 58, p. Espérandieu N° Cortevaix Corgoloin Commarin (?) Comblanchien Combertault Clamecy Clamecy Cissey ND ND ND ND Moux, Pré de la Chaume Champ-SaintGermain ou Les Saints Germains ND Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre ND Pierre ND Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Habitation ND ND ND ND ND ND ND Impasse des Récollets (remploi) La Galette ND Scène Got/La Sénégot ND Chassagne-Montrachet Chaudenay-le-Château En remploi dans un mur Charrecey ND ND ND Chantenay-Saint-Imbert Chassey-le-Camp ND ND Chantenay-Saint-Imbert ND Dans un jardin Métal Dépôt de Champoulet Chantenay-Saint-Imbert Métal Dépôt de Champoulet Pierre Métal Dépôt de Champoulet ND Pierre Pierre Matériau ND ND Contexte ND ND ND ND Compierre Compierre Précision localisation Change Champoulet Champoulet Champoulet Champallement Champallement Commune Calcaire Calcaire oolithique ND Calcaire Grès Calcaire Calcaire oolithique Calcaire 41 36 ND 26 24 40 24 25 82 22 Calcaire oolithique Calcaire coquillier 45 29 14 22 Grès Calcaire Calcaire Calcaire 21 37 Calcaire oolithique Calcaire 23 24 50 35 31 Hauteur conservée (cm) Alliage cuivreux Alliage cuivreux Alliage cuivreux Calcaire Calcaire Précision matériau Statuette Rondebosse Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Bas-relief Haut-relief Rondebosse Bas-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Statuette Stèle Autel Stèle Stèle Stèle Petite statue Statue Statuette Rondebosse Rondebosse Stèle Statuette Statuette Haut-relief Rondebosse Rondebosse Statuette Statuette Rondebosse Rondebosse Précision type de représentation ou de support Technique de réalisation Dieu indéterminé ; déesse indéterminée u indéterminé Epona Vulcain Dieu indéterminé Déesse indéterminée Dieu indéterminé Epona Déesse indéterminée Dieu indéterminé Epona Epona Divinité indéterminée? Bacchus Déesse indéterminée Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Epona Rosmerta Mercure Dieu indéterminé Silvanus Divinités « D(eae) Rosmer/t(a)e Dubno/caratiaci », AE 1980, 643 = I.108 « Deo Merc(urio) / Dubnocara/tiaco », AE 1980, 641 = I.106 Confirmation épigraphique - 51 58.47 58.46 58.45 58.48 58.50 21.253 89.43 89.42 21.256 21.257 21.258 71.501 58.51 71.502 71.514 71.517 XIII, 8274 II, 1547 XV, 9103 XV, 9104 III, 2330 IV, 2925 IV, 2922 III, 2032 III, 2035 III, 2025 III, 2139 III, 2208 XIII, 8258-a3 III, 2131 XIII, 8264 R.302 R.303 R.304 R.305 R.306 R.307 R.308 R.309 R.310 R.311 R.312 R.313 R.314 R.315 R.316 Lamy, 2015 (Éduens) XV, 9102 CAG R.301 NEsp. Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens É du ens Éduens Cité Dracy-le-Fort Dennevy ND ND Sous l’église En remploi dans un mur ND Dampierre-sous-Bouhy Les Chazeaux/ Les Chaseaux Villa La Motte Pasquier/Les Pasquiers, sur un massif de béton à 5 m en avant de la façade d’une villa Demigny ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND Damerey Le Chatelet ND Cussy-la-Colonne (?) Cussy-le-Châtel Les Gorres ND Cussy-la-Colonne Crain Dans un puits Près de Vellnosse Courcelles-lès-Semur Crain ND Cosne-Cours-surLoire (?) Dans un puits Cosne-Cours-surLoire En remploi dans le mur d’une remise ND Dans les ruines d’un bombardement Cosne-Cours-surLoire Cosne-Cours-surLoire ND Dans le mur d’une remise (remploi) Cosne-Cours-surLoire ND Contexte Précision localisation Commune Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau 75 22 Pierre commune Pierre commune Calcaire oolithique Calcaire Calcaire 72 25 8 65 105 Marbre blanc Calcaire 23 19 Calcaire Calcaire tendre 1160 13 Calcaire tendre Calcaire 12 53 17 29 47 Hauteur conservée (cm) Calcaire Calcaire ND ND Calcaire Précision matériau Petite statue Statue Rondebosse Rondebosse Bas-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Haut-relief Haut-relief Bas-relief Autel Stèle Statue Laraire Statue Stèle Stèle Colonne Statue Statuette Rondebosse Rondebosse Statue Statuette Stèle Stèle Précision type de représentation ou de support Rondeboss Rondebosse Haut-relief Haut-relief Technique de réalisation Dieu indéterminé 2 dieux indéterminés ; déesse indéterminée Divinité indéterminée Dieu indéterminé Dieu indéterminé Dieu indéterminé Mercure Junon ; 3 dieux indéterminés ; 2 déesses indéterminées ; 2 divinités indéterminées Mars? Minerve Divinité indéterminée Déesse indéterminée? Jupiter? Divinité indéterminée Divinité indéterminée Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Divinités Stèle associée : « Dea(e) Miner[uae] », CIL XIII, 2892 = I.111 Confirmation épigraphique 52 Tableau B Éduens 58.96 R.328 58.144 58.145 58.146 III, 2262 III, 2300 III, 2261 R.329 R.330 R.331 Éduens Éduens Éduens Éduens R.326 58.121 Éduens 58.86 R.327 Éduens Éduens 58.105 58.109 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Cité 58.84 Autres Éduens III , 2243 58, p. 145, fig. 112 58, p. 145, fig. 111 21. 263 Tremel, 2010 (Carnutes) 58.67 R.325 R.324 R.323 R.322 III, 2345 71.524 71-3, p. 192 R.320 R.321 71.523 71-3, p. 192 21.261 III, 2327 R.318 R.319 21.260 Lamy, 2015 ( Éduens ) III, 2338 CAG R.317 NEsp. Espérandieu N° Les Hopitaux, dans une cave Entrains-sur-Nohain Habitation ND ND ND ND ND ND Les Hopitaux, fond d’une cave Cimetière privé de la famille Hunolstein En r emploi dans le mur d’une épicerie du bourg En remploi dans un garage Environs d’Entrains-sur-Nohain Environs d’Entrains-sur-Nohain Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur- Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains- sur-Nohain Habitation Les Hop i taux, dans une cave En trains -sur-No hain Habitation Habitation Entrains-sur-Nohain ND Dans une carrière entre le bois de la Perrière et la route N 985 Les Hopitaux, dans la cave nord, au centre d’une niche, à proximité de deux petits vases ND Dans une carrière entre le bois de la Perrière et la route N 985 ND ND ND Contexte Château Château Précision localisation Bergerosse Echalot Dyo Dyo Duesme Duesme Commune Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau Calcaire Calcaire tendre Calcaire Calcaire Calcaire oolithique Calcaire de Chevigny Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire 20 37 11 25 59 265 9 46 11 27 120 Calcaire oolithique Calcaire oolithique 42 45 56 82 Hauteur conservée (cm) Grès Calcaire coquillier Calcaire Calcaire Précision matériau Rondebosse Rondebosse Rondebosse Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Haut-relief Haut-relief Rondebosse Bas-relief Haut-relief Rondebosse Bas-relief Haut-relief Technique de réalisation Statuette Statuette Statuette Stèle Statue colossale Statue colossale Petite statue Stèle Stèle Statuette Stèle Stèle Petite statue Stèle Autel Précision type de représentation ou de support Dieu indéterminé Déesse indéterminée Déesse indéterminée Die indéterminé Dieu indéterminé? Apollon Dieu indéterminé? Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé? Dieu indéterminé Minerve Cautès? Dieu indéterminé? Déesse indéterminée? Hercule ; Vulcain ; Mars ; Minerve Divinités Confirmation épigraphique - 53 58.150 III, 2247 R.335 58.152 58.153 58.154 58.155 58.156 58.157 58.158 58.159 58.160 58.161 III, 2255 III, 2256 III, 2313 III, 2293 III, 2246 III, 2251 III, 2282 III, 2301 III, 2273 IX, 7096 et XIII, 8279 R.337 R.338 R.339 R.340 R.341 R.342 R.343 R.344 R.345 R.346 58.151 58.149 III, 2242 R.334 58, p. 164 58.148 III, 2319 R.333 R.336 58.147 Lamy, 2015 (Éduens) III, 2245 CAG R.332 NEsp. Cité ND ND ND ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Environs d’Entrains-sur-Nohain Environs d’Entrains-sur-Nohain Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Environs d’Entrains-sur-Nohain ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Environs d’Entrains-sur-Nohain ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Environs d’Entrains-sur-Nohain ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Contexte Précision localisation Commune Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau Calcaire Calcaire tendre Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire tendre Calcaire Calcaire Calcaire tendre Calcaire Calcaire tendre Grès ferrugineux Calcaire tendre Précision matériau 20 37 76 27 30 21 82 33 32 27 31 38 38 34 15 Hauteur conservée (cm) Haut-relief Bas-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse ebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Technique de réalisation Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Statuette Statuette Statuette Statuette Statuette Statuette Statuette Statuette Précision type de représentation ou de support Sol ou Mithra Sol Dieu indéterminé Séléné? Mercure Epona Jupiter Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé Dieu indéterminé Mercure Dieu indéterminé? Divinités Confirmation épigraphique 54 Tableau B Éduens Éduens Éduens 58.164 58.165 58.171 58.129 58.87 III, 2253 III, 2258 III, 2252 R.349 R.350 R.351 R.352 R.353 Éduens 58.112 58.74 58.79 58.65 58.69 58.72 III, 2274 III, 2264 III, 2248 et 2284 III, 2241 III, 2296 R.361 R.362 R.363 R.364 58.70 58, p. 148, fig. 114 R.359 R.360 58.68 58, p. 148 R.358 R.357 Éduens 58.111 58, p. 148 R.356 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 58.94 58, p. 148 R.355 Éduens 58.93 58, p. 148 R.354 Éduens Éduens Éduens Éduens 58.163 Cité III, 2254 Autres R.348 Tremel, 2010 (Carnutes) 58.162 Lamy, 2015 (Éduens) III, 2259 CAG R.347 NEsp. Espérandieu N° ND ND Les Hopitaux Les Hopitaux Les Hopitaux Les Hopitaux Les Hopitaux Les Hopitaux, dans une fosse dépotoir Les Hopitaux, dans une fosse dépotoir Lit du Nohain Lit du Nohain? Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND ND La Bretonnière Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND Environs d’Entrains-sur-Nohain? Entrains-sur-Nohain ND ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND Environs d’Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND Contexte Précision localisation Commune Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire tendre Calcaire tendre Calcaire oolithique Calcaire Calcaire tendre Calcaire tendre Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Précision matériau 30 76 70 60 17 54 56 8 19 18 27 22 20 34 28 19 28 21 Hauteur conservée (cm) Rondebosse Rondebosse Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Bas-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Technique de réalisation Statue Petite statue Autel Petite statue Petite statue Petite statue Petite statue Statue Stèle Statuette Statuette Statuette Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Précision type de représentation ou de support Déesse indéterminée Esculape? Genius? Dieu indéterminé? Mithra Dieu indéterminé Déesse indéterminée Dieu indéterminé? 3 divinités indéterminées Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Déesse indéterminée Dieu indéterminé? Dieu indéterminé ; déesse indéterminée 2 déesses indéterminées Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé? Dieu indéterminé Divinités « Deo / [inu]icto Myt(hrae) », CIL XIII, 2906 = I.117 Confirmation épigraphique - 55 58.81 58.88 58.95 III, 2272 III, 2240 R.369 R.370 58.101 58.103 58.108 58.110 III, 2277 III, 2279 III, 2289 III, 2271 R.375 R.376 R.377 R.378 R.384 III, 2263 58.125 III, 2288 R.382 58.107 58.126 58.124 III, 2286 R.381 R.383 58.123 XV, 9100 R.380 58, p. 142 58.100, 102 et 104 III, 2276, 2278 et 2287 R.374 58.122 58.99 III, 2275 R.373 R.379 58.97 III, 2283 R.372 58, p. 155, fig. 125 Éduens 58.80 III, 2270 R.368 R.371 Éduens 58.78 III, 2267 R.367 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 58.75 Cité III, 2291 Autres R.366 Tremel, 2010 (Carnutes) 58.73 Lamy, 2015 (Éduens) III, 2268 CAG R.365 NEsp. Espérandieu N° ND ND ND ND ND Quartier des Joncs Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND ND ND ND Entrains-sur-Nohain ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND Contexte Entrains-sur-Nohain ND ND Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND Entrains-sur-Nohain ND ND Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND Entrains-sur-Nohain ND ND Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND Entrains-sur-Nohain ND ND Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain ND Entrains-sur-Nohain ND ND Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Précision localisation Commune Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau Calcaire Calcaire tendre Calcaire Calcaire tendre Marbre blanc Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire tendre Calcaire 33 13 13 12 24 27 24 15 30 32 22 29 Calcaire tendre Calcaire 43 16 25 60 40 18 13 35 Hauteur conservée (cm) Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire tendre Calcaire tendre Calcaire sablonneux Calcaire Calcaire à entroques Précision matériau Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Bas-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Technique de réalisation Stèle Petite statue Petite statue Petite statue Petite statue Statue Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Statuette Petite statue Statuette Statuette Petite statue Petite statue Précision type de représentation ou de support Dieu indéterminé Dieu indéterminé? Dieu in déterminé? Dieu indéterminé? Dieu indéterminé? Dieu indéterminé? Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé? Mithra Mithra Mithra Sol ; Mithra Dieu indéterminé Déesse indéterminée? Epona Déesse indéterminée Déesse indéterminée Déesse indéterminée Dieu indéterminé? Déesse indéterminée Divinités Associé à un ex-voto dédié à Borvo (CIL XIII, 2901 = I.112 Confirmation épigraphique 56 Tableau B Éduens Éduens 58.137 89.49 R.393 R.394 Éduens Éduens 89.51 89.52 R.396 R.397 89.55 89-1, p. 350, fig. 405 R.400 21.264 89.54 89-1, p. 350 R.399 R.401 89.53 89-1, p. 350, fig. 403 R.398 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens R.395 89.50 III, 2325 Éduens 58.136 R.392 89-1, p. 349-350, fig. 402 Éduens 58.83 58, p. 162, fig. 129 R.391 Éduens 58.82 58, p. 154, fig. 119 Éduens Éduens R.390 58.98 III, 2244 R.388 Éduens Éduens Éduens Cité 58.71 58.85 III, 2280 R.387 Autres 58, p. 153154 58.77 III, 2265 R.386 Tremel, 2010 (Carnutes) R.389 58.66 Lamy, 2015 (Éduens) III, 2269 CAG R.385 NEsp. Espérandieu N° Quartier SaintCyr Quartier SaintCyr Quartier SaintCyr Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Essey Pierre Monument à arcades d’EscolivesSainteCamille ND ND Près de la source de l’Armançon ND ND ND Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Monument à arcades d’EscolivesSainteCamille ND Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau ND ND ND ND ND ND ND ND ND Contexte Le Champ des Tombeaux Le Champ des Tombeaux Escolives-Sainte-Camille Escolives-Sainte-Camille Le Champ des Tombeaux Le Champ des Tombeaux Escolives-Sainte-Camille Escolives-Sainte-Camille Le Champ des Tombeaux Le Champ des Tombeaux Escolives-Sainte-Camille Escolives-Sainte-Camille ND Entrains-sur-Nohain (?) Le Champ des Tombeaux ND Entrains-sur-Nohain (?) Escolives-Sainte-Camille Stabulation Billault Route d’Etais? Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Route d’Etais Quartier SaintCyr Entrains-sur-Nohain Entrains-sur-Nohain Précision localisation Commune Calcaire oolithique Calcaire Calcaire de Tonnerre Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire Calcaire 63 152 134 90 125 63 47 46 9 64 31 24 Calcaire grossier Calcaire tendre 22 46 32 24 40 Hauteur conservée (cm) Calcaire tendre Calcaire tendre Calcaire tendre Calcaire tendre Calcaire Précision matériau Statue Statuette Rondebosse Rondebosse Rondebosse Haut-relief Bas-relief Bas-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Petite statue Stèle Pilier Pilier Bloc Bloc Bloc Bloc Statuette Rondebosse Haut-relief Statuette Petite statue Stèle Statuette Statuette Laraire Précision type de représentation ou de support Rondebosse Rondebosse Haut-relief Rondebosse Rondebosse Haut-relief Technique de réalisation 2 déesses indé terminées Rosmerta Mars ; Junon ; Mercure ; Hercule Fortune ; Hercule ; Vénus ; Vulcain Victoire Hercule? Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé Déesse indéterminée? Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé Dieu indéterminé Déesse indéterminée Hercule Dieu indéterminé Déesse indéterminée Déesse indéterminée Divinités « Dea(e) Rosmertae », AE 1968, 306 = I.122 Confirmation épigraphique - 57 71.534 21.283 21.284 21.285 III, 2188 III, 2045 R.408 R.409 R.410 R.411 R.422 R.421 III, 2002 71.546 71.538 71-4, p. 430, fig. 196 XV, 9149 R.420 89.73 21.294 III, 2039 R.419 89-1, p. 435, fig. 591 21.293 III, 2036 R.418 89.72 89.71 IV, 2912-3 R.416 89-1, p. 419, fig. 559 89.67 IV, 2912-2 R.415 R.417 89.69 IV, 2902 89.66 R.414 R.413 89-1, p. 386, fig. 466 21.282 XIII, 8227 R.407 21.291 Éduens 21.271 IX, 7102 R.406 III, 2322 Éduens 71.532 III, 2110 R.405 R.412 Éduens 21.268 IX, 7108-2 R.404 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 21.268 Cité IX, 7108-1 Autres R.403 Tremel, 2010 (Carnutes) 21.267 Lamy, 2015 (Éduens) IX, 7104 CAG R.402 NEsp. Espérandieu N° Abbaye SaintPierre (remploi) Abbaye SaintPierre (remploi) Flavigny-sur-Ozerain Flavigny-sur-Ozerain ND Grésigny-Sainte-Reine Lally Laives Joux-la-Ville Jouey Jouey Hauterive Gy-L’Eveque Gy-L’Eveque Gy-L’Eveque ND Villa ND La Queue des Mouilles Les Bouchies, dans la cave d’une villa Le moulin de Thiot ND ND La Queue des Mouilles Vergennes ND ND ND ND Villa ND Villa? Villa? Dans les bois ND ND ND La Tête de Fer Le Landran Gissey-sous-Flavigny Grimault Le Landran Gissey-sous-Flavigny ND ND Environs de Gilly-sur-Loire Bourg ND ND La Bussière ND ND ND La Fontaine Saint-Martin, Lès Morvandiot Gissey-le-Vieil Gilly-sur-Loire Gilly-lès-Citeaux Fresnes Fontaines Source Source de la Coquille Etalante ND Contexte Précision localisation Commune Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau 20-25 20-25 Calcaire tendre Calcaire tendre Grès Calcaire Calcaire Pierre siliceuse Calcaire 120 35 7 20 38 16 94 Pierre commune Calcaire 18 45 40 40 56 Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire Calcaire Calcaire 23 32 Calcaire gréseux Calcaire 11 40 ND ND 52 Hauteur conservée (cm) Grès ou granite Calcaire ND ND Calcaire Précision matériau Petite statue Statue Rondebosse Rondebosse Haut-relief Haut-relief Rondebosse Haut-relief Rondebosse Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Haut-relief Stèle Stèle Statuette Stèle Statuette Stèle Statue Statue Statue Statuette Stèle Statue Statue Rondebosse Rondebosse Stèle Petite statue Stèle Pilier Pilier Stèle Précision type de représentation ou de support Haut-relief Rondebosse Haut-relief Bas-relief Bas-relief Haut-relief Technique de réalisation Dieu indéterminé Dieu indéterminé Genius? Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Déesse indéterminée Mercure? Divinité indéterminée? Mars? Vénus Déesse indéterminée Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé Mars ou Minerve Déesse indéterminée Apollon Epona Déesse indéterminée? Epona Mars ; dieu indéterminé ; Victoire Apollon? ; Fortune ; Victoire Dieu indéterminé Divinités Confirmation épigraphique 58 Tableau B Éduens 71.558 21.323 XV, 9015 R.436 21.324 21.337 21.338 III, 2394 III, 2392-1 III, 2392-2 R.438 R.439 R.440 R.437 Éduens 21.321 III, 2326 R.435 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 21.320 IX, 7101 Éduens 58.174 Éduens Éduens Éduens 71.548 58.173 Éduens 71.552 Éduens Éduens 21.299 89.74 Éduens 21.311 Éduens Éduens Cité 21.310 Autres Éduens Tremel, 2010 (Carnutes) 21.308 Lamy, 2015 (Édu ens ) R.434 89-1, p. 447, fig. 608 69-1, p. 405 CAG 21.317 NEsp. III, 2038 III, 2183 IX, 7089 IV, 3584 III, 2332 Espérandieu R.433 R.432 R.431 R.430 R.429 R.428 R.427 R.426 R.425 R.424 R.423 N° ND Rue des Epinoches Source SaintCyr? Près de la source Saint-Cyr Près de la source Saint-Cyr Près de la source Saint-Cyr Massingy-lès-Vitteaux Massingy-lès-Vitteaux Massingy-lès-Vitteaux Massingy-lès-Vitteaux Eglise du village (remploi) Marigny-le-Cahouët Le Poulailler ND Marcilly-lès-Vitteaux Marmagne ND Environs de Maligny Maligny Pierre Pierre Pierre Pierre Sanctuaire de la source Saint-Cyr Sanctuaire de la source Saint-Cyr Sanctuaire de la source Saint-Cyr Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau ND ND ND ND ND ND ND Environs de Mâcon ND Villa ND ND Près du Gué de Saint-Martin Pile Tâche ND ND ND Magny-Cours Magny-Cours Mâcon Mâcon Lichères-sur-Yonne L’Etang-Vergy Lechâtelet Lechâtelet Dans la Saône ND Cimetière de Lantilly Lantilly ND La Pyramide Lamure-sur-Azergues Contexte Précision localisation Commune 44 17 14 Calcaire tendre Calcaire oolithique Marbre blanc Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire 21 20 11 10 25 105 45 130 19 Marbre blanc Calcaire oolithique 32 51 Calcaire Calcaire coquillier 56 30 Calcaire oolithique Calcaire 45 ND Hauteur conservée (cm) Calcaire Calcaire Précision matériau Rondebosse Rondebosse Haut-relief Rondebosse Haut-relief Bas-relief Bas-relief Bas-relief Statuette Statuette Stèle Statuette Stèle Autel Autel Autel Statuette Statue Rondebosse Rondebosse Stèle Stèle Statue Statue Stèle Statuette Statuette Statue Précision type de représentation ou de support Haut-relief Haut- relief Rondebosse Rondebosse Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Technique de réalisation Dieu indéterminé? Dieu indéterminé? Déesse indéterminée? Dieu indéterminé? Dieu indéterminé Dieu indéterminé 2 déesses indéterminées ; dieu indéterminé Minerve ; 3 divinités indéterminées Vénus Apollon ou Diane Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Déesse indéterminée Bacchus? Divinité indéterminée? Tutela Dieu indéterminé Dieu indéterminé Apollon Divinités Confirmation épigraphique - 59 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 21.347 21.345 21.346 71.564 71.563 21.355 58.176 58.177 58.178 58.179 58.180 III, 2118 III, 2072 III, 2067 III, 2123 III, 2128 III, 2001 R.443 R.444 R.445 R.446 R.447 R.448 R.449 R.450 R.451 R.452 R.453 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 21.340 Cité III, 2393 Autres R.442 Tremel, 2010 (Carnutes) 21.339 Lamy, 2015 (Éduens) III, 2392-3 CAG R.441 NEsp. Espérandieu N° Ménestreau Ménestreau Ménestreau Ménestreau Ménestreau Meloisey Mellecey Mellecey Mavilly Mavilly Mavilly Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre ND Sanctuaire de Ménestreau Sanctuaire de Ménestreau Sanctuaire de Ménestreau Sanctuaire de Ménestreau Sanctuaire de Ménestreau Le Montot/En Montot La Chaume du Sauveur La Chaume du Sauveur La Chaume du Sauveur La Chaume du Sauveur La Chaume du Sauveur Pierre ND En remploi dans des fondations ou dans un mur Pierre Pierre Pierre ND ND ND En remploi ND ND ND La Renouille/En Renouilles Pierre Pierre Sanctuaire de la source Saint-Cyr Près de la source Saint-Cyr Massingy-lès-Vitteaux Pierre Sanctuaire de la source Saint-Cyr Près de la source Saint-Cyr Massingy-lès-Vitteaux Matériau Contexte Précision localisation Commune Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Grès Calcaire ND Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Précision matériau ND 63 ND ND ND 35 110 60 187 90 24 24 22 Hauteur conservée (cm) Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Bas-relief Haut-relief Relief Bas-relief Bas-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Technique de réalisation Statue Statue colossale Statue Statue colossale Statue Stèle Stèle Stèle Autel Autel Stèle Statuette Statuette Précision type de représentation ou de support Hercule Apollon Dioscure? Apollon Hercule Dieu indéterminé? Epona Mercure Jupiter ; Neptune ; Vulcain ; Vénus ; Mars ; Minerve? ; Mercure ; 3 déesses indéterminées ; 2 dieux indéterminés Mercure ; dieu indéterminé ; déesse indéterminée ; 2 divinités indéterminées Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé? Dieu indéterminé? Divinités « Deo Mercurio », CIL XIII, Tableau B 21.373 21.381 71.572 XIII, 8234 III, 2034 R.464 R.465 R.468 R.467 IX, 7155 Éduens 21.374 III, 2117 R.463 R.466 Éduens 21.375 III, 2112 R.462 Éduens Éduens P.40 P.14 Éduens Éduens Éduens Éduens 71.569 III, 1994 R.461 Éduens Éduens 58.186 R.459 71.566 Éduens 58.185 R.458 X, 7560 Éduens 58.184 R.457 R.460 Éduens 58.183 Cité R.456 Autres Éduens Tremel, 2010 (Carnutes) 58.182 Lamy, 2015 (Éduens) R.455 CAG Éduens NEsp. Espérandieu R.454 N° Pierre Pierre Sanctuaire de Ménestreau Sanctuaire de Ménestreau ND La Chaume du Sauveur La Chaume du Sauveur En remploi à Bourgneuf Villa ND ND Les Chauzeaux/ Les Chazeaux En Roussot Hameau du Grand Bourgueil ND ND Meursault Montceau-et-Echarnant Mont-SaintVincent ND (confins Yonne et Nièvre) ND (dans le département de l’Yonne) ND ND ND ND Pierre Sanctuaire de Ménestreau La Chaume du Sauveur Les Chauzeaux/ Les Chazeaux Pierre Sanctuaire de Ménestreau La Chaume du Sauveur ND Pierre Sanctuaire de Ménestreau La Chaume du Sauveur ND Pierre Sanctuaire de Ménestreau La Chaume du Sauveur Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau Contexte Précision localisation Les Narvaux Meursault Meursault Mesvres Mercurey Ménestreau Ménestreau Ménestreau Ménestreau Ménestreau Ménestreau Commune Calcaire Calcaire dur Calcaire Calcaire 43 31 50 35 69 29 Calcaire oolithique ND 35 14 Marbre rouge Calcaire 34 17 15 10 15 ND 26 Hauteur conservée (cm) Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Précision matériau Haut-relief Haut-relief Bas-relief Haut-relief Rondebosse Haut-relief Haut-relief Rondebosse Bas-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Technique de réalisation Stèle Stèle Stèle Stèle Statue Stèle Stèle Buste ou statue Stèle Statuette Statuette Statuette Statuette Statue Statue Précision type de représentation ou de support Epona Saturne ; Apollon ; Séléné ; Mars ; Mercure ; Jupiter ; Vénus Déesse indéterminée Dieu indéterminé Divinité indéterminée Epona Divinité indéterminée Mercure Dieu indéterminé Divinité indéterminée Divinité indéterminée Divinité indéterminée Divinité indéterminée Mars Dieu indéterminé Divinités .12 P.17 P.15 58.335 58.334 58.331 58.332 58.333 IV, 2894 IV, 2899 IV, 2909 III, 2181 IX, 7095 III, 2198-2 III, 2198-1 III, 2192 R.472 R.473 R.474 R.475 R.476 R.477 R.478 R.479 21.490 21.468 21-3, p. 18, fig. 45 R.485 21.384 III, 2028 R.483 21-3, p. 25, fig. 62 58.336 XIII, 8272 R.482 R.484 58.330 XV, 9096 R.481 58.329 89.77 IV, 2888 R.471 58, p. 209 89.32 IV, 2883 R.470 R.480 P.16 Lamy, 2015 (Éduens) IV, 2881 CAG R.469 NEsp. , 2010 ) , 2015, annexe 9, n 132 Autres Éduens Cité ND ND ND ND Dans les fondations de l’ancienne citadelle Démolition de l’hôtel de la marquise de Remigny ND (musée d’Auxerre) ND (musée d’Auxerre) ND (musée d’Auxerre) Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Nolay Nevers Nevers Nevers Nevers Nevers Nevers Nevers Les Bolards Les Bolards, dans une cave Pierre Pierre Mithraeum des Bolards Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau Habitation ND ND Rue Saint-Martin ND ND ND Place de la République, dans une fosse dépotoir Rue Remigny ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND (musée d’Auxerre) Nevers ND ND ND (musée d’Auxerre) ND ND ND (musée d’Auxerre) Contexte Précision localisation Commune Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Pierre commune Pierre commune Pierre commune ND Pierre commune Pierre commune Précision matériau 18 26 35 63 27 25 25 21 12 30 45 40 45 18 30 51 40 Hauteur conservée (cm) Statuette Rondebosse Rondebosse Haut-relief Haut-relief Edicule avec divinités Stèle Stèle Pied de cartibulum Statuette Rondebosse Haut-relief Statue Rondebosse Statuette Statuette Rondebosse Rondebosse Statuette Stèle Stèle Statuette Statuette Statuette Petit autel Statuette Précision type de représentation ou de support Rondebosse Haut-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Haut-relief Rondebosse Technique de ré Mercure ; dieu indéterminé ; déesse indéterminée Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Divinité indéterminée Apollon? Déesse indéterminée Déesse indéterminée Jupiter? Mercure? Dieu indéterminé Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Déesse indéterminée Mercure Dieu indéterminé Déesse indéterminée Dieu indéterminé Déesse indéterminée Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Tableau B Éduens Éduens Éduens 21.482 21.483 21.532 21.493 21.486 21.494 21.477 21.478 XV, 9066 XV, 9066 XV, 9067 XV, 9061 XV, 9059 III, 2064 R.488 R.489 R.490 R.491 R.492 R.493 R.494 R.495 Éduens 21.481 21.484 21.487 21.495 XV, 9054 XV, 9062 XV, 9053 R.499 R.500 R.501 R.502 Éduens 21.474 XV, 9056 R.498 Éduens Éduens Éduens Éduens 21.471 XV, 9055 R.497 Éduens 21.485 XIII, 8220 R.496 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 21.480 Cité XV, 9064 Autres R.487 Tremel, 2010 (Carnutes) 21.469 Lamy, 2015 (Éduens) XV, 9065 CAG R.486 NEsp. Espérandieu N° ND En remploi de le mur d’un habitation La Chapelle Les Bolards Les Bolards Les Bolards ND ND ND ND ND ND Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND ND Dans un puits Nuits-SaintGeorges Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Mithraeum des Bolards Les Bolards Nuits-SaintGeorges Pierre Mithraeum des Bolards Les Bolards Nuits-SaintGeorges Pierre Mithraeum des Bolards Les Bolards Nuits-SaintGeorges Pierre Mithraeum des Bolards Les Bolards Nuits-SaintGeorges Pierre Mithraeum des Bolards Les Bolards Nuits-SaintGeorges Matériau Contexte Précision localisation Commune Calcaire Calcaire oolithique Calcaire Calcaire Calcaire Marbre blanc Calcaire Calcaire oolithique Marbre blanc Calcaire Calcaire Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire Calcaire oolithique Calcaire oolithique Précision matériau 35 17 27 34 10 14 19 12 ND 40 30 50 10 13 10 82 21 Hauteur conservée (cm) Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Haut-relief Rondebosse Rondebosse Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Technique de réalisation Stèle Stèle Stèle Stèle Statuette Statue Stèle Petite statue Statuette Stèle Stèle Stèle Petite statue Stèle Stèle Stèle Statue Précision type de représentation ou de support 3 déesses indéterminées Dieu indéterminé Déesse indéterminée Dieu indéterminé Vénus? Vénus? Minerve Déesse indéterminée Vénus 3 déesses indéterminées Dieu indéterminé 3 déesses indéterminées Déesse indéterminée? Figure masculine mithriaque Figure masculine mithria que Cautès Cautopatès? Divinités Confirmation épigraphique - 63 21.492 21.479 21.491 21.488 21-3, p. 13, fig. 24-25 21-3, p. 16 21-3, p. 13, fig. 22 21-3, p. 27 R.505 R.506 R.507 R.508 21.545 21.551 21.555 III, 2075 R.517 Éduens Éduens Éduens 21.550 IV, 3590 Éduens Éduens 21.547 R.516 R.515 R.514 III, 2323 Éduens 21.544 III, 2343 R.512 R.513 Éduens 71.580 XIII, 8247 Éduens R.511 89.78 XV, 9151 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens É duens Éduens Cité R.510 Autres III, 2066 Tremel, 2010 (Carnutes) R.509 89-2, p. 519, fig. 730a et b 21.476 21-3, p. 10-11 R.504 21.542 21.475 21-3, p. 1011, fig. 17 R.503 NEsp. Lamy, 2015 (Éduens) Espérandieu CAG N ° ND Environs de Pouilly-enAuxois Puligny-Montrachet Pouilly-sur-Saône Pouilly-en-Auxois ND ND Sur les bords de la Brenne Pouillenay Cimetière de Puligny-Montrachet Villa Dans un sondage révélant les vestiges d’une villa Poiseul-la-Ville-etLaperrière ND ND Près de la source du Revinson Poiseul-la-Grange Dans la Saône ND En remploi dans le mur d’une grande au hameau du Port Ouroux-sur-Saône ND ND A 250 m au sudest de l’église Ouanne ND Pierre SancLes Bolards, tuaire des dans le sacellum Bolards Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges (?) Pierre Sanct uaire des Bolards Les Bolards , dans le puits de la cour sud du grand temple Nuits -SaintGeorges Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Sanctuaire des Bolards Pierre Les Bolards, dans le puits de la cour sud du grand temple Pierre Sanctuaire des Bolards Nuits-SaintGeorges Pierre Sanctuaire des Bolards Sanctuaire des Bolards M atériau Contexte Les Bolards Les Bolards Les Bolards Précision localisation Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Nuits-SaintGeorges Commune Calcaire tendre ND Calcaire coquillier Calcaire Calcaire oolithique Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire oolithique Calcaire Calcaire Calcaire oolithique Calcaire Calcaire Précision matériau 20 44 17 48 37 150-200 25 22 38 ND 47 5 18 14 28 Hauteur conservée (cm) Statuette Statue Rondebosse Rondebosse Bloc Autel Statue Stèle Stèle Statuette Stèle Stèle Stèle Statuette Stèle Statuette Statuette Précision type de représentation ou de support Haut-relief Haut-relief Rondebosse Haut-relief Haut-relief Rondebosse Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Haut-relief Rondebosse Rondebosse Technique de réalisation Dieu indéterminé Déesse indéterminée? Sol ; Sélé né ; deux divinités indéterminées Mercure ; 4 dieux indéterminés ; 3 déesses indéterminées Minerve Déesse indéterminée Epona Dieu indéterminé Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Epona? Déesse indéterminé ; dieu indéterminé ; divinité hermaphrodite indéterminée Dieu indéterminé? 2 déesses indéterminées Vénus Vénus Divinités Confirmation épigraphique 64 Tableau B III, 2219 R.518 71.591 89.91 89.92 III, 2125 IV, 2910-1 IV, 2910-2 R.527 R.528 R.529 71.649 71.603 71-3, p. 102 R.533 R.534 71.602 71-3, p. 102, fig. 21 R.532 R.531 III, 2004 71.593 III, 2127 R.526 Blanchard, 2015, annexe 11, n° 22 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 71.594 III, 2126 R.525 Éduens 71.601 71.586 IX, 7083 R.524 Éduens Éduens 58.347 III, 2202 R.523 Éduens Éduens Éduens 58.354 58.346 III, 2210 R.522 R.530 71.584 III, 2135 R.521 Blanchard, 2015, annexe 10, n° 187 Éduens Cité 89.81 Autres Éduens Tremel, 2010 (Carnutes) 89.82 Lamy, 2015 (Édu ens ) 21.557 58, p. 230 CAG IX , 7098 NEsp. R.520 R.519 Espérandieu N° ND ND Entre les hameaux de Petit et de Grand Chatenay Entre les hameaux de Petit et de Grand Chatenay Sainte-Hélène Saint-Boil Saint-Boil Saint-Boil Champ-Mathey En Noizeret En Noizeret En Noizeret Pierre Pierre Atelier de sculpture ND Pierre Atelier de sculpture Pierre Atelier de sculpture Charancy Saint-Aubin-desChaumes Pierre Pierre ND Travaux du chemin de fer d’Auxerre à Nevers Saint-Agnan Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Matériau ND ND Saint-Agnan Travaux du chemin de fer d’Auxerre à Nevers ND En remploi dans les murs de la chapelle d’Agneux ND ND En Remenot ND ND En remploi dans un mur La Plaine ND Dans un champ ND ND Environs de Quarré-lesTombes Moulin Colas Contexte Précision localisation Les Vingt-CinqJournaux Rully Rully Rully Royer Rouy Rouy Remigny Quémigny-sur-Seine Quarré-les-Tombes Quarré-les-Tombes Commune 44 34 Calcaire oolithique 64 46 29 22 36 116 Calcaire pisolithique Calcaire pisolithique Calcaire pisolithique Calcaire Calcaire tendre Calcaire tendre Grès 36 28 Calcaire oolithique Calcaire 44 53 10 22 Calcaire Calcaire oolithique Marbre blanc Calcaire 50 37 Marbre blanc Calcaire 29 Hauteur conservée (cm) Calcaire Précision matériau Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Bas-relief Rondebosse Rondebosse Haut-relief Technique de réalisation Stèle Stèle Stèle Statuette Statuette Statue Statue Statue Stèle Stèle Stèle Statuette Petite statue Stèle Petite statue Statue Stèle Précision type de représentation ou de support Dieu indéterminé 3 déesses indéterminées Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Déesse in terminée Dieu indéterminé Divinité indéterminée? Divinité indéterminée? Jupiter Epona Dieu indéterminé Dieu indéterminé Victoire? Vénus? Epona Jupiter Apollon Mars? Divinités Confirmation épigraphique - 65 Éduens Éduens Éduens Éduens 89.83 89.84 89.85 71.641 71.643 21.604 21.594 21.595 21.596 IV, 2926 XIV, 8313 XIV, 8314 III, 1999 III, 1996 X, 7513 R.541 R.542 R.543 R.544 R.545 R.546 R.547 R.548 R.549 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 71.637 III, 2012 R.540 Éduens 71.634 XIII, 8248 Éduens 71.614 Éduens Éduens Cité Éduens Autres 89.93 Tremel, 2010 (Carnutes) R.539 R.538 89-2, p. 620, fig. 919 21.571 III, 2037 R.536 R.537 89.89 Lamy, 2015 (Éduens) IV, 2920 CAG R.535 NEsp. Espérandieu N° Pierre Sanctuaire de Champ Daumet ND ND ND ND ND Champ Daumet En remploi dans le mur d’une maison Le Bois des Crots En remploi dans une maison En remploi dans le mur de l’église de Bouhy A quelques mètres des ruines d’une habitation Saint-Firmin Saint-Martin-sous-Montaigu Saint-Maurice-lèsCouches Le Bas de Marais Saint-Sernin-duBois Santenay Santenay Santenay Mont de Sène Mont de Sène Mont de Sène Le Puits Le Bas de Marais Saint-Sernin-duBois Santenay ND Près du lit de la Cure Saint-Père Pierre Pierre Pierre Pierre ND Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Sanctuaire du Mont de Sène ND ND ND Derrière la Halle Saint-Père Saint-Moré Sainte-Vertu Sainte-Sabine Pierre Pierre ND Sainte-Pallaye Travaux du chemin de fer d’Auxerre à Nevers Matériau Contexte Précision localisation Commune Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Grès 8 9 11 45 94 60 80 10 Marbre blanc Calcaire 72 175 30 66 30 55 47 Hauteur conservée (cm) Pierre commune Calcaire Calcaire Grès Calcaire oolithique Calcaire tendre Calcaire Précision matériau Rondebosse Rondebosse Rondebosse Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Bas-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Technique de réalisation Statuette Statuette Statuette Stèle Pied de cartibulum Stèle Stèle Petite statue Petite statue Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Petite statue Précision type de représentation ou de support Divinité indéterminée Divinité indéterminée Déesse indéterminée Epona Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Déesse indéterminée Divinité indéterminée Vénus? Déesse indéterminée 3 déesses indéterminées Epona Déesse indéterminée? Mercure Apollon Déesse in Tableau B 21.605 21.606 21.607 21.608 21.609 III, 2170 III, 2176 III, 2175 III, 2177 III, 2173 R.557 R.558 R.559 R.560 R.561 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 21.602 R.555 21.603 Éduens 21.601 R.554 III, 2171 Éduens 21.600 R.553 R.556 Éduens 21.599 Cité R.552 Autres Éduens Tremel, 2010 (Carnutes) 21.598 Lamy, 2015 (Éduens) R.551 CAG Éduens NEsp. 21.597 Espérandieu R.550 N° Santenay Santenay Santenay Santenay Santenay Santenay Santenay Santenay Santenay Santenay Santenay Santenay Commune Mont de Sène Mont de Sène Mont de Sène Mont de Sène Mont de Sène Mont de Sène Mont de Sène Mont de Sène Mont de Sène Mont de Sène Mont de Sène Mont de Sène Précision localisation Matériau Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Contexte Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Sanctuaire du Mont de Sène Calcaire tendre Calcaire Calcaire tendre Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire Précision matériau 23 14 27 15 13 8 12 8 10 9 10 12 Hauteur conservée (cm) Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Technique de réalisation Stèle Stèle Stèle Stèle Stèle Statuette Statuette Statuette Statuette Statuette Statuette Statuette Précision type de représentation ou de support Tutela Mercure Mercure Déesse indéterminée Esculape Minerve Déesse indéterminée Déesse indéterminée Divinité indéterminée Déesse indéterminée Divinité indéterminée Divinité indéterminée Divinités Confirmation épigraphique - 67 Éduens 21.649 71.652 71.653 71.655 21.650 71.659 III, 2224 XIII, 8271 III, 2162 XV, 9092 IV, 3587 R.565 R.566 R.567 R.568 R.569 Éduens Éduens 89.96 21.651 21.652 XV, 9155 XI, 7676 III, 2404 III, 2403 R.573 R.574 R.575 R.576 Éduens Éduens Éduens 89.95 XV, 154 R.572 Éduens 71.658 X, 7639 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens R.571 R.570 Éduens 21.618 XIII, 8218 R.564 Éduens Éduens 21.617 Cité III, 2042 Autres R.563 Tremel, 2010 (Carnutes) 21.610 Lamy, 2015 (Éduens) III, 2178 CAG R.562 NEsp. Espérandieu N° ND ND Probablement dans les environs de Semu Bassin de la fontaine de Bénetin Semur-en-Auxois ou Sainte-Sabine Source-Seine Source-Seine Source-Seine Sougères-en-Puisaye Sougères-en-Puisaye Solutré-Pouilly Solutré-Pouilly Seurre Sercy Sennecé-les-Mâcon Sennecé-les-Mâcon Pierre Métal Pierre Pierre ND Sanctuaire des sources de la Seine Sanctuaire des sources de la Seine Sanctuaire des sources de la Seine Au sud de Bois de Thury Sanctuaire des sources de la Seine, dans une cachette Sources de la Seine Sources de la Seine Pierre ND Au sud de Bois de Thury Pierre Pierre Pierre Pierre Villa ND ND ND Pierre Pierre Pierre Pierre Les Gerbauds ND ND Dans un garage ND ND Champigean/ Champijon Santosse ND ND Champigean/ Champijon Santosse Pierre Pierre Sanctuaire du Mont de Sène Mont de Sène Santenay Matériau Précision localisation Contexte Commune Calcaire oolithique Calcaire oolithique Alliage cuivreux Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire 80 103 30 31 70 41 35 27 Marbre blanc Calcaire 43 38 33 36 50 26 13 Hauteur conservée (cm) Calcaire Calcaire Calcaire Calcaire oolithique Calcaire Calcaire Calcaire tendre Précision matériau Rondebosse Rondebosse Rondebosse Rondebosse Statue Statue Statuette Statue Statue Statuette Rondebosse Rondebosse Stèle Bas-relief Statuette Buste Rondebosse Rondebosse Stèle Statue Stèle Stèle Stèle Stèle Précision type de représentation ou de support Haut-relief Rondebosse Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Technique de réalisation Dieu indéterminé Esculape ou Apollon Sequana? Dieu indéterminé Dieu indéterminé Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Divinité indéterminée Hygie ; Esculape? Vulcain? Dieu indéterminé Bacchus? Die u indéterminé Dieu indéterminé? ; déesse indéterminée? Dieu indéterminé? ; déesse indéterminée? Divinité indéterminée Divinités Confirmation épigraphique 68 Tableau B Éduens 21.656 21.657 21.658 21.659 IX, 7149 XV, 9105 III, 2417 R.580 R.581 R.582 21.1068 21.1069 71.660 21.1099 III, 2433 III, 2433 III, 1852 IX, 7077 R.584 R.585 R.586 R.587 R.583 Éduens 21.655 III, 2405 R.579 Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens Éduens 21.654 Cité XI, 7682 Autres R.578 Tremel, 2010 (Carnutes) 21.653 Lamy, 2015 (Éduens) III, 2403 CAG R.577 NEsp. Espérandieu N° Sussey Sully Source-Seine Source-Seine Source-Seine Source-Seine Source-Seine Source-Seine Source-Seine Source-Seine Source-Seine Commune Pierre Pierre Pierre Pierre Pierre Sanctuaire des sources de la Seine Sanctuaire des sources de la Seine Sanctuaire des sources de la Seine Sanctuaire des sources de la Seine Sanctuaire des sources de la Seine Sources de la Seine Sources de la Seine Sources de la Seine Sources de la Seine Sources de la Seine ND Pierre Sanctuaire des sources de la Seine Sources de la Seine Environs de Sussey Pierre Sanctuaire des sources de la Seine Sources de la Seine Pierre Pierre Pierre Sanctuaire des sources de la Seine Sources de la Seine ND Pierre Sanctuaire des sources de la Seine Sources de la Seine Le Puy/Le Puits Matériau Contexte Précision localisation Calcaire Grès Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire oolithique Calcaire oolithique Précision matériau 40 55 25 33 48 20 58 13 107 21 48 Hauteur conservée (cm) Rondebosse Bas-relief Rondebosse Rondebosse Haut-relief Haut-relief Haut-relief Haut-relief Rondebosse Rondebosse Rondebosse Technique de réalisation Statuette Stèle Statue Statue Stèle Stèle Stèle Stèle Statue Statue Statue Précision type de représentation ou de support Epona Dieu indéterminé ; déesse indéterminée Déesse indéterminée? Déesse indéterminée? Mercure? Déesse indéterminée Dieu indéterminé Vénus ou Sequana Déesse indéterminée Hercule Dieu indéterminé Divinités Confirmation épigraphique - 69 III, 2115 R.588 89.111 89.112 III, 2236 R.596 89.114 21.1112 21.1110 21.1111 21.1114 IV, 2917 III, 2334 III, 2335 III, 2329 III, 2065 R.601 R.602 R.603 R.604 21.1108 R.600 R.599 R -3, .
41,594
2021REN1S143_11
French-Science-Pile
Open Science
Various open science
2,021
Interfaces et nano-objets fonctionnels et biomimétiques pour l'électrocatalyse
None
French
Spoken
7,187
13,181
A l’inverse des citrates, les calix[4]arènes greffés sur les nanoparticules d’or permettent notamment d’inhiber efficacement la réaction d’HER, contrairement aux citrates. Ces observations ne sont pas systématiques et dépendent grandement de la nature du cœur métallique modifié. En effet, sur les nanoparticules de Calix-AgNPs 6 nm, la présence de calix[4]arènes n’empêche ni la formation de formiate ni la réaction concurrentielle d’HER. A l’inverse, sur les nanoparticules d’argent de 20 nm, on observe une amélioration nette de la sélectivité pour la production de CO. Cette amélioration de la sélectivité s’accompagne par ailleurs d’une diminution de la surtension nécessaire pour activer la CO2RR qu’il est possible d’attribuer à la présence de la couche organique. De plus l’activité de ces systèmes a pu être mesurée qualitativement de manière extrêmement rapide puisqu’il est possible de détecter instantanément à l’anneau les produits formés au disque grâce à la RRDE, à condition d’avoir réalisé préalablement les expériences de contrôles nécessaires à l’interprétation des réponses électrochimiques. Cette analyse exploratoire est donc extrêmement intéressante pour l’étude rapide d’un grand nombre de surfaces catalytiques et de leur sélectivité vis-à-vis de la CO2RR et permet par ailleurs d’étudier précisément l’évolution de leur activité dans le temps. Néanmoins, ces observations doivent être confirmées par des méthodes de quantification classiques des produits formés lors de la réduction du CO2 (i.e. Chromatographies gazeuse et ionique). De plus, cela permettra d’étudier la corrélation entre les signatures chimiques de ces espèces et la quantité formée. Ce travail pourrait permettre, à termes, d’utiliser cette méthode de détection par RRDE non plus comme un outil qualitatif mais quantitatif pour l’étude de la CO2RR sur des surfaces, même peu sélectives. 213 Réduction du CO2 sur une électro de tournante à disque et à anneau pour la détection instantanée des esp èce s produites. Références bibliographiques . 1 C. Costentin, M. Robert and J. M. Savéant, Chem. Soc. Rev., 2013, 42, 2423–2436. 2 R. J. Lim, M. Xie, M. A. Sk, J. M. Lee, A. Fisher, X. Wang and K. H. Lim, Catal. Today, 2014, 233, 169. 3 J. T. Billy and A. C. Co, Appl. Catal. B, 2018, 237, 911. 4 L. Zhang, Z. J. Zhao and J. Gong, Angew. Chemie Int. Ed., 2017, 56, 11326–11353. 5 Z. Yin, G. T. R. Palmore and S. Sun, Trends Chem., 2019, 1–12. 6 Q. Lenne, Y. R. Leroux and C. Lagrost, ChemElectroChem, 2020, 7, 2345–2363. 7 E. R. Cave, J. H. Montoya, K. P. Kuhl, D. N. Abram, T. Hatsukade, C. Shi, C. Hahn, J. K. Nørskov and T. F. Jaramillo, Phys. Chem. Chem. Phys., 2017, 19, 15856–15863. 8 Y. Hori, A. Murata, K. Kikuchi and S. Suzuki, J. Chem. Soc. Chem. Commun., 1987, 728–729. 9 Y. Chen, C. W. Li and M. W. Kanan, J. Am. Chem. Soc., 2012, 134, 19969–19972. 10 E. L. Clark, M. R. Singh, Y. Kwon and A. T. Bell, Anal. Chem., 2015, 87, 8013. 11 P. Dubé and G. Brisard, J. Electroanal. Chem., 2005, 582, 230. 12 J.-P. Grote, A. R. Zeradjanin, S. Cherevko and K. J. Mayrhhofer, Rev. Sci. Instrum., 2014, 85, 104101. 13 F. Calle-Vallejo and M. T. M. Koper, Angew. Chemie Int. Ed., 2013, 52, 7282–7285. 14 S. Wasmus, E. cattaneo and W. Vielstich, Electrochim. Acta, 1990, 35, 771. 15 . Zhang, W. J. Pietro and A. B. P. Lever, J. Electroanal. Chem., 1996, 403, 93–100. 16 X. Zhu, K. Gupta, M. Bersani, J. A. Darr, P. R. Shearing and D. J. Brett, Electrochim. Acta, 2018, 283, 1037. 17 A. Wadas, I. A. Rutkowska, M. Bartel, S. Zoladek, K. Rajeshwar and P. J. Kulesza, Russ. J. Electrochem., 2017, 53, 1194–1203. 18 B. Dembinska, W. Kicinski, A. Januszewska, A. Dobrzeniacka and P. J. Kulesza, J. Electrochem. Soc., 2017, 164, H484. 19 V. Lates, A. Falch, A. Jordaan, R. Peach and R. J. Kriek, Electrochim. Acta, 2014, 128, 75–84. 214 Réduction du CO2 sur une électrode tournante à disque et à anneau pour la détection instantanée des espèces produites. 20 J. Vos and M. Koper, J. Electroanal. Chem., 2019, 850, 113363. 21 F. Zhang and A. C. Co, J. Electrochem. Soc., 2020, 167, 046517. 22 Z. Duan and G. Henkelman, Langmuir, 2018, 34, 15268–15275. 23 B. B. Blizanac, M. Arenz, P. N. Ross and N. M. Markovic, J. Am. Chem. Soc., 2004, 126, 10130– 10141. 24 P. Rodriguez, N. Garcia-Araez, A. Koverga, S. Frank and M. T. M. Koper, Langmuir, 2010, 26, 12425–12432. 25 A. S. Lin, J. Lin and J. C. Huang, Gold Bull., 2007, 40, 82–85. 26 A. Goyal, G. Marcandalli, V. A. Mints and M. T. M. Koper, J. Am. Chem. Soc., 2020, 142, 4154– 4161. 27 Y. Hori, H. Wakebe, T. Tsukamoto and O. Koga, Electrochim. Acta, 1994, 39, 1833. 28 Y. Hori, Mod. Asp. Electrochem., 2008, 42, 89–189. 29 Y. X. Chen, S. Ye, M. Heinen, Z. Jusys, M. Osawa and R. J. Behm, J. Phys. Chem. B, 2006, 110, 9534. 30 G. C. Luque, M. R. G. de Chialvo and A. C. Chialvo, J. Electrochem. Soc., 2017, 164, H748. 31 H. A. steiger, N. Markovic and P. N. Ross Jr, J. Phys. Chem., 1995, 99, 16757. 32 N. Markovic, B. Grgur, C. Lucas and P. N. Ross Jr, J. Phys. Chem. B, 1999, 103, 487. 33 G. Camara, E. Ticianelli, S. Mukerjee, S. Lee and J. McBreen, J. Electrochem. Soc., 2002, 149, A748. 34 J. Zhang, PEM fuel cell electrocatalysts and catalyst layers: fundamentals and application, Springer, 2008. 35 Y. Zhu, H. Uchida, M. Watanabe, Langmuir, 1999, 15, 8757. 36 Y. Hori, K. Kikuchi and S. Suzuki, Chem. Lett., 1985, 1695–1698. 37 Y. Zhao, C. Wang, Y. Liu, D. R. MacFarlane and G. G. Wallace, Adv. ENERGY Mater.,2018, 8, 1801400. 38 Z. Cao, S. B. Zacate, X. Sun, J. Liu, E. M. Hale, W. P. Carson, S. B. Tyndall, J. Xu, X. Liu, X. Liu, C. Song, J. hua Luo, M. J. Cheng, X. Wen and W. Liu, Angew. Chemie Int. Ed., 2018, 57, 12675– 215 Réduction du CO2 sur une électrode tournante à disque et à anneau pour la détection instantanée des espèces produites. 12679. 39 Z. Cao, D. Kim, D. Hong, Y. Yu, J. Xu, S. Lin, X. Wen, E. M. Nichols, K. Jeong, J. A. Reimer, P. Yang and C. J. Chang, J. Am. Chem. Soc., 2016, 138, 8120–8125. 40 N. Sreekanth and K. L. Phani, Chem. Commun., 2014, 50, 11143–11146. 41 F. Zhang and A. C. Co, Angew. Chemie Int. Ed., 2020, 59, 1674–1681. 42 S. Zhao, R. Jin and R. Jin, ACS Energy Lett., 2018, 3, 452–462. 43 C. Kim, H. S. Jeon, T. Eom, M. S. Jee, H. Kim, C. M. Friend, B. K. Min and Y. J. Hwang, J. Am. Chem. Soc., 2015, 137, 13844–13850. 44 C. Kim, T. Eom, M. S. Jee, H. Jung, H. Kim, B. K. Min and Y. J. wang, ACS Catal., 2017, 7, 779– 785. 45 A. Goyal, G. Marcandalli, V. A. Mints and M. T. M. Koper, J. Am. Chem. Soc., 2020, 142, 4154– 4161. 216 Chapitre 6 : Matériels et méthodes. Matériels et Méthodes. Chapitre 6. Matériels et Méthodes. 6-1. Synthèse des nanoparticules. 6-1.1. Nanoparticules de platine. Les nanoparticules de platine modifiées par des calix[4]arènes ont été synthétisées en une étape. Le sel de platine H2PtCl6.xH2O (Acros Organics, 99,9%, 2 eq.) est dissous dans l’acétonitrile (25 mL) avant l’ajout des sels de calix[4]arènes tétradiazonium (1 eq.) préalablement dissous dans l’acétonitrile (25 mL) (Voir Tableau 6.1). Les sels de calix[4]arènes diazonium utilisés ont été synthétisés selon des protocoles décrits dans la littérature et fournis par l’équipe du Pr. Jabin.1,2 On refroidit dans un bain de glace le mélange sous agitation avant l’ajout de l’agent réducteur, NaBH4 (Sigma Aldrich, ≥98%, 6 mg dans 1 mL, 6 eq.). La couleur de la solution, initialement jaune, devient progressivement marron clair après 20 minutes. La réaction est poursuivie durant 2 heures avant que la solution ne soit centrifugée à 15 000 rpm pendant 20 minutes afin de séparer les nanoparticules du surnageant. Les PtCF3NPs ont été lavées en répétant trois fois le cycle de suspension/centrifugation dans l’acétonitrile avant de les disperser dans l’acétone. La coloration du surnageant disparaît au fur et à mesure, ce qui est un signe de l’élimination progressive des sels métalliques et de calix[4]arènes tétradiazonium résiduels. Les PtCOOHNPs sont été nettoyées par trois cycles de suspension/précipitation dans des solutions aqueuses 0,1 M KOH et 0,1 M HClO4, respectivement. Après avoir retiré le surnageant, ces nanoparticules sont dispersées dans de l’eau ultrapure afin de minimiser la force ionique de la solution. Tableau 6.1. Tableau récapitulatif des quantités de sels d’or et de calix[4]arènes tétradiazonium utilisées lors de la synthèse différentes nanoparticules de platine modifiées. m[HAuCl4] M[Calix[4]arènes tétradiazonium] -1 m[Calix[4]arènes tétradiazonium] (mg) (g.mol ) (mg) PtNPsCF3 18 920,6 26 PtNPsCOOH 32 976,8 45 217 Matériels et Méthodes. 6-1.2. Nanoparticules d’or. Les nanoparticules d’or ont été synthétisées selon un procédé de synthèse en une étape. 2 Le sel d’or HAuCl4. 3H2O (Sigma Aldrich, > 99,9%, 2 eq.) est dissout dans l’acétonitrile (20 mL) et est mélangé avec une solution d’acétonitrile (20 mL) contenant les sels de calix[4]arènes tétradiazonium (1 eq.) (Voir Tableau 6.2). Les sels de calix[4]arènes diazonium utilisés ont été synthétisés selon des protocoles décrits dans la littérature et fournis par l’équipe du Pr. Jabin et du Dr. Mattiuzzi. 1,2,4,5 La solution est ensuite refroidie à 0°C et mise sous agitation, sous atmosphère d’Ar avant l’ajout goutte à goutte d’une solution aqueuse de l’agent réducteur NaBH4 (Sigma Aldrich, ≥98%, 5 mg dans 1 mL). La couleur de la solution change rapidement du jaune au rouge rubis après environ 5 minutes. Après 2 heures sous agitation à température ambiante, la solution est centrifugée à 15 000 rpm pendant 20 minutes et on observe une accumulation des nanoparticules d’or modifiées par les calix[4]arènes dans le culot de l’Eppendorf. Dans les cas des AuNPs-PEG, les nanoparticules restent solubles dans l’acétonitrile et peuvent être redispersées par simple agitation. Les différents échantillons ont été nettoyés selon les procédures suivantes : i) Les AuNPs-COOH ont été lavées par trois cycles de suspension/précipitation dans des solutions aqueuses 0,1 M KOH et 0,1 M HClO4, respectivement, ii) Les AuNPs-CF3 et AuNPs-C4F9 et les AuNPs-propyles ont été lavées en répétant trois fois le cycle de suspension/centrifugation dans l’acétonitrile avant de les disperser dans l’acétone, le toluène et l’acétone, respectivement, iii) les AuNPs-PEG ont été centrifugées cinq fois dans de l’acétonitrile à 17 000 rpm pendant 15 minutes en retirant systématiquement la portion de surnageant n’ayant pas de coloration avant de les redisperser dans un volume donné d’acétonitrile. Tous les échantillons sont ensuite recentrifugés pour obtenir une concentration égale à 2 mgAu.mL-1. Tableau 6.2. Tableau récapitulatif des quantités de sels d’or et de calix[4]ar ènes tétradiaz onium utilisées lors de la synthèse des différentes nanoparticules d’or modifiées. m[HAuCl4] (mg) M[Calix[4]arènes tétradiazonium] (g.mol-1) m[Calix[4]arènes tétradiazonium] (mg) AuNPs- AuNPs-COOH AuNPs-CF3 AuNPs-C4F9 AuNPs-PEG 18 25 19 20 15 920,6 976,8 1572 1292 704,4 23 29 35 32 218 propyles Matériels et Méthodes. 6-1.3. Nanoparticules d’argent. Les nanoparticules d’argent fonctionnalisées par les calix[4]arènes ont été synthétisées par l’équipe du Prof. Jabin.3 6-2. Détermination de la concentration des nanoparticules. 6-2.1. Nanoparticules de platine. La concentration des nanoparticules de platine a été déterminée par spectrométrie de masse par plasma à couplage inductif sur un équipement Thermo Scientific iCAP 7000 series. La concentration des échantillons dilués par un facteur 1,102 est mesurée à partir d’une droite d’étalonnage réalisée à partir de solutions étalons ayant des concentrations comprises entre 1,10-2 et 100 mg.L-1. On calcule ainsi les concentrations des solutions mères de PtNPsCF3 et PtNPsCOOH égales à 0,45 et 1,02 mg.mL-1, respectivement. Ces solutions colloïdales ont ensuite été mélangées avec une solution d’isopropanol dans laquelle est dispersée du carbone poreux Vulcan XC-72® (Cabot Corporation) afin d’obtenir une encre catalytique 20% massique de Pt/C. 6-2.2. Nanoparticules d’or. La concentration des solutions colloïdales de nanoparticules d’or a été calculée en mesurant leur absorbance à 506 nm selon la loi de Beer-Lambert6 : A = εlC Où A est l’absorbance mesurée à 506 nm, ε est le coefficient d’extinction molaire, l est la longueur du trajet parcouru par la lumière et C est la concentration de la solution. Il est possible de calculer le coefficient d’extinction molaire ε selon l’équation suivante6 : ln ε = k ln D + a Où D est le diamètre moyen des nanoparticules, calculé en microscopie électronique en transmission, et où k et a sont des constantes empiriques égales à 3,32 et 10,81, respectivement. 6-2.3. Nanoparticules d’argent. La concentration des nanoparticules d’argent modifiées par des calix[4]arènes a été déterminée en amont par l’équipe du Prof. Jabin en considérant que l’intégralité du sel d’argent a été réduit en argent métallique pour former des nano cules. La concentration de ces nanoparticules est alors égale à 219 Matériels et Méthodes. 0,1 mg.mL-1. Ces solutions sont ensuite reconcentrées jusqu’à 2 mg.mL-1 en profitant du phénomène d’agrégation des nanoparticules lorsque le pH devient acide. La concentration des nanoparticules d’argent stabilisées par des citrates est renseignée par le fournisseur et est égale à 1 mg.mL-1. 6-3. Caractérisation des nanoparticules. 6-3.1. Méthodes microscopiques. Les caractérisations de microscopie électronique à transmission à haute-résolution (HRTEM) ont été réalisées avec l’aide du personnel rattaché à la plateforme THEMIS. Avant analyse, 10 μL de chaque échantillon est déposé sur une grille métallique de cuivre recouverte d’un film de carbone. La morphologie et la polydispersité des échantillons a été analysée par HRTEM, sur un microscope Jeol 2100 avec une tension d’accélération de 200 V. Les clichés ont été capturés par une caméra Gatan Orius 200 CCD. La mesure de la polydispersité a été réalisée grâce au logiciel imageJ, version 1.52a. Les caractérisations de microscopie électronique à balayage (MEB) ont été réalisées avec l’aide du personnel rattaché à la plateforme CMEBA. Avant analyse, les échantillons sont déposés sur une électrode de carbone vitreux, dans les mêmes conditions que celles appliquées lors des mesures électrochimique. L’homogénéité des dépôts a été étudiée par MEB sur un microscope Jeol JSM7100 couplé à un détecteur spectroscopique de rayons-X à dispersion d’énergie AztecEnergy de chez Oxford instruments. 6-3.2. Méthodes spectroscopiques. Les spectres d’absorption UV-Visible ont été enregistrés sur un spectrophotomètre Shimadzu UV1605. Ils permettent de déterminer la position de la bande de résonance plasmonique des nanoparticules d’or d’argent. Les mesures XPS ont été réalisées avec un spectromètre de photoémission induit par rayons X, Kratos Axis Nova à l’Institut des Matériaux de Nantes. Les spectres sont enregistrés avec une source RX monochromatisée Al Kα X-(1486,6 eV) avec un spot de taille 0,7 x 0,3 mm2. Les spectres larges (01200 eV) sont collectés en fixant la « pass energy » de l’analyseur à 160 eV (0,5 eV/step), la « pass energy » pour les spectres de zone haute résolution est 40 eV (0,1 eV/step). Les énergies de liaisons ont été calibrées par rapport au pic C1s à 285 eV. Dans le cas des nanoparticules de platine supportées, ces énergies de liaisons ont été calibrées par rapport au signal C1s des carbones sp2 du Vulcan-XC 72® positionné à 284,5 eV. La décomposition des spectres de zone a été effectuée grâce aulogiciel CasaXPS, Ltd. Version 2.3.18, avec une ligne de base de type U2 Tougaard. L’aire des pics des spectres larges a 220 Matériels et Méthodes. été normalisée selon les facteur de sensibilité (coefficients de Scoffield) fournis par le constructeur (SC1s = 0,278, SF1s = 1, SO1s = 0,78, SS2p = 0,668, SAu4f = 6,25, SPt4f = 5,58 et SAg3d = 5,99). Afin d’étudier leur composition chimique, les différents échantillons ont été déposées sur des plaques de silicium. Lors des mesures de stabilité, les mesures XPS n’ont pas pu être réalisées sur les embouts RRDE à cause de leur taille trop importante et ont été déposés sur des électrodes sérigraphiées de carbone DropSens. Pour chaque échantillon, des mesures XPS ont été réalisées sur différent régions de l’électrode, sans qu’aucune différence ne soit observée. 6-3.3. Analyse thermogravimétrique. Les analyses thermogravimétriques ont été réalisées à l’aide d’un TA Instruments Model SDT 2960. Pour cela, 3 à 6 mg de nanoparticules sèches ont été déposées dans un creuset de silice. Les échantillons ont ensuite été soumis à une rampe de température allant de 30 à 900°C avec une augmentation de la température égale à 10°C.min-1, sous une atmosphère inerte d’azote. Les résultats ont ensuite été traités avec le logiciel TA Data Analysis. 6-4. Préparation des électrodes. 6-4.1. Préparation des surfaces d’électrode. Avant chaque utilisation, les électrodes ont été polies sur un papier abrasif P4000 (Struers), ce qui correspond à des grains de 5 μm. Elles sont ensuite soigneusement rincées avec de l’eau ultrapure et de l’isopropanol avant d’être plongées 10 minutes dans de l’eau ultrapure sous sonication. Ces électrodes sont finalement séchées par un flux d’Argon avant le dépôt des différents échantillons. 6-4.2. Modification des surfaces d’électrode. Lors de l’étude des catalyseurs à base de platine, le volume déposé sur l’électrode est ajusté afin d’obtenir une concentration en platine égale à 30 μg.cm-2 sur le disque de carbone vitreux (GC) (0,2475 cm2). Cela correspond à un volume égal à 10, 15 et 17 μL pour les PtNPs/C, PtCOOHNPs/C et Pt CF3NPs/C, respectivement. Concernant les nanoparticules d’or, ce volume est égal à 37 μL pour tous les échantillons afin d’obtenir une concentration d’or égale à 300 μg.cm-2 sur le disque de GC. Enfin, afin d’obtenir une quantité d’argent déposée égale à 300 μg.cm-2, on dépose 37 et 74 μL des solutions de nanoparticules fonctionnalisées par les calix[4]arènes et stabilisées par les rates, respectivement. 221 Matériels et Méthodes. Après séchage, les dépôts de catalyseurs sont recouverts de 35 μL d’une solution d’isopropanol contentant 0,5% de Nafion 117® (Sigma-Aldrich) afin d’assurer sa stabilité mécanique. Cette étape est d’autant plus importante pour les nanoparticules d’or et d’argent fonctionnalisées par des calix[4]arènes décorées par des groupements terminaux acides acétiques, puisqu’elles sont facilement dispersées en milieu basique. 6-5. Mesures électrochimiques. 6-5.1. Généralités. Les mesures électrochimiques ont été réalisées à l’aide d’une électrode tournante à disque (GC) et à anneau (Pt) (RRDE, taux de collection égal à 37%) contrôlée par un rotateur MSR de chez Pine Research. Lors des mesures associées à la réduction du CO2, cet anneau de platine a parfois été remplacé par un anneau d’or. Les courbes de polarisation (LSV), les voltamétries cycliques (CV), les mesures chronoampérométriques (CA) ainsi que les mesures de la résistance (chute ohmique) par spectroscopie d’impédance ont été enregistrées à l’aide d’un potentiostat-galvanostat Autolab PGSTAT302N équipé d’un module BIPOT dans une cellule électrochimique à trois électrodes. Ces mesures ont été enregistrées avec le logiciel Metrohm Nova 2.1 et n’ont pas été corrigés de la chute ohmique, à part dans le cas de la Figure 4.11. 6-5.2. Mesure de l’aire électrochimiquement active (ECSA) des catalyseurs. 6-5.2.1. Mesure de l’aire électrochimiquement active des catalyseurs à base d’or. L’ECSA des systèmes à base d’or a été mesurée par voltammétrie cyclique dans une solution aqueuse 0,1 M HClO4 saturée en argon à 100 mV.s-1. Une grille de platine et une électrode au calomel saturée, KCl (sat.) (ECS) ont été utilisées comme contre-électrode et électrode de référence, respectivement. Le potentiel a été balayé jusqu’à la stabilisation du signal associé à la réduction des oxydes d’or et l’ECSA a pu être calculée selon7 : ECSA = Qoxydes C Où Qoxydes correspond à la charge intégrée à partir du pic de réduction des oxydes d’or et C est la charge associée à la formation d’une monocouche d’Au-OH (400 μC.cm-2)(Figure 6.1).8 222 M atériel s et Méthode s . Figure 6.1. Mesure de l’ECSA sur les catalyseurs à base d’or à partir du signal de réduction des oxydes d’or dans une solution aqueuse 0,1 M HClO4 saturée en argon. 6-5.2.2. Mesure de l’aire électrochimiquement active des catalyseurs à base d’argent. Comme il l’a été expliqué dans le chapitre 2, il n’est pas possible de mesurer l’ECSA de catalyseurs à base d’argent avec la méthode de réduction des oxydes, au risque de dégrader les catalyseurs de manière irréversible.9 L’ECSA des catalyseurs à base d’argent a donc été mesurée à partir de la capacitance de la double couche (CDL) des échantillons, dans une aqueuse 1 M NaOH. Une grille de platine et une électrode au calomel saturée, KCl (sat.) (ECS) ont été utilisées comme contre-électrode et électrode de référence, respectivement. Cette CDL est mesurable en étudiant la zone purement capacitive des différents échantillons (0,85 < E < 0,95 V vs RHE)(Figure 6.2a). En traçant la valeur du courant aux bornes de la gamme de potentiel en fonction de la vitesse de balayage (5 < v < 50 mV.s-1), il est possible d’extrapoler deux droite (une anodique et une cathodique) dont la moyenne des pentes est égale à la CDL (Figure 6.2b). Il est possible de remonter à l’ECSA des différents systèmes en comparant cette CDL à la capacitance spécifique (CS) d’une surface d’argent considérée comme parfaitement plane selon l’équation : ECSA = CDL CS Où CDL est la capacitance de double couche de l’ échantillon étudi é et CS est la capacitance spécifique d ’ une surface d ’argent considérée comme parfaitement plane, valeur commune à tous les calculs d’ECSA. La mesure de CS est réalisée dans les mêmes conditions que celles des CDL sur une électrode d’argent plane polie rigour eusement (Agé om = 0,02cm2). 223 Matériels et Mé thodes . Figure 6.2. a) Voltamétrie cyclique dans la région capacitive des catalyseurs à base d’argent à différentes vitesses de balayage et b) régression linéaire des valeurs de courants relevées aux bornes de la gamme de potentiel en fonction de la vitesse de balayage permettant de remonter à la valeur de la capacitance de la double couche dans une solution 0,1 M NaOH saturée en Ar. 6-5.2.3. Mesure de l’aire électrochimiquement active des catalyseurs à base de platine. L’ECSA des nanoparticules de platine a été mesurée dans une solution aqueuse 0,1 M HClO4 à 20 mV.s-1. Une grille de platine et une électrode au calomel saturée, KCl (sat.) (ECS) ont été utilisées comme contre-électrode et électrode de référence, respectivement. Le calcul de l’ECSA a été réalisé en intégrant la charge associée à deux phénomènes distincts : i) la désorption du dihydrogène déposée en sous-potentiel (HUPD) et ii) la désorption du CO adsorbé à la surface du catalyseur (CO-stripping). Dans le premier cas, la solution est saturée en argon avant de mesurer l’ECSA selon la formule suivante7: ECSA = HUPD C Où HUPD est à la charge associée à la désorption du dihydrogène de la surface de platine, corrigée de la contribution capacitive de l’électrode de carbone sur laquelle sont déposées les nanoparticules de platine, et C correspond à la valeur associée à la formation d’une monocouche de Pt-H (210 μC.cm-2) (Figure 6.3). Dans le cas des mesures de désorption du monoxyde de carbone, la solution est d’abord saturée avec de l’argon et une première voltammétrie cyclique est enregistrée en balayant le potentiel entre 0 et 1,40 V vs RHE. La solution est ensuite saturée 30 minutes en CO avant que le potentiel ne soit fixé à 0,35 V vs RHE pendant 15 minutes. Ensuite, la solution est de nouveau saturée en argon afin 224 Matériels et Méthodes. d’évacuer l’excédent de CO dissous en solution avant qu’une nouvelle voltammétrie cyclique ne soit enregistrée. En isolant la contribution de la désorption du CO, on peut calculer l’ECSA selon10: ECSA = COStripping C Où COStripping est la charge associée à la désorption du CO et C correspond à la valeur associée à la formation d’une monocouche de Pt-CO (420 μC.cm-2)(Figure 6.3). Sur des surfaces classiques nonmodifiées, il est courant d’obtenir des valeurs d’ECSA plus importante par la méthode de COstripping que par la méthode HUPD, conformément aux observations faites dans la littérature .11 Figure 6.3. Mesure de l’ECSA des catalyseurs à base de platine à partir des signaux associés aux phénomène d’HUPD et de COStripping. 6-5.3. Mesure de dépôt de plomb en sous-tension. Des mesures de dépôt de plomb en sous-tension ont été réalisées afin de mettre en évidence les différentes facettes exposées des nanoparticules fonctionnalisées par les calix[4]arènes et celles stabilisées par les citrates. A des potentiels adaptés, cette technique permet la formation autolimitante d’une couche adsorbée de plomb à la surface des catalyseurs d’or. L’énergie nécessaire à la formation et à la dissolution de cette couche d’Au-Pb (290 μC.cm-2) est très sensible à la nature de la structure cristallographique. En conséquence, le potentiel des pics associés à ces phénomènes dépend de la facette cristallographique sur laquelle se forme cette couche de plomb. Avec cette technique, il est donc possible de déterminer quelles facettes sont exposées sur les différents échantillons (Voir Figure 6.4).12 Les potentiels ont été recalculés par rapport à l’électrode à hydrogène réversible selon : E (RHE) = E (ECS) + 0,059 pH + 0,241. 225 Matériels et Méthodes. Les voltammétries cycliques ont été enregistrées dans une solution aqueuse 0,5 M KOH + 5 mM Pb(NO3)2 saturée en argon à 50 mV.s-1. Une grille de platine et une électrode au calomel saturée, KCl (sat.) (ECS) ont été utilisées comme contre-électrode et électrode de référence, respectivement. Figure 6.4. Mesures de déposition de plomb en sous-tension (PbUPD) sur les a) citrates-AuNPs et b) calixAuNPs dans une solution aqueuse 0,5 M KOH + 5 mM Pb(NO3)2 saturée en argon à 50 mV.s-1. Conformément à ce qui a été avancé dans le chapitre 2, on ne distingue pas de différence de morphologie majeure entre les calix-AuNPs et les citrates-AuNPs qui pourraient expliquer les différences observées sur leur activité vis-à-vis de l’ORR lors de la formation des couches Au-Pb. On notera cependant un décalage négatif du potentiel nécessaire à la dissolution du plomb sur les systèmes modifiés avec les calix[4]arènes, ce qui suggère une force d’interaction plus forte entre la surface modifiée de manière covalente et le plomb. 6-5.4. Etude de l ’ ORR. 6-5.4.1. Milieu basique. Les courbes de polarisation ont été enregistrées dans une solution aqueuse 0,1 M KOH à 10 mV.s-1 saturée en O2 à différentes vitesses de rotation (200 < ω < 2000 rpm). Une grille de platine et une électrode Hg/HgO (20% KOH) ont été utilisées comme contre-électrode et électrode de référence, respectivement. Les potentiels ont été recalculés par rapport à l’électrode à hydrogène réversible selon : E (RHE) = E (Hg/HgO) + 0,059 pH + 0,098. Le potentiel ESeuil a été déterminé à partir des courbes de polarisation et correspond à 5% du courant limite. 226 Matériels et Mé thodes. 6-5.4.2. Milieu acide. Les courbes de polarisation ont été enregistrées dans une solution aqueuse 0,1 M HClO4 à 10 mV.s-1 saturée en O2 à différentes vitesses de rotation (200 < ω < 2000 rpm). Une grille de platine et une électrode à calomel saturée, KCl (sat.) (ECS) ont été utilisées comme contre-électrode et électrode de référence, respectivement. Les potentiels ont été recalculés par rapport à l’électrode à hydrogène réversible selon : (RHE) = E (ECS) + 0,059 pH + 0,241. Le potentiel ESeuil a été déterminé à partir des courbes de polarisation et correspond à 2% du courant limite. 6-5.4.3. Modification électrochimique de dépôts de PtNPs/C par des sels de calix[4]arènes tétradiazonium. Afin d’étudier l’influence de la nature du greffage de la couche organique sur l’activité de nanoparticules de platine vis-à-vis de l’ORR, nous avons modifié électrochimiquement des dépôts de PtNPs/C déposés sur le disque de GC avec des calix[4]arènes tétradiazonium avant de mesurer leur activité catalytique vis-à-vis de l’ORR en milieu acide dans les conditions décrites ci-dessus. Les dépôts de PtNPs/C ont été modifiés dans une solution d’acétonitrile contenant 0,1 M de TBAPF6 et 5 mM de sels de calix[4]arènes tétradiazonium. Une grille de platine et une électrode au calomel saturée, KCl (sat.) (ECS) ont été utilisées comme contre-électrode et électrode de référence, respectivement. Ces sels de calix[4]arènes tétradiazonium ont été réduits électrochimiquement en balayant le potentiel entre -0,5 et 0,6 V vs ECS pendant cinq cycles. On observe une diminution rapide du signal associé à la réduction de ces sels, confirmant ainsi la saturation de la surface du dépôt par une monocouche de calix[4]arènes (Voir Figure 6.5a). 227 Matériels et Méthodes . Figure 6.5. a) Voltammétries cycliques associées à la réduction électrochimique des calix[4]arènes portant des groupements fonctionnels trifluorobutyles (CalixCF3) sur un dépôt de Pt/C commercial dans une solution 0,1 M TBAPF6 + 5 mM Calix-CF3 dans l’ACN saturée en Ar à 100 mV.s-1. b) Courbes de polarisation des dépôts de PtNPs/C non-modifié (noir) et de PtNPs/C fonctionnalisé électrochimiquement par les Calix-CF3 (rouge). Courbes enregistrées dans une solution euse contenant 0,1 M HClO4 saturée en O2. v = 10 mV.s-1. ω = 1600 rpm. Contrairement aux observations faites sur les nanoparticules synthétisées en présence de calix[4]arènes portant des groupements trifluorobutyles dans le chapitre 4, le greffage électrochimique du dépôt de PtNPs/C conduit à une diminution de l’activité catalytique (Figure 6.5b). La perte d’activité constatée est similaire à celle du système électrochimiquement modifié par des calix[4]arènes portant des groupements acides acétiques et vient conforter l’hypothèse de l’encombrement des pores du carbone support par les calix[4]arènes, et donc la diminution du nombre de sites catalytiques disponibles. 6- 5.5 . Etu de de la MOR. Les voltammétries cycliques ont été enregistrées dans une solution aqueuse 0,1 M HClO4 + 0,5 M MeOH saturée en argon à 50 mV.s-1. Une grille de platine et une électrode au calomel saturée, KCl (sat.) (ECS) ont été utilisées comme contre-électrode et électrode de référence, respectivement. Les potentiels ont été recalculés par rapport à l’électrode à hydrogène réversible selon : E (RHE) = E (ECS) + 0,059 pH + 0,241. 228 Matériels et Méthodes. 6-5.6. Etude de la CO2RR. L’activité associée à la réduction du CO2 a été mesurée à l’aide d’embouts RRDE avec un disque de carbone et un anneau d’or ou de platine. Une grille de platine et une électrode au calomel saturée, KCl (sat.) (ECS) ont été utilisées comme contre-électrode et électrode de référence, respectivement. Avant chaque mesure de l’activité au disque modifié par les nanoparticules l’anneau (Pt ou Au) a été électropoli par voltammétrie cyclique dans une solution aqueuse 0,1 M HClO4 jusqu’à la stabilisation du signal associé à la réduction des oxydes afin de maximiser la détection des espèces produites. La mesure d’activité vis-à-vis de la réduction du CO2 est ensuite menée dans une solution aqueuse 0,1 M NaHCO3 saturée en CO2 et à 1600 rpm. Un potentiel fixe est imposé au disque modifié par les catalyseurs pour 10 valeurs différentes (-0,35 < E < -1,35 V vs RHE, ΔE = 100 mV) tandis que l’on soumet l’anneau à cinq cycles voltamétriques consécutifs (-0,05 < E < -1,25 V vs RHE) à 100 mV.s-1 afin de réoxyder les espèces formées. Les potentiels ont été recalés par rapport à l’électrode à hydrogène réversible selon : E (RHE) = E (ECS) + 0,059 pH + 0,241. On notera par ailleurs que le pH est amené à varier entre les expériences de contrôles menées en absence de CO2 et celles où l’on mesure l’activité vis-à-vis de la CO2RR, puisque la concentration de CO2 dissous a une influence sur le pH de la solution (pH = 6,8 quand la solution est saturée en CO 2 contre 8,4 lors des expériences de contrôle). 229 Matériels et Méthodes. Références bibliographiques. A. Mattiuzzi, I. Jabin, C. Mangeney, C. Roux, O. Reinaud, L. Santos, J. F. Bergamini, P. Hapiot and C. Lagrost, Nat. Commun., 2012, 3, 1130. 2 L. Troian-Gautier, H. Valkenier, A. 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Strasser, Electrocatalysis, 2014, 5, 408–418. 12 E. Kirowa-Eisner, Y. Bonfil, D. Tzur and E. Gileadi, J. Electroanal. Chem., 2003, 552, 171–183. 230 Conclusion Générale. Conclusion Générale. Conclusion Générale. Les différentes études menées pour ce travail de thèse reposent sur le développement de nanoparticules métalliques (or, argent, platine) fonctionnalisées par des calix[4]arènes. L’activité électrocatalytique de ces systèmes modifiés a été analysée afin de mettre en évidence l’influence de la couche organique de calix[4]arènes sur les performances de réactions importantes dans le domaine, réduction du dioxygène (ORR), réduction du CO2 (CO2RR) ou oxydation du méthanol (MOR). Nous avons déterminé les performances de ces systèmes catalytiques, notamment en termes de stabilité ou de sélectivité, et les avons également comparés à quelques systèmes de référence (nanoparticules d’or ou d’argent stabilisées par des citrates, Pt/C 20%mass.). Afin de comprendre les différences d’activité observées sur nos systèmes modifiés, un bilan de l’état de l’art s’est avéré indispensable. Les différents processus ainsi que les considérations mécanistiques propres à chaque réaction d’activation ont ainsi été discutés. Cela nous a permis de montrer l’intérêt des nanomatériaux modifiés par des ligands organiques pour l’activation électrocatalytique du dioxygène, du méthanol et du dioxyde de carbone. La mise en perspective des différents travaux décrits dans la littérature a permis de dégager quelques points clés sur les effets induits par la présence de la couche organique. Forts de cette synthèse de l’état de l’art, il nous a été ensuite possible de positionner les résultats obtenus dans ces travaux de thèse avec des catalyseurs nanohybrides métal-calix[4]arènes dans le contexte de cette stratégie émergente. Ainsi, la première partie de cette thèse s’est concentré sur la nature du greffage des ligands sur des cœurs métalliques d’or et d’argent vis-à-vis de la réduction du dioxygène. Pour mieux cerner cette problématique, nous avons fait le choix de comparer des systèmes fonctionnalisés de manière covalente par des calix[4]arènes avec des systèmes stabilisés de manière électrostatique avec des citrates. Malgré des morphologies comparables, les cœurs métalliques de petites tailles fonctionnalisés délibérément par une monocouche de calix[4]arènes montrent ainsi de meilleures activités catalytiques lors de la réduction du dioxygène. On reporte notamment une amélioration de la cinétique et de la sélectivité pour le mécanisme à 4 électrons apparents sur les calix-AuNPs et les calix-AgNPs 5 nm par rapport à leurs analogues stabilisés par des citrates. Ces effets sont attribuables à la nature covalente des liaisons M-C, qui induisent très probablement une modification de la structure électronique des cœurs métalliques ainsi qu’à l’organisation de la monocouche. Ces deux effets combinés conduisent probablement à une modification des interactions entre la surface et les espèces impliquées lors de la réduction du dioxygène. De manière générale, on observe surtout une stabilité catalytique et chimique bien supérieure avec les systèmes fonctionnalisés par les 231 Conclusion Générale. calix[4]arènes, encore une fois attribuable à l’ancrage robuste de la plateforme calixarène sur la surface métallique. Cette stabilité catalytique et chimique est par ailleurs observée sur tous les systèmes étudiés dans le chapitre 3. Les nanoparticules d’or fonctionnalisés par des calix[4]arènes décorés par différents groupements terminaux nous ont permis d’analyser finement l’effet de modification des propriétés interfaciales (i.e. à l’interface électrolyte/matériau catalytique) de ces différents systèmes vis-à-vis de la réduction du dioxygène. Bien qu’aucune tendance nette n’ait pu être dressée, nous avons constaté une amélioration de l’activité catalytique pour les interfaces hydrophiles ainsi que celles ayant une certaine affinité pour le dioxygène, à condition que leur caractère hydrophobe ne soit toutefois pas trop important. L’amélioration de l’activité catalytique par la modification des propriétés interfaciales reste néanmoins un phénomène complexe à moduler et nécessiterait l’étude de systèmes additionnels afin de pouvoir rationnaliser les différences observées. Dans le chapitre 4, cette stratégie a été étendue à des nanoparticules de platine et leur activité catalytique vis-à-vis des deux réactions de réduction du dioxygène et d’oxydation du méthanol ont été étudiées. Cette étude montre que le greffage covalent des calix[4]arènes permet d’obtenir un catalyseur modifié polyvalent, améliorant à la fois l’activité catalytique associée à la réduction du dioxygène et à l’oxydation du méthanol tout en empêchant la désactivation du catalyseur dans le compartiment cathodique causée par le passage du méthanol (cross-over). Une étude permettant la compréhension fine des mécanismes, notamment concernant l’oxydation du méthanol, mériterait d’être poursuivie notamment en couplant l’analyse électrochimique avec des mesures spectroscopiques in situ. Enfin, dans le chapitre 5, nous avons mené une étude exploratoire permettant la détection à l’anneau des espèces produites au disque lors de la réaction complexe de réduction du dioxyde de carbone. Cette étude nous a permis, à la suite d’une série d’expériences de contrôle, d’attribuer les différences observées en termes de sélectivité de différents catalyseurs modifiés. Il ressort de ces analyses que la présence de calix[4]arènes induit aussi pour cette réaction des modifications de la sélectivité mais qu’elle dépend fortement de la nature et de la morphologie du cœur métallique fonctionnalisé. Il faut noter que cette réaction est complexe et que maîtriser sa sélectivité notamment vers des composés de type C2/C3 est un enjeu fort du domaine. La stratégie développée dans ce travail constitue une réponse originale à cet enjeu mais nécessite sûrement de sélectionner plus finement le groupement fonctionnel à l’interface. Enfin, les différences de sélectivité associées à la modification des signatures électrochimiques observées à l’anneau doivent être confirmées par des méthodes de détection classiques (i.e. chromatographies ionique et gazeuse) afin d’améliorer la fiabilité de cette méthode exploratoire. 232 Conclusion Générale. En conclusion, ces travaux montrent que la fonctionnalisation délibérée de surfaces métalliques par des calix[4]arènes est une stratégie puissante dans le but de moduler leur activité catalytique pour l’activation de petites molécules ressources. La présence de la couche organique induit en effet des modifications de la structure électronique des nanoparticules à la suite de son greffage covalent, modifiant ainsi les interactions entre la surface et les espèces réactionnelles. Elle impose aussi des contraintes stériques à certaines espèces grâce à la présence de la structure conique rigide des calix[4]arènes. Enfin, la modification aisée des groupements fonctionnels présents sur le petit col de ces plateformes permet de moduler de manière extrêmement diverse les propriétés interfaciales du système modifié. En conséquence de ces effets, nous avons observé dans ce travail de thèse des modifications variées de l’activité catalytique, dépendant à la fois du système modifié et de la réaction d’activation étudiée. Cette stratégie peut par ailleurs être développée avec des systèmes encore plus variés. Outre le nombre restreint de surfaces métalliques étudiées dans ce manuscrit, il est possible de développer des calixarènes permettant de moduler encore plus les propriétés stériques et interfaciales de la couche organique. La conception de calixarènes plus larges (i.e. calix[6]arènes) permettrait de moduler l’accès à la surface de molécules plus imposantes, notamment lors de l’étude des réactions d’oxydation du méthanol ou de réduction du dioxyde de carbone. Avec de tels systèmes, il est par ailleurs possible de décorer le petit col des calix[6]arènes avec des complexes de métaux de transition pouvant servir de co-catalyseurs, et donc de moduler encore plus l’environnement moléculaire permettant une activation efficace de petites molécules ressources. On comprend alors aisément que la modification de surface par des calixarènes peut être dérivée de manières extrêmement variée. Le principal défi de cette stratégie serait maintenant de mieux anticiper quels sont les paramètres permettant d’obtenir une activité accrue en fonction de la réaction étudiée afin de mieux cibler la conception des calix[4]arènes à utiliser. Ce travail n’est possible qu’avec une compréhension et une identification exhaustive des mécanismes régissant ces processus électrocatalytiques. De plus, des efforts doivent encore être fournis avant de pouvoir rationnaliser l’influence de la modification organique sur l’activité catalytique, en s’aidant notamment de techniques de caractérisation in operando. 233 Titre : Interfaces et nano-objets fonctionnels et biomimétiques pour l’électrocatalyse. Mots clés : électrocatalyse, nanoparticules, modification de surface, diazonium. Rés umé : La fonctionnalisation de surfaces métalliques par des ligands organiques permet d’influencer les propriétés électroniques, stériques et interfaciales des matériaux. Cette stratégie peut s’avérer extrêmement intéressante à des fins catalytiques puisqu’elle doit permettre de modifier la nature des interactions entre les espèces à activer et la surface catalytique. Ainsi, une modulation des performances catalytiques, que ce soit en termes d’efficacité, de sélectivité ou de stabilité peut découler de cette stratégie, rarement exploitée en électrocatalyse. Dans ce contexte, les travaux effectués dans le cadre de cette thèse se concentrent sur la fonctionnalisation covalente de nanoparticules métalliques par une monocouche de calix[4]arènes. L’activité catalytique de ces systèmes modifiés a ensuite été étudié lors de l’activation de petites molécules ressources comme le dioxygène, le méthanol, et le dioxyde de carbone. Ce travail a débuté par l’étude de l’impact du greffage covalent des calix[4]arènes à la surface de nanoparticules d’or et ’argent vis-à-vis de la réduction du dioxygène (ORR). Pour cette même réaction, l’influence de la nature chimique des fonctions portées par le petit col des calix[4]arènes, à l’interface entre l’électolyte et la matériau catalytique a aussi été analysée. Cette stratégie de fonctionalisation délibérée a ensuite été étendue à des nanoparticules de platine qui se sont avérées être des catalyseurs polyvalents pour les réactions de réduction du dioxygène et d’oxydation du méthanol. Enfin, la stratégie validée sur l’ORR a été explorée sur la réaction de réduction du dioxyde de carbone, réaction plus demandeuse que l’ORR, notamment en ce qui concerne sa sélectivité. A cet effet, une méthode innovante de détection à l’aide d’une électrode tournante à disque et anneau a été mise en place. Title : Biomimetic and functional interfaces / nano-objects for electrocatalysis. Keywords : electrocatalysis, nanoparticles, surface modification, diazonium. Abstract : Functionalization of metallic surfaces by organic ligands influences the electronic, steric and interfacial properties of the materials. This strategy is of particular interest for electrocatalysis since it can modify the nature of the interactions between the catalytic surface and the species to activate. However, the strategy has been less exploited in the field although higher catalytic performances, i.e. efficiency, selectivity and durability could be expected. In this context, the work presented in this manuscript is focused on the surface functionalization of metallic nanoparticles with a covalently-bound monolayers of calix[4]arenes. The catalytic activity of these modified systems was then studied for the activation of small fuel molecules such as oxygen, methanol, and carbon dioxide. This work started by the study of the impact of the covalent grafting of calix[4]arenes on gold and silver nanoparticles over their activity towards oxygen reduction reaction. For the same reaction, the interfacial influence of the chemical groups decorating the small rim of the calix[4]arenes has also been analysed. This strategy of deliberate functionalization has then been extended to platinum nanoparticles which were shown to be a bifunctionnal catalyst for both the oxygen reduction and methanol oxydation reactions. Finally, the strategy has been explored with a more highly demanding reaction, especialy in terms of selectivity : the carbon dioxide reduction reaction. An innovative detection method with a rotating ring-disk electrode was set for this last study.
20,409
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Vers un repérage automatique des discontinuités dans le discours pathologique du sujet schizophrène. Journées scientifiques du GDR Lift - LIFT 2023, Nov 2023, Nancy, France. &#x27E8;hal-04356448&#x27E9;
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Vers un repérage automatique des discontinuités dans le discours pathologique du sujet schizophrène Barrouillet Vincent-Thomas 1 Michel Musiol1, 2 Maxime Amblard2 (1) Universite de Lorraine, CNRS, ATILF, F-54000 Nancy, France (2) Universite de Lorraine, CNRS, Inria, LORIA, F-54000 Nancy, France [email protected] RESUME Le discours du sujet schizophrène en phase aiguë présente de multiples bizarreries. Un sousensemble de ces dernières a été modélisé en tant que « ruptures ». En étude systématique de corpus, on dégage 27 séquences comportant 47 ruptures dans des entretiens entre des patients et des psychologues. Nous définissons un modèle qui vise à retrouver de façon in fine automatique ces ruptures. À partir de la segmentation en actes des tours de parole, nous définissons les actes pertinents pour chaque interactant au moyen de règles de décision non ambiguës. Enfin, un calcul algorithmique permet de repérer les ruptures attendues. Nous obtenons une F-mesure de 88.9 % et une exactitude de 96.2 %. L’analyse qualitative des données montre que les 40 vrais positifs et les 3 faux positifs relèvent d’une même catégorie, les « ruptures thématiques », tandis que le système échoue à repérer les autres catégories de ruptures. ABSTRACT Toward an automatic identification of discontinuities in the pathological discourse of patient with schizophrenia Pathological discourse of schizophrenics in acute phase presents multiple oddities. A subset of them was modeled as “discontinuities”. Here, 27 sequences with 47 discontinuities were manually identified in our corpus of interviews between a patient and a psychologist. We aim to find these discontinuities in fine automatically. From the segmentation of the turns into acts, we precise all the relevant acts for each interactant and each turn, thanks to unambiguous decision rules. Finally, an algorithm identifies the discontinuities. We achieve a F-measure of 88.9% and an accuracy of 96.2%. By analyzing the data, we point out that the 40 true positives and the 3 false positives fall into the same category, “thematic discontinuity”, while the system fails to identify all other categories of discontinuities. MOTS-CLES : discours, discours pathologique, schizophrénie, corpus KEYWORDS: discourse, pathological discourse, schizophrenia, corpus 1 Contextualisation Le discours pathologique du sujet schizophrène est parsemé de bizarreries que l’on repère intuitivement. Un sous-ensemble de ces bizarreries a été formalisé sous la forme de ruptures, qui sont des discontinuités pragmatiques dans le discours. Un modèle général a ainsi émergé identifiant quatre types de ruptures (Musiol, 2009) qui sont le débrayage conversationnel et la défectuosité de l’initiative conversationnelle d’une part, et les ruptures inter et intra d’autre part. Les deux premières sont prédites par un modèle adapté de la SDRT (Asher & Lascarides, 2003; Rebuschi et al., 2014). Ici, nous nous intéressons plus particulièrement à la partie du modèle prévoyant les deux dernières catégories : les ruptures inter, i.e. ayant lieu entre deux tours parole, et les ruptures intra, i.e. ayant lieu à l’intérieur d’un tour de parole. Ces ruptures sont objectivement et manuellement mises à jour au moyen de la modélisation hiérarchique (Roulet et al., 2001), mais nous cherchons à les identifier par un système in fine automatique qui ne passe plus par la modélisation hiérarchique. 2 Présentation du corpus Le corpus est constitué d’entretiens qui se sont tenus à l’hôpital psychiatrique de Rouen en 2005 et à l’hôpital de Tizi-Ouzou, en Algérie, en 2019. Nous avons obtenu un CPP (« Comité de Protection de la Personne ») pour le corpus de Rouen, mais l’absence de comité d’éthique à Tizi Ouzou ne nous a pas permis d’en présenter un. Aussi, afin de garantir la qualité de la méthodologie appliquée, nous avons réemployé un protocole pour lequel nous avions obtenu un accord la même année auprès du CHRU d’Aix-En-Provence. Le protocole consiste en la réalisation d’un ou deux entretiens non directifs, sans but explicite, permettant au sujet d’élaborer sur son environnement et sa vie quotidienne. Les entretiens sont conduits par plusieurs psychologues ayant reçu les formations nécessaires. Le corpus, qui rassemble 26 heures d’entretiens, a ensuite été retranscrit manuellement par quatre transcripteurs entrainés. Un guide de transcription a été élaboré pour normaliser la production, et les deux transcripteurs ont été entraînés sur des données parallèles afin de contrôler leur production. Nous n’avons pas calculé le Kappa de Cohen car leur entraînement conjoint a été fait sur un volume réduit de données. Le matériel textuel obtenu est désidentifié des noms de personne, de ville, d’institution, etc., et augmenté de balises ad hoc telles que <rire> <chuchotement> <claquement de porte>, etc. Une étude manuelle par deux spécialistes différents des transcripteurs a été effectuée, en application du modèle de (Roulet et al., 2001), pour identifier l’ensemble exhaustif des séquences où les ruptures apparaissent. L’étude a permis d’identifier 27 séquences de ruptures. Les séquences sont composées de plusieurs tours de parole que nous segmentons en actes de langage (Searle & Vanderveken, 1985). Comme il n’existe pas de système automatique ayant les performances suffisantes, la segmentation est réalisée par un annotateur, et le résultat est corrigé et validé par un second annotateur. 3 Méthodologie Notre méthode est basée sur la notion de « mise à jour ». Nous assumons qu’un acte est mis à jour, au sens large, par un acte d’un tour ultérieur du même interactant si le second a explicitement besoin du premier pour exister, comme dans un couple question / réponse, ou dans le cas d’une reformulation, d’une reprise, d’une élaboration, ou encore d’une répétition. Nous envisageons l’un après l’autre l’ensemble des actes d’un tour pour l’un puis pour l’autre des interactants et nous formalisons 5 règles explicitant les traitements à appliquer à chaque acte. Si un acte n’est pas mis à jour par la suite, il n’est pas retenu comme acte pertinent (règle A1). S’il est mis à jour par la suite pour le même interactant, il est retenu comme acte pertinent de tour en tour pour cet interactant (règle A3) jusqu’à sa mise à jour où il n’est plus pertinent (règle A4). L’ensemble des autres règles s’applique pour statuer sur la pertinence éventuelle de l’acte qui acte met à jour le précédent. Et il n’y a ucun acte pertinent dans le dernier tour de parole de la séquence (règle A5). Toutes les règles font l’objet d’une description formelle, mais la règle A2 reste la plus complexe d’un point de vue conceptuel. Chaque tour de parole possède un et un seul acte dit “prévalent”. L’acte prévalent est l’acte « le plus important » du tour de parole qui se calcule comme celui dont les autres actes dépendent. Il est toujours possible de retirer soit un, soit un groupe d’actes secondaires, mais la suppression de l’acte prévalent dans le tour de parole lui retire la possibilité de faire sens. Ce concept est une modélisation de l’« acte principal » défini dans le modèle hiérarchique de (Roulet et al., 2001) et des travaux en cours visent à automatiser le calcul de l’acte prévalent, afin de se libérer totalement de la modélisation hiérarchique dans la détection automatique les ruptures. La règle A2 stipule que l’acte prévalent d’un interlocuteur est forcément pertinent pour le tour en cours et pour l’interlocuteur concerné. Et s’il n’est pas mis à jour par la suite, il n’apparaitra qu’une fois dans le tour de parole qu’il structure. Nous utilisons un tableau à deux entrées contenant les tours de parole pour les deux interactants. Dans chaque case se trouvent les actes pertinents à échéance d’un tour de parole pour le patient ou le psychologue. Les actes pertinents en vertu de la règle A3 portent en indice le numéro de l’acte qui le mettra à jour, et les actes pertinents en vertu de la règle A2 ne portent pas d’indice, car ils n’apparaissent qu’une fois. Par la suite, un algorithme détermine parmi les actes pertinents ceux qui ne doivent pas être pris en compte dans le calcul des ruptures, et qu’il faut retirer ― ces actes sont appelés « actes fantômes ». Enfin, si les deux ensembles d’actes restants, patient et psychologue, ne sont pas identiques pour un tour de parole donné, le système repère une rupture à échéance de ce tour. 4 Pseudo-code de l’algorithme de détection des ruptures Dans cette section, nous proposons une description algorithmique de l’étape finale de la détection des ruptures. Nous commençons par les notations initiales. R := [R0, R1,..., Rk] # le tableau complet R se compose des tours de parole R0 à Rk Ri := [Ri0, Ri1] # le tour Ri se compose des cases du patient (0) et du psychologue (1) Rij := [A0, A1,...] # la case Rij se compose d’une liste d’actes A0, A1,... An := [corps, indice] # l’acte An se définit comme un corps et un indice corps := étiquette # le corps d’un acte est une étiquette qui en donne le numéro (A, B, C...) indice := rien ou étiquette # l’indice d’un acte est l’étiquette de l’acte qui le mettra à jour. Il n’y a pas d’étiquette en cas d’application de la règle A2 Nous poursuivons par la définition d’une fonction supprimant les éléments non pertinents. fonction Rij_sans_fantôme(i, j): # retirer les actes fantômes de R(i, j). liste_fantômes est initialisé comme liste vide. pour tous les actes A de R(i, j).. pour tous les actes B de R(i, 1 – j)... si A = B :.... alors : passer au A suivant.... sinon : pour tous les actes C de R(i – 1, 1 – j)..... si (corps de A = corps de C) et (corps de B = indice de C) alors :...... A est placé dans liste_fantômes. pour tous les actes de R(i, j), retirer les fantômes et renvoyer le résultat fin de la fonction Enfin, nous abordons la fonction qui identifie les ruptures. fonction trouver_rupture(k): # k est le nombre de tours. pour i allant de 0 à k # pour chaque tour i.. pour les deux valeurs de j # les deux interactants... R(i, j) prend la valeur de Rij_sans_fantome(i, j)... si R(i, 0) différent de R(i, 1), alors, il y a rupture à échéance du tour i fin de la fonction 5 Exemple : Voyage & Incontinence Nous développons dans la suite un exemple complet d’analyse d’une rupture. Actes de langage par Interactant S Interactant P tour de parole Ri,0 Ri,1 S0 R0,0 R0,1 A = J’ai toujours une belle-mère et un beau-père. B = Mon beau-père, depuis qu’il est à la retraire, s’absente neuf mois... C = Et quand il revient, il est violent. {BM ; CO} {BD ; CD} P0 R1,0 R1,1 {BM ; CO ; DE} {DF} S1 R2,0 R2,1 E = Oh, je ne sais pas où il va, puisque je ne l’ai jamais accompagné... {BM ; CO ; E} {EF ; DF} P1 R3,0 R3,1 {BM ; CO} {FL} R4,0 R4,1 {BM ; CO ; G} {FL} R5,0 R5,1 {BM ; CO ; LM} {L} R6,0 R6,1 D = Il va où pendant ces neuf mois? F = Il vous dit pas? S2 G = Il est incontinent. H = Hachem. I = Il est incontinent mon beau-père. J = Mon beau-père est incontinent comme un bébé. K = Ou un petit garçon jusqu’à trois ans. P2 L = Et du coup, il s’absente 9 mois? S3 M = Depuis qu’il est à la retraite, oui, il voyage. N = Il s’absente 9 mois O = Et quand il revient, il est violent.... U = Et je suis tombée. V = Et j’ai saigné. Ø Les Ri,j du tableau sont l’ensemble des actes pertinents au regard des règles de décision. L’algorithme donné ci-dessus calcule les actes fantômes qui sont représentés ici en vert. Lorsque Ri,0 et Ri,1 ne sont pas identiques, après le retrait des actes fantômes, la rupture est repérée, ici pour i = 3 et pour i = 4, ce qui signifie qu’il y a une rupture, ici inter, à échéance de ces tours de paroles. Le tour de la patiente noté S2 est donc encadré par deux ruptures thématiques et se constitue donc une sorte d’ilot isolé du reste de l’interaction. 6 Résultats et discussion Parmi les 27 séquences du corpus, le système repère 40 vrais positifs et 213 vrais négatifs, ainsi que 3 faux positifs et 7 faux négatifs. On obtient donc une exactitude de 96,2 % et une F-mesure de 88,9 %, ce qui est un bon résultat au vu de la complexité de la tâche. Plus finement, le système a une précision de 93.0 % et un rappel un peu inférieur, à 85.1 %. L’analyse qualitative des résultats conduit à plusieurs remarques. Dans l’interaction, les ruptures peuvent être de nature différente : ruptures thématiques ou argumentatives. L’ensemble des positifs (vrais et faux) sont des ruptures thématiques, contrairement à l’ensemble des faux négatifs. Le système ne reconnait aucune rupture argumentative, et se focalise sur les ruptures thématiques, y compris les 3 fausses. Nous disposons ainsi d’un système formel permettant d’établir la présence de ruptures thématiques avec un très bon niveau de performance. Mais si ces ruptures sont les plus nombreuses dans le corpus, le système nécessite une adaptation plus fine pour identifier les autres types de ruptures qui apparaissent au niveau de l’interaction. 7 Conclusion Les « ruptures », dans le discours pathologique du sujet schizophrène, sont des points de discontinuité pragmatique que l’on peut mettre au jour objectivement et manuellement au moyen de la modélisation hiérarchique (Roulet et al., 2001). Dans le cadre d’un corpus d’entretiens patients et psychologue, et afin d’automatiser le repérage des ruptures dans le but de se passer de la modélisation hiérarchique, nous proposons un système fondé sur la notion de « mise à jour » : nous assumons qu’un acte de langage est mis à jour par un acte érieur si le second a besoin du premier pour exister (e.g. un couple question / réponse). Cinq règles formelles décident pour chaque acte de chaque tour de parole, pour le patient et le psychologue, si l’acte est « pertinent » ou pas. Si c’est le cas, l’acte se retrouve dans une case Ri,j d’un tableau à deux entrée, i étant le numéro du tour et j valant 0 pour le patient, 1 pour le psychologue. Un algorithme, dont nous avons donné le pseudocode, calcule alors les ruptures dans la séquence, et nous obtenons sur les 27 séquences du corpus, comportant 47 ruptures, une exactitude de 96,2 % et une F-mesure de 88,9 %, soit de bons résultats au regard de la complexité de la tâche. Références ASHER N. & LASCARIDES A. (2003) Logics of conversation. Cambridge University Press. MUSIOL M. (2009) Chapitre 13. Incohérence et formes psychopathologiques dans l’interaction verbale schizophrénique in Psychose, langage et action. Louvain-la-Neuve, pp. 217–238. De Boeck Supérieur (Neurosciences & cognition). REBUSCHI M., AMBLARD M. & Musiol, M. 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Disponible sur : <https://www TABLES DES FIGURES45 FIGURE 1 – CARTOGRAPHIE DE LA ZONE FRANC (SOURCE : DIRECTEUR GENERALE DU TRESOR) 9 FIGURE 2 - PRESENTATION D'UN BILLET DE 10 000 FRANC CFA EMIS PAR LA BCEAO ET UN BILLET DE 10 000 FRANC CFA EMIS PAR LA BEAC (SOURCE : LA BANQUE DE FRANCE) 12 FIGURE 3 – PRESENTATION DE DIFFERENTES DEVISES (DOLLAR, LIVRE STERLING, EURO, YUAN) (SOURCE : GOOGLE IMAGES) 15 FIGURE 4 – ILLUSTRATION DE FLUX DE CAPITAUX EN DIRECTION DE L'UEMOA ET DE LA CEMAC (SOURCE : YOUTUBE) 19 FIGURE 5 – ILLUSTRATION MONTRANT QUE LE FRANC CFA PROMEUT L'INTEGRATION REGIONALE DANS LA ZONE FRANC 23 FIGURE 6 – LE PRESIDENT FRANÇAIS CHARLES DE GAULLE AUX COTES DU PRESIDENT CAMEROUNAIS AHMADOU AHIDJO. A L'ARRIERE JACQUES FOCCART, HOMME D'AFFAIRES ET HOMME POLITIQUES (SOURCES : RELATIONS INTERNATIONALES.ORG). 28 FIGURE 7 - PRESENTATION DU CADRE ARCHITECTURAL DE LA ZONE FRANC (SOURCE : LE DIRECTEUR GENERAL DU TRESOR) 32 FIGURE 8 – PAGE DE COUVERTURE DE L'OUVRAGE SORTIR L'AFRIQUE DE LA SERVITUDE MONETAIRE. 65 SIGLES ET ABREVIATIONS UTILISES  ADP : Agence française de développement  ASS : Afrique subsaharienne  BCC : Banque Centrale des Comores  BCE : Banque Centrale Européenne  BCEAO : Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest  BEAC : Banque des États de l'Afrique centrale  CA : Conseil d'administration  CEDEAO : Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest  CEMAC : Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale  FCFA : Franc CFA  IDE : Investissements directs à l'étranger  KMF : Franc comorien  PED : Pays en voie de développement  UEMOA : Union Économique et Monétaire Ouest Africaine  ZLECAf : Zone de libre-échange continentale africaine 66 GLOSSAIRE M. Alassane OUATTARA (1942-) : Il est l'actuel président de la Côte d'Ivoire. Il officialise aux côtés du président français Emmanuel Macron la fin du franc de la Communauté Financière d'Afrique, à Abidjan, le 21 décembre 2019. M. Emmanuel MACRON (1977-) : Il est le président de la France depuis mai 2017. Ses discours vis-vis du franc CFA montre qu'il n'est pas contre l'abandon du franc CFA. M. Kako NUBUKPO (1968-) : Économiste qui critique le fonctionnement du franc CFA, d'une part pour le symbole colonial que cette monnaie représente. D'autre part, pour la mise en place de cette monnaie finie aujourd'hui par entraver le développement des États membres de la zone franc. Il était aussi un ancien du Togo et est le coauteur d'un ouvrage intitulé Sortir l'Afrique de la servitude monétaire. À qui profite le franc CFA? Afflux et fuite de capitaux : Ici, l'afflux de capitaux se caractérise par les transferts de capitaux vers la zone franc. Ils peuvent prendre la forme d'IDE, transferts de migrants, etc. Tandis que la fuite de capitaux se caractérise par le rapatriement de ressources financières quittant la zone franc pour aller principalement vers la France. Cela peut être due au fait des entreprises françaises installées en zone franc souhaite récupérer leurs liquidités. Ce phénomène s'explique également par le comportement de riches africains qui vont investir en France (ex : achats d'appartements, ). Ou encore, la perte de confiance des investisseurs étrangers internationaux qui vont retirer le capital qu'ils ont investi par peur de le perdre. Afrique subsaharienne : Elle désigne tous les pays africains localisés en dessous du Sahara. Elle rassemble 48 pays dont les 15 pays appartenant à la zone franc. 67 BCE : Née en 1998 et située à Francfort en Allemagne, elle est institution monétaire manoeuvrant la politique monétaire dans la zone euro. Elle est indépendante. Elle permet de garantir la stabilité des prix. Ainsi, en jouant sur les taux directeurs, elle mène actuellement une politique monétaire de lutte contre l'inflation. BCEAO : Située à Dakar, au Sénégal, c'est l'institution monétaire qui se charge de la politique monétaire dans les 8 pays d'Afrique de l'Ouest de la zone franc. Elle est indépendante depuis 2010 mais elle ne contrôle pas sa politique. Elle suit celle mise en place par la BCE, ce qui est actuellement un frein pour les économies de ces huit pays car les pays appartenant à la zone franc ont besoin d'argent pour soutenir leur développement. BEAC : Située au Cameroun, dans la capitale, Yaoundé, elle est l'établissement monétaire qui s'occupe de la politique monétaire pour les six pays d'Afrique Centrale de la zone franc. Elle indépendante depuis 2010 mais, de la même manière que la BCEAO, elle calque sur la BCE alors que la politique monétaire de cette dernière ne correspond pas aux besoins des économies de la zone franc. CEDEAO : Organisation d'Afrique de l'Ouest qui regroupe actuellement 15 pays dont 8 appartenant à la zone franc. Ces pays sont le Bénin, le Burkina Faso, le Cap-Vert, la Côte d'Ivoire, la Gambie, le Ghana, la Guinée, la Guinée-Bissau, le Liberia, le Mali, le Niger, le Nigeria, le Sénégal, la Sierra Leone, le Togo. Il découle des accords de Lagos en 1975. CEMAC : Créée en 1994, elle regroupe les six pays d'Afrique Centrale de la zone franc. Elle remplace l'union économique et douanière de l'Afrique centrale, l'objectif étant de créer un marché commun. Comptes d'opérations : Ils représentent les comptes où doivent les banques centrales africaines doivent déposer leurs réserves. 68 Convergence : Cela désigne ici la mise en place de règles communes et de politiques communes par les pays de la zone franc afin de parvenir à harmoniser leurs économies. Crise de change : Phénomène provoqué par le fait que le flux de devises étrangères entrant dans un pays, par le biais d'investissements étrangers ou d'importations, n'est pas suffisant pour maintenir la valeur de la monnaie qui in fine se déprécie. Franc CFA : Elle est, pour l'instant, la monnaie commune utilisée dans la zone franc. Un seul pays de la zone franc n'utilise pas cette monnaie. Il s'agit du Comores. Celui-ci utilise le franc comorien. En réalité, il existe deux francs CFA. Le « franc de la coopération financière en Afrique » pour les États de l'Afrique de l'Ouest de la zone franc ou le « franc de la Communauté financière africaine » pour les États d'Afrique Centrale de la zone franc. Françafrique : C'est un terme péjoratif utilisé par les détracteurs du franc CFA, notamment les intellectuels. Il s'agit par ce terme de mettre en avant les relations France-Afrique apparentée à une relation néocoloniale. Garantie de convertibilité : Garantie assurée par la France en contrepartie du dépôt de la moitié des réserves de changes sur des comptes d'opérations auprès du Trésor public français. Inflation : Elle désigne la hausse du niveau des prix et la baisse du pouvoir d'achat. Il se diffère de la déflation. Ce dernier est un phénomène de diminution général du niveau des prix et de croissance du pouvoir d'achat. Il faut aussi le dissocier la désinflation qui se traduit par un ralentissement de l'accroissement des prix. Libre circulation des capitaux : Ici, cela désigne la liberté de transfert de capitaux entre la France et la zone franc et à l'intérieur de chaque espace de la zone franc, c'est-à-dire, l'UEMOA, la CEMAC et les Comores. Politique monétaire : Elle permet de maîtriser le volume de monnaie en circulation en jouant notamment sur la masse monétaire et en manipulant les taux d'intérêt. Ici, elle est mise en oeuvre par la BCE ou les banques centrales de la zone franc, c'est-à-dire, la BCEAO, la BCC, la BEAC. Risque de change : Risque auquel tout acteur économique (investisseur, emprunteur, importateur, exportateur, etc.) étant en possession de devises étrangères (i.e. non libellés dans sa devise nationale) doit faire face. Risque systémique : Risque touchant toute une économie et qui met en péril le système financier internationale. Ce risque ne peut pas être diversifié. Taux de change fixe : C'est un régime de change qui correspond au cours d'une devise (ici, le franc CFA) qui est ancré au cours d'une autre devise. La devise servant d'ancrage est celle d'une autre devise ou à un panier de devises. Ici, la devise d'ancrage est l'euro. Ainsi, on parle souvent de parité fixe (ici, du franc CFA à l'euro), ou encore, de cours pivot. Pour parenthèse, le régime de change fixe s'oppose au régime de change flottant. Dans ce régime, la parité fixe, entre deux devises ou une devise et un panier de devises, n'existe pas. Les cours des devises flottent sans entrave par rapport à l'offre et de la demande sur le marché des changes, c'est-àdire, le marché où sont échangées les différentes devises. UEMOA : À l'instar de la CEMAC, elle est née en 1994. C'est une union monétaire et économique rassemblant les huit pays d'Afrique de l'Ouest de la zone franc. Elle vise aussi à la création d'un marché commun. Zone franc : Créée en 1939, elle regroupe actuellement huit pays d'Afrique de l'Ouest (Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Togo, Sénégal), six pays d'Afrique Centrale pays (Cameroun, Tchad, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée équatoriale) et les Comores. 70 Réserves de changes (ou avoirs extérieurs) : Elles correspondent aux devises étrangères possédées par une banque centrale. 71 TABLES DES ANNEXES 72 ANNEXE 1 : FLUX ENTRANTS D'INVESTISSEMENTS DIRECTS ETRANGERS EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE (EN MILLIARDS DE DOLLARS) 46 Source : CNUCED 46 Disponible sur le rapport annuel de la zone franc 2018, pp. 23 : https://publications.banquefrance.fr/sites/default/files/medias/documents/819174_zf2018_web_signets_avec-couv1.pdf 73 ANNEXE 2 : EFFORT DES PAYS DONATEURS EN 2018 (EN % DU REVENU NATIONAL BRUT) 47 Source : OCDE (Comité d'aide au développement) 47 Disponible sur le rapport annuel de la zone franc 2018, pp. 26 : https://publications.banquefrance.fr/sites/default/files/medias/documents/819174_zf2018_web_signets_avec-couv1.pdf 74 ANNEXE 3 : LIST OF LEAST DEVELOPED COUNTRIES (AS OF DECEMBER 2018) 48 Source : The Committee for Development Policy (CDP) 48 Lien : https://www.un.org/development/desa/dpad/wp-content/uploads/sites/45/publication/ldc_list.pdf 75 ANNEXE 4 : BALANCES COMMERCIALES DE LA ZONE CEMAC ET DE LA ZONE UEMOA (EN MILLIARDS DE FCFA)49 49 Disponible sur le site de la Banque de France : https://www.banque-france.fr/economie/relationsinternationales/zone-franc-et-financement-du ANNEXE 5 : BALANCES COMMERCIALES DES COMORES (EN MILLIARDS DE KMF) Disponible sur le site de la Banque France : https://www.banque-france.fr/economie/relationsinternationales/zone-franc et ment DES MATI ERES CLARATION 4 MERCIEMENTS 7 SOMMAIRE 6 INTRODUCTION 8 PARTIE 1 : - LE FRANC CFA SEMBLE PRESENTER UN CERTAIN D'AVANTAGES 11 CHAPITRE 1 – LE FRANC CFA DOIT ASSURER LA STABILITE ECONOMIQUE, FINANCIERE ET MONETAIRE 12 Le franc CFA permet aux Etats de la zone franc de contrôler leur inflation 12 I. A. L'ancrage du franc CFA à l'euro permet aux Etats de la zone franc de contrôler leur inflation 13 B. ce qui explique que les tensions inflationnistes sont plus faibles dans la zone franc que dans le reste de l'Afrique subsaharienne. 14 II. et d'éviter des problèmes liés aux variations change affectant régulièrement les pays moins développés et nuisant à leur stabilité. 15 A. La parité fixe du franc CFA permet, dans la zone franc, d'éviter les crises de changes nuisant à la stabilité économique et financière des pays les moins développés 16 B. D'autre part, la parité fixe du franc CFA limite le risque de change. 17 CHAPITRE 2 – LA STABILITE PROCUREE PAR LE FRANC CFA DOIT PERMETTRE L'ATTRACTIVITE DE LA ZONE FRANC ET UNE INTEGRATION REGIONALE 19 Une crédibilité internationale permise par le franc CFA et assurant l'afflux de capitaux 19 I. A. La parité fixe du franc CFA avec l'euro renforce la présence capitaux étrangers 20 A.1. Les investissements directs à l'étranger (IDE) 20 A.2. Transferts de migrants 21 A.3. Emissions de titres 21 A.4. Les agences de notations financières 21 B. et les investissements visant à promouvoir le développement des Etats de la zone franc 22 Le franc CFA, un atout pour la zone franc en terme d'intégration régionale 23 II. A. Le franc CFA permet la mise en place de politiques communes au sein de la zone franc renforçant l'intégration régionale 24 B. Toutefois, l'intégration régionale est plus avancée au sein de l'UEMOA que de la CEMAC 25 PARTIE 2 - CEPENDANT, IL EST L'OBJET DE NOMBREUSES CONTREVERSES 27 CHAPITRE 3 – LE SYSTEME FRANC CFA, UN PROLONGEMENT DE LA DOMINATION DE LA FRANCE SUR L'AFRIQUE 28 Le franc CFA, un système hér A. Franc CFA ainsi que la zone franc : seul système monétaire issue de la colonisation 29 A.1. Le franc CFA 29 A.2. La livre sterling Ouest-africaine 30 B. et créé au départ pour servir les intér êt s français 30 La présen ce de la France au sein des institutions financières 32 II. A. Les fondements du système CFA ont établi une coopération « françafricaine » 33 A.1. Centralisation des réserves de changes et la libre convertibilité 33 A.2. La parité fixe 33 A.3. La libre convertibilité 34 B. expliquant le poids prépondérant de la France dans la gouvernance des banques 34 B.1. La France est encore très présente dans le fonctionnement du système monétaire 34 B.2. Malgré des réformes pour « africaniser » la zone franc 35 B.3. La baisse du pourcentage de réserves de changes à déposer 36 CHAPITRE 4 – LE FRANC CFA, UN INSTRUMENT PRIVANT LES ETATS DE LA ZONE FRANC DE LEUR SOUVERAINETE MONETAIRE 38 Un outil de « servitude monétaire » freinant le développement 38 I . A. B. Le problème du rationnement du crédit 39 Le problème l'absence de liquidité 40 B.1. due à la centralisation des réserves de changes 40 B.2. due à la fuite de capitaux 41 Un outil de « servitude monétaire » entravant la compétitivité 42 II. A. B. L'absence d'une politique de change due à la parité de taux de change fixe 43 conduit à des balances commerciales déficitaires 43 PARTIE 3 - AINSI, CERTAINS CHEFS D'ETATS VONT ABANDONNER LE FRANC CFA45 CHAPITRE 5 – LES ETATS DONT LES DIRIGEANTS VEULENT METTRE FIN DU FRANC CFA 46 Les chefs d'Etats voulant garder le franc CFA pour les avantages économiques procurés 46 I. A. Les partisans du franc CFA en Afrique 46 B. Des positions plus nuancés, voire neutre 47 B.1. Des chefs d'Etats mitigés 47 B.2. Position neutre 48 Les chefs d'Etats voulant l'abandon du franc CFA pour une monnaie unique 49 II. A. Les détracteurs du franc CFA en Afrique 50 B. Les pays pour l'abandon du franc CFA en Europe 50 B.1. L'exemple de l'Italie 50 B.2. La position de la France 51 CHAPITRE 6 – UNE NOUVELLE MONNAIE EN AFRIQUE, LA MISE EN PLACE DU PROJET ECO AU SEIN DE LA CEDEAO 52 Qu'est-ce que le projet Eco? 52 I. A. Le projet Eco : en route pour la mise en place d'une monnaie unique au sein de la CEDEAO 53 A.1. Définition et mise en place 53 A.2. Fonctionnement 53 B. Ce qui va changer pour les États passant du franc CFA à l'Eco 54 B.1. Fin de la centralisation des réserves africaines de change 55 B.2. Le retrait des représentants français au sein des institutions financières 55 II. Réflexions sur les impacts que pourrait avoir le projet Eco pour les utilitaires du franc CFA et la zone franc 56 A. B..
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Chapitre V - La transition premier emploi-emploi temporaires, nous remarquons que les jeunes avec CDL1 = 0 semblent avoir un peu plus de tels épisodes (25 % entre eux ont au moins deux séquences ultérieures en contrat temporaire). Dans le tableau B, nous présentons la distribution des caractéristiques individuelles sur deux populations de jeunes : des jeunes occupant un CDI cinq ans après la sortie d'études (colonne CDI=1) et des jeunes qui ne sont pas stabilisés en emploi en 2003 (colonne CDI=0). Nous utilisons uniquement les variables explicatives introduites dans l'équation de stabilisation en emploi. Moins d'un jeune sur trois (28 %) de notre échantillon qui débute d'une façon précaire sa trajectoire (en contrat temporaire ou en « inactivité ») occupe un CDI cinq ans plus tard (3 112 jeunes). Les jeunes insérés de façon stable sur le marché du travail commencent plus fréquemment leur trajectoire par une séquence en contrat à durée limitée que ceux qui n'ont pas de CDI en 2003. Egalement, les « stabilisés en emploi » ont plus d'épisodes ultérieurs temporaires de courte durée (33 % des individus en CDI). En revanche, les jeunes qui n'occupent pas un CDI en 2003 connaissent plus fréquemment des séquences ultérieures en contrat à durée limitée avec une durée supérieure à la durée médiane. Ce phénomène peut s'expliquer par le fait que, si vers la fin de la trajectoire, le jeune occupe un contrat temporaire de longue durée, cela va avoir une incidence sur ses chances d'occuper un CDI en 2003. Concernant les caractéristiques individuelles « standards », les jeunes qui sont en CDI à la date de l'enquête sont plus souvent des hommes (53 % contre 42 % pour ceux qui ne sont pas stabilisés en emploi 2003) et sont plus âgés. Parmi les individus en CDI à la date de l'enquête, il existe une part plus importante de jeunes très diplômés, en comparaison avec les jeunes qui ne sont pas stabilisés en emploi (18 % des jeunes en CDI sont sortis d'études au niveau du troisième cycle, contre 6 % des jeunes qui n'occupent pas un CDI à la date de l'enquête). Chapitre V - La transition premier emploi-emploi Les deux variables d'expérience professionnelle antérieure sont : les stages et l'emploi régulier pendant les études. Nous observons que la même part de jeunes parmi les stabilisés en emploi et les non stabilisés en emploi ont travaillé régulièrement pendant leurs études. En outre, 54 % des jeunes en CDI en 2003 ont fait un stage de plus de trois mois, contre 43 % parmi les jeunes qui ne sont pas stabilisés en emploi. Au contraire, 25 % des non stabilisés en emploi n'ont pas effectué de stage contre 17 % pour les jeunes en emploi stable à la date de l'enquête. L'environnement familial semble également différencier les individus en CDI et pas en CDI. Les jeunes qui n'occupent pas un CDI en 2003 ont plus souvent des enfants (27 %) par rapport à ceux qui sont stabilisés en emploi. Ces derniers vivent plus souvent seuls. Les jeunes qui à la date de l'enquête n'ont pas un emploi stable sont plus souvent dans des cas d'habitation chez leurs parents. Concernant l'occupation des parents, être en CDI est plus souvent associé à des parents qui sont dans la catégorie « cadre, ingénieur, profession libérale ». En outre, ceux qui n'ont pas de CDI en 2003, ont plus souvent des parents ouvriers. Tableau B : La distribution des variables explicatives selon la stabilisation en emploi % Situation à la date de l'enquête (2003) CDI=1 CDI=0 Variables CDL1inf 18,19 13,88 CDL1sup 11,70 8,08 CDL2inf 32,68 28,24 CDL2sup 9,70 38,07 Homme Né en France Age fin d'études Premier quartile Deuxième quartile Troisième quartile Quatrième quartile Niveau de formation Niveau 1 Niveau 2 Niveau 3 Niveau 4 Niveau 4 + Niveau 5, 5b, 6 Région fin d'études Ile de France Région du Centre Nord 53,47 96,37 41,69 96,26 15,94 26,90 29,47 27,70 25,59 28,17 23,62 22,62 18,32 12,76 28,53 12,40 11,28 16,71 6,47 12,72 24,33 15,48 13,31 27,69 14,30 21,85 10,65 22,28 315 Chapitre V - La transition premier emploi-emploi NPDC Région de l ' est Région du Nord-ouest Atlantique Région du Sud-ouest Région du Centre-Sud Région du Midi méditerranéen Mobilité géographique entre la fin des études et la date de l'enquête Stage Stage plus de 3 mois Stage moins de 3 mois Pas de stage Emploi régulier pendant les études Profession père Père agriculteur Père artisan, commerçant, chef d'entreprise Père cadre, ingénieur, profession libérale, professeur Père technicien, agent de maîtrise, VRP, profession intermédiaire Père employé Père ouvrier Père sans travail (jamais travaillé ou décédé) Profession mère Mère agriculteur Mère artisan, commerçant, chef d'entreprise Mère cadre, ingénieur, profession libérale, professeur Mère technicien, agent de maîtrise, VRP, profession intermédiaire Mère employée Mère ouvrière Mère sans travail (jamais travaillé ou décédée) Avoir un enfant Situation à la date de l'enquête Vit seul(e) Vit chez ses parents Vit en couple avec conjoint en emploi Vit en couple avec conjoint en non-emploi Nombre individus 8,61 12,15 14,88 70 11,50 6,01 69,86 9,42 12,54 15,38 11,21 10,62 7,90 72,26 54,43 28,53 17,03 8,97 42,51 32,23 25,26 8,73 5,14 11,02 21,53 5,04 10,10 16,08 10,96 9,46 26,99 19,70 4,66 27,88 26,60 4,83 3,18 3,92 13,21 2,94 3,93 9,86 5,30 4,66 51,45 8,74 14,20 22,59 49,93 11,21 17,46 26,66 27,70 19,34 46,72 6,11 3 112 21,36 29,24 43,49 5,57 8 191 Source : CEREQ, enquête « Génération 1998 », interrogation 2003 Champ : 11303 jeunes sortant du système éducatif en 1998 toutes filières et niveaux d'études confondus (sauf apprentissage) qui commencent leur trajectoire en contrat à durée limitée ou en « inactivité ». Chapitre VI La transition emploi-emploi : l'importance des « réseaux d'entreprises » INTRODUCTION SECTION 1 – LE CONTEXTE DE L'ANALYSE 1.1– Un cadre simple de « réseaux de mobilité d'entreprises » 1.2– Les mobilités intra et intersectorielles : revue de la littérature SECTION 2 – LES SOURCES DE DONNEES 2.1– Les variables du fichier « emploi » 2.2– Les variables du fichier « mobilité » SECTION 3 – LA DEMARCHE EMPIRIQUE SECTION 4 – LES RESULTATS 4.1– Les « réseaux d'entreprises » et les taux de mobilité 4.2– Les mobilités intra et intersectorielles : une analyse descriptive avec caractéristiques individuelles et d'entreprises 4.3– Les résultats de la stratégie économétrique CONCLUSION ANNEXES CHAPITRE VI 317 Chapitre VI - La transition emploi-emploi Introduction113 Dans la deuxième partie de la thèse, nous nous concentrons sur l'analyse des trajectoires professionnelles. Après l'étude de l'insertion professionnelle initiale (cf. chapitre V), nous souhaitons nous focaliser sur les transitions ayant lieu une fois que l'individu est rentré sur le marché du travail. Plus précisément, dans ce chapitre, nous analysons les transitions réalisées entre deux emplois. Mais comment l'analyse d'un tel type de transition professionnelle renseigne-t-elle le débat sur la flexicurité? Rappelons que l'objectif de la deuxième partie de la thèse est d'éclaircir certains aspects liés à la sécurisation des trajectoires professionnelles. Ainsi, nous vérifions si des mobilités potentiellement « à risque » renferment les individus dans des parcours précaires ou au contraire, sécurisent le prolongement de leur cheminement professionnel. Les mobilités potentiellement « risquées » sont mesurées à l'aide de certaines caractéristiques des entreprises entre lesquelles a lieu la mobilité (cf. Infra). En outre , dans notre démarche, un rôle primordial est accordé aux conditions initiales de la trajectoire. Ici, les conditions initiales de la trajectoire sont données par les caractéristiques des entreprises d'origine impliquées dans le processus de mobilité entre deux emplois. Les problématiques traitées dans ce chapitre se situent au coeur du débat sur les solutions envisageables de sécurisation des parcours en temps de grave crise économique. Notre analyse peut apporter de réelles réponses pour clarifier ce débat. Depuis le début de la crise économique de fin 2008, les partenaires sociaux, dans l'optique de sécuriser les trajectoires professionnelles des populations les plus fragiles et donc les plus affectées (comme les jeunes et les seniors), militent pour des mobilités professionnelles ayant lieu entre des entreprises appartenant à un même « réseau ». 113 Ce chapitre est une version allongée d'un article en cours effectué en collaboration avec Richard Duhautois et Francis Kramarz et qui s'intitule « Birds of a feather flock together ». itre VI La transition Un des principaux apports de ce travail est lié aux données qu'on mobilise. Les données nous permettent l'identification de « réseaux de mobilité d'entreprises ». Nous analysons la mobilité des salariés entre deux emplois tout en tenant compte des liens qui existent entre les entreprises d'origine et de destination impliquées dans la transition professionnelle. Nous observons comment des liaisons de nature différente entre des entreprises (liens sectoriels, géographiques, financiers, etc.) facilitent la mobilité des salariés. Ces aspects sont interprétés du point de vue du transfert de compétences et peuvent être situés dans le débat qui concerne les marchés professionnels et les marchés internes. Dans ce chapitre, nous nous retrouvons ainsi dans le cas du « socle compétences» de la flexicurité identifié par Freyssinet (2006 et 2009). Nous n'analysons pas directement les compétences des salariés mais nous interprétons leurs mobilités entre deux emplois en termes de liens entre les entreprises entre lesquelles se réalise la transition. Nous considérons que la mobilité des individus est possible grâce à certaines compétences qu'ils ont acquises dans l'entreprise de départ. Nous souhaitons insister sur cet apport méthodologique. Dans l'étude des mobilités professionnelles, la place des liens entre les entreprises apparaît comme étant majeure. Malheureusement, ce débat ne peut pas toujours être traité à cause d'un réel manque d'outils statistiques à la disposition des économistes. Les données utilisées pour étudier les trajectoires professionnelles sont plus riches aux Etats-Unis par rapport aux pays européens. Pour cette raison, nous présentons les principales bases de données Nord-Américaines. La majorité des travaux analysant la mobilité des salariés utilisent des données au niveau de l'individu. Aux Etats-Unis, les études qui s'intéressent au lien entre le salaire et la mobilité, utilisent principalement la source de données « Panel Study of Income Dynamics » – PSID – (Abraham et Farber, 1987 ; Altonji et ses différents coauteurs, 1987, 1997 ; Topel, 1991 ; et plus récemment, Buchinsky et al., 2005). En France, parmi les bases de données disponibles pour analyser les trajectoires, nous rappelons les enquêtes « Génération » du CEREQ, « Histoire de Vie », FQP (Formation qualification professionnelle), « Famille et Employeurs », les sources administratives DMMO (Déclarations de Mouvements de Maind'oeuvre). Chapitre VI - La transition emploi -emploi données appariées employeurs-salariés. Elles permettent de prendre en considération en même temps des caractéristiques individuelles de salariés et d'entreprises afin de décrire les épisodes de mobilité des salariés. Elles renseignent sur les deux côtés du marché du travail : individu et entreprise. Ce chapitre s'inscrit dans la nouvelle vague de la littérature qui s'appuie sur ce type d'outils. En France, la littérature utilisant des sources de données appariées employeurssalariés s'est également développée récemment (Abowd, Kramarz et Roux, 2006 ; Beffy, Kamionka, Kramarz et Robert, 2004). Le travail d'Abowd, Finer, Kramarz et Roux (1997) utilise une des premières versions de la base « Déclarations annuelles de données sociales » (DADS) qui est une source proche d'une partie des données mobilisées dans ce chapitre. Pour les Etats-Unis, ces outils riches utilisés par les économistes sont plus nombreux : voir par exemple, le programme Census – la source LEHD115 – ainsi que les travaux présentés dans la conférence « American Economists Association » de 2005. Nous utilisons une source de données originale contenant des informations au niveau de l'individu qui est appariée à des données au niveau d'entreprise pour examiner l'origine et la destination des mobilités professionnelles d'un échantillon représentatif de salariés français appartenant aux secteurs privé et semi-public. Les données dont nous disposons couvrent la période 1991-1999. Nous examinons les mobilités emploi-emploi des salariés, en insistant sur le rôle des « réseaux de mobilité d'entreprises » (entre les secteurs d'activité, les régions, les départements, les tailles d'entreprises, et d'une manière plus originale, entre les groupes financiers des entreprises). Parmi tous les « réseaux de mobilité d'entreprises », lors de l'implémentation de la stratégie économétrique, nous choisissons de mettre en avant le « réseau de mobilité sectorielle ». Ainsi, l'objectif de ce chapitre est de se concentrer sur les caractéristiques d'entreprises en analysant les mobilités professionnelles des salariés à l'intérieur du même secteur d'activité ou entre deux secteurs d'activité différents sur la période 1991-1999. Concernant les secteurs d'activité, nous nous positionnons au niveau de la classification NES36 (« Nomenclature économique de synthèse ») qui décrit les 36 principaux secteurs d'activité en France. Notre analyse a trois contributions majeures. Dans un premier temps, l'analyse des transitions emploi-emploi avec prise en compte des liens entre les entreprises est un sujet assez peu abordé dans la littérature en France. . Dans un deuxième temps, isées dans ce chapitre ent que et . Nous montrons que pour un salarié, sa probabilité de changer d'emploi au sein du même secteur d'activité est déterminée non seulement par ses caractéristiques individuelles, mais également par les caractéristiques de l'entreprise où il employé. Toutefois, il faut préciser, que nos données ne nous permettent pas d'identifier si la mobilité entre deux emplois est subie ou choisie. Autrement dit, on ne sait pas si le salarié est licencié et donc s'il est contraint à trouver un nouveau travail ou en revanche, s'il souhaite chercher un nouvel emploi (en démissionnant). Dans ce chapitre, nous considérons deux facettes de la mobilité du salarié : d'un côté, les caractéristiques individuelles (l'âge, le sexe, la qualification, le salaire, etc.) et de l'autre côté, les caractéristiques d'entreprise (le secteur d'activité, le taux de variation de la valeur ajoutée, la taille, la région dans laquelle l'entreprise est située, la forme de propriété, etc.). Un des points les plus originaux de notre démarche est la possibilité d'identifier l'origine et la destination des entreprises entre lesquelles l'échantillon représentatif de salariés français change d'emploi. Dans un troisième temps, nous menons une analyse en termes de « réseaux de mobilité d'entreprises ». Nous définissons le « réseau d'entreprises » de la manière suivante : deux entreprises appartiennent au même « réseau » si elles ont les mêmes caractéristiques en termes de secteur d'activité, localisation géographique, forme de propriété, taille ou niveau de santé économique. Par exemple, nous considérons que deux entreprises appartiennent à « réseau sectoriel » si elles « opèrent » au sein du même secteur d'activité. Ainsi, lors de la mise en place de la stratégie économétrique, nous analysons les relations entre le « réseau sectoriel » et les autres types de « réseaux de mobilité d'entreprises » identifiés avec nos données. Pour résumer, notre contribution au débat sur les « réseaux de mobilité d'entreprises » est empirique. D'abord, nous mobilisons des techniques de statistique descriptive afin de décrire les mobilités entre deux emplois avec la prise en compte de différents types de « réseaux d'entreprises ». Section 1 – Le contexte de l'analyse Les travaux sur les « réseaux de mobilité d'entreprises » sont relativement peu nombreux surtout du fait d'un manque de données. De plus, dans la littérature économique, le lien entre les différents « réseaux de mobilité d'entreprises » (par exemple réseau géographique, financier) et le « réseau sectoriel » n'est pas directement abordé. L'originalité de notre étude représente donc un apport extrêmement important. Nous présentons en deux temps la revue de la littérature : dans un premier temps, nous décrivons brièvement les principes généraux autour du concept de « réseau d'entreprises » (section 1.1) et dans un deuxième temps, nous présentons quelques travaux analysant les mobilités intrasectorielles (section 1.2). 1.1 – Un cadre simple de « réseaux de mobilité d'entreprises» A partir des travaux du sociologue Granovetter (1973), les chercheurs ont été extrêmement actifs à identifier le rôle des réseaux sur le marché du travail. De nombreux papiers (surtout en socio-économie) montrent comment les individus trouvent un emploi en utilisant leurs amis, leur famille (par exemple, Munshi, 2003), ou tout autre type de réseau qui leur est disponible. La majorité des chercheurs se sont concentrés sur ce qu'on appelle, à partir de la définition de Granovetter, « les liens faibles ». La plupart de ces réseaux sont examinés du point de vue des individus (réseaux d'individus). Moins d'attention est accordée itre palette variée de réseaux potentiels d'entreprises et également, nous ons d' r leur rôle par rapport aux épisodes de mobilité entre deux emplois. Selon les sociologues, les réseaux peuvent être appréhendés d'une manière générale en mobilisant le concept de ressources car, pas tout le monde n'a accès à tous les types de ressources. Par exemple, dans la littérature, il a été montré que le fait d'avoir accès à des « ressources de longue distance » (des amis à l'étranger, ou au moins, pas dans la même entreprise ou dans la même région) facilite l'usage de l'ordinateur (voir Gollac et Kramarz, 2000). Dans ce chapitre, les ressources qui peuvent être identifiées avec nos données sont : des ressources sectorielles mesurées avec la mobilité intrasectorielle (au niveau de classification 36) ; des réseaux d'employeurs mesurés avec le type de propriété de l'entreprises (entreprises indépendantes, entreprises appartenant à des groupes financiers) ; des ressources locales mesurées avec la mobilité géographique (à l'intérieur du département français ou de la région française) ; des réseaux d'entreprises mesurés avec la taille (travailler dans une entreprise d'une certaine taille développe des compétences spécifiques à cet environnement pour l'individu) ou le niveau de santé économique (travailler dans une entreprise caractérisée par une certaine situation économique conduit au développement de compétences particulières). bien pu utiliser le terme « espaces de mobilités ». Néanmoins, à partir de ce point, par « réseaux d'entreprises », nous entendons le fait que les entreprises entre lesquelles se réalise la mobilité ont certaines caractéristiques identiques. Si les relations spécifiques au secteur d'activité (où à la localisation géographique) sont centrales, la majorité des mobilités entre deux emplois devrait avoir lieu à l'intérieur du même secteur d'activité (où à l'intérieur du même département). Entre 1991 et 2002, en moyenne, deux tiers des personnes recrutées par an dans un secteur ont connu une mobilité au sein du même secteur d'activité (Asseraf et Chassard, 2006). De manière similaire, si les relations financières entre des entreprises représentent des ressources pour les salariés d'un groupe, nous pouvons nous attendre à assister à une mobilité entre deux emplois plus importante à l'intérieur du même groupe financier qu'entre des groupes financiers différents. L'étude des « réseaux de mobilité d'entreprises » peut être replacée dans le cadre économique de l'analyse des marchés professionnels et des marchés internes du travail. Par exemple, pour un salarié d'un secteur d'activité donné, le marché interne représente le marché au sein de l'entreprise et le marché intrasectoriel (par exemple, une mobilité entre entreprises du même secteur d'activité). Doeringer et Piore (1971) distinguent les marchés internes, les marchés professionnels et les marchés externes dans le cadre de la théorie de la segmentation du marché du travail. Les marchés internes se caractérisent par l'acquisition de compétences dans l'entreprise et ainsi, cela implique un parcours professionnel du salarié au sein de sa structure. Les marchés professionnels, quant à eux, sont caractérisés par l'obtention diplômes permettant la valorisation des compétences des salariés en dehors de l'entreprise (Gautié, 2002)117. Du fait de la transférabilité des qualifications, la mobilité des travailleurs est plus grande sur le marché professionnel et l'allocation des ressources en main d'oeuvre peut effectivement être plus efficace. Les marchés externes sont de leur côté principalement des marchés concurrentiels pour les primo-arrivants et les travailleurs non qualifiés. Une des thèses défendues concernant l'évolution de la mobilité en France se focalise sur la chute des marchés internes. Dans cette perspective de transformation des marchés internes, dans ce chapitre, nous souhaitons analyser quels rôles jouent les « réseaux d'entreprises » car, le déclin des marchés internes affecte l'espace de mobilité des salariés. -emploi hautement qualifiés a plus de chances d'être de type professionnel. La logique de marché interne concerne plutôt les cols bleus. Au niveau des secteurs, les marchés internes caractérisent les secteurs concentrés (l'industrie lourde), tandis que l'artisanat révèle un marché du type professionnel (Gautié, 2002). Avant la transformation des marchés internes, la mobilité des salariés avait principalement lieu à l'intérieur de l'entreprise. Après le déclin des marchés internes, la mobilité de salariés a lieu dans des espaces différents : à l'intérieur du secteur d'activité, à l'intérieur du groupe financier, à l'intérieur d'un « réseau d'entreprises » de même taille, à l'intérieur du même département français ou encore à l'intérieur d'un « réseau d'entreprises » qui ont la même santé économique. Ces différentes mobilités peuvent être appréhendées avec les concepts de marché interne et marché professionnel. Nous pouvons ainsi considérer que la mobilité au sein d'un groupe financier est réalisée dans le cadre d'un marché interne. En revanche, pour les autres types de mobilité, on peut considérer avant tout que les salariés développent des compétences spécifiques à certaines entreprises (caractérisées par leur taille, leur secteur d'activité, etc.) et par conséquent, elles se trouvent plutôt sur des marchés professionnels. Le marché interne des salariés s'est en effet transformé : ce ne sont plus les mobilités inter-établissements au sein de l'entreprise qui caractérisent le marché interne des salariés mais ces mêmes mobilités auxquelles on ajoute principalement les mobilités interentreprises au sein du groupe. Ainsi, la non prise en compte des liens de diverses natures entre entreprises (comme les liens financiers) pourrait montrer un déclin des marchés s alors que ces marchés ne sont plus les mêmes. Au contraire, l'espace de mobilité aurait même augmenté si on appelle par exemple, marché interne, le marché au sein d'un groupe financier. Pour les autres espaces de mobilité, la principale interprétation se fait par rapport aux marchés professionnels. Les mobilités des salariés à l'intérieur du même secteur d'activité se font le plus probablement car les individus développent des compétences spécifiques à un certain secteur d'activité et qui par conséquent sont transférables uniquement au sein du même secteur. La même logique est valable pour les mobilités à l'intérieur de même espace géographique, entre des entreprises de même taille ou avec des situations de santé économique comparable. Dans ces cas, les individus acquièrent des compétences spécifiques à ces types d'entreprises. 1.2 – Les mobilités intra et intersectorielles : revue de la littérature Les recherches antérieures s'intéressant à la mobilité sur le marché du travail se concentrent surtout sur la mobilité entre deux emplois, sur la relation entre l'ancienneté dans le travail et le salaire, ou d'une manière générale, sur le bon appariement entre le salarié et 327 Chapitre VI - La transition emploi-emploi l'entreprise. Il y a très peu d'études qui analysent directement les déterminants de la mobilité entre les secteurs d'activité (voir Parrado et al., 2007 ; Shin, 2007 ; McLaughlin et Bils, 2001). En utilisant la source de données « Panel Study of Income Dynamics » (PSID), Parrado et al. (2007) estiment la probabilité pour un salarié de rester dans le même secteur d'activité durant une année. Leur analyse est menée séparément pour les hommes et les femmes. Les auteurs estiment également des changements salariaux en contrôlant le fait que le salarié change d'emploi à l'intérieur du même secteur d'activité ou qu'au contraire, il change de secteur d'activité. Ils utilisent une seule variable sectorielle (la taille du secteur) et mettent en place des modèles de données de panel. Le principal résultat de ce travail est que les salariés changent d'emploi entre des secteurs d'activité différents plus fréquemment sur la période 1981-1993 que sur la période 1969-1980 aux Etats-Unis. Leur deuxième résultat est que les hommes qui changent d'occupation ou de secteur d'activité touchent des revenus plus élevés (en niveau) que ceux qui ne changent pas d'emploi. McLaughlin et Bils (2001) utilisent également la source de données PSID afin de comparer la situation des salariés qui changent de secteur d'activité avec la situation de leurs collègues qui restent. Plus précisément, ils étudient les changements salari entre les individus qui ont changé de secteur et ceux qui sont restés dans le même secteur d'activité. Dans leur papier, ils étudient comment les fluctuations cycliques affectent la mobilité sectorielle et n'utilisent pas de données d'entreprises pour contrôler l'hétérogénéité des secteurs d'activité. Shin (2007) utilise l'enquête « National Longitudinal Survey of Youth 1979 » (NSLY79) pour analyser trois problématiques différentes. Dans un premier temps, l'auteur identifie deux facteurs structurels qui pourraient avoir une très forte influence sur la mobilité entre deux emplois (l'accroissement du PIB sectoriel et les fusions-acquisitions). Dans un deuxième temps, il décrit quatre mobilités possibles en termes de changement salarial : augmentation, baisse, mobilité latérale et sortie d'emploi. -emploi Murphy et Topel (1987), à partir de l'enquête « Current Population Survey » (CPS), montrent que les hausses de taux de chômage (cyclique et structurel) des hommes aux EtatsUnis ont été accompagnées par des baisses des mobilités entre les secteurs d'activité. Leur travail a conduit au développement d'un nombre très important de papiers qui traitent ce sujet. A partir de la principale source de données que nous mobilisons dans ce travail (le panel « Déclarations annuelles de données sociales » - DADS), Le Minez (2002) analyse les mobilités sectorielles entre 1968 et 1998 en France. Le Minez (2002) n'intègre pas dans ses estimations des variables d'entreprise et montre que les secteurs de transports, de l'énergie et de la construction sont des secteurs isolés en ce qui concerne la mobilité : la mobilité entre ces trois secteurs d'activité et les autres secteurs est très faible. Les autres secteurs se regroupent en trois catégories avec des mobilités internes élevées : services, biens de consommation et industrie lourde. Le Minez (2002) met également en évidence qu'une part de la mobilité des salariés a lieu entre des activités similaires : la mobilité suit le processus de production ou elle est expliquée par la similitude des emplois dans ces activités et par conséquent la mobilité aurait lieu à travers les marchés professionnels. Son explication va dans le sens que du fait des contraintes de marché et des bases institutionnelles communes, des activités similaires ont des pratiques managériales similaires. Cela rejoint notre idée selon laquelle la mobilité intrasectorielle se réalise sur un marché professionnel. Section 2 – Les sources de données Dans ce chapitre, nous utilisons des sources de données très riches. Les fichiers sur lesquels nous travaillons sont obtenus avec l'appariement de trois sources principales d'information : le panel « Déclarations annuelles de données sociales » (DADS), les fichiers des données d'entreprise « Bénéfices réels normaux » (BRN) et l'enquête « Liaisons financières » (LIFI)118. Les fichiers BRN ont été déjà mobilisés dans cette thèse (voir chapitre II). Dans le chapitre IV, nous avons utilisé les fichiers d'entreprises DADS à partir desquels le panel DADS est extrait. En outre, il faut préciser que les fichiers finaux utilisés dans ce chapitre sont très proches de ceux mobilisés par Delarre et Duhautois (2004). 118 Nous utilisons une autre source de donnés (les fichiers « Modifications de structures des entreprises » MDST) afin d'identifier et, par la suite, d'éliminer les entreprises qui connaissent des fusions-acquisitions. Son rôle dans l'appariement est présenté dans l'annexe 6.1. La principale source de données utilisée dans cette analyse est le panel DADS (pour une description détaillée, voir Abowd, Kramarz et Margolis, 1999). Nous disposons uniquement de la période de 1991 à 1999 du panel DADS, même s'il commence en 1967. Cette source d'information est issue des données fournies par les entreprises à l'administration (les régimes sociaux). La déclaration de données sociales est une formalité que doit accomplir toute entreprise employant des salariés. Les employeurs doivent communiquer aux organismes de sécurité sociale d'une part, et à l'administration fiscale d'autre part, la masse des traitements qu'ils ont versés, les effectifs employés et une liste nominative de leurs salariés indiquant pour chacun le montant perçu des rémunérations salariales. Le panel DADS est un échantillon au 1/25ème, obtenu par l'extraction du fichier d'origine de tous les individus nés au mois d'octobre d'une année paire. Les individus extraits sont les mêmes pour toutes les années (une fois rentrés et jusqu'au moment de leur sortie). Le panel suit chaque année environ 900 000 salariés (par exemple en 1999, le panel contient 946 708 individus). Au niveau des individus, il permet l'étude des périodes d'emploi, des trajectoires professionnelles et salariales (exceptant les individus qui travaillent dans la fonction publique d'Etat). Les différents secteurs dans lesquels les salariés exercent sont connus avec précision. Au niveau des établissements, il permet le suivi longitudinal de la politique d'embauche et de licenciement, ainsi que le suivi de la politique salariale mise en oeuvre. Outre ces éléments de base, les principales variables nous renseignent sur les périodes individuelles d'emplois (jours de début et de fin de rémunération), le code de l'activité ielle de l'établissement (APE), les salaires versés lors des diverses périodes d'emplois, le type d'emploi, la localisation géographique de l'établissement, la catégorie sociale (CS), ou encore le nombre d'heures effectuées. En utilisant les identifiants d'établissement et d'entreprise contenus dans les informations individuelles relatives à chaque salarié, nous apparions le panel DADS avec l'enquête LIFI. A partir de cette source de données, nous pouvons identifier la majorité des liens financiers entre les entreprises. Plus particulièrement, cette source donne des informations sur tous les « têtes de groupes » et leur participation dans d'autres entreprises. En général, ces données sont disponibles que très difficilement 119. Chapitre VI La transition emploi -emploi choisissons pas de mettre en avant la dimension groupe dans l' analyse des mobilités des salariés. Delarre et Duhautois (2004) se concentrent sur l'étude du rôle des groupes dans la mobilité en utilisant des données extrêmement proches de celles mobilisées dans ce travail. Pour les groupes privés, l'enquête LIFI existe depuis 1979 et pour les groupes publics, depuis 1984. C'est une enquête annuelle dans laquelle chaque observation décrit un lien entre deux sociétés, l'une dite « société amont » (celle qui détient) et l'autre dite « société aval » (celle qui est détenue). Toutes les sociétés interrogées dans cette enquête remplissent une des trois conditions suivantes : posséder un portefeuille de titres de participation supérieur à 1 200 K€, réaliser un chiffres d'affaires supérieur à 30 000 K€ ou disposer d'un effectif salarié supérieur à 500 personnes. Toutes les entreprises qui correspondent à l'un de ces trois critères sont interrogées en tant que « sociétés amont » sur leurs portefeuilles de titres de participation. Si elles déclarent posséder des parts d'une « société aval » qui, par ailleurs, remplirait l'une des trois conditions d'entrées dans la base, alors cette société serait à son tour interrogée en tant que « société amont » (si elle n'a pas déjà été interrogée). Ainsi, des « sociétés aval » qui ne remplissent aucune des trois conditions mentionnées ne sont pas interrogées en tant que « sociétés amont » (mais restent dans le fichier). Dans l'enquête LIFI, plusieurs variables décrivent le lien financier entre la « société amont » et la « société aval »120. Dans ce chapitre, afin de reconstituer les groupes, utilisons la part de capital détenu (déclaré par la « société amont »). Finalement, nous apparions le panel DADS aux fichiers BRN. Ces fichiers nous procurent des informations sur les entreprises auxquelles appartient les individus (effectifs, valeur ajoutée, localisation géographique, etc.) Cette source de données a été présentée plus en détail dans le chapitre II de la thèse (pour une description complète de cette source, voir également Abowd, Kramarz et Margolis, 1999). Elle est d'une extrême importance car elle nous permet de construire le reste des variables décrivant les « réseaux d'entreprises ». Plus précisément, cinq variables décrivent le lien financier entre la « société amont » et la « société aval » : la part de voix détenues en assemblée générale ordinaire par la déclaration de la « société aval », la part de voix détenues en assemblée générale ordinaire par la déclaration de la « société amont », la part de capital détenu par la déclaration de la « société amont », la valeur nette de la participation et le taux de contrôle apparent (égal à la part de voix déclarée par la mère, sinon celle déclarée par la fille). Ces notions renvoient pour la plupart, au droit commercial français. La - Graphique 6.1 : Le diagramme de la mobilité Etre en emploi Changement d'emploi Mobilité intrasectorielle Pas de changement d'emploi Mobilité intersectorielle Dans l'annexe 6.1, nous présentons de manière très détaillée le processus à travers lequel nous obtenons nos échantillons finaux. Pour résumer, nous travaillons avec deux fichiers : un fichier appelé « emploi » qui correspond à tous les épisodes des individus (de mobilité et de « non mobilité ») 121 et un autre fichier appelé « mobilité » (qui correspond uniquement aux épisodes de mobilité) 122. Les épisodes de mobilité qui ont lieu dans des entreprises qui connaissent un processus de fusion-acquisition, ne sont pas retenus à la fin de l'appariement. Cette condition d'appariement est liée au fait qu'il est pratiquement impossible d'identifier si ces épisodes entraînent réellement une mobilité ou au contraire, entraînent un simple changement d'identifiant de l'entreprise. Ainsi, nous émettons l'hypothèse suivante : les processus de fusion-acquisition (ou les restructurations en général) n'entraînent pas des épisodes de mobilité au moment de la fusion-acquisition, ou généralement parlant, de la restructuration de l'entreprise. Cependant, tous les épisodes de mobilité à partir de l'entreprise qui « achète » sont pris en compte. Nous retenons uniquement dans l'étude les individus qui sont en emploi sur la période d'analyse. En appariant les trois sources de données, nous obtenons un fichier « emploi » de plus de 4 millions d'observations qui couvre la période 1991-1999 et un fichier « mobilité » de plus de 1 million d'observations et qui couvre également la période 1991-1999. Le graphique 6.1 décrit la structure des données. Pour chaque individu, en fonction des caractéristiques des entreprises qui sont impliquées dans le processus de mobilité entre deux emplois, nous construisons deux catégories de variables. Dans un premier temps, nous avons des variables qui sont disponibles pour tous les individus qu'ils soient impliqués dans un épisode de mobilité ou non (section 121 Le fichier « emploi » est une base unique qui couvre la période 1991-1999, ayant pour unité statistique la période d'emploi individuelle (« jobspell » dans Abowd, Finer, Kramarz et Roux, 1997). 122 Ce fichier contient l'ensemble des événements de mobilité entre périodes d'emploi. Chapitre VI - La transition emploi-emploi 2.1). Dans un deuxième temps , nous construisons des variables qui sont disponibles uniquement pour les salariés impliqués dans le processus de mobilité (section 2.2). 2.1 – Les variables du fichier « emploi » Un des points originaux de ce chapitre est que, pour étudier les transitions entre deux emplois, nous prenons en compte des indicateurs correspondant aux entreprises d'origine et de destination qui sont impliquées lors de chaque mobilité. Ces variables peuvent être séparées en deux catégories : des variables correspondant aux caractéristiques de l'entreprise dans laquelle l'individu travaille (ou plus précisément, si l'individu est mobile, de l'entreprise d'origine) et des variables correspondant aux caractéristiques de l'entreprise d'origine et de l'entreprise de destination en même temps. Dans cette sous-section, nous décrivons les variables associées à l'entreprise dans laquelle le salarié travaille. Ces variables peuvent être construites pour tous les individus, indépendamment du fait si l'individu est mobile ou non. La présentation de ces variables se fait en deux temps. Nous décrivons d'une part, les variables caractérisant l'individu et d'autre part, les caractéristiques de l'entreprise dans laquelle l'individu travaille (ou de l'entreprise d'origine, s'il y a mobilité). Parmi les caractéristiques individuelles, nos données nous permettent la prise en compte du sexe, de l'âge, de la qualification, du nombre de jours de non-emploi (entre deux emplois), du nombre de mobilités passées, ainsi que du type d'emploi en fonction de son temps de travail. Nous construisons d'abord la variable homme. Ensuite, en ce qui concerne l'âge, nous construisons trois variables correspondant à trois catégories de classe d'âge : age30 est une variable binaire indiquant si le salarié a moins de 30 ans ; age30-49 (le salarié a entre 30 et 49 ans) ; et age50 (le salarié a au moins 50 ans). Nous décidons d'utiliser ces trois catégories de classes d'âge un lors des statistiques descriptives (sections 4.1 et 4.2). En revanche, dans la démarche économétrique, nous introduisons uniquement la catégorie la plus « active » d'individus sur le marché du travail (les 30-49 ans). Nous construisons également trois variables exprimant la qualification des salariés : nonqual est une variable binaire est égale à 1 si le salarié est un ouvrier ou un employé non qualifié ; qual est une variable binaire égale à 1 si le salarié est un ouvrier ou un employé qualifié et TIM qui est une variable binaire indiquant si le salarié est un technicien, ingénieur ou cadre dirigeant (les autres salariés qualifiés). Nous mesurons le salaire à l'aide d'une variable continue appelée 333 Chapitre VI - La transition emploi-emploi salaire, qui est déflatée. Afin de caractériser les périodes de non emploi, nous construisons six variables binaires : Moins1 est une variable binaire qui indique si le salarié passe moins d'un jour en non-emploi ; Jours1-30 si le salarié passe entre 1 et 30 jours en non-emploi ; Jours3190 si le salarié passe entre 31 et 90 jours en non-emploi ; Jours91-180 si le salarié passe entre 91 et 180 jours en non-emploi ; Jours181-360 si le salarié passe entre 181 et 360 jours en non emploi ; et Jours361 si le salarié passe plus de 361 jours en non-emploi. La variable nbmob représente le nombre de mobilités passées et est calculée pour chaque épisode de mobilité. Par exemple, si un individu est mobile en 1995, la variable nbmob est calculée comme étant la somme de toutes les mobilités de cet individu entre 1991 et 1995 (pour 1995, avant bien sûr, la mobilité considérée). Pour finir, la variable tempsplein est une variable binaire qui indique si le salarié travaille à temps plein. Parmi les caractéristiques de la dernière entreprise dans laquelle le salarié travaille (ou de l'entreprise d'origine quand il y a mobilité), nous retenons les variables suivantes : la taille, le secteur d'activité, l'appartenance à un groupe financier, la situation en termes de santé économique et la localisation géographique. D'abord, nous construisons 35 indicatrices sectorielles. Elles correspondent aux principaux 35 secteurs d'activité français agrégés au niveau NES36. Elles indiquent la principale activité de l'entreprise dans laquelle le salarié travaille (ou encore, de l'entreprise d'origine à partir de laquelle le salarié change d'emploi). Nous travaillons avec 35 secteurs car, le panel DADS ne couvre pas les entreprises de l agriculture ou de la sylviculture. Ensuite, la taille est prise en compte en introduisant trois indicatrices : taille20 qui est une variable binaire indiquant si l'effectif salarié de l'entreprise dans laquelle le salarié travaille (ou de l'entreprise d'origine) est de moins 20 salariés ; taille20-499 si l'effectif de l'entreprise dans laquelle le salarié travaille (ou de l'entreprise d'origine) est de 20 à 499 salariés ; et taille500 si l'effectif de l'entreprise dans laquelle le salarié travaille (ou de l'entreprise d'origine) est d'au moins 500 salariés. 2.2 – Les variables du fichier « mobilité » Les variables présentées dans cette sous-section sont calculées uniquement pour les salariés mobiles pendant l'année. Comme ils changent d'emploi entre deux entreprises, nous pouvons faire appel aux caractéristiques de l'entreprise d'origine et de l'entreprise de destination. Encore une fois, les variables que nous construisons peuvent être séparées en deux catégories : des variables liées aux caractéristiques individuelles et des variables liées aux entreprises entre lesquelles a lieu la mobilité. Parmi les caractéristiques individuelles, nous construisons une indicatrice (mqual) qui est égale à 1 si le salarié change d'emploi entre deux entreprises, tout en gardant la même catégorie de qualification. Par exemple, un salarié change d'emploi au cours d'une année et dans les deux entreprises, il travaille en tant qu'ouvrier non qualifié. Du point de vue du changement salarial, nous construisons deux variables : une variable binaire sal+ qui est égale à 1 si le salarié change d'emploi entre deux entreprises en enregistrant une augmentation salariale supérieure à 20% et une variable binaire sal- qui est égale à 1 si le salarié change d'emploi entre deux entreprises en enregistrant une baisse de salaire inférieure à -20%. Nous introduisons également deux indicatrices faisant référence au type d'emploi exercé par le salarié : mtemps est une variable binaire égale à 1 si le salarié est mobile entre deux emplois de même type en termes du temps de travail (soit les deux emplois sont à temps plein, soit ils sont à temps partiel) ; mtempsplein est une variable binaire qui est égale à 1 si le salarié est mobile entre deux emplois à temps plein. Parmi les variables décrivant les caractéristiques des entreprises entre lesquelles se réalise la mobilité, nous construisons les variables de « réseaux d'entreprises» (des variables de « réseau » sectoriel, de taille, d'appartenance à un groupe, de localisation géographique et de santé économique). La variable de « réseau sectoriel » intra est une variable égale à 1 si le salarié change d'emploi entre deux entreprises qui appartiennent au même secteur d'activité (en référence à la classification NES36). La variable intra représente la variable principale . Autrement dit, c'est le « réseau d'entreprises » qu Par rapport à l'appartenance aux groupes des deux entreprises impliquées dans le processus de mobilité, nous construisons cinq variables binaires : indep vaut 1 si le salarié change d'emploi entre deux entreprises indépendantes 123 ; indepd vaut 1 si le salarié change d'emploi entre une entreprise indépendante et une entreprise appartenant à un groupe financier ; indepf vaut 1 si le salarié change d'emploi entre une entreprise appartenant à un groupe financier et une entreprise indépendante ; mmg est une variable binaire indiquant si le salarié change d'emploi entre deux entreprises appartenant à deux groupes financiers différents et m_grp est une variable binaire égale à 1 si le salarié change d'emploi entre deux entreprises appartenant au même groupe financier. Nous construisons deux variables de « réseau géographique » : mdep est une variable binaire égale à 1 si le salarié change d'emploi entre deux entreprises du même département français et midf est une variable binaire qui est égale à 1 si le salarié change d'emploi entre deux entreprises qui appartiennent au même département de la région Ile-deFrance. Le « réseau de taille d'entreprise» est appréhendé avec une variable binaire (mtaille) valant 1 si le salarié est mobile entre deux emplois appartenant à deux entreprises qui ont des effectifs dans la même classe de taille. Par exemple, un salarié est mobile à l'intérieur d'un « réseau de taille d'entreprises », s'il change son emploi entre deux structures de plus de 500 salariés. Concernant la santé économique des entreprises, nous introduisons quatre variables binaires, dont deux d'entre-elles sont des variables qui caractérisent des « réseaux de santé économique d'entreprises». La variable q3q3 est une variable binaire qui est égale à 1 si le salarié change d'emploi entre deux entreprises qui ont des taux de variation de la valeur ajoutée supérieures au troisième quartile. q3q1 est une variable binaire qui est égale à 1 si le salarié change d'emploi entre une entreprise avec un taux de la valeur ajoutée supérieure au troisième quartile et une entreprise qui a une santé plus précaire avec un taux de variation de la valeur ajoutée inférieur au premier quartile. La variable q1q3 est une variable binaire égale à 1 si le salarié change d'emploi entre une entreprise avec un taux de la valeur ajoutée inférieur au premier quartile et une entreprise avec un taux de variation de la valeur ajoutée supérieur au troisième quartile. Par entreprise indépendante, nous entendons une entreprise qui n appartient pas à un groupe financier Section 3 – La démarche empirique 3.1 – Les différentes étapes de l'analyse Dans le cadre de ce chapitre, afin d'appréhender les transitions entre deux emplois, tout en tenant compte de la place occupée par les caractéristiques des entreprises impliquées dans la mobilité (avec la prise en compte de la dimension « réseau d'entreprises »), nous mettons en place une démarche en deux temps. La succession des étapes de la démarche empirique suit une logique en entonnoir. Dans un premier temps, nous mobilisons des techniques de statistiques descriptives avec un double objectif (sections 4.1 et 4.2). D'un côté, nous souhaitons décrire la mobilité des salariés généralement parlant et de la mettre en lien avec les différents « réseaux d'entreprises » présentés dans la section précédente. L'objectif additionnel est de calculer des taux de mobilité à l'intérieur de ces « réseaux d'entreprises» (section 4.1). D'un autre côté, nous nous focalisons sur la mobilité à l'intérieur du même secteur d'activité et nous présentons les distributions des caractéristiques individuelles et d'entreprises. Ainsi, nous souhaitons analyser d'une manière descriptive, la façon dont les variables de « réseaux d'entreprises » affectent la mobilité au sein du même secteur d'activité (section 4.2). Dans un second temps, nous étudions à l'aide de techniques économétriques (un raisonnement de type « toutes choses égales par ailleurs »), les déterminants de la mobilité intrasectorielle et plus particulièrement, comment les autres « réseaux d'entreprises » retenus dans ce travail affectent la probabilité de changer d'emploi au sein du même secteur d'activité (section 4.3). La section 4.2 est une prémisse de la section 4.3. Nous présentons ici uniquement la stratégie économétrique retenue. Cela ne veut pas dire que les statistiques descriptives calculées dans les sections 4.1 et 4.2 ont moins d'importance. Elles ont un voir informatif extrêmement fort car, il y a que très peu de travaux français qui s'intéressent aux transitions entre deux emplois et qui tiennent compte des caractéristiques des entreprises d'origine et de destination dans l'étude de la mobilité. D'ailleurs, ce manque de cadrage chiffré de la mobilité, nous conduit, lors des sections 4.1 et 337 Chapitre VI - La transition emploi-emploi 4.2, à garder le plus d'observations possibles et donc de travailler sur des fichiers de taille importante. Bien sûr, la taille des fichiers mobilisés change en fonction des variables d'entreprise mises en avant. 3.2 – Le modèle probit bivarié avec sélection Dans ce chapitre, nous analysons économétriquement les déterminants de la mobilité intrasectorielle au niveau annuel. Autrement dit, nous analysons comment la mobilité au sein du même secteur d'activité s'effectue du point de vue des caractéristiques des salariés et des caractéristiques des entreprises impliquées dans cette transition professionnelle (entreprise d'origine et entreprise de destination). Cette analyse est menée à partir du fichier « mobilité » qui est un fichier contenant l'ensemble des événements de mobilité entre périodes d'emploi pour une population de salariés (voir annexe 6.1 pour la création du fichier « mobilité »). Pour analyser la mobilité intrasectorielle, il faut d'abord que les salariés aient changé d'emploi au niveau de l'année. Par conséquent, on ne peut pas étudier la mobilité au sein du même secteur pour les individus qui gardent leur emploi sur l'année. Estimer directement la probabilité d'avoir changé d'emploi au sein du même secteur d'activité à l'aide d'un modèle simple de type probit ou logit est très sûrement biaisé. De manière très probable, il existe certaines caractéristiques qui affectent le fait de garder le même emploi sur l'année ou non – être immobile – et qui influencent simultanément le fait de changer d'emploi à l'intérieur du même secteur d'activité. Par exemple, des événements familiaux qui ne sont pas observés peuvent remplir cette condition, comme le fait de se marier avec une personne qui habite une autre région. Cette dernière situation pourrait conduire au choix de quitter son travail afin de s'installer dans une autre région et ainsi l'individu aura plus de chances de chercher un nouveau travail dans le même secteur d'activité que celui qu'il a quitté. En économétrie, ce type de problème s'appelle biais sélection. C'est de la sélection car, la variable de mobilité intrasectorielle existe uniquement pour les salariés mobiles pendant l'année. Cette logique itre VI La transition emploi-emploi représente la motivation principale de l'apparition des modèles de type probit bivarié avec sélection que nous appliquons dans ce chapitre. Ce modèle est initialement développé par Van De Ven et Van Praag (1981)124. Il est similaire au modèle de type Heckman avec sélection, avec la différence majeure qu'il est appliqué pour des variables de type binaire (changer d'emploi ou non au sein du même secteur d'activité). 124 Les estimations sont obtenues en utilisant le module heckprob de Stata. Chapitre VI - La transition emploi-emploi Si mobile = 1, les salariés sont confrontés à un deuxième choix binaire ( intra ). Par conséquent, la deuxième équation se définit uniquement si mobile = 1 et décrit la probabilité d'apparition de la variable de résultat d'intérêt (changer d'emploi entre deux entreprises qui appartiennent au même secteur d'activité). Elle peut se formaliser de la manière suivante : intra = 1 intra* > 0  = 1[ μ + β ′ X + ε 2 > 0 ] (6.2) où 1[.] représente la fonction indicatrice, X le vecteur de variables explicatives et ε 2 le terme d'erreur avec ε 2 ∼ N(0,1). Dans le vecteur X, il y a quatre blocs de variables : X 1 pour les caractéristiques individuelles, X 2 pour les caractéristiques de l'entreprise dans laquelle le salarié travaille, X 3 pour les caractéristiques de l'individu en termes de changement d'emploi et X 4 pour les caractéristiques des entreprises impliquées dans le processus de mobilité. Ainsi, X 1 contient exactement les mêmes variables que Z1 (sexe, âge, qualification, salaire et type d'emploi - temps plein ou temps partiel -). X 2 contient également exactement les mêmes variables que dans Z 2 qui caractérisent l'entreprise dans laquelle le salarié travaille (secteur d'activité, taille, appartenance à un groupe et état de santé économique). Quant aux variables des vecteurs X 3 et X 4, elles sont décrites de manière détaillée dans la section 2.2. Plus précisément, X 3 contient les variables de changement en termes de qualification, de salaire ou de temps de travail (mqual, sal+, sal-, mtemps et mtempsplein) et X 4 contient les variables de changement d'emploi en termes d'appartenance à un groupe, de classe de taille, de localisation géographique et de niveau de santé économique (indep, indepd, indepf, mmg, m_grp,mdep, midf, mtaille, q3q3, q3q1, q1q3 et q1q1). Les variables des vecteurs X 3 et X 4 ont une place particulièrement importante dans notre analyse car elles nous permettent d'appréhender les « réseaux » et encore plus fortement X 4 qui contrôle les « réseaux d'entreprises». Soit ρ la corrélation entre les résidus des deux équations : corr (ε1, ε 2 ) = ρ. Cette modélisation consiste à estimer les paramètres δ, β et ρ par maximum de vraisemblance. Section 4 – Les résultats Dans cette section, on tentera de répondre aux questions suivantes : quelle est l'ampleur de la mobilité des salariés au sein des différents « réseaux »? Les mobilités intrasectorielles sont-elles concentrées dans la même région, au sein du même groupe financier ou concernent-elles des entreprises proches en termes de taille ou en termes de santé économique? Les résultats sont présentés en trois temps. Premièrement, dans la section 4.1, nous présentons les statistiques générales concernant les mobilités entre deux emplois, tout en tenant compte de la dimension « réseaux d'entreprises » : réseaux sectoriel, de localisation géographique, de santé économique ou d'appartenance à un groupe. Dans la section 4.1, nous calculons également des taux de mobilité. Deuxièmement, après ces chiffres de cadrage, on se concentre sur les facteurs susceptibles d'influencer la mobilité intrasectorielle (section 4.2). Nous présentons, avec des statistiques descriptives, la manière dont les caractéristiques individuelles et les caractéristiques d'entreprises affectent la mobilité entre deux emplois du même secteur d'activité. Finalement, dans la section 4.3, nous décrivons les résultats du Si ρ = 0, alors la somme des log-vraisemblances du modèle de sélection et du modèle de mobilité intrasectorielle est égal à la log-vraisemblance du probit bivarié avec sélection. analyse comment les différent « aux influence la mobilité sector avec logique s par ailleurs
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Résonateurs optiques à très forts facteurs de qualité pour la stabilisation d'oscillateurs hyperfréquences à très haute pureté spectrale. Journées Nationales Microondes, May 2009, Grenoble, France. pp.4. &#x27E8;hal-00379736&#x27E9;
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Microonde 27 Grenoble Résonateurs optiques à très forts facteurs de qualité pour la stabilisation d’oscillateurs hyperfréquences à très haute pureté spectrale Pierre - Henri Merrer1,2, Aude Bouchier1,2, Olivier Llopis1,2, Gilles Cibiel3 1 CNRS ; LAAS ; 7 avenue du colonel Roche, F-31077 Toulouse, France Université de Toulouse ; UPS, INSA, INP, ISAE ; LAAS ; F-31077 Toulouse, France 3 CNES, 18 avenue Edouard Belin, 31410 Toulouse Cedex 4 [email protected] 2 Résumé Les performances des résonateurs hyperfréquences en termes de facteurs de qualité sont actuellement limitées. Une solution consiste à transporter les hyperfréquences sur un support différent, en l’occurrence une onde optique. Les résonateurs optiques deviennent alors des objets très intéressants pour l’élaboration de nouveaux résonateurs hyperfréquences plus performants. Des facteurs de qualité optiques supérieurs à 109 peuvent être atteints avec des résonateurs fibrés ou à modes de galerie, par exemple, donnant ainsi accès à des facteurs de qualité supérieurs à 105 à 20 GHz. Nous présentons donc notre étude de différents résonateurs optiques (résonateurs à modes de galerie et boucles de fibre) destinés à la stabilisation d’oscillateurs hyperfréquences autour de 10 GHz, ainsi que leur application à la réalisation d’un oscillateur opto-micro-onde à cette fréquence. 1. Introduction L’amélioration des performances des sources et filtres microondes nécessite de nouveaux résonateurs alliant très fort facteur de qualité (Q) et volume réduit. Avec la technologie actuelle, obtenir des résonateurs compacts est difficile, en particulier en gamme centimétrique. De plus, le facteur de qualité décroît quand la fréquence microonde augment . Actuellement, les résonateurs saphir à modes de galerie montrent les meilleures performances autour de 10 GHz avec des facteurs de qualité à vide de l’ordre de 105. Une méthode élégante pour diminuer la taille des résonateurs est de transporter l’onde hyperfréquence sur un support différent. On peut par exemple travailler dans le domaine acoustique ou dans le domaine optique. Nous avons dans cette étude choisi de piéger l’onde hyperfréquence dans un dispositif optique, grâce à une porteuse optique : un laser émettant dans les fréquences des télécommunications. Puisque la longueur d’onde de la porteuse est petite (de l’ordre de 1,55 μm), les dispositifs réalisés seront de petites dimensions et plus compacts que les dispositifs micro-ondes actuels. Le résonateur optique utilisé présente une succession de modes de résonance distants de la fréquence microonde à stabiliser, ou d’un de ses multiples. Chacun de ces modes présente un coefficient de qualité optique Qopt et un coefficient de qualité équivalent en hyperfréquence Qrf. Le facteur Qrf est le produit de Qopt et du rapport entre les fréquences micro-onde frf et optique fopt (éq. 1) : frf Qrf = Qopt. (1) fopt Contrairement au cas des résonateurs hyperfréquences, Qrf augmente proportionnellement avec la fréquence micro-onde. Le rapport des fréquences impose néanmoins que le facteur de qualité optique de ces résonateurs soit plus élevé que 109 à 1,55 μm (ou 194 THz) pour que le facteur de qualité à 20 GHz soit supérieur à 105 et donc qu’ils puissent permettre d’obtenir des performances meilleures que les résonateurs micro-ondes. Dans le domaine de l’opto-micro-onde, l’utilisation des résonateurs optiques est une alternative à l’approche utilisant une ligne à retard optique, plus facile à mettre en œuvre et aujourd’hui très bien connue. Ces lignes sont des fibres optiques de quelques kilomètres de long permettant d’atteindre des rf de l’ordre de 106 à 10 GHz. Elles ont été utilisées pour la stabilisation d’oscillateurs [1], mais restent peu compactes et difficiles à stabiliser en température. Une alternative intéressante aux lignes à retard est fournie par les mini résonateurs optiques [2,3]. Ce sont des sphères, tores ou disques, dans lesquels l’onde optique circule en utilisant les modes de galerie. Ces structures devant être transparentes autour de 1,55 μm, elles sont constituées de quartz, silice, fluorures de calcium (CaF2) ou magnésium (MgF2), etc... Comme nous allons le montrer ici, ces résonateurs présentent de forts coefficients de qualité optiques (de 108 à 1010 à 1,55 μm), mais restent délicats dans leur mise en œuvre. Une dernière approche, que nous détaillerons également, consiste à utiliser les possibilités de l’optique fibrée, développée pour les télécommunications, et nous présenterons ici le principe et l’utilisation des boucles résonantes de fibre optique. 2. Etude de différents résonateurs optiquesmicroondes 2.1. Les résonateurs à mode de galerie Nous avons étudié deux types de résonateurs à modes de galerie de faible volume : une sphère en silice de diamètre 3,3 mm et un disque en quartz de diamètre 7,7 mm. Les modes de galerie sont excités par le laser porteur de l’onde hyperfréquence. Le laser utilisé pour la caractérisation de ces résonateurs est un laser à fibre dopée erbium amplifié (Koheras) de très faible largeur de raie (~1 kHz pour un retard de 120 μs). Il est accordable grossièrement sur une gamme de fréquences de 120 GHz via sa température, et finement sur 2 GHz grâce à un élément piézoélectrique. Il est couplé dans ces résonateurs via les ondes évanescentes issues d’une fibre effilée ou étirée d’environ 2 μm de diamètre (fig.1) fabriquée par Laseo [4]. Le laser tant accordable en fréquence, le facteur de qualité optique du disque de quartz a été mesuré par une méthode dite de "scan" [4]. Cette méthode consiste à explorer les différents modes de la cavité résonante en faisant varier la fréquence du laser. Elle permet de déterminer l’intervalle entre deux modes (ou intervalle spectral libre (ISL)) et de mesurer finement la largeur d’un mode. En l’occurrence, la largeur de raie de notre laser étant très fine, plus faible que celle d’un mode du résonateur, elle nous permet d’avoir une très bonne résolution des pics principaux des résonateurs. Dans le cas du disque de quartz de 7,7 mm de diamètre, nous avons pu mesurer un intervalle spectral libre de l’ordre de 8 GHz, et une largeur à mi-hauteur des pics principaux de 47 kHz (fig. 1). Ces mesures nous conduisent à déterminer le facteur de qualité optique de ce résonateur à 4.109 à 1,55 μm (~ 194 THz). Figure 1. Caractérisation en "scan" direct des résonateurs à modes de galerie Ce très fort facteur de qualité optique laisse envisager des facteurs de qualité hyperfréquences de l’ordre de 4.105 à 20 GHz. Néanmoins, ces résonateurs compacts ont des inconvénients. D’une part, le couplage du laser en utilisant des fibres étirées ou effilées et l’excitation des modes de galerie est délicat. D’autre part, ces résonateurs sont fortement multimodes transverses, c’està-dire que plusieurs modes spatiaux peuvent circuler à l’intérieur. Ceci est clairement visible en explorant les modes en fréquence avec un laser de très faible largeur de raie. La stabilisation du laser sur une fréquence de résonance est donc très difficile. Bien que nous étudiions encore ces résonateurs, et que des techniques alternatives de couplage puissent être utilisées, avec notamment le remplacement des fibres étirées ou effilées par des prismes [5], il est intéressant d’envisager une technique alternative. 2.2. Les résonateurs fibrés Les fibres optiques sont particulièrement adaptées à une utilisation à la longueur d’onde que nous utilisons. Nous allons donc pouvoir utiliser des fibres monomodes transverses à 1,55 μm. En construisant un résonateur avec ces fibres, nous pouvons travailler avec un peigne de fréquences unique dans le résonateur. D’autre part, le couplage du laser dans le résonateur devient direct en utilisant des lasers fibrés, ce qui permet d’avoir un couplage stable, mais aussi d’intégrer le système. Nous avons donc étudié un résonateur basé sur une boucle de fibre décrite dans la référence [6]. Cette boucle est composée de deux fibres optiques monomodes (corning SMF 28) reliées par deux coupleurs guides d’onde fibrés (couplage typique 99/1%) comme le décrit la figure 2. La connection des fibres à l’intérieur de la boucle est réalisée par des soudures. Sa longueur totale est de 1 à 20 m, ce qui correspond à un intervalle spectral libre de 10 à 200 MHz. Figure 2. Boucle de fibre et modes résonants en absorption et en transmission La simulation d’une telle boucle est décrite dans la référence [6]. Elle prend en compte les coefficients de couplage et de transmission des coupleurs, ainsi que leurs pertes. Elle tient aussi compte des pertes aux soudures des fibres. Après avoir caractérisé les coupleurs utilisés, des facteurs de qualité optiques de 2.108 pour une boucle de 1 m à 5.109 pour une boucle de 20 m, devraient pouvoir être atteint. Expérimentalement, nous avons donc principalement travaillé avec une boucle de 20 m de longueur totale. La méthode de "scan" utilisée pour l’étude des résonateurs à modes de galerie nous a permis de vérifier un intervalle spectral libre de 10 MHz pour cette boucle. Nous avons aussi pu observer que, à cause de leurs très forts facteurs de qualité, ces résonateurs sont très sensibles à toute influence extérieure. Les effets thermiques sont notamment les plus difficiles à gérer et sont dus d’une part aux variations de température de l’environnement, mais aussi à l’injection du laser dans les résonateurs qui modifie la température locale dans la fibre, et surtout dans les coupleurs. Pour ces derniers, des variations de température peuvent induire des modifications des caractéristiques de couplage mais aussi des pertes. Ces variations thermiques décalent donc les fréquences de résonance des résonateurs à fibre. Il est donc nécessaire de stabiliser le laser sur le résonateur, comme indiqué sur le schéma expérimental de la figure 3. La stabilisation du laser est réalisée grâce à une 16èmes Journées Nationales Microondes, 27-28-29 Mai 2009 - Grenoble boucle de type Pound-Drever-Hall (PDH) [7,8]. La modulation de phase est réalisée par un modulateur en niobate de lithium. Le signal d’erreur de la boucle est envoyé sur un intégrateur proportionnel différentiel. La correction est appliquée sur l’élément piézoélectrique permettant d’accorder finement la fréquence du laser. fonctionnant autour de 10 GHz. Le principe du dispositif expérimental est décrit sur la figure 5. Figure 5. Figure 3. Dispositif pour le test du filtrage microonde par le résonateur optique Puissance (u.a.) Transmission ( u.a. ) Une fois le laser stabilisé sur le résonateur, il est possible de le moduler en hyperfréquences à l’aide d’un modulateur de Mach-Zehnder (MZM). Les modes latéraux sont alors explorés en faisant varier la fréquence du modulateur, c'est-à-dire en reliant le MZM à un analyseur de réseaux hyperfréquences. Le spectre du résonateur est alors stable et nous mesurons une largeur à mi-hauteur de 65 kHz (fig. 4). -5,0E+05 Le signal issu de la photodiode est amplifié. Il contient les différentes fréquences des battements entre les modes résonants de la boucle. Pour réaliser un oscillateur ayant une fréquence de 10 GHz, nous utilisons un résonateur diélectrique, qui filtre une gamme de fréquence autour de 10 GHz pour ne sélectionner qu’un seul pic du peigne de fréquences issu du résonateur optique (fig. 6). ISL = 10 MHz dn = 65 kHz -1,0E+06 Fréquence 0,0E+00 5,0E+05 Figure 6. Comparaison autour de 10 GHz de la fonction de transfert du résonateur diélectrique et de l’ISL de la boucle de 20 m Figure 7. Résonance autour de 10 GHz de la boucle de 20 m après filtrage par le résonateur diélectrique 1,0E+06 Désaccord en fréquence (Hz) Figure 4. Principe de l’oscillateur à 10 GHz Résonance du résonateur stabilisé et ISL de la boucle de 20 m en encart Le facteur de qualité optique déterminé avec cette technique est comparable aux calculs réalisés, avec une valeur de 3.109 pour une boucle fibrée de 20 m, constituée de coupleurs 99/1. Ramenée en gamme microonde, cette performance conduit à un facteur de qualité de 3.105 à 20 GHz, ce qui est largement supérieur à ce qui peut être obtenu à cette fréquence avec des techniques entièrement microondes. Cependant, lors de la réalisation d’un oscillateur avec ce résonateur, nous nous sommes aperçus qu’il générait une composante de bruit importante qui rendait moins intéressante cette performance en facteur de qualité. Un nouveau résonateur qui permet de résoudre ce problème a été conçu (brevet en cours de dépôt), mais il présente un facteur de qualité optique plus faible (~2.108 à 1,55 μm). Malgré cela, un premier oscillateur a pu être assemblé avec ce nouveau résonateur. 3. Démonstration d’un oscillateur optohyperfréquence à résonateur optique A partir du dispositif de la figure 3, nous avons réalisé un oscillateur optoélectronique (OEO) Ce signal (fig. 7) est envoyé sur le modulateur de MachZehnder et module la porteuse optique. La fréquence de la porteuse optique est asservie sur une résonance de la boucle, afin que le système soit entièrement stable. On forme ainsi un oscillateur optoélectronique. Le spectre de cet oscillateur, ainsi que son spectre de bruit de phase, sont mesurés par un analyseur de signal 16èmes Journées Nationales Microondes, 27-28-29 Mai 2009 - Grenoble Agilent E5052. Les résultats sont présentés en figure 8. Figure 8. Spectre et bruit de phase de l’oscillateur OEO à 10 GHz Le spectre de bruit de phase présente plusieurs zones. Entre 10 et 103 Hz, le bruit de phase est dominé par le bruit de fréquence en 1/f, caractérisé par une pente de -30 dB/dec. Les pics visibles entre 0,1 et 1 kHz peuvent être dus à des fluctuations mécaniques ou thermiques du résonateur. Le bruit blanc de fréquence, entre 1 et 400 kHz est caractérisé par une pente de -20 dB/dec. Le plancher de bruit de phase apparait au-delà de 0,4 MHz, et est de l’ordre de -120 dBc/Hz. La chute finale du bruit, au-delà de 3 MHz, est due au filtrage réalisé par le résonateur diélectrique. La fréquence flim de la limite entre le bruit blanc de fréquence et le bruit blanc de phase est reliée au facteur de qualité hyperfréquence en charge Qrf par l’équation (2) : frf flim = (2) 2. Qrf où frf est la fréquence de l’onde hyperfréquence [9] . Avec une fréquence à cette limite de 0,4 MHz, le facteur de qualité en charge est de 1,2.104 à 10 GHz, ce qui est cohérent avec un facteur de qualité optique de 2.108 à 1,55 μm. Malgré un facteur de qualité important, cet oscillateur présente un niveau de bruit relativement élevé. Ce phénomène est principalement dû aux pertes en transmission dans le dispositif optique. Ces pertes s’ajoutent au faible taux de couplage entre la boucle et sa sortie en transmission (fig. 2) et contribuent à la dégradation du rapport signal à bruit en sortie du résonateur, et donc à l’augmentation du niveau de bruit de phase. Un deuxième facteur est lié aux différentes sources de bruit dans les composants optiques en hyperfréquence qui n’ont pas particulièrement été optimisés pour cette première réalisation. Nous travaillons actuellement à améliorer ces paramètres dans nos prochains oscillateurs. intégré) pour ces dispositifs. Les résonateurs fibrés de type boucles de fibre résonantes sont quant à eux plus faciles à mettre en œuvre. L’oscillateur OEO, présenté dans cette communication, utilisant un tel résonateur est, à notre connaissance, le premier dispositif de ce type à faire l’objet d’une publication. Ses performances en bruit de phase sont encore modestes et de l’ordre de celles d’un DRO. Néanmoins, les potentialités en termes de facteur de qualité hyperfréquence sont encourageantes et le développement en cours d’un nouveau résonateur fibré devrait nous permettre d’améliorer largement les performances de cet oscillateur. 5. Bibliographie [1] X.S. Yao and L. Maleki, « Progress in the optoelectronic oscillator - a ten year anniversary review », 2004 IEEE Microwave Theory and Tech. Symp. Digest, pp. 287-290. [2] M.L. Goro tsky, A.A. Savchenkov and S.V. Ilchenko, « Ultimate Q of optical microsphere resonator », Opt. Letters, vol.21 (7), pp. 453-5, 1996. [3] D.K. Armani, T.J. Kippenberg, S.M. Spillane and K.J. Vahala, « Ultra-high-Q toroid microcavity on a chip », Nature, vol.421, pp. 925-8, 2003. [4] P.H. Merrer, O. Llopis, S. Bonnefont, P. Feron and G. Cibiel, « Microwave filtering using high Q optical resonators », Proc. of the European Microwave Conf., Amsterdam 2008. [5] V.S. Ilchenko, J. Byrd, A.A. Savchenkov, A.B. Matsko, D. Seidel and L. Maleki, « Miniature oscillators based on optical whispering gallery mode resonators », Frequency Control Symposium, 2008 IEEE International, pp.305-308, 19-21 May 2008 [6] P.H. Merrer, O. Llopis and G. Cibiel, « Laser stabilization on a fiber ring resonator and application to RF filtering », IEEE PTL, vol.20 (16), pp. 1399-1401, 2008. [7] R. V. Pound, « Electronic frequency stabilization of microwave oscillators », Rev. Sci. Instrum., vol. 17 (11), pp. 490–505, 1946. [8] R.W.P. Drever, J.L. Hall, F.V. Kowalski, J. Hough, G.M. Ford, A.J. Munley and H.Ward, « Laser phase and frequency stabilization using an opticalresonator » Appl. Phys. B., vol. 31, no. 2, pp. 97–105, Jun. 1983. [9] D.B. Leeson, « A simple model of feedback oscillator noise spectrum » Proc. of the IEEE, vol. 54, no. 2, pp. 329-330, Fev. 1966. 4. Conclusion Les résonateurs optiques donnent accès à des facteurs de qualité élevés dans le domaine des hyperfréquences tout en garantissant un volume réduit. Les résonateurs à mode de galerie devraient pouvoir permettre la réalisation d’oscillateurs compacts si des solutions peuvent être trouvées pour un couplage intégré (ou semi16èmes Journées Nationales Microondes, 27-28-29 Mai 2009 - Grenoble.
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Activation des phénomènes de migration dans les emballages : application à la sécurité alimentaire des aliments emballés
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Etant donné que l’incertitude initiale et la variabilité intra-classe sont presque homogènes, il est légitime de conclure que les trois paramètres structuraux testés sont capables de classer a priori et de façon satisfaisante les valeurs de log10(D) collectées. Cette conclusion est confortée par la forme peu désordonnée des arbres de classification quand le nombre de nœuds terminaux se réduit. En particulier, il faut souligner que les molécules avec des diffusivités extrêmes sont convenablement identifiées, même avec les arbres de classification très simplifiés. Les meilleurs résultats sont obtenus avec les jeux de molécules comportant la plus grande diversité (PEBDL/PEBD et PEMD/PEHD). Pour tous les jeux de molécules, le risque d’une mauvaise classification semble plus grand pour les molécules ayant des valeurs de log10(D) proches de la valeur moyenne de l’échantillon entier. Comme le risque est considérablement diminué quand la complexité de l’arbre est réduite, cet effet peut être relié à la grande variabilité des données initiales. En effet, les diffusivités "moyennes" dans les polyoléfines (pour les trois jeux de molécules à 23 °C) sont estimées à partir de méthodes très disparates en qualité et qui incluent à la fois des données interpolées et non 210 Chapitre IV – Résultats et discussion interpolées. L’incertitude est estimée jusqu’à une décade et demi (distance entre les branches de l’arbre). Au contraire, les diffusivités extrêmes sont considérées comme étant plus fiables puisque principalement déduites d’expériences de migration bien documentées (cas des faibles diffusivités) ou d’expériences de perméation gazeuse bien contrôlées (cas des diffusivités élevées). 3.3. Prédiction du coefficient de diffusion La procédure de régression fait d’étape d’"apprentissage" consacrée à la minimisation du risque d’une mauvaise classification (précédemment défini) des molécules. Un arbre de régression doit tirer avantage des propriétés de classification intrinsèque des estimateurs testés et aussi des améliorations apportées par l’apprentissage. Les résultats provenant des arbres de régression peuvent être interprétés de la même façon que les résultats des arbres de classification représentés sur la figure IV.30. Afin d’analyser plus finement les effets de l’apprentissage / ajustement (fitting), les arbres de régression basés sur les échantillons complets des données sont établis puis comparés aux résultats obtenus avec les arbres de classification correspondants. L’erreur moyenne d’une mauvaise prédiction est ensuite analysée pour différents niveaux de simplification de l’arbre complet de régression à partir de techniques de validation croisée et de bootstrap. Enfin les arbres "optimaux" de régression ainsi construits rendent possible une utilisation pratique pour la prédiction des valeurs de D. 3.3.1. Arbres de régression basés sur l’échantillon complet La figure IV.31 présente l’arbre complet de régression correspondant à la figure IV.30. Les arbres de régression adoptent tous les quatre une structure plus régulière, sans croisement significatif des branches. Ils montrent en particulier comment les valeurs extrêmes peuvent être combinées aux autres valeurs suivant le processus de simplification qui vise à réduire le nombre de nœuds terminaux. En partant des arbres complets (comportant 75, 30, 28 et 5 nœuds terminaux pour les jeux de molécules respectivement testés dans le PEBDL/PEBD à 23 °C, le PEMD/PEHD à 23 °C, le PP à 23 °C et le PP à 40 °C), les valeurs médianes sont d’abord combinées entre elles avant d’être combinées aux valeurs intermédiaires et extrêmes. 211 Chapitre IV – Résultats et discussion Les arbres, dont le nombre de nœuds terminaux a été réduit d’un facteur allant jusqu’à 4, gardent des gammes similaires de valeurs de log10(D). La procédure de classification combinée à l’étape d’apprentissage contribue à préserver les principales caractéristiques de la distribution initiale des valeurs de log10(D) après classification. En conséquence, le nombre de recombinaisons est plus élevé quand le nombre de valeurs est D est important (principalement autour du mode de distribution des valeurs de log10(D)), alors qu’il est particulièrement bas pour les molécules ayant des valeurs extrêmes. Figure IV.31 : Regroupement ′′a posteriori′′ des coefficients de diffusion en fonction du niveau de taille de l’arbre de régression pour : a) PEBDL/PEBD à 23°C, b) PEMD/PEHD à 23°C, c) PP à 23°C et d) PP à 40°C. ′′n′′ est le nombre de nœuds terminaux restant après la taille de l’arbre. Pour chaque classe de molécules, la valeur caractéristique de D est estimée être égale à la valeur moyenne des valeurs de D. La distribution des valeurs de D et l’ajustement (fit) de la distribution lognormale (trait continu) correspondant sont aussi représentés. α, β, γ, δ et ε sont les sous-groupes correspondant à ceux indiqués sur la figure IV.30(b). L’effet de l’"apprentissage" est discuté sur 3 petits sous-groupes de molécules testées dans le PEMD/PEHD à 23 °C (sous-groupes α, β et γ notés sur la figure IV.30(b)) et qui ne 212 Chapitre IV – Résultats et discussion sont pas classées de façon optimale pour la prédiction de D quand la complexité de l’arbre est réduite. Les sous- groupe α, β et γ sont représentés sur figure IV.32 et contiennent respectivement 2, 4 et 1 molécules ayant une masse moléculaire supérieure à la moyenne. Figure IV.32 : Structure moléculaire compacte (CPK) des molécules correspondant aux sous-groupes formés aux nœuds α, β et γ (définis sur la figure IV.30(b). Toutes les molécules sont relaxées dans le vide et projetées suivant leurs deux principaux axes. Le premier sous-groupe, généré par une classification a priori, se trouve mêlé dans un groupe de 29 molécules (noté δ, comprenant 42 % des molécules testées, détaillé sur la figure IV.33(b)) quand le nombre de nœuds terminaux est réduit de 26 à 17. Ce médiocre regroupement sélectif conduit à une surestimation de la valeur moyenne de D du sous-groupe α par un facteur allant jusqu’à 75. Le mode de regroupement des deux derniers sous-groupes est plus dramatique pour la prédiction des valeurs de D : ces deux sous-groupes se retrouvent mêlés à un vaste et même groupe de 563 molécules (77 % du total) situé à leur opposé sur l’échelle des valeurs de D. Après un regroupement supplémentaire, les valeurs moyennes de D des sous-groupes β et γ sont surestimées par facteur allant jusqu’à 3 décades quand le nombre de nœuds terminaux est réduit jusqu’à 8. Quand un arbre de régression est utilisé à la place d’un arbre de classification, les molécules incluent dans les sous-groupes α, β et γ sont distribuées en 3 classes distinctes, notées δ, ε1 et ε2, et comportant respectivement 12, 5 et 5 molécules. Les propriétés des molécules correspondantes sont listées dans le tableau IV.8. En considérant un arbre complet de régression composé de 30 nœuds terminaux, la valeur moyenne de D des classes initiales est seulement surestimée d’un facteur inférieur à 5 pour les molécules appartenant aux sousgroupes α et β, tandis qu’elle est sous estimée d’un facteur atteignant seulement 4 pour les molécules appartenant au sous-groupe γ. Cette amélioration considérable dans la classification due à la régression (à l’"apprentissage") est illustrée sur la figure IV.33 en comparant les 213 Chapitre IV – Résultats et discussion molécules appartenant à la classe équivalente δ quand un arbre de classification est remplacé par un arbre de ré gression . Figure IV.33 : Structure moléculaire compacte (CPK) des molécules correspondant aux sous-groupes δ définis sur (a) la figure IV.30(b) et (b) la figure IV.31(b). Toutes les molécules sont relaxées dans le vide et projetées suivant leurs deux principaux axes. La nouvelle classe est plus petite et paraît plus homogène. Elle contient seulement des molécules de taille similaire, incluant un ou deux cycles, ou présentant des structures ramifiées équivalentes de telle sorte qu’elles ont des inerties similaires. Pour cette dernière classe, l’intervalle de confiance à 95 % des valeurs de D est inférieur à une décade, ce qui est en parfait accord avec nos intuitions initiales : les molécules possédant une structure 3D similaire doivent avoir des valeurs de D similaires tant qu’elles obéissent au même 214 Chapitre IV – Résultats et discussion mé canisme de transport. Il faut toutefois noter que la présente analyse n’apporte aucune information sur la robustesse de la classification. Tableau IV.8 : Descripteurs moléculaires et valeurs de log10(D) pour les diffusants présentés sur les figures IV.32 et IV.33. Code Nom n° CAS VVdW (Å3) ρ (Å) Iz/x log10(D) log10(D)min log10(D)max n P106 2-Méthoxy-4-(2-propényl) phénol (Eugenol) 97-53-0 162,0 3,32 4,98 -13,9 -13,9 -13,9 1 P112 Diphénylméthane Diphényl oxide (Phénoxy benzène) Néopentane 101-81-5 172,0 3,23 5,41 -13,5 -13,5 -13,5 1 101-84-8 164,0 3,21 5,07 -13,4 -13,4 -13,4 1 463-82-1 109-66-0 123-72-8 71-36-3 131-56-6 95,7 96,1 81,8 87,4 191,0 1,98 2,35 2,00 2,20 3,53 1,00 9,15 11,39 9,85 4,93 -12,8 -12,6 -12,4 -12,5 -14,4 -13,1 -12,6 -12,4 -12,6 -14,5 -12,6 -12,6 -12,4 -12,3 -14,3 2 1 1 2 2 128-37-0 243,0 3,56 2,65 -15,0 -15,5 -13,9 4 71-43-2 84,1 2,02 2,00 -12,4 -12,5 -12,4 2 P113 P12 P13 P14 P15 P153 P158 P16 P161 P171 P196 P20 P21 P220 P231 P233 P235 P25 P27 P28 P29 P33 P34 P36 P39 P43 P57 P62 P81 P85 n-Pentane Butanal (n-Butylaldéhyde) Butylalcool 2,4-Dihydroxy benzophénone 2,6-Di-Tert-butyl-4méthylphénol (BHT) Benzène 2-Hydroxy-4-méthoxybenzo phénone (Chimassorb 90) 2-Hydroxy-4butoxybenzophénone 2-2'-Méthylènebis(6-tertbutyl-4-méthylphénol (Antioxydant 2246) Pentanal 131-57-7 207,0 3,90 5,97 -14,4 -14,4 -14,4 1 15131-438 260,0 5,00 9,94 -14,7 -14,7 -14,7 1 119-47-1 356,0 4,82 4,88 -15,9 -16,0 -15,8 2 n- ne 1,1,3-Tris(2-méthyl-4hydroxy-5-tert-butylphényl)butane (Topanol CA) n-Butylaldéhyde 110-62-3 110-54-3 98,6 113,0 2,32 2,70 15,50 13,35 -12,6 -12,4 -12,6 -12,5 -12,6 -12,2 1 3 1843-03-4 575,0 5,44 2,61 -13,3 -13,3 -13,3 1 2-Phényléthylalcool 3,7-Diméthyl-1,6-octadièn-3yl acétate (Linalyl acétate) Ethylacétate 123-72-8 60-12-8 81,8 126,0 2,00 2,70 11,39 6,65 -12,3 -13,6 -12,4 -13,6 -12,2 -13,6 2 1 115-95-7 216,0 3,66 4,52 -14,1 -14,1 -14,1 1 141-78-6 71-41-0 6032-29-7 108-88-3 928-96-1 105-37-3 626-93-7 106-42-3 105-54-4 90,1 105,0 105,0 101,1 116,0 107,0 121,0 117,0 124,0 2,35 2,53 2,27 2,32 2,66 2,72 2,72 2,65 3,05 4,73 14,50 3,74 3,17 6,49 6,70 7,21 4,73 8,01 -12,6 -12,5 -12,6 -12,5 -12,8 -11,9 -12,8 -12,3 -12,0 -12,7 -12,5 -12,6 -12,5 -12,8 -11,9 -12,8 -12,3 -12,1 -12,5 -12,5 -12,6 -12,5 -12,8 -11,9 -12,8 -12,3 -12,0 2 1 1 2 1 1 1 1 2 123-92-2 141,0 3,06 7,75 -13,1 -13,1 -13,1 1 138-86-3 158,0 2,91 4,75 -13,2 -13,2 -13,2 1 100-86-7 56-23-5 159,0 81,5 2,87 1,55 4,07 2,00 -14,3 -13,3 -14,3 -13,3 -14,3 -13,3 1 1 106-23-0 178,0 3,46 10,84 -14,3 -14,3 -14,3 1 89-80-5 173,0 3,00 3,68 -14,2 -14,2 -14,2 1 1-Pentanol 2-Pentanol Toluène -3-Hexèn-1-ol Ethylpropionate 2-Hexanol p-Xylène Ethylbutyrate Amylacéticester (Isoamylacétate) 4-Isopropényl-1-méthyl-1cyclohexène (Limonène) Diméthylbenzylcarbinol P87 Carbon tétrachloride 3,7-Diméthyl-6-octèn-1-al (Citronellal) P92 2-Isopropyl-5méthylhexanone (Menthone) "n" est le nombre de valeurs de D par molécule. 215 Chapitre IV – Résultats et discussion 3.3.2. Optimisation de la taille des arbres La description qualitative précédente des arbres de régression n’est pas suffisante pour déterminer le niveau optimal de taille de l’arbre pour chaque jeu de molécules. Les résultats de validation croisée et bootstrap sont reportés respectivement sur les figures IV.34(a-b) pour le jeu de molécules testées dans le PEBDL/PEBD à 23 °C. Des résultats similaires sont obtenus pour les trois autres jeux de molécules. Une trop forte réduction de la complexité de l’arbre est responsable d’une augmentation considérable de la moyenne de l’erreur quadratique de prédiction, notée χ2 (figures IV.34(a-b)). Au contraire, augmenter la complexité de l’arbre au-delà d’un certain seuil conduit à une augmentation de l’erreur de prédiction (figure IV.34(a)). Les coefficients de détermination, notés r2, montrent un comportement similaire, leurs valeurs étant significativement plus basses dans les échantillons bootstrap que dans l’échantillon entier quand le nombre de nœuds terminaux augmente (figure IV.34(b)). Figure IV.34 : Effets de la taille des arbres sur l’erreur de prédiction (pour le PEBDL/PEBD à 23 °C). Les résultats sont obtenus par (a) validation croisée (10 échantillons) et (b) bootstrap (1000 échantillons). Les résultats sont exprimés en valeurs de r2, somme des valeurs de χ2, et valeurs p > F. 216 Chapitre IV – Résultats et discussion Ces effets sont connus en tant que sous-ajustements (underfitting) et sur-ajustements (overfitting). Un sous-ajustement produit un biais excessif dans les valeurs de log10(D) prédites, alors qu’un sur-ajustement génère une variance excessive entre les prédictions. Les mesures de performances par validation croisée et bootstrap apportent toutes les deux des optimums différents compris entre 8 et 22 classes. Il est important de noter que la validation croisée conduit généralement à un nombre de classes inférieur à celui estimé par le bootstrap, et conduit également à des valeurs qui varient de façon significative (environ 30 %) entre les répétitions. Au sein de la plage attendue pour le niveau optimal de taille, le choix de construire une branche donnée ou de retirer des nœuds est base sur nos propres évaluations et sur la capacité de l’arbre généré à regrouper des structures chimiques similaires et à préserver des caractéristiques spécifiques en relation avec des structures chimiques remarquables initialement présentes dans le jeu de molécules. Le risque de sur-ajustement (overfitting) est d’autant plus grand que l’échantillon utilisé pour l’ajustement / apprentissage est petit (exemple du jeu de molécules testées dans le PP à 40 °C). Dans notre approche, le risque de sur-ajustement est compensé par l’utilisation d’un petit nombre de descripteurs moléculaires qui semblent conduire à la fois à une classification et à une prédiction pertinente, même sans ajustement / apprentissage préalable. Pour des raisons de robustesse, le nombre de nœuds terminaux est choisi de façon à être pratiquement proportionnel à la racine carrée du nombre de molécules différentes à l’intérieur de chaque jeu testé. 3.3.3. Arbres de régression optimisés (après taille des arbres) Les arbres de régression avec leur niveau optimal de taille sont présentés sur figures IV.35 et IV.36 pour les quatre jeux de molécules testés. Les principales propriétés de ces arbres sont résumées dans le tableau IV.9. Les valeurs de log10(D) à chaque nœud (qu’il soit terminal ou non) correspondent respectivement à la valeur moyenne et au 90ème percentile (figures IV.35 et IV.36) des valeurs de log10(D) regroupées. De cette façon, les figures IV.35(a) et IV.36(a,b,c) présentent les valeurs de log10(D) estimées alors que les figures IV.35(b) et IV.36(d,e,f) présentent les valeurs de log10(D) surestimées avec un risque de 10 %. Les conditions d’embranchement correspondantes sont indiquées à chaque nœud, de façon à ce que la branche de gauche soit choisie quand la valeur testée est vraie (et la branche droite dans le cas contraire). 217 Chapitre IV – Résultats et discussion Figure IV.35 : Arbres de régression optimisés (après taille des arbres) pour le PEBDL/PEBD à 23 °C, basés sur (a) les valeurs moyennes de log10(D) et (b) le 90ème percentile des valeurs de log10(D) de chaque classe. Les conditions d’embranchement correspondantes sont indiquées à chaque nœud. 218 Chapitre IV – Résultats et discussion Figure IV.36 : Arbres de régression optimisés (après taille des arbres) basés sur les valeurs moyennes de log10(D) de chaque classe pour (a) le PEMD/PEHD à 23 °C, (b) le PP à 23 °C et (c) le PP à 40 °C, et basés sur le 90ème ile des valeurs de log10(D) de chaque classe pour (d) le PEMD/PEHD à 23 °C, (e) le PP à 23 °C et (f) le PP à 40 °C. Les conditions d’embranchement correspondantes sont indiquées à chaque nœud. 219 Chapitre IV – Résultats et discussion Les arbres de régression présentés incluent 25, 9, 10 et 4 nœuds terminaux pour les molécules testées respectivement dans le PEBDL/PEBD à 23 °C, le PEMD/PEHD à 23 °C, le PP à 23 °C et le PP à 40 °C (tableau IV.9). L’ordre d’apparition de chaque variable le long de chaque arbre de régression met en évidence leurs poids respectifs pour la prédiction de log10(D). Les effets du volume (VVdW) prédominent pour tous jeux de molécules testés dans le polyéthylène (figures IV.35(a) et IV.36(a)), tandis que le rayon de giration (ρ) et VVdW contrôlent la dispersion des valeurs de log10(D) pour les molécules testées dans le PP à 23 °C. Dans le jeu testé dans le PP à 40 °C, un volume de taille de 538 Å3 combiné à différents facteurs de forme (Iz/x) définit la façon dont les valeurs des coefficients de diffusion sont étalées sur l’échelle des valeurs de log10(D). En raison du risque de sur-ajustement (overfitting), la combinaison des 3 descripteurs est principalement utilisée pour séparer les classes de molécules comportant un nombre significatif de répétitions. En conséquence de la sur-représentativité des molécules de masse moléculaire comprise entre 120 et 450 g⋅mol-1 dans la base de données (voir figures IV.28 et IV.29), chaque arbre taillé adopte une structure dense proche de la médiane des valeurs de log10(D) et se trouve clairsemé de part et d’autre. Le niveau d’enchevêtrement est bas et est maximal quand la densité est maximale. Par conséquent, les arbres de régression basés sur les valeurs moyennes de log10(D) de chaque classe sont compensées et pratiquement symétriques (figures IV.35(a) et IV.36(a,b,c)). Au contraire, les arbres de régression basés sur le 90ème percentile des valeurs de log10(D) se retrouvent déviés vers les valeurs élevées de log10(D) (figures IV.35(b) et IV.36(d,e,f)). Le décalage est plus important (jusqu’à 2 décades) pour les classes correspondant aux valeurs les plus élevées de log10(D) (et à l’opposé plus faible pour les classes correspondant aux valeurs les plus faibles de log10(D)). Pour chaque feuille ou classe terminale comportant plus d’une valeur de log10(D) et si possible plus d’une molécule, le 90ème percentile apporte une valeur pessimiste de D (surestimée de façon sûre) qui peut être utilisée pour évaluer avec suffisamment de sécurité la migration de n’importe quelle molécule connue ou non. Dans le cas où encore plus de sécurité est demandée, le nombre de nœuds terminaux peut être réduit de façon à augmenter le nombre de données correspondant à chaque classe terminale et par conséquent à augmenter la robustesse de l’estimation du percentile supérieur. Il est important de souligner que l’approche proposée ne nécessite aucune supposition sur la distribution des valeurs de D. Le risque de sous-estimation du "vrai" coefficient de diffusion peut être réduit aussi bas que possible en choisissant a priori un percentile supérieur adéquat. 220 Chapitre IV – Résultats et discussion Tableau IV.9 : Principales caractéristiques des arbres de régression optim pour chaque jeu de molécules testé. Température (°C) Nombre de nœuds terminaux PEBDL/PEBD 23 PEMD/PEHD Polymère Nombre de molécules par classe minimum maximum 25 1 23 23 9 1 27 PP 23 10 2 14 PP 40 4 3 13 3.4. Les arbres de décision utilisés comme outils pour assimiler des données Les arbres de régression peuvent remplacer avantageusement les données brutes collectées qui sont intrinsèquement disparates en nombre et en qualité. Ce procédé est connu comme une assimilation des données et conduit à contrôler et standardiser la qualité des données disponibles. En fonction de l’objectif, ce procédé peut être exécuté de façon continue dès que de nouvelles données sont disponibles ou sur un groupe quand une quantité significative de nouvelles données a été collectée. Qui plus est, il peut être utilisé pour obtenir aussi bien des valeurs de D réalistes que des sur-estimateurs appropriés. L’échantillon de molécules, les techniques utilisées et encore le choix des descripteurs sont susceptibles d’influencer significativement la façon dont les données sont assimilées en nouvelles structures cognitives comme les arbres de décision. Afin d’illustrer ces effets possibles, les disparités entre les données et les modèles, basés sur la moyenne et le 95ème percentile de chaque feuille ou classe terminale, sont reportées respectivement sur les figures IV.37 et IV.38 pour chaque jeu de molécules. Les valeurs prédites obtenues à la fois avec les arbres complets de régression et avec les arbres optimaux taillés sont représentées. On notera que les figures IV.37 et IV.38 ne présentent pas de résultats de validation du fait que les arbres de régression sont dans ce cas ajustés sur la totalité des échantillons. Elles illustrent la proximité (figure IV.37) ou la surestimation (figure IV.38) des résultats prédits quand ils remplacent les données es. Les descripteurs testés étant aussi des paramètres classifiant pertinents a priori, la capacité intrinsèque des descripteurs à assimiler de nouvelles données (ou données inconnues) est discutée sur la figure IV.39. 221 Chapitre IV – Résultats et discussion Figure IV.37 : Comparaison des valeurs moyennes prédites de log10(D) et des valeurs disponibles dans la base de données pour : a) PEBDL/PEBD à 23°C, b) PEMD/PEHD à 23°C, c) PP à 23°C et d) PP à 40°C. Chaque figure principale présente les valeurs prédites avec les arbres complets de régression, tandis que les encarts insérés en bas présentent les résultats obtenus avec les arbres de régression optimaux taillés. Les encarts insérés en haut montrent la distribution des valeurs de log10(D) disponibles dans la base de données. 222 Chapitre IV – Résultats et discussion Figure IV.38 : Comparaison des valeurs prédites du 95ème percentile des valeurs de log10(D) et des valeurs disponibles dans la base de données pour : a) PEBDL/PEBD à 23°C, b) PEMD/PEHD à 23°C, c) PP à 23°C et d) PP à 40°C. Chaque figure principale présente les valeurs prédites avec les arbres complets de régression, tandis que les encarts insérés en bas présentent les résultats obtenus avec les arbres de régression optimaux taillés. Les encarts insérés en haut montrent la distribution des valeurs de log10(D) disponibles dans la base de données. "n<", "n=" et "n>" indiquent le nombre de valeurs prédites respectivement inférieures, égales et supérieures à la valeur de référence. 223 Chapitre IV – Résultats et discussion La figure IV.37 montre que les coefficients de corrélation, r, sont supérieurs à 0,89 même pour les arbres taillés. En d’autres termes, 89 % de la variance totale est au moins expliquée par les modèles proposés. Les divergences entre les valeurs prédites et les données initiales sont résumées dans le tableau IV.10. L’écart entre les valeurs de D est compris entre 0,51 et 1,15 décade pour l’arbre complet, et n’augmente pas considérablement quand le niveau de taille augmente puisqu’il reste compris entre 0,79 et 1,31 décade pour l’arbre optimal taillé. En raison du faible nombre de valeurs de D pour les grosses molécules (de masse moléculaire supérieure à 700 g⋅mol-1), l’écart est plus important quand les valeurs de D attendues sont basses. Tableau IV.10 : Ecarts maximums entre les valeurs de D prédites (Dprédit) et les valeurs de D disponibles dans la base de données (Dbase). Polymère Température (°C) 95 ème ⎛Dprédit ⎞⎟ ⎜ ⎟ log 10 ⎜ percentile de ⎜⎝ D ⎠⎟⎟ base arbre complet arbre "optimal" taillé PEBDL/PEBD 23 1,04 1,08 PEMD/PEHD 23 1,14 1,15 PP 23 1,15 1,31 PP 40 0,51 0,79 La figure IV.38 examine la façon dont les valeurs de D basées sur le 95ème percentile de chaque classe surestiment les valeurs de D disponibles dans la base de données. Le nombre de valeurs qui est inférieures aux valeurs de référence est également précisé. La quantification d’une possible sous-estimation des valeurs de D est donnée dans le tableau IV.11. Comme attendu, l’arbre complet surestime ou prédit "exactement" le "vrai" coefficient de diffusion. Une condition d’égalité réside principalement dans la présence d’une feuille ou classe terminale comportant une valeur de D unique. Comme un arbre taillé regroupe plus de données et de structures moléculaires, on s’attend à ce que la taille de chaque classe augmente et que son 95ème percentile puisse sous-estimer ou surestimer l’échantillon de données testé. Un niveau de taille satisfaisant peut générer une sous-estimation similaire à un niveau de risque a priori (5 % pour un arbre de régression basé sur le 95ème percentile des valeurs). Les arbres de régression optimaux taillés vérifient un taux de sous-estimation de 4,9 %, 3,5 %, 224 Chapitre IV – Résultats et discussion 5,0 % et 0 %, respectivement pour les jeux de molécules testés dans le PEBDL/PEBD à 23 °C, PEMD/PEHD à 23 °C, PP à 23 °C et PP à 40 °C (figure IV.38). Le maximum de sousestimation est inférieur à 0,36 décade et intervient principalement pour le jeu de molécules testé dans le PEMD/PEHD à 23 °C. En comparaison du bruit présent dans les données et de l’exactitude généralement reconnue des méthodes conventionnelles pour évaluer les valeurs de D, ces différences peuvent être considérées de très faible importance. Il faut également souligner que l’utilisation de données et de valeurs de D bien contrôlées (cas du jeu de molécules testé dans le PP à 40 °C) ne conduit pas à une sous-estimation des valeurs de D. Tableau IV.11 : Sous-estimations maximales des valeurs de D et des valeurs disponibles dans la base de données. Polymère Température (°C) 5 ème ⎛Dprédit ⎞⎟ ⎜ ⎟ log 10 ⎜ percentile de ⎜⎝ D ⎠⎟⎟ pour les base valeurs vérifiant Dprédit < Dbase arbre complet arbre "optimal" taillé PEBDL/PEBD 23 aucun 0,23 PEMD/PEHD 23 aucun 0,36 PP 23 aucun 0,22 PP 40 aucun aucun La discussion précédente suppose que la formation complète de l’arbre de régression soit réalisée sur une quantité significative de données. Dans la pratique, il peut s’avérer intéressant d’estimer un coefficient de diffusion inconnu ou sa surestimation à partir de conditions plus générales, par exemple à partir de ses similarités de structure moléculaire avec un petit jeu de molécules aux propriétés bien définies. De cette façon, on peut s’attendre intuitivement à ce qu’une nouvelle molécule possède un coefficient de diffusion similaire à celui d’une molécule qui lui ressemble. Cette approche par homologie basée sur des arbres de classification a priori est comparée à l’approche faisant intervenir un ajustement a posteriori sur la figure IV.39. Il est confirmé que ces deux approches sont fortement corrélées et présentent un biais significatif. La variabilité dans les estimations de D, représentée par l’écart interquartile, qui n’est pas minimal quand aucune formation n’est réalisée, est principalement responsable des différences observées. Des comportements inattendus apparaissent pour 225 Chapitre IV – Résultats et discussion quelques molécules et semblent principalement liés aux erreurs expérimentales. Les écarts sont de façon caractéristique compris entre 1 et 2 décades. Figure IV.39 : Comparaison des valeurs de log10(D) obtenues à partir des arbres de classification et de régression, après une taille optimale des arbres, pour : a) EBDL/PEBD à 23°C, b) PEMD/PEHD à 23°C, c) PP à 23°C et d) PP à 40°C. Chaque figure présente l’écart interquartile. Conclusions de la partie 3. En accord avec un mécanisme de transport caractérisé dans les parties précédentes, trois descripteurs topologiques de la structure moléculaire ont été utilisés à la fois pour classer les molécules et pour prédire les valeurs de D : le volume de Van-der-Waals (VVdW), un facteur de forme (Iz/x) et le rayon de giration (ρ). Ces descripteurs sont évalués en absence 226 Chapitre IV – Résultats et discussion d’interaction avec la matrice polymère. Basée sur des arbres de décision, la procédure est non déterministe (qui ne dépend pas d’une théorie) et non linéaire (capables de manipuler des comportements complexes ou des interactions). Un arbre de classification a priori regroupe de façon pertinente les molécules ayant des valeurs de D similaires. Les arbres de régression augmentent le caractère prédictif et réduisent significativement le risque de mauvais classement. Une validation statistique par validation croisée et bootstrap a démontré que l’approche proposée est prédictive et robuste quand les arbres de régression sont simplifiés de façon adéquate par une taille de l’arbre. Les arbres de régression optimaux considèrent les trois descripteurs avec pratiquement la même importance. Aucune des distributions de chaque paramètre ne peut à elle seule s’ajuster à la distribution des valeurs de D collectées. Pour une ébauche de classification des comportements diffusifs sur une échelle de valeurs de D comprises entre 10-17 et 10-13 m2⋅s-1, VVdW prédomine pour les jeux de molécules testées dans le PE alors qu’une combinaison de ρ et de VVdW est nécessaire dans le PP à 23 °C. Pour le petit jeu de molécules testées dans le PP à 40°C et pour une gamme similaire de valeurs de D, VVdW et Iz/x prédominent. Le choix des trois descripteurs se trouve ainsi justifié : VVdW est corrélé à M, et le produit de Iz/x et de ρ donne le volume d’activation. Une méthodologie a été conçue pour calculer des sur-estimateurs robustes des valeurs de D à partir des percentiles supérieures des valeurs collectées dans une même classe. En admettant un risque de 10 % de sous-estimer les valeurs de D collectées dans la base de données, les valeurs du 90ème percentile de chaque classe terminale ont été testées sur des arbres taillés de façon optimale. Pour tous les polymères testés, l’écart entre la valeur "réelle" et la plus faible valeur sous-estimée est environ 2 fois plus grand que l’incertitude liée à la mesure du coefficient de diffusion. En plus de leur aptitude de prédiction, les arbres de décision sont aussi proposés pour la standardisation, la réévaluation et/ou l’ajustement de données nouvelles ou préalablement collectées. Cette opération transforme un jeu initial de données disparates en un nouveau jeu bien validé en fonction des objectifs définis au préalable. Cette approche a été renforcée en montrant que l’utilisation des trois descripteurs proposés pour la classification ou la régression conduit à des conclusions similaires. En raison d’une absence d’ajustement (ou apprentissage) lorsqu’ils sont utilisés en tant qu’agents classifiants, le risque de mauvaise classification est plus grand mais ne montre pas de biais 227 Chapitre IV – Résultats et discussion significatif. En conséquence, les trois descripteurs de la structure moléculaire, se révèlent être des descripteurs pertinents pour définir les analogies entre diffusants. Le modèle de type arbre de décision développé permet ainsi de prédire des estimateurs réalistes ou des sur-estimateurs des coefficients de diffusion (indice de dispersion) et contribue au développement d’une base de données en ligne assurant le classement et la prédiction des coefficients de diffusion, même pour une molécule inconnue. Les modèles finaux proposés sont adaptables pour un large domaine d’utilisations pratiques : conception de matériaux aux propriétés de transport contrôlées, vérification de la conformité des matériaux au contact des aliments, expertise sanitaire et alimentaire basée sur une évaluation du risque de migration des substances des matériaux d’emballage vers les aliments. Les arbres sont toutefois construits en fonction du polymère dans lequel ont été évalués les coefficients de diffusion et en fonction de la température. La prédiction des coefficients de diffusion à une température différente s’avère difficile. En effet, les valeurs d’énergie d’activation (Ea) collectées sont trop imprécises pour calculer un coefficient de diffusion robuste à une autre température. Le manque de connaissance actuel sur l’énergie d’activation empêche encore d’établir la loi de dépendance à la température et limite l’application des arbres de décision. 228 Chapitre IV – Résultats et discussion 4. CONTRIBUTION A L’ETUDE DES HETEROGENITES SPATIALES DES PROPRIETES DE TRANSPORT DANS LES POLYMERES Les premières parties du chapitre ont décrit la diffusion à partir de considérations moléculaires basées essentiellement sur le diffusant lui-même. Si les mouvements du polymère ont été abordés avec les valeurs de α, sa microstructure n’a en revanche pas été étudiée de façon spécifique. Nous avons montré une forte dépendance des déplacements quadratiques moyens du centre de gravité des diffusants (msd) avec les échelles de temps et d’ . Les valeurs du coefficient de diffusion D se sont révélées dépendante de l’échelle de temps dans la phase amorphe de façon très significative. Cette quatrième partie s’intéresse plus en détail à l’effet de l’organisation et de la microstructure du polymère. A température ambiante, les matériaux sont semi-cristallins : constitués de zones amorphes (libres et tendues) et de zones cristallines qui affectent la mobilité au sein du polymère. Il s’agit ici de développer une méthode générale pour caractériser les hétérogénéités des coefficients de diffusion (D) et des paramètres d’activation. L’échelle macroscopique homogénéise les valeurs de D, ce que peut également faire l’échelle microscopique mais jusqu’à une certaine échelle. Il s’agit plus particulièrement d’évaluer cette l’échelle. Afin d’y parvenir, une méthode générale de mesure de D est proposée à l’échelle macroscopique. Elle a été adaptée et optimisée pour des mesures en fluorimétrie, qui ouvre une large gamme de sondes fluorescentes représentatives des additifs couramment utilisés dans les matériaux polymères. De plus, les propriétés de fluorescence des sondes permettent généralement une bonne détection du signal, augmentant ainsi la précision des mesures. Une approche similaire a été appliquée pour la mesure in situ de D en microscopie confocale à balayage laser. Les résolutions proposées par cette technique sont particulièrement adaptées à l’étude des hétérogénéités spatiales que constituent les cristallites (diamètre 10 – 100 μm). De plus, la réduction de l’échelle d’observation s’accompagne d’une diminution du temps de mesure : une durée d’expérience de l’ordre de l’heure rend possible la mesure de D dans la gamme 10-11 – 10-17 m2·s-1, dans des matériaux polymères. 229 Chapitre IV – Résultats et discussion 4.1. Mesure macroscopique de D L’étude à l’échelle macroscopique repose sur des expériences de diffusion dans des empilements de films (contact solide/solide). Elle a été adaptée et optimisée pour des mesures en fluorimétrie. Les travaux sont focalisés sur une gamme de sondes fluorescentes représentatives de structures d'intérêt technologique et des additifs entrant dans la composition des matériaux plastiques (qui eux ne présentent pas de bande d'absorption ou d'émission typiques). 4.1.1. Dimensionnement des expériences de diffusion par contact solide / solide : choix d’une configuration d’empilement Les principaux avantages et inconvénients des méthodes publiées dans la littérature sont ici analysés. Suite à cette analyse, nous proposons une méthode d’empilement susceptible d’entrainer le moins de biais possible pour la mesure du coefficient de diffusion. 4.1.1.1. Méthodes publiées dans la littérature : empilements selon Roe et selon Moisan Les méthodes de mesure de coefficients de diffusion dans un polymère, en absence de solvant, sont basées sur des cinétiques de diffusion ou sur l’évolution de profils de concentration dans des empilements de films (méthodes selon Roe et selon Moisan, tableau I.15). Les méthodes diffèrent suivant la source utilisée et son emplacement dans l’empilement. La figure IV.40 présente les profils simulés pour ces deux types d’empilement. Moisan préconise une source épaisse de concentration élevée en sondes pour que la concentration dans la source soit considérée comme constante dans son traitement de données. Selon Moisan, une source idéale est infinie et ne présente pas de résistance au transfert dans l’hypothèse d’un contact parfait source/film. Nous avons calculé l’évolution de la source dans un empilement selon Moisan (figure IV.40(a)) avec un rapport de 100 entre le coefficient de diffusion dans la source et les films, et un rapport de 10 entre l’épaisseur de la source et celle d’un film. Cette simulation montre un appauvrissement de la source au cours du temps et une inflexion significative du profil de concentration dans la source. La source selon Moisan n’est donc pas idéale. Cet écart à 230 Chapitre IV – Résultats et discussion l’idéalité est responsable d’une sous-estimation du coefficient de diffusion car le traitement des données fait reporter la résistance globale au transfert (résistance dans la source et dans le film) sur le seul coefficient de diffusion dans le film. La méthode spectrale utilisée pour l’équation de transport est à l’origine du pic de concentration en position 0 pour le nombre de Fourier Fo = 0,1 mais reste sans conséquence sur le résultat final pour Fo > 0,1. Par ailleurs, la fabrication et la régénération de la source sont des opérations complexes. L’empilement selon Roe (figure IV.40(a)) présente l’avantage de ne pas faire intervenir de matériau source extérieur. Seul un film contaminé est introduit au centre de l’empilement. Pour un même niveau de contamination, ce type d’empilement est toutefois responsable d’un effet de dilution important (1 film source pour 9 films représente une dilution de 1/9 = 0,11). Les concentrations des diffusants peuvent alors être inférieures au seuil de quantification. Figure IV.40 : Profils simulés de la diffusion dans des empilements : a) selon Moisan : 9 films empilés avec 1 source épaisse contenant les molécules diffusantes ; b) selon Roe : 9 films empilés, dont 1 film source en position 5. 231 Chapitre IV – Résultats et discussion 4.1.1.2. Méthodes alternatives Nous avons proposé une amélioration de l’empilement selon Roe : nous augmentons le nombre de films sources dans l’empilement. L’empilement selon Roe proposait un seul film source d’où un effet de dilution important (1 film source pour 9 films). Nous proposons d’introduire 2 ou 3 films sources dans l’empilement afin de contrôler cet effet dilution. De plus, la présence de plusieurs films sources introduit une répétition du profil de diffusion au cours de la même expérience (même empilement). Les profils de concentration adimensionnés pour des empilements de 14 et 13 films sont représentés respectivement sur les figures IV.41(a) et IV.41(b). Figure IV.41 : Profils simulés de la diffusion dans des empilements dérivés de celui proposé par Roe : a) empilement de 14 films dont 2 films sources en position 5 et 10, soit une dilution de 2/14 ≈ 0,14 ; b) empilement de 13 films dont 3 films sources en position 4, 7 et 10, soit une dilution de 3/13 ≈ 0,23. Comme pour l’empilement selon Roe, les profils obtenus sont non monotones et présentent une transition entre une distribution bimodal e (deux pics , figure IV. 41( a )) ou 232 Chap itre IV – Ré sultats et discussion trimodale (trois pics, figure IV.41(b)) vers une distribution monomodale (un seul pic). Le passage d’une configuration à une autre en termes de nombre de maxima, amplitude de concentration aux bords du domaine et pentes des profils, permet d’identifier de manière aisée le nombre de Fourier à partir de données tabulées (abaques, figure III.9). Par ailleurs, l’utilisation de rapports de dilution (nombre de films sources sur nombre de films total, ici 1/7 et 3/13) permet de mesurer de manière plus sensible les concentrations dans les films. Pour le reste de l’étude, une configuration d’empilement comprenant 14 films dont 2 films sources (en position 5 et 10) a été retenue. Cette configuration permet d’introduire une symétrie dans le profil autorisant une analyse a posteriori de la répétitivité de la méthodologie complète (mise en contact, extraction, séparation et détection). Du fait de la variation très significative des profils en fonction du nombre de Fourier, l’évaluation expérimentale d’un coefficient de diffusion nécessite seulement 3 à 5 valeurs du nombre de Fourier (c'est-à-dire 3 à 5 empilements). 4.1.2. Mesure du coefficient de diffusion macroscopique Afin de tester la configuration d’empilement retenue, le coefficient de diffusion (D) macroscopique de quelques molécules sondes est mesuré. Ce paragraphe illustre le principe de la mesure de D en prenant l’exemple d’empilements de films dont la source contient un mélange de 4 sondes fluorescentes (le naphthalène, le 2-éthoxynaphthalène, le phénanthrène et le pyrène) initialement dissoutes dans du PEBD. Des empilements de 14 films dont 2 films sources (en position 5 et 10) sont constitués et placés à 40°C. La figure IV.42 montre des résultats typiques de profils expérimentaux de concentration obtenus par chromatographie liquide hautes performances après extraction. Elle décrit en particulier la variation d’une distribution bimodale à une distribution monomodale 2 quand les valeurs de Fo sont supérieures à 1. Les variations du rapport t l sont obtenues en modifiant l’épaisseur des films (70, 210 et 420 μm) et les temps de contact (entre 17 et 96 heures). 233 Chapitre IV – Résultats et discussion Figure IV.42 : Résultats typiques de profils expérimentaux adimensionnés de concentration et leur ajustement pour le phénanthrène dans du PEBD à 40 : a) Fo = 0,7, b) Fo = 0,9, c) Fo = 2,7 et d) Fo = 3,9. Dans les conditions envisagées, les valeurs de Fo varient entre 0,3 et 7,2 (figure IV.43(a)) avec des coefficients de détermination supérieurs à 0,99. Aucun biais significatif n’est détecté, ce qui confirme la fiabilité de l’estimation de D reposant sur des expériences indépendantes. Les valeurs de D identifiées sont de 3,7⋅10-12, 2,7⋅10-12, 2,0⋅10-12 et 9,5⋅10-12 m2·s-1 respectivement pour le naphthalène, le 2-éthoxynaphthalène, le phénanthrène et le pyrène (figure IV.43(b)). Les intervalles de confiance sont inférieurs à 10-15 m2·s-1. Ces valeurs de D sont présentées dans le tableau IV.12. 2 Figure IV.43 : a) Valeurs identifiées de Fo en fonction du rapport t l pour 4 sondes fluorescentes dans du PEBD à 40 °C. b) Valeurs de D correspondantes calculées à partir des valeurs de Fo identifiées. L’ensemble des valeurs de D mesurées par ce protocole sont regroupées dans le tableau IV.12. Neuf sondes fluorescentes ont été testées dans du PEBD et trois dans du PP, pour des conditions thermodynamiques différentes (températures de 40 et 60°C ; pressions atmosphérique et de 300 et 500 MPa). 234 Chapitre IV – Résultats et discussion Quel que soit le polymère testé, pour des pressions inférieures à 300 MPa, les valeurs de D augmentent avec la température (d’une puissance de 10 en moyenne entre 40 et 60°C). Les valeurs de D sont plus faibles sous haute pression qu’à pression atmosphérique. Toutefois, à 40°C, les valeurs de D obtenues à 300 MPa sont toutes inférieures à celles obtenues à 500 MPa, alors que l’inverse est observé à 60°C. Bien que l’identification de D conduise à des valeurs robustes, l’utilisation des empilements de films nécessite toutefois des expériences de migration de 96 heures pour des molécules de masse environ 500 g⋅mol-1 et une extraction par des solvants. De plus, la mesure d’une seule valeur de D implique la réalisation et l’analyse de plusieurs empilements et non d’un seul échantillon unique. 235 Chapitre IV – Résultats et discussion Tableau IV.12 : Coefficients de diffusion calculés à l’aide du protocole retenu dans du PEBD et du PP en fonction de la température et de la pression . D (m2⋅s-1) PEBD Diffusant PP 40°C 60°C 40°C 60°C 0,1 MPa 300 MPa 500 MPa 0,1 MPa 300 MPa 500 MPa 0,1 MPa 300 MPa 500 MPa 0,1 MPa 300 MPa 500 MPa naphthalène 3,7⋅10-12 n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d fluorène n.d 1,9⋅10-14 1,4⋅10-13 1,0⋅10-11 6,6⋅10-13 1,2⋅10-13 2,1⋅10-14 4,9⋅10-16 2,4⋅10-15 n.d 1,7⋅10-14 1,1⋅10-15 2-éthoxynaphtalène 2,7⋅10-12 n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d phénanthrène 2,0⋅10-12 n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d pyrène 9,5⋅10-12 8,8⋅10-15 1,9⋅10-14 n.d 1,3⋅10-13 1,2⋅10-14 3,8⋅10-15 7,9⋅10-17 1,3⋅10-16 n.d 1,9⋅10-15 6,2⋅10-16 triphénylène 2,0⋅10-13 n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d .d n.d n.d 9,10diéthoxyanthracène 4,6⋅10-13 3,3⋅10-16 1,8⋅10-15 n.d 4,8⋅10-14 1,2⋅10-14 2,2⋅10-15 n.d 3,7⋅10-16 2,1⋅10-15 1,2⋅10-15 6,1⋅10-16 uvitex OB 4,2⋅10-16 n.d n.d 1,2⋅10-15 2,1⋅10-16 n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d rubrène 7,2⋅10-17 n.d n.d 5,2⋅10-17 7,8⋅10-17 n.d n.d n.d n.d n.d n.d n.d Les intervalles de confiance sont inférieurs à 10-15 m2·s-1 et les coefficients de corrélation sont supérieurs à 0,9. Certaines valeurs sont non définies (n.d) en raison de valeurs de D manquantes (profils de concentration manquants à cause d’un temps de diffusion ou d’une concentration non optimisés) ou de valeurs non mesurées. 236 Chapitre IV – Résultats et discussion 4.2. Mesure microscopique de D La microscopie confocale permet d’imaginer des tranches fines de films dans un matériau sans avoir recours aux empilements de films (paragraphe IV.4.1.1). Par ailleurs, la microscopie confocale à balayage laser permet la mesure in situ de D et l’étude de sondes directement dans leur environnement (sans présence de solvant). Contrairement aux empilements macroscopiques qui nécessitent au minimum 4 à 5 empilements pour estimer une seule valeur de D, cette technique ne demande qu’un échantillon unique de polymère. De plus, la réversibilité de l’étape d’écriture (création d’un gradient de concentration) permet la répétition de la mesure de D au même emplacement dans l’échantillon, dans les mêmes conditions ou pour des conditions thermodynamiques différentes (par exemple un changement de température). La réduction de l’échelle d’observation et de la durée de la mesure en microscopie confocale à balayage laser nous incite à nous intéresser aux molécules de masse molaire élevée (M > 500 g⋅mol-1) dont l’étude avec les techniques usuelles est peu aisée. Une grande partie de notre travail a consisté en une contribution méthodologique. La méthodologie a été développée à l’aide du rubrène (sonde fluorescente de masse 533 g⋅mol-1). La valeur de D de la sonde est obtenue à partir de l'évolution au cours du temps d'un profil de concentration en molécule sonde (ou profil en intensité). Ce profil est obtenu par une photo-oxydation de la sonde sous l'effet d'une augmentation locale de l'intensité du laser. Cette réaction est induite dans des plans perpendiculaires (de quelques μm à quelques centaines de nm) à la région d'observation. La valeur de D est identifiée à partir l'ajustement des données spatio-temporelles à un modèle numérique du transfert en 1D ou 2D. L’homogénéité des valeurs de D est testée en fonction de l’échelle d’observation (longueur caractéristique comprise entre 0,5 et 50 μm). 4.2.1. Caractérisation du profil de concentration en microscopie confocale 4.2.1.1. Analyse du bruit et des biais Comme décrit dans la partie III.2.3.3, l’accumulation des images est utilisée pour réduire les contributions à la fois du bruit de Poisson et du bruit blanc. Un exemple de bruit est montré sur la figure IV.44 pour un échantillon ayant une concentration uniforme en 237 Chapitre IV – Résultats et discussion fluorophores. L’observation, basée sur une seule acquisition, est réalisée à 20 μm de profondeur de la surface externe. Figure IV.44 : a) Bruit caractéristique identifié dans un échantillon de molécules fluorescentes de rubrène dispersées dans du PEBD. Les distributions et projections suivant les axes x et y sont aussi représentées. Effet de l’accumulation b) sur le niveau de bruit et c) sur la linéarité du signal. 238 Chapitre IV – Résultats et discussion Les projections suivant chaque axe montrent que la distribution radiale en intensité est incurvée comme décrit par l’équation (III.2). La distribution en valeurs du bruit est normale avec un écart type d’environ 20 % par rapport à l’intensité moyenne. La réduction du bruit due à l’accumulation est présentée sur la figure IV.44(b). La diminution est prononcée pendant les 50 premières images et beaucoup moins forte ensuite. Comme il est accompagné d’une atténuation significative, le bruit relatif ne tend pas vers zéro avec le nombre d’accumulations et est responsable d’une perte de linéarité entre l’intensité accumulée et le nombre d’acquisitions. Cet effet est analysé sur la figure IV.44(c) en fonction du nombre d’images N. Un maximum d’accumulations N = 20 semble correspondre à un compromis optimal entre la réduction du bruit (réduction de 20 % à 6 %) et la linéarité de la mesure. 4.2.1.2. Cinétique de photoblanchiment Des cinétiques caractéristiques du photoblanchiment sont reportées sur la figure IV.45 pour un protocole standard d’acquisition, incluant une même puissance du laser et un même emplacement du plan focal suivant l’axe z. Les mesures sont réalisées de sorte que la concentration en oxygène ne soit pas limitante. Les valeurs de l’intensité sont normalisées en fonction de leurs valeurs initiales et asymptotiques. Il faut noter que la valeur asymptotique n’est pas égale à zéro, comme il a été discuté dans la partie III.2.2.2, ce biais pouvant être dû à la présence de molécules non blanchies ou à un artefact créé par le processus d’accumulation.
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Amélioration du traitement amont de pixels térahertz, monolithiquement intégrés en technologie CMOS, pour des systèmes d'imagerie en temps réel Nicolas UNIVERSIT AGNE LOIRE ECOLE DOCTORALE N° 601 Mathématiques et Sciences et Technologies de l'Information et de la Communication Spécialité : Electronique Par Nicolas MONNIER « Améliorations du traitement amont de pixels térahertz, monolithiquement intégrés en technologie CMOS, pour des systèmes d'imagerie en temps réel » « Improvements on front-end terahertz pixels, monolithically integrated in CMOS technology, for real time imaging systems » Thèse présentée et soutenue à IMT Atlantique – Campus de Brest, le 19 janvier 2018 Unité de recherche : Laboratoire Lab-STICC Thèse N ° : 2018 I MTA0070 Daniela DRAGOMIRESCU Professeur des universités, Laboratoire LAAS - Toulouse Rapporteurs : Andreas KAISER Cyril LUXEY Directeur de recherche, IEMN - Lille Professeur des universités, IUT Nice Côte d'Azur - Valbonne Examinateurs : Jean-Alain NICOLAS François GALLEE Ingénieur-Chercheur, Commissariat à l'Energie Atomique - Grenoble Maître de conférences, IMT Atlantique Directeur de thèse : Michel NEY Invité Gilles Sicard Professeur, IMT Atlantique Ingénieur-Chercheur, Commissariat à l'Energie Atomique - Grenoble Re ements Remerciements Je tiens à remercier tout particulièrement mes encadrant et co-encadrant du laboratoire L3i du CEA Leti, Jean-Alain Nicolas et Gilles Sicard de m'avoir grandement aidé et orienté durant ces trois années. Merci à eux pour la méthodologie de travail qu'ils ont pu m'apporter, pour nos discussions fructueuses, ainsi que pour le temps passé avec moi. Enfin je tiens à les remercier pour leur grande gentillesse et leur grande générosité. Je tiens à remercier mes directeur et co-encadrant de thèse de l'IMT Atlantique, respectivement Michel Ney et François Gallée pour toute l'aide apportée durant la thèse, les explications et l'ensemble des discussions au sujet des antennes ainsi que pour l'ensemble du temps qu'ils m'ont consacré eux aussi. Je souhaiterais aussi remercier grandement l'ensemble des membres du laboratoire L3i du CEA Leti pour leur chaleureux accueil durant ces trois dernières années. Merci au chef du laboratoire Fabrice Guellec de m'avoir permis de travailler avec l'ensemble de l'équipe et à Michael Tchagaspanian de m'avoir accueilli pour cette thèse. Je tiens particulièrement à remercier Bertrand Dupont, Margaux Vigier, Laurent Millet et Arnaud Verdant pour toute leur aide et leur gentillesse. Merci à Jean-Pierre Rostaing, Guillaume Moritz et François Ayel pour les heures de travail que l'on a passées ensemble et les compétences qu'ils m'ont aidées à développer lors de la conception et du test du circuit réalisé au cours de cette thèse. Merci à l'ensemble des thésards et amis au sein du département pour ces moments passés ensemble, Amaury Nogier, Camille Dupoiron, Simon Eemberger, Wissam Benjilali, Benjamin Caillat, Anthony Goavec. Merci à tous ceux qui ont partagé avec moi ces trois dernières années au sein du département DACLE du CEA Leti et que je n'ai pas cités ici. Je tiens aussi à signifier ma gratitude à l'égard de toutes les personnes avec qui j'ai pu travailler au sein du département DOPT du CEA Leti et pour l'ensemble des compétences et méthodologies de caractérisation qu'ils m'ont apportées. Je pense tout particulièrement à Jérôme Meilhan mais aussi à François Simoens, Jonathan Oden, Antoine Hamelin, Jean-Louis Ouvrier-Buffet et Laurent Dussopt. Avant de finir, et non des moindres, je tiens à remercier l'ensemble de mes amis à Grenoble comme en région parisienne qui m'ont permis de décompresser et de vivre trois années supplémentaires très agréables à Grenoble. Merci à eux pour le soutien mais avant, tout d'être simplement présent. Je pense tout particulièrement à remercier ma petite-amie pour l'ensemble de ce qu'elle a fait pour moi. Pour finir je tiens à exprimer mon immense gratitude à ma famille qui m'a toujours soutenue dans mes choix au cours de ma scolar mais aussi dans ma vie, peu importe les doutes et les incertitudes. Merci tout particulièrement à mes parents pour l'ensemble de ce qu'ils ont fait pour moi tout au long de ces années et à ma grande soeur. Je suis très fier d'eux. Vraiment, merci. N. Re ements iii Publications vii 1 Chapitre 1 Introduction 3 1.1 Science des ondes térahertz 3 1.1.1 La bande térahertz du spectre électromagnétique 3 1.1.2 Les propriétés des ondes térahertz 4 1.2 Applications des ondes THz 6 1.2.1 La détection térahertz 6 1.2.2 Télécommunications térahertz 8 1.3 Sources et détecteurs térahertz 9 1.3.1 Sources 9 1.3.2 Détecteurs 11 1.4 Objectifs de cette thèse 14 1.5 Organisation de cette thèse 15 2 Chapitre 2 Détection THz par transistor à effet de champs 17 2.1 La théorie des ondes plasma dans le canal 17 2.2 La théorie de l'auto-mélange résistif dans le canal 20 2.2.1 Analyse quasi-statique 21 2.2.2 Analyse non quasi-statique 23 2.2.3 Montages de rectification THz par FET 24 2.3 Facteurs de mérites des détecteurs à base de FET 25 2.3.1 La responsivité (Rvi) 25 2.3.2 La puissance équivalente de bruit (ou NEP) 27 2.3.3 Autre facteur de mérite : la puissance minimale détectable (MDP) 28 2.4 Amélioration des facteurs de mérite 29 2.4.1 Pistes d'amélioration de la responsivité 29 2.4.2 Pistes d'amélioration de la puissance équivalente de bruit 31 2.5 Principes d ' acquisition d ' images 34 2.5.1 Acquisition par balayage de trame 34 2.5.2 Acquisition matricielle en temps réel 36 2.6 Détecteurs et imageurs majeurs actuels en technologie CMOS 36 2.7 Conclusion sur la détection THz par transistors FET et les gains potentiels 39 3 Chapitre 3 Développement et analyse du MOSFET de redressement THz 43 3.1 IV Transistors de redressement en technologie intégr ée standard 43 N. Monnier Table des matières 3.1.1 Choix du type de dopage 43 3.1.2 Le transistor n MOS standard 44 3.1.3 Le transistor n MOS RF 44 3.1.4 La longueur du canal du transistor 45 3.2 Impédances du nMOSFET 45 3.2.1 Banc de simulation sous Cadence 46 3.2.2 Zin,Det en fonction de la fréquence THz et de la tension VG du nMOS standard 46 3.2.3 3.3 Zin,Det en fonction de la fréquence THz et de la tension VG du nMOS RF 49 Contributions en bruit du nMOSFET 52 3.3. 1 Densité de bruit en fonction de la fréquence de modulation FMOD et de la tension VG du nMOS standard 52 3.3.2 Densité de bruit en fonction de la fréquence de modulation F MOD et de la tension VG du nMOS RF 53 3.4 Capacit é de redressement des transistors nMOS 55 3.5 Les contraintes de l'intégration 55 3.5.1 La diode de protection des oxydes de grilles (Diode d'antenne) 56 3.5.2 La polarisation électrique du nMOS redresseur et l'influence des résistances de grille (RG) et de source (RS) 59 3.5.3 4 Isolation du substrat de silicium 64 3.6 Discussion autour des validités des modèles 64 3.7 Conclusions et choix 65 Chapitre 4 Intégration d'antennes THz et optimisation de leur environnement 67 4.1 Géométrie d'antennes de réception THz intégrées 67 4.1.1 Co-conception avec le nMOSFET 67 4.1.2 Les différentes géométries d'antenne étudiées 68 4.2 Les contraintes de l'intégration 71 4.2.1 Le substrat de silicium 71 4.2.2 Les dimensions de l'empilement du procédé CMOS et la proximité de la chaine lecture et de traitements 72 4.2.3 La densité métallique imposée 74 4.2.4 Point de polarisation du MOSFET de redressement 75 4.3 Eléments de solution avec les métasurfaces 76 4.4 Les trois types d'environnements électromagnétiques mis en oeuvre 78 4.5 Simulations électromagnétiques des pixels THz à antenne de type Bow-tie 80 N. Monnier V Table des matières 4.5.1 Simulations du pixel THz seul, à antenne Bow-tie dans les 3 configurations 81 4.5.2 4.6 Simulation par matrice de 3 × 3 pixels THz à antenne Bow-tie 83 Simulations électromagnétiques des pixels THz à antenne de type Loop 86 4.6.1 Simulations du pixel THz seul, à antenne Loop, dans les 3 configurations 86 4.6.2 Simulation par matrice de 3 × 3 pixels THz à antenne Loop 89 4.7 Simulations et caractérisations de la réponse de la métasurface implémentée 91 4.7.1 Etude de la bande électromagnétique interdite de la métasurface 91 4.7.2 Etude de la haute impédance de la métasurface 96 4.8 Discussion sur les comparaisons des résultats de rayonnements des cas EBG et GP97 4.9 5 Conclusion sur les choix retenus et l'apport des métasurfaces 98 Chapitre 5 Circuits et caractérisations de la détection THz à base de MOSFET 103 5.1 Présentation du circuit ITH AC 103 5.1.1 Description du pixel 103 5.1.2 Description du circuit complet 107 5.2 Caractérisation de pixels et matrices THz à base de FET 110 5.2.1 Présentation du banc de caractérisation 111 5.2.2 Méthodologie de caractérisation et présentation des résultats pour TERAMOS 113 5.2.3 5.3 6 Impossibilité de caractérisation du détecteur ITHAC à nMOSFET 120 Conclusions sur les caractérisations 121 Chapitre 6 Conclusions et perspectives 123 Références 127 Annexe I Simulations de la capacité de redressement des transistors en technologie CMOS 139 A.1 Redressement dans le cas du nMOS standard 139 A.2 Redressement dans le cas du nMOS RF 141 A. 3 Pertinence du redressement THz observé 142 VI N. Monnier Publications Publications N. Monnier, J.-A. Nicolas, A. Boukhayma, J.-P. Rostaing, G. Sicard, M. Ney, F. Gallée, "A 2D THz Si-MOSFET image sensor based on in-pixel demodulation: toward a fully integrated low-cost real-time THz imagin system" présenté à 8th Terahertz Days, 2015. F. Simoens, J. Meilhan, L. Dussopt, J.-A. Nicolas, N. Monnier, G. Sicard, A. Siligaris, B. Hiberty, "Uncooled Terahertz real-time imaging 2D arrays developed at LETI: present status and perspectives", Micro- and Nanotechnology Sensors, Systems, and Applications IX, 2017, vol. 10194, p. 101942N. N. Monnier, J.-P. Rostaing, G. Moritz, J.-A. Nicolas, G. Sicard, M. Ney, F. Gallée, "Study of CMOS THz pixels using different antenna geometries on metamaterial structures and in-pixel high-performances signal processing" présenté à International Conference on Infrared, Millimeter, and Terahertz Waves, IRMMW-THz, 2017. N. Monnier, J.-A. Nicolas, G. Sicard, F. Gallée, M. VII Partie I Introduction et Théorie Chapitre 1 : Introduction 1 Chapitre 1 Introduction Ce premier chapitre a pour but de présenter le contexte, l'état de l'art et les informations intéressantes quant à la technologie térahertz. Les motivations de cette thèse y seront aussi détaillées. Dans un premier temps une mise en contexte et un tour d'horizon des ondes térahertz sera réalisé, avant de s'attarder sur les propriétés et ainsi les applications permises par ces dernières. S'en suivra une rapide présentation des différents types de sources et de détecteurs térahertz pour terminer sur les motivations originelles puis réorientées de cette thèse de doctorat. 1.1 Science des ondes térahertz Au cours des deux derniers siècles de notre histoire, l'utilisation des différentes bandes spectrales du spectre électromagnétique (EM) a largement contribué à la modernisation de nos sociétés. La bande visible du spectre EM, dont les différentes longueurs d'ondes sont représentables sous forme de couleurs grâce à nos organes oculaires et notre traitement cérébral, ne représente qu'une partie infime de l'ensemble du spectre disponible. En effet, d'autres zones nettement plus vastes de ce spectre ont poussé les chercheurs, aux cours des décennies passées, à multiplier leurs efforts afin de les rendre exploitables. Ces bandes spectrales aux applications multiples, ont ainsi permis le développement des différents moyens de communication de la radio-télécommunication aux systèmes GSM et aux systèmes plus complexes de transmissions de données actuels, Wifi, 3G, 4G et bientôt 5G pour les fréquences plus basses que celles du visibles. Mais elles ont aussi participé au développement de notre compréhension et donc de notre utilisation de l'optique dans les différents domaines tels que les rayons X, les ultra-violets (UVs), les rayons Gammas pour les fréquences supérieures à la bande visible et des infrarouges (IRs) pour les fréquences inférieures à la bande visible. La très grande majorité du spectre ayant été rendu exploitable par les avancées technologiques, les différentes bandes spectrale ont été nommées et normées afin d'en réguler leur utilisation pour la plupart. Cependant une certaine bande du spectre électromagnétique a longtemps résisté aux chercheurs, à savoir la bande des fréquences térahertz. 1.1.1 La bande térahertz du spectre électromagnétique Les ondes Térahertz (THz) correspondent communément aux ondes du spectre électromagnétiques ayant une fréquence comprise entre 0,1 et 10 THz (1 THz = 1012 Hz), voir Figure 1.1. Les anciennes technologies ne permettant pas la synthèse ni la détection de ces fréquences, elles ont longtemps été une barrière à l'exploitation complète du spectre électromagnétique. En langue anglaise cette région était communément nommée « terahertz gap » faisant référence à l'espace des applications laissé vacant par l'incapacité à exploiter la bande. C'est pourtant au cours du XIXème N. Monnier 3 Chapitre 1 : Introduction siècle que les scientifiques ont commencé à s'intéresser à ce domaine de fréquences, ayant pour but de relier les domaines électriques et optiques des ondes en plus de la motivation exploratoire. Cette dualité électro-optique des ondes térahertz se retrouve dans les termes utilisés par Rubens en 1897 « rayonnement chaud des grandes longueurs d'ondes » [Rubens 1897], pour la vision optique d'une part et dans ceux utilisés par Nichols en 1923 « ondes électriques courtes » [Nichols 23], pour la vision électronique. Figure 1.1 : Spectre électromagnétique avec positionnement de la bande THz. D'après [Schuster 11] Au cours du XXème siècle les technologies n'ont fait que rendre de plus en plus accessible l'exploitation de ces fréquences. Ce sont les applications possibles par l'utilisation de cette bande qui incitent les scientifiques du monde entier à repousser les limites des technologies actuelles. En effet, les champs d'applications des rayonnements THz sont très vastes. Ils s'étendent de la télécommunication à la sécurité en passant par le médical et le test industriel. Ces derniers seront plus amplement détaillés dans la partie 1.2 à suivre. 1.1.2 Les propriétés des ondes térahertz La bande de fréquence THz est donc actuellement non standardisée et non allouée et donc complétement libre d'utilisation au-delà de 275 GHz [ERC 16], d'où son attrait certain au vue de l'encombrement actuel du spectre fréquentiel. La bande communément considérée dans la littérature (0,1 – 10 THz), correspondant à des longueurs d'onde dans le vide allant de λ0 = 30 μm à λ0 = 3 mm, recouvre en partie d'autres standards actuels tels que l'infrarouge ou les ondes millimétriques comme le montre le Tableau 1.1. Elle se situe entre la partie haute de la bande des ondes millimétrique (domaine de l'électronique) et l'infra-rouge lointain (domaine de l'optique). Bande de fréquence Millimétriques Submillimétriques Terahertz Infrarouge lointain Fréquence (THz) 0,03 – 0,3 Longueur d'onde (μm) 1000 – 10 000 Energie photonique (meV) 01 – 1,2 0,3 – 3 100 – 1000 1,2 – 12 0,1 – 10 30 – 3000 0,4 – 41,4 1,2 – 10 35 – 300 5 – 41,4 Tableau 1.1 : Définition des fréquences et longueurs d'ondes de la bande THz ainsi que des bandes adjacentes. D'après [Lee 09] 4 N. Monnier Chapitre 1 : Introduction De par leur bande fréquentielle particulière et donc leurs longueurs d'onde, les ondes térahertz ont des propriétés uniques qui leur sont conférées par leur dualité électro-optique. En effet, parmi ces propriétés on retrouve leur très faible valeur énergétique photonique, inférieure à 0,05 eV, contrairement, par exemple, aux rayons X pouvant parfois atteindre le MeV. Ces ondes sont donc considérées comme nondangereuses et non destructrices pour des expérimentations en milieux vivants. Tout comme les ondes millimétriques, les ondes THz sont capables de pénétrer certains matériaux fins et non conducteurs comme certains vêtements, plastiques, bois secs, verres etc. qui peuvent être opaques pour les gammes infrarouges ou visibles. Dues à leur plus petite longueur d'onde comparée aux ondes millimétriques, elles permettent une plus grande résolution spatiale. Ayant une plus grande longueur d'onde que l'infrarouge, elles sont moins sensibles à la dispersion en milieux chargés en particules et ont donc une meilleure pénétration dans des milieux du type poussiéreux. Cette bande spectrale intéresse beaucoup au niveau des études moléculaires car c'est aux fréquences THz que certaines molécules, telles que l'eau, le dioxygène ou le carbone, ont une résonance rotationnelle ou vibratoire. Figure 1.2 : Absorption atmosphérique en fonction de la longueur d'onde/fréquence au niveau de la mer, à 20°C et pour une humidité de 7,5 g/m3. D'après [Lettington 02, Sizov 09] N. Monnier 1.2 Applications des ondes THz Les propriétés fondamentales des ondes THz présentées ci-dessus ouvrent la voie à de nombreuses applications dans des domaines aussi vastes que variés qui seront, pour leur majorité, présentés dans cette partie et peuvent se résumer sous deux grands axes qui sont la détection THz et les télécommunications THz. L'ensemble des possibilités poussent les recherches dans ce domaine, permettant ainsi la découverte de potentiels nouveaux domaines applicatifs. 1.2.1 La détection térahertz  L'imagerie médicale Le rayonnement THz étant très peu énergétiques, elles ne présentent pas de risque du point de vue de leur utilisation en médecine in-vivo. En effet, contrairement aux rayons X, il n'y a alors plus de notion de dose à respecter. Les vibrations intermoléculaires de certaines biomolécules, de l'ADN, de protéines, de bactéries se situent dans cette gamme fréquentielle. C'est pourquoi l'utilisation de la spectroscopie THz dans le domaine temporel (THz-TDS) permettrait une plus grande connaissance de certains aspects du corps humain [Tonouchi 07] et donc une adaptation de traitements médicaux. Bien que ces ondes ne puissent pas pénétrer l'ensemble du corps humain, pour des causes multiples parmi lesquelles la trop forte absorption par l'eau présente dans notre corps, il semble possible de détecter certains cancers ex-vivo ou même pratiquer des études in-vivo [Taylor 15]. En effet, les tissus cancéreux ayant une plus forte concentration en eau que les tissus sains, ils absorbent plus fortement les ondes THz [Son 13]. Certaines analyses dans cette plage fréquentielle permettraient le diagnostic d'autres maladies comme celle d'Alzheimer. Sur des tranches de tissus cérébraux irradiés dans la gamme THz il est possible de différencier les différents composés du cerveau, voir Figure 1.3 (matière grise, blanche etc.) permettant éventuellement de diagnostiquer la maladie, et peut-être un jour, alors que les techniques d'imagerie s'améliorent, cette analyse pourra être réalisée in-vivo [Yeo 14]. Dû à leur contenance en eau particulière, il serait aussi possible de visualiser des brulures de peau ou les premiers stades de caries présentes dans la dentition. Les propriét de la sclérotique, membrane blanche autour de l'oeil, peuvent être étudiées par une analyse TDS dépendant de la polarisation de l'onde [Shin 16]. Enfin, comme l'absorbance THz de l'eau sous forme de glace est plus faible que celle de l'eau liquide, l'imagerie d'échantillons gelés peut amener de nouvelles informations [Hoshina 09]. Figure 1.3 : (a) Micrographie du tissu cérébral avec la matière grise et blanche. (b) Image à 1,5 THz avec les frontières de la matière grise. (c) Spectre THz par réflexion de la matière grise et de la matière blanche pour deux emplacements différents dans l'échantillon (A et B dans l'image (b)). D'après [Yeo 14]. 6 N. Monnier Chapitre 1 : Introduction  Le test industriel Au vu de leurs longueurs d'onde relativement faibles comparées aux ondes millimétriques, les ondes THz permettent la visualisation de structures internes dans les matériaux utilisés dans les procédés industriels (voir Figure 1.4). Ces méthodes de test industriel non destructif (NDT ou NDE en anglais) sont très intéressantes dans la visualisation d'éventuels dommages causés à une structure, par exemple par la chaleur [Redo-Sanchez 06] [Destic 16]. Dans l'industrie du semi-conducteur ces ondes peuvent aussi avoir un rôle à jouer puisqu'elles permettent une évaluation des propriétés du wafer [Tonouchi 07]. De par leur faible énergie, elles peuvent être utilisées dans des domaines tels que l'agriculture ou l'alimentaire pour, par exemple, évaluer des contenances en eau [Born 14]. Figure 1.4 : (a) Image optique de la lame d'un couteau en céramique, (b) Image à 300 GHz, obtenue par balayage de trame, de cette même lame. La structure interne de la céramique devient alors visible. D'après [Schuster 11].  La sécurité C'est l'un des domaines qui crée le plus d'attente quant aux développements de l'imagerie des ondes THz tant les applications sont multiples. Elles peuvent être divisées en trois sous-domaines principaux. La première serait la scanographie de personnes, aux aéroports par exemple, afin de détecter des objets dangereux camouflés, donnant accès à la forme et à l'emplacement comparé aux portails magnétiques classiques. En effet, de par la réflexion complète sur les métaux, ces derniers sont facilement discernables même lorsque dissimulés sous des vêtements, comme le montre la Figure 1.5. Suite à un traitement d'image il est possible de détecter des armes en céramique tout comme celles en métal. Figure 1.5 : Un homme cachant un couteau dans un journal. Gauche : photographie optique, droite : image micro-onde avec freqTHz < 100 GHz. D'après QinetiQ [Coutaz 07]. N. Monnier 7 Chapitre 1 : Introduction Le second domaine lié à la sécurité concernerait la détection de substances interdites : drogues et explosifs tout particulièrement. Ces substances ont une réponse notable aux fréquences THz en transmission ou en réflexion : de par l'amplitude et l'emplacement fréquentiel de leurs raies d'absorption, il est possible de les discerner en plus de les détecter [Pohl 14]. La technique fréquemment employée étant celle de l'analyse du composé majoritaire (voir Figure 1.6). Figure 1.6 : (a) Imagerie multi-spectrale de substituts d'explosifs aux fréquences des raies des sources laser, (b) détermination des composants par « l'analyse du composant majoritaire » (PCA). D'après [Bauer 14]. Enfin, le dernier domaine d'application serait la détection de gaz de type mortels ou autres explosifs pour une utilisation militaire sur le champ de bataille ou en prévention d'attaques 1.2.2 Télécommunications térahertz Au cours des dernières années les débits de transferts de données en télécommunications ont suivi une augmentation fulgurante, la logique va donc dans le sens de l'exploitation des fréquences THz en tant que fréquence porteuse afin d'augmenter encore les vitesses de transfert et la bande passante, ceci permettrait la transmission de contenus lourds sans pour autant avoir à encoder puis à décoder l'information comme par exemple avec de la vidéo en résolution haute-définition. En effet les débits actuels déjà atteints, 32 Gbit/s sur 25m à 385 GHz [Latzel 16], permettent déjà d'imaginer les applications de télécommunications du futur. Cependant, et comme abordé précédemment, l'atmosphère terrestre absorbe une très grande partie des ondes THz due à sa forte concentration en vapeur d'eau. Cette atténuation peut être vue comme un inconvénient d'une part mais aussi comme un avantage d'autre part. En effet, cette faible proximité entre émetteur et récepteur THz permettrait ainsi une communication « plus sécurisée » : dans le cas d'une utilisation pour la transmission de données domestique, tel le Wifi par exemple, les connexions ne seraient possibles que dans un espace restreint (salle, chambre etc.) en fonction de la puissance de l'émetteur. De plus, là où cette limitation de distance entre moins en considération, hors de notre atmosphère, cela pourrait permettre une augmentation des débits de télécommunication entre satellites. Chapitre 1 : Introduction 1.3 Sources et détecteurs térahertz Afin de développer la recherche et l'ingénierie et donc de rendre exploitable les ondes THz, des sources ainsi que des détecteurs fonctionnant dans ces gammes de fréquences ont été développés. L'ensemble étant essentiel dans l'étude de l'onde ellemême, mais aussi dans son interaction avec les objets ou la matière à étudier. La partie ci-dessous a pour but de résumer les principaux types de sources et détecteurs actuellement utilisés. 1.3.1 Sources Dans le domaine THz, il existe principalement deux types de sources : les sources pulsées et les sources continues. Chacune d'entre elles n'apportant pas les même contraintes et flexibilités d'utilisation. Les première émettent une impulsion THz pouvant avoir un spectre très large et sont donc généralement plutôt large bande. Quant aux secondes, elles émettent généralement une seule fréquence en continue, elles sont donc bande étroite. Un tour d'horizon des deux domaines est présenté dans cette partie. 1.3.1.1 Sources pulsées Les sources pulsées sont généralement basées sur des lasers femtosecondes envoyant des impulsions optiques sur des composants tels qu'un cristal non-linéaire ou une antenne photoconductrice. Les matériaux de ces cristaux ou antennes sont minutieusement choisis en fonction de leurs propriétés physiques (concentration, vitesse des porteurs libres etc.). Suite à l'éclairement de l'impulsion optique, le cristal ou l'antenne réémet un signal THz souvent de très large bande (1 à 3 THz) [Schuster 11] comme présenté à la Figure 1.7. Ces sources sont souvent très encombrantes, du point de vue du volume occupé principalement pour le laser femtoseconde. Figure 1.7 : Principe de génération d'une impulsion THz à partir d'un laser fem secondes proche-infrarouge et d'un photoconducteur en arséniure de gallium (GaAs). D'après [Baker 05]. Chapitre 1 : Introduction D'autres possibilités de créer des impulsions THz existent comme l'utilisation de lasers composé d'un cristal de germanium dopé « p » soumis un champ électrique à des températures cryogéniques. 1.3.1.2 Sources continues Les sources THz continues sont quant à elle de types très variés. On y retrouve les sources basées sur les corps noirs, les oscillateurs à ondes inverses, les lasers à gaz émettant dans l'infrarouge lointain, les lasers à cascade quantique, les sources à photo-mélange et bien d'autres [Preu 11], [Feng 12], [Shumyatsky 11], [Schuster 11]. Le problème étant que toutes les sources citées ci-dessus sont des sources à mise en oeuvre et/ou à encombrement conséquent. Il existe cependant deux autres types de sources plus adaptées à l'imagerie, qui est le domaine d'intérêt dans notre cas. Ces sources sont plus à même de permettre le suivi dans le temps de l'onde (absorption, réflexion etc.) en plus d'être plus adapté en termes de dimension. Ces sources sont des sources électroniques basées sur les oscillateurs électroniques à haute fréquence ou sur des faibles fréquences alimentant des chaines multiplicatrices. Les sources basées sur les chaines multiplicatrices permettent d'atteindre les fréquences de la bande THz à partir de fréquences moins élevées par le moyen d'un ou plusieurs niveaux de multiplication. L'inconvénient étant que cette multiplication cause de nombreuses pertes. Ces sources utilisent souvent comme composant principal les diodes Schottky car les performances de ces dernières sont souvent reconnues comme les meilleures en technologies intégrés, de par leur simple modèle métal-oxyde. Cependant, bien d'autres sources sont basées sur d'autres types de diodes, dépendant de leur résistance différentielle négative (NDR) : les diodes Gunn basées sur les composés semi-conducteurs des familles III-V ; les diodes IMPATT et une de leur variantes, les diodes TUNNETT, ées sur le retard du temps de transit des porteurs de charge par respectivement le claquage par avalanche et le claquage par effet tunnel ; enfin les diodes RDT sont basées sur le concept d'alignement des niveau d'énergie dans un caisson quantique grâce à la tension de polarisation afin de contrôler le courant traversant. L'ensemble de ces diodes permettent de couvrir la bande subTHz et émettent à des puissances inférieures à 20 dBm [Rieh 14]. D'autres technologies comme les transistors bipolaires à hétérojonction SiGe ou encore les technologies BiCMOS sont propices à la génération THz de par leur haute fréquence de coupure f |f, comme présenté à la Figure 1.8. Chapitre 1 : Introduction Figure 1.8 : Graphique présentant les différents technologies reportées pour les sources à base de multiplieurs par leur puissance de sortie vs. leur fréquence de fonctionnement. Les nombres à côté des points dans le graphique représentent le nombre d'étages d'amplification employés. D'après [Rieh 14]. Figure 1.9 : Graphique présentant les différents technologies reportées pour les sources à base d'oscillateurs par leur puissance de sortie vs. leur fréquence de fonctionnement. Les chiffres à côté des points dans le graphique représentent le nombre d'harmoniques de l'oscillateur. D'après [Rieh 14]. 1.3.2 Détecteurs Concernant les détecteurs térahertz, ces derniers peuvent être classés, tout comme les sources, en deux grandes catégories. On retrouve d'une part les détecteurs de types cohérents qui vont permettre un traitement lié à l'amplitude de l'onde THz incidente ainsi qu'à sa phase. D'autre part, on trouve les détecteurs de types directs donnant accès directement à l'amplitude (ou à une fonction de cette dernière) tout en perdant l'information de phase au moment de la réception de l'onde. N . M onnier 1.3.2.1 Détecteurs cohérents Les détecteurs cohérents ont la faculté de permettre de retrouver la fréquence de la source afin d'avoir accès à l'information de phase de l'onde ayant traversée le chemin optique. Parmi ces détecteurs on retrouve donc : Les détecteurs THz hétérodynes. Ces détecteurs permettent une conversion basse de la fréquence THz incidente en une fréquence intermédiaire, grâce à un oscillateur local. L'utilisation de mélangeurs passifs en technologie CMOS au-delà des fréquences de coupure de la technologie considérée (f |f ) permet une conversion directe en bande de base [Siligaris 15]. Cependant, ces systèmes nécessitent une grande puissance de l'oscillateur local dans le but de compenser les pertes liées à la conversion passive par transistor à effet de champs ou par diode Schottky. Ces dispositifs sont actifs à température ambiante. De plus, les systèmes étant réellement complexes, les pixels sont donc de taille conséquente, par exemple 1 mm de pas pixel pour une matrice de 2 × 2 pixels [Guo 16]. Il n'est donc guère possible d'intégrer une matrice de détecteurs hétérodynes afin de faire de l'imagerie en temps réel. Il est néanmoins possible d'obtenir des images avec de bonnes sensibilités et avec l'information de profondeur (par l'intermédiaire de la phase) par balayage de trame, comme le montre les photos sur les Figure 1.10 et Figure 1.11. Figure 1.10 : Image d'une feuille d'arbre en rayonnement visuel et à 278 GHz. Les parties sombres sur l'image THz sont les parties de forte absorption de l'eau, quant aux parties claires se sont les parties où l'absorption d'eau est bien plus faible. D'après [Siligaris 15] Figure 1.11 : Exemple de détection hétérodyne réalisée à 591,4 GHz en réflexion plan à plan. (a) Pièce de 2-cent lituanienne dans le visible. (b) Image de la puissance THz réfléchie. (c) Présente l'information de phase. (d) Profil de profondeur obtenu à partir de l'information de phase selon la ligne bleue tracées sur l'image (c). D'après [Lisauskas 14] 12 N. Monnier Chapitre 1 : Introduction Les détecteurs à échantillonnage électro-optique et commutation photoconductrice. Ces détecteurs sont utilisés pour les études THz dans le domaine temporel à l'aide de cristaux non linéaires et d'antennes photoconductrices. Ils sont le procédé inverse de celui vu précédemment lors du paragraphe sur les sources THz pulsées (Partie 1.3.1.1). Ainsi, ils permettent la détection d'impulsions THz, phase et amplitude, avec des résolutions de l'ordre de la picoseconde [Schuster 11]. Il existe d'autres types de détecteurs basés sur le principe de photo-mélange permettant la détection de rayonnements THz continues, mais nous n'entrerons pas dans les détails ici. 1.3.2.2 Détecteurs directs Les détecteurs THz directs sont appelés ainsi car ils permettent uniquement une lecture de l'amplitude ou de la puissance de l'onde THz incidente et sont généralement moins sensibles que ceux vu précédemment. On retrouve les principaux types de détecteurs suivants [Knap 13] [Schuster 11] [Rieh14] : Les détecteurs bolométriques. Ces détecteurs, fréquemment utilisés dans l'imagerie infrarouge ou X sont basés sur le principe d'échauffement d'un matériau qui, avec le changement de température, voit sa résistance électrique modifiée par un effet thermoélectrique : ce dispositif est appelé thermistance. Cette résistance est ensuite lue électriquement afin d'avoir une image de la puissance de l'onde absorbée. Les matériaux absorbants utilisés sont fréquemment l'oxyde de vanadium ou le silicium amorphe. Il faut noter que les bolomètres ont cependant une réponse relativement lente aux variations de l'onde de par leur constante thermique. De plus, ils doivent bien souvent être utilisés à des températures cryogéniques afin d'optimiser leur sensibilité, ce qui les rend particulièrement encombrants. Il existe cependant des bolomètres fonctionnant à température ambiante ou encore des micro-bolomètres [Perenzoni 12], [Simoens 14], pour lesquels d'excellentes performances ont été atteintes en imagerie THz, comme le montre la Figure 1.12. Figure 1.12 : (a) Image optique visible d'un set d'objet en métal. (b) Image THz du set d'objets métalliques scanné sur le tronc d'un humain. Le scan complet est obtenu en 10s. grâce à la matrice μbolométrique en format QVGA. D'après [Simoens 14b]. Les cellules Golay. Ces détecteurs opto-acoustiques sont basés sur le principe de la mesure de dilatation d'un gaz dans une chambre hermétique chauffée par l'intermédiaire d'une plaque métallique recevant le flux THz. Ces détecteurs sont très sensibles et opèrent sur une large bande (jusqu'à 30 THz) mais ont une réponse lente, due aux constantes thermiques, sont encombrants et lourds de mise en oeuvre [Knap 13] [Schuster 11]. Chapitre 1 : Introduction Les détecteurs pyroélectriques. Ces détecteurs sont basés sur des cristaux pyroélectriques ayant une polarisation électrique variante suivant la température. Pour que l'effet du cristal soit présent, l'onde THz doit être modulée. Cette modulation ne peut cependant rarement excéder 10 kHz. Ils disposent d'une large gamme de fonctionnement, jusqu'à 30 THz et d'une très bonne sensibilité, ayant un NEP de l'ordre de la centaine de pW/√Hz. Comme tous les composants utilisant des constantes thermiques, ils ont une réponse lente aux variations du flux THz [Knap 13] [Schuster 11]. Les détecteurs à base de diodes. Ces détecteurs directs utilisent principalement les diodes à barrière Schottky (SBD). Les non-linéarités apportées par le composant permettent un mélange, pour la détection hétérodyne, ou une détection directe de l'onde THz. Ces détecteurs disposent de bandes de fonctionnement pouvant aller jusqu'à 2-3 THz, des responsivités entre la centaine et plusieurs kilovolt par watt et des NEP de l'ordre de la dizaine de pW/√Hz [Knap 13] [Rieh 14]. Les détecteurs par transistors à effet de champ (FET). Les détecteurs basés sur les transistors à effet de champs sont arrivés après la naissance de la théorie des ondes plasma dans le canal expos par Dyakonov et Shur [Dyakonov 93] [Dyakonov 96] qui sera exposée plus en détails dans le Chapitre 2. Cette théorie vérifiée dès la fin des années 90 et début des années 2000 par l'expérience, expose que le transistor travaillant bien au-delà de ses fréquences f |f et correctement excité, permet la détection de flux THz par l'apparition d'une tension DC proportionnelle au carré de l'amplitude de l'onde incidente. Cette détection fonctionne sous différents régimes. Un des avantages majeur de cette solution est qu'elle est compatible avec les circuits de lecture et fonctions de traitement intégrées en technologie CMOS. L'ensemble, intégré avec l'antenne couplant le signal THz au transistor de redressement, permet le développement de matrices de pixels et donc de l'imagerie matricielle dans le plan focal en temps réel. 1.4 Objectifs de cette thèse Cette thèse s'appuie sur un circuit imageur THz précédent de 31 × 31 pixels réalisé au sein du laboratoire d'accueil, le laboratoire L3i du CEA Leti. Cet imageur équipé d'une antenne de type papillon (bow-tie) connectée à un transistor MOS permettant la détection THz est déjà muni d'une chaine de traitement du signal à hautes performances qui est incluse dans chaque pixel. Cette thèse a donc pour but le développement d'un meilleur couplage entre l'onde THz incidente et l'outil de détection qu'est le MOS de redressement afin d'optimiser le premier étage de la chaine de traitement. Cette optimisation du couplage entre l'onde THz et le transistor par l'intermédiaire de l'antenne était antérieurement quelque peu négligée. Aborder cette thématique permet donc d'envisager un fort gain en termes de performances sur l'imageur global. L'ensemble doit être entièrement compatible avec une intégration monolithique en technologie CMOS standard à faible coût. Donc, aucune hybridation ou développement en technologie au-dessus du circuit intégrés, beaucoup plus onéreuses que la solution retenue, n'est envisagée. Le capteur en question doit être matriciel afin de développer l'acquisition en temps réel et donc un suivi instantané en 14 N. Monnier Chapitre 1 : Introduction imagerie THz, De plus, l'ensemble doit fonctionner à température ambiante afin de réduire au maximum l'encombrement et donc d'en développer l'exploitabilité. 1.5 Organisation de cette thèse Cette thèse est présentée en 5 chapitres qui suivent l'introduction. Elle est divisée comme suit : Chapitre 2 : Présentation de la détection THz directe par transistor à effet de champs. Cette présentation a pour but de donner une couverture de la naissance de la théorie des ondes plasma aux dernières avancées et imageurs du domaine. Seront abordées, les différentes théories décrivant la détections THz, les facteurs de mérites et leurs définitions servant à caractériser les imageur THz à base de FET et enfin les différentes techniques d'acquisition d'image. Chapitre 3 : Ce chapitre s'intéresse au choix du type de MOS pour la détection du signal THz. Les influences des différents paramètres ainsi que les possibilités offertes par une technologie intégrée standard. Les contraintes liées à l'intégration pour la détection des ondes THz seront aussi abordées. Chapitre 4 : Dans cette partie nous nous intéresseront aux simulations et intégration des antennes servant à capter le signal THz incident. Le choix de la géométrie, l'influence et les contraintes de l'intégration ainsi que la conception des antennes seront développées. Enfin une des solutions mise en oeuvre dans le but d'optimiser les performances des antennes THz intégrées en technologie CMOS sera abordée. Chapitre 5 : Dans ce chapitre seront présentés dans un premier temps le contenu du pixel THz conçu complet et une présentation du circuit THz de 15 × 15 pixels envoyé en fonderie. Dans un second temps, une méthodologie de mesure et de caractérisation sera présentée et appliquée à la caractérisation d'un imageur THz. Chapitre 6 : Dans cette partie une conclusion sur les développements et résultats sera apportée ainsi qu'une ouverture sur les perspectives et suites possible de l'étude menée durant cette thèse. Chapitre 2 : Détection THz par transistor à effet de champs 2 Chapitre 2 Détection THz par transistor à effet de champs Ce second chapitre a pour but de présenter en détails les ressorts de la détection des ondes THz par les transistors à effets de champs (abrégés FET en langue anglaise). Dans un premier temps seront présentées les théories qui ont donné naissance à l'étude de la détectabilité de ces ondes par les transistors en question. S'en suivront une présentation et explication des facteurs de mérites de ces détecteurs. Enfin les différentes méthodes d'acquisition d'image appliquée aux détecteurs à transistors FET seront abordées. 2.1 La théorie des ondes plasma dans le canal C'est cette théorie, développée par Michael Dyakonov et Michael Shur durant les années 90 [Dyakonov 93] [Dyakonov 96], qui a donné naissance à l'étude, d'abord théorique puis pratique, de la détectabilité des ondes THz par les transistors à effet de champs. Cette théorie se base sur la description de la densité des porteurs de charges négatives dans le canal des FET comme d'un plasma d'électrons régit par les lois de l'écoulement de l'eau en milieu peu profond. D'où le nom alors communément donné de « théorie des ondes plasma » pour la description du phénomène. MM. Dyakonov et Shur ont avancé la théorie selon laquelle les électrons du canal d'un FET peuvent donc être vus comme un gaz d'électrons et peuvent être analysés selon les lois et les équations de l'hydrodynamique de milieu aqueux et peu profonds. Les ondes plasmiques électroniques peuvent se déplacer à des vitesses proches de cm⁄s ce qui est bien plus élevé que la vitesse de dérive d'un électron seul au sein du silicium. Cette propriété permet donc un fonctionnement du transistor bien audessus des fréquences f | f. Cette théorie est basée sur trois équations fondamentales, qui sont :  La dépendance entre la densité surfacique de porteurs de charges (n ) avec la tension locale entre la grille et la source du FET : V x −V − (2.1) n =C, e avec : C : La capacité de grille surfacique, en [F]. x : La distance depuis la source (lieu de création des oscillations), en [m]. V : La tension de seuil du transistor, en [V]. e : La charge de l'électron en valeur absolue avec q = −, × − Chapitre 2 : Détection THz par transistor à effet de champs  L'équation hydrodynamique du mouvement d'Euler ∂v x, t ∂v x, t e ∂U x, t v x, t + v x, t + + =, ∂t m ∂x ∂x τ avec : ∂ ∂, : Le champ électrique longitudinal le long du canal (U x, t = V (2.2) − x, t − V ), en [V/m]. v x, t : La vitesse locale de l'électron, en [m/s]. m : La masse de l'électron (m =, × − kg). τ : Le temps entre deux collisions de l'électron avec des impuretés ou des phonons ou temps de relaxation dynamique, en [s].  L'équation de continuité ∂U x, t ∂ U x, t × v x, t (2.3) + =. ∂t ∂x Le détail du développement de ces équations permettant d'expliquer, grâce à la théorie des ondes plasma, la réponse du FET aux excitations THz est donnée en détails dans les références [Dyakonov 96], [Knap 02a], [Knap 02b] et [Knap 09]. Le but ici n'est pas de redémontrer ces dernières. Au terme de cette démonstration, il est montré que la tension U entre la source est le drain du FET est donnée par l'équation : ∆U = U V ∙ f(ωτ, sτ⁄L, avec : U : L'amplitude de la tension induite par l'onde THz incidente : U En [V]. V : L'excursion en tension DC entre la grille est la source, en [V]. ω : La pulsation THz en [rad/s]. τ : Le temps entre deux collisions des électrons, avec τ = m ⁄e, en [s] : La mobilité des porteurs dans le canal. Pour un Si-MOSFET : ≈ (2.4) = U cos ωt. s : La vitesse de déplacement des ondes plasma, avec s = √eU⁄m, en [m/s] L : La longue ur du transistor, en [m]. cm /Vs . Figure 2.1 : Schéma de détection THz par un transistor MOS. Vgs : polarisation de la grille du transistor, Ua : amplitude de la tension induite par l'onde THz incidente, U : tension DC induite par la rectification du MOS 18 N. Monnier Chapitre 2 : Détection THz par transistor à effet de champs La fonction f(ωτ, sτ⁄L donne, suivant les valeurs de ses paramètres, des modes de détection différents [Dyakonov 96] [Knap 09] [Schuster 11]. Il est fréquemment posé :  Q = ωτ, le facteur de qualité déterminant le mode du régime de fonctionnement haute ou basse fréquence.  C = sτ⁄L, une constante déterminant si le transistor est considéré comme un dispositif à canal court ou à canal long. Il est donc possible d'avoir 4 régimes de détection décrits dans les Tableau 2.1 et Tableau 2.2. Ces différents régimes sont déterminés par la fréquence des ondes THz, la mobilité des porteurs dans le canal et la longueur du canal. Les deux premiers paramètres interviennent sur la rapidité de déplacement des porteurs dans le canal et déterminent le régime appelé haute ou basse fréquence. La longueur du transistor détermine si un amortissement ou au contraire une résonnance des ondes THz a lieu dans le canal. Dans le cas du régime à hautes fréquences Q = ωτ, décrit dans le Tableau 2.1, la longueur L va donc déterminer si les ondes THz sont amorties ou entrent en résonnance sur la longueur totale du canal. = ⁄ > Canal court = ⁄ < Canal long Hautes fréquences : = Détection résonante Le canal du FET agit comme une cavité résonante pour les ondes plasma qui forment alors une onde stationnaire Détection large bande avec un bon rendement Les ondes plasma excitées à la source du FET sont amorties avant d'atteindre le drain Tableau 2.1 : Régimes de fonctionnement à haute fréquence (ou haute mobilité) de la rectification THz par FET en fonction de la longueur du canal. Dans le cas du régime de fonctionnement basses fréquences ou avec une mobilité faible dans le canal, on a alors Q = ωτ. Comme décrit dans le Tableau 2.2, l'amortissement est tellement élevé que les ondes plasma aux fréquences THz créées à la source disparaissent bien avant d'atteindre le drain : elles sont alors sur-amorties à l'instar des oscillations dans un circuit RC. La condition de longueur de canal change alors : il appar ait dans ce cas une longueur critique , not ée l , de disparition des oscillations. Cette longueur est définie par : l = s√ τ⁄ω = √ U⁄ ω. Basses fréquences : = (2.5) Détection large bande avec un mauvais rendement ≤ Canal court Canal long L'excitation AC est alors presque uniforme dans le canal. Une faible tension DC est observable entre la source et le drain mais de valeur très faible comparée aux cas. (On est alors dans le cas quasistatique de la théorie du mélange résistif abordé partie 2.2.1) Détection large bande avec un relativement bon rendement L'excitation AC s'affaiblie en quelques et la tension DC (UDC(x)) augmente exponentiellement avec la distance x de la source Tableau 2.2 : Régimes de fonctionnement basse fréquence (ou faible mobilité) de la rectification THz par FET en fonction de la longueur du canal par rapport à la longueur l c.
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La cartographie du SI se présente comme suit : Activité d'export Propriétairedirigeant Magasin (vente Comptabilité nationale) Production Communication orale, informelle, ou via Whats App, avec transmission manuelle des données Communication formelle à travers un protocole d'internet, transmission automatique des données Déconnexion entre les tâches Schéma 29 – Cartographie société « B » - Source Jeanne KASPARD 168 1.3. Entreprise haute couture « C » L'entreprise « C », est une institution créée en 1980. Son siège social est à Tripoli (deuxième ville du Liban) et n'a pas de filiales ni au Liban ni à l'étranger. Son effectif est constitué de 30 employés. Elle est dirigée par un directeur nommé par le conseil de famille et qui est le fils du fondateur. C'est une entreprise de « Haute couture ». Elle fabrique sur commandes et vend sur le marché intérieur et sur le marché extérieur des robes de soirée, de mariage et des robes de grandes occasions pour les petites filles. Le directeur est lui-même responsable de la gestion interne ainsi que de l'activité d'export. Les décisions stratégiques relevant surtout de la gestion de l'activité d'export et des modes de paiement, ainsi que la possibilité d'emprunter et d'investir, sont précisées dans le conseil de famille et communiquées au directeur. L'entreprise comprend essentiellement trois départements, avec des directeurs pour chaque département. Le premier est le département commercial, le deuxième est le département de production et le troisième de comptabilité. Le directeur commercial gère les ventes nationales, mais pas les ventes extérieures qui relèvent du pouvoir du directeur général de l'entreprise. Toutes les décisions sont prises par le directeur général et il existe une étroite coordination entre le directeur de production et le directeur commercial. Les logiciels utilisés pour la gestion sont des systèmes fonctionnels « sur mesure » relatifs à la comptabilité, et à la gestion des stocks incorporé dans le département commercial). Il n'y a pas de responsable SI dans l'entreprise, tous les logiciels sont « commandés » auprès d'un bureau extérieur. Il existe un logiciel fait « sur mesure » pour l'activité d'export dans lequel figure les noms des clients, le montant des commandes, le pays importateur et la fréquence des commandes. Ce logiciel n'est pas connecté automatiquement à la comptabilité, ce qui cause une duplication des données. Les données d'export sont saisies manuellement à partir des données comptables. La communication organisationnelle (entre directeurs et entre les directeurs et leurs subordonnés) se fait soit par un contact direct de face à face soit en utilisant Whats App, tandis que la communication inter-organisationnelle se fait majoritairement par mail, Skype et, si nécessaire, par le déplacement du directeur de l'entreprise. Elle exporte tous les ans vers les pays arabes selon des commandes passées dans les grands salons de mode et les foires ou à travers les connaissances du dirigeant. La majorité des exportations se fait vers les pays arabes et l'Australie. Elle n'appartient pas à un réseau 169 « formel » (association, syndicat). Les exportations ont débuté pendant l'année 2 000. Le mode d'exportation est traditionnel. Actuellement, son chiffre d'affaires à l'export varie entre 28% et 30% de son chiffre d'affaires global. Le dirigeant tient à maintenir sa part du marché à l'extérieur. La cartographie du SI est schématisée comme suit : Activité d'export Propriétairedirigeant Directeur de Comptabilité Communication orale, informelle, ou via Whats App, avec transmission manuelle des données Communication formelle à travers un protocole d'internet, transmission automatique des données, logiciel d'export « sur mesure » Déconnexion entre les départements Schéma 30 – Cartographie société « C » - Source Jeanne KASPARD 1.4. Entreprise agro-alimentaire « D » L'entreprise « D », est une société de personnes créée en 2 000. Son siège social est à Zahlé. Cette PME n'a pas de filiales ni au Liban ni à l'étranger. Son effectif est constitué de 40 employés. Elle est dirigée par le propriétaire-dirigeant (majoritaire dans le capital de la société). C'est une entreprise de produits laitiers. Elle a une très large gamme de produits laitiers (produits full fat, zéro fat, produits sans lactose) vendus sur le marché intérieur et sur le marché . L'entreprise comprend essentiellement quatre départements : commercial, financier, ressources humaines et production. Il n'y a pas de département de SI, ni de responsable SI. Chaque 170 département a un logiciel propre avec une double connexion informatique : une entre le département financier et le département commercial, et l'autre entre le département commercial et le département de production. Ces logiciels favorisant les connexions sont commandés à un bureau informatique. Le bureau informatique se porte garant des logiciels fournis. Les données de l'export sont transmises manuellement au département commercial pour être commandées et au département financier pour la facturation. Le SI de l'entreprise « D » se schématise comme suit : Activité d'export Département financier Département commercial Propriétairedirigeant Département production Département des ressources humaines Communication orale , informelle , ou via Whats app , avec transmission manuelle des données Communication formelle à travers un protocole d'internet, transmission automatique des données. Schéma 31 – Cartographie société « D » - Source Jeanne KASPARD 1.5. Entreprise agro-alimentaire « E » L'entreprise « E » est une société à responsabilité limitée, créée en 1881. Son siège social est à Tripoli, elle a trois filiales au Liban et aucune filiale à l'étranger. Son effectif est constitué de presque 200 employés. Elle a une grande renommée dans le domaine du « catering » et n'a jamais arrêté de produire, même pendant la guerre. C'est une entreprise travaillant dans la pâtisserie, et récemment dans la restauration. Elle a cinq départements : ressources humaines, comptabilité, approvisionnement, production, et Marketing et vente. Chaque département a un logiciel propre et une connexion existe entre les logiciels d'approvisionnement et de production d'une part, et entre la comptabilité, l'approvisionnement et les ventes d'autre part. Les logiciels « connecteurs » sont commandés à un bureau externe de SI. Les décisions sont centralisées autour de la personne du directeur général élu par les héritiers des fondateurs. Cette entreprise possède une page sur internet exposant ses produits et permettant aux clients étrangers de passer et de payer les commandes. Elle a un double mode d'export : un traditionnel et un nouveau « le E-commerce ». Le logiciel gérant le E-commerce est en connexion avec le département Marketing et vente qui est lui-même lié à la comptabilité et l'approvisionnement. La date de livraison varie entre deux jours et une semaine selon le pays vers lequel l'entreprise exporte. Les principaux clients se trouvent en Europe, Australie, et pays arabes. Depuis quelques années, les produits sont même demandés aux Etats-Unis. Les exportations ont commencé d'une façon irrégulière dans les années 80. Actuellement, son chiffre d'affaires à l'export est aux alentours de 40% de son chiffre 'affaires global. Le dirigeant tient à augmenter sa part du marché à l'extérieur. C'est la raison principale qui l'a poussé à investir dans le SI. De ce fait, l'entreprise possède un responsable marketing qui a une équipe et a pour rôle principal de capter les opportunités d'export, de les étudier et de présenter le dossier au directeur pour que ce dernier mobilise les ressources nécessaires afin que les clients potentiels qui se trouvent à l'étranger soient des clients réels et durables. Les directeurs, présidés par le directeur général, se réunissent hebdomadairement pour mettre en place un calendrier hebdomadaire (projets à réaliser par semaine, commandes extérieures, etc). Un compte rendu, signé par tous, est archivé et une copie est envoyée aux directeurs. Pour la gestion opérationnelle, la communication téléphonique suivant un réseau interne reste le moyen le plus rapide. L'intranet est aussi utilisé. Les directeurs communiquent avec leurs employés d'une façon directe et informelle. La communication avec les clients étrangers (passation des commandes, négociation du contrat etc.) se fait par l'internet. La cartographie du SI se présente comme suit : Proprietairedirigeant Production Marketing et vente Activité d'export Comptabilité et Finance Communication orale, informelle, ou via Whats app, avec transmission manuelle des données Communication formelle à travers un protocole d'internet, ou d'intranet, transmission automatique des données à travers des logiciels de connexion Schéma 32 – Cartographie société « E » - Source Jeanne KASPARD Section 2. La présentation des résultats par cas Cette section a pour but de présenter les résultats de chaque entreprise en se basant sur le dictionnaire des thèmes précisé dans le chapitre précédent. Les résultats comprennent nécessairement le type de SI, simple ou développé comme défini précédemment, dans chaque entreprise et cela pour répondre au « comment ». Les raisons des décisions des dirigeants relatives au type de SI sont exposées pour chaque entreprise, ainsi que les facteurs affectant le SI. L'analyse des résultats dans les cinq entreprises nous a conduits à distinguer le SI organisationnel du SI inter-organisationnel de l'activité d'export. 2.1. Entreprise de bijouterie « A » Nous allons présenter dans un premier temps les critères de classification en SI simple et SI développé pour les deux niveaux organisationnel et inter-organisationnel de l'activité d'export pour pouvoir conclure sur le du SI dans cette PME. Ensuite dans un deuxième temps, nous abordons les raisons de décision par le dirigeant de l'entreprise « A » d'avoir un SI simple pour les deux niveaux et enfin les facteurs, selon le dirigeant, qui affectent le SI de son entreprise. 2.1.1. Communication Coordination Pas de responsable d'export. Pas de responsable SI. Communication (ordinateur : internet) Tableau 16 – Types du SI des niveaux organisationnels et inter-organisationnels de l'entreprise « A » - Source Jeanne KASPARD Nous pouvons constater que l'entreprise « A » possède un SI simple. Le caractère simple du SI organisationnel est justifié par la communication directe et orale ainsi que la transmission manuelle des données et le stockage par papiers. Le directeur de cette entreprise considère que « le contact direct est le moyen le plus efficace et le plus rapide pour passer les instructions ou pour résoudre les problèmes ». Il explique de même que « le logiciel existant est un logiciel de base permettant l'inscription des opérations courantes dans la comptabilité, je n'ai pas un logiciel de traitement des données qu'elles soient comptables, financières ou statistiques ». Mais il exige que ses « employés soient tous diplômés ». Ainsi, les employés sont spécialistes dans leur domaine d'activité opérationnelle : le comptable est diplômé et a suivi une formation pour l'utilisation du logiciel de comptabilité, le designer des bijoux et le responsable de la réalisation sont spécialistes, le responsable du magasin a suivi des formations en marketing, mais il n'y a pas de responsable SI. Le SI de l'activité d'export ne peut être considéré comme « développé » malgré l'utilisation de l'ordinateur et de l'internet, puisque leur rôle se limite à la communication, à la coordination et à la transmission des données avec les clients étrangers. Selon le directeur, « une fois que les contrats sont signés lors de mes déplacements, je rentre en contact avec mes clients étrangers via le mail ». Il n'y a pas de logiciels spécifiques pour gérer l'export ni de responsable spécialiste, le dirigeant stipule : « je suis le responsable de l'activité d'export, et je ne tiens pas à recruter quelqu'un pour cette activité ». En conclusion le SI de l'entreprise « A » est simple vu les fonctions du SI et les logiciels de calcul utilisés. Les spécificités du SI de cette entreprise se résument par la spécialisation des employés dans leur fonction opérationnelle, et l'utilisation de l'internet comme moyen de communication et de transmission de données entre le directeur et les clients à l'étranger. 2.1.2. Raisons de décision du type SI de l'activité d'export Le directeur de cette entreprise avance : « je tiens à conserver ma part sur le marché étranger, et pour le faire je compte sur mon savoir faire et mon expérience dans le domaine ». Il considère « l'activité d'export comme une activité secondaire ou une marge de sécurité ». Il ajoute : « mon objectif en matière d'export est de conserver ma part à l'étranger, et c'est un grand risque que je dois gérer personnellement ». Il stipule qu'il est au « centre du SI de l'entreprise », et que son SI lui permet de « conserver le pourcentage de l'export », il conclut qu'il n'a « pas besoin de faire des investissements en SI ou recruter un responsable en SI pour conserv la part du chiffre d'affaires à l'extérieur ». Il ajoute : « pour l'export, j'ai un mode traditionnel de vente directe, et je n'ai pas besoin de site internet pour un tel mode ». Il considère que ce mode d'export est le « plus ancien et le plus sécurisé » pour les clients et pour l'entreprise. En fait l'entreprise a « ses partenaires dans la livraison, l'assurance, l'encaissement, et les affaires juridiques depuis plus de 10 ans ». Pour l'entreprise A, les raisons de décision du SI simple par le dirigeant tiennent à la stratégie de conservation de la part de l'entreprise sur le marché étranger, à la gouvernance du SI par le dirigeant (gestion des risques, performance et alignement entre outils SI et objectif à l'export), et enfin au mode traditionnel de vente direct à l'export. 2.1.3. Facteurs affectant le SI L'entretien avec le directeur de cette PME révèle que ce dernier considère que « ce n'est pas son diplôme en gestion » qui l'a introduit sur le marché étranger mais son « son intelligence, son savoir faire et l'expérience cumulée dans le domaine d'export ». Selon lui, « l'activité d'export dans le domaine de la bijouterie dépend fortement du réseau informel des connaissances » qu'il possède surtout dans les pays arabes. De ce fait, il avance « qu'il n'y a pas une nécessité de mobiliser des ressources pour avoir un SI développé à travers des logiciels d'export, d'analyse et de traitement des données, ou de recruter un spécialiste en export ». Sa proximité à la fois sur le plan interne avec les employés et sur le plan externe avec les clients à l'étranger, est pour lui « un gage de succès». Il avance : « je suis bien satisfait de mon SI, puisque je décide de tout, et je peux contrôler, et résoudre rapidement les conflits à la fois interne et externe ». Il mentionne aussi que « l'entreprise réalise des profits ridicules qui sont mis dans un compte de réserves car la conjoncture économique, nationale et internationale, est mauvaise ». Il ajoute que le ratio d'endettement n'est pas élevé, mais il préfère « s'éloigner des dettes à cause des intérêts trop élevés ». Il assure que du fait de cette absence de bénéfice et de cette volonté de ne pas s'endetter, il n'est « pas prêt d'entamer des travaux d'amélioration du SI d'export que ce soit en logiciels ou en compétences avec les sommes épargnées » et qu'il est « satisfait » du résultat de son travail. Il ajoute qu' « il n'existe pas au Liban une bonne connexion internet sur laquelle il est possible de s'appuyer pour fonder un commerce ». Pour l'entreprise A, les facteurs affectant le SI se rapportent à : - la compétence du dirigeant à l'export - la capacité du dirigeant à communiquer, et résoudre les problèmes internes et les problèmes de l'activité d'export - des ressources financières limitées - une mauvaise connexion internet - Mauvaise infrastructure numérique dans le pays Conclusion : Les réponses concernant les questions de recherche peuvent être formulées comme suit : Type : La PME exportatrice "A" possède un SI simple et arrive à exporter ses produits avec un chiffre d'affaires à l'extérieur proche de 25%. Pourtant la littérature montre que l'activité d'export nécessite un SI développé. Raisons : Stratégie d'export qui est la conservation de la part de l'entreprise sur le marché ; gestion du risque via le SI ; mode d'export qui est direct Facteurs influençant le SI : la compétence du dirigeant à l'export, les relations que le dirigeant entretient avec ses employés et ses clients à l'étranger, les ressources financières limitées et la mauvaise connexion internet au Liban. 2.2. Entreprise haute couture « B » Le type de SI dans l'entreprise « B », ainsi que les raisons expliquant le type de SI et les facteurs affectant le SI sont présentés dans cette partie. 2.2.1. Type SI Le tableau de classification en SI simple et SI développé de l'entreprise « B » se présente comme suit : Critères de classification SI simple SI organisationnel SI développé SI inter-organisationnel (activité d'export) SI simple SI développé 1- Fonctions du SI - Communication avec les acteurs Contact direct, oral, et via Whats App - - Manuels via le dirigeant Disques durs, CD Rom Impression de tous les documents et stockage par archives papiers Archives papiers Stockage des informations systèmes opérationnels et fonctionnels, avec déconnexion entre les départements 2- Finalités SI Coordination 3- Main d'oeuvre 4- Rôle des TIC Contact direct nécessitant le déplacement du directeur pour la conclusion des contrats Direct, via un protocole d'internet : le mail Au dirigeant, transmission automatique à travers l'ordinateur (commandes, reçus) Pas de logiciels. Coordination Spécialisée Pas de responsable d'export. Pas de responsable SI. Communication (ordinateur : internet) et stockage des informations Communication (par téléphone ou Whats App) Tableau 17– Types du SI des niveaux organisationnels et inter-organisationnels de l'entreprise « B » - Source Jeanne KASPARD 180 Le SI organisationnel est simple vu : - La communication directe entre le directeur et les employés. En effet le directeur stipule « je suis toujours présent dans l'entreprise, et je prends contact avec mes employés d'une façon spontanée et informelle ». - La transmission manuelle des données d'un département à l'autre via le dirigeant. Le dirigeant explique « tous les dossiers, toutes les factures d'achat, de vente sont signés par moi, et c'est moi qui les fait passer d'un département à l'autre ». Le dirigeant ajoute que la transmission manuelle des données lui « procure une sécurité », car il n'a pas « confiance dans les logiciels et les outils informatiques ». Il continue dans ce sens en ajoutant « cette méthode de transmission de données me permet d'effectuer un contrôle direct et instantané du travail » - Les systèmes du SI sont fonctionnels, types de calcul : un logiciel pour la comptabilité permettant d'établir les états financiers de l'entreprise, et un autre pour la gestion de stock afin de gérer les quantités et la nature des matières premières (tissus) et des produits finis (les robes) avec une déconnexion entre les départements. Le directeur met en relief un point important qui est que « la facturation de l'export est indépendante de la facturation des ventes nationales, en d'autres termes, les ventes à l'export sont inscrites dans un compte à part pour pouvoir contrôler le volume des ventes à l'extérieur ». Il continue en expliquant que c'est « l'auditeur externe qui prend en charge de présenter les comptes de l'entreprise au fisc et de faire les traitements indispensables ». - Le rôle principal des TIC est la communication, et la coordination. Les propos du dirigeant à ce sujet se présente ainsi : « la technologie de communication est importante, le cellulaire et What App sont des outils rapides et efficaces de communication ». - La spécialisation opérationnelle de la main d'oeuvre. Suivant les propos du directeur, « les employés sont formés et spécialisés suivant l'activité entretenue, ainsi le comptable et le responsable des stocks sont diplômés. Le responsable des ventes nationales a suivi une formation en Marketing, les couturiers ont une grande expérience dans le domaine ». Le SI de l'activité d'export est caractérisé de simple : - En l'absence d'un logiciel d'export. Le directeur dit qu'il « n'a pas besoin d'un logiciel d'export ». 181 - En l'absence d'un responsable d'export. Le propriétaire-dirigeant se présente comme « le seul responsable de l'activité d'export ». Il se « déplace pour participer toujours à des foires et des salons de mode ou exposer ses produits aux princesses arabes ». - Compte tenu du rôle des TIC : Communication, coordination et transmission des données à travers l'internet. Selon le directeur, l'intérêt des techniques d'information et de communication réside dans « la réception des commandes par mail ». - Au vu du stockage des informations sur CD rom et disques durs. Le directeur explique qu'un « fichier Excel est ouvert au nom des clients pour enregistrer les commandes et les informations personnelles » Malgré l'utilisation du Whats App dans la communication organisationnelle et l'internet pour la transmission des données inter-organisationnelle de l'activité d'export, le SI de la PME exportatrice « B » est simple vu l'absence de logiciels intégrés dans le traitement des données, de spécialiste en SI, spécialiste de l'activité d'export et le rôle principal des TIC qui se résume par la communication et la coordination directe avec les partenaires. La spécialisation des employés dans le domaine opérationnel ne suffit pas pour donner un caractère « développé » au SI de la PME exportatrice « B ». 2.2.2. Raisons de décision du type SI Le directeur de cette entreprise avance que « le pourcentage du chiffre d'affaires à l'export est satisfaisant ». Il ne compte en « aucune façon augmenter ce pourcentage obtenu progressivement tout au long de trente ans ». Il ajoute qu'il faut « gérer le risque de l'export en fidélisant les clients ». Son mon premier souci est la « satisfaction des clients étrangers » car ils « présentent un important volume de chiffre d'affaires par rapport à la quantité vendue ». Il ajoute que pour fidéliser les clients, « il compte sur son contact direct et personnel et n'a pas besoin d'investir dans des logiciels en SI ou avoir une publicité trop coûteuse sur les réseaux sociaux ». Le mode de vente à l'export est « direct ». En effet les exportations sont faites en majorité aux princesses des pays arabes. « Les stylistes et les responsables de la garde-robe des princesses, 182 prennent contact à travers le mail » avec le directeur général « pour commander des robes choisies lors de la participation de l'entreprise à des expositions, ou même suite à des rencontres individuelles ». Dès lors, « le grand travail » est terminé, le reste « couture, livraison, encaissement » sont des détails. Le mode de vente directe « donne un effet de personnalisation de l'opération de vente » et « chaque client peut se sentir unique ». Ce mode « ne nécessite pas des investissements en SI, logiciels, ordinateurs sophistiqués, spécialistes, et les clients ne sont pas dérangés par cette démarche traditionnelle de vente, alors pourquoi avoir un SI développé? ». En plus le dirigeant explique qu'un tel mode est plus « fiable » que les modes « on line », surtout pour les encaissements. Pour l'entreprise B, les raisons expliquant la décision d'avoir un SI simple tiennent : - A la stratégie du directeur à maintenir constant son volume de vente à l'extérieur. - A la gestion du risque à l'export assurée à travers un contact direct avec les clients étrangers. - Au mode d'export par ventes directes 2.2.3. Facteurs affectant le SI Le travail sur le plan interne et sur le plan externe est contrôlé par le dirigeant. Il dit « je suis la banque des informations, et des décisions ». Il ajoute « il n'y a pas de logiciels qui peuvent remplacer mon travail ». En effet, il insiste sur sa capacité de tout gérer et de communiquer facilement et rapidement avec les employés et avec les clients étrangers. Dans ce prolongement il stipule « si j'ai un résultat satisfaisant c'est grâce à mes capacités de communication, je suis à la fois exigeant et compréhensif, je sais comment et quand transférer les messages, et comment résoudre les problèmes ». Il considère que le rôle majeur de « l'internet est la communication avec l'étranger, et ce dernier ne peut remplacer les voyages ou le contact direct avec les clients ». Pour exporter, le dirigeant a son « réseau de connaissances » qui l'introduit dans les salons de mode et lui permet d'être « en relation étroite avec des personnes célèbres ou importantes du pays arabe ». 183 Il explique que son chiffre d'affaires relativement élevé s'explique par « le cumul d'expérience en export » qui lui a permis d'atteindre ce pourcentage qu'il tient à conserver et « non par les logiciels », ou par sa formation en gestion. Pour lui le SI de son entreprise « permet de réaliser les objectifs » et il n'a « pas besoin d'un SI plus développé ». Ce dirigeant déclare que « même si notre clientèle appartient à un rang privilégié, nos gains sont très limités car les matières premières utilisées, tissus de grande qualité, sont vraiment très chères ». Le directeur assure que « l'entreprise est solvable, mais il ne veut pas alourdir la structure financière avec les intérêts élevés des s ». Il ajoute aussi que « c'est inutile de dépenser ses gains pour améliorer l'infrastructure en SI », puisqu'il arrive « à atteindre son objectif de conservation de sa part en utilisant le SI existant ». En plus, il trouve que « dans une organisation simple, comme le cas de son entreprise, le SI développé présente un inconvénient majeur qui est le coût des logiciels et de leur support technique ». De même, le directeur trouve que « l'internet est un support technique important qui affecte le SI de l'entreprise. Pour l'entreprise B, les facteurs affectant le SI se résument par : - Caractéristiques professionnelles du dirigeant pour gérer son entreprise (capacité de communication, de contrôle, de résoudre les problèmes) - Compétences à l'export du dirigeant (cumul d'expérience, savoir-faire, réseau de connaissance) - Degré de satisfaction du dirigeant de l'infrastructure en SI simple existante - Gaspillage des ressources limitées pour le développement du SI - La mauvaise connexion et le prix élevé 184 Conclusion: Les réponses concernant les questions de recherche peuvent être formulées comme suit : Type : La PME exportatrice "B" possède un SI simple et arrive à exporter ses produits avec un chiffre d'affaires à l'extérieur qui varie entre 25% et 30%. Alors que la littérature explique que l'activité d'export nécessite un SI développé. Raisons : Stratégie d'export qui est la conservation de la part de l'entreprise sur le marché. La gestion du « risque export » par le dirigeant assurée par le contact direct avec les clients à l'étranger. Le mode traditionnel d'export par vente directe. Facteurs influençant le SI : Les caractéristiques professionnelles du dirigeant, sa compétence à l'export, sa conviction de l'utilité d'un SI simple, les ressources limitées de l'entreprise, et la mauvaise connexion de l'internet. 2.3. Entreprise de haute couture « C » Nous présenterons successivement les caractéristiques du SI de l'entreprise « C » pour pouvoir conclure sur le type de SI présent dans cette entreprise. Ensuite, toujours selon les entretiens, les raisons de décision du type par le dirigeant, ainsi que les facteurs influençant le SI de cette PME exportatrices sont présentées. 2.3.1. Type SI Le tableau ci-dessous présente les résultats des entretiens réalisés avec le directeur général qui est lui-même responsable de l'activité d'export. organisationnel Critères de classification SI simple SI développé SI inter-organisationnel (activité d'export) SI simple SI développé 1- Fonctions du SI Communication avec les acteurs Contact direct, oral, et via Whats app Manuels Déplacement du dirigeant pour la participation à des foires et salon de mode. Direct, via l'internet : par mail ou par Skype Au dirigeant, transmission automatique à travers l'ordinateur (commandes, reçus) Disques durs, CD Rom Impression de tous les documents et stockage par archives papiers Archives papiers Stockage des informations Opérationnels : systèmes fonctionnels « sur mesure ». Déconnexion entre les départements de comptabilité, de production et de commercialisation. 2- Finalités SI Coordination 3- Main d'oeuvre 4- Rôle des TIC Logiciel d'export « sur mesure » déconnecté des autres départements. Coordination et contrôle Spécialisée Pas de responsable d'export. Pas de responsable SI. Communication ( ordinateur : internet) et stockage des informations Communication (par téléphone ou Whats app ) Tableau 18– Types du SI des niveaux organisationnels et inter-organisationnels de l'entreprise « C » - Source Jeanne KASPARD Le SI organisationnel est considéré comme simple à cause de la communication directe des directeurs avec les employés, de la transmission manuelle des données entre les départements, du mode de stockage des informations par archive papiers, de la déconnexion des systèmes fonctionnels, du rôle général du SI qui est la coordination, et des TIC qui sont abordés comme un moyen de communication. Toutes les décisions sont prises par le dirigeant-propriétaire qui est lui-même le lien entre tous les départements. Toutefois, nous remarquons que les départements de commercialisation et de production échangent entre eux les données d'une façon manuelle. La 186 main d'oeuvre dans tous les départements est diplômée et qualifiée, ce qui présente une spécificité pour une PME. Nous remarquons qu'il y a un avancement dans le degré de sophistication du SI de l'activité d'export, mais ce dernier ne peut être qualifié de « développé ». En fait, les fonctions du SI et le rôle des TIC sont de communication et de contrôle même si les outils utilisés sont un peu plus sophistiqués, et même s'il existe un logiciel d'export. Ce dernier permet de lister les noms des clients étrangers par pays, par valeur et par fréquence de commandes. Il permet de savoir la valeur des exports et l'évolution de l'activité d'export. Il n'est pas utilisé comme outil de gestion de l'activité d'export. Il est appréhendé comme un outil statistique. Ce logiciel est déconnecté des autres systèmes qui sont faits « sur mesure » pour satisfaire le besoin de gestion Il est établi sur l'ordinateur du dirigeant qui est lui-même responsable de l'activité d'export. Au fur et à mesure qu'un besoin apparait, le directeur contacte son fournisseur de logiciels pour lui expliquer le besoin afin que ce dernier fasse les modifications nécessaires dans les logiciels déjà commandés et exécutés chez lui. Le degré de sophistication du SI de l'entreprise « C » est plus avancé que les entreprises « A » et « B », vu l'utilisation d'un logiciel d'export comme un outil statistique. Mais le SI organisationnel et celui de l'activité d'export restent simples puisque les systèmes sont toujours fonctionnels, déconnectés, le rôle des TIC est toujours de communication et de stockage des informations, en plus de l'absence de responsable SI. 2.3.2. Raisons de décision du type SI La stratégie adoptée par le dirigeant est « de trouver des solutions aux problèmes à fur et à mesure que ceux-ci se présentent », de sorte de ne pas reculer dans ses exports. Le premier souci du dirigeant est « de ne pas avoir une dégression dans les exports ». Il ajoute « mon objectif est d'avoir une stabilité de vente à l'extérieur et non pas une augmentation ». En plus, vue la concurrence étrangère, il est « satisfait du volume des ventes à l'extérieur », et ne veut pour aucune raison « perturber cette réalité ». Il explique que pour mieux organiser le travail et maintenir ses ventes à l'étranger, il a fait réaliser une restructuration organisationnelle de son entreprise il y a presque 10 ans. Il a « séparé le département commercial du département production », ce qui l'a aidé « à organiser le travail et à être plus méthodique ». Plus tard, il a « senti qu'il y avait une forte concurrence surtout à l'étranger » et que ses exports allaient diminuer alors il a voulu « connaitre l'évolution de son activité d'export ». Depuis trois ans, il a commandé un logiciel d'export qui est placé sur son ordinateur et la « data entry » se fait manuellement. Mais l'installation de ce logiciel n'a pas abouti à des changements radicaux dans le SI de l'entreprise, puisque le logiciel d'export est utilisé comme « un simple outil statistique fournissant des informations sur l'évolution des ventes à l'extérieur ». Le logiciel est suffisant pour connaitre l'évolution des ventes à l'étranger. Il ne trouve aucune nécessité de recruter un responsable SI. A propos de ce sujet, il avance « c'est pratique, rapide, et moins cher de recourir à un service extérieur en informatique que d'avoir vraiment un employé ou un responsable SI ». De plus, selon le directeur « la maison arrive bien à se débrouiller avec les moyens techniques et humaines qu'elle possède, donc aucun besoin de dépenser pour changer ou améliorer l'infrastructure existante en SI ». Cette PME suit le mode d'exportation traditionnel de vente directe. Son dirigeant trouve que « ce mode, même s'il est ancien, ne peut en aucun cas être remplacé par le commerce online ». Il justifie son point de vue en se basant sur « les escroqueries du net, et les coût élevés des investissements nécessaires pour avoir un site de vente sur l'internet ». Ce contact à travers la vente directe est très important pour « fidéliser le client, être à son écoute et par la suite gérer le risque de ne pas les perdre ». Un élément aussi important à noter est que le dirigeant « veut conserver le prestige de la marque ». Il considère que « c'est plus présentable et chic, pour une entreprise de haute couture, d'avoir une clientèle choisie avec qui on a des rapports directs que d'avoir le public comme clientèle. - A l'alignement stratégique entre objectif d'export et SI. En effet, pour maintenir ses ventes à l'extérieur, il a opéré des changements organisationnels et a implanté un logiciel statistique d'export. La manipulation du logiciel est faite par le dirigeant luimême et non par un spécialiste. - Au mode d'export traditionnel direct pour fidéliser les clients, avoir une clientèle prestigieuse, éviter les problèmes dûs à la mauvaise connexion et les escroqueries du net. 2.3.3. Facteurs affectant le SI Toutes les décisions sont prises par le dirigeant de l'entreprise. Ce dernier veut être le « seul moniteur de l'entreprise ». Il n'a pas voulu « confier l'activité d'export à qui que ce soit ». Il explique que « lui seul connait les détails les plus minutieux au sujet des clients, et c'est grâce à ses facultés de communication et de conviction que les clients se sentent à l'aise et coopératifs ». Il conclut que « l'expérience, la confiance en soi-même, et la rapidité de trouver des solutions ainsi que le bon sens sont a priori beaucoup plus importants que les analyses et les logiciels ». Il pense de ce fait qu'il est « le mieux placé pour gérer l'activité d'export » puisqu'il possède tous les critères. En effet, il se juge « expérimenté » et estime savoir comment se « comporter avec les clients, ou en attirés de nouveaux », il sait « ce qui peut intéresser telle ou telle personne ». En outre, il a « confiance en ses capacités commerciales et ses caractéristiques professionnelles ». Il dit qu'il possède « une personnalité charismatique ». En ce qui concerne « la rapidité de trouver des solutions », il précise que « c'est rare d'avoir des conflits » et c'est toujours « le bon sens et l'intérêt du client qui guide la situation ». Le dirigeant ajoute qu'il ne « trouve pas nécessaire de développer le SI en achetant des logiciels d'analyse et traitement des données, en acquérant des outils et en recrutant une main d'oeuvre qualifiée ». Il justifie ses propos en disant : « si j'arrive à tout gérer moi-même, pourquoi recruter des spécialistes en SI et/ou en export, et si je peux mesurer l'évaluation de mon activité d'export par un logiciel de calcul, pourquoi avoir des logiciels plus sophistiqués? ». Le directeur de cette PME déclare que « le budget dépensé pour la participation aux foires et salon de mode, et même pour maintenir des relations avec des personnes clés, réduit la capacité financière de l'entreprise ». Il ajoute : « de tels créneaux nous ont conduit à avoir un pourcentage d'export près de 25%, et il n'est pas la question de réduire ces dépenses pour investir dans des logiciels, ou recruter des spécialistes en Marketing ». Le directeur confirme que « parfois l'entreprise a recours à un endettement pour couvrir ses charges d'exploitation, car il y a un grand décallage entre le délai d'encaissement des commandes et le délai de paiement aux fournisseurs de tissus ». Le directeur avance « pourquoi investir mes ressources limitées dans le but de développer des activités d'export qui ont un grand risque surtout que le monde entier, et le Liban en particulier, passe par une crise économique? » Le directeur ajoute « c'est tout à fait exact que le Liban est doté d'une infrastructure numérique, mais la connexion est coûteuse et elle a une mauvaise qualité. Comme, il y a toujours des problèmes techniques et des nouveaux règlements entre les entreprises numériques et l'Etat ». Les facteurs influençant le SI de l'entreprise « C » se résu ment par : - Les caractéristiques professionnelles du dirigeant et sa capacité d'entretenir de bonnes relations avec les clients à l'étranger. - La satisfaction du dirigeant des résultats du SI simple - Les ressources limitées de l'entreprise qui ne doivent pas être investies dans des activités d'export à risque vu la crise économique mondiale. - La mauvaise infrastructure en technologie. 190 Conclusion: Les réponses concernant les questions de recherche pour l'entreprise « C », peuvent être formulées comme suit : Type : La PME exportatrice "C" possède un SI simple et arrive à exporter ses produits avec un chiffre d'affaire à l'extérieur qui atteint 30%. Raisons : Stratégie d'export qui est la conservation de la part de l'entreprise sur le marché. L'alignement stratégique entre outils en SI et objectif d'export. Le mode traditionnel d'export par vente directe. Facteurs influençant le SI : Les caractéristiques professionnelles du dirigeant, sa satisfaction des résultats obtenus avec un SI simple, les ressources limitées de l'entreprise, l'infrastructure numérique disponible dans le pays. 2.4. Entreprise agro-alimentaire « D » Dans cette partie, nous présenterons les caractéristiques du SI de l'entreprise « D » pour pouvoir conclure sur le type de SI présent dans cette entreprise. Ensuite, les raisons de décision du type par le dirigeant, et les facteurs influençant le SI de cette PME exportatrices sont présentés. 2.4.1. Type SI 191 SI organisationnel Critères de classification 1- Fonctions du SI SI simple Communication avec les acteurs Stockage des informations - Contact direct, oral, et à travers Whats app entre directeurs et employés. Contact direct, oral de face à face ou par téléphone entre propriétaire-dirigeant et les directeurs Manuels entre le propriétairedirigeant et les départements 2- Finalités SI Coordination 3- Main d'oeuvre 4- Rôle des TIC SI développé SI simple Direct entre les directeurs via un protocole d'intranet, ou d'internet Déplacement du dirigeant pour la conclusion des contrats. Direct, via un protocole d'internet : le mail, ou par Skype Automatiques entre le département financier et commercial d'une part et entre le département commercial et de production d'autre part Archives papiers Opérationnels : Systèmes fonctionnels « sur mesure » avec connexion automatique entre certains départements SI inter-organisationnel (activité d'export) SI développé Au dirigeant, transmission automatique à travers l'ordinateur (commandes, reçus) Disques durs, CD Rom Impression de tous les documents et stockage par archives papiers. Conception d'une page internet Coordination Spécialisée Communication (téléphone, mail, intranet) Pas de responsable d'export. Pas de responsable SI. Communication (ordinateur : internet) et stockage des informations Tableau 19 – Types du SI des niveaux organisationnels et inter-organisationnels de l'entreprise « D » - Source Jeanne KASPARD Le SI organisationnel de cette entreprise a évolué vers des connexions automatiques entre certains départements, et par une transmission automatique d'une partie des données 192 opérationnelles. En effet, pour une meilleure gestion, il a acquis des logiciels pour chaque département » et a commandé « des logiciels de connexion entre certains départements ». Il est prêt « à former les employés pour utiliser les logiciels acquis. Ces logiciels sont d'ordre « opérationnel » et non pas « d'analyse ». Le directeur encourage « la communication formelle à travers les mails entre les départements pour laisser des traces ». Toutefois, la communication reste majoritairement orale et informelle entre les directeurs et leurs employés, le rôle des TIC sur le plan interne est principalement de communication entre directeurs. Malgré la transmission des données automatiques entre certains départements de l'entreprise, et l'utilisation de l'internet pour exposer les produits de l'entreprise à l'étranger, le SI dans ces deux niveaux, organisationnel et inter-organisationnel (de l'activité d'export), ne peut être qualifié de « développé », mais nous pouvons dire qu'il est un peu plus développé que celui des entreprises « A », « B » et « C ». Les raisons reviennent à l'absence des compétences dans le domaine du SI et dans le domaine de l'export, l'absence des systèmes intégrés reliant tous les départements favorisant des traitements des données aidant à une prise de décision et évitant la duplication des informations, et le rôle des TIC qui se limite à la communication (absence des logiciels de stockage et de traitement des données). Donc le SI de l'activité d'export de la PME « D » n'est ni simple, ni développé. La sophistication du SI se situe entre les deux types, ce qui nous conduit à dire que le SI de l'entreprise D est peu développé. 2.4.2. Raisons de décision du type SI L'entreprise « D » a actuellement un chiffre d'affaires à l'export variant entre 30% et 35% du chiffre d'affaires total. Son objectif à court et moyen terme est « d'augmenter ses exportations pour atteindre 40% du total de ses ventes ». Afin d'augmenter ses ventes à l'extérieur, le dirigeant a eu l'idée « d'avoir une vitrine internationale à travers le web ». Et effectivement, ses ventes ont progressé dans les cinq années précédentes pour atteindre aujourd'hui un seuil de 35% du total de ses ventes. Avant le web, il avait lui-même la responsabilité de rechercher des clients étrangers et de « courir les grands restaurants et de faire des liaisons avec des centres diététiques » pour les inciter à recommander ses produits. Le web lui a procuré « une nouvelle clientèle qui jusqu'alors était cachée ». Le web a nécessité un nouveau matériel informatique pour le directeur, qui gère lui-même l'activité d'export, et une nouvelle technique de production. Le directeur précise que la page internet est « seulement pour les clients étrangers ; il y a des produits destinés seulement à l'étranger car ils sont fabriqués suivant des conditions et mesures applicables dans le pays importateur ». Et comme le chiffre d'affaires global et spécialement de l'exportation a 194 augmenté, le directeur a vu « la nécessité d'une connexion entre le département financier, commercial et de production ». Avant le web, le directeur clarifie que « la gestion des informations entre les départements se faisait manuellement », mais après le web, « la quantité des informations à gérer est devenue trop importante, et le support papier ne représentait plus une solution optimale pour mener rapidement les opérations commerciales d'où la nécessité des logiciels de transmission automatique des données entre certains départements ». Toutefois, l'objectif de l'entreprise qui n'est autre que « l'augmentation de la part de l'entreprise sur le marché étranger » a poussé le dirigeant à adopter une page sur l'internet. Ainsi la « stratégie de l'entreprise qui est l'augmentation de la part de l'entreprise sur le marché étranger » a poussé le directeur à entreprendre « une série de changements organisationnels et l'acquisition d'un nouvel outil en SI, qui est la page de l'internet ». En plus, « à chaque fois qu'un besoin de gestion apparait », le directeur contacte « les experts du bureau de SI, ou les logiciels ont été commandés, pour trouver la solution adéquate et la moins chère ». L'activité d'exportation de cette PME qui commercialise des produits laitiers, se fait d'une manière traditionnelle à des concessionnaires. Le dirigeant explique que « les ventes se font en gros à travers les concessionnaires » et la page du net est destiné « aux concessionnaires grossistes ». Si « un particulier demande un produit déterminé en contactant le dirigeant à travers le web, il sera redirigé vers le concessionnaire le plus près ». En plus, « les points de vente des produits à l'extérieur sont précisés par un accord commun avec les concessionnaires ». « Ces der sont responsables de la distribution des produits de l'entreprise aux centres diététiques et hôpitaux » avec lesquels l'entreprise a signé des contrats. Le dirigeant précise que « le mode de vente directe au détail n'est pas adapté aux genres de produits qu'il commercialise ». Il continue en expliquant que « le mode traditionnel des concessionnaires est plus sécurisé pour les encaissements ainsi que pour tout le processus technique de l'export ». - La stratégie SI traduite par la mise en place d'un site sur le net afin d'atteindre l'objectif précisé, ainsi que l'acquisition de nouveaux logiciels de connexion entre départements pour une meilleure gestion des opérations. - Le mode d'export traditionnel de vente aux concessionnaires. Mode peu coûteux, sécurisé pour les paiements et satisfaisant pour les clients.
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T ‫ف ر‬W ‫ف‬W ‫ك‬W ‫ك‬W ‫ذ‬U ‫ذ‬U‫إ‬T‫إ‬T ‫ن‬W ‫ن‬W ‫ي‬U ‫ي‬U ‫ط‬ W‫ط‬ W ‫ب‬Q ‫الب‬ Q ‫و‬W‫و‬W ‫ يبا‬T‫ب‬T‫ش ب‬W ‫ش‬W ‫زى‬W‫ز‬W ‫خ‬U ‫خ‬U W‫أ‬W‫ص ر أ‬ Q ‫ج‬R ‫ج‬R ‫ح‬W ‫الح‬ W ‫ر‬W ‫ر‬W ‫ نصص ‬Q‫ن‬Q ‫د‬U ‫د‬U ‫ق‬W ‫ق‬W W ‫ص‬ W ‫ن‬W‫ن‬W Q‫ل‬Q‫وال‬W‫و‬W ‫ج‬Q ‫اج‬ 571 Al-Ḥaǧǧāǧ a reçu la victoire, Dieu a apporté son assistance // Il a maudit Šabīb et alBuṭayn le renégat 4. Pour conclure Nous avons vu dans ce chapitre qu'al-Balāḏurī ne s'intéresse que très accessoirement à la dimension politico-religieuse du combat entre les Ṣufriyya et les armées d'al-Ḥaǧǧāǧ. Ce dernier est dépeint comme un chef d'une grande lâcheté, qui se fait battre par des femmes. L'auteur se place le plus souvent du côté du de Šabīb, dont il donne le portrait d'un brigand intrépide, qui n'a peur de rien. Toutefois, en insistant sur la dimension sexuelle attachée à la mort de celui-ci, l'auteur nous donne à lire une fin des plus cocasses. En outre, la poésie fortement présente dans le récit permet de confirmer l'un des traits devenu emblématique d'al-Ḥaǧǧāǧ, à savoir son extrême lâcheté, surtout dans son face-à-face avec la femme du chef des Ṣufriyya. 570 Pourtant, c'est dans cette erreur qu'est tombée l'édition égyptienne de Kitāb al-Aġānī, en commençant l'extrait d'Ayman b. Ḫuraym ainsi : T T TT T T P‫س‬ P ‫ر‬T‫ار‬T W‫ف‬W‫يي ف‬W‫ت‬W‫ئت‬W‫ئ‬W ‫ما‬T ‫م‬T ‫م‬U ‫م‬U ‫ه‬T ‫ه‬TT‫ن ا ب‬W ‫ن‬W‫ي‬U ‫ي‬UW‫ت‬W‫ت‬W‫أ‬W‫أ‬ ‫ع بيطا‬W ‫الع‬ W ‫ن‬W ‫ين‬ W ‫س اففكك‬R ‫س‬R ‫ن ال‬W ‫ن‬W ‫س مم‬ W ‫م‬W ‫ام‬W‫ر‬W‫ر‬W ‫ح‬W ‫الح‬ U U Nous sommes venus, deux cents cavaliers // de ceux qui aiment répandre le liquide prohibé tout frais Al-Asfahānī, Kitāb al-Aġānī, édition de 'Alī al-Naǧdī Nāṣif, dir. Muḥammad Abū al-Faḍl Ibrāhim, Al-hay'a almiṣriyya li-l-kitāb, Le Caire, 1993, vol. 20, p. 314. 571 Ansāb, vol. 8, p. 324. 339 Chapitre 6 : La révolte de Muṭarrif b . al-Muġīra Al-Ṭabarī consacre une large place à la révolte de Muṭarrif. Si, dan l'ensemble, il la voit comme une opposition pour des motifs religieux, ceux-ci ne font leur apparition que lorsque les Ṣufriyya s'approchent d'al-Madā'in. De plus, le désir de Muṭarrif de s'emparer du pouvoir pour son propre compte est également suggéré. En outre, l'invitation de Muṭarrif à Šabīb pour débattre du meilleur gouvernement pour les musulmans était vue comme une mesure dilatoire, dont l'objectif était de retarder l'armée kharijite, le temps qu'arrivent les renforts d'al-Ḥaǧǧāǧ. Le récit d'al-Balāḏurī a ceci d'intéressant pour notre problématique qu'en s'appuyant largement sur les mêmes comptes-rendus qu'al-Ṭabarī, il en offre une lecture totalement différente. Commençons par décrire l'organisation du récit qu'il en fait, avant d'en discuter la mise en intrigue. La notice de neuf pages est composée de douze comptes-rendus, dus à différents transmetteurs, dont le plus long, le cinquième, occupe à lui seul près de six pages. Il est précédé de quatre courts aẖbār et suivi de six autres tout aussi courts. Ce ẖabar central attribué par l'auteur à Hišām b. al-Kalbī reprend de manière ramassée les différents aẖbār d'Abū Miẖnaf chez al-Ṭabarī. Certains passages sont identiques chez les deux auteurs. Nous y retrouvons en effet la nomination des trois fils d'al-Muġīra b. Šu'ba ; l'arrivée de Šabīb près d'al Madā'in ; le débat de Muṭarrif avec les émissaires du chef des Ṣufriyya qui se termine par un échec ; le début du soulèvement militaire de Muṭarrif, puis sa défaite et sa mise à mort ; l'amnistie de ses hommes une fois la révolte terminée. Quelques précisions sont à apporter ici : - D'abord, al-Balāḏurī évoque lui aussi la munāẓara entre Muṭarrif et les émissaires de Šabīb dans le récit de la révolte des Ṣufriyya, mais, contrairement à al-Ṭabarī, l'expédie en deux lignes et renvoie le lecteur à la révolte de Muṭarrif, rapportée auparavant, bien que chronologiquement plus tardive : " Šabīb arriva à Bahurasīr et s'installa dans son chef-lieu. Muṭarrif b. al-Muġīra lui demanda : Envoie-moi quelqu'un pour débattre avec lui. Il en fut de lui ce que nous avons rapportés [auparavant] dans notre livre. 340 - Ensuite, al-Balāḏurī ne parle pas de la demande faite par Muṭarrif à al-Ḥaǧǧāǧ de lui envoyer des renforts pour faire face à la menace kharijite. - Le débat qui occupe une place importante chez al-Ṭabarī est résumé lui aussi chez al- Balāḏurī. - Nous n'avons pas mention non plus de l'entrée de Muṭarrif à al-Madā'in et de son dis- cours d'installation en tant que gouverneur. Mais ce sont les courtes anecdotes qui encadrent ce long compte-rendu qui orientent la lecture dans une direction totalement différente. D'abord, la notice commence par ce bref ẖabar : ‫ أرسول أحدكم أكرم أم‬:‫ سمع مطرف الحجاج يقول‬:‫ قال‬،‫ عن أبي عبيدة‬،‫حدثني علي بن المغي رة الثرم‬ 572.‫ وال إن قتله لحلل‬.‫ كافر وال‬:‫ وقال‬،‫خليفته؟ فوجم‬ 'Alī b. al-Muġīra b. al-Aṯram m'a rapporté, d'après Abū 'Ubayda que : Muṭarrif a entendu al-Ḥaǧǧāǧ dire : Le messager de l'un d'entre vous est-il plus noble ou est-ce son vicaire? Il en fut horrifié et dit : Par Dieu, c'est un mécréant! Par Dieu, il est licite de le tuer! Le propos scandaleux proféré par al-Ḥaǧǧāǧ aux yeux de Muṭarrif – et aux yeux de tout lecteur musulman – semble donc une raison suffisante pour que celui-ci rejette son autorité et se rebelle contre lui. La réaction de Muṭarrif, en bon musulman, comme il nous sera dit plus loin, est normale. Elle est pourtant dramatisée par l'utilisation du verbe fa-waǧima qui exprime l'extrémité de l'horreur ressent ie face à un tel propos : il est abasourdi, au point d'en blêmir. Il nous est loisible alors d'essayer de deviner son état de stupéfaction, et de comprendre la sentence définitive qu'il prononce contre le gouverneur d'Iraq. Par son laconisme, l'anecdote, ne peut avoir sur le lecteur que le même effet qu'elle a eu sur Muṭarrif. Nous le voyons bien, dès l'introduction de son récit, al-Balāḏurī installe l'opposition légitime entre Muṭarrif b. al-Muġīra et al-Ḥaǧǧāǧ qui était juste suggérée chez al-Ṭabarī, lorsqu'il rapportait le discours de Muṭarrif, qui était totalement différent de celui d'al-Ḥaǧǧāǧ à al-Kūfa. La mise en intrigue d'al-Balāḏurī En fait, si nous avons parlé longuement du scepticisme d'al-Ṭabarī tout au long de la première partie comme l'un des axes de sa réflexion historique, nous verrons ici que l'auteur de Ansāb alašrāf, tout en insistant au départ sur cette opposition politico-religieuse entre les deux hommes, avancera une seconde lecture, qui s'inscrit dans un différend que l'on pourrait qualifier de généalogique. Ce sont donc ces deux lectures que nous analyserons à partir des courtes anecdotes. 572 Ansāb, vol. 7, p. 3121. 341 Al-Balāḏurī poursuit avec une série de courts aẖbār. Nous nous arrêterons sur quelques-uns d'entre eux qui éclairent plus encore cette révolte. ‫ فاستعان‬،‫ قدم الحجاج الكوفة‬:‫ قال‬،‫ عن ابن عياش الهمداني‬،‫ عن الهيثم بن عدي‬،‫ وحدثني العمري‬- 2 ‫ فلم يزل على الكوفة حتى رجع إليها‬.‫ وأمه أمة كانت لمصقلة بن هبيرة‬،‫ فولى عروة الكوفة‬،‫بولد المغي رة‬ ‫ فقال له‬،‫ وكان يتأله‬،‫ وأرسل إلى مطرف بن المغي رة‬.‫ وولى حمزة بن المغي رة المدائن‬.‫الحجاج بعد رستقباذ‬ ‫ وكان يعتقد إنكار‬.‫ فوقرت في نفس مطرف‬.‫ وهو أكرم على ال من رسله‬،‫ إن عبد الملك خليفة ال‬:‫ا‬V‫يوم‬ ‫ فخالفه في‬،‫ فناظره‬،‫ ومطرف به ا‬،‫ فمر ش بيب بن يزي د الخارجي بالم دائن‬،‫ ول يبلغ قول الخ وراج‬،‫المنك ر‬ 573. ‫ ووافقه على الخروج‬،‫رأيه‬ ‫ فاستعمل الحجاج عروة‬.‫ كان بنو المغي رة صلحاء نبلء‬:‫ وقال هشام ابن الكلبي عن أبي مخنف وغيره‬- 3.‫ ونسبه إلى العجلة والتسرع إلى القتل‬،‫ ذم فيه الحجاج‬V‫ فكتب إلى عبد الملك كتاب ا‬.‫بن المغي رة على الكوفة‬ 574. ‫ وذلك بالكوفة‬،‫ فضربه بالسياط حتى مات‬،‫فبعث عبد الملك كتابه إلى الحجاج‬ ‫ يس ألهما ع ن س يرة‬،‫وال ى محم د ب ن عمي ر ب ن عط ارد‬Z ‫ كت ب عب د المل ك إل ى ع روة‬:‫ وق ال أب و عبي دة‬-4 ‫ وأما‬.‫وارادته‬Z ‫ وكتب ج وابه برضاء الحجاج‬،‫ فأقراه إياه‬،‫ فأتى الحجاج بكتابه‬،‫فأما محمد بن عمير‬ . ‫الحجاج‬.‫ والقدام على الدماء‬،‫ والتسرع إلى العذاب‬،‫ فكتب ينسب الحجاج إلى التجبر والعجلة في المور‬،‫ع روة‬ 575. ‫فضربه حتى قتله بالتجني عليه‬ 2- Al-'Umarī m'a rapporté, d'après al-Hayṯam b. 'Adī, d'après Ibn 'Ayyāš al-Hamdānī qu'en arrivant à al-Kūfa, al- Ḥaǧǧāǧ prit à son service les fils d'al-Muġīra b. Šu'ba. 'Urwa, dont la mère était une esclave de Maṣqala b. Hubayra, fut nommé lieutenantgouverneur d'al-Kūfa, où il remplaça al-Ḥaǧǧāǧ jusqu'à son retour de Rustaqubāḏ. Il désigna Ḥamza à al-Madā'in et convoqua Muṭarrif b. al-Muġīra, qui était très pieux, et lui dit un jour : 'Abd al-Malik est le vicaire de Dieu, il est par conséquent plus digne auprès de Dieu que Ses messagers. Ce propos le marqua de façon indélébile. Il avait pour règle de réprouver ce qui est répréhensible, sans atteindre pour autant le credo des Kharijites. Quand le Kharijite Šabīb b. Yazīd passa par al-Madā'in, où se trouvait Muṭarrif, il débattit avec lui, mais tout en étant d'un avis contraire au sien, il fut d'accord avec lui sur la légitimité de la révolte. 3- Hišām b. al-Kalbī a dit, d'après Abū Miẖnaf et d'autres : Les fils d'al-Muġīra b. - Au plan narratif, notons l'omniscience du narrateur – fa-waqarat fi nafsih. Ce qui relativise en partie les remarques de Daniel Beaumont dans son article sur la narrativité 578. Non seulement al-Balāḏurī intervient de temps à autre pour émettre un avis sur les récits qu'il propose, mais les transmetteurs interviennent littérairement dans la composition de ceux-ci. Nous retrouverons ce même ẖabar dans la notice consacrée par al-Balāḏurī à al-Ḥaǧǧāǧ. Nous verrons plus loin, dans la notice qui lui est consacrée, qu'al-Ḥaǧǧāǧ en rhétoriqueur hors pair se plait à créer ce genre de confusions et d'ambigüités. 578 Daniel Beaumont, « Hard Bo iled: Narrative Discourse in Early Muslim Traditions », Studia Islamica, 83, 1996, pp. 5-31 . 576 577 343 - Lors de son arrivée à al-Kūfa, al-Ḥaǧǧāǧ nomma les fils d'al-Muġīra b. Šu'ba à des postes importants. Il en fit des lieutenant-gouverneurs de différentes régions. Mais leur fin sera dramatique : Muṭarrif sera tué dans la bataille qui l'opposa à l'armée d'alḤaǧǧāǧ ; Ḥamza sera emprisonné à cause de l'aide matérielle qu'il a apportée à son frère dans son soulèvement et mourra en prison ; 'Urwa sera battu à mort pour avoir émis un avis défavorable sur al-Ḥaǧǧāǧ, comme nous le lirons dans les récits 3 et 4. - A l'incroyance d'al-Ḥaǧǧāǧ, telle que rapportée dans le premier et le second ẖabar, s'ajoutent ses mauvaises méthodes de gouverner : en particulier, la précipitation, qui lui a été reprochée comme on l'a vu par al-Muhallab, son empressement à supplicier et à répandre le sang [des musulmans]. Ce que prouvera à son corps défendant 'Urwa b. alMuġīra. - La noblesse et la droiture des fils d'al-Muġīra b. Šu'ba ont été les raisons pour lesquelles ils ont été choisis par al-Ḥaǧǧāǧ, mais elles ont été également la cause de leur fin dramatique. Le refus de l'injustice ici-bas et de la défiance de Dieu personnifiées par alḤaǧǧāǧ, constituent une gradation dans leur mobilisation contre celui-ci. Arrêtons-nous sur l'attitude de 'Urwa. Il ne semble avoir agi qu'en réponse à une doléance de 'Abd alMalik qui paraît, dans un premier temps, se comporter en bon calife se renseignant sur la marche des affaires dans ses provinces. Mais c'était sans compter la duplicité de celuici : il montre son vrai visage, en retournant le courrier de 'Urwa à al-Ḥaǧǧāǧ. Elle peut servir donc à décharger al-Ḥaǧǧāǧ d'une partie de ses forfaits et à les imputer à 'Abd alMalik lui-même. La lettre qui lui est retournée ici signifie carte blanche du calife, non seulement pour punir l'insolence de 'Urwa, mais pour continuer à agir comme il l'entendait. L'élément « ironique » ici est que la requête de 'Abd al-Malik concernait un autre notable d'al-Kūfa : Muḥammad b. 'Umayr b. 'Uṭārid, dont on se rappelle qu'il faisait partie de l'entourage rapproché de Muṣ'ab et qu'il l'avait trahi. La réponse de Muḥammad b. 'Umayr au calife a été écrite sous la dictée du tout-puissant gouverneur. Autre élément ironique est la cause pour laquelle 'Urwa aura été fouetté à mort : c'est qu' aurait, selon al-Ḥaǧǧāǧ porté une fausse accusation contre lui. Sauf que la mise à mort de 'Urwa confirme, s'il en était besoin, cette accusation. - La duplicité de 'Abd al-Malik, dont nous venons de parler, se confirme dans un autre ẖabar de la même notice, qui semble à prime abord une simple variation du troisième. En voici le contenu : ‫والى محمد‬Z ‫ كتب عبد الملك إلى أبي يعقوب عروة بن المغي رة‬:‫ قال‬،‫ حدثني عبد ال بن صالح العجلي‬- 5 ‫ فأم ا‬،‫ فاكتب ا إل ي بس يرة الحج اج وأم ره واص دقاني عن ه‬،‫ إنكم ا م ن س راة أه ل الع راق‬:‫بن عمير بن عط ارد‬ 344 ‫ وأم ا ع روة‬،‫ فكت ب إلي ه بم ا أمله الحج اج‬.‫ آمرن ي ب أمرك‬:‫ وق ال‬،‫ ف أتى الحج اج بالكت اب‬،‫محم د ب ن عمي ر‬ 579. ‫وان في لسانه ذرب‬Z ،‫ إن في الحجاج عجلة‬:‫فكتب‬ 'Abdullāh b. Ṣāliḥ al-'Iǧlī m'a dit : 'Abd al-Malik écrivit à Abū Ya'qūb 'Urwa b. al-Muġīra et à Muḥammad b. 'Umayr b. 'Uṭārid : Vous êtes des grands dignitaires parmi les gens d'Iraq, informez-moi par écrit des actions d'al-Ḥaǧǧāǧ et dites-moi la vérité à son sujet. Muḥammad b. 'Umayr, pour sa part, montra la lettre à al-Ḥaǧǧāǧ et lui dit : Ordonnemoi ce que tu veux. Alors il écrivit ce que lui dicta al-Ḥaǧǧāǧ. Quant à 'Urwa, il écrivit : Il y a chez al-Ḥaǧǧāǧ de la précipitation, et dans ses propos des indignités. 'Abd alMalik envoya la lettre à al-Ḥaǧǧāǧ qui convoqua 'Urwa et le fit frapper au fouet jusqu'à ce qu'il en fut mort. C'était à al-Kūfa. La demande de 'Abd al-Malik aux deux hommes est claire : ce qu'il veut savoir c'est la vérité. On ne peut donc en aucune manière accuser 'Urwa d'inconscience ou d'imprudence. D'autant que le calife leur demandait de lui dire la vérité. Plus, avant de leur faire sa requête, il les louait pour leur droiture en tant que grands dignitaires d'Iraq. - La composition du deuxième récit relie directement l'attitude de Muṭarrif à ses convictions morales : « il rejetait le blâmable », nous est-il dit. Or ce blâmable est personnifié par al-Ḥaǧǧāǧ qui, lui, en représentant du « lieutenant de Dieu » – de ẖalīfat Allāh – devrait se préoccuper de ce qui est blâmable et l'empêcher. Mais le récit ajoute aussi que l'attitude de Muṭarrif ne le place pas au même niveau que les Kharijites. - Dans la première partie de cette même anecdote, nous apprenons que 'Urwa était le fils d'une esclave de Maṣqala b. Hubayra. Cette information qui semble ici de peu d'intérêt, ou du moins hors sujet, est très importante. Elle est également éclairée par un compterendu qui interviendra plus loin dans la notice et qui sera repris dans la propre notice d'al-Ḥaǧǧāǧ, selon laquelle ce n'est pas 'Urwa qui est le fils de l'esclave, mais Muṭarrif. ،‫ وك انت وض يئة‬.‫ وفي ه جاري ة ل ه حام ل‬،‫ فق دم بثقل ه إلى الكوف ة‬،‫ هلك مص قلة بطبرس تان‬:‫وق ال أبو عبي دة‬ ،‫ لو كان مطرف من ولد المغي رة‬:‫ فكان الحجاج يقول‬.V‫ فولدت له مطرفا‬.‫فأخذها المغيرة بمال كان له عليه‬ ‫ ولكنه‬.‫ وأطاع‬،‫ كما سمع حم زة أخوه‬،‫ وسلمة‬،‫ واستقامة‬،‫ وطاعة‬،‫ ولكان ذا سمع‬،‫ما خرج على السلطان‬ Ansāb, vol. 7, p. 3128. Ce ẖabar est anonyme. Notons l'intervention directe d'al-Balāḏurī pour récuser cette accusation. Ansāb, vol. 7, p. 3128..‫ إنما كان رأيه كرأي من خرج مع ابن الشعث من القراء‬،‫ وذلك باطل‬،‫ كان مطرف يرى رأي الخوارج‬: ‫وقال بعضهم‬ 579 580 345 ‫ وكان يقول‬.‫ وليس فينا شيء منه بحمد ال ونعمته‬،‫ وهذا الدين معروف لبني شيبان‬.‫ كما قيل‬،‫ابن مصقلة‬ 581.‫ إنما هذا الرأي لبني شيبان‬،‫ ما لثقيف وهذا الرأي‬:V‫أيضا‬ Abū 'Ubayda a dit : Maṣqala mourut au Ṭabaristān. On ramena ses biens à al-Kūfa : s'y trouvait une esclave qui lui appartenait ; elle était enceinte et était radieuse. Alors alMuġīra la prit en contrepartie d'une somme d'argent qu'il lui devait. Elle lui donna pour fils Muṭarrif. Al-Ḥaǧǧāǧ avait l'habitude de dire : Si Muṭarrif avait été le fils d'alMuġīra, il ne se se rait pas rebellé contre le pouvoir. Il aurait écouté, obéi, été droit et cherché la sécurité, comme son frère Ḥamza savait écouter et obéir. Mais il est en fait le fils de Maṣqala, comme on dit. Cette religion est connue chez les Banū Šaybān. Pas chez nous, Dieu soit loué et béni. Et il disait aussi : Qu'ont les gens de aqīf à voir avec ces opinions? Ce sont là les opinions des Banū Šaybān. La mention de l'origine maternelle de Muṭarrif dans l'anecdote précédente fait bien entendu référence à celle-ci. L'histoire de cette esclave et du conflit qu'il y eut pour elle entre al-Muġīra b. Šu'ba et Maṣqala b. Hubayra est relatée en plusieurs versions dans la notice d'al-Muġīra b. Šu'ba582. Al-Ḥaǧǧāǧ attaque Muṭarrif sur sa naissance entourée de flou. Faisant siennes les rumeurs qui l'entouraient, il a donc tout loisir de le traiter d'illégitime. Ses revendications le sont donc tout autant. Elles sont à chercher, non chez les hommes de aqīf – auxquels appartenait al-Ḥaǧǧāǧ, mais aussi en théorie Muṭarrif –, mais chez les Banū Šaybān, longtemps connus pour être des brigands, mais qui ont donné naissance à nombre de chefs kharijite, dont le plus célèbre restera Šabīb. Les aqafites eux sont réputés, selon al-Ḥaǧǧāǧ – et l'allusion à lui-même n'est pas à exclure – pour leur loyauté indéfectible au pouvoir légitime. Les opinions, les revendications de Muṭarrif, des Banū Šaybān sont élevées par lui au niveau d'une religion, dīn. Ils sont donc à exclure de la communauté musulmane : leur mort serait donc légitime. Mais l'attitude d'al-Ḥaǧǧāǧ vis-à-vis de 'Urwa dément cette explication généalogique. La mère de celui-ci n'était-elle pas la fille de Sa'd b. Abī Waqqāṣ583, l'un des compagnons du Prophète? Pourtant il a subi de la part d'al-Ḥaǧǧāǧ un traitement tout aussi terrible que celui subi par son frère. Pour finir avec la révolte de Muṭarrif, citons un dernier ẖabar qui n'est pas non plus mentionné par al-Ṭabarī et qui souligne l'autre raison de la haine qu'al-Ḥaǧǧāǧ vouait aux fils d'alMuġīra. Ansāb, vol. 7, p. 3129 Ansāb, pp. 5722-5723. Il n'est peut-être pas sans intérêt de rappeler ici la réputation d'homme à femmes d'al-Muġīra, de sa fréquentation de prostituées, voire de femmes mariées, et qu'il n'échappa à la mort que grâce au témoignage bienveillant de Ziyād b. Abīh auprès du calife 'Umar. Voir en ce sens les ancdotes que lui consacre al-Balāḏurī dans sa notice, Ansāb, vol. 13, p. 5717-5726. 583 Ansāb, vol. 13, p. 5725. 581 582 346 ‫ ك انت الفارع ة بنت همام بن ع روة بن مسعود بن‬:‫ قال‬،‫ ع ن عوان ة‬،‫ عن أبيه‬،‫وح دثني عباس بن هشام‬ ‫ فخاصم الحجاج في ميراثها‬،‫ فماتت‬،‫ فولدت له ابنة‬،‫ أم الحجاج بن يوسف عند المغي رة بن شعبة‬،‫معتب‬ ‫ فكان يحقد ذلك‬.‫ ما لختك عندنا مي راث‬:‫ وقال‬،‫ فأغلظ له عروة بن المغيرة‬،‫عروة بن المغيرة إلى ابن زياد‬ ‫ قدم رسول عبد الملك إلى الحجاج بكتابه وعروة‬،‫ فلما كتب فيه إلى عبد الملك بما كتب به‬.‫على عروة‬ :‫ وق ال قوم‬.‫ فم ات تح ت الس ياط‬،‫ وه و ش يخ‬،‫ فض ربه الحج اج‬،‫ م ا ه ذا الكت اب؟ فل م يجب ه‬:‫ فق ال ل ه‬،‫عن ده‬ 584. ‫ فمات بظهر الكوفة من ذلك الضرب‬،‫أخرج من الكوفة‬ 'Abbās b. avec des revendications politiques ou religieuses, mais s'inscrit dans un différent généalogique. L'exclusion de Muṭarrif de son appartenance à aqīf à pour objectif, d'une part, de le rejeter du côté des Banū Šaybān et donc des Ṣufriyya, ce qui donne à sa mise à mort une légitimation. Mais comme nous l'avons signalé les deux autres fils d'al-Muġīra b. Šu'ba mourront également suite aux mauvais traitements infligés par al-Ḥaǧǧāǧ : Ḥamza mourra en prison et 'Urwa après avoir été fouetté. Al-Balāḏurī, toujours fidèle à sa démarche plus littéraire, en introduisant cette anecdote qui implique que Muṭarrif est un fils illégitime d'al-Muġīra b. Šu'ba – en mettant en avant la volonté de ce dernier de posséder l'esclave de Maṣqala, dans les deux sens du terme –, le rend également illégitime pour revendiquer le pouvoir. Le différend pour l'héritage entre al-Ḥaǧǧāǧ et 'Urwa apparaît dès lors comme une volonté du gouverneur d'Iraq d'accéder, par l'intermédiaire de sa demi-soeur – fille d'al-Muġīra b. Šu'ba –, à la noblesse dont il était dépourvu et qui était l'apanage des seuls fils de celui-ci. 348 Chapitre 7 : La révolte d'Ibn al-Aš'aṯ La révolte d'Ibn al-Aš'aṯ, comme nous le signalions dans la première partie de ce travail, a été la dernière révolte à laquelle al-Ḥaǧǧāǧ devait faire face. Elle a été également la plus dangereuse pour lui et pour le pouvoir de 'Abd al-Malik b. Marwān qui, en dépit de l'estime et de la confiance qu'il portait à son gouverneur, a été sur le point de le congédier, pour mettre un terme à cette révolte, au moment où elle a failli mettre en péril son califat. D'où la place très importante qu'elle occupait dans le récit d'al-Ṭabarī. Al-Balāḏurī lui confère à son tour une place de choix dans son livre. Il lui consacre un chapitre indépendant de 72 pages, qui s'intitule : 585 ‫أمر عبد الرحمن بن محمد بن الشعث بن قيس الكندي‬ L'affaire de 'Abd al-Raḥmān b. Muḥammad b. al-Aš'aṯ b. Qays al-Kindī En outre, nous avons vu qu'en parlant de la révolte d'Ibn al-Ǧārūd, il la considère comme un préambule à celle-ci, au point qu'à la fin de son récit, il la « confond » avec elle. En fin, elle constitue l'un des thèmes majeurs dans la notice d'al-Ḥaǧǧāǧ et est également mentionnée de nombreuses fois dans celle de 'Abd al-Malik. Or, comme nous traiterons dans la partie suivante de ce travail du portrait d'al-Ḥaǧǧāǧ à partir de la notice qui lui est dédiée, nous nous limiterons ici au seul chapitre propre à cette révolte. Pour la première fois depuis le début de notre comparaison des deux auteurs, nous pouvons avancer que, concernant dernier conflit, il y a plus points de rencontre que de différence entre eux. Déjà, al-Balāḏurī se conforme à un ordre chronologique plus rigoureux que dans les autres conflits. Nous retrouvons chez lui, le même découpage narratif – début, milieu, fin – que celui proposé par al-Ṭabarī. C'est-à-dire : - Défaite de 'Abd al- Raḥmān b. Abī Bakra dans sa conquête des terres de Rutbīl qui refusait de payer le ẖarāǧ. 'Abd al-Rahmān b. Muḥammad b. al-Aš'aṯ pour venger la défaite de l'armée musulmane. Ibn al-Aš'aṯ veut éviter les erreurs de son prédécesseur et prend soin de ne pas accélérer la conquête. - Al-Ḥaǧǧāǧ lui en fait le reproche, le traite de lâche et lui ordonne d'accélérer sa progression. - Ibn al-Aš'aṯ rassemble son armée, lui fait le compte-rendu du message d'al-Ḥaǧǧāǧ. C'est le début de l'insurrection. - Celle-ci prendra une ampleur populaire sans précédent, puisque le mouvement, qui était au départ militaire, sera rejoint par les qurrā', les mawālī et les nouveaux convertis. - Quatre batailles seront nécessaires à al-Ḥaǧǧāǧ pour venir à bout de ce soulèvement populaire. - Une fois le conflit terminé, les notables parmi les rebelles sont jugés et la plupart passés par les armes. - Un épilogue nous raconte la fin d'Ibn al-Aš'aṯ. La comparaison du récit d'al-Balāḏurī avec celui d'al-Ṭabarī montre clairement que les deux auteurs disposaient des mêmes sources. Il serait fastidieux d'en faire la comparaison totale. Il suffit de renvoyer à quelques pages pour voir que les comptes-rendus qu'ils proposent sont à certains endroits identiques et agencés dans le même ordre, au mot près. Bien entendu, al-Balāḏurī se limite souvent à dire : qālu ou qāl, là où al-Ṭabarī note à chaque fois son isnād. De plus, les citations poétiques qu'il propose sont encore plus nombreuses, et les anecdot comiques ou à allusions sexuelles sont encore présentes. Par ailleurs, si les deux auteurs considèrent que la bataille d'al-Ǧamāǧim constitue le point central du récit du conflit, certains aẖbār sont plus développés tantôt chez l'un, tantôt chez l'autre. Ainsi, l'assimilation partielle de la révolte à une opposition entre 'Alides et Umayyades, tout comme son caractère populaire sont également mis en évidence. Une grande différence se situe dans l'épilogue du conflit constitué par la comparution des rebelles après la défaite de leur armée et leur jugement par al-Ḥaǧǧāǧ. Al-Balāḏurī n'en cite que quelques exemples – en particulier ceux d'al-Ša'bī et de Sa'īd b. Ǧubayr –, préférant les traiter dans la notice consacrée à al-Ḥaǧǧāǧ ou dans celle de 'Abd al-Malik. Un autre personnage qui avait déjà été mis en valeur par al-Ṭabarī, est dépeint également de manière positive par al-Balāḏurī, comme exemple de loyauté et de stratégie militaire. Il s'agit bien entendu d'al-Muhallab b. Abī Ṣufra. Nous avons vu également l'importance accordée par al-Ṭabarī au poète de la révolte, A'šā Hamdān. Al-Balāḏurī lui aussi le présente comme en étant le chantre, à la différence qu'il cite un poème dont al-Ṭabarī ne mentionne que deux vers. En outre il rapporte également une de ses satires contre Ibn al-Aš'aṯ, avant le début de l'affrontement. Il ne parle de son jugement que de façon sommaire, dans la notice de 'Abd al-Malik, mais ne signale pas le long poème apologétique rapporté à cette occasion par al-Ṭabarī. Quant aux éléments du portrait d'al-Ḥaǧǧāǧ, nous les retrouvons partiellement dans les causes de la révolte, ainsi que dans les séances de comparution des prisonniers iraqiens. Afin d'éviter les répétitions avec notre lecture du récit d'al-Ṭabarī, nous nous arrêterons pour chacun de ces éléments sur certains anecdotes absentes de son récit, ainsi que sur l'agencement de certaines séquences, pour souligner l'utilisation qu'en fait al-Balāḏurī. 1. Le rôle d'Ibn al-Aš'aṯ Si nous tenons compte des remarques introductives, nous pouvons avancer que plusieurs éléments nous laissent penser que le récit d'al-Balāḏurī a été agencé de telle sorte que la défaite des Iraqiens soit imputée en premier lieu à Ibn al-Aš'aṯ. Entre autres, c'est un homme impie ; ensuite il a écrit de fausses lettres qu'il a attribuées à al-Ḥaǧǧāǧ. En effet, dès l'introduction de son chapitre, Ibn al-Aš'aṯ est présenté comme un vaniteux et un fornicateur : ‫ عن شيخ م ن‬،‫ عن سحيم بن حفص‬،‫ حدثني عمي‬:‫ قال‬،‫ مولى باهلة‬،‫حدثني روح بن عبد المؤمن المقرىء‬ ‫ وك ان ش خص إل ى‬.‫ عظي م الك بر‬،‫ ك ان عب د الرحم ن ب ن محم د ب ن الش عث ب ن قي س معجب ا‬:‫ ق ال‬،‫كن دة‬ ‫ فشهد عليه‬.‫ فأخذ معها‬.‫ يقال لها ماهنوس‬،‫ فجعل يختلف إلى بغي‬.‫سجستان مع خال له في طلب ميراث‬ ‫ فضرب‬،‫ ويزيد بن زهير‬،‫ ومحمد بن قرظة‬،‫[ وشهد عليه مع ه زفر بن عم رو الف زاري‬]. ‫ك ردم الف زاري‬ ،‫ ودس إليهم قوما‬،‫ فأساء بهم‬.‫ وقد ولي سجستان‬،‫ حتى صار هؤلء النفر في جنده‬،‫ ولم تذهب اليام‬.‫حدا‬ :‫ فقال قائلهم‬.‫ فحدهم‬،‫شهدوا عليهم بالزنا‬ ‫ر‬T‫ز‬U‫و‬T ‫ى‬W‫عل‬W ‫ت‬ U ‫أ‬T‫نا ب‬W‫ب‬QU ‫أ‬W‫ف‬ W ‫ل‬U‫م‬ W‫شت‬U ‫وا‬W ‫ر‬P ‫ج‬W T ‫ب‬T‫ت ب‬ ~ ‫ح‬W T‫نا ب‬W‫د‬U ‫ه‬T ‫ش‬W ‫ل‬P ‫اط‬ W W ‫م‬U W‫ق‬W‫انت‬U ‫و‬W ‫ق‬ ‫ ثم إنه رفع على‬.‫ وفارق ابن الشعث‬،‫ خرج عيينة بن أسماء الفزاري إلى الحجاج‬،‫فلما كانوا بدير الجماجم‬ ‫ فيقول عدونا‬،‫ ل تقتلوهم‬:‫ وقال‬،‫ فحبسهم الحجاج‬.‫ وعلى رأيه‬،‫هؤلء النفر أنهم كانوا موافقين لبن الشعث‬ 586. ‫ل فقتلهم‬ V ‫ فأتاهم بعض أصحابه لي‬.‫إنا نقتل أصحابنا‬ 586 Ansāb, vol. 7, pp. 3027-3028. b 'Abd al-Mu'min al-Muqri', le mawlā de Bāhila m'a rapporté que son oncle lui a , d'après Suḥa b. Ḥafṣ, d'après un vie illard originaire de Kinda : 'Abd al-Raḥmān b. Muḥammad b. al-Aš'aṯ était van iteux et très hautain. Il était arrivé au Siǧistān avec l'un de ses oncles maternels pour récupérer un héri tage. Il se mit alors à fréquenter une prostituée nommée Māhanūs. On le prit sur le fait avec elle. Parmi ceux qui ont témoigné contre lui, il y avait Kardam al-Fazārī [], Zufar b. 'Amr al-Fazārī, Muḥammad b. Quraẓa et Yazīd b. Zuhayr. Il fut châtié au fouet. Peu de temps après, ces hommes intégrèrent son armée, lorsqu'il gouverna Siǧistān. Il les maltraita, en envoyant en sous-main des hommes qui témoignèrent contre eux de fornication. Alors il les châ tia. L' un d 'eux dit : Notre témoign age étai t sincère, mais ta vengeance se fonda sur un mensonge // Nous avon s recueilli une rétribution , mais tu t' es al ourdi d'un péché Quand ce fut la bataille de Dayr al-Ǧamāǧim, 'Uyayna b. Asmā' al-Fazārī quitta Ibn alAš'aṯ et rejoignit al-Ḥaǧǧāǧ. Puis il déclara que ce groupe d'hommes était d'accord avec les idées d'Ibn a-Aš'aṯ. Al-Ḥaǧǧāǧ les emprisonna, en disant : Ne les tuez pas, sinon notre ennemi dira que nous assassinons les nôtres. L'un de ses (?) compagnons vint la nuit et les tua. A sens, cette anecdote joue ici un rôle de prolepse. En faisant apparaître Ibn al-Aš'aṯ comme quelqu'un de moralement vil, il énonce déjà l'échec de la révolte dont il prendra la tête. En effet, c'est un homme arrogant, un fornicateur, un sournois. Pris en flagrant délit, il est châtié, en étant fouetté. Une fois qu'il est devenu gouverneur du Siǧistān, il se vengera de ceux-là mêmes qui avaient témoigné contre lui, mais en poussant des hommes à fabriquer des faux témoignages contre eux, pour le même délit, mais imaginaire cette fois-ci. C'est ce que précise le vers anonyme déclamé par l'un d'eux. En outre, la deuxième partie du ẖabar, nous présente al-Ḥaǧǧāǧ qui, par contre, agît avec perspicacité. Ces mêmes hommes qui avaient témoigné contre Ibn al-Aš'aṯ, se trouvant maintenant prisonniers chez le gouverneur d'Iraq, ce dernier ne veut pas donner une mauvaise image de lui-même à son ennemi. C'est pourquoi il décide de ne pas les tuer. Et ce sont des hommes d'Ibn al-Aš'aṯ qui les auraient assassinés, bien que le pronom de aṣḥābuh, dans la dernière phrase, ne soit pas très précis sur le sujet auquel il se rapporte. Une autre histoire de fornication se répètera quelques pages plus loin, avec un autre personnage, le poète Abū Ḥuzāba, connu pour ses satires, alors que l'armée d'Ibn al-Aš'aṯ était déjà en route vers l'Iraq : :‫ فقال‬،‫ تعرض له‬،‫ فلما وردها ابن الشعث‬.‫وكان أبو حزابة – وهو الوليد بن حنيفة – ][ بكرمان‬ 352 T T T ‫ج‬T‫ر‬U ‫الم‬ W ‫رسي في‬W W‫راني ف‬WW‫ما ت‬W W‫أ‬ T ‫ن‬R‫ة ال‬T ‫ن‬WU‫فت‬T ‫في‬T ‫ج‬T‫ر‬U W‫ذا اله‬W ‫ه‬W ‫و‬W ‫اس‬ ‫ج‬S ‫ش‬W W‫ ال‬W‫دة‬W ‫ن‬U ‫ك‬T ‫يع‬ T ‫ر‬T W‫ن ق‬W ‫ب‬U ‫يا‬W ‫جي‬T‫سر‬ U ‫ب‬W‫ه‬W ‫ذ‬W ‫وش‬ Q ‫ن‬Q‫اه‬ W ‫م‬W ‫و‬W U T‫ت ب‬ ،‫ يقال لها ماهنوش‬،‫ا عند بغي‬V ‫ قبحه ال! وكان قد رهنه على خمسين درهم‬،‫ افتك وا سرجه‬:‫ وقال‬،‫فضحك‬ 587. ‫ شج في بعض أيامهم‬،‫ والشج قيس بن معديكرب‬.‫وبات ليلته عندها‬ Abū Ḥuzāba – al-Walīd b. Ḥanīfa [] – était installé à Kirmān. Lorsqu'Ibn al-Aš'aṯ y arriva, il alla le voir et lui dit : Ô descendant du prince de Kinda, l'homme à la balafre // Ne vois-tu que mon cheval est indisponible Māhanūš a pris ma selle // alors que la foule est en pleine effervescence [pour la guerre] Ibn al-Aš'aṯ, rit et dit : Libérez sa selle, Dieu le maudisse. Il l'avait posée en gage pour cinquante dirham chez une prostituée, du nom de Māhanūš, chez qui il avait passé la nuit. Al-Ašāǧǧ est Qays b. Ma'dī Karib, qui fut blessé lors d'une bataille. En tant que chef suprême de l'armée, Ibn al-Aš'aṯ se devait ici de châtier le poète Abū Ḥuzāba, parce qu'il a avoué lui-même son délit de fornicateur. Et ce qui aggrave son cas, c'est que l'armée rebelle était en pleine préparation pour le combat. Or la réaction d'Ibn al-Aš'aṯ est tout le contraire d'un chef pieux : puisqu'il rit et demande à ses hommes de libérer la selle mise en gage par le poète auprès de la prostituée, dont le nom est à une lettre près le même que celui de la prostituée avec laquelle Ibn al-Aš'aṯ avait commercé aussi : Māhanūš / Māhanūs. ك إل كت اب رج ل يح ب الهدن ة‬،‫ ي ا ب ن الح ائك الغ ادر‬:‫ فكت ب إلي ه‬.‫وكت ب إل ى الحج اج ب ذلك‬ ‫ إنك حين تكف عن ذلك العدو ومعك جندي‬،‫ولعمري يا بن أم عبد الرحمن‬. ‫والموادعة لعدو قليل ذليل‬ ،‫ ولكني عددته ضعفا وجبنا‬،‫ إني لم أعدد رأيك مكيدة‬.‫ لسخي النفس عمن أصيب من المسلمين‬،‫وحدي‬ ‫ حتى يفتحها ال‬،‫ فإنها داركم‬.‫ والهدم لحصونهم‬،‫ فامض لما أمرتك به من الوغول في أرضهم‬.‫والتياث رأي‬.‫عز وجل عليكم‬ ،‫ وهو وال الجبان‬،‫ يكتب إلي ابن أبي رغال بمثل هذا الكتاب‬:‫ وقال‬،‫فأغضب عبد الرحمن بن محمد ذلك‬.[] ‫وأبوه من قبله! وعزم على خلع الحجاج‬ ،‫ وفيما يعمكم نفعه ناظر‬،‫ ولصلحكم محب‬،‫ أيها الناس إني وال لكم ناصح‬:‫ وقال‬،‫فأظهر خلع الحجاج‬ ‫وان‬Z ،‫ فأشاروا علي بما علمتم من ترك التوغل في بلد العدو‬،‫وقد استشرت ذوي أحلمكم والتجربة منكم‬ ‫ كم ا غرر ب إخوانكم‬،‫ر لجم اعتكم‬V‫ وأمرني أن أتوغ ل بكم تغري ا‬،‫الحج اج كت ب إلي بإنك ار ذلك وكراهت ه إي اه‬ ‫ فإن ابن أبي رغال ل يريد‬،‫ ل بل نأبى على عدو ال عز وجل أمره ول نسمع له ول نطيع‬: ‫ فقالوا‬،‫بالمس‬ ‫ وع زل‬،‫ م ن الحج اج ف ي تولي ة ق وم‬V‫ وافتع ل كتاب ا‬،‫ وح ل ألوي ة م ن أب ى منه م‬،‫ وعق د لم ن وث ق ب ه‬،‫ر‬V‫بن ا خي ا‬ 589. ‫ أشرافا‬V‫ وكانوا وجوها‬،‫ ليفسد قلوبهم‬،‫آخرين‬ Il écrivit à al-Ḥaǧǧāǧ, qui lui répondit : Ô fils du traître tisserand! Ta lettre est celle d'un homme qui aime la trêve, préfère l'atermoiement, alors qu'il affronte un ennemi vil et de peu de valeur. Je te jure, ô fils d'Umm 'Abd al-Raḥmān, si tu cesses de com battre cet ennemi avec mes soldats et mes armes, c'est que tu as une âme vile qui mé prise les musulmans morts. Je ne considère pas ton opinion comme une ruse, mais c'est signe de faible, de lâcheté et d'opinions confuses. Alors, entreprends ce que je t'ai ordonné : pénètre leur territoire, détruis leurs forteresses. Ce sera là votre demeure, jusqu'à ce que Dieu, glorifié soit-Il vous en permette la conquête. 'Abd al-Raḥmān entra dans une telle fureur [après avoir lu la lettre d'al-Ḥaǧǧāǧ], et dit : Ibn Abū Riġāl m'écrit une telle lettre à moi, alors que, par Dieu c'est loi le lâche, et son père avant lui. 354 hier. Les hommes dirent : Nous refusons l'ennemi de Dieu, glorifié soit-Il. Nous ne l'écoutons ni ne lui obéissons. Car Ibn Abū Riġāl ne nous veut pas du bien. Ibn al-Aš'aṯ nomma les hommes en qui il avait confiance, s'empara des étendards de ceux qui rejetaient son projet. Puis il forgea une lettre attribuée à al-Ḥaǧǧāǧ, désignant les uns, congédiant d'autres, qui étaient des grands notables, pour les retourner contre lui. Cette séquence est extraite d'un long ẖabar d'al-Madā'inī qui intervient après qu'Ibn al-Aš'aṯ et son armée eurent remporté leurs premières batailles contre l'armée de Rutbīl. Il décida alors de temporiser, afin que ses hommes prennent leurs marques dans les terres de Siǧistān. Puis il écrivit une lettre pour informer al-Ḥaǧǧāǧ de cette décision. Nous ne reviendrons pas sur le contenu de la lettre que nous avons déjà analysée dans le récit d'al-Ṭabarī. Nous relèverons simplement que la version d'al-Balāḏurī lui est quasi identique, à la seule différence qu'al-Ḥaǧǧāǧ ici traite Ibn alAš'aṯ de traître. Ce qui est une indication déjà sur ses intentions futures. Ce qui nous importe par contre c'est de souligner que le reste du ẖabar montre clairement qu'Ibn al-Aš'aṯ comptait trahir al-Ḥaǧǧāǧ dès le début. Le discours qu'il prononça alors à son armée découle de cette volonté de rejeter l'autorité d'al-Ḥaǧǧāǧ. Ainsi leur présente-t-il l'ordre de ce dernier comme une volonté de sa part de les détruire, comme « leurs frères avaient été détruits dans la guerre précédente ». Et l'on notera également que, contrairement au récit d'al-Ṭabarī, où il se définit en homme comme eux, ici il s'adresse à eux en s'excluant des conséquences, comme pour les amener à prendre d'eux-mêmes la décision qui s'imposait : rejeter l'autorité d'al-Ḥaǧǧāǧ. Parce qu'en ce qui le concerne, nous dit le ẖabar, Ibn al-Aš'aṯ, avait fini par afficher publiquement la sienne. En fin, son plan était bien préparé, puisqu'il avait fabriqué une fausse lettre attribuée à alḤaǧǧāǧ, afin de retourner en sa faveur les notables qui, après la lettre comminatoire de ce dernier seraient enclins à lui garder quelque loyauté. Nous le voyons bien : alors que dans le récit d'alṬabarī, Ibn al-Aš'aṯ fut loyal jusqu'au moment où il reçoit la lettre d'al-Ḥaǧǧāǧ, ici il semble avoir tout planifié, et pris prétexte sur celle-ci pour mettre son plan a exécution. Voici, pour finir, un autre ẖabar, qui n'était pas présent dans le récit d'al-Ṭabarī, et qui met en scène la cruauté d'Ibn al-Aš'aṯ : ‫ لما عاهد عبد الرحمن بن محمد بن الشعث‬:‫ قال‬،‫ عن جده‬،‫ عن أبيه‬،‫وحدثني عباس بن هشام الكلبي‬ ‫ على رج ل‬،‫ يقال له فندش بن حيان الهمداني‬،‫ وثب رجل من همدان‬،‫ وكتب بينه وبينه كتاب الوثيقة‬،‫رتبيل‬ ‫ فشجه شجة‬،‫ فض ربه فندش بعود معه‬.‫ جرى بينه وبينه خلف في شيء‬،‫ من أصحاب رتبيل‬،‫من الكفار‬ ‫ وكان‬،‫ فقال أعشى همدان‬.‫ فأمر عبد الرحمن بقتله‬.‫ ولم يقتله‬،‫ فبعث رتبيل إلى عبد الرحمن بفندش‬.‫خفيفة‬ :‫ له‬V‫ ونديما‬V‫فندش صديقا‬ W ‫ل‬U‫في س‬ ‫ء‬ ‫من المر‬ T ‫ ‬ ‫ف‬ ‫المت‬ R T‫ما ب‬W ‫ذا‬W ‫ذ إ‬U‫و‬R ‫ع‬W W‫ت‬ ‫ش‬ ‫ة‬P ‫ع‬W ‫ج‬U ‫ه‬W ‫د‬T‫ع‬U ‫ب‬W ‫ن‬U ‫م‬T ‫ت‬ Q UW W Q ‫طانه‬ P T ‫م‬S ‫ح‬W W‫مت‬Q ‫ه‬T ‫ال‬T ‫خو‬W ‫ش‬ S ‫ف‬ Q ‫ط‬T ‫ع‬U W‫ل ت‬W ‫ل‬P ‫ج‬Q‫ر‬W ‫ن‬U ‫م‬T ‫و‬W Q‫به‬W‫ل‬U‫ق‬W ‫م‬Q ‫ح‬U ‫الر‬ W U ‫ى أ‬W‫عل‬W ‫ريء‬T ‫ج‬W P ‫ش‬W ‫ج‬P ‫ل ‬W T ‫ط‬T ‫ب‬U ‫ي‬W ‫اء‬ ‫ش‬ P ‫س‬W ‫ه‬T T‫ت‬U‫يأ‬W ‫ى‬W‫مت‬W U ‫ب‬W ‫ديد‬ Q‫ابه‬Q ‫ق‬W ‫ع‬T ‫و‬W Q‫شه‬Q ‫ط‬ Q W ‫ي‬W‫م‬U ‫ع‬W ‫ب‬T ‫اع‬ P T P Q‫بمصق‬T ‫ت‬ T ‫الع‬ T ‫د‬W ‫ن‬U‫ف‬W W‫لوة‬W ‫ع‬T ‫ول‬ ‫ش‬ ‫ا‬W‫مه‬Q ‫ل‬U‫ك‬W ‫م‬W ‫د‬U ‫ي‬Q ‫م‬U W‫ود ل‬ W Q T‫شة ب‬W ‫د‬U ‫خ‬W ‫في‬W‫أ‬ W W ‫ب‬U‫ر‬W ‫ض‬ W T ‫يل ص‬ T ‫م العر‬T‫في يو‬T ‫قت‬ P ‫ت‬T ‫ق‬W ‫ير‬U ‫غ‬W ‫ب‬T T W‫نت‬U ‫م‬Q ‫ر‬W ‫ي‬U ‫غ‬W ‫ا‬V‫احي‬ ‫ش‬ W ‫ه‬W‫ز‬WU ‫وأ‬W Q‫سه‬W ‫ف‬U ‫ن‬W ‫وبة‬ W QQ U W W T ‫ر‬W ‫ف‬U ‫م‬T ‫ط‬ [] ‫ش‬ W ‫س‬U ‫و‬W ‫ة‬P‫ار‬W ‫و‬R ‫خ‬W ‫ى‬W‫عل‬W ‫ت‬ W ‫ن‬WU ‫وأ‬W Q‫ه‬W‫لت‬UW‫قت‬W W‫ ف‬Q‫ه‬W‫تل‬U W‫ل ق‬Q ‫ي‬T‫ب‬U‫رت‬Q ‫بى‬WW‫أ‬ ‫ فنودي يوما‬،‫ وهم في عسكر ابن الشعث‬،‫ كانوا على ش راب له م‬،‫ويقال إن فندشا والعشى ورجل آخر‬ ‫ فعله‬.‫ ل نري م ح تى نف رغ م ن بنا‬:‫ فق ال فن دش‬،‫ ف أمرهم باللح اق بالن اس‬،‫ فم ر به م المن ادي‬،‫بالس لح‬ ‫ فأمر بقتل‬.‫ فانطلق إلى ابن الشعث فأعلمه‬.‫ فوثب فندش عليه فضربه بعصا على رأسه‬.‫المنادي بالسوط‬ 590. ‫ والول أثبت‬.‫ فقتل‬،‫فندش‬ 'Abbās b. Hišām al-Kalbī m'a rapporté, d'après son père, d'après son grand-père, qui a dit : Lorsque 'Abd al-Raḥmān b. Muḥammad b. 356 devant eux et leur ordonna de rejoindre les soldats. Alors Fandaš lui dit : Nous ne bougerons pas tant que nous n'aurions pas fini notre boisson. Le crieur allait lui donner un coup de fouet, quand Fandaš se dressa et lui asséna un cou de bâton à la tête. Le crieur alla se plaindre à Ibn al-Aš'aṯ qui ordonna qu'on tue Fandaš. Mai la première recension est la plus plausible. On pourrait dire que la partie en prose du ẖabar apparaît comme un commentaire de la pièce poétique, ou que celle-ci en est l'illustration. Al-Balāḏurī donne deux versions de la mise à mort de Fandaš, tout en intervenant pour souligner que, selon lui, c'est la première qui est la plus sûre. Nous retrouvons ici une critique violente d'Ibn al-Aš'aṯ, accentuée par la satire d'A'šā Hamdān, qui n'est autre que son oncle maternel. Ce qui est, d'une certaine manière, une preuve supplémentaire contre lui. Le comportement extrême du chef de la révolte est comparé à celui de Rutbīl, aussi bien dans le texte que dans le poème. Ce dernier, en toute logique aurait dû être plus sévère, étant donné que l'homme qui a été blessé appartenait à son armée. Or il n'en fut rien. Le châtiment de Fandaš est bien entendu excessif, car il ne s'agissait que d'une blessure légère, qui n'a même produit de saignement, selon le poème. Pour aggraver encore l'attaque contre Ibn al-Aš'aṯ, le châtiment extrême a lieu un vendredi, jour de la prière collective, et donc de recueillement, pour s'approcher de Dieu. En agissant de la sorte, Ibn al-A 'aṯ apparaît tout simplement comme al-Ḥaǧǧāǧ qu'il critiquait pour sa violence et son impiété. Ce même comportement vis-à-vis des siens se répétera dans une scène toute proche. C'était lors de la bataille de Tustar, remportée par les hommes d'Ibn al-Aš'aṯ. Un ẖabar anonyme nous dit : ‫ ابدأوا‬:‫ فقال‬.‫ أنا أحد أخوالك‬،‫ أصلح ال المير‬:‫ فقال لبن الشعث‬.‫وكان في السرى رجل من همدان‬ 591. ‫ ويقال عشية عرفة‬.‫ يوم الجمعة‬،‫ سنة إحدى وثمانين‬،‫ وذلك يوم النحر‬.‫ وقتل‬،‫بخالي! فقدم‬ Parmi les prisonniers, il y avait un homme de Hamdān, qui dit à Ibn al-Aš'aṯ : Dieu préserve le gouverneur, je suis l'un de tes oncles maternels. – Commencez par mon oncle, ordonna Ibn al-Aš'aṯ. On le présenta et le décapita. 357 Tout comme al-Ṭabarī, al-Balāḏurī consacre une bonne partie de son récit à la fuite puis la mort d'Ibn al-Aš'aṯ, qui apparaît dès lors comme une leçon morale sur la trahison. Il souligne le comportement des trois lieutenants-gouverneurs qu'Ibn al-Aš'aṯ avait nommés lors de la révolte. Seul Rutbīl semble prêt à tenir l'engagement qu'il avait contracté avec lui auparavant. C'est donc auprès de lui qu'il trouvera refuge. Toutefois, al-Ḥaǧǧāǧ multipliant les menaces et les offres, finira par faire céder Rutbīl aussi, en lui écrivant : ‫ فأم ا مع دي‬.‫ فإن الكذاب الشرود ع دو الرحمن بن محم د بن الشعث بن قي س بن معدي كرب‬،‫أم ا بعد‬ ،‫ وأما قيس‬.‫ وملوه حصى‬،‫ وشقوا بطنه‬،‫ فجدعوا أنفه وأذنيه‬،‫ فظفروا به‬،‫ فغدر بهم‬،‫ فإنه عاهد مهرة‬،‫كرب‬.‫ فأسلمهم لينجو‬،‫ وغدر بقومه‬،‫ فإنه كفر بعد إيمانه‬،‫ وأما الشعث‬.‫ فقتلوه‬،‫ ثم غدر بهم‬،‫فإنه عاهد مذحج‬ ،‫ فل تثق به‬.‫ معرق له في الغدر والفجور‬،‫ وهذا رجل غدار فاجر مائق‬.‫ فغدر بأهل طبرستان‬،‫وأما محمد‬ 592. ‫ول تمنعه ول تؤوه‬ Bref, sache que le menteur, le fuyard, l'ennemi du Miséricordieux est le fils de Muḥammad, fils d'al-Aš'aṯ, fils de Qays, fils de Ma'dī Karib. Pour ce qui est de Ma'dī Karib, il avait fait un pacte avec la tribu de Muhra, mais les a trahis . Lorsqu'ils l'attrapèrent, ils lui coupèrent le nez et les oreilles, lui fendirent le ventre et le remplirent de gravier. Qays, à son tour, avait fait un pacte avec Maḏḥiǧ et les a trahis, alors ils l'ont tué. Quant à al-Aš'aṯ, il a renié sa foi après être devenu musulman, puis il a trahi les siens qu'il a livrés pour sauvé sa peau. Muḥammad, lui, il a trahi les gens du Ṭabaristān. L'homme qui est chez toi est un traître, un fornicateur, un imbécile, qui est bien enraciné dans la traitrise et la fornication. Ne lui fais pas confiance, tu ne dois le défendre ni lui offrir un refuge. Cette lettre d'al-Ḥaǧǧāǧ à Rutbīl dresse une généalogie de la trahison de 'Abd al-Raḥmān b. Muḥammad b. al-Aš'aṯ sur cinq générations, pour le dissuader de lui offrir sa protection. Chacun des aïeuls de 'Abd al-Raḥmān est caractérisé par un fait infamant. Et en fait, toute la section sur sa mort n'est qu'une suite de trahisons : depuis 'Ubayd b. Sab'593, le commerçant qui était avec Ibn alAš'aṯ, avant de passer du côté de Rutbīl et servir d'intermédiaire entre ce dernier et al-Ḥaǧǧāǧ pour livrer Ibn al-Aš'aṯ, jusqu'aux lieutenants-gouverneurs dont les noms sont comme prédestinés : l'un d'eux se prénommait al-Ba''ār qui, selon l'une des versions594, participera à sa mise à mort. Al-Balāḏurī multiplie lui aussi les versions sur la mort d'Ibn al-Aš'aṯ, dont la plus chargée de symboles est sans doute celle d'al-Madā'inī, dont nous donnons cet extrait : Ansāb, vol. 7, p. 3076. Ansāb, vol. 7, p. 3077. 594 Ansāb, vol. 7, p. 3078. 592 593 358 ‫ وت رك اب ن‬،‫ ق د جاش ت نفس ي‬:‫ فق ال‬،‫ ق ام رتبي ل‬،‫ فلم ا جل س‬.‫ ف دخل عل ى رتبي ل‬،‫وج اء اب ن الش عث‬ ،‫ فضرب رأسه بعمود حديد كان معه‬،‫ وقد كان أخرج من محبسه‬،‫ فقام إليه البعار‬.‫الشعث في المجلس‬.‫ فأوثقوه وناسا من آل ابن الشعث‬،‫ أخذت لها جعل! ثم أخذوا ابن الشعث‬،‫ ويلك‬:‫ فقال‬.‫فشجه وأثخنه‬ ‫ وبعث بابن الشعث ومن معه من حرمه إلى عمارة بن‬.‫ فاذهبوا حيث شئتم‬،‫ إنكم آمنون‬:‫وقيل لصحابه‬ ‫ وصير‬.‫ فسلموهم إلى عمارة بن تميم‬،‫ ووكل بهم جماعة من جند رتبيل‬.‫ لينفذهم إلى الحجاج‬،‫تميم اللخمي‬ ‫ فلق ب أب ا‬،‫ ك ان أت ى عن زا‬،‫ م ن بن ي ربيع ة ب ن حنظل ة‬V‫ وس ير مع ه رجل‬،‫عليه م عم ارة رجل م ن بن ي تمي م‬.‫ رم ى اب ن الش عث نفس ه م ن جب ل‬،‫ فلم ا ص ار بالرخ ج‬.‫ فجع ل م ع اب ن الش عث ف ي سلس لة واح د‬.‫العن ز‬ ‫ أنشدك ال‬:‫ وأبو العنز يقول له‬،‫ فتدهدى‬.‫ وأبو العنز فوقه‬.‫ويقال من فوق سطح عال كان إلى الطريق‬ 595. ‫ ثم لم يلبث ابن الشعث أن مات‬.‫ مات أبو العنز‬،‫والصحبة! فلما وافيا الرض‬ Ibn al-Aš'aṯ entra auprès de Rutbīl, puis s'assit. Ce dernier se leva aussitôt, en disant : J'ai le coeur serré! et le laissa dans le salon. Al-Ba''ār, qu'on avait sorti de sa cellule, se leva et le frappa avec une masse de fer qu'il avait sur lui, et le blessa grièvement. Ibn al-Aš'aṯ lui dit : Maudit, tu as été rétribué pour ça! Ibn al-Aš'aṯ ainsi que des membres de sa famille furent arrêtés. On l'entrava. A ses compagnons, il fut dit : Vous avez l'aman, partez où vous voulez. Trois modèles de trahison sont impliqués ici. Le premier est Rutbīl qui est d'une part terrorisé par al-Ḥaǧǧāǧ, qui l'a menacé de lui envoyer une armée de deux cents mille hommes s'il ne lui livrait pas Ibn al-Aš'aṯ et, de l'autre, il lui propose de le dispenser de payer le ẖarāǧ. Lorsque ce dernier est introduit chez lui, il déclare qu'il a le coeur serré, signe qu'il est sur le point de commettre un acte moralement répréhensible. Le second est al-Ba''ār, dont le surnom est très explicite – le Merdeux. Il était l'un des hommes d'Ibn al-Aš'aṯ. Mais une fois celui-ci ayant perdu la guerre, il lui ferma les portes de sa ville, pour s'attirer la sympathie d'al-Ḥaǧǧāǧ. Arrêté par Rutbīl, c'est lui qui se charge de frapper Ibn al-Aš'aṯ. Le dernier n'est autre qu'Ibn al-Aš'aṯ luimême, qui entraîne dans sa chute et, donc, sa mort, un homme innocent, Abū al-'Anz. Il s'agit sans doute d'une parabole signifiant qu'il a causé la mort de nombreux musulmans innocents qui se sont laissés entraînés par ses revendications, telles les chèvres d'Abū al-'Anz. 3. Eloge de la clairvoyance d'al-Muhallab Bien qu'ayant servi les Zubayrides avant les Marwanides, al-Muhallab b. Abī Ṣufra est présenté comme l'une des rares personnalités respectables, aussi bien par al-Ṭabarī que par al-Balāḏurī. Nous avons vu son attitude conciliante face aux remarques désobligeantes d'al-Ḥaǧǧāǧ à son égard, et comment il a su rester intransigeant quant à la manière de diriger ses opérations militaires jusqu'à la victoire finale contre les Azraqites. Al-Ḥaǧǧāǧ lui a alors reconnu ses qualités, l'a honoré et nommé lieutenant-gouverneur du Ḫurāsān. Cette clairvoyance d'al-Muhallab pourrait servir de miroir où se refléterait l'image d'un Ḥaǧǧāǧ brutal, qui manque de patience et de stratégie à long terme. Nous avons vu qu'al-Ṭabarī interrompt le fil des événements de l'année 82, pour consacrer plusieurs pages à la mort d'alMuhallab et de son fils al-Muġīra596. Il y donne son célèbre discours-testament à ses fils, présenté comme un précis de l'art de gouverner, ainsi que deux thrènes, l'un dédié à lui, l'autre à son fils. Et bien qu'il n'ait pas participé directement à la révolte d'Ibn al-Aš'aṯ, son portrait de sage, prodiguant les bons conseils au bon moment ne s'infirme pas ici. Etant installé au Ḫurāsān, alMuhallab n'intervient que par courriers interposés. Mais ses interventions se révéleront à chaque fois judicieuses : d'un côté, pour mettre en garde Ibn al-Aš'aṯ contre cette entreprise de tous les dangers la « communauté de Muḥammad »597 ; de l'autre, pour conseiller al-Ḥaǧǧāǧ sur l'attitude à adopter vis-à-vis des soldats iraqiens. Al-Ṭabarī cite les différentes missives d'al-Muhallab dans les événements de l'année 81. Nous avons vu qu'al-Ḥaǧǧāǧ ne suit pas ses conseils, en insinuant qu'ils étaient destinés à faire 596 597 Ṭabarī, Tārīẖ, vol. 6, pp. 350-356. Ansāb, vol. 7, p. 3038. 360 gagner Ibn al-Aš'aṯ, originaire comme lui du Yémen 598. Mais une fois qu'il a été défait dans la bataille de Tustar, il conviendra qu'il s'agissait de conseils justes : « C'est un vrai chef militaire. Il nous a prodigué le bon conseil, mais nous l'avons rejeté. »599 Le récit d'al-Balāḏurī donne plus d'informations que celui d'al-Ṭabarī. Selon les comptes rendus qu'il propose, Ibn al-Aš'aṯ l'aurait invité à rentrer en sédition avec lui : ‫ أن عبد الرحمن بن‬،‫ عن ابن عيينة‬،‫ حدثنا وهب بن جرير‬:‫ قال‬،‫حدثني خلف بن سالم وأحمد بن إبراهيم‬ ‫ ما كنت لغدر بعد سبعين‬:‫ فقال المهلب‬.‫ كتب إلى المهلب يسأله الخلع معه‬،‫ لما خلع‬،‫محمد بن الشعث‬ ‫ اتق ال‬:‫ قل له‬:‫ وقال لرسوله‬.‫ يدعوني إلى الغدر من بعض ولدي أكبر منه‬،‫ ما أعجب هذا‬:‫ ثم قال‬.‫سنة‬ 600. ‫ وبعث به إلى الحجاج‬.‫ ولم يجبه عن كتابه‬.‫في دماء المسلمين‬ Ḫalaf b. Sālim et Aḥmad b. Ibrāhīm m'ont dit que : Wahb b. Ǧarīr, nous a rapporté, d'après Ibn 'Uyayna que : Lorsqu'il rejeta [l'autorité d'al-Ḥaǧǧāǧ], 'Abd al-Raḥmān b. Muḥammad b. al-Aš'aṯ écrivit à al-Muhallab, lui demandant de la rejeter avec lui. Ce dernier dit : Je ne vais pas trahir après soixante-dix ans. Puis il ajouta : Qu'il est infatué celui-ci! Il me demande de trahir, alors que certains parmi mes fils sont plus âgés que lui. Et il dit à son messager : Dis-lui : Crains Dieu pour le sang des musulmans. Mais il ne répondit pas à sa lettre, qu'il l'envoya à al-Ḥaǧǧāǧ. Al-Muhallab réagit ici d'abord avec virulence à la proposition d'Ibn al-Aš'aṯ. Puisqu'il nous est dit qu'il ne lui a pas répondu par écrit. Car, non seulement elle met en doute sa loyauté au pouvoir légal de Damas et, par extension, à celui d'al-Ḥaǧǧāǧ, mais elle contrevient au respect dû à un homme âgé, à un chef militaire qui n'a plus à faire ses preuves, par un jeune homme plein d'orgueil. Comme s'il avait peur d'être accusé par al-Ḥaǧǧāǧ d'être un séditieux – ce qui ne manquera pas d'arriver –, il lui envoie la lettre d'Ibn al-Aš'aṯ, comme preuve de sa loyauté. Mais, dans un deuxième temps, il conseille oralement à Ibn al-Aš'aṯ de se préoccuper du sort des musulmans et de la communauté dans son ensemble, preuve encore de sa grande sagesse qui parvient toujours à surpasser sa colère. Ansāb, vol. 7, p. 3039. Ansāb, vol. 7, p. 340. 600 Ansāb, vol. 7, p. 3040. 601 Ansāb, vol. 7, pp. 3041-3042 et pp. 3043-3044. 598 599 361 Terminerons par un extrait du réc it d'al-Balāḏu rī, situé à la veille de la deuxième bataille – alZāwiyya – qui revient encore une fois sur la clair voy ance d 'al - Muhallab et sur la précipitation et la suspicion d'al-Ḥaǧǧāǧ : ‫ وهم مثل السيل المنحط‬،‫ فإن أهل الع راق قد أقبل وا إليك‬،‫ أما بعد‬:‫ كتب المهلب إلى الحجاج‬:‫ وقالوا‬:‫قال‬ ‫ وبه م ص بابة إل ى‬،‫ وله ل الع راق ش رة ف ي أول مخرجه م‬.‫ لي س ي رده شيء ح تى ينته ي إل ى ق ارره‬،‫م ن ع ل‬ ‫ فيواقعوا‬،‫ حتى يأتوا البصرة‬،‫ وخل لهم الطريق‬،‫ فل تستقبلهم‬.‫ فليس يبلى بردهم دون أهليهم‬.‫أبنائهم ونسائهم‬ ‫ ثم واقع‬.‫ فيتفرقوا عن ابن الشعث‬،‫ ويخلدوا إلى المقام في منازلهم‬،‫ فترق قلوبهم‬،‫ ويتنسموا أولدهم‬،‫نساءهم‬ ‫ وال‬،‫ ويلي على المزوني‬:‫ فلما ق أر الحجاج كتابه قال‬.‫ فإن ال عز وجل ناصرك عليهم‬.‫من حاربك منهم‬ ‫ فق د ك ان‬،‫ رح م ال المهل ب‬:‫ فق ال‬،‫ ث م إن ه نظ ر بع د ذل ك ف ي كت ابه‬.‫ ولك ن لب ن عم ه نص ح‬،‫م ا ل ي نظ ر‬ 602. ‫ناصحا للسلم وأهله‬ On raconte qu'al-Muhallab écrivit une lettre al-Ḥaǧǧāǧ : Bref, les hommes d'Iraq se sont avancés vers toi. Ils sont comme un torrent descendant des sommets et que rien ne peut arrêter avant qu'il arrive à son lieu de repos. Au début de leur sortie, ils sont pleins de fougue. Ils aspirent tendrement à voir leurs enfants et leurs femmes. Nul ne réussira à les tenir loin d'eux. Alors ne va pas à leur rencontre, laisse-leur la voie libre, jusqu'à ce qu'ils parviennent à al-Baṣra, qu'ils couchent avec leurs femmes et hument l'odeur de leurs enfants. Alors leurs coeurs se seront adoucis et ils préféreront le repos de leurs demeures et s'écarteront d'Ibn alAš'aṯ. C'est alors que tu pourras attaquer quiconque te combattra. Dieu Tout-Puissant te donnera la victoire sur eux. Quand il lut la lettre, al-Ḥaǧǧāǧ dit : Maudit soit ce mazūnī. Ce n'est pas moi qu'il a pris en considération, mais son cousin qu'il a conseillé. Quelque temps plus tard, il relut la lettre et dit : Dieu bénisse al-Muhallab. Il a toujours été de bon conseil pour l'islam et ses fidèles.
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- 22- - Chapitre 1 : Introduction générale - Dans ce sens, l'anisotropie macroscopique et anhystérétique des tôles magnétiques devra être décrite en reliant les paramètres de modèle aux principales sources d'anisotropie (forme, texture). Il faut évidemment aller vers la conception de modèles anisotropes, aptes à évoluer vers la prise en compte des phénomènes dissipatifs A propos des travaux de recherche exposés : Rendons à César Ce mémoire reflète non seulement mes travaux de recherche personnels, mais aussi ceux des stagiaires (DEA ou thèse) que j'ai encadré ou coencadré depuis 1991 sous la responsabilité scientifique de B. Cornut, à savoir M. Mekhiche, J-M. Bouché, J-M. Couty, M-C. MarionPéra, C. Talowski, A. Merazga, T. Péra, P. Bonnard, F. Ndoudi-Likoho, J-P. Goglio et L-L. Rouve. Bien qu'il y ait une certaine interaction, j'ai divisé par souci de clarté l'exposé de mes recherches en 3 parties thématiques: métallurgie, caractérisation et modèles de comportement. J'ai voulu ne garder que les faits marquants et les grandes lignes de ces recherches, afin d'obtenir un mémoire synthétique; la plupart des précisions, détails, calculs, disgressions peut être trouvée dans les références répertoriées en annexe. La synthèse des travaux que j'ai menés ou dirigés à propos de la conception de modèles de comportement constitue le chapitre IV. Une notable partie de ces recherches a été traitée en collaboration avec l'équipe Modélisation du LEG en les personnes de G. Meunier, F. Ossart et y. Maréchal, en ce qui concerne l'implantation des modèles dans les logiciels à éléments finis. coup de ces travaux de recherche n'auraient pu être possible sans l'aide des équipes techniques du L.E.G. et en particulier C. Brun, D. Tomasik, D. Ogier, B. Mallet, J.c. Perrier, que je remercie pour leurs compétences et leur dévouement à la recherche, dans une ambiance très sympathique. Je ne saurais oublier J. Delaye, J. Verna et S. Pelletier que je remercie vivement pour avoir toujours su associer à leur agréable présence le souci de me délivrer de certaines contingences administratives et de certains travaux dactylographiques dont celui-ci n'est pas le moindre. Je tiens à remercier tout particulièrement C. Chille t, C. Schaeffer, J. Delamare, J. Roudet, C. Cester, S. Bacha, N. HadjSaid, G. Meunier et Y. Maréchal pour les nombreux discussions parfois passionnées, toujours amicales, qui ont contribué à faire de ces années passées au L.E.G. des moments de détente dans une certaine communion de pensée. - 24- - Chapitre 1 : Introduction générale - Références - Chapitre 1 [1.1] Documentation technique N.S.C. [1.2] RH. Pry, c.P. Bean, "Calculation of the Energy Loss in Magnetic Sheet Materials using a Domain Model", J. of Appl. Phys., vol.29, n03, (1958), p 532. [1.3] G. Bertotti, "Some considerations on the Physical Interpretation of Eddy Current Losses in Ferromagnetic Materials", J.M.M.M., 54-57, (1986), P 1556. [1.4] S. Arai, Communication N.S.C. [1.5] Neidhoffer and Schwenger, "The application and significance of magnetic materials in large generator construction", J.M.M.M., 9, (1978),p 112. [1.6] A. Boglietti et al., "Analysis of the magnetic mate rial quality,. influence of the induction motors energetic performances", ICEM 86, proceedings part 1, (1986). [1.7] Bloch, Z.F. Physik, (1932), 74, P 295. [1.8] L. Néel, "Les lois de l'aimantation et de la subdivision en domaines ", J. Phys. Rad., 5,(1944), p 241. [1. 9] W. Heisenberg, Z.F. Physik, 69, (1931), P 287. [1.10] RM. Bozorth, "The theory of ferromagnetic anisotropy of single crystals", Phys. Review, 42, (1932), P 882. --> [1.11] G.M. Fasching, H. Hofmann, "Les vecteurs B et H dans les champs faibles dans des tôles anisotropes", Zeits. für ange Physik, 17, 3, (1964), P 245. [1.12] L. Néel, "Relation entre la constante d'anisotropie et la loi d'approche à saturation des ferromagnétiques", J. Phys. Rad., 9, (1948), P 184. [1.13] F. Preisach, Z. Physik, 94, (1935), P 277. [1.14] L. Néel, "Théorie des lois d'aimantation de Lord Rayleigh", Cah. Phys., 12, (1942), pp 1-20. [1.15] J-L. Porteseil, R Vergne, "Quelques aspects nouveaux d'un vieux problème,' l'aimantation d'un polycristal", J. de Phys., 40, (1979), P 871. [1.16] D.C. Jiles, D.L. Atherton, "Theory of Ferromagnetic Hysteresis", J. Appl. Phys., 55 (6), 1984, pp 2115-2120 and J.M.M.M., vol.61, 1986, pp 48-60. [1.17] S. Ayano, M. Namiki, Y. Saito, "A magnetization model for computational magnetodynamics", J. Appl. Phys., 69 (8), 1991, P 4614. [1.18] M.L. Hodgdon, "Applications of the Theory of Ferromagnetic Hysteresis", IEEE Trans. Mag., 24 (1), 1988, P 218, and "Mathematical Theory and Calculations of Magnetic Hysteresis Curves", IEEE Trans. Mag., 24 (6), 1988, P 3120. [1.19] H,J. Williams, W. Shockley, C. Kittel, "Studies of the Propagation Velocity of a Ferromagnetic Domain Boundary", Phys. Rev., 80 (6), 1950, P 1090. - 25- - Chapitre 1 : Introduction générale - [1.20 J.E.L. Bishop, "Simulation of Skew Domain Wall Bowing in SiFe Laminations with Asymmetric Roll Orientation", IEEE Trans. Mag., voLl8 (4), 1982, P 970. [1.21] G. Bertotti, "A genral statistic approach to the problem of eddy current losses", J.M.M.M., 41, (1984, P 253. [1. 22] G. Bertotti, "Space time correlation properties of the magnetization process and eddy current losses", J. Appl. Phys., 55 (12), 1984, P 4339. [ 1. 23] G. Bertotti, "Physical interpretation of eddy current losses in ferromagnetic materials", J. Appl. Phys., 57 (6), 1985, pp 2110-2126. [ 1.24] G. Bertotti, "Some considerations on the physical interpretation of eddy current losses inferromagnetic materials", J.M.M.M., 54-57, (1986), p 1556. [1.25] A. Kedous, D. Lebouc, P. Brissonneau, "Etude des pertes dans des tôles magnétiques soumises à des variations d'induction B(t) de forme trapézoïdale", Rev. Phys. - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique - Chapitre 2 A LA POURSUITE DE LA TEXTURE CUBIQUE Nous avons souligné au chapitre!, qu'en matière d'amélioration sensible des performances magnétiques des tôles pour l'électrotechnique, la maîtrise de la texture des tôles dites non orientées (N.O.) vers des textures finales de type {100} et en particulier (100) <001> ("texture cubique") était un enjeu considérable, à la fois pour le génie électrique et pour les producteurs d'acier. Cela explique que depuis les années 40, de très nombreux chercheurs aient essayé différentes méthodes d'obtention de cette texture. 2.1/ Les types de caractérisation utilisés Pour la compréhension de ce qui suit, il est utile de se familiariser avec les modes d'évaluation de la texture des tôles: • Les méthodes directes statistiques utilisant la diffraction de RX ou neutrons (en réflexion et/ou transmission) : le principe est simple puisque l'on fait décrire à l'échantillon toutes les positions de l'espace dans une condition de diffraction de Bragg bien déterminée. Pour chaque type de plan diffractant (le "pôle") on obtient ainsi une projection spatiale des différentes orientations cristallographiques présentes dans l'échantillon (figure de pôle) et l'intensité de photons ("coups") reçue à chaque position de l'échantillon est directement reliée au volume de cristaux diffractant dans cette orientation. Avec les RX, les échantillons doivent en principe contenir des cristallites n'excédant pas la dizaine de microns en taille, pour que la caractérisation reste statistique. Par les neutrons, on est beaucoup moins limité (volume échantillon de l'ordre du cm3) mais l'équipement est beaucoup plus lourd et rare ce qui le rend très peu accessible et inadapté à des recherches de métallurgie appliquée. A partir des figures de pôles obtenues, on peut recalculer la fonction de distribution des orientations cristallographiques (FDOC). Durée de caractérisation; quelques heures par échantillon. • Les méthodes directes locales représentent pour le métallurgiste le complément indispensable aux précédentes puisqu'elles permettent d'accéder à l'information locale (corrélation entre orientation et microstructure: topologie, taille, localisation ). La méthode la plus développée actuellement et équipant la plupart des grands laboratoires de métallurgie est l'EBSD (Electron Back Scattered Diffraction) basée sur l'indexation des lignes de Kikuchi en diffraction électronique. N'ayant pas les moyens de disposer de tels équipements à Grenoble, A la - nous verrons au Chapitre III que nous . Dur de caractérisation: quelques heures à 1 jour par échantillon. • Les méthodes indirectes que nous utilisons, sont magnétiques et de première importance dans nos travaux puisqu'elles peuvent donner très rapidement (10' environ) une idée de la texture obtenue, ce qui est souvent suffisant dans une méthodologie d'optimisation de procédé. Les mesures d'aimantation unidirectionnelles (suivant la direction de laminage) constituent un premier type de mesure indirecte, qui s'avère d'autant plus pertinent que la texture caractérisée est monocomposante et très resserrée. Dans la mesure où nous désirons obtenir des tôles magnétiques doublement orientées {110}<001>, un dispositif de caractérisation B-H bidimensionnel serait beaucoup mieux adapté et nous verrons au Chapitre III que des études en ce sens ont été lancées. La mesure indirecte que nous utilisons le plus largement est en réalité "la balance d'anisotropie" qui mesure le couple à appliquer à un échantillon pour compenser celui créé par un champ intense et uniforme dans lequel baigne l'échantillon. Ce couple dépend uniquement de la position de la direction de facile aiman par rapport au champ et le balayage de toutes les positions du champ (par rapport à une position prédéfinie: direction de laminage par exemple) permet d'accéder à la courbe couple-6 qui n'est autre que la dérivée par rapport à 6 de l'énergie magnétocristalline globale de l'échantillon E(6). Par comparaison aux courbes de couple des monocristaux (voir figure 2.1), on se fait une idée du type de composante dominante de texture et de son intensité. 1--(100)[ ] ---- -(111 )[1-10].HHH:H. HH.HJ'------:--_-(_1_1_0_)[_ 0_01-,-]_ _ _ _ - (--c-2_1_1)_[-,-01_-_1---.:] r ~ J J J. o ë - 0 en c _t'tl ""0 10 - - -. ~ -_ :~ :-:.-- -_. ". __ 0 • • • • 0. _. _ ••• _____ • _ •• _ • • • • " ~ *1 >.. ~.! ~ ~ •• _. ___ ••• " • • •• _ _. ; __. _. ___ • ____ ••• _._._~ _____________ • ____ • _____ ••• " _'0'' _'0 '.~ ___._ J J ::l <3 J ~ ~20 Cl. ~ 0 40 80 120 160 Angle (degre) fait par le champ par rapport à la direction de laminage Fig.2.1 : Courbes de couple d'anisotropie pour quelques orientations simples 2.2/ Généralités sur les allia2es. FeSiAI électriques Les alliages FeSi à plus de 2%Si restent monophasés (structure a cubique centrée) jusqu'à très haute température. Cette caractéristique leur permet de ne pas perdre une texture préalablement existante (effet de mémoire au cours du procédé) par transformation de phase au cours d'un recuit à haute température. De plus le Si est relativement stable chimiquement dans le.~ fer, augmente sensiblement la résistivité éleëtrique et conserve une tôle ductile jusqu'à environ 3.2-3.4%Si : pour toutes ces raisons, les tôles FeSi avec 2%<%Si<3.2% représentent les plus gros tonnages de matériaux doux électrotechniques, que ce soit dans des qualités texturées (tôles G.O.) ou peu texturées (tôles N.O.). L'adjonction de 2-3%Si baisse sensiblement les pertes par courants induits (par le biais de la résistivité électrique) mais malheureusement baisse aussi l'aimantation à saturation de l'alliage (taoleau 2.1), environ 2T pour 3%Si : Pertes 50 Hz, L+T à Matériau Aimantation (T) en L+T à ( en Wlkg ) 2500 A/m 5000A/m IT 1.5 T 800A/m Fer3%Si-N.O. ép. 0,50 mm 1,10 2,70 1,49 1,60 1,71 Fer pur-N.O. ép. 0,50 mm 3,60 8,00 1,58 1,68 1,78 - Tab.2.1 : Performances magnétiques d'aciers électriques N.0. - 29- - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique - Cependant, nous l'avons vu au Chapitre 1, la baisse d'induction de travail liée à celle de l'aimantation à saturation peut être très largement compensée si la texture est bien contrôlée, comme l'illustrent parfaitement les tôles Fe3%Si à Grains Orientés. C'est le but essentiel de nos recherches métallurgiques que de trouver des conditions du procédé qui contrôlent mieux la texture finale. Il est connu depuis longtemps que la texture de laminage à froid des aciers bas C comme des aciers FeSi, peut être représentée grossièrement par un mélange des composantes désorientées {112} <110> et {100} <001>. L'intensité relative de ces 2 composantes varie avec le taux d'écrouissage. Dans le cas d'un matériau de départ peu texturé, on obtient après recuit de cette texture, une texture de recristallisation primaire peu à très peu marquée, et par conséquent il ne semble pas possible d'obtenir de texture intéressante à partir du laminage à froid conventionnel + recuit d'un alliage FeSi, initialement pas ou peu texturé. Si on se ramène au procédé industriel des tôles N.O., l'état "initial" avant laminage à froid est constitué par la bande laminée à chaud (+ recuit éventuel). Le métal industriel final est alors en tout point semblable à ce qu'on obtient après laminage à chaud à 1 mis sur installation-pilote (fig.2.2) : une large fraction recristallisée dynamiquement sous la surface et un coeur de bande texturé sensiblement {100} <011>, avec une forte désorientation autour de <011>. Cette texture partielle de laminage à chaud ne semble pas avoir d'influence marquée sur la texture finale (après laminage à froid + it) qui n'est toutefois pas complètement aléatoire: on obtient ainsi près de 1.5 T. à 800 Nm pour un Fe3%Si, alors qu'un polycristal parfaitement désorienté mènerait à moins de 1.4 T à 800 Nm. La saturation se situant vers 2 T, on voit que la marge est encore grande par rapport aux performances magnétiques des tôles N.O. pour les champs habituels électrotechniques, tels que 800, 2500 ou 5000 Nm. Cela a motivé depuis longtemps de nombreux chercheurs, pour trouver des procédés et/ou des alliages autorisant une émergence d'une forte composante de texture {1 00 }. Principales voies connues : Addition d'aluminium: dès 1942, des textures cubiques imparfaites (Ml=12 kJ/m 3 ) sont obtenues par recristallisation primaire sur un alliage Fe4%AI [2.1]. Ce résultat expérimental, plusieurs fois confirmé par d'autres chercheurs, n'a toutefois jamais été expliqué: comment Al intervient-il dans la sélection d'orientation, pour favoriser une texture finale {100}? Dans les années 60-70, les recherches de Creusot Loire sur le sujet font émerger l'alliage Fe2%Si2%AI en tant que meilleur compromis vis-à-vis de l'ensemble des propriétés d'usage du matériau (intensité de la composante de texture cubique, résistance mécanique, pertes magnétiques). C'est dans la voie de l'optimisation de ces alliages à base d'aluminium que fut lancé la thèse de J. Quenin (1986) [2.2] puis la mienne (1990) [2.3]. S'il est exact que l'on favorise d'autant - 30- - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique - plus l'émergence d'une composante {lOO}<OOl> que l'alliage contient d'aluminium, en revanche l'addition de cet élément pose énormément de problème à tous x 25 vitesse de lamina ge 1mis vitesse de laminage O.2m1s x 100 Laminage à chaud sur installation pilote: diamètre des rouleaux 150mm x25. tranche perpendiculaire à DT x 25 vitesse de laminage O.3m1s X 25 vitesse de laminage O.lm1s Laminage à chaud sur installation de laboratoire: diamètre des rouleaux 76mrn Fig.2.2 : Microstructures type de laminé à chaud (section perpendiculaire à la direction travers DT) - 31 - - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique - stades thenniques du procédé (en particulier à l'élaboration) du fait de sa forte affinité chimique en particulier pour l'oxygène et l'azote ; le souci d'obtention de très bonnes propretés résiduelles sera encore plus grand avec de fortes teneurs en aluminium qu'avec les aciers électriques traditionnels. Structure initiale basaltique : En 1957, General Electric présente un nouveau procédé d'obtention de texture cubique [2.4]-[2.5] à partir du laminage à froid et recuit (avec éventuellement un laminage à chaud préalable) de lingots à structures colonnaires, d'axes parallèles à la direction de laminage. Les 10 kJ/m 3 sont atteints après 3 cycles laminage / recuit. Quoi qu'il en soit, ce procédé n'est pas envisageable industriellement. On montre ainsi que l'emploi d'une texture basaltique {hkO} <00 1> associée à de simples laminages à froid unidirectionnels pennet d'accéder à une texture de laminage favorable à la transformation en forte composante de texture "cubique" par recristallisation croissance nonnale. Laminage croisé: En 1960, Armco propose [2.6] d'utiliser le laminage croisé (utilisation successive de 2 directions orthogonales de laminage à froid) pour accéder à une texture de laminage de type {132} qui recristallise primairement en de nombreux * grains orientés approximativement {100}<001>. Cette méthode est actuellement la plus sûre pour obtenir de fortes composantes de texture {100}<001> à partir de n'importe quelle structure de lingot et pour des épaisseurs finales habituelles en électrotechnique (typiquement 0,2 à 0,5 mm). Beaucoup plus récemment, Nippon Steel Corp. probablement conscient de l'importance qu'il y a à maîtriser parfaitement un procédé (même à priori non industrialisable) d'obtention de la texture "cubique", a repris cette méthode en ajoutant des inhibiteurs AIN dans la matrice [2.7][2.8]. Ceux-ci agissent dans un recuit final supplémentaire à haute température, en permettant aux grains orientés {100} de démarrer leur croissance avant les autres. L'optimisation du procédé pennet d'obtenir une avance suffisante pour que cette croissance préférentielle devienne exagérée; les chercheurs japonais contrôlent maintenant suffisamment bien les mécanismes pour présenter des tôles avec de très fortes composantes {100}<001>. Energie de suiface : Kohler toujours, en 1960, propose une méthode de sélection d'orientation [2.9]-[2.10] par l'énergie de surface. Du fait de l'ampleur relative de ces forces motrices de surface par rapport aux forces motrices intergranulaires, la méthode ne peut s'appliquer qu'à des tôles n'excédant pas 0,15 mm d'épaisseur. De plus la régulation très pointue de ces traces de gaz dans de l'hydrogène n'a jamais encore permis pour des raisons technologiques la production le de tôles "cubiques", de faible épaisseur. Cette méthode s'applique notamment très bien au double laminage à froid + recuit des tôles G. O. [2.11] : une texture {120 }<00 1> désorientée autour de <001> est obtenue par recristallisation primaire et l'énergie de surface sélectionne lors d'un recuit final à haute température les cristaux les plus proches de - 32- - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique - l' orientation idéale {100}. Il faut noter que l'orientation précise {100} <001> parmi les orientations {100} <0 v w> ne peut être obtenue qu'en sélectionnant les germes dans les étapes précédant la recristallisation secondaire. Coulée directe: Une dernière méthode a très récemment vue le jour, grâce à la mise au point du procédé dit de "coulée directe" où l'alliage en fusion est directement versé entre les rouleaux d'un "laminoir" en mouvement. 2.3/ Influence du laminal:e à chaud sur les performances magnétiques finales des aciers électriques FeSiAI (P4,P5,P6) Ce travail général sur l'amélioration des propriétés magnétiques finales des FeSiAI a été lancé dans les années 70 par la Sté Métallurgique de Saint Chély d'Apcher et s'est terminé en 1990 par ma thèse où je montrais la grande sensibilité des propriétés magnétiques finales aux conditions de transformation à chaud. J'ai ensuite moi-même repris ce thème du laminage à chaud, et ai poursuivi les recherches d'abord dans le cadre du Groupement de Recherche 934 "Tôles Magnétiques" de (]) f'l (]) III 1990 à 1993 dont j'étais responsable du thème de métallurgie appliquée, puis par la thèse de C. Talowski dont j'ai assuré l'encadrement sous la responsabilité de B. Cornut. (]) o.III o Le laminage à chaud, utilisé initialement dans le seul but d'abaisser fortement l'épaisseur des bandes, a été reconnu depuis quelques années comme une étape-clé du développement des textures des aciers. Concernant le développement industriel des alliages Fe2%Si2%AI parallèlement aux recherches en laboratoire sur ces mêmes alliages élaborés totalement en - 33- - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique - laboratoire, j'ai confirmé les résultats de Quenin [2.2] dans ce sens et montré que l'on pouvait atteindre en laboratoire une anisotropie finale d'au moins 10 kJ/m 3 (pour Ml) avec l à 2 kJ/m 3 de moins pour m2 (monocristal "cubique" : MI=m2=17,5 kJ/m 3 ). Les recherches menées conjointement avec R. Penelle dans le cadre du GR "Tôles Magnétiques" ont montré aussi l'importance de la structure initiale du lingot au travers du laminage à chaud. Cependant, bien que les microstructures de laminé à chaud soient souvent très différentes entre industrie et laboratoire (cf fig. 2.2), la texture de laminage à froid avant le dernier recuit semble grossièrement très semblable, avec les deux composantes classiques {112 }<110> et { 100} < 110>. A l'état final, C. Talowski a montré [2.12] que le choix de la structure initiale du lingot et des conditions de laminage à chaud de laboratoire permettaient de faire varier sensiblement les performances de ces alliages FeSiAI (tableaux 2.2 et 2.3). Laminage à chaud et (nb de passes) Taux de réduction global du laminage à chaud Ep. initiale du lingot (mm) Taux de réduction par passe Vitesse de laminage à chaud (%) (mis) Anisotropie finale Ml (kJ/m 3) m 2 (kJ/m 3) industriel (14) 97 % 200 30 à45% qq mis 5,5 3-4 laboraotire (1) 70 5 70 0.1 11 7 laboratoire (2) 75 5 50/50 0.1 10.5 8.5 laboratoire (3) 77 10 20/50/45 0.1 13 7.5 Tab. x200. tranche perpendiculaire à DT zone imermédiaire Fig.2.3 : Structure hétérogène de bandes de déformation et de cisaillement en zone de sous-surface d'un laminé à chaud de laboratoire (section perpendiculaire à la direction travers DT) L'absence de recristallisation semble une condition nécessaire mais pas suffisante à l'obtention de forts couples d'anisotropie à l'état final, comme le montre schématiquement la fig.2A. L'autre caractéristique principale du laminé à chaud est la présence de bandes de déformation penchées et courbées : du fait des pressions importantes en cours de laminage, il n'y a pas de glissement à l'interface métal/rouleau ce qui permet d'une part de l'assimiler à un contact thermique parfait (pas de résistance de contact) et d'autre part de répercuter entièrement et de façon symétrique la pression du rouleau sur le métal avoisinant. On voit dès lors (fig.2.5) que du fait des réductions importantes d'épaisseur au cours de chaque passe, il existe une zone de transition et de cisaillement intense qui assure la continuité de la matière entre la surface fortement refroidie et "collée" au rouleau et le coeur du métal très chaud et se déformant très essentiellement en compression. 35- - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique 1. 2, ---------~•.------------------, Vites:e = 12 mis 1 structure 20310 M1 =5-5.5" (industriel) équiaxe!i 1'~<8 20% 1 Cil Ê - " pilote 0,8 () ~ CI> -0 CI> 0,6 Cf) CI) CI> :>, M1<7, 5-10% 0,4 M1=8-11 '0%'Ml =7-8.5 O%~ 0,2... '*> -. brame industrielle ~. 0% Ml <6 Ml = 8-11 +-,-Ml =~-10.5*. ~«<1% 0 coulee. 0 labo. *' O~~--~------~~ o 10 + 20 30 40 __~__- L__~__ 50 60 70 80 90 Taux de réduction moyen des 2 premières passes de LAC (%) Fig.2A : Alliages Fe2%Si2%AI soit élaborés et laminés à chaud industriellement, soit élaborés industriellement et laminés à chaud sur installation pilote, soit laminés à chaud en laboratoire (couple d'anisotropie maximum Ml en kJ/m 3, et fraction recristallisée après laminage à chaud en %) Fig.2.5 : Microstructure de laminage à chaud d'un alliage Fe2%Si2%AI élaboré industriellement, à structure colonnaire puis laminé à chaud en laboratoire en une passe de 65% (section perpendiculaire à la direction travers DT) La défonnation caractéristique de la zone de transition entre zones de surface et de coeur, va être essentiellement très dépendante de 3 paramètres : *'la vitesse de laminage qui contrôle non seulement la vitesse de défonnation Ë =de, dt mais aussi le temps de contact métal/rouleau tc qui réglera l'écoulement du flux de chaleur par conduction du métal vers le rouleau. On ramène le problème au refroidissement d'une tranche - 2 : A la Fig.2.6 : Approximations thermiques faites sur le métal pour simuler le laminage à chaud entre 2 outils "froids" en contact parfait et à la température T amb (fig.2.6). Le problème thennique est donc devenu unidirectionnel selon un axe x (on néglige le terme de transport), symétrique par rapport à 0 et on y néglige donc en première approximation la variation d'épaisseur e du métal: on la suppose constante et égale à l'épaisseur moyenne <e> So it <e> = ef + 2 R (1 - Si: <1» avec <1> = Arccos [1 (2.1) J~ -;rl] (2.2) Le problème est celui d'un volume-source émettant par chacune de ses 2 faces (en dimension 1) un flux de chaleur (figure 2.6). La température dans le métal est alors: T(x, t) =Tamb + f\erf «e> + xl + erf «e> - xl ) k k. (2.3) (To-Tamb) où "a" est la diffusivité du matériau (de l'ordre de 10-5 m 2/s dans notre cas), R le rayon des rouleaux de laminage à chaud, ef et eo les épaisseurs du métal respectivement en sortie et en entrée de passe. Par ailleurs, le temps de contact te est donné par : te =~ sin <1> (2.4). Le temps caractéristique de diffusion d'une onde thermique dans le métal est «e/2)2)/4a soit par exemple 6 ms pour e = 1 mm; ce temps reste très petit devant te (quelques centaines de ms) ou plus encore devant le temps interpasse (quelques secondes) et on peut considérer que le métal s'homogénéise instantanément en t = te + E à la température moyenne T m : (PJ2 Tm(t = tc + E) = ~)o Soit Tm(te + E) =Tamb + (To - Tamb) [en(~) -~:ae; (2.5) T(x, tc} dx (1 -exp {- 4 ~2te})] (2.6) - 37- - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique T("C) 1000 900 1 - - - - -__ 1000 800 700 r - - - -__ 100 700 600 600 SOO ""r-----~ 400 JOO 200 t t c -., Laminage à chaud sur installation laboratoire 4 passes : 14%1239c143%/55%/ ép. initiale 15mm, finale 2.5mm, vit. O.lmls Réch. avant LAC : 1050°C Laminage à chaud sur installation pilote 6 passes: 30%/29%/34%/45%/44%/40 ép. initiale 50mm, finale 3mm, vit. 1mis Réch. avant LAC: 1050°C ï;oC) 1000 900 800 700 600 500 400 300 200 t Cocur -i DisW1Ce suivltU la oonnale al piAn de lamiN.ge du métal Laminage à chaud industriel 6 passes-finisseurs: 35-40% chacune ép. initiale lOOmm, finale 2.5mm, vit. lOrn/s Tre fin dégrossissseurs : 830°CoC f- t, turflCC Laminage à chaud sur instaiilition pilote 4 passes : 44%/44%/44%/40% ép. initiale 25mm, finale 2.7 3.2mm, vit. Imls Réch. avant LAC : 1050°C T("C> T{"C> 1000 1000 900 900 800 100 700 700 600 600 soo soo 400 400 JOO JOO 2()() 200 t, c_ t ""'~ Laminage à chaud sur installation pilote 4passes : 44%/44%/44%/40% ép. initiale 25mm. finale 2.7 à 3.2mm, vit. 0.2m1s Réch. avant LAC: 1050°C t c_ Laminage à chaud sur installation laboratoire 3 passes: 5%/32%/58%/ ép. initiale lOmm, finale 2.75mm, vit. O.lmls Réch. avant LAC: 1050°C -t Fig.2.7 : Profils thenniques calculés en fin de chaque passe de laminage à chaud (avant homogénéisation) pour différents types de laminage à chaud Chapitre 2 : A la pour suite de la texture cubique \~/ ~ -------- Mi D Rouleau de laminoir ~ zone "froide" \. ~/ \ ~~i D-- / / / ~/ //~~ ~/~//~//~/________ \~ Mi.---- Compression + cisaillement D ",- D M2 compression M2 ~ c==J~ essentiellement " Front de la perturbation M2 zone "chaude" 4----- thermique de conduction métal/rouleau Fig.2.8 : Schéma de principe de la déformation thermomécanique dans le cas du laminage à chaud de laboratoire La compression crc donne lieu à une dissipation d'énergie à peu près uniforme dans l'épaisseur de la bande, tandis que l'action de cisaillement sera en revanche concentrée sur une portion intermédiaire et réduite de l'épaisseur du métal. Dans le cas des fortes vitesses de laminage à chaud, le front de la perturbation thermique est toujours limité à la très proche sous surface (typiquement entre le et le de l'épaisseur sous la surface) ce qui astreint le cisaillement à l6 la - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique - l'interface corps froid/corps chaud d'être concentré dans cette même zone de sous surface (on assimile au corps froid déformant non seulement le rouleau mais aussi le métal déjà "froid" à l'instant t. Ainsi toute la puissance dissipée liée à l'action de crt (cisaillement en particulier) est concentrée dans cette zone de sous surface, ce qui explique que la recristallisation y soit initiée et développée. Dans le cas des vitesses plus faibles de laminage à chaud (installation pilote ou installation L.E.G.), le front de la perturbation thermique se propage cette fois sur des distances non négligeables (de l'ordre de "4 a t d'après (2.3)), répartissant ainsi la puissance globale dissip ée par cisaillement sur un volume sensiblement plus important (cf fig.2.7). Cela explique que même avec un taux de réduction très important (65 à 68 %) en une passe, on n'observe pratiquement aucune trace de recristallisation à une vitesse de 0,1 mis (cf fig.2.4). • le taux de réduction (TR) : il est défini par TR = (car TR = eOe~ ef x 100) et a une incidence sur l'angle total de contact <1> (cf eq. 2.2), et donc également sur le temps de contact et la vitesse de déformation. De façon générale, plus le taux de réduction croît plus on amplifiera les phénomènes décrits précédemment. • le diamètre des rouleaux (R) : de la même façon que le taux de réduction il intervient, par l'angle <1>, sur le temps de contact et la vitesse de déformation. Mais il intervient aussi et surtout sur la direction de la contrainte ressentie en chaque point de la zone "chaude, puisque crt cre = tg <p. Un élément de matière dm subira jusqu'à l'instant ti (ti ::; te) où il arrivera (éventuellement) à l'interface zone chaude/zone froide (figure 2.8), une succession de déformation élémentaire dont les directions de contrainte s'étaleront de tg <pet tg <pet = ti). =0) = tg <1> à Ainsi plus l'élément dm considéré est situé vers la surface du lingot plus il aura ressenti une direction moyenne de contrainte (avant d'entrer en zone "froide") éloignée de la compression. Ce gradient dans l'épaisseur de la direction moyenne de contrainte est une source de gradient de texture, puisque le cristal se déformera notamment en fonction de la direction de contrainte vis à vis de ses axes cristallographiques. Ce gradient de contraintes est à relier aux bandes de déformation inclinées et courbées mises en évidence expérimentalement. L'hétérogénéité de la déformation RD, est évaluée par le rapport de l'arc de contact à l'épaisseur moyenne du métal durant la passe, soit RD = (<1>.) (2.8) sm<\> ef+2R 1- - <\> si <\> est suffisamment petit alors (2.8) devient RD "" R <\>. ef Tant que le rayon des rouleaux reste nettement plus grand que la variation totale d'épaisseur de la passe, l'hétérogénéité de la déformation est essentiellement déterminée par les - - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique - épaisseurs du métal en entrée et sortie de passe. Ainsi une passe de 55 % (entre eO =5,5 mm et ef = 2,5 mm) sur le laminoir de laboratoire donne une valeur de HD = 2/3, ce qui condamne la déformation à se concentrer principalement suivant les diagonales de l'emprise et être donc très hétérogène (fig.2.3). Dans notre cas l'inhomogénéité thermique dans l'épaisseur est un phénomène majeur et ne peut être négligée: le problème se ramène très qualitativement au cas précédent en considérant que le "rouleau équivalent" est le cylindre de travail augmenté de la "zone froide". Les études menées par C. Talowski sur le ge à chaud en laboratoire ont montré [2.12] qu'en faisant varier aussi largement que possible les principales caractéristiques accessibles (vitesse de laminage, taux de réduction par passe, évolution thermique du métal), les couples d'anisotropie Ml varient de 10 à 13 kJ/m 3 dans le cas de lingots. Fe2%Si2%AI coulés en laboratoire. Nos moyens de laboratoire ne nous permettent donc d'avoir qu'une influence modérée sur les performances finales, à moins que les effets de laminage à chaud évoqués précédemment ne soient pas aussi déterminants que ce qu'avait pu laisser penser les microstructures très spécifiques de laminage à chaud. Conclusions - Perspectives : Ces résultats tendent à montrer que des progrès sensibles peuvent encore être réalisés dans les aciers électriques conventionnels: nous avons montré en particulier que la recristallisation après laminage à chaud était souvent initiée sur les bandes de déformation hétérogènes. Cela relance l'intérêt d'étudier beaucoup plus finement le rôle de ces bandes dans la formation ultérieure de la texture finale. Cette recherche me paraît d'autant plus - 41 - - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique - intéressante que la texture finale à laquelle on arrive après recuit du laminé à chaud, peut être encore modifiée in fine par recuit final supplémentaire à haute température (cf. tableau 2.4). L'amplitude des composantes {llO}<OOl>, {100}<001> ou {lOO}<ovw> est en effet modifiée et permet d'atteindre à 800 A/m une induction de 1.6 T (à comparer à 1.4 T pour une tôle N.O.). Cette voie de recherche devrait à mon avis se prolonger vers l'introduction d'inhibiteur type AIN, qui pourront éventuellement modifier les composantes de texture finale au cours du recuit à haute température Ep (mm) 0.23 Alliage Fe3%Si Recuit du laminé à chaud Recuit supplémentaire final à haute température BSOO (T) Pertes à 1.5 T 50Hz 400Hz (W/kg) (W/kg) industriel / / 1.82-1.92 0.5-0.6 industriel / / < 1.5 T laboratoire non non 1.62 T 1.9 31 laboratoire non oui 1.54 T 1.25 27 G.O. 0.2 Fe3%Si 30 N.O. + 0.6%AI 0.2 Fe2%Si2% Al 0.2 Fe3%Si 0.2 Fe3%Si laboratoire oui OUi 1.61 T 1.30 26 Tableau 2.4 : Performances magnétiques finales en sens long de différents alliages Fe3%Si et FeSiAI élaborés en laborato , comparés aux tôles commerciales actuelles 2.4/ Amélioration des performances magnétiques des tôles en fer pur: transformation de phase et laminage à chaud (P7,P81 Un des grands enjeux des matériaux magnétiques électrotechniques est de parvenir à augmenter la perméabilité magnétique des tôles à basse teneur en silicium. 12r---------------r===========~ - laminage type A laminage type B ô~ 1.200 1/) 1/) 1.10 1\1 laminage type C ~ C/'" - - 8 __ ~ e _ _ _ _.JII_ A~is~cE.!.e ~1~.!tô.!!a '0 _ _ t" N.O. industriellea D CI>, T - - - - -~ i =c : 4-f-. --+. ~ --:::::.~ 2 J"D- - -A- - QI ii ~ ~ O~------~--------~--------~ 0,1 1 10 100 Temps de recuit 'pas à pas' (min.) ~ - 1.000 '0 -"-\ BOO BOO 700 \. -. "- --- Laminage type A -+ Laminage type B \ Q. -a. r------------------------------, QI ~ - "'-\ Laminage type C -- - -- -- eoo~~--~--~--~--~--~--~--~ 2 3 4 5 o 6 7 B Numéro d'ordre de la passe de laminage à chaud (n° = 0 équivaut à température de défournement) Fig.2.9 : Influence du type de laminage à chaud (austénitique, austéno-ferritique ou ferritique) sur les couples d'anisotropie Ml à l'état final dans le cas de lingots de fer pur élaborés en laboratoire - Chapitre 2 : A suite - s ! '0. E 4 90 ' " 80. 70 Cl E ~ '0 e " '0 10 800 ëi.4; 0. ti 7 700 " 60 '0 50 '0 E ~ C.~ ~ 600 ~~~I_~i~i~i~;; 2 W )( " Temps de ~ recuit (min. ) {).25 0.5 1 10 30 60 Temps de recuit (min.) Fig.2.10 : Relations entre les principaux paramètres du procédé (temps et température de recuit, taux de réduction de laminage à froid) et les performances finales (couples d'anisotropie Ml) de tôles en fer pur La texture de laminage à froid {IOO}<011>-{211 }<011> est très accentuée, avec un renforcement de ces 2 orientations lorsque le laminage à froid est poursuivi après 70 % ; l'orientation {321} contenue dans cette composante majeure de texture, pourrait expliquer comme dans le cas des tôles minces, l'émergence d'une composante "cubique" très désorientée à l'état final. Comme le suggère la figure 2.14, la texture de recristallisation primaire semble tout d'abord principalement de type {Ill} puis une croissance de grain sélective permet le développement de la composante "cubique" dans cette matrice primaire : l'induction à 800 A/m (B800) passe ainsi de 1,6 T après 2 min de recuit à 1.75 T après 10 min. -E 12,---------------------------,2 :::; ~ B5000 - - 10F- - 1,8 _/ - 1 - C\J E ~ g 4 C 2 ~ C1I Q. g () - - i: :r~ - -1- / M1 / ~2- A 1/'0 1/ 1 / r----c-ou-p-Ie-M-'--,,,1 Il / / l, Il " \\// V 1 1.4 +9 à800A/m 0.8 +9 à5000A/m!::::====::!.J0.6 10 i=" -§.- 1.2 Couple m2 =-____ 0 L ______---:__ 0.1 1.6 Sf'---a B800/ 8 /.::: g -g Fig.2.11 : Evolution de l'anisotropie finale (couples Ml et m2) et des inductions à 800 et 5000 A/m en fonction du recuit final, dans le cas de tôles de fer pur ayant subi un seul cycle laminage/recuit 100 Temps de recu it (min. ) Perspectives: Les structures de départ (lingot, brame) ne permettent d'avoir qu'une forte composante finale de texture "cubique", très désorientée autour de {IOO} <001>. Des très fortes perméabilités magnétiques pourront être atteintes éventuellement en associant d'autres mécanismes de sélection d'orientation lors du recuit final (inhibiteur), à partir de ces textures - : A la pour de - prim imparfaites. Mais du fait de la transformation de phase a/y à 900°C, une croissance anormale est a priori impossible. Notons qu'une valeur de Bsoo=1.75 T est une performance déjà intéressante industriellement, qu'il serait intéressant de savoir y reproduire (actuellement industriellement Bsoo 1.6 T). 2.5/ Où le laminage croisé reste la voie la plus sûre pour accéder à de fortes composantes de texture {lOOl Nous avons vu au début de ce chapitre que cette méthode d'obtention de la "texture cubique", déjà ancienne, avait été fortement améliorée par les chercheurs de Nippon Steel Corp. en lui adjoignant une phase finale de sélection d'orientation (100)[001] lors du recuit final haute température sous H2, au moyen des inhibiteurs AIN. Quoique très difficile à envisager industriellement, ce procédé est actuellement le seul à permettre la synthèse de tôles magnétiques fortement texturées {1 00 }<00 1> avec des épaisseurs "électrotechniques" classiques de 0.2 à 0.5 mm d'épaisseur. Il est donc incontournable si on veut disposer de fortes textures cubiques finales, afin d'en étudier le comportement magnétique. L'étude de cette voie d'élaboration présente en outre l'intérêt d'être un cas d'école d'émergence d'une texture cubique imparfaite par recristallisation primaire [2.6], qui peut se perfectionner ensuite sensiblement par levée sélective d'inhibition au cours d'un recuit à haute température [2.8]. Beaucoup de mécanismes pouvant amener à une texture finale cubique se retrouvent dans cette voie, et son étude même empirique est un excellent moyen pour bien appréhender les étapes clé de la formation d'une texture cubique, ainsi que la sensibilité de celle-ci aux différents paramètres du procédé. J'ai choisi d'entamer cette étude à partir d'alliages Fe3%Si (:::;; 0.1 %AI) afin de ne pas être gêné par le caractère chimiquement instable de Al tout en rendant possible une distribution modérée d'inhibiteurs AIN. Ces travaux ont fait l'objet de la partie métallurgique de la thèse de M. Mekhiche, que j'ai encadré. Partant d'un matériau laminé à chaud et recuit ("normalisation"), le laminage croisé est ensuite appliqué dans 2 directions successives et perpendiculaires du plan de laminage. Le matériau peut ensuite suivre soit un seul laminage à froid/recuit soit deux; les résultats obtenus sont à peu près similaires dans les deux voies possibles. A la différence de la texture classique de laminage à froid des aciers bas C (cf §2.2), le laminage croisé amène à une texture de déformation du type {100} <011> + {Ill} <112>, qualitativement indépendante des conditions de déformation dans une plage de 30 à 60% de réduction globale par direction de laminage. M. _ - 19 18 C") E -, ~ ~/ 17 ~ 0.~ Q) 0 Ü.-.z if /,A-- / 12 1 j> 1 - -- I~,/ --:. M1 -'J!:- o 100 200 400 1,7 1,6 \ "- ~ ~ t B à 2500A/m 300 x \ "- - - B à 5000A/m 8 1,8 \. - B à eOOA/m -f 1 "- "- 1 ~-couple "-,/ • /----0 / 13 7 1,9 1 9 S- 1 15 10 (!O.QHOO1] - ---- 2 / c ro =0 11 c :::l - "- /.~ 14 00,/ ::: 16 -- - _AlJlsQtrQP~ 9u_mQ!!.Qcr.ll>t~ 1,5 ~ 500 600 1,4 700 Teneur en aluminium visée (ppm) Fig.2.12 : Evolutions du couple d'anisotropie finale Ml et des inductions magnétiques à 800, 2500 et 5000 A/m, en fonction de la teneur en aluminium d'alliages de laboratoire Fe3%Si - 46- - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique EcbaDtiUoD conl.no.1 180 ppm AI Eehantillon contenant 90 ppm AI 15 El [TI] MI Cl m2 7 / / 1 0 / ~ 10 14 16 o 18 lPI ID 2 Amplituaes de Ml et m2 en Ulm' V. /. /. /. /. / ~ / . ~ ~ /] ~ ~ V.~ ~ /1 [,1' V 14 Amplitudes d. Ml <1 16 ~ ~ ~ ~ la ml e. kJJm' Echantillon contenant 420 ppm AI Il 1 El MI C m2 MI ml ü :: ;.:: 1 o 24111141'11 AmpUtudes de Ml et m2 en kj/m) 25111141618 Amplitudes de Ml et m2 en k.J /ml Fig.2.l3 : Histogrammes de couples d'anisotropie Ml et m2 à l'état final, pour des alliages Fe3%Si contenant. différentes quantités d'aluminium! Comparativement au comportement des tôles N.O., l'approche à saturation se passe sensiblement mieux, du fait notamment de la rotation plus aisée des moments magnétiques dans le plan {1 OO} : on obtient ainsi une augmentation de 0,25 T du B800 lorsque le champ passe de 800 à 5 000 Nm (soit donc B5000 B5000:5 = 1,9 T) et seulement de 0.18 T pour une tôle N.O. (soit 1,62 T). Ceci est particulièrement important lorsque l'on sait qu'une grande partie des machines tournantes fonctionnement souvent en régime "saturé". Les pertes des tôles N.O. sont diminuées de 30 à 40 % par ces tôles "cubiques". Champ (en A/m) nécessaire pour obtenir 1.5 T dans la direction de laminage Champ (en A/m) nécessaire pour obtenir 1.5 T dans la direction travers Tôle à texture [100] <001> de laboratoire Tôle N.O. en fer pur à perméabilité améliorée 130 830 135 360 Tableau 2.4 : Valeurs de champ magnétique ( obtenues sur cadre à champ tournant) nécessaire pour aimanter à 1.5 Tet 50 Hz dans la direction de laminage (x=DL) ou travers (x=DT) une tôle Fe3%Si N.O. ou "cubique" - - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique - La caractérisation magnétique en champs tournants montre un processus classique de découplage des axes de facile aimantation à basse induction (B ::; 1 T), tandis qu'à plus haute induction (B ~ 1,5 T) apparaît nettement l'anisotropie macroscopique "cubique" avec des axes de difficile aimantation sensiblement à 45° de la direction de laminage. Cette anisotropie est nettement moins forte que pour une tôle G.O. La comparaison entre tôles "cubiques" et les tôles de fer pur à perméabilité améliorées d'UGINE S.A. (voir tableau 2.4) montre à quel point les meilleures tôles commerciales sont encore éloignées des tôles "cubiques" même imparfaites. Conclusions - Perpectives : Nous sommes maintenant en bonne voie pour disposer de tôles Fe 3 % Si à texture {100} <00 1> très resserrée. Cela nous a permis notamment de commencer à étudier le rôle de l'inhibition, en interaction avec des effets possibles d'énergie de surface lors des recuits sous hydrogène. La perfection de la texture ne pourra être atteinte qu'en maîtrisant parfaitement les mécanismes de sélection d'orientation et en particulier en contrôlant la teneur en azote dans le métal [2.13] et la teneur en oxygène dans l'atmosphère du four. Ces premiers résultats nous ont de plus permis de valider nos modèles de comportement ainsi que de décrire par modélisation numérique certains dispositifs électrotechniques en tôles de texture "cubique". 2.6/ Tôles minces pour moyenne fréquence contre l'allial:e jouons la texture Du fait de l'importance croissante des applications fonctionnant à "moyenne fréquence" (quelques centaines à quelques milliers de Hz), l'obtention de matériaux magnétiques adaptés devient de plus en plus opportune. De nombreux chercheurs en matériaux magnétiques se sont lancés sur cette voie. L'ennemi généralement désigné avant tout autre est les pertes magnétiques. Les pertes magnétiques sont liées à 3 facteurs principaux: épaisseur, alliage et microstructure. Aussi les alliages rapidement solidifiés à base fer sont-ils très avantagés lorsqu'ils associent à de faibles épaisseurs (20-30 Ilm) une forte teneur en silicium (4,5 à 6,5 % Si), voire un mécanisme d'aimantation beaucoup plus favorable (processus de rotation). On peut même, comme cela a été montré jadis par G. Couderchon avec de l'aluminium, faire diffuser en phase solide un élément d'alliage (Al ou Si) qui diminuera la résistivité, la constante d'anisotropie magnétocristalline et la magnétostriction du cristal, toutes choses favorables pour les pertes magnétiques. C'est malheureusement l'induction accessible qui en pâtit. Dans le cas de tôles magnétiques fonctionnant principalement par déplacements de parois, nous verrons au chapitre IV que les pertes magnétiques sont complètement conditionnées par certaines caractéristiques, lesquelles sont très essentiellement liées aux - - Chapitre 2 : A la poursuite de la texture cubique - constantes d'anisotropie magnétocristalline KI et de magnétostriction et à la microstructure du matériau (texture, taille et forme de grain). Aussi en fixant la teneur d'alliage, le perfectionnement de la microstructure peut aussi diminuer sensiblement les pertes par courants in s. Très peu de producteurs au monde savent fabriquer des tôles G.G. minces sans relaminer des tôles G.O. conventionnelles [P13] : la perfection de la texture GOSS de ces tôles reste sensiblement moins bonne que celle de leurs cousines plus épaisses. Les performances magnétiques unidirectionnelles restent quoi qu'il en soit bien meilleures que celles des tôles N.O. minces (0.1 mm). Nous avons donc essayé de contrôler la texture finale pour améliorer la perméabilité et par là-même diminuer les pertes magnétiques des tôles minces Fe 3 % Si. Cette voie a été explorée lors du stage de DEA de F. Khomamizadeh, puis dans la thèse de C. Talowski, que j'ai suivi successivement.
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Enjeux identitaires et mobilité résidentielle dans le cadre de la rénovation urbaine
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Le défaut de sentiment d’appartenance à la ville associé à un manque d’intérêt manifeste (l’implication citoyenne est appréhendée au titre des valeurs parallèlement aux solidarités développées), fondé ou non, pour la vie municipale exprime une certaine fracture entre la population de ces quartiers et les autorités en charge de l’animation et de la gouvernance de la vie politique. Cette impression de frontière, en contribuant au creusement d’un fossé entre le quartier d’appartenance et le reste de la ville participe d’un processus de mise à l’écart et de dualisation de la cité. Avec quelques nuances cependant : « J’ai envie de vous dire non, oui et non. Entre ici et le Centre-ville non, par contre entre l’Almont (quartier de la ZUP qui jouxte son quartier) et le Centre-ville oui. Il y a une frontière géographique parce qu’il y a du relief, pour accéder à certains quartiers ça monte, malheureusement ça veut pas dire que ça monte en qualité... et les points culminants de Melun ne sont pas les points culminants en terme de qualité de vie, vivacité intellectuelle et sociale. Mais non je trouve qu’il y a pas trop, trop d’enclaves, c’est pas très marqué, je le ressens pas. C’est un peu vrai à Houdart, faut dire que c’est la banlieue de Melun...» (Cédric). En refusant son intégration au périmètre de la ZUP et son assimilation aux habitants de l’unité d’habitation où il « réside » plus qu’il n’habite, du fait de son appartenance à la mouvance « artistes », Cédric manifeste un certain mépris pour les habitants des quartiers limitrophes ainsi que ceux de son ancien quartier. Il se convainc que son parcours résidentiel lui a permis de « sortir » de la cité, d’accéder à un nouvel environnement plus conforme à ses représentations et de s’identifier, sans sentiment d’usurpation, à un groupe de référence plus prestigieux plus conforme à ses représentations : « j’ai vu que c’était une rue pavillonnaire tranquille, ça changeait radicalement d’environnement... plus de cage d’escalier puante, plus de comité d’accueil aux portes, je vous en passe et des meilleures...» (Cédric). Concrètement, il s’inscrit dans cette matrice concourant à l’affirmation d’un certain individualisme « moderne », analysée (dans le rapport à l’autre comme source d’identification) comme « forme identitaire individualisée en fonction de laquelle chaque ENJE UX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 283/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le quartier, une image modulée bien que structurante et prégnante personne veut pouvoir choisir son identité, y compris d’appartenance à un groupe, en s’engageant à partager les valeurs du groupe auquel elle considère ou souhaite appartenir ». Par ailleurs, en manifestant son inscription dans la ville et en prenant, néanmoins, ses distances avec son quartier d’accueil, cet individu par l’élargissement de son périmètre d’appartenance « gagne une individualité et une particularité »223 qui lui octroient une dimension liberté personnelle impossible dans un espace plus restreint, attitude conforme en quelque sorte à cet « individualisme moderne » dans lequel chacun veut pouvoir choisir son identité. Cependant, dans le contexte de l’étude ce sentiment fait plus figure d’exception que de règle, les populations éprouvant des difficultés à sortir de la cité (du quartier pour certains, de l’habitat social pour d’autres), en dépit de la mobilité vécue, ou de l’ambiance de la cité, espace désormais devenu anomique, tendent plus souvent à adopter une attitude de repli sur elles-mêmes qu’à manifester une ouverture aux autres, au changement et au monde accordant au quartier un enjeu identitaire modulé et pas vraiment assumé ni conscientisé par ses habitants. De ce fait, l’image renvoyée par les habitants des autres quartiers n’est pas très signifiante pour beaucoup qui ne se prononcent pas. Néanmoins, la notion de « normalité » est récurrente lorsqu’ils s’expriment. Ainsi, appliquée aux habitants des autres quartiers de la ville, la « normalité » : « c’est des personnes normales, comme nous quoi, c’est-à-dire qu’ils habitent en ville et nous on habite dans les quartiers, c’est ça tout simplement » (Rosa). D’autres réfutent la différence et revendiquent, avec une certaine fierté, leur appartenance sociale et, soit rappellent la condition commune telle qu’elles pensent qu’elle devrait exister dans notre société : «..ben, pourquoi je me sentirais différente?J’ai envie de dire, on respire tous par la même bouche...même si c’est des gens qui habitent en ville, ils ont quoi de différent de nous?...peut-être qu’ils ont une mauvaise vision de nous...parce que le Mont Saint Martin c’est comme toutes les cités, on va dire il y a toujours une petite réputation qui traîne comme tous les quartiers où il y a des gens, on va dire, de la classe ouvrière pauvre... » (Yolande), Soit se sentent stigmatisés par rapport aux habitants du Centre-ville et procèdent à un transfert sur les habitants de l’autre cité d’habitat social de la ville : 223 Simmel G., Métropoles et mentalité, in Grafmeyer, Joseph, L’École de Chicago, op. cit., p.69 ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 284/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le quartier, une image modulée bien que structurante et prégnante « le Centre-ville ; je pense que c’est un autre monde, c’est pas pareil. Ils savent très bien que nous on fait partie de la ZUP, quand vous êtes en ville, ils sentent. En fait tout le Centre-ville est de droite, c’est évident... Beauregard, c’est un quartier encore plus stigmatisé, ils sont parqués, sortis de la ville et il n’y a pas de rénovation....Quand on les rencontre, ils sont différents (rires), ils ont un autre visage, ça se voit. Ils ont de drôles de têtes, ils sont tristes ... » (Renima) Signalons une exception, figure atypique des populations de l’ex-quartier J. Cependant, l’image renvoyée par les autres quartiers, laquelle oscille entre normalité et stigmatisation, est en règle générale, associée au sentiment de sécurité et confirme l’enjeu identitaire porté par le quartier, lui-même nourri par des déficits récurrents, pérennes et stigmatisants (éducation, délinquance, pauvreté). II.1.4 DES MODES DE RÉGULATION INOPÉRANTS Nous avons évoqué lors du cadrage de cette étude, la montée d’un sentiment d’insécurité, entre 1997 et 2001, dans nombre de quartiers paupérisés, et la mise en œuvre de politiques pouvant être qualifiées de sécuritaires. Dans ce contexte qui est celui de notre recherche, une très grande majorité de la population de l’échantillon a évoqué, bien qu’avec quelques nuances, la situation de son ancien quartier en termes d’insécurité, de squats et de drogue imputés aux « jeunes ». Les « jeunes » et plus particulièrement ces « jeunes de quartiers », présentés comme « une catégorie à problèmes et construite en grande partie...à travers les systèmes éducatifs et les ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 285/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le quartier, une image modulée bien que structurante et prégnante dispositifs postscolaires »224, sont soumis à des cadres sociaux en recomposition conduisant à une extension des interventions publiques et à une familialisation avérée (maintien ou retour dans la famille). Bien que cette situation, présence de jeunes au foyer, ait été rencontrée dans environ une famille sur cinq (13 sur 60) au sein de notre échantillon, très peu de contacts directs ont été possibles, ces jeunes étant souvent absents ou esquivant tout entretien. Dans ces conditions, il n’a pas été de confronter les témoignages des adultes et ceux des jeunes aux fins d’objectiver les discours. « C’était devenu dangereux du fait des fréquentations, le bâtiment avait une très bonne ossature c’était surtout l’environnement, les jeunes qui squattaient ça veut dire que... ça m’est arrivé de rentrer tard le soir, il faisait nuit, ils avaient cassé l’ampoule et alors ils squattaient dans l’escalier....on n’était pas très rassurés. Je suis passé en marchant sur des bras, des jambes, mais c’est quelque chose qui me faisait peur », (Alain, Melun), «...il y avait de la drogue. Au début quand on est arrivé, ils se piquaient, les enfants (les siens) n’avaient pas le droit d’aller aux poubelles, c’est moi qui y allait. Après les piqures ça s’est calmé, ils fumaient, l’odeur!, ils montaient à chaque étage parce que il y avait des maris qui les envoyaient balader donc ils montaient, à la fin ils sont arrivés au dernier étage et à cet étage là il y avait pas d’hommes. Donc c’était des bagarres, on avait l’impression qu’ils allaient rentrer parce qu’ils se cognaient dans la porte. Un jour il ya eu un « manège » sur le pallier, c’était un lundi, les enfants étaient à l’école, j’ai ouvert il y avait ce qui fallait pas dedans, j’ai pris, j’ai mis ça dans les toilettes...c’était vraiment affreux, affreux, affreux...des jeunes du quartier. Ils nous ont jamais rien fait parce qu’on leur a jamais rien dit » (Pélagie), À ce sentiment d’insécurité, certains habitants adjoignent un effet de « coupure symbolique » entre les adultes (et plus particulière ment les personnes âgées) et les jeunes : « à J. Ferry c’était triste.. parce que bon, les jeunes le soir, ils venaient dans le hall, ils...., Le monsieur qui état au rez de chaussée, quand il sortait le matin il disait « mon Dieu qu’est ce que ça sent mauvais.. ils avaient fait dans le carton. C’était désagréable, alors après ils montaient et ils faisaient sur les paillassons..., la nuit on dort alors..., il y avait plein de pipi plein de caca, c’était une horreur, une horreur. Ils se droguaient aussi, il y avait des seringues qu’ils jetaient dans les boites à papier, sur la pelouse...ma voisine avait un chien qu’elle sortait le matin, un coup je lui ai dit oh là là une piqure.. le chien allait marcher dedans. Oh oui c’était une horreur...» (Suzanne). « j’ai eu plein de discussions avec tous ces petits jeunes qui nous polluaient la vie, vous savez bien pourquoi, je veux pas entrer dans les détails? C’est là, ça squatte les halls, ça va dans les escaliers avec leurs produits. On rentre le soir, on rentrait d’une petite sortie, j’entends un bruit monstrueux dans la cage d’escalier d’en haut, j’ai pas réfléchi, je suis monté...ils étaient une petite dizaine...quand je les ai vus, ils m’appellent tous par mon nom...je me suis dit « c’est pas possible » des gamins que j’ai vus tout petits... » (Daniel), 224 Jovelin E., La jeunesse en difficulté : une citoyenneté tronquée. Le quartier, la politique, l’avenir, Esprit Critique, vol.04. No.07-juillet 2002, p.3 E NJE UX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 286/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le quartier, une image modulée bien que structurante et prégnante « ça fumait, c’était surtout pour avoir de l’argent pour la drogue, d’ailleurs ils se cachaient pas, on les voyait... il y avait une camionnette blanche, ils débarquaient carrément la drogue et puis après par les fenêtres c’était des petits sacs blancs »(Germaine), Parallèlement à ces positions tranchées, d’autres habitants associent une certaine indulgence à une forme de passivité valant complicité de voisinage, tout en se déresponsabilisant : « il y avait des soucis à G. Houdart, dealers et compagnie, les aires squattées jusqu’à 4h du matin, même pour accéder à l’immeuble, il fallait s’excuser quoi ;...moi je crains rien, je travaille avec ce public. Bon, moi, je fais pas de la répression, je fais de la prévention... voilà on faisait quand même de l’éducatif à deux centimes (rire ) ...ça dé rangeait nos visiteurs et en plus la dégradation, oh là là là, ça sentait partout même au niveau des halls. » (Bruno) Si ces témoignages se réfèrent au passé, à l’ancien quartier, la situation apparaît se reproduire (ou se poursuivre), les habitants relogés dans des quartiers similaires d’habitat collectif (Bruno en faisant d’ailleurs partie) car les « jeunes » constituent un groupe visible dans ces unités d’habitation (comme dans tous les quartiers d’habitat social) quasi désertifiés pendant la journée, y compris par les personnes sans activité professionnelle (« Il y a des petites mamies avec leur ptit chien, c’est des gens qui sortent pas, on voit personne en bas... », Maryse). « Là il y a tous les jeunes, les petits de 16 ans qui...Vous savez j’ai eu un cancer l’année dernière et j’ai perdu mes cheveux..., ils se moquaient...parce que moi je me cachais pas, j’allais à la fenêtre je mettais rien sur la tête,...combien de fois ils se sont moqués de moi. Ils fumaient dans les escaliers et j’habite au 1er, ça me gênait quand ils fument leurs joints l’odeur...il y en a que je connaissais, un jour gentiment je leur ai dit « vous pouvez fumer autant que vous voulez mais ça me gêne, vous pouvez aller dehors », le lendemain ils sont pas venus mais après...je me demande même si c’était pas pire. » (Rosa). Ces jeunes désœuvrés, déscolarisés, semblent avoir perdu tout sens du savoir-être, de la discipline, « n’ont plus de références ni morales ni éthiques » [Tissot, 2007, p.35], leur comportement interpellant au regard de la responsabilité des parents qui sont parfois pointés du doigt : ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 287/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le quartier, une image modulée bien que structurante et prégnante «... il y a des p’tits de 8 ans, ils sont là toute la journée, on sait même pas s’ils « bouffent », s’ils sont lavés, les parents ils font même pas attention, les gens on les voit pas... » (Jessica) «...les enfants ne sont pas éduqués mais les parents ne le sont pas non plus. Et puis le problème quand vous leur parlez de ça, ils disent que tu es raciste alors que je ne peux pas être raciste parce que je suis fils d’immigré, français, je viens de l’extérieur aussi, moi-même ma source est étrangère » (Volcan). Ces propos témoignent de comportements et d’un laisser-aller problématiques si l’on considère que l’enfant (le jeune) qui vit des expériences d’apprentissage chaleureuses et gratifiantes dans la vie quotidienne acquiert une « compétence sociale » 225 et accepte plus aisément d’autres formes d’apprentissage. Par ailleurs, les témoignages recueillis tendent à confirmer l’effet très relatif des opérations de rénovation urbaine sur les pratiques et les incivilités dans les secteurs d’habitat social traditionnel (constructions de grande capacité : barres ou tours) du périmètre de l’étude. Ainsi, au-delà des désagréments de voisinage causés par les jeunes, il convenait d’interroger comment, dans le périmètre de référence, se nourrissait le sentiment d’insécurité ressenti et dénoncé, d’autant que les propos recueillis à Melun auprès d’acteurs de terrain s’inscrivaient dans cette dynamique selon laquelle « dans un quartier qui connaît des dégradations, les contrôles s’affaiblissent et un sentiment d’impunité se répand, ce qui génère progressivement une culture de la déviance »226. À cet égard, l’insuffisance des pratiques de contrôle et d’encadrement, notamment au niveau des incivilités (insultes, voitures endommagées, infractions au stationnement, comportements vis-à-vis du bien commun,...) a été maintes fois dénoncée : «... voilà quoi on a peur de ces jeunes qui traînent en bas des escaliers, c’est des jeunes si tu leur dis quelque chose ils sont capables d’aller péter ta voiture » (Jessica), « Les gens se font insulter devant chez eux. Il y avait des gens qui n’osaient même pas sortir de chez eux, c’est grave.» (Rosa). 225 Dutrenit JM., Revue du CERFOP, n°23, décembre 2008, p.63, déjà cité : « Le concept de « compétence sociale » s’identifie comme une médiation pour apprendre, médiation qui se réalise par l’organisation d’expériences impliquant la coopération dans la vie quotidienne et dont2 la poursuite est stimulée dans d’autres secteurs (en particulier celui des apprentissages scolaires »,. 226 Tournier V., « Le rôle de la famille dans la délinquance », Futuribles, avril 2002, cité par Vanoni D., Robert C., op.cit., p. 84 ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 288/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le quartier, une image modulée bien que structurante et prégnante Face à cette situation, les structures municipales (GUP)227 s’avèrent démunies, associant à leur impuissance un sentiment de carence à l’adresse des services de police (insuffisance de moyens et volonté de ne pas sévir) et donnant une impression de toute puissance aux auteurs des incivilités ou délits. D’autant que bien qu’omniprésente dans les esprits, la police s’avère en fait peu présente en action, elle « surveille de loin », passe, sans réellement intervenir plongeant les habitants dans la perplexité, le renoncement, parfois le découragement : «... quand il y avait des soucis, parfois la police, elle se déplaçait pas, ça dépendait des personnes avec qui on était en conflit... » (Daniel) Dans ce contexte, l’existence de conditions favorables au développement de situations porteuses de pratiques déviantes particulièrement sensibles au niveau des jeunes, tend, dans ce périmètre d’habitat collectif densifié, à être établie tant par les expériences vécues que par les représentations. D’autant que, d’une part, les modes de régulation sociale locale (solidarités de voisinage) sont peu opérants et que d’autre part, l’action des services publics, et celle de la police en particulier, ne s’avère pas d’une efficacité palpable (ces habitants considèrent qu’« on » les a oubliés). - Soit assumée en pointillés et relativisée : l’existence d’actes déviants tout étant considérée comme nuisible ne justifie pas la réputation du quartier : « on n’a pas une grosse délinquance, pas de grosse insécurité. Nemours reste une ville calme, c’est pas le Bronx, c’est pas Surville (autre quartier d’habitat social à Montereau en Seine et Marne). Nemours endosse une réputation, les gens du Centre-ville pense qu’au Mont Saint Martin...alors que les gens sont gentils, courtois, on peut faire ses courses tranquillement... » (Ali), « parce que mine de rien, le quartier est bon, hein... Qu’il y ait eu des actes de vandalisme, c’est certain...mais bon on s’est rendu compte en les observant que c’est une minorité, il faut un meneur et les autres qui suivent...mais bon ces gens-là ils ont mûri aussi, ils ont changé d’état d’esprit,... » (Lydie) - Soit « banalisée » par ceux qui se positionnent en défenseurs de la réputation du bailleur et considèrent cette délinquance comme « mineure » : « les incivilités, moi en tant que gardien, j’ai pas de problème, moi je vois quels problèmes il y a, il y a des petits jeunes mais il y a pas de « bad boys ». Vous allez trouver des jeunes qui ont fumé, qui ont fumé un joint. C’est pas méchant, il y a pas eu de braquages, ça non... » (Thierry) La « gravité » de cette délinquance est également minorée par la responsable de la communication de l’OPH 77, bailleur social majoritaire à Melun, qui lors, d’un entretien téléphonique, a cependant admis l’existence de petits trafics de drogue à Melun, situation « qui n’a rien à voir avec ce que l’office doit affronter dans le nord du département où il existe une grosse délinquance avec d’importants trafics, des laboratoires dans les appartements ou dans les parties communes des immeubles... » Ces témoignages établissent l’existence de tensions, d’angoisses liées plus à des actes d’incivilités qu’à de véritables actes menaçant la sécurité. Néanmoins, ils révèlent des pratiques de nature à dégrader le climat social, à nuire aux sociabilités, à altérer les relations entre les habitants, voire dans certains cas, à mettre en cause les comportements éducatifs et le contrôle parental.  d’autre part, ceux (un sur quatre environ soit 15 pour l’échantillon) qui ont mal vécu les derniers mois passés dans les quartiers du périmètre de l’étude (tels Hayatte, Yasid ou ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTI ELLE PAGE 290/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le quartier, une image modulée bien que structurante et prégnante Germaine), ceux qui continuent à entretenir un sentiment d’insécurité (Rosa relogée dans un autre quartier sensible ou Zéna, représentatives de un habitant sur six soit 10) et qui dénoncent la concurrence entre l’éducation familiale et l’éducation de la rue, voulant éviter le risque de perdre leur autonomie de gestion de l’éducation des enfants et souhaitant conserver le sentiment d’estime nécessaire à l’affirmation de leur autorité parentale. Affirmation de cette autorité et attitude de protection des enfants sont prégnantes chez certains pères de famille qui se sont éloignés du périmètre de la ZUP et qui ont fui l’ambiance du quartier : «... il y a une bande qui a commencé à traîner en bas, ça commençait à être mal fréquenté, il y avait la police tous les 4 matins en bas de notre hall, enfin voilà quoi, ça paraissait énorme... ma fille elle avait 7 ans, je la laissais pas aller dehors.... De toutes façons ma fille la dernière année elle sortait pas, je voulais qu’elle voie rien de ce qui se passait parce que je savais très bien ce qui se passait... » (Germain), «...si vous avez des enfants, vous vous dites qu’ils vont vivre dans des quartiers comme ça, qu’ils vont connaître ces pratiques. La délinquance, le deal, tout ça...A Gaston aussi, il y a eu ça, moi-même, j’ai été confronté à plusieurs reprises...c’était deux toxicomanes qui se frottaient le petit joint, je les voyais quand je rentrais, ça me faisait rien jusqu’au jour où j’en ai vu un assis sur la poussette de ma fille. J’étais fou... Je les ai « vidés», je voulais pas que mes enfants voient ça... » (Yassid). Soulignons cependant, cette réaction violente de Yassid qui aurait pu provoquer la dégénérescence de la situation, « il suffit de peu de choses pour que l’ambiance dégénère, notamment sous l’emprise du cannabis ou de l’alcool : un motif futile, un mot de travers, un regard...on profite de la moindre occasion pour s’embrouiller avec eux » [Kokoreff, Lapeyronnie, 2013, p.66], n’a pas eu de conséquences dévasta trices ou belliqueuses comme d’ailleurs dans d’autres cas similaires cités par les habitants. À ce rôle éducatif s’agrège un rôle de protection : «...j’avais peur pour mes enfants parce que moi j’ai vu des choses à Houdart comme partout, je les voyais carrément vendre leur saloperie quoi et je voulais pas que mes enfants vivent dans un quartier pareil et c’était pas le pire quartier de Melun...je peux vous dire que c’était des jeunes du quartier et vendre à des jeunes femmes qui étaient enceintes... » (Manuel) ; Ces propos témoignent de la lucidité de ces habitants et contrastent avec la surprise d’autres qui, soit cantonnés dans le déni, soit incrédules et relogés dans un quartier présentant de fortes ENJE UX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 291/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le quartier, une image modulée bien que structurante et prégnante similitudes avec l’ancien, prennent avec angoisse la mesure de la situation à laquelle ils se trouvent confrontés au quotidien : « Vous savez je suis allée en réunion, j’ai été choquée, je pensais pas que c’était à ce point là. Les gens étaient agressés par les jeunes, ils sont chez eux sans être chez eux en fin de compte. Vous vous rendez compte...ils ont même trouvé des pistolets en dessous des voitures, je me rendais pas compte, je suis rentrée j’en étais malade. Il y a beaucoup de trafics de drogue même ici dans l’immeuble...» (Rosa). La délinquance semble désormais perçue (et fondée) comme la préoccupation première pour cette habitante de Melun qui a « glissé » de son ancien quartier vers un quartier voisin sans véritable changement de contexte. L’insécurité ressentie nous a d’ailleurs, été décrite par une quinzaine d’anciens habitants du quartier d’origine (soit 25%, chiffre comparable aux 28% d’habitants des ZUS) qui déclaraient se sentir « souvent » ou « de temps en temps » en insécurité dans leur quartier (14% à leur domicile) alors que pour les autres quartiers ce chiffre n’est que de 13% (et 8%) [Kokoreff, Lapeyronnie, 2013, p.61]. Cette délinquance attribuée aux jeunes s’inscrit dans les rapports tendus établis entre ces jeunes et les institutions (rapports qui se sont transformés en violences contre la police) et traduit, comme nous l’avons évoqué précédemment, « l’absence de conscience de classe dans les groupes d’habitat paupérisés où règnent l’exclusion et la désorganisation, expose parfois les habitants à des conduites extrêmes ou délinquantes et les confronte à une société qui donne l’impression de ne posséder ni sens, ni avenir » [Dubet, Lapeyronnie, 1992, p.122]. Une situation qui met sur le devant de la scène le rôle éducatif et le contrôle parental : «...regardez le fils à F... Ce gamin, ça fait des années qu’il va plus à l’école...elle parle, elle critique, on a envie de lui dire « mais regarde ton gosse » parce qu’il nous a dégradé beaucoup, lui avec d’autres copains...aujourd’hui, à 3 h du matin, ils foutent le bazar dans les cages d’escaliers que les gens vont travailler quoi.... Les gens se font insulter devant chez eux. Il y avait des gens qui n’osaient même pas sortir de chez eux, c’est grave, moi quand j’ai entendu ça j’ai dit mais où c’est qu’on va là... » (Rosa). Par son manque de réalisme et la confiance « aveugle » qu’elle accordait à la fois aux institutions et à la fonction éducative des parents, cette habitante, attachée à l’ordre établi, traduit une caractéristique « légaliste », les populations les plus exclues étant celles qui s’attachent le plus à l’ordre, qui ne transgressent la loi que si elles sont contraintes (situation de « légitime défense » en quelque sorte) » [Lesbet D., 1988, p.15]. ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 292/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le quartier, une image modulée bien que structurante et prégnante Dans ce contexte d’accentuation des actes de délinquance et des incivilités, l’insécurité envahit les esprits, les habitants ne savent pas trop à qui ils ont à faire, d’autant qu’ils ont l’impression que les autorités publiques abandonnent la partie. En ce sens, évoquant le retour aux « classes dangereuses » du XIXe siècle, M. Kokoreff analyse le phénomène comme processus social qui recouvre des processus d’appauvrissement mais aussi de mise à l’écart et de dualisation de la société, avec des habitants des quartiers qui ont de moins en moins le sentiment de faire partie d’une « classe sociale » inscrite dans un ensemble social hiérarchisé et qui se sentent envahis, selon les processus décrits au titre de la ségrégation (mythe du ghetto) par un sentiment de mise à l’écart et d’exclusion. Un sentiment qui assoit la crédibilité du passage d’une société verticale à une société horizontale telle que l’a décrite A. Touraine [Touraine, 1971] et qui s’articule à la caractérisation de la population que nous avons proposée. Ces habitants considèrent, mais peut être de façon atténuée, l’attitude observée par la police dans leurs quartiers « comme le signe d’un mépris plus global relayant et cristallisant des mécanismes sociaux de rejet et de discrimination partagés par les institutions, l’école, la justice ou la société dans son ensemble » (Kokoreff M., Lapeyronnie D., 2013, p.15-19-20).. Cependant, en dépit de cet aspect sécuritaire et son corollaire de sentiment de marginalisation, ainsi que la concurrence installée entre éducation institutionnelle et familiale et éducation de la rue, le quartier d’origine en structurant des « normes locales » a rempli une fonction pédagogique que la mobilité résidentielle révèle. ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 293/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le quartier, une image modulée bien que structurante et prégnante Au regard de ces observations sur les effets produits par la mobilité, trois niveaux de sociabilités semblent se dessiner :  des sociabilités en régression pour les individus inactifs ou refusant toute inclinaison de leurs habitudes (38% des habitants de l’échantillon soit 23 personnes enquêtées) : personnes âgées (Suzanne, Thérèse, Micheline, Claude,...), personnes seules (Elisa, Christine, Justine, Françoise,...), ou qui éprouvent des difficultés à dupliquer leurs habitudes dans le nouvel environnement (Faty, Zéna, Rosa, Khelfi,...)  des relations sociales en construction (20% de l’échantillon soit 12 personnes) pour les habitants qui ont réalisé une mobilité ascendante ou vécue comme telle, accession à la propriété ou emménagement dans un immeuble neuf (Germain, Manuel, Christelle, Sophie,...),  à un niveau stable pour ceux (25 personnes au total soit près de 42%) qui entretenaient a minima des relations dans leur précédent quartier (personnes seules : Germaine, Hafida, Martine,...) ou qui le considéraient comme leur « dortoir » et qui souhaitent en tout état de cause conserver une distance avec le voisinage (Bruno,.Daniel, Christian, M. Sophie, Yolande,...). Pour conclure ces développements sur le rôle et l’image228 du quartier, il apparaît que le quartier assimilé à un « bien partagé », qui faisait sens pour ses habitants, et dans lequel s’étaient développées des sociabilités singulières bien qu’à géométrie variable et qui demeurent prégnantes chez nombre d’habitants (les femmes y étant particulièrement sensibles), a perdu de sa puissance du fait de la mobilité imposée. Un nouveau voisinage, de nouvelles conditions d’habitat, en règle générale plus agréables, ainsi qu’un effet générationnel, ont suscité et organisé un rapport différent à l’espace et aux autres. La requalification de son rôle, dynamique de respatialisation des habitants, est un processus qui nécessite, en dépit d’une situation qui pour une majorité de ménages ne signifie pas Paquot T., Vive la ville, 1994, p.14 : «...une rue triste, sale, inhospitalière déteint sur votre caractère, vous devenez morose, vulnérable, inquiet et broyez du noir. Des espaces verts lépreux, des voitures mal garées, des incivilités à répétition, un gardien absent ou bougon, tout cela concourt à vous gâcher l’existence et à rendre inhabitable votre logement et ses à côtés ». 228 ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 294/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le logement : marqueur identitaire et identificatoire à facettes multiples un bouleversement, un effort de réadaptation pour imprimer de nouvelles habitudes et « faire sa place » dans le nouveau tissu social. Un processus qui, sans relever d’un effet de classe ou d’espaces sociaux dans les sociabilités observées, est étroitement associé aux propriétés identitaires présentées par les individus appelés à constituer la nouvelle é de vie et qui s’identifie à une logique d’acculturation sur l’échelle du temps (Hoggart, 1970, préface). En revanche, les modes d’usage du quartier (ou de la collectivité) d’accueil apparaissent comme, mis à part quelques exceptions, étroitement imbriqués à ceux du logement, dans le temps comme dans l’espace, quartier et logement étant caractérisés par une forte continuité des usages (Authier, 2001, HDR, p.83) de l’un et de l’autre. L’analyse des manières d’habiter, d’investir le logement et de le mobiliser seront à même d’établir la corrélation entre pratique du quartier et usage du logement, d’apprécier l’incidence de la mobilité vécue par les populations sur leurs comportements et d’observer leur niveau d’adéquation aux hypothèses de départ. II.2 LE LOGEMENT : MARQUEUR IDENTITAIRE ET IDENTIFICATOIRE À FACETTES MULTIPLES « Une cage d’escalier bruyante, des parois perméables aux bruits gênent le repos, entravent le bienêtre, et favorisent la colère, l’agressivité, le refus des autres. » (Paquot T.) 229 Les transformations, les aménagements, les pratiques quotidiennes font du nouvel « habitat » un espace habité, un « espace vécu » (H. Lefebvre), reflet des rapports intimes tissés par l’homme et son espace de vie. Cet espace vécu traduit « l’individu se construisant par ses pratiques et ses perceptions du monde, elles-mêmes constituées à travers le rapport aux formes physiques (espace de vie) et le rapport aux autres (espace social) »230, espace (habitat) qui entre en correspondance avec le Dasein heideggerien c’est-à-dire cet être-là-quiest-au-monde. L’espace vécu, le lieu habité est celui où l’homme projette son être et en retour 229 Pa quot Th. , « Habitat », habitation », « habiter », précisions sur trois termes parents » in Paquot T ., Lussault M, Younés C., Habiter, le propre de l’humain, 2007, Paris, Ed. La Découverte, p. 14 230 Hérouard F., Habiter et espace vécu, in Paquot T, Lussault M, Chris Y., Habiter, le propre de l’humain, Paris, Ed. La découverte, 2007, p. 162 ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 295/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le logement : marqueur identitaire et identificatoire à facettes multiples de quoi, le lieu participe à la constitution de son être, car « c’est en pratiquant que l’individu habitera par la pensée et sera en sure de mettre à proximité les lieux qui lui sont chers et à distance les autres » [Paquot, Lussault, Chris, 2007, p.165]. Comme nous l’avons souligné lorsque nous avons analysé l’ethos de l’« habiter », H. Lefebvre a établi l’importance du rôle de la vie quotidienne, aussi banale soit-elle, dans le tissu de la vie sociale. Ce tissu de la vie sociale est constitué à la fois d’aspects environnementaux (imputables en première instance au quartier) et du cœur de l’espace habité, le logement car le logement porte en lui les ingrédients lui donnant vocation à structurer, au-delà des conditions matérielles, la vie quotidienne. Ainsi, à l’apogée des grands ensembles, la dénonciation des méfaits produits par l’exiguïté ou la conception des logements, le bruit, la promiscuité (« cages à lapins »231) était certes l’expression d’un sentiment de défiance vis-à-vis des procédés de construction moderne (impression de démesure, d’uniformité et médiocre qualité technique) mais également la traduction d’aspirations à d’autres modes de vie relevant du rêve, de la culture, de différenciation ou d’une envie de promotion sociale souvent inatteignable. La « médiocrité » des constructions et l’envie d’autres horizons relevant du rêve, ont été convoquées au cours des entretiens : «... entre guillemets on est quand même dans des « cages à lapins ». On n’a pas la verdure qu’on voudrait avoir... » (Yolande) Même lorsque le rêve est devenu réalité :« (Houdard) c’est pas beau, vous avez l’impression que vous êtes dans des cages à lapins. Moi quand j’allais au Portugal chez mes parents, c’est une maison comme celle-ci, plus grande, pas loin de la mer, c’est vrai que quand je revenais j’avais pas le moral, on disait, on repart dans les cages à lapins quoi! c’est vrai que depuis que j’ai acheté, on revient avec plaisir » (Manuel). Le logement, dans la hiérarchie des problèmes nationaux, continue à occuper une place de premier plan (nous avons mentionné l’enquête parue en 1948, réalisée par l’INED, qui plaçait le logement en première place dans les Désirs des Français en matière d’habitation urbaine. Une enquête par sondage). L’installation dans les logements collectifs reflétait, en fait, un état transitoire caractéristique à cette période de l’état d’esprit des locataires « HLM » pour qui le désir pavillonnaire était (à hauteur de 87%) l’aspiration dominante, y compris au prix de sacrifices (par exemple : ajouter une demi-heure de transport quotidien entre lieu de résidence 231 Hebdomadaire France Observateur, n ° 474, 4 juin 1959 ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 296/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le logement : marqueur identitaire et identificatoire à facettes multiples et lieu de travail), il s’agissait d’une situation inscrite dans la temporalité. Le confort offert par le logement collectif n’était pas, loin s’en faut, significatif, malgré l’engouement perceptible, de volonté ou de souhait des locataires de vouloir s’ancrer et rester longtemps dans les lieux232. Cependant, si dans les années 1960, habiter un logement social n’était pas perçu comme un élément de promotion sociale, (il ne l’est pas davantage aujourd’hui), l’enjeu de la mobilité résidentielle était plus l’éloignement des zones urbaines densifiées que la manifestation du rejet de l’habitat social. L’étude conduite en 1966 par A. Touraine qualifie l’habitat HLM de « petit bourgeois » en ce sens que ce sont les employés aux revenus plus aisés qui acceptent le principe du HLM et qui en exprimant un vif désir de rester dans la cité et un refus à l’idée d’habiter un pavillon, manifestent leur adaptation [Touraine, Cleuziou, Lentin, 1966, p.63), et une tendance forte à l’appropriation du logement type HLM. Au niveau de notre terrain de recherche, les cas d’accession (10% de l’échantillon) récente sont plus nuancés voire contrastés, car ils traduisent une tension entre l’ancrage dans l’habitat collectif et l’appropriation du logement, parallèlement au désir, au « rêve » pour une majorité d’être propriétaire (comme nous l’avons mentionné au niveau des éléments de cadrage, l’image du pavillon était préemptée par plus de 80% de la population au milieu du XXe siècle), de posséder une contrepartie au loyer versé, de pouvoir transmettre quelque chose. « c’est à nous (son pavillon type castor), c’est dur mais quand on sera à la retraite on n’aura plus de loyer ; On laissera quelque chose à nos enfants... l’héritage c’est pas mal... » (Véra),...la différence avec avant, j’avais ma responsabilité limitée, là je suis responsable. Là-bas je payais mon loyer, mes charges,... là j’ai la tranquillité mais ça comprend des choses en plus....Là-bas aussi j’étais bien, comment on dit, là-bas j’ai pris mon argent, je l’ai foutu par les fenêtres, là c’est pas pareil, je sais que mes enfants auront quelque chose à la fin. J’ai acheté après 30 ans de location, c’est de l’agent foutu par la fenêtre. » (Khelfi) Au-delà de l’aspect patrimonial, l’acquisition de la maison individuelle évoque des sentiments contrastés qui n’ont pu être inscrits dans une typologie faute d’un échantillon suffisant, relevons cependant que sur 6 acquéreurs, les deux exemples cités y attachent un intérêt patrimonial, celui de pouvoir transmettre, trois éprouvent une certaine fierté (Germain, 232 Touraine A., Cleuziou N., Lentin F., Une société petite bourgeoise : le HLM, Paris, Centre de recherche d’urbanisme, 1966, p. 62 : 32% se déclarent satisfaits et 68% désirent en changer plus par souci de distinction sociale que par défiance à l’égard de l’état matériel du logement plus ceux qui ont des possibilités de promotion). ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 297/473 Pratique du quartier et usage du logement : paramètres de la construction identitaire Le logement : marqueur identitaire et identificatoire à facettes multiples Manuel, Virginie) voire un sentiment de supériorité vis-à-vis de leurs anciennes relations de proximité : «...je suis fier de les recevoir, c’est clair, c’est plaisant...je suis content de les voir, je sais que tous plus ou moins ils ont réussi à s’en sortir quand même très bien dans leurs moyens,...moi je suis content pour eux,... » (Germain) Pour tous, à l’exception de Roland pour qui la maison, qu’il semble ne pas investir intensément, réalise l’adéquation avec sa situation professionnelle, le pavillon représente comme pour Khelfi, l’accomplissement d’un rêve, celui d’une vie de travail, bien qu’un petit sentiment de trahison par rapport à son groupe d’appartenance transparaisse: « oui, ma femme elle voulait pas mais y a rien à regretter, au contraire », (Khelfi, Nemours). Pour d’autres habitants de l’échantillon, la maison fait figure d’utopie « mon rêve c’est d’aller habiter dans une petite maison avec un bout de jardin et une cheminée,.... Un rêve parce que j’en ai pas les moyens », (Martine, Nemours). Par ailleurs, les témoignages recueillis confirment que l’enjeu de la mobilité résidentielle, en dehors de toute opération la rendant inéluctable (tel le contexte de cette étude), dans le cadre du périmètre de la présente étude, s’est déplacé. Les habitants les plus dynamiques sont partis (au cours des décennies 1970-1980) des logements collectifs, réalisant donc, pour beaucoup, leur rêve d’accession au pavillon, et ceux qui sont restés, pour des raisons économiques ou de proximité culturelle, et dont l’ancienneté dans le logement précédent en atteste, témoignent d’un enracinement profond et de l’appropriation de leur cadre de vie. De ce fait, la mobilité qui ne faisait pas ou plus partie des projets de ces populations, même si elle apparaît comme une contrainte dans le cadre de la rénovation urbaine, s’inscrit dans un nouveau paradigme faisant intervenir d’autres paramètres que ceux qui sont mobilisés traditionnellement (confort, calme, voisinage, verdure, patrimonialisation). Ce nouveau cadre de la mobilité convoque désormais les caractéristiques de l’espace du quartier et celles du logement ainsi que le capital spatial détenu par ces habitants invités à le mobiliser et à mettre en œuvre leurs compétences d’habiter pour s’approprier un nouvel environnement, leur nouveau lieu de vie afin de se « déclarer habitant » et de le revendiquer. Ainsi, emménager dans un nouveau logement engage à la fois l’espace et le temps, recouvre des « pratiques de fondation ». Le nettoyer, le ranger, le repeindre, le meubler,... sont autant « d’actes matériels et banals qui transforment l’espace, soit espace de l’autre (occupant ENJEUX IDENTITAIRES ET MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE PAGE 298/473 Pratique du quartier et du logement : paramètres de la construction identitaire Le logement : marqueur identitaire et identificatoire à facettes multiples précédent), soit espace vierge non habité, en un nouvel espace » [Ségaud M., 2010, p.95]. Cette dynamique en action qui fait appel cumulativement à la compétence d’habiter des populations et au capital spatial détenu par les habitants (tels que présentés au titre des éléments de cadrage), met en jeu non seulement les propriétés du logement mais tout ce qui en constitue ses caractéristiques de monde privé, lieu par excellence de l’intimité personnelle et familiale participant de la construction identitaire. II.2.1 LE LOGEMENT : UNE « FIGURE D’ATTACHEMENT »233OU LA DE L’ ANCIEN LOGEMENT NOSTALGIE Bien que le temps atténue la nostalgie (beaucoup ont quitté leur ancien logement depuis plus de deux ans) de l’ancien domicile, nombreux sont les habitants qui n’ont pas encore totalement installé dans le passé leur changement de résidence et qui entretiennent peu ou prou une image « façon sépia » de leur habitat précédent. Ainsi, à partir des entretiens et observations de terrain, nous avons identifié trois profils génériques de ces habitants :  Ceux qui avouent leur nostalgie ou leur perte de repères : les souvenirs occupent une grande place, davantage chez les femmes qui évoquent presque systématiquement la naissance des enfants, que chez les hommes : « C’est mon espace de vie, mon espace pour recréer des souvenirs, parce que c’est vrai qu’à G. Houdart on a vécu pendant 20 ans, c’est vrai qu’on avait des souvenirs, la naissance de nos filles, enfin tout, même les premiers pas de notre première petite fille... » (Maryse), « J’adorais mon appartement, je l’avais emménagé comme je le voulais, je l’adorais. Mes enfants y sont nés...on n’oublie pas les souvenirs, tous les souvenirs qu’on y a vécu, non on les oublie pas... » (Nora) « Les HLM nous ont dit qu’on allait partir, qu’on allait raser les...on n’y croyait pas,...ils nous ont dit on va casser ceci, cela... c’est sûr moi j’ai mes enfants qui sont nés là-haut, j’ai vécu 15 ans quand même à cet endroit, j’ai beaucoup de souvenirs qui sont partis.
22,408
2020NORMR040_2
French-Science-Pile
Open Science
Various open science
2,020
Utilisation des techniques de télédétection pour mesurer la topographie des zones intertidales littorales dans le cadre de la mission SWOT
None
French
Spoken
7,027
11,861
4.6 Tidal coverage provided by SWOT for tests : ( a ) V09 and (b) V06.......... 4.7 Results obtained for V09 and V06 tests: (a) and (b) V09 and V06 waterlines; (c) and (d) V09 and V06 SWOT-derived DEMs; (e) and (f) V09 and V06 absolute difference maps between the original sentinel-derived DEMs and the SWOTderived DEMs....................................... xix 100 101 102 103 104 105 107 110 111 119 123 125 126 127 127 128 xx L IST OF F IGURES 4.8 S entinel -derived DEM /SWOT - de rived DEM density scatter plots for tests: (a) V09 and (b) V06...................................... 129 4.9 Arcachon Bay DoD maps generated from: (a) 2017 and 2016 Sentinel-derived DEMs; (b) 2017 and 2016 SWOT-derived DEMs; (c) 2018 and 2017 Sentinelderived DEMs; and (d) 2018 and 2017 SWOT-derived DEMs............ 130 4.10 Veys Bay DoD maps generated from: (a) 2017 and 2016 Sentinel-derived DEMs; (b) 2017 and 2016 SWOT-derived DEMs; (c) 2018 and 2017 Sentinel-derived DEMs; and (d) 2018 and 2017 SWOT-derived DEMs...... 131 A.1 Schematic diagram of the OCOG method...................... 141 C.1 (a,b) Examples of ERS-2 along-track profiles of altimetry height over water (purple crosses) and land (green crosses) at high (a) and low (b) tides, the topography under the altimeter ground track is represented in brown and it is filled with water (in blue) using leveled tide-gauge records; (c,d) Variation of Ice-1 backscattering coefficients of Ku-band (black dots) at high (c) and low (d) tides..... ..................... ................ C.2 (a,b) Examples of ENVISAT along-track profiles of altimetry height over water (purple crosses) and land (green crosses) at high (a) and low (b) tides, the topography under the altimeter ground track is represented in brown and it is filled with water (in blue) using leveled tide-gauge records; (c,d) Variation of Ice-1 backscattering coefficients of Ku-band (black dots) at high (c) and low (d) tides.......................................... C.3 Spatial variation of the backscattering coefficient for ENVISAT (cycle 21) at high tide along with the corresponding waveforms of the indicated zones... C.4 Spatial variation of the backscattering coefficient for ENVISAT (cycle 9) at low tide along with the corresponding waveforms of the indicated zones...... 146 146 147 147 E.1 SWOT sampling for test V06.............................. 151 L IST OF TABLE S 1.1 Comparison of methods for mapping the bathymetry of shallow waters and the topography of their adjacent beaches...................... 2.1 Main characteristics of the altimetry missions used in this study......... 2.2 Passing-Bablok regression model and statistical results for the comparisons made between in- situ and altimetry-based SSH (ERS-2, ENVISAT, SARAL, and CryoSat-2) for manual (MAPS) and automatic selections............. 2.3 Passing-Bablok regression model and statistical results for the comparisons made between LiDAR and altimetry-based topography estimation for ERS-2, ENVISAT, SARAL, and CryoSat-2............................ 51 59 72 73 3.1 The number of available Sentinel-1 and Sentinel-2 images for Arcachon and Veys Bays between 2015 and 2018 and the number of eliminated images due to unavailable sea level information, noisy (SAR) or cloudy (MSI) images, and images with redundant water level. 96 3.2 Topographic changes in terms of surface (km2 ) and volume (106 m3 ) between 2016 and 2018 for the Arcachon Bay and the Bay of Veys. 106 3.3 MAEs and RMSEs of LiDARand waterline-derived topography profiles of Figures 3.15 (Arcachon) and 3.16 (Veys). 112 4.1 The results obtained by the orbit selection module simulating SWOT’s swaths covering the Arcachon Bay for the A01 test (mission start time: 01/01/2016 00:00:00; simulation start time 01/06/2016 00:00:00; simulation end time: 01/10/2016 00:00:00) and the attributed sea level obtained from the Arcachon-Eyrac tide-gauge records. 122 4.2 The comparison results expressed as MAEs and RMSEs between the original DEM and the SWOT-derived DEMs simulated with various mission start time and the same acquisition period. 125 4.3 The comparison results expressed as MAEs and RMSEs between the original DEM and the SWOT-derived DEMs simulated with the same mission start time and various acquisition periods. 129 xxi A CRONYMS ACR Aquatic Color Radiometry. 40, 41, 43 ANN Artificial Neural Network. 54 ARGOS Advanced Research and Global Observation Satellite. 61 ATLAS Advanced Topographic Laser Altimeter System. 53 BOA Bottom-Of-Atmosphere. 85 CAST China Academy of Space Technology. 4, 22 CI Confidence Interval. 42, 66, 70 CNES Centre National d’Études Spatiales. 3, 4, 5, 11, 21, 22, 23, 30, 47, 61, 115, 117, 120, 134, 136 COSMO COnstellation of small Satellites for the Mediterranean basin Observation. 3, 22, 81, 116 CRS Coordinated Reference System. 89 CSA Canadian Space Agency. 4, 22, 117 CTOH Centre of Topography of the Oceans and the Hydrosphere. 61, 67 CWB Correlation-Wave -Bathymetry. 45 DDTM Direction Départementale des Territoires et de la Mer. 38, 61, 85, 119 DEM Digital Elevation Model. xviii, 24, 25, 26, 28, 30, 31, 32, 34, 35, 36, 37, 79, 80, 81, 82, 83, 86, 89, 90, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 104, 106, 108, 109, 112, 113, 115, 116, 117, 118, 119, 120, 121, 122, 124, 127, 129, 130, 131, 132, 134, 135, 136, 137, 151 DIODE Détermination Immédiate d’Orbite par Doris Embarqué. 61 DN Digital Numbers. 89 DoD DEM of Difference. 94, 96, 104, 109, 122, 129, 136 DORIS Détermination d’Orbite et Radiopositionnement Intégré par Satellite. 61 ECMWF European Centre Medium-Range Weather Forecasts. 64 EM electromagnetic. 20, 21, 22, 62, 91, 138, 149 xxiii xxiv A CRONYMS ENVISAT ENVIronmental SATellite. 3, 4, 8, 22, 38, 52, 57, 58, 60, 61, 64, 65, 67, 69, 70, 73, 74, 77, 81, 84, 116, 135 ERS European Remote Sensing. 3, 4, 8, 22, 28, 34, 37, 38, 52, 57, 58, 59, 60, 61, 64, 65, 67, 69, 70, 73, 77, 81, 84, 116, 135 ESA European Space Agency. 3, 4, 22, 59, 60, 61, 81, 83, 86, 89 ETM+ Enhanced Thematic Mapper Plus. 32 EUMETSAT European Organisation for the Exploitation of Meteorological Satellites. 4, 22 EW Extra Wide-swath. 84 FFT Fast Fourier Transform. 49 GDR Geophysical Data Records. 61, 64, 67, 143 GEOS Geostationary Operational Environmental Satellite. 3, 22 GFO Geosat Follow-On. 3, 22 GIM Global Ionospheric Maps. 64 GMES Global Monitoring for Environment and Security. 83 GPS Global Positioning System. 20 GRD Ground Range, Multi-Look, Detected. 84 HJ Huan Jing. 106 HOMONIM History, Observation and Modeling of sea level. 85, 120 HRG High Geometric Resolution. 45 HY Haiyang. 4, 22 HYCOM HYbrid Coordinate Ocean Model. 85, 120 ICESat Ice, Cloud, and Land Elevation Satellite. 8, 53 ICESat-2 Ice, Cloud, and Land Elevation Satellite-2. 53, 138 IDW Inverse Distance Weighting. xviii, 10, 94, 96, 97, 98, 112 IERS International Earth Rotation and Reference Systems. 64 IGN Institut national de l’information géographique et forestière (previously Institut Géographique National). 38, 62, 64, 83, 86, 119 InSAR Interferometric Synthetic Aperture Radar. 2, 5, 7, 13, 24, 25, 29, 30, 35, 36, 37, 55, 80, 137 A CRONYMS xxv IPF Instrument Processing Facility. 89 IRS Indian Remote Sensing. 81, 116 ISRO Indian Space Research Organization. 4, 22, 61 IW Interferometric Wide-swath. 84 JERS-1 Japanese Earth Resources Satellite 1. 81, 116 JPL Jet Propulsion Laboratory. 3, 22, 120 KaRIn Ka-band Radar Interfer . 4, 23, 117 LEP Leading Edge Point. 141 LiDAR light detection and ranging. 2, 8, 10, 17, 20, 28, 30, 38, 45, 52, 58, 62, 64, 65, 66, 67, 70, 73, 74, 77, 79, 80, 83, 86, 96, 97, 98, 99, 108, 109, 112, 135, 139 LOCNES Lake Observation Cover aNd Extent from SWOT. 121 LoD Level of Detection. 94, 100, 104, 109 LRA Laser Retroflector Array. 61 LRM Low Resolution Mode. 4, 22, 38, 53, 58, 61, 73, 77, 135 LUT Look Up Table. 89 MAE Mean Absolute Error. 42, 97, 100, 108, 115, 122, 124, 127, 132 MAPS Multi-mission Altimetry Processing Software. 38, 64, 70, 77 MBES MultiBeam EchoSounder. 17, 28, 45 MNE Modèle Numérique d’Élévation. 5, 6, 7, 9, 11, 12, 13 MOS-1 Marine Observation Satellite 1. 81, 116 MS Multispectral. 21, 54 MSI MultiSpectral Instrument/Imagery. 28, 41, 42, 44, 45, 55, 81, 82, 85, 89, 91, 134, 135 MSL Mean Sea Level. 64, 65 NASA National Aeronautics and Space Administration. 3, 4, 21, 22, 117 NDWI Normalized Difference Water Index. 86, 89, 91 NGF Nivellement Général de la France. 64, 83, 119 NIR Near Infra-Red. 85, 89 xxvi A CRONYMS NNI Natural Neighbor Interpolation. 32 NOAA National Oceanic and Atmospheric Administration. 3, 4, 22 OCOG Offset Center Of Gravity. 38, 141 OLI Operational Land Imager. 28, 106 QAA quasi-analytical algorithm. 41, 42 QAB quasi-analytical multispectral model for shallow water bathymetry inversion. 41, 42 RA Radar Altimeter. 59 RA-2 Radar Altimeter 2. 60 REFMAR Réseaux de référence des observations marégraphiques. 61, 85, 120 RF Random Forest. 54 RISAT Radar Imaging SATellite. 49 RMSE Root Mean Square Error. 7, 30, 38, 46, 47, 54, 57, 70, 77, 97, 108, 115, 122, 124, 127 ROLNP Réseau d’Observation du Littoral Normand Picard. 86 RSO Radar à Synthèse d’Ouverture. 3, 4, 5, 6, 8, 9, 12, 13 RTK-GPS Real-Time Kinematic Global Positioning System. 29, 30 S1TBX Sentinel-1 ToolBoX. 89 SAR Synthetic Aperture Radar. 22, 23, 24, 29, 32, 34, 35, 37, 38, 40, 49, 52, 53, 55, 58, 61, 73, 74, 77, 81, 82, 84, 89, 91, 99, 112, 116, 117, 120, 133, 134, 135, 137 SARAL Satellite with ARgos and ALtika. 4, 8, 22, 38, 39, 57, 58, 61, 64, 65, 67, 69, 70, 73, 74, 77, 135 SARin Synthetic Aperture Interferometric. 61 SDB Satellite-Derived Bathymetry. 54 SHOM Service Hydrographique et Océ ographique de la Marine. 10, 38, 45, 61, 85, 86, 93, 97, 119, 120 SIRAL Synthetic Aperture Interferometric Radar Altimeter. 52, 53, 61, 143 SLC Single-Look Complex. 84 SM Strip Map. 84 SNAP SentiNel Application Platform. 86, 89, 91, 108 A CRONYMS xxvii SNR Signal to Noise Ratio. 36, 37, 54 SPOT Satellite Pour l’Observation de la Terre. 3, 21, 28, 30, 44, 45, 81, 116 SRAL Synthetic aperture Radar ALtimeter. 52, 53 SRTM Shuttle Radar Topography Mission. Différentes définitions ont été proposées afin de définir l’étendue géographique des zones côtières dont la majorité considère que ces zones s’étendent de part et d’autre du trait de côte. Ces zones englobent une variété de milieux marins comprenant les estuaires, les lagunes côtières, les estrans (zone intertidale), les barrières, les deltas, les falaises maritimes, les côtes rocheuses, les marais, les dunes et les plages de sable, etc. (Wong et al. 2014). La position géostratégique des zones côtières les associe à des densités de population et taux de croissance démographique et d’urbanisation élevés malgré que géographiquement ces zones ne représentent que 5% de la superficie terrestre (Agardy and Alder 2005; Neumann et al. 2015; Small and Nicholls 2003). La population côtière est toutefois exposée à une série de dangers, notamment l’érosion, l’intrusion d’eau salée, la subsidence, les tsunamis et les inondations (Nicholls 2002). Ces dangers sont susceptibles de s’aggraver dû au changement climatique et ses effets (l’élévation du niveau de la mer et l’augmentation des tempêtes) (Switzer 2015). L’élévation du niveau de la mer et l’augmentation des tempêtes, ainsi que le surdéveloppement en terme d’infrastructure et d’urbanisation auquel ces zones sont confrontées, ont augmenté la vulnérabilité des zones côtières à l’érosion et aux inondations (Masselink and Gehrels 2015). La pression exercée par la croissance démographique, les diverses utilisations de la zone côtière (développement industriel et résidentiel, exploitation des ressources, infrastructure, tourisme et loisirs (Kay and Alder 2005)) et les risques côtiers soulignent la nécessité d’adopter des pratiques de gestion durable dans ces régions (Haslett La gestion des zones côtières nécessite le suivi des changements qui se produisent dans ces environnements dynamiques qui subissent en permanence des variations morphologique. En effet, la morphologie des zones côtières a un certain contrôle sur son propre développement puisqu’elle est contrôlé par les processus côtiers affectés à leur Des tour par les changements morphologiques (Masselink and Gehrels 2015). informations topographiques et bathymétriques précises et actualisées sont alors cruciales pour garantir une gestion efficace et permettre aux scientifiques d’étudier l’évolution de ces systèmes complexes. Situées entre les limites des plus hautes et des plus basses marées, les zones intertidales constituent l’un des environnements les plus difficiles sur le plan logistique et les plus dangereux pour le suivi topographique. Les zones intertidales (les estrans ou zones de balancement des marées) sont des zones de faible pente, légèrement inclinées, immergées ou émergées en fonction du cycle de marée. Ces écosystèmes côtiers très répandus se trouvent principalement dans des environnements dominés par les marées et dans les zones côtières abritées où l’action de la houle est faible (Gao 2019). Il s’agit de zones très productives, caractérisées par une forte biodiversité, qui aident à la stabilisation du littoral, et qui offrent une protection contre les tempêtes et les inondations côtières (Murray et al. 2019). Les environnements méso et macrotidaux ES 1 2 R ÉSUMÉ S UBSTANTIEL favorisent la formation des vasières intertidales parce que dans ces environnements l’action des marées est généralement dominante sur les autres forces hydrodynamiques (Gao 2019). Cependant, cette dominance est relative, ce qui signifie que les vasières intertidales peuvent se former également dans les environnements microtidaux si l’action des vagues est inférieure à celle de la marée. Par contre, même si l’amplitude de la marée est importante, les vasières intertidales ne peuvent pas se former si l’action des vagues domine celle de la marée (Gao 2019). Le développement des zones intertidales dépend de l’apport en sédiments. Toute pénurie ou coupure de cet apport peut entraîner l’érosion et le rétrécissement de ces milieux (Gao 2019). Les interventions humaines (développement côtier, dragage, barrages en amont, pollution, etc.), accompagnées d’une élévation du niveau de la mer due au changement climati , ont mis ces régions sous forte pression. Une étude récente menée par Murray et al. (2019) a montré que les zones intertidales subissent une régression rapide à l’échelle mondiale (diminution de 16% entre 1984 et 2016), mettant en évidence leur vulnérabilité à l’extension des activités humaines. Une cartographie précise et continue de la topographie des zones intertidales est essentielle pour la prévision des inondations côtières, la défense côtière, l’identification de l’érosion ou de l’accrétion du littoral, la navigation, la pêche, l’exploitation économique et le tourisme (Mason et al. 2000, 2010). La bathymétrie/topographie de ces zones est notamment un paramètre essentiel pour la modélisation hydrodynamique en eaux peu profondes puisque de nombreux termes de forçage dans l’équation hydrodynamique du mouvement dépendent de la profondeur de l’eau (Mason et al. 1995). Actuellement, il existe une grande variété de techniques de cartographie topographique des zones intertidales. Les techniques conventionnelles terrestres et aéroportées (e.g., stéréo-photogrammétrie, LiDAR et InSAR) fournissent des mesures très précises. Les techniques terrestres sont habituellement dédiées aux petites zones et sont limitées par la lumière du jour, les conditions météorologiques et la marée. Quant aux techniques aéroportées, elles peuvent couvrir des zones plus vastes en peu de temps, tout en couvrant des régions inaccessibles et dangereuses. Toutefois, ces dernières sont également dépendantes des conditions météorologiques, et sont coûteuses et non adaptées à cartographier la topographie complète (marnage complet) des zones relativement vastes. Les techniques satellitaires (la télédétection spatiale) offrent donc une alternative viable et rentable à la cartographie topographique en raison de leur nature synoptique, en particulier dans les régions éloignées et dangereuses. La première définition officielle de la télédétection spatiale a été donnée lors de la réunion plénière des Nations Unies du 3 décembre 1986 comme la suivante : Le terme télédétection désigne la détection de la surface de la Terre depuis l’espace en utilisant les propriétés des ondes électromagnétiques émises, réfléchies ou diffractées par les objets détectés, dans le but d’améliorer la gestion des ressources naturelles, l’utilisation des sols et la protection de l’environnement. Il existe deux approches de télédétection : active et passive. L’approche active consiste à émettre des ondes électromagnétiques et à enregistrer le signal réfléchi ou diffusé (Lavender and Lavender 2015) ; Tandis que l’approche passive ne mesure que le rayonnement réfléchi ou émis par un objet (Lavender and Lavender 2015). Grâce à nos connaissances sur l’interaction entre les ondes électromagnétiques et les matériaux de la surface terrestre, le traitement et l’analyse des signaux reçus nous permettent de déduire diverses propriétés de la Terre (physiques, chimiques et biologiques), tel que la topographie. Actuellement, une vaste gamme de R ÉSUMÉ S UBSTANTIEL 3 capteurs de télédétection spatiales sont en orbite autour de la Terre, parmi lesquelles deux types de capteurs sont les plus utilisés pour mesurer la topographie des zones intertidales: Les capteurs radar (actifs) et les capteurs multispectraux (passifs). Les détecteurs multispectraux sont des détecteurs optiques passifs qui mesurent les rayonnements électromagnétiques dans différentes bandes spectrales. Ils détectent les rayonnements électromagnétiques solaires visibles et infrarouges (proche infrarouge et infrarouge moyen) réfléchis par la surface de la Terre et les rayonnements électromagnétiques infrarouges thermiques émis par la Terre. Landsat 1 a été le premier satellite multispectral civil lancé par la NASA en 1972. La série de s LandSat s’est poursuivie jusqu’à aujourd’hui. Landsat 8, lancé en 2013, a été le dernier de cette série. L’agence spatiale française (Centre National d’Études Spatiales (CNES)) a également apporté une contribution très importante aux capteurs multispectraux avec la série SPOT. Cette série a débuté avec le lancement de SPOT-1 en 1986 et s’est poursuivie jusqu’à la constellation actuelle composée de SPOT-6 et SPOT-7 lancés respectivement en 2012 et 2014. D’autres satellites ont fourni et continuent de fournir des données très utiles pour l’observation de la Terre, tels que IKONOS (1999), QuickBird (2001), WorldView-1 (2007), GeoEye-1 (2008), WorldView-2 (2009), Pléiades (2011), la constellation Sentinel-2 (2015), entre autres. Contrairement aux capteurs optiques passifs, les capteurs radar ont une capacité à fonctionner de jour comme de nuit et indépendamment des conditions climatiques. Les systèmes radars actifs émettent des micro-ondes électromagnétiques et reçoivent l’énergie rétrodiffusée par la surface. Dans les années 1950, Carl Wiley a établi le principe de système de Radar à Synthèse d’Ouverture (RSO) (Wiley 1985) qui est un système d’imagerie pouvant acquérir des images radar de la surface de la Terre. Seasat a été le premier satellite civil à transporter un instrument RSO développé par le Jet Propulsion Laboratory (JPL) (NASA). Depuis les années 1990, plusieurs satellites RSO ont été lancés tels que les satellites ERS-1/-2 et ENVISAT de l’Agence Spatiale Européenne (ESA), les satellites RADARSAT-1/-2, les satellites COSMO-SkyMed, TERRASAR-X et TanDEM-X, GAOFEN-3, entre autres. Récemment, l’ESA a lancé une nouvelle génération de satellites RSO (Sentinel-1A en 2014 et Sentinel-1B en 2016). Le caractère open source des données Sentinels disponibles pour tous les s est très avantageux pour le développement des méthodes spatiales dédiées à fournir des produits actualisés régulièrement (e.g. cartes topographies intertidales). L’altimétrie satellitaire est un autre type de capteurs radar actifs largement utilisés. A l’origine, l’altimétrie satellitaire a été conçue pour mesurer la forme de la Terre (Benveniste 2011). L’utilisation de l’altimétrie pour mesurer la topographie de surface des océans a été abordée pour la première fois au congrès de Williamstown en 1969 (Kaula 1970). La station spatiale Skylab, lancée en 1973 a transporté le premier altimètre. Sa précision de mesure était de l’ordre de 60 cm (Fu et al. 1988), mais bientôt améliorée par GEOS-3 (NASA, 1975-1978) et Seasat (NASA, 1978) avec des précisions de 25 cm et 5 cm (Stanley 1979; Tapley et al. 1982). Durant les années 80, Geosat (US Navy, 1985-1990) était le seul altimètre en orbite effectuant des mesures en permanence (Benveniste 2011) avec une précision de 4 cm (Chelton et al. 2001). La précision a atteint 3 cm avec ERS-1 (ESA, 1991-2000) et 2 cm avec Topex/Poseidon (NASA-CNES, 1992-2006) (Benveniste 2011; Frappart et al. 2017). Dans la continuité de la mission ERS-1, la mission ERS-2 (ESA, 1995-2011) a été lancée en 1995 suivie par la mission GFO (US Navy-NOAA, 1998-2008) 4 R ÉSUMÉ S UBSTANTIEL ayant la même orbite que Geosat (Benveniste 2011). Jason-1 (CNES-NASA, 2001-2013), 2008-présent), et Jason-3 Jason-2 (CNES-NASA-EUMETSAT-NOAA, (CNES-NASA-EUMETSAT-NOAA, 2016-présent) ont été lancés dans la continuation de la mission Topex/Poseidon tandis que l’ESA a lancé le successeur des missions ERS-1/2, ENVISAT (ESA, 2002-2012) (Frappart et al. 2017). Les altimètres HY-2 (CNES-CAST 2011-présent) et SARAL (ISRO-CNES, 2013-présent) partagent aussi l’orbite d’ENVISAT/ERS. Tous les altimètres mentionnés fonctionnaient en mode basse résolution (LRM). Parmi ces altimètres, SARAL est le premier à fonctionner en bande Ka (Frappart et al. 2017). Une nouvelle génération d’altimètres fonctionnant en mode RSO (mode haute résolution le long de la trace) a débuté avec CryoSat-2 (ESA, 2010-présent) (Wingham et al. 2006) et a également été adoptée pour la constellation Sentinel-3 (ESA, 2016-présent). Comme indiqué précédemment, l’altimétrie satellitaire est une technique destinée à mesurer la topographie de la surface des océans le long de la trace du satellite. Près des côtes, l’acquisition et le traitement des données souffrent de plusieurs défauts. Cependant, les nouvelles technologies d’altimétries satellitaires fonctionnant en bande Ka et en mode RSO ont augmenté le potentiel de cet outil de télédétection dans les zones côtières et leurs utilisations sont maintenant possibles dans des environnements tels que les zones intertidales. Prochainement, de nouvelles possibilités de télédétection seront offertes par la future mission d’altimétrie à large fauchée SWOT (Surface Water and Ocean Topography) (Morrow et al. 2019). SWOT est une mission conjointe entre la NASA et le CNES, avec des contributions de l’agence spatiale canadienne (CSA) et de l’agence spatiale du Royaume-Uni (UKSA). C’est la première mission altimétrique capable de mesurer l’élévation des eaux de surface. La mission SWOT, dont le lancement est prévu en 2021, durera au moins 3 ans et fournira des mesures de niveau d’eau en 2D. L’instrument principal de la mission sera un interféromètre radar en bande Ka (KaRIn) (Biancamaria et al. 2016) qui est un système RSO bi-statique ayant deux antennes aux extrémités opposées séparées par un mât de 10 m permettant de fournir des observations altimétriques dans une fauchée de 120 km de large (Fjortoft et al. 2014). La charge utile de SWOT comprend également un altimètre conventionnel (bande Ku ) qui sera utilisé pour la validation et la calibration des mesures interférométriques et qui permettra en plus de combler l’écart entre les fauchées (Srinivasan et al. 2015). Contrairement aux missions altimétriques conventionnelles destinées uniquement aux surfaces océaniques, la mission SWOT fournira des mesures de haute précision de l’élévation de l’eau au niveau des océans, des côtes et des eaux de surfaces. Les rivières de plus de 100 m de large et les lacs (zones humides et réservoirs) de plus de 250 km2 seront résolus avec une précision verticale de 10 cm. Au niveau des eaux terrestres et côtières, SWOT fournira des cartes 2D de la topographie des surfaces d’eau en haute résolution ce qui donne accès à l’élévation, la pente, et les extensions d’eau (Bianca et al. 2016). Une amélioration significative de performance va être alors apporter à la surveillance des zones côtières à l’aide de cette mission innovante. Des études plus orientées vers l’hydrodynamique ont été menées pour évaluer la performance de SWOT dans les zones côtières et estuariennes (Chevalier et al. 2019; Turki et al. 2015). Turki et al. (2015) ont étudié la capacité de SWOT à reproduire la variabilité temporelle du niveau de la mer dans la Manche ; tandis que Chevalier et al. (2019) ont évalué la capacité attendue de SWOT en terme de précision de mesure dans différents R ÉSUMÉ S UBSTANTIEL 5 contextes hydrodynamiques en prenant l’estuaire de la Seine comme site d’étude. Cette thèse s’inscrit aussi dans le cadre de la mission SWOT et du projet SWOT COTEST (Caractérisation, modélisation et potentialité du satellite SWOT à mesurer les phénomènes hydro-météo-marins dans les systèmes côtiers et estuariens) dans le cadre du programme TOSCA (Terre Solide, Océan, Surfaces Continentales et Atmosphère) du CNES, dont un des axes du projet s’intéresse au couplage entre SWOT et les missions satellites en activité appliquées aux zones côtières. D’un point de vue méthodologique, il existe diverses méthodes de télédétection spatiale dédiées à cartographier la topographie intertidale, notamment la méthode de l’interférométrie SAR (InSAR) (Choi and Kim 2018; Lee and Ryu 2017), la stéréophotogrammétrie (Tateishi and Akutsu 1992) et la méthode de la ligne d’eau (Mason et al. 1995). Les images RSO et optiques sont utilisées par les méthodes InSAR et stéréophotogrammétrie respectivement, tandis que la méthode de la ligne d’eau peut exploiter les deux types d’images. Les méthodes InSAR et stéréophotogrammétrie utilisent deux images RSO ou optiques qui se chevauchent et qui sont acquises de différentes perspectives pour reconstruire des objets tridimensionnels (e.g., des Modèles Numériques d’Élévation (MNEs) topographiques). Quant à la méthode de la ligne d’eau, elle consiste à : (i) l’extraction des lignes d’eau (interface entre les zones intertidales et l’eau) à partir d’une série d’images échantillonnées à différents stades de marée, (ii) l’attribution de hauteurs d’eau aux lignes d’eau en utilisant des informations de niveau d’eau (provenant d’un marégraphe ou d’un modèle de circulation océanique), et (iii) l’assemblage et l’interpolation des lignes d’eau pour former un MNE maillé. Bien que les deux premières méthodes soient capables de fournir des résultats relativement précis, la méthode de la ligne d’eau reste la méthode la plus couramment utilisée pour cartographier la topographie intertidale. Cela est lié à plusieurs raisons notamment la simplicité d’utilisation, la disponibilité des données, la faisabilité de la méthode de l’InSAR pour les missions d’interférométrie à acquisition simultané seulement, et le coût élevé des images de cette dernière et des images stéréophotogrammétrique, etc.. Malgré les progrès de la méthode de ligne d’eau au cours du temps, elle n’est pas encore complètement automatique et requiert un traitement manuel très important. Suite à la demande croissante aux données topographiques intertidales pour des raisons scientifique, économique et sociétale, ce travail a pour but d’étudier l’utilisation des nouvelles missions de télédétection spatiales pour mesurer la topographie des zones intertidales. Pour atteindre ce but dans le cadre de cette thèse et du projet SWOT, deux objectifs principaux sont définis : 1. Exploration, développement et amélioration des méthodes de télédétection spatiale pour la surveillance de la topographie des zones intertidales. 2. Étudier la capacité et évaluer la performance de la future mission SWOT pour mesurer la topographie des zones intertidales. 6 R ÉSUMÉ S UBSTANTIEL Les objectifs proposés conduisent aux questions de recherche spécifiques suivantes : 1. Est-ce que l’altimétrie satellitaire est capable d’extraire des profils topographiques intertidales à marée basse? 2. Est-ce qu’il est possible d’effectuer une auto-discrimination entre les points de mesure émergés et submergés en utilisant des paramètres altimétriques intrinsèques (Coefficient de rétrodiffusion et Peakiness) (Annexe B). 3. Les missions d’imagerie Sentinel (1 et 2) (open source) fournissent-elles des données adéquates pour le suivi de la topographie intertidale en utilisant la méthode de la ligne d’eau? 4. Quelles améliorations pourraient être apportées à la méthode de la ligne d’eau afin de réduire le taux du traitement manuel? 5. L’application de la méthode de la ligne d’eau permet-elle de fournir régulièrement des MNEs intertidaux aptes à détecter des changements topographiques? 6. Est-ce que SWOT permet de mesurer la topographie des zones intertidales à l’aide de la méthode de la ligne d’eau? 7. Est-ce que SWOT permet le suivi des changements topographiques à l’aide de la méthode de la ligne d’eau? Les méthodologies élaborées ou utilisées dans le cadre de ces travaux pour répondre à ces questions ont été appliquées aux zones intertidales de deux baies : La baie d’Arcachon et la baie des Veys. Ces deux baies sont situées sur la façade atlantique française. Le choix de ces baies intertidales est motivé par la disponibilité des données de validation précises (pour des raisons de comparaison) et par les caractéristiques contrastées (hydrodynamiques et morphologiques) que les deux baies présentent afin de prouver l’applicabilité des méthodologies présentées dans différents environnements intertidaux. La baie d’Arcachon est une lagune mésotidale abritée avec de vastes zones vaseuses où la marée entre dans le système par deux chenaux tidaux, tandis que la baie des Veys est une baie ouverte macrotidale caractérisée par un mélange de matériaux vaseux et sableux, avec une présence abondante de sable. Cette thèse débute par un chapitre (Chapitre 1) faisant le point sur l’état de l’art des méthodes de télédétection spatiale utilisées pour mesurer la bathymétrie et la topographie des zones côtières. Ensuite, les capacités de l’altimétrie radar satellitaire ont été explorées dans le Chapitre 2 en évaluant ses performances pour le suivi de niveau d’eau et de la topographie intertidale dans une lagune côtière (le bassin d’Arcachon). Dans le Chapitre 3, des améliorations ont été apportées à la méthode de la ligne d’eau en appliquant cette méthode dans la baie d’Arcachon et la baie des Veys en utilisant des données RSO (Sentinel-1) et multispectrales (Sentinel-2). Enfin, le potentiel de la future mission SWOT pour mesurer la topographie intertidale par la méthode de la ligne d’eau a été évalué pour les deux sites étudiés (Chapitre 4), ce qui a permis de faire des projections pour le futur concernant le suivi de la topographie des zones intertidales à partir des observations satellitaires. R ÉSUMÉ S UBSTANTIEL 7 Chapitre 1 : Suivi de la topographie et la bathymétrie des zones côtières par télédétection spatiale : une revue de la littérature (Salameh et al. 2019). Le premier chapitre de la thèse présente les méthodes de télédétection spatiale utilisées pour cartographier la bathymétrie et la topographie des zones côtières notamment les plages, les zones intertidales et le nearshore. Les différentes méthodes présentées sont illustrées avec des exemples d’application. Premièrement et en se basant sur une étude mené par Almeida et al. (2019), la stéréoscopie était présenté pour la cartographie de la topographie des plages et des dunes. En utilisant des données Pléiades à très haute résolution spatiale (2 m), cette méthode est capable de mesurer la topographie des plages avec des erreurs (erreur quadratique moyenne) variant entre 35 cm et 48 cm. Les méthodes dédiées aux zones intertidales ont été présentées dans la section 1.3. Dans cette section, une étude bibliographique détaillée est présentée pour la méthode de ligne d’eau sur laquelle se base une grande partie de cette thèse. La méthode InSAR pour le suivi des zones intertidales a été aussi présentée. Malgré les difficultés techniques que cette méthode présente, elle a un grand potentiel pour le suivi des zones intertidales. Des MNEs intertidales ont été générés à l’aide de cette méthode qui ont présenté des erreurs de 15 cm. L’altimétrie satellitaire est la troisième méthode présentée pour le suivi de la topographie des zones intertidales. Cette méthode est celle utilisée dans le cadre de cette thèse et elle est présentée dans le Chapitre 2. Contrairement aux autres méthodes, elle permet l’extraction des profils intertidales (RMSE peut atteindre 0.23 m pour l’exemple présenté) et non pas des cartes topographiques. Enfin, une dernière section était dédiée pour l’inversion bathymétrique des zones de nearshore à partir des données sur la couleur de l’eau et inversion bathymétrique basée sur les caractéristiques des vagues. Les hodes mentionnées dans ce chapitre fournissent des données complémentaires. Leur combinaison peut générer des produits de bathymétrie et de topographie multi sources. Chapitre 2 : Suivi du niveau de la mer et de la topographie des lagunes côtières intertidales à l’aide de l’altimétrie satellitaire : L’exemple du bassin d’Arcachon dans le golfe de Gascogne (Salameh et al. 2018). Cette première étude consiste à examiner, pour la première fois, la capacité de l’altimétrie satellitaire à extraire des profils topographiques intertidaux le long des traces des altimètres. L’étude comprent également une évaluation des performances de l’altimétrie pour mesurer le niveau d’eau dans les lagunes côtières et une tentative d’auto-discrimination entre les points de mesures émergés et submergés en utilisant des paramètres altimétriques intrinsèques (coefficient de rétrodiffusion et Peakiness). L’altimétrie satellitaire fournit une mesure du niveau de la mer au nadir (à la verticale) du satellite à une précision centimétrique. Cependant, l’altimétrie en zone côtière se heurte à des limitations, et les observations altimétriques se dégradent fortement à l’approche des côtes. Cela est dû principalement à la contamination de l’écho radar par les zones terrestres qui se trouvent dans l’empreinte au sol du capteur. Pour une meilleure observation de la dynamique côtière, des efforts majeurs ont été déployés et se poursuivent au niveau de développement des nouvelles techniques de traitement des données et ainsi le développement de nouveaux instruments de mesures. Plusieurs satellites embarquant à leur bord des altimètres radar ont survolé de manière répétitive le bassin d’Arcachon. Dans cette étude, nous avons examiné la performance de quatre 8 R ÉSUMÉ S UBSTANTIEL altimètres à mesurer les variations de niveau d’eau, et pour la première fois, à estimer la topographie de la zone d’estran du bassin d’Arcachon. Les satellites-altimètres concernés sont : ERS-2 (1995 à 2011), ENVISAT (2002 à 2012), SARAL (2013 à 2018) et CryoSat-2 (2010 à 2018). L’analyse des données fournies par ces quatre altimètres a pour but de mettre en évidence l’évolution de performance entre les anciennes technologies (ERS-2 et ENVISAT) et les technologies récentes (SARAL et CryoSat-2). Les comparaisons avec le marégraphe d’Arcachon-Eyrac ont démontré une nette amélioration de précision entre les anciennes (ERS-2 et ENVISAT) et les nouvelles (SARAL et CryoSat-2) techniques. Un passage d’un biais de 0.79-1.47 m pour ERS-2 et ENVISAT à un biais de 0.17-0.24 m pour SARAL et CryoSat-2 est observé. L’amélioration de la précision présentée par SARAL est essentiellement due à l’utilisation de la bande Ka (37.75 GHz) dont la tache au sol est faible par rapport à la bande Ku (13.5 GHz) employée par ERS-2 et ENVISAT. La bonne précision de Cryosat-2 (qui opère en bande Ku) est lié au fait qu’il opère en mode RSO, ce qui augmente sa résolution spatiale le long de la trace. Cette étude a également démontré la capacité de l’altimétrie satellitaire (SARAL et CryoSat-2) à mesurer la topographie de la zone intertidale grâce à la comparaison des mesures altimétriques à une cartographie LiDAR (biais < 0.25 m). Cependant, l’auto-discrimination ne peut pas être effectuée, point par point, en utilisant uniquement le coefficient de rétrodiffusion et le paramètres de Peakiness. La limitation la plus importante réside dans la grande taille de l’empreinte au sol des altimètres. Néanmoins, une technique de discrimination automatique entre les mesures effectuées à marée haute et marée basse a été mise en place. Ceci est dû au bon contraste obtenu pour les paramètres mentionnés à l’échelle de la baie entre les marées basses et les marées hautes (de forte variation des paramètres en fonction de la contribution des surfaces émergées à l’empreinte au sol). Des suivis de la zone intertidale du bassin d’Arcachon et d’autres environnements similaires seraient donc envisageables grâce à cette mé de télédétection. Du fait des passages répétés, la quantification du déplacement de ces zones pourrait être réalisée. En termes de perspectives, la prochaine étape à franchir est de prouver la qualité des altimètres dans d’autres milieux intertidaux, comme la baie du Mont-Saint-Michel, la baie de Seine (Vasière Nord) en France et la baie de Fundy au Canada (le marnage le plus élevé du monde). Ces environnements intertidaux sont survolés par différents altimètres et présentent des caractéristiques contrastées en termes de taille de site, de type de matériaux et du régime de marée. Pour cela, l’évaluation des performances de l’altimétrie sur ces sites sera très utile et permettra d’obtenir une vision plus complète et extrapolable sur les capacités de l’altimétrie dans l’ensemble des zones intertidales. En ce qui concerne l’auto-discrimination entre les points de mesure émergés et immergés, il faudra se concentrer sur l’analyse des formes d’onde altimétriques (non seulement sur le coefficient de rétrodiffusion et la Peakiness) afin de pouvoir classer plus efficacement les points de mesure. L’altimétrie radar a fourni des mesures relativement précises dans la zone intertidale du bassin d’Arcachon, mais des mesures plus précises pourront être fournies par la mission d’altimétrie laser ICESat-2. Cette mission peut fournir des données de très haute résolution spatiale (0,7 m contre 175 m au mieux pour l’altimétrie). L’intérêt de cette mission présente sera très important surtout pour la calibration et la validation d’autres méthodes utilisées sur des sites d’accès difficile où les mesures in situ sont difficiles à acquérir. R ÉSUMÉ S UBSTANTIEL 9 Chapitre 3 : Suivi de la topographie intertidale par la méthode de la ligne d’eau à partir des images Sentinel-1 & -2 : l’exemples du bassin d’Arcachon et de la baie des Veys en France (Salameh et al. ed). Après avoir exploré les capacités de l’altimétrie satellitaire dans les zones intertidales, nous avons abordé les systèmes d’imagerie satellitaire. Ce type de données permet la génération des MNEs intertidaux maillés plutôt que l’extraction des profils topographiques. Cette deuxième étude consiste à améliorer la méthode de la ligne d’eau utilisée pour mesurer la topographie des zones intertidales. La méthode de la ligne d’eau est une technique largement utilisée pour la création des MNEs des zones d’estran. La ligne d’eau fait référence à l’interface terre-mer ou à la ligne de côte dans la zone intertidale. La méthode consiste à détecter le bord de la ligne d’eau des images satellitaires à l’aide des techniques de traitement d’images. Ensuite, la position de cette ligne d’eau est géolocalisée et nivelée à l’aide du niveau d’eau donné par un modèle hydrodynamique de marée et de tempête pour la zone observée au moment de l’acquisition de l’image (ou bien en utilisant des observations marégraphiques). À partir d’une série d’images échantillonnées à différents stades de marée, un ensemble de lignes d’eau est assemblé et ensuite interpolé pour générer une carte topographique complète de la zone. Cette technique suppose qu’il n’y ait pas eu de changement majeur dans la topographie de la zone intertidale pendant la période d’acquisition de l’ensemble des images. Les images RSO sont surtout utilisées en raison de leurs capacités à fonctionner de jour comme de nuit et indépendamment des conditions climatiques. Les images multispectrales ne peuvent être utilisées qu’en absence de couverture nuageuse : il est ainsi recommandé d’utiliser les images acquises pendant la saison estivale durant laquelle il n’y a pas un changement majeur dans la topographie. Traditionnellement, la méthode de la ligne d’eau souffrait non seulement d’un nombre insuffisant d’images satellitaires, mais aussi du seuillage subjectif effectué dans le processus de détection des contours (lignes d’eau), et du long post-traitement (parfois manuel) des lignes d’eau extraites. Une nouvelle technique de détection des contours a été développée dans le cadre de cette étude pour surmonter ces difficultés. Cette méthode est accompagnée d’une procédure automatique visant à éliminer les images RSO bruitées et à les exclure de tout traitement ultérieur. Cette nouvelle méthode d’extraction des lignes d’eau se base sur une procédure de segmentation (basée sur l’algorithme de clustering non supervisé k-means) et un modèle de contour actif. Cette méthode permet l’extraction des lignes d’eau pour les deux types d’images RSO et multispectrales et elle a été conçue pour créer des contours fermés (des objets). Le seuillage subjectif lors de la méthode de détection de contour a été évité grâce à la segmentation des images à l’aide de l’algorithme de clustering k-means. Le post-traitement des lignes d’eau a été automatisé grâce à l’extraction des lignes d’eau en tant que contours fermés ce qui a permis : (i) l’élimination automatique des sections de lignes d’eau qui se croisent (effectuée manuellement dans les études précédentes) et (ii) la sélection automatique de la ligne d’eau la plus appropriée parmi un ensemble de lignes redondantes (lignes d’eau de hauteurs proches). Cette dernière a été effectuée en se basant sur le nombre d’objets des lignes d’eau (conservation de la ligne d’eau avec le nombre d’objets minimal) et c’est une étape essenti lorsque les données sont abondantes (cas des missions Sentinel). La deuxième étape a permis une élimination de second degré des images de qualité intermédiaire, qui n’avaient pas été éliminées lors de la première procédure d’élimination 10 R É SUM É S UBSTANTIEL automatique. Par conséquent, en utilisant cette méthode, il n’est plus nécessaire de sélectionner manuellement les images à utiliser et de modifier manuellement les lignes d’eau après extraction. En se basant sur la méthode de ligne d’eau décrite ci-dessus, quatre cartes topographiques ont été produites pour les années 2015, 2016, 2017 et 2018 pour le Bassin d’Arcachon et trois cartes topographiques pour les années 2016, 2017 et 2018 pour la Baie des Veys. L’utilisation des observations Sentinels a permis un échantillonnage complet de l’amplitude de la marée en moins de 4 mois. La validation de la méthode a été effectuée en comparant les cartes topographiques produites aux cartes topographiques précises dérivées du LiDAR. Dans cette étude, les lignes d’eau ont été nivelées à partir des données marégraphiques et à partir des sorties d’un modèle hydrodynamique de SHOM. La procédure d’interpolation a été faite en utilisant deux méthodes différentes, IDW (Pondération inverse à la distance) et krigeage. Les résultats de cette étude ont mis en évidence que la méthode de la ligne d’eau utilisée généralement sur des grandes zones intertidales est capable de fournir des cartes précises sur des zones relativement petites avec une erreur d’environ 19 à 25 cm. L’étude a également montré que la méthode d’interpolation par krigeage convient mieux à la génération des cartes topographiques, par rapport à la méthode IDW. Des études antérieures ont montré qu’il est préférable de niveler les lignes d’eau à l’aide des sorties de modèles hydrodynamiques maillées afin de prendre en compte la pente de l’eau. Cependant, nos résultats ont montré la même performance entre l’utilisation des sorties maillées et les marégraphes (ou bien les sorties modèle prises en un point précis). Cela est principalement dû à la faible pente des eaux de surface dans les petites zones intertidales. De plus, l’étude a confirmé la capacité de la méthode de la ligne d’eau à mesurer les changements topographiques dans le bassin d’Arcachon et la baie des Veys à l’aide des images Sentinel-1 et Sentinel-2 où des volumes significatifs d’érosion et de dépôt ont été détectés. La zone intertidale d’Arcachon a montré un comportement globalement stable avec des petites taches d’érosion et de dépôt répartis dans la zone intertidale. Concernant la baie des Veys, des zones d’érosion et de dépôt adjacentes localisés le long des chenaux ont été observées. Cette localisation peut indiquer une migration des chenaux entre les années observées. Entre 2016 et 2018, des pertes en volume de 1,12 × 106 m3 et 0,70 × 106 m3 ont été détectés pour le bassin d’Arcachon et la baie des Veys respectivement. Il faut noter qu’en terme de volumes érodés et accrétés, la baie des Veys à montrer des variations plus fortes malgré le fait que les changements nets observés sont plus faibles par rapport à Arcachon.
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BOUVA RD. 455 56 57 58 278 257 191 429 436 334 253 430 446 265 438 210 431 276 400 230 261 Chasu b le Chape Da lmatiq ues Echarpe Etole, Franc s F-rnncs Francs Francs Francs 160 245 255 280 345 350 375 3~0 400 450 500 500 450 460 575 500 525 530 f\00 ô80 735 290 300 310 90 100 115!H5 IJ5 80 515 530 580 590 700 590 765 705 135 145 150 150 175 165. 80 100 » 110 165 175 205 210 220 225 245 260 '260 290 285 315 395 345 3!15 360 400 475 450 4(10 N.B. 775 610 780 675 715 700 800 925 900 980 175 175 205 185 185 200 210 225 235 250 50 55 55 90 90 95 Ch ape Dalmatiq ues Echarpe Etole Francs Fra ncs Frn,,cs Francs Fra n cs 500 550 680 700 800 935 250 275 360 130 140 145 950 1060 1135 294 295 456 254 412 271 545 455 750 735 695 850 128 390 389 270 39,2 437 785 1335 1125 1070 1375 3100 454 440 338 340 1155 1550 1470 1830 1700 1150 1580 1210 1700 935 785 1260 1235 965 325 315 460 405 4!10 400 240 230 205 250 7 485 480 » » 335 » » 1910 1675 1920 4400' 3475 2300 3200 5700 740 450 925 935 475 225 560 675 540 840 810 580 1365 1260 260 315 310 120 215 185 Le damas ordinaire et la brocatelle sont remplacés : par la lampassette.. -------w. -~ ~v u, Ul':S. 11 175 205'6 105 115 115 130 130 140 327 233 399 Chasublf' l 105 105 90 110 10.5 N" i-t:pPOQUCtlons photographiques de br. ~ - oder1es execute,es dai:,s nos ateliers. r l N" es •'• • 453 241 331 Chasubl e Ch a p e Dalm a tiques Echarpe Etole F rancs Francs F rancs Fra n cs Francs 475 480 fi30 910 rn10 1050 1125 1470 1575 300 415 430 205 245 245 250 343 325 376 356 434 500 875 745 815 810 710 342 289 352 264 245 349 930 1110 1100 1245 1180 441 362 360 2 55 256 310 935 975 13ü0 1000 1415 1525 1705 1980 1800 2175 1575 360 » 525 400 205 365 250 rnoo 1760 1945 1870 2435 2200 ~125 2815 2:'>20 535 680 680 600 675 715 310385 330 445 405 375 1125 1315 1525 1315 1230 1625 2260 1960 1750 1675 1680 1790 3:')00 2675 3050 2375 2415 3250 730 840 740 470 440 385 415 480 490 12;i0 1f>73 1440 1810 11 » 710 760 I__:_ 12 Chasu ble Ch a pe, Francs Francs Echa rpe Etol e Francs Francs Francs 3050 3340 3~90 33:;o 3275 635 840 875 715!-J45 ô60 475 400 410 440 435 345 D a lma tiques / 1500 1365 1625 1445 1575 1600 1790 2210 1810 2300 1735 2 47 1575 2 46 1420 249 1990 2 86 * 1600 239 2015 1 324 4375 '.2210 2130 2890 1870 2130 5525.357(j 30JU 415U 3250 4300 8800 740 820. 985 555 900 1810 530 390 550 390 485 1075 442 364 259 243 260 382 215 245 365 470 » 10:!J Pages 2100 31.10 13 125 1585 1995 3400 800 490 14 172 2785 2950 5350 1610 785 15 126 2550 2870 4700 970 540 Tous les,,rix ci- des sus con cern a nt l,, s orn ement s brodiis en mé tal, sont 1,0 11 r bro derie en m ét a l bla nc d o, é, or f in. E l"nl do nn é les f l11 ctu q. lio11 s de l'arge 11 /, n o us co nsull er p our les pn:c d,,s orn em ents brodes en or ou en argent fin (Or 0 11 a rgent f in. sont to11Jo11rs au Je• litre 990 / 000. / Pages '- -ECHARPES i No 276 121 293 BANNIERES (suite) 277 290 200 205 490 250 No M,Lal blanc àorà Fr. 210 310 840 1m10 sur om75 1m30 sur om90 1m65 sur 1m10 ETOLES No 537 536 530 94 531 127 1 Face..* Fr. 145 415 lOO 220 290 2 Faces. Fr. 250 » 175 » 525 260 1m10 sur om75 1 30 sur ooego 1m55 sur 1m10 111 No 532 1517 535 506 109 125 1 Face.... Fr. 325 110 330 380 360 485 2 Faces. Fr. 610 » 610 » » » 1m10 sur OW75 1m30. sur om90 1m65 sur 1m10 775 1m10 sur om75 1~30 sur om90 l m65 sur 1m10 No 93*1 935 934 929 926 927 928 Fr. 195 325 500 520 925 975 1 1200 Fr. Fr. Fr. No 21 DEVANTS D'AUTEL.Fr. Fr. Fr. No No 126 172 1 F~ce. * Fr. 540 No 20 » Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. No BANNIERES D.imensions :. No 1m10 sur om75 Fr. 1m30 sur om90 Fr. lm65 sur l mto Fr. 517 700 810 1.060 523 695 885 1.115 481 730 840 1.120. 1ro10 sur om75 1m30 sur om90 1m65 sur 1w10 Fr. Fr. Fr. 514 935 1.035 1.275 432 700 815 1.115 515 785 985 1.290. 555 1.115 1.490 1.625 415 1.095 1.470 1.815 561 1.140 1.545 1.925 448 1.115 1.475 1.810 518 1.085 1.410 1.775 480 1.630 2.060 2.770 461 1.225 1.610 2.015 521 1.350 1.695 2.050 427 1.195 1.495 2.035 503 925 1.200 1.635 499 1.725 2.150 2.850 502 985 1.285 1.715 No 487 22 2m sur 1m20 Broderie métal blanc doré Fr. 10.900,.r<:: Pages ◄ BANNIERES (suit e) 27 Dimensions 22 1 m3:5 sur om90 Broderie Métal hl. doré 1•75 sur 1•to Broderie Métal bl. doré Z3. No 446 Fr. Fr. 3.550 4.910 N° 542 526 590 1 1m10 sur om75 tm30 sur omgo P 65 sur 1m10 Fr. Fr: * Fr. 800 750 1.000 1.350 1.780 2.200 3.000 1 985 1.310 465 Fr. 685 855 N ~* 456 458 450 Fr. 3.000 2.875 3.150 827 Fr. 40 45 115 -N o 994 Fr. 464 459 No 1202 Fr. 250 Métal Métal 4.330 N° 780 781 Fr. 305. 380 759 754 760 555 660 965 3.17fi 780 3.600 AUBES ET ROCHETS MITRES TOURS DE CHAIRE 805 Brod. Mét. hl. doré Fr. 1.750 2.500 3.000 *31 N o 765 32 N° 703 Fr. 810 N ° 70~ Fr. 1.300 TULLE BRODE POUR DEVANT D'AUTEL No. ANTIPENDIUM Fr. 330 850 851 852 853 854 855 » 22.75 23.75 13.25 13.75 17.25 857 858 859 860 861 22 25 Fr. No 19 Fr. 18.25 * 23.75 22 » » » Canons d' Autel et bijouterie d'*E glise Hausse 110 % CONOPES 907 901 910 485 Métal 840 601) 160 752 N° 704 Fr. 1.050 2663 55 751 Monture des Dais simples (monture compl.) Fr. 500 Monture ~es_Dais mi-r iches (mont. compl.) Fr. 875 ) 130 Nous avons en stock un choix considérable de garnitures d'aubes et rochets en guipure, tulle application, tulle brodé, Renaissance, filet, Milan, Venise, Bruges, etcï *•* depuis 75 francs jusqu'à 2.000 et ;l.000 -francs. 4.000 1 804 776 778 750 30 MONTURES DE DAIS No 775 DRAPS MORTUAIRl::S 112 469 No 1204 Fr. 310 PAVILLONS DE CIBOIRES Moire 1.060 1.715 Sat. 2.17:'5 Satin 975 Drap d'or 2.1~0 468 675 \ 29 463 828 OMBRELLINO N o 1206 Fr. 340 DAIS 460 826 PELERINES Les prix des drapeaux étant ~ubordonnés a. a richessé de l'ornementation et des tissus , pri ère de nous donner tout es in dications util t> s pour établi r un dessin que nous vous soumettrons avec devi~ et prix. No 825. N o 992 Fr. 475 DRAPEAUX 25 No 28 1 24 26 BOURSES DE BENEDICTION Bronzes et orfèvrerie d'Eglis•~ 33 81. 90 % à 80 inclus. Hausse Falots, etc.~. Hausse 110 % TARIF des FOURNITURES pour la CONFECTION des ORNEMENTS d'EGLIS TISSUS GALONS Le Mètre Le Mètre Largeur 54 °;m 73 °;m Damas soie et simili tte• nuances Depuis 24 ». rayonne 27 50 tout soie 32 50 Lampassette 10 > Satin ordinaire 11 > extra 16 » 23 soie riche 38 » 58 Moire antique soie et cot 13 50 21 tout soie 28 75 42 Velours anglais 15 » mi-soie 27 » Draps d'or glacé 24 >.' 32 31 » 45 mi-fin métal doré.. *70 » 105 fin 1er titre. 130 » 200 d'arg. fin 1•r titre 120 » 180 Brocard métal doré et soie 45 » DOUBLURES » » » » Large Galon jaune ou blanc.... 2 nuances............ Depuis soie nué.. glacé faux ou argent faux.. x or mi-fin...... argent mi-fin.. colonne or ou argent mi-fin.,, >' » Larg. 'Le mèt. Sur demande, il sera envoyé franco des échantil• Ions de ces tissus, ainsi que dans des qualités plus riches. 1 50 2 80 1 80 1 » 2 25 1 50 » 3 25 5 » 2 3 75 2 90 FRANGES 27 Le Mètre m;m * -- - Frange bourdon soie jaune *ou hl. 3 75 couleurs. *.. 4 » ot mi-fin à bouil... 6 75 argent mi-fin. 6 » 42 m;m 55 m;m 82 m;m ____,____ -----l 4 25 4 75 5 25 5 75 12 10 9 50 8 » >) >> Cordons d'étole soie jaune ou blanc la pièce soie coule11rs : Satin Parisien toutes nuances 80 °/"' 6 50 Satinette 80 c;m 4 » Sergé polonaise Depms 1 60 c;m 11, » 15 » 1 80,, "/m Bougran écru.....1140 c;m 6 50 1 95 Galons gothiques larges, depuis 5 fr. » >> 1 10 1 » - or mi-fin à bouillons Depuis 7 50 8 » 17 -. 12 75 5 6 8 75 » 75 \, SUJETS Sah1t-Nom, Agneau, Pélicaq, etc., gloires paillettes Pour chasuble 29 50 Pour chape 34 » Médaillons de chasubles brodés soie.. Depuis 10 50 13 » de chapes brodés soie..... Soutanes d'enfants de choelir.. Depuis 50 » Calottes..... 6 50 Surplis 24 » Cottas Depuis 13 >-' Ba s pour ecclésiastiques, quai. _ext., cot. 11 25 laine 12 75 Bas de sport pour scouts, patronages et pour religieuses. DORURES POUR LA BRODERIE Filés or mi-fin à broder le kilog argent mi-fin..... métal bfanc doré... argenté. or fin et argent fin t •r titre.. Soutaches métal blanc <loré :. argenté.. Cordons métal blanc doré.-. argenté. 425 200 » » 475 >' 250 » n u cou r s 400 225 325 190 » » D » Cannetille or mi-fin le kilog argent mi-fin.. métal blanc doré. '. -- argenté.... or et argent fin l•r titre Paillettes or mi-fin de 200 à 450 fr. suiv. les N °• arg. fin de 100 à 310 fr. suiv. les N °' Découpures perles (épis, etc.), or mi-fin le kil. arg. mi-fin 350 200 425 225 » > » > nu cou rs 800 » 350 » Choix d'Aubes, Rochets, Dentelles pour aubes bénédictines. - Prix divers. - Chapelets, l\Wailles, Statues, Chemins de croix. Tarifs spéciaux pour réparations d'ornements, bronzes, orfèvrl rie. Pr i ère de ne découp_er a y_cun. modél~,- Il suffit d'i f'! diquer *,a COUL EUR et 1e* NUMÉRO de l' ornement choi si. DAMAS, médaillon brodé soie jaun e ombrée, gal<?n. et frange soie, doublure satin par1 s1en. Chasi1ble. Fr. 90 Il E cha rpe~.. Fr. 58 " 31 Chape....,, 1 4 7 *11 Etole 2 Dalmatiques,, 185 DAMAS; broderi e soie.j a un e ombrée,,galon et frange soie de 2 couleurs, doublure satin parisien. Chasi\ble.'Fr. * Echa,r pe.,.. Fr. 05 Chape... » 153 Etol e.....,; 34 2.Da lmatiques » 185 DAMAS, r iche médaillon et d evant brodés soie jaune d'or ombrée, galon et frange soie de 2 couleurs, doublure satin parisien. Chasubl e. * Fr. 121 /1 Echarpe Fr. 90 Chape » 219 E tole... >' 40 2 Dalmatiques,, 365 1, * DA.MAS, broderie soie Jaun e ombrée, • galon. et frange soie de 2 co uleurs, dou blure sa tin parisien. 02 1 Il Chasuble. Fr. 13211 Echarpe Fr. 92 Chape. » 220 E tole. •)) 50 2 Dalmatiques " 345, DAMAS * BROCATELL E 1re q te, médaillon br? dé soie ja une ombrée, ga lon et fran ge soie*, doubl u re satin pa risien 'I Chasub le. Fr. 100 Ech~rpe Fr. 73 Chape. » 178 Etole.,, 40 2 Dalmatiqu es " 225 1 DAMAS BR'OCATELLE, 1 110 quali.t é, broderie en soie de coulem'.s, galon et frange soie de 2 couleurs, doublure sati n parisien. Cl<ias uhle. f' r. 13811* E~harpe Fr. 98 Chape.,, 255 Etole. " 52 2 Da lmatiques " 385 Da ns les prix qe s Chasubles sont compris l' E tole , la Manipul e , le Voile et la Bourse , ces deux derniers articles sont toujours doublés en soie. N.-8.- En.rai so n des fl uctuations dont les prix sont touj ours l'objet, nous indiquons ceux que nous espérons pouvoir mainteniP, bien qu'en dessous du cours du jour de l'établissement du présent catalogue. * T ons nos d ess ins de Chasublerie sont d es reproductions photographiques de broder ies exécutées dans nos a teliers. 2 Prière -de conserver avec s,oin ce Cataloa-ue * et de ne pas s•e*n dP.ssaisir l DAMAS BROCATELLE , broderie soie jaune d' or om bré e, ga lon -et frange soie de 2 couleurs, doublure satin parisien. Chasuble. Fr. Echarpe. Fr. 113 Chape. '» _ 2 69 Etole. » 54 2 Dalmatiques " 41 5 149 1 SATIN b1,oderie en soie de coul-eurs, ga lon et fra 11ge soiè de 2 cou!., doubl. satin parisien Chasuble. Fr. Echarpe. Fr. 123 Chape. » 325 Etole. » 62 175 1 2 Dalmatiques » 505 * M ême p *, . i x en Damas double , chaîne DAMAS, broderie soie* Jaune d'o r ombrée g!tlon et frange soie de 2 couleurs, doublure satin parîsien. Chasuble. Fr. Ec harpe. Fr. 119 Chape '. » 277 Etole. » 58 2 Dalmatiques » 430, 15711 VELOURS NOIR ANGLAIS, riche broderie soie blanche et gr ise, ga lon argen té, frange à hou ilions, doublure satin parisien )) Chasuble. Fr. 18 Echarpe. Fr. Chape » 322 Etole » 88 2 Dalma1iques » 510 711 DAMAS broderies en soies de couleurs, ga lon frange -et soie de 2 couleurs, doubl ure satin parisien. Chasuble Fr. 17211 Echarpe. Fr. 125 Chape " 320 Etole. SAT\IN, b;oderie en soie de cou leurs, galons Brodés, fnmge soie, Doublure satin parisien. Chasuble. Fr. Echarpe. Fr. 152, Chape.... » 435 Etole... " 05 2 Dalmati ques » 5 7 5 24511 210. SATIN N0lR, broderie en soie blanche, galon brodé, frange soie, doublure satin parisien. C. hasub le.. Fr. 24G 11 Echarpe.. Fr. " Chape.... » 383 Etole.... » * 8G 2 Dalmatiques » 525 1 * 25311 27511 Tous nos dessins Chasuble~ie sont * des reproductions photographiques de broderies exécutées dans nos ateliers Prière de ne découper aucun modèle, il suffit d'indiquer la couleur et.l e numéro de l'ornement choisi. Les or~ements brodés or fin soiit du 1er titre (990/000) garanti et confection,11és avec doublure soie ~t frange à bouillons métal blanc doré s. t 2. '. - - - - - -r,e pas se aena1s1r ae ce ca1:a1ogue que nos concurrents ont Intérêt a Vous 8Hi8V8F 230 DAMAS, qualité, riche, broderie en soies de couleurs, galon brodé, frange SOie CO U leurs, doub lure sati n parisien . Chasub le . Fr . 2 81 E charpe . Fr. 180 » 115 Chape... » 450 Etole Dalmatiques " 630 Il MOIRE. ANTIQUE NOIRE TOUT SOIE, broder ie en soie blanche, ga lons brodés, fra nge soie, doublu r e satin parisien.. Chasuble. Fr. Echa rp*e. Fr. 200 Cha pe... ll 520 Etole... » 120 2 Dalmat iques» 760 31511 325 1\ 399 327 SA TI N, broderi e en so ies de cou leu rs' avec ruban tis sé, g,do ns brodés, frange soie de 2 couleurs. doublure satin parisie n. Chasuble. Fr. 335 \1 Echarpe.. F,*. » Chape lJ 500 Etol e..... n » 2 Dalmatiques n 8 35 1 SATIN, ric he broderie en soies d e cou leu rs, galon brodé, frange soie, * doublure sati n parisien. Ch asu ble. Fr. Echarpe. Fr. 188 Chape..,, 525 1 Etole... » 120 2 Dalmatiques» 770. MOIRE AN T IQUE TOUT SOIE,,*iche b rode r ie en soies de couleurs, ga lon brodé, frange soie, doublure satin parisien. Chasub le. Fr. 380 Echarpe. F r. 230 Chape... >> 620 [ Etole... » • 129 2 Dalmatiques ll 860 * il SATIN, riche broderie en soie jaune d 'o,* ombré, Sacré-Coeur brod é aux petits points soies de couleurs, gal on brodé, frange à boui l lons o r mi-fin, doub!u,'-e sati n parisien Chasubl~. F r. 4 1 0 Echarpe. Fr: 255 Cha pe.. » 615 Etole... » 130, 2. Dalmatiques 840 Il ' nos générales sur Les Ornements su r Damas, Satin, Moire et Lampassette peuvent se faire en couleurs: Bl anc, R6uge, Noir, Violet et Vert, et aux mêmes prix. Nous possédons une qu antité d'AU T RES DESSINS dont nous pouvons SOUMETTRE PHOTO par retour. - Nous con sulter. Consulter nos notes générales sur la Chasublerie, 295 MOIRE ANTIQUE GAUFR ÉE, l>rnJeri ~ mé- SA TIN, broderie. métaf b lanc doré or fin. en tal blanc doré or fin et soie jaune d'or. relief et soies de couleurs., frange à bouil. chiffre brodé en reli e\', galon or mi-fin, lons et gal on or mi-fin, doublure' satin * frange à bouillons or. mi-fin. doublure saparisien. tin parisien. Chasuble., Fr. 270 \\ E char pe*. Fr. 178 Echa rpe Fr. 17 5 * Chasuble. Fr. 2 ij Chape. » 470 Etole.,, 110 Chape.,, 488 Eto le. 104. 2 Dalmatiques. 750 2 Da lmat iqu es " 720 511 254 412 MOIRE ANTIQUE TOUT SOIE, broderie mét al hl a ne doi'é fin en relief et soies de couleurs, ga lons brodés, frang e à bou'illons, doublure satin parisien. Ch;isuble Fr. 445 1/' Echarpe. Fr. 235 Chape » 715 Etole,, 148 2 Dalmatiques >l 965 1 MOIRE ANTIQUÉ TOUrr S OIE, broderie's oie j aune d'or, les fleurs• relevées et liserées •de fris é or; Christ' brodé aux pe_tits points, ga lons brodes,.frange à bouillons or* mi-fin, doublure satin * parisien Chasu?lé. •~,r. 49*0 i:=charpe. Fr. 240 Chap_e 665- E tole )) 120 2. Dalmatiques » 805 SA TIN, broderie en soies de couleurs, liseré de filé méta.l blanc doré or fin. Christ hrodé aux petits points, galons or mi-fin, frange à bouillons, doublure satin parisien Chasuble. Fr. 420 \\ Echarpe. Fr. 288 Chape. ».' 880. Etole. » 141 2 Dalmatiques» 995 0 Il -SATIN; broderie métal blanc doré or fin en relief et -so.ies de coul eurs; frange à bouillons et * petit ga lon tiss e,or m i-fin, doublure satin parisien Cha.s ubie Fr. Edharpe Fr..250 Chape 635 Etole » Hl-5 2 Dalmat,, 1010 * 485 1 / Dans les pri x de s Chasubles, sont compris l'Etale, le Manipule, le Voile et la Bourse, ces deux derniers articles sont toujours en soie. En raison d es fluctuations dont les prix sont touJours. J?objet. nou*s indiquons ceux que nous espérons pouvoir maintenir, bien qu'en dessous dn, cours du jour *de l'établissement du présent catalogu e. 128 390 Moire antique tout soie, le sujet et les croix SATIN, broderi e en relie. brodés métal blanc doré or fin en r elief les ornements brodés soie janne liseré d'or, petit galon brodé or et aux accessoires, frange or mi-fin à bouillons, doublure_satin parisien Chasuble.. Fr. Echarpe. Fr. 275 Chape l> 650 Eto'.e...,, 175 2 Dalmatiques i> 930. 445 1 Chasuble 389 En or fin En métal blanc 1er titre doré or fin Fr. 695 MOIRE ANTIQUE TOUT SOIE, broderie am point de couchure métal blanc doré or lin, et soies de couleurs *à la main, ga lon et frange à bouillons or mi-fin, doubluresatin parisien. Chasuble.. Fr. 510 Echarpe. Fr. 30(} Chape... " 905 Etole... n ~05 2 Dalmatiques* •> 1 515 Il Fr. 510 392 ~('., 'i '-~_:.,. DRAP d'OR, MÉTAL BLANC DORÉ, broderie en reli ef métal blanc doré or fin et soie jaune d'or, ga lon brod é, frange à.bonillons or mi-fin, doublure satin parisien Chasuble Fr. 560 Echarpe. Fr. 275 Chape.... >> 890 Etol_e.*.. l) 155 1 2 Dalmatiques " 13 7 5. Il,À 'Y - SATIN, broderie au point de** couchure, métal • blanc doré et soies de coul eurs à la main, galons brodés, frange à bouillons or mifin et doublure satin parisien. Chasuble. Fr. 8 -00 Echarpe. Fr. 475 * Chape. » 1210 Etole » 280 2 Dalmatiques n 15 8 5 * * Il SATIN, riche broderie au point de couchure-, métal blanc doré or fin et soies de couleurs. à la main, galon dentelle, frange à bouillons or mi-fin, doublure satin parisien. Chasuble Fr. 1650 Echarpe. Fr. 635, Chape.... » 2390 Etole.., » 385 2 Dalmatiques » 3400 Il Les ornements noirs sont toujours brodés en argent ou en soie blan~he L es ornements sur Damas, Satin, Moire et Lampassette, peuvent *s e foin, en couleurs : Blanc, Rouge, Noir et Vert aux mêmes prix Les or-nements brodés or fin sont clu 1er titre (990/000) ga ral)ti ét confectionnés avec doublure soie et frange à bouillons métal blanc doré AJ,.,..,,,. J,.1t,;.mm1rndPK 1111 Directeur de I' ART CATHOLlOUE LYONNAIS. rue Lafont. 20. à Lvon Prié,.e de.ne découoer a.ucun modèle, il suffit d'ind iquer la couleur et le numéro d• l'orneme nt choisi. D RAP D'OR GLACÉ,'blanc doré or fin frange à bouillons tin pa risien. Chasuble. Fr. 202 Chape » 290 :2 Da lmatiques» 338 médaillon brod é métal en relief, *galon glacé, or mi - fin, doublure sa11 Echarpe. Fr. 148 E t ole.., » 73 MOIRE ANTIQU E GAU FR ÉE, brnderi e méta l blanc doré or fin en relief, ga lon glacé, frange à boui ll ons or mi-fin, doublure satin pa risien. Chasuble. Fr. 233 11 Echa r pe. Fr. 158 1.hape...» 364 Etol e... >> 103 2 Dalmatiques» 675 241 'DRAP D'OR GLACÉ, broderie m étal blanc doré or fin en relief, galon glacé, frange à bouillons or mi-fin, doublure satin parisien. Chasuble. Fr. 249 11 Echarpe. Fr. 155 Chape... n 898 Etole... » 106 '2 Dalmatiques » 695 DRAP D'OR Ml-FIN, rich e croisi llon brodé métal blanc *doré or fin en relief, frange *à bouillons et ga lon mi-fin, doublure satin parisien. Chasu ble. _Fr. 260 Echarpe Fr. 195 Chape. » 515 Etole » 12 8 2 Dalmatiques» 700 Il MO IRE ANTIQUE GAUFRÉE NOIRE, brnderi e métal blai1c * argenté fin en relief, ga lon ù co lonne et fra nges à bouill qns * argent é, doub lure sati n pa risien: Chas uble. Fr.* 248 11 Echa rpe. Fr. » Chape '> 39 2 Eto le_..,, 100 2 Da ltnatiqu es *,, 715 331 MOIRE ANTIQ UE TOUT SOIE, 'brode rie métal blanc doré or fin en 1'eli ef, ga lons et fra nge à bouillons or mi-611, doublure, satin parisien. Chasubl e. F r. 32511 Ec harp e. Fr. 23 0 Clrnpe. » 548 E tole » 13 5 2 Dalmatiques » 8 05 : Tous nos dessins de Chasublerie sont des reproductions photographiques de broderies exécutées dàns nos ~telie rs. Dans les prix des Chasubles, sont compris l'Etole, le Manipule, le Voile et la Bourse, ces deux -derni ers a rticles,sont toujou_rs * doublés en soie. N.-B.- En raison des fluctuations dont les prix sont toujours l'objet nous in <liqu.ons ceux que •.1ous (lspérons pouvoir maintenir bien qu'en dessous du cours du jour*d e l'établissement du présent catalogue. 8. 1 250 DRAP D'OR Ml-FIN, broderie en méta l blanc doré or fin en re lief , riche ga lon à colonne * métal. b la nc doré, frn nge à boui llons, doubl ure satin pari sien, Chasuble Fr. ~charpe. F r. 185 Chape » 450 Etole'...,, 115 2 Dalmatiques " 720 285 1 325 DAMAS, qualité ric ;hc, broderie métal b la nc doré or fin en re lief, ga lon brodé, frange à bouillon s or mi-fin, d_o ublure sati n par isie ù. Chasuble.. Fr. ~cba 1y e. Fr. 195 Chape.. » 400 Etole... )). 1'18 2 Dalmatiques » 710 330 1 VELOURS NOIR Ml-SOIE,. b,*odcrie mé'tal bl.i 11 ~ :1;.gc11té fin en relicl', ga lo ns et frange,, bou ill ons argent m i-li n, doub lure sa tin p:,risicl). C hasul, le. Fr. Echarpe. Fr*.,, ê hapc 678 Eloi e 1 89. 2 lh lm:itiqu rs » 998,. 369 1 434 3.7 6 VELOURS NOIR Ml-SOIE, bro<lc ri e métal bla nc argen t é fin en r el ief, petrt galon soutaché, *frange à bouillons a rgen té, doublure satin parisien. Chasuble Fr. 360 Echarpe. F r. •'' Chape... » 540 E t ole...,, 130 2 Dal m atiques » 850 Il D.RAP D'OR MI-FI N, broderie métal blanc. do ré or fin en reli ef frange à bouillons et galon or mi-fin, doublure satin pari s ien. Chasub le Fr. 3 7 5 Echarpe Fr. 270 Ch ape.... 11 609 Etole. » 170 2 Da lmatiques " 995 t li MOIRE ANTIQUE GAUFRÉE, broderi mét al bla nc dor é, 01* fi n en. relief, gal.on brodé, frange à bo uill ons or m i4iu. dou blu re sa t in pa risien. Chas ub le.. Fr. 390 Echai*pe Fr. 238 Chape. " 595 E tole » 150* 2 Dalmati qu es,, 925 1 I' Nous possédons une quantité d'AUTRE'i DESSINS dont nous pouvons SOUMETTRE PHOTO par retour. Les* ornements su~ -Damas, Satin, Moire et Lainpassette, peuvent se l'aire en couleurs : Blanc, Rouge, Noir, Violet et Vert et aux mêmes pri x _ Les ornements brodés or fin sont du 1er titre (990/000) garanti et confecti onnés avec doublure soie et frange à bouillons métal blanc doré. Tous nos Dessins de Chasublerie tont d~s reproductJ~!"_S photographiques de *br,oderies exécutees dans nos ateliers. *_ 342 289 9 352,1 -~~ MOIRE ANT IQ UE TOUT SOIE,* broderie métal bla nc <l ol'é or lin en relief, ga lons brod és,!'range il bouil lo ns 01* mi -tin, doublure s:i l in parisien.'Chasuble. * Fr. 440 r1- Ecbar pe. Fr. 310 Chapt..,, 655 Eto le _,, 172 2 Dalmatiqu es " 995 MOIRE 'ANTIQUE TOUT SO I E. li,-.,dc 1*ie 111 ét:il blan c d o ré 01* lin c11 rcli'c t', ga lo-n b1*od é,. fra nge :i boui llons or 111i-l-i 11, doublure sa tin parisi e n. Chasu bl e. Fr. 475 \\ • Ecliarp e. F r. 292 Chape. _,, 670 E t ole _. l> 17 5 2 Da lm at ig ues,, 1165 1 - <l._,,A_~~C~-- - -. MOIRE ANTIQUE TOUT SOIE, br oderie méta l blan c doré or lin c11 relief. ga lon brodé, frang e à b ouill o11s 01' mi-fin. dou blu re satin parisien. Chasuble. Fr. 515 11 Echarpe. Fr. 305 Chape.. » 750 Eto le,,. 185 2 Dalmatiqu es » 1 21 0 349 245 264 ~ k, ~:,•","'!'' ;. ~---- _ • t-,~ 1. ;. '. -~ ~ - ~),.- MOIRE ANTIQUE TOUT SOIE, broderi e en rc li cf,galons brod és, fran ge:i- bouillon s mé lai blan c doré et <loublure soie pourl'orfin. Broderie en or fin Ier titre MOIRE ANTIQUE TOUT SOIE, broderi e e n re li ef, ga lon hroclé, Frange ù bouillo ns méta'! blan c doré e l d oublure soie pourl'or fin'en métal blanc doré or fin Broderie en or fin 1er titre en métal blanc doré or fin DRAP D'OR et broderie métal h lanc doré or tin en reli e f. * petit ga lon soutaché, frange ii _bouill o ns or m i-fin, doublure sa tin paris ien. Chasuble. _Fr. 665 11 Ech a rpe. F,.. 370 » 220 Chape. » 955 Eto le. 2.Dalmatiques » 16_20' F,._ 940 935 620 C has ubl e..,, 1325 Fr. 545 1355 925 Chape 740 2025 1300 2 Dalmatiqu es 2120 1450 Echnq)c 340 Echarpe.. _ 570 335 * 495 Eto le. : 298 205 330 186 Etole. . 1*:n rai so n d es fluctuations d ont les prix sont toujours l'objet, nous ind iqu ons ce u x que n ous espérons pouvoir maintenir, * *. bie n qu'en dessous du cours du jour de l'établisse ment du présent cata logt1e. _ * Les orn ements brodés or fin, sont du premier titre (990/000) garanti et confectionnés avec doublure soie et fr ange à boui ll o ns métal blanc doré. - Les ornements noirs sont toujours bro dés en argent ou en soi e blanche . Cha s ubl e._ Chape 2 Dalm a tiqu es. AdrP.A!H~r IP.A )). Ne *pa.s se de C" que nos con *r 362 MOIRE ANTIQUE TOUT SOIE, ri che hroderi e au point de couchu.r e, m éta l blanc doré o r lin, galon m éta l blan c do1*é, fra nge* àbo uill o ns or mi-fiA,d ~ublurcsatin parisien Cba s uhl e Fr. Echarpe. Fr. 340 Chape.. » 8 70 Etol e ~02 2 Dalm nt iqn es» 1550 505 1 MOIRE ANTIQUE TOUT SOIE, brode rie méta l bl a nc d o ré or fin e n reli ef, ga lon brodé, fra n ge à bo uill ons or mi-fin, doubltire satin parisi en. Chasuble. F r. 600 Echarpe Fr. 382 Chnpe _. " 860 Etole.. '> 205 2 Dalm atiques)).1 440. Il a vous enlever. 360' MOIRE ANTIQUE TOUT SOïE , brod erie m éta l blan c doré o r fin en* relief, ga lon br ocl ü. fr,111gc ü b ouillon s or m; -{in, doubl nrc sa tin par is ien Chasuble. F,*. Fcha q ~e. F1* 325 C hape. " 830 Eto le 1.95. 2 Da lm atiq11c•s » 1435 1 635 1 310 256 VELOURS NOIR MI-SOIE, riche brode ri e en relief, petit galo n tissé, frange i't boui ll o ns m étal bla nc argenté fi n, doublure soie pou r* l'arge nt fin. Broderie en* argent fm 1er titre Chasuble._ Chape* Dalmatiques (pa ire) Echarpe... Etole,... _ Fr. )) )) 930 1250 2180 Broder ie en or fin 1er titre en métal blanc argenté fin Fr. 595 )) 835 ;, 1310 )) 315 MOIRE ANTIQUE TOUT SOIE.,*ichc brod eri e_ en relief, petit galon agrément, fran-* ge à bouil lons métal blanc doré or fin. doublure so ie pour l' or Jin. " 215 Fi:. 865 " 1280 )) 2090 )> 575 )) 36 5 Chasub_lc Chape Dalma ti_ques (paire) Echarpe E tol e.. en métal blanc doré or fin DR A.P D'OR, ri che brode ri e c11 relief, pc.tit ga lon tiss é, frange ù bou ill ons métal blanc do ré or lin, d oublure ~o ie ponr l'or fin_. Chasu ble, __ Chape.. _.. Dalm atiques ( pa ire),, Ech a rpe.. Fr. 638 900 >) 1450 )) 380 242 * Broderi! PD or fin 1er titre en méta l blanc doré or fin Fr. 1315 » 1465 2720 Fr. 740 855 )) 1595. à un e band.! et 8.*côtés ') » 710 395,, ') 365 250 En raison des flu •tuations d o nt les prix sont toujours l'objet, nous indiq11011s t:cnx q*ue nous espérons pouvoir 111ain 1enir. hic11 qu'en -_dessous dn con rs du _j on r de l'établissenH'nt du prést' nt ca lal ogt1e. -:- Co 11sulter no s noll"s gC-11C-r:1les s u rl:iC h :-; s u blel'i e p:ig<' :li. :-fous possédo ns m,ie quantité. d'autres'd _essin~ dont nou s pouvons soumettre pl10 o pa r retour. J o: oo•a,,,. 1~ ~ R T r A T I-IOT TOT JJ;' T.VONN A TS?O,.,.,. T, f nt J.YO'Tous nos dessins de chasu bl erie sont des reproduct ions phot ograph iq ues d e broderie s e~é cut ées dans. nos ate liers. VELOURS NOIR M!-SOIE, ri c h e broderie m ê lai bl:in c :irgenl é Vin en relief. g"lon brodé-, Frange,, bouillons arge nt é. don ** hl11rc s:1 lin pari sie n. Chasub le Fr. 605 11, E c harpe. * Fr. 297 Chape.. E 1ole...,, 19 8 '! Dalm :i MOIRE ANTIQUE TOUT SOIE. hrnd ri c rn ét:d hln dort' or fin en r li H. galo n bro ,!"range :1 bo 11i llo 11s o r mi-fin, dou bln, -e sat in p 1risien. ~ ha suble. F r. 698 *1 e:charpc Fr. '398 Ch ap e. *» 895 l*.iole 225 2 D:drü atiqn rs » 1825 'I! Z43 Brod.-ric t>n or fir? 1t> r titre F r. 1050 Ch asuble... 1375 Chap.e..... 2350 D,ilmatiques ( pa ire ) 550 Ec harp e., DRAP D'OR, ri c he brnd ie c• . - * galo ns brod és . f range'! bo uill o ri,: mé l:, I bla11 c doré or fin, d oublure so ie pour!"o r lin. * En or lin ter titre Mél,I blanc ùor&oifia Chasubl e. Fr . 1200 Fr. 700 Chape. 1655 » 975 Dalmatiqu es ( p a ire) n 2 7 50 •> 1630 Echarp e,, 695 420 Et ole » * 345 » 2 52 382 260 MOIRE ANTIQUE TOUT SOIE, brod e ri e eJ1 re li e r. galo n b ro d é.!'ra n ge à bouillo n s métal hlnn c doré et clo nblnre soie pour l'or fin. en m"!tal b lanc doré o r fin 71 0 92 0 " 1670 360 235 Fr.
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3.5.3.2.2 Avec les habitants Le problème principal de cette démarche est que l'initiative de produire des terrains à bâtir disponibles vient de l'unique volonté des propriétaires à céder une partie de leur bien. Il s'agit alors d'établir un dialogue entre les personnes porteuses du projet de densification et les propriétaires concernés. Pour la plupart des gens, les problématiques d'étalement urbain ne sont pas leur inquiétude première. En effet, ce sont plus les personnes exploitants les terres qui voient la consommation de l'espace comme un réel problème, qu'il convient de stopper au plus vite. C'est pourquoi la démarche de densification BIMBY impose de rejoindre les intérêts des élus et des citoyens concernés. Pour ce projet d'initiative privée, la consultation des habitants est impérative. D'ailleurs, elle ne doit pas s'arrêter à une simple présentation du projet car cela freinerait les habitants qui pensent que l'intention finale serait de leur imposer de nouveaux voisins, de réduire leur intimité. L'accompagnement des habitants par une équipe de professionnels urbanistes, géomètres, architectes, paysagistes est un moyen de leur montrer tout le potentiel de leur bien qu'ils ne soupçonnaient même pas. Cet accompagnement doit se faire tout le long de la procédure d'élaboration (ou de révision) du PLU afin que celui-ci réponde aux projets éventuels des habitats. Dans le département du Var, les réunions publiques ont montré que l'intégration par les habitants est très compliquée. Seuls les potentiels vendeurs se réjouissent car un accompagnement leur est proposé si cette démarche se fait sur un secteur de la commune. Pour les autres, l'idée d'avoir un nouveau voisin encore plus proche que ceux qu'ils ont actuellement n'est pas envisageable. 3.5.3.2.3 Dans les PLU Dans cette démarche, le PLU doit être un outil permettant de gérer des espaces déjà bâtis, à densifier, autrement dit construire la ville sur la ville. Au travers de son contenu, le PLU doit présenter sa volonté d'entamer une démarche BIMBY. Cela passe par une justification dans le rapport de présentation, une des orientations du PADD et un règlement répondant aux demandes des propriétaires reçus lors de l'élaboration du plan. Enfin une OAP peut être créée spécialement pour la démarche BIMBY, à l'échelle d'un quartier à aménager dans ce sens. La démarche BIMBY est envisageable si le règlement se prête à une optimisation de l'espace des parcelles bâties tout en conservant la qualité urbaine des lieux et une bonne cohabitation avec les habitants des constructions déjà existantes. Le articles du règlement touchant à l'implantation des constructions, l'accès aux parcelles, les places de stationnement, l'assainissement, l'emprise au sol ou encore la hauteur des constructions doivent être écrits de manière à rendre possible la densification, sans impacter négativement les lieux (voir partie suivante). 3.5.4 Le règlement Les propositions sont présentées en annexe selon la nomenclature du nouveau règlement proposée par le Décret n°2015-1783 du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre Ier du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme, avec entre parenthèses la correspondance avec les articles du règlement "ancien". Les règles portent autant sur le gabarit des constructions que sur leur implantation et leurs connexions aux divers réseaux. L'annexe 18 propose différentes règles qui peuvent être rédigées dans un règlement de PLU sur des zones où une densification est v CF ANNEXE 18 : Exemples de règles permettant de densifier 3.5.5 La surélévation des immeubles en copropriété C'est un mode de construction qui a été facilité par l'ordonnance n°2013-889 du 3 octobre 2013 et qui permet de produire plus de logements dans les centralités par dérogations aux règles de gabarit et de densité des PLU. Pour les copropriétaires, c'est un moyen de valoriser l'immeuble. La toiture peut être refaite, l'extension verticale de la façade peut amener son ravalement, c'est l'occasion d'implanter des équipements produisant des énergies renouvelables ou d'entamer d'autres travaux de rénovation (ascenseur, chaudière, isolation). Bien entendu, de tels travaux obligent une décision prise en assemblée générale. Un modificatif à l'Etat Descriptif de Division (EDD) et au règlement de copropriété est à prévoir. Pour les élus, la surélévation remplit un des critères du Grenelle II qui est la lutte contre l'étalement urbain par la densification des secteurs déjà bâtis. Dans ces cas précis, ce sont des secteurs très denses et surtout situés à proximité d'équipements ou d'infrastructures.  Depuis la loi ALUR, les PLU doivent analyser la capacité densification. Le L 151-4 pourrait insérer les termes de "capacité de surélévation". Lors de l'élaboration d'un plan, l'appel à un architecte pour évaluer le potentiel de densification par surélévation peut alors être pertinent. Il en ressortirait un potentiel brut de surface, qu'il conviendrait bien sûr de voir à la baisse afin d'évaluer les véritables possibilités de surélévation à court terme. Une enquête a été effectuée en 2010 sur 12 rues caractéristique de . L'architecte Michel CANTALDUPART avait alors évalué à 466 650 m2 le potentiel foncier aérien en respectant les règles du PLU. Ce nombre a été réduit à dix fois moins pour estimer les projets envisageables à court terme. Cela a conduit à une possible création de 584 logements de 80 m2 sur ces douze seules rues. En appliquant cette proportion de 10 % sur toutes les rues de Paris, ce serait 292 000 logements de 80 m2 (purement théoriques) qui seraient possibles, soit une augmentation de 20 % du parc de logements parisien. A l'échelle de plus petites villes, les chiffres seront certes moins importants mais pourront tout de même permettre de répondre à une partie des besoins en logements. 3.5.6 Les transports en commun Même si leur prise en compte n'est pas obligatoire dans les SCoT ou les PLU lors des études de densification, les transports en communs, qu'ils soient existant ou programmés ne sont pas à négliger. Pour aller plus loin, leurs développements pourraient d'ailleurs orienter les élus à densifier certains secteurs encore peu urbanisés et dont un réseau de transport efficace rendrait très attractifs. En centre-Var, la ligne de chemin de fer allant de Carnoules à Gardanne a arrêté le transport de personnes juste avant la seconde guerre mondiale. Cette ligne de 79 kilomètres comporte cinq gares dont les bâtiments existent encore. Des associations militent aujourd'hui pour sa réouverture, chose qui pourrait arriver à l'horizon 2030-2040. Certes rien n'est certain mais les PLU peuvent s'appuyer sur cette ligne pour prévoir de la densification. Plutôt que de créer des parcelles d'habitats individuels, du logement collectif peut être implanté à proximité des gares.  Le code de l'urbanisme pourrait imposer les SCoT à prendre en compte les transports en communs (article L 141-7 et L 141-8) pour fixer des objectifs de densité minimaux, ou fixer une valeur minimale en dessous de laquelle les PLU ne doivent pas descendre. Les dispositifs de lutte contre l'étalement urbain 3.6 Le contrôle des documents Aujourd'hui, les documents d'urbanisme passent pour "contrôle" par la Commission Départementale de Préservation des Espaces Naturels, Agricoles et Forestiers (CDPENAF) présidée par le préfet. La saisine de cette commission est obligatoire avant l'enquête publique lorsqu'il y a un projet de réduction des surfaces A, N ou F, une extension d'une habitation en zone A ou N, un changement de destination en zone A ou N, une dérogation à la règle de constructibilité limitée en cas de RNU Cette commission peut rendre des avis simples ou conformes. La CDPENAF peut aussi s'auto-saisir sur tout projet d'aménagement ou d'urbanisme autre que l'élaboration d'un PLU dont le périmètre est compris dans celui d'un SCoT approuvé après le 13 octobre 2014 (date de promulgation de la loi d'Avenir pour l'Agriculture, l'Alimentation et la Forêt). Dans les faits, la majorité des avis qu'elle rend est simple. Ainsi, les collectivités ne sont pas obligées de les suivre ce qui limite alors leurs portées. Le travail de cette commission est de contrôler la consommation d'espaces NAF afin d'atteindre l'objectif de réduction de 50 % de la consommation des surfaces agricoles d'ici à 2020 (objectif de la loi n° 2010-874 de Modernisation de l'Agriculture et de la Pêche du 27 juillet 2010). Sur aucun des documents étudiés dans la partie 2 on retrouve une baisse de la consommation de cet ordre-là.  L'article L 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime définissant la CDPENAF devrait élargir le champ d'application de cette commission et rendre tous ses avis conformes (et donc opposables), notamment :       3.7 SCoT réduisant les s NAF : avis conforme (et non plus un avis simple). L 143-20 C. urb. ; PLU hors SCoT réduisant les surfaces NAF : avis conforme (et non plus un avis simple). L 153-16 C. urb. ; Carte communale hors SCoT réduisant les surfaces NAF : avis conforme (et non plus un avis simple). L 163-4 C. urb. ; Projet dérogeant à la règle de l'urbanisation limitée (pour tous les territoires hors SCoT) : avis conforme (et non plus un avis simple). L 142-5 C. urb. ; Projet dérogeant à la règle de constructibilité limitée (communes sous RNU) : avis conforme (et non plus un avis simple). L 111-5 C. urb. Conclusion Après avoir analysé le contenu règlementaire et législatif du code de l'urbanisme, il en ressort que les outils théoriques de la limitation de l'étalement urbain existent bel et bien. Ce sont leurs mises en oeuvre qui sont moins évidentes pour les collectivités. Sans soutien direct de l'Etat et dans un contexte économique difficile, les élus doivent trouver eux-mêmes les moyens, les solutions ou les méthodes pour appliquer au mieux la législation. Selon les territoires, les techniques d'analyse sont différentes. Une uniformatisation est en cours et sera prête dans les années à venir, sans pour autant garantir de sa bonne application. Concernant les outils pratiques utilisés, ceuxci sont encore peu nombreux car l'intégration des dispositifs Grenelle et ALUR dans les documents de planification est progressive. En termes de densification, le comblement de dents creuses par l'élaboration d'OAP, la démarche BIMBY dans les secteurs adaptés ou la surélévation pour les centres-villes sont des outils permettant de lutter efficacement contre l'étalement urbain. Pour arriver à identifier ces espaces et à évaluer les capacités d'accueil dans les secteurs considérés comme déjà urbanisés, des outils d'analyse peuvent être utilisés en plus des déplacements sur le terrain. Un dialogue permanent avec les élus et la population est aussi indispensable pour bien cerner la mentalité des gens et leurs envies. Une stabilisation des mesures d'urbanisme semble le moyen pour que les collectivités puissent s'adapter à ce que la législation leur impose. Une clarification et un renforcement du code de l'urbanisme combinés à un plus grand contrôle de l'Etat pourraient permettre d'améliorer l'efficacité des dispositions et des outils déjà en place. 53 Les dispositifs de lutte contre l'étalement urbain Le demi-siècle écoulé a fait de la France un territoire où le développement urbain semblait s'appuyer sur une ressource foncière inépuisable. L'extension de l'urbanisation autour des centralités et l'habitat diffus ont considérablement transformé le paysage français. Ce mode d'habitat qui est encore aujourd'hui choisi par beaucoup de français est en réalité néfaste pour l'environnement, puisqu'il conduit à l'emploi systématique de plusieurs véhicules par foyer pour les transports quotidiens, réduit les espaces naturels et agricoles et porte atteinte à la biodiversité et à l'environnement. La planification urbaine tend à prendre un autre virage conduisant à une gestion plus économe du foncier. La loi SRU du 13 décembre 2000 a marqué le point de départ d'importantes modifications dans la planification locale à travers la création des Schéma de Cohérence Territoriale et des Plans Locaux d'Urbanisme. Des obligations et des outils sont venus s'y ajouter au fil de l'évolution de la législation. Un des objectifs a été de lutter contre l'étalement urbain tout en préservant l'accueil des populations et des constructions dans les espaces déjà urbanisés. Dans le prolongement de la loi Grenelle II de 2010, la loi ALUR de 2014 a apporté des mesures facilitant la densification notamment avec la suppression des COS et des superficies minimales dans les PLU ou encore les nouvelles dispositions pour faire évoluer les lotissements. Pour être efficace, la lutte contre l'étalement urbain doit donc être pensée en amont, par un urbanisme de projet. Ce mémoire a montré que d'importantes dispositions légales devaient s'inscrire plus efficacement dans les SCoT ou les PLU. Le projet de développement d'une commune va bien au-delà d'un mandat municipal, c'est pourquoi encore beaucoup de territoire ne sont pas couverts par un SCoT et que beaucoup de POS étaient encore applicables jusqu'au 26 mars 2017. La décision de se lancer dans l'élaboration d'un document d'urbanisme est une mesure très importante pour une commune. Près de 16 ans après l'instauration des PLU et des SCoT, énormément de communes ont continué de fonctionner selon le même projet de développement qu'elles avaient mis en place depuis les cinquante dernières années. Ce fonctionnement permettait d'assurer une activité économique pour le secteur du BTP (et notamment des petites entreprises) et de garder leur territoire attractif. Bannir ces pratiques représente un bouleversement dans les habitudes de consommation et d'a . La majeure partie du travail consiste aujourd'hui à 'exploiter au mieux les outils disponibles pour revoir l'urbanisation, en la recentrant sur les villes. De plus, le dialogue entre les auteurs des documents d'urbanisme, les élus et la population joue un rôle important dans la réussite du projet communal. Pour améliorer la situation, la loi Grenelle II, renforcée par la loi ALUR, a imposé aux SCoT et aux PLU des analyses poussées de leur territoire sur les années qui précèdent l'élaboration du document afin de pouvoir fixer des objectifs chiffrés de lutte contre la consommation d'espaces. Pour les PLU, une analyse des capacités de densification dans les espaces déjà bâtis est désormais obligatoire. Les dispositifs de lutte contre l'étalement urbain Les dispositions du code de l'urbanisme et les outils disponibles pour lutter contre l'étalement urbain demandent à être mieux appliqués à l'échelle de tout le territoire. C'est pourquoi une clarification de certains articles du code permettrait aux collectivités de mieux appliquer ce que le législateur impose. Le contrôle de l'Etat pourrait également être renforcé afin de garantir que chaque projet approuvé prévoit une consommation économe de l'espace. La prise en compte des derniers dispositifs législatifs en vigueur devrait couvrir tout le territoire français d'ici les années à venir. C'est pourquoi les dispositifs mis en place doivent être totalement maîtrisés et les moyens de mise en oeuvre assurés. Le panel d'outils disponibles n'est actuellement pas appliqué uniformément à l'échelle nationale. Une simplification de leur application permettrait une meilleure cohérence dans l'espace et dans le temps. En accordant des méthodes de mises en oeuvre plus claires pour les professionnels de l'urbanisme, ces derniers ne répondront pas uniquement aux directives de l'Etat mais iront au-delà et planifieront l'urbanisation de demain, celle qui répond aux problématiques de lutte contre l'étalement urbain. Ce TFE m'aura permis de concentrer mes recherches sur deux outils majeurs : le code de l'urbanisme et les documents de planification opposables aux demandes d'autorisation de droit du sol. De plus, l'évaluation de leur efficacité par rapport à la problématique posée a mis en évidence que certaines dispositions légales peuvent encore être largement améliorées, notamment par certaines modifications ou applications différentes, qui permettraient une lutte accrue contre l'étalement urbain. La législation évoluant très rapidement, la veille juridique devra être particulièrement attentive dans les prochaines années en ce qui concerne l'application et l'évolution des dispositifs de lutte contre l'étalement urbain, car les enjeux d'une gestion économe de l'espace tendent à devenir des enjeux prioritaires et urgents pour la préservation de notre environnement. BIBLIOGRAPHIE Textes législatifs :           Loi n°67-1253 du 30 décembre 1967 d'orientation foncière Loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains Loi n°2003-590 du 2 juillet 2003 urbanisme et habitat Loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement Loi n°2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche Loi n°2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové Loi n°2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt Loi n°2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives Loi n°2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République Loi n°2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain Textes réglementaires :      Ordonnance n°2015-1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre 1er du code de l'urbanisme Décret n°2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts Décret n°2013-671 du 24 juillet 2013 déterminant la liste des agglomérations et des établissements publics de coopération intercommunale mentionnés au deuxième alinéa de l'article L 302-5 du code de la construction et de l'habitation et la liste des communes mentionnées au septième alinéa du même article Ordonnance n°2013-889 du 3 octobre 2013 relative au développement de la construction de logement Décret n° 1783 du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre 1er du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme Sites internet :             Agence Nationale de la Recherhe, BIMBY, [en ligne]. Disponible sur : <www.bimby.fr>. (consulté le 26 avril 2017) Chambre d'agriculture Manche, La commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, [en ligne]. Disponible sur : <www.chambre-agriculture-50.fr>. (consulté le 13 juin 2017) Centre Régional de l'Information Géographique en PACA, BD OCSOL PACA, [en ligne]. Disponible sur : <www.crige-paca.org>. (consulté le 23 février 2017) République française, Contours des départements français issus d'OpenStreetMap, [en ligne]. Disponible sur : <www.data.gouv.fr>. 56 Les dispositifs de lutte contre l'étalement urbain     Direction Régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement, PACA , [en ligne]. Disponibe sur : <www.paca.developpement-durable. gouv .fr>. (consulté le 3 avril 2017) Prefecture du Var, Système d'information géographique du Var, [en ligne]. Disponible sur : <www.statique.sigvar.org>. 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Vitalis M. 2015, Action Région 0.1 : Implication des agences d'urbanisme pour l'élaboration d'une méthode commune d'analyse de la consommation foncière, 50 p., AGAM Travaux universitaires :    Charpentier S., 2014, Du périurbain au périurbanisme : analyse des (bonnes et mauvaises) pratiques de lutte contre l'étalement urbain dans l'aire urbaine du Mans. Thèse de doctorat, Université du Maine, 275 p. GOUJON S., 2014, Approche règlementaire de la densification urbaine : les apports de loi ALUR. Mémoire présenté en vue d'obtenir le titre de géomètre-expert foncier D.P.L.G., Université du Maine, 72 p. JACQUES N., 2016, La loi ALUR et ses conséquences pour les lotissements existants, Mémoire en vue d'obtenir le diplôme d'ingénieur CNAM, E.S.G.T., 54p. 57 Article de périodiques imprimés :  Roulleau Gérard et Cazaux Olivier, Surélévation de l'immeuble : opportunité à saisir, GEOMETRE, 2016 n°2140, p. 32-46 Article de périodiques électroniques :  Chambon J. P., BIMBY, une nouvelle filière de renouvellement urbain, L'Essentiel sur, 2016, n°141, 12 p. Rapport de conférence :  Commission mondiale sur l'environnement et le développement de l'Organisation des Nations unies, présidée par Gro Harlem Brundtland, 1987, Our Common Future, 318p TABLE DES FIGURES Figure 1 : Part des communes françaises touchées par un SCoT 8 Figure 2 : Part de la population française touchée par un SCoT 8 Figure 3 : Etat d'avancement des SCoT et des PLUi au 31 décembre 2015 23 Figure 4 : Etat d'avancement des SCoT dans le département du Var 24 Figure 5 : Principe d'urbanisation limitée dans le Var 25 Figure 6 : Extrait du DOO du SCoT Loire Angers 28 Figure 7 : Extrait du DOO du SCoT Loire Angers 29 Figure 8 : Extrait du rapport de présentation du SCoT de la Provence Verte 29 Figure 9 : Extrait du DOO du SCoT Coeur du Var 29 Figure 10 : Extrait du rapport de présentation du SCoT de la Picardie Verte 29 Figure 11 : Extrait du rapport de présentation du SCoT de l'aire métropolitaine de Bordeaux 30 Figure 12 : Extrait du rapport d'activité 2015 du SCoT du Pays du Mans 30 Figure 13 : Extrait du rapport de présentation du SCo T de l ' aire m étropolitaine de Bordeaux 30 Figure 14 : Extrait du rapport de présentation du SCoT de la Provence Verte 30 Figure 15 : Extrait du rapport d'activité 2015 du SCoT du Pays du Mans 32 Figure 16 : Etat d'avancement des POS en France au 31/12/2015 36 Figure 17 : Etat d'avancement des PLU en France au 31 /12/2015 36 Figure 18 : Etat d ' avance ment des documents d' urbanisme dans le Var 37 Figure 19 : Evolution de l'urbanisation à Saint-Maximin 37 Figure 20 : Extrait du diaporama de présentation du PLU du Val 38 Figure 21 : Etude de densification à Saint-Maximin 40 Figure 22 : Extrait du PADD du PLUi Loire Angers 41 Figure 23 : Extrait du diaporama de présentation du LU du Val 41 Figure 24 : Exemple d'une OAP de La Tranche-sur-Mer (La Terrière ouest) 44 Figure 25 : Ouverture prévisionnelle à l'urbanisation - OAP de La Tranche-sur-Mer 44 58 Les dispositifs de lutte contre l'étalement urbain TABLE DES ANNEXES ANNEXE 1 : EPCI du Var avant la réforme ANNEXE 2 : EPCI du Var après la réforme ANNEXE 3 : Organisation du règlement modernisé des PLU ANNEXE 4 : Article L 331-36 et L 331-37 du code de l'urbanisme ANNEXE 5 : Article 1396 du code général des impôts ANNEXE 6 : Extrait de la table d'attributs créée ANNEXE 7 : Différence de nomenclature entre les différents Mode s d'Occup ation des Sols ANNEXE 8 : Synthèse des méthodes de mesure de la consommation de l'espace ANNEXE 9 : Synthèse détaillée sur l' analyse méthodologique et temporelle de la consommation d' espace s NAF dans les SCoT étudiés ANNEXE 10 : Synthèse détaillée sur les indicateurs utilisés par les SCoT étudiés ANNEXE 11 : Synthèse détaillée sur la rédaction des objectifs des SCoT étudiés ANNEXE 12 : Synthèse détaillée sur la justification des objectifs des SCoT étudiés ANNEXE 13 : Synthèse détaillée des suivis des résultats des SCoT étudiés ANNEXE 14 : Synthèse détaillée sur l'analyse méthodologique et temporelle de la consommation d'espaces NAF dans les PLU ANNEXE 15 : Synthèse détaillée sur les indicateurs utilisés par les PLU étudiés ANNEXE 16 : Synthèse détaillée sur la rédaction des objectifs des PLU étudiés ANNEXE 17 : Synthèse détaillée sur la justification des objectifs des PLU étudiés ANNEXE 18 : Exemples de règles permettant de densifier ANNEXE 1 ANNEXE 2 ANNEXE 3 : Organisation du règlement modernisé des PLU ANNEXE 4 : Article L 331-36 et L 331-37 du code de l'urbanisme Article L331-36 en vigueur au 14 juin 2017 Modifié par ORDONNANCE n°2015-1174 du 23 septembre 2015 - art. Article L331-37 en vigueur au 14 juin 2017 Modifié par LOI n°2014-366 du 24 mars 2014 - art. 158 (V) Pour chaque secteur, le seuil minimal de densité ne peut être inférieur à la moitié ni supérieur aux trois quarts de la densité maximale autorisée par les règles définies dans le plan local d'urbanisme. ANNEXE 5 : Article 1396 du code général des impôts Article 1396 en vigueur au 14 juin 2017 Modifié par LOI n°2017-257 du 28 février 2017 - art. 50 I.-La taxe foncière sur les propriétés non bâties est établie d'après la valeur locative cadastrale de ces propriétés déterminée conformément aux règles définies aux articles 1509 à 1518 A et sous déduction de 20 % de son montant. II.-A.-Dans les communes mentionnées au I de l'article 232 et classées dans les zones géographiques mentionnées au premier alinéa du I de l'article 234, la valeur locative cadastrale des terrains constructibles après la déduction mentionnée au I du présent article est majorée d'une valeur forfaitaire fixée à 3 euros par mètre carré. Toutefois, la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre compétent en matière de plan local d'urbanisme peut, par une délibération prise dans les conditions prévues au I de l'article 1639 A bis, moduler cette valeur forfaitaire dans la limite de 1 à 5 € par mètre carré, en retenant un nombre entier. B.-Dans les communes autres que celles mentionnées au A, la valeur locative cadastrale des terrains constructibles situés dans les zones urbaines ou à urbaniser, lorsque les voies publiques et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie de la zone à urbaniser ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à er dans l'ensemble de cette zone, délimitées par une carte communale, un plan local d'urbanisme, un document d'urbanisme en tenant lieu ou un plan de sauvegarde et de mise en valeur approuvé conformément au code de l'urbanisme, peut, sur délibération du conseil municipal prise dans les conditions prévues au premier alinéa du I de l'article 1639 A bis, être majorée d'une valeur forfaitaire comprise entre 0 et 3 € par mètre carré pour le calcul de la part revenant aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale sans fiscalité propre. La majoration ne peut excéder 3 % d'une valeur forfaitaire moyenne au mètre carré définie par décret et représentative de la valeur moyenne du terrain selon sa situation géographique. B bis.-Pour l'application des A et B, la superficie retenue pour le calcul de la majoration est réduite de 200 mètres carrés. Cette réduction s'applique à l'ensemble des parcelles contiguës constructibles détenues par un même propriétaire. La commune ou, le cas échéant, pour la majoration prévue au A, l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre compétent en matière de plan local d'urbanisme peut, par une délibération prise dans les conditions prévues au I de l'article 1639 A bis, supprimer cette réduction. C.-La liste des terrains constructibles est dressée, pour la majoration mentionnée au A, par l'autorité compétente en matière de plan local d'urbanisme et, pour la majoration mentionnée au B, par le maire. Cette liste ou, le cas échéant, toute modification qui y est apportée est communiquée à l'administration des impôts avant le 1er octobre de l'année qui précède l'année d'imposition. En cas d'inscription erronée, les dégrèvements en résultant sont à la charge du bénéficiaire de la majoration ; ils s'imputent sur les attributions mentionnées à l'article L. 2332-2 du code général des collectivités territoriales. D.-1. Les majorations prévues aux A et B ne sont pas applicables : 1° Aux terrains appartenant aux établissements publics fonciers mentionnés aux articles L. 321-1 et L. 324-1 du code de l'urbanisme, aux agences mentionnées aux articles 1609 C et 1609 D du présent code, à l'établissement public Société du Grand Paris mentionné à l'article 1609 G ou à la société mentionnée au deux alinéa du I de l'article 141 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006. 2° Aux parcelles supportant une construction passible de la taxe d'habitation ; 3° Aux terrains classés depuis moins d'un an dans une zone urbaine ou à urbaniser ; 4° Aux terrains appartenant ou donnés à bail à une personne relevant d'un régime de protection sociale agricole, au sens de l'article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime, ou mentionnée à l'article L. 731-23 du même code et utilisés pour les besoins d'une exploitation agricole, au sens de l'article 63 du présent code. 2. Bénéficient, sur réclamation présentée dans le délai indiqué à l'article R. * 196-2 du livre des procédures fiscales et dans les formes prévues par ce même livre, d'un dégrèvement de la fraction de leur cotisation résultant des majorations prévues aux A et B, qui s'impute sur les attributions correspondantes mentionnées à l'article L. 2332-2 du code général des collectivités territoriales : 1° Les contribuables qui justifient avoir obtenu au 31 décembre de l'année d'imposition, pour le terrain faisant l'objet de la majoration, un permis de construire, un permis d'aménager ou une autorisation de lotir. Toutefois, la majoration est rétablie rétroactivement en cas de péremption du permis de construire, du permis d'aménager ou de l'autorisation de lotir ; 2° Les contribuables qui justifient avoir cédé au 31 décembre de l'année d'imposition le terrain faisant l'objet de la majoration. 3. Les majorations prévues aux A et B ne sont pas prises en compte pour l'établissement des taxes spéciales d'équipement prévues aux articles 1607 bis à 1609 G ANNEXE 6 : Extrait de la table d'attributs créée L'annexe 6 présente un extrait de la table d'attributs qui a été créée. Les différentes colonnes représentent les renseignements qui ont été recherchés pour chaque commune du Var. ANNEXE 7 : Différence de nomenclature entre les différents Modes d'Occupation des Sols SCoT ETUDIES NIVEAU PRECISION 1 NIVEAU PRECISION 2 NIVEAU PRECISION 3 Tissu urbain continu Bâti diffus COEUR DU VAR Approuvé le 12 avril 2016 Espaces artificialisés OCSOL PACA (basé sur Corine Land Cover) Zones industrielles et commerciales Zones industrielles ou commerciales et réseaux de communication Aéroports Mines, décharges et chantiers - Espaces verts artificialisés - Zones urbaines denses AIRE METROPOLITAINE DE BORDEAUX Approuvé le 13 février 2014 Réseaux routiers, ferroviaire et espaces associés Zones urbaines Espaces d'urbanisation MOS local - - Campings principaux - Aéroports et aérodromes - Réseaux autoroutiers PROVENCE VERTE Approuvé le 21 JANVIER 2014 Bâti diffus Zones industrielles et commerciales OCSOL PACA (basé sur Corine Land Cover) - Zones industrielles ou commerciales et réseaux de communication Espaces artificialisés Réseaux routiers, ferroviaire et espaces associés Aéroports Extraction de matériaux PICARDIE VERTE Approuvé le 21 février 2014 Mines, décharges et chantiers Décharges Chantiers Espaces verts artificialisés PAYS DU MANS Approuvé le 29 janvier 2014 Surfaces imperméabilisées Surfaces artificialisées MOS local (basé sur Corine Land Cover et Teruti Lucas) Autres surfaces artificialisées Espaces verts urbains Equipements sportifs et loisirs Sols bâtis Sols revêtus ou stabilisés Mines, décharges et chantiers Espaces verts artificialisés Ce tableau met en évidence des différences d'interprétation selon les territoires. Entre les niveaux 1 et 2, les termes "espaces", "zones" et "surfaces" sont utilisés et on ne sait pas ce qu'ils contiennent réellement. Au niveau 3, il apparaît les termes de "tissu" et "sols" ce qui ajoute encore des possibilités d'interprétation différentes. ANNEXE 8 : Synthèse des méthodes de mesure de la consommation de l'espace METHODES CORINE LAND COVER MOS GRANDE ECHELLE AVANTAGES - Reproductibilité facile - Plusieurs millésimes existants - Gratuit - Echelle d'utilisation - Nomenclature complète DONNEES BATIS (MAJIC, CADASTRE, BD TOPO) - Mise à jour SITADEL - Mise à jour RECENSEMENT GENERAL AGRICOLE - Spécifique aux terrain agricoles INCONVENIENTS - Echelle d'utilisation - Nomenclature variable selon les millésimes - Coût - Renseignements déclaratifs - Coût - Ne permet pas de qualifier les espaces consommés - Ne permet pas de qualifier les espaces consommés - Mise à jour - Localisation Ce tableau synthétise les avantages et les inconvénients de l'ensemble des méthodes de mesures de consommation de l'espaces employées pour l'analyse des territoires des SCoT étudiés ANNEXE 9 : Synthèse détaillée sur l'analyse méthodologique et temporelle de la consommation d'espace NAF dans les SCoT étudiés SCoT ETUDIES METHODE MILLESIME PROVENCE VERTE Approuvé le 21 janvier 2014 MOS local (OCSOL 47 postes) 1999 et 2006 SITADEL 1999 à 2012 COEUR DU VAR Approuvé le 12 avril 2016 MOS à partir de la BD ORTHO (17 postes) 2003, 2008 et 2011 SITADEL 1999 à 2011 Corine Land Cover (44 postes) 2000 et 2006 2000 et 2010 Etude spécifique de la DREAL Picardie Entre 2003 et 2008 PAC 2000 à 2009 MOS local à partir de la BD ORHTO + images satellites (31 postes) 2000 et 2010 MOS local 1996, 2005 et 2015 SITADEL 1990 à 2014 MOS local (18 postes) 1996 et 2010 SITADEL 1999 à 2008 Non renseigné PICARDIE VERTE Approuvé le 21 février 2014 PAYS DU MANS Approuvé le 29 janvier 2014 LOIRE ANGERS uvé le 9 décembre 2016 AIRE METROPOLITAINE DE BORDEAUX Approuvé le 13 février 2014 PERIODE D'ETUDE 2004 – 2012 2003 – 2011 2003 – 2010 2000 – 2010 2005 – 2015 1996 – 2010 Ce tableau synthétise les différentes méthodes de mesure utilisées pour chaque SCoT étudiés, les millésimes des données ainsi que la période d'étude. ANNEXE 10 : Synthèse détaillée sur les indicateurs utilisés par les SCoT étudiés SCoT ETUDIES PROVENCE VERTE Approuvé le 21 janvier 2014 COEUR DU VAR Approuvé le 12 avril 2016 PICARDIE VERTE Approuvé le 21 février 2014 PAYS DU MANS Approuvé le 29 janvier 2014 LOIRE ANGERS Approuvé le 9 décembre 2016 AIRE METROPOLITAINE DE BORDEAUX Approuvé le 13 février 2014 INDICATEURS Ratio m2 SPC / m2 artificialisé (1999-2006) Application de ce ratio sur la période (2006-2012) Evolution des espaces bâtis par destination (1999-2006) Mutation d'espaces A, N, F vers U (2002-2012) Part de constructions de logements individuels (1990-2009) Répartition de la consommation foncière par destination (2004-2014) Ratio m2 urbanisé / habitants (1999-2011) Evolution des occupations du sol (2003-2011) Mutations entre espaces A, N, F et U (2003-2011) Evolution des espaces artificialisés par destination (2003-2011) Evolution de la densité de logements et constructions (1999-2011) Répartition des permis de construire autorisés (2000-2009) Evolution des espaces artificialisés (2000-2006) Evolution des terres agricoles (2000-2006) Consommation d'espaces A et F pour l'habitat (2003-2008) Répartition des surfaces consacrées à la construction par catégorie (2003-2008) Part de constructions de logements par types (1999-2008) Evolution des surfaces agricoles utilisées par communes (2000-2010) Part de constructions de logements par taille (1990-2008) Evolution des surfaces agricoles déclarées à la PAC (2000-2009) Part de terres consommées au profit de logements (2000-2008) Evolution aires de stationnement (2000-2010) Evolution des espaces artificialisés par destination (2005-2015) Evolution de la taille des parcelles pour l'habitat individuel (2008-2014) Evolution de la production de logements (1990-2014) Evolution des espaces urbanisés (1996-2010) Evolution de la densité dans les surfaces urbanisées (1996-2010) Mutation d'espaces A, N, F vers U (1996-2010) Evolution de la consommation foncière par types de logement (1999-2008) Ce tableau synthétise les s indicateurs que chaque SCoT a utilisé pour décrire la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers sur son territoire. Tailles de logment : T1, T2, T3 Types de logement : Individuel libre, individuel avec procédure Catégories : agricole, naturel, forestier, artificialisé Destinations : habitat, économique, infrastructures, équipement ANNEXE 11 : Tableau détaillé sur la rédaction des objectifs des SCoT étudiés SCoT ETUDIES PROVENCE VERTE Approuvé le 21 janvier 2014 OBJECTIFS QUANTIFIEUR LOCALISATION Par destination : habitats – activités/commerce/tourisme – énergie Hectares/an Par EPCI Production de logements Logements/an Par EPCI Logements/hectare Par communes Logements/an Par ville Logements/hectares Par typologies des espaces bâtis Consommation d'espaces ANF pour l'urbanisation Hectares/an Par pôle Consommation d'espaces ANF pour l'artificialisation Hectares/an Par pôle Production de construction Constructions/an Par cantons et par pôle Hectares à l'horizon 2030 Par canton et par pôle Production de logements COEUR DU VAR Approuvé le 12 avril 2016 PICARDIE VERTE Approuvé le 21 février 2014 Surface d'extension urbaine résidentielle Potentiel foncier pour les activités économiques PAYS DU MANS Approuvé le 29 janvier 2014 Potentiel foncier pour le développement commercial Production de logements AIRE METROPOLITAINE DE BORDEAUX Approuvé le 13 février 2014 Hectares en renouvellement urbain (2030) Par secteurs dans chaque EPCI Hectares à l'horizon 2030 Globale dans les ZAcom Logements/an Par pôle Logements économes en espace (2030) Par ville Logements/hectare Par ville Logements/an Par EPCI et par pôle Logements/types Par pôle Consommation d'espaces AN pour l'artificialisation par destination Hectares/an SCoT global Potentiel foncier à vocation résidentielle et économique Hectares/an Par EPCI et par pôle Evolution de l'enveloppe urbaine Hectare SCoT global Production de logements LOIRE ANGERS Approuvé le 9 décembre 2016 Hectares en extension (2030) Habitats individuels et collectifs Proportion m2 artificialisés/logement Par EPCI Consommation foncière m2 artificialisés/logement Par EPCI Proportion espaces NAF / espaces U Pourcentage Par pôle Ce tableau synthétise les différents objectifs chiffrés des SCoT, selon les termes dans lesquels ils sont définis, le quantifieur associé ainsi que leur localisation. ANNEXE 12 : Tableau détaillé sur la rédaction des objectifs des SCoT étudiés SCoT ETUDIES PROVENCE VERTE Approuvé le 21 janvier 2014 COEUR DU VAR Approuvé le 12 avril 2016 PICARDIE VERTE Approuvé le 21 février 2014 PAYS DU MANS Approuvé le 29 janvier 2014 LOIRE ANGERS Approuvé le 9 décembre 2016 AIRE METROPOLITAINE DE BORDEAUX Approuvé le 13 février 2014 JUSTIFICATION DES OBJECTIFS Baisse de la consommation ANF Incident de l'absence d'un SCoT sur la consommation foncière pour l'habitat diffus Rapprochement de du ratio départemental actifs/emplois Proportion d'espace destinés aux énergies renouvelables conservée Densification des EPCI déjà plus peuplés Baisse du rythme d'artificialisation et d'urbanisation Plus-value du SCoT sur les émissions de GES Etude foncière + analyse de "dents creuses" Forte baisse de la consommation d'espace Augmentation de la densité globale Besoins pour le développement économique Plus de logements sur moins d'espace Plus grande densification des pôles centres Baisse de la consommation d'espace Plus grande densité dans les pôles centres Plus de logements sur moins d'espaces Plus grande densification des pôles centres Forte augmentation de la densité de logement Plus grande proportion de logements collectifs Avantage du SCoT pour la maîtrise de l'enveloppe urbaine Plus grande densification des pôles centres Ce tableau synthétise la manière dont les SCoT ont justifié les objectifs chiffrés qu'ils ont fixés. ANNEXE 13 : Suivi des résultats des SCoT étudiés SCoT ETUDIES PROVENCE VERTE Approuvé le 21 janvier 2014 COEUR DU VAR Approuvé le 12 avril 2016 PICARDIE VERTE Approuvé le 21 février 2014 PAYS DU MANS Approuvé le 29 janvier 2014 INDICATEURS DE SUIVI OUTILS RYTHME DE SUIVI Millésimes 2006 et 2014 Evolution des occupations du sol OCSOL Evolution des parcelles non bâties Evolution de la surface de plancher Affectation des sols selon la destination Plans de zonage numérisé Flux des surfaces mises en chantier et autorisée SITADEL Surfaces de développement économique Surfaces commerciales Chambre de commerce et d'industrie, des métiers 3 ans Evolution de la surface agricole utile 10 ans Evolution de la tâche artificialisée MOS BD ORTHO IGN Localisation de la nouvelle urbanisation INSEE / IGN / communes 6 ans Densité moyenne des opérations neuves SITADEL 1 an Evolution des surfaces agricoles - Logements créés SITADEL 3 ans Surfaces urbanisées en extension créées Analyse sur le terrain 3 ans - - 3 ans Logements commencés Production de logements LOIRE ANGERS Approuvé le 9 décembre 2016 1 an SITADEL Hectares ouverts à l'urbanisation pour le développement économique DDT 49 Taille moyenne des parcelles pour les logements individuels purs SITADEL Part des logements construits en renouvellement urbain SITADEL + Fichiers fonciers Densité des logements construits SITADEL Hectares de foncier consommé Consommation à vocation économique 1 an 3 ans 6 ans MOS local Consommation à vocation résidentielle AIRE METROPOLITAINE DE BORDEAUX Approuvé le 13 février 2014 Evolution de la tâche urbaine MOS local - Suivi de la consommation foncière pour les nouvelles constructions - - Recensement des projets de densification et de mutation dans les secteurs identifiés - - Ce tableau synthétise ce que les SCoT ont prévu concernant le suivi de leur résultats sur objectifs de lutte contre l'étalement urbain. Les indicateurs de suivi, l'outil qui va être utilisé ainsi que la fréquence du suivi est indiqué pour chaque SCoT étudiés. ANNEXE 14 : Tableau détaillé sur l'analyse méthodologique et temporelle de la consommation d'espaces NAF dans les PLU étudiés PLU ETUDIES METHODE MILLESIME BORDEAUX METROPOLE Approuvé le 16 décembre 2016 2006-2013 2006 - 2013 ANGERS LOIRE METROPOLE Approuvé le 13 février 2017 MOS local 1996, 2005, 2011 et 2015 2005 - 2015 EUROMETROPOLE STRASBOURG Approuvé le 16 décembre 2016 2003-2012 2003 - 2012 Plan cadastral 2001 et 2011 Non renseigné Plan cadastral 1977, 1985, 1993, 2015 Zonage du POS 1977, 1985 et 1993 MOS local 1972 et 2003 LE MANS METROPOLE (projet de PLUi) SAINT-MAXIMIN Approuvé le 19 janvier 2016 LE VAL (projet de PLU) 2002 - 2011 Puis 2012-2016 - 1972 - 2003 Ce tableau synthétise les différentes méthodes de mesure utilisées pour chaque PLU étudiés, les millésimes des données ainsi que la période d'étude . ANNEXE 15 : Tableau détaillé sur les indicateurs utilisés par les PLU étudiés PLU ETUDIES INDICATEURS BORDEAUX METROPOLE Approuvé le 16 décembre 2016 Evolution des espaces urbanisés (2006-2013) Consommation moyenne d'espace par logement (2006-2013) Evolution des espaces artificialisés (2006-2013) Part des espaces artificialisés pour le logement (2006-2013) ANGERS LOIRE METROPOLE Approuvé le 13 février 2017 Evolution des espaces ANF (1996-2011) Mutation des espaces ANF vers artificialisés par destination (1996-2015) EUROMETROPOLE STRASBOURG Approuvé le 16 décembre 2016 Evolution de la consommation foncière pour les logements par localité (2003-2012) Evolution de la consommation foncière par destination (2003-2012) PAYS DU MANS (Projet de PLUi) Superficie artificialisée par catégorie (2002-2011) Répartition de la consommation foncière par destination (2002-2011) Mutation des espaces A et N vers espaces artificialisés (2002-2011) Répartition du parc de logements par zones (2002-2011) Densité moyenne en extension de la zone agglomérée Evolution des zones constructibles et non constructibles des différents POS (1977-1985-1993) Evolution des emprises des constructions suite à la mise en place des POS (1977-1985-1993) LE VAL (Projet de PLU) Evolution des surfaces artificialisées, agricoles et naturelles (1972-2003) L'annexe 15 synthétise dans un tableau les différents indicateurs que chaque PLU a utilisé pour décrire la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers sur son territoire. Tailles de logement : T1, T2, T3 Types de logement : Individuel libre, individuel avec procédure Catégories : agricole, naturel, forestier, artificialisé Destinations : habitat , é conomique, infrastructures, équipement ANNEXE 16 : Tableau détaillé sur la rédaction des objectifs des PLU étudiés PLU ETUDIES BORDEAUX METROPOLE Approuvé le 16 décembre 2016 OBJECTIFS QUANTIFIEURS LOCALISATION Proportion 50/50 entre espaces artificialisés et espaces ANF - Consommation d'espace ANF m2/hab - Proximité des transports en communs et des centralités Production de logements Pourcentage Par pôle Densité de logements Logements/hectare Par pôle Potentiel foncier mobilisable dans l'enveloppe urbaine Hectares par destination Besoin foncier en extension urbaine pour l'habitat Hectare Besoin foncier pour le développement de l'activité Hectares Baisse des surfaces constructibles (U et AU) Hectares Territoire global Baisse des surfaces constructibles Hectares Territoire global Densité de logements Logements/hectare Par quartier urbain Nombre de logements en plus - Par quartier urbain Territoire global ANGERS LOIRE METROPOLE Approuvé le 13 février 2017 EUROMETROPOLE STRASBOURG Approuvé le 16 décembre 2016 SAINT-MAXIMIN Approuvé le 19 janvier 2016 LE VAL (Projet de PLU) Territoire global Ce tableau synthétise les différents objectifs chiffrés des PLU, selon les termes dans lesquels ils sont définis, le quantifieur associé ainsi que leur localisation. ANNEXE 17 : Tableau détaillé sur la justification des objectifs des PLU étudiés PLU ETUDIES JUSTIFICATION DES OBJECTIFS BORDEAUX METROPOLE Approuvé le 16 décembre 2016 Equilibre entre zones U et AU avec A et N Baisse de la consommation foncière ANGERS LOIRE METROPOLE Approuvé le 13 février 2017 Baisse des espaces consommés Plus de logements créés sur une surface équivalent Plus grande densité dans les pôles centres EUROMETROPOLE STRASBOURG Approuvé le 16 décembre 2016 Forte diminution des espaces AU au profit d'espaces AN 100 emplois à l'hectare SAINT MAXIMIN Approuvé le 19 janvier 2016 Baisse de 4 % des surfaces constructibles (U et AU) LE VAL (Projet de PLU) Baisse de 53 % des surfaces constructibles (U et AU) Densification des secteurs déjà bâtis Ce tableau synthétise la manière dont les PLU ont justifié les objectifs chiffrés qu'ils ont fixés. ANNEXE 18 : Exemples de règles permettant de densifier I - Destination des constructions, usages des sols et n atures d'activités 1. Interdiction et limitation de certains usages et affectations des sols, constructions et activités, destinations et sous-destinations - Art. R 151-30 à R 151-36 C.urb. (article 1) Selon ce que veux faire la commune 2. Mixité fonctionelle et sociale - Art R 151-37 à R 151-38 C. urb. (article 2) Typ ologies de lo gements II - Caractéristiques urbaine, architecturale, environnementale et paysagère 1. Volumétrie et implantation des constructions - Art R 151-39 et R 151-40 C. urb. (article 6, 7, 8 et 10) - Autoriser les implantation en limite séparative de la nouvelle limite créée (si division perpendiculaire à la voie ou division en fond de parcelle) - Imposer les implantations en limite séparative de la nouvelle limite créée (si division perpendiculaire à la voie ou division en foncd de parcelle) - Imposer le même retrait par rapport à la voir que la construction déjà existante sur la parcelle mère (si division perpendiculaire à la voie) - Imposer la construction mitoyenne au bâti existant sur la parcelle mère (si division perpendiculaire à la voie) - Imposer un retrait par rapport aux limites séparatives (si division en fond de parcelle) - Imposer des hauteurs minimales et/ou maximales 2. Qualité urbaine, architecturale, environnementale et paysagère - Art R 151-41 à R 151-42 C. urb. (article 9 et 15) - Appliquer un coefficient d'emprise au sol permettant l'implantation d'une construction nouvelle - Ne pas appliquer de coefficient d'emprise au sol - Harmoniser les constructions (façades, toitures, clôtures) - Imposer un coefficient de jardin 3. Traitement environnemental et paysager des espaces non-bâtis et abords des construction - Art R 151-43 C. urb. (article 11 et 13) - Prévoir des espaces à conserver pour leur caractère d'espaces verts 4. Stationnement - Art R 151-44 à R 151-46 C. urb. (article 12) III - Equipement et rése aux 1. Desserte par les voies publiques ou privées - Art R 151-47 et R 151-48 C. urb. (article 3) - Perm des accès par les fonds voisins 2. Desserte par les réseaux - Art R 151-49 et R 151-50 (article 4 et 16) - Imposer des aménagements pour ne pas bloquer le bon écoulement des eaux Les dispositifs de lutte contre l'étalement urbain Mé d'In eur C. M., Le RESUME Dans la continuité de la loi SRU, les lois Grenelle II et ALUR ont ancré dans le code de l'urbanisme les principes de gestion économe de l'espace et de développement durable. La lutte contre l'étalement urbain est peu à peu devenue une problématique globale et prioritaire.
16,482
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French-Science-Pile
Open Science
Various open science
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219 Annexe Annexe 6 : Le regroupement de 5 critères principaux à partir de 16 sous-critères (cf. tableau A6-1) Nom image1 image2 image3 image4 image5 image6 image7 image8 image9 image10 image11 image12 image13 image14 image15 image16 image17 image18 image19 image20 image21 image22 image23 image24 image25 image26 image27 image28 image29 image30 image31 image32 image33 image34 image35 image36 image37 image38 image39 image40 image41 image42 image43 image44 image45 image46 image47 image48 image49 image50 A A1 A2 1 0 1 0 0 1 0 0 1 1 0 1 1 1 1 0 0 0 0 0 1 0 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 0 1 1 1 1 0 1 0 1 1 1 1 0 1 1 1 1 0 0 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 0 0 0 1 1 1 1 1 0 0 0 0 1 1 1 0 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 0 1 1 1 1 1 1 0 0 0 1 1 0 1 1 1 1 0 1 0 0 1 0 0 0 A3 1 1 0 1 1 1 1 0 0 1 0 0 1 0 0 0 0 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 0 1 0 0 0 0 1 0 0 1 1 0 1 1 1 0 0 A4 1 0 0 0 0 0 0 0 1 0 1 0 1 1 1 0 0 0 0 1 0 1 0 0 1 1 1 0 1 0 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 0 0 1 1 1 1 1 0 1 A5 0 0 1 1 1 0 0 1 0 1 1 1 1 1 1 0 1 0 1 0 0 0 1 1 1 1 0 1 0 0 0 1 1 0 0 1 1 1 0 1 0 0 1 0 0 1 1 1 1 0 A6 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 1 0 0 1 1 0 1 0 1 0 0 0 1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 0 0 1 1 1 1 0 B B1 B2 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 0 0 0 1 1 1 0 0 1 0 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 1 0 1 0 0 0 0 0 1 0 1 1 1 0 1 0 0 0 1 0 1 0 1 1 1 0 0 1 0 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 1 C C1 C2 C3 D 0 1 0 0 1 0 0 0 1 0 1 1 1 1 0 0 1 1 0 1 1 1 1 1 0 0 1 0 1 1 1 1 1 1 0 0 1 0 0 0 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 0 1 1 1 1 0 0 1 0 0 0 0 0 1 1 0 0 0 1 1 0 1 1 1 1 0 0 1 1 0 0 0 0 0 0 0 1 1 1 1 1 0 1 0 0 0 0 1 1 0 0 0 1 1 0 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 0 1 1 0 0 1 1 1 1 0 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 1 0 0 0 0 1 0 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 1 1 0 1 0 0 0 0 0 0 1 1 0 1 1 1 1 1 0 0 1 0 0 0 1 1 1 1 0 0 1 0 1 1 0 1 1 0 0 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 1 0 0 0 D1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 0 1 1 0 1 0 1 0 0 1 1 1 1 1 1 0 1 D2 1 0 1 1 0 1 1 0 1 1 1 1 0 1 1 0 0 0 1 1 0 1 0 1 0 1 1 1 1 0 0 1 1 1 1 1 0 1 0 1 1 0 1 1 1 0 1 1 1 0 D3 1 1 0 1 1 1 0 1 0 1 1 1 1 1 1 1 0 0 1 0 0 1 1 0 0 1 1 0 1 0 1 1 1 0 1 1 0 1 1 1 1 0 1 1 0 1 1 1 1 0 D4 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 0 0 0 1 1 1 0 1 1 1 0 1 1 1 Tableau A6-1 : Le regroupement de 5 critères principaux à partir de 16 sous-critères 220 E 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 0 1 0 0 0 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 0 Annexe Annexe 7 : Comparaison le nombre de critères principaux validés avec les moyennes des notes données par les étudiants (cf. tableau A7-1) No. Image 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 Nombre de critères principaux validés 4 2 3 4 4 3 3 1 4 4 4 4 3 3 4 1 0 1 3 3 2 3 2 3 2 4 4 3 2 3 3 1 4 2 4 4 3 3 2 4 3 1 3 4 0 3 5 5 3 0 Moyennes des notes données par les étudiants 67,9 67,9 50 67,9 67,9 67,9 71,4 50 78,6 75 71,4 57,1 60,7 78,6 75 71,4 46,4 64,3 78,6 64,3 67,9 78,6 14,3 67,9 53,6 85,7 71,4 71,4 67,9 82,1 57,1 78,6 78,6 71,4 85,7 64,3 53,6 85,7 60,7 85,7 78,6 71,4 92,9 85,7 46,4 82,1 89,3 82,1 60,7 64,3 Tableau A7-1 : Nombre de critères principaux validés et les moyennes des notes données par les étudiants 221 Annexe Annexe 8 : Calcul de coefficient de corrélation entre (1) les moyennes des notes données par les étudiants (X) et (2) le nombre de critères principaux correspondants validés en appliquant les règles de déduction (5 critères principaux). Supposons que les moyennes des notes données par les étudiants sont X et le nombre de critères principaux correspondants est Y. Ici, δ(X,Y) est égal à 0.4746. Il dépasse largement 0.368 et donc hautement significatif. Il explique environ 14% de la variation entre X et Y. 222 Annexe Annexe 9 : Le regroupement d'avis des experts en 3 critères principaux après l'adaptation de l'hypothèse (2) (cf. tableau A9-1) Image image1 image2 image3 image4 image5 image6 image7 image8 image9 image10 image11 image12 image13 image14 image15 image16 image17 image18 image19 image20 image21 image22 image23 image24 image25 image26 image27 image28 image29 image30 image31 image32 image33 image34 image35 image36 image37 image38 image39 image40 image41 image42 image43 image44 image45 image46 image47 image48 image49 image50 A A 1 A 2 A 3 A 4 A 5 A 6 B B 1 B 2 C 1 C 2 C 3 D D D 1 2 D 3 D 4 E Nombre de critères principaux validés 1 0 0 1 1 0 0 0 1 1 1 1 1 1 1 0 1 0 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 0 1 1 0 1 0 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 0 1 1 1 0 0 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 0 1 1 1 0 1 1 1 0 1 1 0 1 0 0 1 0 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 0 0 1 1 1 0 1 1 0 1 1 1 1 0 0 1 0 0 1 0 0 0 0 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 0 1 0 0 0 0 1 0 0 1 1 0 1 1 1 0 0 1 0 0 0 0 0 0 0 1 0 1 0 1 1 1 0 0 0 0 1 0 1 0 0 1 1 1 0 1 0 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 0 0 1 1 1 1 1 0 1 0 0 1 1 1 0 0 1 0 1 1 1 1 1 1 0 1 0 1 0 0 0 1 1 1 1 0 1 0 0 0 1 1 0 0 1 1 1 0 1 0 0 1 0 0 1 1 1 1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 1 0 0 1 0 1 0 1 0 0 0 0 0 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 1 1 1 0 1 0 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 0 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 0 0 0 0 1 1 1 0 1 1 0 1 0 1 1 1 1 1 0 0 1 1 0 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 0 0 1 0 0 0 1 1 1 1 0 1 0 0 0 0 1 1 0 0 0 1 0 1 1 0 1 1 1 1 0 1 0 0 1 0 1 0 0 0 1 0 1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 0 0 0 1 0 0 0 0 0 0 1 0 1 1 0 1 0 1 0 0 0 1 0 0 1 1 0 0 1 1 0 1 1 1 0 1 0 1 1 1 1 1 1 1 0 0 1 0 0 1 1 0 0 1 1 0 1 0 1 1 1 0 1 1 0 1 1 1 1 0 1 1 0 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 0 0 0 1 1 1 0 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 0 1 0 0 0 1 1 0 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 0 2 0 1 2 2 1 1 0 2 2 2 2 1 1 2 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 2 2 2 0 1 1 0 2 0 2 2 1 2 1 2 1 0 1 2 0 1 3 3 1 0 0 0 0 0 1 0 0 0 1 1 1 1 1 1 1 0 1 1 1 0 1 0 1 1 1 1 1 1 0 1 1 0 1 1 1 1 1 0 1 1 1 0 1 1 0 1 1 0 0 0 1 1 1 1 1 1 1 0 1 0 1 0 0 0 1 1 1 0 0 1 0 0 0 1 1 0 1 1 0 1 0 0 1 1 1 0 1 0 1 1 1 0 1 1 0 0 1 1 1 0 1 1 0 1 1 1 Tableau A9-1 : Le regroupement d'avis des experts en trois critères principaux 223 Annexe Annexe 10 : la comparaison de résultats de l'étape et l'étape 2 après l'adaptation de l'hypothèse (2) (cf. tableau A10-1) No. Image 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 Nombre de critères principaux validés 2 0 1 2 2 1 1 0 2 2 2 2 1 1 2 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 2 2 2 0 1 1 0 2 0 2 2 1 2 1 2 1 0 1 2 0 1 3 3 1 0 Moyennes des notes données par les étudiants 67,9 67,9 50,0 67,9 67,9 67,9 71,4 50,0 78,6 75,0 71,4 57,1 60,7 78,6 75,0 71,4 46,4 64,3 78,6 64,3 67,9 78,6 14,3 67,9 53,6 85,7 71,4 71,4 67,9 82,1 57,1 78,6 78,6 71,4 85,7 64,3 53,6 85,7 60,7 85,7 78,6 71,4 92,9 85,7 46,4 82,1 89,3 82,1 60,7 64,3 Tableau A10-1 : la comparaison de résultats de l'étape et l'étape 2 après l'adaptation de l'hypothèse (2) 224 Annexe Annexe 11 : Calcul de coefficient de corrélation entre (1) les moyennes des notes données par les étudiants (X) et (2) le nombre de critères principaux correspondants validés en appliquant les règles de déduction (3 critères principaux). Supposons que les moyennes des notes données par les étudiants est Y et le nombre de critères principaux correspondants est Y. Ici, δ(X,Y) est égal à 0.374, et donc hautement significatif. Soit 14% de la variabilité des moyennes de pertinence est expliqué par les trois critères principaux. 225 Annexe Annexe 12 : Calcul de corrélation partielle. Le calcul de corrélation partielle utilise les données dans le tableau Annexe 9. Nous calculons la corrélation bisérielle entre X (la moyenne des notes données par les étudiants) et chaque critère principal (A, B, D). Ce calcul suit les étapes suivantes : Etape 1 : Calculer la corrélation bisérielle entre X et critère A. Voici un tableau qui résume les valeurs pour le calcul de corrélation bisérielle entre X et A. ∑X n ∑X2 X 0 15 981 65547 65,4 1 35 2488 18469 6 71,1 ∑ 50 3467 25014 3 Tableau A12-1 : des valeurs pour calculer la corrélation bisérielle entre X et critère A n (σ x ) = n−1 σˆ x = 50 (13.9706) = 13.971 49 Équation A12-1 : calcul de σˆ x rbis ( X, A) = X 0 − X1 σˆ x n0 n1 n2 65.4 − 71.1 15 * 35 13.971 50 2 = 0.187 = rbis = 0.035 ≈ 4% 2 Équation A12-2 : Calcul de variance de la corrélation bisérielle X , A Etape 2 : Calculer la corrélation bisérielle entre X et critère B. Voici un tableau qui résume les valeurs pour le calcul de corrélation bisérielle entre X et B. n ∑X ∑X2 X 0 39 2681 19272 3 68.4 1 11 788 71.6 57520 ∑ 50 3469 25024 3 Tableau A12-2 : des valeurs pour calculer la corrélation bisérielle entre X et critère B 226 Annexe rbis ( X, B ) = X 0 − X1 σˆ x n0 n1 n2 68.4 − 71.6 13.971 = 0.095 39 *11 50 2 = rbis = 0.009 ≈ 0,9% 2 Équation A12-3 : calcul de variance de la corrélation bisérielle X, B Etape 3 : Calculer la corrélation bisérielle entre X et critère D. Voici un tableau qui résume les valeurs pour le calcul de corrélation bisérielle entre X et D. = xˆ x Lorsque c = 0, 1, 2, ou 3 − − − − C = 0, x = 61 C = 1, x = 68 C = 2, x = 74 C = 3, x = 81 227 Annexe Annexe 13 : Liste des architectes qui participent à l'expérimentation pour la validation de l'hypothèse. ID 4 5 6 7 8 12 13 14 15 16 18 19 20 21 26 28 29 32 34 35 36 Région Terminé l'expérimentation? Bourgogne Alsace Auvergne Auvergne Bretagne Lorraine Alsace Alsace Lorraine Alsace Lorraine Lorraine Ile-de-France Ile-de-France Ile-de-France Languedoc-Roussillon Ile-de-France Lorraine Ile-de-France Lorraine Lorraine Oui Non Non Oui Non Oui Oui Non Oui Non Oui Oui Non Oui Oui Oui Oui Oui Non Non Oui Tableau A13-1 : Liste des architectes participant à l'expérimentation 228 Annexe Annexe 14 : Liste des architectes qui n'ont pas terminé l'expérimentation ID Initial Type de projet pour lequel l'utilisateur souhaite retrouver les produits 5 S.A. Maison Ouverture Non 6 JP.L. Maison Ouverture Oui 8 P.H. Commerce Ouverture Non 14 P.K. Habitation Toiture Non 16 JM.C. Ecole Ouverture Non 20 O.D. Maison Autres Oui Je cherche les cuves enterrées 34 P.M. Autres Autres Non je cherche des carrelages 35 P.G. Loisir Ouverture Oui Je cherche une façade vitrée avec ossature bois Problème de conception envisagé Est-ce que l'utilisateur demande un produit précis? Ce que l'utilisateur a exprimé par rapport à son besoin avant de commencer la recherche je cherche des fenêtres fixes en pvc coloré bois avec renfort acier total Je cherche des menuiseries PVC à 2 vantaux qui ouvrent à la fois à la française et en OB, avec en plus des petits carreaux c'est pas de ma faute si mes clients ont des goûts de Ch Recherche de portes coulissantes en verre, sans structure (seule structure = portique métal vertical type système portails coulissants) Je cherche les tôles pour couvertures et bardages de façade en cuivre Je cherche les tôles pour couvertures et bardages de façade en cuivre Table au A14-1 : les architectes qui n 'ont pas terminé l'expérimentation (sic.) Remarque Nous avons des produits qui peuvent répondre à ce besoin Nous avons des produits qui peuvent répondre à ce besoin Nous avons des produits qui peuvent répondre à ce besoin Nous avons des produits qui peuvent répondre à ce besoin Nous avons des produits qui peuvent répondre à ce besoin Nous n'avons pas ce produit, ni d'images qui représente ce produit. Nous avons ce produits, mais pas d'images qui peut représenter ce produit Nous avons ce produit. Annexe Annexe 15 : Exemple d'analyse de résultat de l'expérimentation ID : 04 Initial : C.G. Région : Bourgogne Résultats de l'expérimentation : • • Type de projet pour lequel l'utilisateur souhaite retrouver les produits :Habitation Problème de conception envisagé :Toiture Est-ce que l'utilisateur demande un produit précis?: Non Ce que l'utilisateur a exprimé par rapport à son besoin avant de commencer la recherche :« Je cherche les tôles pour couvertures et bardages de façade ». Termes choisis [Type produit]Couvertures, accessoires [Fonction]Toitures [Forme]Plaques rigides sans recouvrement [Type produit]Anti-choc [Type produit]Bacs de couverture [Type produit]Bardages [Type produit]Bâtiments industrialisés [Type produit]Couvertures, accessoires [Type produit]zénithal [Type produit]Lanterneaux [Type produit]antisolaire [Type produit]Rénovation, réhabilitation [Type produit]Tôles [Type produit]Verrières [Type produit]Voûtes, plaques translucides [Fonction]Toitures [Fonction]Parements verticaux extérieurs [Fonction]Saillies de façades [Métier]Charpente, couverture métallique [Métier]Menuiserie métallique, serrurerie [Matériau]Aciers [Matériau]Aciers inoxydables [Matériau]Zinc [Forme]Plaques rigides sans recouvrement [Forme]Combinaison de formes [Forme]Feuilles malléables [Type produit]Bacs de couverture [Type produit]Bardages [Type produit]Couvertures, accessoires [Type produit]Tôles [Fonction]Couvertures [Fonction]Parements verticaux extérieurs [Métier]Charpente, couverture métallique [Matériau]Aciers [Forme]Combinaison de formes [Forme]Plaques rigides sans recouvrement [Type produit]Bacs de couverture [Type produit]Bardages [Type produit]Tôles [Métier]Charpente, couverture métallique [Matériau]Aciers Tableau A15-2 : les requêtes • Résumé : L'utilisateur est orienté vers les couvertures en tôle métallique 233 Poids d'expressivité 0,6666666666666667407 0,3333333333333333703 0,6666666666666666297 0,2 0,2 0,4 0,2 0,4 0,2 0,2 0,2 0,2 0,4 0,2 0,2 0,2 0,2 0,2 0,4 0,2 0,2 0,2 0,4 0,4 0,4 0,2 0,3333333333333333148 0,5555555555555555802 0,4 0,5555555555555555802 0,4 0,4444444444444444198 0,6666666666666666297 0,5555555555555555802 0,4666666666666666186 0,3777777777777777679 0,5 0,4047619047619 Annexe • La liste de produits avec le jugement de pertinence de l'utilisateur : ID Produit Nom de produit Jugement de pertinence de l'utilisateur 1 1676 Bacs profilés pour couvertures et bardages de façades en acier J 2 1290 Tôles et bacs pour couvertures et bardages en acier J 3 1176 Panneaux isolants pour couvertures et bardages en acier à âme laine minérale J 4 1144 Tôles et bacs profilés pour couvertures et bardages en acier J 5 1109 Tôles et bacs profilés pour couvertures et bardages en acier J 6 4273 Bardages pour façades en métal J 7 3788 Cassettes pour bardages en acier J 8 2772 Bardages pour façades et parois bungalow, palissades, cloisons) en acier J 9 2767 Profils pour couvertures et bardages cintrés en acier J 10 1678 Accessoires de fixation pour bardages en acier J 11 1675 Couventines, bavettes d'appuis de fenêtres et bandeaux d'acrotères en acier J 12 1673 Accessoires de raccords et d'étanchéité pour bardages en acier J 13 1177 Accessoires de fixation et raccords pour couvertures et bardages en acier J 14 1174 Profils pour couvertures et bardages cintrés en acier J 15 1141 Panneaux isolants pour couvertures et bardages en acier à âme polymère J 16 1139 Panneaux isolants pour locaux frigorifiques en acier à âme polymère K 17 1133 Caissons isolants pour bardages en acier, acoustiques J 18 4617 Tôles et bacs profilés pour couvertures et bardages en métal J 19 1921 Tôles et bacs profilés pour bardages en aluminium J 20 1912 Tôles et bacs profilés pour couvertures en aluminium J Légende : J très pertinent ; K neutre ; L pas pertinent Tableau A15-3 liste de produits avec le jugement de l'utilisateur • • Ce que l'utilisateur exprime par rapport à son besoin juste au moment il demande la liste de produits : « tôle de couverture cintrée » Commentaire de l'utilisateur : « efficace, rapide, bonne méthode, mais on ne devra pas présenter plusieurs fois les mêmes images si elles sont classées « oui » Calcul de taux de rappel et taux de précision : • Résumé de thème de recherche par l'assesseur : Tôles, bacs et cassettes métalliques (acier, aluminium) pour façades et couvertures, non compris : éclaircissement et gouttières. • Voici la liste des produits pertinents fournie par l'assesseur : No ID Produit Nom de produit 1 1673 Accessoires de raccords et d'étanchéité pour bardages en acier 2 1177 Accessoires de fixation et raccords pour couvertures et bardages en acier 3 4 5 6 7 8 9 1678 301 153 1676 465 494 335 Accessoires de fixation pour bardages en acier Bacs profilés et accessoires de finition pour couvertures et bardages en acier Bacs profilés pour bardages en aluminium Bacs profilés pour couvertures et bardages de façade en acier Bacs profilés pour couvertures et bardages en acier et aluminium Bardages de parement pour façades en acier Bardages pour façades en aluminium 2772 4273 1133 4274 1665 302 3788 2349 3762 4936 339 771 4398 1675 1674 362 1289 33 1677 1176 1141 1287 609 5251 1137 2396 161 159 1246 493 4618 2452 2451 Bardages pour façades et parois bungalow, palissades, cloisons) en acier Bardages pour façades en métal Caissons isolants pour bardage en acier, acoustiques Cassettes et clins pour bardages en acier ou aluminium Cassettes et clins pour bardages en aluminium Cassettes pour bardages de bâtiments industriels et commerciaux en acier Cassettes pour bardages en acier Cassettes pour bardages en acier et aluminium Cassettes pour bardages en acier et aluminium Cassettes pour bardages en acier inoxydable Cassettes pour bardages en aluminium Cassettes pour bardages en aluminium Cassettes pour bardages en aluminium Couventines, bavettes d'appuis de fenêtres et bandeaux d'acrotères en acier Couvertures en acier Couvertures en acier à protection composite anticorrosive Couvertures en acier, acoustiques Couvertures en tôle d'acier sans fixation visible Panneaux composites à parois métalliques 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 Panneaux isolants pour couvertures et bardages en acier à âme laine minérale Panneaux isolants pour couvertures et bardages en acier à âme polymère Panneaux et cassettes pour bardages en acier Panneaux et cassettes pour bardages laqués aluminium à âme polymère Panneaux nervurés pour façades, sous-toitures ou plafonds Panneaux pour bardages à fenêtre en hublot intégrées en acier Panneaux pour bardages de façades et surtoitures en métal Panneaux pour bardages en aluminium Panneaux pour bardages en aluminium à âme isolante Panneaux pour bardages et murs-rideaux en aluminium Panneaux pour couvertures et bardages en acier, aluminium ou composite Panneaux sandwich pour couvertures et bardages en métal et polymère Panneaux sandwich pour façades et toiture en métal, mousse en polyuréthane Panneaux sandwich précintrés pour façades et toiture en acier et aluminium 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 2767 1174 3462 303 1672 4275 1001 1922 4979 348 1290 1921 1912 1109 1144 4617 1185 4978 4397 774 Profils pour couvertures et bardages cintrés en acier Profils pour couvertures et bardages cintrés en acier Revêtements pour façades en aluminium Systèmes de couvertures de grandes portées en acier Systèmes de couvertures et bardages à isolation intégrée Systèmes de fixation pour bardages en métal Tôles et bacs pour bardages en acier inoxydable Tôles et bacs pour couvertures à pente élevée en aluminium Tôles et bacs pour couvertures en acier inoxydable étamé Tôles et bacs pour couvertures et bardages de façades en aluminium Tôles et bacs pour couvertures et bardages en acier Tôles et bacs profilés pour bardages en aluminium Tôles et bacs profilés pour couvertures en aluminium Tôles et bacs profilés pour couvertures et bardages en acier Tôles et bacs profilés pour couvertures et bardages en acier Tôles et bacs profilés pour couvertures et bardages en métal Tôles et profilés cintrés en acier et aluminium Tôles isolantes sandwich en acier inoxydable et âme polymère Tôles ondulées ou nervurées pour couvertures et bardages en aluminium Tôles pour couvertures et bardages en aluminium Note : les produits mis en évidence ont été retrouvés par le système Tableau A15-4 : Les produits pertinents fournis par l'assesseur • • • 19 produits ont été jugés pertinents par l'utilisateur, 62 produits ont été jugés pertinents par l'assesseur, R@20 = P@20 = 19/20 = 0,95 2. matières Remerciements 5 Sommaire 7 Introduction 9 Chapitre 1 : Recherche d'informations sur les produits du bâtiment et la conception architecturale. 15 1. Recherche d'informations sur les produits du bâtiment 15 1.1 L'importance des matériaux de construction dans le domaine de l'architecture 15 1.2 « Matière », « Matériau », « Produit » 16 1.3. L'architecte : un acteur important dans le choix des produits 18 2. Place de la recherche d'informations sur les produits dans le processus de conception architecturale 20 2.1. Le rôle des informations sur les produits dans le processus de conception architecturale 20 2.2. Les informations relatives aux produits du bâtiment qui aident à résoudre les problèmes de conception architecturale 23 2.3. Les modèles illustrant les différentes phases du processus de conception architecturale. 25 2.4. Le modèle Artec pour la conception architecturale 27 2.5. Les quatre niveaux du modèle Artec pour la conception architecturale 28 2.5.1. Les différents niveaux du modèle et les différents points de vues 28 2.5.2. Le tableau comparatif 30 2.5.3. Les besoins de rechercher les produits et les informations sur les produits 30 3. Typologie des besoins d'informations sur les produits 31 3.1. Les types des besoins de l'utilisateur 31 3.1.1. Les facteurs dérivés 31 3.1.2. Les trois types de besoins 32 3.1.3. Le type de besoin qui n'existe pas 33 3.2. La veille technologique 33 3.3. L'orientation progressive 33 4. Accès aux informations 34 4.1. Les différents supports à la recherche d'informations sur les produits du bâtiment 34 4.1.1. Les catalogues papiers 34 4.1.2. Les cd-roms 35 4.1.3. Les catalogues en ligne 35 4.1.4. La conclusion 36 4.2. Les modes d'accès aux bases de produits en ligne existants 36 4.3. La proposition de la recherche par l'image 37 5. Conclusion 38 Chapitre 2 : Trois domaines relatifs à la recherche d'informations 41 1. Introduction 41 2. Recherche d'informations 42 2.1. L'introduction 42 2.1.1 La navigation 42 2.1.2. La recherche, formulation d'un besoin 43 2.2. Méthode de recherche d'informations 44 2.2.1. L'indexation 44 2.2.1.1. Les modèles de documents 45 2.2.1.2. Les langages d'indexation 46 237 Table des matières 2.2.1.3. La syntaxe 46 2.2.1.4. Les vocabulaires d'indexation 46 2.2.1.5. Le thésaurus 47 2.2.1.6. Le processus d'indexation 47 2.2.2. L'interrogation 48 2.2.2.1. Les modèles de demande 48 2.2.2.2. Les modèles de mise en correspondance 49 2.2.3. La pertinence 52 2.3. Conclusion 52 3. d'informations sur les bases de produits en ligne 53 3.1. Les bases de produits en ligne. 53 3.2. Les modes d'accès aux bases de produits en ligne 57 3.2.1. La recherche libre 57 3.2.2. La recherche multicritères 58 3.2.3. La navigation 58 3.2.3.1. La navigation par ordre alphabétique 58 3.2.3.2. La navigation thématique 59 3.2.3.3. La navigation thématique assistée par l'image 59 3.3. Conclusion 60 4. Recherche d'informations utilisant l'image 62 4.1. La recherche d'images (dont le résultat d'une recherche est l'image) 62 4.1.1. La recherche d'images fondée sur la sémantique 63 4.1.1.1. L'indexation d'images fondée sur la sémantique 63 4.1.1.2. L'interrogation d'une base d'images fondée sur la sémantique 64 4.1.1.3. Les exemples de systèmes sémantiques de recherche d'images 64 4.1.2. La recherche d'images par similarité 65 4.1.2.1. L'indexation d'images par les caractéristiques physiques 65 4.1.2.2. L'interrogation de la base d'images par similarité 66 4.1.2.3. Les exemples de systèmes de recherche d'images par similarité 66 4.1.3. La recherche d'images mixte 67 4.2. La recherche d'informations par l'image 68 4.2.1. Le principe de la recherche d'information par l'image 69 4.2.2. Les exemples de systèmes de recherche par l'image 70 4.3. Conclusion 70 5. Conclusion 71 Chapitre 3. Image et la recherche de produits du bâtiment 73 1. Cadre général 73 1.1. La définition de l'image pour notre approche. 73 1.1.1. L'image comme « support » à la recherche d'informations 73 1.1.2. L'acception du terme « image » 74 1.1.3. Le dessin 74 1.1.4. La photographie 75 1.2. L'image comme véhicule d'informations : de diverses théories de l'image à la théorie de l'information et de la communication. 76 1.2.1. La sémiotique et la publicité 76 1.2.2. La théorie de l'information et de la communication 77 1.2.3. Le modèle du code 77 1.2.4. Le modèle de la communication messages iconiques 78 1.2.5. La proposition d'un modèle analogue 80 1.3. L'analyse d'images 81 1.3.1. L'analyse d'images photographiques 81 1.3.2. Les autres tentatives d'analyse d'image 82 1.3.3. L'analyse de l'image pour la création d'un outil d'aide à la recherche de produits du bâtiment par l'image 84 238 Table des matières 1.3.3.1. La quantité d'images nécessaires 84 1.3.3.2. Produits « génériques » et Produits « singuliers » 84 1.3.3.3. Estimation du nombre d'images 85 1.3.4. Le contexte et le principe de pertinence dans notre méthode d'analyse d'images 86 1.3.4.1. La grille d'analyse sous forme de « filtre » 86 1.3.4.2. « Problème de contexte » et « Modèle inférentiel » 87 1.3.4.3. « Principe de pertinence » et la collecte d'images de produits 88 2. Propriétés et limites de l'image 90 2.1. Propriétés de l'image photographique 90 2.1.1. La première propriété 90 2.1.2. La deuxième propriété 93 2.1.3. La troisième propriété 94 2.1.4. La quatrième propriété 95 2.1.5. La cinquième propriété 95 2.1.6. La sixième propriété 96 2.1.7. La septième propriété 96 2.2. Propriétés de l'image représentant les produits du bâtiment 97 2.3. Les limites de l'image 98 2.3.1. La polysémie 98 2.3.2. La surcharge informationnelle 99 2.3.3. Le déficit informationnel 99 2.3.4. L'ambiguïté sémio-graphique 100 3. Filtre pour l'analyse d'images 101 3.1. Les critères de pertinences d'images pour la recherche de produits 101 3.1.1. La pertinence de base 101 3.1.2. La pertinence graphique 102 3.1.3. La pertinence sémantique 102 3.1.4. La pertinence visuelle 103 3.1.4.1. La focalisation 103 3.1.4.2. L'intégralité 105 3.1.4.3. La similarité 106 3.1.4.4. La pertinence spatiale 107 3.1.4.5. La pertinence temporelle 109 3.1.5. Conclusion 109 3.2. La consigne d'application de la pertinence visuelle 110 3.2.1. La focalisation 110 3.2.2. L'intégralité 111 3.2.3. La similarité 111 3.2.4. La pertinence spatiale 112 3.2.5. La pertinence temporelle 112 3.3. L'expérimentation pour valider les critères de pertinence visuelle 113 3.3.1. Le protocole de l'expérimentation 113 3.3.1.1. L'étape 1 113 3.3.1.2. L'étape 2 114 3.3.1.3. La comparaison de résultats des deux étapes 115 3.3.2. L'analyse de résultat par des méthodes statistiques. 116 3.3.2.1 Test de validité des moyennes des notes données par les étudiants. 116 3.3.2.2. Validation de l'hypothèse (1) 117 3.3.2.3. Validation de l'hypothèse (2) 118 3.3.2.4. Adaptation de 'hypothèse (2) 120 3.3.3. La conclusion 122 3.3.3.1. Les limites de validation des hypothèses 122 3.3.3.2. Une première application 122 3.3.3.3. Autres résultats de l'expérimentation 124 4. Conclusion 124 matières Chapitre 4 : Proposition d'une méthode de Recherche de Produits par l'Image 127 1. Recherche d'Images v.s. Recherche de Produits par l'Image 127 1.1. Recherche de Produits par l'Image, architecture 127 1.2. Processus de Recherche de Produits par l'Image 128 1.2.1. Recherche d'images (RI) : la formulation du besoin 128 1.2.2. Etape intermédiaire : « interprétation du besoin » 128 1.2.3. Recherche de Produits (RP) : l'interrogation de la base de produits 128 1.3. Méthode de Recherche de Produits par l'image, description rapide 128 1.3.1. Méthode de Recherche d'Images 128 1.3.2. L'interprétation du besoin 129 1.3.3. Produits 2. Mé thode de Recherche d'Images 130 2.1. La construction de la base d'images 130 2.1.1. A la recherche de la source d'images 130 2.1.1.1. Internet : source d'images 130 2.1.1.1.1. Qualités attendues d'une source d'images 130 2.1.1.1.2. Source d'images et qualités 131 2.1.1.1.3. Internet, source de qualité 132 2.1.1.1.4. Conclusion 132 2.1.1.2. Les caractéristiques d'images du Web 133 2.1.1.2.1. Les caractéristiques liées à la forme de l'image 134 2.1.1.2.2. Les caractéristiques liées à la localisation de l'image : la répartition des types d'images dans le Web 136 2.1.1.2.3. Les caractéristiques liées au sens de l'image 137 2.1.2. Méthode pour la construction d'une base d'images 138 2.1.3. L'extraction automatique d'images à partir du Web. 139 2.1.3.1. Les critères de pertinence et leur automatisation 139 2.1.3.1.1. Les critères automatisables 139 2.1.3.1.2. Les critères non-automatisables 139 2.1.3.1.3. Processus de décision 139 2.1.3.2. Les règles d'extraction automatique 140 2.1.3.3. Les règles d'extraction manuelle 142 2.1.4. L'indexation sémantique d'images 144 2.1.4.1. L'organisation du thésaurus 144 2.1.4.2. L'extraction des termes d'indexation à l'aide du thésaurus 144 2.1.4.3. Les étapes du processus d'extraction des termes d'indexation 145 2.1.4.3.1. Pré-traitement 145 2.1.4.3.2. Début 146 2.1.4.3.3. Contrôle 147 2.1.4.4. Le modèle de document 148 2.2. Le principe de la recherche interactive et progressive d'images 148 2.2.1. Le bouclage de pertinence 148 2.2.2. Processus de recherche de produits par l'image 149 2.2.3. Conclusion 150 2.3. Le modèle de mise en correspondance 151 2.3.1. Le modèle de documents 152 2.3.1.1. Le modèle général de documents 152 2.3.1.2. Le modèle de documents systèmes 152 2.3.2. Le modèle de demandes 152 2.3.2.1. Le modèle de besoins de l'utilisateur 152 2.3.2.2. Le modèle de requêtes intermédiaires 2.3.2.3. Le modèle de requêtes systèmes 153 3. Interprétation du besoin et la sélection de produits 154 3.1. L'analyse du choix d'images 154 des matières 3.2. La construction des requêtes 157 3.2.1. La construction de requête intermédiaire 157 3.2.1.1. La mise en place du premier niveau d'expression du besoin 157 3.2.1.2. La mise à jour du niveau d'expression du besoin 158 3.2.1.3. La reformulation du besoin appris 159 3.2.2. La construction de requête système 161 3.3. La sélection d'images et de produits 161 3.3.1. La mise en place de la matrice des documents 161 3.3.2. Le calcul de similarité 161 3.3.3. La déformation 161 3.3.4. La méthode de la recherche de produits 162 4. Conclusion 162 Chapitre 5 : Application et l'expérimentation 165 1. Extraction et l'indexation d'images à partir du Web 165 1.1 Les travaux annexes 165 1.2 Les principales fonctions du robot 166 1.2.1. Le processus mis en oeuvre dans Wimexbot 166 1.2.2. L'extraction/l'indexation automatique 167 1.2.3. La validation/exportation manuelle 168 1.3 L'évaluation du Wimex-Bot 168 1.3.1. Le fonctionnement du robot 169 1.3.1.1. La configuration du robot 169 1.3.1.2. Le parcours de sites 171 1.3.1.3. La validation manuelle des résultats 172 1.3.1.4. La création de fichier d'exportation 173 1.3.2. Le protocole de l'expérimentation 173 1.3.2.1. Le choix des sites à parcourir 173 1.3.2.2. Le choix des valeurs des paramètres 175 1.3.1.3. L'exploitation du résultat 176 1.3.3. L'interprétation du résultat 177 1.3.3.1. Les résultats de l'extraction d'images 177 1.3.2.2. Le résultat de l'indexation automatique 179 1.3.4. La conclusion 179 2. Application de la recherche de produits par l'image 184 2.1 La recherche de produits dans BATIMAGE 184 2.1.1. La formulation de demandes 184 L'accès au premier ensemble d'images 184 2.1.2. L'affinement de choix d'images 185 2.1.3. La visualisation de la liste de produits 186 2.2. L'évaluation de la recherche de produits par l'image 186 2.2.1. L'objectif de l'expérimentation 187 2.2.2. Le protocole de l'expérimentation 187 2.2.2.1. L'échantillon d'images 187 2.2.2.2. La sélection des utilisateurs 188 2.2.2.3. Le déroulement de l'expérimentation 188 2.2.3. L'évaluation de la pertinence du système 190 2.2.3.1. La nécessité d'adapter une méthode d'évaluation de la pertinence de système 190 2.2.3.2. L'adaptation de méthode : le taux de précision 190 2.2.3.3. L'adaptation de méthode : le taux de rappel 191 2.3. La présentation de résultats 192 2.3.1. Les utilisateurs qui n'ont pas terminé l'expérimentation 192 2.3.2. Les utilisateurs qui ont terminé l'expérimentation 193 2.3.2.1. L'analyse de la pertinence des 20 premiers documents 193 241 Table des matières 2.3.2.2. L'analyse par type de besoin des demandes des utilisateurs 194 2.3.2.2.1. Le tableau résumant les types de besoins des demandes des utilisateurs 194 2.3.2.2.2. L'analyse des résultats pour les demandes de « cas 1 » 194 2.3.2.2.3. L'analyse des résultats pour les demandes de « cas 2 » 196 2.3.2.3. Analyse de la progression des choix d'images 197 2.4. La conclusion et l'amélioration 197 2.4.1. La conclusion 197 2.4.2. La proposition d'amélioration de l'approche 198 3. Conclusion 199 Conclusion 201 Bibliographie 205 Annexe 211 Annexe 1 : Le corpus d'images pour l'expérimentation pour la validation de critères de pertinence 211 Annexe 2 : Les notes données par les étudiants 216 Annexe 3 : La synthèse d'avis des 3 experts selon 16 sous-critères de la pertinence visuelle 217 Annexe 4 : La comparaison de résultat de l'étape 1 et l'étape 2 218 Annexe 5 : Calcul de coefficient de corrélation entre (1) le nombre de sous-critères correspondants selon l'avis des experts (X) et (2) les moyennes des notes données par les étudiants (Y) 219 Annexe 6 : Le regroupement de 5 critères principaux à partir de 16 sous-critères (cf. tableau A6-1) 220 Annexe 7 : Comparaison le nombre de critères principaux validés avec les moyennes des notes données par les étudiants 221 Anne xe 8 : Calcul de coefficient de corrélation entre (1) les moyennes des notes données par les étudiants (X) et (2) le nombre de critères principaux correspondants validés en appliquant les règles de déduction (5 critères principaux). 222 Annexe 9 : Le regroupement d'avis des experts en 3 critères principaux après l'adaptation de l'hypothèse (2) 223 Annexe 10 : la comparaison de résultats de l'étape et l'étape 2 après l'adaptation de l'hypothèse (2) 224 Annexe 11 : Calcul de coefficient de corrélation entre (1) les moyennes des notes données par les étudiants (X) et (2) le nombre de critères principaux correspondants validés en appliquant les règles de déduction (3 critères principaux). 225 Annexe 12 : Calcul de corrélation partielle 226 Annexe 13 : Liste des architectes qui participent à l'expérimentation pour la validation de l'hypothèse. 228 Annexe 14 : Liste des architectes qui n'ont pas terminé l'e 229 Annexe 15 : Exemple d'analyse de résultat de l'expérimentation 230 Table des matières 237 Résumé - Abstract 243 Résumé - Abstract Rés umé Le problème de choix de produits du bâtiment occupe une place importante dans un processus de conception architecturale. Les moteurs de recherche de produits existants sur le Web proposent les modes d'accès, qui, en général, s'appuient sur l'utilisation du texte. Ces modes d'accès sont mal adaptés aux besoins d'informations des architectes qui sont souvent vagues au départ, et ne sont jamais clairement et complètement énonçables en mots. C'est pourquoi, nous proposons l'image comme un nouveau support à la recherche de produits. Abstract The problem of building product selection occupies an important place in an architectural design process. Building product search engines on the Web propose access modes, which, in general, rely on the use of text. These access modes are badly adapted to architect's information needs, which are often fuzzy at the beginning and they are never clearly and completely enunciable in words. Therefore, we propose the image as a new support for building product search. We present a method applied to an interactive building product search, as well as the construction of an image database used in this search. Consequently, two applications have been realized from this method: 1) a crawler intended for extraction and indexing of building product image from the Web, 2) an interactive building product search tool. Evaluation of these tools allows us to propose ameliorations of the approach. Le problème de choix de produits du bâtiment occupe une place importante dans un processus de conception architecturale. Les moteurs de recherche de produits existants sur le Web proposent les modes d'accès, qui, en général, s'appuient sur l'utilisation du texte. Ces modes d'accès sont mal adaptés aux besoins d'informations des architectes qui sont souvent vagues au départ, et ne sont jamais clairement et complètement énonçables en mots. C'est pourquoi, nous proposons l'image comme un nouveau support à la recherche de produits. Nous présentons une méthode appliquée à la recherche interactive de produits ainsi que la construction de la base d'images utilisées pour cette recherche. Par conséquent, deux applications ont été réalisées à partir de cette méthode : 1) un robot logiciel destiné à extraire et indexer les images de produits à partir du Web, 2) un outil recherche interactive de produits par l'image. L'évaluation de ces outils permet de proposer des améliorations de l'approche. TITRE en anglais Information search by the image. Application to the interactive building product search. RESUME en anglais The problem of building product selection occupies an important place in an architectural design process. Building product search engines on the Web propose access modes, which, in general, rely on the use of text. These access modes are badly adapted to architect's information needs, which are often fuzzy at the beginning and they are never clearly and completely enunciable in words. Therefore, we propose the image as a new support for building product search. We present a method applied to an interactive building product search, as well as the construction of an image database used in this search. Consequently, two applications have been realised from this method: 1) a crawler intended for extraction and indexing of building product image from the Web, 2) an interactive building product search tool. Evaluation of these tools allows us to propose ameliorations of the approach. DISCIPLINE Science pour l'Architecture MOTS-CLES Architecture, conception architecturale, produits du bâtiment, recherche d'informations, image, Internet Recherche d'informations par l'image. Application à la recherche interactive de produits du bâtiment CRAI (Centre de Recherche en Architecture et Ingénierie) 2, rue Bastien Lepage, B.P. 435 Nancy-cédex.
11,663
2018STRAH003_4
French-Science-Pile
Open Science
Various open science
2,018
Transformation et transport des pesticides inorganiques et de synthèse dans les sols de bassins versants agricoles
None
French
Spoken
6,845
13,576
Figure 2-5 : Caractéristiques et occupation du sol du bassin versant de grande culture étudié 72 Figure 2-6 : Instrumentation présente sur le bassin versant de grande culture Les caractéristiques des sols des bassins versants de grande culture et viticole sont résumés dans le tableau suivant (Table 2-1). Table 2-1 : Caractéristiques des sols agricoles utilisés Parameter Bulk density* ( Clay Silt Sand OM Loss on ignition OC Black & Walkley Al2O3 CaCO3 Fe2O3 MnO Cu Zn Metalaxyl S-metolachlor CEC pH *Après tamisage Unit [g.cm-3] [%] [%] [%] [%] [%] [%] [%] [%] [%] [mg.kg-1] [mg.kg-1] [mg.kg-1] [mg.kg-1] [cmol+.kg-1] [-] Crop soil 0.99 28.3 61.5 10.3 5.52 1.18 11.2 0.81 6.66 0.14 48 77 0.21 0.40 9.1 6.97 Vineyard soil 1.05 68.5 23.1 8.4 1.67 0.84 7.49 27.1 3.86 0.1 171 81 0 0.41 15.4 8.1 73 3. Extraction et quantification des pesticides et métaux 3.1. Pesticides La quantification des pesticides dans les eaux est réalisée après extraction en phase solide des pesticides dissous avec un système AutroTrace 280 SPE (Dionex®, CA, USA) permettant de traiter simultanément 6 échantillons. Brièvement, les échantillons d’eau (de 100 mL à 1 L suivant ruissellements obtenus sur le terrain) passent sur des cartouches SolEx C18 (Dionex®, CA, USA) remplies avec 1 g de silice. Ces cartouches sont préalablement lavés avec 5 mL d’éthanol (EtOH) suivi de 5 mL d’éthyle acétate (EtAc), puis conditionnées avec 5 mL d’eau déminéralisée. Puis les échantillons d’eau sont injectés sur les cartouches retenant les molécules d’intérêts en fonction de leurs polarités. Pour une meilleure extraction, la cartouche est ensuite séchée sous flux d’azote (10 min) et l’élution des pesticides étudiés se fait ensuite par 5 mL d’EtAc et 5 mL d’acétonitrile (ACN). Les extraits obtenus sont ensuite concentrés par évaporation du solvant (mixture EtAc + ACN) sous flux d’azote jusqu’à la dernière goutte. Enfin ces extraits concentrés sont mis en solution dans 500 à 1000μL d’acétonitrile (ACN) (Elsayed et al., 2014). Les extraits sont conservés à -18°C en attendant leur analyse. Les pesticides présents dans la phase solide des sols sont quantifiés après une extraction solide-liquide adaptée de précédentes études (Anastassiades et al., 2003; Ivdra et al., 2014). Brièvement, 5-10 g de sol (brut, sans préparation préalable) est mis en présence d’EtAc dans un tube Falcon (50 mL) suivant un ratio 2:1 sol:solvant. Ce mélange est agité 15 s à l’aide d’un agitateur-vortex puis placé dans un bain à ultrasons pendant 5 min. Une quantité d’eau ultrapure est ensuite ajoutée pour atteindre un sol avec une teneur en eau de 80 % (définie selon la teneur initiale du sol). Après une nouvelle agitation de 1 min, le mélange est centrifugé pendant 5 min à 5000 tours par minute (rpm) permettant la séparation et le prélèvement de la phase liquide organique. L’opération est répétée deux fois sans nouvel ajout d’eau ultra-pure. Les phases liquides organiques sont « poolées » et concentrées sous flux d’azote jusqu’à la dernière goutte, remises en solution dans 500-1000 μL d’ACN et mises en contact de sulfate de magnésium MgSO4 anhydre pour en assécher les possibles traces d’eau. Une étape supplémentaire de purification des échantillons est effectuée avec l’ajout de 12,5 mg d’amine (PSA, primary secondary amine) et 75 mg de MgSO4 anhydre aux 500 μL d’échantillons, agités 74 30 s et centrifugés 1 min à 5000 rpm. Les extraits sont conservés à -18°C en attendant leur analyse. Un mélange de 20 pesticides a été étudié au cours de cette thèse. Ce mélange est composé de 9 fongicides (azoxystrobin, carbendazim, cymoxanil, cyprodinil, dimethomorph, krésoxim-méthyle, metalaxyl, pyrimethanil et tetraconazole) 10 herbicides (atrazine, diuron, isoproturon, isoxaben, oryzalin, pendimethalin, pyraflufen-éthyle, simazine, S-metolachlor et terbuthylazine) et 1 insecticide (flufenoxuron). En dehors du S-metolachlor, ces pesticides ont été choisis car ils ont été régulièrement utilisés par les viticulteurs du bassin versant viticole étudié. L’herbicide S-metolachlor est couramment utilisé par les agriculteurs du bassin versant de grande culture étudié. Suivant la polarité de ces composés, certains ont été suivis en GCMS, d’autres en LC-MS. La quantification de l’atrazine (ATR), azoxystrobin (AZO), cyprodinil (CYP), diméthomorph (DIM), krésoxim-méthyle (KM), métalaxyl (MTY), pendimethalin (PEN), pyraflufen-éthyle (PRY), pyriméthanile (PYR), simazine (SIM), terbuthylazine (TER), tétraconazole (TZL) et S-métolachlore (SMET) est réalisée par chromatographie gazeuse (Trace 1300, Thermo Fisher Scientific) couplée à de la spectrométrie de masse (ISQ, Thermo Fisher Scientific) (GC-MS), équipée avec une colonne TG-5MS (30 m × 0.25 mm de diamètre interne et une épaisseur de 0.25 m), avec de l’hélium comme gaz vecteur à un débit de 1.5 mL.min-1. Le four du GC est maintenu à 50 °C pendant 1 min, mis à 160 °C à 30 °C.min-1, puis 220 °C à 4 °C.min-1 et 300 °C pendant 1 min à 30 °C.min-1. 1,5 μL d’échantillon est alors injecté dans un injecteur split/splitless fonctionnant en mode split avec un flux de split à 6,0 mL.min-1 et maintenu à 280 °C. La ligne de transfert et la source de la masse sont chauffées à 320 °C. Le metolachlor d11 est utilisé comme standard interne. Les limites de détection et de quantification des composés suivis au GC-MS sont résumées dans la table suivante (Table 2-2). Les scans et rendements d’extraction de ces composés sont résumés dans la Table 2-3. 75 Table 2-2 : Limites de détection (LD) et quantification (LQ) instrumentale des pesticides suivis au GC-MS ATR AZO CYP DIM KM MTY PEN PRY PYR SMET SIM TER TZL LD [μg.L-1] 11.5 7.7 4.3 24.9 5.3 6.6 4.5 9.4 12.7 10.1 4.4 9.3 6.3 LQ [μg.L-1] 34.8 23.4 13.0 75.8 16.0 20.0 13.8 28.5 38.5 30.7 13.5 28.2 19.3 Table 2-3 : Temps de rétentions et rendements d’extractions des pesticides quantifiables par GC-MS ATR AZO CYP DIM KM MTY PEN PRY PYR SMET SIM TER TZL RT [min] 17.26 32.88 24.34 32.96 26.22 22.43 24.53 27.44 18.74 16.96 23.48 18.18 23.96 Recovery [%] 61.1 21.6 33.8 51.4 2.2 67 5.7 3.6 55.4 23 23 13.1 16.5 SD [%] 1 2 12 14 1 3 3 1 6 9 2 2 6 Les concentrations de carbendazim (CAR), cymoxanil (CYM), diuron (DIU), flufenoxuron (FLU), isoproturon (ISP), isoxaben (ISX) et oryzalin (ORY) ont été mesurées par LC-MS (TSQ Quantum Access Max, Thermo Scientific, Waltham, Massachusetts, USA). La phase mobile (0.3 ml.min-1) est constituée d’un gradient d’ACN (30 to 95 %) et d’eau (70 to 5 %) à 4500 V. La dernière étape est maintenue pendant 3 min avant le retour à l’état initial 76 pendant 6 min. A chaque fois, 20 μL de chaque échantillon est injecté dans une colonne EC 150/3 Nucleodur C18 Pyramid 3 μm. L’isoproturon d6 est utilisé comme standard interne. Les Tables 2-4 et 2-5 résument les scans, rendements mais aussi les limites de détection et quantification. Table 2-4 : Temps de rétention et rendements des pesticides étudiés au LC-MS CAR CYM ISP DIU ISX ORY FLU ISPd6 Parent Transition Transition mass 1 2 192 160 132 199 128 83 207 72 165 233 72 188 333 165 107 347 288 305 489 158 141 213 78 171 RT [min] 2 7.3 13.9 14.3 17.4 17.8 21.5 13.8 Recovery Recovery in in soil [%] water [%] 23 41 29 56 105 98 80 91 23 48 30 82 172 33 - Table 2-5 : Limites de détections et de quantification des pesticides étudiés au LC-MS CAR CYM ISP DIU ISX ORY FLU ISPd6 LOD in soil LOQ in soil LOD in LOQ in [μg.g-1] [μg.g-1] water [μg.L-1] water [μg.L-1] 0.17 0.5 0.01 1 0.17 0.5 0.01 1 0.17 0.5 0.003 0.01 0.17 0.5 0.003 0.01 0.17 0.5 0.01 1 0.17 0.5 1 5 0.5 5 0.01 25 - Les formules des pesticides étudiés sont présentées dans la Figure 2-7. Les caractéristiques de ces composés sont résumées dans le Table 2-6. 77 Figure 2-7 : Formules des pesticides du mélange utilisé pour doper les sols des microcosmes 78 Table 2-6 : Caractéristiques physico-chimiques principales des pesticides présents dans le mélange utilisé pour doper les sols des microcosmes Solubility Sorptive and hydrophobic Hydrophobic Moderately hydrophobic [mL.g-1] [mL.g-1] FLU C21H11ClF6N2O3 0.0043 157643 PRY C13H9Cl2F3N2O4 0.1 PEN C13H19N3O4 ORY C12H18N4O6S Kd DT50,th vineyard [mL.g-1] [days] 1863 1319 42 1949 23 16.3 0.3 0.3 15744 186 132 90 1.1 807 9.5 6.8 45 ISX C18H24N2O4 0.9 351 4.1 2.9 105 SIM C7H12ClN5 5 340 4 2.8 60 TER C9H16ClN5 6.6 219 2.6 1.8 75 ATR C8H14ClN5 35 93 1.1 0.8 75 DIU C9H10Cl2N2O 35.6 499 5.9 4.2 76 ISP C12H18N2O 70.2 122 1.4 1.02 12 DIM C21H22ClNO4 29 1360 16.1 11.4 57 CYP C14H15N3 13 1470 17.4 12.3 37 PYR C12H13N3 121 301 3.6 2.5 55 AZO C22H17N3O5 6.7 581 6.9 4.9 78 2 437 5.2 3.7 16 8 223 2.6 1.9 40 157 4680 55.3 39.2 61 SMET C15H22ClNO2 480 185 2.2 1.5 15 CYM C7H10N4O3 780 44 0.5 0.4 0.7 MTY C15H21NO4 7100 163 1.9 1.4 42 C18H19NO4 CAR C9H9N3O2 Hydrophilic Kd crop [mg.L-1] KM Sorptive and hydrophilic Koc TZL C13H11Cl2F4N3O 3.2. Métaux Contrairement aux molécules organiques, la quantification des métaux se fait après digestion des sols. Une préparation préalable des sols est nécessaire et consiste en leur séchage à l’étuve à 60 °C puis broyage et tamisage à 100 μm La digestion de la matrice solide des sols est réalisée sous hotte à flux laminaire en salle blanche (classe ISO 6) dont l’air est filtré grâce à une batterie de filtres (Campfil 14743700, G4 ; 13687200, F7 et 3484.10.40, H14, USA). 79 Environ 100 mg d’échantillons de sol sec sont introduits dans des récipients en Téflon, Savilex préalablement lavés avec des bains successifs de 1:5 HCl concentré : eau ultra-pure (1 x 24 h) et d’eau ultra-pure (2 x 24 h). 1 mL d’acide nitrique distillé HNO3 (15N) et 3 mL d’acide fluorhydrique HF (X N) supra-pur sont ajoutés dans ces récipients. Ces mélanges sont mis dans un bain à ultrasons pendant 15 min avant d’être placés sur plaque chauffante à 100 °C pendant 12 h afin de digérer la matrice silicatée des sols. Puis 1 mL d’acide perchlorique distillé est introduit dans les échantillons avant évaporation des acides HNO3 et HF à 70 °C pendant 24 h. Pour digérer la matière organique présente dans les sols, les échantillons sont chauffés à 120 °C pendant 3 h puis à 150 °C pendant 48 h. Pour finir la digestion, 1 mL d’acide borique H3BO3 et 4 mL d’acide chlorhydrique HCl à 3 M sont introduits dans les échantillons. Ces mélanges sont chauffés à 100 °C pendant 5 h. Après vérification visuelle de l’absence de particules solides dans les solutions obtenues, les échantillons sont évaporés à 120 °C pendant 4 h puis 150 °C le temps nécessaire (environ 12 h). Ensuite 5 mL d’acide chlorhydrique à 7 M sont introduits sur les résidus secs pour les solubiliser. Les échantillons sont alors mis dans un bain à ultrasons pendant 30 min puis mis sur plaque chauffante à 70 °C pendant 12 h. Le temps global de l’étape de minéralisation des sols est de 5 jours. Les éléments majeurs et traces dont les métaux présents dans ces échantillons sont quantifiés par ICP-AES (ICAP6500, Thermo Fisher Scientific) après dilution de 100 μL de ces échantillons dans 10 mL d’acide nitrique HNO3 à 0.5 M. Pour contrôler la procédure de digestion, les standards de roches BCR-2 (US Geological Survey, Reston, VA, USA) et SCL-7003 (Analytika, Prague, Czech Republic) sont digérés en même temps que les échantillons (Babcsányi et al., 2014). Une incertitude analytique de ± 5 % est obtenue comprenant la précision et la reproductibilité. Les limites de détection pour le Cu et le Zn sont quant à elles de respectivement 3 et 1 μg.L-1. 4. Spéciation physique (classes granulométriques) Les contaminants dont les pesticides et les métaux sont exportés sous forme dissoute et particulaire dans les eaux de ruissellement. Ces eaux transportent des particules de différentes classes granulométriques (sables, > 50 μm ; limons, 2-50 μm ; et argiles, < 2 μm) suite à l’érosion des sols au cours des évènements pluvieux (Martınez-Casasnovas et al., 2002; Mohamadi and Kavian, 2015). Or les pesticides et métaux présentent des affinités différentes avec les minéraux constituant les sables, limons et argiles (Clausen et al., 2001; Cornejo et al., 80 2008; Ðurovi et al., 2009; Ma and Uren, 1998; Pokrovsky et al., 2008; Remucal and GinderVogel, 2014). Pour ces raisons, il semble important de séparer les fractions granulométriques des sols et d’en étudier les proportions de pesticides et métaux. Pour ce faire, plusieurs protocoles ont été développés comprenant des étapes de tamisage, sédimentation à l’aide de la loi de Stokes (méthode de la pipette) (Buchan et al., 1993). De plus, le recours à la sonification est couramment utilisé pour aider à la séparation des classes granulométriques (Genrich and Bremner, 1974). Cependant, cette technique est source de dommages physiques et chimiques suivant l’énergie appliquée au cours de la procédure (Kaiser and Asefaw Berhe, 2014). Dans le cadre de cette thèse, les fractions sableuses (> 50 μm), limoneuses (de 2 à 50 μm) et argileuses (< 2 μm) contenues dans nos sols ont été séparés d’après le protocole de Wang and Keller (2008). La Figure 2-8 résume ce protocole. Figure 2-8 : Protocole suivi pour séparer les fractions granulométriques des sols agricoles étudiés, d’après Wang and Keller (2008) Brièvement, une suspension de 100 g de sol et 500 mL d’eau ultra-pure a été agitée à 60 rpm durant 24 h. La fraction sableuse a alors été isolée en tamisant cette suspension à 53 μm. Les fractions limoneuses et argileuses ont alors été séparées à l’aide de sédimentations répétées dont la durée a été calcul ée avec la loi de Stokes. La suspension restante eau-limons-argiles est introduite dans des bouteilles Nalgène. Après centrifugation de ce mélange, l’eau surnage ante contenant les argiles est mise de côté et de l’eau ultra-pure est introduite dans la bouteille Nalgène. Le culot est remis en suspension après agitation et une nouvelle centrifugation est réalisée pour sédimenter les limons. Cette opération est répété e jusqu ’à l’obtention d’un surna geant clair. Pour finir la fraction argileuse en suspension dans les eaux surnageantes mises de côté ont également été sédimentées. Les fractions sableuses, limoneuses et argileuses ont 81 alors été conservées au congélateur (-4 °C) avant d’en extraire les pesticides et mettre en solution les métaux en vue de quantifier ces polluants . La durée totale de la séparation granulo métrique d ’ une série de 4 sols est de 5 jours. 5. Spéciation chimique La spéciation chimique du Cu et du Zn a également été déterminée. Le partage des éléments majeurs et traces dans les fractions chimiques des sols est étudié depuis plus de quarante ans, notamment sur la base du protocole établi par Tessier et al. (1979). Ce protocole s’intéresse à cinq fractions : i) échangeable, ii) acido-soluble, iii) réductible, iv) oxydable et v) résiduelle. Ce protocole reste majoritairement utilisé même si au cours des années, un grand nombre de protocole de séparation chimique séquentielle ont été développé. Parmi ces protocoles, celui du Bureau Communautaire des Références (BCR) (Ure et al., 1992) est également largement utilisé. Ce protocole comporte un nombre de fractions chimiques restreint : i) fractions échangeable et acido-soluble confondues, ii) fractions réductible et oxydable confondues et iii) résiduelle. Récemment, Rao et al. (2008) ont proposé une synthèse des différents protocoles existant. D’après ces travaux, un protocole a été développé permettant de déterminer la spéciation chimique des métaux associés à huit fractions chimiques: i) facilement échangeable, ii) moins échangeable, iii) acido-soluble, iv) réductible-Mn (associée aux oxydes de manganèse), v) réductible-Fe amorphes (associée aux oxydes de Fe amorphes), vi) réductible-Fe cristallisés (associée aux oxydes de Fe cristallisés), vii) oxydable (associés à la matière organiques) et enfin viii) résiduels. Brièvement, environ 1 g de sol est mis en contact avec 25 mL de différentes solutions d’extraction suivant la fraction chimique à extraire. Une solution de chlorure de baryum BaCl2 est utilisée pour extraire les éléments facilement échangeables. Pour l’extraction des éléments moins échangeable et acido-soluble, des solutions de nitrate de plomb PbNO3 et d’acétate de sodium CH3COONa (en présence d’acide acétique pour obtenir un pH de 5) respectivement sont utilisées. Les fractions réductibles ont été extraites à l’aide de chlorure d’hydroxylamine NH2OH·HCl (oxyde de Mn), d’oxalate H2C2O4 (oxyde de Fe amorphe) et d’oxalate d’ammonium (NH4)2C2O4 (en présence d’oxalate, oxyde de Fe cristallisé). Une solution de 82 pyrophosphate de sodium Na4P2O7 a servi à l’extraction des éléments associés à la matière organique. Des temps d’agitation compris entre 30 min et 24 h ont été appliqués après l’ajout des solutions d’extraction suivant les fractions à extraire. Les extractions des fractions associées aux oxydes de Fe amorphes et cristallisés ont été conduites respectivement à l’obscurité et sous rayons ultraviolets (UV). Chaque extraction a été suivi d’une centrifugation à 5000 rpm pendant 30 min afin de sédimenter les sols étudiés et récupérer la solution d’extraction et les éléments extraits. L’ensemble de ce protocole est résumé en Table 2-7. Entre chaque étape d’extraction, les échantillons de sol ont subi 5 min d’agitation avec de l’eau ultra-pure. Pour finir, la fraction résiduelle a été dissoute en y ajoutant i) 10 mL de HNO3 distillé et chauffant 200 °C pendant 24 h sur plaque chauffante et ii) 10 mL de HCl distillé et 10 mL de HF supra-pur. Les échantillons ont alors été portés à 100 °C pendant 24 h. Après une évaporation des acides à 120 °C, les échantillons ont été solubilisés dans 5 mL de HCl 7 M grâce à un bain à ultrasons pendant 5 minutes et un chauffage sur plaque pendant 12 h. 83 Table 2-7: Protocole d’extraction chimique séquentielle Fraction chimique Solution d’extraction Concentration Temps d’extraction Facilement échangeable BaCl2 0,1 M 2h Moins échangeable PbNO3 0,05 M 16 h Acido-soluble CH3COONa (et CH3COOH, pH 5) 1M 6h Réductible-Mn (associé aux oxydes de Mn) NH2OH·HCl 0,01 M 30 min Réductible-Fe amorphe (associé aux oxydes de Fe amorphes) H2C2O4 0,1 M 4 h, à l’obscurité Réductible-Fe cristallisé (associé aux oxydes de Fe cristallisés) (NH4)2C2O4 (et H2C2O4) 0,175 M (0,1 M) 3 h, sous UV Oxydable (associé à la matière organique) Na4P2O7 0,1 M 24 h Résiduelle HNO3, HCl / HF 16 M, 12 M / 29 M 24 h, 24h 6. Analyse isotopique par composé spécifique (CSIA) appliquée aux sols L’utilisation du fractionnement isotopique dans l’étude de la biodégradation de composés organiques est basée sur le fait que, parmi les processus participant à la dissipation de ces composés, certains processus n’affectent pas les ratios entre isotopes stables (e.g. volatilisation, sorption, transport). A l’inverse, certains processus tels que la biodégradation et les réactions chimiques abiotiques s’accompagnent d’un fractionnement isotopique. Les variations en isotopes stables sont généralement notées et exprimées en pour mille relatif à un standard international de référence de composition isotopique connue (e.g. Standard 84 Vienna-Pee-Dee Belemnite (PDB) pour le carbone) selon l’équation suivante (Eq. 2-1), pour l’analyse des isotopes stables 12C et 13C : é (2-1) é où Réch. et Rstandard représentent respectivement les ratios 13C/ 12C de l’échantillon mesuré et du standard. Ainsi, des valeurs de positives représentent un enrichissement en 13C par rapport au standard, tandis que des valeurs négatives représentent un appauvrissement en 13C. La mesure du rapport isotopique (R) du carbone (C) (cette mesure peut également être faite pour les éléments C, H, O, N, ou encore S) est réalisée par chromatographie en phase gazeuse couplée à un module de combustion et à un spectromètre de masse à rapport d’isotopes stables (GC-C-IRMS). Dans ce système séquentiel, les molécules sont vaporisées et poussées par un flux d’hélium dans une colonne chromatographique. Puis les constituants de l’échantillon sont séparés par chromatographie en phase gazeuse (GC). Les molécules séparées entrent alors dans un four de combustion (C) et subissent une phase d’oxydation/réduction au cours de laquelle les composés sont transformés en CO2, H2O et NOx. Après diverses phases de piégeage en fonction des analyses souhaitées, les flux résultants en CO2, H2O et/ou NOx sont ensuite introduits dans la source d’ionisation du spectromètre de masse (IRMS). Enfin, les flux résultants sont envoyés sur un système classique de spectrométrie de masse séparant les composés en fonction du ratio masse/charge un champ électromagnétique perpendiculaire au flux d'ions, pour la détermination des rapports isotopiques (13C/12C) individuels (Figure 29). 85 Figure 2-9 : Principe (A) et instrumentation (B) d’une chromatographie en phase gazeuse couplée à un module de combustion et à un spectromètre de masse à rapport d’isotopes stables (GC - C - IRMS) (Elsner et al. , 2012) 86 Les isotopes « lourds » (13C, 15N, deutérium) présentent des liaisons plus fortes que les isotopes légers du même élément, et présentent ainsi une plus haute énergie d’activation (Elsner et al., 2005). Au cours du clivage d’une liaison, les isotopes les plus légers sont donc plus facilement mobilisés et ainsi les liaisons entre atomes légers seront plus rapidement dissociées, induisant un enrichissement en isotopes lourds dans la fraction de composé de départ. Cet enrichissement isotopique donne lieu un facteur d’enrichissement isotopique ( ) dépendant de la réaction, plus souvent exprimé sous la forme bulk selon l’équation (Eq. 2-2): (2-2) L’enrichissement isotopique s’exprime à l’aide de l’équation de Rayleigh (Eq. 2-3) : " où 13!! # $ " % C désigne la composition isotopique 13C/12C du composé restant, (2-3) 13 C désigne le rapport isotopique initial, Cx/Cin désigne le ratio entre la concentration de substrat au début (Cx) et à la fin (Cin) de la réaction, et bulk représente le facteur d’enrichissement isotopique. A l’aide de l’équation de Rayleigh, des facteurs d’enrichissement isotopiques ( ) peuvent être obtenus lors d’études en laboratoire pour différents composés et réactions de dégradation catalysées par différentes souches microbiennes (Fletcher et al., 2011). Ils reflètent les variations de concentration observées pendant la dégradation d’un composé par rapport aux changements de la composition isotopique de ce composé. Ces facteurs peuvent être utilisés pour quantifier le degré de biodégradation d’un composé in situ à condition de connaître les facteurs d’enrichissement appropriés aux réactions de biodégradation de ce composé s’établissant sur site (Braeckevelt et al., 2012; Meckenstock et al., 2004; Richnow et al., 2003). Afin d’aider à l’évaluation des sources de polluants mais aussi des voies de dégradation que subissent les pesticides dans l’environnement, il est possible de mesurer les rapports isotopiques de deux éléments à la fois. Cette technique, l’analyse isotopique par composé spécifique en deux dimensions (2D-CSIA) donne plus d’information que le CSIA en une dimension. L’utilisation du 2D-CSIA a notamment permis à Rosell et al. (2012) de déconvoluer les différentes voies de dégradation possible pour le méthyl tert-butyl éther (MTBE) (Figure 210) et l’impact de différentes cultures bactériennes sur ces dégradations. 87 Figure 2-10: Apport du 2D-CSIA dans la compréhension des mécanismes de dégradation du MTBE (Rosell et al., 2012) Il est également possible de déterminer l’ effet cinétique isotopique apparent (AKIE en anglais) à partir de l’ enrichissement isotopique bulk . Cette conversion permet de comparer les fractionnements isotopiques du C avec ceux report és dans la littérature . L’ équation suivante ( Eq . 2-4) utilisée pour calculer les AKIE (Elsner et al., 2005). &'()* + *!,. /0123 (2-4) 444 où n est le nombre d’atome d’un élément donné, x est le nombre de réactions réactives non distinguables, et z est le nombre de positions en compétition au sein de la molécule. 88 7. Analyse isotopique des métaux appliquée aux sols 7.1. Purification du Cu et du Zn Des protocoles de double purification du Cu et du Zn adaptés respectivement des travaux de Marechal et al. (1999) pour le Cu (Babcsányi et al., 2014) et Moynier et al. (2006) pour le Zn ont été appliqués. La Table 2-8 présente les protocoles de purification du Cu et du Zn, qui doit atteindre 100% pour effectuer une analyse isotopique, sous peine d’un fractionnement isotopique lié à la procédure. Des colonnes en polypropylène (PP) (Poly-prep chromatography columns, BioRad) sont remplies des résines échangeuses d’anions AGMP1 (100–200 mesh, chloride form, BioRad) pour isoler le Cu des échantillons et AG1X8 (100–200 mesh, chloride form, BioRad) pour la purification du Zn. Les volumes de résines à introduire varient selon la matrice (sol, eau) mais aussi le nombre de purifications (Table 2-8). La purification des éléments étudiés est réalisée en cinq étapes : i) lavage de la résine, ii) conditionnement de la résine, iii) chargement de l’échantillon, iv) élution de la matrice, et pour finir v) élution du Cu ou du Zn. Le lavage de la résine se fait à l’aide de HNO3 0,5 M et d’eau ultra-pure uniquement dans le cas du Zn, alors que l’utilisation de HCl 7M est également nécessaire pour laver la résine AGMP1 pour la purification du Cu. Les résines sont alors conditionnées avec les acides de reprise des échantillons à purifier après leur digestion. Les échantillons sont ensuite chargés sur les colonnes de résine avant l’élution de la matrice. Enfin, l’élution du Cu et du Zn est réalisée. Chaque purification de Cu est suivie par une étape de minéralisation avec 1 mL de HNO3 distillé de la matière organique éluée au cours de la procédure suite à l’utilisation de la résine AGMP1. Les échantillons et standards purifiés sont mis en solution dans le volume d’acide nitrique dilué (0,5 M HNO3) nécessaire pour atteindre des concentrations de Cu et Zn respectivement de 100 et 200 μg.L-1. 89 Table 2-8 : Protocole de purification du Cu et du Zn présents dans des échantillons d’eau et de sol Element to purify Sample Resin type 3 mL 2 mL 3×7 mL HNO3 0.5 M alternating with 7 mL H2O, 7 mL HCl 7 M, 7 mL H2O 8 mL HCl 7 M + H2O2 0.01 % 1 mL HCl 7 M + H2O2 0.01 % 8 mL HCl 7 26 mL HCl 7 M + H2O2 M + H2O2 0.01 % 0.01 % 3×7 mL HNO3 0.5 M alternating with 7 mL AGMP1 1.6 mL H2O, 7 mL HCl 7 M, 7 mL H2O 6 mL HCl 7 M + H2O2 0.01 % 1 mL HCl 7 M + H2O2 0.01 % 4 mL HCl 7 26.5 mL HCl M + H2O2 7 M + H2O2 0.01 % 0.01 % Cu Solid (2nd AGMP1 purification) Zn Solid, water (x 2) Conditioning Sample load Target element elution 6 mL HCl 7 45 mL HCl 7 M + H2O2 M + H2O2 0.01 % 0.01 % Cu Water (x 2) Resin wash Matric elution 3×8 mL HNO3 0.5 M 10 mL HCl 7 1 mL HCl 7 alternating with 8 mL M + H2O2 M + H2O2 H2O, 8 mL HCl 7 M, 0.01 % 0.01 % 8 mL H2O Solid (1st AGMP1 purification) Cu Resin volume AG1X8 1 mL 3×5 mL HNO3 0.5 M 3 mL HBr 1.5 alternating with 5 mL M H2O 1mL HBr 1.5 M 5 mL HBr 1.5 M 5 mL HNO3 0.5 M 90 7.2. Analyse des isotopes du Cu et du Zn Les analyses isotopiques du Cu (65Cu/63Cu) est du Zn (66Zn/64Zn) ont été rendues possibles grâce au développement du spectromètre de masse à source à plasma et à multicollection Finnigan-Nept MC-ICP-MS (Thermo Scientific, Waltham, MA, USA) (Figure 211). Le MC-ICP-MS est un appareil composé d’un plasma à haute température comme source d’ions, d’un analyseur de masse et d’une unité de détection. Après une phase d’ionisation, les ions quittent la source puis sont focalisés et accélérés sous une différence de potentiel. Ensuite, un aimant sépare les ions suivant leur rapport masse sur charge (m/z). L’unité de détection (cages de Faradays) est un ensemble de collecteurs capable de mesurer les faisceaux d’ions de plusieurs isotopes à la fois. Cette unité de détection permet d’atteindre une précision de ± 0.001 % (Weiss et al., 2008). Les rapports des isotopes du Cu et du Zn sont mesurés au MC-ICP-MS en mode plasma sec et humide. Des standards de Ni (NIST SRM 986) et de Cu (NIST SRM 976) sont utilisés respectivement pour les mesures des isotopes du Cu et du Zn. La correction du biais de masse de l’appareil est corrigé à l’aide des standards de Cu (NIST SRM 976) et de Zn (IRMM 3702) comme précédemment décrit par Li et al. (2009). Une mesure des rapports des isotopes du Cu consiste en 40 cycles de 8 s d’intégration. Pour le Zn, 30 cycles de 8 s sont nécessaires. L’incertitude analytique pour l’ensemble de la procédure (digestion, purification et analyse isotopique) est valeurs de ( 65 66 0.05 ‰ (2, n=15) pour les valeurs de 65 Cu et 0.09 ‰ (2, n=15) pour les Zn. Ces incertitudes sont déterminées à l’aide du standard géologique CRM-7003 Cu = 0.18 ± 0.05 ‰, and 66 Zn = -0.25 ± 0.09 ‰; incluant 3 échantillons digérés séparément et 15 mesures isotopiques). A l’instar des pesticides, les variations en isotopes stables des métaux sont également notées et exprimées en pour mille relatif à un standard international de référence de composition isotopique connue (i.e. NIST 986 Ni pour le Cu ou NIST 976 Cu pour le Zn) selon l’équation suivante (Eq. 2-5), pour l’analyse isotopique du Cu : 56 7é é (2-5) 91 où Réch. et Rstandard représentent respectivement (dans le cas du Cu) les ratios 65Cu/ 63Cu de l’échantillon mesuré et du standard. Ainsi, des valeurs de positives représentent un enrichissement en 65Cu par rapport au standard, tandis que des valeurs négatives représentent un appauvrissement en 65Cu. Figure 2-11 : Composition d’un spectromètre de masse à source à plasma et à multi-collection (Goldstein and Stirling, 2003) Ainsi, l’étude du rapport des isotopes stables du Cu et du Zn peut être adaptée au suivi du cycle de ces éléments à l’échelle des agrosystèmes et des zones tampons humides afin de mieux comprendre les mécanismes qui contrôlent sa séquestration / mobilisation et son transport. Le fractionnement des isotopes du Cu a été observé au cours de plusieurs processus au sein des organismes, des sols, des milieux aquatiques mais aussi des sédiments. L’adsorption du Cu sur les minéraux, sa complexation avec la matière organique, les réactions oxydoréduction, sa précipitation et son prélèvement par la végétation ou les microorganismes induisent des différences de valeurs isotopiques (Figure 2-12). En effet, diverses études 92 montrent que la réduction/oxydation du Cu produit un fractionnement distinct. Pokrovsky et al., (2008) ont étudié l’impact de la sorption du Cu sur des hydroxydes de fer et ont mesuré des enrichissements isotopiques du Cu ( 65 Cu(solide-solution)) de l’ordre de 1,0 ± 0,25 ‰ (gibbsite) et 0,78 ± 0,2 ‰ (goethite). Une étude conduite par (Babcsányi et al., 2014) montre que le Cu dissous est appauvri en isotope lourd (65Cu) suite à son adsorption sur des hydroxydes d’aluminium (et de fer) et de la matière organique présents dans le sédiment d’un bassin d’orage. Les argiles et la matière organique produisent un fractionnement significatif, de même que la transformation biotique du cuivre (passage par des racines, translocation dans les plantes). Enfin, au cours d’une expérience de sorption et d’incorporation du Cu faite avec différentes bactéries, (Navarrete et al., 2011) ont obtenu un fractionnement isotopique du Cu ( 65 Cu(solution-solide)) allant de 0,2 à 2,6 ‰. Figure 2-12 : Fractionnements isotopiques rencontrés pour le Cu au cours de différents processus 93 8. 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31,375
1996LIL12007_4
French-Science-Pile
Open Science
Various open science
1,996
Les configurations de contrôle au sein des réseaux interorganisationnels : une recherche exploratoire
None
French
Spoken
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AKERLOF (1970) a appliqué ce problème au marché des voitures d'occasion, dans lequel il se vend des voitures de bonne qualité et des voitures de mauvaise qualité, des lemons,,. La sélection adverse provient de I'incapacité du client (le principal) à distinguer un bon modèle d'un <( lemon,>.Dès lors, rien n'empêche un vendeur (I'agent) peu scrupuleux de vendre ces deux types de voitures au même prix. L'incertitude sur la qualité du bien provoque la sélection adverse. Tous les acteurs sont finalement lésés : les acheteurs qui ont acheté un (< lemon >>, les vendeurs malhonnêtes qui ne pourront pas réitérer la vente et les vendeurs honnêtes qui subissent l'image négative du marché de la voiture d'occasion. Le volume des échanges s'en trouve limité. II appartient au marché d'émettre des signaux visant à rétablir la confiance, qualifiés ci-dessus de coûts d'obligation (garanties sur les modèles, labels de qualité...). D'une manière générale, ce phénomène s'étend à toutes les situations où le principal n'est pas à même de vérifier la qualité de l'agent (HIRSHLEIFER & RILEY, 1979). Ainsi, un fournisseur qui procure un produit de qualité supérieure à ceux qui existent sur le marché, faute d'émettre les bons signaux, ne sera pas davantage sollicité par des clients. En raison de ses coûts supérieurs dus à son niveau de qualité, il sera amené à terme à disparaître du marché. Cette incapacité à vérifier les caractéristiques de I'agent peut se poursuivre après signature du contrat (EISENHARDT, 1989a) - c LERISQUE MORAL (OU MORAL HAZARD) La notion de risque moral fait référence aux formes d'opportunisme ex-post : le comportement de I'agent change après signature du contrat. Son apparition est due au fait que les actions des agents ne sont pas directement contrôlables. Ceux-ci, les entrepreneurs, peuvent choisir de privilégier leur intérêt propre53.Le deuxième élément générant le risque moral provient de l'impossibilité d'établir des contrats capables d'intégrer toutes les éventualités endogènes et exogènes à la relation. Les problèmes de risque moral interviennent donc dans toute situation où un acteur est tenté d'agir de façon inefficace tout en laissant croire qu'il a mené une autre action, en raison d'une part, de la divergence d'intérêts qu'il a par rapport au principal et d'autre part, du caractère non vérifiable de son comportement. Dans toutes les circonstances de risque moral, l'individu qui prend la décision n'en supporte pas Le terme de risque moral est issu des problèmes d'assurance et traduit le fait que les personnes assurées ont tendance à prendre davantage de risque (à changer de comportement) une fois leur contrat signé, au grand dam et au détriment des compagnies d'assurance. Pour l'assureur, il est en effet difficile de contrôler le comportement des assurés. 53 pleinement les conséquences. Deux éléments complémentaires sont à prendre en compte : la divergence des intérêts des acteurs ; l'indépendance entre la prise de décision et la responsabilité finale. MILGROM & ROBERTS (1992, pp. 170-176) présentent, là encore, un exemple intéressant : le cas des institut de dépôts américains, réel, qui permet de comprendre l'ampleur du problème du risque moral. La situation décrite est celle des Savings and Loans Associations (S&L). Ces instituts sont garantis par la Federal Savings and Loans Insurance Corporation (FSLIC). Durant les années 80, les S&L ont investi l'argent des particuliers dans des actifs risqués dont la valeur a chuté. La plupart des instituts de dépôts ont fait faillite, la FSLIC n'ayant pas de réserves suffisantes pour les couvrir. Les épargnants ont donc supporté les pertes. Une analyse simple explique le problème : Soient A et B deux possibilités d'investissement, A étant un investissement sûr de c( père de famille )> et B étant un actif risqué : PARTICULIERS S& L FSUC TOTAL INVESTISSEMENT 97 3 O 100 1 RETOUR 97 28 O 125 RETOUR2 97 -3 -32 65 ESPERANCE NE-I-~E O 11 -16 -5 Dans cette situation, où les S&L ne sont pas entièrement responsables des pertes, les S&L ont intérêt à jouer un jeu risqué au détriment de la FSLIC. Plus l'investissement est risqué, plus I'espérance de gain pour les S&L augmente, tandis qu'en même temps I'espérance de perte pour la FSLlC s'accroît. Cette situation est bien connue dans les études de finance d'entreprise et correspond aux situations où les sociétés en difficultés sont financées par de la dette. Les managers cherchent alors à augmenter les risques, diminuant la valeur de la dette mais augmentant la valeur du capital. L'exemple des S&L cependant est particulièrement riche et intéressant puisqu'il met en jeu trois groupes distincts, faisant eux-mêmes partie d'un réseau d'au moins quatre groupes d'acteurs : - les Savings and Loans, qui ont pris des risques excessifs et ont dissimulé les conséquences probables de leur politique d'investissement. - les particuliers, qui n'ont pas ontrôlé les investissements réalisés avec leur argent parce que les dépôts étaient garantis par la FSLIC. - le gouvernement, qui a favorisé l'industrie (à qui bénéficie ces investissements risqués) au détriment des particuliers. Dans ce cas précis, les problèmes de risque moral ont finalement conduit à la faillite du réseau, laissant les particuliers en supporter la majeure partie des conséquences. Les questions de risque moral mettent donc en avant l'importance du contrôle de la relation. Dans l'optique de la Théorie de l'Agence, la politique de partage des risques, négociée au moment de la rédaction des contrats, devient une dimension essentielle. - d LE PARTAGE DU RISQUE Une réponse possible au problème de risque moral est de rendre I'agent responsable des effets de ses décisions. L'impact de ces effets sur le revenu final de I'agent doit contribuer à augmenter sa motivation. L'objectif général de l'étude des relations d'agence est donc d'augmenter la motivation de I'agent afin de réduire le risque moral. Rendre I'agent responsable de ses performances revient à l'exposer à un double risque : le caractère non observable du comportement de I'agent conduit à évaluer ce dernier par les résultats de ses actions. Le résultat (comme son comportement) peut être influencé par des variables qu'il ne peut maîtriseP4. Le comportement, comme les résultats, devient aléatoire ; - l'évaluation des performances de I'agent par le principal présente nécessairement un certain degré de subjectivité. L'hypothèse comportementale qui régit l'intégration du risque dans l'approche normative est similaire à celle développée par BERNOUlLLl (trad. 1954) selon laquelle les individus ont une aversion vis-à-vis du risque. Les agents sont supposés être adverses au risque et préfèrent recevoir un revenu R de façon certaine, à un revenu aléatoire ayant une espérance égale à R. Les agents sont alors prêts à payer une prime de risque pour abandonner un revenu aléatoire au profit d'un équivalent certain, L'exemple type est l'impact de la météo sur les ventes de glaces. déterminé en soustrayant la prime de risque à I'espérance de revenus. L'individu considère la valeur du revenu certain comme équivalente au revenu initial aléatoire. Une augmentation du risque a donc un coût pour I'agent. L'objectif principal de la théorie normative est donc de déterminer le meilleur compromis qui apporte le maximum de motivation sans que le risque soit intolérable pour I'agent : les contrats étudiés par le modèle Principal-Agent cherchent ainsi à maximiser l'équivalent certain des partenaires et non I'espérance de gain. Lorsque la notion d'équivalent certain est prise en compte, le problème du risque est en effet automatiquement intégré. Ce même modèle suppose que le principal, sans être absolument neutre, est moins hostile vis-à-vis du risque que I'agent. La prime de risque du principal est donc moins élevée que celle de I'agent. L'essentiel du risque devrait être supporté par le principal, au détriment de l'équivalent certain de I'agent, minimisé par l'augmentation de la prime de risque. III - LA RATIONALITE LIMITEE ET L'INCOMPLETUDE DES CONTRATS La Théorie de l'Agence repos sur une autre hypothèse comportementale : celle de la rationalité limitée des acteurs. (< Les limites de la rationalité sont li ées au manque d'informations et de connaissances, à la difficult é de prévoir et d'é valuer les con sé quences des choi x envisagés et aux problèmes liés à l'existence d'une pluralité d'objectifs,, (KOENIG, 1990, p. 390) Elle stipule que l'individu est incapable de traiter de manière parfaite toutes les informations qui l'entourent. L'environnement de celui-ci est trop incertain et l'obtention d'information trop coûteuse. II cherche en conséquence à être rationnel mais doit être conscient de certaines limites : les circonstances imprévues, voire impossibles à prévoir, y compris dans le cas d'une information parfaite ; - les coûts de mise en place des plans d'action : supposer que les informations soient intégralement connues n'exclut pas les erreurs d'analyse ; les imprécisions de langage : même si l'individu pouvait pressentir correctement l'environnement et les actions nécessaires, il ne parviendrait pas obligatoirement à les retranscrire correctement dans un contrat ; les problèmes liés à l'interprétation multiple d'un même contrat. II en résulte un modèle de décision qui intègre la rationalité limitée, décrit par LINDBLOM (1959) comme un processus d'évasion (muddling through). Les individus sont obligatoirement confrontés à la rationalité limitée. Devant un problème, ils recherchent des solutions jusqu'à ce qu'ils en trouvent une acceptable et s'en déclarent << satisfaits >>. Les solutions optimales sont donc remplacées par des solutions simplement satisfaisantes. Néanmoins, les individus apparaissent toujours confrontés à des objectifs divergents. Ces objectifs sont alors pris en compte un à un, de manière séquentielle, pour éviter les problèmes de choix et de compromis. SIMON (1976) distingue la rationalité procédurale de la rationalité substantielle. La rationalité substantielle <( conduit les agents à faire individuellement des choix qui les conduisent collectivement à réaliser un optimum social. La rationalité procédurale, à l'inverse, ne garantit pas le résultat. Elle postule simplement que les agents vont mettre en oeuvre des stratégies pour parvenir à des situations qui leur paraissent préférables,>. (BROUSSEAU, 1993, p. 63). L'atteinte des buts, malgré la volonté de l'agent et les moyens qu'il met en oeuvre, n'est pas garantie, ni « la concrétisation d'une optimalité sociale >>. La rationalité limitée conduit à l'incomplétude des contrats : écrire des contrats complets et précis n'est pas toujours possible. Les contingences peuvent être connues, mais trop nombreuses pour être consignées. D'autre part, certaines actions des contractants sont invérifiables, même ex-post. L'incomplétude du contrat peut impliquer un engagement incomplet des acteurs et facilite les comportements opportunistes. IV - LE CONTRAT En Théorie de l'Agence, nous l'avons dit, l'unité d'analyse est le contrat. Le contrat doit gouverner la relation Principal-Agent le plus efficacement possible compte tenu de trois éléments : comportementaux : la rationalité limitée et l'aversion au risque ; organisationnels : la divergence des buts que le principal doit gérer par la mise en place de systèmes d'information ; - informationnels : l'acquisition d'information conduit à l'adoption d'un système de contrôle permettant d'atténuer I'opportunisme. Deux types de contrats sont utilisables : le contrat << comportemental >> (Behavior- based contract) dans lequel la rémunération de I'agent est liée à son comport ement et le contrat << résultat >> (Outcorne-based contract) dans lequel cette rémunération repose sur l'obtention des résultats fixés. Le contrat comportemental s'exprime par la relation de travail (salaires, règles hiérarchiques), le contrat-résultat obéit à des règles de marché (commission, transfert de droits de propriétés). Peu importe, pour ce dernier, la façon dont I'agent parvient au résultat fixé. Le courant positiviste de la Théorie de l'Agence repose sur deux propositions quant aux mécanismes de gouvernement des relations Principal-Agent (EISENHARD, 1989a) : - le contrat-résultat atténue I'o~~ortunisme. Un tel contrat aligne les préférences de I'agent sur celles du principal car la rémunération dépend de l'action commune. Les conflits dus à I'opportunisme sont réduits (JENSEN & MECKLING, 1976) ; les systèmes d'information atténuent I'op~ortunisme.L'agent est d'autant plus à même de ne pas (< décevoir )) le principal que ce dernier peut observer le comportement du premier. Plusieurs paramètres sont ensuite relevés par EISENHARDT et permettent de sélectionner le type de contrat le plus efficient en fonction du contexte. On peut les résumer comme suit : TYPEM CONTRAT LE PLUS EFFICIENT : Comportemental Résultats Incertitude sur le résultat forte faible Aversion au risque (agent) forte faible Aversion au risque (principal) faible forte Conflits d'objectifs entre principal et agent faible forts fort faible faible fort longue courte développés limités CRITERESDE CONTINGENCE LIES AU CHOIX DU CONTRAT Caractère programmable de la tâche Caractère mesurable du résultat Durée de la relation Systèmes d'information de contrôle Tableau 16. Les choi x contractuels, d'après EISENHARDT (1989a) et DELMOND (1994, p. 169). Lorsque le comportement est difficilement observable, deux options s'offrent au principal. Soit il investit dans un système d'information ( , reporting, niveau supplémentaire de management...), soit il motive le comportement de l'agent par coalignement incitatif. Le recours au système d'information implique un contrat comportemental plutôt qu'axé sur les résultats. L'incertitude sur le résultat induit l'incapacité de prévoir et I'assomption du risque par l'un ou l'autre des contractants. En fonction de l'incertitude et du comportement du principal ou de I'agent, sera défini un type de contrat. L'existence ou non de conflits d'intérêts entre les deux conduit au choix entre résultat et comportement : si le conflit d'intérêts décroît, le contrat résultat ne se justifie plus. La << programmabilité )) de la tâche se définit comme le degré auquel le comportement approprié de I'agent peut être spécifié à l'avance ; plus la tâche est programmable, plus le contrat est comportemental car l'information sur le comportement est connue. Certaines tâches nécessitent du temps pour que le résultat soit connu. Selon cet aspect des choses, le résultat est soit difficile à mesurer dans l'absolu, soit difficile à mesurer pendant le laps de temps en question. Ainsi, plus le résultat est difficile à mesurer, plus le contrat sera comportemental. Une relation de long terme implique que le principal apprenne de I'agent : la maîtrise du comportement s'en ressent. A court terme, l'asymétrie informationnelle entre le principal et I'agent est plus importante. L'apprentissage est un moyen de la combattre. Une relation de long terme implique un contrat fondé sur le pilotage du comportement, et inversementune relation de court terme implique un contrat résultat. B . LE MODELE DE M. AOKl Certains auteurs ont supposé que l'opposition entre organisation mécaniste et organique (BURNS & STALKER, 1961, BURNS, 1962) est transposable à la hiérarchie, adaptée aux environnements stables, et à la coopération ou à ses traductions organisationnelles, conçue en réponse à l'incertitude environnementale. La structure mécaniste correspond à ce que WEBER (1921) appelait l'organisation bureaucratique rationnelle légale dans laquelle s'observe une division des tâches par spécialistes. Par contre, le modèle " J " d'AOKI (1986 ; 1990) " ressemble étrangement au modèle organique décrit [...] par BURNS " (PIOTET, 1992, p. 595). Le tableau ci-dessous résume les caractéristiques des structures mécanistes et organiques. STRUCTURE MECANISTE STRUCTURE ORGANIQUE Division du travail par une différenciation spécialisée des tâches fonctionnelles. Nature contributive d'un savoir spécialisé et de l'expérience commune a i'organisation. Contrôle par supervision hiérarchique. Ajustement et redéfinition des tdches individuelles par /'interaction avec les pairs. Structure hiérarchique du contrôle, de l'autorité et des communications. Structure en réseau du contrôle, de /'autorité et de la communication. Renforcement de la structure hiérarchique par la localisation du savoir au sommet de la pyramide. Allocation du savoir à tous les niveaux du réseau. Relation entre supérieur et subordonné par interaction verticale. Relation horizontale développée, consultation entre niveaux hiérarchiques. Orientation des comportements par instructions, loyauté et obéissance. Implication dans la tâche par /'éthique technologique ou scientifique. Tableau 17. Comparaison entre structure mécaniste et organique, d'après BURNS & STALKER, 1962. AOKl distingue en effet deux formes organisationnelles stylisées structurées 112 autour de la circulation de I'information. La forme <( A >, (correspondant à la firme américaine) présente une structure informationnelle verticale, où I'apprentissage est localisé aux niveaux hiérarchiques élevés. La forme (c J >> (pour japonaise) offre, quant à elle, une structure informationnelle horizontale, dans laquelle I'apprentissage est généralisé aux niveaux hiérarchiques inférieurs. La différence entre ces deux formes réside dans la circulation de I'information et dans la prise de décision. Si la forme " A " centralise I'information et exerce un contrôle hiérarchique, la forme " J " se différencie par une coopération horizontale entre fonctions et la gestion de l'incertitude au sommet. L'efficacité de la forme << J >,résulte du partage immédiat des informations et sur l'échange autour des problèmes. Leur résolution est rapide et fondée sur un apprentissage par la pratique. Le modèle coopératif infraorganisationnel J repose sur trois prérequis : une coordination mutuelle des tâches et la capacité des unités à maîtriser leurs tâches opérationnelles et à pouvoir traiter les problèmes éventuels localement et de manière autonome ; - des acteurs qui ne soient pas des spécialistes mais des généralistes familiers des processus de production car pouvant occuper chacun des postes ; - une compétence opératoire qui dépasse l'expertise en intégrant la capacité à communiquer, à travailler en équipe, à prendre des décisions individuellement et collectivement. La firme << J >> est moins intégrée que la firme << A,, : il s'agit d'une forme hybride, combinant les avantages du marché et de la hiérarchie (GAFFARD, 1990) Le modèle permet d'établir et de maintenir des relations de long terme, aussi longtemps que nécessaire, avec des sous-traitants semi-autonomes dans le contrôle de leur production. Un système d'information est mis en place, s'as surant du partage des connaissances techniques. Les unités opérationnelles sont coordonnées directement et non pas par un mécanisme de contrôle centralisé. Derrière cette présentation, il existe des processus dynamiques : le sens de l'évolution de la firme A )> est différent de celui de la firme << J >,.La première traduit un développement conglomérai, la deuxième une diversification de type relié ou partenarial. Le modèle << J >> étendu à la coopération industrielle donne naissance à la coalition de type << J >, (AOKI, 1988). 11 s'agit d'un modèle dans lequel une firme principale et des firmes satellites entretiennent des relations constituant un réseau complexe de soustraitance en cascade. Les rapports entre pivot et sous-traitants de premier ordre sont les mêmes que ceux qui existent entre la firme et les employés des unités opérationnelles. Les développements et les investissements sont spécifiques à I'activité du pivot comme dans les réseaux stables décrits par MILES & alii. (1992). Les acteurs sont dépendants et solidaires les uns des autres. Les partenaires ne sont en effet plus substituables et le niveau de spécificité constitue une barrière à l'entrée d'autres partenaires dans le réseau. La coopération est érigée pour un bénéfice collectif (la quasi-rente relationnelle) et non pour le seul bénéfice du pivot. Une rupture de ces relations partenariales conduit à la perte de l'activité pour les deux parties (dépendance réciproque) ainsi qu'à celle de l'essentiel de l'apprentissage. Le modèle << J >> d'AOKI met donc en évidence une sélection forte des partenaires par un contrôle amont développé, une gestion souple de ceux-ci par le partage d'objectifs communs ainsi qu'une dualité dans le contrôle organisationnel des firmes << J >,. La dualité rencontrée dans le modèle << J >> repose sur trois principes. Le premier, énoncé par AOKI (1991) est fondé sur un mode de coordination non hiérarchique, tandis que les systèmes de stimulation sont gérés selon une logique hiérarchique. Sachant qu'il s'y trouve des informations pertinentes, la hiérarchie délègue les fonctions de coordination au niveau inférieur. c< Les employés savent qu'ils sont jugés sur leurs propres contributions à long terme aux objectifs de l'organisation. Ainsi sont-ils incités à se conformer aux directives managériales sans qu'il soit besoin d'instructions hiérarchiques quotidiennes >> (1991, p. 8). Pour être efficace, la coordination horizontale doit, bien entendu, aider I'organisation à atteindre ses buts. Les décisions du management sont en adaptation permanente avec les informations recueillies sur place, quel que soit le niveau de la hiérarchie fonctionnelle. Les employés peuvent influencer une redéfinition des objectifs. Des liens verticaux sont mis en place, (( réciproques par lesquels les managers tiennent compte des intérêts des employés tandis que ceux-ci, en contrepartie, font des efforts accrus » (p. 10). Les objectifs de I'organisation sont, du fait de l'implication de tous, de véritables objectifs partagés. Le deuxième principe de dualité est celui de la symétrie entre I'organisation interne de la firme (développé ci-dessus) et la nature du contrôle financier externe. Le système de contrôle financier a deux caractéristiques liées : les banques sont les principaux actionnaires des entreprises, elles assurent le rôle de prêteur dominant et confèrent une stabilité actionnariale aux entreprises. L'indépendance relative du management par rapport au contrôle financier externe est observée, lorsque ce premier prend des décisions concernant la société. Les liens informationnels sont très forts entre la banque et le management. Ainsi, afin de garantir les employés, très liés à l'entreprise, contre les risques de défaillance, le système d'information permet de réagir très vite et de réduire les risques de faillite. Dans un tel contexte, (( I'organisation interne et le contrôle financier de la société japonaise sont doublement caractérisés par le rôle limité de la hiérarchie dans les mécanismes de décision et par son rôle accru dans les mécanismes d'incitation (p. 10). )> Le troisième et dernier principe de dualité est celui qui constate le double contrôle qui s'exerce sur le management de la part des détenteurs de capitaux et des employés, alors qu'un contrôle unilatéral des premiers serait plus logiquement rencontré dans une société de type <( A )).Le contrôle ne concerne pas seulement la répartition du profit mais également la prise de décisions qui concernent la firme. Les moyens de réaction au management sont, pour les employés, la menace de mettre fin à leur coopération dans la coordination horizontale. Pour la banque, la menace brandie est l'assujettissement. La répartition des gains de la firme (< celle de J >> entre rémunération du travail et du capital est fonction, outre du rôle de l'action collective syndicale, du sentiment que les employés ont de la loyauté de la hiérarchie. Ceci conduit AOKl à considérer comme - parétienne l'amélioration de la gestion de 11entreprise55, les hommes constitutifs du réseau - étant considérés comme un actif spécifique. (< éléments Lorsque les employés forment un réseau, les arrangements réciproques des employés et de la direction peuvent créer les conditions d'une situation meilleure dans une optique parétienne, c'est-à-dire avantageuse pour toutes les parties prenantes >, (1991, p. 13). Le modèle repose donc sur : I'indépendance relative des employés par rapport à la direction ; I'indépendance relative de la direction par rapport à l'actionnaire-prêteur ; une volonté de contrôle de la part de l'actionnaire et des employés ; la peur du licenciement pour les employés et de la mauvaise réputation pour les managers ; la nécessaire action collective. Le modèle << J >, d'AOKI n'est cependant pas de portée universelle. Si la théorisation de la coopération industrielle est très intéressante pour l'étude du contrôle dans les coopérations, elle ne doit pas être isolée de son contexte. Le modèle est effectivement contingent et semble être adapté aux contextes changeants, aux mouvements fréquents et lents tandis que le modèle << A >,(hiérarchique) serait plus adapté aux environnements stables ou très turbulents. Une amélioration parétienne s est un accroissement du bien-être général sans qu'aucun bienêtre individuel ne soit diminué. 55 (( C . I - L'INDUSTRIE AUTOMOBILE JAPONAISE UN EXEMPLE DE COALITION La coalition de type " J " se rencontre dans l'industrie automobile japonaise, organisée en réseau stable. Le producteur automobile japonais est essentiellement un assembleur qui a recours à un vaste réseau de sous-traitants. II assemble ces activités selon le principe du flux continu (juste à temps). Cette méthode nécessite pour la firme centrale d'avoir de bonnes relations avec ses sous-traitants. ASANUMA (1985) a présenté de façon détaillée l'organisation de cette coalition, s'intéressant notamment à deux aspects contractuels qui régissent le réseau : les mécanismes d'ajustement des quantités et des prix ; les mécanismes d'encouragement de réduction des coûts. Soixante-dix pour cent des frais de construction automobile sont constitués par l'achat de pièces détachées. Trois réseaux de sous-traitants sont associés, qui correspondent à trois activités principales : la fabrication de la carrosserie ; la fabrication du moteur, des axes et de la transmission ; l'assemblage et l'addition au modèle de diverses pièces détachées : composants électriques, pneus vitres, phares... Les pièces sont multiples et nombreuses et leur combinaison produit de nombreux arrangements en fonction de leurs formes et couleurs, qui dépendent de la demande du marché final. La régulation de l'approvisionnement dépend d'une coopération forte entre le constructeur et ses sous-traitants. Cette coopération débute bien avant la contractualisation, dès la conception d'un nouveau modèle d'automobile. Le modèle est conçu selon le principe japonais du prixcible (HIROMOTO, 1988) : les responsables marketing déterminent le prix et les caractéristiques du véhicule. Aux ingénieurs de production d'atteindre ce prix-cible. Pendant cette phase d'étude, le constructeur consulte de nombreux sous-traitants qui préconisent leurs propres solutions ou répondent à un cahier descharges spécifiques. Une fois sélectionné, le sous-traitant a la garantie d'être le fournisseur exclusif des pièces pour lesquelles il a été sélectionné. Le sous-traitant est alors encadré et encouragé par le constructeur. Ces relations sont limitées à l'exploitation du modèle et peuvent être remises en cause lors du modèle suivant. Deux types de contrats régissent la relation : - le contrat de base définit les règles d'ensemble qui doivent être suivies par les deux parties. II s'agit d'une sorte de contrat-cadre ; le contrat individuel détermine les quantités, les dates et lieux de livraison... II est généralement spécifié en cours de production. Ces contrats précisent peu les mécanismes d'ajustement. Le prix de base est celui défini et accepté lors de la phase de conception. La principale négociation a donc lieu pendant la phase d'étude. Le producteur essaie d'examiner le processus de fabrication du sous-traitant afin que conjointement, ils atteignent le prix-cible. Le constructeur ne cherche donc pas à réduire la marge du sous- raitant mais à réduire les coûts de production. Pendant le processus de production, des ajustements peuvent être nécessaires en raison de l'évolution du coût des matières premières et de l'énergie, du besoin de réduction des coûts pour le constructeur, de variations de coût de production consécutifs aux modifications des produits ou à des changements du volume de production. Les deux premiers ajustements sont négociés sur la base du compromis raisonnable. En revanche, si les modifications du produit impliquent une augmentation des coûts de production, le prix est ajusté en conséquence. A l'inverse, si elles entraînent une baisse du coût, le prix initial est maintenu pendant un certain temps, ceci afin d'encourager le sous-traitant à proposer des améliorations. Les quantités produites définies en phase de conception sont ajustées de façon pragmatique en fonction des quantités vendues. Ceci implique un ajustement de prix pour l'absorption des frais fixes du sous-traitant. Les frais généraux sont évalués par le soustraitant qui, seul, supporte le risque de son évaluation (frais de recherche et de formation). Le cadre décrit par ASANUMA évoque les problèmes d'agence repris par KAWASAKI & McMlLLAN (1987). L'asymétrie informationnelle soumet le donneur d'ordres à deux types de risques liés à la sélection adverse : le sous-traitant connaît mieux son processus de transformation que le donneur d'ordres et peut tricher sur ses coûts de production ; - le donneur d'ordres ne maîtrise pas la qualité du produit fourni au cours de la relation. Un autre risque, lié cette fois au hasard moral provient de la difficulté d'identifier précisément l'économie de coûts consécutive aux innovations des sous-traitants. L'asymétrie informationnelle oblige à une étroite collaboration entre les partenaires avant la signature du contrat, réduisant les risques d'opportunisme pré et postcontractuel. Le partage des risques est très soigneusement étudié et des systèmes sont mis en place pour encourager le sous-traitant à innover sans lui faire supporter le risque d'une renégociation. L'organisation décrite par ASANUMA a été étudiée de manière plus formelle à partir d'un modèle issu de la Théorie de l'Agence. II - LES RESULTATS KAWASAKI & McMlLLAN (1987)' testant empiriquement le modèle " J ", cherchent à étudier le mécanisme de partage des risques au travers d'un modèle normatif issu de l'analyse économique du contrat de sous-traitanceS6. Ils observent que les contrats sont surtout destinés au partage des risques plutôt qu'à I'accroissement des moti~ations5~. L'explication tient à l'efficience de l'organisation industrielle. En effet, dans une structure de réseau, la motivation peut être encouragée par la volonté de maintenir des relations de long terme. Mais les parties conservent leur autonomie, le constructeur peut changer de sous-traitant lors de l'étude du modèle suivant. Ce faisant, l'objectif de la conception du contrat concerne davantage le partage équitable des risques. Les soustraitants affichent en effet une forte aversion vis-à-vis du risque. Celle-ci dépend de la valeur totale des ventes de I'entreprise et du nombre total de partenaires : plus la valeur des ventes est importante et plus les débouchés sont diversifiés, moins I'entreprise a peur du risque. Le risque moral augmente lorsque les investissements - notamment humains sont plus spécifiques. La conception du contrat entre le donne d'ordres et le sous-traitant intègre la prise en compte de ce risque. Les conclusions sur le modèle J >> laissent apparaître que le système de sous- traitance dans l'industrie japonaise est un vrai système de coopération : les constructeurs automobiles soutiennent et encouragent leurs sous-traitants à innover. Le cadre contractuel décrit par la Théorie de l'Agence met en évidence le partage des risques, dont le constructeur assume la majeure partie. Comme le précise GAFFARD (1990, p. 404), l'objet de la coopération [...] n'est pas d'assurer à la firme principale une rente de Des restrictions sont à apporter quant au test statistique. Leur validation empirique, du fait de l'indisponibilité de certaines variables, repose sur des estimations. 56 57 En France, le risque lié à l'activité est entièrement supporté par le sous-traitant (BAUDRY, 1991). m0nopsone5~pour la firme principale >,,ni de faire supporter aux plus faibles les fluctuations de l'activité. En revanche, les producteurs choisissent le modèle (< J >, car il est moins coûteux que la hiérarchie. KAWASAKI & McMlLLAN estiment les coûts d'inefficacité dus au risque moral de 7 à 14% des coûts de production et les considèrent inférieurs aux coûts de contrôle d'un système intégré verticalement. La section présente a montré les développements économiques pouvant s'appliquer aux réseaux. Le principe de l'intensité de l'encouragement est important. Le réseau est un système composé d'acteurs différents qui concourent à la même demande finale. L'étude des motivations individuelles permet d'améliorer l'efficience du réseau. La section a surtout mis l'accent sur le caractère homogène de modèles possédant leur propre logique de fonctionnement. Moins réductrices de la réalité sont les préconisations des approch plus organisationnelles ou managériales. Le monopsone est une structure de marché caractérisé par un acheteur et de nombreux vendeurs. 58 Section 2. DES CONCEPTIONS PLUS ORGANISATIONNELLES DU CONTROLE DES RESEAUX Si le modèle d'AOKI permet de penser qu'il est nécessaire d'analyser la coopération comme un tout, une approche organisationnelle traduit davantage le besoin d'aborder le contrôle des réseaux au sein d'une approche processuelle. Les problèmes de contrôle qui se posent aux différentes étapes du développement du réseau ne sont pas forcément constants. Deux volets distincts sont proposés dans cette section. Le premier analyse les apports de la littérature. D'abord sont présentés des modèles dynamiques d'analyse des rapports de coopération entre firmes, conceptuels ou issus de recherches empiriques. Dans un deuxième temps, les préconisations diverses sont recueillies, issues de nombreux textes, mais n'appartenant pas à des modèles (c intégrés,,. Aurait-elle la prétention d'être exhaustive que cette présentation serait à l'image de cette littérature : désordonnée, confuse parfois et allusive. Quelques thèmes majeurs s'en dégagent qui nécessitent là encore une mise en ordre selon une approche dynamique. Ces préconisations sont universelles ou limitées à leur terrain d'analyse. Plus que des recettes, l'analyse des problèmes de la coopération nécessite un cadre d'analyse original, objet de notre deuxième volet. La confiance est un phénomène commun à cette littérature. C'est pourquoi nous lui consacrons une section afin de faire le point sur son rôle dans la coopération. A. DES MODELES DYNAMIQUES INTEGRES : APPROCHE PROCESSUELLE DU CONTROLE I - LE MODELE DE P. S. RING & A. H. VAN DE VEN (1994) La dynamique du réseau met en avant I'importance de la dimension temporelle dans l'étude des liens coopératifs, l'approche sociologique permet de relativiser l'importance de phénomènes formels, mus par le seul intérêt économique. S'inscrivant dans cette même vision dynamique, RlNG & VAN DE VEN étudient le processus de création, de management et d'abandon des liens interorganisationnels coopératifs. Leur apport est conceptuel, qui développe des aspects formels et légaux d'une p a r t e t s'attache, d'autre part, à analyser les aspects informels et psychosociologiquesde ces liens. En prenant en compte le facteur temps, les auteurs se démarquent de l'économie des Coûts de Transaction et élaborent un ensemble de propositions théoriques59 pour expliquer la dynamique et le besoin d'analyser la dynamique des coopérations. La façon de négocier, de gérer ou de modifier des arrangements coopératifs affecte le jugement que les parties impliquées ont de l'équité et de l'efficacité de ceux-ci. Le caractère statique est la principale critique faite ici à la théorie des coûts de transaction. Son application à des processus managériaux est limitée. L'unité d'analyse est la transaction. Or, la coopération repose sur une répétition des transactions entre les mêmes partenaires. II faut donc analyser cet ensemble de transactions cumulées, pour comprendre les processus coopératifs (STINCHCOMBE, 1990). 59 Empruntant à diverses disciplines : droit, économie, sociologie et gestion. Le modèle repose sur une proposition de base : il existe des conditions économiques ainsi que des motivations suffisantes pour créer une volonté d'échange entre plusieurs organisations, de type coopératif, fondée sur un contrat relationnel plutôt que transactionnel. Quatre concepts sont mobilisés : L'incertitude Elle est de deux sortes : la première porte sur les états de nature à venir, la seconde sur la confiance à générer pour lutter contre les problèmes de sélection adverse et de hasard moral. Afin de minimiser cette incertitude, la confiance en la bonne volonté des parties est nécessaire (DORE 1983 ; RING & VAN DE VEN, 1992). Cette acception de la confiance est plus restrictive que celle qui la définit par rapport au caractère prédictible des attentes des parties. Elle est cependant plus souple au plan des mécanismes de génération et de lutte contre les phénomènes d'opportunisme qu'elle entraîne. La confiance a trois origines : - elle est fondée sur les normes d'équité grâce auxquelles l'un juge que l'autre remplit ses obligations et que la relation est équitable (VAN DE VEN & WALKER, 1984) ; - elle provient des relations interper~onne1le.s~~ entre les organisations, encourageant des comportements loyaux qui n'excluent cependant pas les mesures de prudence. De même, au niveau interorganisationnel, des transactions répétées réduisent la recherche d'un avantage immédiat ou de court terme auprès d'autres firmes ; 60 Généralement négligées par les approches statiques. A ne précisent pas le niveau d'analyse de ces relations. l'instar de GRANOVETTER, les auteurs enfin, la confiance repose également sur la réputation (WEIGELT & CAMERER, 1988) et sur I'importance du passé et des transactions réussies. L'aspect cumulatif de ces échanges entraîne une réduction des coûts de transactions (apprentissage et expérience) : le fait que plusieurs firmes aient I'habitude de se livrer à des transactions entre elles sans problème permet une génération de la confiance qui autorise une diffusion plus complète de l'information entre ces firmes61. L'équité et I'efficacité Les auteurs relativisent I'importance de I'efficacité chère transactionnelle. L'équité est à placer sur le même plan que I'efficacité. à (( l'analyse Les facteurs aggravant le risque ou réduisant la confiance encouragent les parties a s'attacher au caractère équitable plutôt qu'efficace dans l'établissement de la coopération p, (1994, p. 94). La juste répartition, issue de I'efficacité et de la réciprocité repose sur des normes et des précédents émanant de tiers arbitres (à caractère légal) et crée une réputation autorisant un échange équitable dans des conditions d'incertitude forte (HELPER & LEVINE, 1992). La résolution interne des conflits Les parties auront d'autant plus intérêt à préserver la relation qu'elle aura nécessité des investissements spécifiques. La médiation d'un tribunal soldant généralement le lien, les acteurs auront intérêt à une résolution informelle plutôt que formelle, d'autant que leurs relations sont fondées sur la confiance. On peut ici déduire implicitement qu'il existe des situations dans lesquelles la confiance ne garantit pas l'efficience. Face à des activités qui relèvent de i'innovation, par exemple, le caractère cumulatif des transactions ne fonctionne plus. Relier la confiance à I'habitude et à la récurrence n'est pas un gage d'efficience. 61 L'importance de l'attitude La dynamique des relations interorganisationnelles est la conséquence d'actions individuelles. Les acteurs développement d'abord une attitude organisationnelle par des relations institutionnelles, puis une attitude " réelle " entraînant des liens interpersonnels (GABARRO, 1987). La confiance donnée à la personne privée n'est pas transposable à la personne institutionnelle. La coopération s'analyse alors comme une séquence récurrente de négociation, d'engagement et de mise en oeuvre, évaluée en termes d'efficacité et d'équité. Figure 10. Le processus de négociation dans tes coopérations, RING &VAN DE VEN, 1994, p . 97. Bien que continu, ce processus est scindé en trois phases : Phase de néqociation Les acteurs présentent des attentes communes et évaluent l'incertitude. L'accent est mis sur des processus formels de négociation avec volonté de concrétiser des relations potentielles. Au plan informel, les acteurs cernent l'idée d'une coopération mutuelle, la nature des rôles et la confiance à placer. Phase d' enqaq ement Etablissement d'un agrément sur les obligations et les règles d'une future action coopérative. Les termes et la structure de gouvernement sont établis et contractualisés plus ou moins formellement. Phase de mise en oeuvre Mise en oeuvre physique et gestion de la coopération. A long terme, les rôles formels disparaissent peu à peu au profit de relations personnelles. Le long terme engendre des modifications comportementales qui nécessitent de fixer à nouveau les règles du jeu pour les seules sources de conflit. L'efficacité et l'équité sont garantes de la poursuite et du renforcement de la coopération. En fin de processus, la dissolution de la coopération sera éventuellement prononcée. L'excessive formalisation et le contrôle fort de la coopération conduit à la dissolution prématurée des liens (VAN DE VEN & WALKER, 1984). Contrairement aux propositions de WILLIAMSON (1975 ; 1985), le recours à des mécanismes formels et impersonnels de lutte contre l'opportunisme peut conduire à des comportements d'abus de confiance (SHAPIRO, 1987). RING & VAN DE VEN (1992) rendent compte du rôle néfaste des juristes dans la volonté croissante des organisations américaines de se protéger, qui empêchent les accords tacites et spontanés. Ils sont d'accord avec OUCHl (1984) pour affirmer que le recours aux tribunaux dans la résolution des conflits coopératifs traduit la dissolution des liens. Enfin, ACHROL (1991) évoque la nécessité de ne pas porter les conflits devant la justice mais de créer un système quasi-judiciaire interne. MOHR & SPEKMAN (1994) postulent que la manière dont les conflits sont résolus a un impact sur le bon déroulement du partenariat : les petits conflits doivent être réglés par des mesures conjointes tandis que les plus importants entraînent le recours à un tiers arbitre. D'un autre côté, le despotisme ou le laisser-faire ne sont que des solutions de court terme inadaptées aux relations récurrentes. il - L'ETUDE EMPIRIQUE DE A. LARSON (1991) A partir d'une étude empirique sur quatre réseaux, LARSON, décrit un modèle dynamique de gestion des réseaux composé de deux phases : une phase initiale de jugement ; une phase de partenariat. Ces deux étapes sont le nécessaire passage des relations de marché aux relations de réseaux : J O 2 ans - - Temps - Figure 11. La formation du partenariat un processus en deux temps, LARSON, 1991, p. 179. Le modèle est fondé sur une approche longue des relations interentreprises. Ces relations, d'abord de type client-fournisseur, évoluent peu à peu vers des liens de partenariat. La première phase est celle du jugement, pendant laquelle les entreprises s'apprécient et analysent l'éventualité et l'opportunité de développer des relations partenariales. Les entreprises s'évaluent mutuellement et s'échangent des informations sur leurs métiers respectifs, tant techniques que managériales. Pendant la phase de jugement, des règles de fond explicites et implicites sont établies comme support à une éventuelle coopération et au passage incrémental vers la relation partenariale. Les idées dominantes sont celles d'équité et de volonté d'évolution. Les partenaires testent la confiance qu'ils peuvent mutuellement s'accorder. La phase de jugement requiert du temps à consacrer pour formaliser les échanges. Une négociation est nécessaire pour que s'instaurent une routine et des procédures d'échanges physiques et informationnels. Ceci crée un système de référence, un cadre de coopération. Les rapports ne reposent pas sur des contrats formalisés mais sur la confiance et sur la durée, la connaissance mutuelle permettant de combattre les comportements opportunistes. L'aboutissement de cette phase de jugement est le développement d'un contrat informel fondé sur la confiance et la réciprocité des actions que cette confiance encourage. Dans le partenariat, la confiance recouvre plusieurs aspects comportementaux : confiance dans un comportement commun ; patience et aide à faire face aux exigences du changement ; adhésion à des valeurs partagées. La phase du partenariat proprement dit se distingue de la phase de négociation par la transformation du projet en opération : la relation est structurée et << intégrée,>par les organisations concernées ; elle engendre des investissements ; - elle implique les acteurs dans des relations qui visent à entretenir et à développer la coopération au travers des échanges réciproques et des contacts interindividuels. Le partenariat se précise dans son objet par une communication large et fréquente. II procure aux acteurs l'impression d'appartenir à une même entreprise. Le critère de succès d'une relation coopérative est l'atteinte de ses buts initiaux. L'échange évolue de la décision des directions ou du management vers tous les niveaux de l'entreprise, de la dimension politique à des dimensions plus opérationnelles. L'intérêt de tels modèles est bien évidemment d'introduire une dimension temporelle et séquentielle dans l'étude de la coopération et des processus dynamiques de constitution et de gestion des réseaux. Un tel travail enrichit considérablement l'approche contractualiste des liens interorganisationnels développés par la Théorie des Coûts de Transaction ou la Théorie de l'Agence, par une distance prise envers une contractualisation formelle poussée au profit d'une contractualisation tacite ou relationnelle, et par l'importance donnée à la sélection des partenaires. RING & VAN DE VEN comme LARSON prônent à l'évidence une orientation du contrôle de ces liens par des procédures formelles légères ainsi que des aspects informels développés. Ces deux travaux envisagent plutôt la création et le maintien des liens interorganisationnels sous l'angle de la réciprocité (voir OLIVER, 1990). Cette dernière remarque introduit les limites de ces présentation. La coopération ne se limite pas aux comportements loyaux et réciproquess2 (BENSON, 1975). Les auteurs précisent que chaque partie devrait se comporter de façon à ce que la coopération se passe bien. On ne peut s'empêcher de constater le caractère quelque peu (< naïf,, d'une telle remarque. Cette naïveté (la confiance est le moyen de bien coopérer et supplante des outils plus formels de contrôle) se retrouve dans beaucoup de textes. Pourtant, THIETART & VANDANGEON (1990) ont mis en avant l'usage de règles formelles et rigides comme mode de contrôle des coopérations au détriment de la confiance ou de la délégation. KOENIG & VAN WlJK (1991) ont relativisé l'emploi de la confiance en lui associant un contexte culturel prédisposant son développement. Enfin, les modèles présentés évoquent une constante dans les comportements quelle que soit la phase de développement dans laquelle se trouve la coopération. Le modèle de BERRY (1994) relativise cet aspect des choses. III - LA CONCEPTUALISATION DE A. J. BERRY Pour l'auteur, l'existence du processus dynamique pose trois problèmes de contrôle interorganisationnel : la sélection des entreprises constituant le réseau ; 62 C'est ce qui peut justifier l'abondance des textes qui traitent des rapports de force (de pouvoir) au sein des réseaux. - la mise en place du réseau, c'est-à-dire l'établissement du système opératoire qui sert de base à la mise en oeuvre du changement vers des liens interorganisationnels ; le management du système établi. La construction de BERRY repose sur un mode de contrôle dominant (mais non exclusif) selon la phase de développement dans laquelle le réseau. se situe. Les phases de négociation lors de la sélection des partenaires et de la définition des règles communes sont longues car il convient de mettre en place un cadre de fonctionnement et de contrôle à la fois stable et évolutif. De plus, des règles réduisant les temps de négociation ou de prise de décision sont nécessaires lors de la phase opérationnelle du réseau. Enfin, une évaluation du système mis en place doit avoir lieu périodiquement. Trois types idéaux de contrôle sont définis : la domination : l'acteur qui a le plus de pouvoir, à quelle qu'étape du processus de production que ce soit, est capable de s'assurer de la soumission des autres firmes à ses exigences, se jouant de leurs faiblesses. Ce type de contrôle se rencontre dans les rapports de sous-traitance ; la collaboration : le contrôle est conjoint entre firmes membres du réseau ; la compétition : le contrôle est de type marché, où chacun s'assure que l'autre est à même de fournir ou d'acheter, au jour le jour. Le type d'interdépendance entre acteurs est un facteur influençant le contrôle. La taxonomie de MILLER (1976)63, proche de celle de THOMPSON (1967)' identifie trois types d'interdépendance. 63 Utilisée par l'auteur. L'interdépendance est sérielle ou séquentielle lorsque les activités s'enchaînent l'une à l'autre. Elle est mutuelle lorsque deux activités sont programmées en même temps et mènent éventuellement à une troisième. Elle est enfin réciproque si les activités sont inter-reliées. Un contrôle dominant leur est attribué : PHASE INTERDEPENDANCE NATURE DU CONTENU DES LIENS CONTROLE NEGOCIATION DES Mutu elle Compétition Rapports de force pour établir son rôle et sa place dans le réseau Réciproque Collaboration Recherche du meilleur compromis Mutuelle ou réciproque Collaboration Recherche du meilleur compromis Domination / co//aboration Respect des engagements ROLES (DELAISLONGS) MISEEN PLACE (DELAISLONGS) OPERATIONNALISATION Séquentielle / mutuelle (DELAISCOURTS) Tableau 18. Phases de d éveloppement réticulaire et contrôle , B ERRY, 1994. La phase d'opérationnalisation est celle où le type de contrôle est le plus ambigu quelle que soit l'interdépendance. Elle doit allier un contrôle de type domination (le pouvoir de la firme-pivot s'exerce pour que les plannings soient respectés) à un contrôle de type collaboration pour maintenir un esprit coopératif et sauvegarder les liens de partenariat. Cette assertion montre qu'il n'y a pas de mode exclusif de contrôle au sein des réseaux, mais à l'instar de la proposition d'OUCHI (1980) et de LEBAS & WEINGENSTEIN (1986) un ajustement d'une combinaison de modes de contrôle.
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 Les paronymes : la phonétique est proche de celle des mots du secret. Ils donnent l'exemple du mot allemand « Käfer » qui se traduit par coléoptère en évoquant un patient qui en était passionné et mettaient en relation ce sujet avec la question secrète de la grossesse de sa mère alors qu'elle était enceinte de lui en faisant le lien avec « que faire? ».  Les allosèmes : un même mot peut avoir deux sens différents. Ils donnent l'exemple d'une meurtrière, fenêtre étroite dans un mur et une femme coupable de meurtre. En fait, les allosèmes apparaissent sous la forme de figurations visuelles dans les rêves ou les fantasmes mais ne sont jamais prononcés.  Les cryptonymes : le mot employé n'a plus, en apparence, aucun rapport avec le mot interdit. « Leur insistance dans le langage, ou encore leur investissement, agit dans des passetemps, des choix professionnels ou même amoureux (par exemple le choix d'un conjoint au nom évocateur) pourrait constituer le témoignage encrypté du secret indicible » (Tisseron, 1992b, p. 127). Le porteur du secret est partagé entre le désir de parler et l'impossibilité de le faire : d'un côté, il veut se débarrasser de cet événement indicible en le mettant hors de lui en faisant comme s'il n'avait jamais existé et d'un autre côté, il souhaite l'introjecter, le mettre en mots. Aussi, il va tout mettre en oeuvre pour que son secret ne voie pas le jour mais à certains moments, le secret peut se manifester par des malaises, des actes manqués, une gêne, etc. chez le porteur du secret.  Discrimination, différence faite avec les autres enfants L'exemple le plus parlant est celui d'Odile : « A Pâques, moi, j'avais toujours un lapin en sucre rouge et mes cousins avaient du chocolat. [] » (Odile, p. 10). Mais la différence peut être plus flagrante encore et mise en mots : « Quand je disais un mot à une communion ou autre où toute la famille était rassemblée, on me disait : "Toi, tu te tais, tu ne fais pas partie de la famille". Alors qu'officiellement je ne savais pas que j'avais été adoptée, mes parents ne m'avaient rien dit » (Odile, p. 10). Rozenn Monereau, quant à elle, a remarqué une discrimination faite dans le choix des prénoms des enfants de sa fratrie : « Je me souviens avoir été troublée et peinée en réalisant que les autres enfants de la fratrie, contrairement à moi, s'étaient vu attribuer, en deuxième et troisième prénom, des prénoms de grand-mères, soeurs ou d'autres membres de la famille. Pourquoi cette différence? » (2009, p. 42). Comme l'explique François Vigouroux, le choix d'un prénom peut également cacher un secret : « Ainsi , toute répétition de prénom comme d'ailleurs toute étrangeté relevée dans l'arbre généalogique incitera à une exploration fouillée. Elle signale souvent des interactions fortes, passionnelles, et donc les zones obscures où dorment les secrets » (Vigouroux, 2000, p.42). Dans certaines familles les prénoms des enfants sont ceux des grands-parents ou oncles et tantes, en fonction des liens affectifs et de la position de cette personne dans la famille. Et souvent, le parent faisant le choix de donner à son enfant (lorsque ce n'est pas un ascendant qui en fait le choix pour lui), le prénom d'un membre de la famille, partage un secret avec cette personne. D'autres expliquent qu'ils se sont interrogés à la suite de certains propos entendus inopinément. C'est ainsi que Patricia Gandin s'est questionnée sur l'identité de son père au regard de propos de sa mère sur un homme qu'elle a aimé : « "Et si mon père n'était pas celui que j'ai connu?". [] La petite phrase me porte, fait de moi une géante et en appelle une autre, presque immédiatement : "Mon père, si c'était Lorenzo Fonti, cet homme dont ma mère me parle de loin en loin, son amour de jeunesse?" » (1996, p. 36). Jean-Marie Perier a également entendu des propos troublant qui l'ont amené à s'interroger : « Mais en 1995, pourquoi Marie Daems, qui m'aimait pourtant bien, m'emmenait-elle systématiquement chez ses amis de couleur? C'était gentil de vouloir m'apprendre à danser, mais était-ce innocent? Un soir, Samba, toujours courtois, me demanda de lui tendre la main. Pendant qu'il regardait mes doigts, hochant la tête, acquiesçant en silence, Marie me caressa la joue et lui dit : "Tu ne trouves pas qu'il ressemble à Henri?" Henri? » (2001, p. 44). Il en fut de même pour Marie Brunet : « Dans l'abri, quelqu'un avait murmuré : "Pauvre petite, elle n'a décidément pas de chance." Je mesure aujourd'hui le fil ténu auquel fut, pendant quelques instants, suspendu mon destin » (2002, p. 49). Martine Venelle a entendu des propos qui l'ont amenée à s'interroger : « Devant l'employée, sa maman semblait gênée : "Oui, c'est bien ma fille" disait-elle. La tension montait, je levais les yeux vers cette femme que j'aimais tant. Je remarquais ses joues qui rougissaient, je l'entendais même bafouiller devant ce guichet froid et gris. Ma mère me suggéra, dans un murmure, de sortir quelques instants. Ce jour-là j'ai failli l'interroger » (2007, p. 12). Serge Tisseron explique souvent que l'enfant sent qu'on lui cache quelque chose. De ce fait, il s'imagine des choses qui ne sont pas en lien avec le secret et se sent exclu et indigne de « recevoir la confidence » et qu'il est peut-être même la cause du secret : « Cette honte liée à la conviction d'une indignité correspond au poids que l'idéal du moi déjà constitué de l'enfant fait peser sur son moi, c'est-à-dire à la façon dont cet idéal condamne le moi pour absoudre le(s) parent(s) du secret. Par ailleurs, cette honte – comme d'ailleurs toutes les hontes liées à un secret familial – est impossible à dire, puisque ce serait dire qu'il existe un secret et en solliciter la confidence, donc transgresser l'interdiction qui est de n'en rien savoir ou, à défaut, de faire "comme si". [] Cette honte, que le sujet pourra îner tout au long de sa vie, est liée à l'injonction de ne pas chercher à connaître le contenu du secret. Après l'identification du moi de l'enfant au moins du parent qu'il imagine honteux, c'est l'identification partielle de son idéal du moi aux consignes du parent porteur de secret qui est en cause. Le désir de savoir de l'enfant est frappé de honte. Cet idéal du moi perturbé peut, par extension, frapper de honte tout désir de savoir et entraver largement les possibilités d'apprentissage » (Tisseron, 1992a, p. 94). Ainsi, Gérard Lenorman a également entendu des bribes de conversation : « J'engrangeais ce que je pouvais capter, au gré des conversations, je glanais indices et bribes d'informations pour reconstituer le puzzle, mais sans plus » (2007, p. 15). « C'est dans les hésitations, les silences, les intonations, les mimiques et les gestes soulignant tel ou tel mot d'apparence anodine que se fixent pour le jeune enfant les sonorités qui donnent accès à cet impensé parental. Et le langage lui-même, quand il véhicule de tels secrets, en est porteur dans ses manques et sa phonétique plutôt que dans ses effets explicites de signification. C'est alors dans les mots évités ou au contraire les persévérations, les lapsus et les coq-à-l'âne qui sont communiqués, bien plutôt que les « légendes familiales » qui, lorsqu'elles existent, sont le plus souvent destinées à occulter quelque honte » (Tisseron, 1985, p. 164).  Pressentiment du secret Parfois, l'existence d'un secret peut être juste pressentie, sans que des signes précis se manifestent comme l'explique Rozenn Monereau : « Dès ma petite enfance, j'ai vécu dans la nostalgie d'un lien perdu et le sentiment de l'existence d'un lourd secret » (2009, p. 14). Roxane, la soeur de Rozenn Monereau ignorait l'existence de Ronan, leur frère aîné mais pressentait quelque chose : « Maman ne lui en avait jamais clairement parlé mais elle n'était pas vraiment étonnée. Confusément, elle semblait avoir toujours su que maman avait déjà été mariée et qu'elle avait un grand frère » (2009, p. 223). Gérard Lenorman pressentait l'existence d'un évènement qui imposait le silence : « Je n'aurais pas su dire pourquoi mais je sentais bien que quelque chose clochait Une chape de plomb s'était abattue sur notre maison. C'était comme si un frein ralentissait l'amour de ma mère ; un frein si puissant qu' l'arrêtait net dans son élan. Cet amour ne pouvait donc parvenir jusqu'à moi. A trois ans, on peut avoir des certitudes. J'en avais : celle, entre autres, de ne pas avoir été programmé pour exister » (2007, p. 11-12). Serge Tisseron explique que l'existence d'un secret chez l'un des parents va affecter la communication, entre eux, dans un premier temps, puis ce secret va affecter la communication mère-enfant dans un deuxième temps. « Il est courant que la communication mère-enfant se trouve perturbée par l'existence d'un tel secret. Soit « directement » - si on peut dire - au cas où le secret concerne ses propres ascendants.  L'enfant va s'interroger sur la culpabilité de son parent imaginant que, si son parent lui cache quelque chose, c'est qu'il en a honte. Et l'enfant invente des scénarios possibles d'actes honteux. Il va alors perdre confiance en ses parents et dans les substituts de parents que sont les enseignants, ce qui peut mettre à mal ses apprentissages scolaires.  L'enfant se demande s'il ne s'est pas trompé dans ce qu'il a vu ou entendu. Et il va douter par rapport à cet événement précis et douter de tout ce qu'il voit ou entend parce qu'il doit choisir entre ce qu'il a vraiment vu et ce que ses parents donnent à voir. L'enfant peut étendre ses doutes à tous les domaines de la vie. Par exemple, si l'enfant fait remarquer à son parent qu'il change de chaîne chaque fois qu'il est évoqué l'adoption à la TV, son parent peut lui répondre qu'il se fait des idées. L'enfant va alors douter de ce qu'il a vu. Devenu adulte, cet enfant peut douter de toutes ses constructions psychiques et dit qu'il se trompe, se fait des idées au sujet de ce qu'il aura construit. Ce que Serge Tisseron appelle les suintements du secret sont parfois appelés « signaux » par d'autres auteurs. Andréas Zempleni parle de « secrétions » faisant ainsi référence à l'étymologie du mot secret. Il appelle « secrétions » « l'ensemble de processus plus ou moins involontaires par lequel le secret s'exhibe devant ses destinataires sans être, pour autant, ni communiqué, ni révélé » (1976, p. 64). Cela peut prendre la forme de silence ou surabondance de discours, lapsus, soupirs, expressions du visage, embarras soudain, agitation gestes inadaptés, attitudes étranges, qui traduisent l'indicible. Pour Claire Delassus, le secret est « à la fois enfoui tout en étant exhibé » (1993, p. 64). Il y a donc une différence entre ce qui est dit et ce qui est montré, comme un orchestre qui jouerait faux. L'enfant ne sait plus ce qu'il doit comprendre entre ce qu'il entend et ce qu'il perçoit. Et plus un secret est important, plus il est douloureux, plus il infiltre le quotidien. Il est toujours possible de déterrer un secret de famille : « une personne qui chercherait à percer le secret qui la concerne − le secret de sa naissance, par exemple − pourra toujours, malgré les obstacles apparents, tels que la disparition des témoins ou la destruction des archives, parvenir au bout de sa recherche. Imaginons qu'un homme décide de retrouver son père qu'il n'aurait pas connu. [] Si cet homme a le courage et la ténacité de poursuivre jusqu'au bout son enquête et de poser les bonnes questions, un moment viendra où il retrouvera nécessairement son père. Ce qui ne veut pas dire qu'il retrouvera un homme en chair et en os, ou un acte d'état civil, ou une tombe avec un nom − encore que cela puisse se produire−, cela veut dire qu'il aura fait un parcours et un retour sur lui-même, et qu'il aura changé quelque chose de sa vie et de la vision qu'il en a. [] Le cheminement qui sert à parvenir à la vérité du secret constitue le secret lui-même. Et en un sens on pourrait dire, au mépris des lois de la temporalité ordinaire, que la façon dont le secret est découvert rétroagit sur la façon dont il se constitue » (Vigouroux, 2000, p. 64). Du fait des manifestations émotionnelles et sémantiques du parent porteur du secret, l'enfant a une vague idée de l'événement à l'origine du secret mais il va continuer à ignorer les effets de ce secret sur son propre fonctionnement psychique et cela pourra conditionner ses choix de vie. « Le plus souvent, tout se passe comme si le système psychique [de l'enfant du parent porteur d'un secret] s'employait à produire des effets destinés à témoigner de l'événement frappé d'interdiction de parole dans la génération précédente, et en même temps de le faire oublier, d'en laver la culpabilité réelle ou supposée du fait du silence qui l'a entouré. Pour cela, un ensemble de choix est le plus souvent mis en oeuvre - tel que le choix d'un métier, d'un hobby, d'un conjoint, de prénoms d'enfants, etc. - de manière à tenter de réparer le parent en soi. A travers ces choix, l'enfant du parent porteur du non-dit met en acte les mots du secret et leurs équivalents déformés dont l'insistance dans le discours du parent a modelé son univers symbolique. Et il peut, à la limite, être conduit comme malgré lui - et pour ainsi dire aveuglément - à des actes qui sont censés contenir la solution qu'il a inconsciemment construite comme résolutrice du problème du parent. Des actes qui peuvent être sans rapport apparent avec la situation historique initiale, d'ailleurs inconnue de l'enfant du porteur du secret. Ce rapport reste pourtant organisé autour de résonances phonétiques renvoyant aux mots tus du secret et aux mots privilégiés pour en commémorer secrètement le contenu ou les lieux » (Tisseron, 1992a, p. 146-147). Un non-dit chez un parent va engendrer un clivage chez l'enfant (ce que Serge Tisseron appelle un « fonctionnement psychique clivé ») : l'enfant a dû s'adapter aux perturbations de la communication de son parent et sa propre communication s'en trouvera perturbée. Aussi, il va transmettre ces perturbations à ses propres enfants. Le parent est porteur d'un secret indicible et l'enfant est porteur des perturbations de la communication liée à ce secret. « Dans les deux cas, la transmission est assurée par des déformations de langage et des attitudes bizarres avec lesquelles l'enfant doit organiser son monde symbolique interne. Les interdictions d'expression spontanée que ce soit d'expériences émotionnelles, motrices ou verbales, sont en effet très tôt perçues par l'enfant, en tout cas bien avant l'apparition du langage. C'est ainsi que les propos ou les comportements de l'enfant qui renvoient le parent à des pensées intolérables deviennent pour l'enfant totalement interdits. L'ensemble des pensées qui s'y rapportent sont de même exclues du fonctionnement psychique de l'enfant par un clivage radical. A l'inverse, certains sons, mots ou comportements se voient chargés de la part du parent d'une valeur exceptionnelle. Ce sont ceux qui sont destinés à commémorer l'événement passé sous silence, c'est-à-dire à lui assurer une place dans la tradition familiale à l'insu même de ses participants. 177 Il est probable que, plus encore que leur répétition, c'est la charge émotive qui leur est attachée qui assure la transmission » (Tisseron, 1992b, p. 161-162). L'enfant du porteur du secret, devenu adulte, va répéter avec ses propres enfants ces comportements, attitudes, langages afin de tenter d'évacuer le vécu de ces moments en les dép çant vers d'autres. L'enfant du parent porteur d'un secret a eu avec lui une relation insatisfaisante, relation qu'il va répéter avec son enfant, d'autant plus, selon Serge Tisseron, s'il s'agit de l'aîné ou de celui qui occupe la même place que le parent porteur du secret. Chez le parent porteur d'un secret, c'est le Moi qui est clivé. Chez l'enfant de ce parent, c'est l'ensemble de sa personnalité qui est affectée. Mais l'enfant ignore les perturbations de sa personnalité consécutives à l'existence d'un secret chez son parent. Les perturbations de l'enfant sont une réponse aux perturbations de la communication de son propre parent porteur d'un secret. La mémoire de l'enfant du parent porteur du secret n'a pas la connaissance du contenu du secret. En d'autres termes, alors que le parent porteur du secret avait des comportements inadaptés (émotions, langage, ) dans certaines situations, lieux, etc., l'enfant du porteur du secret ne manifeste rien. « L'indicible » d'une génération se transforme ainsi en « impensable » pour la suivante avec des conséquences dramatiques pour la descendance (Tisseron, 2002a, p. 32). Conclusion Et c'est ainsi que les secrets de famille peuvent faire des ricochets sur plusieurs générations. « Un enfant qui grandit dans une famille à secrets met en place certains gestes, certaines attitudes psychiques et des comportements qui témoignent de sa souffrance, tandis que d'autres témoignent de la manière dont il a dû amputer très tôt de sa pensée consciente l'ensemble des problèmes qu'il a ressentis, et qu'il lui était interdit d'aborder. Un dicton dit : "Il est interdit de parler de corde dans la maison d'un pendu." Un enfant qui grandit dans une famille à secrets est toujours dans cette situation très complexe de devoir à la fois repérer qu'il ne faut pas parler de corde, et ne pas montrer trop clairement, par son attitude, qu'il l'a compris » (Tisseron, 2002a, p. 32). L'enfant comprend alors qu'il y a des choses dont il ne faut pas parler, qu'il ne faut pas poser de questions et ne pas montrer qu'il a compris. Et souvent, devenu adulte, l'enfant va répéter les mêmes attitudes envers ses propres enfants, d'où des « ricochets » du secret sur plusieurs générations. Mais dans ces ricochets, la dynamique du secret change d'une génération à l'autre. C'est pourquoi on parle d' « indicible » à la première génération, d' « innommable » à la deuxième et d' « impensable » à la troisième. « Indicible » parce qu'à la première génération, les parents ont décidé de cacher l'événement à l'enfant : les parents ne veulent pas en parler pour protéger l'enfant ou se protéger eux-mêmes, ou ne peuvent pas en parler car c'est trop douloureux. Puis le secret change de statut à la deuxième génération, il devient innommable : l'enfant peut ressentir l'événement mais ne peut pas en avoir de confirmation. Et à la troisième génération, cet enfant, devenu adulte, a lui-même des enfants qui peuvent manifester des troubles physiques ou psychiques mais dont l'origine, le secret, est impensable pour eux. Comme nous allons le voir, le parent porteur d'un secret sait s'entourer d'alliés afin de se protéger et le protéger. 2. 1. 4. DIFFÉRENTS COMPLICES DE LA CRÉATION ET DU MAINTIEN DU SECRET DE FAMILLE Dans le petit théâtre des secrets, les complices sont plus ou moins nombreux et variés. Cela va de « tout le monde » à quelques personnes qui se sont retrouvées, de par leur situation (proches, voisins) ou leur fonction (travailleurs sociaux), complices par obligation. Mais plus nombreuses sont les situations où « tout le monde » connaît le contenu du secret excepté la personne concernée. « Quand j'étais petite, tout le monde savait sauf moi » explique Odile (2006, p. 14). « Dans leur famille à eux [la famille de ses parents], tout le monde savait que j'étais adopté » (Michel, p. 7). « J'étais au centre d'un secret de famille pendant trente-sept ans puisque toute la famille le savait, sauf moi. Donc là, c'est vraiment le secret de famille dont on est le, enfin, la seule personne qui devrait être au courant, c'était moi. Or là, tout le monde était au courant sauf moi. Je crois qu'on peut dire que j'étais la victime du secret. » (Noëlle, p. 1). Dans ces cas-là, les personnes concernées se disent « victimes » et vont même jusqu'à parler de « cabales » montées contre elles. Lorsqu'un enfant apprend un secret que les autres membres de la famille connaissent, il va se sentir mis à l'écart et marginal dans sa propre famille comme s'il n'en faisait pas partie. Marie Brunet apprend, après son mariage, que son mari et son beau-père connaissent son histoire : « Aux tous premiers temps de notre mariage, il m'arriva d'accompagner mon mari dans ses déplacements. Je songeai souvent à ce que je n'avais jamais osé lui avouer. Nous étions, ce jour-là, à Audierne []. "J'ai vécu dans ce village, avant que les Brunet ne m'adoptent. Ils ne sont pas mes vrais parents." Il me fit cette réponse étonnante : "Je sais. Ta mère m'avait prévenu, avant notre mariage, en me demandant, simplement, de ne pas te le dire." Puis il ajouta ceci, de bien plus étonnant encore! "Mon père se souvenait parfaitement de ton adoption. Il était, à l'époque, greffier du tribunal civil de première instance. Il en a même établi et signé l'acte » (2002, p. 101-102). In fine, Marie Brunet pense que tout le monde connaît son adoption : « En mettant de l'ordre dans un vieux secrétaire, je trouvai l'acte du jugement de mon adoption, rendu en audience publique. [] Il y était fait mention de l'insertion d'un extrait dans le journal "Ouest-France". Cette adoption qui se voulait secrète étalée au grand jour! Tous les témoins!» (2002, p. 115). Elle parle de « secret de Polichinelle » : « Avec l'été me vint un lancinant désir de revoir Poncé. [] J'ai poussé le portail de la maison maintenant propriété de trois frères, [] Mon enfance m'attendait. Nous l'avons évoqué à satiété sans la moindre fausse note. J'ai parlé de mon adoption pour constater, une fois de plus, qu'elle n'était que secret de Polichinelle » (2002, p. 138). En regardant une photo de mariage de ses parents biologiques, union dont il est issu, Rémy Brown se rend compte que tout le monde était au courant. Il explique : « C'est la photo que j'ai découverte ce jour-là. C'est la première fois que j'ai vu l 'image de mon père et j'ai reconnu sur la photo mes grands-parents, mes arrières grands-parents, mes oncles, mes tantes, tout le monde y était, tout le monde était au courant. » Un tiers complice du secret se voit dénier le droit de le révéler. Il devient, comme nous l'avons vu (cf., chap. 1, § 1.1.2.4.), dépositaire à son tour du secret. Il n'en parle pas, même à un tiers qui sait (un frère, un parent par exemple). A fortiori, il n'en parle surtout pas à l'extérieur pour ne pas briser le mythe, par peur de désunifier la famille. Garder un secret, c'est « comme être assis sur une bombe à retardement ». « De graves événements provoquent la décision de taire un secret, mais une fois gardé, il devient lui-même un engin explosif » (Cottle, 1995, p. 117). Les complices du secret s'interrogent : « Quand et où l'explosion aura-t-elle lieu? Cela éclatera-t-il à la maison, devant toute la famille, que passera-t-il dans ma tête? Pourrai-je échapper à l'explosion, déménager, peut-être aller ailleurs » (Ibid, p. 118). 4. 1. Entourage familial 180 Le plus souvent, de nombreuses personnes de la famille connaissent le secret excepté la personne concernée et un ou deux membres, susceptibles de le révéler ou que l'on veut également protéger. Ce fut le cas de Jocelyne, dans le sens où, hormis sa soeur et elle-même, toute sa famille adoptive était au courant de son adoption et tous lui ont « menti ». Elle cite notamment sa marraine et sa grand-mère paternelle, deux personnes qu'elle affectionne plus particulièrement. Aussi, elle est d'autant plus déçue : « Ma marraine m'a menti autant que ma mère là-dessus. Mais ma marraine, je ne pense pas qu'elle ait tout su. Et puis, ma grandmère paternelle, elle me jurait qu'elle ne savait rien. [] Donc, c'est horrible parce que ça veut dire que, de toute façon, tout le monde, tous ceux que j'ai connus m'ont menti. » En outre, elle suppose que son ex-mari l'a su avant elle : « Mon beau-père avait appris mon adoption avant mon mariage par l'ex-patron de mon père. Donc son fils, c'est-à-dire mon mari l'a certainement su avant moi » (Jocelyne, p. 15). Ce fut le cas pour Odile également : son mari l'a su avant elle : « Quand je suis rentrée la première fois avec mon futur époux, mon père lui a dit : "Ecoute, viens avec moi, moi, je voudrais te parler". Et ma mère m'a dit : "Toi, tu viens avec moi à la cuisine, j'ai à te parler". Et puis mon père en a parlé à mon mari [de son adoption]. Donc mon mari était au courant mais ne m'a rien dit » (Odile, p. 10). Dans l'histoire de Sandrine, ses parents ont imposé à son frère d'être leur complice jusqu'au jour où le poids de ce rôle a été trop lourd à porter pour lui et qu'il a parlé : « Quand mon frère m'a dit ça, de rage, en fait, de méchanceté et de colère, [] je suis allée voir directement mes parents et ensuite je suis partie dans ma chambre pour pleurer, j'ai hurlé, j'ai pleuré, et je suis revenue discrètement dans le couloir, mes parents étaient dans le salon avec mon frère et ils étaient en train de dire à mon frère "Mais tu sais bien que tu ne dois pas en parler". Donc, je pense qu'ils ont fait porter, en fait, ce poids-là à un gamin pour pas que le secret sorte de leur truc à eux trois ». Sandrine évoque aussi le rôle joué par ses deux grand-mères et sa déception : « Mes deux grand-mères adoptives étaient au courant parce que mes parents n'avaient pas eu le choix. Ils ont dû leur dire qu'ils allaient avoir un enfant supplémentaire et comme je suis arrivée à l'âge de deux ans, ils ont été obligés de leur dire. Mais elles n'en parlaient pas. » Sandrine se rendit compte, plus tard, que ses grand-mères n'avaient, en fait, que peu d'informations la concernant : « Elles ne savaient pas comment mes parents m'avaient eue. Elles supposaient que je venais de la DDASS parce qu'elles avaient quatre-vingt-dix ans et elles ne savaient rien d'autre. Le secret était gardé de tous les côtés » (Sandrine, p. 4-5). La mère adoptive de Michel lui a dit, lorsqu'il a appris son adoption, que personne ne savait, hormis un grand-père : « J'avais invité mes parents adoptifs là, près de T., je venais d'acheter la maison, et j'ai appris en l'achetant ; donc après, j'ai évidemment voulu leur en parler de vive voix. Ma mère adoptive m'a dit : "Surtout, promets-moi de ne plus en parler, personne ne savait, il n'y avait que nous qui savions et le grand-père" » (Michel, p. 16-17). Michel se rendra compte, plus tard, que d'autres membres de la famille était complices, voire toute la famille. Michel invoque la complicité « contrainte » de cousins qui désapprouvaient l'attitude de ses parents adoptifs mais qui, néanmoins, n'ont rien dit : « J'ai appris aussi par B. et C. que des papiers me concernant étaient chez un voisin notaire qui était également un cousin de la famille. [] Et quand ce notaire est décédé, mes parents adoptifs ont voulu remettre ces papiers à B. et C. B. a répondu à mon père "[] Je ne suis pas d'accord du tout, donc je ne désire pas du tout détenir ces papiers-là et admettons que je les prenne et que vous vous tuiez en voiture en rentrant à P. Qu'est-ce que j'en fais de ces papiers?". Et mon père lui a dit "Tu les brûles. Michel ne doit jamais savoir". Pour vous dire à quel point le secret était fort" (Michel, p. 7). Pour Sylvie, toute la famille de la génération de ses parents savait que son frère n'était en fait que son demi-frère, sauf les enfants : « Les enfants et les cousins, on va dire, la génération de mon frère, dans cette génération-là, personne ne le savait. Par contre dans la génération audessus, tout le monde le savait. Mon frère est donc le fils de ma mère et pas de mon père » (Sylvie, p. 1). Patricia a pu obtenir des informations de sa famille paternelle mais rien de sa famille maternelle. Tous ont protégé le secret : « Ils [ses parents adoptifs] m'ont eue par piston. Ça, c'est mon père qui me l'a dit. Lui m'avait donné quelques tuyaux. Mais je pense, qu'en fait, il n'en savait pas tellement. Et tous, du côté de la famille de mon père, parce que je leur ai, à tous, écrit en leur demandant, m'ont tous répondu, téléphoné ou écrit. Il n'y a que du côté de ma mère, que ça a été le black out. Ils ne savaient rien, je n'avais pas le droit de savoir et de toute façon, je sortais d'une poubelle » (Patricia, p. 5). La mère de Patricia Gandin lui explique qu'elle a dû partager son secret parce que trop lourd à porter : « C'était quand même très lourd J'ai [sa mère] eu besoin de me confier. Mais à une seule personne : Régine. Notre cousine sait depuis toujours. Bien sûr, elle sait » (1996, p. 58). Patricia Gandin téléphone à sa soeur Soline pour lui révéler qu'elles n'ont pas le même père et l'identité de son père biologique. Mais sa soeur savait « "Je le savais Mais ça ne change rien, Patricia. Ça ne change rien". [] "Depuis l'âge de quatorze ans." » Elle lui 182 apprend qu'elle le savait d'une autre cousine : « Tu te souviens, c'était ma meilleure amie. Un jour où je me plaignais que nos parents ne s'entendaient pas bien, elle m'a répondu : "C'est normal, ta mère est amoureuse d'un autre homme. Il s'appelle Lorenzo Fonti et ta soeur, c'est sa fille » (1996, p. 83). Le père de Catherine David menait une double vie secrète, avec la complicité de sa première femme : « Mon père avait divorcé pour épouser ma mère, qu'il aimait, mais il continuait à vivre et à recevoir chez sa première femme, [] comme si de rien n'était, comme s'ils n'avaient pas divorcé » (2002, p. 65). Laurence avait mis sa soeur dans la confidence : « Ma soeur est au courant de la situation. » Dans ces situations, deux sentiments sont fortement exprimés et de façon récurrente : la déception et la colère. Parfois, les complices le sont par nécessité, parce que le porteur du secret a besoin de se confier. Ce fut le cas pour la mère de Patricia Gandin et Laurence par 2. 1. 4. 2. Entourage amical À part son amie Marie, personne de l'entourage de la mère de Catherine Hermence n'était au courant de sa naissance, pas même ses parents. Louise, voisine et amie très proche des parents de Philippe Grimbert connaissait leur histoire : « Louise faisait partie de notre famille, je l'avais toujours connue. []. Elle se prétendait sans secrets, sa vie était là, dans ce cabinet sombre [cabinet de massage], elle dispensait ses bons soins aux habitués, les écoutait jour après jour. Depuis des années elle écoutait mes parents avec la même attention, laissant courir sur eux ces mains énergiques qui les délestaient de leurs soucis : avec leur fatigue, ils abandonnaient chez elle leurs secrets » (2004, p. 31-34). Pour Philippe Grimbert, tous mes proches savaient, « tous avaient connu Simon [son demi-frère], l'avaient aimé. Tous avaient en mémoire sa vigueur, son autorité. Et tous me l'avaient tu » (2004, p. 84). Mazarine Pingeot évoque quelques personnes qui, au fur et à mesure de ses rencontres, vont se retrouver complices de son secret : « Je me fais une copine. Bien sûr, sa mère vient la chercher avant l'étude. [] Mes parents la rencontrent. Elle n'a pas de travail. [] Papa l'engage. Elle est adoptée. Entre dans le secret comme on entre dans une secte. Prend sa part de silence » (2005, p. 81). Ainsi, Mazarine Pingeot évoque une forme d'adoption, par la famille, du ou des complices du secret, ce qui peut également être le cas dans les autres 183 situations. L'ami-complice devient membre de la famille. C'est le cas également de Louise pour la famille Grimbert. Le fait d'être complice assigne une nouvelle à la personne et signifie son intégration dans la famille. 2. 1. 4. 3. Entourage social Sandrine évoque le voisinage de ses parents qui, inévitablement, devait être au courant puisqu'elle est arrivée dans leur foyer à deux ans. Mais tous disent ne rien savoir : « Alors, je ne sais pas ce qu'ils leur ont dit, est-ce qu'ils leur ont dit qu'avant j'étais malade, que je devais rester à la maison? [] Il a bien fallu, à un moment, arrivant à l'âge de deux ans, dire quelque chose à quelqu'un. Alors j'ai pensé que les voisins de mes parents à l'époque pouvaient savoir. J'ai discuté avec l'une des voisines qui m'a dit : "Moi, je ne sais rien". Donc, comme ça, on était tranquille parce que je pense qu'elle avait la consigne de ne rien dire. Donc c'était vraiment secret » (Sandrine, p. 5-6). Pour Odile, les voisins savent aussi : « Les voisins savaient également mais tout le monde se tait » (Odile, p. 2). « La dame par laquelle je le sais était pratiquement voisine d'elle, dans cette rue. Et elle s'appelle C. [le deuxième prénom d'Odile donné par sa mère biologique] aussi. Mais cette dame ne veut pas me donner d'information sur mon père » (Odile, p. 6). Odile a la certitude que le voisinage de sa mère biologique est au courant de son histoire mais chacun se tait : « Pourtant il y a encore des voisines de l'âge de ma mère, c'était un vieux quartier, il y a beaucoup de vieilles personnes qui sont forcément au courant. Mais personne ne dit mot. » Et elle évoque la fleuriste qui était l'employeur de sa mère et qui ne veut rien dire non plus : « Elle a travaillé encore longtemps après l'âge de soixante ans chez un fleuriste que je suis allée voir avec mon amie parisienne. On est rentrées dans le magasin, moi je regardais les fleurs et mon amie regardait les fleurs également mais en observant le comportement des propriétaires du magasin. La dame me regardait, elle n'arrêtait pas de me regarder, comme si elle reconnaissait quelqu'un. Pourtant, quand mon amie s'est dévoilée et lui a posé la question, elle lui a répondu qu'elle ne connaissait personne, qu'elle ne connaissait pas du tout ma mère » (Odile, p. 4). Au cours de ses recherches, Sébastien Trotoux va rencontrer des personnes ayant connu sa famille biologique. Certaines lui donnent les informations qu'elles détiennent, d'autres se taisent. « Nous "arrachons" le nom de deux anciens locataires, voisins de palier présumés des C, soi-disant témoins d'une situation dont personne ne peut parler. Monsieur L, 184 Monsieur R, Madame D, tous auront su conserver les secrets de vie de leurs voisins, me préservant provisoirement d'une histoire simplement trop compliquée pour eux » (2006, p. 143-144). Contrairement aux amis qui ont accepté d'être complices, le voisinage l'est devenu par obligation. Cette complicité n'a pas été un choix et ils n'ont pas eu la possibilité d'en échanger avec le porteur du secret ; aussi, ils se protègent en disant qu'ils ne savent rien. Ils ont enfermé, encrypté ces histoires anciennes qu'ils n'ont pas envie de voir resurgir. 2. 1. 4. 4. Des personnes anonymes Tout comme ce fut le cas pour Michel qui a reçu des appels téléphoniques et lettres anonymes l'informant qu'il n'était pas le fils de ses parents, Odile a reçu un appel téléphonique d'une personne qu'elle méconnaissait et qui prétendait connaître son histoire : « J'ai mis une annonce dans « Les dernières Nouvelles d'Alsace ». Et après quatre semaines, j'ai eu un appel, celui d'une dame qui connaît mon histoire mais qui ne veut pas en dire de trop. [] Elle m'a dit qui était ma mère mais ne veut pas me dire qui est mon père et pourtant elle le sait. Elle dit qu'elle a promis à la personne [sa mère biologique] qui lui a dit, donc qu'elle ne le dirait pas » (Odile, p. 2) Il existe donc une sorte de loyauté envers le porteur du secret qui contraint le complice à se taire. 2. 1. 4. 5. Professionnels, les institutions, les élus Certains professionnels deviennent, par fonction ou par mission, complices du secret car ne peuvent déroger au principe du secret professionnel auquel ils sont soumis. Cela n'est pas toujours bien compris par les victimes. Odile parle de différentes institutions qui refusent de lui donner des informations et notamment l'Armée, son père biologique était militaire, et la municipalité : « L'armée, c'est fermé à bloc. Il habitait [] une maison qui appartenait à l'armée, qui appartient toujours à l'armée et quand je pose la question à la mairie, on me répond : "On ne sait pas qui habitait dedans". C'est un peu limite quand même parce que je pense qu'ils savent » (Odile, p. 1-2). Elle évoque également la complicité des Archives de France : « Et je reçois une réponse des Archives de France [qui] refusent de me montrer le dossier. [] Je ne le comprends pas. » Et enfin, d'évoquer la complicité du maire de la commune dans laquelle vivaient ses parents 185 biologiques : « Et j'ai essayé, je ne sais pas combien de fois, d'obtenir un rendez-vous avec le maire, rien à faire. []. Je suis sûre qu'à la mairie, ils ont l'information. [] De toute façon, secret, secret, secret » (Odile, p. 2). Michel évoque la complicité de la Directrice de la Maternité de l'époque : « Moi, je suis né en novembre 1947 et, trois mois après, il aurait fallu une délégation des droits de puissance paternelle, c'est-à-dire droits parentaux, pour que mes parents adoptifs puissent me garder. Or, cette délégation des droits de puissance paternelle n'a certainement pas eu lieu. [] Il aurait fallu trente-cinq ans révolus pour la maman adoptive, ce qui n'était pas le cas [] et il leur fallait dix ans de mariage, à mes parents adoptifs, ce qui n'était pas le cas non plus []. Donc, les conditions n'étant pas réunies, ils ne pouvaient pas adopter. Ils n'ont pu m'adopter qu'en 1952 lorsque j'avais cinq ans. Donc, entre-temps, il fallait bien que quelqu'un me surveille. Il y avait eu un accord très certainement entre mes grands-parents de naissance et mes parents adoptifs par l'intermédiaire de Marguerite G. qui était directrice de la maternité » (Michel, p. 3-4). Les professionnels de l'entourage de Mazarine Pingeot se sont également retrouvés, par obligation, complices de son secret. Elle parle d'un « clan » : « Les gardes du corps sont mes meilleurs amis. Ce sont les personnes que je vois le plus, à qui je n'ai rien à cacher » (2005, p. 82). Et d'expliquer : « Mon itinéraire [] c'est plutôt les couloirs, l'escalier de service, la petite porte qui s'ouvre sur la cuisine []. Je vais dire bonjour à Didier, un marin cuisinier, soulever les couvercles des casseroles, demander à Richard qui m'accompagne et retrouve ses collègues []. Plus besoin de me cacher, ici [à l'Elysée] les secrets sont gardés, c'est même une profession. Et puis je m'entends bien avec eux, gendarmes, policiers, nous avons été élevés ensemble – quasiment. Une sorte de clan » (2005, p. 113-114). France Prun s'interroge également sur le fait que son médecin qui l'avait toujours suivie, ne lui en ait jamais parlé : « Lui non plus ne m'a jamais interrogée. Il me suivait depuis tant d'années. La naissance d'un enfant laisse des traces sur le corps d'une femme N'avait-il rien vu? ou plutôt rien voulu voir? » (2005, p. 30). Plus tard, elle est certaine qu'il savait : « J'ai lu avec certitude dans les yeux du médecin : lui savait » (2005, p. 38). Sébastien Trotoux parle de professionnels, assistantes sociales notamment, qui détiennent des informations le concernant mais ne les lui transmettent pas car soumises au secret professionnel : « Madame B. et Madame K., représentantes des services sociaux des AlpesMaritimes, connaissent bien mon dossier! » (2006, p. 170). Conclusion Ainsi, les complices ont reçu, explicitement ou implicitement, l'ordre de se taire ; ils ont le plus souvent été mis dans la confidence par obligation ou ont appris le contenu du secret par hasard ou du fait de leur profession. Mais tous respectent ce devoir de silence et se retrouvent, comme certains l'expriment, à leur tour, « enfermés » dans et par le secret. Certaines victimes du secret se sentent « trahies » et/ou « trompées » lorsqu'elles apprennent qu'une ou plusieurs personnes savaient mais qu'elles ne leur ont rien dit. Un tiers complice du secret se voit dénier le droit de révéler le secret. Il n'en parle pas, même à un tiers qui sait (un frère, un parent par exemple). A fortiori, il n'en parle surtout pas à l'extérieur pour ne pas briser le mythe, par peur de désunifier la famille. Mais garder un secret est, comme nous l'avons vu, être assis sur une bombe à retardement. Le secret est un « engin explosif » pour reprendre l'expression de Thomas Cottle. Le secret est imposé au complice. Cette confidence est un non-choix. Il a pu lui être dit : « Tu sais garder un secret » ce qui n'invite qu'à une seule réponse : « oui ». Ainsi, l'auteur du secret le révèle à son complice sans recueillir préalablement son assentiment pour assumer ce rôle. Le complice se trouve alors enfermé à son tour par le secret. Il doit en assumer le poids, ne pouvant s'en libérer. Certains vont trahir le pacte de silence car éprouve le besoin de le partager pour s'en libérer, tout du moins, s'en alléger en partie mais devront néanmoins être vigilants afin de ne pas montrer de signes, de ne pas laisser suinter des indices. Ainsi, parce qu'ils auront été sollicités pour un conseil, une aide, ou simplement parce que l'auteur n'a pas d'autre choix que de le dire, le complice va se retrouver, à son corps défendant, gardien et prisonnier du secret. Et ce rôle sera d'autant plus difficile et le secret plus pesant qu'il n'aura pas demandé à en prendre connaissance. Ce rôle de complice peut, pour le cas d'une personne travaillant au sein d'une institution, faire partie de ses fonctions. Elle devra alors faire montre de prudence afin de ne dévoiler aucune information. Sa fonction lui imposant de garantir le secret, elle apprend à ne pas le trahir, posant même, si nécessaire, le secret comme principe dans l'exercice de ses missions. Mais le complice sera souvent « démangé » par l'envie ou le besoin de parler, d'où une position plutôt inconfortable pour lui. Ainsi, il peut être convaincu qu'une révélation de ce secret serait « bienfaitrice » pour la personne concernée. C'est ainsi que certains, ne voulant pas trahir, le font par le biais d'informations anonymes (lettres, appels téléphoniques, ). 187 Seule la révélation du secret les libérera même s'il sera difficile de dire alors : « Oui, je le savais » provoquant ainsi un sentiment de trahison chez la personne concernée. Ainsi, le secret est pesant, enfermant, source de mal-être pour le complice, dans un entredeux, mais il l'est également, comme nous le verrons, chez la victime. 2. 2. FONCTION DE PROTECTION DU SECRET DE FAMILLE Bien que, pour la plupart d'entre nous et la grande majorité des personnes interrogées par le biais du questionnaire, le secret soit négatif, il est présenté comme protecteur, de soi mais également de l'autre et de l'unité familiale. 2. 2. 1. LE SECRET PROTÈGE De nombreux auteurs notent la protection comme fonction première du secret. Pour Georg Simmel (rééd. 2000, p. 62), elle est même la fonction première du secret. Cette protection vise d'abord les destinataires du secret. Elle vise ensuite le porteur du secret luimême mais également l'image de la famille. La volonté de protéger quelqu'un et plus spécifiquement un membre de sa famille voire sa famille entière est l'une des raisons massivement évoquée comme étant à l'origine d'un secret de famille dans les questionnaires. Pour les personnes enquêtées, la protection de soi et des autres représente 1/3 des réponses. C'est donc l'une des premières raisons motivant la création et le maintien d'un secret de famille et plus particulièrement pour les 41-50 ans qui la notent deux fois sur trois. Il s'agit de « protéger », dans la majeure partie des réponses, un membre de la famille. Vient ensuite l'unité familiale qu'il est nécessaire de protéger, l'équilibre de la famille : protéger ses membres d'un conflit, d'une rupture si le secret était révélé. Mais il s'agit également de protéger les enfants, la descendance. Certaines personnes nuancent leur réponse en précisant « protéger à tort » ou « illusion de protéger » ou encore « soi-disant protéger ». Dans quelques cas, rares, il s'agit de protéger un bien, une fortune. Par rapport à cette volonté de protéger, le pourcentage de réponses hommes / femmes est identique au nombre de réponses de l'ensemble des questionnaires (27 % d'hommes et 73 % de femmes). Mais 40 % des hommes évoquent la « protection de soi ». Les hommes se protègent donc d'abord et les femmes protègent plutôt la famille et descendance.
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De l'analyse des communications à celle des représentations fonctionnelles partagées. Une application à la relève de poste. Psychologie. Université René Descartes, 1995. Français. &#x27E8;NNT : &#x27E9;. &#x27E8;tel-04508655&#x27E9;
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Ainsi, la situation de MP se distingue fortement des autres : les séquences ayant pour objet le secondaire, relatives au système de conduite (notamment aux régulations automatiques et verrines), les "informations directes", les séquences relatives à des dysfonctionnements sont plus nombreuses. Par contre, peu de séquences concernent la sûreté, le primaire et les activités d'autrui. Dans cette situation, en effet, l'ensemble des régulations automatiques et le secondaire sont en fonction, ce qui explique l'importance des séquences informations directes, relatives au système de conduite et au secondaire, et le pourcentage peu élevé de séquences évoquant le primaire. Par ailleurs, l'état des verrines étant défini par rapport à la situation de MP, il est d'autant plus important de s'informer des verrines allumées que cela ne constitue pas une situation normale (en situation d'arrêt chaud ou d'arrêt froid par contre, il est normal qu'un certain nombre de verrines soient allumées ; les opérateurs y accordent donc moins d'importance). La disposition des circuits de sûreté, la ventilation et le conditionnement de l'enceinte, de même que la configuration de la partie électrique de l'installation étant strictement définis dans cette situation, les opérateurs s'assurent donc simplement qu'ils sont dans une configuration normale (d'où le faible pourcentage de séquences relatives à la sûreté dans ces situations). De même, les interventions de la maintenance sont limitées du fait de la configuration du système, ce qui explique le faible pourcentage de séquences "régulation structurale". Quant aux résultats concernant les séquences "dysfonctionnements", il s'explique davantage par la situation particulière de relève que par l'état de la chaufferie ; il est toutefois à noter que certains dysfonctionnements ne pourront être détectés qu'en situation de MP (dysfonctionnements concern les verrines, les automates ou appareils du secondaire) et que des dysfonctionnements repérés en arrêt chaud peuvent devenir cruciaux en MP. Les situations non critiques (AF, ACCR, ACCN) sont par contre caractérisées par un pourcentage de séquences évoquant le primaire plus important, par des "informations directes" moins importantes, mais davantage de séquences relatives aux activités des opérateurs et d'autrui. Dans ces situations, les moyens de régulation nécessitent davantage d'interventions des chefs de bloc, d'où l'importance des séquences évoquant le primaire, les activités et régulations des opérateurs. Ces situations permettent en outre l'intervention des secteurs de maintenance à différents endroits de l'installation et la - sultats Chapitre 3. Tentative d'analyse quantitative des contenus des échanges verbaux en phase de relève de poste réalisation d'essais nucléaires et d'essais périodiques, d'où l'importance des séquences "régulation structurale" et "activités". Les situations d'ACCR se caractérisent également par un fort pourcentage de séquences relatives à la sûreté du réacteur. Les circuits de sûreté peuvent en effet être ou non disposés dans cette situation. Les situations d'AF se distinguent fortement des autres situations, notamment par l'absence de séquences relatives au système de conduite et par une faible proportion de séquences relatives aux auxiliaires. En effet, seuls quelques auxiliaires sont en fonction dans cette situation et les régulations se font manuellement. Enfin, bien que ces situations d'arrêt permettent de réaliser d'importantes activités de maintenance, les séquences "régulation structurale" ne sont pas particulièrement nombreuses dans cette situation. Ceci s'explique par le moment de l'observation (il s'agit d'une relève de 7 heures et les secteurs de maintenance sont absents la nuit et lors des relèves du matin). Ceci est également lié au fait qu'il s'agissait d'un arrêt de courte rée, ce qui limite les activités de maintenance réalisables. Par conséquent, les résultats observés dans cette situation ne sont sans doute pas représentatifs des échanges généralement observés en AF. Enfin, peu de variations sont observées en ce qui concerne les séquences relatives à la partie électrique de l'installation, aux tâches ou aux récupérations des opérateurs. Quel que soit l'état de la chaufferie, la planification par les opérateurs de leurs futures tâches est un souci constant. La partie électrique est elle aussi toujours évoquée, les opérateurs s'assurant a minima que la disposition électrique est normale. Les informations plus précises la concernant seront transmises par les électriciens. De façon générale, le type de messages et les objets évoqués en fonction de l'état de la chaufferie reflètent les spécificités de la conduite, sa plus ou moins grande automatisation, les interventions permises par la configuration du système... 2.5. Variations en fonction des opérateurs impliqués. La plupart des opérateurs ayant été observés une seule fois en position de montant sur l'ensemble des relèves, une analyse des différences inter-individuelles ne peut être menée. Chapitre 3. Tentative d'analyse quantitative des contenus des échanges verbaux en phase de relève de poste L'ensemble de ces résultats met en évidence que : • les échanges verbaux permettent d'assurer la continuité des activités de conduite par des informations précises sur les principaux paramètres de conduite, une gestion de l'ensemble du système et une connaissance des principales difficultés rencontrées au moment de la rencontre ; • des stratégies différentes d'échange en fonction des différentes situations de relève : gestion des échanges différentes en fonction des opérateurs et de leur taux de rencontre, gestion et exigences différentes des échanges en fonction de la durée d'absence au poste de l'opérateur montant, contenus des échanges adaptés à la modification des activités entre les factions de jour et de nuit et en fonction de l'état de la chaufferie. IV. SYNTHESE DES ANALYSES MENÉES SUR LES UX TERRAINS. Ces analyses révèlent que les échanges verbaux à la rencontre ne visent pas seulement à assurer la continuité des opérations de conduite initiées et ne constituent pas une simple transmission d'informations de l'opérateur descendant à l'opérateur montant. Les activités de planification y sont importantes, la gestion du système fait partie intégrante des échanges, ces échanges permettent également d'entretenir l'expertise des opérateurs en comblant l'absence de feed-back de l'opérateur descendant concernant certaines opérations initiées lors de son dernier poste... Ils permettent l'adaptation essentielle à la situation particulière de relève, qu'il s'agisse des caractéristiques individuelles des opérateurs ou des spécificités liées à l'état du processus. Ils sont donc le résultat d'une interaction entre deux opérateurs, eux-mêmes en interaction avec une situation particulière de conduite. Mais ces échanges reflètent également des caractéristiques plus globales de la situation. Le taux d'échange est ainsi deux fois plus important entre chefs de bloc qu'entre conducteurs de la machine à papier (39,85 séquences en moyenne dans la première situation vs 20,29 dans la seconde). Ces caractéristiques plus globales concernent : • le nombre de variables de conduite en interaction. Les différents objets évoqués sont beaucoup plus importants dans le second terrain d'étude que dans le premier ; • la variété des situations. Le système de rotation, la modification des activités en fonction des différentes factions, et les particularités du processus conduisent à une plus forte variabilité des situations de relève sur le second terrain d Chapitre 3. Tentative d'analyse quantitative des contenus des échanges verbaux en phase de relève de poste que dans la papeterie. Cette variabilité se traduit par des variations plus importantes du taux d'échange des opérateurs. Ainsi, tandis que l'écart type observé pour le nombre de séquences représente environ un cinquième de la moyenne dans la première situation d'étude, celui-ci représente presque un tiers de la moyenne dans la deuxième situation. Concernant le nombre d'énoncés, cette variabilité est encore plus marquée, puisque l'écart type représente environ un quart de la moyenne dans la première situation d'analyse, mais presque la moitié de la moyenne dans la seconde. • le degré de médiatisation et d'automatisation de la conduite. L'importance des séquences évoquant le système de conduite dans la deuxième situation d'étude reflète sans aucun doute la forte médiatisation et automatisation de la conduite. C'est là un point essentiel qui distingue les deux terrains d'analyse. Le système de conduite représentait un objet très rarement évoqué dans la première situation d'analyse, où l'informatisation est partielle et où les interventions manuelles et directes sur le processus restent prédominantes, si bien que les séquences évoquant ces objets avaient été classées parmi les informations "autres". Ainsi, une grande part de l'activité des chefs de bloc consiste à gérer le système de conduite lui-même, ce qui s'explique également par le fait que les opérateurs ont pour consigne de s'informer lors de la relève sur les verrines et messages du système de conduite. Cette activité n'est pas observée lors des échanges verbaux entre conducteurs de machine. Ceci explique sans doute aussi que les principales variables de conduite soit davantage évoquées sous forme d'informations directes dans la seconde situation d'analyse et que les séquences relatant une activité des opérateurs soient beaucoup plus importantes dans la première situation d'analyse que dans la seconde (ces activités représentent au total 33,17% des séquences dans la première situation d'analyse, mais seulement 17,48% dans la seconde). • la formalisation par la hiérarchie de la période de relève. La moindre importance des séquences "activités" dans la seconde situation d'analyse est sans doute liée au moment de la relève, mais aussi, et contrairement à la première situation d'analyse, à l'existence de consignes concernant cette période de travail. Ces consignes établissent qu'en cas de manoeuvre de courte durée à cette période, celle-ci doit être effectuée par l'équipe descendante ; par consigne, les changements d'état sont rares à cette période. Ainsi, il est rare que des activités spécifiques soient réalisées au moment des échanges, sauf cas de réalisation d'essais nucléaires ou de disposition des circuits de sûreté. Dans la première situation d'analyse par contre, ces situations sont plus fréquentes. Chapitre 3. Tentative d'analyse quantitative des contenus des échanges verbaux en phase de relève de poste Ainsi, les échanges peuvent être écourtés au profit d'interventions immédiates sur le processus (cas des situations incidentelles). • les contraintes de production. Tandis que dans la première situation, les contraintes de production sont importantes, celles-ci sont quasi-inexistantes dans la seconde situation d'analyse : la chaufferie sert essentiellement à la réalisation d'essais nucléaires et à la formation. Ceci explique sans doute la très rare apparition d'échanges liés à des activités concomitantes de la rencontre dans la seconde situation d'analyse et la priorité donnée à la conduite du processus (au détriment des échanges verbaux) lors de situations incidentelles dans la première situation d'analyse. • le système de rotation et la durée des activités effectuées (sur ce sujet, voir Grusenmeyer, 1991). La gestion du processus se fait à plus court terme sur le second terrain d'analyse (un planning de la semaine est disponible, mais il est précisé, voire modifié chaque jour par les supérieurs ; les conducteurs de la machine à papier disposent au contraire des feuilles de fabrications correspondant à plusieurs fabrications futures). Cette gestion du processus à court ou long terme est sans doute très liée au délai de réponse du processus (très court dans la deuxième situation d'analyse, plus long dans la première). Les opérations menées sur la chaufferie ont ainsi une plus courte durée que celles effectuées par les conducteurs (une commande de papier peut durer plus d'une semaine et les réglages effectués à un moment donné peuvent avoir des répercussions sur la conduite future). Ces deux phénomènes expliquent sans doute que les informations sur les tâches soient nettement plus importantes dans le premier terrain d'étude que dans le second. Ce souci de planification des tâches est sans doute également lié au système de rotation mis en place. L'absence au poste de l'opérateur montant est en moyenne plus longue sur le deuxième terrain d'analyse, ce qui ne facilite pas les activités de planification. La situation et l'état du réacteur peuvent ainsi être complètement différents pour deux factions successives tenues par le même opérateur. Au contraire, la situation est plus stable pour les conducteurs, puisqu'ils conduisent le processus tous les jours de la semaine. • la répartition des tâches sur le processus. Tandis que les chefs de bloc ont essentiellement un rôle de détection des dysfonctionnements (les récupérations sont pour l'essentiel menées par les différents secteurs de maintenance), les conducteurs de machine doivent détecter, diagnostiquer et récupérer dans la mesure du possible les différents dysfonctionnements qui surviennent (ce n'est que dans le cas d'interventions très importantes qu'ils feront appel à la Chapitre 3. Tentative d'analyse quantitative des contenus des échanges verbaux en phase de relève de poste maintenance). Ceci explique le très faible pourcentage de séquences relatant une récupération des chefs de bloc, comparativement au pourcentage de séquences constituant des informations directes sur les dysfonctionnements, et une moins forte différenciation de ces deux pourcentages sur le premier terrain d'étude. • le degré de définition des différents états du processus et la variabilité conséquente des activités des opérateurs. Alors que sur la chaufferie, les différents états du processus (AF, ACCR, ACCN...) sont strictement définis par des valeurs précises des principaux paramètres de conduite et par la configuration du processus, les différents états de la machine à papier ne sont pas définis. Il n'y a d'ailleurs pas réellement d'équivalence dans un cas et dans l'autre, même si la machine à papier peut être arrêtée pour une longue ou courte durée (situation d'entretien), ou en marche (fabrication en cours ou changement de fabrication). Ainsi, la nécessité d'identifier la situation et l'état du processus lors des échanges n'a pas lieu d'être dans la seconde situation d'analyse. L'état du processus est déjà défini. Les opérateurs n'ont donc qu'à se transmettre cette information et peuvent par conséquent se focaliser sur la conduite du processus (informations précises sur les principaux paramètres de conduite). Au contraire, les échanges entre conducteurs de la machine à papier vont se centrer sur l'identification de l'état du processus, d'autant que cet état a des conséquences directes sur la gestion de leurs activités de prise de poste (ce qui n'est pas le cas pour les différents états de la chaufferie : la variabilité des activités des opérateurs en fonction de l'état du processus est moins grande dans cette dernière situation). Les informations précises concernant la conduite seront alors prélevées en prise de poste, sauf cas de difficultés particulières. Ainsi, tandis que les échanges à la rencontre visent aussi dans ce dernier cas à identifier de façon globale l'état du processus et la situation, les échanges entre chefs de bloc permettent essentiellement d'assurer, par des informations précises les principaux paramètres, la continuité de la conduite. Ainsi, les échanges verbaux en phase de relève de poste sont déterminés : • par l'organisation du travail mise en place : le système de rotation des opérateurs (parce qu'il détermine leur taux de rencontre, la durée d'absence au poste de l'opérateur montant), la formalisation de la période de relève, la modification des activités selon les postes, la répartition des tâches sur le processus de fabrication... - 131 - Analyses et résultats Chapitre 3. Tentative d'analyse quantitative des contenus des échanges verbaux en phase de relève de poste • par les caractéristiques du processus et les activités des opérateurs : complexité de la situation, degré d'automatisation et de médiatisation de la conduite, contraintes de production, durée des activités effectuées et variabilité de ces activités en fonction de l'état du processus, gestion du processus à court ou long terme, délai de réponse du processus... • par les caractéristiques individuelles des opérateurs (certains guidant davantage les échanges que d'autres, par exemple). - 132 - Analyses et résultats Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? Chapitre 4. PEUT-ON IDENTIFIER LES CAS DE CONSTRUCTION D'UNE REPRÉSENTATION FONCTIONNELLE PARTAGÉE? Les précédentes analyses ont permis de définir le contenu des échanges verbaux entre opérateurs, l'importance relative de ces contenus et leurs variations en fonction de différents indicateurs de contexte liés à l'organisation du travail, aux caractéristiques du processus, aux activités des opérateurs... Elles ne permettent toutefois pas de savoir si les deux opérateurs disposent à la fin des échanges de représentations fonctionnelles différentes ou partagées, si une mise en commun a été réalisée. Or, ces éléments sont importants à considérer dans une étude de la phase de relève de poste si l'on veut évaluer le caractère opérationnel des échanges verbaux et les risques présentés par ces échanges. Par ailleurs, les différentes séquences d'échange ne sont probablement pas équivalentes de ce point de vue, les différents objets évoqués au cours de ces séquences ne nécessitant certainement pas tous la construction in situ, et à travers les échanges, d'une représentation fonctionnelle partagée. C'est donc à cette mise en commun effectuée in situ, et par les échanges, que nous allons nous intéresser. Plus exactement, cette seconde analyse vise à déterminer un certain nombre de critères permettant de repérer les séquences au cours desquelles les deux opérateurs devraient se créer une représentation fonctionnelle partagée. I. RECHERCHE DE CRITÈRES PERMETTANT DE REPÉRER LES CAS DE CONSTRUCTION D'UNE REPRÉSENTATION FONCTIONNELLE PARTAGÉE. 1. Toutes les séquences ne sont pas équivalentes. Tous les objets évoqués ne devraient pas nécessiter la construction in situ d'une représentation fonctionnelle partagée. Trois types de séquences différentes sont théoriquement possibles, ces trois types de séquences pouvant coexister au sein d'une même relève : • des séquences au cours desquelles les deux opérateurs ont déjà une représentation partagée qu'il suffit d'instancier. En effet, en situation de relève de poste, les opérateurs disposent en principe des mêmes compétences, ils effectuent les mêmes tâches, ont les mêmes fonctions. Ils devraient donc disposer d'un certain nombre de savoirs partagés, de connaissances communes ou partagées, d'autant qu'ils sont expérimentés et Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? que les objets ou situations évoqués sont habituels. Leur langage sera alors être très opératif, les échanges très réduits, cette réduction et le caractère opératif des échanges étant indicatifs de l'existence de systèmes de références communs (Navarro, 1991), de l'intériorisation de connaissances communes (Falzon 1991 a et b, Savoyant, 1977, 1984, 1985...). Par conséquent, l'ajustement des deux opérateurs à travers les échanges ne pourra être directement observable à travers les échanges verbaux. Chaque opérateur dispose de connaissances suffisantes pour comprendre et interpréter les informations fournies par l'autre, sans que cela ne nécessite une mise en partage au sein de l'interaction. Une actualisation ou une réactualisation des informations concernant l'objet évoqué seront suffisantes. • des séquences au cours desquelles les deux opérateurs ne parviendront pas à une mise en partage, soit parce qu'ils ne parviennent pas à s'ajuster (les deux opérateurs ont des représentations sensiblement différentes ou vicariantes), soit parce que les échanges verbaux sont élagués ou inexistants (cas d'un oubli ou de fortes contraintes temporelles conduisant à une réduction des échanges). Quoi qu'il en soit, les deux opérateurs n'ont pas de représentation fonctionnelle partagée à la fin des échanges. • des séquences au cours desquelles les deux opérateurs se construisent au sein de l'interaction et grâce aux échanges verbaux une représentation fonctionnelle partagée (cas de situations problématiques ou inhabituelles par exemple). Ainsi, les différentes séquences d'échange entre opérateurs ne sont probablement pas équivalentes. Elles devraient se différencier sur un certain nombre de points. • Dans le cas où les deux opérateurs disposent d'un certain nombre de connaissances communes ou partagées, leur langage devrait être très opératif, leurs échanges réduits. Au contraire, lorsque les deux opérateurs se construisent in situ une représentation fonctionnelle partagée, l'ajustement des deux opérateurs devrait nécessiter davantage d'échanges d'informations. Selon la théorie de l'architecture conversationnelle (Roulet & al, 1991) sur laquelle s'appuie l'analyse du discours, les échanges composés de plus de trois constituants sont en effet la manifestation d'une sorte de transaction entre locuteurs. L'échange dépourvu de "complétude interactionnelle" se poursuit jusqu'à l'atteinte d'un double accord, permettant la clôture de l'échange. Un ou plusieurs échanges subordonnés pourront alors viser l'atteinte de ce double accord. Ainsi, ce partage, cette mise en commun, s'ils se réalisent au cours de l'interaction, nécessiteront un certain nombre d'échanges d'informations. Les Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? différentes séquences d'échange devraient, par conséquent, se différencier en fonction du nombre d'informations échangées. Les premières devraient être courtes, les secondes plus longues. • Dans le cas d'une simple instanciation par les opérateurs d'une représentation fonctionnelle déjà partagée, une simple transmission d'informations de l'opérateur descendant à l'opérateur montant devrait être suffisante. Par contre, si les deux opérateurs se construisent coopérativement, ensemble, une représentation fonctionnelle partagée in situ, l'opérateur montant devrait largement participer à ces échanges. Il est toutefois possible que cette construction ne se fasse pas de façon interactive, que l'opérateur montant accepte les informations fournies par son collègue, sans se manifester. Mais, il est alors impossible d'affirmer, à partir des seuls échanges verbaux, si une mise en partage a été réalisée. Le cas où seul l'opérateur descendant donnerait des informations à son collègue ne permet pas de décider, à partir des seuls échanges verbaux, si les deux opérateurs se sont constitués in situ une représentation fonctionnelle partagée ; ne serait-ce que parce que la manifestation d'un double accord suppose une participation de l'opérateur montant aux échanges. La situation est alors indécidable, à moins que l'opérateur montant ne participe aux échanges. Quoi qu'il en soit, si les échanges visent une simple instanciation d'une représentation partagée, l'opérateur descendant devrait principalement participer à l'échange. Si les deux opérateurs se construisent coopérativement une représentation fonctionnelle partagée, ils devraient tous deux participer aux échanges. Les différentes séquences devraient alors se différencier en fonction du degré de participation de l'opérateur montant à la séquence. • Du fait de la succession à un même poste d'opérateurs différents, les deux opérateurs, montants et descendants, ne disposent pas toujours d'un historique complet concernant un événement ou l'évolution d'un objet particulier. Ils auront selon les cas, aucune, une partie voire toutes les informations. C'est sans doute là la principale difficulté liée à la situation de relève. Un des moyens essentiels des opérateurs de s'ajuster l'un à l'autre in situ sera alors sans doute de reconstruire l'évolution temporelle de l'objet évoqué. Cette reconstruction pourra selon les cas se faire de façon individuelle (cas où un des deux opérateurs dispose de l'ensemble des informations) ou de façon collective (cas où les deux opérateurs disposent chacun d'une partie de ces informations). Les séquences au cours desquelles les deux opérateurs se construisent in situ une représentation fonctionnelle partagée devraient alors être caractérisées par ces Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? activités de reconstruction. Une telle activité ne sera sans doute pas nécessaire dans le cas où les deux opérateurs disposent déjà d'une représentation partagée qu'il suffit d'instancier. Les différentes séquences d'échange devraient donc se distinguer en fonction de ces activités de reconstruction. • Enfin, la nécessité de se construire in situ une représentation fonctionnelle partagée ne devrait pas être indépendante des contenus évoqués. Les opérateurs observés dans les deux situations d'analyse sont des opérateurs expérimentés. Ils disposent de connaissances opératives et n'auront probablement pas besoin pour des contenus habituels, non problématiques de se construire in situ une représentation fonctionnelle partagée. Par contre, lorsque des contenus problématiques sont évoqués, la nécessité d'une mise en partage devrait être accrue. C'est en effet sur ces contenus problématiques ou inhabituels, que les connaissances sont le moins stabilisées. Falzon (1991 a et b) met ainsi en évidence qu'en situation incidentelle, la conversation est anormalement longue, que les tours de parole sont plus longs et que les actes illocutoires se différencient de ceux utilisés en situation routinière. Par conséquent, les séquences évoquant des contenus habituels et celles traitant de contenus problématiques devraient se différencier sur l'ensemble des points énoncés précédemment. Nous nous proposons de tester ces différentes hypothèses générales. Il s'agit simplement ici de tester si les différentes séquences se distinguent sur ces différents points. Si c'est le cas, nous pourrons choisir a priori des séquences au cours desquelles nous nous attendons fortement à ce que les deux opérateurs se construisent in situ une représentation fonctionnelle partagée. Des analyses plus fines seront alors réalisées sur ces séquences, analyses qui devraient permettre une meilleure compréhension des mécanismes par lesquels les deux opérateurs s'ajustent ou non l'un à l'autre. Ce n'est qu'une fois ces nouvelles analyses réalisées que nous pourrons conclure si les deux opérateurs se sont construits in situ une représentation fonctionnelle partagée ou si au contraire ils ont des représentations sensiblement différentes. Ainsi, les analyses présentes ne permettent en aucun cas d'inférer à quel type de séquences parmi les trois types définis auparavant correspondent différentes séquences examinées. 2. Les critères susceptibles de différencier les séquences. Afin de tester ces différentes hypothèses générales, chaque séquence a été caractérisée par un certain nombre d'indicateurs Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? • par le nombre d'énoncés qu'elle contient, celui-ci étant indicatif du nombre d'informations échangées et de la longueur des séquences. • par la contribution de chacun des opérateurs à la séquence. Pour chaque séquence, le nombre d'énoncés évoqués par l'opérateur descendant d'une part, et par l'opérateur montant d'autre part, a été calculé et rapporté au nombre d'énoncés global de la séquence. Ceci permet d'obtenir une évaluation de la participation de chacun des opérateurs à la séquence. • par le nombre de références temporelles évoquées. Pour chaque séquence, le nombre de factions différentes évoquées par les opérateurs a été comptabilisé, qu'il s'agisse d'une référence explicite ("hier", "cette nuit") ou moins explicite ("Vous avez pas recassé"). L'extrait suivant illustre cette analyse. (...) OM : Vous avez pas recassé pour la euh première presse. (Faction N, N-2). OD : Ben non. Ils ont pas recassé cette nuit non plus. (Faction N-1). OM : Nous on a remis du collant ce matin par en dessous. (Faction N-2). OD : Non, j'ai vu ce matin (Faction N) j'ai dit tiens ils ont mis du collant. T'as tout enlevé au dessus par le fait. (Faction N-2). OM : Ben oui, ben on a terminé et puis on a remis 2, 2 bouts de collants dessous hein. Et puis, je repousse une mise au bon moi, je casse. On relève un peu, y avait encore de l'eau. On en a remis un troisième, parce que tu sais la bavette toute fine qui vient sous la lame... (Faction N-2). OD : Oui la... OM : Y avait encore de l'eau, alors on en a remis un troisième qui vient dessous. (Faction N-2). OD : Au dessus y a plus rien alors, juste sur le racle. (Faction N). OM : Non, y a plus rien dessus. (Faction N). (...) Le nombre de références temporelles évoquées est en effet indicatif d'une re construction par les deux opérateurs de l' évolution de l'objet ou de l'événement évoqué. • par la présence ou l'absence d'explication des op érateurs des liens entre l'événement ou l'objet et les activités qu'ils ont menés . L ' exemple suivant illustre une séquence au cours de laquelle une seule faction est év oquée et où l'opérateur de scendant développe une telle activité d'explication : OD : La lèvre 9,2. On l'a refermé ce matin (ACTIVITÉ), parce que sur plaque il faisait grenu (ÉVÉNEMENT). C'était grenu ou bien floculaire, mais... Bon, là on a encore baissé un peu la lèvre (ACTIVITÉ). C'est un peu moins grenu (ÉVÉNEMENT). Alors euh dans un premier temps, ça allait, ils ont rien dit de nouveau d'après c'qu'on avait fait sur la lèvre. OM : Elle était... OD : Parce qu'on l'a baissé. On l'a baissé pour la 225. (ACTIVITÉ). Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? La présence de ces activités d'explication est indicative d'une reconstruction temporelle de l'évolution de l'objet ou de l'événement évoqué par au moins un des deux opérateurs. Les différent es séquences devraient donc se différen cier par le nombre d'énoncés qui les composent, par la contribution de chacun des opérateurs, par le nombre de références temporelles évoquées et par la présence ou l'absence d'explication des opérateurs. Les séquences traitant de contenus problématiques, et donc les séquences informant de dysfonctionnements, devraient être caractérisées par un nombre d'énoncés importants, une contribution plutôt égalitaire des deux opérateurs, un nombre important de références temporelles et par la présence d'activités d'explication. Les séquences traitant de contenus habituels, notamment les "informations directes sur les objets" devraient être courtes, caractérisées par une forte contribution de l'opérateur descendant, un faible nombre de références temporelles et l'absence d'activités d'explication. Chaque séquence identifiée sur chacun des terrains d'étude est donc caractérisée par ces différents indicateurs. Elle a également été caractérisée précédemment par les différents descripteurs relatifs à son contenu. L'analyse menée ici vise à tester si, de façon globale, les différentes séquences se différencient en fonction de ces indicateurs. Elle vise également à tester si les séquences s'opposent sur ces indicateurs en fonction des descripteurs de contenus qui les caractérisent, notamment en fonction du type de messages et selon que l'objet abordé concerne une situation normale ou un dysfonctionnement. Seules les communications fonctionnelles sont envisagées ici. II. LES DIFFÉRENTES SÉQUENCES SE DISTINGUENT-ELLES EN FONCTION DES CRITÈRES ADOPTÉS? 1. Analyse sur le premier terrain d'étude. 1.1. Le nombre d'énoncés des séquences. 1.1.1. Analyse global e du nombre d'énoncés . - Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? Analyses et résultats Les précédentes analyses ont mis en évidence qu'une séquence d'échange est composée en moyenne de 6,12 énoncés. Cette moyenne est peu différente lorsque les seules communications fonctionnelles sont considérées (m = 6,64 énoncés). Mais, de fortes variations de cet indicateur sont observées puisque l'écart type est supérieur à la moyenne : σ = 8,33. Le minimum observé est ainsi d'un énoncé, tandis que le maximum est de 67. La valeur la plus fréquemment observée est d'un énoncé (22,60% des séquences sont constituées d'un seul énoncé). La majorité des séquences sont donc courtes. Le premier quartile correspond à 2 énoncés, la médiane est de 4 énoncés, le 3° quartile correspond à 9 énoncés. Et 9,62% des séquences sont supérieures à 16 énoncés (ce qui correspond au 9° décile). Par ailleurs, le calcul du rapport étendue sur déviation standard indique que la distribution est très hétérogène (ce rapport est de 7,92). Les séquences sont ainsi très différentes en fonction du nombre d'énoncés qu'elles contiennent. 1.1.2. Variations du nombre d'énoncés en fonction du type de messages. Le nombre moyen d'énoncés par séquence a été calculé en fonction du type de messages. Les résultats sont présentés dans le tableau 5. TYPE DE MESSAGES NOMBRE MOYEN D'ÉNONCÉS ÉCART TYPE EFFECTIF 3,27 3,69 91 3,39 3,27 31 8,14 5,87 29 Informations directes sur l'objet Informations sur une activité habituelle Informations sur une régulation Informations sur une récupération Informations sur un dysfonctionnement 8,89 5,55 9 15,82 14,41 34 Régulation structurale 8,86 5,22 14 TOTAL 6,64 8,33 208 Tableau 5. Nombre moyen d'énoncé s en fonction du type de messages. Ces résultats mettent en évidence : • des variations du nombre moyen d'énoncés en fonction du type de messages. Une augmentation de cet indicateur est constaté des séquences "informations directes sur l'objet" aux séquences "informations sur un dysfonctionnement" en passant par les séquences évoquant les activités des conducteurs ou d'autres Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? opérateurs . Les "informations directes sur les objets" sont les plus courtes, avec 3,27 énoncés en moyenne. La majorité d'entre elles (36,26%) sont composées d'un seul énoncé, et les trois quart d'entre elles sont inférieures à 5 énoncés. Les "informations sur les dysfonctionnements" sont les plus longues (15,82 énoncés en moyenne). Elles sont ainsi quasiment 5 fois plus importantes que les précédentes. Le maximum observé pour ces séquences est de 67 alors qu'il est de 18 pour les informations directes sur les objets. Les trois quart d'entre elles sont supérieures à 6 énoncés. • des écarts types importants pour chaque type de messages, ce qui tend à montrer que ce descripteur n'est pas le seul à déterminer la longueur de la séquence. Ainsi, l'écart type observé pour les séquences "informations directes sur l'objet" s'explique par des séquences très courtes, lorsqu'il s'agit d'informer sur une variable ou une sortie du processus. Les séquences informant des tâches sont par contre beaucoup plus longues, avec 8,27 énoncés en moyenne, puisque les opérateurs s'informent sur les différentes tâches à réaliser et planifient les activités de la prochaine faction. Concernant les séquences "informations sur les dysfonctionnements", l'écart type observé est également important, puisque ces séquences peuvent informer de l'absence de dysfonctionnement, d'un dysfonctionnement passé ou en cours. Dans le premier cas, le nombre d'énoncés est faible, dans le second il est plus important, surtout si le dysfonctionnement est actuel. Ce sont effectivement les séquences relatives à un dysfonctionnement ("informations sur un dysfonctionnement" et "récupérations") qui comportent le plus grand nombre d'énoncés ; les séquences évoquant des contenus habituels (activités habituelles des opérateurs, informations directes sur l'objet...) étant beaucoup plus courtes. 1.2. Contribution des opérateurs aux séquences. 1.2.1. Contribution globale des opérateurs aux séquences. La contribution moyenne de l'opérateur descendant sur l'ensemble des séquences est de 0,79. Elle est de 0,20 pour l'opérateur montant et 0,01 pour les autres opérateurs. C'est donc l'opérateur descendant qui contribue de façon majoritaire aux échanges. La rencontre semble donc être essentiellement une transmission d'informations de l'opérateur descendant à l'opérateur montant. Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? Toutefois, des variations relativement importantes de ces indicateurs sont observées, puisque les écarts types sont de 0,26 pour la contribution de l'opérateur descendant (c'est-à-dire environ un tiers de la moyenne) et 0,25 pour la contribution de l'opérateur montant (l'écart type observé est plus important que la moyenne). L'opérateur descendant participe seul à la majorité des séquences d'échange (47,59% d'entre elles se caractérisent par une contribution de l'opérateur descendant de 1). Mais la contribution de l'opérateur montant peut varier de 0 à 1. La participation des deux opérateurs à l'échange est donc variable. 1.2.2. Variations de la contribution des opérateurs en fonction du type de messages. La contribution de chacun des opérateurs aux séquences a été calculée en fonction du type de messages. Les résultats sont présentés dans le tableau 6. CONTRIBUTION OPÉRATEUR DESCENDANT CONTRIBUTION OPÉRATEUR MONTANT Régulation structurale 0,83 σ = 0,27 0,81 σ = 0,29 0,80 σ = 0,18 0,80 σ = 0,21 0,68 σ = 0,27 0,73 σ = 0,23 0,16 σ = 0,25 0,18 σ = 0,29 0,19 σ = 0,18 0,19 σ = 0,19 0,32 σ = 0,27 0,26 σ = 0,23 TOTAL 0,79 0,20 TYPE DE MESSAGES Informations directes sur l'objet Informations sur une activité habituelle Informations sur une régulation Informations sur une récupération Informations sur un dysfonctionnement EFFECTIF 91 31 29 9 34 42 208 Tableau 6. Contribution des opérateurs à l'échange en fonction du type de messages. Ces résultats mettent en évidence : • une contribution de l'opérateur descendant toujours plus importante que celle de l'opérateur montant. Un examen plus précis des résultats révèle toutefois qu'il existe des séquences pour lesquelles la contribution de l'opérateur montant est supérieure à celle du descendant. Ces séquences concernent essentiellement les "informations sur un dysfonctionnement" et les séquences "régulation structurale", ce qui tend à montrer que ce phénomène n'est pas indépendant du type de messages évoqués. Les séquences n'ont donc pas toujours la forme d'une transmission d'informations de l'opérateur descendant à l'opérateur montant. Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? • des variations de la contribution des deux opérateurs en fonction du type de messages. La contribution de l'opérateur montant peut passer du simple au double en fonction du type de messages. Cette contribution est la moins importante pour les "informations directes sur les objets" (m = 0,16) et la plus importante pour les "informations sur les dysfonctionnements" (m = 0,32). Les premières séquences ont donc davantage la forme d'une transmission d'informations de l'opérateur descendant à l'opérateur montant, les secondes celle d'un véritable dialogue des deux opérateurs. La forte contribution de l'opérateur montant aux séquences "régulation structurale" est également à noter. Elle s'explique par le fait que les interventions d'autrui peuvent avoir des répercussions importantes pour la conduite (cas d'un essai effectué sur les matières premières par exemple). Par ailleurs, certaines d'entre elles constituent une réponse à un dysfonctionnement rencontré par les opérateurs. • les écarts types sont importants. Ainsi, par exemple la contribution de l'opérateur montant aux "informations directes sur les objets" est variable. Elle est très importante lorsqu'il s'agit de s'informer sur les tâches ou les entrées (la contribution des opérateurs inclut en effet l'initiative), moins importante lorsqu'il s'agit de s'informer sur les sorties et inexistante concernant les informations sur les variables du processus. La participation la plus équilibrée des deux opérateurs à l'échange concerne effectivement les séquences relatives à des contenus problématiques ou inhabituels ("informations sur les dysfonctionnements"). Les séquences informant d'une récupération sont toutefois caractérisées par une faible contribution de l'opérateur montant, sans doute parce qu'il s'agit la plupart du temps de problèmes résolus dont l'opérateur descendant a seul connaissance. Les séquences évoquant des contenus habituels constituent par contre davantage des transmissions d'informations de l'opérateur descendant à l'opérateur montant. 1.3. Le nombre de références temporelles évoquées. 1.3.1. Analyse globale du nombre de références temporelles évoqué es . Le nombre moyen de références temporelles évoquées par séquence est de 1,53. Des variations assez importantes de cet indicateur sont observées, puisque l'écart type représente plus de la moitié de la moyenne (σ = 0,86). Le minimum est d'une référence temporelle, le maximum de 6. Dans 63,94% des séquences, une seule référence - 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? Analyses et résultats temporelle est évoquée. Mais 2 références temporelles sont évoquées dans 24,52% des séquences et au moins 3 références temporelles sont observées dans 11,54% des séquences. La distribution est donc assez hétérogène. Par conséquent, les séquences se différencient en fonction du nombre de références temporelles évoquées. 1.3.2. Variations du nombre de références temporelles évoquées en fonction du type de messages. Le pourcentage de séquences au cours desquelles sont évoquées une, deux, trois ou plus de trois références temporelles différentes a été calculé en fonction du type de messages. Les résultats sont présentés dans le tableau 7. TYPE DE MESSAGES Informations directes sur l'objet Informations sur une activité habituelle Informations sur une régulation Informations sur une récupération Informations sur un dysfonctionnement NOMBRE DE RÉFÉRENCES TEMPORELLES ÉVOQUÉES 1 2 3 >3 82,42% 14,29% 1,10% 2,20% 64,52% 29,03% 6,45% 0% 41,38% 51,72% 3,45% 3,45% 88,89% 11,11% 0% 0% 35,29% 26,47% 32,35% 5,88% Régulation structurale 42,86% 28,57% 14,29% 14,29% TOTAL 63,94% 24,52% 8,17% 3,37% Tableau 7. Nombre de références temporelles évoquées en fonction du type de messages. Ces résultats montrent que le nombre de références temporelles évoquées est variable en fonction du type de messages. Le pourcentage de séquences "informations directes sur l'objet" et "informations sur une récupération" au cours desquelles est évoquée une seule référence temporelle est important (82,42% et 88,89% respectivement). Ce dernier résultat s'explique par le fait que la plupart des récupérations évoquées font référence à des problèmes résolus. L'opérateur descendant informe alors simplement son collègue de la récupération effectuée. Les "informations sur les dysfonctionnements" ainsi que les séquences "régulation structurale" sont par contre caractérisées par un nombre important de références temporelles. Ainsi, 57,14% des séquences "régulation structurale" se caractérisent par l'évocation d'au moins deux références temporelles. Les activités d'autrui ont en effet Chapitre 4. Peut- on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? des répercussions directes sur la conduite. Ainsi, lorsque les deux conducteurs relatent ces activités, ils envisagent également leurs conséquences en termes de conduite du processus. 64,7% des séquences informant sur les dysfonctionnements se caractérisent par l'évocation d'au moins deux références temporelles et 38, 23% par l'évocation d'au moins trois références temporelles. Le nombre de références temporelles est donc le plus important pour ces séquences. Le fait que les "informations sur une régulation" se caractérisent pour 58,62% d'entre elles par l'évocation d'au moins deux factions est également à noter. L'analyse plus précise de ces séquences révèle que les opérateurs anticipent les conséquences éventuelles de cette régulation, expliquent la régulation effectuée sur la base d'événements passés... Ainsi, ce sont effectivement les séquences relatives à des dysfonctionnements qui comportent le plus grand nombre de références temporelles (le nombre de références temporelles évoquées est toutefois faible pour les "informations sur une récupération"). Celui-ci est par contre moins important lors de séquences évoquant des contenus habituels (cas des informations directes sur l'objet, des activités habituelles des opérateurs). 1.4. Les explications des opérateurs. 1.4.1. Analyse globale des explications des opérateurs. L'examen global de la présence / absence d'explications des opérateurs concernant les liens entre l'événement ou l'objet relaté et les activités qu'ils ont menées révèle que la majorité des séquences (72,60% d'entre elles) sont caractérisées par l'absence de telles explications. La présence de ces explications est observée pour seulement 27,40% des séquences. Les différentes séquences se distinguent donc peu sur cet indicateur. 1.4.2. Variations des explications en fonction du type de messages. Le pourcentage de séquences caractérisées par la présence d'une explication des opérateurs a été calculé en fonction du type de messages. Les résultats sont présentés dans le tableau 8. - Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? Analyses et résultats TYPE DE MESSAGES Informations directes sur l'objet Informations sur une activité habituelle Informations sur une régulation Informations sur une récupération Informations sur un dysfonctionnement PRÉSENCE / ABSENCE D'ACTIVITÉS D'EXPLICATION DES OPÉRATEURS ABSENCE PRÉSENCE 96,70% 3,30% 96,77% 3,23% 44,83% 55,17% 33,33% 66,67% 23,53% 76,47% Régulation structurale 64,29% 35,71% TOTAL 72,60% 27,40% Tableau 8. Pourcentages de sé quences caractéris ées par une explication des op érateurs ( conce r nant les liens activité s / événements ou objets relatés). L'analyse de ces résultats révèle que la présence d'explications des opérateurs est variable en fonction du type de messages. Tandis que les "informations directes sur les objets" et "les informations sur les activités habituelles" sont caractérisées par l'absence de ces activités, les séquences relatives à des contenus inhabituels ou problématiques (informations sur une récupération ou un dysfonctionnement) font fréquemment l'objet d'explications des opérateurs (66,67% et 76,47% de ces séquences sont concernées). Ainsi, les "informations sur un dysfonctionnement" représentent presque la moitié des séquences (45,61% des séquences) pour lesquelles une telle explication des opérateurs est observée. L'importance de ces explications lors de séquences informant d'une régulation des opérateurs est également à noter. Les opérateurs expliquent généralement les régulations qu'ils ont effectuées en évoquant la cause de cette régulation. Les régulations effectuées régulièrement et ayant un caractère routinier ne feront pas l'objet de telles explications. La présence d'explications des opérateurs est donc fortement liée au contenu évoqué. Les contenus habituels ne donnent généralement pas lieu à de telles explications. Ces explications sont par contre très importantes lors de l'évocation de contenus inhabituels ou problématiques (cas des informations sur un dysfonctionnement ou sur une récupération des opérateurs). - Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? Analyses et résultats 2. Analyse sur le second terrain d'étude. 2.1. Le nombre d'énoncés des séquences. 2.1.1. Analyse globale du nombre d'énoncés . Les analyses précédentes avaient mis en évidence un nombre moyen d'énoncés par séquence de 6,09. La même analyse réalisée sur les seules communications fonctionnelles révèle que ces séquences comportent 7,14 énoncés en moyenne. Mais les variations de cet indicateur sont importantes puisque l'écart type est supérieur à la moyenne (σ = 7,64). Le nombre minimum d'énoncés d'une séquence est de 1, le maximum de 60. Les séquences sont le plus fréquemment composées d'un seul énoncé ; toutefois cela ne concerne que 16,39% d'entre elles. Le premier quartile correspond à 2 énoncés, la médiane est de 5 énoncés et le troisième quartile correspond à 9 énoncés. Ainsi, la majorité des séquences sont courtes. Le calcul du rapport étendue / déviation standard indique que la distribution est très hétérogène (ce rapport est égal à 7,72). Ainsi 9,56% des séquences comprennent plus de 16 énoncés, ce qui correspond au 9° décile. Les séquences d'échange se distinguent donc très fortement en fonction du nombre d'énoncés qu'elles contiennent. 2.1.2 Variations du nombre d'énoncés en fonction du type de messages. Le nombre moyen d'énoncés par séquence a été calculé en fonction du type de messages. Les résultats sont présentés dans le tableau 9. TYPE DE MESSAGES NOMBRE MOYEN D'ÉNONCÉS ÉCART TYPE EFFECTIF 5,35 5,95 206 8,62 6,22 29 11 11,58 28 Informations directes sur l'objet Informations sur une activité habituelle Informations sur une régulation Informations sur une récupération Informations sur un dysfonctionnement 8,29 5,47 7 10,02 9,19 64 Régulation structurale 7,97 8,31 32 TOTAL 7,14 7,64 366 - 146 - Analyses et résultats Chapitre 4. Peut-on identifier les cas de construction d'une représentation fonctionnelle partagée? Tableau 9. Nombre moyen d'énoncés en fonction du type de messages. Ces résultats met tent en é vidence : • des variations du nombre moyen d'énoncés en fonction du type de messages . Une augmentation de cet indicateur est observée des séquences "informations directes sur l'objet" aux séquences informant d'une régulation ou d'un dysfonctionnement, en passant par les séquences évoquant d'autres activités des opérateurs . Les "informations directes sur l'objet" sont les plus courtes avec 5,35 énoncés en moyenne. La majorité d'entre elles sont constituées d'un seul énoncé (23,30%) et plus des trois quart d'entre elles sont inférieures à 8 énoncés. Les informations sur les dysfonctionnements et sur les régulations sont les plus longues (respectivement 10,02 et 11 énoncés en moyenne). Elles sont deux fois plus importantes que les précédentes. Le maximum observé pour ces séquences est respectivement de 45 énoncés et 60 énoncés. Il est seulement de 39 énoncés pour les "informations directes sur les objets". Les trois quart des "informations sur les dysfonctionnements" contiennent plus de 13 énoncés et trois quart des "informations sur une régulation" comportent plus de 12 énoncés. La longueur de ces dernières séquences s'expliquent par les nombreuses variables de conduite en interaction. Les opérateurs évoquent, au cours d'une même séquence , l'ensemble des variables permettant de réguler la température primaire.
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2,019
Madīḥ al-karāhiya de Ḫālid Ḫalīfa
None
French
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ISSN 0806-198X Madīḥ al-karāhiya de Ḫālid Ḫalīfa : corps féminin, violence et religieux* MARTINA CENSI (Université de Bergame, Italie) Abstract In Madīḥ al-karāhiya (The Praise of Hatred, 2006), Syrian novelist Khālid Khalīfa devotes his art to the literary representation of martyrdom. In this novel, the relationship between body, violence and identity is explored in order to represent and challenge any form of repression—be it political or religious—that ravaged Syria during the 1980s. The novel’s female protagonist is a teenager from a Muslim family of Aleppo. Upset by the changes that are happening to her body—she is becoming a woman—her wish to escape sexual desire and to conceal the signs of her femininity brings her closer to a group of Muslim extremists who practice armed struggle. By focusing on this female character, Khālid Khalīfa questions the role of violence and religion in the process of the individual’s subjectivation. The adolescent female body becomes the symbol of the individual’s rejection of norms, a nonconformism that cannot be accepted by society. For the protagonist, martyrdom is the means to define her individual identity and to appropriate her body by imposing it on the public space and on her community. Key words: Syria, novel, Khālid Khalīfa, martyrdom, body, identity, violence. Résumé Dans Madīḥ al-karāhiya (L’éloge de la haine), roman publié en 2006, l’écrivain syrien Ḫālid Ḫalīfa se consacre à la représentation littéraire du martyre. Dans cette œuvre, la relation entre corps, violence et identité devient un moyen pour représenter et contester toute forme de pouvoir répressif – politique et religieux – ayant ravagé la Syrie pendant les années 1980. La protagoniste est une adolescente – issue d’une famille musulmane d’Alep – bouleversée par les changements de son corps. Sa volonté d’échapper à ses désirs sexuels et à la manifestation de plus en plus visible de sa féminité entraîne son rapprochement d’un groupe d’extrémistes musulmans qui pratiquent la lutte armée. En portant son attention sur l’individu féminin, Ḫālid Ḫalīfa s’interroge sur le rôle de la violence liée à la religion dans les processus de subjectivation des individus. Le corps féminin adolescent devient le symbole de la différence « hors-norme » de l’individu qui n’arrive pas à trouver sa place dans la société. Le martyre est le moyen pour la protagoniste de définir son identité individuelle et de s’approprier son corps en l’imposant sur l’espace public et sur la collectivité. Mots-clés: Syrie, roman, martyre, corps, identité, violence. Dans son introduction à l’ouvrage collectif Martyrdom in Literature: Visions of Death and Meaningful Suffering in Europe and the Middle East from Antiquity to Modernity, Friederike Pannewick aborde les thèmes de la violence religieuse et du martyre en tant que sujets qui, au cours de l’histoire, ont toujours suscité le débat (PANNEWICK 2004: 1). Au cours de ces dernières décennies, ces sujets ont envahi la presse et les réseaux sociaux, surtout après * Je souhaite remercier tout spécialement Salomé Caillot pour son aide précieuse dans la relecture de cet article. Journal of Arabic and Islamic Studies • 19 (2019): 1-14 © Martina Censi, Université de Bergame, Italie Martina Censi Page | 2 la chute des régimes dictatoriaux au Moyen Orient – comme en Iraq et en Syrie – et à l’émergence de Daech.1 Dans notre rôle de lecteurs et de spectateurs, nous avons donc l’habitude d’entendre parler de ces phénomènes notamment dans les domaines de la politique et du journalisme. Dans le cadre de cet article, notre attention sera portée sur le domaine littéraire, et tout spécialement sur le genre du roman, et sur son rôle dans la représentation et la remise en question des catégories évoquées. Le roman avance-t-il une réflexion alternative sur ces catégories ? Contribue-t-il activement à remettre en question et ainsi à déconstruire les stéréotypes qui les entourent ? La production littéraire arabe des dernières décennies se focalise souvent sur la représentation de la violence religieuse comme effet de toute forme de répression des libertés fondamentales des individus dans les sociétés arabes. Ces mêmes thèmes sont approfondis également pour explorer les problématiques identitaires impliquant les individus et les groupes dans les sociétés contemporaines. Le personnage du martyr est présent dans plusieurs œuvres récentes devenues célèbres, comme un certain nombre de romans libanais publiés durant et après la guerre civile,2 ou plus récemment le bestseller de 2002 ʿImārat Yaʿqūbiyān (L’immeuble Yacoubian) du romancier égyptien ʿAlāʾ al-Aswānī, dans lequel on représente le parcours d’extrémisation religieuse d’un jeune égyptien issu d’une classe sociale défavorisée. Ici le parcours d’extrémisation religieuse et le martyre sont représentés comme une conséquence directe des injustices des institutions corrompues et dépravées de l’État, subies à plusieurs reprises par le personnage. 3 Parmi les auteurs qui se sont récemment consacrés à la représentation littéraire du martyre, on trouve également le romancier syrien Ḫālid Ḫalīfa qui en fait le thème central de son roman Madīḥ al-karāhiya (Éloge de la haine), publié en 2006. Dans cette œuvre, la relation entre corps, violence et identité est au centre de la narration et devient un moyen pour représenter et contester toute forme de pouvoir répressif – politique et religieux – ayant ravagé la Syrie pendant les derniers décennies. L’auteur narre le parcours d’extrémisation religieuse d’une jeune fille syrienne originaire d’Alep. La protagoniste traverse un double processus de changement impliquant à la fois son identité individuelle et son identité collective. Le changement de l’identité individuelle est représenté à travers le changement de son corps et le passage de celui-ci du statut de corps enfantin au statut de corps de femme. Le changement de l’identité collective est représenté à travers le parcours d’affiliation progressive de la protagoniste à un groupe d’extrémistes religieux qui pratiquent la lutte armée. À travers ce personnage féminin adolescent en devenir, Ḫālid Ḫalīfa vise à explorer la relation entre violence, religieux et identité dans la société syrienne des années 1980. Ḫālid Ḫalīfa est né à Alep, Syrie, en 1964. Après des études à la faculté de droit, il s’est consacré à l’écriture. Scénariste de plusieurs films et séries télévisées, fondateur d’une 1 Daech est un acronyme qui vient de l’arabe et qui est utilisé pour se référer à l’organisation de l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL). 2 À ce propos voir, parmi les autres, MEJCHER-ATASSI 2004. 3 Pour une critique sur la représentation du parcours psychologique d’extrémisation religieuse du personnage de Ṭāhā dans ʿImārat Yaʿqūbiyān voir l’étude de NICOSIA 2014: 93-95. • 19 (2019): 1-14 Madīḥ al-karāhiya de Ḫālid Ḫalīfa : corps féminin, violence et religieux revue culturelle, Aleph, il a publié plusieurs romans qui l’ont placé parmi les écrivains syriens les plus reconnus. Après une nomination en 2008 pour l’International Prize for Arabic Fiction (IPAF) avec Éloge de la haine, il a obtenu en 2013 le prestigieux prix Naguib Mahfouz à l’Université américaine du Caire pour son roman Lā sakākīn fī maṭābiḫ hāḏihi lmadīna (Pas de couteaux dans les cuisines de cette ville). Son dernier roman, publié en 2015, s’intitule al-Mawt ʿamal šāqq (La mort est une corvée).4 Féminité et masculinité dans Éloge de la haine Madīḥ al-karāhiya se présente comme un récit intergénérationnel se déroulant autour de la vie d’une famille traditionnelle musulmane et aisée de commerçants d’Alep, pendant les années 1980. À travers les aventures impliquant les membres de cette famille, l’auteur restitue l’image d’une société marquée autant par la répression policière que par la corruption, mais aussi par les méfiances communautaires, le fanatisme religieux et une profonde crise morale. Cette famille, qui représente un microcosme de la société syrienne de l’époque, est composée de quatre sœurs, trois frères, de l’épouse de l’un de ces trois frères et du domestique aveugle de la famille. La narration se déroule principalement autour des quatre personnages féminins : trois sœurs adultes et leur nièce adolescente. Cette dernière, véritable protagoniste du récit, décide de quitter la maison de ses parents pour aller habiter avec ses tantes maternelles dans la vieille maison de famille située au cœur de l’ancienne ville d’Alep. La maison familiale est le microcosme habité par ces trois sœurs qui incarnent trois modèles différents de féminité. Ṣafāʾ et Marwa cherchent à exprimer librement leur féminité en rêvant d’amants impossibles, en se maquillant et en chantant les chansons d’Oumm Kalthoum. Elles jouent un rôle significatif dans la formation de leur nièce qui traverse une phase de passage de l’âge enfantin à l’âge adulte. Elles cherchent notamment à l’accompagner dans le parcours de mûrissement de son corps, pour l’aider à incarner sa nouvelle identité de femme adulte comme un événement spontané et agréable. Au contraire, Maryam, leur troisième sœur, est une femme très religieuse et conservatrice, refoulée, qui exerce une grande influence sur sa nièce, en lui rappelant à tout moment que le corps est une entité sale et immorale, source de péché et qu’il faut cacher les marques corporelles de la féminité. On retrouve également d’autres personnages féminins qui jouent un rôle important dans la formation de la protagoniste : Zahrāʾ, la femme – dévote et au joli visage – de son oncle Bakr ; Hadja Raḍiyya, une pieuse musulmane proche des tantes de la protagoniste qui organise des séances mystiques pour femmes ; Hadja Suʿād, une activiste affiliée aux Frères musulmans qui accompagne la protagoniste dans son parcours d’extrémisation religieuse. La famille comprend également les trois oncles de la protagoniste – Salīm, Bakr et ʿUmar – et ʿAbdallāh, le mari de sa tante Ṣafāʾ. Tandis que Salīm ne joue pas un rôle significatif dans la narration, les deux autres frères incarnent deux modèles de masculinité aux antipodes : Bakr est un musulman conservateur – affilié aux Frères musulmans – qui guide sa nièce dans un parcours d’extrémisation religieuse, en lui donnant à chacune de leurs 4 Une étude récente sur ce roman est celle de NASSIF 2019. • 19 (2019): 1-14 Page | 3 Martina Censi Page | 4 rencontres des lectures religieuses ; son frère ʿUmar est un libertin qui passe sa vie à séduire les femmes et qui se livre à la contrebande. Les deux travaillent, pendant un temps, dans le commerce des tapis, activité familiale depuis plusieurs générations. ʿAbdallāh, le mari de l’une des tantes de la protagoniste, suit quant à lui un parcours d’extrémisation religieuse qui l’amènera à intégrer un groupe islamiste djihadiste et à s’installer en Afghanistan avec les combattants arabes pour prendre part dans le conflit. Ḫalīfa s’appuie sur ces personnages – et notamment sur les personnages féminins – pour explorer la société syrienne de l’époque ainsi que le rôle de la violence liée à la religion et au despotisme dans les processus de subjectivation des individus. L’auteur se consacre à une phase précise de l’histoire syrienne : les années 1980. Il s’agit d’une période d’attentats djihadistes contre le régime de Hafez al-Asad qui entraîne une répression brutale et sanglante menée par les milices du régime baasiste principalement dans les villes de Hama et d’Alep, et qui fera des milliers de victimes. Ḫalīfa s’appuie sur cette phase de l’histoire syrienne pour restituer l’affrontement entre le despotisme et l’islamisme radical qui a ravagé la Syrie pendant les années 1980. La protagoniste du roman est une adolescente d’Alep, élevée dans une famille musulmane traditionnelle, qui est à la recherche de son identité individuelle et collective. Le roman narre le parcours de « formation djihadiste » à travers l’extrémisation graduelle de cette adolescente qui passe des lectures religieuses rigoristes proposées par son oncle Bakr, à une interprétation violente de l’Islam dans des groupes pour filles, affiliées aux Frères musulmans, sous le guide de Hadja Suʿād. Dans le roman, l’extrémisme religieux est associé au despotisme du parti Baas au pouvoir. Violence et terrorisme sont présentés comme le langage sans mots partagé par l’État et les groupes djihadistes. Comme l’explique Adriana Cavarero dans une étude sur la violence et le terrorisme contemporain, la spécificité du terrorisme est de viser à effacer la singularité des individus à travers des actes violents adressés à une collectivité (CAVARERO 2007). Dans le roman, en revanche, l’acte terroriste – de l’État ou des groupes djihadistes – semble être fonctionnel à la définition de l’identité individuelle et collective du terroriste, dans ce cas incarné par la jeune protagoniste. À travers le point de vue de la protagoniste de Madīḥ al-karāhiya – narrateur homodiégétique – la question de l’appartenance aux différents groupes politiques et religieux caractérisant la société syrienne des années 1980 est explorée. La question des appartenances est directement liée à la question identitaire. À ce sujet, il n’est pas anodin que l’auteur ait choisi un personnage adolescent pour représenter le parcours d’extrémisation et de martyre. L’adolescent est – par excellence – un sujet « en devenir », un sujet en plein changement, placé vis-à-vis d’un très riche éventail de possibilités et par conséquent malléable. Le processus de subjectivation de l’adolescent passe à travers l’identification au groupe : la dimension individuelle de l’identité est définie en passant par l’identité collective. La particularité du roman est de porter l’attention sur un personnage féminin qui choisit de se consacrer à la lutte armée, même si finalement elle n’arrive pas à achever son parcours de martyre. Grâce à ce personnage, Ḫalīfa contribue d’un côté à déconstruire l’image stéréotypée de femme passive et objectivée, soumise à la volonté des membres masculins de la famille et de l’autre côté nous permet d’explorer le phénomène de la participation active des femmes dans les luttes djihadistes, qui demeure peu analysé. • 19 (2019): 1-14 Madīḥ al-karāhiya de Ḫālid Ḫalīfa : corps féminin, violence et religieux Corps, féminité et espace Dans Madīḥ al-karāhiya, le cadre spatial joue un rôle significatif dans la représentation du parcours de changement et de recherche identitaire de la protagoniste. Dans la première partie du roman, les deux endroits principaux qui occupent la narration sont la grande maison familiale où la protagoniste habite avec ses tantes, et l’école secondaire pour filles où elle fait ses études. La maison représente le lieu des origines, de la cyclicité des traditions et de l’enfance, un milieu à la fois rassurant et angoissant dans lequel la protagoniste vit et exprime ses craintes par rapport aux changements impliquant son corps en train de passer du statut de corps enfantin à celui de corps de femme. La maison est un espace complètement séparé de l’espace extérieur, un lieu de protection et d’enfermement à la fois, une sorte de coquille où se cacher, marquée par la présence féminine et dont l’accès est presqu’interdit aux hommes qui ne font pas partie de la famille. Le seul homme qui vit avec les trois sœurs et leur nièce est Raḍwān, le serviteur aveugle, qui les accompagne durant leurs rares sorties en ville. C’est seulement grâce à son état de cécité qu’il a été accepté dans la maison et qu’il a le droit d’interagir librement avec les femmes de la famille. Dans cette maison traditionnelle, témoin de la longue histoire de l’illustre famille aleppine, la protagoniste commence à être bouleversée par les changements de son corps adolescent et par un désir qui ne la laisse pas dormir la nuit : ،‫ ميتد المل اىل اكفة أعضاء جسدي‬،‫ يشء يف صدري يؤملين‬، [...]،‫أمتلمل يف الفراش‬ ‫ ال أجرؤ عىل الاقرتاب ومالمسة‬،‫ يف هناايت أصابعي وبني خفذي‬،‫أحتسس يف مسامايت‬ ‫ أحس بعرّي أمام أانس عيوهنم جاحظة وشفاههم‬،‫ أتالىش يف الظالم بصمت‬،‫أعضايئ‬ ‫ ال أعرف ما هو هذا‬،‫ « هناك يشء جيب أن ميوت » أردد لنفيس‬، ‫مرختية من هول املشهد‬ )ḪALĪFA 2006: 47-48( » ‫[ « نعم الرغبة جيب أن متوت‬...] ‫اليشء جيب أن ميوت‬ Je me retournais dans mon lit, [...]. Ma poitrine me faisait mal, puis la douleur se propageait partout dans mon corps, je la sentais sur ma peau, sur le bout des doigts, entre mes cuisses. Je n’avais pas le courage de m’approcher et de toucher mon corps. Je me noyais dans l’obscurité et j’avais l’impression d’être nue au milieu des gens les yeux exorbités et la bouche bée pour l’horreur de ce spectacle. Je me répétais : « Il y a quelque chose qui doit mourir », mais j’ignorais quoi [...]. « Oui, le désir doit mourir. »5 Ici le changement du corps est décrit comme une expérience affreuse, l’exposition de la féminité aux yeux des gens inconnus une sorte de punition pour la honte de devenir femme et de n’être plus capable de le cacher. Dans ce passage sont décrits les changements du corps adolescent qui s’épanouit vers une identité sexuée définie, désormais devenue visible. Il s’agit d’une identité adulte qui nécessite d’être assumée publiquement. Les changements corporels n’affectent pas uniquement le statut individuel, mais impliquent également un changement du statut social de l’individu. Le devenir adulte de la protagoniste est destiné à 5 Toute traduction de l’arabe au français a été réalisée par mes soins. • 19 (2019): 1-14 Page | 5 Martina Censi affecter toutes ses relations sociales et notamment les relations avec les hommes. À ce propos, la protagoniste évoque les yeux des gens qu’elle sent glisser, dans l’espace public, sur son corps devenu sensuel : elle est désormais reconnue socialement en tant que femme, et source du désir de l’autre et par conséquent de danger potentiel en tant que force capable de subvertir les normes sociales. Mais ce n’est pas uniquement le désir des autres envers son corps qu’elle considère comme une source de danger, mais également son propre désir d’adolescente : un désir indéfini, sans limites, potentiellement bouleversant. Il s’agit d’un désir qui risque de briser les frontières des tabous et des normes sociales. Le danger du désir est représenté de façon explicite dans les pensées de la protagoniste : Page | 6 ‫ هتدأ قليال لتجعلين أانم كام كنت‬،‫الرغبة هذه اللكمة احملمةل بآالف املعاين جيب أن متوت‬ ‫ لوهنا وراحئهتا يك‬،‫ لو أس تطيع تلمسها ورؤيهتا يك أحدد مقاساهتا‬،‫أفعل قبل س نوات قليةل‬ )ḪALĪFA 2006: 48( [...] ‫أقتلها وأبددها لتنترث مع الرحي‬ Le désir, ce mot chargé de mille significations, devait mourir, devait s’apaiser un peu pour me laisser dormir comme je faisais avant, il y a quelques années. Si seulement je pouvais le toucher, le voir pour en définir les dimensions, la couleur, l’odeur, pour pouvoir le tuer et le disperser au vent ! La haine évoquée dans le titre du roman est l’une des autres forces potentiellement bouleversantes qui sont associées aux passions de l’adolescente. Au cours de la narration, la haine se fait de plus en plus présente et remplace petit-à-petit le désir frustré de la protagoniste. Ce processus est décrit à plusieurs reprises dans le roman : ‫ أتلمس خاليص جبلويس وحيدة لساعات‬،‫الكراهية أربكتين كام احلب الشديد يربك عاشقة‬ )ḪALĪFA 2006: 75-76( .]…[ ‫طويةل وقراءة الكتب‬ La haine me troublait autant qu’un amour tenace peut troubler une amoureuse. Je cherchais le salut en lisant les livres assise toute seule pendant des heures […]. Ici on retrouve le lien entre les deux passions qui animent la jeune adolescente : la haine et le désir. Ces deux passions sont très significatives en tant que déclencheurs de son processus de changement et de recherche identitaire. La haine se fait petit à petit de la place en tant que force cathartique capable d’apprivoiser le désir de l’adolescente en le rendant moralement acceptable aux yeux de la collectivité. La relation étroite entre désir et haine caractérise également les relations de la protagoniste avec ses camarades de l’école. L’école est un endroit significatif dans l’économie spatiale du roman. Il s’agit du seul endroit publique auquel la protagoniste a librement accès. Il s’agit également de l’espace où la protagoniste crée ses liens d’appartenance et donc d’un milieu où son identité collective et sociale se développe. L’école comprend trois groupes principaux d’étudiantes : les filles musulmanes modérées ; les filles – dévoilées et audacieuses – proches des autorités du Baas ; et les filles qui ont intégré des groupes islamistes extrémistes. Chaque groupe de filles est caractérisé par un style spécifique dans la • 19 (2019): 1-14 Madīḥ al-karāhiya de Ḫālid Ḫalīfa : corps féminin, violence et religieux façon de s’habiller. Ceci devient un moyen pour manifester aux autres l’appartenance à un groupe et affirmer son identité collective. L’identité sociale de la protagoniste, à titre d’exemple, est définie à travers sa façon de s’habiller et de se montrer aux regards des passants tout au long du chemin que chaque matin elle parcourt pour se rendre à l’école : ،‫ حىت بدون تهنيدة واحدة‬،‫ دون راحئة عطر‬،‫كيس أسود حيمل حقيبة مدرس ية دون مالمح‬ ‫غربيت انهتت حني اقرتبت من بنات يش هبنين يف أش ياء كثرية وان اكن بعضهن خيلعن غطاء‬ ‫الرأس فور دخولهن اىل املدرسة مث خيلعن املانطو الثقيل لينضممن اىل شةل الطالبات‬ )ḪALĪFA 2006: 73( ‫اجملاهرات بعدائنا حنن من لقبوننا بشةل البطاريق‬ Un sac noir portant un cartable sans physionomie, sans parfum, sans même un soupir. Mon sentiment d’exil disparut lorsque je me rapprochai des filles qui me ressemblaient sous plusieurs aspects. Toutefois certaines enlevaient leurs foulards dès leur arrivée à l’école et enlevaient leurs lourds manteaux pour rejoindre le groupe des élèves qui affichaient leur hostilité envers notre bande, la bande des pingouins. Ce passage est significatif car s’y trouve représentée la fonction symbolique de la tenue et des habits de la protagoniste et des filles de l’école pour la définition de leur identité collective et de leur positionnement dans l’espace social. Dans ce cadre, le port du voile et des manteaux noirs, couvrant entièrement les corps des jeunes filles, acquiert un caractère symbolique, en tant qu’élément qui permet de dévoiler l’identité sociale de l’individu à travers l’acte de se voiler. Le statut ambivalent du voile dans le roman se manifeste dans la gestion de l’espace individuel de la personne – son corps – vis-à-vis des autres à travers l’acte de se rendre à la fois invisible et visible. Le voile rend invisible car il cache le corps avec ses particularités et ses marques, mais il le rend visible en marquant l’appartenance religieuse de l’individu. L’individu devient socialement visible par les autres qui arrivent à le reconnaître en tant que membre d’une collectivité. La façon de s’habiller et, de manière plus générale, la gestion du corps sont des éléments centraux dans le roman, utilisés pour explorer la crise socio-politique et la conflictualité affectant la société syrienne dans son ensemble pendant les années 1980. Durant cette période, l’opposition entre les partisans du Baas et les affiliés aux groupes islamistes – et notamment aux Frères musulmans – s’exacerbe et entraîne une fracture sociale. Cette césure au sein de la société syrienne est souvent représentée dans le roman à travers les changements d’affiliation des jeunes filles de l’école. Par exemple, le passage d’une étudiante, amie de la protagoniste, du groupe des musulmanes modérées au groupe des filles proches des affiliés au Baas est décrit encore une fois en s’appuyant sur le changement dans la façon de s’habiller : ‫ خلعت جحاهبا ومل تعد تشاركنا الصمت يف‬،‫غادة ملعت جفآة يف سامء املدرسة كنجمة‬ )ḪALĪFA 2006: 76( ‫ بعد عودتنا من العطةل الصيفية‬،‫الاسرتاحات وس ندويش الفالفل‬ Soudain, Ġāda s’était mise à étinceler dans le ciel de l’école comme une étoile. Elle avait enlevé son voile et ne partageait plus notre silence dans les • 19 (2019): 1-14 Page | 7 Martina Censi cafétérias et chez les vendeurs de sandwich et de falafels, après notre retour des vacances d’été. Page | 8 Le changement du personnage de Ġāda est décrit en s’appuyant sur le champ visuel et sur le dévoilement de la jeune fille qui passe du statut enfantin au statut de femme. Ġāda est une amie très proche de la protagoniste qui fait partie avec elle du groupe des filles musulmanes conservatrices et voilées avant d’intégrer le groupe des filles dévoilées proches des hommes du régime. Ġāda aussi entame une aventure passionnelle avec un homme du régime, beaucoup plus âgé qu’elle, et entreprend un changement identitaire qui se manifeste à travers son dévoilement et une nouvelle façon de s’habiller qui devient provocante. Son amant, après avoir profité pour un certain temps d’elle, la quitte et elle, qui a désormais perdu son honneur, se suicide. Le désir joue un rôle central dans le changement identitaire de Ġāda en la conduisant à la mort. Le désir est également le moteur de la relation entre la protagoniste et Ġāda. Le changement identitaire de Ġāda ainsi que la fin tragique de son histoire d’amour affecte profondément la protagoniste et l’amène à développer d’avantage son sentiment de haine envers les autorités du régime ainsi que le désir de s’immoler à travers le martyre. Ce désir s’épanouit particulièrement dans l’esprit de la protagoniste après la rencontre avec Hadja Suʿād, une femme affiliée aux Frères musulmans qui organise des rencontres en vue de l’enrôlement des filles dans les rangs de son organisation. La protagoniste fait la connaissance de Hadja Suʿād par le biais de son oncle Bakr, qui joue le rôle de guide spirituel. Pendant ces réunions Hadja Suʿād cherche à endoctriner les jeunes filles sur la possibilité de la création d’un État sur lequel flotterait la bannière du Prophète sur terre. À partir de cette rencontre, la protagoniste s’éloignera du groupe des filles musulmanes modérées pour intégrer, toujours à l’école, le groupe des filles affiliées aux Frères musulmans. Son parcours d’extrémisation l’amènera à devenir leader de ce groupe d’étudiantes. Corps, violence et religieux Le corps joue un rôle central dans le processus de subjectivation de la protagoniste. C’est le changement du corps – et notamment la difficulté à accepter l’identité féminine adulte avec toutes ses implications sociales – qui déclenche le parcours d’extrémisation religieuse de la protagoniste. À plusieurs reprises dans le texte on trouve des passages dans lesquels la mortification du corps féminin est représentée à travers la suppression des marques de la féminité : ‫ وجه‬،‫ عينان حاداتن‬،‫ وهجيي اكن يش به رسام فرعونيا‬،‫يف الليل وقفت أمام املرأة لرى شعري‬ ‫ أختفت‬،‫ قصصت شعري راغبة ابخلالص من رموز أنوثيت‬،‫طويل أمسر وجفنان مرتاخيان‬ ‫حلمتاي يف أعامق هندي الذلين أصبحا ككيسني مطاطيني ممتلئني ابلهواء الفاسدة‬ )ḪALĪFA 2006: 123( Le soir, je me mis debout face au miroir pour observer mes cheveux. Mon visage ressemblait à une image des pharaons, les yeux perçants, le visage al- • 19 (2019): 1-14 Madīḥ al-karāhiya de Ḫālid Ḫalīfa : corps féminin, violence et religieux longé et sombre, les paupières molles. Je me coupai les cheveux en souhaitant de me débarrasser des marques de ma féminité et de laisser disparaître mes mamelons au fond de mes seins qui étaient devenus comme deux sacs flasques pleins d’air putride. Ce passage dans lequel l’auteur représente le refoulement de la féminité nous rappelle l’une des caractéristiques des romans des écrivaines des années cinquante et soixante, comme Laylā Baʿalbakkī et Colette al-Ḫūrī, mais aussi des années soixante-dix comme l’égyptienne Nawāl al-Saʿdāwī. Ces romancières représentaient souvent le refus des spécificités corporelles de la femme à travers des actions comme le fait de se couper les cheveux, le désir de cacher son propre sein et la répulsion pour la grossesse. Le corps de la femme était considéré comme la source de l'oppression, en tant qu'objet exclusif du désir de l'homme au sein d'une société patriarcale. Dans Madīḥ al-karāhiya, les désirs du corps – réprimés par la protagoniste – sont remplacés par la haine. Lors de son dix-septième anniversaire la protagoniste déclare : ‫«حنتاج اىل الكراهية يك جنعل حلياتنا معىن» فكرت وأان أحتفل وحيدة بعيد ميالدي السابع‬ )ḪALĪFA 2006: 116( ‫عرش‬ « Nous avons besoin de la haine pour donner un sens à notre vie », pensai-je en célébrant, toute seule, mon dix-septième anniversaire. La haine se transforme bientôt en la volonté concrète de mourir en martyre, désir que la protagoniste déclare solennellement à ses tantes : ‫ أضفت أنين‬،‫ فاحتة ذراعي معلنة رغبيت أن أموت شهيدة‬،‫وقفت عىل حوض الربكة احلجري‬ ‫ نظرن‬،‫ كررهتا « أان الن المرية » مث نزلت وحسبت ثويب خلفي‬،‫ أان المرية‬،‫أريد الشهادة‬ ‫ اكن اذلهول يف عيوهنن وقبل أن أغيب كين رأيهتن‬،‫ رست اىل غرفيت مث التفت الهين‬،‫ايل‬ )ḪALĪFA 2006: 142( ‫ينحنني حمييات المرية‬ Je me mis debout sur le bord de pierre du bassin, en ouvrant les bras pour annoncer mon désir de mourir comme une martyre. J’ajoutai que je voulais le martyre, moi la princesse, je répétai : « Je suis une princesse à présent ! » Puis je descendis, laissant traîner ma robe derrière moi. Elles me regardèrent. Je pris la direction de ma chambre et me retournai vers elles qui étaient éberluées et, avant de disparaître, j’eus l’impression de les voir faire la révérence pour saluer la princesse. Le parcours d’extrémisation religieuse de la protagoniste est censé s’achever par le sacrifice extrême de son corps. Dans ce passage on remarque clairement que le martyre devient un moyen pour la protagoniste de définir son identité et donc de se distinguer des autres membres de sa famille. Le martyre lui confère un caractère exceptionnel en la transformant en une « princesse » qui a enfin le droit d’exprimer sa féminité de façon légitime. D’ailleurs, en s’appuyant sur le concept de nécropolitique avancé par Mbembe, le martyre peut être considéré comme l’appropriation extrême du corps par l’individu et son imposi- • 19 (2019): 1-14 Page | 9 Martina Censi Page | 10 tion sur l’espace public et la collectivité. Mbembe avance l’hypothèse que « l’expression ultime de la souveraineté réside largement dans le pouvoir et la capacité de dire qui pourra vivre et qui doit mourir. Faire mourir ou laisser vivre constituent donc les limites de la souveraineté, ses principaux attributs » (MBEMBE 2006: 29).6 Dans ce cadre, le martyre peut être considéré comme l’affirmation sauvage de l’individu qui refuse la souveraineté qui exerce son contrôle sur la mortalité. Ce n’est plus au pouvoir répressif – dans le roman représenté par le régime – de disposer du corps et de la vie de ses assujettis, mais c’est l’assujetti qui, à travers le choix du martyre, se réapproprie son corps et, à travers un acte paradoxal qui amène à sa destruction, se subjective. Le martyre est un phénomène qui naît souvent à l’intérieur d’une collectivité qui s’autoreprésente comme une communauté de victimes dont les membres sont prêts à se sacrifier pour la collectivité. Le martyre, qui représente d’une part le sacrifice extrême de l’individu en faveur du groupe, peut d’autre part être considéré comme la « réalisation » suprême de l’individu qui acquiert un statut exceptionnel, au-dessus du reste de sa communauté. Il s’agit d’un acte héroïque, transgressif, hors-norme. Le concept de martyre se place donc au carrefour des instances individuelle et collective. Il répond au besoin de subjectivation et de définition identitaire de l’individu qui l’accomplit, mais il acquiert un caractère collectif car il est fonctionnel à la lutte d’un groupe. Comme le définit Pannewick : In the literary imagination martyrdom breaks down social borders, undermines social values and institutional authority. This power of transgression is evident in both the literary imagination of the Liebestod as well as in representations of religious zeal or national sacrifice in situations of hopeless inferiority. In all these cases the power of the martyr is imagined as being unbounded by convention, the suffering experienced is an outcry stirring others into action, a public appeal, an act of rebellion, a form of « counter-suffering » as described by Erich Auerbach. […] the rebellion of the martyr is limited to the suffering inflicted on an extremely vulnerable body. The more vulnerable and weaker this body appears […] the greater the impact of the symbolic power. (PANNEWICK 2004: 10) Dans Madīḥ al-karāhiya, un lien est donc établi entre la transgression du corps féminin adolescent – ni enfantin ni adulte – et la transgression violente du martyre. Le martyre représente la possibilité de donner de nouveau un statut « normatif » au sein de la communauté au corps « transgressif » et « hors-norme » de la protagoniste. Toutefois le martyre ne se réalise pas car la protagoniste est arrêtée et passe plusieurs années dans les prisons du régime. La prison représente un autre endroit très significatif pour le cadre spatial du roman car il s’agit du lieu où la protagoniste arrive à s’éloigner partiellement de l’idéologie de son groupe et à abandonner l’idée du martyre. Cet éloignement est ainsi décrit dans le roman : ،‫تضحكين لكمة الوطن اليت يس تخدهما امجليع بتبجيل واحرتام من جامعيت اىل اجلالدين‬ ‫ حنن‬،‫ فكرت طويال مبعىن الوطن‬،‫تدهش ين قدرة البحث عن مفهوم جمرد وسط عبث املعاين‬ 6 À ce sujet voir, parmi les autres, l’étude de SAI 2019. • 19 (2019): 1-14 Madīḥ al-karāhiya de Ḫālid Ḫalīfa : corps féminin, violence et religieux ‫ مليئا‬،‫ اجلالدون يريدونه مزارع خاصة هلم‬،‫ سالفة وجامعهتا تريده ماركس يا‬،‫نريده اسالميا‬ ‫] قلت لسالفة «كيف تكون‬...[ . ‫ابلسجون ليتابعوا اس متناءمه وذلة تشبهثم بكرايس السلطة‬ ‫البالد ماركس يا» أجابت حبامس فاتر «محراء وال ألوان أخرى» مث أجبت نفيس «وحنن نريده‬ )ḪALĪFA 2006: 286( . ‫خرضاء» البالد امللونة يريدها امجليع ذات لون واحد‬ Le mot patrie, que tout le monde – depuis mon organisation jusqu’aux bourreaux – utilisait avec déférence et respect, me faisait rire. Notre capacité à rechercher un concept abstrait au milieu de l’absurdité m’étonnait. J’avais longtemps réfléchi à la signification du mot patrie : nous la voulions islamique, Sulāfa et son groupe la voulaient marxiste, les bourreaux la voyaient comme un territoire privé pour eux, rempli de prisons, pour continuer à se masturber et à jouir en s’accrochant aux sièges du pouvoir [...]. Je dit à Sulāfa : « Comment le pays peut-il être marxiste ? » Elle répondit avec un tiède enthousiasme : « Rouge, sans aucune autre couleur. » Puis je me dis dans mon for intérieur : « Et nous le voulons vert. » Tout le monde voulait rendre monochrome le pays polychrome. La prison, un endroit d’enfermement, de coercition, de contrôle et de violence, est paradoxalement le seul endroit où la protagoniste – éloignée de sa famille et de son organisation islamiste – arrive à entreprendre un véritable processus de subjectivation. 7 La prison représente un microcosme où les différents groupes militants qui ont lutté contre le régime se retrouvent les uns aux côtés des autres. Une grande partie des prisonnières est affiliée au groupe extrémiste de la protagoniste, d’autres femmes étant engagées dans des groupes marxistes. Le détachement idéologique de la protagoniste se manifeste à travers son amitié avec Sulāfa, jeune femme qui militait en faveur des marxistes. Les deux jeunes femmes deviennent des amies très proches et commencent à partager des fantaisies érotiques en s’imaginant des rencontres passionnelles avec un jeune amant de Sulāfa. L’expérience de la prison conduit donc la protagoniste à découvrir, petit-à-petit, les plaisirs de son corps et à accepter son désir qui devient légitime. Au lieu d’effacer le désir et la volonté de jouir, l’expérience de la prison et de la torture semblent déclencher le processus de subjectivation de la protagoniste qui passe à travers le plaisir de son corps. Dans son étude The Body in Pain, Elaine Scarry explore les effets de la torture sur le corps et sur la subjectivité du torturé. À travers la torture, le pouvoir vise à effacer la subjectivité désirante et la dimension historique de l’individu dans le but de détruire sa représentation du monde, ainsi que sa personnalité. La torture représente l’oppression de la liberté individuelle à travers l’assujettissement du corps. À ce sujet, la théoricienne féministe Hortense Spillers soutient que ce qui distingue le sujet libre de l’assujetti est la séparation entre le « corps » et la « chair » (SPILLERS 1987: 67-68). La « chair » est ce qui existe avant le corps, une sorte de « narration primaire » qui ne se place pas complètement en dehors du discours, mais qui est privée de toute dimension éthique et relationnelle, et par conséquent 7 Le genre de la littérature carcérale est au centre de plusieurs études parmi lesquelles celle de COOKE 1994 et de BENIGNI 2009. • 19 (2019): 1-14 Page | 11 Martina Censi Page | 12 réduite aux caractéristiques anatomiques. Le prisonnier est objectifié, son corps devenant une chose entre les mains de ses geôliers. Le « vol du corps » symbolise la perte de la volonté et du désir de l’individu, et ainsi la perte de sa position en tant que sujet. Dans Madīḥ al-karāhiya, l’expérience de la torture et du « vol du corps » permettent paradoxalement à la protagoniste de se débarrasser de son ancienne identité, liée à l’appartenance au groupe djihadiste. Une fois libérée de cette identité collective violente et contraignante, la protagoniste peut enfin laisser fleurir son identité individuelle. 8 L’éloignement de l’identité collective marquée par son appartenance au groupe des militants djihadistes entraîne l’éloignement de la haine, la découverte du désir et de son identité de femme. Ce n’est pas anodin qu’en prison la protagoniste a également l’occasion de faire l’expérience d’une sorte de maternité avec le bébé d’une autre prisonnière qui devient le fils de toutes les femmes de la cellule. Une fois sortie de prison, la protagoniste reprend ses études à la faculté de médecine. Dans ce cadre, son processus de subjectivation continue de se développer, en lui permettant de quitter définitivement l’idée du martyre. À ce propos, on lit dans le roman : ‫ أحببت همنة الطب اليت أهدتين ما أنقذ حيايت‬،‫وقفت لول مرة أمام جثة يف درس الترشحي‬ )ḪALĪFA 2006: 357( ‫من الاس هتتار ابملوت ومتجيد احلياة‬ Pour la première fois, je me tins debout un cadavre, en cours de dissection. J’aimais la profession de médecin, qui m’avait sauvé la vie de mon propre mépris envers elle et qui m’avait permis de la glorifier. La rencontre avec la mort, symbolisée par le corps du cadavre à disséquer, lui permet de réévaluer la vie, en la « glorifiant ». On passe donc de la mortification de la vie à travers le désir du martyre, à la « glorification » de la vie, comme on le lit dans le passage. Parallèlement, la haine est remplacée par le désir : la protagoniste commence en effet à planifier des rencontres passionnelles avec des hommes, pour expérimenter le plaisir de son corps. Ces rencontres ne demeurent qu’une fantaisie timide, mais elles ne sont pas non plus une véritable source de jouissance pour la protagoniste qui gardera sa virginité intacte tout au long de la narration. Ce qui est significatif pour notre analyse est le fait qu’elle commence à faire la connaissance de son corps et donc de son identité loin de toute sorte d’appartenance accablante. Le changement identitaire de la protagoniste se manifeste également par rapport au personnage de Ṣafāʾ, sa tante, mariée avec ʿAbdallāh, un moudjahidine qui part en Afghanistan pour combattre aux côtés des talibans. Avant de rejoindre son mari en Afghanistan et de commencer à vivre en suivant les principes de la charia selon les djihadistes, Ṣafāʾ était une femme très soignée et raffinée, amoureuse des belles choses, du chant et du rire. Après s’être installée avec les talibans, elle se transforme, aux yeux de sa nièce, en un être triste, une femme desséchée, couverte d’un lourd voile noir, tandis que la protagoniste arrive à retrouver sa féminité, sa joie et son attachement à la vie. Pour pouvoir vivre librement son identité nouvelle, la protagoniste décide de quitter Alep pour rejoindre son oncle Bakr et sa femme à Londre, où elle commence à travailler 8 À ce sujet on renvoie encore une fois à l’étude de COOKE 1994. • 19 (2019): 1-14 Madīḥ al-karāhiya de Ḫālid Ḫalīfa : corps féminin, violence et religieux dans un hôpital pour obtenir sa spécialisation. Ce déplacement physique représente une sorte de passage symbolique de la mort à une vie nouvelle : du travail à la morgue de l’hôpital d’Alep, avec ses cadavres malodorants et ses médecins affiliés au régime, la protagoniste commence à travailler à l’hôpital de Londres ; de la vieille maison traditionnelle d’Alep, symbole de l’histoire familiale et de la nation défaite, elle s’installe dans un petit studio londonien. Londres, une ville aux antipodes d’Alep, représente la possibilité de couper tout lien avec les anciennes appartenances – familiale, sociale, religieuse – et de chercher une identité individuelle nouvelle. À ce propos on lit dans le roman : ‫ متحلةل من الانامتء كطري جيوب‬،‫أحسست مرة أخرى ابخلالص اذلي كنت أسعى اليه‬ )ḪALĪFA 2006: 407( ‫السامء وال تس تطيع لك الش باك ايقاعه يف الرس‬ Encore une fois, je sentis la libération que j’avais souhaitée, j’étais libre de toute appartenance, comme un oiseau qui traverse le ciel et qu’aucune chaîne ne peut capturer.
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Des récits de conception révélateurs de processus de conception focalisés : cas d'un éleveur bovin en transition agroécologique Marie Chizallet, Flore Barcellini, Lorène Prost  Ergonomics abstract Des récits de conception révélateurs de processus de conception focalisés : cas d'un éleveur bovin en transition agroécologique Marie CHIZALLET1,2&3, Flore BARCELLINI1 et Lorène PROST2 1. Ergonomics Team, CNAM, CRTD, 41 rue Gay-Lussac, 75005 Paris, France 2. UMR LISIS, INRA, CNRS, ESIEE Paris, UPEM, Université Paris-Est, 77454 Marne-La-Vallée, France 3. IRSST, 505, Boul. De Maisonneuve Ouest, Montréal, Québec H3A 3C2 [email protected] Rés umé. L'enjeu de cette communication est de mieux comprendre le processus de conception dans lequel un agriculteur s'engage lorsqu'il développe des pratiques plus agroécologiques sur son exploitation. Pour cela, nous nous appuyons sur la notion de récit, et proposons de parler de "récit de conception". Cette communication se focalise sur une étude de cas : un agriculteur bovin, en transition vers un s herbager, économe et autonom e . La narration des récits de conception par l'agriculteur est u par la mise thode ). Ces récits lui ent explicit ses préoccupations majeures, de nature variée et interdépendantes. De plus, les récits de conception mettent en évidence des processus de conception focalisés sur ces préoccupations et permettent à l'agriculteur de se mouvoir dans le temps du processus de conception. Mots-clés : Processus de conception et de développement ; évaluation et coûts-avantages du changement ; conception du travail et facteurs organisationnels ; qualité de la vie professionnelle. Revealing design narratives of focused design processes: the case of a cattle farmer in agroecological transition Abstract. The challenge of this communication is to better understand the design process that a farmer engages in when developing more agroecological practices on his/her farm. To do so, we rely on the notion of narrative, and propose to speak of "design narrative". This paper focuses on a case study: a cattle farmer, in transition to a grassland system, low-input and self-sufficient. The narration of design narratives by farmer is allowed by the implementation of the Chronicle of Change method (Chizallet, 2019). These narratives allow him to make his experience explicit and are indicative of his major concerns, which are varied in nature and interdependent. In addition, design narratives highlight design processes that focused on these concerns and allow the farmer to move through the time of the design process. Keywords: Design and development process ; evaluation and cost benefits of change ; work design and organisational factors ; quality of working life. *Ce texte original a été produit dans le cadre du congrès de la Société d'Ergonomie de Langue Française qui s'est tenu à Paris, les 16, 17 et 18 septembre 2020. Il est permis d'en faire une copie papier ou digitale pour un usage pédagogique ou universitaire, en citant la source exacte du document, qui est la suivante : Chizallet, M., Barcellini, F., & Prost, L. (2020). Des récits de conception révélateurs de processus de conception focalisés : cas d'un éleveur bovin en transition agroécologiaue. Actes du 55ème Congrès de la SELF, L'activité et ses frontières. Penser et agir sur les transformations de nos sociétés. Paris, 16, 17 et 18 septembre 2020 Aucun usage commercial ne peut en être fait sans l'accord des éditeurs ou archiveurs électroniques. Permission to make digital or hard copies of all or part of this work for personal or classroom use is granted without fee provided that es are not made or distributed for profit or commercial advantage and that copies bear this notice and the full citation on the first page. INTRODUCTION 2011). A partir de ces deux constats, nous proposons d'envisager la TAE comme un processus de conception dans lequel l'agriculteur est un concepteur (parmi d'autres) qui doit combiner, dans le déroulement du processus de conception, l'aspect technique qu'impose la mise en oeuvre d'une agriculture plus agroécologique et son travail réel, qui lui-même est impacté par un ensemble de déterminants (Leplat & Cuny, 1977). L'enjeu de cette communication est alors de mieux comprendre le processus de conception dans lequel un agriculteur s'engage lorsqu'il développe des pratiques plus agroécologiques sur son exploitation. Pour cela, nous nous appuyons sur la notion de récit. Peu de recherches en ergonomie se sont saisies de ce concept (e.g. Decortis, 2008 ; Beaujouan 2011). Le récit est à comprendre dans la narration d'une expérience passée qui s'actualise dans le présent de la narration, mais également dans sa dimension ancrée dans le futur. Le récit est ici envisagé comme pouvant révéler la mobilisation de l'expérience dans les processus de conception pour soutenir la projection de l'agriculteur dans des situations de travail futures, relativement aux préoccupations de l'agriculteur dans le temps du présent de la narration. Nous parlons alors de récit de conception. Au-delà d'un objectif de recherche, le récit est aussi mobilisé pour soutenir l'activité de conception des agriculteurs. Il existe une préoccupation grandissante concernant le développement d'une agriculture durable et ceci depuis les années 90 (e.g. Landais, 1998). De nombreux acteurs agricoles et politiques en France s'accordent à promouvoir un des modèles d'agriculture durable : l'agroécologie (AE). Elle est une modernisation écologique de l'agriculture (Horlings & Mardsen, 2011) qui prend différentes formes (voir Duru, Therond, & al., 2015). Elle s'appuie globalement sur l'idée de mobiliser davantage les régulations biologiques (Wezel & al., 2009) et passe par la mise en oeuvre de techniques alternatives aux intrants chimiques, la diversification des cultures ou encore le développement d'infrastructures agroécologiques (prairies permanentes, haies, agroforesterie, etc.). Nous faisons l'hypothèse qu'une telle modernisation écologique implique de profondes transformations pour le travail notamment des agriculteurs. Bien qu'il ait été relevé que le développement de nouvelles pratiques agricoles modifie la charge de travail physique, mentale et organisationnelle des agriculteurs (Nicourt & Souron, 1989), cette question semble avoir été relativement peu traitée dans les problématiques de recherche des disciplines agronomiques jusqu'à présent (Madelrieux & Dedieu, 2008). A l'inverse, si les travaux en ergonomie placent au coeur de leurs recherches les transformations du travail, ils se sont principalement inscrits dans le contexte industriel. Peu de travaux se sont construits dans le secteur agricole voire plus globalement dans des contextes aussi "ouverts" et aux prises de déterminants aussi larges et nombreux (ex : conditions météo, différentes échelles spatiales : la parcelle, l'exploitation agricole, le paysage, le territoire, les filières,), intégrant une échelle environnementale et qui se joue au niveau de préoccupations sociétales. Cependant, la question des transformations du travail des agriculteurs semble être re-dynamisée sous l'effet de la transition agroécologique (TAE). En effet, les changements mis en évidence au fil de la TAE tels que le développement de nouvelles activités pour les agriculteurs (Merot & Wery, 2017) ou le changement de rôle des conseillers agricoles (Cerf, Jeuffroy, Prost & Meynard, 2012 ; Guillot & al., 2013) stimulent un intérêt pour le travail agricole et ses transformations au sein de l'agronomie et de l'ergonomie. C'est dans ce contexte de TAE et de transformation du travail agricole que se situe cette recherche en ergonomie. Nous pouvons nous appuyer sur un certain nombre de travaux, notamment en sociologie et ergonomie, qui ont analysé le développement de pratiques agricoles "agroécologiques" en combinant les dimensions techniques et/ou sociologiques en jeu dans ces processus (e.g. LE RÉCIT: MOBILISER LE PASSÉ DANS LE TEMPS PRÉSENT POUR PENSER LE FUTUR Donner une signification à l'expérience Médiateur entre le temps vécu par un individu et le temps qu'il raconte (e.g Carcassonne & Servel, 2009), le récit est « la construction d'une réalité chronologique, où des évènements passés sont racontés à partir d'un présent partagé par les coénonciateurs (enquêté/enquêteur) » (Varro, 2008, p. 5). Il « est un compte rendu de l'expérience ou d'évènements qui sont mis dans une séquence temporelle et qui véhiculent une signification » (Decortis, 2008, p. 32). Plusieurs auteurs parlent du récit à travers deux dimensions : la représentation linéaire et épisodique du récit, et sa dimension "configurante" (Carcassonne & Servel, 2009). Cette deuxième dimension renvoie à ce qui « transforme la succession des évènements en une totalité signifiante qui [] fait que l'histoire se laisse suivre » (Ricoeur, 1983, p. 17). Bruner (2002) parle du récit comme d'un véhicule de l'élaboration de la signification. Ainsi, « suivre le déroulement d'une histoire (ordre 2 SELF 2020, PARIS 11 -13 janvier 2021 METHODOLOGIE chronologique), c'est déjà réfléchir sur les événements en vue de les embrasser en un tout signifiant (ordre configurationnel) par un acte de jugement réflexif » (Adam, 1984, p. 17). Dans ce sens, le récit constitue un outil qui permet de construire des significations, soit de donner du sens à l'expérience vécue de celui qui raconte. Étude de cas – L'agriculteur « N » L'agriculteur N est installé sur son exploitation depuis 2008. Il reprend la ferme de son oncle qui était en agriculture conventionnelle avec très peu de mise des animaux à l'herbe. L'exploitation de l'agriculteur N est actuellement construite autour d'un système de production de viande bovine basé principalement sur le pâturage tournant1. Il a 80ha dont 63% d'herbe, trois ilots avec un parcellaire morcelé, 50 vaches et un système naisseur-engraisseur. Motivé par d'importantes difficultés économiques, l'agriculteur N développe une transition "chemin faisant" vers un système herbager économe et autonome qui passe par plusieurs étapes que décrit l'agriculteur : une prise de conscience après une mauvaise récolte de céréales en 2010 et suite à laquelle il congédie son technicien céréalier ; la mise en place de prairies multi-espèces à l'automne 2013, constituant pour lui le « vrai départ » ; à l'automne 2018, sa décision d'arrêter l'engraissement de ses veaux mâles et du maïs ensilage2 pour faire plus d'herbe. Ce cas a un fort intérêt pour notre recherche. Tout d'abord, l'agriculteur est en cours de TAE : ceci permet de reconstituer le processus de conception passé et en train de se faire avec lui. Ensuite, il est demandeur d'un accompagnement du point de vue des transformations du travail. Il dit ne plus trouver de sens à son travail, avoir d'importantes difficultés à se projeter et être en grande détresse dans son travail. De plus, il est accompagné dans sa TAE du point de vue technique par un animateur de CIVAM3. Cet animateur est demandeur de soutien et de formation pour accompagner les transformations du travail de cet agriculteur. Enfin, N n'a pas d'employé : est à la fois concepteur-prescripteur et exécutant de ses choix de conception. Le récit orienté vers le futur Plusieurs auteurs (e.g. Carcassonne & Servel, 2009) soulignent une dimension du récit relative à ce qui pourrait advenir : le possible, les perspectives, les anticipations, etc. Par exemple, Dan Slopin, spécialisé dans l'étude des relations entre langage et pensée, explique qu'il n'est pas possible de mettre en mots une expérience sans que celle-ci soit embrassée par une perspective. D'autant plus que la verbalisation va généralement favoriser certaines de ses perspectives (Slopin, 2000, cité par Bruner, 2002, p. 66). Nous comprenons alors le récit comme l'élaboration de l'expérience par la mobilisation dans le présent d'évènements effectifs passés, en vue de « voir venir ». Dans ce sens, Bruner explique que « le récit nous propose des moyens simples et souples pour traiter les résultats incertains de nos projets et de nos anticipations. » (Bruner, 2002, p. 28). Le récit dans le cadre de la conception Dans ses travaux, Beaujouan (e.g. 2011) caractérise ce qui relève du récit professionnel à visée didactique, dans un contexte de séminaires destinés à des ergonomes en formation. Il retient plusieurs critères permettant de les caractériser. Nous nous en sommes inspirées pour les adapter dans un cadre de conception, notamment pour intégrer des références au futur qui sont clés dans des processus de conception. Nous proposons alors de s'intéresser à deux propriétés en particulier (parmi d'autres : voir Beaujouan, 2011 ; Chizallet, 2019). Premièrement, le récit doit contenir une mise en intrigue, c'est-à-dire que l'acteur concerné par le récit rencontre ou a rencontré des difficultés ou poursuit un objectif. Il y a une « mise en intrigue du récit par la présence d'une ou plusieurs complications (obstacles, difficultés rencontrées par les protagonistes) aboutissant à leur résolution (ou tentative de résolution) en fin de récit. » (Beaujouan, 2011, p. 28). Deuxièmement, le récit doit avoir un procès structuré. La succession des actions dans un récit doit poursuivre un même objectif (immédiat ou plus lointain/global). Cette succession doit être chronologique et causale permettant d'avoir une structure du récit avec un début, un milieu et une fin. Le récit doit contenir au minimum une situation initiale, la situation actuelle, une ou des péripéties, et des situations projetées. La situation initiale permet d'avoir une vision d'ensemble sur la situation de l'agriculteur au début de son récit (autrement dit : "de quoi on part?"). La situation actuelle consiste à faire une pause dans le temps concernant la fin du récit de conception et de rendre compte de la situation globale actuelle dans laquelle se trouve l'agriculteur , relativement à l'intrigue du récit (autrement dit : "jusqu'où on va?"). Les péripéties permettent de rendre compte chronologiquement des situations vécues par l'agriculteur entre sa situation initiale et sa situation actuelle (autrement dit : "comment on y va?"). Enfin, les situations projetées correspondent aux situations qui sont envisagées ou visées par l'agriculteur (autrement dit : "pour aller où?"). Ateliers « Chronique du Changement » Nous avons utilisé la méthode de la Chronique du Changement (CC) pour reconstruire le processus de conception avec l'agriculteur. La CC s'appuie sur un artefact favorisant la narration de récits de conception par les agriculteurs qui passe par l'explicitation ainsi que le traçage écrit et chronologique de leurs objectifs, difficultés et ressources qu'ils mobilisent – ou souhaiteraient mobiliser – au cours de leur TAE (Chizallet & al., 2016 ; Chizallet & al., 2019 ; Chizallet, 2019). Le rôle de l'ergonome est de permettre à l'agriculteur d'expliciter ce qu'il cherche à atteindre dans son processus de conception, son travail réel et les possibles qu'ils pourraient envisager pour la suite de son processus de conception. Concernant l'agriculteur N, la mise en oeuvre de la CC a été réalisée par un ergonome et un animateur de CIVAM suite à un processus d'appropriation de la CC. La CC a consisté en trois ateliers, présentés dans le Tableau 1. 1 Type d'alimentation des animaux basé sur l'utilisation de prairies sur lesquelles les animaux s'alimentent librement. La gestion de ce pâturage consiste à diviser les prairies en plusieurs parcelles et à créer une rotation entre ces parcelles pour l'alimentation des animaux. 2 Maïs cultivé pour l'alimentation des animaux. 3 Centre d'Initiatives pour Valoriser l'Agriculture et le Milieu rural. RÉSULTATS Tableau 1 : Ateliers CC menés auprès de N Atelier Objectif Date / Durée Atelier Traçage Construction de la CC depuis le début du changement jusqu'au jour de l'entretien Construction de la CC depuis le dernier entretien jusqu'au jour du nouvel entretien 19/07/17 - 3h Suivi 1 Suivi 2 Illustrations des résultats La CC fournit un cadre pour la narration de l'agriculteur, lui permettant de rendre compte de ses préoccupations par la construction de ses récits de conception. Les préoccupations ainsi relevées par les récits de conception sont les suivantes : (1) Produire quelque chose dans ses champs (2) La situation économique de l'exploitation (3) Une ferme pédagogique? (4) Ses animaux dehors (5) Sa santé et son plaisir au travail (6) La perte de veaux (7) Le regard des voisins (8) Un passage à l'AB? Chacun de ces récits de conception a été représenté selon la Figure 1. Si nous choisissons par exemple le récit de conception (5) dont la préoccupation majeure concerne la santé de l'agriculteur et son plaisir au travail, le processus de conception focalisé sur cette préoccupation est illustré en Figure 2. 26/04/18 - 3h 21/03/19 - 3h Chaque atelier a fait l'objet d'un enregistrement audio et d'une retranscription. Caractérisation des récits de conception La reconstitution des récits de conception repose sur l'identification des intrigues élaborées par l'agriculteur au cours des ateliers. Les ateliers ont été découpés en séquences correspondant à ces intrigues. Les intrigues pouvant se construire sur différents ateliers et différentes séquences d'ateliers. Ces séquences ont ensuite été rassemblées pour reconstituer les récits des agriculteurs. Parmi les récits ainsi reconstitués, sont gardés uniquement ceux de conception, identifiés sur la base du cadre théorique préalablement explicité. Ainsi, huit récits de conception sont identifiés pour N. Des récits de conception révélateurs de préoccupations majeures de l'agriculteur Form alisation des récits de conception Dans un premier temps, il ressort de ces huit récits de conception les importantes difficultés économiques rencontrées par l'agriculteur N et qui ont participé à son choix de changer ses pratiques. Dans un deuxième temps, ces récits de conception mettent en évidence l'implication de la famille de N dans son processus de conception et plus largement dans son travail. N donne à voir que celle-ci s'impose dans le processus de conception, aussi bien comme un soutien, un partenaire de la prise de décision mais aussi une difficulté (notamment dans le décalage des visions relatives au futur pour ce qui est du choix de l'orientation technique de l'exploitation). Cela est sans doute lié à l'histoire agricole de la famille de N et au fait qu'il vive avec sa femme et ses enfants sur l'exploitation, non loin de sa famille, dans une région où 'tout le monde se connaît'. Dans un troisième temps, les récits de conception soulignent le fait que N est préoccupé par le regard de ses voisins lorsqu'il décide de changer progressivement ses pratiques. Alors, N prend part progressivement à un réseau de soutien technique (le CIVAM) qui lui permet d'échanger avec des agriculteurs sur ses nouvelles pratiques. De plus, à propos de ses difficultés économiques, il bénéficie d'un réseau de soutien important (ex : sa femme, un centre de comptabilité et Solidarité Paysans). Plus globalement, les résultats montrent que l'agriculteur doit faire face à une diversité de préoccupations lorsqu'il s'engage dans une TAE. Mais ces préoccupations ne sont pas à comprendre Une fois les récits de conception identifiés, nous avons porté une attention particulière au procès structuré du récit. Il consiste à lire la structure du récit de à travers une situation initiale ( ), la situation actuelle ( ), des péripéties (P), et des situations projetées (S). L'identification de ces éléments pour chaque récit permet de construire une représentation séquentielle du processus de conception impliqué dans le récit de conception concerné (figure 1). Figure 1 : Représentation séquentielle d'un récit de conception Le cercle en pointillé, Figure 1, concerne ce qui est projeté par l'agriculteur. Le rectangle en pointillé correspond à une situation projetée par l'agriculteur, réalisée ou non dans le temps vécu du récit par l'agriculteur. Figure 2 : Représentation du processus de conception focalisé sur la santé et le plaisir au travail de l'agriculteur N 4 SELF 2020, PARIS 11 -13 janvier 2021 comme indépendantes les unes des autres. L'exemple du récit (5) « Sa santé et son plaisir au travail », représenté en Figure 2, montre qu'un même récit de conception est susceptible de se construire à partir de plusieurs dimensions du travail de l'agriculteur telles que : - - - Economique ; ex : l'agriculteur N mentionne un mauvais bilan financier ; Sociale, ex : N aborde sa mauvaise relation avec sa banque ; Familiale, ex : N décrit un échange qu'il a pu avoir avec sa femme à propos de son travail ; Biologique et technique, ex : N explique qu'il sort davantage ses animaux dehors ; Propres aux caractéristiques de l'agriculteur, e.g. à travers l'explicitation d'un échange que N a eu avec sa femme, il exprime ses priorités et sa vision d'un équilibre entre sa vie personnelle et professionnelle. - DISCUSSION Cette recherche s'inscrit dans la lignée de travaux qui ont analysé les trajectoires des agriculteurs dans le développement de pratiques agricoles plus agroécologiques, ceci en combinant les dimensions techniques et/ou sociologiques en jeu dans ces processus (e.g. Chantre, 2011 ; Cardona, 2012 ; Chantre & Cardona, 2014). Cependant, en proposant (1) d'envisager la TAE comme un processus de conception, et (2) d'utiliser le récit de conception pour en rendre compte, nous pensons tout d'abord avoir permis à l'agriculteur N d'expliciter un large panel de transformations du travail que ses préoccupations recouvrent. Plus que cela, N met en perspective plusieurs dimensions du travail telles qu'économique, sociale, familiale, biologique et technique, et propres aux caractéristiques de l'agriculteur. La narration des récits de conception semble alors permettre à l'agriculteur de porter un regard sur ses expériences qui articulent ces différentes dimensions. De plus, le récit de conception a permis de révéler le processus de conception dans sa dynamique temporelle : il fait référence au présent de la narration mais aussi à un présent "actuel", que nous saisissons à travers l'explicitation des situations actuelles et dont la représentation séquentielle du récit facilite le repérage. C'est bien à partir de ce présent que l'agriculteur explicite des situations passées (saisies via les situations initiales et les péripéties), ceci dans le présent de la narration, tout en projetant de nouvelles situations dans des futurs plus ou moins proches (e.g. Varro, 2008). Plus particulièrement le récit de conception permet de mettre en lumière l'intrication des différents moments du temps (présent, passé, futur) de l'activité de conception de l'agriculteur, alors que ceux-ci sont peu évoqués dans les travaux en ergonomie (Gaudar , 2013 ; Zara-Meylan, 2012 ; 2016). Ainsi, les récits de conception montrent que les préoccupations des agriculteurs sont de nature variée, qu'elles sont interconnectées, et touchent à de nombreuses dimensions de travail de l'agriculteur. Ils donnent ainsi une première vision de la complexité du processus de conception des agriculteurs en TAE. Les récits de conception pour explorer les moments du processus de conception Afin d'explorer les moments du processus de conception, nous avons porté notre attention sur les différentes situations : initiales, actuelles, projetées et les péripéties. En s'intéressant de plus près à chacune de ces situations, plusieurs remarques peuvent être formulées. Tout d'abord, les agriculteurs naviguent dans le passé et le présent par la narration de situations initiales, actuelles et de péripéties. La situation initiale semble constituer un état dans lequel les agriculteurs exploitent un ensemble de situations passées (ex : décès du père de l'agriculteur N), de caractéristiques de l'exploitation (ex : l'historique des parcelles), de choix (ex : décision de N de réduire l'utilisation des antibiotiques), et de ressentis (ex : la peur de N que rien ne pousse dans ses champs). De plus, ces situations initiales sont marquées par une prégnance des difficultés économiques. De la même manière, la situation actuelle se révèle être un état très lié au fait de porter une évaluation sur un évènement, de faire un constat, et/ou de prendre une décision. Par exemple, N a réussi l'implantation de ses prairies multi-espèces et se sent « plus zen dans son travail » (figure 2). Ensuite, les péripéties, que nous comprenons comme des situations de travail vécues par les agriculteurs, se révèlent plus ou moins reliées les unes aux autres. Elles peuvent par exemple s'enchaîner selon un processus en cascade mais peuvent aussi constituer des situations qui ne sont pas le fait de l'agriculteur mais qui ont un impact sur son travail. Enfin, N fait référence au temps futur par la narration de situations projetées. Il est alors possible de distinguer plusieurs types de projections : Des objectifs : la situation projetée constitue une situation so ée par l'agriculteur (ex : se dégager du temps). Des références à un futur très lointain : la situation projetée constitue un idéal (ex : avoir une structure en AB). Des prévisions : certaines situations projetées semblent déjà prévues par l'agriculteur (ex : sortir ses animaux quand il n'aura plus de fourrage). Des possibilités : des situations projetées constituent des situations possibles pour l'agriculteur (ex : décaler la période de reproduction). Des risques : des situations projetées semblent risquées pour l'agriculteur (ex : le risque d'une réduction des ventes). CONCLUSION ET MISE EN PERSPECTIVE Pour conclure, cette étude de cas permet de clarifier trois points cruciaux : (1) Les récits de conception permettent aux agriculteurs de se mouvoir dans le temps du processus de conception ; (2) Les récits de conception permettent aux agriculteurs engagés dans une TAE de rapporter leurs expériences relativement à leurs préoccupations actuelles et aux situations qu'ils projettent ; (3) Les préoccupations des agriculteurs en TAE sont de nature variée et sont interdépendantes : elles 5 SELF 2020, PARIS 11 -13 janvier 2021 learning, and links with the advisory services. Agroecology and Sustainable Food Systems, 38(5), 573-602. semblent donc difficiles à traiter de manière isolée. C'est pourquoi les processus de conception focalisés sont aussi à comprendre de manière combinée. C'est par leur combinaison que l'on approche le processus de conception global. Finalement, les récits de conception nous donnent accès très concrètement à ce qui est en jeu dans le processus de conception des agriculteurs. D'une part, nous pensons qu'ils sont un moyen d'argumenter le postulat répandu que la TAE suggère un ensemble de transformations de natures diverses pour l'agriculteur. Cependant, et en en lien avec les travaux de Duru et al. (2014) qui montrent qu'il existe des difficultés techniques spécifiques à la TAE, il serait intéressant de souligner plus précisément ce qui fait état de spécificités liées aux TAE. D'autre part, si la construction de récits de conception par l'agriculteur N souligne l'ampleur des changements occasionnés par des transitions agroécologiques, elle souligne également l'intérêt du point de vue construit autour du travail réel, que porte l'ergonome sur ces transitions. Ceci pose alors la question de savoir comment transmettre ce point de vue à ceux qui entourent plus classiquement les agriculteurs, dans notre cas tout le tissu du conseil agricole. La conception de la CC à laquelle des animateurs de CIVAM ont pris part est une des possibilités que l'on peut envisager pour se faire et continuer de développer. Il s'agirait alors de s'interroger sur la mobilisation et la valorisation du récit de conception par certains acteurs agricoles qui pourraient par exemple s'appuyer sur la représentation séquentielle des processus de conception focalisés pour échanger avec les agriculteurs de leur travail. Chizallet, M., (2019). Comprendre le processus de conception d'un système de travail dans l'indivisibilité du temps. Le cas d'agriculteurs en transition agroécologique. Thèse, Conservatoire National des Arts et Métiers, Paris. Chizallet, M., Barcellini, F., Prost, L. & Cerf, M. (2016). 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Biosynthèse et polymérisation de la lignine La lignine est un polymère de molécules phénoliques, dont la structure est complexe du fait de la grande variété de métabolites pouvant être incorporés et des différentes liaisons chimiques possibles entre ces sous-unités (Boerjan et al., 2003; Boudet et al., 2003). Ce polymère a un rôle fondamental dans la paroi secondaire et lui confère une résistance mécanique, une imperméabilité ainsi qu'une résistance à la biodégradation. Du fait de ses propriétés, la lignine est résistante à la dégradation, et représente par conséquent un obstacle industriel majeur pour l'accès aux polysaccharides de la paroi. Sa présence nécessite l'emploi de prétraitements polluants et couteux, lors de la production de pâte à papier ou de biocarburants par exemple. Les enjeux économiques ont grandement encouragé l'étude des voies de biosynthèse de la lignine (Grima-Pettenati and Goffner, 1999; Boudet et al., 2003), qui se sont avérées particulièrement complexes. Les études menées ces dernières années continuent de mettre en évidence des voies alternatives dans la biosynthèse des précurseurs de la lignine (Humphreys and Chapple, 2002; Boerjan et al., 2003; Ralph et al., 2004; Vanholme et al., 2010, 2013). Si la majorité des acteurs de la biosynthèse des précurseurs sont relativement connus, les enzymes impliquées dans leur polymérisation dans la paroi restent encore à identifier pour la plupart. La biosynthèse de la lignine débute dans la voie du shikimate, à l'origine d'une grande variété de molécules phénoliques. Dans cette voie métabolique, le chorismate sert de précurseur, notamment pour la production des acide aminés aromatiques : la phénylalanine, la tyrosine et le tryp phane (Knaggs et al., 2003). La biosynthèse des trois principaux alcools phydroxycinnamyliques (alcool p-coumarylique, coniferylique et sinapylique), se produit à travers 11 étapes enzymatiques de la voie des phénylpropanoides (Figure 10a). La voie générale des phénylpropanoides débute avec la désamination de la phénylalanine et conduit à la production d'esters d'hydroxy-cinnamoyl CoA. Les enzymes impliquées dans cette courte série de réactions sont la phenylalanine ammonia-lyase (PAL), cinnamate 4-hydroxylase (C4H) et 4-coumarateCoA ligase (4CL). Pour la production de monolignols, les esters d'hydroxy-cinnamoyl CoA subissent une succession d'hydroxylation et O-methylation de leur cycle aromatique, via l'action des 5 enzymes : shikimate O-hydroxycinnamoyl-transferase (HCT), CSE, p-coumarate 3-hydroxylase (C3H), caffeoyl CoA 3-O-methyltransferase 24 (CCoAOMT), ferulate 5-hydroxylase (F5H) et caffeate/5-hydroxyferulate O-methyltransferase (COMT). (a) (b) Flavonoids, stilbenes Lignin, oligolignols, glycosylated monolignols Figure 10: Représentation de la voie des phénylpropanoides. a) Voie générale des phénylpropanoides impliquée dans la biosynthèse des monolignols et de leurs dérivés, ainsi que des flavonoides et stilbenes. b) Gènes impliqués dans la biosynthèse des monolignols destinés à former le polymère de lignine chez l'Eucalyptus. Adapaté de Carocha et al., 2015. Le gène codant pour la CCR et l'activité enzymatique correspondante ont été caractérisés pour la première fois chez l'Eucalyptus gunnii (Lacombe et al., 1997), puis chez Arabidopsis (Lauvergeat et al., 2001) et le peuplier (Leplé et al., 2007). Un travail pionnier similaire a conduit à la caractérisation du gène d'Eucalyptus EguCAD2 (Grima-Pettenati et al., 1993). Les études fonctionnelles des autres gènes impliqués dans la voie des 25 phénylpropanoides ont été conduites principalement chez Arabidopsis, via des analyses de mutants (Vanholme et al., 2012). La disponibilité de la séquence du génome de l'Eucalyptus a récemment permis une annotation experte des gènes impliqués dans la biosynthèse de la lignine (Soler et al., 2014). L'annotation combinée à une analyse phylogénétique comparative, ont permis d'identifier 38 gènes appartenant aux clades bona fide, qui codent pour les enzymes impliquées dans les 11 étapes de la voie des phénylpropanoides. L'analyse de leur profils d'expression a permis d'identifier les 17 gènes considérés comme nécessaires pour la biosynthèse de la lignine au cours du développement du xylème (Figure 10b). Une approche similaire a été conduite chez le peuplier (Shi et al., 2010) pour l'identification gènes impliqués dans la biosynthèse de la lignine. Lorsque les précurseurs des monolignols sont synthétisés, ceux-ci sont transférés dans l'apoplaste par un mécanisme qui implique probablement des transporteurs de type ATPbinding cassette (ABC transporter) (Figure 9c). Récemment, il a été montré que le transporteur ABC, AtABCG29, est capable de transporter l'alcool p-coumarylique chez la levure et que l'accumulation de lignine est réduite chez un mutant d'Arabidopsis muté pour ce gène (Alejandro et al., 2012). Si la biosynthèse des précurseurs de la lignine est bien connue, l'étape de polymérisation bénéficie de beaucoup moins de preuves fonctionnelles. Le modèle actuel considère que lorsque les précurseurs des monolignols sont exportés dans la paroi, ceux-ci sont oxydés par des peroxydases et des laccases, et polymérisent avec la macromolécule de lignine pour former les monolignols. Leur oxydation, qui peut se faire sans le contact direct avec une de ces enzymes, conduit également à la mise en place de liaisons covalentes avec les polysaccharides environnants. Les gènes codant pour les laccases AtLAC4 et AtLAC17, ainsi que la peroxydase AtPER64 ont été associés à la polymérisation de la lignine (Lee et al., 2013; Berthet et al., 2011). Chez les dicotylédones, la lignine est principalement composée des sous-unités G et S, tandis que les H sont minoritaires (Vanholme et al., 2012). La structure finale du polymère de lignine va dépendre notamment de la quantité de sous-unités S/G/H. En effet, celles-ci diffèrent par leur degré de méthoxylation, et par conséquent, par le type de liaison qu'elles vont établir lors de la multimérisation dans la paroi. Ainsi, il est considéré que plus de 60% des li entre monolignols, chez les dicotylédones, sont de type -O-4. Ces liaisons -aryl éther, sont clivées par des traitements alcalins ou acides agressifs et sont ciblées dans le protocole de thioacidolyse couramment utilisé pour évaluer le ratio S/G (Sarkanen and 26 Ludwig, 1971). Les deux autres liaisons trouvées dans le polymère de lignine sont de type phénylcoumaranes et résinols formées par un couplage en -5 ou - respectivement. Ce sont des liaisons carbone - carbone extrêmement stables qui forment un polymère de lignine plus condensé, qu'il est impossible de dégrader sans endommager également les polysaccharides. Ces trois types de liaisons forment un polymère linéaire, mais des branchements en positions 4-O- ou 5-, peuvent être ajoutés et densifier le polymère final (pour plus de détails, voir Ralph et al., 2004). Le polymère de lignine est dérivé d'esters d'hydroxy-cinnamoyl CoA, qui sont également les précurseurs d'une large gamme de métabolites secondaires tels que les flavonoïdes, anthocyanes et tannins condensés (Boerjan et al., 2003). Les monolignols sont également utilisés pour la production d'au moins trois classes de composés secondaires : les oligolignols, les monolignols 4-O-hexosides et les lignanes. Les oligolignols sont des petits polymères issus du couplage des monolignols et qui ne sont pas liés au polymère de lignine (Morreel et al., 2004, 2010b, 2010a; Ralph et al., 2004). Les monolignols 4-O-hexosides regroupent des monolignols glycosylés tels que la coniferine et la syringine, qui pourraient être des formes de stockage des monolignols (Lim et al., 2005). Les lignanes sont des dimères de monolignols dont le type de liaison diffère de celles trouvées dans le polymère de lignine, et ont des propriétés antioxydantes (Umezawa, 2003). Récemment, il a été démontré chez le peuplier, que l'enzyme phenylcoumaran benzylic ether reductase (PtPCBER), est impliquée dans la synthèse de lignanes, ayant un rôle dans la protection contre le stress oxydatif (Niculaes et al., 2014). Ce processus de lignification de la paroi secondaire est la dernière étape précédant la mort de la cellule. 2.2.3. Mort programmée et formation du bois de coeur Lorsque le dépôt de la paroi secondaire est terminé, les vaisseaux et fibres vont entamer un processus de mort programmée. Les vaisseaux entament le processus de mort programmée dans les jours qui suivent leur différenciation de la zone cambiale, tandis que les fibres peuvent rester en vie pendant environ 1 mois (Bollhöner et al., ). Il a également été constaté que le processus de mort programmée des fibres est plus long que celui observé pour les vaisseaux conducteurs. Les cellules du parenchyme radial sont les seules cellules pouvant rester en vie après la maturation du xylème. Celles-ci sont impliquées dans les échanges entre xylème et phloème, dans le stockage de molécules de réserves (amidon et lipides), dans la construction des parois secondaires des cellules adjacentes et dans la formation du bois de 27 coeur. Le bois de coeur, ou duramen, correspond à la partie la plus interne du tronc, qui apparait souvent plus foncé que l'aubier, c'est à dire la partie la plus récente du tronc. Chez certaines espèces, l'aubier dispose de vaisseaux fonctionnels, tandis que les vaisseaux du duramen sont obstrués par des bouchons de tylose produits par les rayons adjacents. Plus généralement, le duramen est enrichi en composés phénoliques qui le rendent plus résistant. Cette accumulation de composés phénoliques est assurée par les cellules des rayons qui produisent ces composés et les libèrent dans les parois, ainsi que dans la lumière des cellules adjacentes (Déjardin et al., 2010). La mort programmée des cellules du xylème est une étape clé dans leur processus de maturation (Bollhöner et al., 2012). Il semblerait que les acteurs moléculaires nécessaires à cette étape soient produits dès que le processus de différenciation des cellules du xylème est entamé. En effet, durant la différenciation des cellules du xylème, un large spectre de protéases, lipases et nucléases sont produites et stockées dans la vacuole. Par un signal qui reste inconnu, la rupture du tonoplaste entraine un relargage et une activation de ces enzymes dans le cytoplasme menant à l'autolyse des composants de la cellules (Courtois-Moreau et al., 2009). Les protéases à cystéine XYLEM CYSTEINE PEPTIDASE1 (AtXCP1) et AtXCP2, ainsi que la nucléase BIFUNCTIONAL NUCLEASE1 (AtBFN1) ont été associées à ce processus d'autolyse chez Arabidopsis. 3. Régulation de la formation du bois La xylogenèse, est un processus complexe et dynamique influencé par de nombreux signaux endogènes et exogènes qui interviennent à plusieurs échelles. Ce mécanisme nécessite la coordination transcriptionnelle d'un grand nombre de gènes structuraux, qui est assurée, à plusieurs niveaux, par un eu d'hormones et autres molécules signal, ainsi qu'un réseau de gènes régulateurs. Malgré les progrès réalisés au cours de ces dernières années dans l'étude de la formation de la paroi secondaire, les us impliqués dans le contrôle de l'activité cambiale et la différenciation des cellules du xylème restent encore mal connus. 3.1. Régulation de l'activité cambiale et de la différenciation des cellules du xylème Le maintien du caractère pluripotent des cellules cambiales est indispensable pour une l'activité méristématique continue du cambium. Il a été montré, chez Arabidopsis, qu'à l'instar des méristèmes apicaux caulinaires et racinaires, le maintien et la prolifération du cambium sont contrôlés par une voie de signalisation impliquant des peptides, leur récepteur et un facteur de transcription (Fisher and Turner, 2007; Hirakawa et al., 2008; Etchells and 28 Turner, 2010). Le peptide TDIF est produit dans le phloème à partir des protéines CLE41/CLE44. Il est perçu par le récepteur kinase TDR/PXY (TDIF RECEPTOR/PHLOEM INTERCALATED WITH XYLEM) produit dans le cambium. Figure 11: Voie de signalisation TDIF/PXY regulant le maintient du cambium. Adapaté de Fukuda, 2016. Chez Arabidopsis, des partenaires potentiels interagissant avec TDR/PXY ont été identifiés : les récepteurs kinases (RLKs) ERECTA (ER) et ER-LIKE1 ainsi que leur ligands EPFL4 et EPFL6 (Uchida et al., 2013). Deux autres RLKs, MORE LATERAL GROWTH1 (MOL1) et 29 REDUCED IN LATERAL GROWTH1 (RUL1), semblent être des régulateurs négatifs de l'activité cambiale et pourraient agir en amont de TDR/PXY-WOX4. MOL1 agirait en tant que répresseur et RUL1 comme activateur de la croissance secondaire (Agusti et al., 2011). Toujours chez la plante modèle Arabidopsis, un autre FT de type KNOX classe I, BREVIPEDICELLUS (BP)/ KNAT1, est impliqué dans la différenciation du xylème. Des plantes surexprimant ce gène montrent une inactivation du dépôt de lignine, tandis que les mutants pour ce gène montrent une lignification ectopique (Mele et al., 2003). Chez le peuplier, un orthologue de ce gène, ARBORKNOX2 (PtARK2), est exprimé dans les meristèmes, dont le cambium. D'autre part, lorsque ce gène est surexprimé, une expansion de la zone cambiale est associée à une inhibition de la production de nouvelles assises cellulaires dans le xylème et le phloème, ainsi qu'une régulation négative des gènes reliés à la synthèse de paroi (Du et al., 2009). Ces observations indiquent qu'ARK2 participe au maintien de l'activité cambiale, bien que la régulation qu'il exerce sur les gènes de biosynthèse de la paroi, ait parfois conduit à le considérer uniquement comme un régulateur de la formation de la paroi (Hussey et al., 2013). Certaines hormones telles que les cytokinines, l'auxine, les gib ellines et l'éthylène sont considérées comme nécessaires dans la régulation de l'activité cambiale (Didi et al., 2015). Les études fonctionnelles conduites chez Arabidopsis et le peuplier, suggèrent que la voie de signalisation des cytokinines régule à la fois le maintien et la prolifération du cambium (Mahonen et al., 2006; Matsumoto-Kitano et al., 2008; Nieminen et al., 2008; Hejátko et al., 2009). L'analyse de peupliers surexprimant un gène encodant une enzyme de biosynthèse de l'éthylène (PtACO1) et un mutant d'Arabidopsis pour le gène encodant le récepteur de l'éthylène (AtETR1), ont montré que cette hormone végétale stimule l'activité cambiale ainsi que la différenciation des cellules du xylème (Love et al., 2009). Il a été proposé que l'éthylène participe à la régulation de l'activité cambiale via les voies de signalisation à l'auxine, puisque les gènes reliés à la biosynthèse de l'éthylène sont induits par l'auxine dans la tige du peuplier (Nilsson et al., 2008). Chez le peuplier, la stimulation de l'activité cambiale par l'application d'auxine et d'acide gibbérellique, est en faveur de l'hypothèse d'un rôle clé de ces hormones dans le contrôle de la formation du bois (Björklund et al., 2007). Un nombre croissant d'études associent l'auxine à la formation du xylème. Chez Arabidopsis, un flux d'auxine va participer à la dédifférenciation des cellules précurseurs du 30 cambium, puis au maintien de celui-ci (Donner et al., 2009; Ohashi-Ito et al., 2010). De plus, la formation des faisceaux vasculaires est induite par un pic d'auxine dans le procambium, généré par un transport polarisé assuré par le transporteur PINFORMED 1 (AtPIN1) (Donner et al., 2009). Chez le peuplier, la surexpression d'une version mutée du gène PtIAA3, qui entraine une plus faible sensibilité à l'auxine, est associée à une réduction importante de l'activité cambiale et de la croissance secondaire (Nilsson et al., 2008). La surexpression d'une version stabilisée de la protéine EgIAA4 d'E. grandis chez Arabidopsis, entraine un retard de la lignification des fibres interfasciculaires et des faisceaux vasculaires (Yu et al., 2014). Ces observations montrent que l'auxine exercerait un rôle à la fois dans le contrôle de l'activité cambiale et dans la différenciation des cellules du xylème. Cependant, les voies de signalisation impliquées sont encore mal connues. En aval des voies de signalisation de ces hormones, différents FT sont impliqués dans la différenciation du système vasculaire. Le FT de type HD-ZIP de classe III, ATHB8, est requis pour le développement du procambium et la différenciation des tissus vasculaires chez Arabidopsis. Son expression est induite par le FT de type RF (Auxin Response Factor), MONOPTEROS (MP), suite à la perception de l'auxine (Donner et al., 2009). En plus de ce gène, quatre autres FT du même type ont été reliés à la différenciation du xylème : PHB/ATHB14, PHV/ATHB9, REV/IFL1 et CNA/ATHB15 (Baima et al., 2001; Ilegems et al., 2010). La caractérisation fonctionnelle des orthologues de certains de ces gènes chez le peuplier, comme ATHB8 (PtHB7), ATHB15 (POPCORONA) et REV/IFL (POPREVOLUTA), a confirmé leur implication dans la formation du cambium et la différenciation des tissus vasculaires chez les arbres (Du et al., 2011; Robischon et al., 2011; Zhu et al., 2013). Ceci suggère que ce mécanisme observé chez les plantes herbacées, serait conservé chez les arbres. Le FT de type GARP, KANADI 1 (AtKAN1), exprimé dans le phloème, a un rôle antagoniste aux FT de type HD-ZIP de classe III dans la régulation de la différenciation des cellules du xylème, en réponse à l'auxine (Izhaki and Bowman, 2007; Ilegems et al., 2010). L'intervention de ces FT HD-ZIP et GARP, n'est pas réduite à la formation du xylème, mais plus généralement à l'activité méristématique et l'organisation des organes (Schuetz et al., 2013). En plus de la régulation par l'auxine, les FT HD-ZIP classe III subissent des régulations post-transcriptionnelles par les micro ARN (miARN) 165 et 166. Dans le modèle généralement admis, les FT de type HD-ZIP activent l'expression des transporteurs d'auxine PIN dans le cambium, ce qui induit un pic d'auxine dans la zone cambiale et active la prolifération du cambium ainsi que la différenciation de nouvelles assises cellulaires dans le 31 xylème. Les FT de type KAN et les miARN exprimés dans le phloème vont réguler négativement le transport d'auxine et l'expression des FT HD-ZIP, dans la zone cambiale coté phloème, dans le but de favoriser la différenciation d'assises cellulaires du phloème (Ilegems et al., 2010). Lors de leur différenciation, les cellules du xylème vont subir une série de modifications morphologiques. Une des étapes majeures dans ce processus est le dépôt d'une épaisse paroi secondaire qui constituera ensuite le bois. 3.2. Régulation transcriptionnelle de la formation de la paroi secondaire 3.2.1. Les facteurs de transcription de type MYB et NAC sont des régulateurs clés Les FT sont des protéines chargées de réguler la transcription de gènes cibles, via la reconnaissance de motifs présents dans leurs promoteurs. Prés de 60 familles de FT ont été identifiés chez Arabidopsis le peuplier et l'Eucalyptus (Jin et al., 2017). Les FT de type MYB-R2R3 constituent une des plus grandes familles et régulent un grand nombre de processus, tels que le métabolisme primaire et secondaire, la différenciation cellulaire, le développement, et la réponse aux stress biotiques et abiotiques (Jin and Martin, 1999; Dubos et al., 2010). Les FT MYB-R2R3 sont caractérisés par la présence d'un domaine de liaison à l'ADN (MYB pour MYeloBlastosis) composé de deux répétitions adjacentes (R2R3) en Nterminal, et une région C-terminale variable portant l'activité d'activation ou répression de la transcription (passé en revue par Jin and Martin, 1999; Dubos et al., 2010). Chez Arabidopsis, l'analyse phylogénétique de cette famille et la détection de motifs dans la région C-terminale variable, a permis de définir 22 sous-groupes regroupant la majorité des gènes MYB-R2R3. Cependant, pour beaucoup d'entre eux, aucun motif conservé n'a pu être détecté (Kranz et al., 1998; Stracke et al., 2001). Des études de phylogénie ont ensuite été conduites chez d'autres espèces, telles que le riz (Oryza sativa; Jiang et al., 2004; Yanhui et al., 2006), la vigne (Vitis vinifera; Matus et al., 2008), le peuplier (Populus trichocarpa; Wilkins et al., 2009), le maïs (Zea mays; Du et al., 2012), le soja (Glycine max; Du et al., 2012b), le pommier (Malus domestica; Cao et al., 2013) et le millet (Panicum virgatum; Zhao and Bartley, 2014). Ces travaux ont révélé que la plupart des sous-groupes décrits chez Arabidopsis sont conservés. Cependant, certains sous-groupes, absents chez Arabidopsis sont détectés. Plus récemment, Soler et al., (2014) ont tiré profit de la disponibilité du génome d'E. grandis, pour réaliser une analyse phylogénétique comparative incluant des espèces ligneuse (E. grandis, V. vinifera et P. trichocarpa) et des espèces herbacées (A. thaliana et O. sativa). Ce travail a montré que les 32 sous-groupes contenant les FT clés de la régulation de la formation de la paroi, sont conservés entre les espèces. De façon intéressante, cette étude a également révélé l'existence de trois sous-groupes enrichis en gènes d'arbres (woody-expanded subgroups, WES; S5, S6 SAtMYB5) et 5 sous-groupes préférentiellement détectés chez les arbres (woody-preferential subgroups, WPS; WPS-I à V). La diversification de ces FT permettrait d'assurer la régulation de fonctions spécifiques aux espèces pérennes. L'expression préférentielle de certains des membres de ces sous-groupes dans les tissus du bois, suggère un rôle spécifique dans la régulation de la croissance secondaire (Soler et al., 2014). Les FT de type NAC, définis par la présence d'un domaine de liaison à l'ADN NAC (NAM, ATAF1/2 et CUC2) en N-terminal, représentent une autre grande famille de FT pour les plantes. Cette famille de FT a également fait l'objet d'une annotation et d'une étude phylogénétique chez l'Eucalyptus (Hussey et al., 2015). Cette étude montre que ces FT, qui sont impliqués dans la régulation d'un grand nombre de fonctions biologiques, pourraient jouer un rôle important dans le développement et la réponse des tissus vis à vis des stress biotiques et abiotiques. Phloem Immature xylem Level 1 Level 2 Level 3 Secondary cell wall biosynthesis Figure 12: Réseau de régulation impliqué dans le contrôle du dépôt de paroi secondaire dans les cellules du xylème en différenciation. Adapaté de Hussey et al., 2013 et Ko et al., 2014. Chez Arabidopsis, 10 FT (AtVND1 à AtVND7, AtSND1, AtNST1 et AtNST2) appartiennent à cette catégorie de régulateurs maitres de type NAC, et initient la formation de la paroi dans différents types cellulaires (Zhong et al., 2010a). Les FT AtVND1 à AtVND7 sont spécifiquement exprimés dans les vaisseaux et induits lors de la différenciation de cultures cellulaires d'Arabidopsis en vaisseaux (Kubo et al., 2005; Yamaguchi et al., 2008). Ces gènes sont phylogénétiquement proches et appartiennent au sous-groupe des VND (VASCULAR-RELATED NAC DOMAIN) (Ohtani et al., 2011; Zhu et al., 2012). 34 L'implication de ces gènes dans la régulation de la formation de la paroi secondaire spécifiquement dans les vaisseaux a été démontrée uniquement pour les gènes VASCULAR RELATED NAC DOMAIN6 (AtVND6) et AtVND7, qui semblent avoir une fonction redondante (Yamaguchi et al., 2008, 2010a, 2011). AtVND7 interagit avec AtVND1, AtVND2, et AtVND3, mais la fonction de ces gènes dans la différenciation des vaisseaux, n'est pas encore clairement définie (Yamaguchi and Demura, 2010; Hussey et al., 2013). Une étude récente a mis en évidence que tous les FT VNDs activent l'expression d'AtVND7, tandis que la réciproque n'est pas vraie. Ce qui suggère que AtVND7 pourrait être positionné à la fin d'une cascade de régulations transcriptionnelles (Endo et al., 2015). Les gènes NAC SECONDARY WALL THICKENING PROMOTING FACTOR 1 (AtNST1), AtNST2 et SECONDARY WALL ASSOCIATED NAC DOMAIN PROTEIN 1 (AtSND1/AtNST3), sont les trois autres régulateurs maitres de la formation de la paroi secondaire caractérisés à ce jour (Ko et al., 2007; Mitsuda et al., 2007; Mitsuda and OhmeTakagi, 2008). Ils sont exprimés dans les fibres, les racines et les siliques, mais leur expression n'est pas détectée dans les cultures de cellules qui se différencient en vaisseaux. Un triple mutant pour ces gènes présente une perte totale de la formation de la paroi secondaire dans les fibres du xylème tandis que les vaisseaux ne sont pas affectés (Zhong et al., 2006; Mitsuda et al., 2007; Zhong et al., 2007b; Mitsuda and Ohme-Takagi, 2008; Zhong and Ye, 2014). AtNST1 et AtNST2 sont également exprimés dans les cellules de l'endothécium des anthères et le double mutant ne forme plus de paroi secondaire dans ces types cellulaires (Mitsuda et al., 2005). Ces observations conduisent à affirmer que ces trois gènes sont impliqués dans la régulation de la formation de la paroi spécifiquement dans les fibres. Cependant, l'expression de AtNST1 dans les stades précoces de la différenciation des vaisseaux et le profil du dépôt de paroi ressemblant à celle des vaisseaux dans les surexpresseurs AtNST1, ne permet pas d'exclure un rôle dans les vaisseaux également (Mitsuda et al., 2005, 2007). Il est connu qu'une combinaison d'hormones, peptides mobiles et de FT de type bZIP de classe III, participent à déterminer le devenir des nouvelles assises cellulaires produites par le cambium (Schuetz et al., 2013; Partie 3.1). Cependant la paroi secondaire n'est pas mise en place dès les premières étapes de la différenciation. Ce qui implique l'existence de mécanismes moléculaires contrôlant l'expression spatio-temporelle des régulateurs maitres de la formation de la paroi. Récemment, les gènes ASYMMETRIC LEAVES2-LIKE19/LATERAL ORGAN BOUNDARIES DOMAIN30 (AtASL19/AtLBD30), AtASL20/AtLBD18 et VND35 INTERACTING2 (AtVNI2), ont été identifiés comme régulateurs de l'expression des VNDs (Soyano et al., 2008; Yamaguchi et al., 2010b). Des lignées mutées dans le gène AtWRKY12, montrent un dépôt ectopique de paroi secondaire, associé à une activation des gènes reliés à la biosynthèse des composants de la paroi et une augmentation du niveau de l'expression d'AtNST2 (Wang et al., 2010). L'hypothèse est que le FT AtWRKY12 inhiberait la formation de la paroi secondaire en régulant négativement les régulateurs maitres NST. AtMYB26 semble lui aussi réguler l'expression de AtNST1 et AtNST2 dans les anthères, contribuant au contrôle de la formation de la paroi secondaire (Yang et al., 2007). En dépit d'une apparente spécificité cellulaire de ces régulateurs maitres, les travaux its ces dernières années suggèrent que l'essentiel de leurs cibles seraient communes. Les régulations induites par AtVND6/AtVND7 et AtNST2 sont largement communes à celles induites par AtSND1/AtNST1, bien qu'un certain nombre de cibles soient spécifiques à AtVND6, AtVND7 ou AtSND1 (Hussey et al., 2013). Notamment, AtVND6/AtVND7 régulent la différenciation des vaisseaux en induisant les gènes impliqués dans la mort cellulaire programmée, alors que ces derniers ne sont pas régulés par AtSND1/AtNST1 qui contrôlent la différenciation des fibres (Ohashi-Ito et al., 2010; Zhong et al., 2010b). De plus, le couple AtVND6/AtVND7 est impliqué dans une boucle de rétrocontrôle positif avec les FT AtASL19 (ASYMMETRIC LEAVES2/LATERAL ORGAN BOUNDARIES DOMAIN) et AtASL20 (Soyano et al., 2008). Enfin, AtVND7 interagit avec le répresseur AtVNI2, qui n'est pas détecté dans un autre type cellulaire que les vaisseaux (Yamaguchi et al., 2010b). Ces régulateurs maitres du niveau 1 interviennent très en amont dans les voies de régulation de la formation de la paroi secondaire et régulent un ensemble de FT de niveau 2 (Figure 12) (Hussey et al., 2013) parmi lesquels AtMYB46, AtMYB83 et AtMYB103, AtXND1 et AtSND3, ainsi que AtASL11 (Zhong et al., 2010b; Yamaguchi et al., 2011). AtMYB46 et AtMYB83 sont fonctionnellement redondants et sont les cibles de tous les régulateurs maitres cités précédemment. Ils sont exprimés dans les fibres et vaisseaux, et sont capables d'induire la formation d'une paroi secondaire lorsqu'ils sont surexprimés (Zhong et al., 2007a; Ko et al., 2009; McCarthy et al., 2009). Ils semblent donc former un carrefour de régulation s'appliquant directement aux FT du niveau 1 : AtMYB43, AtMYB52, AtMYB54, AtMYB58 et AtMYB63, le trio de gènes redondants AtMYB4/AtMYB7/AtMYB32, le FT AtC3H14 de type C3H-type zinc finger et le FT AtKNAT7 de type homeobox (Figure 12) (Ko et al., 2009; McCarthy et al., 2009; Nakano et al., 2010; Zhong and Ye, 2012). AtMYB46 et AtMYB83 sont également capables de réguler directement des gènes impliqués dans la 36 biosynthèse de la paroi, l'organisation du cytosquelette, le transport vésiculaire et la mort cellulaire programmée (Zhong and Ye, 2012). AtMYB103, qui est phylogénétiquement proche d'AtMYB61 et AtMYB55 (Dubos et al., 2010), est une cible directe du régulateur maitre AtSND1. AtMYB103 régule la biosynthèse de la lignine, particulièrement la voie conduisant aux sous unités S (Öhman et ., 2013). AtMYB61 semble également activer l'expression de gènes structuraux de façon directe, notamment les gènes reliés à la biosynthèse de lignine (Hussey et al., 2013). La répression dominante d'AtMYB103 et AtSND3 provoque une réduction du dépôt de paroi, mais leur surexpression n'entraine pas un dépôt ectopique de paroi secondaire. Ils permettraient donc d'ajuster le dépôt de paroi, mais leur rôle n'est pas clairement défini (Zhong et al., 2008). AtXND1 a été proposé comme régulateur négatif de la biosynthèse de paroi secondaire et de la mort programmée, mais sa fonction précise reste à définir (Zhao et al., 2008). Des études fonctionnelles, et notamment des analyses de ChipSEQ et de simple hybride (Hussey et al., 2013), ont pu montrer que parmi les régulateurs les plus en aval du réseaux (niveau 1), on peut trouver deux groupes de FT : des régulateurs positifs et des régulateurs négatifs du dépôt de SCW. Les gènes AtMYB20, AtMYB43 et AtMYB85 sont 37 phylogénétiquement proches, et clusterisent près du sous-groupe 3 qui contient AtMYB63 et AtMYB58 (Dubos et al., 2010). Ils sont également des cibles directes des régulateurs maitres, notamment AtMYB20 dont l'expression est régulée par AtSND1 (Zhong et al., 2008; Öhman et al., 2013). Ces trois FT, ainsi qu'AtMYB79 sont généralement considérés comme capables de réguler la biosynthèse de lignine (Hussey et al., 2013), bien que cette régulation n'ait pu être mise en évidence que pour AtMYB85 (Zhong et al., 2008). Parmi les régulateurs négatifs, le trio de FT AtMYB4/7/32, sont caractérisés par la présence d'un motif répresseur de type ERF-associated amphiphilic repression (EAR), caractéristique des FT répresseurs chez les plantes (Ohta et al., 2001). Cependant, seul AtMYB32 a été relié de façon directe à la formation de la paroi (Preston et al., 2004). Certaines données de caractérisation fonctionnelle suggèrent que ces gènes sont reliés à la régulation du métabolisme des phénylpropanoides (Jin et al., 2000; Preston et al., 2004). Le FT AtKNAT7 est directement activé par les régulateurs maitres NAC de niveau 3 ainsi que AtMYB46/83. Il réprime les gènes impliqués dans la biosynthèse de la cellulose, des hémicelluloses et de la lignine (Zhong et al., 2008; Li et al., 2012). D'autres FT tels que AtC3H14 et AtSND2 ont été associés, plus généralement, à la régulation de gènes impliqués dans la biosynthèse de plusieurs types de composants de la paroi secondaire (Hussey et al., 2013). Bien que positionné très en amont dans la voie de régulation de la différenciation du xylème, AtBES1 est le seul FT de ce réseau pour lequel une liaison aux promoteurs de gènes de CesA nécessaires à la biosynthèse de la paroi secondaire, a été démontrée (Xie et al., 2011). Par ailleurs, de nombreux FT de types bZIP, homeodomain, BEL1-like et zinc-finger ont été listés comme cibles des FT AtMYB46 et AtMYB83, mais n'ont pas été reliés à la biosynthèse de la paroi (Zhong and Ye, 2012). Les analyses globales de transcriptomique et d'interaction ADN-protéines, conduites ces dernières années, suggèrent que les réseaux de régulation contrôlant le dépôt de paroi sont bien plus complexes que ce qui est connu. 3.2.3. Conservation du réseau de régulation du dépôt de paroi chez les espèces pérennes Plusieurs études conduites chez des espèces pérennes telles que le peuplier et l'Eucalyptus, suggèrent que ces voies de régulation décryptées chez la plante herbacée Arabidopsis, sont conservées chez les arbres (Zhang et al., 2014). Chez le peuplier, 16 gènes sont phylogénétiquement proches des régulateurs maitres de type NAC (NST/SND/VND). Ils sont généralement nommés PtVNS (P. trichocarpa VND-, NST/SND-, SMB-related proteins) ou PtWNDs (wood-associated NAC domain). Parmi ces gènes, les orthologues d'AtSND1 chez le peuplier (PtWND2B et PtWND6B) sont capables d'induire un dépôt ectopique de paroi secondaire et complémentent le double mutant snd1 nst1 d'Arabidopsis (Zhong et al., 2011). Parmi les 8 gènes qui sont proches phylogénétiquement des AtVND, l'orthologue d'AtVND7 (PtVNS07/PtWND6A) semble réguler le dépôt de paroi secondaire chez le peuplier (Ohtani et al., 2011). Parmi les régulateurs du niveau 2, des orthologues du gène AtMYB46 ont été décrits dans de nombreuses espèces dont des monocotylédones telles que le riz (OsMYB46) et le maïs (ZmMYB46) (Zhong et al., 2011). Les premiers orthologues d'AtMYB46 ont été caractérisés chez le pin (PtMYB4; Patzlaff et al., 2003), puis chez l'Eucalyptus (EgMYB2; Goicoechea et al., 2005). La surexpression d'EgMYB2 chez le tabac entraine une induction des gènes impliqués dans la bio èse de la lignine, une modification du ratio S/G, ainsi qu'une induction des gènes reliés à la biosynthèse de la cellulose et des hémicelluloses. Les auteurs ont également démontré qu'EgMYB2 est capable de se lier aux promoteurs des gènes d'Eucalyptus EgCCR et EgCAD2, impliqués dans la biosynthèse de lignine, et d'activer leur transcription (Goicoechea et al., 2005). Plus récemment, il a été démontré qu'EgMYB2 complémente le double mutant myb46 myb83 d'Arabidopsis (Zhong and Ye, 2009). La conservation du jeu de régulateurs AtMYB46/AtMYB83, chez les arbres, a à nouveau été démontrée lors de la caractérisation de leurs orthologues PtMYB2/PtMYB21 et PtMYB3/PtMYB20, qui assurent une fonction similaire chez le peuplier (McCarthy et al., 2010; Zhong et al., 2013). Toujours chez le peuplier, les orthologues fonctionnels d'AtXND1 et AtSND2/3 jouent également un rôle dans la régulation de la formation de la paroi secondaire (Grant et al., 2010). Le FT de l'Eucalyptus EgMYB1, appartient au sous-groupe 4, qui est constitué de régulateurs de la voie des phénylpropanoides chez Arabidopsis (AtMYB4, AtMYB7, AtMYB32) (Soler et al., 2015). EgMYB1 a été le premier membre de ce sous-groupe à être relié à la synthèse de lignine pour la formation de la paroi secondaire (Legay et al., 2007, 2010). Il est 39 capable de se lier aux promoteur des gènes EgCCR et EgCAD2 pour réguler négativement leur transcription (Legay et al., 2007). Sa surexpression chez Arabidopsis et le peuplier entraine une réduction de l'épaisseur de paroi associée à une plus faible accumulation de lignine dans le xylème (Legay et al., 2010). Plus récemment, il a été découvert qu'EgMYB1 interagit avec l'histone linker EgH1.3 pour inhiber l'expression des gènes impliqués dans la biosynthèse de lignine, ce qui suggère que cette régulation pourrait être associée à un mécanisme de remodelage de la chromatine (Soler et al., 2016). La caractérisation fonctionnelle récente des orthologues d'EgMYB1 chez le peuplier (PtMYB156/PtMYB221), a confirmé leur activité de répresseurs de la formation de la paroi secondaire (Tang et al., 2015; Yang et al., 2017). Parmi les nombreux FT du niveau 3, les paires de FT PtMYB216/170 orthologues d'AtMYB61, PtMYB92/125 orthologues d'AtMYB42, PtMYB90/167 orthologues d'AtMYB52 et PtMYB10/128 orthologues d'AtMYB103, ainsi que l'orthologue d'AtKNAT7 ont été caractérisés chez le peuplier (Li et al., 2012; Chai et al., 2014; Li et al., 2015). Ces études suggèrent que les principaux acteurs impliqués dans la régulation de la formation de la paroi secondaire dans le xylème, caractérisés chez Arabidopsis, semblent conservés chez les arbres. Cependant, certains exemples la penser qu'il pourrait exister des divergences entre les arbres et les plantes herbacées dans les voies de régulation de la formation de la paroi. Par exemple, le FT EgMYB1 est impliqué dans le contrôle du dépôt de lignine dans le xylème de l'Eucalyptus, tandis que son plus proche orthologue chez Arabidopsis (AtMYB4) ne semble pas impliqué dans ce processus, mais dans la régulation de la synthèse des phénylpropanoides lors de la réponse au stress UV (Jin et al., 2000; Legay et al., 2010). Il a également été constaté l'existence de sous-groupes de FT de type MYB détectés préférentiellement chez les arbres (Soler et al., 2015). Ces données laissent supposer qu'il pourrait exister des mécanismes de régulation de la formation de la paroi secondaire, spécifiques aux espèces ligneuses. Ces régulations pourraient intervenir dans la formation de la paroi dans des tissus ou des conditions spécifiques. 4. Plasticité de la formation du bois dans l'adaptation aux contraintes environnementales 4.1. Quelles contraintes environnementales? Dans leur environnement naturel, les plantes doivent faire face à une variété de stress biotiques et abiotiques. Parmi les stress abiotiques les plus fréquemment rencontrés, la sécheresse et le froid, sont responsables de très fortes réduction du rendement en agriculture (Wang et al., 2013). Dans de nombreuses régions du monde, ils représentent également une 40 contrainte majeure affectant la croissance des plantes pérennes, y compris l'Eucalyptus (Teulieres et al., 2007). Le froid et la sécheresse étant les deux facteurs qui limitent le plus l'implantation de ce ligneux dans certaines régions du monde (Teulières et al., 2007). Par ailleurs, les espèces d'Eucalyptus les plus productives sont cultivées en zones tropicales et subtropicales, où il est prédit que les changements climatiques altéreront les régimes de précipitation et de températures, exacerbant les épisodes de sécheresse et de températures extrêmes (Wu et al., 2011). Pour faire face aux contraintes environnementales, les plantes ont élaboré des réseaux de signalisation complexes qui consistent en (1) la perception des signaux de l'environnement, (2) l'activation des voies de transduction du signal et (3) l'induction d'une réponse génétique en modulant l'expression de gènes impliqués dans l'adaptation de la physiologie en vue de la mise en place d'un état de tolérance. Les mécanismes de perception de ces stress par la cellule ne sont pas encore clairement démontrés. Dans le cas du stress froid, il a été avancé qu'il pourrait être perçu directement au niveau de la membrane plasmique, via des changements dans les propriétés physicochimiques de celle-ci, et notamment dans sa fluidité, impliquant la réorganisation du cytosquelette et l'activation de canaux calciques (Plieth et al., 1999; Huang et al., 2012; Knight and Knight, 2012). Chez Arabidopsis, il a été proposé que le stress osmotique induit par le manque d'eau, serait perçu notamment par l'histidine kinase AtAHK1 localisée dans la membrane plasmique (Tran et al., 2007; Osakabe et al., 2014). En aval de ces mécanismes de perception, les FT de type DREB (drought-responsive element binding) qui appartiennent à la famille AP2/ERF (Apetala 2/ethylene-responsive factor), ont pour rôle de réguler l'expression des gènes impliqués dans la protection (Licausi et al., 2013). Ils sont caractérisés par un domaine de liaison à l'ADN conservé de type AP2, pour la liaison aux éléments cis de type DRE/CRT (C-repeat factor) dans le promoteur des gènes cibles (Stockinger et al., 1997; Yamaguchi-Shinozaki and Shinozaki, 2005). Chez Arabidopsis, les FT de type DREB2 sont principalement impliqués dans la mise en place de la tolérance à la déshydratation ou aux fortes températures (Xu et al. 2011). Le deuxième groupe, les FT DREB1 ou CBF (C-repeat binding factor), sont impliqués dans la tolérance au gel (Miller et al., 2006; Lata and Prasad, 2011; Dhillon and Stockinger, 2013; Motomura et al., 2013; Park et al., 2015). Dans le cas de l'Eucalyptus, 17 gènes composent la famille CBF, ce qui est beaucoup plus que chez Arabidopsis, et seulement 6 gènes à la famille DREB2 (Cao et al., 2015; Nguyen et al., 2017). La surexpression ectopique d'un des EgCBF, entraine des modifications de la croissance similaires à celles observées lors d'une acclimatation au 41 froid, dont : une augmentation de la résistance au froid associée à une réduction de la croissance (Navarro et al., 2011). Un effet similaire a été observé dans d'autres espèces pérennes (Benedict et al., 2006; Siddiqua and Nassuth, 2011; Tillett et al., 2012; Artlip et al., 2013; Wisniewski et al., 2015). Ceci suggère que ces FT induisent des mécanismes de protection, mais également des régulations dans les processus développementaux. Ce contrôle de la croissance par les CBFs pourrait être contrôlée par la régulations des voies de signalisation des gibbérellines et des cytokinines (Achard et al., 2006, 2008; Huang et al., 2009). Bien que les CBFs soient principalement induits en réponse au froid et les DREB2 principalement induits en réponse au stress osmotique, un nombre croissant d'études mettent en évidence des régulations croisées entre ces deux voies de réponse (Lata and Prasad, 2011; Huang et al., 2012; Yoshida et al., ). Chez l'Eucalyptus, des membres des deux groupes sont induits en réponse au froid et à la sécheresse, suggérant que certaines adaptations sont similaires entre ces deux stress (Nguyen et al., 2017). 4.2. Impact de ces stress sur la formation du bois Dans les nombreuses études menées sur la réponse des plantes aux stress abiotiques, la paroi a reçu moins d'attention que les réponses moléculaires impliquées dans la préservation des processus biologiques cellulaires. De nombreuses études s'accordent à dire que la paroi joue également un rôle dans la mise en place de la résistance à des stress tels que la sécheresse ou le froid (Moura et al., 2010; Cabane et al., 2012; Gall et al., 2015). Le plus souvent, l'exposition au froid ou au manque d'eau, semble activer les voies de biosynthèse de la paroi dans des organes tels que les feuilles et les racines. Pour la paroi primaire, une augmentation de la synthèse des hémicelluloses, et parfois de cellulose, est observée. Généralement, les auteurs relient ce phénomène à des changements de potentiel osmotique et des ajustements dans la croissance (Gall et al., 2015). Les études de l'adaptation de la paroi secondaire des cellules du système vasculaire sont plus rares, et suggèrent le plus souvent une augmentation de la biosynthèse de lignine en réponse aux stress (Moura et al., 2010; Cabane et al., 2012). Ceci est généralement interprété comme une stratégie consistant à rigidifier et imperméabiliser la paroi des cellules du système vasculaire pour résister au manque d'eau et au gel. Dans le cas de l'exposition au froid, la majorité de ces observations sont parcellaires, parfois contradictoires, et reposent sur l'analyse de quelques paramètres isolés comme l'expression de quelques gènes potentiellement reliés à la biosynthèse de la lignine, la quantification de l'activité de certaines enzymes de la voie des phénylpropanoides (Hausman 42 et al., 2000; Moura et al., 2010; Cabane et al., 2012; Domon et al., 2013). En ce qui concerne la réponse à la sécheresse dans le xylème, la majorité des études conduites chez les espèces pérennes se sont concentrées sur les modifications structurales du système conducteur (Vander Willigen and Pammenter, 1997; Awad et al., 2010; Plavcová and Hacke, 2012; Pattathil et al., 2016; Fonti et al., 2013; Eldhuset et al., 2013), et suggèrent le plus souvent une activation de la biosynthèse de paroi (Arend and Fromm, 2007 Cependant, très peu de données sont disponibles quant à l'impact de la sécheresse sur la régulation transcriptionnelle de la biosynthèse de paroi secondaire (Gall et al., 2015). Par ailleurs, un nombre croissant d'études mettent en lien l'adaptation au manque d'eau et le régime de fertilisation minérale (Wang et al., 2013). Le potassium notamment est connu pour être un ion essentiel dans le développement du bois (Fromm, 2010), mais également dans les processus d'adaptation des plantes aux stress (Cakmak, 2005; Wang et al., 2013). Il a récemment été montré que sa disponibilité impacte la croissance de l'Eucalyptus, et son adaptation au manque d'eau (Laclau et al., 2009; Battie-Laclau et al., 2014, 2016). Mais les régulations transcriptionnelles induites dans le développement du xylème secondaire d'arbres fertilisés et soumis au manque d'eau n'ont pas été étudiées. Des gènes impliqués à la fois dans le contrôle de la tolérance aux stress abiotiques et de la formation de la paroi secondaire commencent à être identifiés. Par exemple, la surexpression de MYB46 chez le bouleau, impacte à la fois la tolérance et le dépôt de paroi secondaire (Guo et al., 2017). De même, les lignées d'Eucalyptus surexprimant un CBF, présentent des modifications de l'expression des gènes impliqués dans la biosynthèse de la paroi secondaire ainsi qu'une meilleure résistance aux stress (Navarro et al., 2011). 4.3. Cas du bois de réaction La formation du bois de réaction en réponse à une contrainte mécanique, est l'exemple le plus marquant et le mieux caractérisé de l'impact d'un stress abiotique sur la formation du bois. Le bois de réaction est généralement formé en réponse à une orientation non verticale de la tige, inclinaison qui peut être causée par différents facteurs externes. Dans le processus de développement, ce type de bois est produit dans le but réorienter la tige pour une croissance verticale. Chez les angiospermes il est caractérisé par une croissance excentrique dans la zone de la tige maintenue en tension, par la stimulation de l'activité cambiale sur la face supérieure (bois de tension) et l'inhibition de la croissance sur la face inferieure (bois de compression) (Hellgren et al., 2004). Chez de nombreux angiospermes tels que l'Eucalyptus et le peuplier, 43 le bois de tension se distingue du bois normal, par des changements drastiques dans sa composition et sa structure (Jourez et al., 2001; Toghraie et al., 2006). Lors de sa mise en place, la modulation de l'activité cambiale accompagnée d'une réduction de la production de nouveaux vaisseaux au profit des fibres, et des changements dans leur morphologie (Jourez et al., 2001). Le bois de tension est caractérisé par des modifications importantes dans le programme de biosynthèse de la paroi secondaire des cellules qui le composent. Les changements les plus remarquables sont une réduction de l'épaisseur des différentes couches de la paroi secondaire, une réduction de l'angle des microfibrilles de cellulose et le remplacement de la couche S3 par une couche G (Jourez et al., 2001; Pilate et al., 2004; Mellerowicz and Sundberg, 2008). La couche G est mise en place par les fibres et représente un volume conséquent qui peut occuper une grande part de la lumière de ces cellules. Elle est composée exclusivement de polysaccharides, dont principalement de la cellulose ayant un angle faible par rapport à l'axe longitudinal de la cellule, et qui est responsable de la mise en tension du xylème secondaire (Jourez et al., 2001). Dans l'étude de la réponse du xylème secondaire aux contraintes environnementales, la formation du bois de tension est la réponse la mieux caractérisée au niveau anatomique et mais également moléculaire. Bien que les mécanismes de perception qui en sont à l'origine restent mal connus, les régulations transcriptionnelles et métaboliques induites ont largement été étudiées (Pilate et al., 2004; Paux et al., 2005; Mellerowicz et al., 2006; Mizrachi et al., 2015). Ces études ont mis en évidence une reprogrammation du processus de dépôt de paroi en réponse à ce stress. Avec notamment des régulations négatives d'un ensemble de gènes impliqués dans la biosynthèse de lignine et des hémicelluloses. Par ailleurs, les analyses transcriptomiques effectuées sur le bois de tension, ont permis l'identification de nombreux gènes impliqués dans la formation et la réorganisation de la paroi chez le peuplier. Certains de ces gènes semblent spécifiquement impliqués dans la réorganisation de la paroi dans la réponse à ce type de stress (Andersson-Gunnerås et al., 2006; Mizrachi et al., 2015). 5. L'étude de la formation du bois chez l'Eucalyptus est un enjeu stratégique 5.1. L'Eucalyptus est le feuillu le plus planté au monde Le genre Eucalyptus est natif d'Australie et Nouvelle Guinée où la plupart des climats sont représentés. Ils sont implantés naturellement du niveau de la mer jusqu en altitude, dans des zones humides, tempérées et semi-arides (Eldridge, 1994). Avec environ 700 espèces, ce genre présente une adaptabilité remarquable à une variété de climats. L'Australie ayant un 44 climat globalement chaud, la majorité des espèces ont une bonne tolérance aux conditions arides, mais ne sont pas résistantes aux conditions gélives. Hormis quelques espèces d'altitude, l'Eucalyptus n'est pas adapté au froid intense. Bien que ses mécanismes d'acclimatation apparaissent très efficaces (Keller et al.; Nguyen et al., 2017), sa croissance opportuniste du fait de l'absence d'endodormance et la persistance de ses feuilles en hiver, le rendent très vulnérable aux gelées hivernales. Par ailleurs, le fait qu'il dispose d'un lignotuber, lui donne la possibilité de produire des rejets de la souche suite à la coupe, ce qui le rend adéquat pour la culture en taillis. Cette grande diversité a permis l'introduction de l'Eucalyptus dans plus de cent pays aux climats très variés. Il représente actuellement environ 8% des forêts plantées dans le monde, avec une implantation en constante progression (Rockwood et al., 2008). Ceci en fait le feuillu le plus planté avec plus de 20 millions d'hectares de plantations (Food and Agriculture Organization of the United Nations., 2011; Myburg et al., 2014). Quatre espèces, E. camaldulensis, E. grandis, E. urophylla, E. globulus, et leurs hybrides, représentent 80% de ces plantations (Teulières et al., 2007). L'Eucalyptus grandis et des hybrides E. grandis x E. urophylla, sont les plus plantés dans des régions tropicales et subtropicales d'Amérique du sud, d'Afrique et d'Asie. Eucalyptus globulus est l'espèce la plus plantée en régions tempérées, autour du bassin méditerranéen, au Portugal, Espagne, Chili et Australie, tandis qu'Eucalyptus camaldulensis est principalement planté dans des zones semi-arides à arides (Afrique du nord par exemple). Dans des régions froides d'Europe, telles que la France, ou d'Amérique du Nord, Eucalyptus gunnii est cultivé en tant qu'espèce pure ou utilisé pour l'introgression de la tolérance au gel dans des espèces à plus forte productivité telles qu'E. dalrympleana (hybrides E. gunnii x E. dalrympleana, souvent nommé E. gundal). La plus grande part des plantations d'Eucalyptus se trouvent en zones tropicales et subtropicales où l'E. grandis ( . Hill ex Maiden) assure des rendements de production records dépassant les 70m3.ha-1.an-1 sur des plantations à temps de rotation courts (6 à 8 ans) (Rockwood et al., 2008). Au Brésil, sur les 170 millions de m3 de bois consommés, environ 80% correspondent à du bois d'Eucalyptus. Ce bois est utilisé principalement pour la production de pâte à papier (36.1%), comme source d'énergie par combustion directe (26.3%) ou production de charbon (10%), et comme bois d'oeuvre ou d'ameublement (26.2%) (Gonçalves et al., 2013). Ces très fortes productions et les propriétés exceptionnelles du bois de certaines espèces, font de l'Eucalyptus une excellente source de biomasse pour la production de bioénergie. Le fait que le génome de l'Eucalyptus ait récemment été séquencé (Myburg et al., 2014), permet également la conduite d'approches de génomique et l'identification de gènes candidats dans la formation du bois notamment. Ceci a encouragé la mise en place de différentes approches de transgénèse pour la caractérisation fonctionnelle de ces gènes (Tournier et al., 2003; Plasencia et al., 2015). Bien que longue, sa transformation stable via la 46 régénération de plantes entières est possible (Tournier et al., 2003; Navarro et al., 2009). Récemment un protocole de transformation plus rapide a été mis au point au laboratoire (Balasubramanian et al., 2011; Plasencia et al., 2015). Il permet la production de plantes composites dont seules les racines sont transformées. Ceci représente un excellent modèle d'étude de la formation de la paroi secondaire des cellules du xylème (Plasencia et al., 2015). 6. Hypothèses et objectifs de la thèse La formation du bois est un processus développemental complexe qui requiert la contribution de plusieurs milliers de gènes nécessaires au contrôle de l'activité cambiale et de la différenciation des cellules du xylème. L'ensemble de ces gènes est régulé par des signaux endogènes faisant intervenir un réseau complexe de FT, qui n'est que partiellement décrypté. Les données disponibles dans la littérature suggèrent que des contraintes environnementales pourraient agir en tant que signaux exogènes capables d'influencer la xylogénèse et de permettre l'adaptation des arbres à leur environnement. Cette réponse pourrait impliquer des gènes régulateurs se trouvant à l'interface entre les voies de réponse aux stress et les mécanismes assurant la formation du bois. Dans le contexte de changement climatique, il est prédit une augmentation de l'occurrence des épisodes prolongés de sécheresse et/ou de froid. Or sont les principales contraintes environnementales qui affectent la croissance de l'Eucalyptus, et par conséquent son exploitation. Étant donné l'importance économique que représente l'Eucalyptus, il apparaissait essentiel d'évaluer l'impact de ces stress sur la formation du bois, pour que ces informations soient prises en compte lors de la sélection de nouveaux génotypes. Les objectifs de mon projet de thèse étaient : (1) de caractériser l'effet de stress abiotiques sur la composition et la structure du bois; (2) d'analyser et de comprendre les régulations qui sont impliqués dans le remodelage de la paroi secondaire en réponse à ces stress, pour identifier les régulateurs clés impliqués dans cette réponse; (3) caractériser la fonction de ces régulateurs dans la formation du bois. 6.1.2. Caractérisation de l'effet de la sécheresse combinée à différents régimes nutritifs sur la formation du bois chez E. grandis La première partie de ma thèse a révélé plusieurs FT régulés par le froid et potentiellement impliqués dans des mécanismes de régulation de la formation du bois en réponse à ce stress. Les données obtenues dans l'équipe avant mon arrivée, suggéraient que certains de ces FT répondaient également à d'autres stress abiotiques tels que la sécheresse, le stress mécanique ou l'apport en nutriments azotés. Par conséquent, 'ai voulu déterminer si une partie des mécanismes régulant la formation du bois n'étaient pas communs à plusieurs stress et s'il serait possible d'identifier les régulations concernées, au niveau transcriptionnel et métabolique. Au travers d'une collaboration avec le CIRAD de Montpellier et un laboratoire Brésilien de l'université de ao Paulo, 'ai eu l'opportunité de partir pendant 3 mois au Brésil pour analyser la formation du bois d'Eucalyptus soumis à des stress abiotiques, dans le cadre d'un système expérimental unique au monde. Dans ce système, des clones d'E. grandis ont été soumis à une exclusion de l'eau de pluie (de 33%) conduisant à une sécheresse modérée, combinée à différents régimes nutritifs (fertilisation minimale, fertilisation au potassium, fertilisation au sodium). J'avais pour objectif de caractériser les modifications induites dans la composition et la structure du xylème de ces arbres, par des approches de microscopie et de dosage biochimiques (teneur en lignine, rendement de saccharification), combinées à des analyses transcriptomiques et métabolomiques. Profondément impliqué dans le projet Agropolis-Capes, visant à intégrer des données globales de transcriptomique, de métabolo ique et d'écophysiologie obtenues sur ces arbres, 'ai, dans un second temps, développé des approches de biologie des systèmes dans le but d'identifier des FTs impliqués dans le contrôle de la formation du bois en réponse au manque d'eau et à la fertilisation. Cette étude, présentée dans le Chapitre II, décrit l'effet combiné de la restriction d'eau et de la fertilisation au potassium sur le dépôt de paroi et son impact sur les propriété physico-chimique du bois. Un réseau complexe de FTs, dont certains sont communs avec la première partie de mon étude, a révélé des gènes candidats dont la caractérisation fonctionnelle suggère un rôle central dans la formation du bois en condition de stress abiotiques. L'ensemble de ces résultats, présentés sous forme de manuscrit d'article (Chapitre II), doit être valorisé très prochainement. 6.2. Caractérisation fonctionnelle de facteurs de transcription impliqués dans la régulation de la formation du bois en condition de stress abiotiques Les deux approches présentées précédemment devaient permettre l'identification de FT candidats non caractérisés et potentiellement impliqués dans le contrôle de la formation du bois en condition de stress. Durant mon doctorat, j'ai entamé la caractérisation fonctionnelle de ces candidats dans des lignées de plantes transgéniques. La transformation de l'Eucalyptus étant longue et fastidieuse, nous avons choisi de sur-exprimer les gènes candidats dans un système hétérologue, chez le peuplier, ou dans un système homologue, des racines transgéniques d'Eucalyptus. En effet, 'ai pu bénéficier d'une technique récemment mise en place au sein de l'équipe visant à développer un système de transformation stable, efficace et rapide, afin procéder à la caractérisation fonctionnelle de gènes d'intérêt potentiellement impliqués dans la formation du bois chez l'Eucalyptus. Cette technique consiste à transformer des plantules d'E. grandis par A. rhizogenes, générant ainsi des racines transgéniques surexprimant le gène cible. Il est alors possible d'étudier, dans ces racines, le développement du xylème qui est analogue à celui observé dans la tige. Cinq gènes de la famille des MYB-R2R3 ont été choisis : EgMYB20, EgMYB36, EgMYB64, EgMYB68 et EgMYB137. La fonction de ces gènes étant totalement inconnue, mon premier ob ectif a été d'analyser l'expression spatio-temporelle de leur promoteur fusionné au gène rapporteur encodant le gène GU (β-glucuronidase). Le deuxième objectif était de tester la capacité de ces gènes à réguler la formation du bois via l'analyse de la croissance, de la structure, la composition ainsi que l'expression de gènes impliqués dans la formation du bois, dans la tige ou les racines de lignées sur-exprimant ces gènes candidats. Les résultats concernant EgMYB137 ont été intégrés dans le projet de publication du Chapitre II. Les observations réalisées sur les gènes EgMYB20, EgMYB36, EgMYB64 et EgMYB68, sont présentées dans le Chapitre III. Achard, P., Cheng, H., De Grauwe, L., Decat, J., Schoutteten, H., Moritz, T., Van Der Straeten, D., Peng, J., and Harberd, N.P. (2006). Integration of Plant Responses to Environmentally Activated Phytohormonal Signals. Science (80-. ). 311. Achard, P., Gong, F., Cheminant, S., Alioua, M., Hedden, P., and Genschik, P. (2008). 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51,094
548a752f0f20a045279a47b370ec508f_20
French-Science-Pile
Open Science
Various open science
2,008
Taux d'épargne net des ménages
None
French
Spoken
6,585
13,456
Définition Le revenu est défini ici comme le revenu disponible des ménages, au sens large. Il comprend les gains provenant du travail, le revenu du patrimoine comme les intérêts et les dividendes, ainsi que les pensions et les autres prestations de sécurité sociale. L’impôt sur le revenu et les cotisations de sécurité sociale versés par les ménages en sont déduits. Pour déterminer dans quelle mesure il y a égalité entre les individus quant au revenu disponible, on se sert ici du coefficient de Gini. Celui-ci, qui est d’ailleurs couramment utilisé à cette fin, va de 0, qui signifie « l’égalité parfaite » (chaque fraction de la population obtient la même part de revenu) à 100, qui représente « l’inégalité parfaite » (la totalité du revenu est détenue par la fraction de la population qui a le revenu le plus élevé). Le revenu des ménages est ajusté de manière à tenir compte de la taille de ces derniers. Se reporter à la rubrique « Source » ci-dessous pour plus de précisions sur la définition du coefficient de Gini et sur l’ajustement effectué en vue de prendre en compte la taille des ménages. Luxembourg, de la Nouvelle-Zélande et de la Suisse (2001) ; ainsi que du Mexique, de la République tchèque et de la Turquie (2002). Les données figurant sous le titre « Milieu des années 90 » se rapportent à l’année 1995 pour tous les pays, à l’exception de l’Autriche (1993) ; de l’Allemagne, de l’Australie, du Danemark, de la France, de la Grèce, de l’Irlande, du Japon, du Mexique et de la Turquie (1994) ; ainsi que de la Nouvelle-Zélande et de la République tchèque (1996). Les données présentées sous le titre « Milieu des années 80 » se rapportent à l’année 1983 pour l’Autriche, la Belgique, le Danemark et la Suède ; à 1984 pour l’Australie, la France, l’Italie et le Mexique ; à 1985 pour le Canada, l’Espagne, le Japon, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ; à 1986 pour la Finlande, le Luxembourg, la Norvège et la Nouvelle-Zélande ; à 1987 pour l’Irlande et la Turquie ; à 1988 pour la Grèce ; et à 1989 pour les États-Unis. Les données ont été fournies par des experts nationaux qui les ont établies à l’aide de définitions communes. Cependant, dans un grand nombre de cas, les pays ont dû apporter plusieurs ajustements à leurs données de base. Les variations de faible importance d’une période à l’autre et les petites différences entre pays ne sont généralement pas significatives. Comparabilité Source Les données présentées sous le titre « 2000 » se rapportent à l’année 2000 pour tous les pays, à l’exception de l’Australie, de l’Autriche et de la Grèce (1999) ; de l’Allemagne, du • Förster, M. et Mira d’Ercole, M. (2005), Income Distribution and Poverty in OECD Countries in the Second Half of the 1990s, Questions sociales, emplois et migrations – Documents de travail de l’OCDE, n° 22, OCDE, Paris. Pour en savoir plus Tendances à long terme Le niveau de l’inégalité de revenu est très variable d’un pays de l’OCDE à l’autre. Pour les années qui se situent aux alentours de 2000, le coefficient de Gini est le plus faible au Danemark et en Suède, et le plus élevé au Mexique et en Turquie, qui sont les deux pays de l’OCDE où le revenu par habitant est le plus bas. En moyenne, dans les 20 pays pour lesquels on dispose de données partant du milieu des années 80, le coefficient de Gini est passé de 29 à 31, mais cette augmentation entre peut-être dans la marge d’erreur possible pour les statistiques relatives à la répartition du revenu. Le plus sûr est de considérer que, pour ces 20 pays dans leur ensemble, l’évolution a été faible, voire nulle. On relève toutefois des changements frappants pour plusieurs pays lorsque l’on compare les années qui se situent autour de 2000 avec le milieu des années 80. La répartition du revenu entre les ménages est devenue nettement plus égale en Espagne et en Irlande, et une diminution plus faible de l’inégalité de revenu s’est produite en Australie, au Danemark et en France. À l’autre extrémité de l’échelle, le coefficient de Gini a augmenté (accroissement de l’inégalité) de 10 % à 20 % en Norvège, au Japon, en Italie et au Royaume-Uni, et de plus de 20 % en Suède, en Nouvelle-Zélande et en Finlande. Il convient toutefois de noter que malgré le fort accroissement relevé en Suède, le coefficient de Gini demeure dans ce pays l’un des plus faibles de la zone de l’OCDE. 248 Publications analytiques • Jomo, K. S. (2001), Globalisation, Liberalisation, Poverty and Income Inequality in Southeast Asia, Documents de travail du Centre de développement de l’OCDE, n° 185, OCDE, Paris. • Kayizzi-Mugerwa, S. (2001), Globalisation, Growth and Income Inequality: The African Experience, Documents de travail du Centre de développement de l’OCDE, n° 186, OCDE, Paris. • OCDE (2004), Income Disparities in China: An OECD Perspective, OCDE, Paris. • OCDE (2005), Accroître les chances de chacun : Pour une politique sociale active au bénéfice de tous, OCDE, Paris. • OCDE (2007), Panorama de la société : Les indicateurs sociaux de l’OCDE Édition 2006, OCDE, Paris. • Uchimura, H. (2005), Impact of Changes in Social Institutions on Income Inequality in China, Documents de travail du Centre de développement de l’OCDE, n° 243, OCDE, Paris. Sites Internet • Statistiques de l’OCDE sur la protection sociale, www.ocde.org/statistiques/social. • Travaux de l’OCDE sur l’inégalité des revenus et la pauvreté, www.ocde.org/statistiques/social. PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2008 – ISBN 978-92-64-04055-7 – © OCDE 2008 QUALITÉ DE VIE • SOCIÉTÉ INÉGALITÉ DES REVENUS Distribution des revenus disponibles équivalents des ménages Mesurée par les coefficients de Gini Milieu des années 1980 Milieu des années 1990 2000 Allemagne .. 28.3 27.7 Australie 31.2 30.5 30.5 Autriche 23.6 23.8 25.2 Canada 28.7 28.3 30.1 Danemark 22.8 21.3 22.5 Espagne 36.7 33.9 32.9 États-Unis 33.8 36.1 35.7 Finlande 20.7 22.8 26.1 France 27.6 27.8 27.3 Grèce 33.6 33.6 34.5 29.3 Hongrie .. 29.4 Irlande 33.1 32.4 30.4 Italie 30.6 34.8 34.7 Japon 27.8 29.5 31.4 Luxembourg 24.7 25.9 26.1 Mexique 45.1 52.0 48.0 Norvège 23.4 25.6 26.1 Nouvelle-Zélande 27.0 33.1 33.7 Pays-Bas 23.4 25.5 25.1 Pologne .. 38.9 36.7 Portugal .. 35.9 35.6 République tchèque .. 25.7 26.0 Royaume-Uni 28.6 31.2 32.6 Suède 19.9 21.1 24.3 Suisse .. .. 26.7 Turquie 43.5 49.1 43.9 Moyenne OCDE 29.3 30.9 31.0 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/275755833115 Distribution des revenus disponibles équivalents des ménages Mesurée par les coefficients de Gini Milieu des années 80 2000 50 45 40 35 30 25 20 15 10 5 Su èd Pa e ys -B a Ré Au s pu bli tri ch qu e et ch Lu èqu e xe m bo ur Fin g lan d No e rv èg e Su iss e Fr an All ce em ag ne Ho ng rie Ca na da Irla nd e A Mo ust ye rali e nn eO CD E Ro J a p o ya um n eUn Es i No pa uv g ell e- ne Zé lan de Gr èc e Ita lie Po rtu Ét gal at sUn is Po log ne Tu rq ui Me e xiq ue Da ne m ar k 0 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/400588376152 PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2008 – ISBN 978-92-64-04055-7 – © OCDE 2008 249 QUALITÉ DE VIE • SOCIÉTÉ POPULATION CARCÉRALE Si les délits et infractions causent un préjudice énorme aux victimes et à leurs proches, les coûts liés à l’incarcération peuvent également se révéler considérables. Ces coûts se justifient habituellement par trois « besoins » de la société : punir les coupables, dissuader d’autres individus de commettre des actes similaires et empêcher la récidive. La taille de la population carcérale dépend du niveau de criminalité, des mesures législatives, et de l’efficacité des mesures exécutives. Définition Les personnes incarcérées n’ont pas toutes été jugées coupables, en particulier celles qui sont en attente de leur procès ou d’une décision de justice. L’indicateur retenu ici porte sur l’ensemble des catégories de population carcérale, y compris les individus incarcérés en attente de leur procès et les personnes placées en détention provisoire. Comparabilité Cet indicateur porte sur la population carcérale toutes catégories confondues (y compris les individus incarcérés en attente de leur procès et les personnes placées en détention provisoire) pour 100 000 habitants. Ces informations sont recueillies par le Centre international d’études pénitentiaires tous les trois ans environ, depuis 1992. D’autres données comparatives sont disponibles auprès de ce Centre comme, par exemple, les proportions respectives de : personnes incarcérées en attente de leur procès/en détention provisoire, femmes, mineurs et étrangers, par rapport à la population carcérale totale, ainsi que les niveaux d’occupation exprimés en pourcentages (de la capacité officielle des prisons). Tendances à long terme Au cours des 15 dernières années, le taux d’incarcération n’a cessé d’augmenter dans la plupart des pays de l’OCDE. En moyenne, sur les 30 pays de l’Organisation, ce taux est passé de 100 personnes par unité de population totale (équivalant à 100 000 habitants) au début des années 90 à 130 personnes environ en 2004. C’est aux États-Unis que ce taux est le plus élevé, soit plus de 700 détenus pour 100 000 habitants en 2004. Ce taux est de trois à quatre fois supérieur à celui relevé en Pologne (pays qui, sur ce plan, se classe au deuxième rang des pays de l’OCDE), et il a augmenté rapidement. Cette progression se retrouve dans la plupart des autres pays de l’OCDE. Depuis 1992, le taux d’incarcération a plus que doublé aux Pays-Bas, au Mexique, au Japon, en République tchèque, au Luxembourg, en Espagne et au Royaume-Uni. Apparemment, il a reculé uniquement au Canada, en Islande et en Corée. La composition de la population carcérale varie considérablement d’un pays à l’autre. En moyenne, un détenu sur quatre est une personne qui attend son procès ou qui est placée en détention provisoire, mais ces deux catégories représentent une proportion bien plus forte en Turquie, au Mexique et au Luxembourg. En moyenne, les femmes et les mineurs (jeunes âgés de moins de 18 ans) représentent respectivement 5 et 2 % de la population carcérale. Les étrangers représentent une proportion bien plus élevée des détenus (soit, en moyenne, près de 20 % de la totalité des détenus), cette proportion dépassant même 40 % du total au Luxembourg et en Suisse ainsi qu’en Australie, en Autriche, en Belgique et en Grèce. Dans plusieurs pays, l’accroissement rapide de la population carcérale a entraîné le dépassement de la capacité d’accueil des institutions en place : dans plus de la moitié des pays de l’OCDE, les taux d’occupation sont supérieurs à 100 % et atteignent même plus de 125 % en Espagne, en Grèce, en Hongrie, en Italie et au Mexique. 250 Source • Walmsley, R. (2005), World Prison Population List (sixième édition), Centre international d’études pénitentiaires, Londres., www.unodc.org/unodc/crime_cicp_surveys.html. Pour en savoir plus Publications analytiques • OCDE (2007), Panorama de la société : Les indicateurs sociaux de l’OCDE Édition 2006, OCDE, Paris. • UN Office on Drugs and Crime (2004), United Nations Surveys on Crime Trends and the Operations of Criminal Justice Systems (neuvième enquête), UNODC, Vienne, www.unodc.org/pdf/crime/forum/forum3_Art3.pdf. Sites Internet • OCDE Statistiques sur la protection sociale, www.oecd.org/ statistics/social. • Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, www.unodc.org. PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2008 – ISBN 978-92-64-04055-7 – © OCDE 2008 QUALITÉ DE VIE • SOCIÉTÉ POPULATION CARCÉRALE Taux de la population carcérale Nombre pour 100 000 habitants 1992 1995 1998 2001 Allemagne 71.0 81.0 96.0 96.0 2004 96.0 Australie 89.0 96.0 107.0 116.0 120.0 Autriche 87.0 77.0 86.0 85.0 96.5 Belgique 71.0 75.0 81.0 85.0 88.0 Canada 123.0 131.0 126.0 116.0 107.0 Corée 130.0 136.0 152.0 133.0 121.0 Danemark 66.0 66.0 64.0 59.0 70.0 Espagne 90.0 102.0 114.0 117.0 138.0 États-Unis 505.0 600.0 669.0 685.0 725.0 Finlande 65.0 59.0 50.0 59.0 66.0 France 84.0 89.0 86.0 78.0 91.0 Grèce 61.0 56.0 68.0 79.0 82.0 Hongrie 143.0 124.0 132.0 152.0 163.0 Irlande 61.0 57.0 71.0 78.0 85.0 Islande 101.0 119.0 103.0 110.0 39.0 Italie 81.0 87.0 85.0 95.0 97.0 Japon 37.0 37.0 40.0 48.0 58.0 Luxembourg 89.0 114.0 92.0 80.0 121.0 Mexique 98.0 102.0 133.0 164.0 177.5 Norvège 58.0 55.0 57.0 59.0 65.0 Nouvelle-Zélande 129.0 128.0 146.0 157.0 168.0 Pays-Bas 49.0 66.0 85.0 95.0 123.0 Pologne 153.0 163.0 148.0 183.0 210.0 Portugal 93.0 124.0 146.0 131.0 129.0 République slovaque 119.0 138.0 138.0 129.0 165.0 République tchèque 123.0 181.0 209.0 210.0 169.0 Royaume-Uni 90.1 100.2 124.5 124.4 138.7 81.0 Suède 63.0 65.0 60.0 68.0 Suisse 79.0 80.0 85.0 71.0 81.0 Turquie 54.0 82.0 102.0 89.0 100.0 Moyenne OCDE 102.1 113.0 121.8 125.0 132.4 Afrique du Sud 282.0 280.0 387.0 409.0 333.0 Brésil 74.0 92.0 102.0 133.0 183.0 Chine Fédération de Russie Inde .. 101.0 115.0 111.0 118.0 487.0 622.0 688.0 638.0 587.0 .. .. 28.0 30.0 30.0 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/275761175242 Taux de la population carcérale Nombre pour 100 000 habitants, 2004 587 725 350 300 250 200 150 100 50 Ind Isl e an d Ja e p No on rv è Fin ge Da land ne e m ar Su k èd Su e iss e Gr èc Irla e Be nde lgi qu Fr e All anc em e ag Au ne tri ch e Ita l i Tu e rq u Ca ie na d Ch a Au ine str ali e Lu Co xe ré m e bo Pa urg ys Mo Po Bas ye rtu nn ga eO l CD E Ro spa E y a gn um e Ré epu bli H Uni qu on No e s gr i Ré uve lova e pu lle- qu bli Zé e qu la e t nd ch e èq Me ue xiq ue Br és Fé Afr Po il dé iqu log ra e ne tio du nd S e R ud Ét ussi at e sUn is 0 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/400602788767 PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2008 – ISBN 978-92-64-04055-7 – © OCDE 2008 251 QUALITÉ DE VIE • TRANSPORT RÉSEAU ROUTIER QUALITÉ DE VIE Transport Les autoroutes ont diverses incidences sur la qualité de vie. Avant tout, elles facilitent les déplacements en automobile et les rendent plus sûrs, mais elles peuvent aussi nuire à la qualité de vie des riverains et leur construction peut avoir des effets dommageables sur l’environnement. Définition Une autoroute est une route spécialement conçue et construite pour la circulation automobile, qui ne dessert pas les propriétés riveraines et qui : • sauf en des points singuliers ou à titre temporaire, comporte, pour les deux sens de circulation, des chaussées distinctes séparées l’une de l’autre par une bande de terrain non destinée à la circulation ou, exceptionnellement, par d’autres moyens ; Comparabilité Les données relatives aux autoroutes sont jugées généralement comparables pour la plupart des pays. Toutefois, celles dont on dispose pour le Canada sont exprimées en « routes-kilomètres équivalent deux-voies », les chiffres du Mexique ne concernent que les routes à péage, et l’Espagne classe certaines routes express dans la catégorie autoroutes même si elles ne correspondent pas rigoureusement à la définition donnée plus haut. Pour quelques pays, les données sont fournies par exercice budgétaire plutôt que par année civile. • ne croise à niveau ni route, ni voie de chemin de fer ou de tramway, ni chemin pour la circulation de piétons ; • est spécialement signalée comme étant une autoroute et est réservée à certaines catégories de véhicules routiers automobiles. Dans le calcul de la longueur du réseau autoroutier, les voies d’entrée et de sortie des autoroutes sont incluses quel que soit l’emplacement de la signalisation. Les autoroutes urbaines sont également incluses. Tendances à long terme Les réseaux autoroutiers se sont étendus dans tous les pays de l’OCDE pour lesquels des données sont disponibles. S’agissant des taux de croissance annuels, les pays de l’OCDE se répartissent en trois groupes. Le taux de croissance du réseau autoroutier a été d’au moins 6 % chaque année pendant les dernières années dans les cinq pays suivants : Corée, Pologne, Portugal, Irlande et Grèce. Tous ces pays possédaient des réseaux relativement limités au début de la période, ce qui explique leur croissance rapide. Vient ensuite un groupe intermédiaire, dont le Japon, la France et les pays scandinaves, qui affiche un taux de croissance annuel compris entre 2 et 6 %. Enfin, le troisième groupe est constitué de neuf pays de l’OCDE plus la Fédération de Russie où le taux de croissance du réseau autoroutier a été inférieur à 2 % par an ; ce groupe comprend le Canada, l’Allemagne, les Pays-Bas et les États-Unis, où le réseau, après une expansion de plusieurs décennies, était déjà parvenu à maturité au début de la période. La taille du réseau autoroutier est en général fonction de celle du pays, mais il y a des exceptions. Ainsi, les réseaux du RoyaumeUni et de la Turquie sont relativement limités, tandis que ceux de l’Allemagne, de la France et de l’Espagne sont très importants, que ce soit par rapport à la population ou à la superficie du pays. 252 Source • FTI (2007), Évolution des transports, FIT, Paris.. Pour en savoir plus Publications analytiques • CEMT (2005), Rapport annuel de la CEMT 2005, CEMT, Paris. • OCDE (2007), L’impact environnemental des transports : Comment le découpler de la croissance économique, OCDE, Paris. Publications méthodologiques • UNECE, CEMT, Eurostat (2003), Glossary for Transport Statistics, CEMT, Paris. Sites Internet • Forum international des transports, www.internationaltransportforum.org. PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2008 – ISBN 978-92-64-04055-7 – © OCDE 2008 QUALITÉ DE VIE • TRANSPORT RÉSEAU ROUTIER Réseau autoroutier Kilomètres 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 Allemagne 11 080 11 143 11 190 11 190 11 246 11 309 11 427 11 515 11 712 11 786 12 037 12 044 12 174 12 363 Autriche 1 567 1 589 1 596 1 607 1 613 1 613 1 634 1 633 1 644 1 644 1 670 1 677 1 677 1 678 Belgique 1 665 1 666 1 666 1 674 1 679 1 682 1 691 1 702 1 727 1 729 1 729 1 747 1 747 1 763 Canada 15 983 15 983 15 983 15 983 15 983 15 983 15 983 15 983 16 600 16 900 16 900 16 900 16 900 16 900 Corée .. .. .. .. .. 2 107 2 425 2 477 2 567 3 060 3 486 3 489 3 415 3 415 Danemark 737 786 796 825 900 902 922 953 971 1 009 1 270 1 278 1 278 1 340 Espagne 6 577 6 485 6 962 7 295 7 750 8 569 8 893 9 049 9 571 9 739 10 286 10 286 10 286 10 286 91 287 États-Unis 73 274 73 274 73 274 73 274 73 274 88 915 89 232 89 426 89 996 89 848 91 287 91 287 91 287 Finlande 337 388 394 431 444 473 512 549 591 603 653 653 653 693 France 7 645 8 030 8 247 8 596 8 864 9 303 9 626 9 766 10 068 10 223 10 379 10 486 10 843 10 843 880 Grèce .. .. .. .. .. 357 444 636 742 742 880 880 880 Hongrie 269 293 335 365 382 448 448 448 448 533 542 569 569 569 Irlande 51 68 70 70 70 94 94 103 125 125 176 192 192 192 Italie 6 352 6 401 6 473 6 473 6 473 6 473 6 478 6 478 6 478 6 478 6 478 6 478 6 478 6 478 Japon 5 054 5 410 5 410 5 932 6 114 6 402 6 455 6 617 6 851 6 915 7 196 7 296 7 383 7 383 Luxembourg 100 121 123 115 118 118 114 114 115 126 135 146 147 147 Norvège 512 524 527 560 570 570 589 606 636 629 664 664 664 664 Nouvelle-Zélande Pays-Bas 156 156 156 156 156 156 184 226 167 169 169 171 172 172 2 167 2 178 2 208 2 222 2 236 2 250 2 268 2 265 2 281 2 281 2 308 2 342 2 342 2 342 Pologne 231 245 246 258 264 268 317 358 398 405 405 552 552 662 Portugal 579 587 687 710 797 1 252 1 441 1 482 1 659 1 835 1 835 1 835 1 835 1 835 316 République slovaque 198 198 198 215 219 292 295 296 296 302 313 316 316 République tchèque 356 390 425 487 487 499 499 499 518 518 518 546 564 564 Royaume-Uni 2 756 2 839 3 200 3 200 3 300 3 300 3 400 3 500 3 610 3 611 3 611 3 753 3 748 3 783 Suède 1 044 1 145 1 262 1 350 1 428 1 437 1 484 1 501 1 507 1 544 1 591 1 700 1 700 1 740 Suisse .. .. .. .. 1 258 1 262 1 267 1 270 1 305 1 342 1 351 1 341 1 357 1 361 Turquie 1 070 1 167 1 246 1 493 1 500 1 528 1 726 1 749 1 851 1 851 1 851 1 851 1 851 1 851 Chine .. .. .. .. .. .. .. .. 1 698 000 1 765 200 1 809 800 1 870 700 3 345 200 3 457 000 Fédération de Russie .. .. .. .. .. 29 000 29 000 29 000 29 000 29 260 29 260 29 260 29 260 29 260 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/275802057784 Croissance du réseau autoroutier Croissance annuelle moyenne en pourcentage, 1993-2006 ou dernière période disponible 16 14 12 10 8 6 4 2 Fé d de érati Ru on ss ie Ita lie Ca na d Be a lgi qu Au e tri c No Pa he uv ysell Ba eZé s la All nde em ag ne Su iss Ét at e sUn No is Ro r vè ya g um e eUn i Fr an ce J Lu apo xe m n bo u Ré pu E rg bli spa Ré qu g pu e t ne c bli qu hèq e s ue lov aq ue Su èd e Tu rq u Da i ne e m ar Fin k lan d Ho e ng rie Co ré Po e log n Po e rtu ga l Irla nd e Gr èc e Ch ine 0 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/400616346227 PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2008 – ISBN 978-92-64-04055-7 – © OCDE 2008 253 QUALITÉ DE VIE • TRANSPORT VÉHICULES ROUTIERS AUTOMOBILES ET ACCIDENTS MORTELS DE LA ROUTE Le nombre de véhicules routiers automobiles est élevé et en augmentation dans toute la zone OCDE. La réduction du nombre d’accidents de la route est donc une préoccupation pour tous les pays. Les tableaux de cette section indiquent le nombre de véhicules routiers automobiles pour mille habitants et deux indicateurs de la sécurité routière – le nombre de tués de la route par million d’habitants et le nombre de tués de la route par million de véhicules. Définitions Un véhicule routier automobile est un véhicule sur roues qui est destiné à être utilisé sur les routes, qui est pourvu d’un moteur constituant son seul moyen de propulsion et qui sert normalement à transporter des personnes ou des marchandises ou à tracter, sur route, des véhicules utilisés pour le transport de personnes ou de marchandises. Entrent par conséquent dans cette catégorie les autobus, autocars, véhicules de transport de marchandises et motocycles, ainsi que les voitures particulières. Les véhicules automobiles se déplaçant sur rails sont exclus. On entend par « tué sur la route » toute personne qui décède immédiatement ou dans les 30 jours suivant un accident de la route. Comparabilité Les véhicules routiers automobiles sont attribués aux pays dans lesquels ils sont immatriculés tandis que les décès sont attribués aux pays dans lesquels ils surviennent. Par conséquent, les ratios des tués par million d’habitants et des tués par million de véhicules ne peuvent pas être strictement interprétés comme indiquant la proportion de la population d’un pays qui risque d’être victime d’un accident mortel sur la route ou la probabilité qu’un véhicule immatriculé dans un pays donné soit impliqué dans un accident mortel. Toutefois, dans la pratique, les écarts entre les numérateurs et les dénominateurs ont tendance à s’annuler. Le nombre de véhicules composant le parc actuel est en général exact mais l’information concernant le nombre de véhicules retirés de la circulation est moins sûre. Tendances à long terme En 2006, le nombre de véhicules automobiles rapporté à la population varie de 778 pour 1 000 habitants au Portugal à environ 86 en Turquie. Au cours des périodes considérées dans le tableau, les ratios véhicules/population ont augmenté dans tous les pays sauf aux États-Unis. Ils ont fortement augmenté au Portugal, en Islande, en Grèce et en Pologne. En 2006, le nombre de tués de la route par million d’habitants variait de plus de 230 en Fédération de Russie à 49 en Suède. Au cours des périodes considérées dans le tableau, les taux ont diminué dans tous les pays, à l’exception de l’Islande et de la Fédération de Russie, et très nettement au Portugal, en Nouvelle-Zélande et en France. Les taux de tués sur la route par million d’habitants constituent un indicateur ambigu de sécurité routière, car le nombre d’accidents dépend, dans une large mesure, du parc de véhicules de chaque pays. Le dernier graphique illustre le nombre de tués par million de véhicules ainsi que le nombre de tués par million d’habitants en 2006. Les taux par million de véhicules sont influencés par les habitudes de conduite, la réglementation routière et l’efficacité de son application, le tracé routier ainsi que d’autres facteurs sur lesquels peuvent agir les pouvoirs publics. En 2006, les taux de mortalité sur les routes par million de véhicules étaient de moins de 100 en Suisse, en Norvège et en Suède, mais supérieurs à 400 en République slovaque, en Turquie et à 1 100 en Fédération de Russie. À noter qu’à des taux de mortalité bas par million d’habitants peuvent correspondre des taux de mortalité très élevés par million de véhicules. Par exemple, un pays dont le parc de véhicules est petit peut affiché un faible nombre de tués par million d’habitants mais un nombre élevé de tués par million de véhicules. 254 Source • FTI (2007), Évolution des transports, FIT, Paris.. Pour en savoir plus Publications analytiques • CEMT (2004), Road Safety Performance: National Peer Review: Lithuania, CEMT, Paris. • CEMT (2005), Rapport annuel de la CEMT 2005, CEMT, Paris. • CEMT (2007), La gestion de la vitesse, CEMT, Paris. Publications statistiques • CEMT (2003), Rapport statistique sur les accidents de la route 1999-2000, CEMT, Paris. Publications méthodologiques • UNECE, CEMT, Eurostat (2003), Glossary for Transport Statistics, CEMT, Paris. Sites Internet • Forum international des transports, www.internationaltransportforum.org. PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2008 – ISBN 978-92-64-04055-7 – © OCDE 2008 QUALITÉ DE VIE • TRANSPORT VÉHICULES ROUTIERS AUTOMOBILES ET ACCIDENTS MORTELS DE LA ROUTE Véhicules routiers automobiles Par millier d’habitants 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 Allemagne 478 523 540 547 551 556 564 570 582 589 593 597 603 592 Australie .. .. 603 599 591 626 629 623 625 634 643 653 665 659 Autriche 515 528 543 495 509 529 544 555 563 535 542 553 554 547 Belgique 454 464 487 494 482 490 500 511 517 520 525 531 528 540 Canada 595 569 565 565 564 583 568 574 573 582 585 586 580 590 268 Corée 2006 .. .. .. .. .. Corée .. .. .. .. .. 226 232 218 171 152 151 136 132 .. .. 184 180 161 150 148 152 143 138 127 121 121 118 Autriche 312 315 277 257 269 228 248 219 211 221 211 196 169 162 189 Belgique 362 360 294 270 278 300 273 280 279 251 223 210 197 Canada 209 196 200 182 179 166 172 166 156 160 150 146 156 .. Corée .. .. .. .. .. 892 983 920 703 624 587 518 491 .. 125 Danemark 289 281 287 246 228 228 230 221 189 201 186 157 139 Espagne 386 348 328 301 296 299 273 264 242 227 228 191 155 160 États-Unis 215 217 206 202 201 195 200 197 195 195 190 190 193 189 Finlande 224 223 202 181 195 172 179 161 173 163 144 138 133 120 France 307 284 278 263 256 261 243 226 223 206 160 144 145 130 Grèce 715 704 656 631 622 591 532 476 414 354 320 315 297 286 Hongrie 703 636 614 524 523 533 499 437 430 470 414 385 372 379 Irlande 415 371 384 360 351 320 269 258 242 216 184 205 191 202 Islande 198 205 198 79 100 171 124 178 122 145 112 106 88 144 Italie 207 205 198 186 185 195 187 182 179 177 155 144 139 134 Japon 210 196 186 164 155 163 158 157 150 142 130 124 116 106 107 Luxembourg 329 320 264 257 196 199 200 248 222 192 161 145 136 Norvège 141 140 148 124 140 159 135 148 118 131 116 104 89 93 Nouvelle-Zélande 267 253 247 216 226 205 203 178 173 149 165 149 134 129 100 Pays-Bas 195 198 201 171 165 157 162 153 136 131 130 104 95 Pologne 784 789 770 669 724 672 609 527 440 439 413 399 377 334 Portugal 479 444 420 452 391 350 305 266 227 218 198 160 151 134 452 République slovaque 441 478 578 528 630 652 492 463 436 426 433 452 446 République tchèque 340 348 461 404 404 358 380 388 339 356 347 326 293 242 Royaume-Uni 153 147 148 141 137 131 127 125 122 118 117 104 103 102 Suède 163 152 145 135 134 128 136 135 132 125 117 106 95 96 Suisse 213 197 196 173 162 162 154 153 137 127 133 122 97 87 Turquie Fédération de Russie .. .. .. 887 771 681 596 469 482 656 636 710 726 726 2 556 2 166 1 785 1 428 1 294 1 286 1 261 1 165 1 172 1 196 1 281 1 241 1 222 1 177 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/276040610450 Accidents mortels de la route 2006 ou dernière année disponible Par million de véhicules Par million d'habitants 1177 800 700 600 500 400 300 200 100 Pa e ys -B a um s eAll Uni em ag ne Ja Lu po xe n m bo ur Au g str ali Fin e lan d No Dan e em uv ell a rk eZé lan de Fr an c Po e rtu ga l Ita lie Isl an d Es e pa gn Au e tri ch Be e lgi qu Ét at e sUn Ré is pu bli Irla qu nd et e ch èq ue Gr èc e Po log Ré n e pu bli Hon qu e s grie lov aq Fé ue dé ra Tu tio rq n d uie eR us sie e èd Ro ya Su èg rv No Su iss e 0 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/400643663035 PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2008 – ISBN 978-92-64-04055-7 – © OCDE 2008 257 THÈME SPÉCIAL PRODUCTIVITÉ INTRODUCTION INDICATEURS ÉCONOMIQUES DE CROISSANCE DE LA PRODUCTIVITÉ ÉVOLUTION DU PIB PAR HABITANT CROISSANCE DE LA PRODUCTIVITÉ DU TRAVAIL PRODUCTIVITÉ MULTIFACTORIELLE BILAN DE LA CROISSANCE POUR LES PAYS DE L'OCDE NIVEAUX DE PRODUCTIVITÉ NIVEAUX DE REVENU ET DE PRODUCTIVITÉ ÉVOLUTION DES NIVEAUX DE REVENU ET DE PRODUCTIVITÉ PRODUCTIVITÉ DU TRAVAIL ET HÉTÉROGÉNÉÏTÉ DE LA TAILLE DES ENTREPRISES CROISSANCE DE LA PRODUCTIVITÉ PAR INDUSTRIE CONTRIBUTION DES SECTEURS CLÉS À LA CROISSANCE GLOBALE DE LA PRODUCTIVITÉ CROISSANCE DE LA PRODUCTIVITÉ DANS L’INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE CROISSANCE DE LA PRODUCTIVITÉ DANS LES SERVICES EFFET DE LA PRODUCTIVITÉ DU TRAVAIL SUR LES COÛTS DE LA MAIN-D’ŒUVRE COÛTS UNITAIRES, PRODUCTIVITÉ ET RÉMUNÉRATION DU TRAVAIL PRODUCTIVITÉ INTRODUCTION PRODUCTIVITÉ La productivité n’est pas tout, mais à long terme, c’est presque tout. La capacité d’un pays à améliorer son niveau de vie au cours du temps dépend presque exclusivement de sa capacité à augmenter sa production par travailleur. Paul Krugman, L'âge des rendements décroissants (1994) On définit habituellement la productivité comme le rapport en volume d’une production aux ressources mises en œuvre pour la réaliser. En d’autres termes, elle mesure l’efficience avec laquelle les facteurs de production tels que le travail et le capital sont utilisés dans une économie pour obtenir un volume donné de production. La productivité est considérée comme une source majeure de croissance économique et de compétitivité et elle constitue donc une information statistique de base pour de nombreuses comparaisons internationales et mesures de performance des pays. On utilise par exemple les données sur la productivité pour étudier l’impact sur la performance économique des réglementations relatives aux marchés des produits du travail. La croissance de la productivité est un élément important pour la modélisation de la capacité productive d’une économie. Elle permet aussi de mesurer l’utilisation des capacités, et à partir de là de déterminer la position des économies dans le cycle conjoncturel et de prévoir la croissance économique. La capacité de production est en outre utilisée pour évaluer les pressions de la demande et les pressions inflationnistes. Les mesures de productivité sont nombreuses, le choix dépendant de l’objectif fixé et/ou des données disponibles. L’une des mesures les plus utilisées est le produit intérieur brut (PIB) par heure travaillée. Cette mesure rend mieux compte de l’utilisation des apports de travail que la production par salarié. En général, la source par défaut pour le total des heures travaillées est la base de données de l’OCDE sur les comptes nationaux, mais pour un certain nombre de pays il faut recourir à d’autres sources. Malgré les progrès réalisés et les efforts faits dans ce domaine, la mesure des heures travaillées pose encore divers problèmes sur le plan des statistiques ; en effet, les concepts et les sources statistiques de base diffèrent selon les pays, ce qui peut nuire à la comparabilité internationale. En principe, la mesure du facteur travail doit aussi prendre en compte les différences de niveau d’instruction, de qualifications et d’expérience des travailleurs. L’OCDE a donc entrepris de mettre au point des mesures ajustées du facteur travail. Dans certains cas, on constate des différences importantes entre les profils d’évolution du facteur travail ajustés et non ajustés. S’agissant du rôle du facteur capital, une mesure qui paraît appropriée est le flux de services productifs issus du stock cumulé des investissements réalisés (tels que machines et équipements). Ces services sont estimés par l’OCDE en tenant compte du taux de variation du « stock de capital productif » qui tient compte de la dépréciation, des déclassements et autres sources de réduction de la capacité productive des actifs fixes. Le prix des services du capital par actif est mesuré par le 260 PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2008 – ISBN 978-92-64-04055-7 – © OCDE 2008 PRODUCTIVITY prix de location de l’actif considéré. S’il existait des marchés pour tous ces services, on pourrait directement observer les prix de location. Dans la pratique, cependant, les prix de location doivent être imputés pour la plupart des actifs sur la base du loyer implicite que les détenteurs de biens d’équipement « se paient » à eux-mêmes (« coût d’usage du capital »). Une fois qu’on a calculé les contributions du travail et du capital à la production, on peut en déduire la productivité multifactorielle (PMF). Celle-ci mesure la croissance résiduelle qui ne s’explique pas par le taux de variation des services du travail, du capital et des facteurs intermédiaires, et elle est souvent interprétée comme la contribution à la croissance économique de facteurs tels que l’innovation technique et organisationnelle. Cela posé, cette section présente un aperçu général des indicateurs de la productivité sous quatre angles différents. La première partie présente des comparaisons internationales des indicateurs de la croissance de la productivité pour l’ensemble de l’économie. La deuxième présente des comparaisons internationales des niveaux de revenu et de productivité, avec une mesure de l’hétérogénéité de la productivité selon la taille des entreprises. La troisième présente des indicateurs de croissance de la productivité par industrie et services. La dernière concerne l’impact de la productivité du travail sur les coûts unitaires de main-d’œuvre. Sauf indication contraire, le PIB se réfère à l’économie totale. PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2008 – ISBN 978-92-64-04055-7 – © OCDE 2008 261 PRODUCTIVITÉ • INDICATEURS ÉCONOMIQUES DE CROISSANCE DE LA PRODUCTIVITÉ ÉVOLUTION DU PIB PAR HABITANT Indicateurs économiques de croissance de la productivité Le produit intérieur brut (PIB) par habitant, qui est l’un des indicateurs clés de la performance économique, mesure l’activité économique ou le revenu par personne. Le PIB par habitant est un indicateur général du niveau de vie moyen ou bien-être économique. Sa croissance peut se décomposer en une partie due à la croissance de la productivité du travail (mesurée par le PIB par heure travaillée) et une partie due à l’accroissement de l’utilisation de main-d’œuvre (mesurée par le nombre d’heures travaillées par personne). La croissance de l’utilisation de main-d’œuvre peut avoir un impact considérable sur la croissance du PIB par habitant. Le ralentissement ou la baisse du taux d’utilisation de main-d’œuvre conjugué à une croissance élevée de la productivité du travail peut indiquer une utilisation accrue du capital et/ou une diminution de l’emploi de travailleurs à faible productivité. Définition L’indicateur ci-après se calcule en utilisant les estimations du PIB et de la population publiées dans la base de données OCDE des comptes nationaux annuels. Pour les agrégats de zones, les estimations du PIB ont été converties en dollars des EU constants, à l’aide des parités de pouvoir d’achat de 2000. Les séries relatives aux heures travaillées sont essentiellement tirées des comptes nationaux annuels de l’OCDE ; lorsqu’ils faisaient défaut, on a eu recours aux Perspectives de l’emploi de l’OCDE. Comparabilité Tous les pays de l’OCDE utilisent le Système de comptabilité nationale de 1993, sauf la Turquie qui utilise celui de 1968. Les heures travaillées sont les heures effectivement travaillées, mais les méthodes utilisées pour les calculer peuvent varier d’un pays à l’autre. Dans le graphique ci-contre montrant une longue période 1970-2006, le Total OCDE ne comprend pas la République tchèque, la Hongrie, la Pologne et la République slovaque alors que dans le graphique de la page de droite montrant une période courte 2001-2006, le Total OCDE ne comprend pas la Pologne et la Turquie. Variation en pourcentage, taux annuel 1970-2006 2001-2006 Italie Portugal Allemagne Suisse France Pays-Bas Total UE15 Autriche Belgique Sept grands Danemark Japon Total OCDE Espagne Canada Mexique Norvège États-Unis Australie Nouvelle-Zélande Royaume-Uni Islande Finlande Suède Luxembourg Irlande Grèce Pologne Corée République tchèque Hongrie République slovaque Turquie 0 1 2 3 4 5 6 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/400650835762 Sources Tendances à long terme Sur la période 1970-2006, la croissance du PIB par habitant a été supérieure à 2 % dans la plupart des pays de l’OCDE, mais nettement plus dans quelques pays, notamment l’Irlande et la Corée, pour lesquelles le taux de croissance moyen a dépassé 4 %.
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218 de l'ouvrage contiennent de précieuses réflexions sur la communication (« Note sui modi di comunicare ») ainsi que sur le travail particulier de la rédaction (« Nota sulla scrittura ») : Questo libro l'abbiamo scritto in 20. L'idea ci è venuta durante il viaggio col Gorilla, nell'assemblea riportata a pp. 142 sgg. Con tutto quello che ci era capitato, pensavamo allora a una specie di vita di Scaramouche. [] Così tutto il gruppo ha potuto trasferirsi per il mese di luglio in un piccolo paese dell'Appennino modenese, Palagano, a un'ora di macchina dal territorio della Bismantova. La forma del viaggio è quella che meglio descrive la nostra esperienza, che è stata un processo continuo di arricchimento e scoperta. Quello della cronaca di viaggio era anche il modo più semplice per sfuggire al pericolo dell'astrattezza e raccontare invece per fatti, per cose viste e sentite, affidandoci spesso alla testimonianza diretta, registrata. Abbiamo prima di tutto concordato insieme una scaletta del libro : cioè la struttura generale, le parti. Poi ognuno, sulla base degli appunti e dei ricordi, ha cercato di raccogliere quanto più poteva di ogni giornata, in modo da darne la descrizione. Attraverso molte assemblee i ricordi personali sono diventati patrimonio di tutti, e abbiamo tracciato la linea generale della cronaca. Ci siamo distribuiti delle parti da scrivere, a seconda di quanto ognuno meglio ricordava. Così piano piano sono cominciate a nascere le giornate412. Plusieurs données intéressantes : la pratique politique de l'assemblée, du cercle de parole, sert ici à des fins poétiques. La mise en commun des souvenirs donne forme à un patrimoine commun, partagé : ici, donc, « il privato è poetico ». Il y a également quelque chose de multimédia dans la pratique scripturale du groupe qui mobilise souvenirs, notes et enregistrements sonores : une écriture transversale, donc, qui préfigure nombre des expérimentations du Settantasette bolonais qui interrogent bien souvent les limites du medium utilisé. Enfin, – et même s'il s'agit d'un excursus nous tenons à souligner cette intéressante parenté –, il y a quelque chose de très boccacien dans cette façon de faire « naître les journées » : loin de la ville, dans une retraite amène, vingt jeunes hommes et jeunes femmes se racontent des histoires, leur histoire Rappelons que la nature carnavalesque du Decaméron a souvent été évoquée : la brigata des jeunes Florentins qui fuient la ville où se répand la pestilence opère un double renversement en se réfugiant à la campagne et dans le monde de la fiction narrative ; à chaque journée son roi ou sa reine, comme à l'oc412 Il Gorilla quadrumàno, op. cit., p. 197-198. 219 casion des festivités du carnaval qui prévoient l'élection d'un nouveau souverain. À leur manière, les étudiants du DAMS créent eux aussi un nouveau modèle de société, certes temporaire (comme le carnaval), mais qui préfigure largement les problématiques et les pratiques du Movimento del '77. L'écrivain et critique Gianni Celati, également professeur au DAMS comme Scabia, prend part au spectacle du Gorille à plusieurs occasions. En 1974, il publie un article sur la revue du Parti communiste Rinascita, dans lequel il précise tout d'abord que les spectacles du teatro da stalla émilien avaient lieu « durante il periodo di carnevale ». Celati donne la parole aux étudiants qui indiquent que : [] col pretesto del teatro, questi contadini (che per alcuni di noi sono poi i nonni e i bisnonni) stavano assieme ; e [] facevano « cultura » in modo autonomo, coi propri mezzi, anche molto poveri413. Le teatro da stalla des origines est donc une forme de contre-culture des classes subalternes qui s'établit loin des institutions, en autonomie, et qui présente une forme de do it yourself. L'expérience du Gorilla quadrumàno participe d'une démocratisation des pratiques artistiques, en donnant la possibilité à des non-experts de se prêter au jeu ; la catharsis et la fête qui s'en suivent permettent de décloisonner, de désaliéner les rapports sociaux : [] la gente ride, si dimena, commenta di rimando agli attori come fa al ciarlatano sulla pubblica piazza, c'è una specie di decongestione generale, di scioglimento dei reciproci riserbi che sfocia nella festa. Ora la socialità si verifica soprattutto nella festa, e perciò nella comicità : nella festa che segna le alternanze tra lavoro e non lavoro, e prima ancora l'alternanza stagionale e di regime economico, come il carnevale414. Celati souligne donc la portée socio-politique de l'expérience du laboratoire du DAMS qui va bien au-delà des velléités théâtrales. Le gorille (et ses autres déclinaisons, comme celui de la fable éponyme de Kafka ou encore le King Kong du cinéma américain) pro413 CELATI Giovanni, « Le virtù del gorilla », Rinascita, n. 32, 9 août 1974, p. 28. 414 Ibid. 220 blématise, de façon métaphorique, la question de la sociabilité et évoque la possibilité (ou l'impossibilité, dans le cas du monstre qui terrorise New York) d'un « accord entre la sociabilité présente du groupe et ses racines originelles » ; il problématise l'articulation entre travail et loisir, les discontinuités entre ville et campagne et met en jeu le problème de la communication comme première pierre d'une action politique : Detta alla svelta, è l'ipotesi che la prima mossa politica da fare sia quella di costruire tessuti di socialità, luoghi di identificazione collettiva. [] sono le drammatizzazioni sociali i grandi modelli a cui pensare, gli sposalizi, i battesimi, i carnevali, le processioni e i comizi politici. [] la nostra perdita del senso culturale di questi eventi, di queste grandi messe in scena di gestualità collettiva, è la perdita del nostro senso sociale e l'ingresso nella nostra solitudine415. Le spectacle du Gorille parcourt ainsi la voie ouverte par les situationnistes, à savoir l'exploration des contextes alternatifs, éloignés dans l'espace ou dans le temps, servant d'exemple pour montrer que d'autres rapports sociaux sont possibles et envisageables. Ici, le spectacle s'érige donc contre la société du spectacle aliénante qui atomise les individus et délie les rapports de solidarité. Alice disambientata Quelques années après l'expérience du Gorille, Gianni Celati et ses étudiants du DAMS se retrouvent dans une dynamique de création collective analogue. Celati organise un séminaire sur le nonsense victorien, à l'occasion duquel il se penche notamment sur les écrits de Lewis Caroll : nous retrouvons donc l'origine principale de l'omniprésence des thématiques nonsensical et d'Alice dans les graffitis bolonais. Bien vite, le séminaire se transforme en autre chose et déborde du cadre universitaire, il devient « [] un collettivo politico, una scuola di scrittura creativa, un cineclub, un concerto rock, un set psicanalitico416 ». Une urgence expressive s'empare des étudiants qui ne se contentent plus de faire leurs devoirs : pris d'une frénésie d'écriture, leurs fiches de lecture et autres « saggi » deviennent de véritables dérives intellectuelles où se mêlent considérations philosophiques, 415 Ibid. Note introductive en deuxième de couverture de CORTELLESSA Andrea, in CELATI Gianni (dir.), Alice disambientata, Florence, Le Lettere, 2017. 416 221 politiques, artistiques, biographiques De cette expérience naît Alice disambietata, un objet littéraire inclassable, fruit d'un travail collectif : Questo libro è composto da interventi e discussioni sviluppati durante gli incontri del gruppo Alice/DAMS (Facoltà di Lettere e Filosofi , Università di Bologna) tra il novembre 1976 e il novembre 1977. I materiali raccolti (interventi scritti, registrazioni, schede, appunti, biglietti e frasi sparse) sono stati messi in una macchina di scrittura, che ha montato, ampliato o contratto i vari discorsi venuti fuori417. Notons au passage que nous trouvons parmi les participants de cette initiative des noms que nous avons déjà croisés, comme ceux de Roberto « Freak » Antoni ou Enrico Palandri. Notons également que l'écriture polyphonique est doublée d'une multimédialité, comme ce fut le cas pour la rédaction du livre Il gorilla quadrumàno. Dans l'introduction à Alice disambientata, Celati revient sur la particularité du contexte citadin bolonais : Il fatto è che [gli studenti] a un certo punto discutevano seriamente sulle avventure di Alice, ma era come se parlassero sempre della loro situazione di studenti fuori casa, fuori dalla famiglia. La formula « Alice disambientata » è nata dal loro disambientamento. Il disambientamento dipendeva dal medio strozzinaggio degli affittacamere, dal frequente malservizio delle mense, dalla mancanza di posti per radunarsi senza dover stare sempre per strada. Non credo che Bologna fosse un posto più disagiato di altri, per viverci da studente ; ma l'enorme aumento della popolazione studentesca ne aveva fatto un luogo affollato, spesso con un'aria da corte dei miracoli, e con visitatori che affluivano da tutte le parti attirati dalla sua intensa vita all'aperto. Città di incontri più d'ogni altra in quel periodo, era un ambiente da romanzo, come quello raccontato nel Boccalone di Enrico Palandri. In Boccalone, Palandri parla d'una città di camminatori, « alti camminatori », dice. Era una città di studenti vaganti, che spesso andavano alle lezioni più che altro per mettersi a sedere. Dato il sovraffollamento delle camere d'affitto, molti avevano il problema di dove ciondolare per tutto il giorno, soprattutto nei mesi freddi418. Le « dépaysement » qui afflige les étudiants néo-arrivants, les errances quotidiennes qui lui sont liées, confirment nouveau les racines psychogéographiques du Settantasette bo- 417 Ibid., p. 4. médié , point de ralliement des mendiants, des malfrats et des estropiés. Dans un célèbre passage de Notre-Dame de Paris, Victor Hugo évoque ce monde du faux-semblant, de la ruse et de la tromperie, en se basant sur les descriptions saisissantes d'Henri Sauval dans Histoire et recherches des antiquités de la ville de Paris (1724). Signalons au passage que Celati se réfère également au carnaval, dans une acception toutefois péjorative (au sens de « spectacle » debordien – le terme étant explicitement cité), pour définir la fin du Movimento bolonais à l'occasion du Convegno contro la repressione : Tutta la città ha assunto un'aria da spettacolo consacrato ai servizi giornalistici ; subito il convegno si è presentato come una carnevalata, esibita per la televisione, ed è finito ancora peggio, con l'annuncio della formazione di gruppi armati che di lì a poco avrebbero cominciato le loro imprese, anche quelle come esibizione per i mass media419. Quoi qu'il en soit, malgré la fin abrupte du mouvement, quelque chose s'est passé à Bologne en 1977, et Celati de souligner également la particularité de ce moment historique intimement lié à un territoire : Per un anno o poco più, Bologna è stato un laboratorio all'aperto, dove le idee e le opinioni circolavano a grande velocità, con letture frettolose o echi del sentito dire, e subito superate da altre. Poi è finita, è iniziata l'era di una nuova ica economica, con una domesticazione ancora più faticosa dell'animale umano420. Ces « lectures hâtives », ces « échos du ouï-dire » évoqués par Celati, rejoignent les considérations que nous faisions sur la maîtrise inégale des références littéraires, philosophiques, politiques et plus largement culturelles qui imprègnent le Movimento. Celati revient d'ailleurs sur la prégnance de la figure d'Alice et explicite la généalogie de son omniprésence, en rappelant que c'est tout d'abord la contre-culture américaine qui l'érige comme figure symbolique et la transforme en un « mot de ralliement ». Les métamor419 Ibid., p. 8. 420 Ibid., p. 9. 223 phoses successives d'Alice, les morcellements de son identité, ses altérations de conscience, symbolisent également parfaitement les expérimentations liées à la culture de la drogue dans les années 1960 ; quête résumée par le « White Rabbit » de Jefferson Airplane, qui invite à « demander à Alice », en transformant les éléments du récit de Carroll en un véritable hymne psychédélique : One pill makes you larger, and one pill makes you small And the ones that mother gives you don't do anything at all Go ask Alice when she's ten feet tall 421 Quant au contenu du livre en soi, Celati le définit ainsi : [All'editore] Fachinelli interessava perché questo insieme di discorsi arruffati non aveva nessuna rete protettiva, e semmai un'aria pagliaccesca proprio là dove si tentavano discorsi seri. Nato in un clima di euforia per ciò che è esterno, per il puro accadere dei fatti e degli incontri, il libro non nasconde il suo carattere un po' posticcio : come uno che si metta una maschera da sapiente, ma si stanchi subito di portarla e la butti alle ortiche, tra scherzi e lazzi 422. Cette définition met en évidence le détachement intellectuel particulier qui émaille les productions qui composent Alice disambientata, un détachement que nous avons précédemment évoqué comme étant une ultérieure déclinaison du renversement carnavalesque. Ici, Celati utilise justement des termes carnavalesques pour désigner cette attitude particulière propre aux étudiants du mouvement bolonais, en parlant de « l'air clownesque » du livre, en parlant de « masque du sachant ». Ce masque du sachant, dans la tradition de la Commedia dell'Arte, n'est autre que celui du docteur bolonais Balanzone. Professeur de Droit à l'Université de Bologne, Balanzone est bien loin d'être mesuré comme devrait pourtant présager son nom renvoyant à la « balance » : homme irascible, il multiplie les gaffes et devient l'objet de beffe à répétition. Savant autoproclamé, son rapport à l'érudition est hautement problématique : ses raisonnements alambiqués, son latin maccheronico 421 JEFFERSON AIRPLANE, « White Rabbit », Surrealistic Pillow (album), RCA Victor, 1967. 422 Alice disambientata, op. cit., p. 10. 224 et ses citations hasardeuses en font un personnage ridicule. Que les étudiants du Movimento del '77 s'inscrivent consciemment ou non dans une sorte d'émulation de ce personnage de la tradition, ils ont cependant bien clair à l'esprit le caractère « posticcio », factice, postiche, fabulateur, que revêtent parfois leurs discours inspirés. Il y a là une remarquable aptitude à l'autocritique et à l'auto-ironie (tout à fait absente chez Balanzone), au désenchantement également, qui émerge d'ailleurs dans les textes qui composent Alice disambientata. Une intervention, datée de juillet 1977, met en exergue les défauts et les paradoxes de l'opération, d'un point de vue politique : Vi avverto che se continuate a dire delle cose così culturalistiche non venderete neanche una copia di questo libro. E poi non sono neanche cose rivoluzionarie, io non le capisco e rimango indifferente. Di che tendenza politica siete voi, fate parte o no d'un partito, oppure siete cani sciolti? A ogni modo il vostro libro non lo compro, perché già stampare un libro secondo me è una contraddizione. Se parlate di lateralità, bisogna essere laterali fino in fondo, non pubblicare libri con editori di moda, come fa Nanni Balestrini che scrive Vogliamo tutto (neanche farina del suo sacco) e poi è un maneggione affarista e basta. Non bisogna aver niente a che fare con i managers d'una certa sinistra rivoluzionaria che beve tutto quello che i managers gli danno da bere423. L'écriture collective contient en soi sa propre limite, sa propre négativité ; de nombreux discours (moins polémiques que ce dernier) problématisent justement les notions de polyphonie424, de groupe, et font montre d'une grande conscience des écueils de l'entreprise d'Alice disambientata : Bisognerebbe cercare di scrivere e parlare per ellissi, salti e sincopi ; comunicare non attraverso frasari, ma attraverso figure di movimento, in modo che le cose fuggano, sfuggano via. Usare la velocità e il ritmo contro il senso e il sapere del perbenismo scolastico. Cadere nel buco di Alice per un movimento spontaneo, poi seguire quel ritmo, seguire la velocità dei trapassi, e tutti i percorsi del discorso che si perde sottoterra425. Di fronte alla scrittura collettiva c'è un rischio : quello di creare un gruppo chiuso che espropri nuovamente gli altri. Rischio cioè di fare dell'avanguardia, di sostituire l'indi- 423 Ibid., p. 48. 424 Le plurilinguisme est d'ailleurs un concept on ne peut plus bakthinien. 425 Ibid., p. 68. 225 vidualismo borghese col collettivismo burocratico. Una scrittura collettiva non può essere se non per breve tempo prerogativa d'un gruppo ; deve essere un gioco praticato da tutti, uno scrivere romanzi in milioni di persone. Con le parole è possibile giocare in infiniti modi. È possibile anche smettere di giocare. Di sicuro oggi leggere è contro lo scrivere : è una fuga dalle trappole della comunicazione, che vuole trasformarci in ciechi consumatori di spettacoli 426. Scrittura collettiva. Non ci può essere scrittura collettiva che non sia contraddittoria, varia, eterogenea, senza un quadro ideologico prestabilito. Se scrivono o parlano in tanti, ci sono teste che partono in varie direzioni. Il centro tematico diventa un pretesto, un luogo di circolazione e basta. Così ha funzionato Alice 427. 3.2. Les textes du « piccolo gruppo » bifien Scrittura e Movimento Alice comme prétexte (ou pré-texte) donc, comme mot de ralliement des contrecultures, comme métaphore, comme anaphore poétique ; d'une certaine façon, Alice ne pouvait que continuer de traverser les murs et de se répandre dans l'air en devenant une fréquence radio. Avant d'affronter la question de l'émettrice bolonaise, nous devons revenir sur les productions théoriques de Franco « Bifo » Berardi et de l'aire bifienne qui préparent le terrain et culminent avec la création de la radio libre de via del Pratello. Scrittura e Movimento428 constitue une sorte de vademecum pour les expériences bolonaises des années 1970 qui graviteront toujours, de près ou de loin, autour de la figure bifienne. Ce traité de philosophie politique que Berardi rédige à 23 ans, entre avril et mai 1972, présente les caractéristiques saillantes du contexte dans lequel il naît : il s'insère dans un environnement intellectuel en effervescence et multiplie les références à d'autres textes théoriques avec lesquels il entre en résonance ; son écriture est également très dense et complexe (parfois lourde et excessivement technique, avec une tendance à la répétition notamment, à la reprise de sections entières de phrases dans le but d'être très 426 Ibid., p. 90. 427 Ibid., p. 126. 428 BERARDI Franco, Scrittura e Movimento, Venise – Padoue, Marsilio Editori, 1974. précis pour ne pas risquer d'être mal interprété). Le titre de l'essai renvoie précisément à une problématique centrale de notre recherche ; à savoir comment lier écriture et mouvement, c'est-à-dire poétique et politique. En effet, l'approche bifienne vise à faire entrer l'écriture dans le giron de la politique, à démontrer que c'est à l'intérieur du Mouvement que doit désormais s'opérer la pratique scripturale. En insistant sur la tendance lourde de la prolétarisation du travail intellectuel, Berardi met en évidence une mutation du système capitaliste qui se traduit par une sorte de nivellement par le bas ; dès lors, les intellectuels doivent nécessairement reconnaître qu'ils sont des prolétaires et s'allier avec les classes subalternes. Toutefois, la production d'un texte est toujours tributaire d'un sujet, d'un individu socialement et psychologiquement déterminé : dès lors, comment concilier ces deux dimensions antithétiques de l'individu et du collectif? Berardi revient sur les échecs consécutifs de la littérature réaliste, dont l'engagement et le volontarisme ne permettent pourtant pas d'aller outre cette limite constitutive : Il tentativo di legare la pratica significante, la letteratura in modo particolare alla storia della lotta di classe, del movimento operaio, non riconoscendo questa determinatezza della pratica specifica, ha prodotto quel che sappiamo. Il legame della letteratura con la realtà politico-sociale, è stato sempre un legame volontaristico, che non ha mai modificato il modo specifico della pratica letteraria, dell'operazione particolare. Il realismo (inteso come poetica) non faceva che contemplare oggetti nuovi (la lotta del proletariato, quando va bene, o addirittura la pura e semplice forma di esistenza positiva del lavoro , o del « popolo ») ma non giungeva a modificare il modo stesso della scrittura, dell'operazione produttiva, cioè429. Le problème réside donc dans l'énonciation ; et c'est justement la prolétarisatisation du travail intellectuel qui peut permettre à l'écriture de s'insérer dans un contexte social différent et par conséquent de modifier les modalités de son énonciation : Finora così. Ma l'ipotesi che avanziamo è che, nel corso della riorganizzazione capitalistica negli anni sessanta giunta al punto di maturità, il lavoro intellettuale sia entrato nel processo di produzione di valore, e che in questo modo la figura del lavoro intellettuale sia andata progressivamente proletarizzandosi, o omogeneizzandosi con la figura complessiva di classe430. 429 Ibid., p. 20. 430 Ibid., p. 21. 227 Dès lors, la figure de l'écrivain-intellectuel (mais également celle du leader syndicaliste ou politique – Berardi critiquant avec insistance toute forme de léninisme) appartient à un modèle dépassé où le détenteur de la science se pose dans un rapport de supériorité ou de latéralité par rapport aux classes prolétaires et sur lesquelles il calque des schémas interprétatifs pré-acquis : Una forma nuova di scrittura emerge allora (e scrittura è modificazione del linguaggio, costruzione di un testo, ma anche intervento, azione che modifica i rapporti materiali) : una scrittura in movimento, che non presuppone ipostaticamente una data struttura del mondo, né, quindi, un rapporto dato fra parola e concetto, fra mondo e pensiero. E all'interno del rapporto fra movimento e scrittura, non abbiamo più a che fare con una scrittura che conosce il movimento, ma si tratta di una pratica che scrive, che interviene (a partire dalla sua posizione interna al movimento) sul terreno dell'organizzazione dei segni, modificandola secondo un'intenzione, un senso, che nel movimento, nella pratica reale (e non in quella determinata, se pure anche specifica della scrittura stess a) si forma 431. Berardi revient également sur la question des avant-gardes et souligne l'incomplétude de leur portée, leur incapacité à sortir d'une position négative. Comme la littérature réaliste et volontariste, les avant-gardes « ne vont pas assez loin ». Même si leur constat est juste, elles n'arrivent pas à modifier leur énonciation et considèrent toujours la création artistique comme une « mission » toujours dans un rapport d'altérité par rapport aux classes subalternes : L'avanguardia negativa (pensiamo a un settore dell'avanguardia storica : il surrealismo, dadà, parte del futurismo ; e parte della letteratura degli anni '60, in Germania, USA, e anche in Italia) identifica la letteratura con un'operazione totale perché ha già scoperto che il capitalismo è un sistema oppressivo, ma deve ancora scoprire che la letteratura è inserita nel sistema capitalistico come ciclo particolare di produzione, come particolare pratica determinata. E così l'artista di avanguardia rifiuta il capitalismo, ma crede di poterlo rifiutare proprio usando la sua mansione come un'arma, come una forza autonoma e negativa432. 431 Ibid., p. 24. 432 Ibid., p. 39. En s'appuyant sur des réflexions tirées de l'essai Verifica dei poteri de Franco Fortini, Berardi identifie une particularité de la néo-avant-garde que nous avons déjà rencontrée : [Fortini dice] : « la sola diversità reale della neo-avanguardia da quella storica consiste, nell'uso quasi esclusivamente ironico e "classicheggiante'' del materiale iconografico, verbale e psichico che nella maggiore avanguardia storica era spesso ancora "tragico'' e di diretta discendenza romantica ». Qui, con l'aria di dire una cosa da nulla, Fortini mette in luce il più grosso punto di differenza fra le due avanguardie, e soprattutto indica l'elemento caratterizzante dell'atteggiamento di neo-avanguardia. L'atteggiamento di neo-avanguardia è proprio questo di ironia e di distacco nei confronti di ciò che si dice ; di doppiezza, diciamo pure di disincantata freddezza e quasi di disinteresse per ciò che si dice433. Et Berardi d'expliciter les raisons de ce détachement qui sera si caractéristique des productions du Movimento bolonais : Dalla tragicità della prima avanguardia all'ironia della neo-avanguardia ci sta di mezzo, forse, la massificazione della condizione letteraria, che invade settori sempre più vasti, passando attraverso la pubblicità, le comunicazioni di massa, la « letteratura di consumo » ; ci sta di mezzo la consapevolezza acquisita di essere forza-lavoro che produce una merce di cui non è valutabile, come per ogni altra merce, la qualità, ma il valore di scambio, la quantità di lavoro (lavoro linguistico, nella fattispecie) cristallizzato in essa. Chi scriverebbe dando l'impressione di credere in ciò che scrive? Ecco l'atteggiamento che ispira il gusto del gioco, il barocchismo, il « formalismo » della neo-avanguardia. Ma è questo, diciamolo pure, ora, l'unico atteggiamento possibile, l'unico atteggiamento corretto434. La prolétarisation du travail intellectuel, suite à la réorganisation du capitalisme, constitue ainsi une mutation radicale quasi anthropologique. Une mutation qui sape la « foi dogmatique en la coïncidence entre la parole écrite et le monde » propre au réalisme et à toute forme d'idéalisme ; les avant-gardes, si elles mettent en crise cette confiance et commencent à en révéler les ambiguïtés et les absurdités, en déconstruisant les langages notamment, finissent par déboucher sur le détachement, l'ironie, le cynisme de la néo-avantgarde, sur la « répétition constante de son propre geste dé-signifiant ». L'émergence du 433 Ibid., p. 52. structuralisme correspond à une volonté de sortie de cette « phase ciselante », mais sa tentative de refondation du langage poétique reste incomplète selon Berardi car elle se cantonne aux aspects « phonico-graphiques » du signe sans prendre en compte ses déterminations historiques et politiques ; en identifiant linguistique et poétique, le structuralisme ne permet pas de déboucher sur une pratique scripturale de nature différente. Voici donc la conclusion de Berardi : Ne possiamo però finalmente venire a capo puntando sull'assunzione del punto di vista come determinante storico-materiale, e riconsiderando in questo modo la parola poetica come complesso significativo-polisemo, che, dall'ambiguità del segno particolare, esibisce il suo significato nel contesto complessivo. Non c'è così, in questa rivalutazione della intenzione di conoscenza dell'opera poetica (letteraria-artistica) un ritorno dall'ambiguo alla fede dogmatica, dalla cinica o tragica onnisemanticità alla piatta univocità rappresentativa, ma l'apertura verso un'ambiguità determinata ; l'ambiguità del polisenso articolato in un sistema di differenze linguistiche e in un discorso poetico, e che esibisce la sua determinatezza storica esprimendo una situazione particolare e portando in sé il punto di vista di una classe particolare. Questo è possibile assumendo il movimento come luogo di formazione del soggetto che conosce, che scrive. Il modo di produzione del testo si trasforma, a costituirlo non è più una forma immutabile del mondo, o un ipostatico meccanismo linguistico. La scrittura non è né specchio né macchina ; è una pratica, e a costituirla è il movimento. Il movimento del lavoro contro il lavoro, del comunismo contro lo Stato. Di questo movimento il lavoro intellettuale proletarizzato è parte, e la scrittura si forma nello spazio materiale della lotta435. Il faut donc miser sur l' « ambiguïté » du mot poétique, c'est-à-dire sur la non-univocité de sa signification. Dès lors, et par extension, le sens d'une oeuvre peut sans cesse être réactivé, en fonction des contextes sociaux, politiques, historiques, géographiques, que celle-ci rencontre. Les considérations de Berardi ne sont ici pas éloignées de celles d'Umberto Eco dans L'opera aperta : l'oeuvre n'est pas une donnée immuable, elle ne dure que grâce à l'altérité, grâce à l'action du lecteur qui, en la parcourant avec sa sensibilité déterminée par un contexte socio-historique, lui donne de nouvelles significations. Si Eco parle d'oeuvre ouverte, l'on pourrait prêter à Berardi l'expression d'oeuvre en mouvement, 435 Ibid., p. 75-76. avec une double acception : une oeuvre qui se meut, mais également une oeuvre au sein du mouvement. Chi ha ucciso Majakovskij? Chi ha ucciso Majakovskij? de Franco Berardi apparaît comme une tentative de mise en pratique de la théorie philosophique exposée dans Scrittura e movimento. Le sous-titre du livre, « romanzo rivoluzionario », en dit déjà long : l'oxymore synthétise la collusion entre poétique et politique, entre art et vie. Le livre a bien peu de romanesque, il est plutôt un geste iconoclaste voire anti-littéraire : Berardi veut clairement se démarquer de la littérature bourgeoise et de la narration à la première personne. Vladimir Maïakovski, célèbre poète russe suicidé, alter ego de Bifo, devient la prosopopée du mouvement dans un ouvrage où la temporalité et la géographie sont chamboulées. Il s'agit d'un texte expérimental, intéressant à de nombreux égards et qui tente d'appliquer des innovations poétiques et politiques. Un projet toutefois très complexe et parfois obscur, un texte hautement ambigu qui suppose un acte de lecture renouvelé, débarrassé des attentes traditionnelles car il est tout sauf facilement lisible. Chi ha ucciso Majakovskij? se retrouve à la croisée de plusieurs genres : poésie, manifeste politique, traité philosophique, écriture automatique, roman autobiographique, méditation Il est donc plus juste de parler de texte, au sens étymologique du terme, c'est-à-dire d'un entrelacs de différentes trames et de différents matériaux. Cette caractéristique met donc en évidence la volonté de Berardi de ne pas tomber du côté de la traditionnelle énonciation bourgeoise : Occorre non scrivere affatto alcunché che possa essere letto, ma scomposto, separato pezzo per pezzo, compreso il modo che il romanzo non sia scrittura su qualcosa, ma quel qualcosa appunto. Non sia romanzo oggetto scambiabile quindi ipostasi fissazione di un senso (di un tempo) precedente al lavoro che qui si svolge ; ma esibizione del processo in cui si costruisce (il tempo) (il senso) nello spostamento dei rapporti esistenti nel testo precedente nel testo dato per differenza nel testo che il testo ritaglio fuori del testo, il suo lavoro cioè, non scambiabile non comprensibile esso, ma dato come possibilità di senso 231 (dal) movimento 436. Le texte bifien veut montrer à son lecteur (ainsi qu'à son éditeur qu'il apostrophe plusieurs fois437) qu'il est un procédé fastidieux, un travail, précisément : il veut faire entrer le lecteur dans l'officine de l'écrivain-prolétaire, lui montrer les rouages de son laboratoire. C'est sans doute pour cela qu'il malmène également la mise en page traditionnelle au profit d'expérimentations graphiques multiples : sauts de lignes arbitraires, anaphores, expérimentations typographiques. Les mots, les lettres constituent une matière première, l'oeuvre littéraire est un ouvrage, un assemblage quasi manuel de signes. D'ailleurs, le livre lui-même, en tant qu'objet physique, se rattache à l'esthétique du do it yourself avec son texte rédigé à la machine à écrire et son titre écrit au feutre noir438. On retrouve dans l'écriture bifienne l'obsession de l'analyse méta-poétique : le recours à la mise en abyme est constant, et ce dès les premières pages du texte qui discourent sur un « manifesto », objet fétiche et fixation symbolique qui entre dans un rapport de chiasme avec la ville, l'autre grande thématique omniprésente du texte : La città si riflette nel manifesto, ma poi il manifesto fa la città, entra a cambiarla ed a mutarne la faccia, a mutare i rapporti reali. Una realtà scritta dai testi, dalle azioni. La scrittura è direttamente una pratica, una forma di mutamento del reale, una forma di movimento che a partire dallo stato di cose presente va verso la sua abolizione439. BERARDI Franco, Chi ha ucciso Majakovskij? Romanzo rivoluzionario, Rome, Squilibri edizioni, 1977, p. 16. 436 « Caro signore è con vero fastidio che prendo ancora in mano questo lavoro, questo mio scritto ; è con vero fastidio che lo rileggo e continuo a scriverne parti, cambiando, eccetera ; lei, come editore, mi dovrebbe rompere un po' meno i coglioni perché se no le spedirò una foto di Frank Zappa con i pantaloni giù fino ai piedi seduto sul water a cagare. Dopo le Mothers of invention, e continuando con Frank Zappa, la scrittura musicale, il rumore, la banalità, tutto vuole concorrere a rendere questo insopportabile reale stridore. Merda : perché l'armonia riduceva il mondo ad un accordo falsificante, occorre invece rendere nel testo il fastidio fisico, lasciare il testo così irrisolto così inconcluso che attraverso esso, oltre le sue righe, oltre il suo lavoro si possa leggere il fastidio che provoca produrlo.», ibid., p. 74. 437 Un lettrage typique des éditions Squilibri pour qui le fumettista Andrea Pazienza réalisera d'ailleurs plusieurs couvertures. 438 439 Ibid., p. 5. 232 Che sia la strada a scrivere, a formare l'oggetto-scritto ; che sia il movimento, di cui l'atto di scrivere fa parte. Scrivere è una forma di conoscenza ; è conoscere (infatti) costruire un oggetto secondo norme di formazione determinate dal soggetto che conosce.440 Facciamo un manifesto. Esso è la scrittura che invade la strada. Facciamo un testo per un manifesto. Esso è la strada che invade la scrittura441. Des considérations méta-poétiques qui pourraient être sorties tout droit de Scrittura e movimento : Ora di nuovo qui davanti a questo manifesto, a ripensarci. Un problema è stato il modo dello scrivere per esempio proprio quando ne parlavo con C. ripetevo che il modo stesso della scrittura deve essere mutato, se il soggetto che scrive questo libro non è lo stesso del romanzo borghese. il libro si deve portar dentro un'esperienza collettiva che di continuo entra in contraddizione con l'ordine costituito delle parole. Dicevo come puoi scrivere egli andò egli disse egli fece. Che cosa ti permette di avere tanta sicurezza? E poi, perché ingannare con questa pretesa identità fra il susseguirsi delle parole e lo svolgersi dei fatti? Occorre rinunciare alla terza persona, così sicura di sé ma così falsa442. On remarque également l'importance du substrat situationniste dans l'écriture de Bifo, avec (en plus de l'importance accordée à la ville) des références évidentes au concept debordien de spectacle ou d'intertextualité. On note également l'influence exercée par la littérature américaine et Ginsberg, par exemple, sur l'écriture bifienne. Ce qui émerge de Chi ha ucciso Majakovskij?, c'est la volonté de démontrer la force performative de l'art, sa force poétique, c'est-à-dire sa capacité à créer de nouvelles réalités : l'écriture peut même agir sur le cours de l'histoire et ressusciter Vladimir Maïakovski, le poète suicidé. C'est bien pour cela qu'elle doit déborder, se muer en affiche et coloniser les murs de la ville, que les vers poétiques doivent être hurlés sur les places ci440 Ibid., p. 6. 441 Ibid., p. 7. 442 Ibid., p 233 tadines. Le texte se constitue autour d'une radicale ambiguïté : deux temporalités, la Russie post-révolution bolchévique et l'Italie post-Autunno caldo443, s'entrelacent et sont redoublées par deux énonciations, à savoir Maïakovski et l'alter ego de Bifo (ces deux narrateurs étant également alter ego l'un de l'autre, dans un jeu de miroir qui démultiplie les points de vue et entretient la confusion à dessein). Le texte agit donc sur la temporalité mais également sur la spatialité, présentant ainsi une géographie tout à fait particulière : Mentre sul treno sobbalzo verso Milano, attraversando la pianura padana, gli Urali e parte della bassa Baviera, mi rendo conto che [il compagno] Budda dev'essere molto cambiato 444. Une confusion spatio-temporelle entretenue par des références à des personnalités renvoyant à la culture de masse occidentale contemporaine et au monde du cinéma surtout : Jean-Paul Belmondo, Alain Delon, Woody Allen. En apposant des références symboliques antithétiques, diamétralement éloignées dans le temps et dans l'espace, Berardi multiplie les effets de « straniamento », de dépaysement : aussi l'italien, le russe et l'anglais se mélangent-ils fréquemment : Nalievo, napravo, how do you do? [] Smescuoi, funny, divertente 445. S'il est un texte fondamentalement méta-poétique, Chi ha ucciso Majakovksij? est également, dans le même temps, une réflexion méta-politique sur la question de l'engagement et de la lutte du point de vue de l'écriture : Le masse devono capire la poesia o la poesia le masse? E se si vogliono capire le masse occorre vedere quello che accade più in profondità. Che la scrittura parli il linguaggio che la realtà desidera parlare, che pulsa come un ritmo nuovo ; le strade che insorgono, la folla in movimento, l'espandersi della lotta di classe, questo deve lasciare segni. La realtà muta ; ed anche questo linguaggio deve mutare, deve trasformarsi. « Questo libro fu scritto nel riflusso, mentre l'occupazione di Mirafiori non aveva potuto valicare i cancelli [] », ibid., p. 3. 443 444 Ibid., p. 36. 445 Ibid., p. 10. Il pensiero dell'immutabile ferma il mondo davanti a sé facendone spettacolo, riducendolo a morto oggetto di conoscenza ; e così vogliono che la poesia non sia fatta dalla realtà, dalla storia, dal movimento ; ma che diventi riflesso di una realtà-spettacolo, di una storia-spettacolo, di un movimento-spettacolo. La lotta di classe vuole parlare nella voce formidabile della poesia ; e per loro dovrebbe al contrario stare lì come un oggetto che la poesia rappresenti : come se fosse immutabile l'oggetto, e neutrale la poesia. Abbiamo invece cercato, a partire dal 1914, e poi per tutti questi anni, di dare una voce al movimento, e quindi di fare un linguaggio che si muove, e non di fermare il movimento nell'immagine, e così farne spettacolo. Dicono che io sono incomprensibile. Può darsi, perché per i nepmani letterari, per gli appartniki della poesia, è comprensibile solo ciò che eternizza il presente. A me interessa dire che il presente è morto, e che nel testo a parlare sarà il movimento, questa appropriazione è modificazione violenta446. Si le Boccalone de Palandri est un roman autobiographique, imprégné de la personnalité du narrateur et de ses souffrances amoureuses (et donc « bourgeois »), l'écriture n'en présente pas moins des considérations méta-poétiques qui rejoignent celles de Berardi : Devo riuscire a rompere la catena grammaticale legata alla prima persona e ai tempi passati ; così sembra il racconto di un vecchio, che guarda il suo passato dal punto di sintesi, riarrangia i ricordi solo per poterli controllare è un racconto ancora molto superficiale, in cui la disperazione non può trovarsi un posto : mi servono modi e costrutti sintattici di movimento, che mostrino la confusione dalla parte della confusione, e devo perdere questo soggetto prepotente e arrogante che determina tutte le situazioni in cui si trova ; forse va tutto riscritto al presente, come un diario? o devo mollare tutto come dice anna? comunque sia, registriamo anche questo dubbietto447. « Mouvement », « confusion », « doute » : l'écriture lyrique, saisie par le moment politique, s'interroge sur sa propre validité et constate une incompatibilité. L'oeuvre traversée par les contradictions laisse transparaître ses fêlures, revendique son caractère ouvert, comme si elle était en réalité un work in progess plutôt qu'une unité immuable : mais 446 447 PALANDRI Enrico, Boccalone, op. cit., p. 18. 235 c'est peut-être dans cette incomplétude que réside sa force448. C'est même le collectif qui l'emporte sur l'auteur en tant qu'individu : Palandri revendique l'absence de style, le marqueur le plus intime de l'auctorialité, au profit d'une polyphonie dans l'oeuvre ouverte et « trouée » : Non ho uno stile nello scrivere, e neppure nel parlare ; parlo un po' come maurizio, un po' come gianni, un po' come gigi eccetera eccetera, cioè chissà come quanti altri [] così anche se non era finito (ma lo sarà mai?) ho fatto leggere queste pagine a maurizio, gianni, clorinda, ad anna [] ; e ancora tantissimi altri lo hanno letto e ne hanno parlato con me ; siccome non sono mai sicuro di quello che dico e le cose individuali mi fanno schifo, le cose che gli amici mi hanno detto, sul libro, o che col libro non c'entravano nulla, sono tutte entrate nel racconto, lo hanno tutto bucato di cose che succedevano nel frattempo, nel mentre che lo scrivevo [] ; lui (il libro) è un brusio leggero, un racconto che non riguarda nessuno, e allo stesso tempo parla di tutti, così come sono le mie giornate, piene di confusione e di persone ; non sono e non voglio essere precisamente enrico palandri, ma qualcosa di simile ; credo che questo sia un oggetto collettivo ; il collettivo non appartiene più al progetto, fa parte dei miei sogni, del mio modo di passare il tempo, di vivere la vita, di stare nella merda, come di cercare di uscirne ; ed è sussurrato, non declamato ; in molti punti vorrei essere interrotto, costretto a cambiare registro : qui è tropp o romantico, qui non è credibile ; qui è falso ; è questa la vera sfiga di scrivere soli, che si lascia andare una voce sola 449. Le chassé-croisé entre les thématiques bifiennes et palandriennes se retrouve également dans la présence symbolique de Maïakovski qui agit presque comme une sorte de talisman : Palandri intègre ainsi quelques vers du poète russe dans sa prose450. D'une façon générale, les références artistiques se mélangent, qu'elles renvoient au patrimoine commun des contre-cultures, à l'infarinatura estudiantine ou aux slogans de la publicité : comme l'avait dit Eco, les jeunes parlent enfin la langue de l'avant-garde : Se mi drogavo un po', e delle volte anche senza drogarmi, sedevo da qualche parte a declamare poesie : qualsiasi rima, dalla pubblicità dei tortellini fioravanti a ugo foscolo, « There is a crack, there is a crack in everything / That's how the light gets in », comme le chantera Leonard Cohen dans « Anthem » (1992). 448 449 Ibid., p. 175-176. 450 « Se dal cielo l'arcobaleno penzola », ibid., p. 44. 236 a dante alighieri, a rimbaud, a majakovskij ; e i respiri profondi, gli sniffi di mondo, che bello l'amore quando ci si mette!!! (Slurp451!) Malgré les doutes quant aux chemins que doit emprunter la création artistique, on remarque un enthousiasme certain, une confiance en la capacité de la poésie de changer le monde : comme Bifo, Palandri affirme la nécessité de déclamer des vers, de les faire bondir des livres et de les faire résonner dans les places, dans les rues, sous les arcades bolonaises. Alice è il diavolo Outre ses productions personnelles, Franco Berardi prend également part aux expériences du collectif A/traverso à l'origine de Radio Alice 452. En 1976, le collectif publie Alice è il diavolo. Sulla strada di Majakovskij : testi per una pratica di comunicazione sovversiva453, faisant ainsi cohabiter les deux figures patronnes du Movimento bolonais, Alice et Maïakovski. Ce recueil de textes, pour l'essentiel des transcriptions d'émissions radiophoniques de l'émettrice bolonaise, présente les mêmes caractéristiques essentielles que les ouvrages cités précédemment, à commencer par son caractère collectif : Essere comprensibili, essere invisibili, senza troppi buchi, e poi, lo garantiamo, QUESTO LIBRO È VERAMENTE COLLETTIVO, non ci sono trucchi : una bella storia a margine che racconta, descrive, riesuma, consuntiva454. On retrouve sensiblement les mêmes réflexions sur l'art et l'engagement, sur le contexte social de l'Italie des années 1970 avec une attention accrue sur les problématiques des besoins, du désir, du travail : 451 Ibid., p. 55.
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Apprendre et pratiquer sa créativité : des dispositifs en actes inspirés de la démarche des arbres de connaissances
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Voix plurielles 13.1 (2016) 113 Apprendre et pratiquer sa créativité : des dispositifs en actes inspirés de la démarche des arbres de connaissances Aude Ramseier et Sabine Oppliger, Haute école pédagogique du canton de Vaud (Suisse) Introduction Comment dans le cadre scolaire est-il possible d’encourager une culture de la créativité chez les élèves ? Le terme de créativité associé à l’apprentissage est fréquemment utilisé, mais il ne suffit pas de vouloir « avoir » des élèves dits créatifs dans sa classe pour que les processus attendus se déroulent. De même, connaître les éléments qui peuvent stimuler la créativité chez les élèves en termes d’attitudes ou les obstacles qui peuvent la freiner ne garantit pas toujours son développement. Dans cet article, nous allons présenter des dispositifs et des démarches inédits qui ont été conduits dans le but de favoriser l’émergence de la créativité personnelle et collective des élèves dans une communauté d’apprenants (Brown et Campione). 1. Contextualisation Une recherche-action a été mise sur pied par l’une d’entre nous dans sa classe d’élèves de neuf à onze ans dans le canton de Vaud en Suisse en vue d’expérimenter une démarche inspirée des arbres de connaissances (Authier et Lévy) durant l’année scolaire 2011-2012. Nous allons tout d’abord exposer les principaux axes qui constituent cette démarche puis les dispositifs utilisés, leur nature ainsi que les présupposés sur lesquels ils se fondent. Le contexte dans lequel s’inscrit notre démarche repose principalement sur les principes de base des communautés d’apprenants tels que décrits par Ann L. Brown et Joseph Campione. Il y est relevé que pour créer un climat propice aux apprentissages souhaités, la posture de l’enseignant soit celle d’un accompagnateur de projets, ayant pour objectif de faciliter la mise en œuvre de travaux collectifs ou individuels, explicités et mis en lien avec des destinataires clairement identifiés. Les élèves sont placés dans une posture d’auteurs et d’acteurs de projets collectifs et personnels et co-créent ainsi la culture de la classe. Ce contexte scolaire spécifique s’inspire également de la démarche des arbres de connaissances (abrégée dès lors ADC) telle que proposée par Michel Authier et Pierre Lévy. La philosophie intrinsèque à cette dernière stipule que « Chacun sait, on ne sait jamais, tout le savoir est dans l’humanité » (87). Elle insuffle des valeurs de reconnaissance et de partage des compétences personnelles et sociales. La démarche proposée pour les démontrer passe par la production de brevets qui représentent l’image des savoirs : « Ils reconnaissent des savoirs Voix plurielles 13.1 (2016) 114 élémentaires, modulaires clairement identifiés. Ils sont attribués aux individus après passation d’une épreuve » (100). L’usage d’un médiateur graphique sous forme d’arbre est utilisé pour mettre en évidence les différents brevets émis par les membres de la communauté au fur et à mesure de leur élaboration et ainsi faciliter l’acquisition de blasons qui représentent l’image de l’individu : « Il s’agit d’une représentation graphique des savoirs que l’individu possède y compris ceux qui sont nés de l’expérience, les « savoirs de vie » qui ne sont pas habituellement reconnus par des diplômes. Le blason évolue naturellement au fur et à mesure que l’individu acquiert ou parvient à faire reconnaître de nouveaux savoirs ». (100). Chacun a la possibilité à tout moment de rendre visible et partager une connaissance qui lui est propre (expertise) et également d’en acquérir de nouvelles proposées par les autres à travers ce dispositif médiateur. En quoi ce dispositif des ADC a-t-il inspiré cette communauté d’apprenants et comment l’enseignante l’a-t-elle transposé dans sa classe ? Tout d’abord, elle a reformulé l’énoncé de base des ADC en l’adaptant à ce contexte d’apprentissage spécifique : « Chacun sait, personne ne sait tout, tout le savoir est dans la communauté ». Ensuite, la démarche d’Authier et Lévy a été adaptée à l’âge des enfants et aux contenus enseignés dans le canton de Vaud en Suisse. L’enseignante a conservé comme objectif la reconnaissance de savoirs globaux, le dépôt de brevets et l’arbre médiateur. Les élèves ont été stimulés tout au long de l’année scolaire à produire et présenter des projets sous la forme de textes, d’exposés et de jeux qui les autorisaient à exister pour une compétence à laquelle ils donnaient une valeur personnelle. L’évaluation des productions se faisait à travers les critères des compétences visées par le plan d’études en vigueur. Un dispositif médiateur sous la forme d’un arbre papier a été présenté aux élèves comme étant un espace dans lequel ils allaient pouvoir faire apparaitre les savoirs dont ils étaient porteurs et ainsi se faire reconnaitre auprès de leurs pairs par ces connaissances variées (cf. Illustrations 1 et 2). Il leur a été expliqué que le but principal des productions qu’ils seraient amenés à effectuer en classe consistait en des projets de communication dont ils seraient les principaux destinataires. Selon le langage proposé par Authier et Lévy, il s’agit de déposer des brevets qui témoignent de leur expertise personnelle et qui font sens pour eux (cf. Illustration 4). Ils ont été invités à se mettre dans une posture d’auteur et d’illustrateur de leurs réalisations. Ces éléments faisaient intégralement partie des consignes explicites. Afin de mener à bien ces dépôts de brevets, l’importance des destinataires a été soulignée, des procédures d’écriture ont été institutionnalisées et différentes explicitations ont été apportées au sujet : Voix plurielles 13.1 (2016) - 115 Des modalités plurielles de production individuelle et collective : il s’agissait de produire, seul ou à plusieurs, des brevets sous la forme de jeux, d’exposés libres et de devoirs principalement en mathématique et en français. - De l’entrainement à fabriquer ces brevets par désétayage progressif (Laveault), tout au long de l’année, le temps d’intégrer la complexité de la démarche de production. Tout d’abord, les enfants étaient invités à produire tous le même jeu (un mot croisé), puis ils ont pu en produire différents genres selon leur imagination et leur envie tout en respectant les critères formels propres à la production de projets (présence d’un titre, de consignes claires, etc.) - Des critères d’évaluation qui reposent sur les éléments formels sus-mentionnés. - Des moments d’échange et de régulation des brevets. Des dispositifs de production de travaux et d'évaluation formative ont été engagés pour favoriser l'émergence de la créativité des élèves. Dans la partie suivante, nous allons présenter ces dispositifs ainsi que les présupposés sur lesquels ils se fondent. 1.1 Les dispositifs en vigueur Trois dispositifs de nature différente ont été élaborés dans la classe. Premièrement, un médiateur sous la forme d’arbre qui sert à mettre en évidence les règles, les valeurs, les rôles et les productions de la communauté. Ce médiateur n’a pas seulement pour but de faire apparaître les savoirs. Afin de favoriser un climat de classe riche en interactions positives et une dynamique du groupe favorable aux apprentissages, l’enseignante a choisi d’expliciter le plus possible les normes en vigueur avec les élèves pour assurer l’équité, le sentiment de confiance et de sécurité nécessaires à la posture d’apprenant, et d’autant plus à celles d’auteur et de créateur. Deuxièmement, des dispositifs d’évaluation formative qui permettent de réguler les apprentissages sociaux et cognitifs. Ils existent sous la forme d’un conseil de classe hebdomadaire et de différents dispositifs d’auto-évaluation et de co-évaluation des productions. Ils permettent de réguler l’acquisition des normes en vigueur ainsi que les apprentissages. Troisièmement, le dispositif d’apprentissages sous la forme de brevets qui encourage à la reconnaissance et au partage des compétences spécifiques à chacun. Il donne également un but et un sens aux apprentissages des élèves, incite à les canaliser dans des projets concrets avec des destinataires bien définis favorisant ainsi leur motivation. Ces dispositifs orientent l’enseignement et la posture de l’enseignant. Les intentions qui en découlent s’appuient sur des valeurs de partage qui sont en résonnance avec celles promues par la pédagogie coopérative (Howden et Kopiec). « Tapies dans l'ombre de nos enthousiasmes, de nos doutes ou de nos remises en question : les valeurs. Celles-ci méritent notre attention, sur le plan individuel et collectif, car elles fondent et orientent tant la conduite Voix plurielles 13.1 (2016) 116 de l'enseignant dans sa classe, jour après jour, que le système éducatif dans son ensemble (les finalités de l’éducation). Ingrédients à la base de nos croyances et de nos représentations, inspiratrices des nombreuses décisions à prendre, les valeurs sont le moteur de l'engagement professionnel ». Cette citation extraite de l’article « Les valeurs au cœur de la profession enseignante ! » rédigé en 2013 par Eric Walther, mais non publié, propose une définition qui convient particulièrement à ce contexte. Ces valeurs sont les suivantes : la confiance, l’ouverture envers les autres, l’entraide, l’égalité, le droit à l’erreur, la solidarité, l’engagement, le plaisir et la synergie sont clairement formulés et travaillés avec les élèves durant toute l’année scolaire (cf. Illustration 3). Elles sont particulièrement importantes au même titre que les règles de classe pour la constitution de la norme, car elles préservent et maintiennent un climat propice aux apprentissages coopératifs et aux relations entre les apprenants. Autant les règles de classe sont-elles explicitées pour réguler les comportements et les interactions et maintenir ainsi l’équité de traitement au sein du groupe, autant l’explicitation des valeurs garantit-elle à l’individu une équité dans le traitement qui touche à l’ensemble de ses actions. 1. 2. Question de recherche et hypothèse Dans le cadre de cet article, nous allons questionner comment et en quoi cet environnement est porteur de conditions propices à la créativité. Les trois dispositifs décrits précédemment visent à placer les élèves dans une position d’auteurs-acteurs qui nous amène à poser la question de recherche suivante : en quoi les dispositifs mis en actes proposent des conditions-cadres favorables à l’émergence de la créativité des élèves ? Nous faisons l’hypothèse que des dispositifs de cette nature encouragent le développement d’une créativité partagée dans la classe. 2. Cadre conceptuel pour la mise en œuvre des dispositifs Dans ce contexte d’apprentissage spécifique, la créativité est abordée comme un concept transversal qui se déploie de manière individuelle ou collective au travers du dispositif médiateur de l’ADC, des brevets ainsi que des dispositifs d’évaluation formative et qui peut être définie comme étant « la capacité à réaliser une production qui soit à la fois nouvelle et adaptée au contexte dans lequel elle se manifeste » (Lubart 10). Les recherches de Todd Lubart et plus particulièrement son approche d’une créativité dite multivariée mettent en évidence que la créativité n’est pas seulement une caractéristique cognitive, mais le produit de l’interaction entre des composantes conatives (conduites conscientes en termes d’efforts qui se réfèrent au traits de la personnalité, mais aussi à la Voix plurielles 13.1 (2016) 117 motivation), des composantes affectives (émotions, préférences, intérêt) et des composantes relatives à l’environnement. C’est « la combinaison de ces multiples facteurs qui influencera le potentiel créatif de chaque individu, son développement, ainsi que son expression » (Besançon et Lubart 4). Une production créative nécessite non seulement une succession d’actes cognitifs, tant dans les pensées que dans les actions, mais est également dépendante de plusieurs facteurs qui entrent en interaction, notamment « la pensée divergente-exploratoire qui se réfère à la capacité à rechercher des idées, à puiser dans son environnement et ses connaissances des éléments en lien avec la tâche » (4). Cette citation rappelle que l’environnement a un rôle à jouer dans la mise en condition d’une posture de recherche chez l’apprenant. Liée aux facteurs conatifs, la motivation est essentielle pour qu’un sujet s’engage dans une tâche ou un projet qui a du sens pour lui. Elle peut être intrinsèque et prendre naissance dans les besoins de l’individu (par exemple, la curiosité, l’envie d’exprimer son individualité) ou extrinsèque car générée par des incitations extérieures, comme la reconnaissance sociale par des pairs (Amabile). L’influence suscitée par l’environnement sur les productions créatives est indubitable, il peut être « source de stimulation sociale, d’opportunités et de leviers, mais aussi de freins, d’inhibition et de contraintes pour la créativité » (Besançon et Lubart, 4). Les facteurs émotionnels (l’attention portée aux émotions vécues, leur intensité) sont également présents en orientant ou en nuançant la pensée associative lors de la recherche d’idées, notamment, comme le relèvent ces auteurs, l’idiosyncrasie qu’ils définissent comme la réaction, le tempérament et la manière de se comporter propre à chaque individu face aux influences de l’environnement (physique et personnel). En lien avec cette composante affective, Mihaly Csikszentmihalyi met en évidence les besoins d’une personne créative en prenant en compte deux dimensions : - Une première externe liée au besoin de l’autre, du dehors qui permet de répondre aux besoins de retour, de résistance, de se reconnaître, de s’identifier, de se situer par rapport à son environnement et de s’inscrire dans un contexte. - Une seconde qui a trait au besoin de pouvoir se concentrer sur soi-même avec notamment le fait de se confronter avec sa propre conception du monde, d’inscrire le nouveau dans son propre univers, de sentir ses envies et ses besoins, de se sentir dans un processus, de pouvoir essayer, échouer, réessayer et de trouver de nouvelles configurations à l’intérieur de son univers. Notre analyse montrera comment les dispositifs prévus dans la démarche inspirée des ADC permettent la prise en compte de ces doubles besoins en favorisant l’émergence des Voix plurielles 13.1 (2016) 118 processus créatifs chez les élèves. Nous reviendrons aussi de manière plus détaillée sur les quatre facettes dont Pasi Sahlberg envisage la notion de créativité. La première touche au fait de concevoir une production nouvelle qui a du sens dans tous les contextes d’activité. La deuxième postule que la créativité peut être à la fois individuelle et collective, en pensée comme en action. La troisième relève que le processus créatif devrait engager des applications délibérées de savoirs, de compétences et d’attitudes antérieurs. La quatrième rappelle que chacun possède quelque capacité créative dans un domaine. 3. Aspects méthodologiques et recueil de données Durant l’année scolaire 2011-2012, dans une classe du canton de Vaud composée de vingt-six élèves de neuf à onze ans, une recherche-action mise sur pied en vue d’observer le processus d’évolution de la démarche inspirée des ADC (Authier et Lévy) a fait l’objet de différentes observations. Pour cet article, nous avons choisi de focaliser notre attention sur les conditions-cadre de la démarche en les analysant du point de vue de la créativité. Nous avons privilégié une approche de type qualitatif qui porte sur l’analyse des intentions liées aux dispositifs en place et sur des bilans auto-évaluatifs (cf. Illustrations 5 et 6) réalisés en fin d’année scolaire par les élèves. Ces données ont été traitées en regard de notre questionnement et de notre cadre théorique. 4. Analyse 4.1 Un contexte motivant, tremplin pour les processus créatifs. Les dispositifs de la démarche des ADC remplissent plusieurs préalables mentionnés par des auteurs (Csikszentmihalyi ; Jaoui ; Lubart ; Sahlberg), comme nécessaires à l’émergence de la créativité tels que légitimer le droit à l’erreur (valeur clairement explicitée), encourager la pluralité des réponses dans le contexte scolaire, favoriser un va-et-vient continu entre l’individu qui crée et le groupe en prenant en compte ses besoins internes et externes et pratiquer de nombreuses rétroactions positives pour établir un espace sécurisant (dans le cadre du conseil de classe). Les conditions mises en place engagent les élèves dans une démarche concrète et adaptée : l’instauration progressive d’un cadre précis avec des normes sécurise les élèves et leur permet d’expérimenter et de s’exprimer en autorisant par exemple l’entraide, le droit à l’erreur, les attitudes de non-jugement, l’engagement, l’ouverture aux autres, etc. L’enseignant leur attribue une posture d’auteur-acteur propre à la communauté Voix plurielles 13.1 (2016) 119 d’apprenants et propose des modalités d’enseignement/apprentissage qui sortent de l’ordinaire. Durant toute l’année scolaire, ils sont sollicités pour concevoir et réaliser des brevets sous forme de projets de communication. Les consignes invitent les élèves à puiser dans leur imagination et leur expérience pour réaliser des travaux qui engagent leurs connaissances en les réactualisant. Les projets ainsi conçus témoignent des savoirs acquis et des processus d’apprentissage, mais aussi de manière plus large de leur intégration en tant qu’élèves au sein de la communauté-classe qui répondent aux objectifs fixés par le plan d’étude en vigueur. En lien avec les quatre facettes relevées par Sahlberg, la question du sens est un incontournable dans la démarche des ADC, tant dans ses fondements que dans ses visées. Les apprenants s’engagent dans des tâches qui requièrent des processus créatifs, mais qui répondent aussi à des intérêts de connaissances et de partage. Les élèves choisissent le sujet, la manière de l’élaborer, de le présenter et personnalisent sa forme finale. Le potentiel créatif des élèves est activé de manière individuelle et/ou collectivement par des travaux en duos ou triades et ceci tant dans des productions qu’au niveau des pensées par le partage de valeurs communes. Lorsqu’ils créent des jeux avec leurs pairs, ils mettent en commun des savoirs, des moyens et des ressources qui se complexifient et s’étayent mutuellement, mais aussi le fait de « co-créer » concrétise les valeurs promues dans le dispositif. Le fait de mettre en pratique ces valeurs de façon répétée génère une mise en confiance durable et propice à l’émergence et au développement des processus créatifs chez les élèves. La dimension affective liée aux besoins de sécurité et de reconnaissance est dépendante de l’explicitation et de la clarification du cadre en termes de règles, de valeurs, d’intentions. En lien avec les doubles besoins présents dans l’acte créatif mis en évidence par Csikszentmihalyi, la métaphore de l’arbre de connaissances comme dispositif médiateur prend tout son sens, par exemple quand les élèves font l’expérience de l’intégration progressive des attentes du cadre, explicitées et co-construites qui protègent les débuts en créativité souvent fragiles et les aident à surmonter les résistances dues aux jugements de valeurs. 4.2 La posture de l’enseignant dans l’émergence de la créativité des élèves Les conditions favorables sous-entendent également que l’enseignant assume la responsabilité de jouer un rôle actif dans le développement de la créativité de ses élèves par sa posture d’ouverture à cette dimension et qu’il l’intègre de manière intentionnelle et transversale dans son enseignement. Ceci se traduit par l’explicitation de valeurs, le partage des savoirs et des apprentissages, la co-construction d’une culture de classe et de situations d’apprentissages qui permettent aux élèves de faire l’expérience d’une créativité partagée (Berthod). En variant Voix plurielles 13.1 (2016) 120 les moyens, les supports, les finalités, ils sont capables de mieux utiliser leurs potentialités et améliorent le niveau de leurs créations. Elaborer des jeux, par exemple, est un apprentissage. Au fur à mesure de l’année scolaire, sont intégrés les procédés, les techniques, l’utilisation des matériaux, la confiance dans la valeur du travail et des échanges pour co-construire, mais également dans ses propres aptitudes à persévérer, à inventer et donner forme. La créativité des élèves est aussi stimulée par un certain nombre de contraintes identifiées et connues par la classe par exemple les critères qui composent l’auto ou coévaluation formative. Cependant, les activités pour concevoir les projets de communication sont basées sur des consignes suffisamment ouvertes dans leur formulation pour permettre aux élèves de donner des réponses personnelles et originales. Nous allons maintenant les analyser au travers de leurs productions. 4.3 Une imagination matérialisée en brevets avec la mise en « jeux » et en « je » des apprentissages La diversité des thématiques choisies par la communauté d’apprenants témoigne d’une créativité en actes. Elle traite de sujets variés tels que : • La nature et les phénomènes naturels : « L’arbre magique », les pivoines, les étangs, les geysers, les fossiles, … • Les animaux de compagnie et leur environnement : le lapin, la tortue, l’aquarium, … • La santé, la diététique et les arts de la table : « Mon assiette », plusieurs recettes de cuisines, etc. • La musique : style de musique « boogie woogie », présentation d’un compositeur, d’un instrument, d’un morceau de musique, etc. • La famille et des événements existentiels : la maladie, la mort, etc. • Des livres de jeux et de nombreux exercices en français de type « phrases à trous », « phrases codées », « mots cachés », « mots croisés » ou en mathématiques. La mise en œuvre et la forme finale des projets de communication indiquent que les élèves se sont approprié la démarche. Ils se sont clairement identifiés sur la page de couverture comme auteur ou illustrateur de leurs histoires. Ils ont utilisé le « je » pour présenter un intérêt de connaissance. Ils ont soigné leur mise en page en y ajoutant des éléments esthétiques. Leurs brevets sont enrichis de dessins originaux ou d’images judicieusement choisies. La multiplicité des réponses apportées par les élèves est aussi un bon indice, en termes de créativité, de la pertinence des types de sollicitation faites par l’enseignante et suscitées par la démarche inspirée des ADC. A partir d’une même consigne « réaliser un projet de communication en français », les thématiques sont non seulement très riches mais aussi traitées Voix plurielles 13.1 (2016) 121 sous des formes différentes : histoires inventées, dossiers écrits, exposés oraux. La pluralité des moyens choisis par les élèves témoigne d’une singularité assumée et capable de « diverger » pour élaborer un projet qui fait sens pour soi, avec aussi des résultats intéressants en termes de fluidité1 et d’élaboration2 ». Les élèves développent une relation vivante et dynamique aux apprentissages et aux savoirs. Ils mentionnent qu’ils comportent des pièges, des dangers. De plus, les règles qui accompagnent les jeux, rendent attentifs leurs camarades aux nombreux risques possibles présents, mais les créateurs stimulent leurs pairs à se lancer dans l’épreuve à l’aide de renforcements positifs tels que : « Vas-y ! », « Courage… ». Quand ils rattachent les brevets aux valeurs, ils tissent un lien explicite entre le processus et le produit, entre l’expérience du processus et du produit, à savoir sa mise en acte dans la réalisation des brevets. Conclusion et perspectives Nous nous demandions en quoi les dispositifs de la démarche inspirée des ADC favorisent l’émergence de la créativité chez les élèves. Les bilans auto-évaluatifs laissent apparaître que les valeurs proposées par le dispositif médiateur ont été investies par les élèves et rattachées à des objets de productions concrets. Les apprenants ont fait l’expérience d’une culture de créativité partagée tout au long de l’année qui institutionnalise cette dimension en l’intégrant dans un processus continu qui la légitime comme objet d’apprentissage. Les élèves font l’expérience que la créativité n’est ni mystérieuse, ni magique et que l’environnement, par le biais de l’enseignant, a un rôle actif à jouer pour la promouvoir et la développer dans sa classe. Les dispositifs mis en place issus de la philosophie insufflée par les ADC reformulés par l’enseignante « chacun sait, personne ne sait tout, tout le savoir est dans la communauté » instaurent des valeurs et une culture de reconnaissance par la création d’espaces qui la rendent possible. Ces éléments officialisés, dès le début de l’année scolaire, par le dispositif médiateur « arbre », rendent légitime leur expression au travers des différents brevets. Les conditionscadres prennent en considération les temps d’intégration et de régulation et permettent aux élèves de développer un sentiment d’appartenance au groupe en s’appropriant des éléments liés au prescrit et d’autres issus des interactions qui font de cet espace le lieu unique de l’expérience. Les apprenants sont encouragés à endosser la posture d’auteur-acteur et à mener des projets qui font sens pour eux. L’enseignant par sa posture d’accompagnateur facilitateur est le garant de la conduite de cette démarche motivante qui éveille des intérêts, offre des espaces d’expérimentation en Voix plurielles 13.1 (2016) 122 lien direct avec cette culture de reconnaissance. Les dispositifs de l’arbre médiateur mobilisent les potentialités individuelles au service du collectif et de la co-création d’une culture de la reconnaissance des compétences des élèves en classe. Bibliographie Amabile, Teresa M. Creativity in Context : Update to « the Social Psychology of Creativity ». Boulder, CO : Westview, 1996. Authier, Michel et Pierre Lévy. Les arbres de connaissances. Paris : La Découverte, 1996. Besançon, Maud et Todd Lubart. « Favoriser la créativité des élèves par une approche multivariée ». Educateur 2 (2014) : 3-5. Berthod, Eric. « La créativité, une compétence en partage ». Résonnances. Mensuel de l’école valaisanne 8 (2014) : 6-7. Brown, Ann L. et Joseph Campione. « Concevoir une communauté de jeunes élèves, leçons théoriques et pratiques ». Revue française de pédagogie 111 (1995) : 11-33. Csikszentmihalyi, Mihaly. La créativité : psychologie de la découverte et de l'invention. Paris : Laffont, 2006. Howden, Jim et Marguerite Kopiec. Structurer le succès : un calendrier d’implantation de la coopération. Montréal/Toronto : La Chenelière/McGraw-Hill, 2006. Jaoui, Hubert. La créativité. Le trésor inconnu. Paris : Morisset, 1995. Laveault, Dany. « De la ‘régulation’ au ‘réglage’ : élaboration d’un modèle d’autoévaluation des apprentissages ». Régulation des apprentissages en situation scolaire et en formation. Dir. Linda Allal et Lucie Mottier Lopez. Bruxelles : De Boeck, 2007. 207234. Lubart, Todd. Psychologie de la créativité. Paris : Colin, 2003. Sahlberg, Pasi. « Creativity and Innovation through Lifelong Learning ». Lifelong Learning in Europe 16 (2011). _____ NOTES 1 Aptitude à produire un grand nombre d’idée ou de réponses à partir d’une question donnée et qui est associée à la pensée dite divergente. 2 Aptitude à développer, structurer, préciser, affiner une réponse au moment où sont considérées les idées trouvées et sélectionnées ainsi que les meilleures solutions selon différents critères de choix qui apparaissent dans la phase de la pensée dite convergente. Voix plurielles 13.1 (2016) 123 Annexes : Illustrations du dispositif de l’arbre de connaissances réalisé dans une classe, volée 2011-2012 (photos A. Ramseier) Illustrations 1 et 2 : Evolution du dispositif de l’arbre de connaissances de la rentrée scolaire en août 2011 à juin 2012. Illustration 3 : Les valeurs coopératives (Howden et Kopiec) constitutives du dispositif médiateur de l’arbre de connaissances Voix plurielles 13.1 (2016) 124 Illustration 4 : Les expertises des élèves apparaissent sous forme de brevets dans le dispositif des arbres de connaissances Illustrations 5 et 6 : Bilans auto-évaluatifs réalisés par les élèves sur leur apprentissage en lien avec les valeurs explicitées sur le dispositif médiateur arbre.
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French-Science-Pile
Open Science
Various open science
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Mission de gouvernance des risques de l'institution chargée de gérer ou de coordonner la gestion des risques majeurs à l'échelon central/fédéral (2016)
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French
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Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 14. AU SERVICE DES CITOYENS L’accessibilité financière de l’éducation 14.9. Dépenses privées en matière d’enseignement (2013) Préprimaire % 100 Primaire, secondaire et post-secondaire (non supérieur) Enseignement supérieur 90 80 70 60 50 40 30 20 10 L CR I LT U RU S CO N US A CH L AU S IS R NZ L CA N GB R PR T HU N IT A M EX LV A ES OC P DE NL D SV K CZ E IR L FR A TU R PO L ES T DE U SV N BE L SW E IS L DN K AU T NO R FI N LU X JP KO R 0 Source : oCde (2016), Regards sur l’éducation 2016, tableaux b3.1 et C2.3. 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540408 14.10. Taux de scolarisation aux âges de 3 et 4 ans dans des structures d’éducation de la petite enfance et d’enseignement primaire (2014) Taux d’inscription à l’âge de 3 ans dans des structures d’éducation de la petite enfance Taux d’inscription à l’âge de 4 ans dans des structures d’éducation de la petite enfance et d’enseignement primaire % 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 A CR I LT U RU S BR IR L GR C M EX US A TU R CH E E N SV K PO L CH L FI FR CZ A BE L IS R DN K ES P NO R DE U SW E IT A KO R NZ L LV A GB R SV N JP N NL D HU N PR OC T DE AU T AU S LU X 0 Source : oCde (2016), Regards sur l’éducation 2016, tableau C2.1. 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540427 14.11. Taux de première inscription dans l’enseignement supérieur (2014) Taux de première inscription dans l’enseignement supérieur En excluant les étudiants internationaux Moins de 25 ans uniquement (hors étudiants internationaux) % 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 L LT U CO X EX N LU M IT A HU FI N US A IS R AU T CZ E OC DE BE L PR T DE U SW E GB R SV K R CH E JP N PO L ES P SV N NL D L IS NO K CH L DN R TU NZ L 0 Source : Regards sur l’éducation 2016, graphique C3.1 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540446 Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 243 14. AU SERVICE DES CITOYENS Accès aux services juridiques et judiciaires l’accès égal de tous aux services juridiques et judiciaires est une condition essentielle pour un bon fonctionnement de l’état de droit. Cette égalité d’accès est également évoquée dans le cadre des objectifs de développement durable fixés à l’horizon 2030 (odd n° 16). les enquêtes en population offrent des indications utiles pour évaluer les obstacles qui entravent l’accès aux démarches juridiques et à l’assistance correspondante. toutefois, il faut interpréter les données qui suivent avec prudence, car elles se fondent sur un nombre limité de répondants, peuvent subir l’influence de biais culturels et n’ont été recueillies qu’en zone urbaine. Pour mieux étudier l’accès des citoyens à la justice, il serait important d’améliorer la qualité des données qui sont tirées des enquêtes en population et des sources administratives. les données disponibles semblent montrer que les besoins juridiques non satisfaits peuvent être coûteux pour les individus, les collectivités et les économies. un tiers environ des personnes interrogées dans le cadre de l’enquête en population générale réalisée par le World Justice Project en 2016 ont indiqué avoir été parties à un différend au cours des 12 mois précédents. Parmi ces individus, 38 % environ, en moyenne de la zone oCde, avaient pris des mesures pour régler ce différend. au sein de la zone oCde, les habitants qui s’étaient abstenus de prendre de telles mesures ont justifié leur choix, le plus souvent, en indiquant que le différend s’était rapidement réglé sans heurts, ou qu’ils n’en avaient pas ressenti le besoin. environ 26 % d’entre eux ont indiqué s’être abstenus en raison d’un manque de confiance à l’égard des mécanismes de règlement des litiges de leur pays. environ 23 % ont invoqué l’existence d’entraves, y compris d’ordre financier, et un manque d’information et de connaissances sur les procédures. toujours d’après la même enquête en population générale, environ 31 % des individus de la zone oCde avaient bénéficié d’une assistance et de conseils juridiques pour régler leur différend. Cette assistance pouvait être assurée par un large éventail d’intervenants, y compris des avocats ou des services officiels, entre autres. le simple fait d’avoir bénéficié d’une assistance juridique ne signifiait pas nécessairement que les personnes interrogées avaient pris des mesures pour régler leurs différends. dans la plupart des pays de l’oCde, les habitants qui s’étaient abstenus de solliciter une assistance juridique ont justifié leur choix, le plus souvent, en indiquant qu’ils n’avaient pas jugé que des conseils juridiques étaient nécessaires. environ 16 % des personnes interrogées au sein de la zone oCde ont invoqué des entraves d’ordre financier. C’est en allemagne et en turquie que ce pourcentage était le plus bas, et en Corée qu’il était le plus élevé. Par ailleurs, environ 12 % des personnes interrogées au sein de la zone oCde ont invoqué leur méconnaissance des interlocuteurs à contacter pour obtenir une assistance juridique. enfin, certains répondants ont indiqué ne pas avoir cherché à obtenir une assistance juridique parce qu’ils ne faisaient pas confiance aux avocats, parce qu’ils les considéraient comme inefficaces ou pour d’autres raisons encore. Méthodologie et définitions les données proviennent d’une enquête en population générale du World Justice Project (2016). les réponses ont été fournies par un échantillon probabiliste de 1 000 répondants des trois plus grandes villes de chaque pays. les répondants (qui comptaient autant de femmes que d’hommes) ont été interrogés en face à face ainsi qu’en ligne. les intervalles de confiance de 95% sont fourni dans les H. les différends englobent tous les différends qu’un ménage ou un individu a pu avoir avec des parents, des individus, d’autres ménages ou les autorités au cours des 12 derniers mois. il peut s’agir de différends fonciers, de différends administratifs, de cas de divorce/ séparation, de violence domestique, de questions d’héritage, de différends au travail ou de tout autre type de différend. Ces différends peuvent relever de la compétence des tribunaux, de la police, des autorités ou de tout autre organisme. l’assistance juridique correspond aux conseils juridiques ou à l’aide obtenus auprès d’une autre personne ou d’un autre groupe, tel qu’un responsable local, un avocat ou un membre du personnel parajuridique. les entraves correspondent aux cas dans lesquels les personnes interrogées ont indiqué n’avoir pas pris de mesure parce qu’elles ne savaient pas quoi faire ni où s’adresser, parce que la personne susceptible de les aider était trop loin, parce que le coût aurait été trop élevé ou parce que les tribunaux étaient trop lents. les personnes interrogées avaient le choix entre les réponses suivantes : « Je ne pensais pas avoir besoin de conseils », « Je ne pensais pas avoir les moyens financiers d’obtenir des conseils juridiques » et « Je ne savais pas à qui m’adresser ». les données relatives au thème « accès à la justice et aux mécanismes alternatifs de règlement des litiges (indicateurs composites) » sont disponibles en ligne (voir annexe F). Pour en savoir plus sur la méthodologie sous-jacente, veuillez consulter le site http://worldjusticeproject.org/ rule-of-law-index. Pour en savoir plus World Justice Project (2016), The Rule of Law Index 2016, World Justice Project, Washington. Notes relatives aux graphiques les notes relatives aux graphiques sont accessibles dans les statslinks. la France émet des réserves sur l’utilisation d’une seule source, le World Justice Project, qui repose sur un nombre limité de répondants et ne permet pas de refléter la situation objective en matière d’accès et de qualité des services judiciaires. 244 Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 14. AU SERVICE DES CITOYENS Accès aux services juridiques et judiciaires 14.13. Pourcentage d’individus ayant pris des mesures et ayant bénéficié d’une assistance juridique pour résoudre un différend au cours des 12 derniers mois (2016) Pourcentage d’individus ayant pris toute mesure pour résoudre un différend % 70 Pourcentage d’individus ayant bénéficié d’une assistance juridique 60 50 40 30 20 10 F ZA S RU D IN L CO N N JP CH R KO R A FR TU U L PO DE L BE DE OC E SW R P ES GB S AU D NL US A 0 Source : World Justice Project, enquête en population générale 2016. 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540465 14.14. Motifs invoqués par les individus n’ayant pas pris de mesure pour résoudre un différend (2016) % 70 Différend résolu sans heurts / pas de nécessité de prendre des mesures Défiance à l’égard du mécanisme Entrave Autres 60 50 40 30 20 10 F ZA S RU D IN L CO N CH S AU L BE D NL A R KO FR U DE A US E SW P ES DE R GB OC N JP L PO TU R 0 Source : World Justice Project, enquête en population générale 2016. 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540484 14.15. Trois principaux motifs invoqués par les individus n’ayant pas cherché à bénéficier d’une assistance juridique pour résoudre un différend (2016) Pas nécessaire % 90 Pas abordable Méconnaissance des interlocuteurs à contacter 80 70 60 50 40 30 20 10 F ZA S RU D IN L N CH CO R KO D NL A FR L P ES BE S AU R GB DE OC U DE A US N E SW JP L PO TU R 0 Source : World Justice Project, enquête en population générale 2016. 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540503 Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 245 14. AU SERVICE DES CITOYENS La réactivité des systèmes de santé face aux besoins des patients dans tous les pays de l’oCde, la prestation de soins de santé réactifs et axés sur le patient occupe une place grandissante au sein des politiques de santé. les pays sont de plus en plus nombreux à recueillir des éléments de mesure de l’expérience déclarée par les patients (Prem) et des résultats déclarés par les patients (Prom), dans le cadre d’une transition consistant à se détourner d’un modèle de gestion des ressources sanitaires axé sur le volume en faveur d’un modèle axé sur la valeur (institut canadien d’information sur la santé, 2015). de longs délais d’attente suscitent un mécontentement chez les patients, parce qu’ils repoussent à plus tard les bénéfices attendus des traitements, et parce qu’ils prolongent la douleur et l’incapacité liées à la maladie. de tels délais peuvent aussi avoir des répercussions sanitaires néfastes, lorsqu’une prise en charge pourtant nécessaire tarde à être assurée. les délais d’attente résultent d’une interaction complexe entre l’offre et la demande de services de santé. la demande est déterminée par l’état de santé de la population, les préférences des patients et l’étendue de la prise en charge des frais de santé par la collectivité. de longs délais d’attente peuvent résulter d’une pénurie de personnel médical ou infirmier dans l’ensemble du pays ou dans certaines régions, mais ils peuvent aussi parfois s’expliquer par une mauvaise organisation du travail ne permettant pas de faire face aux demandes de soins (siciliani et al., 2013). dans le cadre de l’enquête internationale 2016 du Commonwealth Fund sur les politiques de santé, qui a été menée auprès de 11 pays de l’oCde, moins du tiers des habitants de l’australie, de la nouvelle-Zélande et des Paysbas interrogés indiquaient ne pas avoir pu obtenir un rendezvous le jour même ou le lendemain avec leur médecin habituel ou un autre médecin la dernière fois qu’ils avaient eu besoin de consulter. Cette proportion passait à au moins la moitié des personnes interrogées au Canada et en norvège. or, des délais d’attente plus longs peuvent conduire à une aggravation des problèmes de santé des patients et aboutir à un recours accru aux urgences hospitalières, ce qui entraîne des coûts plus élevés. au Canada, plus de 40 % des personnes interrogées déclaraient avoir recouru aux urgences hospitalières au cours des deux années précédentes, ce qui correspondait au pourcentage le plus élevé des onze pays couverts par l’enquête. indiquaient avoir dû attendre plus de deux mois avant d’obtenir un tel rendez-vous. Cette proportion s’échelonnait entre moins de 10 % en allemagne, aux États-unis, en France, aux Paysbas et en suisse et environ 30 % au Canada et en norvège. or, de tels délais d’attente peuvent retarder l’établissement d’un diagnostic précis et le début du traitement requis. s’agissant de la communication et de l’interaction avec leur médecin habituel, les patients se déclaraient généralement satisfaits. moins de 20 % des personnes interrogées en australie, en nouvelle-Zélande, aux Pays-bas, au royaume-uni et en suisse déclaraient que leur médecin habituel ne leur consacrait pas suffisamment de temps pendant les consultations ou ne leur fournissait pas d’explications formulées dans un langage clair et compréhensible. Cette proportion était légèrement plus élevée en France et en suède, et elle augmente depuis 2013. diverses caractéristiques et politiques des systèmes de santé peuvent influer sur le comportement des médecins à l’égard des patients et, donc, sur l’expérience vécue par ces derniers ; on peut notamment citer l’organisation de la prestation des soins de santé, les modes de rémunération et les politiques médico-juridiques visant à protéger les intérêts des patients. Méthodologie et définitions les données proviennent de l’enquête internationale 2016 du Commonwealth Fund sur les politiques de santé, qui couvre 11 pays de l’oCde. les données ont été recueillies dans chaque pays au moyen d’enquêtes téléphoniques réalisées du mois de mars au mois de juin 2016 auprès d’échantillons représentatifs à l’échelon national de personnes âgées d’au moins 18 ans. les échantillons nationaux comptaient, en définitive, entre 1 000 et 7 124 individus. les données ont été pondérées afin d’assurer des résultats finals représentatifs de la population adulte de chaque pays. Pour en savoir plus il existe également d’importantes différences au niveau des délais d’attente selon le revenu. dans tous les pays de l’oCde (sauf les Pays-bas), les personnes dotées de faibles revenus faisaient état de délais d’attente plus longs pour accéder aux soins dont elles avaient besoin. en allemagne et au Canada, plus de 35 % des personnes interrogées dotées de faibles revenus déclaraient avoir dû attendre au moins six jours pour obtenir un rendez-vous chez le médecin la dernière fois qu’elles avaient eu besoin de soins, alors que le pourcentage était de 27 % pour les personnes dotées de revenus plus élevés. iCis – institut canadien d’information sur la santé (2015), « les temps d’attente pour les interventions prioritaires au Canada », ottawa. Pour les rendez-vous chez les médecins spécialistes, les délais d’attente variaient là encore beaucoup selon les pays. en moyenne, 14 % des habitants de la zone oCde interrogés Notes relatives aux graphiques 246 Commonwealth Fund (2016), « 2016 international Health Policy survey in eleven Countries », novembre 2016. siciliani, l., m. borowitz et V. moran (2013), Waiting Time Policies in the Health Sector: What Works?, Études de l’oCde sur les politiques de santé, oCde, Paris. les notes relatives aux graphiques sont accessibles dans les statslinks. Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 14. AU SERVICE DES CITOYENS La réactivité des systèmes de santé face aux besoins des patients 14.17. Pourcentage de patients n’ayant pas obtenu de rendez-vous le jour même ou le lendemain auprès de leur médecin habituel ou d’un autre médecin la dernière fois qu’ils ont eu besoin de consulter (2016) 14.18. Pourcentage de patients ayant dû attendre au moins six jours pour obtenir un rendez-vous auprès de leur médecin habituel ou d’un autre médecin la dernière fois qu’ils ont eu besoin de consulter, en fonction du niveau de revenu (2016) CAN Ensemble des autres adultes Adultes à faibles revenus NOR DEU DEU CAN FRA USA CHE SWE USA NOR GBR FRA SWE GBR OCDE OCDE AUS CHE NZL AUS NLD 0 10 20 30 40 50 60 % Source : enquête internationale 2016 du Commonwealth Fund sur les politiques de santé. 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540522 14.19. Pourcentage de patients ayant dû attendre au moins deux mois pour obtenir un rendez-vous chez un médecin spécialiste (2016) NZL NLD 0 FRA NOR SWE NZL NOR GBR CAN SWE USA OCDE OCDE AUS DEU CHE GBR NLD CHE USA NZL FRA AUS DEU NLD 10 20 30 40 50 60 Source : enquête internationale 2016 du Commonwealth Fund sur les politiques de santé 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540560 Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 20 30 40 50 60 14.20. Pourcentage de patients considérant que, souvent, leur médecin habituel leur consacre trop peu de temps ou ne leur fournit pas d’explications claires (2016) CAN 0 10 Source : enquête internationale 2016 du Commonwealth Fund sur les politiques de santé 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540541 0 5 10 15 20 25 30 35 40 Source : enquête internationale 2016 du Commonwealth Fund sur les politiques de santé 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540579 247 14. AU SERVICE DES CITOYENS La réactivité des systèmes éducatifs face aux besoins des élèves dans tous les pays de l’oCde, les systèmes éducatifs s’emploient à répondre aux besoins d’élèves présentant des profils divers sur le plan du milieu social, du niveau de revenus et des conditions de vie. la réactivité des systèmes éducatifs peut s’apprécier à trois échelons différents : au niveau du système éducatif, à celui des établissements d’enseignement et à celui des enseignants. au niveau du système éducatif, l’indice de pénurie de supports pédagogiques fournit des renseignements précieux. l’édition 2015 de l’enquête Pisa montre l’existence d’une association négative entre le manque de supports pédagogiques ou leur qualité médiocre et les résultats des élèves. au sein de la zone oCde, les pénuries de supports pédagogiques sont particulièrement importantes en Hongrie, en italie et au Japon, et c’est en australie, au Canada et en islande qu’elles sont les plus faibles. toutefois, il est à noter que ces données sont issues d’enquêtes d’opinion, et que l’appréciation de ce qui constitue une pénurie peut varier selon les pays. en moyenne, la pénurie de supports pédagogiques pèse davantage sur la possibilité d’assurer une instruction dans les établissements des zones socioéconomiquement défavorisées et rurales que dans les établissements des zones favorisées et urbaines. au niveau des établissements d’enseignement, les programmes d’aide aux devoirs proposés dans les locaux de l’établissement peuvent offrir aux élèves des conditions leur permettant de finir leurs devoirs et de gagner en confiance, surtout s’agissant des élèves qui, sinon, ne participeraient pas à des programmes se déroulant après le temps scolaire. dans le cadre de l’édition 2015 de l’enquête Pisa, on a demandé pour la première fois aux chefs d’établissement si l’école mettait à la disposition de ses élèves une salle où faire leurs devoirs et des membres du personnel pouvant leur assurer une aide en la matière. sur l’ensemble de la zone oCde, environ trois élèves sont quatre sont inscrits dans des établissements où une salle est mise à leur disposition pour qu’ils fassent leurs devoirs, et trois élèves sur cinq fréquentent des établissements où des membres du personnel sont à leur disposition pour leur assurer une aide en la matière. au Japon, au luxembourg et au royaume-uni, au moins 95 % des élèves de 15 ans ont accès à une salle pour faire leurs devoirs à l’école ; en Grèce, au mexique et en république slovaque, ce pourcentage est inférieur à 50 %. au danemark, aux États-unis, au luxembourg, au royaume-uni et en suède, plus de 90 % des élèves fréquentent des établissements où des membres du personnel sont à leur disposition pour les aider à faire leurs devoirs ; en autriche et en italie, c’est le cas de moins de 30 % des élèves. au niveau des enseignants, des méthodes pédagogiques et d’instruction pertinentes jouent un rôle crucial s’agissant d’intéresser les élèves à divers thèmes, d’améliorer leurs résultats et d’enrichir leurs acquis. en moyenne de la zone oCde, 45 % des élèves indiquent que leurs enseignants adaptent de nombreuses leçons, ou toutes les leçons ou presque, aux besoins et aux connaissances de la classe, et 48 % indiquent que leurs enseignants fournissent une aide individuelle aux 248 élèves qui ont du mal à comprendre un sujet ou une tâche. les méthodes d’enseignement qui s’adaptent à l’élève sont positivement corrélées aux résultats scolaires en sciences. Méthodologie et définitions Pour tous les graphiques, les données sont tirées de l’enquête Pisa (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) 2015, dans le cadre de laquelle ont été évaluées les compétences des jeunes de 15 ans en compréhension de l’écrit, en mathématiques et en sciences (l’accent étant mis sur les sciences) dans 72 pays et économies. 14.21. l’indice de pénurie de supports pédagogiques a été calculé à partir des réponses fournies par les chefs d’établissement, qui étaient invités à indiquer dans quelle mesure (pas du tout, très peu, dans une certaine mesure ou beaucoup) la capacité de leur établissement à assurer une instruction était entravée par une pénurie ou une inadaptation au niveau des infrastructures physiques telles que les bâtiments, les systèmes de chauffage et de refroidissement et les espaces d’enseignement ; et au niveau des supports pédagogiques tels que les manuels, les équipements de laboratoire, les supports d’instruction et les ordinateurs. une valeur positive signifie que les chefs d’établissement considèrent plus que la moyenne oCde que la capacité à assurer une instruction est entravée par une pénurie de supports pédagogiques ; une valeur négative signifie que les chefs d’établissement considèrent moins que la moyenne oCde que la capacité à assurer une instruction est entravée par une telle pénurie. 14.22. le profil socioéconomique est mesuré par l’indice Pisa de statut économique, social et culturel (sesC). 14.23. porte sur les méthodes d’instruction signalées par les élèves comme étant suivies par leurs enseignants pour de nombreuses leçons ou pour toutes les leçons ou presque. Pour en savoir plus oCde (2016), Résultats du PISA 2015 (Volume II) : Politiques et pratiques pour des établissements performants (version française à paraître), Éditions oCde, Paris, http://dx.doi. org/10.1787/9789264267510-en. Notes relatives aux graphiques les notes relatives aux graphiques sont accessibles dans les statslinks. informations sur les données concernant israël : http://dx.doi.org/ 10.1787/888932315602. Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 14. AU SERVICE DES CITOYENS La réactivité des systèmes éducatifs face aux besoins des élèves 14.21 Indice de pénurie de supports pédagogiques (2015) Index score 1 0.8 0.6 0.4 0.2 0 -0.2 -0.4 -0.6 -0.8 A CO L CR I ID N LT U PE R RO M RU S BR JP N IT A HU N M EX IS R KO R GR C IR L ES P TU R BE L PR T FI N DE U SV K ES T GB OC R DE NO R NZ L CZ E LU X FR A LV A NL D DN K AU T SW E SV N CH L US A PO L CH E AU S IS L CA N -1 Source : oCde, base de données Pisa 2015, tableau ii.6.2. 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540598 14.22. Pourcentage d’élèves inscrits dans des établissements où les formes suivantes d’aide aux devoirs sont fournies (2015) Salle(s) où les élèves peuvent faire leurs devoirs % 100 Membres du personnel pouvant assurer une aide aux devoirs 90 80 70 60 50 40 30 20 10 A CO L CR I ID N LT U PE R RO M RU S BR LU X GB R JP N DN K NZ L FR A SW E CA N AU S BE L IR L SV N NL D PR T KO R US A CH E CH L PO L IS OC L DE DE U ES P LV A AU T NO R HU N ES T CZ E IT A FI N IS R TU R M EX SV K GR C 0 Source : oCde, base de données Pisa 2015, tableau ii.2.46 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540617 14.23. Pourcentage d’élèves indiquant que leur enseignant adapte son enseignement pour de nombreuses leçons de sciences, ou pour toutes les leçons de sciences ou presque (2015) L’enseignant adapte la leçon aux besoins et aux connaissances de ma classe L’enseignant fournit une aide individuelle quand un élève a du mal à comprendre un sujet ou une tâche % 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 A CO L CR I LT U RU S BR IS R LU X FI N CZ E SV K NL D ES T BE L IT A HU N DE U IR L AU T IS L PO L FR A PR T LV A DN K M EX JP N CH L CA N NZ L NO R AU S KO R TU R ES P US A SW E GB R CH OC E DE GR C 0 Source : oCde, base de données Pisa 2015, tableau ii.2.22 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540636 Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 249 14. AU SERVICE DES CITOYENS La rapidité des services de justice civile l’inaptitude à assurer une réponse efficace et rapide aux besoins d’ordre juridique peut restreindre l’accès aux ressources économiques, renforcer le piège de la pauvreté et empêcher les individus d’exprimer leur potentiel. la réduction de la durée des procédures judiciaires civiles constitue une priorité pour un certain nombre de pays de l’oCde et de pays partenaires. les dernières données disponibles montrent que le délai estimatif de traitement des affaires civiles, commerciales, administratives et autres affaires non pénales s’est globalement amélioré entre 2010 et 2014 dans les pays de l’oCde/ue couverts par l’évaluation de la CePeJ. toutefois, on constate d’importants écarts selon les pays. en 2014, ce délai estimatif était inférieur à 40 jours au danemark et en estonie, alors qu’en 2012 (dernière année disponible pour ces deux pays), il était supérieur à deux ans au Portugal et supérieur à 18 mois en Grèce. si l’on s’intéresse uniquement aux procédures contentieuses civiles et commerciales telles que, par exemple, les procédures contentieuses en matière de divorce ou en matière contractuelle, des progrès ont également été réalisés sur le plan de la durée des procédures, mais d’importants écarts persistent entre les pays. en 2014, la durée estimative des procédures était inférieure à 6 mois en autriche, au danemark, en estonie, en Hongrie, au luxembourg, aux Pays-bas, en république tchèque et en suède, alors qu’elle était supérieure à un an en italie et en république slovaque. Pour les affaires administratives, la durée estimative des procédures est généralement plus longue que pour les procédures contentieuses civiles et commerciales. Cette durée varie entre moins de 4 mois en slovénie et en suède, plus de 4 ans en Grèce et plus de 2 ans et demi en italie, pour la dernière année disponible. d’importants progrès ont été réalisés s’agissant de la durée des procédures d’ordre administratif en lettonie et au royaume-uni, tandis que la situation s’est dégradée en république slovaque. Pour offrir des services réactifs en matière de justice civile, il faut non seulement assurer des procédures rapides, mais aussi fournir un éventail de services adaptés aux besoins et aux capacités des individus, y compris en recourant à des dispositifs spéciaux pour les justiciables les plus vulnérables, mais aussi en proposant toute une gamme de mécanismes alternatifs de règlement des litiges. la durée des procédures correspond au délai estimatif nécessaire pour qu’une affaire soit tranchée par le tribunal, c’est-à-dire au délai nécessaire au tribunal pour arriver à une décision en première instance. on obtient cette durée en divisant le nombre d’affaires pendantes à la fin de la période considérée par le nombre d’affaires résolues au cours de la même période, puis en le multipliant par 365. Cet indicateur ne correspond pas à une estimation du délai moyen de traitement d’une affaire, mais à une moyenne théorique de la durée d’une affaire au sein d’un système spécifique. s’agissant d’interpréter les comparaisons internationales, la prudence s’impose, car il peut y avoir des différences, d’un pays à l’autre, au niveau des affaires et des types de tribunaux couverts, ainsi qu’au niveau de la collecte ou de la classification des données. de plus, pour établir avec exactitude la durée moyenne des procédures, il serait nécessaire de disposer de données relatives à la durée effective des affaires issues de systèmes informatiques fonctionnels. des notes détaillées relatives aux graphiques peuvent être consultées en ligne : http://ec.europa.eu/ justice/effective-justice/scoreboard/index_en.htm. dans le cadre de la méthodologie de la CePeJ, on englobe toutes les affaires civiles et commerciales, contentieuses comme non contentieuses, les affaires non contentieuses portant sur l’inscription à des registres (y compris les registres fonciers et les registres du commerce), les autres affaires non contentieuses, les affaires de droit administratif et les autres affaires non pénales. le contentieux civil (et commercial) correspond aux litiges opposant des parties – au sujet d’un contrat, par exemple. en revanche, les affaires civiles (et commerciales) non contentieuses portent sur des procédures – injonctions de paiement, par exemple – non contestées. les affaires commerciales relèvent de la compétence de juridictions commerciales spécialisées dans certains pays, et des juridictions ordinaires (civiles) dans d’autres. le contentieux d’ordre administratif oppose les citoyens aux autorités locales, régionales ou nationales. les affaires administratives relèvent de la compétence de juridictions administratives spécialisées dans certains pays, et des juridictions ordinaires (civiles) dans d’autres. Pour en savoir plus Méthodologie et définitions les chiffres sont tirés du tableau de bord 2016 de la justice dans l’union européenne et se fondent sur l’évaluation des systèmes judiciaires réalisée par la CePeJ en 2016. les pays sont rangés par ordre croissant de délai nécessaire, en nombre de jours, lors de la dernière année disponible. CePeJ (2016), « systèmes judiciaires européens : efficacité et qualité de la justice », Études de la CePeJ n° 23, http://www. coe.int/T/dghl/cooperation/cepej/default_fr.asp Notes relatives aux graphiques les notes relatives aux graphiques sont accessibles dans les statslinks. 250 Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 14. AU SERVICE DES CITOYENS La rapidité des services de justice civile 14.24. Délai de résolution des affaires civiles, commerciales, administratives et autres (première instance, en nombre de jours, 2010-14) 2010 2012 2014 Jours 1 200 1 000 800 600 400 200 M RO LT U T PR C A FR GR P ES IT A K SV LV A E N FI CZ N SV E D NL SW N HU L T AU PO T ES DN K 0 Source : tableau de bord de la justice dans l’ue, d’après l’étude n° 23 de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (CePeJ, 2016). 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540655 14.25. Délai de résolution des affaires contentieuses civiles et commerciales (première instance, en nombre de jours, 2010-14) 2010 2012 2014 Jours 700 600 500 400 300 200 100 M RO LT U IT A K SV A FR T C GR PR P ES FI N LV A N SV L DE PO U K E CZ DN E N HU SW D T AU NL T ES LU X 0 Source : tableau de bord de la justice dans l’ue, d’après l’étude n° 23 de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (CePeJ, 2016). 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540674 14.26. Délai de résolution des affaires administratives (première instance, en nombre de jours, 2010-14) 2010 2012 2014 Jours 2 500 2 000 1 500 1 000 500 M RO LT U C GR L BE IT A E K SV CZ P ES U DE N FI A D NL FR R GB LV A N HU T ES X L PO LU E SW SV N 0 Source : tableau de bord de la justice dans l’ue, d’après l’étude n° 23 de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (CePeJ, 2016). 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540693 Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 251 14. AU SERVICE DES CITOYENS La qualité des soins de santé Chaque jour, les prestataires de soins de santé doivent prendre en charge un large éventail de problèmes de santé, parmi lesquels les maladies infectieuses, les maladies chroniques et les maladies et blessures mettant en jeu la vie du patient. les maladies cardiovasculaires (y compris les crises cardiaques et les accidents vasculaires cérébraux, entre autres) et les différents types de cancers font partie des problèmes de santé les plus répandus et les plus graves au sein de la zone oCde. il s’agit, de loin, des deux principales causes de décès dans les pays de l’oCde : les différentes maladies cardiovasculaires et les différents types de cancers sont à l’origine, respectivement, d’environ le tiers et le quart de l’ensemble des décès. s’il est peut-être possible de réduire la survenance des problèmes cardiovasculaires et des cancers en redoublant d’efforts de prévention (dans le cadre de la lutte contre la consommation de tabac, par exemple), les systèmes de santé ont un rôle majeur à jouer dans la détection précoce de ces problèmes de santé et dans la fourniture rapide de traitements efficaces quand ces problèmes sont diagnostiqués. un bon indicateur de la qualité des soins aigus pour les patients ayant fait un infarctus aigu du myocarde (iam, crise cardiaque) est le taux de létalité calculé 30 jours après leur admission à l’hôpital. Cet indicateur reflète l’efficacité des processus de prise en charge (par exemple : transport rapide des patients à hôpital) et des interventions médicales et il varie d’un minimum d’environ 4% en australie et en suède, à un maximum de 28% au mexique. dans la plupart des pays (à l’exception du mexique), le taux de létalité des iam a baissé sur la dernière décennie, ce qui reflète une amélioration de la prise en charge par les services d’urgence en amont de l’arrivée du patient à l’hôpital et immédiatement après son admission. après le cancer du poumon, le cancer du sein représente la principale cause de décès liés au cancer pour les femmes. il est possible de réduire la mortalité liée au cancer du sein grâce à un diagnostic plus précoce et à des traitements plus efficaces. la proportion de femmes âgées de 50 à 69 ans ayant fait l’objet d’un dépistage au cours des deux à trois dernières années a progressé dans la plupart des pays de l’oCde sur la dernière décennie, mais elle reste faible dans plusieurs pays. en 2014, plus de 80 % des femmes de 50 à 69 ans avaient bénéficié d’un dépistage récent au danemark, aux États-unis, en Finlande, au Portugal et en slovénie. au mexique et en république slovaque, cette proportion était inférieure à 30 %, mais cela représentait néanmoins un net progrès en l’espace d’une décennie. la Corée et le Japon avaient eu aussi enregistré une augmentation substantielle de la proportion de femmes ayant bénéficié d’un dépistage du cancer du sein. sur la même période, les taux de mortalité du cancer du sein ont baissé d’environ 3.5 p.p., en moyenne, dans la zone oCde. Cette baisse reflète les progrès réalisés sur le plan de la détection et du traitement précoces de ce cancer. la mortalité a fortement diminué en nouvelle-Zélande, aux Pays-bas et en république tchèque, avec une baisse de plus de 6.6 p.p. en l’espace d’une décennie. le danemark faisait lui aussi état d’une baisse 252 considérable, mais continuait d’enregistrer en 2014 le taux de mortalité le plus élevé. À l’inverse, en Corée, au Japon et en turquie, les taux de mortalité du cancer du sein avaient augmenté en l’espace d’une décennie, mais continuaient de figurer parmi les taux les moins élevés de la zone oCde. Méthodologie et définitions le taux de létalité des iam correspond au pourcentage de patients âgés d’au moins 45 ans qui décèdent dans les 30 jours qui suivent leur hospitalisation pour un iam. les taux fondés sur des données d’admission font référence aux décès intervenus dans l’hôpital où le patient a été initialement admis. les admissions aboutissant à un transfert du patient ont été exclues pour tous les pays sauf l’australie, la belgique, le danemark, la Hongrie, l’irlande, israël, le Japon, le luxembourg, le mexique, les Pays-bas, la république slovaque et la suède. on aboutit généralement, avec cette exclusion, à un taux plus élevé que pour les pays qui n’excluent pas les transferts. les taux sont standardisés par rapport à l’âge et au sexe en fonction de la population des habitants de la zone oCde de 2010 âgés d’au moins 45 ans admis à l’hôpital pour un iam. les taux de dépistage se fondent sur des enquêtes ou des données relatives à des programmes, ce qui peut influer sur les résultats. les données d’enquête peuvent être faussées par un biais de mémorisation. les données relatives à des programmes sont souvent calculées dans une logique de suivi des programmes nationaux de dépistage, et des différences au niveau de la population cible et de la fréquence des dépistages peuvent entraîner des écarts selon les pays au niveau de la couverture du dépistage. les taux de mortalité proviennent de données brutes qui ont été extraites de la base de données de l’oms sur la mortalité en juin 2016 ; ils ont été standardisés par rapport à l’âge en fonction de la population de la zone oCde de 2010, afin de supprimer les écarts liés aux différences de structure d’âge entre les pays et au fil du temps. des données supplémentaires sur les taux de mortalité sont accessibles en ligne (voir annexe F). Notes relatives aux graphiques les notes relatives aux graphiques sont accessibles dans les statslinks. informations sur les données concernant israël : http://dx.doi. org/10.1787/888932315602. Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 14. AU SERVICE DES CITOYENS La qualité des soins de santé 14.27 Taux de mortalité trente jours après une admission à l’hôpital pour un IAM (2003, 2008 et 2013 ou années les plus proches) 2003 2008 2013 Taux pour 100 admissions standardisé par rapport à l’âge et au sexe, patients d’au moins 45 ans 35 30 25 20 15 10 5 NO R IS L LU X FR A SV K BE L NL D GB R CH E ES P OC DE KO R DE U PR T AU T ES T JP N HU N CH L LV A M EX E R IS CZ L N CA NZ L N FI IR A K DN IT A US AU S SW E PO L SV N 0 Source : statistiques de l’oCde sur la santé 2015, 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540712 14.28. Taux de dépistage (par mammographie) pour les femmes de 50 à 69 ans (2004 et 2014, ou années les plus proches) 2004 2014 PRT DNK FIN SVN USA ESP NLD IRL BEL GBR NOR NZL ISR KOR OCDE CZE LUX ISL EST POL ITA DEU AUS FRA GRC CAN CHE HUN JPN LVA CHL TUR SVK MEX 14.29. Taux de mortalité du cancer du sein chez les femmes (2004 et 2014 ou années les plus proches) 2004 2014 DNK IRL ISR SVN BEL HUN ISL NLD SVK GBR DEU LUX FRA NZL LVA ITA AUT GRC EST POL CAN OCDE CHE USA CZE PRT AUS NOR SWE FIN ESP CHL JPN MEX TUR KOR ZAF RUS LTU CRI COL BRA LTU 0 0 20 40 60 80 100 % de femmes ayant bénéficié d’un dépistage Sources : statistiques de l’oCde sur la santé 2015 et base de données de l’organisation mondiale de la santé, 2016, 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540731 Panorama des administrations Publiques 2017 © oCde 2017 10 20 30 40 50 Taux standardisé par rapport à l’âge pour 100 000 femmes Sources : oeCd Health statistics 2015 and World Health organization database, 2016 12 http://dx.doi.org/10.1787/888933540750 253 14. AU SERVICE DES CITOYENS Les résultats des élèves et l’équité en matière éducative les systèmes éducatifs des pays de l’oCde et des pays partenaires visent avant tout à doter les enfants et les adultes des connaissances et des compétences nécessaires pour exprimer pleinement leur potentiel. en 2015, au sein de la zone oCde, ce sont le Canada, l’estonie, la Finlande et le Japon qui ont obtenu les meilleurs scores en sciences : dans tous ces pays, les élèves ont obtenu un score moyen supérieur à 525 points, contre un score moyen de 493 pour la zone oCde. Ce sont le Chili, le mexique et la turquie qui ont obtenu les scores moyens les plus faibles de la zone oCde. sur la dernière décennie, le score Pisa moyen en sciences a nettement progressé en israël, en norvège et au Portugal, avec un gain de plus de 10 points ; c’est en Finlande, en Hongrie et en république slovaque qu’il s’est, à l’inverse, le plus dégradé, avec une chute supérieure à 25 points. au-delà des moyennes nationales, les pourcentages d’élèves parvenant aux divers niveaux de compétence indiquent dans quelle mesure les pays réussissent à redresser les résultats des élèves en difficulté tout en œuvrant en faveur de l’excellence. il est particulièrement important d’atteindre au moins le niveau 2 de compétence, qui est considéré comme un socle minimum que tous les jeunes adultes devraient maîtriser pour avoir la possibilité de se perfectionner par la suite et pour pouvoir participer pleinement à la vie sociale, économique et civique de sociétés modernes à l’heure de la mondialisation. en matière de sciences, les élèves qui atteignent le niveau 2 peuvent s’appuyer sur leur maîtrise des connaissances et procédures scientifiques de base pour trouver une explication appropriée, interpréter des données et repérer la question à laquelle une expérience simple vise à répondre. au Canada, en estonie, en Finlande et au Japon, la proportion d’élèves très performants (niveaux 5 et 6) est plus forte que la proportion d’élèves peu performants (résultats inférieurs au niveau 2). aux niveaux 5 et 6, les élèves manient des idées ou des concepts scientifiques abstraits pour expliquer des phénomènes, évènements et processus plus complexes et non familiers impliquant de multiples liens de causalité. au mexique et en turquie, on trouve peu d’élèves très performants, alors que la proportion d’élèves peu performants est très élevée, puisque plus de 40 % des élèves n’atteignent pas le niveau 2. les élèves socioéconomiquement défavorisés sont près de trois fois plus susceptibles que les élèves favorisés de ne pas acquérir le socle minimum de compétences en sciences (oCde, 2016). en moyenne de la zone oCde, 13 % de l’écart de performance en sciences peut s’expliquer par le statut 254 socioéconomique des élèves. Ce statut explique moins de 10 % de l’écart de performance en sciences dans des pays comme le Canada, l’estonie, l’islande, l’italie, la lettonie, la norvège et la turquie ; en revanche, il explique plus de 18 % de l’écart de performance en France, en Hongrie et au luxembourg. sur la dernière décennie, la part de l’écart de performance en sciences due au statut socioéconomique des élèves a nettement baissé au Chili, aux États-unis et en turquie ; à l’inverse, elle a augmenté particulièrement nettement en Corée et en république tchèque. outre les effets du statut socioéconomique, on constate de nets écarts entre les scores des élèves immigrés et non immigrés dans certains pays membres de l’oCde. Méthodologie et définitions Pour tous les graphiques, les données proviennent de l’édition 2015 de l’enquête Pisa (Programme international pour le suivi des acquis des élèves), qui a permis d’évaluer les compétences des élèves de 15 ans de 72 pays et économies. dans le cadre de l’enquête Pisa, on estime le statut socioéconomique d’un élève en calculant un indice de statut économique, social et culturel (sesC) à partir de plusieurs variables liées au milieu familial de l’élève : niveau éducatif des parents, profession des parents, équipements du foyer considérés comme indicatifs du niveau d’aisance matérielle et nombre de livres et d’autres ressources éducatives présents dans le domicile. les élèves favorisés et défavorisés sont ceux qui se classent dans la tranche supérieure/inférieure des 25 % des valeurs de l’indice sesC pour leur pays. le graphique relatif à l’écart de performance en sciences entre les élèves immigrés et non immigrés pour 2015 est disponible en ligne (voir annexe F). seuls les pays comportant un pourcentage d’élèves immigrés supérieur à 6.25 % y figurent. Pour en savoir plus oCde (2016), Résultats du PISA 2015 (Volume I) : L’excellence et l’équité dans l’éducation, Éditions oCde, Paris. http://dx.doi. org/10.1787/9789264266490-en. Notes relatives aux graphiques les notes relatives aux graphiques sont accessibles dans les statslinks. informations sur les données concernant israël : http://dx.doi.org/ 10.1787/888932315602.
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Figure 19 - multi-tier framework criteria. Source: ESMAP 24 D'ici 2025, les crit ères et objectifs suivants sont pris en compte dans l'évaluation de l'accès universel : • Le taux de couverture (disponibilité) et de connexion : o toutes les localités et zones habitées disposeront d'un service d'électricité ; o tous les citoyens et toutes les entreprises devront être connectés au réseau ou à une source d'énergie décentralisée. Cependant, certaines personnes peuvent ne pas vouloir être connectées ou ne pas avoir les moyens de l'être. C'est pourquoi, l'objectif est de 100% avec un seuil minimum de 90%. Dans tous les cas, le budget d'investissements est calculé sur un objectif de 100% de taux de connexion et englobent des fonds pour aider les familles les plus pauvres à se connecter, avec une attention particulière accordée aux femmes dans le cadre de la promotion de l'égalité des sexes ; • La capacité disponible : choix technologiques en fonction des besoins (densité en population et taille de la localité). Niveaux S1 à S4 en fonction des besoins (Figure 20) ; • Le temps de service (durée) : permettre le développement économique, un service 24h/24h dans les zones densément peuplées et un minimum de 8 heures de service pour les petits villages isolés restants est envisagé. • La fiabilité et la qualité : pour anticiper l'augmentation de la consommation d'énergie, une capacité de réserve d'au moins 20% doit être systématiquement prévue. De plus, une limite maximale d'interruptions de service sera prise en compte ; • L'accessibilité et le comptage prépayé : mise en oeuvre d'un système de tarification unique quelquesoit la technologie sur l'ensemble du pays. L'utilisation universelle du comptage prépayé afin de donner la possibilité aux consommateurs d'utiliser l'énergie en fonction de leurs besoins et de leur budget, tout en permettant aux concessionnaires de gérer efficacement une infrastructure dispersée ; • La sécurité : des règles et spécifications de sécurité seront définies et appliquées. Figure 20 - Proposed technologies by type of settlement. Source: ASER 25 6.3.4 Objectifs 2025 En 2025, comme le montre le graphique ci-dessous (Figure 21), 14.234 villages et plus d'un million de clients ruraux devraient être électrifiés principalement par l'extension du réseau (soit 12.556 villages et 95% des clients ruraux), mais aussi par des mini/micro réseaux hybrides ou 100% solaire décentralisés (soit 1.215 villages et 4% de clients ruraux). L'électrification rurale, qui nécessitera une capacité de production supplémentaire de 180 MW d'ici 2025, proviendra de la « ramification » de la dorsale de moyenne tension et d'un vaste programme de mini-réseaux dans la partie est du pays. Les systèmes solaires individuels (SHS) ne concerneront que 464 localités (moins de 1% des clients ruraux). Figure 21- number of rural settlements versus type of technology. Sources : Gesto & Earth Institute Analysis Entre 2015 et 2025, il est prévu d'avoir 773.900 clients supplémentaires connectés au réseau, dont 516.800 dans la période 2018-2025. Au total, la consommation rurale est estimée à 608 GWh en 2025, ce qui correspond à une demande crête de 181 MW. La figure 22 suivante montre l'évolution de la consommation crête entre 2015 et 2025 en fonction de la technologie utilisée. L'interconnexion du système nécessitera une augmentation de capacité de 150 MW. Il est également notable que la part de SHS sera réduite car la plupart des foyers utilisant les systèmes individuels seront connectés soit au réseau central soit aux mini-réseaux. Enfin, les mini-réseaux 100% diesel auront disparu en 2025. Figure 22- rural consumption load by type of technology (Sources : Gesto & Earth Institute Analysis) 26 La modélisation de l'extension du réseau à l'horizon 2025 (Figure 23) illustre bien la densification des lignes MT (Moyenne Tension) à l'ouest du pays, zone plus densément peuplée et à plus forte demande, en même temps qu'une prédominance des mini-réseaux à l'est. Figure 23 - Network expansion model results and HV network. Sources : Gesto & Earth Institute Analysis En 2025, toute la population rurale devrait être électrifiée, soit 1 million de clients et 9,6 millions de personnes. La Figure 24 illustre la répartition des villages électrifiés en fonction des technologies : 88% par le réseau, 9% par les mini-réseaux (3% en hybride et 6% en 100% solaire), 3% par SHS. Figure 24- rural settlements by electrification technology in 2025 (Sources : Gesto & Earth Institute Analysis) 27 6.3.5 Le Programme National d'Electrification Rurale (PNER) Le taux d'électrification dans les zones urbaines au Sénégal était de 90% en 2016 et de 32% seulement dans les zones rurales (26% en 2012). La lenteur de la progression est en partie due aux résultats décevants du PASER. C'est la raison pour laquelle, face aux défis de l'électrification rurale, notamment en termes de cohésion sociale et de développement équilibré du pays, le gouvernement a voulu accélérer l'électrification rurale par le lancement d'un programme d'urgence dont le plan d'investissement jusqu'en 2025 est inclus dans le PSE. C'est ainsi qu'est né le PNER (Programme national d'électrification rurale) qui a été approuvé et adopté en 2015. Le PNER chapeaute le PNUER et les concessions d'électrification rurale. Le Programme National d'Urgence d'Electrification Rurale (PNUER) définit une stratégie pour l'électrification rurale, avec une étape intermédiaire qui visait un taux d'accès national à l'électricité de 60% en 2017 et un taux minimum de 30% par département. Il est structuré en trois parties (Figure 25) : la conclusion des programmes précédents, un plan d'urgence pour la période 2015-2017 (PNUER) et un plan supplémentaire pour l'accès universel jusqu'en 2025 (« Programme Complémentaire pour l'Accès Universel à l'horizon 2025 ») qui prévoit également l'attribution des 4 concessions restantes. Figure 25- Programs and Projects of the PNER. Source: ASER 6.3.5.1 Le Programme national d'urgence d'électrification rurale Le PNUER visait à électrifier une population totale de 4,7 millions de personnes (494 000 clients), soit une augmentation du taux d'électrification vérifié de 32% à la fin de 2016 à 60%. A l'issue du PNUER, 51% des villages ruraux devaient être électrifiés et tous les départements devaient atteindre un taux d'électrification de 30%. La figure 26 résume bien les objectifs du PNUER. Figure 26- PNUER connection targets. Source - ASER 28 Il est à noter également que le PNUER a été partiellement mis en oeuvre par le Programme d'Urgence de Développement Communautaire (PUDC) en cours, ainsi que par d'autres initiatives coordonnées par l'ASER et financées par l'État. L'investissement dans PNUER a été estimé à 146 milliards de FCFA (222,6 millions d'euros). Au début de 2016, environ 100 milliards de FCFA (152,4 millions d'euros) avaient été financés, et 45 milliards de FCFA manquaient encore à l'appel. Le défi de mise en oeuvre était grand car, même avec un financement disponible, atteindre 60% des clients ruraux revenait à doubler le taux d'électrification rurale. En 2018, on a pu constater que le PUDC avait eu un impact significatif dans la mise en oeuvre du programme, grâce notamment à son mode de fonctionnement « par projets ». 6.3.5.2 Le programme complémentaire pour l'accès universel en 2025 Le programme complémentaire pour l'accès universel est structuré suivant 6 axes : (i) Les systèmes décentralisés : la priorité est accordée aux mini-réseaux solaires et hybrides, ainsi qu'à la réhabilitation des réseaux existants ; (ii) L'extension MV : principalement par la « ramification » de la dorsale MV du PNUER ; (iii) La distribution : pour atteindre de nouveaux villages et pour densifier ceux déjà électrifiés ; (iv) L'installation interne : étendre le comptage prépayé à tous les clients et en encourager l'adoption grâce au financement de la connexion au réseau et des installations domestiques ; (v) Le genre : octroyer un soutien spécial à « l'électrification des femmes » et promouvoir l'égalité des chances à travers l'électrification rurale ; (vi) La compétence, la coordination et l'ingénierie : intégrer l'exigence de préparation nécessaire à la mise en oeuvre d'un programme aussi ambitieux. 6.3.5.3 Les besoins en financement Le plan complémentaire pour l'accès universel exige un financement total de 375 milliards de FCFA (571,6 millions d'euros), soit une moyenne de 47 milliards de FCFA par an (71,7 millions d'euros/an). Cela revient presque à conserver le niveau du PNUER qui était de 49 milliards FCFA par an. La figure 27 présente une synthèse des investissements par axe et par initiative. Figure 27- Proposed Axis and initiatives for the Additional Plan. Sources : Gesto & Earth Institute Analysis 29 La figure 28 suivante montre la répartition de l'investissement prévu entre 2018 et 2025 en fonction de la technologie, dont 320 milliards de FCFA (487,8 millions d'euros) d'investissements dans l'extension du réseau. Bien qu'aucun nouveau mini-réseau à base de diesel n'est prévu, le plan d'investissement envisage de renforcer les réseaux BT (à basse tension) de plusieurs mini-réseaux 100% diesel existants, dans la perspective de l'interconnexion future au réseau. Figure 28- investments needs for the period 2018-2025 by type of technology (Source : Gesto Analysis) 6.3.6 Le plan de réorganisation du marché de l'électricité Le marché de l'électricité sénégalais est composé de : (i) unités industrielles privées ; ii) la SENELEC ; et (iii) des producteurs d'électricité indépendants (IPP). Dans le segment des produits gazeux, il a été décidé de réserver l'utilisation du gaz provenant du soussol national à la SENELEC et aux producteurs indépendants. Ces producteurs indépendants sont tenus, quelle que soit la source d'énergie qu'ils produisent, de fournir l'intégralité de leur production à la SENELEC. Pour accomplir les tâches qui lui sont assignées dans le cadre du contrat de concession et du cahier des charges, la SENELEC lance des appels d'offres, conformément aux dispositions d'un arrêté du ministre chargé de recevoir les offres de sociétés ayant une activité ou envisageant d'avoir une activité de production d'énergie électrique. Le CRSE surveille le respect des principes d'équité, de transparence et de non-discrimination dans les procédures de recours, les appels d'offres et la sélection des offres de fourniture. La SENELEC conclut, après appel d'offres, des contrats d'achat d'énergie électrique. L'objectif poursuivi par le gouvernement dans ce sous-secteur est d'assurer la disponibilité en quantité et en qualité d'énergie électrique, compétitive et produite à partir de diverses technologies, notamment charbon, gaz, hydroélectricité et énergie solaire. Pour atteindre ces objectifs, le Sénégal a mis en place un cadre réglementaire favorable au financement du secteur. Le plan de production 2013-2017, adopté par le gouvernement lors de la réunion du Conseil des ministres du 21 mars 2013 à Matam, décrit les étapes stratégiques suivantes : • Le gouvernement a l'intention de promouvoir une forte implication du secteur privé dans la production et entend, à cette fin, engager les IPP et la SENELEC pour résoudre les différends qui pourraient compromettre le partenariat et avoir un impact négatif sur les futurs projets de production indépendants ; • Le gouvernement a donc décidé d'intensifier la rénovation des réseaux de transport-distribution pour faire face à de multiples incidents, notamment dans les réseaux de distribution et de transport, mais aussi aux besoins d'extension du réseau ; • 6.3.7 Le gouvernement a lancé la restructuration financière de la SENELEC, qui comprend diverses mesures, à savoir (i) l'élimination de l'écart tarifaire, (ii) la recapitalisation de la SENELEC, (iii) la restructuration de la dette et (iv) la mise en oeuvre par la SENELEC d'un plan d'amélioration interne (réduction des coûts, amélioration des revenus, amélioration globale de l'efficacité, réduction du BFR). Avec la mise en oeuvre du plan de restructuration financière et opérationnelle de la SENELEC et l'achèvement des investissements dans les capacités de production intermédiaires, le gouvernement entend fournir les moyens pour une baisse progressive de la subvention ainsi qu'un plan d'action pour compenser la réduction des revenus attendue de la SENELEC ; Parallèlement, le gouvernement a décidé de signer un contrat de performance pour 2013-2015 avec la SENELEC, fixant les objectifs et précisant les conditions pour atteindre les objectifs qui seront suivis au moyen d'un ensemble d'indicateurs de performance. Ce contrat sera audité annuellement. En outre, le gouvernement étudie l'option de la restructura institutionnelle de la SENELEC, qui favorise la libéralisation du secteur de la production et l'intervention des producteurs privés. A cet égard, la séparation comptable est envisagée telle que prévue par l'article 19 de la loi d'orientation du secteur de l'électricité, de même que la dissociation des activités en deux entités, la première chargée de la production et la seconde chargée des activités de transport et de distribution. Le sous-secteur des énergies renouvelables Le sous-secteur des énergies renouvelables constitue un défi de taille, car l'exploitation du potentiel national pourrait contribuer de manière significative à la réalisation de l'objectif consistant à améliorer l'indépendance énergétique et la sécurité énergétique. En ce qui concerne l'électricité, l'objectif était d'atteindre en 2017 un taux d'environ 20% de la capacité installée, notamment grâce aux projets sélectionnés par le comité d'agrément mis en place par le ministère de l'énergie et d'autres mécanismes. 6.3.8 La consommation électrique dans le PANEE Considérant le poids des importations de produits pétroliers dans la balance commerciale du pays (40,4% des recettes d'exportation en 2010)22, le gouvernement a pleinement pris conscience de l'importance 22 World bank data base 31 pour le Sénégal de réduire la dépendance du pays aux importations pour son approvisionnement et d'atténuer la facture pétrolière en mettant en place une Agence pour l'économie et la maîtrise de l'énergie depuis 2011 (AEME). Un plan d'action pour l'EE a été mis en place, incluant un cadre législatif et réglementaire (normes et exigences d'efficacité énergétique, contrôle qualité, audit énergétique obligatoire, etc.), la distribution massive des lampes à basse consommation (LBC), des audits des secteurs résidentiel, commercial, industriel et du transport, ainsi que la normalisation et l'étiquetage des équipements électriques domestique et de bureau. 6.3.8.1 La consommation électrique Le plan d'action national pour l'efficacité énergétique (PANEE) définit les objectifs suivants en matière d'efficacité énergétique23: (i) En 2020 : (i) Élimination des lampes à incandescence et promotion des lampes à économie d'énergie (LBC et LED) ; (ii) Taux de pénétration de l'éclairage en réseau égal à 82% ; iii) Taux de pénétration de l'éclairage hors réseau de 1% ; (iv) Nombre d'appareils avec des étiquettes en vigueur égal à 4 ; (v) Pourcentage d'industries ayant appliqué des mesures d'efficacité égal à 20% ; et (vi) Pourcentage d'économies d'énergie dans l'industrie égal à 5%. (ii) D'ici 2030 : (i) Taux de pénétration de l'éclairage en réseau de 99% ; (ii) taux de pénétration de l'éclairage hors réseau de 1% ; (iii) Nombre d'appareils avec des étiquettes en vigueur égal à 6 ; (iv) Pourcentage d'industries ayant appliqué des mesures d'efficacité égal à 80% ; et (v) Pourcentage d'économies d'énergie dans l'industrie égal à 25%. Les stratégies pour atteindre ces objectifs sont les suivantes : (i) Interdiction de fabriquer, d'importer et de commercialiser des lampes à incandescence ; (ii) Généralisation de l'utilisation de lampes efficaces avec la fourniture de 3 000 000 de lampes aux ménages ; (iii) Sensibiliser le public aux avantages d'un éclairage efficace sur le réseau et hors réseau ; (iv) Adoption de normes minimales de performance énergétique pour l'éclairage sur réseau et hors réseau ; (v) Développer et adopter des instruments fisca pour réduire les prix de l'éclairage efficace ; (vi) Mise en place d'une ligne de financement pour les audits énergétiques dans l'industrie. Au total, le gouvernement vise, entre autres objectifs, la réduction de 10 à 20% de la facture grâce au programme en cours avec l'Institut de l'énergie et de l'environnement de la Francophonie (IEPF) et une économie d'énergie d'environ 40 % sur la demande électrique en 2020. L'AEME prévoit une économie d'1,5 milliards de FCFA (env. 2,3 M€) par an dans le domaine de la facture publique d'électricité via l'audit des 7000 polices d'abonnement de l'administration permettant de détecter et corriger les anomalies administratives et techniques. L'acquisition et la pose de condensateurs est, notamment, prévue pour pallier les anomalies techniques (compensation de la puissance réactive et augmentation du facteur de puissance). Par ailleurs, un programme de 450 millions a été lancé pour remplacer tous les éclairages des bâtiments publics du Sénégal. 6.3.8.2 L'industrie La promotion de l'efficacité énergétique dans le secteur industriel au Sénégal s'effectue par le biais du Bureau de Mise à Niveau (BMN), dont l'instrument principal est le Programme de mise à niveau des entreprises (PMNE) qui vise à renforcer la compétitivité du secteur privé et à promouvoir une nouvelle culture entrepreneuriale. Il intègre dans ses missions la thématique « Environnement et Efficacité Energétique ». Le BMN accompagne les entreprises du secteur privé pour les amener à adopter des technologies propres et énergétiquement efficaces. En pratique, il s'agit d'un appui ciblé aux entreprises pour les inciter à investir dans ECREEE action enegal la maîtrise de l'énergie et dans une meilleure prise en compte des effets néfastes de leurs activités sur le milieu naturel. Les principales missions confiées au BMN en matière de promotion de l'efficacité énergétique auprès des entreprises sont les suivantes : (i) les diagnostics énergétiques ; (ii) les études techniques approfondies ; (iii) la formation sur les techniques d'économie d'énergie ; (iv) les acquisitions d'équipements et de procédés plus économes en énergie ; (v) le changement de sources d'énergie plus économes ; (vi) le Système de Management de l'Efficacité Energétique (SEME). Afin de mener à bien leurs projets de transformation, le BMN octroie des financements selon les critères suivants : (i) le montant maximal d'un prêt est de 1,3 milliard FCFA (env. 2 M€) ; (ii) un autofinancement minimum de 15% ; (iii) la durée minimale d'un prêt est de 3 ans avec possibilité de différé. (iv) Enfin, ne sont éligibles que les projets destinés à : ( ) la dépollution (traitement des rejets, valorisation des déchets) (vi) la maîtrise de l'énergie (production d'EnR, mise en place de mesures d'efficacité énergétique). 6.3.9 Liens avec la lutte contre le réchauffement climatique24 Le CPDN du Sénégal, sur l'atténuation, vise à mettre en oeuvre des activités spécifiques ayant un impact sur la réduction des émissions de GES, sur la base des ressources nationales (objectifs de contribution inconditionnelle) et du soutien de la communauté internationale (objectifs de contribution conditionnelle). Ces activités couvrent trois types de gaz : le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4) et les oxydes nitreux (N2O). Les activités générant des réductions d'émissions de GES sont prévues dans les sous-secteurs suivants : 1) Figure 29 – Trajectoires émissions. Source : MEDER, 2015 é nergie , production d'électricité, efficacité énergétique et transport, 2) foresterie agricole et autres utilisations des terres (AFAT) par la gestion du fumier, la riziculture, les sols agricoles, engrais organiques, terres forestières et plantations, (3) industrie et (4) gestion des déchets par traitement des déchets solides, des eaux usées industrielles, domestiques et commerciales. Dans le cadre de l'option inconditionnelle (CPDN), les réductions d'émissions attendues sont respectivement de 3%, 4% et 5% en 2020, 2025 et 2030. Avec l'option conditionnelle (CPDN+), les réductions d'émissions attendues sont de l'ordre de 7 %, 15% et 21% au cours des mêmes années. La contribution du secteur de l'énergie a été répartie en trois sous-secteurs : i) électricité et combustibles domestiques ; ii) efficacité énergétique ; et (iii) le transport. Cependant, l'essentiel de la politique de réduction des émissions du secteur repose sur l'introduction d'énergies renouvelables dans la production d'électricité à hauteur de Figure 30- Trajectoires CPDN. Source : MEDER, 2015 30% d'ici 2030. Les graphiques ci-dessus et ci-contre montrent les engagements de réduction des émissions correspondantes selon les scénarios CDPN et CDPN+. ANALYSE DE LA STRATEGIE D'ACCES UNIVERSEL 7.1 BILAN D'ETAPE DU PNER 7.1.1.1 Evaluation du système des Concessions d'Electrification Rurale (CER) Malgré le grand intérêt et la mobilisation de fonds de la communauté internationale, seules 6 des 10 concession ont été accordées et celles accordées ont rencontré de nombreux obstacles, tels que la complexité des procédures administratives d'appel d'offres et de passation de marchés avec la SENELEC et la résistance de la population locale en raison des différences de prix et de niveau de service par rapport à ceux offerts par la SENELEC. Les concessions accordées sont les suivantes : 1) St. Louis, Dagana (COMASEL); (2) Podor, Louga, Linguère (COMASEL); (3) Kaffrine, Tambacounda, Kédougou (ERA); (4) Mbour (STEG-SCL); (5) Kolda, Vélingara (ENCO-ISOFOTON); et (6) Kaolack, Nioro, Fatick, Gossas (ENCO-ISSOFOTON). COMASEL SA est détenue par ONE (Maroc), ERA par EDF (France), ISOFOTON est une société espagnole et STEG est une société tunisienne. Le capital de toutes ces sociétés comprend des participations de sociétés locales (MATFORCE, SCL, ENCO). En fait, plusieurs années après la signature des contrats de concession avec MEDER, des retards considérables ont été observés dans la mise en oeuvre. 7.1.1.2 Evaluation du système des ERILs Fin 2015, 44 projets ERIL avaient été attribués, 150 villages électrifiés et 7 116 ménages connectés par rapport à une cible de 8 883 ménages (80% de l'objectif) en comptabilisant les mini-réseaux PERACOD26. Sept entreprises locales sont répertoriées en tant que propriétaires de projets ERIL. Ces manquements aux objectifs sont attribués par les opérateurs aux causes suivantes : (i) difficultés à obtenir des certificats d'exemption permettant aux opérateurs de bénéficier des dispositions de la convention fiscale de l'ASER ; (ii) faible rentabilité d'exploitation liée à la taille autorisée des ERIL ne pouvant dépasser 200 ménages. 7.1.1.3 Bilan d'étape Ainsi, pour les deux modèles (Concessions et ERIL), ces retards sont principalement dus à : (i) des chevauchements institutionnels, des procédures administratives longues et complexes; (ii) un modèle économique qui rend les investissements difficiles à réaliser; (iii) l'absence de politique relative à l'interactivité du réseau crée une incertitude pour les projets hors réseau, comme, par exemple ce qui se produirait lorsque le réseau national arrivait ; (iv) un modèle tarifaire souvent hors de portée des ménages pauvres; (v) le non accès aux financement des banques commerciales : les exploitants de mini-réseaux ont généralement du mal à obtenir des prêts auprès des banques commerciales car ils ne sont pas contractés par le gouvernement et manquent généralement de garanties autrement. Par ailleurs, l'une des conséquences de la réforme du secteur, par la création des CERs et des ERILs, est qu'il subsiste donc un grand écart entre les tarifs urbains et ruraux, puisque les urbains sont servis par la SENELEC tandis que les ruraux sont servis par les attributaires de concession CER et/ou les développeurs d'ERILs, à l'exception près des localités rurales servies par la SENELEC. Bien évidemment, les clients de la SENELEC ne sont censés payés que le coût marginal de production de la SENELEC alors que les clients des autres concessionnaires paient également les coûts de connexion et d'équipement-câblage que le concessionnaire privé à l'obligation d'assurer, en sus du kWh. De ce fait les conditions techniques et économiques de l'électrification varient d'une concession à l'autre, ce qui induit, bien entendu, une hétérogénéité des tarifs applicables, même si le « price cap » s'applique à tous. Cette hétérogénéité du système de tarification de l'électricité suscite de nombreuses plaintes de la part des utilisateurs 27. C'est pourquoi, jugeant ces tarifs excessifs, de nombreuses personnes dans les zones rurales refusent de souscrire. 7.2 BILAN D'ETAPE DU PANEE Le PANEE : Bien qu'aucune évaluation concrète des résultats du PANEE ne sera faite avant 20202021, quelques retours d'expérience existent 28 en Afrique sub-saharienne concernant la réduction de la consommation électrique à travers : i) l'établissement de normes et l'étiquetage des appareils ; et (ii) le remplacement des lampes. L'ONUDI cite notamment les exemples suivants : En Ethiopie : Les nouvelles lampes fluorescentes compactes (CFL) permettent aux ménages ruraux d'économiser de l'argent et de l'énergie. Grâce à un projet de la Banque mondiale, le gouvernement de l'Éthiopie a distribué 5 millions d'ampoules fluocompactes. Après avoir seulement distribué la moitié des ampoules, ils avaient déjà économisé 80 MW d'électricité. Ainsi, pour un investissement de 4 millions de dollars US dans de nouvelles ampoules, le gouvernement a économisé 100 millions de dollars US en coûts d'énergie, sachant que la construction de centrales électriques produisant 80 MW d'électricité coûte environ 100 millions de dollars. Au Ghana : l'adoption de normes et d'étiquettes avec presque zéro coût d'investissement. Les Equipements concernaient l'éclairage, les cuisinières à biomasse, les chauffe-eaux solaires, les systèmes de chauffage/climatisation, les moteurs électriques et l'électroménager. Les résultats chiffrés ont été les suivants : au moins 7 millions € d'économies sur les systèmes de climatisation avec réduction des émissions de 132 000 tCO2 et des capacités de production d'électricité libérées d'environ 29 MW ; 63 millions €/an d'économies sur les réfrigérateurs ; 2,5% d'économie sur les revenus des ghanéens grâ à l'éclairage à CFL (lampes fluorescentes compactes) dans les grandes villes du pays. En Tanzanie : la correction du facteur de puissance. Le siège social de Tanzania Posts Corporation connaissait des factures mensuelles substantielles. Le facteur de puissance était en moyenne de 0,75 (puissance active de 225 kW et puissance réactive de 198 kVA pour une puissance requise de 300 kVA). Cela a été corrigé à 0,98 grâce à un investissement dans des condensateurs qui a coûté 4000 €, mais qui a généré des économies annuelles d'environ 2625 €, ce qui a entraîné un délai de récupération d'un peu plus de 18 mois. Ainsi, le déploiement de mesures similaires, comme prévu par l'AEME dans tout le domaine public, devrait également générer des économies d'énergie substantielles au Sénégal. L'EE dans l'industrie : Figure 31- Résultats du PNME Phase 1. 7.3 BARRIERES A L'EFFICACITE ENERGETIQUE Le score obtenu par le Sénégal vis-à-vis de l'indicateur RISE (Regulatory Indicators for Sustainable Energy) du Programme d'aide à la gestion du secteur énergétique (ESMAP) de la Banque mondiale reflète assez bien les performances du pays en matière de politique énergétique et de cadres réglementaires. Le RISE évalue la politique et le soutien réglementaire des pays pour chacun des trois piliers de l'énergie durable : l'accès à l'énergie moderne, l'efficacité énergétique et l'énergie renouvelable. La note globale du pays est de 48 avec la répartition suivante Figure 32- Mapping RISE / Efficacité énergétique Sénégal. Source : ESMAP : 69 sur l'accès à l'énergie, 54 sur l'énergie renouvelable et 19 sur l'efficacité énergétique30. S'il est juste de reconnaître que dans le cas du Sénégal, parler de mesures d'efficacité énergétique peut sembler incongru à aux yeux de certains, puisque la consommation d'énergie par tête reste très faible (0,27 tep pour l'énergie finale totale et 230 KWh/habitant pour l'électricité en 2016)31, il est néanmoins important de rappeler que ces faibles chiffres par habitant reflètent surtout le fait qu'une grande partie de la population du pays n'a pas accès à l'énergie conventionnelle (électricité et produits pétroliers). En fait, la consommation d'énergie par habitant devient importante lorsqu'on ne considère que la partie de la population qui est réellement http://www.bmn.sn/IMG/pdf/senegal_brochure_final.pdf World Bank alimentée en énergie conventionnelle. De plus, une vision à long terme nécessite la prise en compte du taux de croissance de + 3,6%/an de la consommation totale d'énergie du pays qui sera accéléré par les programmes d'électrification en cours. Malgré de nombreuses déclarations des pouvoirs publics et des initiatives visant à développer l'efficacité énergétique, le processus n'a pas encore atteint une ampleur significative en raison d'une série d'obstacles résumés par RISE (voir la figure 32). Même si aucune mesure officielle des progrès n'est disponible à ce jour, on peut être sceptique sur la réalisation de l'objectif du pays d'atteindre 40% d'économie d'énergie sur la demande électrique d'ici 2020. En effet, alors qu'il existe plusieurs barrières institutionnelles, financières, commerciales et politiques qui entravent l'adoption de l'efficacité énergétique, cinq (5) thèmes clés émergent : (i) La capacité financière des ménages et du secteur privé. 7.4 MINI-RESEAUX : BARRIERES A COURT TERME ET RISQUES A LONG TERME (i) Incertitude sur la demande en milieu rural : Un article de recherche sur les expériences indienne, kenyane et sénégalaise, publié en 2018 (K. Ulsrud et al., Energy Research & Social Science 44 (2018) 32–40, 2018) mettait en exergue les problématiques suivantes concernant les mini-réseaux : a. Continuité ou Substitution? Dans la pratique, les services du mini-réseau conçus avec un business model reposant sur une logique de fidélisation commerciale basée sur un abonnement peuvent se heurter à la versatilité du cashflow des clients qui préfèreront utiliser les énergies de substitution (bougies, lampe à kérosène, batteries de voiture, etc) en fonction de leurs besoins du moment et du cash dont ils disposeront au moment précis ; b. Dimensionnement du projet, viabilité financière i. Le cas sénégalais a démontré le dilemme entre fournir un approvisionnement abondant en électricité et assurer la durabilité économique. Dans le cas sénégalais, les gens pouvaient utiliser l'électricité pour presque tous les types d'appareils, mais comme la majorité d'entre eux ne pouvaient consommer qu'une quantité limitée de l'énergie, le potentiel n'était pas utilisé. La demande limitée a fini par nuire à la 37 performance économique. La stratégie choisie par l'entreprise pour surmonter ce problème a finalement consisté à sélectionner des villages plus grands et plus riches pour leurs futurs projets. ii. Dans le cas indien, il était difficile de répondre aux attentes et à la demande croissantes d'électricité. Une fois que les consommateurs avaient commencé à utiliser des appareils plus nombreux et plus gourmands, le modèle standardisé, basé sur les programmes de soutien nationaux exist ants et conçu pour permettre une réplication à grande échelle, ne disposait pas d'une flexibilité suffisante pour répondre efficacement à la demande croissante sur différents mini-réseaux. Il convient de noter que, parallèlement, l'augmentation rapide de l'utilisation de l'électricité, facilitée par des tarifs très bas ou nuls, représentait un résultat positif pour le projet indien. Dans les deux autres cas (Kenya et Sénégal), des mécanismes de contrôle efficaces (système prépayé avec déconnexion automatique au Sénégal et paiement par prestation de service, par exemple, par jour de location de lanterne au Kenya) et les limites d'accessibilité financière ont empêché de tels progrès rapides. c. Disparité des projets et inégalités sociogéographiques : i. Du point de vue du réalisateur du projet, le dilemme a tendance à être résolu soit en fournissant une fourniture d'électricité minimaliste (comme dans le cas du Kenya) au prix de l'exclusion de nombreux services électriques potentiels, soit en sélectionnant des villages plus grands et plus riches (comme dans le cas sénégalais), excluant de facto les villages les plus pauvres de l'accès à l'électricité. ii. Certains projets d'électrification sont soutenus au détriment d'autres plus urgents uniquement pour des motivations politiques. d. Des usages productifs spécifiques : puisque l'agriculture et l'élevage représentent 88% des activités de la population active en milieu rural sénégalais32, les risques suivants sont à prendre en compte dans la prévision de cashflow ainsi que dans les couplages énergie/technologie lors du montage de projet : i. Saisonnalité des usages productifs de la localité (quotidiens, hebdomadaires, saisonniers, etc) ; ii. Capacités de paiement intermittentes ; iii. Manques de liquidité en période de soudure ; iv. Activités de subsistance/survie ou entreprenariat avec une ambition de grandir? e. La spécificité du micro-réseau : il y a peu ou pas de recherche effectuée sur la façon dont la consommation évolue dans une communauté isolée. Il est donc nécessaire de surveiller en permanence l'utilisation des installations, les nouveaux besoins, la croissance et l'explosion lorsque, par exemple, une industrie s'installe à proximité ou inversement, se retire. Dans le micro-réseau (<100 MWh/an) d'une communauté isolée, il peut y avoir des augmentations potentielles de 40% ou plus d'une année à l'autre33. Le succès et l'échec d'un micro-réseau dépendent fortement du context e dans lequel il est mise en oeuvre (culturelle, sociale, économique et technique). Ainsi, pour que la probabilité de succès d'un microréseau augmente, la réalité particulière du micro-réseau doit être reconnue et cela signifie que quiconque en est le propriétaire, le gestionnaire et/ou l'exploitant doit concevoir un modèle qui est accessible à la communauté et qui répond à ses besoins, car ce sont Energie Monde Bustos, . Watts pplied précisément sa volonté de payer (Willingness to Pay) et sa satisfaction qui décideront si le modèle est viable dans le temps. 7.5 ELECTRIFICATION RURALE ET OPPORTUNITES NUMERIQUES 7.5.1 Synergies entre opérateurs mobiles et opérateurs de mini/micro réseaux solaires Les panneaux solaires et le stockage sur batteries sont désormais suffisamment bon marché pour jouer un rôle clé. Les données de Bloomberg New Energy Finance montrent une baisse de 82% des coûts pour les modules photovoltaïques et de 76% pour les blocs de batteries fixes au lithium-ion entre 2010 et 201734. (i) Partenariats de déploiement : les opérateurs de réseaux mobiles ont du mal à trouver de l'énergie fiable à faible coût en zone reculée/isolée (Last Mile), tandis que les fournisseurs d'énergie locaux, en particulier les opérateurs de mini/micro-réseaux ont besoin de sources de revenus plus stables. Les partenariats de déploiement constituent donc une opportunité, les deux parties améliorant leurs performances financières et opérationnelles. Grâce à une planification et à un déploiement conjoints efficaces, les sociétés de services énergétiques spécialisées peuvent offrir aux opérateurs de réseaux mobiles des tarifs inférieurs, tout en fournissant de l'électricité aux ménages et aux entreprises voisins. Par exemple, OMC Power, fonctionne avec ce modèle économique en Inde. (ii) Alimentation de l'infrastructure de connectivité : l'extension d'un réseau cellulaire implique généralement la construction de nouvelles tours pour les stations de base qui connectent les téléphones mobiles au réseau plus large. Toutefois, les zones reculées présentent des défis uniques, notamment des coûts d'exploitation plus élevés et une plus faible densité de clientèle. Une combinaison d'énergie solaire distribuée moins coûteuse pour une infrastructure cellulaire conventionnelle et de stations de base plus petites et plus efficaces conçues pour combler les lacunes de couverture dans le réseau principal pour atteindre Figure 33 - LCOE Diesel vs S olaire . Source Bloomberg 34 Volume weighted average Lithium Ion battery pack prices in 2017 were $209/KWh, primarily seen in the EV sector. Stationary storage developers can expect to pay a premium, with possible large volumes prices of $240/KWh. 39 davantage de personnes à moindre coût. Plus d'un million de tours de téléphonie cellulaire dans les pays en développement sont hors réseau ou au mieux extrêmement peu fiables. Ces tours font généralement appel à des générateurs diesel pour l'alimentation primaire pendant une grande partie de la journée afin d'éviter les interruptions du réseau mobile. De tels générateurs et le carburant qu'ils consomment peuvent représenter 40 à 50% des coûts d'exploitation d'une tour. Or, une solution est déjà disponible sur le marché aujourd'hui. En effet, composés d'un mélange de panneaux solaires, de générateurs diesel et de batteries, les systèmes hybrides peuvent faire économiser aux opérateurs de réseaux mobiles ou aux opérateurs de tours jusqu'à 54% du coût énergétique d'une tour hors réseau générée par un générateur diesel conventionnel (Figure 33). De nombreux opérateurs de tours préfèrent néanmoins compter sur des technologies établies par crainte des dépenses initiales en capital beaucoup plus élevées pour le solaire. Cela ouvre une opportunité aux prestataires spécialisés qui peuvent exploiter et financer l'énergie solaire pour les tours et aider les télécoms à réduire le coût du service des régions éloignées. (iii) Les opportunités de partenariat et d'intervention ne manquent pas : les innovateurs du monde entier s'efforcent d'accroître l'accès à l'électricité et à la connectivité. Cependant, pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD) 7 et 9, qui exigent un accès universel dans les deux secteurs, il faut passer à échelle plus rapide. Sans plus d'entrepreneurs, de réseaux de distribution plus étendus, d'accès plus facile aux capitaux et de cadres réglementaires favorables, il y aura peu d'attractivité. Les partenariats entre le secteur de la connectivité et celui de l'énergie offrent des possibilités 'accélérer les progrès vers ces deux objectifs. Les opérateurs de réseaux mobiles, les services publics et les startups de l'accès à l'énergie peuvent travailler ensemble non seulement par le biais d'investissements, mais également grâce à la collaboration opérationnelle et à l'innovation conjointe. Figure 34- Innovation numérique & Accès à l'électricité. Source Banque Mondiale (iv) Partage de données : les opérateurs de réseaux mobiles et les opérateurs de systèmes solaires domestiques sur le modèle PAYG peuvent également tirer parti du partage des données des consommateurs et ainsi mieux comprendre les caractéristiques et les exigences des clients. De meilleures données et analyses peuvent améliorer les stratégies d'acquisition, de rétention et de vente des clients pour les deux parties. Chacun peut également utiliser les données pour développer des campagnes de marketing, planifier son expansion, améliorer le service client ou même améliorer l'évaluation du crédit client lors du financement des achats de produits. (v) Distribution et logistique : les opérateurs de réseaux mobiles sont généralement des marques proches des foyers avec de grands réseaux de distribution vendant des cartes SIM, des recharges de temps de connexion et d'autres produits connexes. Ces canaux de distribution peuvent également constituer des itinéraires précieux vers les entreprises de systèmes solaires domestiques 40 (SHS), en tirant parti des points de vente, des plates-formes logistiques et des associations de marques existants. À l'inverse, les opérateurs de réseau mobile peuvent conclure des accords de partage des revenus pour ces services et renforcer considérablement la fidélité des clients en élargissant la gamme de services proposés.35 (vi) Paiements et Mobile Money : la plupart des sociétés de SHS, dont le PAYG (Pay-As-You-Go) est le modèle de facturation, utilisent les opérateurs de téléphonie mobile pour collecter le grand nombre de petits paiements de leurs clients, que ce soit par le biais de services d'argent mobile ou directement sur le compte client (abonné) ou la recharge de crédit (prépayé). Les deux approches stimulent les revenus des MNO ( Network Operators). L'accès à l'énergie pourrait donc être élargi plus rapidement si de tels partenariats et les interfaces de programmation d'application (API) nécessaires aux systèmes de télécommunications sont plus facilement accessibles. Le Hub IPN, récemment mis au point par GSMA, est un exemple prometteur de moyens de faciliter l'adoption de l'argent mobile par le secteur de l'accès à l'énergie et d'accélérer son déploiement36. (vii) Coalitions pan-sectorielles : sur les marchés de technologie d'innovation, les coalitions pansectorielles à grande échelle constituent un moyen courant d'accélérer l'innovation, de sensibiliser les consommateurs et de réclamer des réglementations appropriées. Le potentiel des ressources énergétiques distribuées (DER) Une connaissance et une gestion améliorées des systèmes de distribution électrique pourraient faciliter les ressources énergétiques distribuées (DER), telles que les systèmes photovoltaïques et les systèmes de batteries solaires sur les toits et dans les communes. Les DER présentent de nombreux avantages par rapport aux systèmes de réseaux centralisés, tels que les pertes de puissance réduites, la conception évolutive et l'adéquation aux sources renouvelables. En particulier, les DER ont le potentiel d'atténuer les inégalités sociales renforcées par les modèles basés sur les réseaux centralisés. Les réseaux existants en Afrique subsaharienne favorisent les communautés plus riches, situées dans des zones où le réseau est limité et qui peuvent se permettre des frais de connexion relativement élevés, tandis que les communautés rurales disposent de possibilités limitées d'accès à l'électricité. Ce déficit électrique intrarégional perpétue l'inégalité en entravant le développement social de ceux qui sont actuellement pauvres. Les DER sous la forme de micro-réseaux ont le potentiel de contourner ce défi et de fournir rapidement de l'énergie aux communautés sans accès au réseau. Contrairement aux systèmes de transmission, les systèmes de distribution ont, par le passé, été peu surveillés par les opérateurs. Avec l'avènement des technologies de réseau intelligent, l'Afrique subsaharienne a la possibilité de rendre ses réseaux réceptifs aux DER, réduisant la pression de la production central et augmentant la fiabilité globale du réseau. Les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) seront essentielles au succès des DER car elles permettent la communication à distance pour la maintenance et la réparation, l'analyse facile des données et le comptage intelligent. Les DER attendent le bon mélange de catalyseurs, tels que des coûts de batterie moins élevés et des NTIC plus intelligentes, pour générer une croissance et un déploiement sans précédent. 7.5.3 WAPP Le Pool énergétique ouest-africain (WAPP) est une institution spécialisée de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) composée de 14 pays : Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée. -Bissau, Libéria, Mali, Niger, Nigéria, Sénégal, Sierra Leone et Togo. Le WAPP est encore en développement et n'est pas encore opérationnel. Les progrès réalisés dans les réseaux intelligents et les technologies de l'information et de la communication (NTIC) permettront à la région de tirer pleinement parti de ses ressources renouvelables exceptionnelles. 7.6 ON-GRID OU MINI-RESEAUX DECENTRALISES? Jusqu'à présent, le discours sur l'accès à l'électricité en Afrique subsaharienne a été dominé par des arguments opposant des solutions centralisées telles que l'extension du réseau à des solutions décentralisées telles que les mini-réseaux. Certains soutiennent que les mini-réseaux sont incapables de fournir des services énergétiques fiables et modernes, tandis que d'autres estiment que l'extension du réseau est trop lente et coûteuse pour atteindre des millions de personnes sans électricité. Ces arguments du tout-ou-rien reposent sur l'hypothèse dépassée selon laquelle la fourniture d'électricité doit provenir de réseaux de production et de réseau centralisés à grande échelle mis en service par les gouvernements nationaux. 42 Dans les faits, la réalité est plus nuancée car la planification de l'électrification rurale est complexe. En effet, il faut d'abord tenir compte des réalités du terrain : géographie (et géopolitique) pour les interconnections possibles avec les pays voisins, éloignement du réseau central par rapport aux localités à électrifier, topographie du terrain sur chaque zone du territoire, répartition spatiale des ressources naturelles potentiellement sources d'énergie primaire pour la production, Figure 35- Représentation de l'espace Mini-Réseaux. Source : EUEI PDF, 2014 répartition spatiale des localités à électrifier, taille de la communauté, demande en énergie locale,, densité de population sur site et potentiel de croissance. La figure 35 ci-contre montre qu'il y a une surface dans laquelle le mini-réseau est la solution la plus économique (moins cher que le réseau central et les SHS hors subvention de l'électricité). Ensuite, il faut faire des arbitrages économiques, et politiques, avant de viser le modèle d'organisation du marché le plus efficace possible en fonction des économies d'échelle (cf. figure 36 ci-dessous). Figure 36- Acteurs recommandés par taille de réseau. Source : EUEI PDF, 2014 Souvent, les objectifs légitimes de déploiement rapide dictés par l'urgence du développement économique, la nécessité de réduire les inégalités et de freiner le taux croissant de pauvreté électrique dans les zones rurales, imposent des stratégies combinées et par étapes. En effet, ne serait-ce que pour des questions de délais de réalisation et de disponibilité des financements, les deux solutions doivent être déployées en tandem et en synergie (Casillas et Kammen, 2010). Les mini et micro-réseaux doivent être conçus comme un palliatif pour l'extension du réseau principal pendant plusieurs années et doivent être intégrés (recyclés comme distributeur indépendant, indemnisés, etc) de manière 43 transparente au réseau principal à son arrivée sur la localité. Le manque d'intégration peut se traduire par un manque d'énergie, ce qui dissuadera les investisseurs d'investir dans de petites entreprises énergétiques privées capables d'atteindre les régions les plus reculées. C'est également la raison pour laquelle les micro-entreprises privées doivent être soutenues par des services publics d'électricité et des programmes d'électrification rurale. Par ailleurs, si le gouvernement n'est pas en mesure de prendre en charge entièrement les investissements, il doit au moins subventionner les actifs immobilisés des projets, en particulier ceux du mini-réseau, car lorsque le réseau national atteindra les zones d'exploitation des mini-réseaux. Le concept des mini-réseaux conçus au départ pour pouvoir se connecter au réseau central - concept de neutralité technologique - permet réduire l'incertitude entourant la valeur future des infrastructures. C'est également une option (réelle) prise qui permettra d'améliorer la nature des services énergétiques fournis par le mini-réseau, à terme. Par exemple, un micro-réseau décentralisé finalement connecté au réseau national (principal) peut évoluer du rôle de générateur décentralisé local vers celui d'acheteur d'électricité du réseau central, fonctionnant comme un petit distributeur d'énergie pour ses connexions domestiques existantes. La figure 37 ci-dessous illustre bien l'influence de l'environnement réglementaire sur la vitesse de développement des mini-réseaux privés. Figure 37- Modèles, contrôle gouvernemental et vitesse de déploiement. Source : EUEI PDF, 2014 Compte-tenu des spécificités du Sénégal (pays plutôt plat, végétation soudano-sahélienne dans l'ensemble du territoire excepté la région Sud de Casamance, réseaux hydroélectriques OMVG et OMVS le long des fleuves Gambie et Sénégal, implantation des populations, niveau actuel de déploiement du réseau central, etc), la vision et la stratégie sénégalaise de privilégier le réseau central pour 96% de l'électricité rurale à terme, semblent cohérentes et conformes au principe d'égalité des chances – y compris entre hommes et femmes – par la démocratisation de l'accès au même niveau de service d'énergie électrique pour tous et partout. 7.7 RECOMMENDATIONS 7.7.1 7.7.1.1 Stratégie de financement Harmonisation des tarifs et financement Les clients des services S1, S2 et S3, de même que ceux du service S4 avec panneau solaire, paient actuellement un abonnement mensuel fixe. Ces tarifs forfaitaires fixes peuvent revenir jusqu'à sept (7) fois plus chers au kWh consommé que les tarifs variables. De la même manière, les concessionnaires appliquent des tarifs d'abonnements au kWh (tarifs variables) qui sont 20-30% plus chers que les tarifs SENELEC. Cependant, les différences entre concessions ne sont pas si grandes. En revanche, il peut y avoir dans une même concession des villages électrifiés avant 2002 - donc dans le périmètre rural de la SENELEC - qui bénéficient de tarifs beaucoup plus attractifs que leurs voisins distants de seulement quelques kilomètres. Il en résulte une mauvaise opinion à l'égard des concessionnaires qui, de facto, font face à une réelle réticence à la souscription de la part de clients potentiels. A la suite aux nombreuses plaintes, le gouvernement sénégalais envisage d'harmoniser les tarifs depuis 2017. À cet égard, une étude est en cours de finalisation sur la manière d'harmoniser les tarifs et le CRSE est en train d'établir les règles détaillées de ce processus. Si elle est prise, la décision d'harmoniser les tarifs avec la SENELEC entraînera une réduction significative des coûts pour les consommateurs dans les zones de concession ainsi que l'amélioration recherchée du taux de souscription par les clients. La figure 38 ci-dessous montre le coût estimé par kWh pour le consommateur, basé sur une consommation moyenne pour chaque niveau de service, et compare le tarif SENELEC au tarif S4 pratiqué hors réseau central dans 4 concessions différentes (Mbour, Kédougou-Tamba-Kolda, Louga, Saint-Louis). Figure 38- comparison of different tariffs in Senegal. Source: Gesto. Data: ASER, PSE, SENELEC La figure 39 suivante montre une estimation des coûts variables d'exploitation des opérateurs ruraux par technologie et sans rémunération ou subvention directe aux investissements. Elle montre également, dans les mêmes conditions (hors subventions) une analyse des flux de trésorerie disponibles en 2025. Figure 39- Operating free cash flow per kWh. Source: Gesto. Data: ASER, SENELEC, CRSE L'analyse des chiffres montre que la mise en application d'une harmonisation des tarifs générera des revenus - dans le secteur électrique du monde rural - qui seront insuffisants pour couvrir l'ensemble des coûts d'exploitation, ce qui provoquera une perte de 26,7 FCFA/kWh produit. Puisque le poids de la SENELEC dans la fourniture d'électricité en zone rurale sera prépondérant (96% de la consommation), ce déficit du secteur peut s'expliquer par le faible écart entre le tarif réglementé de vente 95,8 FCFA/kWh et le tarif de la SENELEC (accès et achat d'électricité) aux opérateurs (91,4 FCFA/kWh). Cette marge opérationnelle du secteur en zone rurale (4,4 FCFA/kWh) sera insuffisante pour couvrir les pertes et frais d'exploitation nécessaires à la couverture d'un réseau de clientèle très dispersé. Les pertes d'exploitation des réseaux hybrides, dont les revenus suffiront à peine à payer le carburant, contribueront également au déficit du secteur avec un risque réel sur les heures effectives de fonctionnement de ces mini-réseaux. Seuls les réseaux 100% solaires pourront échapper au déficit à condition que les investissements initiaux soient subventionnés (dons, fonds climat, etc), puisque leurs coûts d'exploitation sont très faibles. Il semble donc évident que le secteur aura besoin de gagner en efficacité en réduisant ses coûts totaux (production, transmission, distribution, exploitation). Aussi, compte-tenu du poids de la SENELEC dans la production-transmission au niveau national, il paraît raisonnable qu'il faille commencer par là en priorité. A cet égard, l'exploitation des interconnexions régionales doit être maximisée (OMVG, OMVS, WAPP), de même qu'il faudra plus d EnR dans le système, tout en recherchant les coûts de financement les plus faibles possibles. Du côté des mini-réseaux, les opportunités de gain d'efficacité sont nombreuses : (i) Modernisation/Amélioration de l'infrastructure : 46 a. meilleures capacités des batteries et panneaux solaires, donc moins de consommation de fuel pour les centrales hybrides ; b. réseaux intelligents permettant de mieux contrôler l'infrastructure à distance et de minimiser les défaillances et frais de maintenance à long terme ; (ii) Généralisation du prépayé en synergie avec les opérateurs mobiles (cf. chap 7?5.1) ; (iii) Recrutement et formation de personnel local pour des interventions SAV de 1er niveau ; Par ailleurs, des économies d'échelle substantielles, qui auront un impact positif sur les coûts d'exploitation, peuvent être réalisées si le secteur est réorganisé avec 1 seul distributeur par concession (cf. chap 7.6). En dehors de la réduction des coûts, la mise en place d'un mécanisme de compensation sera nécessaire pour permettre aux opérateurs de fournir, dans des conditions soutenables, un service de qualité aux millions de néoclients ruraux. Cela pourra se faire par un instrument de subventions croisées, notamment en réduisant le tarif payé par les opérateurs à la SENELEC ou par une légère augmentation de la taxe d'électrification payée par tous les clients. Dans le premier cas, si la structure de coûts de la SENELEC ne devient pas beaucoup plus efficace, il faudra que l'état mette la main à la poche pour la compenser. Le montant total des compensations à verser aux concessionnaires est estimé à 168 milliards de FCFA (255,3 millions d'euros) jusqu'en 2025. Les besoins totaux de financement, compensations comprises, sont estimés à 542 milliards de FCFA (environ 826 millions d'euros). La répartition pluriannuelle est la suivante : o o o 2018-2020 : 208,4 milliards de FCFA (347 millions de dollars) 2021-2023 : 217,2 milliards de FCFA 362 millions de dollars) 2024-2025 : 115,2 milliards de FCFA 192 millions de dollars) Ces montants, très importants, ne concernent que la partie électrification rurale. Ils ne tiennent pas compte des augmentations de capacité de production centrales et des lignes de transmission HT (Haute Tension) qui seront nécessaires aussi bien pour les clients urbains que les ruraux. Par conséquent, il semble évident qu'il soit nécessaire de bâtir une véritable stratégie de mobilisation de fonds à moindre coût.
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Les présentations qui sont considérées comme les plus faciles à interpréter pour choisir un scenario sont : 1) Pour les midpoints avec plus de 2 scénarios : l'histogramme sous-set gravité discriminant (H5) 2) Pour les endpoints : l'histogramme classique, sans indication de la contribution des midpoints (H2). 3) Pour les présentations de 2 scénarios exactement : l'histogramme en proportion (H10) puis l'histogramme "balance" (H9). A noter : l'histogramme midpoints classique est considéré de manière quasi unanime comme difficile à interpréter du fait de la multiplicité des critères et de l'impossibilité de juger de la gravité des critères. 2.1.2 Scénario choisi suivant le mode de présentation Quel est le meilleur scénario du point de vue environnemental? 0% 20% 40% 60% 80% 100% H1 - Histo midpoints classique H2 - Histo endpoints classique H3 - Histo midpoints classé H3V - Histo midpoints surligné classé H4 - Histo midpoints sous-set "gravité" Scénario 1 H4V - Histo midpoints sous-set "gravité" surligné classé H5 - Histo midpoints sous-set gravité et discriminant Scénario 2 H6 - Histo endpoints + contribution des midpoints Scénario 3 H6V - Histo endpoints + contribution des midpoints éclatée Choix indéterminé Non réponse H7 - Histo midpoints classique (2 sc.) H8 - Histo endpoints classique (2 sc.) H9 - Histo midpoints "balance" H10 - Histo midpoints "en proportion" Arbre On observe par ailleurs que taux de non réponse, ou d'indétermination est plus fort pour les novices en ACV. 2.2 Qualités des différents graphes La présentation classique des impacts (midpoints) en ACV (H1) est considérée comme moins facile à comprendre que la plupart des autres visualisations testées. Les présentations jugées les plus agréables à lire sont celles présentant les endpoints (H2 et H8) ainsi que les histogrammes midpoints "sous set gravité et discriminant "(H5) pour plus de deux scénarios et les histogrammes midpoints "proportion" puis "balance" (H10 et H9) pour deux scénarios exactement. 2.2.1 Qualité des graphes : Midpoints plus de deux scénarios Graphes midpoints et arbre pour 2 scénarios et plus H1 - Histo midpoints classique H3 - Histo midpoints classé H3V - Histo midpoints surligné classé Semble agréable à lire H4 - Histo midpoints sous-set "gravité" Semble facile à comprendre H4V - Histo midpoints sous-set "gravité" surligné classé Est bien compris (principe parfaitement reformulé) H5 - Histo midpoints sous-set gravité et discriminant Semble permettre de facilement sélectionner H7 - Histo midpoints classique (2 sc.) Arbre 0 5 10 15 Nombre de réponses (sur 15 répondants sauf arbre 14) 2.2.2 Qualité des graphes : Midpoints deux scénarios exactement Graphes midpoints pour 2 scénarios exactement H7 - Histo midpoints classique (2 sc.) Semble agréable à lire H8 - Histo endpoints classique (2 sc.) Semble facile à comprendre H9 - Histo midpoints "balance" Est bien compris (principe parfaitement reformulé) H10 - Histo midpoints "en proportion" 0 Semble permettre de facilement sélectionner 5 10 15 Nombre de réponses (sur 15 répondants) 29 2.2.3 Qualité des graphes : Endpoints Graphes endpoints pour 2 scénarios et plus H2 - Histo endpoints classique Semble agréable à lire H6 - Histo endpoints + contribution des midpoints Semble facile à comprendre H6V - Histo endpoints + contribution des midpoints éclatée Est bien compris (principe parfaitement reformulé) 0 Semble permettre de facilement sélectionner 5 10 15 Nombre de réponses (sur 15 répondants) Graphes endpoints pour 2 scénarios et plus H2 - Histo endpoints classique Choix plus de 2 scénarios en endpoint (élu) H6 - Choix plus de 2 scénarios en endpoint (technicien) aucun non réopnse 0 5 10 15 Nombre de réponses (sur 15 répondants) 30 2.3 Principes à retenir 0% 20% 40% 60% 80% 100% Utiliser conjointement les mid et les endpoints (pour vérifier la convergence entre les deux niveaux) Présenter les midpoints en les classant par niveau décroissant sur un des scénarios Surligner avec des couleurs différentes les critères où un scénario domine les autres Ecarter les critères non discriminants Ne pas tenir compte des impacts (midpoints) qui sont déjà contrôlés par la réglementation sur les rejets (eutrophisation) Utiliser un sous-set de midpoints sélectionné par des experts de l'ACV pour les systèmes d'assainissement dans ACV4E Utiliser un sous-set de midpoints sélectionné par des décideurs (élus et ou techniciens des collectivités) en fonction des enjeux qui leur semblent importants Si oui : pensez-vous qu'il est possible de faire choisir des indicateurs midpoint à des décideurs? Faut-il laisser la possibilité d'effectuer la normalisation des résultats Il est préférable de présenter des portions ("A est trois fois plus impactant que B") plutôt que des pourcentages du plus impactant ("l'impact de B représente 33% de l'impact de A")? Non Oui Indifférent Non réponse Les principes de simplification sont presque tous validés, sauf le fait de retirer les critères contrôlés par la réglementation. 3 Rédaction d'un nouveau cahier des charges pour la programmation de la visualisation des résultats L'analyse des résultats du test par l'équipe de recherche a conduit à proposer un nouveau cahier des charges définissant le mode de visualisation adopté. Il fait l'objet d'un document spécifique. Le nouveau module de visualisation se déclinera suivant le type d'usage. Conformément aux recommandations du groupe, pour l'usage "choix d'investissement", il proposera non pas juste des graphiques, mais fera suivre à l'utilisateur une série d'étapes (logique de l'arbre de décision) pour simplifier la présentation des résultats en explicitant les principes retenus : - supprimer les critères peu discriminants, - conserver uniquement les critères qui génèrent le plus de dommage, - voir la convergence entre les midpoints et les endpoints. Pour les graphiques présentant des midpoints, on ajoutera une information (camembert) à la fois sur le nombre de fois où un scénario est le meilleur et le moins bon (ceci se substituant au classement et au surlignage). On offrira aussi la possibilité de retirer les scénarios qui seraient systématiquement moins bons qu'un autre (permet de limiter le nombre d'informations affichées en éliminant les plus mauvais scénarios). Pour 2 scénarios exactement, le graphe midpoints en proportion (H10) sera proposé. Le reclassement des midpoints par familles n'a pas pu être retenu pour des contraintes de programmation. Les intitulés des critères seront modifiés autant que possible pour être un peu plus parlants. Enfin la terminologie française (impacts, dommages) sera retenue (au lieu de midpoints endpoints). La normalisation sera abandonnée. Le cahier des charges propose aussi des représentations distinctes pour les usages d'éco-conception, d'écoexploitation et de benchmarking (basées sur un travail indépendant du test du 2 octobre). fin, il sera possible de faire des extractions des résultats chiffrés sous XLS et non pas seulement sous forme de copies d'écran de graphiques.
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L'important pour nous était de garder les mêmes cellules du début à la fin de l'étude, afin d'avoir des modèles cohérents des étapes in vitro aux études précliniques. Si, contrairement aux résultats obtenus in vitro, nous n'avions pu sensibiliser à la chimiothérapie les cellules injectées chez l'animal, les causes auraient pu être les modifications contextuelles apportées par l'animal. L'accès des siRNA aux cellules est par exemple particulièrement différent in vitro et in vivo. Il est direct in vitro, alors qu'in vivo, un certain nombre de paramètres entrent en jeu pour éventuellement réduire cet accès. La voie d'administration, le véhicule (PEI chez la souris / oligofectamine in vitro), la distribution dans l'organisme (dilution et élimination rapide), l'accès aux cellules de la masse tumorale dont la vascularisation n'est pas forcément la plus dense, la BHE au niveau du cerveau. Nos résultats positifs in vivo démontrent que l'administration des siRNA est efficace. En d'autres termes, même si l'on peut optimiser ce traitement en améliorant la vectorisation, le ciblage, la stabilité des siRNA, ils peuvent déjà atteindre une cible cellulaire. L'administration de siRNA peut donc être réalisée efficacement à destinée thérapeutique. La dimension pragmatique de notre travail, dont la finalité clinique transparaît en de nombreux points est retrouvée dans le Consortium siRNA in vivo soutenu par la LNCC. Ce projet est le fruit de la réflexion d'utilisateurs de siRNA dont l'objectif est de les porter en clinique. Cela a conduit à fixer des critères garantissant la spécificité des siRNA, leur efficacité, avec toutes les difficultés que nous avons à la prédire sur des modèles précliniques, et leur innocuité. L'ensemble de nos aux, des premiers, in vitro, aux derniers, in vivo, ont permis de définir un cadre expérimental tout à fait transférable à d'autres questions. Si les modèles in vitro et in vivo que nous avons établis ne peuvent répondre qu'à des questions identiques ou connexes à la nôtre, avec d'autres gènes candidats, comme c'est le cas pour nos travaux avec la société TRANSAT, la démarche expérimentale suivie pour la validation des siRNA in vivo, peut être utilisée comme une base robuste pour établir toute démonstration concernant la validation de siRNA thérapeutiques. La société TRANSAT, basée à Lyon, et avec laquelle nous collaborons, a transposé les paramètres de notre test à un format automatisé et à débit supérieur afin de valider leur banque de siRNA dirigés contre le kinome. Lors de ces travaux, nous avons dans un premier temps identifié des gènes impliqués dans la chimio-résistance des gliomes. Ces gènes sont des cibles thérapeutiques innovantes que nous sommes en train de valider au niveau préclinique. L'application de notre modèle d'étude aux kinases et phosphatases a permis de mettre à jour de nouveaux gènes cibles pour une stratégie chimio-sensibilisatrice. Ces gènes n'iront pas grossir les rangs des innombrables cibles thérapeutiques potentielles jamais validées. En effet, cette recherche a d'autant plus d'intérêt que nous proposons tous les outils pour les valider in vivo. 143 PERSPECTIVES 144 Le projet se poursuivra dans un premier temps par la transposition des études in vitro aux cellules souches cancéreuses puisque des données nouvelles soulignent l'importance de ces cellules dans la biologie des tumeurs. Parallèlement à cela, les expérimentations en sous-cutanée seront étendues à d'autres lignées d'astrocytomes (LN229 IV1 et U87 IV1), puis dans des modèles orthotopiques de gliomes. Une fois ces différentes étapes validées, les aspects in vivo concluants seront une base scientifique raisonnable pour lancer un essai clinique. Il restera alors à ajouter quelques paramètres réglementaires tels que l'évaluation de la toxicité du traitement et la production des outils en qualité GMP (Good Manufacturing Practice). Concernant l'étude de la toxicité, un contrat de prestation de service est en cours avec la société Oncodesign basée sur Dijon. Quant au caractère GMP des outils, les sociétés produisant les siRNA (Eurogentec) et le PEI (Polyplus) nous ont dors et déjà assuré une telle production. Nos travaux sont en accord avec l'hypothèse que nous avions posée concernant la diminution d'expression consécutive à la perte d'hétérozygotie des bras 1p et 19q. Il serait par conséquent intéressant d'effectuer une analyse transcriptomique des tumeurs de patients répondeurs et non répondeurs aux traitements, afin de déterminer les gènes les plus sous-exprimés dans les entités sensibles et ainsi réaliser un nouveau criblage à la fois plus ciblé mais concernant un plus grand nombre de familles de gènes. Dans le cadre de l'essai clinique, il pourrait être utile de mesurer l'expression et la fonction des gènes de réparation chez les patients éligibles pour une chimio-sensibilisation anti-ercc1. Nous avons vu l'expression au niveau de l'ARN ne pouvait répondre à cette question, même si ces gènes sont surexprimés dans les GBM par rapport aux oligodendrogliomes, ce qui peut semblé paradoxal. Il faudrait alors évaluer l'intérêt pronostique d'un dosage immunohistochimique de ERCC1 sur des prélèvements biopsiques, ou mieux, mesurer la fonction de réparation de ERCC1 en mettant en place un dosage enzymatique et ainsi sélectionner les patients qui pourraient répondre à notre traitement chimio-sensibilisant. L'imagerie permettra d'autre part de déterminer pour la première fois comment se distribuent les siRNA chez l'Homme. Cette information sera bien sûr utile pour nous, mais aussi pour le reste de 145 la communauté scientifique, et permettra l'amélioration de l'administration, et donc probablement de l'efficacité du traitement. D'autres siRNA seront testés sur ces différents modèles de tumorigenèse.
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La maîtrise d'ouvrage urbaine des projets iconiques ou la gouvernabilité de la production urbaine des territoires métropolitains
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The ”maitrise d’ouvrage urbaine” of iconic urban projects or the gouvernability of urban production of metropolitan areas. Betty Jista To cite this version: Betty Jista. The ”maitrise d’ouvrage urbaine” of iconic urban projects or the gouvernability of urban production of metropolitan areas.. Humanities and Social Sciences. Ecole des Ponts ParisTech, 2007. English. NNT :. pastel-00004045 HAL Id: pastel-00004045 https://pastel.hal.science/pastel-00004045 Submitted on 21 Jul 2008 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. 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ECOLE NATIONALE DES PONTS ET CHAUSSSEES LABORATOIRE DES THEORIES DES MUTATIONS URBAINES INSTITUT FRANÇAIS D’URBANISME UNIVERSITE PARIS 8 LA MAITRISE D’OUVRAGE URBAINE DES PROJETS ICONIQUES OU LA GOUVERNABILITE DE LA PRODUCTION URBAINE DES TERRITOIRES METROPOLITAINS Etude de trois cas à travers la gestion de la programmation urbaine : Ile de NantesRives de Loire, Lyon Confluence, Euroméditerranée à Marseille THESE DE DOCTORAT EN URBANISME Sou tenue par Betty JISTA 8 octobre 2007 Sous la direction de Alain BOURDIN Professeur de sociologie à l’Institut Français d’Urbanisme Membres du jury Alain BOURDIN, Professeur de sociologie, Institut Français d’Urbanisme, Université de Paris VIII Jérôme DUBOIS, Professeur de sciences politiques, Institut d’Aménagement Régional, Université d’Aix – Marseille III Paul BOINO, Professeur de géographie, Institut d’Urbanisme de Lyon, Université de Lyon II Viviane CLAUDE, Professeur d’urbanisme, Institut d’Urbanisme de Lyon, Université de Lyon II 2 A la f ête Ko sa in soz 3 4 Remerciements Je remercie vivement les membres du jury d’avoir parcouru ce travail, mon directeur de thèse pour ses apports au fil des années, les acteurs professionnels qui ont bien voulu se prêter au jeu de l’étude, les chercheurs qui m’ont beaucoup appris par leurs textes, et tous ceux avec lesquels j’ai pu échanger. Je remercie aussi chaleureusement mes amis qui ont accordé de l’intérêt à la démarche et aux questionnements, avec un salut particulier à Eric, à Laurent, à Isabelle, à Karine, à Céline, à Florence, à Eddy, à Laurent, à Karine, à Giselle, à Jean-Paul, à Claudine, à Jean-Jacques, à Denise, à Manon, à Rosine , Caillou, à Elise, à Mado et compagnie. 5 6 RESUME Cette thèse porte sur le fonctionnement de la maîtrise d’ouvrage urbaine des grands projets d’aménagement urbain tels que l’Ile de Nantes-Rives de Loire, Lyon Confluence, et Euroméditérannée à Marseille. L’enjeu global est de saisir comment les territoires sont encore gouvernables à travers le développement de ces projets. L’analyse montre alors que les collectivités locales en particulier celles en charge de l’aménagement urbain sont devenues les principaux initiatrices et actrices de ces développements urbains. Ce ne sont ni les groupes sociaux structurés, ni des investisseurs privés qui ont permis l’émergence et la pérennité de ces processus de projet. Selon l’auteur, l’exercice de la maîtrise d’ouvrage urbaine revient à constituer les moyens pour faire advenir les projets mobilise des compétences de management de projet. Pour le décrire, l’auteur propose le terme de gouvernance de projet. A travers l’analyse du mode de programmation des projets, l’auteur montre que l’un des rôles majeurs de la maîtrise d’ouvrage urbaine est d’assurer la mise en compatibilité de l’ensemble des éléments du processus de projet. Et cette mise en compatibilité repose sur un rôle de mise en coordination de nombreuses activités et d’acteurs. Cela mobilise des acteurs et des institutions qui sont à la fois en situation de hiérarchie et d’indépendance les uns par rapport aux autres. De ce fait, les moyens de coopération et de construction d’accords sont sans cesse à reconstruire au sein de la maîtrise d’ouvrage urbaine : contrats, chartes, constructions de référentiels de projets sont mobilisés. C’est l’un des rôles de l’exercice de la maîtrise d’ouvrage urbaine. Cette mise en compatibilité est d’autant plus complexe que certaines structurations favorisent plus ou moins la maîtrise du processus. L’auteur observe que la mise en concordance des politiques publiques et des éléments du projet sur ces espaces de projets est complexe et cela peut présenter un risque. En l’occurrence, la création de SEM de projet présente le risque de l’extra-territorialité. De plus, les moyens de maîtrise des processus de mise en compatibilité sont relativement peu formalisés au sein de la maîtrise d’ouvrage urbaine. L’auteur évoque le référent –métier reposant sur un réseau professionnel et institutionnel qui permet de financer les projets, et de structurer la MOU avec des SEM. Afin de mieux évaluer leur action, l’auteur propose une évaluation de ces configurations de maîtrise d’ouvrage urbaine à partir des coûts de transaction. Enfin, l’auteur confronte plusieurs théories de la gouvernance urbaine avec 7 8 l’exercice de la maîtrise d’ouvrage urbaine, en indiquant dans quelle mesure plusieurs théories anglo-saxonnes ne permettent pas de rendre compte des caractéristiques de la maîtrise d’ouvrage urbaine des grands projets en France. De cette manière, nous avons décrit comment des acteurs des métropoles accueillant des grands projets d’aménagement les rendent gouvernables. Toutefois, cette gouvernabilité porte sur des territoires restreints, et reste fortement liée aux acteurs publics et parapublics. La mise en œuvre de cette gouvernabilité mérite d’autres évaluations précises en terme de coûts et de maîtrise de l’action publique. 9 10 SIGLES AIN AGAM AMO AURAN CCI CDC CNFPT COURLY CPA CU CUM CNR CUN DATAR DG DGP DGST DGDU EPA EPAEM IDN-RDL MO MOv MOU PEP PLU POS SCET SCI SEM SERL SPRLIN VNF ZAC Atelier Ile de Nantes Agence d’Urbanisme de l’agglomération Marseillaise Assistance à Maîtrise d’Ouvrage / Assistant à Maîtrise d’Ouvrage Agence d’Urbanisme de l’Agglomération Nantaise Chambre de Commerce et d’Industrie Caisse des Dépôts et Consignations Centre National de la Fonction Publique Territoriale Communauté urbaine de Lyon / Grand Lyon Convention Publique d’Aménagement / Concession Publique d’aménagement Communauté Urbaine Communauté Urbaine de Marseille-ProvenceMéditerranée Compagnie Nationale du Rhône Communauté urbaine de Nantes / Nantes Métropole Délégation à l’Aménagement du Territoire et l’Action Régionale Direction Générale Direction Générale des Projets Direction Générale des services Direction générale du développement urbain Etablissement Public d’Aménagement Etablissement Public d’Aménagement Euroméditerranée Ile de Nantes-Rives de Loire Maîtrise d’Ouvrage / Maître d’Ouvrage Maîtrise d’œuvre / Maître d’Oeuvre Maîtrise d’Ouvrage Urbaine Programme d’Equipement Public Plan Local d’Ubanisme Plan d’Occupation des Sols Société Centrale d’Equipement du Territoire Société Civile Immobilière Société d’Economie Mixte Société d’Equipement de la Région Lyonnaise Secrétariat Permanent des Rives de Loire et de l’Ile de Nantes Voies Naviguables de France Zone d’Aménagement Concerté 11 12 SOMMAIRE INTRODUCTION....................................................................................................................................... 15 A. LE CONTEXTE DU DEVELOPPEMENT DES GRANDS PROJETS URBAINS...................... 15 B. LES PROJETS ICONIQUES : DES PROJETS URBAINS ET DES GRANDS PROJETS D’AMENAGEMENT.............................................................................. 21 C. PROBLEMA TIQUE.................................................................................................................... 27 D. DEMARCHE ET METHODE....................................................................................................... 45 E. NOS HYPOTHESES.................................................................................................................. 57 PARTIE I DES PROJETS ICONIQUES FACE A LA CONCURRENCE METROPOLITAINE........... 59 PARTIE I. CHAPITRE I. L’ENJEU DES PROJETS ICONIQUES POUR DES METROPOLES FRANCAISES......................................................................................... 60 PARTIE I. CHAPITRE II. A LA RECHERCHE DE LA METROPOLE NANTES-SAINT NAZAIRE : LA METROPOLISATION, UN VIEUX FILON................ 67 PARTIE I. CHAPITRE III. LYON CONFLUENCE: UN PLAN STRATEGIQUE POUR LEGITIMER L’ACTION SUR LE CENTRE.......................................... 92 PARTIE I. CHAPITRE IV. LE PROJET EUROMEDITERRANNEE A MARSEILLE................. 113 PARTIE I. CHAPITRE V. DE LA METROPOLE D’EQUILIBRE NATIONALE A LA METROPOLE CONCURRENTIELLE................................................. 127 PARTIE II. LA MOU OU LA MISE EN COMPATIBILITE..................................................................... 139 PARTIE II. CHAPITRE I. LA MONTEE EN PUISSANCE D’UNE EXPERTISE URBAINE ET D’UNE ORGANISATION PAR PROJET DANS LES COLLECTIVITES LOCALES.............................................................. 142 PARTIE II. CHAPITRE II. LA MOU : COORDONNER POUR RENDRE COMPATIBLE....... 195 PARTE II. CHAPITRE III. LA MOU OU assurer la synthèse et LA MISE EN COMPATIBILITE................................................................................................................ 226 PARTIE II. CHAPITRE IV. LA MOU OU GERER UNE PROGRAMMATION URBAINE CONCURRENTIELLE ET INNOVANTE............................................ 252 PARTIE II. CHAPITRE V. LA MOU OULA MISE EN COMPATIBILITE ET LES REGIMES DE PRODUCTION...................................................................................... 322 13 PARTIE II. CHAPITRE VI. ORGANISATION EXTERNALISEE ET RISQUES POUR L’ACTION PUBLIQUE............................................................................................ 342 PARTIE III. LE PROJET COMME MODE D’ACTION PUBLIQUE REGULE.................................... 371 PARTIE III. CHAPITRE I. LA GOUVERNABILITE DES PROJETS........................................... 379 PARTIE III. CHAPITRE II. LA REGULATION A DIFFERENTES ECHELLES : TERRITOIRE METROPOLITAIN -ESPACE DE PROJET......................................... 397 PARTIE III. CHAPITRE III. MODES DE GOUVERNEMENT ET GOUVERNANCE DE PROJET................................................................................................................ 413 PARTIE III. CHAPITRE IV. LA REGULATION DE LA PRODUCTION DANS LES MOU...... 441 PARTIE IV. PETIT MANUEL DE LA GOUVERNANCE : LES THEORIES A L’EPREUVE DE LA MOU...................................................................................................... 461 PARTIE IV. CHAPITRE I. VERS DES MODES DE DEVELOPPEMENT TYPES POUR CES MOU?.................................................................................................... 461 CONCLUSION GENERALE................................................................................................................ 495 LISTE DES TABLEAUX................................................................................................................ 503 LISTE DES FIGURES................................................................................................................ 505 BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................ 507 ANNEXES................................................................................................................ 515 14 INTRODUCTION A. LE CONTEXTE DU DEVELOPPEMENT DES GRANDS PROJETS URBAINS 1. LE MARCHE DES TERRITOIRES COMME CONTRAINTE : LA METROPOLISATION COMME ISSUE Les territoires du monde sont en concurrence, qu’ils soient des zones de production agricole, des zones industrielles textiles ou des pôles de nouvelles technologies. Les métropoles européennes n’échappent pas à ce phénomène de concurrence entre territoires. Les villes sont aussi en concurrence entre elles (SAVITCH, KANTOR 2002). L’essor des outils de marketing urbain depuis plusieurs décennies ne le dément pas. En Europe, les réponses apportées par les métropoles sont diverses. Dans l’industrie automobile, des initiatives privées ont favorisé le rapprochement des fournisseurs et des monteurs de l’industrie automobile dans les régions rennaises et lyonnaises. Dans le domaine de le recherche et de l’industrie, des initiatives conjointes entre acteurs publics et privés pour la création de pôles de compétitivité (en production industrielle ou tertiaire) continuent de se développer. Face aux logiques récentes de spécialisation de certains territoires de production (la mode à Milan, ou d’innovation (le design à Barcelone) et aux délocalisations (industrie textile, électronique...), certains pouvoirs publics locaux cherchent à favoriser des dynamiques économiques sur leur propre territoire. Ces polarisations économiques et les développements urbains corollaires ne sont pas nouveaux. Par ailleurs, on constate la montée en puissance de l’action publique locale. Les institutions régionales, départementales, intercommunales et communales n’ont cessé de prendre le relais de l’Etat dans le développement économique, mettant parfois en concurrence des territoires d’une même région (le long conflit entre les villes de Metz et de Nancy est un célèbre exemple), d’une même agglomération urbaine (pour l’implantation d’entreprises et l’usage du foncier entre les communes périphériques et les commune-centre avant la taxe professionnelle unique en est un autre exemple ), d’un même « pays »... Ainsi, la concurrence entre territoires se fait à de multiples échelles, et les villes françaises et européennes se livrent à des batailles de promotion (dans les salons immobiliers tels que le MIPIM à Cannes, ou de tourisme....) depuis plusieurs années. 2. L’ACTION PUBLIQUE VOLONTARISTE COMME REPONSE A LA CONCURRENCE Dans ce contexte de marché concurrentiel des territoires, de nombreuses villes privilégient une logique de renforcement de leurs caractères métropolitains. Selon F. ASCHER (ASCHER 1995), la métropolisation est « la concentration d’activités stratégiques, identifiées par des fonctions (information, recherche, recherche industrie, commerce de gros, commerceindustrie), des secteurs d’activités (presse-édition, études et conseil et assistance, administration publique, recherche et enseignement supérieur, industrie, commerce international) et des professions (chefs d’entreprises, cadres, journalistes, chercheurs, ingénieurs architectes, médecins, cadres commerciaux, etc..). Notre observation des processus contemporains de métropolisation montre que la métropolisation prend en partie ces formes mais aussi d’autres formes. La ville post-fordienne européenne présente quelques caractéristiques. Beaucoup de territoires florissants de l’ère industrielle font aujourd’hui l’objet de projets de reconversions 16 économiques. Ces reconversions s’accompagnent souvent de requalifications urbaines. Ces projets de reconversion sont l’occasion de développer un processus de métropolisation de leur territoire. Dans certains cas, la concurrence se traduit par un investissement massif des pouvoirs publics sur certains territoires centraux des agglomérations. Ces territoires deviennent alors des signes de l’ultra-modernité d’une ville. Ces signes sont appelés à être visibles tels des drapeaux repérables sur la planisphère pour un investisseur économique quelconque. Dans cette logique concurrentielle, chaque territoire qui porte un drapeau cherche à se différencier de l’autre à travers son « offre urbaine ». En France, dans la conjoncture économique des années 1990, ces processus ne sont pas toujours initiés par le secteur économique privé. En effet, ils sont accompagnés de nombreuses actions publiques qui sont mal connues. Dans certaines villes, ces interventions portent sur des territoires centraux d’agglomération. Nous proposons d’en étudier trois : les projets Ile de Nantes, Lyon Confluence, et Euroméditerranée à Marseille. 3. LA METROPOLISATION ET LE LOCAL : UNE ACTION PUBLIQUE ORGANISEE En France, alors que la métropolisation « volontariste » étatique est un phénomène ancien, la métropolisation menée par les collectivités à partir des grands projets d’aménagement est assez méconnue, en particulier l’organisation interne des collectivités territoriales mise en place dans cet objectif. Etudier le rôle joué par les collectivités dans les nouvelles formes de métropolisation mobilise des connaissances sur l’action publique locale en France. Nous évoquerons dans ce champs des travaux issus de l’analyse des politiques publiques qui évoquent les rapports des élus locaux avec l’Etat (GREMION 1976, GAUDIN 1981) ou des élus communaux ou départementaux (MABILEAU 1992) ou régionaux (FAURE 1994) avec l’Etat. L’objectif est d’identifier les logiques de constitution de groupe d’individus pour assurer une maîtrise d’ouvrage de projet à travers leurs relations institutionnelles ou organisationnelles. Dans ses travaux, J.DUBOIS (DUBOIS 1995) concentre son analyse de l’action publique urbaine locale, sur les modes de regroupements et les interactions entre les groupes d’acteurs publics qui se sont mis en place à l’occasion des projets. Il ne caractérise pas les liens entre les modes d’organisations et les types de production qui en sont issus. Or, cela nous semble important pour comprendre la nature de la production urbaine aujourd’hui et en particulier celle des grands projets icôniques1 que nous étudions. Cet aspect 1 nous reviendrons plus loin sur notre usage du terme « icônique » 17 organisationnel est assez méconnu même si les projets étudiés par J. DUBOIS ont une forte portée icônique pour Montpellier et Aix–en–Provence. Cet aspect est étudié par un autre biais par O. BORRAZ (BORRAZ 2001). Ses recherches étudient les logiques internes des gouvernements urbains à travers le fonctionnement des équipes municipales. Il est alors question du mode de gouvernement communal à travers les notions de collégialité, de hiérarchie. Dans ses travaux, il évoque plus l’exercice de gouvernement que la production urbaine qui en est issue. Il recherche plutôt les aspects sociologiques du fonctionnement du gouvernement politique communal. Or, ce qui nous intéresse ici, ce sont les fonctionnements des équipes municipales ou intercommunales en lien avec une forme de production urbaine : le projet icônique. En somme, ce sont à la fois, les gestions techniques et politiques du processus de production qui nous préoccupent. Ainsi, notre approche se distingue des travaux sur la gouvernance locale et les gouvernements urbains qui évoquent les logiques d’institutionnalisation de certaines institutions locales, ou leur fonctionnement politique (PINSON, 2002). Nous ne sommes pas dans la perspective de l’étude de la gouvernance identifiant le rôle de la société civile, comme acteur de la régulation politique ou de la production urbaine (KOOIMAN 1993). Nous nous éloignons de ces approches de la gouvernance fortement influencées par une lecture marxiste des sociétés urbaines. Dans ces approches, l’impact de la gouvernance sur la production urbaine est traité à travers une lecture de la société urbaine structurée par des rapports de force entre groupes sociaux et institutions. La notion de gouvernance locale est focalisée sur les dimensions politiques et sociologiques, même si des effets de la gouvernance sur le processus et le projet urbain y sont évoqués. Ce n’est pas notre propos. Si nous mobilisons la notion de gouvernance c’est dans sa dimension de gestion politique d’un processus de production d’action publique et dans la dimension productive de cette gestion politique, dans ses effets sur la production urbaine. Ainsi, nous nous situons dans l’approche de la gouvernance liée au processus de production de la ville. Nous nous éloignons de ces aspects strictement politiques ou strictement sociologiques pour nous intéresser aux modes de production à travers l’étude des organisations, des ressources mobilisées sur les plans techniques, et des modes de programmation urbaine. Ce qui surprend dans les trois processus de projet étudiés, ce sont les aspects évolutifs des programmes, et l’ajustement des prévisions au fil du temps. Ces évolutions diffèrent à la fois par leur nature et leurs modalités. De nombreuses études cherchent à caractériser la production urbaine contemporaine, et évoquent la gouvernance en terme de mode de gouvernement (Etat-collectivités locales, centre-périphérie, Etatanimateur, Etat -médiateur, groupe social prédominant dans la 18 décision –arènes politiques...) ou encore la gouvernance financière. Elles nous renseignent sur les actions publiques locales, mais il semble qu’elles ne prennent pas en compte les modes de mise en œuvre des projets sous les aspects organisationnels des collectivités territoriales. Elles évoquent les modes de production urbaine en lien avec les différentes configurations d’acteurs, mais sur des objets urbains spécifiques (tramway, produit immobilier, un centre commercial et de loisirs...) et rarement à l’échelle d’un vaste territoire. Nous proposons de mettre évidence les liens entre le mode de production d’un projet et le mode de gouvernance locale à travers la notion de gouvernance de projet. Nous la préciserons plus loin. Pour étudier ces liens, nous nous intéressons à la gouvernabilité d’une forme d’action publique spécifique : le développement d’un projet icônique de métropolisation. 4. LA METROPOLISATION PAR LE PROJET URBAIN ICONIQUE A ce stade, nous allons définir les caractéristiques d’un projet icônique. La forme de métropolisation que nous étudions porte sur des territoires restreints qui font l’objet d’investissements financiers considérables dans les budgets municipaux ou intercommunaux. L’objectif général de ces projets de requalification est la constitution d’ « arguments urbains », d’une « vitrine » convaincante d’un magasin qui serait la métropole toute entière. En cela, ces territoire de projets sont des icônes de ces métropoles. L’objectif est d’attirer des investisseurs privés, des entreprises, des touristes ou d’autres acteurs du développement économique et urbain. Ainsi, en est-il des projets « Ile de Nantes », « Lyon Confluence » et « Euroméditérranée ». Nous avons retenu ces projets urbains comme espaces privilégiés d’observation de ce phénomène de métropolisation concurrentielle parce que les renouvellements de ces espaces urbains sont publiquement annoncés comme des « accélérateurs » de la métropolisation des territoires sur lesquels ils se trouvent. Ils sont annoncés comme des « porte–drapeaux » visibles de la métropole. Les processus de métropolisation pris au sens de « concentrations d’activités stratégiques » faisaient auparavant l’objet de politiques publiques nationales planifiées dans le cadre de l’aménagement du territoire (DATAR et CIADT, Plans du Commissariat au Plan). Ces processus de métropolisation étaient aussi des icônes avec les centres directionnels dans ces capitales régionales. A cette époque, l’élaboration de ces projets d’aménagement revenait en grande partie aux services de l’Etat (DDE, DATAR interministériel, CETE et autres organismes d’étude sur les infrastructures, missions chargées par exemple de plans de redéploiements ministériels du secteur de la santé,...). Ces processus de métropolisation étaient encadrés par des dispositifs législatifs : la création des métropoles d’équilibre en 1967, 19 la création de centres tertiaires supérieurs programmée par l’Etat (La Défense-Paris, CRITT et autres implantations de centre de recherches qui pouvaient être construits en périphérie des agglomérations). Ces politiques nationales de métropoles d’équilibre étaient dotées de financements importants et de fonds d’intervention élevé s pour l’époque : sur la période 1963-1970, les dotations s’élevaient à 246 milliards de francs pour les huit métropoles d’équilibre (BIAREZ 1989). Ces politiques n’existent plus. Aujourd’hui, le soutien de l’Etat pour la métropolisation des villes s’opère à travers une multiplicité de politiques sectorielles précises (pôles économiques, pôles de compétitivité nationaux et européens,...) et de dotations de fonctionnement réparties entre plusieurs collectivités locales. Ces processus de métropolisation ont plus tendance à être initiés par des collectivités territoriales, qui, depuis les années 1980, élaborent de plus en plus souvent leur propre stratégie urbaine. L’observation de la mise en œuvre des projets actuels permet de constater une redéfinition du rôle de l’Etat, la montée en puissance des collectivités locales dans cette dynamique de métropolisation, et le changement dans la nature des facteurs de métropolisation. En effet, comme dans les années 1960, les projets actuels proposent une requalification des infrastructures (transport, port...) sur le périmètre du territoire en projet, mais reposent aussi sur une programmation mélangeant à la fois les loisirs urbains, les évènements culturels, une programmation immobilière spéculative. Ainsi, la métropolisation se fait toujours par des icônes de la « modernité » telles que les infrastructures, mais aussi par des icônes de la « post –modernité ». Ces icônes ont en partie évolué. Si ces icônes ont pour rôle de constituer des signes voire des preuves du caractère concurrentiel de l’offre urbaine de ces territoires, leur rôle est de renforcer la visibilité internationale des métropoles qui les accueillent. Cette forme de métropolisation se fait, dans nos trois cas, par la mutation de friches urbaines à proximité des centres historiques. Elle a pour objectif de constituer des arguments urbains concentrés sur un territoire spécifique pour être attractif auprès des investisseurs économiques, ou immobiliers. 20 B. LES PROJETS ICONIQUES : DES PROJETS URBAINS ET DES GRANDS PROJETS D’AMENAGEMENT Les trois projets que nous étudions sont désignés de diverses manières. Dans certains cas, ce sont des « opérations complexes », si l’on se réfère au Club des maîtres d’ouvrage d’opérations complexes aujourd’hui nommé Club Ville-Aménagement (Club Ville Aménagement 1995), associant le Ministère de l’Equipement et des opérateurs institutionnels de l’urbanisme. Parfois, ils sont nommés « grandes opérations urbaines » par le Secrétariat Général des Grandes Opérations Urbaines du même ministère. D’autres fois, ce sont des « grands projets d’aménagement », ou des « projets urbains », à en croire l’usage qui en est fait dans les ateliers projet urbains, animés par le même Ministère. Par ailleurs, ces projets d’aménagement sont aussi présentés lors des rencontres nationales du « forum des projets urbains » chaque automne depuis 2003. Ainsi, les usages et les dénominations sont divers. Nous proposons de les qualifier encore autrement ces projets: « les projets urbains icôniques ». Dans un premier temps, il semble important d’évoquer quelques acceptions de cette notion de projet urbain afin d’en mieux saisir le sens. Le projet urbain peut indiquer un objet ou une démarche. A Barcelone, G. HENRY (CHARRIE 1995) qualifie aussi bien comme "projet", l’aménagement d’un espace public dans un quartier, que la planification de la « ville olympique ». Le projet urbain indique ici l’aménagement d’espaces d’échelles différentes. Il indique aussi un projet de ville, un projet d’agglomération, un projet de quartier. Selon A. LEVY, le projet urbain peut être l’expression d’une volonté politique de la société (TOMAS, 1995). Ici, nous utiliserons le terme projet urbain au sens d’un processus d’aménagement urbain, de transformation spatiale dans un périmètre circonscrit. Nous préférons éviter de parler d’ « opération urbaine » car cette expression est fortement connotée et liée à l’urbanisme opérationnel. Cette dimension opérationnelle subsiste dans le vocabulaire des acteurs contemporains mais aussi dans certaines pratiques d’aménagement. Les acteurs impliqués dans ces projets cherchent en fait à éviter la démarche d’un urbanisme opérationnel avec des ZAC sur des terrains à viabiliser, dans la mesure où il s’agit de processus de renouvellement urbain. Mais de fait, les outils de l’urbanisme opérationnel qui n’ont pas été conçus pour des démarches de renouvellement urbain sont encore utilisés aujourd’hui. 21 1. UN LIEU DE CONVERGENCE Lors d’un colloque intitulé « Projet urbain : de l’intention à la réalisation »2 organisé par la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) et la Direction de l’Aménagement et de l’Urbanisme (DAU) du Ministère de l’Equipement à Strasbourg, R. ADJEJ définit le projet urbain comme « une équation à [plusieurs] inconnues : technique, conceptuelle, économique, sociale, et une inconnue politique, à découvrir en premier ». Pour d’autres, « les projets servent à intégrer les acteurs, les institutions, les corps intermédiaires qui vont participer à la conception, et qui donneront corps à la mise en œuvre des actions » (OFFNER 1996). Du point de vue de l’action publique, le projet urbain apparaît comme un lieu de synthèse, de convergence sur un territoire de mise en œuvre d’actions souvent déclinées en politiques publiques (logement, transport,...). Le projet urbain a donc une dimension productive. Il implique des activités de conception. 2. UNE DEMARCHE DE CONCEPTION ET DE PRODUCTION B. HUET définit le projet urbain comme « une manière de produire de l’espace ou de la forme »3. Ph. PANERAI estime que « les élus se sont emparés du terme de « projet urbain » à la place de « politique urbaine », [que] le projet urbain est « une technique consistant à s’occuper de la forme urbaine »4. La prise en compte des formes urbaines relève de la composition urbaine. P. MERLIN définit la composition urbaine comme « la figuration tridimensionnelle d’une ville entière, ou d’une partie d’une ville, conçue et dessinée de façon suffisamment précise pour permettre la construction, et correspondant à une implantation sur un site réel ou décrit comme tel, compte tenu de ses accidents et particularités » (MERLIN, CHOAY, 2003). J-P. LACAZE (LACAZE, 1991) indique que la « composition urbaine a pour rôle de définir l’organisation de l’espace de la ville ou du quartier aménagé. [...] Ses objectifs sont de fournir une image globale, de fixer des règles sur la localisation, l’implantation et l’élaboration de projets successifs de construction » Un très important champ d’analyse et d’expertise du projet urbain s’est développé sous le vocable générique de « composition urbaine », en particulier dans les écoles d’architecture. Aussi, pour certains, un projet urbain implique un dessein ou un dessin de l’espace public5. Certains praticiens français6 depuis les années 1970, se distinguent dans l’élaboration d’une pensée urbaine par le 2 Actes du Colloque « Le projet urbain, de l’intention à la réalisation », Strasbourg, CDC-DAU, 1992. Actes du colloques, idem 4 Actes du colloques, idem 5 TSIOMIS Y, « le projet urbain », COURS EDVE, E.A Paris-Belleville. 18/05/2001. 6 F. GRE , Ch. DEVILLERS, B. REICHEN, B. HUET... 3 22 projet urbain, favorisant un travail important sur l’espace public (DEVILLERS 1994). De même, le projet urbain peut porter sur la transformation d’un territoire en renouvelant aussi ses vocations économiques, immobilières... Dans ce cas, il implique un travail de programmation urbaine. « La programmation urbaine est dans le processus d’études d’une création urbaine, la définition d’un « contenu » qui doit au moins au départ, être préalable à la définition du contenant » (LECUREUIL 2001). De nombreux travaux existent sur la programmation en France7, mais celle-ci est rarement traîtée sous l’angle des modalités de production à l’échelle urbaine. Ainsi, le projet urbain peut-il aussi bien être un programme d’équipement, d’immeubles que d’embellissement d’un espace public. Il peut aussi être entendu au sens d’un programme de transformation urbaine allant des infrastructures à la programmation immobilière. Du point de vue de certains praticiens qui débattent par exemple sur la notion ou en font la promotion dans le cadre de manifestation comme des « ateliers projet urbains », le projet urbain reflète aussi un modèle de ville. J-M DUTILLEUL déclarait à propos des projets de gare que « c’est le projet qui engendre la méthode » (DUTILLEUL 1997). Il défend alors l’usage des modèles dans la création car il permet une démarche créatrice collective. Dans ce cas, le projet est présenté comme un cadre de création qui implique la prise en compte d’un processus collectif dans la conception du projet. Selon la définition de ECOSIP, le projet se comprend aussi comme « une création collective organisée dans le temps et dans l’espace, en vue d’une demande » (ECOSIP 1993). Le projet urbain est aussi une conjonction de plusieurs types de savoirs et de compétences. En observant ces projets, on constate le recours à des expertises nouvelles, aux montages juridiques nouveaux... Le mode de production de la ville a évolué ces dernières années. Les propositions de méthode de production urbaine de J-P LACAZE faites dans un ouvrage cité plus haut, semblent remis en cause. Y JANVIER le souligne en notant la transformation et la superposition de certaines activités de la production urbaine dans le temps avec une remontée dans la phase amont de certains acteurs traditionnels intervenant plutôt en aval dans les processus de projet. Il évoque également que les « lieux de toutes les mises en convergence nécessaires [dans le processus de production] sont en grande partie à inventer » (JANVIER 2001). Diverses recherches sur l’élaboration des projets urbains en Europe indiquent des changements dans les manières de concevoir la ville contemporaine dans le cadre de projets urbains. Ainsi, les expertises nécessaires au développement du projet sont 7 Réseau de recherche RAMAU, Association IPAA... 23 définies au fil du projet (PROST 2001). Nous le verrons précisément avec les cas nantais et lyonnais. De même, la programmation urbaine est élaborée au fil du processus de projet. Les projets étudiés ne sont pas définis précisément lorsque leur budget est alloué et voté institutionnellement. Dans ses « nouvelles méthodes de l’urbanisme », F. ASCHER (ASCHER 2001) fait de la prise en compte de l’évolutivité, l’une des caractéristiques de la production urbaine aujourd’hui. Dans une certaine mesure, s’opèrerait dans le processus d’élaboration des projets le développement d’un régime de production concourant. En effet, « l’ingénierie intégrée [ou concourante] consiste à prendre en compte simultanément les besoins relatifs à s moment du cycle de vie d’un produit » (AFITEP 2000). Dans cette perspective, les processus de conception des projets méritent d’être étudiés (CLAUDE 2000). Notre attention portera sur la prise en compte de ces mutations dans l’élaboration des projets urbains sélectionnés. Le management des processus d’élaboration des projets suscitera tout notre intérêt afin de saisir des modalités de la production urbaine aujourd’hui. Dans ce champs, les travaux de N. ARAB (ARAB 2004) ont apporté un éclairage sur des modes d’analyse et de pilotage des processus de projet d’aménagement urbain tel qu’un tramway, ou un pôle de loisirs et de commerces. Notre travail porte lui sur des projets de territoires de taille plus importante qui concernent plusieurs centaines d’hectares. Notre travail s’intéresse aussi à certains éléments de conception. Dans ce cas, la conception est alors considérée comme « toutes les activités qui entrent dans la définition des choix de transformation de l’espace et celle du processus de production » (BEN MAHMOUD-JOUINI 2003). A la différence de N. ARAB, notre attention n’aura pas comme focus la gestion de la connaissance dans le processus de conception. Nous nous intéresserons dans une certaine mesure au pilotage des processus, et notre attention portera sur des modalités de la conception et de la production à travers certaines activités de conception qui sont assurées dans l’élaboration d’un projet telle que la mise en compatibilité et la coordination. Nous étudierons ce rôle de mise en compatibilité à travers deux aspects du processus d’élaboration de projet : la programmation et l’organisation. 3. LE PROJET, UN EXERCICE DE GOUVERNANCE URBAINE La longue littérature sur le portage politique des projets associe habituellement la vision d’un homme politique à un grand projet. En 1997, A.SAUVAGE et A. HAYOT introduisaient un colloque8 sur le projet urbain en demandant si « le projet urbain [ne] constituait [pas] 8 Actes du colloque « le projet urbain, enjeux, expérimentations et professions », Introduction, le 31/01/1997, Editions de la Villette, Paris, 2000 24 l’opportunité pour des citoyens de soutenir d’âpres conflits, [ou celle] de rendre les transformations spatiales moins aveugles de leurs attentes », et poursuivent en parlant d’un « inducteur d’un processus favorisant l’émergence d’espaces citoyens, accueillants, ouverts ». Le projet urbain est considéré comme « susceptible de donner matière à réflexion pour ceux qui vont décider ou plus généralement y participer plus ou moins directement » (BAUDIN 2000). Si le projet urbain mobilise des acteurs, il peut être une forme de discours sur la ville, ou un discours démocratique qui reste encore à organiser. Il peut faire émerger des logiques d’acteurs qui donnent lieu à certains rapports de force, comme ce fut le cas à Barcelone, ville souvent prise en exemple en terme de « participation ». Le projet urbain, vu sous l’angle de la gouvernance peut être défini par les processus complexes qu’il implique (organisation, définition d’une nouvelle légitimité des décideurs par exemple), et par la multiplicité d’acteurs qu’il mobilise. «Le projet urbain est [aussi] conçu par ses promoteurs comme une méthodologie de construction de la ville, à une échelle permettant l’organisation de la participation » (PINSON 1999). M. DELEBARRE disait à ce propos que « le projet urbain ne doit pas être que de la construction ou de l’urbanisme, il fait aussi de la démocratie ». Au-delà de cet aspect mobilisateur, il est également un objet de conception. 4. DES PRODUCTIONS URBAINES EN EVOLUTION Analyser cet objet de conception est assez rare, en particulier à travers des modes de production urbaine (concourant, planifié...). Aussi, allons-nous nous intéresser au processus d’élaboration au regard des modèles de management des processus de projet. Par exemple, nous évoquerons des innovations qui s’opèrent dans le processus et leur apport structurant pour l’ensemble du processus de production. L’observation de ces types de management, nous éclaire sur les modes contemporains de production urbaine, mais aussi sur les mutations dans les métiers, sur l’exercice de la maîtrise d’ouvrage urbaine et de la maîtrise d’œuvre urbaine. Ainsi, nous analysons cette dimension de la conception de projet urbain généralement résumée à la notion de dessein, de dessin, et de gouvernance urbaine. Nous constatons qu’il n’existe pas de modèle de la gouvernance urbaine pour le développement de ces projets : des arrangements plus ou moins stables sont possibles entre certains acteurs, mais il n’existe pas non plus un modèle général de fonctionnement. En effet, nous montrerons que les arrangements informels mis en place entre acteurs afin de faire advenir le projet, évoluent au fil du temps. Et c’est l’évolution des ces coopérations et les arrangements qui indiquent le degré de gouvernabilité des processus de 25 projet. Ainsi, le projet urbain est-il le lieu de convergence de plusieurs problématiques allant de l’action politique, à l’aménagement urbain, à la composition urbaine et architecturale (LEVY 2000) jusqu’au projet social. C’est en somme un instrument d’action sur la ville. Les divers usages du terme semblent par ailleurs faciliter l’adhésion d’acteurs différents, de nouveaux experts par exemple, sans forcément rendre plus ouvert l’accès aux débats démocratiques9. Le projet urbain apparaît alors comme un « artéfact » au croisement de plusieurs projets : projection d’une idée par la composition et par la forme urbaine, projet politique avec des dimensions sociales et culturelles, projet d’innovation dans certains cas. Il constitue un cadre pour l'action publique et une forme de territorialisation de l’action publique. On constate des évolutions dans le mode de développement des projets urbains : les acteurs intervenants ont changé. L’Etat apparaît sous des formes diverses (agences parapubliques, filiales d’agences...). Les collectivités locales qui sont parmi les principaux investisseurs financiers de ces projets. Les partenariats entre acteurs institutionnels font l’objet d’innovations (contrats, montages juridiques...). les organisations internes des collectivités locales évoluent. Depuis la décentralisation, celles-ci ont connu d’importantes transformations avec les lois sur les regroupements institutionnels intercommunaux (exemple : loi Chevènement 1999) des tendances nouvelles émergent dans les pratiques : l’association promoteurconcepteur-investisseur se développe... 9 Colloque « Questions de projets », IFU, 2002 26 C. PROBLEMATIQUE Les projets choisis sont aussi appelés des « opérations complexes » ou des « grands projets d’aménagement urbain ». Nous proposons un autre terme : les projets icôniques. En effet, les collectivités locales s’inscrivent dans une logique de marketing territorial. Le marketing territorial actuel affirme la nécessité des qualités spécifiques de l’offre urbaine pour qu’elle reste concurrentielle. Ces qualités peuvent être des produits immobiliers innovants, de la programmation urbaine, de la composition urbaine innovante, ou des combinaisons de programmes urbains attractifs de par l’importance de l’offre. Aussi, les collectivités locales tentent-elles de concevoir des projets innovants dans cette logique concurrentielle. Etudier le rôle des collectivités locales dans ce cadre revient à étudier comment les gouvernements des territoires s’organisent pour inventer des projets, développer des concepts, des territoires « concurrentiels ». L’un des enjeux pour les collectivités locales impliquées dans leur développement économique et urbain est de parvenir à concevoir des territoires concurrentiels. Il faut alors s’organiser de manière à trouver un aménagement de territoire basé sur un ou plusieurs concepts innovants pour devenir un espace attractif. Pour cela, il faut aussi définir les modalités et les outils adéquats en vue de cet aménagement urbain innovant. Nous observons dès lors l’élaboration de produits innovants (immobiliers, assemblages de loisirs nouveaux...) mais aussi un certain nombre d’innovations dans les processus afin que cette offre concurrentielle soit produite. C’est ce que nous proposons d’analyser dans nos études de cas. Cela revient à étudier les acteurs de ces processus, ce que nous appelons les acteurs de la maîtrise d’ouvrage du projet. De façon générique, nous décrirons l’ensemble des moyens mis en œuvre pour développer chaque projet comme la « maîtrise d’ouvrage urbaine » du projet (MOU). Nous définissons la MOU comme les acteurs mais aussi comme l’ensemble des « moyens mis en œuvre » afin de faire advenir ces projets icôniques. Les ressources mobilisées par les acteurs sont multiples : organisations, dispositifs institutionnels, financements privés, législations, innovations juridiques... Ces ressources peuvent être financières, humaines, cognitives, médiatiques, politiques, juridiques... C’est la mobilisation et la mise en musique de tous ces moyens que nous associons à l’exercice de la MOU. Notre étude ne permettra pas d’évoquer de façon exhaustive ce que peut-être l’exercice de la MOU, mais elle s’intéressera à certains moyens et ressources sollicités, en particulier, les expertises mobilisées en vue de la programmation urbaine et en vue de la mise en compatibilité de ces éléments de programmation. Nous étudierons cette mise en compatibilité à travers l’étude de la coordination entre acteurs techniques, en particulier à travers l’étude de ressources mobilisées 27 par les acteurs institutionnels en charge de la compétence d’urbanisme sur les territoires concernés. Ces acteurs techniques font partie de la maîtrise d’ouvrage urbaine du projet. Dans le cadre des projets étudiés, l’un des enjeux de la MOU en terme de management de projet et de management public local est de permettre la conception d’un produit innovant ou du moins concurrentiel. Cette logique est comparable à celle d’une entreprise (BOUINOT, BERMILLS 1992, ROSEMBERG 2000) qui doit concevoir un produit innovant pour être concurrentiel sur son marché. Ce produit innovant est ici un territoire réaménagé, qui aura pour rôle d’être une icône pour l’ensemble de la ville. Elle est alors le symbole d’un changement, d’une offre innovante, et c’est aussi un « porte-drapeau », un symbole d’un territoire plus vaste mise sur une infirme surface de son territoire, qui serait un échantillon ou le meilleur de l’œuvre collective des acteurs locaux. Le développement de certains projets urbains s’inscrit dans cette dynamique de concurrence, en proposant de la qualité et de l’innovation (par des produits innovants, par le développement de niches en terme de marché immobilier...). Les évolutions de l’économie industrielle ces dernières décennies peuvent être éclairantes, pour identifier des évolutions sur un autre marché économique, celui des territoires. Comme les produits industriels dans les années 1970-85 qui, pour être concurrentiels devaient se différencier des autres, les territoires métropolitains français sont aujourd’hui dans une logique de croissance variée comparable. Elles doivent offrir aux investisseurs des produits variés afin de se distinguer des autres villes et d’être l’un des sites choisis. Pour être concurrentielle, cette offre variée doit aussi accompagner une offre de quelques produits innovants. En effet, dans les projets que nous étudions à l’image de la production industrielle récente, les territoires doivent également offrir des produits novateurs. Ces innovations peuvent porter soit sur les produits, soit sur la programmation, soit sur la composition, soit sur l’ambiance urbaine... Dans cette logique, les territoires en friches sont devenus des moyens de dépasser la crise de l’offre pléthorique de territoire en recourant à l’innovation. Bien que les innovations sur les produits offerts dans les projets ne soient pas l’objet de notre étude, il reste primordial de les évoquer dans la mesure où cette contrainte de l’innovation des produits génère des positionnements et des montages spécifiques. Ces montages peuvent à leur tour constituer des modes d’action innovants pour les acteurs de l’aménagement urbain. D’ailleurs, cette contrainte de l’innovation est d’autant plus prégnante que les projets étudiés ont pour rôle d’être les symboles de la capacité d’innovation des acteurs de ces territoires de manière générale. La saturation des marchés de territoires poussent les villes à gérer la concurrence par l’innovation dans l’offre, par la recherche d’une stratégie de niches, afin d’éviter 28 l obsolescence de leur offre urbaine sur ce marché des territoires. Cela caractérise l’exercice de cette maîtrise d’ouvrage urbaine. A travers l’étude de l’élaboration de ces projets, on évoquera des aspects de développement endogènes ou exogènes. De même, notre intérêt se portera sur les modalités de conception de ces innovations, telles que l’internalisation ou l’externalisation, et ce, dans une perspective d’analyse des mutations dans le management des organisations publiques et dans le cas de management de projet innovants. En somme, dans le cadre de ces projets, l’un des enjeux de la maîtrise d’ouvrage urbaine est d’assurer la conception d’un projet complexe et innovant, et ce, durant plusieurs années. 1. LE MANAGEMENT DE PROJET ET LA MISE EN COMPATIBILITE Le management de projet est une « démarche spécifique qui permet de structurer méthodiquement et progressivement une réalité à venir pour laquelle on n’a pas encore d’équivalent exact » (AFITEP-AFNOR 1989). La notion de « management de projet » implique par exemple des notions de maîtrise des coûts, du temps, de réalisation... Nos cas d’étude sont des projets urbains qui se développent sur plusieurs années. La question des délais et des coûts est sans cesse redéfinie. La « réalité à venir » est effectivement indéfinie. Dans son manuel sur le management de projet, M. RAABE (RAABE 2001) ne dit pas le contraire concernant l’aménagement urbain : « la justification des projets est devenue la principale préoccupation des décideurs. Celle-ci s’appuie sur des simulations financières fondées sur des analyses de rentabilité et de risque ». Les études sur les processus de développement de projet d’aménagement urbain amènent souvent les mêmes conclusions : le management de projet correspond à quatre fonctions à assurer: [L’élaboration de la politique urbaine, le portage politique, le pilotage technique, la régulation des différents acteurs] (JANVIER, MASBOUNJI 2001). Selon J-L POIDEVIN, l’aménageur fait la « synthèse entre la conception du projet et la mise en œuvre opérationnelle entre plusieurs intervenants » (POIDEVIN, MASBOUNJI 2001). Cette activité de synthèse correspond en partie au rôle de l’aménageur mais aussi à celui des collectivités qui délèguent des missions d’aménagement. Intervient alors la notion de maîtrise d’ouvrage urbaine. L’identification des rôles proposés par Y. JANVIER semble refléter le rôle de la multiplicité de l’ensemble des membres de la maîtrise d’ouvrage urbaine. Elle comprend aussi bien les acteurs des institutions délégantes que les sociétés d’aménagement auxquelles est délégué l’aménagement des projets. Ainsi, l’un des rôles à tenir à travers le pilotage technique, la politique urbaine, le portage politique et la régulation des acteurs est la mise en compatibilité de l’ensemble. C’est ce qu’évoque la notion d’ensemblier souvent utilisée pour décrire l’exercice de la maîtrise d’ouvrage urbaine. 29 Notre choix d’analyse de la maîtrise d’ouvrage urbaine (MOU) s’est porté sur la gestion de la mise en compatibilité comme objet d’analyse. Cela nous amène à identifier certains risques au fil du développement des processus, au cours de l’exercice de cette MOU. Par ce biais, nous proposons une évaluation de ces risques à partir de certains problèmes de production que sont les modes de d’organisation ou les outils mis en place pour gérer certaines difficultés de développement du projet. Ainsi, notre approche est une étude de certains aspects du management du processus d’élaboration d’un projet urbain. Ces activités sont à assurer par des acteurs, qui pour une partie, sont regroupés sous le vocable de « maîtrise d’ouvrage urbaine ». L’un des rares ouvrages sur le management de projet en urbanisme publié par l’association internationale du management de projet (PMP), fut réalisé dans un esprit d’adaptation des outils de management de projet en général aux processus d’aménagement foncier. Mais l’auteur de cet ouvrage, Terry A. CLARCK (2002) prend peu en compte l’organisation des acteurs en charge ces projets. De plus, la dimension aléatoire d’un processus sur le long terme est peu traîtée dans son approche des outils de gestion de projet. Pourtant, l’expérience montre que la notion d’organisation des équipes de projet est une donnée fondamentale du management de projet urbain. En effet, la montée en puissance des acteurs privés de l’aménagement pose la question du repositionnement des acteurs traditionnels de la production urbaine (OPAC, SEM, Ville, grandes entreprises du BTP...). De même, la généralisation des regroupements intercommunaux a modifié le rôle des acteurs communaux et intercommunaux. L’intégration de l’Union Européenne a également favorisé le renforcement des agences parapubliques telles que RFF, VNF,... en tant qu’acteur de la production urbaine. C’est pourquoi, il est important de s’intéresser à l’organisation des acteurs de la production urbaine. Par ailleurs, les objectifs des projets étudiés ne sont pas énoncés de manière précise : ni la nature du produit final (ici, c’est un territoire réaménagé), ni les moyens (à la fois les moyens financiers ou humains et les modalités juridiques ou contractuelles) ne sont déterminés à l’avance. L’objectif majeur connu au début des processus est de renforcer la métropolisation des territoires dans lesquels les projets sont inscrits. Notre approche propose de traiter de certains aspects du management de projet mais pas de tous.
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I.2.6. Fraction soluble de OC L'étude de la fraction de OC soluble dans l'eau revêt principalement une importance en ce qui concerne l'impact climatique des aérosols carbonés (voir paragraphe I.3). On peut distinguer deux fractions dans l'OC: le WSOC (Water Soluble Organic Carbon) et le WISOC (Water InSoluble Organic Carbon). Il existe plusieurs méthodes de mesure de cette fraction soluble à partir d'un échantillon d'aérosol collecté sur un filtre. En particulier, le protocole de solubilisation utilisé est un paramètre important et conduit à des résultats variables. La méthode utilisée lors de notre étude est décrite dans le chapitre III. Le tableau I.9 récapitule un certain nombre de résultats récents de mesure de la fraction WSOC des aérosols. Il faut en premier lieu noter que, pratiquement pour chaque étude, un protocole expérimental différent à été utilisé, en terme de débit de pompage de l'aérosol, de diamètre de coupure du prélèvement, d'extraction de l'échantillon, de son analyse, à la fois pour la détermination de OC et de WSOC. Ces études sont donc difficilement comparables entre elles de manière stricte. De plus, ces études ont généralement été conduites très ponctuellement. L'étude proposée par Decesari et al. (2001) couvre la plus longue période de temps, avec 40 échantillons collectés sur le même site entre Janvier 1998 et Mai 1999. Toutefois, les prélèvements n'étaient pas continus mais déclenchés 2 à 3 fois par mois pendant 1 à 4 jours sur des périodes correspondant à des conditions météorologiques sélectionnées (stabilité anticyclonique, absence de précipitations). En fait, ces études concernent généralement des périodes courtes correspondant à des épisodes spécifiques, ou à des es de sources, généralement peu représentatives d'une évolution moyenne réelle. L'étude de Sullivan et al. (2004) est quelque peu différente dans la mesure où les prélèvements et analyses de WSOC sont effectués en continu, et toute les heures pour OC et EC. Ces deux caractéristiques générales (pas de méthode standard de mesure et assez peu d'études) 70 s'expliquent pas le fait que l'intérêt pour la fraction WSOC est assez récent, les résultats publiés ayant ainsi indéniablement un caractère pionnier. Cet intérêt est accru par les progrès technologiques, et la méthode de caractérisation chimique proposée par Decesari et al. (2000) semble plus prometteuse (au moins à court et moyen terme) que la spéciation chimique moléculaire par GC/MS. En effet, le rendement des analyses par GC/MS, ne rendant compte que de quelques dizaines de % au plus des molécules formant OC, chute considérablement pour les espèces les plus solubles dans l'eau. Au contraire, la technique proposée par Decesari et al. (2000), que nous ne développerons pas ici, permet de classer généralement plus de 70% de la masse de WSOC en trois catégories : (1) les composés neutres ou basiques, (2) les acides mono- et di-carboxyliques (voir paragraphe I.2.7), et (3) les composés organiques polyacides. Cette dernière catégorie contient en particulier les HULIS (Humic-Like Substances), macromolécules s'apparentant aux acides humiques ou fulviques. Les HULIS peuvent former une partie importante de WSOC (entre 21 et 55% sur certains sites Européens, selon Zappoli et al., 1999). Les sources des HULIS sont encore très mal connues. Elles peuvent être primaires comme les feux de biomasse (Facchini 71 et al., 1999). Cependant, des sources secondaires doivent être envisagées pour expliquer les niveaux observés, et un certain nombre de processus de formation par réactions hétérogènes (polymérisation) de composés d'origines anthropiques et naturelles, catalysées par des particules contenant de l'acide sulfurique, ont récement été proposés (Limbeck et al., 2003; Kanakidou et al., soumis, et références incluses). Il a aussi récemment été démontré que des HULIS pouvaient être formées par l'oxydation atmosphérique des suies (Decesari et al., 2002). Ce type de réaction, dont l' réel n'est encore pas quantifié, rend la particule de suie plus hydrophile et acide, et donc potentiellement susceptible de se comporter en noyau de condensation nuageuse, phénomène observé en laboratoire (Kotzick et Niessner, 1999). Quelques éléments ressortent toutefois de ces études. D'abord, les concentrations en WSOC se retrouvent généralement dans une gamme entre 0,6 et 5 μg/m3, sauf pour le site de Tokyo ou des valeurs très fortes de l'ordre de 20 μg/m3 sont atteintes. Ces valeurs extrêmes sont cependant à relativiser car elles ont été mesurées lors de pics de concentration de PM10 supérieures à 100 μg/m3. Ensuite, les concentrations atmosphériques en WSOC semblent avoir tendance à augmenter en valeur absolue lorsque l'on se rapproche des sources anthropiques. 72 Sur des sites influencés par des feux de biomasse en Amazonie, Graham et al. (2002) mesures des rapports WSOC/OC compris entre 41 et 74%. Les auteurs, s'appuyant sur les travaux de Novakov et Corrigan (1996) qui ont mesuré en laboratoire des rapports inférieurs à 5% pour des émissions par combustion avec flamme d'Eucalyptus mais supérieurs à 40% pour des feux couvants, concluent que les sources d'OC sont principalement des feux couvants. Toutefois, les processus de vieillissement de OC ne sont pas pris en compte dans l'étude de Graham et al. (2002), et il est possible que leur influence soit en partie au moins responsable de ces valeurs élevées, rendant l'hypothèse sur les sources relativement incertaine. Il existe donc très peu d'études de l'évolution de cette fraction soluble dans le temps et selon les conditions environnementales. Le tableau I.9 montre, pour les sites où des études ont été réalisées à des périodes différentes de l'année, que si des différences été-hiver existent, il n'est pas de cycle saisonnier apparaissant de manière évidente, ni dans les concentrations en WSOC, ni dans leur contribution à OC. Finalement, le peu d'études existant montre que la fraction soluble de OC représente généralement entre 10% de OC au plus près des sources de combustion et peut représenter plus de 70% de OC pour un aérosol âgé. Les sources de WSOC pourraient donc être principalement secondaires, bien que les connaissances actuelles ne permettent pas de les quantifier précisément. Ce constat est aussi valable dans le cas particulier de sites influencés par les émissions anthropiques. La voie ouverte par les travaux de Decesari et al. (2000) pour l'étude de WSOC est très prometteuse. Ceci dit, une première étape essentielle et très peu ée à ce jour concernant l'étude de WSOC est sa mesure en atmosphère réelle, et l'interprétation des niveaux de concentration en fonction de traceurs de sources et de processus de vieillissement. Enfin, il n'existe pas à notre connaissance d'étude sur un cycle annuel complet de l'évolution de cette fraction soluble de OC. I.2.7. Acides dicarboxyliques Les acides dicarboxyliques font partie des espèces chimiques identifiées de la matière carbonées et certains d'entre eux ont été quantifiés sur un assez grand nombre d'études. Les acides auxquels nous nous intéresserons ici sont ceux que nous avons mesurés lors de notre étude, c'est-à-dire les ions oxalate (C2), glutarate (C5), succinate (C4), malate (C4), malonate (C3), et tartarate (C4) (voir chapitre II). Selon toute vraisemblance, ils sont présents dans l'atmosphère essentiellement en phase condensée plutôt que gazeuse en raison de leur faible pression de vapeur saturante (Saxena et Hildemann, 1996). Ceci implique qu'ils ne sont à priori pas ou peu soumis aux artéfacts de collecte constatés pour la fraction semi-volatile de OC, au contraire des monoacides carboxyliques (formate et acétate). Le caractère semi-volatil de ces composés a toutefois en partie été remis en cause par Limbeck et al. (2001) lors d'une étude de terrain en Afrique du sud. Ceci dit, la méthode de prélèvement employée et le faible nombre d'échantillons collectés ne permet pas de conclure de manière satisfaisante sur ce 73 caractère semi-volatil ou sur de possibles artéfacts de mesure de ces composés par la méthode utilisée. Nous ferons donc l'hypothèse que les artéfacts de mesure sont faibles pour les acides dicarboxyliques que nous avons mesurés (voir la méthode, chapitre III), en gardant à l'esprit que cette hypothèse est à vérifier. Ces diacides sont très solubles dans l'eau, et sont donc des constituants de la fraction soluble de OC, WSOC. Leur extraction est donc simplifiée par rapport à d'autres espèces constitutives de OC, et plusieurs méthodes 'analyse permettent de séparer et doser ces espèces dans des échantillons atmosphériques (IC, GC, GC-MS). L'étude de ces composés, qui ont le mérite d'être mesurables relativement aisément, permet donc de renseigner la fraction de OC qu'ils représentent. I.2.7.1. Sources d'acides dicarboxyliques Il existe dans la littérature assez peu de mesures d'acide dicarboxyliques dans les profils chimiques d'émissions par les sources primaires de composés organiques. La source primaire d'acides dicarboxyliques par la combustion de fuel fossile a été mise en évidence notamment par Kawamura et Kaplan (1987), en prélevant l'aérosol à l'échappement d'une voiture. Toutefois, Grosjean (1989) a estimé, lors d'une étude à Los Angeles, que les acides dicarboxyliques émis par la source véhiculaire ne représentaient qu'un très faible pourcentage (2%) de la masse d'acides organiques émis par cette source (largement dominée par les acides formique et acétique). L'influence réelle de cette source sur les concentrations atmosphériques n'est pas évidente, même en zone urbaine (Chebbi et Carlier, 1996). Des mesures d'acides dicarboxyliques dans des panaches de feux de biomasse en Indonésie par Narukawa et al. (1999) et par Graham et al. (2002) sur des sites de prairies et forêts d'Amazonie en période de feux naturels indiquent que les combustions de biomasse constituent une source potentielle. D'autre sources primaires potentielles, telles que des émissions directes par les sols (Kawamura et Kaplan, 1987) ou par les plantes (Rogge et al., 1993) semblent extrêmement faibles. La source secondaire d'acides dicarboxyliques a notamment été mise en évidence lors d'études de terrain par Kawamura et Ikushima (1993). A partir de cycles saisonniers de concentrations atmosphériques, les auteurs estiment que la production secondaire d'acides dicarboxyliques est prépondérante en été par rapport à une possible source primaire. Dans cette étude, la production secondaire d'acide oxalique, malonique et succinique a été mise en évidence, et les auteurs concluent que l'acide oxalique est probablement un produit de fin de chaîne d'oxydation de certains composés aromatiques et même d'autres diacides comme les acides malonique ou succinique. Un certain nombre d'études en chambre de simulation avaient déjà montré la possibilité d'une production secondaire d'acides dicarboxyliques en phase homogène. Grosjean, en 1976, a proposé que les acides dicarboxyliques puissent être formés directement dans l'atmosphère à partir de l'oxydation de composés organiques tels que 74 des oléfines cycliques, d'origine anthropique. La production d'autres acides dicarboxyliques tels que les acides succiniques (Hatakeyama et al., 1985), glutariques ( takeyama et al. 1985; Hatakeyama et al., 1987) à partir de différents COV essentiellement d'origine anthropique, a aussi été démontrée en chambre de simulation. Enfin, la formation d'acide oxalique en phase aqueuse (dans le nuage) a été proposée par Chebbi et Carlier (1996), et plus récemment, Ervens et al. (2003) et Warneck (2003) ont proposé des mécanismes de formation d'acide oxalique en phase aqueuse. Ervens et al. (2004) estiment à partir d'une approche par modélisation que la production en phase aqueuse d'acides dicarboxyliques à chaîne courte pourrait être significative. Notons finalement que les sources d'acides dicarboxyliques sont très mal connues, même si les sources secondaires semblent dominantes. I.2.7.2. Concentrations atmosphériques et cycles saisonniers Bien que relativement peu nombreuses, les mesures in-situ d'acides dicarboxyliques dans l'aérosol couvrent une gamme assez vaste de typologies de sites. Il existe par exemple des mesures sur des sites marins (Kawamura et Sakagushi, 1999), arctiques et antarctiques (Kerminen et al., 1999; Ricard et al., 2002; Kawamura et al., 1996), côtiers (Bardouki et al., 2003; Krivacsy et al., 2001) d'altitude (Krivacsy et al., 2001) ou encore embarquées dans des avions (Mader et al., 2003). Dans le cadre de notre étude, nous nous intéressons plutôt à des sites ruraux à urbains, et si possible à des études de cycles saisonniers. Le tableau I.10 présente des concentrations d'acides dicarboxyliques mesurés dans l'aérosol sur différents sites semi-ruraux à très influencés par le trafic routier. On notera que l'acide oxalique est systématiquement la plus abondante de ces espèces, avec des concentrations généralement comprises entre 100-400 ng/m3, sauf sur l'étude de Sempéré et Kawamura (1994), ou les concentrations dépassent 1 μg/m3 sur des échantillons collectés en été. On remarquera en fait que toutes les concentrations mesurées lors de cette étude sortent assez largement des gammes de concentrations habituellement observées. Les auteurs ne proposent pas d'explication à cela. Les acides malonique et succinique sont les seconds acides dicarboxyliques les plus abondants dans l'aérosol (10 à 100 ng/m3), les autres acides dicarboxyliques étant mesurés moins fréquemment et en quantité plus faibles. Ces observations sont en accord avec les observations de Chebbi et Carlier (1996). Notons que nous n'avons pas trouvé de concentrations d'acide tartarique dans la littérature sur ces types de site. L'étude de Kawamura et Ikushima (1993), dont les concentrations moyennes sont rapportées ici, présente aussi des cycles saisonniers des contributions des acides oxaliques, malonique, succinique et malique au carbone total (TC) à partir de valeurs mensuelles. Ces contributions montrent toutes un signal saisonnier avec des contributions maximales en été 75 (de 0,15% pour le malate à 1% pour l'oxalate) et minimales en hiver (inférieures à 0,01% pour le malate et 0,1% pour l'oxalate). Ce cycle saisonnier est en accord avec celui observé par Sempéré et Kawamura (1994), et est cohérent avec une production secondaire de ces espèces maximale en été. Il est par contre contraire à celui observé par Yao et al. (2004) sur trois sites à Honk Hong, où les valeurs sont minimales en été et maximales en hiver. Kawamura et Ikushima (1993) ont observé lors de leur étude à Tokyo une variation saisonnière assez marquée du rapport massique des concentrations en acides malonique et succinique (noté C3/C4). Le rapport est maximal en été (jusqu'à 3), et minimal en hiver (inférieur à 1). Les auteurs expliquent cette saisonnalité par le fait que le rapport à l'émission véhiculaire mesuré par Kawamura et Kaplan (1987) est 0,35 en moyenne (0,25 à 0,44), et font l'hypothèse qu'une augmentation de ce rapport pourrait être un indicateur de production photochimique de diacides. Il faut toutefois être prudent, et nous noterons que les émissions véhiculaires de diacides mesurées par Kawamura et Kaplan (1987) l'ont été sur 2 véhicules seulement : 1 Toyota Corola 1,8l essence année 1982, et une Mercedes Benz 220D 2,2l 76 Diesel année 1971, pour lesquelles le rapport massique C3/C4 mesuré est de 0,29 et 0,52 (ce qui ne correspond d'ailleurs pas tout à fait aux valeurs rapportées par Kawamura et Ikushima (1993). A notre connaissance, il n'existe pas d'autres mesures de ce rapport à l'émission par la source véhiculaire. On peut donc dès lors se demander dans quelle mesure cet échantillon est représentatif de l'ensemble d'un parc automobile quel qu'il soit, et en particulier du parc automobile actuel sur les sites de notre étude, étant donné notamment l'évolution des moteurs et la présence de poids lourds. Yao et al. (2004) utilisent ce rapport pour estimer les impacts des sources primaires véhiculaire et secondaire. Ces auteurs relèvent que ce rapport est, dans plusieurs études, inférieur à l'unité pour des émissions véhiculaires, et supérieur à l'unité pour des sites influencés par la production secondaire d'acides dicarboxyliques. Toutefois, on peut trouver un certain nombre d'études où ce rapport est inférieur à l'unité pour des sites naturels : 0,07 à 0,44 en Antarctique (4 échantillons sur un site côtier en Antarctique, Kawamura et al., 1996), ou encore proche 0,5 en moyenne sur deux ans de mesures en continu sur un site naturel en Finlande (Ricard et al., 2002), et où ce rapport est supérieur à l'unité pour des sites urbains (2,1 sur 3 échantillons à Vienne, pour Limbeck et Puxbaum, 1999). De plus, Graham et al. (2002) rapportent des rapports C3/C4 de l'ordre de 0,8 sur des sites amazoniens très influencés par des combustions de biomasse. I.3. Enjeux de l'étude des aérosols et de la matière carbonée contenue dans les aérosols Les études de l'aérosol sont très généralement motivées par deux buts précis développés dans les deux paragraphes suivants : l'impact sur le climat et l'impact sur la santé humaine. D'autres motivations existent, telles que l'impact sur les écosystèmes, ou sur des intérêts humains tels que la détérioration des bâtiments, ou encore la dégradation de la visibilité ayant éventuellement des conséquences potentielles sur le tourisme. Mais les fonds 77 consacrés à ces types de programmes de recherche sont finalement marginaux par rapport aux aspects climatiques et sanitaires. Décrire exhaustivement les différents processus de causalité entre les particules atmosphériques, particulièrement leur fraction carbonée, et leurs effets sort du propos de cette étude, d'autant qu'ils ne sont encore souvent que mal compris et leurs estimations très incertaines. Nous présentons seulement dans cette partie les différents enjeux de l'étude de OC et EC, dans le cadre d'abord de l'impact sanitaire puis de l'impact climatique. I.3.1. Impacts sanitaires et actions des pouvoirs publics I.3.1.1. Impact sanitaire L'une des premières mises en évidence de relation directe entre santé publique et taux d'exposition aux particules a été effectuée par Dockery et al. (1993) lors des travaux menés dans 6 villes américaines. Des niveaux élevés de particules y ont été associés à un affaiblissement des fonctions respiratoires (souffle court, asthme) ainsi qu'à des maladies chroniques du système pulmonaire pouvant aller jusqu'à des cancers des poumons et des maladies cardio-vasculaires. Cette relation a, depuis, été confirmée et affinée par de nombreuses études épidémiologiques mettant en relation maladies respiratoires et concentrations totales des particules (Abbey et al., 1999), émissions particulaires diesel (Salvi et al., 1999) ou le nombre de particules appartenant au mode fin de l'aérosol (Peters et al., 1997). Schématiquement, plus les particules sont fines, plus elles pénètrent profondément dans le système respiratoire (Berico et al., 1997). Ainsi, les particules de diamètre inférieur à 2,5 μm franchissent les voies de respiration haute (nez et pharynx) et peuvent atteindre les bronchioles et alvéoles pulmonaires. Celles supérieures à 2,5 μm sont, quant à elles, efficacement piégées en amont des poumons et éliminées par déglutition. Les fines particules (Dp<2,5 μm) jouent donc un rôle prépondérant dans la problématique de santé publique. Emises directement dans l'atmosphère, essentiellement lors des combustions de matières organiques, ou formées in situ par des processus de conversion gaz/particules (Figure XX), ces fines particules contiennent une beaucoup plus grande proportion de matière organique que celles appartenant au mode grossier (Putaud et al., 2004). particules permettent donc la pénétration dans les voies respiratoires de composés toxiques comme certains acides ou hydrocarbures ayant des propriétés mutagènes et cancérogènes même à basses concentrations. Au delà de la composition chimique des particules inhalées, les particules sont également susceptibles d'irriter les voies respiratoires (Wilson et Spengler, 1996) favorisant par là même les échanges entre les polluants gazeux et particulaires et les réseaux lymphatiques ou sanguins. Les conséquences de ces échanges sur la santé ont été clairement établies lors d'épisodes de pollution dans les grandes agglomérations urbaines. Des centaines de décès furent attribués aux épisodes de pollution du début du siècle à Londres - à l'origine du mot smog utilisé pour caractériser à la fois le brouillard (fog) et la fumée (smoke) - mais en réalité, toutes les villes industrielles étaient alors affectées par des teneurs extrêmement élevées en SO2 et en particules. A l'heure actuelle, les études épidémiologiques montrent qu'une augmentation de la masse des PM10 de 10μg m-3 produirait une augmentation de 0,5 - 1,5% de la mortalité sur une population exposée lors d'épisodes de pollution (Wilson et Spengler, 1996). Cette augmentation pourrait aller jusqu'à 5% dans le cas d'une exposition à long terme à des teneurs élevées de particules. On peut schématiquement classer les effets biologiques des particules en trois catégories: (1) réactions inflammatoires aiguës, (2) effets cancérigènes, (3) effets immunotoxiques et allergiques. Le risque cancérigène est étroitement lié à la nature chimique de l'aérosol et à la présence de certains composés organiques comme les hydrocarbures aromatiques polycycliques (les HAP) qui possèdent des structures à plusieurs cycles benzéniques. On les retrouvent en zones urbaines, associés aux particules fines émises par les véhicules diesel sous forme de benzo[a]pyrène, ou de benzo[a]anthracène, par exemple, dont les propriétés cancérigènes sont amplement démontrées. Cependant, d'autres polluants cancérigènes, organiques ou non, sont aussi présents dans les aérosols en milieu urbain (nickel, arsenic, chrome et cadmium). Une étude épidém ologique effectuée sur des populations professionnellement exposées aux aérosols d'échappement des véhicules diesel chiffre l'excès de risque de cancer bronchique à 33% (Ichinose et al., 1995). En conclusion, les résultats des études épidémiologiques, conduites dans des contextes fort variés, au sein de populations différentes, convergent pour attribuer aux particules fines une part de responsabilité dans la survenue d'une vaste gamme d'effets sanitaires dont certains peuvent être extrêmement sérieux. Mais ces études restent incomplètes et ne permettent pas encore de définir des relations de cause à effet entre les conséquences sanitaires et la concentration de particules, en particulier pour des expositions prolongées à des teneurs moyennes de concentration (Lebowitz, 1995 ; Leduc et al., 1995). I.3.1.2. Action des pouvoirs publics, surveillance de la qualité de l'air En réponse aux problèmes de santé publique posés par la pollution atmosphérique dans les centres urbains, des politiques de surveillance et de prévention ont été mis en place aux USA et plus tardivement en Europe. Aux USA, la surveillance de la qualité de l'air est coordonnée par l'EPA (Environmental Protection Agency), qui promulgue tout les 5 ans une mise à jour concernant les polluants et seuils de pollution revus en fonction des avancées des connaissances scientifiques dans ces domaines (NAAQS, National Ambient Air Quality Standards). Si en France la surveillance systématique des PM10 date de 1996 (Loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie, http://aida.ineris.fr/sommaires_textes/sommaire_thematique/index.htm), en application de directives européennes, elle est pratiquée de manière courante aux USA depuis 1987. Une autre différence notable entre les politiques de surveillance de la qualité de l'air entre la CE et les USA est que la surveillance des particules en suspension est depuis 1997 basée aux USA sur la mesure des PM2,5, et ceci pour des raisons maintenant bien établies d'impact sanitaire. Le CAFE (Clean Air For Europe) recommande désormais en Europe la surveillance des PM2,5 dans son rapport daté du 6 avril 2004. En France, les textes légaux en matière de réglementations pour lutter contre la pollution découlent de décrets de la communauté européenne. Le parlement français a adopté le 19 décembre 1996 la loi 96-1236 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie (http://www.legifrance.gouv.fr/texteconsolide/UPEHE.htm). Cette loi s'appuie sur le "droit reconnu à chacun de respirer un air qui ne nuise pas à sa santé". Ce principe est assorti de l'obligation du concours de l'état des collectivités territoriales pour "l'exercice du droit à l'information sur la qualité de l'air et ses effets sur la santé et l'environnement". Découlent de cette loi une surveillance de la qualité de l'air par les AASQA (Associations Agréées de Surveillance de la Qualité de l'Air) et des normes à l'émission des différents polluants, ou de leur précurseurs (figure I.8). 80 Euro 4 Euro 3 100 Euro 2 Euro 1 Evolution des normes d'émissions des voitures particulières 80 60 40 20 0 1972 1976 1980 1981 CO 1986 COV 1989 NOx 1990 1993 1997 2000 2005 PS figure I-8: Exemple de norme européennes à l'émissions par les véhicules légers (http://europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/l21047.htm). L'établissement de politiques visant à réduire les niveaux de PM rencontrés en zone urbaine nécessite de bien connaître les sources de ces particules. La composition chimique nous indique que la matière carbonée est un, sinon le, constituant majoritaire des aérosols urbains (voir paragraphe I.1). Il est donc nécessaire de bien connaître les sources et processus à l'origine des concentrations en matière carbonée observées pour pouvoir, éventuellement établir une politique efficace de réduction d'émission ayant un impact sur les PM. La surveillance des niveaux de PM10 dans l'atmosphère est régie par des lois strictes, en ce qui concerne les type de sites à surveiller et la localisation de l'appareil de mesure, le protocole de mesure et, bien-sur, les niveaux à ne pas dépasser. Toutes ces informations sont disponibles sur le site de l'Air de l'Ain et des Pays de Savoie (http://www.atmorhonealpes.org/), réseau de surveillance de la qualité de l'air pour les sites de notre étude. Notons que les concentrations journalières en PM10 ne doivent pas dépasser 50 μg/m3 plus de 35 fois par an en 2005, et que ce nombre de dépassements autorisés est dégressif pour atteindre seulement 7 en 2010. I.3.2. Impacts climatologiques Le rôle des aérosols dans la problématique générale du changement climatique est désormais reconnu (IPCC, 2001). Néanmoins, de grandes incertitudes quant à leurs impacts réels et la façon de modéliser leurs effets subsistent. Le niveau général de compréhension des 81 interactions climat/particules est encore très faible (figure I.9). Toutefois, les aérosols affectent de façon significative le bilan radiatif terrestre par deux effets. D'abord, les particules diffusent et absorbent les radiations lumineuses (effets directs). Pour appréhender l'effet des phénomènes de diffusion, il faut distinguer les radiations solaires (flux incident à la surface terrestre) des radiations thermiques (ré-émises par la surface terrestre). Les radiations solaires ont des longueurs d'onde inférieures à 4 μm (essentiellement dans les longueurs d'ondes visibles), tandis que celles des radiations thermiques sont globalement comprises entre 4 et 20 μm (infrarouge). Etant donné que les aérosols sont principalement de taille inférieure à 4 μm et que les particules diffusent plus fortement les radiations dont la longueur d'onde est voisine de leur taille, les phénomènes de diffusion par les aérosols atmosphériques ont lieu, préférentiellement, dans le spectre solaire. La diffusion du rayonnement solaire engendre une diminution du flux incident et induit un forçage climatique négatif (refroidissement). L'importance de ce forçage négatif est en relation directe avec le nombre de particules, principalement les fines. Notons également que les particules de diamètre supérieur à 2 μm diffusent les radiations thermiques. figure I-9: Evolution du forçage radiatif global du système climatique entre l'époque préindustrielle (1750) et l'année 2000 (source IPCC 2001). Les phénomènes d'absorption induisent, quant à eux, un réchauffement de l'air environnant et donc un forçage positif. Ils sont particulièrement marqués pour le EC, mais dépendent de son degré de mélange avec les autres constituants (composés organiques fonctionnalisés, sulfates, eau) (Penner et al., 2001). Dans le cas de mélanges internes, c'està-dire associé aux autres constituants sur une même particule (et par opposition aux mélanges 82 externes où les différents constituants sont considérés comme des entités distinctes), Jacobson (2001) a estimé un forçage radiatif du EC supérieur à celui du méthane, deuxième gaz à effet de serre émis par l'homme après le dioxyde de carbone. L'absorbance des particules est donc intimement liée à leur composition, et donc à leurs sources et aux processus de transformations (dégradations chimiques, coagulation) intervenant au cours de leur transport. Le second type d'impact des aérosols consiste en une modification de la microphysique et probablement de la durée de vie et de la quantité des nuages (effets indirects) (Penner et al., 2001). Ces effets indirects engendrent une modification de l'albédo planétaire et donc du flux lumineux incident à la surface terrestre. L'impact de cet effet indirect sur le bilan radiatif planétaire est considéré comme négatif (Figure I.9). Les différents processus gouvernant les effets indirects des aérosols sont excessivement complexes et des discussions détaillées sont proposées, notamment par Penner et al. (2001) et Schwartz et Slingo (1996). Notons cependant que ces impacts vont dépendre en premier lieu de la capacité des aérosols à se comporter comme des CCN (Cloud Condensation Nuclei, c.à.d. noyau de condensation nuageuse). Cette capacité fonction principalement de la taille des particules mais également de leur composition en surface, liée à leur hygroscopicité ou à leur solubilité. Une meilleure connaissance de la composition des aérosols, et notamment en ce qui concerne la matière organique, apparaît là encore comme indispensable, accompagnée d'études de ses propriétés. En effet, le rôle de ses propriétés n'est pas encore clair et certaines études ont montré que les composés organiques inhibaient la formation de gouttelettes (Jacobson et al., 2000) alors qu'au contraire Novakov et Penner (1993) ont mis en évidence que les aérosols organiques pouvaient contribuer significativement à la masse totale des CCN, ce phénomène apparaissant comme particulièrement vrai pour les aérosols organiques secondaires (Cruz et Pandis, 1997). I.3.3. Conclusion Les impacts sanitaires et climatologiques des aérosols sont donc largement démontrés sur le plan qualitatif, mais de grandes incertitudes demeurent sur le plan quantitatif. En ce qui concerne plus précisément la matière carbonée contenue dans l'aérosol, il vient plusieurs 83 remarques. Dans le cas de la pollution urbaine par les particules, d'origine essentiellement anthropique, la matière carbonée est un composant majoritaire de l'aérosol fin à l'origine des problèmes de santé publique. Il est alors essentiel de bien comprendre les sources et mécanismes conduisant aux concentrations mesurées en zone urbaine. En ce qui concerne les impacts climatologiques, la fraction élémentaire de la matière carbonée (EC) a tendance à augmenter l'effet de serre. Les effets de la fraction organique (OC), plus complexes, semblent plus intenses et en sens inverse, mais les incertitudes sont très fortes. Une meilleure compréhension globale de OC, ainsi que de ses fractions primaire/secondaire et soluble/insoluble font partie des améliorations nécessaires à nos connaissances pour mieux quantifier ses impacts environnementaux. Il est clair que notre étude ne prétend pas aborder toutes les questions en suspend à propos de la matière carbonée contenue dans les aérosols. Il est de plus évident que la grande hétérogénéité de la composition chimique des particules oblige à des études spécifiques, et locales. Les cadres géographiques, temporels et contextuels de notre étude ainsi que les objectifs spécifiques de ce travail sont précisés dans le chapitre suivant. 86 CHAPITRE II. CADRE DE L'ETUDE ET OBJECTIFS 88 CHAPITRE II. CADRE DE L'ETUDE ET OBJECTIFS Cette partie présente le contexte local de ce travail. La partie II.1 est consacrée à une description du programme POVA (POllution des Vallées Alpines), dans lequel s'insère notre étude. Les parties II.2 et II.3 suivantes sont dédiées à la présentation des vallées étudiées : spécificités de la dynamique atmosphérique dans les vallées (II.2) et présentation plus détaillée des deux vallées ou sont localisés nos sites de prélèvements (II.3). La dernière partie (II.4) contient de plus une description du trafic routier dans ces deux vallées. Après avoir présenté dans ce chapitre le contexte local de l'étude (POVA), la spécificité des sites étudiés et la méthodologie adoptée dans ce cadre, ainsi que la problématique plus générale de l'étude de la matière carbonée dans le chapitre précédent, nous conclurons cette partie par les objectifs de notre étude. Ils sont donc d'une part liés aux objectifs de POVA, mais les dépassent pour apporter une contribution à la problématique plus générale de la compréhension des processus liés à la matière carbonée dans les aérosols. II.1. Cadre de l'étude : POVA La communauté scientifique nationale et internationale s'est mobilisée depuis de nombreuses années dans le but de mieux comprendre les mécanismes complexes associés à la chimie de l'atmosphère, dans l'espoir de permettre d'élaborer des politiques de contrôle visant à limiter la pollution. A l'échelon national, deux grands programmes intégrés ont été mis en oeuvre dans le cadre de la lutte contre la pollution atmosphérique locale et régionale : ESQUIF (Etude et Simulation de la QUalité de l'air en Ile de France) à l'échelle de l'agglomération parisienne, et ESCOMPTE (Expérience sur Site pour COntraindre les Modèles de Pollution atmosphérique et de Transport d'Emissions) dans la région de Marseille - Etang de Berre. A ce jour, aucun programme d'envergure nationale n'a été réalisé pour des régions montagneuses. Les vallées alpines représentent cependant un cadre très particulier pour ce type d'étude, compte tenu de la concentration spatiale des émissions de précurseurs (en particulier celles dues au trafic routier) en vallées encaissées, et des conditions dynamiques et chimiques spécifiques (activité convective, brises de vallée et rayonnement solaire intense lié à l'altitude en été, mais aussi inversions thermiques et couverture neigeuse en hiver, etc). A ces contraintes géographiques locales s'ajoutent des spécificités majeures pour la problématique générale de la qualité de l'air en Rhône Alpes: • le 24 mars 1999, l'incendie du tunnel du Mont-Blanc a stoppé net le transit international dans la vallée de Chamonix, réduisant ainsi au minimum le nombre de camions dans ce couloir alpin pendant la période de fermeture. Assumant la majorité du report du trafic, le 89 • • nombre de poids lourds dans vallée de la Maurienne a, quant à lui, considérablement augmenté, alors même que l'autoroute permettant l'accès au tunnel du Fréjus n'était pas encore finalisée. La circulation dans cette vallée, a été, durant cette période, aussi importante que celle prévue dans 10 ans, alors que se profile la réalisation de la liaison ferroviaire Lyon-Turin, il est indispensable d'estimer les conséquences de la réalisation d'un tel projet au regard de l'évolution du trafic routier, l'image des vallées alpines repose en partie sur la relative pureté des hautes montagnes et sur la préservation du patrimoine, et une part importante de l'activité économique dépend du tourisme lié à cette image. L'ensemble de ces points place le programme POVA au coeur d'une problématique à la fois sensible car très médiatisée, et complexe. Plusieurs programmes de recherche ont toutefois été menés sur la thématique de la pollution atmosphérique en vallées alpines : l'étude menée par Marcoux et al. (1998), le projet TRANSALP, financé par l'Entente Région Rhône-Alpes, qui constitua, par ailleurs, l'amorce du programme POVA, et le programme Ecosystèmes, Transports, Pollutions (ETP) financé par l'ADEME/PREDIT. Néanmoins, ces études, souvent très ponctuelles, ne prenaient en compte qu'un nombre limité d'espèces chimiques, la plupart gazeuses. Le programme VOTALP (Vertical Ozone Transports in the ALPs ), conduit entre 1996 et 1998, constitue, véritablement, le premier projet d'envergure réalisé en milieu alpin. Son principal objectif était de comprendre les phénomènes dynamiques et chimiques gouvernant les concentrations d'ozone, en se focalisant sur son transport vertical, dans une région montagneuse (Wotawa et Kromp-Kolb, 2000). Enfin, le projet Espace Mont-Blanc, financé par INTERREG, se consacrait à l'étude des sources, des mécanismes de dispersion et du rayonnement UV dans les vallées jouxtant le massif du Mont Blanc. Ainsi, des mesures de NOx, d'ozone, de COV, de poussières (PM10, PM2.5), d'HAP, de métaux lourds et de radiation UV sur des stations au sol, ainsi que des mesures aéroportées d'ozone et de ses précurseurs gazeux ont été effectuées. Ces études étaient essentiellement consacrées à la problématique de l'ozone, et les mesures de particules n'ont pas fait l'objet, à notre connaissance, de publication. La proposition du programme POVA, et en particulier le et concernant les mesures des propriétés des aérosols par le LGGE, sont décrits plus en détail ci-dessous. II.1.1. Objectifs généraux du programme POVA La thématique générale du programme POVA concerne donc la qualité de l'air en vallée alpine. Fort des résultats des programmes déjà réalisés, 4 objectifs principaux et complémentaires ont été définis pour le programme général : 1) dresser un état des lieux comparatif de la pollution liée au trafic véhiculaire en vallée de Chamonix et de la Maurienne, avant et après la réouverture du tunnel du Mont Blanc, 2) évaluer les parts respectives des différents types d'émissions : biogéniques et anthropiques (émissions véhiculaires, émissions industrielles, émissions domestiques, feux de végétaux) et déterminer leurs variabilités en fonction des conditions environnementales, 3) développer un outil opérationnel de modélisation de la dispersion de la pollution atmosphérique appliqué au cas des vallées alpines, directement exploitable par L'Air-APS, qui permette de réaliser des études de scénario, 4) initier des études d'impact de la pollution dans ces deux vallées, avec l'établissement de cartes d'exposition en fonction des études de scénario. II.1.2. Méthodologie générale de POVA La stratégie initiale mise en place pour atteindre ces objectifs était basée sur un calendrier initial de réalisation de 3 ans (été 2000-été 2003) et sur le couplage étroit entre observations et modélisation. Elle comprend, tout d'abord, un volet d'études de terrain. Des campagnes de mesures intensives (aéroportées et au sol) ont permis de caractériser la composition chimique de l'atmosphère des vallées et la dynamique atmosphérique associée, dans des conditions météorologiques et environnementales très différenciées (en été et en hiver). Une première finalité de ces campagnes était tout d'abord d'établir un bilan comparatif de l'état de la pollution pour les deux vallées, que ce soit dans les conditions de fermeture du tunnel du Mont Blanc, puis après sa réouverture, en accord avec le premier objectif. Au cours de ces campagnes, les espèces chimiques essentielles pour une meilleure compréhension des émissions et des processus gouvernant l'évolution des concentrations ont été prises en compte, afin d'atteindre le second objectif. Ces études détaillées, mais ponctuelles dans le temps, sont replacées dans le contexte des variations à plus long terme, avec le suivi continu annuel de quelques espèces chimiques importantes pour l'évaluation des épisodes de pollution. Cette action s'appuyait sur les surveillances menées par l'AIR APS aux deux stations de mesure du réseau (à Chamonix et Saint-Jean-de-Maurienne), auxquelles ont été adjointes des mesures complémentaires. L'objectif initial était de valider la représentativité des campagnes intensives, le premier suivi 91 annuel permettant aussi d'orienter le choix des périodes de campagnes intensives de la seconde partie du projet. Nous verrons par la suite que les données obtenues lors de suivi continu nous apporte un grand nombre d'informations sur l origine et les mécanismes de la pollution atmosphérique observée à Chamonix et St Jean de Maurienne. Ces études de terrain ont été étroitement associées au volet de modélisation du programme. Ce volet a consisté tout d'abord à développer un Système d'Informations Géoréférencées (SIG) propre à chacune des vallées. Ces SIG intègrent l'ensemble des données nécessaires au développement des modélisations numériques de la chimie de l'atmosphère. Sur la base des modèles numériques de terrain (MNT), différentes couches d'informations sont intégrées aux SIG, donnant, entre autres, une description des occupations du sol, des populations et des différents types de sources d'émission d'espèces chimiques vers l'atmosphère (biogéniques et anthropiques). II.1.3. Implication et objectifs du LGGE dans POVA Les actions entreprises par le LGGE dans le cadre du programme POVA concernent essentiellement la caractérisation chimique des aérosols, dans le but de documenter et de comprendre les processus à l'origine des niveaux de PM10 mesurés dans les vallées. Ces actions concernent directement les objectifs 1 et 2 du programme, pour ce qui est de la pollution liée aux PM10. Elles constituent aussi une partie de la base de données nécessaire à l'aboutissement de l'objectif 3. Des actions sensiblement différentes et complémentaires ont été menées d'une part sur les périodes d'observation intensives et d'autre part sur le suivi continu, afin d'atteindre les objectifs fixés. Ces actions sont décrites ci-dessous. Périodes d'observation intensives (POI) : L'objectif des campagnes intensives est de renseigner les processus d'évolution des aérosols sur des pas de temps cohérents avec la compréhension des phénomènes à petites échelles de temps et d'espace (niveaux de concentration, sources, processus d'évolution des 92 aérosols) dans des conditions hivernales et estivales typiques. La stratégie d'échantillonnage a évolué au cours du temps, et s'est largement étoffée entre la première campagne (été 2000), et la dernière (été 2003). En effet, si les deux premières campagnes ont été réalisées dans un climat de relative urgence (due à l'imminence de la réouverture supposée du tunnel du Mont Blanc à cette période), le délai finalement laissé par les multiples retards dans cette réouverture a permis d'affiner les stratégies et de réunir des outils et des moyens non disponibles lors des premières campagnes. En pratique, les actions du LGGE lors des POI ont consisté dans le prélèvement d'aérosols en vue de l'analyse ses composants majoritaires sur 5 sites par vallée (en moyenne), et sur des pas de temps représentant un compromis entre les processus étudiés et les capacités analytiques. Les sites ont été choisis afin de décrire au mieux la diversité des situations rencontrées sur l'ensemble de chaque vallée, et la plupart des sites étaient équipés de préleveurs automatiques d'aérosols. Un site par vallée était maintenu manuellement et comportait une instrumentation beaucoup plus développée pour une étude détaillée des caractéristiques de la phase particulaire. II.2. Caractéristiques dynamiques des vallées De part leur géomorphologie, les vallées alpines, et plus généralement les vallées montagneuses, présentent des propriétés les différenciant radicalement des plaines. Ces spécificités s'expriment, notamment, au niveau de la dynamique atmosphérique et rendent la problématique de la pollution liée au transport des biens et des personnes particulièrement aiguë. Les processus de dynamique atmosphérique au sein des vallées montagneuses sont influencés à la fois par les processus à l'échelle synoptique, mais également par des processus internes aux vallées. Ces derniers sont majoritairement dus à des effets thermiques. Dans les cas de forçage synoptique faible, les phénomènes thermiques constituent les seuls mécanismes dispersifs. Ils revêtent donc une importance particulière dans l'étude de la pollution atmosphérique au sein d'une vallée. Des présentations plus poussées sur les phénomènes dynamiques intervenant dans les vallées sont proposées notamment par Fujibe et al. (1999) et Anquetin et al. (1998, 1999). Nous nous contenterons, dans cette partie, d'une présentation générale de ces différents mécanismes (Thillet, 1997). II.2.1. Les brises de pente et de vallée Les brises de pentes et de vallée sont deux phénomènes intimement liés, les brises de pentes constituant, souvent, l'amorce des brises de vallées. Brise diurne montante : L'échauffement des pentes au soleil favorise la création d'ascendances car le sol augmente alors la température de l'air à son contact, le rendant ainsi plus léger que l'air ambiant au même niveau. Ces ascendances provoquent un appel d'air, dans la mesure où l'air qui s'échappe en altitude doit être renouvelé. Par convection, l'air de la vallée comble le déficit. Ainsi, depuis les plaines bordant les montagnes, s'organise un flux à travers les vallées, en direction des sommets : c'est la brise d'aval ou brise montante (figure I.20). Elle s'établit en milieu de matinée et s'éteint avec le coucher du soleil. En moyenne, la brise d'aval atteint 94 15 à 20 km.h-1 en été au cours des belles journées et se fait surtout sentir dans les basses couches de l'atmosphère. C'est également un phénomène progressif, dépendant de la rugosité du sol et de l'ensoleillement, et susceptible de se renforcer jusqu'à ce que le soleil atteigne son zénith. Enfin, étant majoritairement gouvernée par les processus thermiques, cette brise diurne est moins perceptible l'hiver. Brise de pente : montante Brise de pente : descendante Amont Amont Aval Brise de vallée : montante Aval Brise de vallée : descendante figure II-1: Schématisation des brises de pentes et de vallées. Brise nocturne descendante : A l'inverse, au cours des nuits dégagées, le sol rayonne sa chaleur vers l'espace, et donc se refroidit. L'air à son contact voit également sa température baisser et devient plus lourd. Par simple effet gravitationnel, il coule le long des pentes jusqu'au fond de vallée. L'air froid s'accumule sur une plus ou moins grande épaisseur, de l'ordre de 100 à 200 m selon la configuration de la vallée. Il s'écoule ensuite facilement vers la plaine dans le cas d'une vallée 95 en pente régulière et bien ouverte ; il a tendance à s'épaissir dans les dépressions étroites (et la Vallée de Chamonix peut en être un bon exemple). Ce courant froid s'appelle la brise d'amont ou brise descendante (figure I.20). Ce phénomène s'établit dès que le soleil cesse d'échauffer les pentes. Il est également progressif et dépend de la rugosité du sol et de la température des basses couches en vallée. II.2.2. Phénomènes d'inversions thermiques Dans la troposphère, d'une manière générale, la température de l'air décroît avec l'altitude au rythme d'approximativement 0,6 °C tous les 100 m (gradient adiabatique). Néanmoins, l'air étant un très mauvais conducteur thermique, et le sol se refroidissant (par rayonnement) plus rapidement que l'atmosphère, une fois le soleil couché, il peut se former, à proximité du sol, des couches d'air dont la température est plus basse que l'air situé immédiatement au-dessus, créant ainsi une inversion thermique. Après le lever du soleil, le développement vertical de cette couche située près du sol s'accroît sous l'effet de mouvements de convection. Elle peut, par la suite, être détruite par des mouvements convectifs intenses ou par le vent synoptique. Ces mécanismes ne sont pas propres aux systèmes montagneux mais ils y apparaissent plus fréquemment et de façon plus marquée, particulièrement l'hiver et lors de nuits dégagées. En effet, dans les vallées encaissées, relativement protégées des vents synoptiques, le sol n'est irradié par le rayonnement solaire que tard dans la journée, voir pas du tout, spécialement l'hiver, limitant ainsi les mouvements convectifs et donc la possibilité de briser rapidement la couche d'inversion. En montagne, ce phénomène est accentué par les brises nocturnes descendantes amenant de l'air froid des sommets vers la vallée. Dans le cas de vallées étroites et accidentées, l'air froid, plus lourd, s'accumule et forme une nappe très stable en fond de vallée. La figure II.2 illustre l'apparition de ces couches d'inversions. Le gradient de érature provoque une forte stabilité dans les premières dizaines de mètres au dessus de Chamonix. On voit que l'ozone est détruit sur cette épaisseur (avec environ 10 ppb en valeur résiduelle), et retrouve ensuite de manière très abrupte son niveau de la troposphère libre, environ 45 ppb dans notre cas. Ce très fort écart dans les concentrations d'ozone entre les 100 premiers mètres et les couches atmosphériques supérieures montre que NO, émis au niveau du sol, est complétement piégé dans cette couche proche du sol et que cette couche n'est pas du tout mélangée aux couches supérieures. Les gaz et les particules émises au niveau du sol vont former une "nappe" de pollution pouvant être perceptible visuellement (voir figure II.3). 96 Profil d'Ozone 8h30 TU 2400 2200 Profil d'ozone 2000 A ltitu d e 1800 1600 1400 1200 1000 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 [O3] (ppb) Profil de T°C figure II-2: Profils verticaux d'ozone et de température obtenus le 17/01/03 à 10h sur le premier tronçon du télécabine del'Aiguille du Midi, entre Chamonix et le Plan de l'Aiguille. (Données obtenues par P Perros, LISA). figure II-3: Conséquence d'un phénomène d'inversion thermique sur Chamonix : une nappe bleuâtre stagne au dessus de la ville (photo prise le 19 Janvier 03 durant la POI d'hiver 2003, à 10h du matin). En résumé, par beau temps, en hiver (mais éventuellement aussi en été), des couches stables se forment dans l'atmosphère et limitent, voir suppriment totalement, les mouvements verticaux. Une des conséquences est l'accumulation des polluants dans les zones habitées des fonds de vallée. La position et l'"étanchéité" de ces "couvercles" qui piègent la pollution dans la vallée évoluent au cours des heures de la journée sous l'effet des variations d'ensoleillement. Décrire la structure verticale de l'atmosphère et les échanges entre couches aux diverses altitudes est donc primordial pour une meilleure compréhension des mécanismes dispersifs de la pollution. Il est cependant clair que l'apparition de couches d'inversion est probablement l'un des facteurs prépondérants dans les mécanismes conduisants aux concentrations de polluants émis au sol, du fait que leur accumulation sera dans ce cas extrêmement favorisée. II.3. Caractéristiques physiques, démographiques, économiques et infrastructures routières principales des vallées étudiées Une carte représentant la situation géographique des deux vallées est proposée dans le chapitre III (figure III.2). II.3.1. Vallée de la Maurienne La vallée de la Maurienne (Savoie) s'étend le long d'un arc, sur 130 km de Aiton à Bonneval/Arc (points extrêmes de la vallée). Elle est relativement encaissée et entourée, au nord, du massif de la Vanoise dont les sommets culminent entre 2500 et 3800m d'altitude, et au sud des crêtes de La Levanna à La Ciamarella où aucun col ne s'abaisse en-dessous de 3000m, puis du massif d'Ambin. Sa rive sud est également caractérisée par deux vallées transversales, relativement ouvertes, menant aux cols de la Croix de Fer et du Galibier. L'altitude du fond de vallée augmente progressivement de St Jean de Maurienne (550 m) à Sollières (1340 m). Sa largeur est très variable et comprise entre quelques dizaines de mètres dans le défilé d'Orelle, à plusieurs kilomètres. La vallée est habitée par 42 000 résidents permanents, répartis sur 63 communes (données 1999, INSEE) et représentant 11% de la population active de la Savoie. Les communes les plus importantes sont St Jean de Maurienne, St Michel de Maurienne et Modane comptant respectivement 15.666, 5.670 et 6.547 habitants en 1999. Un tissu industriel important est implanté dans cette vallée qui, depuis 1890, a joué un rôle pionnier dans l'avènement de l'électrométallurgie et l'électrochimie. Bien qu'en perte de vitesse depuis une trentaine d'années, un certain nombre de grandes structures sont encore présentes dans la vallée. Elf Atochem est implanté à Epierre (20 km en aval de St Jean de Maurienne, 67 salariés, chimie du phosphore –synthèse d'acides phosphoriques, d'anhydride phosphorique- et fabrication de produits de dégraissage et décapage) et à La Chambre (10 km en aval de St Jean Maurienne, 255 salariés, production d'amines –75 000 tonnes en 1999- et de solvants organiques –20 000 tonnes en 1999-) (données recueillies par Chenal et Nicot, 2001). Le pôle métallurgique est principalement constitué par l'usine Métal Temple (St Michel de Maurienne, 420 salariés, production de pièces d'acier), et par Pechiney Aluminium (St Jean de Maurienne, fabrication d'aluminium et d'électrodes en carbone). II.3.2. Vallée de Chamonix La vallée de Chamonix (Haute Savoie) est enclavée entre le massif du Mont Blanc, très haut et très large, constitué de dômes comme le Mont Blanc (4807 m) et d'aiguilles comme l'Aiguille Verte (4122 m), et le massif des Aiguilles Rouges culminant à 2965 m. Fermée à l'aval par la Cluse de Servoz et à l'amont par le Col des Montets, la vallée de Chamonix est très encaissée et caractérisée par les plus forts dénivelés des Alpes, Chamonix n'étant guère qu'à 1000 m d'altitude au pied du Mont Blanc. La vallée de Chamonix quasi rectiligne et orientée SO-NE n'est longue que de 17 km entre les Houches et Argentière (voir carte § IV.3.2) (figure I.25). Elle ne compte qu'environ 15 000 habitants permanents dont 9 830 dans la commune de Chamonix-Mont-Blanc (données 1999, INSEE). Vallée éminemment touristique, sa population augmente d'un facteur de l'ordre de 5 certains mois de l'année. En 1991, elle disposait déjà d'une capacité d'accueil de 55 000 lits (Estienne, 1991). Le tourisme est également la clef de son activité économique et aucune infrastructure industrielle n'est présente. La vallée de Chamonix est parcourue sur toute sa longueur d'abord par la route nationale 205 jusqu'à Chamonix (la N205 se prolongeant jusqu'au tunnel du Mont Blanc), puis par la route nationale 506 rejoignant la Suisse via le col des Montets. II.4. Trafic routier dans les vallées alpines et impact de la fermeture du tunnel du Mont-Blanc II.4.1. Problématique générale « Alpes : l'asphyxie », « Alpes : les transports en question » ou « Mont-Blanc : la querelle des tunnels » titraient respectivement Télérama (n°2620, du 1er Avril 2000), Alpes Magazine dans un numéro spécial (n°8, 2000) entièrement consacré à cette problématique, et Libération (1er et 2 septembre 2001). Ces trois exemples, parmi de nombre ux articles ayant émaillé la presse nationale depuis l'accident sous le tunnel du Mont Blanc, montrent à quel point le transport routier dans les Alpes, et particulièrement celui du fret par les poids lourds, est devenu une préoccupation majeure de la population et pas seulement celle directement concernée. Cette question, et plus généralement celle posée par les échanges commerciaux et leurs nuisances, est devenue un enjeu de société majeur au même titre que la sécurité alimentaire. Là encore, s'affrontent les intérêts économiques et environnementaux. La problématique du transport routier dans les Alpes résulte d'une problématique plus large qui doit être examinée à l'échelle européenne. 100 Le transport de fret a augmenté considérablement, au sein de l'Union Européenne, au cours de ces 20 dernières années. Les changements de productions et des circuits d'alimentation et les distances croissantes ont eu comme conséquence une augmentation de 55% du tonnage.km de marchandises transportées entre 1980 et 1998, avec la plus grande croissance annuelle observée pour les transports routiers (+ 3,9% en moyenne) (EEA, 2001). Le transport par poids lourds représente à l'heure actuelle 43% du transport total de fret, contre 33% en 1980 (EEA, 2001). figure II-4: Principaux axes de circulation alpins (bleu : axes routiers, rouge : axes ferroviaires) (Sources : ministère de l'équipement :http://www.equipement.gouv.fr/montblanc/index) Pour le massif alpin, le problème spécifique du transport routier est étroitement lié à sa localisation entre deux grands centres économiques européens. L'important taux de croissance du transport de fret à travers les Alpes résulte des échanges entre les centres économiques traditionnels du nord de l'Europe et les régions économiques croissantes du Sud. De plus, les Alpes constituent une barrière naturelle. Pour son franchissement, seul un nombre limité de voies de circulation à haute capacité est disponible. Pour le trafic routier, les principales voies de communication (voir figure II.4) assurant la quasi-totalité du transport de fret sont: o Vintimille (Auroroute A8/A10), Tunnel du Fréjus (A43/N506/N6) et le tunnel du Mont Blanc (A40/N205) pour la France ; 101 o Col du Grand Saint Bernard (Route fédérale 21/27), tunnel du Gothard (Autoroute N2) pour la Suisse ; o Brenner (autoroute A12/A13) pour l'Autriche. Parmi ces différents axes, les passages français assument un tonnage de marchandises transportées relativement équivalent et compris entre 18 et 23 millions de tonnes (données 1998 ; EAA, 2001). Ils constituent chacun des points de passages privilégiés après celui du Brenner (environ 45 millions de tonnes en 1998). Au cours des 20 prochaines années, un doublement du transport de fret à travers les Alpes est attendu, ainsi qu'une augmentation de 50% du transport de passagers (EAA, 2001).
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5.1.2. Maquette de la zone de simulation Pour réaliser nos simulations, deux maquettes du parc ont été testées (Figure 5.1). La première maquette (maquette du parc), présentée dans la Figure 5.1a, se concentre uniquement sur la zone d'intérêt, sur une trentaine de mètres autour du Georges' tree. La deuxième maquette (maquette du quartier), illustrée dans la Figure 5.1b, représente l'ensemble du quartier, soit une centaine de mètres autour du Georges' tree. La zone du parc est incluse dans la zone du quartier. Ces maquettes sont caractérisées de manières géométriques et sémantiques. Ces caractéristiques ont été soit mesurées, soit estimées (description dans les deux sous-parties suivantes). La maquette du quartier a été initialement créée dans l'objectif de simuler le microclimat d'un quartier végétalisé avec LASER/F et de simuler la zone d'influence du parc sur ses alentours. Néanmoins, après avoir testé le modèle sur la maquette du quartier, le temps de calcul d'environ 3.5 h pour réaliser une simulation sur un quart d'heure a semblé déraisonnable. Ainsi, dans l'état actuel, il est nécessaire d'optimiser l'écriture du code de LASER/F si l'on souhaite un jour simuler le microclimat au sein de quartiers urbains végétalisés avec ce modèle. Ce constat nous a poussés à appliquer LASER/F sur une plus petite zone afin d'être en mesure de réaliser notre étude comparative et d'évaluer son potentiel. C'est la raison pour laquelle, la deuxième maquette, celle du parc (Figure 5.1a), a été utilisée. Figure 5.1 – Maquettes autour du jardin du Palais Universitaire testées dans LASER/F : a) maquette du parc et b) maquette du quartier. 5.1. Paramétrage de LASER/F à l'échelle d'un parc 5.1.2.1. Caractéristiques relatives à la géométrie 3D La reconstruction de la maquette du parc a déjà été présentée dans le Chapitre 3, sous-partie 3.2.2. L'obtention de la géométrie de trois types d'objets différents (Figure 5.2) a été nécessaire : six bâtiments, trois types de sols différents (route, sol nu et sol enherbé) et 49 arbres (tilleuls argentés uniquement). La maquette est composée de 77,7 % de bâtiments (dont 46,5 % de murs), de 17,4 % de végétation basse et haute (dont 6,6 % de couronne d'arbres), de 2,8 % de sols nus et de 2,2 % de routes (bitume). La sémantique des objets présents dans la scène a été renseignée manuellement. Suite à l'analyse des données LiDAR, nous avons constaté que d'une période de simulation à l'autre, les tilleuls argentés ont à peu près une couronne foliaire qui a atteint le même stade de croissance. C'est pourquoi nous avons émis l'hypothèse que les arbres ont un même volume et un même indice de surface foliaire pour ces différentes périodes. Ainsi, pour simplifier les calculs, chaque arbre est représenté avec la même maquette pour les trois périodes de simulation. Chaque couronne d'arbre est également composée de 20 faces afin de simplifier aussi leur géométrie par rapport aux 100 faces utilisées dans le Chapitre 4. La raison de cette simplification est expliquée dans la sous-partie 5.1.3.2 suivante. Par conséquent, la même maquette du parc est utilisée pour réaliser les simulations sur les trois périodes. L'indice de surface foliaire est identique pour tous les arbres, avec un LAI de 10 (Chapitre 3, sous-partie 3.2.2.3). Ce LAI indique que le feu des arbres est très dense. Concernant l'indice de surface foliaire du sol enherbé, l'hypothèse d'un LAI de 1 a été faite, puisqu'il s'agit d'une pelouse tondue. 5.1.2.2. Caractéristiques relatives à la typologie des objets Les caractéristiques typologiques de chaque surface présente dans la maquette sont à renseigner car elles influent directement sur l'inertie thermique des matériaux ou encore la valeur des flux simulés, comme par exemple, la quantité de rayonnement infrarouge émis. La Figure 5.2 illustre l'ensemble des caractéristiques paramétrées pour le fonctionnement du modèle LASER/F dans le parc. Il faut souligner ici qu'il est rare de trouver des bases de données ou des archives contenant ce type d'informations pour des quartiers existants et anciens. Pour se procurer ces informations, la mesure de terrain directe ou indirecte semble une solution. L'extraction automatique du matériel et du revêtement constituant une face, à partir de données lasergrammétriques et/ou photogrammétriques, serait un point fort pour faciliter l'application de LASER/F sur divers quartiers. Pour nos simulations, ces informations ont été obtenues de la façon suivante : - - - Les caractéristiques du sol naturel ont été établies d'après un carottage effectué dans le sol du parc pour déterminer sa nature globale. Il s'agit de limon sableux composé à 43 % de sables, 39 % de limons et 18 % d'argiles. Les propriétés des matériaux constituant les bâtiments ont été définies dans une étude annexe réalisée au sein du laboratoire ICube par Roupioz et al. (2018) en utilisant une caméra thermique. Les revêtements en surfaces et les matériaux en profondeur ont été hypothétiquement établis pour la plupart (Kastendeuch et al., 2017), ou estimés à partir de données provenant d'abaques disponibles dans la littérature (Pielke Sr, 1984) qui recensent les caractéristiques des matériaux. Chapitre 5. Extension des simulations à l'échelle d'un parc Figure 5.2 – Caractéristiques sémantiques et typologiques attribuées chaque face de chaque objet. 5.1.3. Complexité du calcul LASER/F La complexité du calcul LASER/F va bien au-delà des données utilisées en entrée du modèle. Elle se retrouve dans la façon dont on fragmente les faces en facettes, le pas de temps des simulations, l'activation ou non de certaines options de calcul. Chaque paramétrage permet d'augmenter la précision des résultats, mais au détriment du temps de calcul qui augmente lui aussi. Les choix effectués concernant le pas de temps, la fragmentation et le calcul de radiosité sont résumés dans le Tableau 5.2. Un pas de temps de 2 minutes et 30 secondes a été choisi pour garantir la stabilité de la simulation. Quant aux autres paramétrages, plus de détails sont donnés dans les paragraphes suivants. PARTIES DE CALCULS LASER/F EFFECTUEES Fragmentation Pas de temps Calcul de la radiosité 0,1 m 2 à 60 m2 2 min 30 secondes Oui Tableau 5.2 – Choix réalisés quant à certaines parties de calculs du modèle LASER/F pour la simulation à l'échelle du parc. 5.1.3.1. Fragmentation de la maquette La possibilité de fragmenter l'ensemble des faces (Figure 5.3) en une multitude de triangles élémentaires (facettes) permet d'augmenter le nombre de points (barycentre de chaque facette) où le bilan d'énergie est calculé par le modèle, et par conséquent d'améliorer l'estimation finale du calcul à l'échelle d'une maille de 250 m x 250 m. La fragmentation a été réalisée de manière progressive avec une superficie de 0,1 m2 en partant du centre de la zone d'intérêt où sont localisés les capteurs météorologiques et une superficie maximale de 60 m2 en périphérie de la zone de simulation (Figure 5.3c). Ainsi, plus un triangle est proche . métr / à l'échelle d'un parc du centre d'intérêt, plus sa superficie est petite. Cette fragmentation permet de concentrer les calculs sur la zone d'intérêt, tout en prenant en compte les objets éloignés. Figure 5.3 – Maquette du parc a) avec la visualisation des différents matériaux, b) la maquette sous forme filaire avant fragmentation et c) la maquette sous forme filaire après fragmentation, en partant du centre de la zone. 5.1.3.2. Calcul de radiosité Lors d'une simulation, il est possible de calculer l'ensemble des composantes du bilan d'énergie de chaque facette de la scène, et notamment les échanges radiatifs qui s'opèrent entre ces facettes. Ces échanges sont obtenus grâce à un algorithme de radiosité progressive (Kastendeuch et al., 2017 ; Kastendeuch & Najjar, 2009) qui permet en principe d'obtenir d'excellents résultats. Malheureusement, cet algorithme implique un temps de calcul supplémentaire assez conséquent. Ainsi, la nécessité d'activer ou non ce calcul a été étudiée, car il est possible de remplacer cette procédure par une approche simplifiée, mais moins précise. Le calcul de radiosité est utilisé dans LASER/F pour évaluer les échanges radiatifs qui se déroulent entre toutes les facettes constituant la maquette, c'est-à-dire les échanges par réflexion dans les longueurs d'onde du rayonnement solaire ainsi que les échanges par rayonnement infrarouge émis et réfléchi. En fonction de l'activation de cette option ou non, une facette ne recevra pas la même quantité de rayonnement incident en provenance des autres facettes. Ainsi par exemple, pour le rayonnement solaire : - - Lorsque la radiosité est activée, la quantité de rayonnement réfléchi par l'ensemble des facettes visibles est prise en compte. Elle dépend de l'albédo de chaque facette ainsi que des facteurs géométriques (superficie, angle de vue, distance). Lorsque la radiosité est désactivée, la quantité de rayonnement réfléchi incident est paramétrée à partir d'une valeur de réflexion moyenne obtenue sur l'ensemble des facettes de la maquette, qui est modulée par la part de terrain visible (TVF : Terrain View Factor). Le même type de raisonnement s'applique pour le rayonnement infrarouge. Pour voir si l'activation de cette option induit de grandes différences au niveau des résultats, une analyse de sensibilité a été réalisée. La Figure 5.4 présente une partie des comparaisons obtenues. Cette analyse a révélé que désactiver le calcul de radiosité a un fort impact sur les échanges radiatifs au sein de la scène. En effet, lorsque l'on compare les simulations avec et sans radiosité dans la Figure 5.4a, nous pouvons voir que sans radiosité, le rayonnement net mesuré à 40 cm du sol enherbé est plus important la journée (écart maximal de 100,00 W/m2) et moins important en début de matinée et de soirée (écart maximal de -50,00 W/m2). De manière plus détaillée, la désactivation de la radiosité entraîne une diminution (écart maximal de -80,00 W/m2) du rayonnement solaire réfléchi par le sol enherbé le jour et une augmentation (écart de 20,00 W/m2) de ce rayonnement, en début de matinée et de soirée (Figure 5.4b). La somme du rayonnement infrarouge émis et réfléchi mesuré est quant à elle plus importante au cours de la journée (écart maximal de 40,00 W/m2) sans radiosité qu'avec radiosité. Cet impact sur les échanges radiatifs a pour conséquence des répercussions sur le bilan d'énergie. Nous avons constaté que la température de surface, le flux de chaleur dans le sol et le flux de chaleur sensible sont aussi plus importants avec la désactivation du calcul de radiosité. Quant à l'évapotranspiration émise par la végétation, l'impact n'est que secondaire. a) b) c) Figure 5.4 – Comparaisons des simulations du modèle LASER/F avec l'activation du calcul de radiosité (trait pointillé noir) et avec la désactivation du calcul de radiosité (trait continu vert). Trois flux radiatifs sont présentés : a) le rayonnement net, b) le rayonnement solaire réfléchi et c) le rayonnement infrarouge (réfléchi + émis). Ces mesures proviennent d'un capteur implanté dans la maquette à 40 cm du sol enherbé. Cette analyse nous a conduits à conserver l'option de radiosité progressive, mais au prix de temps de calcul plus importants. En conséquence, le nombre de faces, par arbre, dans la maquette, a été réduit, de 100 à 20 faces, pour tenter d'obtenir des temps de calculs plus raisonnables. Pour pallier ces concessions, il semblerait judicieux qu'un informaticien optimise le code de LASER/F en le réécrivant dans un langage plus adapté. 5.2. Comparaison des simulations de LASER/F à des mesures de terrain Le modèle LASER/F a été appliqué sur la zone du parc afin de simuler les interactions entre l'environnement urbain et la végétation, sur les trois périodes météorologiques considérées. Le but est de reproduire les effets bénéfiques de la végétation (évapotranspiration, ombres portées, température de surface faible). Afin d'évaluer, pour la première fois, les simulations du module de végétation de LASER/F, nous avons procédé à une comparaison de certains résultats obtenus avec le modèle à des mesures de terrain. Dans cette étude, les mesures ne sont pas considérées comme des vérités absolues, étant donné que nous ne connaissons pour chaque capteur, que la précision théorique annoncée par le constructeur et non la précision effective sur le terrain (précisions théoriques indiquées dans l'Annexe C, page 168). Pour cette raison, nous n'employons pas le terme de « validation » des simulations du modèle LASER/F, mais plutôt celui de « comparaison ». Les mesures que nous allons utiliser ont été obtenues lors de plusieurs campagnes expérimentales réalisées dans le parc (Chapitre 2). 5.2. Comparaison des simulations de LASER/F à des mesures de terrain 5.2.1. Présentation des grandeurs comparées Les comparaisons entre simulations et mesures de terrain ont été réalisées à partir de mesures issues de plusieurs capteurs. La Figure 5.5 permet de localiser la position des différents capteurs dans la zone du parc. Le Tableau 5.3 donne une liste exhaustive de l'ensemble des grandeurs comparées. Il faut noter que pour pouvoir réaliser ces comparaisons, des capteurs fictifs ont été introduits dans la simulation exactement aux mêmes endroits que les capteurs réels. Les nuages de points géoréférencés, obtenus avec le scanner laser terrestre, nous ont permis d'identifier la position exacte de tous les capteurs. Pour plus de détails sur les mesures de terrain utilisées et l'intégration des capteurs fictifs dans LASER/F, se référer à l'Annexe C, page 168. Les comparaisons simulations / mesures ont été effectuées sur trois aspects concernant : (i) le sol enherbé ; (ii) les arbres et (iii) l'ensemble du parc (Figure 5.5 et Tableau 5.3). VOLET GRANDEUR COMPAREE Bilan-mètre à quatre composantes à 40 cm et radio-thermomètre à 4 m Bilan-mètre à quatre composantes à 40 cm Températures dans le sol Profil de sept thermistances mesurant la température dans le sol Flux-mètre à 8 cm dans le sol Chambre à transpiration Radio-thermomètre proche d'une couronne d'arbre Flux de sève avec des thermocouples à 1,3 m sur six troncs Rayonnement montant Pyranomètre et pyrgéomètre à 17 m sur un mat Anémomètre sonique et analyseur de gaz à 17 m Anémomètre sonique et analyseur de gaz à 17 m Indice de confort thermique Globe gris et globe noir au milieu de la scène à 2 m Température de surface SOL ENHERBE ARBRE PARC CAPTEUR ASSOCIE SUR TERRAIN Tableau 5.3 – Grandeurs simulées par LASER/F comparées aux grandeurs mesurées sur le terrain et les capteurs utilisés pour obtenir ces mesures. Figure 5.5 – Illustration des capteurs utilisés pour obtenir les mesures de terrain comparatives et leur localisation dans la zone d'étude. La position des capteurs est illustrée en rouge dans un nuage de points SLT. 107 Chapitre 5. Extension des simulations à l'échelle d'un parc Parmi l'ensemble de ces comparaisons, seules celles relatives à la végétation et plus particulièrement aux arbres, sont présentées dans la partie suivante. L'objectif principal de cette thèse à travers l'utilisation de LASER/F est d'évaluer la capacité du nouveau module de fonctionnement de la végétation à simuler l'évapotranspiration de la végétation. C'est la raison pour laquelle, les comparaisons liées à cette grandeur sont mises en avant dans cette étude. Les comparaisons relatives aux autres flux du bilan d'énergie sont abordées dans une moindre mesure. Les comparaisons liées au sol enherbé sont présentées en Annexe K.1, page 201. Enfin, les comparaisons relatives à l'ensemble du parc, plus particulièrement à une zone englobant plusieurs arbres et les sols, sont présentées à la suite des comparaisons qui concernent les arbres. 5.2.2. Résultats et analyses des comparaisons Au cours de cette thèse, les résultats produits par différentes versions successives (une dizaine, dont deux majeures) du module de végétation de LASER/F ont été comparés, chaque fois, aux mesures de terrain. Les analyses qui en sont ressorties ont permis d'avancer dans le développement du modèle. Dans ce chapitre, nous présentons les comparaisons relatives à la dernière version de LASER/F datant de mai 2018. Les résultats obtenus avec la version antérieure à celle utilisée dans ce chapitre, ont fait l'objet d'un article et ont été présentés lors de la conférence de l'Association Internationale de Climatologie (Bournez et al., 2018). Pour analyser les comparaisons entre les simulations et les mesures, une étude statistique a été menée avec le logiciel Excel (Microsoft). Des régressions linéaires simples ont été calculées afin d'étudier la cohérence entre les simulations et les mesures. Les régressions ont été comparées à l'aide des grandeurs statistiques R2, RMSE, MAE, MBE et dr (voir les formules dans l'Annexe H, page 191). Pour l'analyse globale des résultats, nous nous baserons sur le coefficient de détermination R2 qui indique s'il y a une relation entre les grandeurs simulées et mesurées. À cette analyse statistique globale vient s'ajouter une analyse visuelle des dynamiques journalières des grandeurs simulées et mesurées. Bien que le pas de temps des simulations est de 2 minutes et 30 secondes, les analyses ont été réalisées uniquement par heure, afin d'effectuer des comparaisons uniquement aux pas de temps pour lesquels le forçage météorologique est appliqué. 5.2.2.1. Comparaisons relatives aux arbres Les comparaisons relatives aux arbres ont été réalisées sur six tilleuls argentés, lors de P1 et P2, pour l'évapotranspiration, et sur le Georges' tree, lors de P3, pour la température de surface du feuillage. Les grandeurs statistiques représentatives des résultats obtenus sont détaillées dans le Tableau 5.4. Grande ur R2 RMSE M BE MAE dr ET 0,65 100,46 -54,95 59,43 0,70 TS 0,69 4,2 -0,8 3,7 0,06 Tableau 5.4 – Grandeurs statistiques calculées pour la compara ison relative à l' évapotranspiration (ET) des six tilleuls argentés sur l'ensemble des périodes de simulations (P1, P2 et P3) et relative à la température de surface (TS) de deux zones de feuillage du Georges' tree sur la période 3. 108 5.2. Comparaison des simulations de LASER/F à des mesures de terrain  Flux d'évapotranspiration L'évapotranspiration (ET) simulée par LASER/F pour les arbres a été comparée avec les mesures de flux de sève (Figure 5.6). Ces comparaisons ont été effectuées sur six tilleuls argentés. Les dynamiques journalières visibles dans la Figure 5.6 représentent la moyenne des flux en prenant en compte les six arbres et l'écart-type par rapport à cette moyenne. Nous avons choisi de représenter la moyenne des flux pour simplifier l'étude comparative. Figure 5.6 – Dynamiques journalières de l'évapotranspiration (ET) moyenne sur les six tilleuls argentés simulée et mesurée, avec les écart-types associés, pour les périodes P1 et P2. Analyse de la mesure L'analyse des mesures de l'évapotranspiration soulève deux remarques : - - Des pics matinaux de l'évapotranspiration sont observés chaque matin pendant une heure environ. Comme il a été expliqué dans la sous-partie 4.3.2.2 du Chapitre 4, page 91, ils sont dus à un biais instrumental qui est en train d'être examiné et corrigé. Il ne faudra donc pas faire cas de ces pics dans les analyses. La variabilité de l'évapotranspiration des six arbres est beaucoup plus importante avec la mesure qu'avec la simulation. L'évapotranspiration mesurée entre les six arbres est très variable, contrairement à la simulation. En effet, entre 8 h et 17 h, l'écart type des six mesures est de 72,91 W/m2, alors que l'écart type des six simulations est de 10,64 W/m2. La raison de l'importante variabilité des mesures a été tout d'abord cherchée à travers la géométrie des six tilleuls argentés. Or, aucune relation n'a été trouvée entre le PEA de chaque arbre et le taux d'évapotranspiration simulé. De même, le diamètre réel du tronc de chaque arbre étant quasi identique, cela ne peut pas expliquer cette variabilité. L'analyse de la spatialisation des arbres dans l'environnement urbain, par rapport à l'environnement alentour, n'a pas donné de conclusion. La question de la provenance de la variabilité des mesures reste à ce jour en suspens. Comparaison entre la période où le sol est sec et celle où le sol est humide Concernant la comparaison des simulations avec les mesures sur l'ensemble des périodes de simulations, une bonne corrélation a été trouvée entre les deux avec un R2 de 0,65. Lorsque les périodes sont analysées séparément, la période où le sol est sec (P1) se distingue statistiquement légèrement de la période où le sol est humide (P2) avec un R2 de 0,69 pour P1 et de 0,56 pour P2. L'analyse des dynamiques journalières entre les deux périodes permet de comprendre l'origine de cette différence. - Lors des deux dernières journées de P2, la simulation chute brutalement en fin de journée par rapport à la mesure. Au vu des conditions météorologiques (Annexe J, 109 Chapitre 5. Extension des simulations à l'échelle d'un parc - page 194), cette chute pourrait être attribuée à l'humidité et à la température de l'air. En effet, elles atteignent toutes deux leur valeur extrême (humidité de 19 % et température de 34,0 °C) à la fin de la journée du 18 juillet 2014. La résistance stomatique à l'humidité et à la température de l'air est donc peut-être trop importante. Ce point mérite d'être approfondi. Néanmoins, le changement de condition météorologique qui semble expliquer le plus cette diminution du taux d'évapotranspiration est la diminution du rayonnement direct et l'augmentation du rayonnement diffus en ces fins de journées. Cette corrélation entre les deux phénomènes (météorologique et simulation), montre que la conductance stomatique du feuillage des arbres est trop sensible aux variations du rayonnement direct. Ce constat rejoint celui auquel nous étions arrivés à l'issue de l'étude à l' chelle de l'arbre (Chapitre 4). Ainsi, dans le futur, il faudrait connaître la conductance stomatique du feuillage étudié, liée au rayonnement. Ensuite, il semblerait que le modèle réagisse correctement aux différences d'humidité dans le sol, entre P1 et P2. En effet, lorsque les dynamiques journalières moyennes de l'évapotranspiration simulée sont comparées aux mesures, les écarts entre P1 et P2 sont globalement cohérents. De plus, ces graphiques montrent que les tilleuls argentés ne sont pas stressés par les conditions hydriques, que ce soit avec la mesure ou la simulation. Effectivement, lorsque le sol s'assèche en surface lors de P2, une diminution très faible de l'évapotranspiration simulée est remarquée en parallèle. Ainsi, ces constats amènent à supposer que l'horizon racinaire dans le modèle et que la régulation stomatique de l'arbre, liée à la réserve utile d'eau dans le sol, correspondent à la réalité. Comparaison des dynamiques journalières entre la simulation et la mesure Un dernier point important à étudier est la différence de comportement entre les simulations et les mesures entre le jour et la nuit. Globalement, le modèle sous-estime l'évapotranspiration par rapport à la mesure, avec une MBE de -54,95 W/m2 et une RMSE de 100,46 W/m2. De manière plus détaillée, le flux simulé le matin (de 4 h à 7 h) a tendance à être surestimé de 5,90 W/m2 en moyenne +/- 16,06 W/m2 par le modèle, et sous-estimé de 94,01 W/m2 en moyenne +/- 67,11 W/m2 au cours de la journée (de 7 h à 20 h). La nuit, les taux simulés et mesurés sont nuls. Les paragraphes suivants présentent des explications sur les raisons de ces résultats. Interprétation des résultats La comparaison de l'évapotranspiration d'un arbre simulée par LASER/F à des mesures de flux de sève a déjà été réalisée sur le Georges' tree uniquement (sans l'environnement urbain autour), sur une centaine de journées (Chapitre 4, sous-partie 4.3.2, page 91). Les résultats obtenus avec LASER/F à l'échelle d'un arbre (Etude 1 – E1) étaient meilleurs que ceux présentés, ici, à l'échelle du parc (Etude 2 – E2). Il a été montré que LASER/F est capable de simuler correctement la dynamique de l'évapotranspiration de cet arbre (R2 de 0,68). Il a aussi été montré que le potentiel du modèle LASER/F se rapprocherait des capacités du modèle RATP (R2 de 0,83) si la conductance stomatique du feuillage était paramétrée en fonction de l'espèce d'arbres étudiée. Ainsi, l'insertion de l'environnement urbain dans E2, n'explique pas la diminution globale, sur la journée, du taux d'évapotranspiration, observée entre E1 et E2. Par conséquent, l'écart observé dans E2 est simplement dû à une différence de paramétrage entre les deux études, retrouvée entre E1 et E3. Nous allons maintenant étudier ce point plus en détail. Figure 5.7 – Dynamique journalière du taux d'évapotranspiration du Georges' tree, lors de la journée du 17 juillet 2014 : mesuré (en pointillé), simulé par RATP (en continu noir) et simulé par LASER/F dans le cas : i) E1 – de l'étude à l'échelle de l'arbre avec 100 faces consituant la couronne (en continu bleu), ii) E2 – de l'étude à l'échelle du quartier avec 20 faces (en noir, avec marqueurs ronds) et iii) E3 – de l'étude à l'échelle de l'arbre avec 20 faces (en rouge, avec marqueurs carrés). Chapitre 5. Extension des simulations à l'échelle d'un parc Etude PEA (m2) Volume (m3) TLA (m2) LAI (m2/m2) LAD Nombre 3 (m2/m ) de faces E1 23,7 60,4 (101,4 total) 265,5 11,2 4,4 E2 20,94 30,25 (50,42 total) 209,44 10 6,9 100 20 Tableau 5.5 – Différences de caractéristiques relatives à la maquette 3D de la couronne du Georges' tree entre l'étude 1 (E1 – à l'échelle de l'arbre - Chapitre 4) et l'étude 2 (E2 – à l'échelle du parc – Chapitre 5). Les caractéristiques sont la surface de l'enveloppe projetée au sol (PEA), le volume, la surface foliaire total (TLA), l'indice de surface foliaire (LAI), la densité foliaire (LAD) et le nombre de faces par couronne. Le Tableau 5.5 présent e les différences de caractéristiques relatives à la cour onne du Georges' tree entre E1 et E2. Les caractéristiques sont plus faibles pour E2 que pour E1, avec -2,76 m2 de PEA, -30,15 m3 de Volume, -56,06 m2 de TLA et par con s é quent -1,2 de LAI et + 2,5 de LAD. Ces différences sont caus ées par le cumul de trois change ments relatifs à la re construction de la couronne du Georges' tree : - - - Le LAI de l'arbre a été modifié de manière à correspondre davantage à l'état de maturité du feuillage représentatif des trois périodes de simulations étudiées dans E2. En effet, lorsque nous avions commencé l'étude E1, nous avions utilisé la seule maquette disponible, c'est-à-dire une maquette représentative de l'état de maturité du 24/10/2013. En revanche, pour E2 nous avons considéré qu'une maquette représentative de l'état de maturité du 03/07/2013 était plus cohérente avec les périodes de simulations étudiées. Ainsi, il est normal d'observer une diminution du LAI entre E1 et E2. L'enveloppe 3D de la couronne foliaire a été modifiée pour les mêmes raisons que précédemment. Néanmoins, nous souhaitons obtenir ces maquettes à partir d'une seule campagne d'acquisition SLT. Une seule date d'acquisition correspondait à ces critères. C'est la raison pour laquelle, l'état de maturité du 27/06/2016 a été pris en compte dans E2. Ainsi, il est normal d'observer une diminution du volume et de la PEA entre E1 et E2. Enfin, pour que LASER/F puisse fonctionner à l'échelle du quartier, la réduction du nombre de faces par arbre s'est avérée primordiale. La couronne, qui était composée de 100 faces en contient maintenant 20. Pour simplifier le processus de reconstruction 3D, cette simplification a toujours été effectuée à partir du nuage de points de chaque arbre. Par conséquent, le volume et la PEA de la couronne diminuent forcément entre E1 et E2. Nous nous sommes rendus compte trop tard que la méthode adoptée pour simplifier le nombre de faces dans la couronne n'était sans doute pas la meilleure. Comme nous allons le voir dans la suite, cette simplification pourrait être réalisée en gardant le PEA ou le volume de l'arbre initial, au détriment de la forme de la couronne. Les différences de caractéristiques entre E1 et E2, retrouvées sur l'ensemble des arbres présents dans la scène, engendrent logiquement une diminution du taux d'évapotranspiration émis par ces arbres. Ces résultats montrent l'importance du paramétrage lié à la géométrie de la couronne foliaire des arbres. Ainsi, pour réaliser des simulations sur la totalité d'une période d'été, la représentation de la croissance de la couronne foliaire sera très importante, au moins au début et à la fin de la période. Actuellement, le modèle LASER/F peut utiliser un LAI qui varie au cours du temps. En revanche, le volume de la couronne ne peut varier dans une même simulation ; il en va de même pour le modèle RATP. 5.2. Comparaison des simulations de LASER/F à des mesures de terrain Amélioration de la géométrie des arbres dans LASER/F Au vu des conclusions précédentes, un travail a été entrepris sur l'optimisation de la maquette 3D de l'enveloppe de la couronne foliaire de manière à simuler correctement les flux tout en simplifiant au maximum la maquette utilisée. Pour ce faire, une étude de sensibilité du taux d'évapotranspiration d'un arbre simulé par LASER/F en fonction de la variabilité de nombreux critères géométriques, liés à la couronne, a été réalisée (se référer à l'Annexe L, page 211) : - - - Cette étude a montré que la diminution du volume et de la PEA de la couronne foliaire, en même temps, engendre une très forte diminution de l'évapotranspiration. Ce constat rejoint celui établi dans le Chapitre 4, sous-partie 4.2. Il avait été mis en évidence que la PEA et le volume sont les grandeurs les plus importantes à déterminer pour simuler correctement l'évapotranspiration. Cette analyse de sensibilité nous a montré aussi que l'augmentation du volume sans changement de la PEA aurait un plus faible impact sur le flux. C'est pourquoi, nous émettons l'hypothèse qu'une détermination moins précise de la hauteur de la couronne plutôt que de son diamètre aurait moins d'impact sur le flux simulé. Enfin, dans le cas du tilleul argenté taillé en forme de tête de chat, cette étude a montré qu'une représentation sphérique ou cubique de la couronne pourrait s'avérer une solution pour simplifier la maquette 3D tout en préservant la quantité de flux simulé. L'ensemble de cette étude de sensibilité a été réalisé avec des versions antérieures de LASER/F. Les conclusions effectuées nécessitent donc d'être vérifiées. Par la suite, il faudra pousser davantage ce type d'analyses afin de déterminer comment simplifier au mieux la complexité des arbres dans LASER/F. La température de surface du feuillage impacte sur son rayonnement net, qui impacte luimême sur le taux d'évapotranspiration de l'arbre. Ainsi, une analyse de la température de surface simulée va maintenant être effectuée pour comprendre davantage les résultats précédents.  Température de surface La température de surface (TS) du feuillage du Georges' tree, simulée par LASER/F a été comparée à la température de brillance de ce feuillage mesurée avec les radios-thermomètres (Figure 5.8). Une comparaison est réalisée pour le feuillage à l'est et une autre pour le feuillage à l'ouest. L'installation du radio-thermomètre ayant été effectuée uniquement en 2015, seule la période P3 peut être utilisée. La température de l'air mesurée par un capteur météorologique à 2 m de hauteur a été ajoutée à cette comparaison. Nous savons que les surfaces dans LASER/F sont homogènes, c'est-à-dire qu'il y a uniquement du feuillage et donc pas d'air, alors qu'en réalité les deux sont présents dans la couronne d'un arbre. Mais, cette comparaison, entre température de surface simulée et température de brillance mesurée, est possible dans ce cas d'étude. En effet, l'émissivité des feuilles dans le domaine spectral du capteur (8-14 m) est connue comme très proche de l'unité. De plus les capteurs étant très proches du feuillage, l'atténu du rayonnement due à la transmission atmosphérique est négligeable. Nous nous trouvons donc dans une situation où la température de brillance est quasi équivalente à la température de surface et peut donc se trouver comparée aux sorties du modèle LASER/F. Chapitre 5. Extension des simulations à l'échelle d'un parc Globalement, une corrélation existe entre les simulations et les mesures (R2 de 0,69). Pour pouvoir interpréter au mieux les résultats, il est nécessaire de distinguer la température de surface à l'est et à l'ouest. Dans ce cas, les simulations sont plus proches des mesures à l'ouest (R2 de 0,84) qu'à l'est (R2 de 0,69). La température de surface simulée à l'est est en moyenne inférieure à la mesure de 1,1 °C +/- 4,6 °C, alors qu'à l'ouest l'écart moyen est de -0,5 °C +/- 3,8 °C. De manière plus détaillée, on observe que lorsque le feuillage est éclairé, la température est surestimée par LASER/F avec un écart maximum de 12,8 °C à l'est et de 6,2 °C à l'ouest. Lorsque le feuillage est à l'ombre, LASER/F sous-estime la température de surface avec un écart maximum la nuit de -6,0 °C quel que soit le côté du feuillage pris en compte. Dans la suite, nous allons essayer de comprendre pourquoi LASER/F simule ces résultats. Figure 5.8 – Dynamiques journalières de la température de surface du feuillage (TS) à l'est et à l'ouest sur la période P3, simulée et mesurée, ainsi que la température de l'air mesurée à deux mètres de hauteur (en jaune). Il est communément admis que la température des feuilles à l'ombre est environ égale à la température de l'air et qu'au soleil la température des feuilles est d'environ 2,0 °C supérieure à la température des feuilles à l'ombre. De plus la température des feuilles la nuit est environ égale à la température de l'air (Idso et al., 1981 ; Linacre, 1964). Or, un écart en moyenne de -2,0 °C (-3,5 °C max) et de -2,8 °C (-7,9 °C de max), est observé respectivement entre la température de brillance mesurée et la température de l'air et entre la température de surface simulée et la température de l'air. Il semblerait donc que la simulation et la mesure sousestiment toutes les deux la température du feuillage. Lors de P3 (mois d'octobre), l'écart observé entre la mesure et la température de l'air est plus important que l'écart observé au mois de juillet ou août. La température de l'air est plus basse au mois d'octobre qu'au mois de juillet ou août. Le problème de mesure peut provenir de la calibration en laboratoire des capteurs avec un corps noir. En effet, celle-ci est moins fiable pour les températures basses en raison de la difficulté d'atteindre des valeurs pour la température du corps noir très en dessous de la température ambiante (de l'ordre de 20,0 °C). Donc, les valeurs obtenues lors de journées fraiches s'avèrent moins exactes que lors de journées chaudes. Bailey et al. (2016) insistent sur la difficulté de mesurer la température de surface du feuillage. Nous retiendrons, toutefois, que le modèle LASER/F simule un feuillage trop chaud, lorsque le rayonnement direct 'atteint et trop froid, le reste du temps, par rapport à la température de l'air. Lors de la comparaison des simulations de LASER/F avec celles de RATP (Chapitre 4, partie 4.3, page 82), nous avions déjà observé ce même phénomène. Au-delà d'erreurs provenant de l'imprécision du paramétrage des arbres dans le modèle (émissivité et conductances physiologiques), il semblerait que le problème provienne principalement d'une mauvaise estimation du rayonnement infrarouge absorbé et émis par le feuillage. Le feuillage se comporte comme si toutes les feuilles émettaient librement leur rayonnement infrarouge, or 5.2. Comparaison des simulations de LASER/F à des mesures de terrain une partie de celui-ci est absorbée par les feuilles voisines. La nuit, le rayonnement infrarouge émis est donc trop important et par conséquent la température de surface est très faible. 5.2.2.2. Comparaisons relatives à l'ensemble du parc L'analyse des flux émanant d'une zone plus large du parc est intéressante, puisque ces flux traduisent les capacités du modèle à simuler correctement plusieurs types d'objets. La zone traitée ici est illustrée dans le Tableau 5.6 par un encadré rose. Cette zone a été définie selon l'emprise supposée des capteurs, localisés à 17 m de hauteur, utilisés pour cette étude comparative (Annexe C.2, page 168). Comme cette zone comprend plusieurs arbres et du sol enherbé, nous allons pouvoir approfondir l'évaluation de la capacité de LASER/F à reproduire le fonctionnement des arbres et aussi du sol enherbé. Les grandeurs statistiques représentatives des résultats obtenus sur l'ensemble des périodes (P1, P2 et P3) sont détaillées dans le Tableau 5.6. L'étude comparative présentée dans la suite concerne les périodes 1 et 2. ZONE Grandeur LEzone Szone RNzone Solairezone↑ IRzone↑ R2 0,85 0,89 0,97 0,98 0,95 RMSE 64,07 39,95 41,51 32,30 28,42 MBE -31,84 23,46 2,17 -20,20 19,40 MAE 39,41 32,30 20,39 20,32 20,50 dr 0,76 0,76 0,96 0,78 0,69 Tableau 5.6 – Grandeurs statistiques calculées sur l'ensemble des périodes de simulation pour les comparaisons relatives à l'ensemble de la zone (encadré rose dans l'illustration) : flux de chaleur latente (LEzone), flux de chaleur sensible (Szone), rayonnement net (RNzone), rayonnement solaire montant (Solairezone↑), et rayonnement infrarouge montant (IRzone↑).  Flux de chaleur latente Le flux de chaleur latente (LEzone), provenant d'une certaine emprise du parc, a pu être comparé à des mesures effectuées par l'analyseur de gaz et l'anémomètre sonique à 17 m de hauteur (Tableau 5.6 et Figure 5.9). Cette emprise comprend des arbres, du sol enherbé, du sol nu et du bitume. Statistiquement, une forte relation est observée globalement entre le flux simulé et le flux mesuré avec un R2 de 0,85. Il en est de même lorsque le sol est sec (R2 de 0,86) ou humide (R2 de 0,88). Chapitre 5. Extension des simulations à l'échelle d'un parc Figure 5.9 – Dynamiques journalières du flux de chaleur latente (LEzone) simulé, comparé à la mesure sur P1 et P2. Comparaison simulations/mesures sur les périodes diurnes En général, l'évapotranspiration est moins importante lors de P1 que lors de P2. Ce constat est cohérent puisque le sol en P1 est très sec alors qu'en P2 il est totalement humide en début de période et s'assèche avec les jours. Ce dernier point est bien visible avec la diminution du flux mesuré lors de P2. De manière plus détaillée, la journée, le flux simulé lors de P1 est plus sous-estimé par rapport à la mesure (MBE de -51,05 W/m2) que ne l'est le flux simulé lors de P2 (MBE de -30,81 W/m2). Comme il a été montré précédemment, l'évapotranspiration simulée par les arbres, lors de P1, est légèrement inférieure à celle simulée lors de P2, ce qui ne peut donc pas expliquer seulement la différence entre les deux périodes. Ainsi, cet écart est dû à l'évapotranspiration du sol enherbé, étudiée en Annexe K.1, page 201 : - - En effet, tout d'abord, la simulation et la mesure de l'évapotranspiration du sol enherbé, lors de P1, sont bien inférieures à celles observées lors de P2 (en moyenne de 145,35 W/m2). De plus, lors de P2, l'évapotranspiration du sol enherbé est même surestimée par rapport à la mesure (MBE de 47,35 W/m2). Enfin, la même diminution du flux simulé est observée entre l'évapotranspiration du sol enherbé et celle de l'ensemble de la zone. Cette diminution est liée à une diminution du rayonnement solaire direct (Annexe J, page 194). Nous avons vu dans la comparaison effectuée dans l'Annexe K.1, qu'avec L /F, la pelouse semble trop sensible aux variations du rayonnement direct. Comparaison simulations/mesures sur les périodes nocturnes La nuit (de 20 h à 4 h), que ce soit pour la mesure ou la simulation, le flux de chaleur latente est très faible, de l'ordre de 0 à 13,97 W/m2 en moyenne. Ce taux positif avec la simulation, doit provenir de l'évapotranspiration émise par le sol enherbé, puisque la nuit, nous avons montré que l'évapotranspiration des arbres est nulle L'analyse présentée en Annexe K.1, montre bien que l'évapotranspiration du sol enherbé, la nuit, simulée par LASER/F, est nulle lors de P1, alors qu'elle est légèrement positive lors de P2 (environ 15,00 W/m2). Cette différence de flux entre les arbres et la pelouse, peut provenir de l'énergie stockée dans le sol le jour, qui apporte de l'énergie la nuit en surface et donc permet encore d'émettre un flux. 5.2. Comparaison des simulations de LASER/F à des mesures de terrain - De plus, une lég ère différence de flux est observée entre P1 et P2, entre la simulation et la mesure. Elle peut provenir d'une imprécision dans la simulation, de l'humidité du sol ou bien d'une imprécision de mesure. Le sujet de l'évapotranspiration de la végétation, la nuit, est un débat chez les scientifiques. La seule théorie approuvée est que ce flux est très faible par rapport au jour. Nous ne nous attarderons donc pas plus sur l'évapotranspiration de la végétation en période nocturne. Comparaison du taux d'évapotranspiration provenant des arbres et de la pelouse Les mesures de terrain ont montré que, ramené à la surface projetée au sol, le taux d'évapotranspiration d'un tilleul argenté est normalement équivalent au taux d'évapotranspiration émis par la même surface de sol enherbé. En effet, l'étude comparative relative aux tilleuls argentés (Figure 5.7) et l'étude comparative relative au sol enherbé présent dans le parc (Annexe K.1, page 201) montrent que, l'évapotranspiration maximale atteinte par le sol enherbé est équivalente à l'évapotranspiration maximale atteinte par les arbres (environ 250,00 W/m2). Ce constat est à considérer uniquement dans le cas d'un tilleul argenté avec un LAI d'environ 11 et d'une surface de sol enherbé avec un LAI d'environ 1. Ces résultats sont vrais lorsque le sol est humide, mais pas lorsque le sol est sec. En effet, normalement, l'arbre puise l'eau plus en profondeur dans le sol que l'herbe (Jackson et al., 1996). Comme le sol s'assèche très lentement en profondeur, il souffre moins rapidement de stress hydrique. Il est donc capable d'émettre plus longtemps de l'évapotranspiration lorsque le sol s'assèche, ce qui lui confère un effet rafraîchissant de l'air plus longtemps que celui de l'herbe. Dans LASER/F, bien que l'équivalence 'évapotranspiration entre un arbre et le sol enherbé, pour 1 m2 de sol ne soit pas tout à fait retrouvée, le fonctionnement de la végétation (arbre et sol enherbé) est cohérent, que ce soit lorsque le sol est sec ou humide ou entre le jour et la nuit. Il reste maintenant à savoir si le modèle fonctionne bien par rapport à d'autres flux.  Flux de chaleur sensible Le flux de chaleur sensible (Szone), provenant d'une certaine emprise, a été comparé au flux mesuré par l'analyseur de gaz et l'anémomètre sonique situés à 17 m de hauteur sur le mât (Tableau 5.6 et Figure 5.10). Statistiquement, sur l'ensemble des périodes, la relation entre le flux simulé et mesuré est forte (R2 de 0,89). Lorsque les périodes sont traitées séparément, la relation est toujours très bonne, mais plus faible avec P2 (R2 de 0,72) qu'avec P1 (R2 de 0,96). Figure 5.10 – Dynamiques journalières du flux de chaleur sensible (Szone) simulé, comparé à la mesure sur P1 et P2. 117 Chapitre 5. Extension des simulations à l'échelle d'un parc Comparaison simulation s/mesures sur les péri odes di ur nes Le jour, le flux de chaleur sensible est plus important en P1 qu'en P2, quasiment le double, que ce soit pour la simulation ou la mesure. Ce comportement semble réaliste et cohérent par rapport aux analyses précédentes sur le flux de chaleur latente. En effet, lors de P1, le sol étant sec, l'herbe n'est plus capable d'émettre un fort flux de chaleur latente pour réguler sa température de surface. Par conséquent, elle chauffe plus et émet donc plus de flux de chaleur sensible. C'est l'inverse pour P2 avec un sol humide. L'écart entre le flux simulé et mesuré est très faible lors de P1 (MBE de -3,63 W/m2). Ceci montre que globalement les températures de surfaces des éléments présents dans la scène sont correctement estimées. Le problème détecté précédemment, à propos de la température de surface du feuillage des arbres se compense dans ce cas, avec les surfaces ombragées et éclairées. Les différences entre la simulation et la mesure (MBE de 55,98 W/m2), lors de P2, n'ont pas encore été expliquées à ce jour. Comparaison simulations/mesures sur les péri odes nocturnes La nuit (de 20 h à 4 h), avec la mesure, un phénomène d'inversion thermique a lieu. Le pic plus intense (maximum de 46,93 W/m2) observé en début de soirée est lié à la présence de végétation dans la zone et à sa conductance stomatique : - - - À partir de 17 h, les températures de surfaces des éléments naturels (majoritairement présents dans la zone étudiée) deviennent inférieures à la température de l' et donc le flux de chaleur sensible s'inverse. Néanmoins, le rayonnement solaire contribue toujours au flux de chaleur latente. Par conséquent, la température de surface de la végétation baisse encore plus. Ce refroidissement dure jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de rayonnement solaire et que la plante régule sa température de surface. La température de surface de la végétation étant légèrement inférieure à la température de l'air la nuit, les mesures semblent réalistes.
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Les guerres de religion ont bien eu lieu. Dominique Barjot; Anna Bellavitis; Bertrand Haan; Olivier Feiertag. Regards croisés sur l’historiographie française aujourd’hui, SPM, p. 63-75, 2020. &#x27E8;halshs-03939778&#x27E9;
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Les HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Nicolas Le Roux, « Les guerre s de religion ont bien eu lieu », dans Regards croisés sur l’historiographie française d’aujourd’hui (dir. D. Barjot, A. Bellavitis, B. Haan et O. Feiertag), SPM, 2020, p. 63-75. On a pu se demander récemment si les guerres de Religion étaient vraiment des guerres de religion1. On sait que les violences qui marquèrent la France du XVIe siècle furent en partie commandées par les solidarités nobiliaires et la défense de l’honneur familial, et que la vendetta joua un rôle central dans les troubles2. Par ailleurs, tous les acteurs des guerres ne furent probablement pas des guerriers de Dieu et, au XVIe siècle, comme à d’autre époques, il n’était sans doute pas nécessaire d’être motivé pour tuer3. Certains auteurs sont même allés jusqu’à dénier toute légitimité au concept de « violence religieuse »4, non seulement parce que les causes religieuses et politiques des guerres civiles ne peuvent être distinguées, mais plus fondamentalement parce qu’il n’y aurait pas de différence de nature entre les violences commises au nom de la religion et les violences justifiées par une idéologie séculière, et que le développement de « l’État moderne » n’a pas eu pour effet l’apaisement des violences, mais au contraire la réalisation de violences autrement plus dévastatrices que celles que les affrontements interconfessionnels ont pu provoquer. On s’est finalement demandé si les guerres de Religion avaient vraiment eu lieu5, ou si elles n’étaient pas qu’une construction historique, voire une reconstruction, éventuellement anachronique ou biaisée idéologiquement. Le mouvement historiographique tendait pourtant à « remettre de la religion dans les guerres de Religion6 », en se replaçant dans l’état d’esprit des croyants du XVIe siècle, pour 1 Philip Benedict , « Were the French Wars of Religion Really Wars of Religion? », in Wolfgang Palaver, Harriet Rudolph et Dietmar Regensburger (dir.), The European Wars of Religion : An Interdisciplinary Reassessment of Sources, Interpretations, and Myths, Farnham, Ashgate, 2016, p. 61-86 ; Jérémie Foa (dir.), Les guerres de Religion furent-elles des guerres de religion?, colloque d’Aix-en-Provence, 27-28 juin 2019. 2 Stuart Carroll, Blood and Violence in Early Modern France, Oxford, Oxford University Press, 2006 ; Id., « Political justice and the outbreak of the Wars of Religion », French History, vol. 33, n° 2, 2019, p. 177-198 ; Michel Nassiet, La Violence, une histoire sociale. France, XVIe-XVIIIe siècles, Seyssel, Champ Vallon, 2011. 3 Nicolas Mariot, « Faut-il être motivé pour tuer? », Genèses, n° 53, 2003, p. 154-177. 4 William T. Cavanaugh, Le Mythe de la violence religieuse, Paris, Éd. de l'Homme nouveau, 2009. Pour une réfutation de cette vision révisionniste, voir Barbara Diefendorf, « Were the Wars of Religion about Religion? », Political Theology, vol. 15, n° 6, 2014, p. 552-563. 5 Jérémie Foa et Paul-Alexis Mellet, « Les guerres de Religion ont-elles eu lieu? », in Jérémie Foa et PaulAlexis Mellet (dir.), Le Bruit des armes. Mises en formes et désinformations en Europe pendant les guerres de Religion (1560-1610), Paris, H. Champion, 2012, p. 19-36. 6 Mack P. Holt, « Putting Religion Back into the Wars of Religion », French Historical Studies, vol. 18, n° 2, 1993, p. 524-551. Pour des synthèses historiographiques : Nicolas Le Roux, Les guerres de Religion (15591629), Paris, Belin, « Histoire de France », 2009 ; Id., Les guerres de Religion, Paris, PUF, « Que sais-je? », sa isir la force mobilisatrice du religieux, dont la valeur légitimante ou la force destituante peuvent s’avérer extrêmement efficaces . Denis Crouzet a montré que les guerres de Religion ont été le théâtre de violences de masse qui s’expliquent par la puissance de l’imaginaire eschatologique à l’œuvre dans la société catholique. Il y eut également un véritable enthousiasme protestant au début des années 1560. Les huguenots ont pu espérer que la vérité divine ouvrirait les yeux des jeunes rois, François II et Charles IX, et de leur mère, Catherine de Médicis, et c’est ce qui explique la conjuration d’Amboise de mars 15607, puis l’attitude particulièrement intransigeante de Théodore de Bèze lors du colloque de Poissy, à l’automne de 15618. Les Églises réformées étaient de plus en plus nombreuses en France : alors qu’on n’en comptait que 6 en 1555, il y en avait 116 en 1559, 285 en 1560, 648 en 1561 et 816 en 15629. On ne considère plus en revanche que le nombre de 2 150, à l’époque avancé par les réformés, fut atteint. La conversion n’entraînait pas nécessairement l’engagement armé. Parmi ceux qui prirent les armes pour combattre dans l’armée de Condé pendant la première guerre de Religion (1562-1563), certains revinrent ensuite revenir dans le giron catholique et royal, l’exemple le plus spectaculaire étant celui du baron des Adrets. D’autres, au contraire, ont été animés par un engagement absolu au service de la cause réformée. Ce fut le cas d’Antoine de Croÿ, et surtout de Gaspard de Coligny10. Ce dernier a suivi l’exemple de son frère cadet, François d’Andelot, qui fut le premier de la fratrie à se convertir. Tous deux se sentaient appelés par Dieu après les épreuves de la captivité, mais leur attitude ne fut pas exactement la même, car Coligny se montra beaucoup plus prudent que d’Andelot. La disparition soudaine 2016 ; Olivia Carpi, Les guerres de Religion (1559-1598). Un conflit franco-français, Paris, Ellipses, 2012. Voir aussi Laurent Bourquin, « Les défis des guerres de religion 1559-1610 », in Joël Cornette (dir.), La Monarchie entre Renaissance et Révolution, 1515-1792, Paris, Éd. du Seuil, 2000, p. 63-134. 7 Serge Burnet, « La conjuration d’Amboise (16 mars 1560), Emmanuel-Philibert de Savoie et Genève », in Stéphane Gal et Louis Périllat (dir.), La Maison de Savoie et les Alpes : emprise, innovation, identification (XVeXIXe siècle), Chambéry, Université Savoie Mont Blanc, 2015, p. 303-336. 8 Hugues Daussy, Le Parti huguenot. Chronique d’une désillusion (1557-1572), Genève, Droz, 2014. 9 Jonathan A. Reid, « French evangelical networks before 1555 : Proto-churches? », in Philip Benedict, Silvana Seidel Menchi et Alain Tallon (dit.), La Réforme en France et en Italie. Contacts, comparaisons et contrastes, Rome, École française de Rome, 2007, p. 105-124 (p. 108) ; Philip Benedict et Nicolas Fornerod, « Les 2 150 “églises” réformées de France de 1561-1562 », Revue historique, n° 3, 2009, p. 529-560. 10 Nicolas Breton, Pour Dieu, pour le roi, pour soi. Les engagements politiques et religieux des ColignyChâtillon, du milieu du XVe au milieu du XVIIe siècle, thèse de doctorat, dir. Laurent Bourquin et Hugues Daussy, Le Mans Université, 2017 ; Tomaso Pascucci, « Basculement confessionnel et engagement politique au début des guerres de Religion : le cas d’Antoine de Croÿ, prince de Porcien », Revue historique, n° 3, 2018, p. 593620. 2 d’Henri II en 1559 provoqua une rupture fondamentale 11. L’opposition aux Guise, désormais au pouvoir, peut expliquer les prises de position publiques en faveur des réformés. C’est sans doute à ce moment, à Pâques de 1560, que Coligny sauta finalement le pas. La mort de François II, en décembre, rebattit les cartes. Cette fois ce furent les Guise qui tombèrent de la roue de la fortune. D’Andelot et Coligny soutenaient désormais ouvertement les calvinistes, accueillant des prédicateurs et finissant par rompre avec leur oncle, le connétable de Montmorency. C’est véritablement à ce moment que Coligny se posa en chef de parti, aux côtés de Condé. La première guerre de Religion a constitué une rupture majeure. Le début des troubles fut particulièrement meurtrier. Les massacres perpétrés par les catholiques, généralement en position majoritaire, furent particulièrement nombreux en 156212. De leur côté, les huguenots pratiquaient une violence ciblée, qui portait sur des objets et des lieux sacrés (iconoclasme)13, mais aussi, personne ne le nie, sur des personnes, comme ce fut le cas lors de la « Michelade » du 30 septembre 1567, qui fit plusieurs dizaines de victimes parmi les notables et les ecclésiastiques de Nîmes14. De grands seigneurs furent tués, et on inaugura la pratique de l’attentat, avec la mort de François de Lorraine, duc de Guise, sous les murs d’Orléans en mars 156315. La maison de Lorraine entra alors dans un cycle de vengeance dont l’attentat contre Gaspard de Coligny, le 22 août 1572, puis la mort de celui-ci lors de la SaintBarthélemy, le 24 août, furent l’aboutissement16. Un second cycle s’ouvrit en décembre 1588, après l’assassinat d’Henri et de Louis de Lorraine, les fils de François. On sait que les dames jouaient un rôle central dans la défense de l’honneur familial. Elles avaient le devoir de réclamer la tête des meurtriers de leurs époux ou fils, surtout quand l’héritier du nom était trop jeune pour assurer lui-même la vengeance. Anne d’Este, veuve de François de Lorraine et mère d’Henri, était au cœur de cette quête vindicatoire17. Il ne faut pas cacher que Catherine de Médicis elle-même attendait avec impatience qu’on lui apporte la tête de l’infortuné 11 Sophie Tejedor , À la croisée des temps. François II, roi de France et la crise des années 1559-1560, thèse de doctorat, dir. Denis Crouzet, Sorbonne Université, 2019. 12 Allan A. Tulchin, « Massacres during the French Wars of Religion », Past and Present, vol. 214, suppl. 7, 2012, p. 100-126. 13 Olivier Christin, Une révolution symbolique. L’iconoclasme huguenot et la reconstruction catholique, Paris, Éd. de Minuit, 1991. 14 Allan A. Tulchin, « The Michelade in Nîmes, 1567 », French Historical Studies, vol. 29, n° 1, 2006, p. 1-36 ; Id., That Men Would Praise the Lord : The Triumph of Protestantism in Nîmes, 1530-1570, Oxford, Oxford University Press, 2010, p. 170. 15 Éric Durot, François de Lorraine, duc de Guise entre Dieu et le Roi, Paris, Classiques Garnier, 2012. 16 Jean-Marie Constant, Les Guise, Paris, Hachette, 1984 ; Stuart Carroll, Martyrs and Murderers : The Guise Family and the Making of Europe, Oxford, Oxford University Press, 2009. 17 Christiane Coester, Schön wie Venus, mutig wie Mars. Anna d’Este, Herzogin von Guise und von Nemours (1531-1607), Munich, Oldenbourg, 2007. 3 chevalier qui avait mortellement blessé son époux, Henri II, lors du tournoi fatal de 1559. Elle finit par l’obtenir, et sa vengeance reçut un habillage judiciaire : le comte de Montgomery fut exécuté le 26 juin 157418. La guerre plongea les provinces dans une situation de stress considérable. La société entama un processus de militarisation, et peut-être aussi de brutalisation, qui aboutit à la mise en place de réseaux locaux de financement et de mobilisation19. Les gens de guerre, que la paix du Cateau-Cambrésis (1559) avait démobilisés20, retrouvèrent un emploi ; de nouvelles générations se familiarisèrent avec les armes, au point de ne jamais connaître autre chose que la guerre civile. Les paysans eux-mêmes s’organisèrent en milices pour résister aux agressions21. Dans les villes, il fallait tout à la fois assurer la défense face aux dangers extérieurs, contrôler les éventuels suspects intérieurs, maîtriser les approvisionnements et éventuellement lutter contre l’épidémie. Le volume des correspondances augmenta considérablement et l’information avait une valeur primordiale22. Les autorités prirent des mesures de contrôle et d’identification des amis comme des ennemis23. Des listes furent dressées : de contribuables, de combattants, de bannis, de victimes etc. Des signes distinctifs furent établis : couleurs24, marques, cris... En mars 1563 fut inaugurée une forme de réconciliation promise à riche avenir : la signature d’un édit de pacification, suivie par la nomination de commissaires chargés de son application25. Jérémie Foa a reconstitué l’esprit et la pratique du travail des commissaires 18 Penny Roberts, « Violence by royal command : a judicial “moment” (1574-1575) », French History, vol. 33, n° 2, 2019, p. 199-217. 19 Pierre-Jean Souriac, Une guerre civile. Affrontements religieux et militaires dans le Midi toulousain (15621596), Seyssel, Champ Vallon, 2008. 20 Bertrand Haan, Une paix pour l’éternité. La négociation du traité du Cateau-Cambrésis, Madrid, Casa Velázquez, 2010 ; Alain Tallon, L’Europe au XVIe siècle. États et relations internationales, Paris, PUF, 2010. 21 Serge Brunet, « Les milices dans la France du Midi au début des guerres de Religion (vers 1559-1564) », in Serge Brunet et José Javier Ruiz Ibañez (dir.), Les Milices dans la première modernité, Rennes, PUR, 2015, p. 63-116 ; Philippe Hamon, « Pourquoi nous combattons. Réflexions sur l’engagement des communautés rurales dans les guerres de la Ligue », in Sylvie Daubresse et Bertrand Haan (dir.), La Ligue et ses frontières. Engagements catholiques à distance du radicalisme à la fin des guerres de Religion, Rennes, PUR, 2015, p. 95109. 22 Matthieu Gellard, Une reine épistolaire. Lettres et pouvoir au temps de Catherine de Médicis, Paris, Classiques Garnier, 2014 ; Gautier Mingous, « Selon les nouvelles que vous nous ferez savoir ». Information et pouvoir à Lyon au tournant des guerres de Religion (vers 1552-vers 1576) », thèse de doctorat, dir. Nicolas Le Roux et Philippe Martin, Université Lyon 2, 2019. 23 Jérémie Foa, « Who goes there? To live and survive during the Wars of Religion, 1562-1598 », French Historical Studies, vol. 40, n° 3, 2017, p. 425-438. 24 Denise Turrel, Le Blanc de France. La construction des signes identitaires pendant les guerres de Religion, Genève, Droz, 2005. 25 Olivier Christin, La Paix de Religion. L’autonomisation de la raison politique au XVIe siècle, Paris, Éd. du Seuil, 1997 ; Penny Roberts, Peace and Authority during the French Religious Wars, c. 1560-1600, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2013 ; Allan A. Tulchin, « Ending the Wars of Religion », The American Historical Review, vol. 120, n° 5, 2015, p. 1696-1708. 4 nommés en 1563 et en 157026. Il s’agissait de détacher la justice du roi des affaires de religion ; chacun devait respecter les dispositions de la paix, quelle que soit son appartenance confessionnelle. L’obéissance devenait la vertu première du sujet, qu’il soit catholique ou protestant. De son côté, le roi s’engageait à rendre une bonne justice, universelle, déconfessionnalisée et efficace. L’application de la paix restait délicate, et les relations entre les envoyés du gouvernement central et les détenteurs de l’autorité locale n’étaient pas toujours simples. Les gouverneurs ou les lieutenants généraux restaient jaloux de leurs prérogatives, et ils étaient animés par une culture de l’action assez différente de l’esprit juridique des commissaires. Le cas de Blaise de Monluc illustre bien ce problème : le vieux soldat catholique s’opposa frontalement aux agents envoyés en Guyenne. De leur côté, les autorités romaines tentent logiquement d’obtenir l’abolition des édits de tolérance27. Elles craignaient par ailleurs du risque que l’État royal n’exerce un contrôle excessif sur l’Église de France à travers cette politique de conciliation civile28. Les édits de pacification imposaient l’oubli et le pardon, mais l’amnésie ne se décrétait pas29. Plus d’un quart de siècle après les faits, les notables catholiques de Lyon évoquaient encore la prise de la ville par les huguenots en 1562. Des recherches récentes portent tout particulièrement sur la mémoire des violences. Les histoires de villes gardèrent le souvenir des événements majeurs des guerres, de même que les grandes chroniques rédigées par des témoins ou des historiographes, notamment dans le camp réformé30. Les Mémoires composés par les acteurs se multiplièrent31. La parole avait une dimension testimoniale : il fallait témoigner des souffrances encourues pour la vérité de l’Évangile. C’est très clair quand on lit 26 Jérémie Foa, Le Tombeau de la paix. Une histoire des édits de pacification, 1560-1572, Limoges, PULIM, 2015. 27 Alain Tallon, « Rome et les premiers édits de tolérance d’après la correspondance du nonce Santa Croce », in Michel Grandjean et Bernard Roussel (dir.), Coexister dans l’intolérance. L’édit de Nantes (1598), Genève, Labor et Fides, 1998, p. 339-352. 28 Alain Tallon, « Raison d’État, religion monarchique et religion du roi. Un aperçu de l’historiographie française et de ses évolutions », in Philippe Büttgen et Christophe Duhamelle (dir.), Religion ou confession. Un bilan franco-allemand sur l’époque moderne (XVIe-XVIIIe siècles), Paris, Éd. de la MSH, 2010, p. 355-371. 29 Jérémie Foa, « L’histoire au ras du sol. Temps, mémoire et oubli au lendemain des premières guerres de Religion », in Olivier Christin et Yves Krumenacker (dir.), Les Protestants à l’époque moderne. Une approche anthropologique, Rennes, , . - . 30 Jacques Berchtold et Marie-Madeleine Fragonard (dir.), La Mémoire des guerres de Religion. La concurrence des genres historiques (XVIe-XVIIIe siècles), Genève, Droz, 2007 ; Philip Benedict, « Shaping the memory of the French Wars of Religion. The first centuries », in Erika Kuijpers, Judith Pollmann, Johannes Müller et Jasper van der Steen (dir.), Memory before Modernity : Practices of Memory in Early Modern Europe, Leyde, Brill, 2013, p. 111-125. 31 Susan Broomhall, « Reasons and identities to remember. Composing personal accounts of religious violence in sixteenth-century France », French History, vol. 27, 2013, p. 1-20 ; Ead., « Disturbing memories. Narrating experiences and emotions of distressing events in the French Wars of Religion », in E. Kuijpers, Memory before Modernity, op. cit., p. 253-267. 5 les Mémoires de Charlotte Arbaleste, l’épouse de Philippe Duplessis-Mornay32. Tous deux étaient des survivants de la Saint-Barthélemy. Leur fils devait se montrer digne d’eux et suivre leur exemple. Denis Crouzet a souligné la tentation « tentation radicale » qui animait Catherine de Médicis à la fin des années 156033. C’est ainsi que les édits de pacification furent supprimés en 1568, puis qu’une guerre particulièrement rude fut menée dans le Sud-Ouest l’année suivante. Le prince de Condé, chef du parti huguenot, fut tué, peut-être de sang-froid et sur l’ordre du duc d’Anjou, le futur d’Henri III, sur le champ de bataille de Jarnac. L’événement fut fêté par les catholiques, en France d’abord, mais aussi à Venise ou à Rome34. On espérait la fin rapide des guerres, voire la disparition de l’hérésie, mais on se trompait. S’inspirant du vocabulaire de l’époque, Denis Crouzet a parlé de politique de « nécessité » pour caractériser les différentes mesures prises par la reine mère35. Cette politique segmentée, faite de « sinuosité » et de « faux-semblant »36, faisait alterner la douceur et la force, la négociation et la violence, car il fallait s’adapter constamment au mouvement du monde. Il ne faut pas se le cacher : la modération n’a pas toujours été à l’œuvre pendant les guerres de Religion, et la « modération absolue37 », qui animait le chancelier Michel de L’Hospital au début des années 1560, n’a pas toujours eu cours. La Saint-Barthélemy reste, aujourd’hui encore, l’objet de toutes les attentions. On s’est penché sur le contexte de l’événement (la paix de 1570, la reprise de la guerre aux Pays-Bas au printemps de 1572, le mariage de Marguerite de Valois et d’Henri de Navarre le 18 août 1572, etc.) et l’on a tenté de retracer l’enchaînement des décisions ou des réactions qui aboutirent non seulement à la mise à mort des chefs du parti huguenot, mais aussi à des violences de masse sans précédent, à Paris d’abord, dans une dizaine d’autres villes ensuite (Orléans, Rouen, Bourges, Lyon, Toulouse, Bordeaux...)38. Denis Crouzet a insisté sur le caractère inouï de l’événement, et sur l’espèce de mutisme qu’il provoqua chez ses acteurs. Les violences exterminatrices trouvaient ici à la fois leur acmé et leur terminus. Il semble 32 Les Mémoires de Madame de Mornay, éd. Nadine Kuperty-Tsur, Paris, H. Champion, 2010. Denis Crouzet, Dieu en ses royaumes. Une histoire des guerres de Religion, Seyssel, Champ Vallon, 2008, p. 386. 34 Ariane Boltanski, « “Dans cette bataille, tomba et fut écrasée la tête du serpent”. Les usages idéologiques de la mort du prince de Condé dans le camp catholique », in Ariane Boltanski, Yann Lagadec et Franck Mercier (dir.), La Bataille. Du fait d’armes au combat idéologique (XIe-XIXe siècle), Rennes, PUR, 2015, p. 123-141. 35 Denis Crouzet, Le Haut Cœur de Catherine de Médicis. Une raison politique aux temps de la SaintBarthélemy, Paris, A. Michel, 2005, p. 201 et suiv. 36 Ibid., p. 211. 37 D. Crouzet, Dieu en ses umes, op. cit., p. 350. acquis que le massacre n’a pas été prémédité, car Catherine de Médicis souhaitait pérenniser la paix durement acquise en 1570. Il semble également que l’attentat contre Gaspard de Coligny ait été commandité par le duc de Guise, qui entendait venger la mort de son père, car il tenait l’amiral comme responsable de celle-ci. Mais Catherine de Médicis elle-même pouvait souhaiter sa mort de l’amiral, car il militait pour l’entrée en guerre contre l’Espagne, et la cour ne parlait que d’une chose, pendant l’été 1572 : la guerre aux Pays-Bas39. Il pouvait paraître cohérent de faire la paix avec les protestants, tout en voulant neutraliser leurs chefs militaires, y compris par des moyens extrêmes. L’assassinat d’Henri III par un religieux, en 1589, fut le résultat d’un travail de désacralisation de la figure royale entamé trente ans plus tôt, d’abord par les monarchomaques protestants40 ; ensuite par les prédicateurs ligueurs. Le dernier Valois s’est montré très interventionniste dans ses relations avec la noblesse. Il a essayé de créer de nouveaux réseaux de fidélité, en utilisant ses favoris comme des agents auprès des gentilshommes et des villes des provinces. Cette entreprise de marginalisation des anciens réseaux aristocratiques suscita le mécontentement des grands seigneurs. Certain, comme Louis de Gonzague, duc de Nevers, tentèrent de s’imposer comme des conseillers privilégiés du roi, mais ils se heurtèrent à l’ascension de nouveaux venus41. Quant à Henri de Lorraine, duc de Guise, il ne reçut aucun commandement de premier plan. La politique pacificatrice du roi ne favorisait pas ses intérêts. Jean-Marie Constant a montré que le leitmotiv qui guidait l’action du duc était de se montrer digne de son père en jouant le rôle de principal conseiller du monarque42. Le rassemblement de nombreux gentilshommes dans le cadre restreint de la cour, dans un contexte de crise politique et religieuse, eut pour effet la multiplication des conflits et des affrontements43. Incontestablement, les rivalités partisanes, les luttes pour la maîtrise du gouvernement, ou tout au moins de la faveur royale, ont joué un rôle important dans les conflits. La crise 38 Denis Crouzet, La Nuit de la Saint-Barthélemy. Un rêve perdu de la Renaissance, Paris, Fayard, « Pluriel » 2012 [1994] ; Arlette Jouanna, La Saint-Barthélemy. Les mystères d’un crime d’État (24 août 1572), Paris, Gallimard, « Folio Histoire », 2017 [2007]. 39 Matthieu Gellard, « “Entreprendre une guerre dehors pour entretenir la paix dedans”. Les partisans d’une guerre ouverte contre l’Espagne pendant les guerres de Religion », in Éric Schnakenbourg (dir.), Les Entrées en guerre à l’époque moderne (XVIe-XVIIIe siècle), Rennes, PUR, 2018, p. 79-100. 40 Paul-Alexis Mellet, Les Traités monarchomaques. Confusion des temps, résistance armée et monarchie parfaite (1560-1600), Genève, Droz, 2007. 41 Ariane Boltanski, Les Ducs de Nevers et l’État royal. Genèse d’un compromis (ca 1550-ca 1600), Genève, Droz, 2006. 42 Jean-Marie Constant, « La culture politique d’Henri de Guise vue à travers son comportement », in Id., La Noblesse en liberté, XVIe-XVIIe siècles, Rennes, PUR, 2004, p. 217-225. Sur le pouvoir contesté des Guise en Champagne : Laurent Bourquin, Noblesse seconde et pouvoir en Champagne aux XVIe et XVIIe siècle , Paris, Publications de la Sorbonne, 1994. 7 dynastique fut également centrale. : c’est bien parce qu’Henri III n’avait pas d’héritier catholique que le royaume sombra de nouveau dans la guerre civile. Le soulèvement ligueur, entamé en 1585, a constitué une nouvelle rupture majeure44. Le roi d’Espagne intervenait financièrement dans le royaume, finançant les Guise et se forgeant un réseau de soutiens très actifs, spécialement dans le Sud-Ouest45. Le duc de Savoie, de son côté, se préparait à profiter du chaos pour s’emparer des dernières possessions françaises au-delà des Alpes, et éventuellement pousser ses pions en Provence ou en Dauphiné46. Par l’édit de Nemours, signé en juillet 1585, Henri III révoqua les édits de tolérance et imposa l’unité de religion. Il avait le sentiment d’avoir franchi une frontière qu’il ne pourrait plus retraverser. Il n’entendait pas pour autant que les protestants soient maltraités : ils avaient six mois pour se converti ou pour quitter le royaume. Le roi veillait de près à l’application de l’édit de Nemours, et il fit diffuser en janvier 1586 le formulaire indiquant la confession de foi qui les nouveaux convertis devaient faire. Les conversions furent nombreuses ; les exils aussi47. Dépourvu de succession directe, Henri III comptait sur la conversion du roi de Navarre, son lointain cousin, mais il regrettait son obstination religieuse, et surtout celle de son entourage. Il regrettait plus encore les interventions étrangères dans son royaume. Fin 1587, il crut avoir enfin réussi à inverser le cours de l’histoire après avoir pris lui-même la tête de ses troupes et obtenu la retraite des mercenaires suisses et allemands engagés par les huguenots. Mais l’exaltation fut de courte durée. Le duc de Guise s’affichait ouvertement comme le premier défenseur du catholicisme, et Paris se souleva contre le roi en mai 1588. Celui-ci signa l’édit d’Union en juillet 1588, par lequel il s’engageait, avec tous ses sujets, à vivre et mourir dans l’Église catholique, avant de réunir les états généraux à Blois. À Blois, Henri III accomplit un coup de majesté. Il fit tuer le duc de Guise le 23 décembre, puis son frère le cardinal, le lendemain. Contrairement à ses attentes, les effets de 43 Nicolas Le Roux , La Faveur du roi. Mignons et court isans au temps des derniers Valois (vers 1547-vers 1589 ), Seyssel , Champ Vall on , 2001 ; Jacqueline Boucher, Société et mentalités autour de Henri III, Paris, H. Champion, 2007. 44 Jean-Marie Constant, La Ligue, Paris, Fayard, 1996 ; Robert Knecht, Hero or Tyrant? : Henry III, King of France, 1574-89, Burlington, Ashgate, 2014. 45 Serge Brunet, « De l’Espagnol dedans le ventre! » Les catholiques du Sud-Ouest de la France face à la Réforme (vers 1540-1589), Paris, H. Champion, 2007. 46 Stéphane Gal, Grenoble au temps de la Ligue. Étude politique, sociale et religieuse d’une cité en crise (vers 1562-vers 1598), Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 2000 ; Id., Lesdiguières. Prince des Alpes et connétable de France, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 2007 ; Fabrice Micallef, Un désordre européen. La compétition internationale autour des affaires de Provence, 1580-1598, Paris, Publications de la Sorbonne, 2014. 8 ce coup de force furent dramatiques. De nombreuses villes se soulevèrent, plusieurs grands seigneurs, à commencer par les membres de la maison de Lorraine et leurs alliés, prirent les armes. La Sorbonne délia les sujets du serment d’obéissance fait au roi48. « Henri de Valois » était un tyran dont on espérait le châtiment providentiel. Une grande campagne de disqualification de la figure royale fut lancée49. Au printemps de 1589, le pape menaça Henri III d’excommunication50. Celui-ci était alors réfugié à Tours, où il installa les cours souveraines parisiennes51. Sa situation était fragile, mais il réussit à remobiliser une partie de la noblesse et, désormais accompagné du roi de Navarre, il put menacer Paris. Sa mort, suite à l’attentat commis par Jacques Clément le 1er août 1589, n’en parut que plus miraculeuse. En dépit des tentatives de centralisation et de structuration du mouvement menées par le duc de Mayenne, la Ligue restait une fédération de mouvement provinciaux très indépendants. C’est ce qui explique sa fragilité52, mais c’est également ce qui permit à certains de ses chefs, comme le duc de Mercœur en Bretagne, de mener une politique autonome et de résister, grâce au soutien espagnol, jusqu’en 159853. Certains ligueurs refusèrent toujours l’idée d’obéir à un roi hérétique, quand bien même celui-ci se convertirait54. Une partie des Seize parisiens furent très actifs, et à Orléans certains religieux réussirent à mobiliser une partie des habitants dans la confrérie du Petit-Cordon, malgré l’opposition de l’évêque et des notables55. Mais l’immense majorité des ligueurs n’étaient pas des fous de Dieu. À Lyon, à Bourges ou à Amiens, la Ligue fut beaucoup plus 47 Jérémie Foa, « Dans les petits papiers du pouvoir. Abjurations huguenotes du temps de l’édit de Nemours (1585) », in Thomas Lienhard et Isabelle Poutrin (dir.), Pouvoir politique et conversion religieuse. 1. Normes et mots, Rome, Publications de l’École française de Rome, 2017 (en ligne). 48 Thierry Amalou, « Une Sorbonne régicide? Autorité, zèle et doctrine de la faculté de théologie de Paris pendant la Ligue (1588-1593) », in Les Universités en Europe (1450-1814) (Bulletin de l’Association des historiens modernistes des universités françaises, n° 36), Paris, Presses de l’université de Paris-Sorbonne, 2013, p. 77-116. 49 Michel Cassan, « La guerre en discours : l’année 1589 en France », in J. Foa et P.-A. Mellet, Le Bruit des armes, op. cit., p. 259-275. 50 Benoît Schmitz, Le pouvoir des clefs au XVIe siècle. La suprématie pontificale et son exercice face aux contestations religieuses et politiques, thèse de doctorat, dir. Alain Tallon, Université Paris-Sorbonne, 2013. 51 Sylvie Daubresse, « De Paris à Tours. Le Parlement “du roi” face au Parlement “de la Ligue” (1589-1594) », in Le Parlement en exil ou Histoire politique et judiciaire des translations du parlement de Paris (XVe-XVIIIe siècle), Paris, H. Champion, 2007, p. 301-536. 52 Michel Cassan, « La fragilité des ligues provinciales. Poitou, Périgord, Limousin, Velay », in S. Brunet, La Sainte Union des catholiques de France, op. cit., p. 23-49. 53 Emmanuel Buron et Bruno Méniel (dir.), Le duc de Mercœur. Les armes et les lettres (1558-1602), Rennes, PUR, 2009. 54 Robert Descimon et José Javier Ruiz Ibañez, Les Ligueurs de l’exil. Le refuge catholique français après 1594, Seyssel, Champ Vallon, 2005. 55 Nicolas Le Roux, « Rivalités nobiliaires, solidarités urbaines et mobilisation catholique. La Ligue dans le centre du royaume (Berry, Orléanais, Touraine) », in Serge Brunet (dir.), La Sainte Union des catholiques de France et la fin des guerres de Religion (1576-1629), Paris, Classiques Garnier, 2016, p. 51-94. 9 modérée56. On craignait naturellement les huguenots et leurs alliés royalistes, on se souvenait parfois de la prise de la ville par les hérétiques en 1562. Pour autant, on se montrait très hostile aux manifestations les plus spectaculaires, au point que les consuls lyonnais invitèrent le jésuite Emond Auger à quitter leur ville. Celui-ci avait pourtant milité pour donner à la lutte contre les huguenots la force spirituelle d’une véritable croisade dans un traité intitulé Le Pédagogue d’armes57, et il cherchait à orienter les catholiques vers une religion pénitentielle, insistant sur la nécessaire contrition qui pourrait, seule, laver les péchés des hommes58. Les notables n’étaient pas séduits par cette forme de spiritualité. Les Lyonnais trouvaient ainsi, en mars 1589, qu’Auger rendait « beaucoup de mauvais offices à la cause de la saincte Union des catholiques » en prêchant de manière exagérément violente59. Finalement, Auger quitta Lyon. À Paris, en revanche, les jésuites participèrent activement à la mobilisation ligueuse, notamment par l’encadrement des jeunes garçons au collège de Clermont60. Le nouveau monarque, Henri IV, s’employa à disloquer le parti ligueur par l’usage simultané des armes et de la négociation. Dans les articles accordés aux villes qui se soumettaient à son autorité, il accordait son pardon aux anciens rebelles en exaltant le sentiment national61. Les anciens ligueurs s’engageaient à se retirer de toutes les associations faites contre un roi qui entendait apparaître non comme le chef du parti victorieux, mais comme un souverain choisi par Dieu pour régner sur un peuple réuni62. Au lendemain des guerres civiles, on chercha à réduire le conflit qui avait déchiré la France pendant quatre décennies à une simple lutte de factions. Pour restaurer l’ordre et assurer la paix, le monarque devait s’imposer désormais comme supérieur à tous ses sujets et apaiser les mécontents. C’est ce qu’expliquait par exemple le moraliste Pierre Charron dans son traité De la sagesse63. En vérité, les troubles n’étaient pas uniquement dus aux rivalités 56 Olivia Carpi, Une république imaginaire. Amiens pendant les troubles de religion (1559-1597), Paris, Belin, 2005. 57 Gianclaudio Civale, « Religione e mestiere delle armi nella Francia dei primi torbidi religiosi. Il Pédagogue d’armes del gesuita Emond Auger (1568) », Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance, t. LXXIV, no 3, 2012, p. 505-533 ; Ariane Boltanski, « Forger le “soldat chrétien”. L’encadrement catholique des troupes pontificales et royales en France en 1568-1569 », Revue historique, n° 1, 2014, p. 51-85. 58 Benoist Pierre, La monarchie ecclésiale. Le clergé de cour en France à l’époque moderne, Seyssel, Champ Vallon, 2013, p. 264-265. 59 Nicolas Le Roux, Un régicide au nom de Dieu. L’assassin d’Henri III (1er août 1589), Paris, Gallimard, « Folio Histoire », 2018 [2006], p. 248. 60 Florence Buttay, Peindre en leur âme des fantômes. Image et éducation militante pendant les guerres de Religion, Rennes, PUR, 2018. 61 Michel Cassan, « La réduction des villes ligueuses à l’obéissance », Nouvelle revue du XVIe siècle, t. XXII, n° 1, 2004, p. 159-174. 62 Michel De Waele, Réconcilier les Français. Henri IV et la fin des troubles de religion (1589-1598), Québec, Presses de l’Université Laval, 2010 ; Nicolas Le Roux, Le Roi, la Cour, l’État. De la Renaissance à l’Absolutisme, Seyssel, Champ Vallon, 2013, p. 281-298. 63 Pierre Charron, Da la Sagesse [1601-1604], Paris, Fayard, 1986, p. 614-614. 10 entre grandes maisons aristocratiques. L’esprit li gueur restait d ’ailleurs toujours vivace au début du XVIIe siècle et le temps de la haine était loin d’être achevé64 : Henri IV en fit la tragique expérience65. Les guerres de Religion avaient bien eu lieu. 64 Yann Rodier, Les raisons de la haine. Histoire d’une passion dans la France du premier XVIIe siècle, Ceyzérieu, Champ Vallon, 2020. 65 Michel Cassan, La Grande Peur de 1610. Les Français et l’assassinat d’Henri IV, Seyssel, Champ Vallon, 2010. 11.
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2013ESAE0048_3
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2,013
Potentialités d’un plasma hors-équilibre localisé pour la réalisation d’antennes imprimées reconfigurables ou autolimitantes
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rier d’une phase cristalline solide à un état liquide, et vice-versa, en fonction de la tension de commande continue. Cette technologie est largement utilisée dans le domaine optique pour la conception des écrans plats de télévision. Récemment, quelques études ont montré leur utilisation dans le domaine de la reconfigurabilité micro-onde. En effet, quand on applique un champ électrique à des cristaux liquides, les molécules changent d’orientation en réponse à ce champ, ce qui change leur permittivité relative dans la gamme des micro-ondes. La permittivité relative de ce type de matériau peut varier entre 2.5 et 4 [53]. Ces propriétés intéressantes ont été principalement mises en oeuvre dans le cadre de la réalisation de circuits imprimés dont le substrat contient des cristaux liquides. Les avantages principaux des cristaux liquides sont leur faible tension de polarisation (entre 15 et 20 V) et leur modeste consommation de puissance. L’inconvénient principal de ce type de matériau est qu’il doit rester à une température comprise entre 20 et 35 ̊C. Dans le cas contraire, les cristaux liquides deviennent solides (à basse température) ou liquides (à haute température). Les autres points négatifs sont les fortes pertes d’insertion pour les hautes fréquences et le temps de commutation élevé (quelques ms [59]). Dans les antennes reconfigurables, ce matériau est couramment employé comme déphaseur ou capacité variable pour obtenir une agilité en fréquence [60, 61, 62]. La Figure 2.11 [63] 36 2.1. La reconfigurabilité dans le domaine des antennes micro-ondes (a) Antenne imprimée sur substrat de cristaux liquides [63]. (b) Résultats de mesure du paramètre |S11 | pour différentes tensions de polarisation [63]. F IGURE 2.11 – Antenne reconfigurable en fréquence à base de cristaux liquides. montre l’exemple d’une antenne reconfigurable et accordable à aux liquides. 2.1.2.ii.2 Ferrites et matériaux ferroélectriques Les ferrites sont des matériaux qui ressemblent d’un point de vue structurel aux céramiques. Ils se caractérisent par des perméabilités relatives de quelques milliers et une permittivité diélectrique relative supérieure ou égale à 10. La propriété utilisée dans le domaine des antennes reconfigurables est la possibilité de faire varier la perméabilité en appliquant un champ magnétique statique. Les ferrites présentent des pertes faibles et proposent une agilité importante en fréquence en comparaison avec tous les autres matériaux accordables. Leurs principaux inconvénients sont des conditions de polarisation relativement complexes (i.e. une bobine électroaimantée) et une consommation de puissance DC élevée. Un autre inconvénient est que l’agilité maximale en fréquence proposée diminue avec l’augmentation de la fréquence [53]. Un exemple d’antenne à résonateur diélectrique reconfigurable en fréquence avec un ferrite est montré sur la Figure 2.12 [64]. La fréquence de résonance du résonateur peut varier de 10.5 GHz à environ 11.5 GHz en fonction de la polarisation magnétique appliquée à la ferrite. Les matériaux ferroélectriques sont analogues aux ferrites mais c’est leur permittivité qui peut être accordée en appliquant un champ électrique statique. La constante diélectrique de ces matériaux est d’environ quelques centaines. La polarisation des matériaux ferroélectriques est plus simple que celle des ferrites. Les inconvénients principaux de ce type de reconfigurabilité sont la forte intensité du champ nécessaire pour réussir la reconfigurabilité (de l’ordre du MV/m) ainsi que des pertes importantes en haute fréquences. Un exemple d’antenne reconfigurable en fréquence avec un matériau ferroélectrique est montré sur la Figure 2.13 [65]. La fréquence de résonance de l’antenne peut changer de 33.54 GHz à 31.35 GHz. 2.1.2.iii Util d’approches plus exotiques En complément des éléments localisés et des matériaux accordables on trouve des stratégies plus exotiques pour la reconfigurabilité micro-onde. 37 Chapitre 2. État de l’art des dispositifs micro-ondes reconfigurables à base de plasma F IGURE 2.12 – Antenne à résonateur diélectrique accordable en fréquence avec un ferrite [64]. F IGURE 2.13 – Antenne fente accordable en fréquence avec un matériau ferroélectrique [65]. 2.1.2.iii.1 Commutateurs hydrauliques et pneumatiques Les commutateurs hydrauliques et pneumatiques utilisent une commutation mécanique pour parvenir à reconfigurer l’antenne. Le fonctionnement de ces mécanismes est normalement dû à un piston inséré dans un tube, qui, à l’aide d’un changement de pression de l’air (pneumatique) ou d’un liquide (hydraulique), peut se déplacer pour entraîner un contact dans la zone voulue. Ce type de dispositif est normalement très volumineux et nécessite un bon système de contrôle de positionnement du piston. D’autre part, la vitesse de commutation est relativement lente. L’avantage principal de ce type de configuration est l’absence d’un circuit de polarisation. La Figure 2.14 montre une antenne reconfigurable en fréquence par le positionnement d’une membrane métallique à l’aide des commutateurs pneumatiques [66]. La fréquence de résonance de cette antenne peut varier entre 51 GHz à 55.35 GHz en modifiant la position de la membrane. 38 2.1. La reconfigurabilité dans le domain e des antenne s micro-ondes F IGURE 2.14 – Antenne imprimée accordable en fréquence à l’aide des commutateurs pneumatiques [66]. 2.1.2.iii.2 Matériaux déformables L’utilisation d’antennes qui peuvent changer activement de forme est également une méthode utilisée pour la reconfigurabilité. Parmi les matériaux utilisés comme dispositifs reconfigurables, on trouve des polymères électro-actifs et des alliages avec mémoire de forme. Les avantages principaux de tels matériaux sont leur bonne tenue en puissance (ils peuvent supporter des puissances RF élevées). Leur accordabilité est réglable selon la tension appliquée. Leurs inconvénients principaux sont leur temps de commutation, leur fiabilité mécanique qui impacte directement leur coût, leur tension de polarisation (d’environ 100 V) ainsi qu’une faible bande de reconfigurabilité (normalement de 10% pour des reconfigurabilités en fréquence). La Figure 2.15 représente des exemples d’antennes reconfigurables qui utilisent ce type de matériau pour la reconfigurabilité. 2.1.3 Conclusion Dans cette section, nous avons présenté les différentes stratégies de reconfigurabilité pour une antenne. Ces stratégies comprennent la reconfigurabilité en fréquence, la reconfigurabilité en diagramme de rayonnement et la reconfigurabilité en polarisation. Pour obtenir cette reconfigurabilité, différents éléments actifs existent et sont déjà mis en œuvre. Il peut s’agir d’éléments localisés (comme des diodes PIN, des diodes varactors ou des MEMS RF par exemple), de matériaux reconfigurables (comme des cristaux liquides, des ferrites ou des matériaux ferroélectriques par exemple), ou encore de stratégies plus exotiques. Chacune de ces technologies présente des avantages et des inconvénients qui lui sont propres. Néanmoins, une limitation commune à toutes ces solutions réside dans leur tenue en puissance micro-ondes. L’utilisation de décharges plasma peut s’avérer être une solution alternative lorsque les puissances micro-ondes en jeu deviennent trop importantes de par leur capacité à supporter des densités de puissance élevées. Comme nous allons le voir dans la section suivante, cette propriété 39 Chapitre 2. État de l’art des dispositifs micro-ondes reconfigurables à base de plasma (a) Antenne agile en fréquence utilisant un plan de masse déformable [67]. (b) Antenne agile en fréquence utilisant la modification de sa géométrie, via l’activation magnétostatique [68]. F IGURE 2.15 – Différentes configurations d’antennes reconfigurables en fréquence utilisant des matériaux déformables. a déjà été mise à profit dans plusieurs dispositifs micro-ondes reconfigurables. Il est d’ ailleurs intéressant de noter que le plasma peut être utilisé sous la forme d’un élément actif localisé, mais aussi d’un matériau reconfigurable. 2.2 Utilisation des plasmas pour la reconfigurabilité dans le domaine des micro-ondes L’interaction entre une onde électromagnétique micro-onde et un plasma froid hors-équilibre est un sujet qui a été largement traité dans le passé dans le cadre de problématiques comme la propagation dans l’ionosphère [69], le phénomène de blackout (pertes des fonctions de communication) des engins spatiaux lors de leur rentrée dans l’atmosphère [70] ou encore l’implémentation de duplexeurs micro-ondes de forte puissance pour les systèmes RADAR [71]. Au fil des années, plusieurs travaux expérimentaux ont montré la faisabilité de fonctions micro-ondes reconfigurables utilisant des décharges plasmas. L’objectif de cette section est de fournir un état de l’art de l’utilisation des plasmas pour la reconfigurabilité dans le domaine des micro-ondes. Devant le caractère assez marginal de ces applications, avons décidé de considérer les systèmes antennaires reconfigurables bien entendu, mais aussi les circuits et dispositifs (métamatériaux, structures à bande interdite,...) reconfigurables. Cet état de l’art est construit de manière originale. En effet, dans le Chapitre 1 nous avons constaté que les valeurs prises par la partie réelle de la permittivité complexe relative du milieu plasma présentent trois zones distinctes. Le découpage de cette section suit donc cette classification en zones d’intérêt, à savoir une première zone où la permittivité du plasma est fortement négative, ce qui correspond en pratique à un comportement métallique du plasma, une deuxième zone où la permittivité du plasma est faiblement négative, et enfin une troisième zone où la permittivité relative du plasma est comprise entre 0 et 1. 40 2.2. Utilisation des plasmas pour la reconfigurabilité dans le domaine des micro-ondes 2.2.1 Exploitation du plasma comme un matériau à ε fortement négatif Comme mentionné dans le Chapitre 1, le plasma peut se comporter sous certaines conditions comme un matériau possédant une permittivité diélectrique négative très forte. En d’autres termes, le plasma peut être vu comme un élément conducteur électrique. Dans la littérature, on se réfère généralement à ce comportement en parlant du comportement métallique du plasma. Ainsi, le plasma pourrait a priori remplacer des éléments conducteurs lorsqu’il est ionisé, et être totalement transparent d’un point de vue électromagnétique une fois éteint. A noter, comme nous le verrons par la suite, que dans ce type d’applications, on retrouve l’idée d’un plasma contrôlé par l’intermédiaire d’une tension DC de commande, mais aussi l’idée d’un plasma directement généré par la puissance micro-ondes incidente. 2.2.1.i Applications dans le domaine des circuits micro-ondes 2.2.1.i.1 Applications à la limitation de puissance Les premières applications micro-ondes des plasmas froids hors-équilibre ont trouvé naissance dans le développement des systèmes RADAR. Ces applications ont été essentiellement motivées par la nécessité de reconfigurer, ou plutôt protéger, des systèmes contre des puissances micro-ondes incidentes très importantes. Les dispositifs les plus connus sont les duplexeurs micro-ondes [71]. L’objectif d’un circuit duplexeur est de pouvoir utiliser une seule antenne commune au récepteur et à l’émetteur RADAR. En pratique, le duplexeur permet la commutation rapide entre les modes émission et réception d’un RADAR monostatique à ondes pulsées. Il assure ainsi la protection du récepteur lors de l’émission de signaux de forte puissance. Pour ce faire, on utilise des tubes remplis de gaz (communément de l’Argon) à basse pression qui réagissent à un champ incident intense en s’ionisant, ce qui a pour effet de réfléchir ce champ. On parle généralement de tubes TR (Transmit Receive) ou ATR (Anti Transmit Receive). Du fait de la forte puissance micro-onde incidente (de quelques kW jusqu’à quelques MW), la décharge créée à l’intérieur du tube possède une forte densité électronique ne (ne ∼ 1015 cm−3 pour des pressions entre 10 et 30 torr). Cette décharge présente alors le comportement d’un milieu conducteur électrique, soit un court-circuit d’un point de vue circuit. La Figure 2.16 montre la structure typique d’un de ces tubes en technologie guide d’ondes rectangulaire en bande X. Sur la Figure 2.16b on peut observer le tube TR inséré dans une section de guide d’ondes rectangulaire, tandis que la Figure 2.16c montre en détails la section du tube TR où la décharge est déclenchée. Le schéma de la Figure 2.16c permet de voir plus précisément la présence des cônes capacitifs entre lesquels la décharge est générée. La distance g entre les cônes est généralement comprise entre 0.25 et 0.76 mm. La fonction de l’électrode keep-alive que l’on observe sur la Figure 2.16c est de fournir une quantité d’électrons libres suffisante pour assurer la génération rapide et efficace du plasma lorsque l’onde RF arrive au niveau du tube. Normalement, cette électrode est polarisée avec une tension négative comprise entre -100 et -1000 V. Ces propriétés de création d’un plasma par un champ électromagnétique micro-ondes incident ont aussi donné lieu plus récemment à leur utilisation dans le cadre de dispositifs limiteurs de puissance, avec comme objectif premier de se prémunir contre des attaques micro-ondes de 41 Chapitre 2. État de l’art des dispositifs micro-ondes reconfigurables à base de plasma électrode keep-alive verre cônes capacitifs gap ( a ) Tube TR dans sa cellule [72] (b) Détail de la section tube TR [72] (c) Vue en coupe d’un tube TR F IGURE 2.16 – Tube TR initiat ligne mic F IGURE 2.17 – Limiteur de puissance microruban à base de plasma [73] forte puissance (HPM ou High Power Microwaves). Dans ce cas précis, les effets recherchés au niveau du plasma sont à la fois une réflexion du champ incident voire une absorption de ce champ par le plasma ainsi créé. Par exemple, un limiteur de puissance en technologie microruban à base de plasma a été proposé pour une application large bande de 0 à 18 GHz [73]. La Figure 2.17 [73] montre une coupe transverse de ce limiteur. Il consiste en une ligne microruban suspendue insérée dans un boîtier hermétique rempli de Xénon. La section transverse de la ligne microruban est de forme trapézoïdale pour obtenir un champ électrique plus intense aux bords de la ligne. Lorsqu’une onde électromagnétique de forte puissance se propage le long de la ligne, une décharge plasma se déclenche au niveau des arêtes et s’étale vers le centre de la ligne. Une fois la décharge créée, elle a pour effet de court-circuiter en partie la ligne microruban et d’absorber aussi une partie de la puissance incidente. Le seuil de puissance nécessaire pour déclencher le limiteur est de 65 W. Une fois le limiteur en marche, la puissance de sortie est limitée à 1 W de la bande S jusqu’à la bande X. La puissance maximale admise en entrée de ce limiteur est de 50 kW. En 2013, une nouvelle façon d’intégrer la fonction de limitation de puissance utilisant un plasma a été proposée. L’idée est d’intégrer directement au sein d’un filtre micro-ondes passebande des capsules de gaz neutre qui s’ionisent lorsque le champ électromagnétique devient trop intense [74]. Le plasma perturbe alors cette structure très résonante et entraîne la disparition de la bande-passante du filtre. La Figure 2.18 montre le dispositif expérimental conçu. Il 42 2.2. Utilisation des plasmas pour la reconfigurabilité dans le domaine des micro-ondes (a) Filtre hairpin [74]. (b) Image du dispositif à l’état "off" [74]. (c) Image du dispositif à l’état "on" (décharge plasma) [74]. F IGURE 2.18 – Filtre limiteur de puissance ’ordre un à base de plasma. s’agit d’un filtre à résonateur Hairpin d’ordre un incluant une capsule de gaz en alumine entre les deux extrémités du résonateur. Des électrodes insérées à l’intérieur de la coquille d’alumine permettent un couplage optimal entre le champ présent aux extrémités du résonateur et l’intérieur de la capsule. Les résultats obtenus avec ce filtre limiteur en puissance sont exposés sur la Figure 2.19. On constate sur la Figure 2.19a la diminution du paramètre S21 avec l’augmentation de la puissance en entrée du filtre, et donc une limitation de la puissance délivrée en sortie du filtre. Néanmoins, lorsque la puissance en entrée du filtre est trop importante, on observe une saturation de l’effet de limitation de la puissance (région atténuation sur la Figure 2.19). Ceci est dû à une augmentation très importante de la densité électronique qui rend le plasma très conducteur, et qui transforme le résonateur Hairpin en un résonateur en anneau. On obtient alors un autre filtre opérationnel à une autre fréquence de résonance. Dès lors le plasma ne peut plus limiter la puissance. Il convient de noter que pour cette solution, la puissance nécessaire pour le claquage du gaz est de 28 dBm et non 12 dBm comme le laisse penser la Figure 2.16b. Le prolongement de l’effet limiteur à des puissances moins importantes est en fait dû à un effet d’hystérésis du plasma. Une fois déclenché, le plasma peut être entretenu avec des puissances micro-ondes plus faibles. 2.2.1.i.2 Applications à la reconfigurabilité Le comportement métallique du plasma a aussi été mis à profit pour permettre la reconfigurabilité de circuits micro-ondes. Par exemple, un coupleur directionnel reconfigurable à base de plasma a été proposé [75]. Comme le montre la Figure 2.20, la décharge plasma est déclenchée dans un tube, à la manière des tubes Néon utilisés pour l’éclairage. Ce tube est inséré dans un guide d’ondes circulaire qui fait la jonction entre deux guides d’ondes rectangulaires et dont les dimensions ne permettent pas la propagation des ondes aux fréquences utilisées. Lorsque le plasma est allumé en revanche, le guide d’ondes circulaire tend à se comporter comme un câble coaxial dont l’âme centrale est le tube de plasma. En fonction de la densité électronique du plasma, on peut contrôler le niveau de couplage entre les deux guides d’ondes rectangulaires. Le niveau maximal de couplage observé expérimentalement est de 3 dB à 450 MHz. Sur le même concept, un filtre passe-bande accordable en fréquence a été présenté [76]. 43 Chapitre 2. État de l’art des dispositifs micro-ondes reconfigurables à base de plasma -10 Pi Off 34 dBm 44 dBm 54 dBm 20 Off On Région Attenuation Po (dBm) 0 S21 (dB) -20 15 -30 Région Limitation 10 -40 -50 600 5 700 800 Fréquence (MHz) 900 10 20 30 Pi (dBm) 40 50 (a) Mesure du module du paramètre S21 [74]. (b) Mesure de la puissance en sortie du filtre par rapport à la puissance disponible en entrée [74]. F IGURE 2.19 – Résultats de mesure du filtre limiteur de puissance d’ordre un à base de plasma. F IGURE 2.20 – Coupleur directionnel reconfigurable à base de plasma. Comme le montre la Figure 2.21 un tube Néon est inséré en bout d’un guide d’ondes rectangulaire, et à proximité d’une sonde coaxiale. Le couplage entre les deux structures propagatives est faible bande. On obtient alors un filtre passe-bande dont la fréquence peut être accordée électriquement en faisant varier la densité électronique du plasma. En pratique, l’augmentation du courant dans la décharge (et donc de la densité électronique ne ) entraîne une augmentation de la fréquence centrale du filtre (variation entre 3.295 GHz et 3.982 GHz) et une diminution de sa bande passante (entre 320 MHz et 80 MHz). Dans tous les cas, les pertes d’insertion du dispositif ne dépassent pas les 2 dB. Plus récemment, des travaux préliminaires ont montré la pertinence de reconsidérer les applications des plasmas dans les circuits micro-ondes en n’utilisant pas des tubes volumineux, mais plutôt des décharges localisées. Ainsi, la mise en œuvre d’une décharge coplanaire a été étudiée pour réaliser des fonctions de commutation dynamique large-bande [77, 78]. L’idée est de générer une décharge coplanaire pour compenser un gap de 3 mm inséré dans une ligne de transmission microruban. Lorsque le plasma est absent, le gap empêche la propagation le long 44 2.2. Utilisation des plasmas pour la reconfigurabilité dans le domaine des micro-ondes F IGURE 2.21 – Filtre à plasma avec sortie coaxiale. de la ligne microruban. En revanche, lorsque la décharge est générée au niveau du gap, le comportement métallique du plasma doit compenser la partie manquante de la ligne de transmission. La Figure 2.22 représente un schéma du dispositif expérimental réalisé. Les expériences ont été conduites dans de l’Argon pour différentes pressions (entre 0.1 et 100 torr) et différents courants de décharge. La Figure 2.23a montre la puissance transmisse pour une puissance incidente de 0 dBm. On observe que pour des faibles courants d’alimentation de la décharge plasma, la puissance transmise est très faible. Pour un courant supérieur à 10 mA en revanche, la puissance transmise tend vers une valeur constante de -6.1 dBm. Pour une ligne microruban sans gap, la puissance transmise est alors de -0.5 dBm. Cette topologie de commutateur propose une transmission relative de 27 % à 3 GHz pour un courant de 10 mA (cf. Figure 2.23b [77]). Cette transmission moindre peut s’expliquer par la faible densité électronique de la décharge (1012 cm−3 ) et également par l’absence de contact idéal entre le plasma et le métal (présence de gaines). Ces effets se confirment lorsque l’on regarde la dépendance fréquentielle de la transmission relative. Le temps de réponse du commutateur est de 1 μ s en montée et d’environ 2 μ s en descente. Selon le même principe, un coupleur reconfigurable en technologie microruban a été dimensionné [79]. Encore une fois le plasma sert à compenser un gap pour établir dans ce cas une jonction en T (cf. Figure 2.24). Quand le plasma est allumé, une réduction significative de la transmission le long de la ligne microruban est observée. Cette réduction dépend des paramètres de la décharge (principalement du courant injecté à la décharge). Ce dispositif a été testé avec des décharges à une pression comprise entre 20 et 200 torr pour du Néon. 2.2.1.ii Applications dans le domaine des antennes 2.2.1.ii.1 Applications à la limitation en puissance Comme mentionné dans la Section 2.2.1.i.1, les plasmas froids hors-équilibre peuvent être utilisés comme briques de base pour la réalisation de limiteurs de puissances. En accord avec cette approche, une étude sur l’utilisation de décharges plasmas dans des antennes à fentes a été rapportée [80]. Le dispositif proposé consiste en une antenne fente résonante contenant en son centre deux pointes métalliques en vis-à-vis. Lorsqu’une onde électromagnétique de forte 45 osciloscope Chapitre 2. État de l’art des dispositifs micro-ondes reconfigurables à base de plasma s coupleur d anode ligne mic cathode creuse F IGURE 2.22 – Commutateur micro-ondes large-bande à base de plasma. 0 -10 t -20 20 -30 10 0 0 10 0 20 (a) Puissance transmise mesurée à 3 GHz en fonction du courant (puissance en entrée de 0 dBm) [77]. 2 10 12 (b) Efficacité de transmission pour un courant de 10 mA [77]. F IGURE 2.23 – Résultats de mesure du commutateur micro-ondes large-bande à base de plasma. charge 50 amplificateur RF coupleur Vk filtre passe haute Va Ia ligne microruban filtre passe haute A Ic canal plasma F IGURE 2.24 – Jonction reconfigurable en T à base de plasma. 46 2.2. Utilisation des plasmas pour la reconfigurabilité dans le domaine des micro - ondes F IGURE 2.25 – Dispositif de mesure du dispositif limiteur plasma basé sur une antenne fente résonante. puissance en bande S est reçue, une décharge plasma est créée entre les deux pointes à pression atmosphérique et dans l’air. La Figure 2.25 présente une photo du dispositif expérimental. La présence de cette décharge permet une réduction de 24 dB de la puissance transmise lorsqu’un champ incident de 52 kV/m est reçu au niveau de la fente. Le temps de commutation du dispositif a été mesuré à environ 3 μ s. Ce temps peut a priori être réduit en utilisant une pointe polarisée pour créer une préionisation locale de l’air ou en insérant un élément radioactif à proximité de la fente. 2.2.1.ii.2 Applications à la reconfigurabilité Le comportement métallique du plasma a aussi été largement étudié dans le cadre de l’utilisation d’une décharge comme élément rayonnant [81, 82, 83, 84]. Dans ces applications, le plasma est généré à partir d’un gaz à basse pression confiné dans un tube en verre à la manière d’un tube d’éclairage, et il est directement utilisé comme l’élément rayonnant principal sous la forme d’une antenne monopole. L’utilisation d’une décharge plasma en lieu et place d’un monopole entièrement métallique présente une propriété intéressante dans le domaine de la furtivité. En effet, le plasma peut être allumé et éteint rapidement, ce qui permet le passage rapide d’un état "on" à un état "off" de l’antenne. L’état "off" de l’antenne à plasma permet en l’occurrence de réduire sensiblement sa section équivalente RADAR par l’absence de conducteur électrique. Les performances de ce type d’antenne monopole à plasma ont été évaluées en utilisant un tube rempli d’Argon à une pression d’environ 1 torr [81]. Cette antenne présente de bons résultats en termes d’adaptation d’impédance de gain d’antenne pour les fréquences des bandes HF (3-30 MHz) et VHF (30-300 MHz). Ce concept de tubes plasma a aussi été utilisé pour la réalisation d’antennes reconfigurables en diagramme. Dans ce cas, comme le montre la Figure 2.26, plusieurs tubes sont disposés à proximité d’une antenne monopole standard. Ils occupent alors le rôle de réflecteurs reconfigurables puisqu’on peut choisir quels tubes sont allumés. En fonction du nombre de tubes allumés et de leurs positions, on peut obtenir un diagramme de rayonnement donné et reconfigurable [84]. Récemment, ce principe a été mis en œuvre pour la réalisation d’antennes reconfigurables en diagramme à 2,45 GHz [85, 86]. 47 Chapitre 2. État de l’art des dispositifs micro-ondes reconfigurables à base de plasma élément rayonnante tube plasma (a) Configuration de l’antenne reconfigurable à plasma [84]. (b) Prototype de l’antenne à plasma [84]. F IGURE 2.26 – Antenne reconfigurable en diagramme à base de tubes plasma. Enfin, une approche similaire a été étudiée dans les années 1990 dans l’optique de réaliser des miroirs micro-ondes reconfigurables [87, 88, 89]. Ce comportement de miroir pour les ondes électromagnétiques est obtenu lorsque la fréquence angulaire ω de l’onde incidente est inférieure à la pulsation du plasma ω p. L’utilisation de ces miroirs plasma était envisag ée pour remplacer les mir oirs métalliques utilisés pour les antennes directives des systèmes RADAR. Ces miroirs métalliques possèdent en pratique une forte inertie qui limite leurs mouvements. Le concept de miroir plasma en revanche présente l’avantage de se former dans un plan souhaité et de changer son orientation pour obtenir un nouveau dépointage en un temps bien inférieur. La validation expérimentale de ce concept a consisté en la création d’un volume de plasma partiellement ionisé produit par une décharge à cathode creuse pulsée, décharge qui est confinée à l’aide d’un champ magnétique axial [88]. Le gaz utilisé dans l’expérience était de l’air à une pression comprise entre 100 et 400 mtorr. Comme le montre la Figure 2.27a, pour la partie micro-ondes de l’expérience, un cornet émetteur et un cornet récepteur ont été mis en place face à face, avec la décharge entre les deux, et un autre cornet servant à récupérer la puissance réfléchie par le miroir plasma était installé perpendiculairement au cornet émetteur. Les résultats montrent que le dispositif permet un niveau de réflexion comparable à celui d’une paroi métallique en bande X (10.5 GHz), pour une pression égale à 145 mtorr et un champ magnétique égal à 150 Gauss (Figure 2.27b). 2.2.2 Exploitation du plasma comme un matériau à ε faiblement négatif Comme mentionné précédemment, lorsque la partie réelle de la permittivité du plasma est fortement négative, le milieu se comporte comme un conducteur électrique. Lorsque cette partie réelle est faiblement négative en revanche, les effets sont légèrement différents, et d’autres applications sont envisageables. 2.2.2.i Applications dans le domaine des antennes Dans les années 60, des résultats expérimentaux ont montré que le rayonnement d’une antenne miniature placée au centre d’une sphère remplie de plasma (cf. Figure 2.28) pouvait être sensiblement amélioré si l’antenne est utilisée à une fréquence légèrement inférieure à la fréquence plasma [90, 91, 92]. Dans ce cas, le plasma présente une permittivité faiblement négative et cette sphère de plasma se comporte alors comme un élément inductif pour le champ électro48 2.2. Utilisation des plasmas pour la reconfigurabilité dans le domaine des micro-ondes c 100 cornet p cornet ur Puissance (u.a) 80 miroir p 60 40 20 angle miroir 0 cornet p (a) Schéma du dispositif expérimental du miroir plasma [88]. 0 10 20 30 40 50 60 Angle (degrés) 70 80 90 (b) Comparaison entre la puissance réfléchie par un miroir métallique (ligne continue) et par le miroir plasma (cercles) en fonction de l’angle du miroir, pour p = 145 mtorr et B = 150 G [88]. F IGURE 2.27 – Miroir à plasma pour la reconfigurabilité en diagramme d’antennes. F IGURE 2.28 – Antenne miniature entourée d’un sphère de plasma [90]. magnétique. C’est en fait le signe négatif de la permittivité qui transforme l’effet capacitif de la sphère en un effet inductif. Au final, cette sphère de plasma permet de réduire l’effet de la forte capacitance qui existe dans le cas des antennes miniatures, et aussi améliorer l’efficacité d’antennes miniatures Plus récemment, avec l’avènement des métamatériaux, cette constatation expérimentale a été remise au goût du jour d’un point de vue théorique [93, 94]. L’effet alors recherché est le comportement d’un matériau à permittivité faiblement négative ou ENG (pour Epsilon NeGative). Ce type de matériau pourrait, selon certains auteurs, permettre de réaliser des antennes miniatures efficaces [93, 94, 95], des antennes à ondes de surface reconfigurables en diagramme [96] ou encore des coupleurs directionnels aux performances optimales [97]. 49 Chapitre 2. État de l’art des dispositifs micro-ondes reconfigurables à base de plasma (a) Configuration du dispostif [101]. (b) Dispositif avec décharge Néon [101]. (c) Dispositif avec décharge Hélium [101]. F IGURE 2.29 – Métamatériau reconfigurable à base de plasma. 2.2.2.ii Applications dans le domaine des matériaux et métamatér i aux En complément à ces travaux sur des antennes et circuits micro-ondes, l’utilisation des plasmas à permittivité faiblement négative est aussi étudiée dans le domaine des métamatériaux. Le terme métamatériau fait référence à des matériaux artificiels dont les propriétés électromagnétiques n’existent pas à l’état naturel [98]. En pratique, il s’agit d’un matériau dont la permittivité et la perméabilité sont toutes les deux négatives (DNG pour Double NeGative), c’est-à-dire un matériau dont l’indice de réfraction n est négatif. De telles propriétés ouvrent des perspectives intéressantes en termes de contrôle de la propagation des ondes électromagnétiques. Dans la gamme micro-ondes, la perméabilité magnétique négative (MNG pour Mu-NeGative) est généralement obtenue en utilisant des matériaux structurés à base de résonateurs en anneaux fendus ou SRR (pour Split Ring Resonators) [99]. Pour obtenir une permittivité négative, on utilise classiquement un réseau de fils métalliques ou diélectriques périodiques qui émule cette propriété [100]. Récemment, il a été proposé de substituer à ce réseau de fils périodiques un milieu plasma dont les caractéristiques sont telles qu’il se comporte comme un matériau ENG. L’objectif est en réalité de pouvoir contrôler la valeur de cette permittivité à une fréquence donnée. La Figure 2.29 montre par exemple un dispositif avec un indice de réfraction négatif contrôlable. Les structures à double-hélice métalliques génèrent une perméabilité magnétique artificielle alors que les décharges plasmas produites dans des tubes se comportent comme un matériau ENG [101]. D’un point de vue expérimental, ce dispositif a été étudié avec différents gaz et différentes conditions de décharge pour voir l’effet de la variabilité de la permittivité. L’indice de réfraction n a été estimé pour les cas sans et avec plasma. Sans décharge, la partie réelle de l’indice de réfraction Re(n) est d’environ 1.8 avec un déphasage lors de la propagation de 6.1 rad. En présence du plasma (dans du Néon à une pression de 150 torr) le déphasage est supérieur à 2π, et la partie réelle de l’indice de réfraction Re(n) prend des valeurs négatives, à savoir -1.5 et -3.0 en fonction du courant de décharge. L’intégration d’une décharge plasma dans une structure périodique à bande interdite (EBG ou Electromagnetic Band Gap) reconfigurable a aussi été proposée [102, 103, 104]. La décharge plasma a ici pour but de perturber la structure périodique en jouant le rôle d’un défaut local. Il est ainsi possible de changer les propriétés de propagation du matériau EBG en contrôlant le plasma. La Figure 2.30a montre la structure EBG et la Figure 2.30b représente la décharge dans la structure EBG [102]. Comme le montre la Figure 2.31a, en l’absence de plasma cette structure 50 2.2. Utilisation des plasmas pour la reconfigurabilité dans le domaine des micro- ondes y cathode gaine #$% (&')*, (0'-./* colonne plasma x source d'ondes x a a rale d!"talliques (a) Structure EBG [102]. anode (b) Dispositif expérimental décharge de l’EBG [102]. F IGURE 2.30 – Structure EBG avec défaut plasma. (a) configuration parfaite [102]. (b) défaut central [102]. (c) défaut asymétrique [102]. F IGURE 2.31 – Distribution du champ dans le matériau EBG sans et avec plasma. interdit la propagation des modes diagonaux et axial, dans la direction Ox, pour une fréquence de 18 GHz. Lorsque le défaut plasma est présent en revanche, il dissymétrise la structure et autorise alors la propagation selon les modes diagonaux (cf. Figure 2.31b et 2.31c). 2.2.3 Exploitation du plasma comme un matériau à ε nul ou positif Enfin, si l’on considère toujours la partie réelle de la permittivité relative d’un plasma, on voit qu’elle peut aussi être nulle ou comprise entre 0 et 1. Lorsque la permittivité est nulle ou proche de 0, on obtient un matériau classiquement appelé dans la littérature matériau ENZ (pour Epsilon Near-Zero). Dans ce cas particulier, l’onde peut être propagative (lorsque la permittivité est légèrement supérieure à 0) avec une longueur d’onde qui tend vers l’infini. De telles propriétés ont trouvé une résonance toute particulière dans la communauté scientifique, et différents travaux purement théoriques ont mis en évidence des applications très intéressantes dans le domaine des micro-ondes. Citons par exemple la possibilité de créer des antennes compactes directives [105, 106] ou encore le phénomène extraordinaire de canalisation (ou tunneling en anglais) de l’énergie électromagnétique à travers des canaux sub-longueur d’onde [107]. 51 Chapitre 2. État de l’art des dispositifs micro-ondes reconfigurables à base de plasma guide d'ondes et anode colonne F IGURE 2.32 – Dispositif varactor à base de tubes plasma. condensateur RF gaine plasma volume plasma (a) Image du dispositif de mesure capacité micro-ondes [110]. (b) Capacité micro-ondes à plasma [110]. F IGURE 2.33 – Capacité variable à base de plasma. 2.2.3.i Applications dans le domaine des circuits La partie positive de la permittivité du plasma a déjà été mise à profit pour la réalisation d’un déphaseur en technologie guide d’ondes rectangulaire contrôlable en continu dans la bande X [108]. Pour ce faire des varactors à plasma, c’est-à-dire des décharges plasma confinées dans des tubes, sont insérés en série dans le plan transverse du guide d’ondes comme le montre la Figure 2.32. Chaque tube est contrôlé de manière indépendante de sorte à modifier le milieu de propagation de l’onde guidée. On fait alors varier la permittivité relative du plasma entre 0 et 1. Ce dispositif permet au final un déphasage continu de 360 degrés avec de faibles pertes d’insertion (inférieures à 0.5 dB), un faible bruit et une haute tenue en puissance (supérieure à 200 W). Basé sur le même principe, le contrôle de cette permittivité positive a aussi été implémenté dans le cadre de la réalisation d’une capacité variable caractérisée de 500 MHz à 2.5 GHz [109]. Le contrôle de la permittivité du plasma se fait par l’intermédiaire d’une tension externe. Au final, la capacitance peut varier dans un rapport 2-6 :1 avec un facteur de qualité Q de 60 MHz à 600 MHz. La Figure 2.33 montre le condensateur variable à base de plasma. 52 2.3. Conclusion A1 1 126 31 amplitude 123 125 71 f89:;<8= >?@9 é 0 (a) Mesure en champ lointain de la lentille plasma à 36 GHz [110]. (b) Prototype qui permet la déviation de faisceau [110]. F IGURE 2.34 – Dispositif de lentille plasma pour la reconfigurabilité en diagramme de rayonnement. 2.2.3.ii Applications dans le domaine des antennes Dans le domaine des antennes, le caractère positif de la permittivité a été utilisé pour la réalisation d’une lentille reconfigurable en diagramme à 36 GHz [110]. Le principe de fonctionnement du dispositif est basé sur les propriétés de réfraction du plasma lorsqu’on génère un gradient de densité électronique. Ainsi, en générant un milieu dont la permittivité relative varie entre 0 et 1 dans l’espace, on peut contrôler la déviation d’un champ électromagnétique incident provenant d’une antenne source, et donc le dépointage du diagramme de rayonnement. Dans ce cas précis, l’antenne source est un cornet qui éclaire une enceinte où le plasma est généré. Les mesures ont été réalisées avec le dispositif BASIL (Basic Ion Laser) qui produit un plasma magnétisé de forte densité (5-10x1018 m−3 ). La Figure 2.34 représente le dispositif expérimental proposé. La mesure du diagramme de rayonnement en champ lointain pour la lentille plasma à 36 GHz est représentée sur la Figure 2.34a et une image du dispositif sur la Figure 2.34b. La Figure 2.34a montre une excellente collimation du faisceau dévié avec une déviation maximale du faisceau de 25◦. Les pertes d’insertion sont évaluées à environ 2 dB, et elles proviennent essentiellement des pertes par diffraction et par couplage de l’onde à travers la surface en verre de la cloche à vide. Plus récemment, une équipe du LAPLACE à Toulouse à proposé d’utiliser cette propriété pour réaliser des antennes à ondes de fuite reconfigurables en diagramme [111]. Une implémentation pratique est en cours d’étude. 2.3 Conclusion Dans ce chapitre nous avons dans un premier temps rappelé les stratégies de reconfigurabilité envisagées dans le domaine des antennes micro-ondes, qu’il s’agisse d’une reconfigurabilité en fréquence, en diagramme ou en polarisation. Une liste non exhaustive des éléments actifs utilisés pour réaliser cette propriété de reconfigurabilité a aussi été dressée en considérant notamment les éléments localisés (diodes PIN, 53 Chapitre 2. État de l’art des dispositifs micro-ondes reconfigurables à base de plasma diodes varactors et MEMS RF), les matériaux reconfigurables (cristaux liquides, matériaux ferroélectriques,...) et des stratégies plus exotiques. Si chaque approche possède ses avantages, il persiste une limitation commune en termes de puissance micro-onde acceptable. Ainsi, la reconfigurabilité de fonctions micro-ondes pour une gamme de puissance de l’ordre de quelques dizaines de watts à plusieurs centaines de watts ne peut pas être actuellement adressée simplement avec ces technologies. L’utilisation de décharges plasmas semble être une piste intéressante pour combler ce manque. L’état de l’art réalisé dans ce chapitre sur les applications des plasmas dans le domaine de la reconfigurabilité micro-ondes permet justement de tirer quelques conclusions importantes. Tout d’abord, il apparait clairement qu’une décharge plasma peut être utilisée même pour des puissances micro-ondes importantes. C’est en particulier le cas pour les limiteurs de puissance qui font appel aux propriétés non linéaires du milieu plasma à forte puissance vis-à-vis de l’onde électromagnétique incidente. Ensuite, on remarque que l’utilisation des plasmas dans des dispositifs micro-ondes reste relativement marginale. Ceci s’explique d’une part par l’existence d’autres technologies adressant les applications de faible puissance (diodes PIN, MEMS RF,...), et d’autre part par la difficulté à intégrer les dispositifs de génération des plasmas dans des circuits micro-ondes (électrodage, puissance DC nécessaire,...). D’ailleurs, on note pour ce dernier point que la majorité des dispositifs proposés utilisent des plasmas relativement volumineux au voisinage des fonctions micro-ondes (e.g. le miroir reconfigurable, la structure EBG, la lentille reconfigurable,...) ou directement intégrés au sein de structures micro-ondes volumineuses (e.g. les tubes duplexeurs, les antennes tubes, le déphaseur réglable,...), et ceci malgré l’apparition depuis quelques années des dispositifs de génération de microdécharges qui laissent entrevoir une intégration plus poussée du plasma au sein d’un circuit [112]. On observe justement quelques nouvelles applications récentes combinant la génération d’un plasma localisé au sein d’un circuit micro-ondes de plus petite taille (e.g. coupleur reconfigurable, capacité variable,...). A partir de ces conclusions, nous avons décidé d’étudier l’intégration et l’utilisation d’une microdécharge de type MCSD directement dans des circuits imprimés pour la reconfigurabilité des systèmes micro-ondes. Étant donné l’absence de modèle électromagnétique précis caractérisant ce type de microdécharges, nous avons privilégié une caractérisation expérimentale de ses propriétés. 54 CHAPITRE 3 CARACTÉRISATION MICRO-ONDE EXPÉRIMENTALE D’UNE DÉCHARGE PLASMA LOCALISÉE DU TYPE MCSD Si le Chapitre 1 a permis de mettre en évidence les potentialités associées aux plasmas froids hors-équilibre en termes de reconfigurabilité électromagnétique, le Chapitre 2 a aussi démontré que les applications effectives restent marginales et qu’elles reposent principalement sur l’utilisation de plasmas volumineux. Néanmoins, comme mentionné dans le Chapitre 1, de nombreuses études récentes dans le domaine des plasmas ont montré l’émergence de dispositifs de petite taille pour la génération de microdécharges qui laisse entrevoir des applications intéressantes dans le cadre des circuits imprimés micro-ondes reconfigurables. Dans ce chapitre nous allons nous intéresser tout particulièrement à la structure MCSD qui, comme mentionné dans le Chapitre 1, permet de générer des décharges localisées en utilisant trois électrodes DC. L’objectif à terme étant d’intégrer une microdécharge directement dans un circuit imprimé, il est nécessaire de bien connaître son comportement vis-à-vis d’une onde électromagnétique micro-onde. Même si l’existence du modèle de Drude permet d’appréhender certains effets, la complexité physique de la microdécharge en elle-même (i.e. en termes d’inhomogénéité de la densité électronique principalement) entraîne une incertitude forte sur la validité de ce modèle. Pour remédier à ce problème, nous avons décidé de caractériser expérimentalement la décharge MCSD à l’aide de dispositifs de mesure conçus pour l’occasion. Ces dispositifs, ainsi que le protocole expérimental seront présentés. Les résultats de mesures seront analysés et discutés afin d’en extraire les informations pertinentes en termes d’utilisation comme élément reconfigurable. Sommaire 3.1 3.2 Introduction.......... . Dispositifs de mesure...... 3.2.1 Ligne de transmission MCSD..... 3.2.1.i Cathode.................. microruban.............. 55............ intégrant.................... une.............. 56...... 58 microdécharge...... 58...... 58 Chapitre 3. Caractérisation micro-onde expérimentale d’une décharge plasma localisée du type MCSD 3.3 3.4 3.5 3.2.1.ii Feuille diélectrique..................... 3.2.1.iii Anode 1........................... 3.2.1.iv Anode 2........................... 3.2.1.v Ligne de transmission microruban 50 Ω.......... 3.2.1.vi Dispositif final........................ 3.2.2 Ligne de transmission microruban inversée intégrant une microdécharge MCSD....................... ....... Protocole expérimental............................ Résultats de mesure.............................. 3.4.1 Mesures du dispositif utilisant une ligne de transmission microruban. 3.4.1.i Puissance DC injectée à la décharge............ 3.4.1.ii Coefficient de réflexion S11................. 3.4.1.iii Coefficient de transmission S21............... 3.4.1.iv Bilan de puissance micro-onde............... 3.4.2 Mesures du dispositif utilisant une ligne de transmission microruban inversée................................. 3.4.2.i Puissance DC injectée à la décharge............ 3.4.2.ii Coefficient de réflexion S11................. 3.4.2.iii Coefficient de transmission S21............... 3.4.2.iv Bilan de puissance micro-onde............... Conclusion............... .................... 60 60 60 61 61 62 66 68 69 69 70 72 75 76 76 76 78 78 79 3.1 Introduction Parmi les différents types de microdécharges présentés dans le Chapitre 1, nous avons spécialement porté notre attention sur la Micro-hollow Cathode Sustained Discharge ou MCSD pour l’intégration dans un dispositif RF. Ce choix est principalement motivé par la versatilité de ce type de microdécharges et par sa configuration en termes d’électrodes qui laisse présager une intégration simplifiée au sein d’un circuit imprimé micro-onde. La Figure 3.1 représente la topologie de la décharge MCSD. Nous remarquons un premier bloc constitué de deux électrodes, à savoir la cathode et l’anode 1, séparées par une feuille diélectrique. L’ensemble est percé en son centre pour obtenir un trou de diamètre Φ. En tant que telle, cette structure s’apparente à une microdécharge MHCD (Micro Hollow Cathode Discharge). La différence fondamentale entre les topologies MCSD et MHCD est la présence d’une troisième électrode, l’anode 2, dans le cas de la MCSD. Cette anode supplémentaire sert en pratique à tirer la décharge à l’extérieur du trou pour former un volume plasma plus important. La structure MHCD peut alors être vue comme une source d’électrons dans la configuration MCSD. D’un point de vue opérationnel, on applique tout d’abord une tension DC suffisante entre la cathode et l’anode 1 de sorte à créer un plasma dans le trou de diamètre Φ. Une fois cette décharge établie, il est possible de l’étendre en volume en polarisant l’anode 2. Le milieu plasma occupe alors l’espace entre les deux anodes. 56 3.1. Introduction F IGURE 3.1 – Configuration d’une microdécharge MCSD.
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Open Science
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Signalisation et réparation des cassures double-brin de l'ADN dans les gliomes : modulation de la réponse aux traitements chimio-radiothérapeutiques
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I.1.4.4 La chimiothérapie des gliomes I.1.4.4.1 La chimiothérapie systémique En général, la réponse tumorale à la chimiothérapie systémique varie beaucoup selon le tissu d’origine des tumeurs. (Stewart 2003). Certaines lésions cérébrales, telles que les oligodendrogliomes anaplastiques ou les médulloblastomes répondent très bien au traitement, tandis que les néoplasies les plus fréquentes, astrocytomes anaplastiques et glioblastomes, font partie des tumeurs les moins chimiosensibles (Bredel 2001; Cairncross, Seiferheld et al. 2004). Les molécules de chimiothérapie les plus actives, et les plus étudiées, sont en particulier les nitrosourées (bis-chloro-ethyl-nitroso-urée (BCNU), chloro-2-ethyl-1-cyclohexyl-3-nitrosourée (CCNU)), les composées dérivés de platine (cisplatine, carboplatine, oxaliplatine), la procarbasine (Stewart 2002) et de façon plus récente, le témozolomide (Stupp, Mason et al. 2005). Les thérapies ciblées qui visent les changements moléculaires spécifiques dans les gliomes sont décrites dans la suite. Les premières études randomisées (comparant une irradiation suivie d’une chimiothérapie à la radiothérapie seule) n’ont pas démontré de façon évidente et reproductible, une augmentation de la médiane de survie mais plutôt une augmentation du pourcentage de survivants à 18 et 24 mois (Walker, Alexander et al. 1978). C’est pourquoi la chimiothérapie a initialement été réservée au traitement des récidives. Dans cette situation, la plupart des études 23 ont en effet montré que l’on pouvait espérer un taux de réponse d’environ 10 % après l’addition d’une chimiothérapie (les nitrosourées en majorité) sur une courte période (4 à 6 mois) (Yung, Albright et al. 2000). L’intérêt d’une chimiothérapie adjuvante a été confirmé par les résultats de deux métaanalyses. Ces résultats ont montré un bénéfice modeste en termes de médiane de survie et de pourcentages de survivants à long terme, mais les critères cliniques ou histologiques des « bons chimio-répondeurs » n’ont pas pû être recherchés (Fine, Dear et al. 1993; Stewart 2002). La méta-analyse publiée par le Glioma Meta-analysis Trialist Group (GMTG) (Stewart 2002) s’est fondée sur 12 essais randomisés (ayant inclus 3004 patients dont 63 % atteints d’un glioblastome) qui comparaient une radiothérapie exclusive à une radiothérapie associée à une chimiothérapie (nitrosourées plus ou moins associées à une autre drogue). Dans cette métaanalyse, les résultats ont montré que l’adjonction de chimiothérapie améliorait significativement la survie (p < 0,0001) avec une diminution du risque relatif de décès de 15 % et apportait un gain en médiane de survie de 2 mois de façon indépendante de l’âge et de l’histologie (grade III ou IV). Plus récemment, une étude thérapeutique de phase III, menée par l’Organisation Européenne pour la Recherche et le Traitement du Cancer (EORTC, European Organisation for Research and Treatment of Cancer) (Stupp, Mason et al. 2005) a pu évaluer l’efficacité d’une nouvelle molécule de chimiothérapie, le témozolomide (Témodal) sur les 573 patients avec un glioblastome nouvellement diagnostiqué. Le traitement administré de façon concomitante avec la radiothérapie standard a été comparé au traitement standard seule (radiothérapie seule, 60 Gy en 30 fractions de 2 Gy). Un gain de survie de près de 3 mois a été obtenu : médiane de survie de 14.6 mois après témozolomide + radiothérapie versus 12.1 mois après radiothérapie seule ; p<0.001. A cette étude, le nouveau traitement standard des glioblastomes a été défini, reposant sur l’administration de témozolomide en traitement concomitant et adjuvant du schéma conventionnel de radiothérapie. I.1.4.4.2 La chimiothérapie intratumorale La situation particulière du cerveau, isolé par la barrière hémato-encéphalique (BHE) bloque la pénétration des molécules de chimiothérapie dans le parenchyme cérébral et influence ainsi le résultat du traitement. Les méthodes de chimiothérapie intratumorale sont 24 développées pour s'affranchir des limites de la BHE. Ces méthodes consistent en une application locale (dans le lit tumoral) des drogues anticancéreuses via les cathéters ou via des implants en polymères qui diffusent le produit localement. L’injection par cathéter permet de réaliser des applications répétitives, prolongées ou à faible débit grâce aux pompes permettant de contrôler le débit de fluide. Les implants, de taille ou de matières différentes, sont chargés avec une drogue donnée. Le traitement anticancéreux est diffusé de façon constitutive, toutes les grandes classes de molécules ont été testées. Les résultats cliniques ne montrent que de faibles améliorations de la survie (gain de 2 mois pour les patients avec les implants chargés par BCNU comparés avec les patients traités par placebo) et par rapport au traitement systémique (Westphal, Hilt et al. 2003). Par contre, cette méthode présente les grands avantages de réduire les effets toxiques systémiques de la chimiothérapie et de concentrer les molécules efficaces au sein même de la tumeur. I.1.4.5 Les traitements combinés et les traitements ciblés Le traitement combiné de la chimiothérapie cytotoxique et de la radiothérapie permet d’augmenter l’index thérapeutique en améliorant le contrôle local et de réduire la dissémination métastatique des cancers (Favaudon and Noel 2005). Elle est souvent utilisée dans le traitement des tumeurs cérébrales non opérables ou dans la phase postopératoire afin de bloquer la dissémination de la maladie (Frappaz, Chinot et al. 2003). Les drogues en mono ou polychimiothérapie (les nitrosourées, les sels de platine, le témozolomide, la procarbazine...) peuvent être utilisées en combinaison avec la radiothérapie selon des critères de tolérance et d’efficacité. L’interaction entre les deux modalités thérapeutiques peut être à l’origine de mécanismes multiples affectant la formation ou la réparation des dommages radioinduites de l’ADN, l’altération de la progression du cycle cellulaire, la réoxygénation des tumeurs, la repopulation ou l’inhibition de l’angiogenèse tumorale (Favaudon and Noel 2005). Les récentes découvertes dans le domaine des voies de signalisation impliquées notamment dans la gliomagenèse (voir chapitre 1.1.3.2.) ont permis de développer de nouvelles molécules thérapeutiques agissant spécifiquement sur ces changement moléculaires. Les groupes principaux de ces traitements ciblés sont les inhibiteurs de récepteurs tyrosine kinase 25 EGFR (Tarceva®, Iressa®) ou PDGFR (Glivec®), de la farnélysation de Ras (Zarnestra®), de mTOR (mamalian target of rapamycin). Les effets de ces drogues anti-prolifératifs, proapoptotiques et anti-angiogéniques (Figure 7), ils permettent d’augmenter la sensibilité vis-àvis des traitements classiques de chimio-radiothérapie. Plusieurs essais cliniques de phase I-III de produits ciblés sur gliomes sont en en cours (Hutterer, Gunsilius et al. 2006). Figure 7 : Schéma de l’activation des voies moléculaires de signalisation dans les gliomes et leur modulation par les thérapies ciblées. I.1.4.6 Les traitements expérimentaux utilisant le rayonnement synchrotron Même si le synchrotron européen de Grenoble (ESRF) n'a pas été le premier à l'origine de l'utilisation du rayonnement synchrotron dans les stratégies anti-gliomales, il réunit aujourd'hui les trois grands types d'approches utilisées. Nous nous focaliserons donc dans ce chapitre sur les applications médicales à l'ESRF. I.1.4.6.1 Le rayonnement synchrotron: rappels et stratégies L’ESRF est un synchrotron de 3ème génération capable de produire un rayonnement synchrotron. Les électrons sont accélérés par deux accélérateurs successifs (Figure 8). Le 26 rayonnement synchrotron est un rayonnement électromagnétique de faible longueur d’onde (rayons X mous), caractérisé par une très grande intensité. Il est produit par des paquets d’électrons de très haute énergie qui circulent selon une trajectoire quasi circulaire, dans un anneau de stockage prévu à cet effet. Lorsque ces paquets d’électrons sont déviés de leur trajectoire par un champ magnétique intense, ils émettent des photons de haute intensité tangentiellement à leur trajectoire : c'est le rayonnement synchrotron (Figure 9). Figure 8 : Les différents accélérateurs à l’ESRF. Production du rayonnement synchrotron : Les électrons sont émis par un canon à électrons, puis accélérés dans un accélérateur linéaire et injectés dans le synchrotron Booster où ils sont de nouveaux accélérés jusqu’à une énergie optimale. Puis ils sont injectés dans l’anneau de stockage (storage ring) où ils sont déviés de leur trajectoire. Le rayonnement synchrotron est récupéré (ligne de lumière) jusqu’à la salle d’expériment à la fin de la ligne de lumière (beamline). Figure 9 : Schéma d’un aimant de courbure. Les irradiateurs médicaux standardisés produisent généralement les rayons X polychromatiques de haute énergie (entre 5 et 25 MeV), ce qui facilite le traitement des 27 tumeurs situées en profondeur. Le rayonnement synchrotron (10-100 keV) est caractérisé par sa haute fluence. Il est beaucoup moins pénétrant et donc indiqué pour les tumeurs peu profondes. Le programme de recherche mené sur la ligne médicale (ID 17) est actuellement axé sur les trois stratégies innovatrices de la radiothérapie des tumeurs cérébrales. Historiquement, ces trois modalités thérapeutiques utilisant le rayonnement synchrotron ont été conçues selon trois points de vue différents (Figure 2 ; tableau 7): les radiologues et les spécialistes de l’imagerie proposent de charger la tumeur avec un agent de contraste contenant des atomes lourds tels que l’iode ou le gadolinium, prendre l’image de cette tumeur pour établir sa localisation et son volume à irradier, irradier la tumeur en favorisant l’effet photoélectrique (la photoactivation) par le rayonnement synchrotron monochromatique à l’énergie de résonance de l’iode ou du gadolinium. La technique développée dans notre équipe est appelée la radiothérapie par photoactivation des agents de contraste (« Computed Tomography » thérapie) (Adam, Elleaume et al. 2003; Adam, Biston et al. 2005) ; les radiothérapeutes et les oncologistes proposent une autre modalité, appelée la radiothérapie par photoactivation des drogues platinées (PAT-Plat). L’idée est de charger la tumeur avec des drogues platinées (cisplatine, carboplatine ou oxaliplatine) intensivement utilisées en chimiothérapie et ensuite de photoactiver les atomes de platine pendant l’irradiation par le rayonnement synchrotron monochromatique à l’énergie de résonance du platine (78 keV) (Corde, Balosso et al. 2003; Biston, Joubert et al. 2004; , Joubert et al. 2007). les physiciens proposent de maximaliser le dépôt d'énergie dans le volume tumorale en employant le rayonnement synchrotron polychromatique avec un débit de dose très élevé (625 Gy délivrés en quelques millisecondes) sous forme de faisceaux micrométriques multiples, parallèles et planaires. C'est la thérapie par microfaisceaux (MRT) (Laissue, Geiser et al. 1998). Ces trois options thérapeutiques (Figure 10, Tableau 7) sont décrites plus en détails et les résultats obtenus sont comparés dans une revue qui fait partie de cette thèse (Revue 1). 28 Figure 10 : Présentation des trois modes de radiothérapie expérimentale utilisant le rayonnement synchrotron (Revue 1). I.1.4.6.2 Résumé des acquis de l'utilisation du rayonnement synchrotron La comparaison des survies de rats traités porteurs de gliomes figure dans la revue I. Il apparaît que la PAT-Plat offre les meilleurs résultats de guérison et de survie. Basée sur une synergie entre radiation et cisplatine, cette modalité suggère que les gliomes peuvent répondre à une radio-chimiothérapie utilisant des molécules utilisées pour d'autres types de cancers (Revue 1). 29 Tableau 7 : Avantages et inconvénients des 3 applications médicales du rayonnement synchrotron contre les gliomes. I.1.5 Les modèles de gliomes et leur utilisation dans les études précliniques La compréhension des facteurs comme la chimiorésistance ou la radiorésistance ainsi que l’évaluation de l’efficacité des traitements requièrent l’utilisation de modèles appropriés. De tels tests incluent l’utilisation de cultures cellulaires (in vitro) et de modèles animaux (in vivo). La majorité des lignées cellulaires ont été produites par la sélection des clones par culture cellulaire. Malheureusement, ces facteurs de sélection ne sont probablement pas les mêmes que les facteurs présents dans la tumeur d’origine Ainsi, l’histologie et la génétique de ces tumeurs implantées peuvent ne pas refléter fidèlement les caractéristiques des tumeurs humaines (Vogel, Zhuang et al. 2005; Becher and Holland 2006). 30 I.1.5.1 Les modèles d’implantation La greffe des cellules tumorales chez le rongeur représente l’approche la plus commune pour étudier la gliomagenèse et la réponse à un traitement in vivo. Les modèles conventionnels de gliomes reposent sur l’injection de cellules tumorales, soit en sous-cutané (injection ectopique), soit dans le cerveau (injection orthotopique). Les cellules d’origine humaine sont injectées chez des souris immunodéprimées, tandis que les lignées dérivées de rongeurs peuvent être injectées chez un animal de la même espèce (syngénique). La majorité des gliomes expérimentaux ont été induits chimiquement par un traitement de l’animal avec un mutagène. Ces tumeurs présentent divers phénotypes comparables aux astrocytomes, glioblastomes et gliosarcomes. Les cellules les plus communément utilisées pendant ces trois dernières décennies sont issues des lignées de gliomes de rat C6, 9L et F98, qui ont été isolées chez le rat par un traitement mutagène avec des dérivés de la nitrosourée, tels que la methylnitrosourée (MNU) ou éthylnitrosourée (ENU). Ces lignées peu immunogènes sont capables de produire une tumeur cérébrale après injection intracrânienne (Tableau 8). Les lignées cellulaires humaines dérivées des gliomes les plus utilisées sur des souris immunodéficientes (souris nude) sont U87, U118, U373 et LN229. Evidemment, même s’ils sont intensivement utilisés pour évaluer les modalités thérapeutiques en radio chimiothérapie des gliomes, les modèles animaux et humains ne présentent pas les mêmes caractéristiques moléculaires et prolifératives. Une étude récente a permis d’identifier dans deux gliomes humains plus ou moins fréquents (médulloblastome et glioblastome), un sous-type de cellules exprimant l’antigène CD133 et présentant les propriétés de cellules souches : prolifération, renouvellement illimité et différenciation (Singh, Hawkins et al. 2004). Transplantées intracérébralement chez une souris immunodéprimée, ces cellules se sont comportées comme des cellules initiatrices de tumeurs. Cette xénogreffe présente une « phénocopie » de la tumeur primaire opérée chez le patient. Cette étude laisse entrevoir la possibilité de modéliser individuellement la tumeur d’un patient donné et de tester in vivo la réponse des cellules prélevées avant une chimio-radiothérapie. 31 I.1.5.2 Les animaux génétiquement modifiés A cause des limitations des modèles implantés, la transgénèse a été développée pour l’étude des gliomes. Cette technique est utilisée surtout chez la souris à cause de sa durée de vie courte et de sa reproduction rapide et abondante. Elle consiste à manipuler les gènes (oncogènes ou gènes suppresseurs de tumeur) prédisposant au développement des tumeurs gliales et ainsi de valider leur rôle dans la pathogenèse des tumeurs. Les deux approches de transgénèse peuvent être utilisées pour modifier l’expression des gènes: le gain de fonction (la surexpression des oncogènes) la perte de fonction (knock out) Un des exemples représentatifs est la surexpression ciblée du proto-oncogène Ras dans les astrocytomes. Les animaux développent spontanément les astrocytomes de grade I à III. (Ding, Roncari et al. 2001; Bajenaru, Hernandez et al. 2003). D’autres lignées surexprimant l’oncogène Src ont été établies (Weissenberger, Steinbach et al. 1997). Le croisement de cette lignée avec des souris IL6-/a pu démontrer le rôle important dans la progression tumorale de l’interleukine 6 (Weissenberger, Loeffler et al. 2004). Plusieurs gènes peuvent être manipulés chez le même animal pour étudier les effets de leur mutation. Un modèle présentant l’hétérozygotie des deux gènes suppresseurs de tumeurs NF1 et TP53 a permis de modéliser la progression des glioblastomes secondaires dérivés d’un astrocytome de grade II. La majorité des souris a présenté des tumeurs gliales à 6 mois (Reilly, Loisel et al. 2000). I.1.5.3 Conclusions sur les modèles de gliomes La prudence reste évidemment de mise pour l'extrapolation des données précliniques à l'homme. Cependant, les voies de réparation et de signalisation du stress ont beaucoup de points communs entre les genres de mammifères, il sera donc utile d'analyser les réponses aux traitements à la fois pour les modèles animaux et des lignées humaines en gardant à l'esprit les effets sélectifs de l'établissement des lignées in vitro. 32 I.1.6 Conclusion-bilan sur les rappels bibliographiques concernant les gliomes A travers cette revue évidemment incomplète de la littérature scientifique, il apparaît qu'à la fois les traitements contre les tumeurs cérébrales et la connaissance des mécanismes biologiques de formation et de réponse thérapeutique sont insuffisants. Il reste beaucoup à faire pour comprendre les mécanismes sous-jacents et pour prédire la spécificité, l’efficacité et la tolérance à court et à long terme des traitements sur une base individuelle. Une grande part des stratégies et des recherches moléculaires concerne les acteurs de la prolifération, ou de l'angiogénèse, souvent à partir de concepts empiriques. Dans certains cas, les analyses histologiques ou génétiques effectuées à but diagnostique peuvent déjà être exploitées dans un but prédictif. Finalement, une analyse moléculaire systématique des événements initiaux produits par les traitements est rarement menée. Cette approche d’exploration des mécanismes de réparation pourrait compléter nos connaissances sur les voies de signalisation en réponse à l’irradiation. Ceci pourrait permettre d’accroître l’efficacité de la radiothérapie ou d’en réduire les complications. Table 8: Caractéristiques principales des 3 modèles de gliomes de rongeurs les plus utilisés . Lignée Type tumoral Statut Origine Mutagène Gliosarcome Wistar NU, dose répétitive 9L Gliosarcome CD Fisher MNU, dose répétitive F98 Gliome anaplastique CD Fisher ENU, dose unique C6 Dépositaire p53 Sauvage (Asai, Miyagi et al. 1994; Schlegel, Piontek et al. 1999) Muté (Asai, Miyagi et al. 1994; Schlegel, Piontek et al. 1999) Sauvage (Schlegel, Piontek et al. 1999) or Muté (Senatus, Li et al. 2006) p16/CDKn2a/Ink4 Muté (Schlegel, Piontek et al. 1999) Benda and Schmitek (Benda, Lightbody et al. 1968) Sauvage (Schlegel, Piontek et al. 1999) Benda and Schmitek (Benda, Lightbody et al. 1968) Muté (Schlegel, Piontek et al. 1999) Wechsler (Ko, Koestner et al. 1980) 33 Table 9: Caractéristiques principales des lignées gliomales humaines étudiées dans cette thèse. Lignée Type tumoral Grade L’âge du donneur Implantation dans la souris nude Dépositaire U87MG (HTB 14) Gliome anaplastique III 44 Oui J Ponten (Ponten and Macintyre 1968) U118MG (HTB 15) Gliome anaplastique III 50 Oui J Ponten (Ponten and Macintyre 1968) U138MG (HTB 16) Gliome anaplastique III 47 Non J Ponten (Ponten and Macintyre 1968) U373MG (HTB17) Gliome anaplastique III? Oui J Ponten (Ponten and Macintyre 1968) LN229 Gliome anaplastique III 60 Oui N de Tribolet (Diserens, de Tribolet et al. 1981) 68 Non ATCC depository 33 Non J Allalunis-Turner (Allalunis-Turner, Barron et al. 1993) CCF-STTG1 MO59J Glioblastome Gliome anaplastique IV III 34 I.2 Rappels de radiobiologie I.2.1 La radiobiologie, une science pluridisciplinaire en plein essor Après une phase descriptive où la connaissance des effets des radiations se limitait à la description des événements tissulaires, la radiobiologie est rentrée dans une phase quantitative depuis le milieu du XXème siècle et actuellement les moindres effets moléculaires et cellulaires peuvent être mesurés et comparés. La radiobiologie et plus généralement la génotoxicologie , ont considérablement évolué ces dernières années, au milieu en termes conceptuels techniques. I.2.1.1 La spécificité des réponses moléculaires et cellulaires La molécule de l’acide désoxyribonucléique (ADN) est un des constituants essentiels des organismes vivants. L’ADN est très sensible aux attaques génotoxiques (UV, rayons X, produits chimiques). Alors que les radiations ionisantes génèrent un large spectre de dommages de l’ADN biochimiquement différents (ex : les dommages de bases (DBs), les cassures simple-brin (CSBs), les cassures double-brin (CDBs)), la cellule répond spécifiquement à chaque type de dommage radioinduit par l’activation de modes de réparation spécifiques afin de maintenir l’intégrité et la stabilité génomique (Lindahl 1993). Une mutation, un dysfonctionnement dans l’un de ces modes peut donc entraîner un défaut de réparation pour certains dommages et une réponse normale pour d’autres, d’où l’intérêt de connaître précisément le spectre des différents dommages engendrés par les rayonnements considérés. Un défaut de réparation peut générer un blocage de la transcription et de la réplication et/ou la mort cellulaire. Plusieurs maladies héréditaires liées aux mutations des gènes responsables de la stabilité génomique sont impliqués dans des défauts de la réparation des dommages de l’ADN induites, ainsi que dans le vieillissement (Finkel and Holbrook 2000) ou dans la cancérogenèse (Hoeijmakers 2001; Peltomaki 2001). 35 I.2.1.2 La dualité des réponses cliniques Parmi les dommages radioinduits de l’ADN, les CDBs sont les lésions-clés de la létalité. Une seule CDB non réparée entraîne la mort de la cellule. Bien que la réparation des CDBs soit majoritairement fautive, les conséquences péjoratives pour la cellule sont plutôt bonnes pour le résultat du traitement anticancéreux. Cependant, ces CDBs mal réparées peuvent générer une instabilité génomique, à l’origine d’une avalanche d’erreurs qui peut donc conduire à une cancérisation. Cette dualité entre radiosensibilité (effet létal) et cancer se retrouve dans la façon de réparer les CDBs : soit par suture (c’est-à-dire par simple ligature des brins coupés), soit par recombinaison (c’est-à-dire en allant chercher une séquence, en la coupant puis en l’insérant dans le trou causé par la cassure). Un défaut de réparation par suture entraîne une augmentation des fragments d’ADN non réparés et donc une mort cellulaire plus importante. On retrouve ces événements en cytogénétique sous la forme de cassures chromosomiques. Aucun défaut de la recombinaison n’existe, car il est non viable à cause de son rôle prépondérant dans la mitose et la méiose. Par contre, on peut rencontrer un manque de contrôle de la recombinaison, sous la forme d’une hyperrecombinaison où la cellule casse elle-même son ADN et le recombine avec un grand risque d’erreurs aboutissant à la cancérisation. On retrouve ces événements en cytogénétique sous la forme des aberrations chromosomiques. Cependant, une fois encore, la nature des aberrations est multiple et seules des études en amont, sur l'ADN, permettent, avec moins de biais, d'obtenir des informations plus précises sur la cause du phénomène observé. I.2.1.3 La redondance et/ou la complémentarité des voies de réparation Un DB est généralement réparé par excision-resynthèse c’est-à-dire qu’il est transformé en CSB. Face à de nombreux DBs, la cellule produit donc, lors de sa réparation, de nombreuses CSBs qui peuvent, à leur tour, pendant leur réparation, devenir des CDBs tardives. Ainsi, la cellule peut activer successivement, à des temps post-stress plus ou moins longs (de la minute à quelques heures) tous les modes de réparation de l’ADN. Une mutation, peut donc intervenir à la fin ou au milieu d’un processus de réparation plus ou moins long. De plus, les réparations par suture ou par recombinaison peuvent intervenir en secours d’un dysfonctionnement des deux modes, augmentant donc le risque, sinon d’une réponse suraigüe (radiosensibilité), probablement d’un événement cancérogène. A noter que cette chaîne 36 d’événements se déroule indépendamment de la dose, ce qui place donc l'estimation du nombre de dommages voire leur simulation théorique bien loin des effets biologiques effectivement enregistrés. I.2.1.4 L’importance de la condensation de l’ADN La cellule au cours de son cycle naturel condense/décondense son ADN. La forme de l’ADN la plus décondensée est quand la double hélice de l’ADN est dénudée des histones pendant la phase du cycle cellulaire S. Les chromosomes en métaphase représentent la forme la plus compacte (Figure 11). Une décondensation ou une surcondensation anormale peuvent avoir le même effet qu’un défaut de réparation. Des particules à haut transfert d’énergie linéique (TEL, keV/μm) peuvent, en percutant l’ADN, provoquer une décondensation violente et entraîner une génération de « trou » difficilement réparables dans la chromatine. La situation où la personne exposée aurait déjà une chromatine décondensée ou surcondensée la rendrait plus sensible à ce type de rayonnement. Dans ce cas, en plus de la condensation ou des effets du cycle, un nombre de cassures identiques peut aboutir à des effets biologiques et donc une réponse tissulaire différents. Figure 11 : Les différents degrés de l’ assembl age de l'ADN et de la compact ion de la chromatine en fonction des phase s du cycle cellulaire (Grunstein 1992). 37 I.2.1.5 Le problème posé par les effets de voisinage (ou effets bystander) L’effet bystander décrit des phénomènes biologiques spécifiques au voisinage de cellules directement touchées par un stress, notamment de type radiatif. Il s’agit en particulier d’un stress oxydant supplémentaire, des arrêts du cycle, d’une perte de la clonogénicité voire des effets membranaires. Une fois encore, cet effet pourrait être préférentiellement observé sur des cellules exposées aux particules lourdes qui dissémineraient leur action à distance, touchant ainsi d'autres tissus (sains par exemple). I.2.1.6 L'hypersensibilité aux faibles doses et à de faibles débits Depuis une dizaine d'années, les radiobiologistes et les radiothérapeutes ont observé des effets surprenants provenant de très faibles doses de radiations ionisantes. Suivant les cellules, les tissus et les individus on peut en particulier observer une hypersensibilité aux faibles doses de rayons X (typiquement 1 500 mGy), comparable à l’effet des doses 2 à 3 fois plus élevées. Le même phénomène a été observé pour les faibles débits. Bien que certaines observations puissent s'expliquer aujourd'hui par des biais techniques, il n'en reste pas moins important de répondre aux 2 questions suivantes : 1) Comment expliquer ce phénomène? 2) Est-il défavorable? 3) Si oui, peut-il être prévu et existe-t-il des statuts à risque? I.2.1.7 Des marqueurs spécifiques des différentes voies de réparation Aujourd’hui, il est possible de visualiser et de quantifier dans le noyau des cellules irradiées, presque immédiatement après l’irradiation (à partir de quelques minutes poststress), la formation des dommages de l’ADN (DBs, CSB, et CDBs) et le déroulement étape par étape de leur réparation. De plus la signalisation post-stress peut être investiguée également par immunofluorescence avec des marqueurs de dommages, de réparation, d’effet du cycle et/ou de mort cellulaire. C’est notamment le cas des techniques de détection des dommages de l’ADN, qu’ils soient induits par des agents physiques (radiations, hyperthermie) ou chimiques (drogues chimiothérapiques). Nous verrons d’ailleurs plus loin quelle opportunité a représenté cette technique pour les travaux de cette thèse. 38 I.2.1.8 La découverte de nouveaux syndromes génétiques Certaines maladies génétiques souvent rares (appelées orphelines) sont associées à une certaine radiosensibilité et/ou déficience dans la réponse moléculaire et cellulaire aux radiations. Dès le début de la radiobiologie, la collection de biopsies issues de patients ayant montré des réactions suraigües à leur traitement de radioet /ou chimiothérapie a fortement contribué à une meilleure connaissance des bases moléculaires de la réparation de l’ADN et de la radiosensibilité. Cependant, cet effort doit se poursuivre afin de dresser une carte complète de la radiosensibilité et de la chimiosensibilité chez l’homme. Cette thèse s’inscrit dans cette approche. Ainsi, vu la complexité croissante des événements induits par un stress génotoxique, il paraissait plus raisonnable de ne détailler ici que les différents aspects concernant spécifiquement les travaux de thèse. En particulier, nous insisterons ici sur les différents voies de réparation des cassures double-brin (CDBs), leur évaluation et les conséquences de leur dysfonctionnement dans un contexte de traitement radio-chimiothérapique. Une place particulière sera notamment réservée à la modulation de la réparation et des voies de signalisation par des drogues telles que des inhibiteurs de tyrosines kinases dont certaines, comme on l'a dit précédemment, sont déjà utilisées en clinique. I.2.2 Les événements radioinduits initiaux I.2.2.1 La phase physique et l’importance des microdépôts d’énergie On entend par rayonnement ionisant tout rayonnement susceptible d'ioniser une molécule d'air ou d'eau (à partir de 14 eV) (Tubiana, Dutreix et al. 1986). Lorsqu’un rayonnement pénètre dans la matière, il peut interagir avec les atomes rencontr et perdre, à chacune de ses interactions, une partie de son énergie. Cette énergie cédée est transférée au milieu sous forme d’ionisations et/ou d’excitations constituant autant de microdépôts d’énergie dont la densité d’énergie conditionnera la nature biochimique des dommages induits dans l’ADN (Goodhead 1989). 39 L’interaction des rayons X avec la matière peut notamment s’effectuer selon trois processus aujourd’hui bien connus des physiciens : l’effet photoélectrique, la diffusion Compton et la création de paires : Si un photon interagit avec la matière, il peut être totalement absorbé par l’atome cible et désorganiser son nuage électronique : un ou plusieurs électrons des couches K, L, M,... sont alors expulsés (photoélectrons) de leur orbitale. C’est l’effet photoélectrique. L’atome retourne alors dans son état initial par des processus qui correspondent à l’émission de rayonnement dit de fluorescence. Le mode de désexcitation non radiatif ou électronique est également connu sous le nom de cascade Auger. Figure 12 : (A) L’effet photoélectrique : Interaction d’un photon avec un atome, réarrangement du cortège électronique par fluorescence. (B) L’effet Auger : Réarrangement du cortège électronique par cascade Auger. I.2.2.1.1 Les 3 effets majeurs de l’interaction rayonnement-matière Si le photon incident perd une partie de son énergie seulement, il peut mettre en mouvement un électron peu lié et sera finalement dévié de sa trajectoire initiale, dans une direction de l’espace dépendant de son énergie incidente : C’est l’effet Compton (Figure 13A). Si le photon incident possède une énergie supérieure à 1.022 MeV, il peut s’annihiler en émettant un électron et un de trajectoires divergentes à 180°. C’est l’effet de création de paire (Figure 13B). L’importance relative de ces principaux effets dépend directement de la gamme d’énergie utilisée et du milieu traversé. Notamment, l’effet Compton est le mode principal d’interaction pour des photons d’énergies comprises entre 1 et 5 MeV. Pour des énergies plus basses, l’effet 40 Compton prédomine seulement pour les matériaux légers (eau, tissus biologiques), laissant la place à l’effet photoélectrique pour les matériaux plus lourds. Figure 13 : (A) L’effet Compton. (B) L’effet de création paire. I.2.2.1.2 Les microdépôts d’énergie Couramment utilisée en radiobiologie, la notion de dose absorbée, exprimée en gray (Gy) a toutefois ses limites pour apprécier un effet biologique. En effet, à l’échelle microscopique l’énergie n’est pas délivrée de façon homogène mais stochastique, par paquets variables en nombre et en densité d'énergie : les microdépôts d’énergie. Dans les années 80, Dudley T. Goodhead a été l’un des premiers à s’y être intéressé et ses travaux ont conduit à plusieurs principes directement applicables aux radiations : le passage d’un photon dans le milieu biologique produit une arborescence de microdépôts d’énergie aléatoirement espacés et de densité d’énergie différente qui dépendent de la nature des radiations (Figure 14). Pour les rayons X, les microdépôts les moins denses en énergie (quelques eV.nm-3) sont les plus nombreux et les microdépôts de quelques centaines d’électronvolts par nm3 sont les plus rares (Goodhead 1989). La variété de ces microdépôts est probablement la cause de la grande hétérogénéité biochimique des dégâts créés dans l’ADN. En effet, un parallèle existe entre la nature biochimique des lésions radioinduites de l’ADN et le quantum des microdépôts d’énergie. Les modifications de bases (1000 à 10000 par Gy) sont avec les CSBs (1000 par Gy), les évènements les plus fréquents : on chiffre à 1-10 eV.nm-3 l’énergie nécessaire pour créer une modification de base et 10-100 eV.nm-3 pour une CSB. Les CDBs (40 par Gy) sont des évènements beaucoup plus rares (Frankenberg-Schwager 1989). Il faut en effet plus de 100 eV. m-3 pour créer une seule CDB. De tels écarts dans la densité d’énergie conditionneront la « réparabilité » des lésions considérées (Foray, Monroco et al. 1998). 41 Figure 14 : Représentation schématique de la d'une arborescence de microdépôts aléatoirement espacés et de densité d'énergie différente.traversant le noyau d’une cellule, d’après Goodhead (Goodhead 1989). I.2.2.2 La phase chimique et l’importance des produits radicalaires radioinduits I.2.2.2.1 Les principaux produits de la radiolyse de l’eau Constituants majeurs de la matière vivante, les molécules d’eau se dégradent sous l’effet des radiations ionisantes en des produits radicalaires et à des rendements bien connus des chimistes. L’ionisation d’une molécule d’eau nécessite environ 13 eV. La radiolyse de l’eau aboutit rapidement à la formation de deux ions radicaux instables : - l’ion H2O+• (qui donnera en 10-10s l’ion hydronium (H3O+) et le radical hydroxyl OH• au contact d’une autre molécule d’eau) H 2 O Irradiatio n → H 2 O +• + e − H 2 O +• + H 2 O → H 3 O + + OH • - un électron (qui se liera à l’eau pour donner un électron aqueux (e-aq ). e → e-aq Les concentrations locales de ces deux produits primaires seront responsables respectivement d’une forte acidification du milieu et de réactions d’oxydations violentes. Par recombinaison chimique, ils se transformeront en e-aq, OH•, H•, H3O+, O2-, H2O2 (Figure 15). 42 Figure 15 : Les différentes étapes de la radiolyse de l’eau. I.2.2.2.2 Les conséquences de la radiolyse d’une solution aqueuse Evidemment la présence de solutés peut favoriser l’une ou l’autre des nombreuses réactions radicalaires possibles entre les espèces citées dans le paragraphe précédent. Les radiations ionisantes décomposent également toute molécule en solution aqueuse en entités chimiques secondaires qui peuvent être elles-mêmes très réactives. Il faudra donc être vigilant en ce qui concerne une photo-décomposition possible de drogues chimiothérapiques dans le cas d’une radio-chimiothérapie ou d’une photo-décomposition d'agents de contraste dans le cas du radiodiagnostic (scanner). Deux exemples significatifs ont été récemment mis en évidence : d’une part, la décomposition des produits de contraste iodés sous irradiation, d’autre part, les conséquences des flux extranucléaires d’ions calcium qui sont libérés par la cellule irradiée. Dans le premier cas, il a été montré que les rayons X produisent une dégradation des produits de contraste iodés en libérant notamment des ions iodures (I-). Rapidement combinés au potassium et au sodium du milieu biologique sous forme de NaI ou de KI, les iodures se fixent sur l’ADN (alors que les produits de contraste ne pénètrent pas les cellules), inhibent la réparation des cassures radioinduites et entraînent une forte toxicité pour les cellules qui ont capté des iodures. La photodégradation des produits de contraste constituent l’un des exemples les plus représentatifs de l’impact biologique de la radiolyse des molécules utilisées en clinique. De nombreux échanges ioniques (pompes à protons, à sodium,...) assurent l’intégrité de la membrane cellulaire. Après irradiation, la cellule subit une perturbation transitoire de ses équilibres ioniques. En particulier, dans la première heure post-irradiation se crée un flux massif d’ions calcium (Ca2+) hors de la cellule. Bien que cette observation soit ancienne, elle 43 a récemment retrouvé un intérêt à travers les recherches sur les effets de voisinage. Nous y reviendrons dans les chapitres suivants. I.2.3 La phase biologique et l’importance de la qualité de la réparation de l’ADN I.2.3.1 L’importance de l’ADN dans la réponse aux radiations Une cellule doit lutter pour protéger l’intégrité de son matériel génétique. Toutes les altérations du génome constituent un dommage à l’ADN. Les déficiences dans la réparation ou de la signalisation de ces dommages de l’ADN sont à l’origine de la majorité des cancers. Parmi les sources extérieures, les radiations ionisantes produisent les lésions de l’ADN multiples. Des expériences de micro-irradiation utilisant des émetteurs β ont montré que pour induire 50% de létalité chez un fibroblaste humain, il faut délivrer 200 à 500 Gy au cytoplasme alors que 1 à 3 Gy suffisent quand on irradie seulement le noyau. Le noyau est donc une cible privilégiée de l’effet létal des radiations ionisantes et nous nous focaliserons dans ce chapitre sur les effets radioinduits sur l’ADN. Comme on l’a vu plus haut, l’action des radiations ionisantes sur l’ADN se distingue de celle des autres agents génotoxiques par la diversité des types biochimiques des lésions induites : les DBs, les CSBs et les CDBs. Chaque type de lésions se caractérise par sa fréquence de formation et les voies de réparation qu’il déclenche (Tableau 10, Figure 16). Les DBs regroupent toutes les formes d’altérations telles que l’oxydation, le pontage entre les bases voisines ou la perte d’une base de l’ADN (Moustacchi 2000). Ces dégâts sont les plus fréquents et prépondérants (environ 1000 à 10000 par Gy et par cellule humaine pour une irradiation X) ; leur réparation est rapide (généralement exécutée en quelques minutes). Elle s’effectue par le processus d’excision-resynthèse assuré par les protéines du BER (base excision-resynthesis) ou du NER (nucleotide excision-resynthesis) (Lindahl and Wood 1999). Les CSBs sont formés par la rupture de la colonne sucre-phosphate de l’ADN, les liaisons covalentes sont rompues. On compte environ 1000 dommages par Gy par cellule humaine pour une irradiation X (Ward 1988). Leur réparation est généralement exécutée en quelques 44 dizaines de minutes par des processus d’excision-resynthèse mais aussi de recombinaison (Lindahl and Wood 1999). Tableau 10 : Les dommages de l’ADN radioinduits et leur spécifications physiques et biologiques: le dépôt d’ énergie minimal nécessaire pour la formation de DB, CSB ou CDB, leur incidence par Gray de rayons X, leur demi-vie de réparation et la voie de réparation activée par ce type de dommage (Joubert and Foray 2006). Dommage de base (DB) Cassure simple-brin (CSB) Cassure double -brin (CDB) Energie nécessaire >1 eV/nm3 >10 eV/nm3 >100 eV/nm3 Incidence 50 % de dommages réparés ~ 10 000 / Gy ~ 1000 / Gy ~ 40 / Gy 5-10 min 10-20 min >50 min Mode de réparation Suture Recombinaison homologue Excision-Resynthèse La réparation par excision de nucléotides (NER) est principalement utilisé pour réparer les lésions encombrantes et gênantes la structure de l’ADN comme par exemple les dimères de pyrimidines causées par les UV. La lésion est détectée, l’ADN entourant la région affectée est déroulé par le complexe TFIIH, des endonucléases (ERCC-XPF et XPG) génèrent les coupures simple-brin du site de dommage et finalement l’ADN polymérase comble le site vacant en ajoutant les nucléotides adéquats La réparation par excision de base (BER) sert principalement à replacer les bases modifiées ou combler les sites vacants laissés par une perte de base. Les glycosylases créent un site abasique et un ou plusieurs les nucléotides viennent remplacer les anciens. Nos travaux se concentrent principalement sur les CDBs, nous ne détaillerons pas plus les voies de réparation des dommages de base et des CSBs. Contrairement aux idées reçues, une CDB radioinduite ne peut-être le résultat de deux CSBs radioinduites suffisamment proches et créées par deux traces de particules différentes. Une dose de 1 Gy de rayons X ne produit qu’environ 40 CDBs par cellule (Frankenberg-Schwager 1989; Goodhead 1989). En revanche, ces lésions sont plus lentement réparables que les CSBs ou les DBs (environ quelques heures). Plus que les autres lésions radioinduites l’ADN, les CDBs ont focalisé l’attention des radiobiologistes car, non réparées, elles peuvent conduire à la perte définitive de l’information génétique et à la mort de la cellule. 45 Figure 16 : Les différentes voies de réparation de l’ADN selon Hoeijmakes (Hoeijmakers 2001). I.2.3.2 Les différentes voies de réparation des CDBs: suture, recombinaison Dans les cellules eucaryotes, il existe deux systèmes de réparation des CDBs : la recombinaison, qui est une voie majoritaire au cours des phases S et G2 du cycle cellulaire et la suture ou (NHEJ : non-homologous end joining), qui est prédominante pendant la phase G1. Ces deux mécanismes de réparation sont distincts et complémentaires. La NHEJ consiste en une suture des deux extrémités de l’ADN (Figure 17, 18 et 19). La réparation par recombinaison consiste à remplacer la séquence endommagée par une séquence identique susceptible de s’apparier, prise en amont ou en aval de la région lésée, du chromosome homologue (recombinaison homologue). Tandis que la recombinaison homologue est le mode de réparation majoritaire chez la levure, c’est le NHEJ qui prédomine chez les cellules humaines. Chez les mammifères, l’augmentation de la fréquence de recombinaison (homologue on non) c’est-à-dire l’hyper-recombinaison, joue un rôle essentiel dans la cancérogenèse (Thyagarajan, McCormick-Graham et al. 1996). Comme on l’a dit plus 46 haut, un défaut de NHEJ est toujours associé à une radiosensibilité alors qu’une hyperrecombinaison semble être à l’origine de mutations entraînant une forte instabilité génomique et une susceptibilité aux cancers. Figure 17 : Réparation des CDB par suture ou par recombinaison. La réparation par suture fait intervenir les protéines de réparation Ku et DNA-PKs. La réparation par recombinaison homologue fait intervenir le complexe RAD51/RAD52, couplé à BRCA1 et B 2 (Foray, Marot et al. 2002). I.2.3.2.1 Réparation par suture La protéine Ku80 s’associe à la protéine Ku70 (Walker, Corpina et al. 2001), et cet hétérodimère coulisse le long de l’ADN. Au niveau de la cassure, il recrute la protéine DNAPKcs. Ces trois protéines forment le complexe DNA-PK, qui a une fonction essentielle de serine-thréonine kinase dans le processus de réparation NHEJ : cette kinase phosphoryle en effet certaines protéines comme le variant X de l’histone H2A. La phosphorylation de l’histone H2AX par DNA-PK produit une distorsion de l’ADN qui pousse le complexe DNAPK à s’éloigner du site de la cassure. Les protéines de réparation par suture (Ligase 4 et XRCC4) sont ensuite recrutées pour réunir les deux extrémités de l’ADN. L’autophosphorylation du complexe DNA-PK provoque son détachement de l’ADN (Figure 17, 18 et 19). Les dommages chromosomiques typiques d'un défaut de suture NHEJ 47 sont généralement des délétions qui peuvent être associées à une forte radiosensibilité et une immunodéficience sévère (Dai, Kysela et al. 2003). Certaines molécules de chimiothérapie peuvent produire un autre type de lésions de l’ADN: les pontages ADN-protéines ou les pontages ADN-ADN, dont l’exemple le plus représentatif est constitué par les adduits de l’ADN. L’adduit covalent peut gêner la réparation de la cellule. Les adduits intraou inter-brin bloquent stériquement l’accessibilité aux extrémités coupées de l’ADN des protéines de suture Ku80 et Ku70 (Turchi and Henkels 1996). I.2.3.2.2 Réparation par recombinaison La reconnaissance des CDBs réparées par recombinaison est assurée par l'anneau heptamérique Rad52 qui coulisse le long de l'ADN. Une fois l'anneau proche de la cassure, la protéine Rad51 est recrutée et forme un nucléofilament qui va rapprocher les brins homologues (ou non-homologues) près du site de réparation. La formation de ce nucléofilament met en jeu une multitude de protéines comme les protéines RPA (Replication Protein A), XRCC2 et XRCC3 ainsi que les protéines BRCA1 et BRCA2. Cependant, les étapes suivant la reconnaissance par Rad52-Rad51 sont encore méconnues (Wu, Davies et al. 2001). Singulièrement, alors que l'absence de toute recombinaison homologue est létale chez les mammifères, il a été montré au contraire qu’un manque de contrôle de la recombinaison pouvait contribuer à une forte instabilité génétique : c'est l'hyper-recombinaison (Lengauer, Kinzler et al. 1998; Zhou, Akgun et al. 2001). Par ailleurs, la surexpression de Rad51 a été observée dans de nombreuses cellules tumorales induisant un fort taux de recombinaison. Les aberrations chromosomiques typiques d'un manque de contrôle de la recombinaison sont les translocations, souvent associées à différents types de cancer (Khanna and Jackson 2001). 48 Figure 18: Les différentes étapes de la suture et de la recombinaison homologue selon www.focosi.immunesig.org/dnaturnover.html. 49 I.2.3.2.2.1 Le rôle particulier de BRCA1 La protéine BRCA1 (Breast cancer susceptibility) est un suppresseur de tumeurs spécifique de sein et de l’ovaire dont les mutations sont responsables de la majorité des tumeurs héréditaires du sein (Futreal, Liu et al. 1994; Miki, Swensen et al. 1994) et de la majorité des syndromes cancéreux du sein et de l’ovaire (Easton, Ford et al. 1993). BRCA1 est une nucléoprotéine de 220 kDa de taille, situé sur le locus 17q21. Depuis le clonage du gène BRCA1 et sa caractérisation (Miki, Swensen et al. 1994), de multiples fonctions de cette protéine ont été mises en évidence, telles que le contrôle du cycle cellulaire, l’ubiquitination des protéines et la remodelage de la chromatine. Sa localisation et le niveau d’expression varient avec le cycle cellulaire dans les cellules proliférantes. La plus grande concentration nucléaire est observée pendant les phases S, G2 et M (Chen, Farmer et al. 1996), pendant lesquelles des foci nucléaires distincts sont formés et visibles par immunofluorescence. Après traitements aux rayons X, UV ou par différentes drogues de chimiothérapie, cette protéine subit une hyper-phosphorylation en formant également des foci. Cette forme phosphorylée de BRCA1 est nécessaire pour son import nucléaire et pour son recrutement sur les sites des cassures de l’ADN. Ces sites de BRCA1 recrutent ensuite plusieurs protéines de réparation impliquées dans la réparation des dommages de l’ADN. Ce mécanisme de phosphorylation de BRCA1 est essentiel pour ses fonctions au cours de la prolifération cellulaire et de la réparation de l’ADN (Scully, Chen et al. 1997). Différents domaines fonctionnels ont été décrits (Figure 19): - domaine Zinc ring finger amino-terminal impliqué dans les interactions protéinesprotéines - domaine carboxyterminal acide : domaine d’activation transcriptionnel constitué de 2 carbones terminaux : BRCT pour BRCA C-terminal - domaine central comportant différentes régions, telles que des séquences NLS (Nuclear Localisation Signal) et des domaines d’interactions avec d’autres protéines telle que Rad 51. 50 Figure 19 : Le schéma des sites fonctionnellement importants de la protéine BRCA1. La partie BRCT et les sites MRE11/RAD50/NBS1 et RAD51 sont les domaines importants pour les interactions avec les autres protéines de réparation, la partie centrale interagit avec l’ADN. Ring domaine participe à l’ubiquitination. Les sites de phosphorylation sont les cibles des kinases ATM et ATR.. Des progrès majeurs ont été réalisés au cours des der nières années dans la caractérisation de mutations génétiques importantes de BRCA1. Une radiosensibilité a été observée dans les lignées portant le gène BRCA1 muté. La perte complète de BRCA1 conduit à une radiosensibilité cellulaire liée à une réduction des capacités de réparation des cassures doubles brins. Cette radiosensibilité semble par ailleurs être corrélée avec le statut génétique de BRCA1. En effet, les cellules avec deux copies sauvages de BRCA1 sont plus résistantes que les cellules avec une seule copie fonctionnelle, elles mêmes plus résistantes que les cellules sans BRCA1 (Abbott, Thompson et al. 1999; Foray, Randrianarison et al. 1999; Ruffner, Joazeiro et al. 2001).
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Approche socio ethnographique du processus de concertation : étude de l'émergence d'une politique locale de jeunesses intégrée. Education. Université Toulouse le Mirail - Toulouse II, 2022. Français. &#x27E8;NNT : 2022TOU20066&#x27E9;. &#x27E8;tel-04099996&#x27E9;
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Théorie des appartenances multiples et complexification des mondes sociaux À l’époque de l’étude de la ville de Chicago par Mead (Park, 1921), du village polonais par Thomas et Znaniecki (1919) ou de la Tepoztlán mexicaine par Redfield (1930), la société était considérée comme traditionnelle. La définition d’un monde social : où commence-t-il et où finit-il, et la question de l’appartenance d’un individu à ce monde ne se posait pas de la même manière, car les identités étaient clairement déterminées. Les sociologues des années 1950 évoquent dans leurs travaux le « pluralisme culturel » propre « aux sociétés de masse » (Shibutani, 1955 ; Lemert, 1953) qui se développe. Le travail sur les mondes sociaux s’est compliqué quand la société est devenue complexe et les identités individuelles, multiples et hétérogènes. Partant de ce constat théorique, un monde social est amené à connaître des divisions internes, et les mondes sociaux sont plus ou moins interconnectés entre eux. Leurs frontières deviennent floues, les engagements des membres sont variés et ne garantissent plus une unité de perspective. Les champs d’expérience et les univers de discours qui caractérisent un monde social apparaissent disloqués puisque les situations internes se multiplient autant que les Soi qui les composent. Tamotsu Shibutani (1955) rend compte de cette complexification en s’emparant du concept de « groupe de référence » tenu jusqu’alors par 141 Herbert Hyman, Robert K. Mertin et Alice Rossi et le ré-élabore à la manière de la tradition sociologique de Chicago. L’appartenance d’un individu à plusieurs mondes sociaux se double de « la cohabitation pour un même Soi de plusieurs groupes de référence » (Cefaï, 2015) ce qui donne lieu à des tensions, des dilemmes et des contradictions (Hughes, 1971) entre différents Moi d’un individu. On imagine très bien comment dans cette conception, ce qui fait « commun » aux membres d’un monde social se complique. Daniel Cefaï (2015) parle même de « fiction limitée » quand il s’agit d’approcher aujourd’hui le concept de monde social comme un « bien ordonné, clos, unifié et cohérent. ». Il préfère la perspective qui s’attache à considérer le monde social comme le lieu où s’organise la pluralité et la conflictualité, comme une « arène sociale ». Un monde social, c’est donc la rencontre entre plusieurs « groupes de référence » (entendus par extension comme des champs d’expérience et des univers de discours) qui entrent en tension. 1.3.4. La théorie de l’arène publique : des mondes sociaux au monde politique Un monde social n’est donc pas forcément un ensemble homogène et permanent. Il existe aussi certains mondes qui se forment du fait de la rencontre de mondes sociaux hétérogènes. Ils sont la fusion de différents « segments » (Strauss & Bucher, 1961). Daniel Cefaï (2016) s’est particulièrement intéressé à ces mondes qui se forment dans la prise en charge d’un « problème public ». Cette notion est particulièrement d’actualité depuis la fin des années 1990 du fait de l’évolution du politique en France et de la dimension territoriale et concertée que l’action publique tente de revêtir. Daniel Cefaï réintroduit la dimension politique des mondes sociaux en réinvestissant sa dimension pragmatique telle que l’a pensé John Dewey ou George H. Mead. Ces auteurs constatent qu’à Chicago au début du 20e siècle, les décisions politiques à l’échelle locale se prennent à travers les interrelations multiples entre des citoyens engagés et les preneurs de décisions politiques qui forment alors un réseau du fait du partage de préoccupations communes. Et ces réseaux traversent « des mondes sociaux » à la fois linguistiques et ethniques, entrepreneuriaux et syndicaux entre lesquels l’émergence de quelque chose comme « une raison publique » était possible du fait du rôle de passeurs, médiateurs et traducteurs que les individus exerçaient entre eux. Daniel Cefaï relit le concept d’arène sociale à la lumière des travaux de George H. Mead et John Dewey en le distinguant également de trois autres concepts qui prennent de l’ampleur à la fin des années 1990. Selon Daniel Cefaï, une arène publique est différente d’un « marché » qui dispose d’une logique de profit à travers l’échange, d’un « champ » qui souligne la logique de domination entre groupes sociaux et d’une « agora » qui insiste sur la logique d’argumentation et de délibération propre aux mondes sociaux. En rassemblant ces logiques dans le concept des arènes publiques, il réalise une écologie des problèmes publics. Une ar publique est, selon lui, une arène sociale dont les acteurs s’intéressent aux biens publics, définissent leurs problèmes comme publics et « sentent, agissent et parlent en conséquence » (Cefaï, 2016). De la théorie de l’arène sociale à la théorie de l’arène politique : une redéfinition autour de la « segmentation » des mondes sociaux Dès 1955, Tamotsu Shibutani qualifiait les mondes sociaux d’« arènes sociales ». Anselm Strauss mettait ensuite en exergue l’idée de l’existence d’un « l’ordre négocié » au sein de ces arènes. Seule la dimension de forum de discussion, ou d’ « agora » était alors envisagée. En 143 acceptant toutefois qu’il puisse exister d’autres modalités d’interactions, l’idée d’arène sociale d’Anselm Strauss et d’Howard Becker ne comportait pas de dimension éthique et politique capable de penser la prise en charge des problèmes publics, notion qui était pourtant centrale dans les thèses pragmatistes du début du 20e siècle. À la fin des années 1990, Daniel Cefaï (2016) forge le concept « d’arène publique » qui selon lui permet de reconnecter l’étude des problèmes sociaux avec l’histoire de la philosophie pragmatique et de la sociologie de Chicago. Il en vient donc à prolonger l’acceptation première de « l’arène sociale» pour lui donner une définition en lien avec l’étude des problèmes publics. Daniel Cefaï définit l’arène publique comme « un ensemble organisé d’accommodements et de compétitions, de marchandages et d’arrangements, de protestations et de consentements, de promesses et d’engagements, de contrats et de conventions, de concessions et de compromis, de tensions et d’accords plus ou moins symbolisés et ritualisés, formalisés et codifiés, où se joue un public interest... Il existe toutes sortes d’arènes sociales, mais ce n’est que lorsque ces mondes de mondes sociaux, qui configurent des territoires, des connaissances, des technologies, des organisations et des institutions, ordonnés à la réalisation d’un bien public ou à l’évitement d’un mal public, que l’on parle d’arènes publiques. » (Cefaï, 2016, p. 45). Sur la base des travaux de John Dewey de « the public and its problems » (1927), Daniel Cefaï (2016) constate que lorsque les individus sont confrontés à une situation problématique et qu’ils s’inquiètent, s’interrogent, expérimentent, enquêtent et discutent, ils forment une « arène publique ». Un monde social peut donc être une arène dans laquelle s’exercent des activités politiques, mais pas au sens où ces activités sont entreprises par des corps législatifs ou des cours de justice. L’origine d’une telle arène se trouve dans l’existence « d’un trouble » qui ne peut être résolu dans le cadre des mécanismes habituels. Par un processus d’association et d’organisation, les membres du collectif vont définir cette situation problématique et tenter de trouver des solutions en projetant des alternatives, imaginant des scénarios. Ils tentent de « passer à l’action » pour « résoudre » le problème en 144 s’engageant de manière conjointe dans une indissociable relation de coopération et de compétition. John Dewey et George H. Mead insistaient sur le fait qu’une arène publique s’organise autour « de terrains d’enquête et de laboratoire d’expérimentation » (Cefaï, 2002, p. 101). C’est donc grâce à cette dynamique collective qu’émergent un problème et son public. Une arène publique se déploie donc autour d’une situation problématique ou d’un problème public. Ce qui attire particulièrement notre attention ici c’est que l’histoire des politiques de jeunesses en France nous a montré que bien souvent se cristallise ce genre de situations autour de la jeunesse. Tantôt dangereuse ou messianique (Guerin-Plantin, 1999), la jeunesse peut être à la fois le problème comme c’est le cas depuis quelques années dans les banlieues (Bordes, 2007) ou la solution comme dans les campagnes (Gambino et al., 2019). La jeunesse engage dans tous les cas un processus de définition collective. Elle revêt une dimension symbolique (Becquet et al., 2012) qui va engendrer « un champ d’expérience collective » avec ses propres façons de voir, de dire et de faire. Seulement, cette dynamique collective va parfois prendre une certaine ampleur puisque finalement elle va intéresser des gens au-delà de ceux qui sont directement touchés (Dewey, 1927). La communauté qui se forme autour du problème public va être liée par l’existence d’« une préoccupation commune » (common concerns) les poussant à se créer une « expérience commune ». Des gens, qui sont capables de sentir et de ressentir en commun, vont alors se rassembler, discuter, s’inquiéter, pourquoi pas trouver des leaders pour faire entendre leurs réclamations, recruter des alliés comme des élus ou des experts avec qui s’associer, convaincre et mobiliser. Daniel Cefaï nous engage à voir ces gens comme les membres de mondes sociaux différenciés qui, touchés par une épreuve de désorganisation, cherchent une issue. Ils peuvent au début, par des stratégies individuelles, réformer leur environnement personnel, mais finalement, lorsqu’ils prennent conscience que des solutions communes seraient plus adéquates, ils s’engagent dans actions collectives. Ils visent alors à une réorganisation des « équipements et des ressources disponibles, à une redistribution du pouvoir, des territoires et des populations, à une refonte des technologies ou des institutions mises en place et participer par là à la co-production de nouvelles normes ou de standards [...] et au-delà, de nouvelles politiques. » (Cefaï, 2016). Les humains embarquent leurs mondes sociaux respectifs dans de nouvelles configurations. Ce processus est nommé «l’enquête ». Il s’agit par là pour le collectif de définir le trouble en problème public en le mettant à l’épreuve de réalité et de validité. Le problème public doit gagner en légitimité en emportant l’assentiment des pouvoirs publics, du public le plus général et de certains « publics spécifiques » (Park, 1922). L’enquête est une action collective qui va induire d’autres actions. Elle permet notamment de déterminer la grandeur d’échelle spatiale 145 et temporelle de la situation problématique. L’enquête fixe également les finalités, les objectifs, les moyens et les ressources pour résoudre le problème. Elle détermine les opportunités, les contraintes et engage entre les membres des stratégies d’alliance et d’opposition. L’enquête permet également de nommer les acteurs autorisés à prendre en charge le problème. Tout ça fait que l’enquête organise un « champ d’intervention ». Ce qui est particulièrement intéressant c’est que la création d’une arène publique va établir de nouvelles habitudes collectives entre ses membres. De nouveaux répertoires d’actions (Lahire, 1998) vont se créer face aux situations problématiques en vue de les résoudre. Publiciser un problème c’est également « le sortir de l’ombre » (Cefaï, 2016) pour en faire quelque chose qui puisse être reconnu, exploré et résolu par ce que Daniel Cefaï (2016) nomme « les représentants de l’opinion publique » et « par les opérateurs d’action publique », sous le regard du public. En venant synthétiser trois logiques, celle du marché, celle de la domination et celle de la délibération, le concept d’arène publique autorise les problèmes publics à être pensé comme le résultat dune rationalité communicationnelle. Cette approche a incontestablement des affinités avec la perspective pragmatiste qu’on retrouve chez Dewey, Mead ou encore Park qui louent les mérites de « la discussion publique ». En effet, ces auteurs étudiaient à leur époque les mouvements de réformes et voyaient dans la formation d’arènes publiques le moyen d’atteindre une « intelligence créatrice » (Dewey et al, 1989) dans laquelle l’imagination progressiste pouvait se donner libre cours grâce à l’expérimentation. Ces mouvements, portés par des individus variés, créés selon eux de « formidables bouillons de culture publique ». Les auteurs avaient une vision très positive des humains dans la mesure où ils leur accordaient la capacité de transcender leurs intérêts égoïstes afin de s’intéresser à l’intérêt public (Dewey, 1927). Daniel Cefaï (2016) insiste également sur la perspective écologique des arènes publiques. En effet, selon lui, les actions collectives prennent des formes distinctes en fonction du type d’environnement dans lequel elles s’inscrivent. Cette perspective est bien celle de la sociologique de Chicago et elle sera en partie redéveloppée par Tamotsu Shibutani, Anselm Strauss et Howard Becker par la suite. Un problème s’ancre indéniablement dans un environnement (Abbott, 2005) à la fois instrumental, organisationnel, idéel ou moral. Les dispositifs d’action qui seront engagés sont limités dans un champ des possibles. Et « l’intelligence créatrice » qui se déploie à travers « l’activité collective » réordonne ces environnements, modifie l’ordre des choses pour résoudre les situations problématiques. Et comme chaque arène est propre à un environnement, sa composition ne peut être donnée à l’avance. C’est exactement la thèse que défend Patricia Loncle (2011) pour qui « les 146 politiques locales de jeunesses ne sont pas de simples lieux de résonance des phénomènes exogènes ni des lieux de dispersion aléatoire, mais elles présentent des particularités territoriales qui permettent d’affirmer qu’il existe des systèmes locaux d’action publique » (Loncle, 2011, p. 130). On ne peut donc pas assigner par avance les frontières d’une arène publique. Elle se déploie en prenant ses fondements et en lançant des ponts entre différentes scènes publiques. L’arène publique contribue à ouvrir des mondes sociaux et institutionnels les uns aux autres. Elle crée des connexions entre eux. Elle met ces mondes en contact, les féconde et les impulse, contribue à des processus de transformation, de désintégration et de recomposition, de segmentation et d’intersection, de dénégation et de légitimation (Strauss, 1992). Les problèmes publics sont pris en charge et ent entre différents mondes sociaux et vont engendrer eux-mêmes de nouveaux environnements. L’idée de « segmentation » (Strauss & Bucher, 1961) est pensée comme une forme d’innovation organisationnelle et institutionnelle et plus seulement comme le délitement d’un groupe social. Ce processus de diffusion et de circulation des problèmes publics par delà les frontières de différents mondes sociaux a été particulièrement pris en charge par la médiatisation du concept d’objet-frontière (boundary objects) (Star & Griesemer, 1989; Trompette & Vinck, 2009) que je présenterai par la suite. Il répond à des besoins de traduction du problème dans des environnements distincts. Plus le degré de mobilisations d’acteurs différents monte en puissance, plus le problème public pourra résonner dans de nombreux auditoires, car dans des scènes sociales différentes qui vont progressivement s’emprunter des thèmes, des ressources et des informations entre elles. Finalement, une arène publique n’est pas réductible à une agora, un champ ou un marché. Elle trouve ses appuis dans des environnements institutionnels, professionnels, confessionnels, organisationnels où des problèmes publics se constituent, faisant et défaisant des mondes sociaux et les juridictions dans lesquelles ils viennent à être définis, traités, régulés, résolus. John Dewey et George H. Mead l’ont souvent répété : la politique doit définir et résoudre les problèmes publics par une méthode d’enquête et d’expérimentation. Elle se déploie autour de situations d’épreuve, souvent au point d’intersection entre plusieurs mondes sociaux ou environnements institutionnels. Cette prise en charge de problèmes publics par des arènes publiques conduit, selon Daniel Cefaï (2016), à la création de « services publics » ou au lancement « de politiques publiques ». S’associer, explorer des situations, enquêter et expérimenter, discuter et protester sont autant de façons de s’engager dans des processus d’action conjointe et de jugement politique (Arendt, 1982) et de bâtir, dans la pluralité et la 147 conflictualité, un monde commun. Nous avons affaire à un processus spécifique d’émergence et d’invention dans lequel la concertation se place comme une modalité d’interaction entre les acteurs qui y prennent part. La théorie de l’objet-frontière pour penser les processus de traduction entre différents mondes sociaux au sein d’une arène publique. En poursuivant les recherches entreprises par Strauss (1992) sur les mondes sociaux et les arènes sociales, le concept « d’objet-frontière » a été théorisé pour la première fois par Star et Griesemer (1989). Dans le cadre d’une étude ethnographique sur les mécanismes de coordination du travail scientifique au sein d’un muséum d’histoire naturelle, les auteurs ont mis en lumière le processus qui permet à des mondes sociaux hétérogènes de collaborer et communiquer dans le cadre d’un projet commun. Le souci des auteurs était alors de décrire et comprendre le processus par lequel des acteurs appelés à coopérer, mais issus de mondes sociaux différents pouvaient réussir à se coordonner. En se basant sur la notion de « traduction » (Akrich et al., 2006) dont ils critiquent la perspective asymétrique des opérations de traduction, l’objet-frontière est défini comme « quelque chose sur et avec lequel les personnes agissent » (Leigh Star, 2010). Il se trouve « à la frontière » de plusieurs mondes sociaux. Le mot frontière n’est pas utilisé dans le sens de « limite », mais au contraire comme « un espace partagé, le lieu précis où le sens de l’ici et du là-bas se rejoignent » (Leigh Star, 2010, p. 20). Les auteurs développent une perspective écologique de l’opération de traduction. L’objet-frontière est donc « un arrangement qui permet à des gens de travailler ensemble »(Leigh Star, 2010). Il doit être assez souple pour s’adapter aux astreintes et aux nécessités de chaque acteur, mais il doit être suffisamment ferme pour garder une signification commune de l’objet face aux identités propres de chacun. L’objet frontière permet à la fois la communication entre les mondes des acteurs tout en maintenant leur autonomie et leurs points de vue. C’est un outil d’intercompréhension et de coopération. Ce concept a connu un investissement académique important et a donné lieu à une « descendance conceptuelle » abondante. Il vient compléter le bagage conceptuel développé par Hugues, Becker et Strauss. Il fut particulièrement utile à l’étude des organisations, a été utilisé dans de nombreux champs disciplinaires comme la gestion, la sociologie, l’ingénierie de conception ou encore les sciences de l’éducation et de la formation (Gurnade, 2016). Dans le prolongement de l’objet frontière, c’est le concept d’«organisation-frontière » (boundary organization) qui apparaît à la fin des années 1990 dans le domaine de la sociologie 148 des sciences. À l’origine, l’organisation-frontière a été utilisée pour analyser le développement d’organismes dont les actions se situent aux frontières entre la science et la politique (Guston, 1999, 2000, 2001; Raman, 2005). Ce concept est notamment appliqué à l’analyse de comités d’experts, d’institutions de recherches ou d’agences gouvernementales. Miller (2000) donne une définition des organisations-frontières comme étant des « organizations that sit in the territory between science and politics, serving as a bridge or an interface between scientific research, political decision and public action ». Guston en livre une autre : « institutions that internalize the provisional and ambiguous character of the apparent boundary between science and politics ». Il a par ailleurs particularisé l’organisationfrontières en trois principes : elles existent à la frontière de deux mondes sociaux différents, la science et la politique, en étant responsables et redevables à la fois de manière scientifique et politique; elles incluent la participation d’acteurs à la fois scientifiques et politiques et de médiateurs entre les deux mondes; elles utilisent et créent des « objets-frontières » (boundary objects) (Star & Griesemer, 1989), c'est-à-dire des objets socialement construits qui peuvent être utilisés dans les deux mondes sans perdre leur identité, et d’« ensembles standardisés » (Fujimura, 1992), c'est-à-dire de dispositifs institutionnels, de protocoles et de procédures qui organisent et stabilisent la coopération entre les deux mondes » (Guston, 2001). Guston (2001) utilise la théorie principal-agent pour formaliser la relation entre l’organisation frontière (l’agent) et ses principaux (les communautés scientifiques et politiques). Ces organisations peuvent concilier l’offre et la demande de savoir, construire et développer des instruments, des protocoles, des normes, des méthodes d’évaluation communs aux deux mondes, coordonner ces derniers (par des activités de communication, de traduction, de négociation...) et négocier les frontières entre science et politique (Miller, 2000). Le concept d’organisation-frontière a aussi été utilisé pour décrire le rôle de l’Agence européenne pour l’environnement (Guston, 2001, p. 403) : l’action de cette agence se situe à l’interface entre les communautés scientifiques et politiques, emploie des agents issus des deux mondes et joue un rôle essentiel de médiation. Si ce concept a été principalement utilisé pour analyser l’activité d’organismes qui accomplissent des fonctions à l’interface de la recherche et de l’action politique, il pourrait s’appliquer à d’autres sphères comme le groupe de travail autour de la jeunesse (Gurnade, 2016). Finalement, au terme des études qui ont été conduites et présentées, il en résulte qu’un monde social peut être défini de manière générale comme « un réseau ouvert d’acteurs collaborant autour d’une activité spécifique et unie par un étroit tissu de relation » (Lebreton, 2016). 149 David Unruh (1983) a également proposé de les définir comme des formes d’organisation sociale qui ne sont ni étroitement organisées ni clairement délimitées (Unruh 1983, p. 274). La consultation, la concertation et la négociation renvoient toutes les trois aux processus de prise de décision collective, mais chacune désigne une situation, des objectifs et des processus différents. (Touzard, 2006). La concertation vise à construire des objets communs essentiels pour l’avenir. Elle laisse par ailleurs les acteurs libres de construire ensemble la question posée. Finalement, ce qui fait l’intérêt de la concertation par rapport à la consultation ou à la négociation, c’est la construction collective d’objets qui vont devenir communs aux participants et sur la base desquels pourront émerger des initiatives, des décisions, des règles, à l’issue ou en aval de la concertation proprement dite. La concertation peut n’induire ni décision ni action collective, mais elle crée des références communes qui rendent possibles l’action et la décision collective (Beuret, Pennanguer, et al., 2006, p. 31). Je définis la concertation comme un processus de construction collective de questions, de visions, d’objectifs et de projets communs relatifs à un objet. Finalement, cette conception rejoint le fait qu’un processus de concertation engendre l’émergence « d’une arène publique » dans la mesure ou des références communes se créent afin de définir une politique publique. Dans ce travail, je désignerai sous le vocable générique « concertation », l’ensemble des processus. 2. Les indicateurs de la concertation au sein d’une arène publique. Un débat autour de la définition du concept de concertation tient à son degré de précision. Nonjon (2005) évoque un « flou définitoire » caractérisant les politiques participatives. « La participation citoyenne et les processus de concertation visant à la mettre en œuvre seraient par essence un atout pour l’action publique, idée largement répandue qui permettrait de s’économiser certains efforts de définition des termes et des objectifs poursuivis. Signalons que l’entrée de la concertation dans certains textes légaux n’a pas clarifié les choses, car ces textes introduisent des obligations de concertation sans définir ce terme (Brédif, 2006; Hélin, 2001). Derrière « l’extrême hétérogénéité des pratiques » auxquelles la concertation donne lieu, constatée par Hélin (2001), Bacqué et Sintomer (2011) et bien d’autres auteurs, se cache certes une grande inventivité, mais aussi des interprétations parfois vivement critiquées (p. 30). Pour une partie de la littérature, l’enjeu est de ne pas définir précisément ces termes et militer en faveur d’une absence de clarification pour «ne pas enfermer la concertation dans un carcan qui briderait son inventivité. La concertation reste avant tout un exercice de créativité, visant à construire une intelligence collective de situations données, puis à l’exploiter pour innover » (Beuret, 2012). Mermet (2006) défend ainsi une conception très large de la concertation, qui en fait un terme flou, flottant. Selon cet auteur, la concertation recouvre un continuum de pratiques, non seulement celles qui sont très impliquantes et coopératives, mais aussi des pratiques de consultation qui le sont très peu et « il n’est ni possible ni souhaitable de figer un mot « précis » pour définir le champ dans son ensemble : cela reviendrait à en figer par trop le périmètre » (Mermet, 2006). Pour d’autres auteurs, la non-définition des termes permet certes une grande inventivité et l’inclusion de pratiques très diverses et parfois complémentaires, mais elle pose aussi beaucoup de problèmes. C’est d’abord une porte ouverte vers des interprétations minimalistes, vivement critiquées ; c’est ensuite une porte ouverte vers des stratégies de non-participation. Un autre problème lié au « flou définitoire » existant tient au fait que certaines démarches sont, de facto, quasi labellisées comme relevant de démarches de concertation et/ou d’un type d’outils précis, alors même que le respect de références précises ne peut être contrôlé. Par exemple, selon Bacqué et Sintomer (2011), « sous le même nom de « budget participatif », on se trouve en présence de processus qui n’ont pas grand-chose à voir les uns avec les autres ». Dans le cadre de ce travail, je m’appuie sur les indicateurs de la concertation tels qu’ils ont été dégagés par Beuret et Cadoret (2011) dans le cadre d’une étude sur des porteurs de projets de concertation territoriale mobilisés autour des questions environnementales. Pour Beuret (2006), la concertation prend forme sur des scènes autour desquelles s’articulent les échanges 151 entre acteurs. Il assimile une scène de concertation à celle d’un théâtre, car elle regroupe un certain nombre d’acteurs, ainsi qu’un décor. La pièce est amenée à changer et va se matérialiser dans des lieux divers. Selon les auteurs, il y a différentes composantes à la concertation que je range dans trois grandes catégories : la coopération, la construction collective et le processus. Je propose de venir opérationnaliser davantage ces indicateurs à la lumière des travaux des sociologues de l’interactionnisme symbolique pour inscrire pleinement le concept de concertation au sein de mon cadre théorique. 2.1. La coopération À travers la concertation, l’idée est de mobiliser, mettre en relation des acteurs afin qu’ils puissent échanger des informations, s’écouter et trouver une place. Analyser un processus de concertation suppose d’identifier les acteurs qui y prennent part et leur forme d’implication (Mission démocratie participative du Conseil général et al., 2008). Il y a deux types d’acteurs à la concertation : ce que les auteurs nomment « les parties prenantes » qui sont les personnes physiques ou morales ayant un intérêt commun à une question ou un projet. Elles choisissent ou acceptent de prendre part au processus de concertation. Être partie prenante, c’est accepter d’être impliqué, d’avoir un parti pris. Parmi les parties prenantes, il y a également toutes les personnes en direction de qui le projet est tourné, c’est-à-dire les « personnes concernées » par le projet de la concertation. Elles sont appelées publics. Dans notre cas il s’agit des jeunes. La concertation peut faire appel à la participation du public, mais peut aussi n’associer que des personnes publiques. La participation est donc une dimension possible de la concertation. La typologie des formes de participation proposée par Pretty (1994) nous semble utile pour disposer de références quant aux niveaux de participation. Cet auteur distingue : La participation passive : le public est informé de ce qui va se passer La participation par la collecte d’informations : le public répond à des questions prédéfinies La participation par consultation : le public donne son propre avis La participation en échange d’incitations matérielles : le public participe en échange d’un accès à certaines ressources. La participation fonctionnelle : la participation du public crée des conditions favorables pour la réussite du projet La participation interactive : le public participe à l’analyse conjointe et décide de suite du projet. L’automobilisation : le public prend ses propres initiatives. La participation directe : Souvent perçue de manière protestataire et contraignante, elle 152 exprime un intérêt et une volonté forte des citoyens d’être associés au projet. Moins un outil qu’un réactif sur lequel rebondir ; Exemples : blocages, manifestations, assemblées populaires, pétitions Au départ, le réseau d’acteur est limité aux quelques catégories qui acceptent le dialogue, à une échelle et autour d’un objet lui-même restreints, puis, selon Beuret, le réseau doit s’étoffer (Beuret, 2006, p. 34). Selon Daniel Cefaï (2016), l’une des caractéristiques de la dynamique de problématisation et de publicisation des « troubles » est qu’elle ouvre des « scènes » sur lesquelles le problème public est « mis en scène » devant un auditoire. Il conçoit, tout comme Céline BoniccoDonato (2016) qu’on puisse alors adopter la métaphore dramaturgique et rhétorique dans le lignage d’Erving Goffman, Orrin Klapp et Murray Edelman (Cefaï, 2016, p. 45). Pour lui, parler de « scènes publiques » doit s’entendre au sens dramaturgique puisqu’il s’agit finalement « d’acteurs » qui accomplissent des opérations de dramatisation, d’argumentation, de narration, qui ont pour objet de transporter des auditoires dans des « champs d’expériences » et des « univers de discours ». Ainsi, une arène publique peut être entendue comme une « constellation de scènes qui empiètent les unes sur les autres, qui ouvrent sur des coulisses à géométrie variable, où les degrés de publicité sont déterminés par les cadrages des acteurs et dont les auditoires changent au gré des performances » (Cefaï, 2016). L’étude de la constitution d’une expérience publique prend la forme d’une écologie de l’attention du public (Goffman, 2013) qui peut être étudiée pour elle-même (Cefaï, 2016, p. 49). Goffman invite à étudier le monde social comme une scène, dans laquelle les individus « se mettent en scène » pour « mettre en forme leur monde ». Les individus sont alors « des acteurs » qui tiennent un « rôle » et répondent créativement aux évènements qu’ils rencontrent ainsi qu’aux contraintes structurelles qui pèsent sur eux. L’action commune entre les protagonistes n’est possible que grâce au partage et au respect de « règles d’interaction » que les acteurs définissent collectivement dans l’action de leur coopération. Leur organisation est donc un construit social qui se négocie ou est subi en fonction de leur capacité à aider au déroulement du processus tout au long des moments de « représentation ». Mais lorsque les règles d’interaction ne sont pas respectées, qu’advienne un malaise ou une gêne, Goffman parle alors de « rupture » dans l’interaction. Ces ruptures entraînent soit un repli des acteurs dans « les coulisses » afin de rectifier ce qui a fait défaut pour reprendre l’interaction, soit un arrêt de la représentation sociale. Dans ces jeux d’interaction, Strauss (1992) met en évidence qu’il existe des jeux de pouvoir qu’il invite à dévoiler. 2.1.1. La microsociologie d’Erving Goffman Erving Goffman est un sociologue né en 1922 au Canada, dans la ville de Mannville. Il est issu d’une famille de marchands juifs ukrainiens qui a émigré comme près de 200 000 autres personnes au même moment au Canada au tout début du 20e siècle. À l’époque, le gouvernement canadien refusait que les familles arrivant d’Europe s’installent dans les grandes villes comme Montréal. Mais finalement, Erving passera son enfance et son adolescence à Winnipeg, ville dans laquelle son père fait construire une maison. Cependant, les habitants sont hostiles à l’égard de la communauté juive, ce qui fait que Goffman grandit dans un environnement dans lequel il était constamment mis sous le regard des autres, à tenter de maîtriser le « monde social » qui l’entourait en dehors de sa famille. À la sortie de l’école secondaire, il étudie d'abord la chimie à l'université du Manitoba, et travaille un peu auprès d’un cinéaste et auteur de documentaire avant de s'inscrire en sociologie à l’université de Toronto en 1944. Ce parcours aura une importance dans le développement de la pensée de l’auteur. Goffman partira aux États-Unis, et plus précisément à Chicago, pour y continuer ses études tout en gardant sa nationalité canadienne. C’est Everett Hughes et Herbert Blumer qui 154 le forment en partie à la recherche. En 1949, Goffman part pendant douze mois dans les îles Shetland, au nord de l’Écosse pour y recueillir des données pour sa thèse de doctorat qu’il soutiendra sous l’égide de Warner en 1953. Il mène là-bas une enquête ethnographique et participative puisqu’il va travailler notamment comme plongeur dans le restaurant de l’hôtel dans lequel il est logé. Son travail va consister non pas analyser les structures de classes ou les relations de pouvoir, mais à analyser les interactions élémentaires de face-à-face entre les membres de l'île de Unst (appelée Dixon dans la thèse), observées directement au cours de parties de cartes ou de billard, de soirées dansantes et autres activités proposées par le principal hôtel de l'île. Goffman commence à construire ainsi une théorie de l'interaction à la fois originale, multidisciplinaire, analytique et enracinée dans l'observation directe. Il rédige sa thèse en 1951 à Paris, revient à Chicago où il se marie avec la fille d’un grand bourgeois protestant et soutient sa thèse en 1953, comme il aime à la dire « faite dans une communauté et non sur une communauté ». Et c’est dans le titre de son chapitre conclusif que se trouvera pour la première fois la notion « d’ordre de l’interaction ». En 1954, juste après sa soutenance de thèse, Goffman part pour Washington, accompagné de son épouse Angelica Choate et de son fils Tom. En 1955, il obtient un contrat de recherche pour passer une année dans un hôpital psychiatrique, celui de Sainte-Elisabeth à Washington, comptant plus de sept mille lits, afin d'observer la vie des reclus. Il y développe un de ses premiers concepts, celui « d’institution totale » qu’il définit comme « un lieu de résidence et de travail où un grand nombre d'individus, placés dans la même situation, coupés du monde extérieur pour une période relativement longue, mènent ensemble une vie recluse dont les modalités sont explicitement et minutieusement réglées » (Goffman, 1961). Juste après, en 1958, il acquiert un poste d’Enseignant à l'université de Californie à Berkeley, sur demande de Blumer, son ancien professeur de Chicago, il y sera nommé professeur en 1962 et entre temps, en 1961, il publie Asile, qui restitue son enquête sur les institutions totales. Goffman est à cette époque financièrement à l’aise et développe une passion pour les jeux, la bourse et les casinos qu’il considère comme des terrains d’étude de prédilection. Dès son premier ouvrage « la présentation de soi », il envisage la vie sociale comme une « scène de théâtre » (région où se déroule la représentation), avec ses « acteurs », son « public » et ses « coulisses ». Il se place comme un représentant de l’analyse ique. Il étudie la société comme « un spectacle des apparences mené par des acteurs en représentation, soucieux de tenir leur rôle sans fausse note et de contribuer à la tâche commune de produire des prestations cohérentes, toujours dans la crainte de perdre la face ou de la faire perdre à l’autre » (Goffman, 1956). Profondément inscrit dans la méthodologie développée par l’École de Chicago, Erving Goffman appartient à ce que l’on a l’habitude d’appeler « la seconde génération » de l’école du même nom, pour la différencier de la première où « Park règne en maître » (Chapoulie, 1995). Il s’est distingué par sa capacité à constamment changer de vocabulaire d’analyse pour demeurer au plus près de l’expérience individuelle de la vie sociale : il employa tantôt les métaphores du théâtre (mise en scène de la vie quotidienne) ainsi que celle du cinéma (les cadres de l’expérience). Toutefois, ce changement régulier de registre lui a valu de vives critiques dans la mesure ou on l’a taxé de ne pas avoir d’ancrage théorique et de méthode rigoureuse. Cependant, la pierre angulaire de l’ensemble de ses travaux se trouve dans le concept « d’ordre d’interaction », qu’il qualifie comme étant une forme d’ordre social. Ce que tente de faire Goffman dans tous ses livres est de dégager les principes généraux de cet ordre de l’interaction au sein de situations particulières qui ne sont jamais étudiées pour ellesmêmes, mais pour ce qu’elles révèlent quant aux modes de fonctionnement du type d’ordre social qu’est l’interaction. Finalement, la sociologie d’Erving Goffman peut paraître pour le moins déconcertante. Elle délaisse les structures macro-sociales pour faire place « aux miettes de notre ordinaire » (Bonicco-Donato, 2016, p. 8), aux rencontres les plus banales de l’existence, mais qui en disent long sur la manière dont les gens font pour faire société. Il érige l’interaction « en concept scientifique opératoire (Bonicco-Donato, 2016, p. 90) doté d’une consistance et épistémologie propre pour er l’une des strates du monde social. Toute infraction dans l’ordre de l’interaction est une infraction dans l’ordre de la société. L’interaction pour Goffman est comprise comme le face-à-face entre au moins deux personnes. Pour lui, il n’y a pas de regard, de silence qui n’ait pas d’importance dans l’interaction. Il est l’inventeur d’un regard microsociologique (Joseph, 2009). Son écriture est 156 également extrêmement particulière dans la mesure où il mêle dans ses analyses à la fois des situations prises sur le vif, mais également d’autres qu’il tire de romans, de pièce de théâtre, de journaux, etc. Aussi, il mettra sur le même plan un mémoire d’étudiant ou les œuvres de Weber et de Durkheim. Il ne fait pas de hiérarchie dans ses citations. Il décède d'un cancer de l'estomac en novembre 1982, à l'âge de 60 ans. 2.1.2. Le cadre de « la représentation théâtrale » C’est l’ouvrage de « la présentation de soi » qui établit le vocabulaire des symboles expressifs par le biais de la métaphore théâtrale. Selon la perspective adoptée dans l’ouvrage, reprenant le lieu commun du theatrum mundi, il est possible d’analyser la vie sociale qui a lieu au sein d’une arène publique comme une pièce de théâtre dont les individus sont les acteurs. Dans chaque situation, ils doivent jouer un rôle en satisfaisant les attentes du public. La vie sociale s’apparente à une représentation, ou plutôt à une succession de représentations mises en forme par les contraintes des scènes sur lesquelles les acteurs évoluent, dont le succès dépend de l’approbation des spectateurs. Bien que l’emploi du paradigme théâtral soit un moyen commode pour attirer l’attention sur le caractère expressif et symbolique de nos comportements, elle a cependant des limites et n’a d’autre prétention, et cela, Goffman le met bien en garde, de n’être qu’un outil heuristique. Dans la Présentation de soi (p. 245), Goffman indique la nécessité d’abandonner cette métaphore dans la mesure où elle tend à faire croire que la vie sociale n’est qu’une illusion alors qu’elle est pourtant bien réelle. En lectrice avertie, j’y serai vigilante puisque cette métaphore est toutefois un excellent moyen analytique pour classer les informations (Bonicco-Donato, 2016). Sur scène se trouve un acteur, c’est-àdire quelqu’un qui joue ou encore qui donne une représentation et utilise pour cela différents signes : certains qu’il porte sur lui (ce que Goffman nomme « la façade personnelle ») et d’autres qui ont une relative indépendance par rapport à l’acteur (ce que Goffman regroupe sous le terme « décor »). Le jeu de l’acteur sur scène passe donc par un appareillage symbolique qui comprend ces deux éléments. Nous allons maintenant définir de manière plus approfondie le bagage conceptuel proposé : La représentation Il s’agit du moment où l’individu se transforme en acteur. Les représentations n’ont pas toutes le même degré de « pureté » et il convient de classer selon qu’elles sont plus ou moins destinées à être regardées par le public, les spectateurs. Les représentations les plus pures sont les spectacles de cabarets, ballets ou encore concerts. Ensuite, dans un second degré, on peut 157 citer tout ce qui tourne autour des tournois et rencontres sportives. L’acteur et ses rôles L’acteur est l’individu qui est entré dans l’espace scénique pour la représentation. Le théâtre est le lieu où s’opère la distinction entre le rôle (désigne une aptitude ou une fonction, quel que soit le cadre dans lequel elle apparaît), la personne (sujet d’une biographie) et le personnage (version théâtrale de la personne). Un interactant aura autant de « rôles » différents que de « soi » en fonction des mondes sociaux dans lesquels il évolue. Toutefois, les rôles sont toujours indexés au rôle général de l’homme sur la scène publique. Dans la vie quotidienne, notre attention se porte davantage sur le rôle de tel individu dans tel domaine que sur ce qu’il fait dans la vie en tant que sujet doté d’une biographie propre. Ceux qui sont séparés en acteur et en public pour une représentation peuvent former « une équipe » pour une autre représentation. Goffman a également travaillé sur le concept d’équipe qu’il renvoie à « un ensemble de personnes dont la coopération très étroite est indispensable au maintien d’une définition donnée de la situation » (Nizet & Rigaux, 2014). Ces personnes coopèrent à la mise en œuvre d’une « routine particulière » (Goffman & Accardo, 1973 p. 81.). Une équipe est donc pour Goffman un acteur collectif qui doit compter sur la conduite des autres pour mener à bien la représentation. Les membres d’une équipe ne doivent pas trahir le secret de leur représentation et sont contraints à une certaine cohérence. Tous les acteurs sont regardés sur scène de manière continue par le « public ». Le public C’est l’individu qui entre dans l’univers du dramaturge. Son rôle consiste à se trouver devant toute activité quotidienne, à y jeter un œil à la fois sans se cacher, mais sans y participer non plus. Il n’a pas le droit d’intervenir sur ce qui se passe sur scène. Il ne peut que très occasionnellement faire partager son avis. Quelqu’un qui va au théâtre est également autre que soi. La réaction du public peut servir d’indicateur, le rire par exemple. Goffman insiste sur le fait qu’il faut différencier celui qui est provoqué par un acte ou une réplique drôle de celui provoqué par le bafouillement ou l’embrouillement d’un comédien sur scène. Le premier est le spectateur qui rit, le second est l’amateur. Dans les deux cas, cela fera réagir les comédiens puisqu’ils devront ajuster leur jeu. Dans la vie réelle, les trois partenaires (deux 158 comédiens et le public) se ramènent à deux : une personne adapte le rôle qu’elle joue aux rôles que jouent les autres personnes présentes qui constituent aussi le public. Chacun est à la fois acteur et public. Les relations avec le public permettent d’envisager le caractère écologique du monde social. Ce n’est pas un monde replié sur lui-même. L’appareillage symbolique C’est la partie de la représentation qui a pour fonction normale d’établir et de fixer la définition de la situation qui est proposée aux observateurs. Il a pour conséquence de donner des informations au spectateur sur le rôle qui est joué par l’acteur. Mais pour que l’appareillage symbolique puisse transmettre des informations sur la scène sociale qui se déroule, Goffman pense qu’il faut que les acteurs et les spectateurs partagent le même « univers de discours ». C’est selon lui la condition indispensable pour que les individus puissent faire société, et, être dans le même monde social. En effet, il pense que ce n’est ni le partage des mêmes institutions, ni de mêmes valeurs ou de mêmes croyances qui permettent de créer l’unité d’un monde social, mais bien la possibilité pour les membres « d’interpréter de la même manière les situations » (Bonicco-Donato, 2016, p. 114). L’appareillage symbolique est composé de différentes parties : - la façade personnelle : Goffman donne une analyse assez vague de la façade personnelle dans la « Présentation de soi » en s’attachant principalement à décrire le « costume » qui transmet une information sur la personne et sur les tâches qu’elle peut accomplir au cours de la représentation ainsi que sur son statut social. Il approfondit son propos dans « Les relations en public » en mettant l’accent sur la dimension corporelle proprement dite (Bonicco-Donato, 2016) qui révèle « le rôle que l’acteur compte jouer dans la situation présente » (Goffman, 1973, p. 33). Par sa façade personnelle, l’acteur exprime aux autres son positionnement dans l’espace et dans la situation scénique (Bonicco-Donato, 2016, p. 107). À côté du style, il convient donc de prendre en compte la manière de se mouvoir. La façade personnelle met l’accent sur la dimension communicationnelle de l’interaction, mais cela n’est possible que si tous les participants à la scène partagent le même système de significations. Goffman dresse dans « Les relations en public » une typologie des comportements expressifs et cela l’amène à distinguer l’expression corporelle d’orientation de celle de circonspection et d’outrance. La première désigne le comportement de l’individu qui manifeste qu’il se livre bien à l’activité « officielle », c’est-à-dire l’activité normale étant donné le lieu dans lequel il se trouve et ses règles et usages. La seconde expression renvoie au comportement d’un individu qui manifeste le caractère honnête de ses intentions. Le même geste se révélera porteur de messages différents suivant les « scènes » dans lesquelles il se déroule. - le décor qui comprend le mobilier, la décoration, la disposition des objets et d’autres éléments de second plan et les accessoires des actes humains. Il est normalement géographiquement stable. Le décor est considéré comme un prolongement de l’acteur qui peut confirmer aux autres l’impression que l’acteur tente de communiquer par son comportement. Il est soumis aux mêmes principes de cadre spatio-temporel que la façade personnelle. La région Il s’agit de « tout lieu borné par des obstacles à la perception ». La représentation se produit dans une région strictement délimitée. Certains lieux peuvent faire office à un moment de région postérieure et à d’autres, de région antérieure. - La région antérieure est le lieu où se déroule la représentation. C’est le lieu où se déploient certaines normes que l’on peut répartir en deux grandes catégories : - Les normes de « politesses » (façon dont l’acteur traite le public pendant la conversation) et les normes de « bienséances » (façon dont l’acteur se comporte quand il se trouve dans le champ visuel et auditif du public). Ces deux notions sont à mettre en lien avec la façade personnelle : « la manière » est en lien avec « la politesse » tandis que « l’apparence » est en lien avec « la bienséance ».
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Cette arène des proches « n'est pas constituée de gens anonymes et interchangeables, mais de familiers qui se livrent à des débats et des évaluations qui peuvent aller jusqu'à la constitution de savoirs et à la désignation de missions plus légitimes que d'autres » (Pruvost, 2016, p. 331). En se basant sur des réseaux d'interconnaissance, sur les cercles de proche dans et hors travail (familiaux, communautaires, locaux), inhérents à un monde où tout le monde se connaît, les discussions qui s'engagent au sein de cette arène participent à l'émergence de « formes hybrides de savoirs, au carrefour de plusieurs métiers ou d'activités rémunérées, bénévoles, militantes, politiques et familiales » (Ibid. p 339). Ces formes hybrides de savoir se retrouvent dans la pratique de la réhabilitation, du fait que les professionnels concernés sont souvent eux aussi habitants (ayant parfois même réhabilité leur propre maison), engagés dans leur pratique professionnelle ou dans la transmission et l'échange de leurs expériences au sein de cercles multiples (formation de stagiaires, activités d'enseignement, participation à des ateliers, investissement dans des collectifs ou dans des associations autour de la réhabilitation du pisé, de l'écoconstruction ou de la construction neuve etc.). Par exemple, Jean a travaillé dans plusieurs entreprises de la région et réhabilité plusieurs maisons en pisé, chez lui et dans la famille, avant de monter son entreprise de maçonnerie gros oeuvre. Il travaille aujourd'hui en direct avec des particuliers, mais aussi à la demande d'un maître d'oeuvre spécialisé en conception bioclimatique sur des chantiers ou il est amené à croiser des maçons spécialisés terre crue, même s'il ne travaille pas directement avec eux et n'a pas envie de refaire du pisé Il a form plusieurs 310 apprentis qui ont ensuite monté leur entreprise individuelle et avec lesquels il travaille ponctuellement sur certains chantiers. De son côté, Patrick a installé son agence d'architecture dans le village où il a construit sa maison, dans une ancienne grange en pisé. Sa pratique de l'architecture ne se concentre pas vraiment sur la réhabilitation (il travaille dans un organisme de conseil), il a décidé de s'investir personnellement dans un collectif citoyen qui vise à promouvoir l'écoconstruction et la rénovation du patrimoine bâti en pisé en Nord-Isère, collectif au sein duquel il est amené à échanger avec des acteurs professionnels divers. Cette imbrication d'engagements permet une circulation des savoirs de la réhabilitation au sein de « communautés de savoirs » qui ne s'organisent plus seulement selon une « logique de lignée » associée à des groupes restreints, des savoirs privatisés et un phénomène de filiation, mais qui s'oriente vers une « logique de cercle », où des groupes se structurent autour d'une action particulière, contribuant à l'émergence de lieux et d'objets de savoirs distincts (Jacob, 2007). Ces groupes semblent d'ailleurs plutôt se rapprocher de « communautés de pratiques », qui se caractérisent selon Etienne Wenger par un engagement mutuel, une entreprise commune et un répertoire partagé (Wenger, 1998, p. 73). Les collectifs professionnels qui s'investissent dans la réhabilitation du pisé engagent des activités communes qui peuvent faire émerger des relations mutuelles poursuivies amenant à une possibilité de poser rapidement les problèmes, dans un réseau d'interconnaissance qui partage une histoire, un langage et des éléments implicites de connaissance et de jugement (Ibid. p.125), ce qui leur permet d'échanger autour d'un projet ou autour de la constitution de pratiques professionnelles spécifiques. Ces communautés de pratiques ne sont pas seulement cantonnées au chantier et aux professionnels praticiens, en ce qu'elles peuvent engager les maîtres d'ouvrage (dans le cadre d'un projet ou d'une relation qui se poursuit après le projet) autant que des acteurs institutionnels qui s'investissent pour définir ou diffuser des pratiques de réhabilitation. Cette analyse ne signifie cependant pas qu'il n'y aurait qu'une seule communauté de pratique de la réhabilitation du bâti ancien en pisé où tous les savoirs de la réhabilitation circuleraient dans un collectif aux objectifs communs. Il s'agit bien comme nous l'avons vu tout au long de cette thèse, d'une imbrication de communautés de pratiques aux engagements et aux répertoires divergents au sein desquelles les professionnels de la réhabilitation peuvent être plus ou moins mobiles. De plus, plusieurs pratiques sont restreintes à une communauté particulière. C'est le cas de la pratique du diagnostic, qui semble circonscrite à des professionnels revendiquant une approche particulière de l'architecture de terre ou du patrimoine. Ces professionnels affirment d'ailleurs que cette pratique est difficile à transmettre car elle implique une expérience de la variabilité du bâti ancien qui peut difficilement être restreinte à des protocoles, sous peine d'appliquer des solutions toutes faites et non plus des solutions ajustées à un bâtiment. Conclusion du chapitre : Dès les premiers échanges avec les clients puis tout au long de l'intervention dans un projet, les professionnels engagés dans la réhabilitation sont amenés à composer en situation avec la variabilité du bâti ancien en pisé. Il s'agit dans un premier temps d'arriver à saisir les indices permettant d'orienter les habitants dans leurs recherches relatives aux bonnes manières de réhabiliter, dans des échanges qui permettent aussi aux professionnels de transmettre leurs approches du pisé à des clients plus ou moins ciblés du fait des cercles dans lesquels ils s'engagent. Cet « art de la prise » (Bessy, Chateauraynaud, 1995) se poursuit en situation dans les premières rencontres physique avec le bâtiment, dans le cadre de pratiques de diagnostic comme de la pratique du chantier. Les professionnels sont alors amenés à engager un dialogue entre le maître d'ouvrage, son projet, le bâtiment et leur propre expérience professionnelle pour trouver les médiations permettant de circonscrire au mieux les incertitudes qui pourraient persister dans leurs réponses aux questions que se posent leurs clients. La variabilité du bâti ancien en pisé devient 312 le coeur d'une pratique prudentielle (Champy, 2009) qui peut dépasser la simple relation commerciale pour s'apparenter à une relation de service auprès d'un client autant qu'auprès d'un bâtiment. Cette pratique articule ajustements et combinaisons au pied du mur et parfois même avec le mur. Cet art de la combinaison permet alors aux professionnels qui l'exercent d'essayer d'apprivoiser la variabilité du bâti plutôt que de la maîtriser. Les différentes dimensions qui caractérisent cet art de la prise et de la combinaison en situation permettent aux professionnels de s'attacher à des pratiques singulières. Ils doivent cependant aussi composer avec les exigences propres aux mondes de la construction dans lesquels ils 'inscrivent. L'analyse de la manière dont les professionnels de la réhabilitation définissent par défaut les compétences de la réhabilitation fait émerger des mondes polarisés traversés par des tensions relatives à la bonne distance des professionnels à leur objet d'intervention et à la manière d'aborder la variabilité du bâti, entre une appréhension maîtrisée et normalisée et une appréhension sensible, associée à la construction d'attachements. Du fait des engagements individuels des professionnels concernés au sein même de ces mondes polarisés émergent cependant des collectifs professionnels beaucoup plus hybrides qu'il n'y parait au premier abord. 82 Selon Wenger (1998), les communautés de pratiques ne sont pas nécessairement des communautés d'apprentissage. Seules des configurations particulières (qui doivent selon lui être encouragées de l'intérieur comme de l'extérieur de la communauté) peuvent permettre à des communautés de pratiques « potentielles » de devenir des communautés de pratiques « actives » (p.228). Ces configurations doivent favoriser l'engagement des personnes dans la communauté (ouverture aux échange et à la compréhension mutuelle des compétences de chacun, assurance d'une continuité des expériences individuelles), le positionnement des membres (objectifs et principes clairs, méthodes de coordination et de gestion des conflits) et le développement de leur imagination (opportunités d'explorer et de casser les rythmes routiniers). 313 CHAPITRE VII : APPRÉHENDER ET FAIRE APPRÉHENDER COLLECTIVEMENT LA RÉHABILITATION 24 février 2017. Journée d'échange autour du bâti ancien en pisé en région Auvergne-Rhône-Alpes organisée au Musée des Confluences (Lyon) à l'initiative du laboratoire CRAterre-ENSAG et de la région Auvergne-Rhône-Alpes, dans le cadre du projet « Mise en Valeur du patrimoine en pisé en région Auvergne-Rhône-Alpes » financé par le CDDRA Isère, Porte des Alpes. Elle réunit plusieurs acteurs institutionnels, professionnels et associatifs engagés dans la réhabilitation et la mise en valeur du patrimoine en pisé. La première présentation restitue les résultats du projet, organisé autour de cinq activités : capitaliser les recherches existantes, identifier et cartographier le patrimoine en pisé remarquable de la région, repérer le patrimoine en pisé sur le territoire Isère Porte des Alpes et faire émerger ses valeurs patrimoniales, construire une vision d'ensemble des actions de mise en valeur et du réseau d'acteurs, et enfin, faire émerger les besoins des collectivités territoriales en ce qui concerne la gestion de ce bâti. Suite à cette présentation, une discussion s'engage au sein du public : Homme, responsable de la formation chez Oikos Ecoconstruction, membre du réseau Ecobâtir et cofondateur de l'association Tera : J'ai plusieurs remarques. Déjà je voulais vous remercier, notamment au niveau de la recherche, le travail est assez remarquable. Le fait de cartographier le patrimoine et de le quantifier, je trouve ça tout à fait remarquable En revanche, quand il s'agit de coordination des acteurs, je suis un peu gêné, parce que l'association Tera, qui a été créée à l'initiative du réseau Ecobâtir, mais dans un cadre national, avec la DHUP et cetera, elle pour mission de produire du concours technique à destination des artisans et des acteurs Et on n'est pas impliqués dans ce projet là Mais en fait c'est une critique constructive que je fais : si je suis là c'est aussi pour ça Par contre, y'a quelque chose qui m'inquiète énormément, mais là c'est pas CRAterre ou cette journée qui est en cause, c'est au niveau global plus général. Là, je m'adresse aux acteurs publics et aux financeurs : c'est que l'urgence, à mon sens, je prêche pas pour ma paroisse de formateur, mais je pense que ce qui est dramatique par rapport au patrimoine pisé, c'est le manque de compétence des intervenants, des gens qui interviennent sur le bâti. 314 Femme, élue locale : Je fais partie du groupe des élus et je pense que vous êtes un petit peu optimiste quand vous pensez que les élus et les agents municipaux sont informés du patrimoine bâti en terre de leur commune. Moi j'habite une commune sur laquelle le pisé est très présent, personne ne s'y intéresse et on n'a aucun état d'âme pour démolir les maisons et reconstruire dessus! Et je pense que la connaissance du patrimoine bâti en terre est essentielle. Evidemment la formation des artisans est une étape incontournable, mais, si personne ne fait attention au patrimoine qui est sur son territoire, ça sert à rien d'avoir des artisans qui sachent le restaurer. Homme, responsable de la formation chez Oikos Ecoconstruction, membre du réseau Ecobâtir et cofondateur de l'association Tera : Ne vous méprenez pas sur mon intention : je pense que si justement le patrimoine est délaissé, détruit, c'est justement qu'il y a une méconnaissance et que justement les gens au niveau des collectivités territoriales, les acteurs des collectivités, comme ils ne connaissent pas le pisé, quand ils le voient c'est quelque chose du passé qu'il faudrait faire disparaître, c'est un problème à gérer, dont ils ne voient pas le potentiel Donc je ne dis pas qu'il ne faut pas s'adresser à eux. Il faut s'adresser à eux en disant, c'est pas parce que c'est du pisé que c'est fragile. C'est pas parce que c'est du pisé que ça vaut rien, c'est pas parce que c'est du pisé qu'on peut rien en faire. Au contraire, on n'a pas parlé de l'écosystème économique qu'il y a autour du pisé, c'est-à-dire que quand on rénove le pisé, on crée de la valeur et la valeur elle reste locale, sur le territoire, elle s'échappe pas, elle quitte pas le territoire Mais je pense que l'action il faut qu'elle soit sur les compétences de ces techniciens, pour que quand ils voient du pisé, ils ne le dévalorisent pas. On le voit dans cette situation, plusieurs personnes se mobilisent pour que l'action sur le bâti ancien en pisé transcende les communautés de pratiques informelles et singulières de la réhabilitation que nous avons suivies jusqu'à présent. Cet engagement s'articule autour de démarches où le problème de la réhabilitation est posé de différentes manières. Les pragmatistes définissent ce processus de problématisation comme un moment où des personnes « s'inquiètent, s'interrogent, enquêtent, expérimentent et discutent. Elles tentent de définir le 315 problème, d'en déterminer les causes, d'en repérer les facteurs et d'en établir les responsabilités. Elles s'associent et s'organisent, se trouvent des leaders pour faire entendre leurs voix et pour convaincre et mobiliser à grande échelle. Elles prennent la parole, témoignent, mesurent, argumentent, critiquent, délibèrent, interpellent l'opinion et les pouvoirs publics » (Cefaï, 2016, p. 26-27). En interrogeant les évidences, les certitudes et les valeurs admises, le fait de poser les termes d'un problème conduit les acteurs à s'engager et à engager d'autres acteurs dans la constitution d'une prise collective sur ce problème et sur sa résolution (Quéré, Terzi, 2015). Cette dynamique s'attache cependant à des objets différents selon la manière dont on s'engage dans la réhabilitation. Rien que dans la situation précédente, les intervenants font apparaître plusieurs facettes du problème de la réhabilitation : problème de connaissance ou de compétence, problème de valeur, problème d'action territoriale, problème patrimonial ou architectural etc. Le débat s'engage autour de la hiérarchie à établir à propos de ces problèmes et aux modalités d'action permettant de les résoudre, entre coordination, formation, gestion recherche, sensibilisation, information ou revalorisation. Cette priorisation concerne également les publics à engager, qu'il s'agisse des acteurs légitimes pour prendre part au débat sur les actions à mettre en oeuvre (institutions, collectivités locales, associations, professionnels, laboratoires de recherche etc.) ou des destinataires de ces actions (élus, professionnels, habitants, techniciens etc.). La problématisation de la réhabilitation du bâti ancien en pisé se construit alors différemment selon les acteurs qui la portent, les arènes dans lesquelles elle s'exprime et les publics auxquels elle est destinée, au coeur de la pratique quotidienne du travail, dans la sphère militante et associative, dans la mise en oeuvre de politiques publiques ou dans la volonté de coordonner l'ensemble des acteurs engagés dans des activités de réhabilitation. Cette sélection n'est bien entendu pas exhaustive, le but de ce travail n'étant pas de recenser l'ensemble des démarches collectives qui s'organisent autour de la réhabilitation mais d'analyser en quoi ces démarches mettent la pratique de la réhabilitation à l'épreuve. J'ai donc sélectionné, parmi les démarches auxquelles j'ai pu avoir accès, des expériences qui me paraissaient apporter un éclairage sur différentes manières de problématiser la réhabilitation du bâti ancien en pisé. 316 A - Des professionnels militants : partager l'expérience de la réhabilitation Certains professionnels se mobilisent tout d'abord dans leur pratique quotidienne, au sein même des communautés de pratiques qu'ils traversent, pour favoriser l'émergence de questionnements sur les pratiques de réhabilitation. Ces professionnels construisent ou intègrent différents dispositifs qui leurs permettent de partager leurs attachements à la réhabilitation, dans une forme de « militantisme du quotidien » où « il ne s'agit pas seulement de vivre et de travailler autrement, mais de participer à la promotion d'un mode de vie, pensé comme étant généralisable. Cet engagement prend la forme de la transmission pédagogique de son savoir-faire et de ses idées. Cette activité est intégrée à l'emploi du temps telle une activité légitime et nécessaire » (Pruvost, 2013, p. 43-44). Les professionnels concernés ne se contentent d'ailleurs pas d'associer engagement professionnel et engagement personnel pour la promotion d'autres approches de la réhabilitation. Ils revendiquent une association intime entre savoirs théoriques et savoirs d'action, dans la mise en pratique concrète et quotidienne du positionnement éthique qu'ils revendiquent dans des arènes militantes. 1) Militer dans le travail : faire passer une manière d'être et de faire dans la pratique quotidienne Ce qui est important pour nous, c'est d'avancer dans le travail. On a fait plus pour la réhab que si on avait écrit des grands bouquins. On fait parce qu'on est sur le terrain m'expliquait un artisan, investi de longue date dans une pratique de la maçonnerie qu'il qualifie avant tout d'humaine et de relationnelle. Le contexte dans lequel je l'ai rencontré n'est d'ailleurs pas anodin. Ce n'est pas sur un chantier ou dans le cadre d'une rencontre professionnelle que nous avons échangé, mais à l'occasion d'une journée d'étude organisée au Musée Dauphinois de Grenoble autour de l'anthropologue Tim Ingold, qui développe une approche anthropologique des liens que nous tissons avec notre environnement (Ingold, 2011 ; 2013). La volonté d'être sur le terrain affichée par ce professionnel ne traduit pas une opposition entre savoirs théoriques et savoirs pratiques, mais plutôt une volonté, partagée par d'autres professionnels, de mettre sa conception de ce que devrait être l'activité constructive au travail, au sens propre du terme, dans sa pratique quotidienne. Plusieurs des professionnels que j'ai rencontrés au fil de mes enquêtes revendiquent une pratique professionnelle qui ait du sens, dans une définition du métier artisanal proche de celle analysée par Richard Sennett (2009). Que ce soit à travers une approche constructive de l'architecture ou dans une pratique réflexive de la prise en situation, ces professionnels mettent en avant leur capacité à penser dans l'acte de faire. Ils développent une activité technique ancrée dans une pratique de la réhabilitation qui ne considère pas le bâti comme un élément extérieur qu'il faudrait gérer par le biais de l'intervention, mais comme un membre à entière du milieu associé à leur activité technique, pour reprendre les termes de 317 Simondon (2012). Dans cette perspective, leur savoir et leur pratique se construisent en même temps qu'ils interviennent sur le bâti. Cette approche relationnelle ne s'applique d'ailleurs pas seulement au travail professionnel. Elle suppose une pensée des bâtiments en pisé comme des habitats en relation avec leur environnement, et appelle à retisser, par la pratique, des relations entre les hommes et leur cadre de vie en valorisant conjointement qualité d'habiter et qualité de travailler. Ces professionnels s'opposent notamment au fait que « les objets que nous utilisons, les édifices que nous habitons, n'émettent plus les signes permettant de les connecter à une géographie, à une culture singulière, à une spatialité loquace de son origine et de son histoire » (Ruchon, 2016, p. 131). En revendiquant de préserver la diversité du bâti, de ses habitabilités et de ses professionnalités, ils se positionnent contre une uniformisation des modes de construire qui serait favorisée par l'industrialisation et la normalisation et couperait les liens entre les hommes et le monde qu'ils habitent. Mettre cette approche à l'épreuve du travail quotidien conduit ces professionnels à développer une pratique qui attire l'attention des collectifs professionnels et des collectifs de projets au sein desquels ils sont investis (clients, collègues, stagiaires etc.) sur le bâti ancien en pisé comme espace de relations. La première dimension de cet espace de relation est le bâti lui-même, considéré comme un système vivant qui interagit avec le milieu naturel et humain dans lequel il s'intègre. Par exemple, au sujet de l'isolation, l'un de ces professionnels m'expliquait que l'enjeu n'était pas de savoir s'il était bon ou pas d'isoler le bâti, mais d'avoir conscience que certaines solutions d'isolation coupent physiquement le lien entre le bâtiment et l'environnement extérieur. Ne pas isoler ou isoler avec des matériaux qui favorisent la respiration du bâti (transferts d'humidité par exemple) et qui conservent ses qualités d'inertie permettrait alors de préserver les apports d'un milieu variable (le bâti réagissant différemment selon les apports solaires et la température extérieure). Il s'agissait également selon ce professionnel de ne pas déléguer la question du confort thermique à des systèmes (isolation, ventilation, chauffage) qui permettraient de conserver une température constante à l'intérieur de la maison, mais d'habiter la maison en lien avec l'environnement qui l'entoure (apprécier et profiter au mieux des apports solaires, d'un système de chauffage qui chauffe la masse des murs plutôt que l'air ambiant et vivre différemment le confort de sa maison selon les saisons). Cette qualité d'habiter s'éprouve dans la pratique même du chantier. Cette pratique est une manière de se reconnecter au bâti, en trouvant les prises sur ce dernier et en aidant les maîtres d'ouvrage à les appréhender, par des échanges soutenus, voire par leur engagement physique dans les travaux de réhabilitation. De l'autre, ils cherchent à favoriser les prises du client sur sa maison, qu'il connaîtra mieux et qu'il pourra donc peut être mieux habiter du fait qu'il a lui-même participé aux travaux. Militer dans le travail, c'est vouloir partager ses connaissances et ses prises sur le bâti ancien, prendre le temps de prendre du recul par rapport au mur et d'expliquer ce que l'on fait, comme nous l'avons vu dans le chapitre précédent, pour redonner de la valeur aux savoirs constructifs et permettre aux collègues comme aux clients de mieux les appréhender. Pour ces professionnels, ce partage de connaissance ne peut cependant pas se faire hors sol, à travers des programmes d'information ou de sensibilisation qui ne passeraient que par le discours oral ou écrit. Même si certains d'entre eux sont engagés dans des cercles citoyens, militants, scientifiques ou artistiques et n'hésitent pas à nourrir leur pratique professionnelle de la pensée d'intellectuels comme Tim Ingold, Gilbert Simondon ou Ivan Illich, ils restent attachés à transmettre et à mettre à l'épreuve cette pensée dans l'espace de la pratique, afin que chacun puisse faire lui-même l'expérience de la prise. La pratique professionnelle doit être l'occasion d'activer un espace de relation au sein des équipes, avec les clients/participants au chantier et avec le bâtiment lui-même. La pratique du chantier permet également à ces professionnels d'entretenir la relation qu'ils tissent avec le bâti en s'engageant personnellement dans les travaux de réhabilitation. Il ne s'agit pas seulement d'observer et de prescrire de loin une approche de la réhabilitation, mais de pratiquer physiquement la relation au bâtiment, en tant qu'artisan, dans une épreuve toujours renouvelée de la prise du corps avec la matière qu' transforme. Les projets individuels de réhabilitation apparaissent alors comme un lieu privilégié d'une pratique sans cesse renouvelée, pour leur capacité de « sur-prise » et l'espace de jeu avec les normes qu'ils laissent entrouvert. Ces projets favoriseraient ainsi plus que d'autres espaces comme les chantiers publics ou la construction neuve l'expression d'une intelligence du chantier, qui peut être aussi investie par ces professionnels à travers d'autres pratiques de l'écoconstruction (construction en paille ou en terre crue par exemple). 2) Faire de notre maison un lieu de formation et d'échange : le chantier personnel comme espace d'échange de savoirs Pour d'autres professionnels, militer au quotidien implique avant tout un engagement habitant au sein des lieux qu'ils pratiquent, à commencer par leur propre maison. C'est ainsi que Fabian et Valérie se sont lancés dans le négoce de matériaux de construction, après une première phase de réhabilitation de leur maison en pisé, réalisée avec les ressources trouvées dans les négoces de la région, sans forcément s'interroger sur le pisé ou utiliser des matériaux particuliers. Alors que leur projet était déjà bien avancé, Fabian a réalisé un stage sur la construction en béton de chanvre auprès d'Yves Kühn84, qui a transformé son approche de la réhabilitation. Le couple a donc entrepris de refaire entièrement les travaux réalisés sur la maison avec des matériaux plus naturels. Ils ont alors observé que ces matériaux et les techniques qui y étaient liées étaient relativement mal diffusés auprès du grand public. Fabian avait des connaissances en informatique. Il a donc entrepris de réaliser un site internet pour ouvrir l'accès à ces matériaux, tout en se formant lui-même à la maçonnerie et en développant un premier négoce de chaux et de chanvre, Alliance 4. Sur le site internet sont décrits les matériaux disponibles, mais aussi des procédés de mise en oeuvre, sous la forme de fiches techniques élaborées par le couple. Ces fiches sont basées sur des techniques apprises auprès d'autres autant que sur leur propre expérimentation de ces techniques. Le fait qu'ils proposent de la chaux leur a permis de rencontrer Frédéric, dont l'entreprise est basée à proximité. Il les a aidés à s'initier à la construction en terre et les a encouragé à propos à la vente de la terre à pisé et de l'argile qu'ils extraient directement de leur terrain. Dans chaque pièce de la maison, différentes techniques ont été testées pour le revêtement des murs, l'isolation ou l'étanchéité à l'air. Une des granges accolée à la maison sert d'espace de démonstration : on y trouve par exemple un mur écorché, qui permet d'observer différentes phases de mise en oeuvre d'un solivage et d'enduits. A une époque, ils organisaient aussi des journées de sensibilisation, mais Fabian n'est plus convaincu par cette méthode : la sensibilisation et l'information, c'est inutile, car ça ne se traduit pas dans l'action, c'est beaucoup d'énergie dépensée pour rien. Son objectif est avant tout de montrer par l'exemple la facilité de mise en oeuvre et de diffuser l'information sur les savoirs existant, parce qu'il faut quand même faire, les gens ils doivent vraiment réaliser tout seul. Il faut se donner du mal quand même. Il met le maximum d'informations sur le site internet et accompagne certains clients sur les chantiers, du fait de la formation de maçon qu'il a suivie. Le couple organise également des journées de stage adressées aux auto-constructeurs souhaitant approfondir des mises en oeuvre. Cette pratique conduit l'entreprise à cibler une clientèle de professionnels à la recherche de matériaux spécifiques et de particuliers qui ont envie de s'investir dans les travaux : 84 Yves Kühn pourrait faire partie des artisans-intellectuels-militants dont nous venons de décrire l'approche : « inventeur d'un procédé de maçonnerie en béton de chanvre [] nourri aux pensées du philosophe Rudolf Steiner et de l'architecte Imre Markovecz [] paysan dans la Drôme, bâtisseur dans le Vaucluse, professeur à l'école de l'architecture et du patrimoine d'Avignon et patron de thèses à l'université de Paris-La Villette » (Miguet, 2003) 320 Nous on attire plus des miséreux, pas comme d'autres vendeurs, qui ont des produits tout prêts, tout propres, eux c'est plus des bourgeois! Déjà il faut venir ici, c'est tout sale, c'est beatnik, mais c'est pas cher. Y'a un positionnement marketing, le prix, l'endroit, le site Moi je suis toujours parti du principe que je voulais pas être grand public, parce qu'en fait c'est le début des emmerdes. Parce qu'en fait, celui qui est motivé, il est capable d'aller là-dedans et de gérer les problématiques. Il faut pas quelqu'un d'assisté, parce que s'il est assisté, il va embêter le vendeur. Ici, il faut avoir envie de venir, de prendre les matériaux, de faire un effort. Ceux qui vont venir, c'est ceux qui auront envie. Fabian, négociant en matériaux de construction Les objectifs et les principes de l'entreprise sont ainsi clairement exprimés : Fabian et Valérie ne sont pas là pour donner des recettes ou des solutions toutes faites, mais pour accompagner des personnes qui ont déjà une première réflexion sur leur pratique en leur donnant les moyens techniques et matériels de faire face aux épreuves de réhabilitation. Si cette approche peut conduire à ne toucher qu'un petit nombre d'initiés, il apparaît pourtant que l'entreprise est progressivement devenue un lieu ressource où beaucoup d'habitants et de professionnels viennent s'approvisionner, se former ou se renseigner 85. Autour de la maison en pisé réhabilitée par le couple se sont ainsi progressivement construits depuis 2005 une activité professionnelle et un espace local d'échange de savoirs où se croisent des habitants et des professionnels très diversifiés, activité qui s'insère dans un réseau amical tissé au fil des rencontres permises par leurs activités professionnelles comme personnelles. Ce statut de lieu ressource n'est cependant pas spécialement revendiquée par Valérie et Fabian qui préfèrent valoriser une approche qui vise à « démocratiser les savoirs constructifs », par des coûts maîtrisés, la mise à disposition d'outils et de fiches techniques, la formation et le maintien d'un lien fort à la pratique et au terrain (Alliance 4, [s.d.]). D'autres professionnels revendiquent quant à eux clairement le fait de faire de leur maison un lieu ressource. C'est le cas de Martin et de Mathilde, tous deux architectes et formateurs qui ont décidé de faire de leur projet de réhabilitation d'une imposante grange située sur la commune de Paladru un lieu d'échange et de formation autour des techniques de rénovation du pisé. L'investissement de ces deux professionnels sur le sujet n'est pas réc : ils se sont tous deux rencontrés au sein de la SCOP Caracol Ecoconstruction, entreprise spécialisée dans la construction en terre crue active en Nord-Isère de 2005 à 2014. L'entreprise avait notamment entrepris la constitution d'un « pôle formation et sensibilisation » où ses membres se positionnaient en tant qu'« artisans formateurs » (Béguin, 2010, p. 21-22). Leur vision de l'apprentissage, reprise par Mathilde Béguin en 2010 dans son mémoire intitulé Savoirs en construction implique que « c'est l'apprenant lui-même qui construit activement des savoirs ». Pour ces professionnels, la transmission des savoirs et des connaissances s'opère par l'acte de faire, en laissant Nous en avons croisés quelques-uns (Gilles, Manuel, Pierre, Xavier, Jocelyn, Frédéric notamment) au fil des descriptions de parcours qui ont émaillé cette thèse 321 une place importante « à l'imagination (invention) et à l'autonomie (découverte) de l'apprenant » (Ibid., p.11). En 2016, la réhabilitation de leur grange donne aux deux architectes l'occasion de poursuivre cette dynamique de formation. Ils construisent leur chantier comme un espace pédagogique où s'articulent des formations, des chantiers application, des visites et des échanges à destination des particuliers et des professionnels. Il s'agit de créer un lieu identifié comme tel sous la dénomination de la « Grange Sonnière » (nom du lieu-dit sur lequel se situe la grange) qui soit un espace d'échange « pour transmettre les savoir-faire liés à la restauration du patrimoine en pisé et plus largement de diffuser les connaissances autour de la construction contemporaine en terre » (Béguin, Pointet, 2016). Les formations intègrent systématiquement des ateliers pratiques où les participants sont amenés à faire eux-mêmes l'expérience de la manipulation des matériaux (notamment de la terre crue) et du bâtiment, tout en permettant petit à petit au projet de réhabilitation de la grange d'avancer. Les chantiers application visent à construire la transmission des savoirs comme un « échange équitable entre les propriétaires et les apprenants. Un temps de formation théorique est dispensé aux apprenants en échange de leur participation active sur le chantier » (Ibid.). Les rencontres interprofessionnelles sont ouvertes aux professionnels du territoire. Elles « ont pour objectif de créer un réseau local et de faire monter en c ence les professionnels du territoire intervenant sur le bâti en pisé » (Ibid.). Les professionnels qui participent à ces rencontres travaillent ainsi autour d'une prise collective, à la fois technique et organisationnelle, sur la réhabilitation (échange autour des pratiques de diagnostic, formation, rénovation énergétique etc.). L'idée est de constituer un réseau d'échange d'expériences qui permettrait de capitaliser et de faire émerger des questionnements sur les pratiques des uns et des autres. Ces deux démarches visent chacune à répondre, à des échelles différentes, au constat fait par leurs porteurs selon lequel les savoirs de la réhabilitation ne seraient pas suffisamment accessibles auprès des particuliers comme auprès des professionnels, ou du moins pas suffisamment partagés. 3) Quand y'aura des morts dans les maisons en pisé, ça fera pas une bonne pub : transmettre son expérience du pisé dans l'arène publique D'autres acteurs considèrent que l'un des problèmes de la réhabilitation du pisé est que le public (sous-entendu la majorité des professionnels et des particuliers) n'a pas accès aux bonnes informations pour savoir comment réhabiliter. Ces acteurs se mobilisent alors dans différentes arènes, dans l'objectif de venir interroger les évidences de la pratique ordinaire du bâti ancien. Certains professionnels comme Jérémy Cohen (maçon spécialisé dans la réhabilitation de l'habitat ancien) prennent le contre-pied de la profusion d'informations contradictoires que chacun peut trouver sur internet quand il cherche à savoir comment réhabiliter. La première page de son site internet précise d'ailleurs que : « Si vous êtes arrivés ici, c'est que vous cherchez soit des informations techniques sur la restauration des bâtiments anciens, soit un professionnel qui saura répondre à vos attentes et travailler dans les règles de l'art. J'ai créé ce site il y a quelques années pour pallier au manque d'informations, ou pire, aux mauvais conseils que l'on peut trouver dans les abysses de l'internet concernant la bonne restauration de nos vieux bâtiments » (Cohen, 2018). Au-delà de la présentation de son activité professionnelle, le site internet intègre un blog dans lequel l'artisan publie régulièrement « des articles pédagogiques sur différents points techniques de la rénovation / réhabilitation, qui composent également un récit d'expérience personnelle que j'ai souhaité partager avec le plus grand nombre » (Ibid.). Ses articles sont agrémentés de nombreuses photos et vidéos de mises en oeuvre. Ils mettent en scène une approche personnalisée de la réhabilitation qui se traduit notamment dans le titre de certains articles (Ma maison en pisé est-elle saine? Que dois-je vérifier avant d'acheter ma maison en pisé? Comment réalise-t-on un enduit sur une façade en pisé dans les règles de l'art? etc.), qui visent clairement à faire échos aux inquiétudes des particuliers relatives à l'état de leur bâtiment. D'autres professionnels se mobilisent dans leur pratique professionnelle quotidienne pour attirer l'attention sur les spécificités du bâti ancien en pisé. L'architecte et expert judiciaire Pascal Scarato est localement un exemple emblématique de cet activisme 86, du fait de la durabilité de son engagement sur la question depuis les années 1980 (Scarato, 1982 ; P. Scarato, 1984 ; Scarato, 2014 ; Scarato, Jeannet, 2015). Selon lui, il est nécessaire de transmettre auprès des différents acteurs intervenant sur le pisé une connaissance de l'architecture de terre et de son fonctionnement, afin d'éviter les sinistres qui touchent 86 Aux côtés de plusieurs autres professionnels et organisations comme le CRAterre, le CAUE, Maisons Paysannes de France etc. ces bâtiment et les coûts humains, financiers et patrimoniaux qui leurs sont associés. Il opère cette transmission à plusieurs échelles. Après un mémoire de fin d'études en architecture sur Les conditions de la réhabilitation des architectures en pisé (1982), il monte son agence d'architecture, au sein de laquelle il se spécialise progressivement sur la pratique du diagnostic technique et architectural du pisé. Cette pratique lui permet de devenir expert judiciaire auprès de plusieurs tribunaux de la région, expertise qu'il exerce également à la demande de propriétaires privés ou de professionnels, dans le cas de sinistres et de constats avant travaux (Avons-Bariot, 2016). Cette pratique professionnelle assez spécifique lui a permis de développer une expérience importante de la pathologie des bâtiments en pisé et des phénomènes pouvant conduire à la dégradation de ces bâtiments. Elle lui permet de rencontrer de nombreux particuliers, professionnels, experts d'assurance et membres de collectivités locales qu'il s'agit selon lui de diffuser son expérience des phénomènes pouvant conduire à la dégradation du pisé et des systèmes architecturaux permettant de les éviter. Quand je me retrouve en expertise devant des gens dont la maison a été effondrée, où une entreprise a été mise en cause, y'a des experts, y'a des avocats, y'a beaucoup de gens à convaincre », m'expliquait-il. Pour favoriser ce travail de persuasion, il a réalisé plusieurs fiches et monographies de bâtiments, réunies sous la forme d'un Cahier d'expert (Scarato, Jeannet, 2015), qu'il apporte avec lui pendant ses expertises et ses diagnostics, de façon à rendre ses explications plus tangibles. Il expose également son travail d'analyse dans plusieurs publications et conférences, notamment des publications professionnelles comme la revue de l'Agenc Qualité Construction (Heitz, 2014) ou la Revue Experts (Scarato, 2014). Dans cette dernière, il se fait d'ailleurs porte-parole des murs en terre, les faisant parler à la première personne pour qu'ils racontent leur histoire : « Oui, nous sommes constitués d'un matériau tendre et fragile, car provenant de terres locales. [] Mais c'est ce qui fait nos ressemblances et en même temps notre grande diversité. [] De nombreuses solutions inadaptées ont été mises en oeuvre quand le savoir-faire a été perdu par la plupart des intervenants, provoquant de nombreux sinistres majeurs. Cette mise en scène du bâti en pisé vise à attirer l'attention sur les principaux problèmes observés par Pascal Scarato dans sa pratique professionnelle, pratique qu'il met sur le devant de la scène à travers des présentations qui prennent la forme de récits d'expérience. Ces récits lui permettent de faire ressortir son vécu du bâti ancien en pisé, mettant un point d'honneur à prendre le contre-pied de ce qu'il considère comme des idées reçues pour attirer l'attention sur des aspects qu'il n'estime pas suffisamment considérés : 324 Donc, là on a un cas particulier, une maison qui s'effondre (Figure 66). Dans cette expertise dans cet effondrement, y'a tout. Donc je vous liste les faits. En janvier 2014, la maison s'effondre. On le voit sur cette photo, prise le jour de l'effondrement, il y a un échafaudage. Une entreprise est venue pour piquer l'enduit et le refaire. L'entreprise vient, met son échafaudage, tape sur le mur. Ils entendent craquer, ils descendent de l'échafaudage, le chien aboie, l'enfant qui était dans la maison sort, et là, la maison s'effondre []. Donc moi j'arrive, et j'arrive sur un gros tas comme ça. C'est pas facile d'aller trouver les causes [] d'un effondrement, les responsabilités quand on a un gros tas comme ça. [Mais c'est] ce que me demande le juge! Donc je suis allé dans StreetView [service de navigation virtuelle de Google] et j'ai eu la chance de trouver une image de la maison six mois avant, parce que la maison est en bord de route []. Sur la photo de gauche, les façades étaient complètement fissurées [] on a l'enduit qui est ouvert et y'a la végétation qui pousse. Autre chose, qui est intéressant, sur cette maison, on le voit peut être pas bien : injection de résines tout autour de la maison, il y a vingt ans, pour l'humidité. Vous voyez le résultat vingt ans après, ça a vachement bien marché! [] Donc on a fait raser la maison [] Dans le cadre d'une expertise, il y a des parties qui sont mises en cause. Donc ici, il y a une route [qui a été] rehaussée il y a quelques années. Donc je fais mettre en cause l'entreprise qui a fait les travaux de rehaussement des routes, et la communauté de communes qui a commandé les travaux. Ce que je veux dire, c'est que quand on parle des acteurs de la construction en terre, on parle souvent des artisans. Je suis fils de maçon, mais je pense qu'il n'y a pas que les artisans qui sont concernés par la construction en terre. Quand il y a des mises en causes, on peut mettre en cause le géomètre qui a tracé la rehausse de routes, l'agence immobilière qui a vendu la maison, les artisans qui sont intervenus, les élus qui ont décidé, les experts d'assurance qui ont pas vu le problème Donc j'aimerais montrer que dans les acteurs de la construction en terre y'a pas que les artisans. [] Je commence à lister tous les sinistres que je rencontre, là j'arrive à 130 87. J'évalue à peu près à 2000 sinistres, non à peu près 2000 disparitions de murs en terre en Rhône Alpes. Sur ces sinistres, une maison sur deux, il y avait des gens dans la maison avant l'effondrement. [] je veux dire que, quand y'aura des morts dans les maisons en pisé, ça fera pas une bonne pub! [] On dit : on connaît le patrimoine, on connaît ses pathologies. Moi je dis, revenons peut être aux acquis sur le patrimoine. J'entends toujours « le bon chapeau et les bonnes bottes » [expression fréquemment utilisée pour souligner le fait qu'une maison en pisé doit avoir un toit et un soubassement qui jouent chacun leur rôle]. Je l'utilise parfois, mais ce n'est pas suffisant! N'expliquons pas le patrimoine en disant « bon chapeau, bonnes bottes » et on passe à autre chose [sans analyser le mur dans son ensemble]. Quand j'entends qu'une maison s'est effondrée parce qu'il y avait de la laine de verre à l'intérieur, je me dis que l'analyse, il faut peut-être aller un petit peu plus loin que ça Et une maison, qui est enduite au ciment Y'a combien de maisons qui sont enduites au ciment en Rhône Alpes, qui n'ont pas de problèmes? Alors [quand il y en a une qui tombe], c'est à cause de l'enduit ciment. J'aimerais qu'on aille un petit peu plus loin au niveau de l'analyse. Le pisé ne tombe jamais d'en haut, il tombe quand c'est cuit dessous. Si vous avez du pisé au ras du sol, par exemple, sans soubassement, l'humidité va dedans et ça arrive à tomber. Figure 66. Support de présentation utilisé par Pascal Scarato pour appuyer son discours. Extrait de « Pour en finir avec les sinistres - maisons en terre ». 5e Assises nationales de la construction en terre crue. Université de Strasbourg IUT Robert Schuman. Disponible sur : < http://www.canalc2.tv/video/12981 > (consulté le 17 mai 2018). 326 En décrivant ainsi sa pratique de la réhabilitation, l'architecte met en exergue plusieurs points qui font que, selon lui, la majorité des intervenants n'appréhende pas la réhabilitation de la bonne manière. Tout d'abord, à travers le récit d'une situation d'expertise consécutive à un sinistre, il montre comment ses méthodes d'analyse lui permettent de rechercher des indices pour appréhender au mieux les causes de l'effondrement. Au vu de la flagrance de certains de ces indices, il pointe le fait que ces sinistres pourraient être mieux appréhendés, pour éviter des dégâts irréparables, particulièrement parce que beaucoup des maisons sur lesquelles il intervient sont des maisons habitées. En revenant sur la diversité des acteurs qui peuvent être mis en cause dans ce type de sinistres, il souligne également que le public concerné par la question de la réhabilitation est beaucoup plus large qu'il n'y parait. Il pointe l'intérêt de développer un savoir analyser, dans un engagement qui prend la forme d'un service à rendre à ce public autant qu'au bâti lui-même. Lorsqu'il souligne que quand il y aura des morts dans les maisons en pisé, ça fera pas une bonne pub, Pascal Scarato prend le contre-pied des pratiques qui visent à mettre en visibilité les qualités des architectures de terre telles que nous les avons analysées dans le chapitre IV. Selon l'architecte, le public de la réhabilitation est avant tout composé de personnes qui interviennent au quotidien sur le bâti ancien en pisé, personnes qui sont de ce fait confrontées à des risques qu'il s'agit d'expliciter pour qu'ils puissent s'en prémunir, en comprenant la nécessité de faire appel à des professionnels disposant du savoir analyser qu'il préconise. Il ne s'adresse cependant pas en ces à n'importe quel public, mais à un cercle de professionnels de la construction en terre crue dans lequel il s'inclue lui-même, en leur proposant de prêter plus attention aux raccourcis qui peuvent être faits dans leurs analyses du bâti. L'aspect sensationnel des effondrements qu'il décrit vise à toucher ses collègues autant qu'il peut être lui-même touché par ces situations. En mettant en avant la violence que peuvent revêtir certains aspects de la réalité du bâti en pisé, il souhaite aussi remettre en question les acquis qui la concernent, pour mettre l'accent sur sa complexité. Ce positionnement lui permet aussi de mettre en avant la nécessité d'une expertise de terrain, qu'il estime nécessaire pour dépasser la simplification du réel que l'on peut retrouver dans certains documents de conseils et de sensibilisation. Chacun à leur échelle, Pascal Scarato et Jérémy Cohen (parmi bien d'autres acteurs de la réhabilitation) tentent, en partageant leurs expériences individuelles, de déplacer le regard des habitants comme des professionnels sur leurs pratiques et leurs approches de la réhabilitation. En partageant leurs expériences au sein d'arènes (internet, groupes d'experts, publications) où ils se ménagent une place sur mesure, ces professionnels agissent comme des lanceurs d'alerte 88, réagissant à leur sentiment que 88 L'expression de « lanceur d'alerte » a été élaborée à l'origine dans le cadre d'un programme de recherche sociologique sur la question des risques. « Il s'agissait de désigner les personnages qui, en s'évertuant à faire reconnaître un danger ou un risque émergent, rencontraient toutes sortes de difficultés cognitives (faire comprendre de quoi il retourne) et politiques (être entendu et obtenir des enquêtes ou des dispositions) [] Les acteurs qui lancent des alertes ne visent pas, dans un premier temps au moins, une dénonciation ou une critique radicale du "système", mais espèrent voir leur message repris par d'autres [] Le lancement d'alerte est un acte de vigilance active. Il se produit quotidiennement dans toutes sortes d'activité et de milieux, dans le but 327 certains aspects de ces expériences ne sont pas suffisamment abordés dans ces arènes. Jérémy Cohen vise à pallier l'absence d'information fiable et vérifiable sur internet en utilisant les outils du web pour proposer un accès à une expérience éprouvée sur le ch , expérience qu'il estime nécessaire de porter à la connaissance du public dans une perspective d'intérêt général. Pascal Scarato estime quant à lui que l'attention donnée au bâti ancien est trop peu présente dans les débats sur l'architecture de terre, alors que ce sujet est pour lui d'intérêt public, du fait du nombre de bâtiments et du risque qui les concerne. La communauté des professionnels de la terre crue focaliserait selon lui trop son attention sur la construction neuve et sur des techniques de mise en oeuvre ne prenant pas suffisamment en compte les logiques architecturales propres au bâti ancien. Qu'elles soient portées par des professionnels militants, habitants ou lanceurs d'alertes, qu'elles visent à favoriser au quotidien les prises sur la réhabilitation, le partage des savoirs ou la transmission d'information, ces mobilisations contribuent, chacune à leur échelle (sur le chantier, dans des lieux ressources, dans des espaces publics) à engager différents publics dans des espaces de discussion autour de la pratique de la réhabilitation. Ces mobilisations semblent cependant restreintes à des initiatives individuelles qui, si elles commencent à faire émerger des lignes qui tissent des liens entre plusieurs communautés de pratiques, ne forment encore qu'un maillage relativement dispersé. Ce maillage se construit notamment en dehors d'arènes associatives ou institutionnelles plus classiques qui revendiquent elles aussi leur place dans la constellation des acteurs de la réhabilitation. Pour certains des professionnels qui militent pour une mise à l'épreuve quotidienne de la réhabilitation, cette posture est clairement revendiquée. Ces professionnels affirment notamment que l'expérience de terrain et son analyse est la seule manière de faire avancer les choses, certains d'entre eux rejetant même toute initiative organisationnelle, considérée comme une perte de temps. D'autres professionnels militants ont cependant une position plus nuancée et associent leur engagement quotidien à l'intégration dans des collectifs professionnels plus ou moins structurés. Jérémy Cohen s'est par exemple associé au collectif Matière Première, qui rassemble plusieurs artisans installés dans l'Avant-Pays-Savoyard qui mêlent leurs compétences selon les chantiers et se mobilisent sur des événements locaux pour transmettre leurs d'empêcher qu'un processus ne se révèle fatal » (Chateauraynaud, 2013) 328 connaissances autour de la construction écologique et de la réhabilitation du pisé. L'artisan est également érent de l'association Tera. Martin Pointet est quant à lui salarié à temps partiel de l'atelier amàco et s'investit dans le conseil d'administration de l'association Asterre, qui était l'organisatrice de la conférence dans le cadre de laquelle Pascal Scarato est intervenu. 1) Faire émerger les problèmes que se posent les acteurs de la réhabilitation Cette réflexion collective s'organise surtout parmi les acteurs qui s'engagent pour mettre en visibilité les spécificités du bâti ancien et de l'architecture de terre et qui revendiquent une approche singulière de ces spécificités. Ces acteurs se retrouvent régulièrement au sein des associations qui rassemblent les professionnels de la terre crue (par ex. Tera, Asterre ou CRAterre), les acteurs du bâti ancien (par ex. Maisons Paysannes de France) ou de l'écoconstruction (par ex. Oikos ou Ecobâtir), mais aussi dans le cadre de réunions organisées régulièrement par l'un d'entre eux. Ces temps d'échange peuvent être plus ou moins formels, depuis la discussion entre plusieurs professionnels oeuvrant sur un même territoire jusqu'au colloque international rassemblant praticiens, scientifiques et acteurs institutionnels. Ils peuvent être organisés à l'initiative d'un acteur moteur qui rassemble plusieurs institutions aux mandats distincts ou s'ancrer dans les réunions régulières d'un groupe constitué en collectif ou en association. Si certaines de ces rencontres mettent clairement en discussion la question de la réhabilitation du bâti ancien en pisé, la plupart d'entre elles l'intègrent comme une question parmi d'autres des problématiques de la construction en terre crue, du bâti ancien ou d'un positionnement alternatif dans l'acte de bâtir. Les réseaux existants sont en effet focalisés sur l'un ou l'autre de ces termes, et ce sont plutôt les acteurs de la réhabilitation qui circulent entre ces réseaux en y faisant émerger les problèmes spécifiques par lesquels ils sont affectés. Dès les années 1980, des collectifs comme le Groupe pisé de l'Ain, CRAterre ou Pisé, terre d'avenir rassemblent artisans, architectes, chercheurs, habitants et institutions intéressés par la connaissance du pisé et le développement d'une réflexion sur son entretien et sa restauration (CAPEB, Groupe Pisé, CAUE de l'Ain, 1980 ; CAUE de l'Ain, Groupe Pisé, 1983 ; CAUE de l'Ain, 1983 ; Henry, Guillaud, Doat, et al., 1983 ; Jeannet, Pignal, Scarato, 1996). Des colloques sont également organisés à cette époque autour de la « restauration » ou de la « réhabilitation » du patrimoine en terre crue (Hardouin-Fugier, Michel, 1987 ; Monnier, Gohel, Rioult, 1991). Cette dynamique se poursuit dans les années 2000 avec trois « Echanges transdisciplinaires sur les constructions en terre crue » (de Chazelles, Klein, 2003 ; Guillaud, de Chazelles, Klein, 2007 ; de Chazelles, Klein, Pousthomis, 2011) qui rassemblent eux aussi chercheurs, architectes, ingénieurs, conservateurs du patrimoine et praticiens de la construction en terre crue. Plus récemment, l'ENTPE et l'association Tera ont été à l'initiative de deux journées d'échange entre scientifiques et professionnels sur la construction en terre crue (2014 et 2018) où les questions de réhabilitation n'ont pas manqué d'être évoquées par les participants. En 2013 et 2014, CRAterre a aussi organisé des séminaires visant à faire le point sur les stratégies et les enjeux des acteurs de la réhabilitation du pisé à l'échelle régionale (Rakotomamonjy, Moriset, Gandreau, 2013 ; Génis, Béguin, Chancel, et al., 2014). Ces séminaires étaient intégrés dans le programme du festival Grains d'Is , qui est aussi un lieu où se rencontrent les acteurs intéressés par les questions de réhabilitation et de construction en terre crue. Les associations de professionnels de la terre crue, de l'écoconstruction et de la préservation du patrimoine organisent également des rencontres régulières. L'Asterre réunit les professionnels de la terre crue autour d 'Assises de la construction en terre L'association Tera organise des rencontres et des temps de travail et d'échanges entre praticiens et participe à plusieurs événements publics. Les rencontres du réseau Ecobâtir rassemblent deux fois par an les adhérents autour d'ateliers thématiques. Des collectifs comme Terre de pisé ou Matière première organisent plus localement des réunions régulières entre des professionnels, habitants ou élus mobilisés autour de la réhabilitation. De même, les assises et rencontres interprofessionnelles se nourrissent des présentations des derniers résultats de recherche à propos de la construction en terre et de la réhabilitation. Ces rencontres rassemblent des acteurs intéressés pour réfléchir ensemble autant à la pratique qu'à la connaissance du bâti ancien en terre crue. Certains d'entre eux associent d'ailleurs à la connaissance empirique liée à leur pratique professionnelle des 330 connaissances théoriques qui leur permettent d'échanger sur un pied d'égalité avec les chercheurs ou du moins de porter un regard réflexif sur leur expérience professionnelle pour la partager dans ces arènes résolument hybrides. Les acteurs investis durablement dans la préservation et la réhabilitation du bâti en pisé sur le territoire ne sont d'ailleurs que peu nombreux et la plupart des personnes qui participent à ces échanges se connaissent et se retrouvent régulièrement, dans des espaces de rencontre qui peuvent être très locaux, mais qui peuvent aussi s'étendre à l'échelle nationale, voire européenne 89. Ces rencontres peuvent prendre différentes formes. Certaines sont plus orientées autour du fait de se rencontrer entre acteurs affectés par des problèmes similaires pour échanger autour de leurs expériences communes. D'autres ont clairement pour objectif de faire émerger des plans d'actions qui pourraient permettre de répondre à ces problèmes. Ces deux dimensions peuvent être mêlées dans des rencontres qui rassemblent des personnes et des institutions qui se sentent concernées par un même problème, dont elles essayent de tracer les contours en se basant sur les expériences de chacun des participants. Ces rencontres se construisent souvent autour de présentations réalisées par les participants qui font le point sur une activité, une recherche en cours ou une expérience individuelle. Les 5èmes assises nationales de la construction en terre crue, qui se tenaient à Strasbourg en octobre 2014, organisées par l'association Asterre en partenariat avec l'École d'Architecture et l'IUT de Strasbourg réunissaient ainsi professionnels de la terre crue membres de l'association (artisans, architectes, formateurs, chercheurs), représentants d'associations, de collectivités locales et de laboratoires de recherche, enseignants et étudiants autour de quatre tables rondes. Chacun avait été au préalable invité à préparer une présentation autour des questions suivantes : « Quoi de neuf côté résultats, recettes, produits, effets recherchés? Êtes-vous prêts à partager vos secrets – ou vos échecs? Partagez en une image ou deux vos retours d'expérience, exemples, solutions, astuces, trucs qui marchent et trucs qui n'ont pas marché, vos questions. On voit bien émerger la proposition d'un format de partage d'expérience, qui se retrouve dans les réunions d'association comme Ecobâtir, qui rassemble ses membres et des invités extérieurs autour de débats thématiques sur des sujets comme La réhabilitation de l'habitat : quels objectifs, quels moyens (mai 2008), Formation et écoconstruction (novembre 2013) ou Façonnons l'outil plutôt qu'il ne nous 89 Plusieurs acteurs de la construction en terre crue sont investis dans des réseaux à l'échelle européenne, voire internationale, investissement qui se traduit dans leur participation à des projets européens communs portant sur la formation et les compétences des professionnels et des formateurs en construction en terre crue ou en écoconstruction. 331 façonne (mai 2015). Ici aussi, les participants sont invités à préparer une présentation de leurs expériences ou de leur réflexion personnelle sur les questions traitées et à la mettre en discussion avec l'assemblée. La confrontation des expériences de chacun et la discussion entre pairs permet aux acteurs qui présentent autant qu'à ceux qui écoutent de se sentir moins isolés dans leurs expériences et dans leur traitement des problèmes de réhabilitation auxquelles ils sont confrontés au quotidien, et de construire une réflexion qui transcende ces problèmes individuels. Ce format se retrouve dans d'autres réseaux professionnels qui souhaitent favoriser l'échange et la transversalité entre les expériences de leurs membres, comme le souligne Frédéric Goulet dans son analyse des collectifs professionnels agricoles : « l'engagement des individus dans la communauté, la mise en mots des pratiques individuelles, contribuent à la construction progressive d'un répertoire partagé fait d'objets, de mots, de routines, d'histoires avec lesquels les opérateurs parviennent non seulement à construire des identités, mais aussi à produire des cadres d'interprétation et d'apprentissages à partir de leurs pratiques individuelles » (Goulet, 2013, p. 505). Ces rencontres participent à forger une réflexion collective sur la construction en terre et les pratiques de réhabilitation entre des praticiens « éloignés géographiquement, mais liés par une pratique commune [qui parviennent ainsi] à mettre en partage leurs expériences personnelles et singulières » (Ibid., p. 518). Les discussions collectives qui s'engagent pendant ces rencontres peuvent être laissées relativement ouvertes, permettant à chacun de tirer de l'échange une réflexion et des apports pour sa pratique individuelle ou de faire émerger une action collective portée par certains membres du groupe. Elle peuvent aussi être explicitement orientées vers la définition de stratégies visant à construire une réponse coordonnée aux questions soulevées pendant la rencontre. Les espaces de discussion entre pairs amènent souvent à proposer des actions visant à faire sortir la réflexion de ce cercle, pour s'engager et engager d'autres publics dans la réhabilitation du bâti ancien en pisé de manière générale, et non plus celle d'un bâtiment particulier ou d'une pratique individuelle. La réflexion s'engage alors autour de problèmes qui peuvent être de différents ordres. La méconnaissance des architectures de terre soulignée dans cet extrait revêt plusieurs dimensions. Elle s'applique tout d'abord aux propriétés qui font tenir l'architecture de terre (autant dans son équilibre structurel que dans son fonctionnement) et aux pratiques adaptées à cette architecture. La disparition des savoir-faire est d'ailleurs souvent mise en cause dans l'existence de pratiques de réhabilitation inadaptées qui conduit les intervenants à fragiliser involontairement les bâtiments. Cette méconnaissance apparaît également porter sur le fait que le bâti n pisé est porteur de valeurs qui en font un patrimoine à préserver, comme le souligne l'article présenté en. L'action qui s'organise face à cette méconnaissance s'articule autour de deux formes d'activités. Il s'agit dans un premier temps de renforcer les pratiques de recherche visant à mieux connaître ce bâti et ses valeurs et donc à détenir les éléments permettant d'attirer l'attention des particuliers, professionnels et collectivités sur ce bâti. Il est alors question de partager et de faire partager cette connaissance à travers la coordination d'espaces de circulation des savoirs auprès de différents intervenants, mais aussi entre ces derniers. Nous ne reviendrons pas ici sur les démarches de recherche et de sensibilisation visant à connaître et à mettre en visibilité les caractéristiques et les valeurs du bâti ancien en pisé que nous avons analysées dans le chapitre IV de cette thèse. Il est cependant intéressant de se rappeler ici comment ces démarches, portées par des professionnels et des chercheurs mobilisés autour de la reconnaissance et de la préservation de l'architecture de terre visaient par différentes méthodes d' information et de sensibilisation à engager le public (habitants, professionnels, élus) à prendre conscience de l'intérêt de prêter attention à ce bâti.
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Module physique intégré pour horloge atomique miniature à cellule de césium Remy Vicarini D E Module physique intégré pour horloge atomique miniature à cellule de césium n R ÉMY VICARINI Thèse de Doctorat école doctorale sciences pour l'ingénieur et microtechniques X D E X Rémy VICARINI Grade de Docteur de l'Université de Bourgogne Franche-Comté Spécialité : Sciences pour l'ingénieur Module physique intégré pour horloge atomique miniature à cellule de césium Soutenue publiquement le 30 mai 2018 devant le Jury compos é de : BENABID GUERANDEL François VERNOTTE Olivier Llopis Jean-Marc LESAGE Serge GALLIOU Rodolphe BOUDOT Luca RIBETTO Fetah Stéphane Rapporteur Rapporteur Examinateur Examinateur Examinateur Directeur de thèse Co-encadrant de thèse Encadrant industriel Directeur de Recherche CNRS, XLIM, Limoges Chargé de Recherche CNRS, SYRTE, Observatoire de Paris Professeur, UFC, UTINAM, Besançon Directeur de Recherche CNRS, LAAS, Toulouse Ingénieur, DGA MI, Bruz Professeur, FEMTO-ST/ENSMM, Besançon Chargé de Recherche CNRS, FEMTO-ST, Besançon Ingénieur développement, Tronics Microsystems, Grenoble À la mémoire de mon grand-père Pierrot VICARINI Remerciements Les travaux présentés dans ce mémoire ont été réalisés au sein du département Temps Fréquence de l'institut FEMTO-ST de Besançon en collaboration avec la DGA et l'entreprise Tronics microsystems basée à Crolles. Cette èse CIFRE-Défense est cofinancée par l'ANRT et l'entreprise Tronics microsystems et s'inscrit dans une démarche qui se veut en faveur du développement de la recherche partenariale publique-privée sur un sujet d'intérêt défense. Mes plus sincères remerciements vont à Serge GALLIOU, professeur à l'ENSMM et directeur de cette thèse. Je tiens à le remercier chaleureusement pour cet accompagnement plein de sagesse et d'attention. Il m'a proposé un premier stage il y a 3 ans déjà sur cette thématique et a su m'amener ici aujourd'hui après un chemin riche en connaissances et en enseignements. Je ressors grandi de ces travaux et saurai en faire bon usage! J'ai aussi eu la chance d'être encadré par Rodolphe BOUDOT, maitre inconditionné de la métrologie temps-fréquence et des horloges CPT, son enseignement à permis d'aboutir cette thèse et d'obtenir des résultats tout à fait satisfaisants. Son entrain a su me pousser et je lui souhaite beaucoup de réussite dans ses futures recherches aux USA. Salarié de Tronics microsystems, je tiens tout particulièrement à remercier Luca RIBETTO pour son encadrement, son soutien et son dynamisme. Ce projet est encore long pour l'entreprise et je suis sûr qu'il sera fructueux. Je tiens aussi à remercier Vincent GAFF pour avoir su porter ce projet industriel, Pierre-Marie VISSE et Maxime DUROCHER pour le partage et l'entraide sur les tâches de conception. Valérie VOLANT, Pierre DESCOURS et Thomas LAPASSET pour leurs assemblages, Julien BON pour son pragmatisme et toutes les équipes Tronics. Je souhaite également exprimer ma gratitude aux membres du jury qui ont accepté de lire et juger ces travaux de thèse. En particulier je remercie Fetah BENABID, directeur de recherche CNRS au laboratoire XLIM de Limoges et Stéphane GUERANDEL, chargé de recherche CNRS au laboratoire SYRTE de l'observatoire de Paris, tous deux rapporteurs de cette thèse. Je remercie Olivier LLOPIS, directeur de recherche CNRS au LAAS de Toulouse et Jean-Marc LESAGE, Direction Générale de l'Armement, d'avoir examiné ces travaux. Enfin je remercie François VERNOTTE, Professeur de l'Université Bourgogne Franche-Comté d'avoir présidé ce jury. Syrlinks, acteur important dans ce projet de micro horloge atomique française, je tiens à remercier Jean-Marie DANET pour son enthousiasme et son franc parlé judicieux. Principalement présent sur le site de FEMTO-ST, je remercie les doctorants et post-doctorants qui ont su m'apporter les conseils, l'aide précieuse et instaurer la bonne ambiance nécessaire pour mener à bien cette thèse. Un grand merci à Nikolay VOROBYEV, Christophe FLUHR, Moustafa ABDEL HAFIZ, Vincent MAURICE, Jaroslaw RUTKOWSKY et Eric KROEMER. Sans leurs vii viii interventions je n'aurais pas su avancer comme j'ai pu le . C'est la preuve des avantages du travail en équipe, du partage des connaissances et de l'optimisation des points forts. Je remercie sincèrement Nicolas PASSILLY pour son aide, son soutien dans les moments difficiles et lui souhaite de continuer avec acharnement l'optimisation des cellules césium et de ses chronos en triathlon. Je remercie aussi les équipes MN2S, et Christophe GORECKI pour sa motivation à pousser la thématique dans laquelle je me suis trouvé. Je remercie les personnels FEMTO-ST et les doctorants que j'ai pu côtoyer. Je pense particulièrement à Philippe ABBE, David VERNIER, Joël IMBAUD, Cyrus ROCHER, Yannick GRUSON, Valérie SOUMANN, Baptiste MARECHAL, Etienne VAILLANT, Jérémy BON, Guillaume WONG, Grégoire COGET, Ahmed BAKIR, Cédric VUILLEMIN et bien d'autres. 5 1.1.1 5 1.1.2 Domaine temporel............................. 6 1.1.3 Domaine fréquentiel............................ 8 1.1.4 Liens entre domaine fréquentiel et domaine temporel........... 8 1.1.5 Principe de base d'une horloge atomique................. 11 Types de sources de fréquence........................... 12 1.2.1 Oscillateur à quartz............................. 12 1.2.2 Horloge à jet de Césium.......................... 12 1.2.3 Horloge à cellule Rb............................ 13 1.2.4 Micro - horloge atomique CPT.............. Micro-horloges atomiques C ........................... 16 1.3.1 Objectifs de performances......................... 17 1.3.2 Applications et marchés.......................... 17 1.3.3 19 1.3.4 Positionnement de la thèse......................... 24 1.2 1.3 2 Description et physique des micro-horloges atomiques 27 2.1 Physique du phénomène CPT............................ 27 2.1.1 Physique.................................. 27 2.1.2 Caractéristiques de la résonance CPT : Critère pour la stabilité de fréquence cour terme............................. 29 Déplacements de fréquence : Contribution à la stabilité de fré quence moyen et long terme............................ 33 Architecture général e d'une micro horloge atomique.... 37 2.2.1 Architecture................................. 37 2.2.2 Diode laser VCSEL............................. 39 2.1.3 2.2 ix x SOMMAIRE 2.3 3 40 2.2.4 Microcellule................................ 40 2.2.5 Module physique.............................. 43 2.2.6 Électronique................................ 45 46 47 3.1 Cahier des charges................................. 47 3.2 Premier dessin de conception avec chemin optique linéaire............ 48 3.2.1 Optique..................... 50 3.2.2 Magnétisme................................. 52 3.2.3 Thermique................................. 58 Deuxième dessin de conception avec faisceau optique replié........... 79 3.3. 1 Optique................................... 79 Propositions inventives d'améliorations...................... 80 3.4.1 Structure planaire déployable....................... 81 3.4.2 Structure à résistance thermique variable................. 82 86 3.4 3.5 Caractérisation d'éléments du module physique 87 4.1 Caractérisation Optique............................... 87 4.1.1 Chemin optique linéaire...... .................... 87 4.1.2 Chemin optique replié........................... 89 Caractérisation magnétique............................. 90 4.2.1 Solénoïde.................................. 91 4.2.2 μmétal................................... 93 Caractérisation thermique.............................. 93 4.3.1 cellule.................................... 94 4.3.2 VCSEL................................... 95 4.4 Caractérisation de photodétecteurs...... 97 4.5 Caractérisation de VCSEL D1 Vixar........................ 98 4.2 4.3 4.6 5 Optique................................... Module physique MEMS : Conception et simulations 3.3 4 2.2.3 4.5.1 Puissance de sortie en fonction de la température et du courant de la VCSEL 98 4.5.2 Modulation et spectroscopie........................ 99 4.5.3 Bruit AM et FM, largeur de raie...................... 101 101 Métrologie temps-fréquence 103 SOMMAIRE 5.1 5.2 5.3 5.4 6 xi Module physique 1................................. 103 5.1.1 Présentation du module physique 1.................... 103 5.1.2 Caractérisations préliminaires....................... 105 5.1.3 Caractérisation du module physique pour une horloge atomique..... 110 5.1.4 Stabilité relative de fréquence....................... 114 Module physique 2................................. 124 5.2.1 Description du module physique 2..................... 124 5.2.2 Spectroscopie CPT............................. 126 5.2.3 Stabilité de fréquence préliminaire avec le module physique D2..... 126 Module physique 3................................. 128 5.3.1 Description du module physique 3..................... 128 5.3.2 Spectroscopie CPT............................. 128 5.3.3 Stabilité de fréquence préliminaire avec le module physique 3 (D1 )... 130 131 Techniques avancées de métrologie et mesures de vieillissement 133 6.1 Techniques avancées pour réduction des effets de déplacement lumineux..... 133 6.1.1 Historique de solutions proposées................ ..... 134 6.1.2 Principe et originalité de la solution proposée............... 135 6.1.3 Implémentation des méthodes proposées.................. 137 6.1.4 140 Etude de fuites de gaz tampon par le verre de microcellules............ 140 6.2 6.2.1 6.3 6.4 Motivations de mesures de la stabilité de l'atmosphère interne de la microcellule.................................. 140 6.2.2 Description du banc de mesure de vieillissement............. 141 6.2.3 Méthodologie de la mesure......................... 142 6.2.4 Mesures de microcellules Cs-Ne...................... 145 6.2.5 Microcellules Cs-He : comparaison entre verre ASG et borofloat..... 151 6.2.6 155 Spectroscopie CPT sur microcellules Tronics................... 156 6.3.1 156 6.3.2 Exemple de mesure sur une cellule..................... 156 6.3.3 Résumé des mesures............ Introduction Générale Les performances d'une multitude d'applications, telles que les systèmes de navigation par satellite, la sécurisation des communications numériques, la synchronisation des réseaux de télécommunication ou les systèmes avioniques et de défense, sont directement améliorées avec la stabilité relative de fréquence de l'horloge qu'ils utilisent. Aussi, l'augmentation massive des technologies électroniques embarquées alimentées sur batterie a renforcé le besoin stratégique d'horloges miniatures haute performance, basse consommation, bas coût et pouvant être produites en masse. Les horloges atomiques, bien que reconnues comme les références de fréquence les plus stables, furent longtemps privées de déploiement dans de telles applications en raison de leur complexité et volume conséquents. Au cours de la dernière décennie, la combinaison d'un phénomène physique nommé piégeage cohérent de population (CPT), les techniques de microfabrication et les diodes lasers, ont permis le développement de micro-horloges atomiques. Ces horloges présentent un volume total de 15 cm3, une puissance de consommation de 150 mW et une stabilité relative de fréquence journalière de l'ordre de 10−11 (dérive inférieure à 1 μs par jour). Ces performances combinées, deux ordres de grandeur supérieures à celles des oscillateurs à quartz massivement utilisés, font de ces micro-horloges des dispositifs à très fort potentiel industriel et de grand intérêt pour les applications citées ci-dessus. Les travaux pionniers sur le développement de micro-horloges atomiques ont débuté aux EtatsUnis au NIST au début des années 2000, conduisant en 2004 à la démonstration du premier prototype de micro-horloge atomique [1]. Par la suite de lourds financements et moyens humains engagés par la DARPA aux États-Unis [2] ont conduit en 2012 à la première micro-horloge atomique industrielle commerciale proposée par Microsemi. En Europe, ces travaux ont été initiés en 2005-2006 à FEMTO-ST aboutissant en 2007 à la proposition d'une nouvelle et originale technologie de microcellule à vapeur de césium [3]. Cette nouvelle technologie a donné à FEMTO-ST la légitimité pour proposer et piloter de 2008 à 2012 un projet européen ambitieux nommé MAC-TFC, regroupant 10 partenaires académiques et industriels. Ce projet a conduit à la démonstration d'un premier prototype de micro-horloge atomique en Europe. Ce projet fructueux a suscité en France l'intérêt de la DGA supportant depuis cette thématique et l'engouement de plusieurs groupes industriels. Un projet ANR DGA ASTRID ISIMAC fut conduit de 2011 à 2014, associant les partenaires FEMTO-ST et SYRTE, visant à la démonstration d'une nouvelle technologie de microcellule dite réflective [4] et l'investigation de dépôts anti-relaxants octadecyltrichlorosilane (OTS) pour microcellules [5][6]. Dans la même période, un projet de thèse à FEMTO-ST financé par Thalès Avionics a conduit à la proposition d'un mélange de gaz tampon He-Ne original pour microcellules haute température [7][8]. En 2014 furent créés à l'initiative de la DGA les fondements d'une plateforme, composées des industriels Tronics et Syrlinks et du laboratoire de FEMTO-ST, visant à l'aboutissement d'une micro-horloge atomique industrielle française à l'horizon 2020. Ces travaux ont débuté avec le projet RAPID HABAC (2014-2016) au cours duquel la technologie de microcellule de 1 2 FEMTO-ST a été transférée à Tronics Microsystems et la conception et simulation d'un module physique hautement miniaturisé a été réalisée. Ces travaux se poursuivent aujourd'hui dans le cadre du projet PEA EDAM, piloté par Tronics, visant à la démonstration de premiers prototypes d'horloges atomiques miniatures françaises. C'est dans le cadre précédemment décrit que s'inscrit mon travail de thèse (bourse CIFRE Tronics). Ce dernier a débuté en 2015, en cours du projet HABAC. Mon travail de thèse a eu pour but la conception, simulation, réalisation, test et caractérisation métrologique en horloge d'un module physique hautement miniaturisé, visant à terme à respecter au maximum et spécifications d'une micro-horloge atomique industrielle. Plusieurs designs de module physique ont été proposés. Le module physique issu de cette étude constitue à notre connaissance un des premier module physique MEMS complet et opérationnel en h en Europe intégrant une cellule à vapeur alcaline de césium dont le développement est pleinement compatible avec les technologies de micro fabrication et la production industrielle de masse. Ce projet s'inscrit à la frontière entre recherche académique et industrie et vise à la valorisation industrielle de travaux de recherche débutés à FEMTO-ST depuis presque 10 ans. Le module physique conçu au cours de ma thèse, de dimensions extérieures 15x15x13 mm3, intègre une diode laser VCSEL (vertical cavity surface-emitting laser), quelques éléments optiques pour le routage, l'atténuation et la polarisation du faisceau optique, une microcellule à vapeur alcaline de césium remplie d'une pression de gaz tampon et un photodétecteur. Cet ensemble est associé à des capteurs de température et éléments en chauffe pour contrôler la température de cellule et du laser et, un solénoïde pour appliquer un champ magnétique statique. La totalité des éléments est insérée dans un boîtier céramique au sein duquel un vide de l'ordre de 10−3 mbar visera à être maintenu. Un blindage magnétique en μmétal protège l'ensemble des perturbations extérieures magnétiques. La consommation électrique totale de module physique est à ce jour de 1 W en régime permanent pour une température ambiante de −40◦ C. Cette consommation sera réduite prochainement pour atteindre quelques 20 mW en optimisant les substrats de support des éléments régulés en température. Des performances de stabilité de fréquence d'horloge proche de l'état de l'art mondial, de l'ordre de 2,5×10−11 à 1 s et inférieures à 2×10−11 à 100 000 s ont été démontrées à l'aide de ces modules physiques, en environnement calme. Des travaux en cours sont encore nécessaires pour confirmer pleinement la viabilité de ces micro-horloges. Les résultats obtenus au cours de cette thèse demeurent cependant très prometteurs. Ce mémoire synthétise l'ensemble des travaux effectués dans le cadre de ma thèse et s'articule en 5 chapitres : – Le chapitre 1 rappelle quelques définitions élémentaires sur les horloges et présente les outils utiles à la caractérisation métrologique des performances de ces dernières. Le principe d'une horloge atomique est rappelé brièvement. Je présente ensuite différents types de références de fréquence compactes, exposant leurs performances typiques en terme de stabilité relative de fréquence, volume, consommation. Une partie est ensuite dédiée aux micro horloges atomiques, mettant en avant l'historique, objectifs, les applications essentielles envisagées, et l'état de l'art de ce domaine. Je termine cette section en décrivant le contexte exact de ma thèse. – Le chapitre 2 s'intéresse à la description basique du phénomène physique, nommé piégeage cohérent de population (CPT), impliqué au coeur de ces horloges. On distingue la description des mécanismes jouant sur les caractéristiques (largeur, amplitude, contraste) de la résonnance CPT 3 et donc sur la stabilité de fréquence court terme. On déduit ensuite brièvement les déplacements de fréquence majeurs (déplacement Zeeman, déplacement collisionnel, déplacement lumineux) influant sur la stabilité relative de fréquence moyen et long terme des horloges. La seconde partie de ce chapitre expose l'architecture et le fonctionnement d'une micro-horloge atomique. Des détails sont apportés sur la description des différents éléments clés d'une micro-horloge atomique (laser, microcellule, module physique, etc.). – Le chapitre 3 reporte d'abord le cahier des charges auquel doit répondre le module physique de micro-horloge atomique développé au cours de ma thèse. Ensuite, je présente la conception et simulation de 2 designs de module physique. Pour chaque module physique, l'optique de mise en forme du signal laser, l'apport du champ magnétique et la thermalisation de la cellule et de la diode laser sont définis et simulés. On caractérise ensuite après fabrication chaque sous partie du module physique retenu (diode laser, solénoïde, régulation de température, etc.). L'objectif est d'assurer le bon fonctionnement des modules physiques complets utilisés en horloge dans le chapitre 4. – Le chapitre 4 présente la caractérisation des performances d'horloges atomiques exploitant en leur coeur les modules physiques précédemment décrits. Trois modules physiques sont testés, deux utilisant une diode laser VCSEL à 895 nm (raie D1 du Cs) et un utilisant une diode VCSEL à 852 nm. Des performances de stabilité relative de fréquence de l'ordre de 2,5×10−11 τ−1/2 jusque à 1 000 s et meilleure que 2×10−11 à 105 s sont reportés (avec VCSEL D1 ). Ces résultats sont comparables à l'état de l'art mondial et sont très encourageants. L'analyse des résultats met en avant que les contributions majeures à la stabilité long terme sont d'une part des phénomènes de déplacement lumineux, eux même sensibles à la température environnante et d'autre par, une évolution lente et progressive possible de la pression de gaz tampon au sein de la microcellule. Des solutions pour réduire ces contributions sont alors mises en avant le chapitre 5. – Le chapitre 5 décrit des solutions envisagées pour améliorer la stabilité de fréquence moyen et long terme de micro-horloges atomiques. Des techniques avancées impliquant la mise en place de boucles de stabilisation et d'asservissement additionnelles sont proposées pour réduire de manière significative la contribution des effets de déplacement lumineux. Aussi, une étude expérimentale dédiée est mise en place pour mesurer la contribution de l'évolution de l'atmosphère interne de la microcellule, sur la stabilité journalière de l'horloge. Cette contribution est estimée inférieure à 10−11 /jour, valeur proche des spécifications visées. L'exploitation de verres faiblement perméables, dit alumino-silicatés, est une approche supposée pour réduire cette contribution. 1.1/ Horloges et outils de la métrologie temps-fréquence 1.1.1/ Définitions Une horloge en électronique est un système autonome capable de générer un signal périodique découpant l'axe du temps en intervalles réguliers et les comptabilisant ensuite. On définit la période T en secondes de ce signal représentant l'intervalle de temps entre deux passages successifs à la même valeur de tension. On définit la fréquence ν0 de ce signal, en Hz, comme l'inverse de la période, définissant le nombre d'oscillations par seconde, telle que : ν0 = 1/T (1.1) Le signal V(t) délivré par un oscillateur idéal conserve en permanence la même fréquence ν0 et la même amplitude V0. On a alors : V(t) = V0 cos(2πν0 t) (1.2) Dans le domaine fréquentiel, le signal délivré par un oscillateur idéal est donc constitué d'un seul pic de Dirac à la fréquence ν0 (voir figure 1.1). Dans la réalité, différents phénomènes déterministes ou aléatoires modifient la phase et l'amplitude du signal d'une oscillation à l'autre (voir figure 1.2). Le signal réel V(t) s'écrit alors sous la forme : V(t) = V0 [1 + α(t)] cos(2πν0 t + φ(t)) (1.3) avec α(t) et φ(t) représentant respectivement les fluctuations d'amplitude et de phase du signal. Dans la majorité des cas, les fluctuations d'amplitude sont négligeables par rapport aux fluctuations de phase. La caractérisation des fluctuations de fréquence du signal peut être réalisée soit dans le domaine temporel soit dans le domaine fréquentiel. Figure 1.1 – Représentation d'une source idéale dans le domaine temporel et fréquentiel. Figure 1.2 – Représentation du signal d'une source réelle dans le domaine temporel et fréquentiel. 1.1.2/ La caractérisation des instabilités de fréquence dans le domaine temporel fait appel à des méthodes statistiques. Le principe est de répéter la mesure de la fréquence du signal un grand nombre de fois de façon à obtenir un tableau de valeurs ν1, ν2,, νN. On définit la moyenne < ν > sur N mesures : N 1 X < ν >= νk N k=1 (1.4) La fréquence instantanée ν(t) est donnée par : ν(t) = ν0 + 1 dφ 2π dt (1.5) On introduit les fluctuations relatives de fréquence y(t) (utiles pour comparer des horloges de fréquence différente) telle que : φ̇(t) ν(t) − ν0 = (1.6) y(t) = ν0 2πν0 La figure 1.3 montre un exemple d'évolution des fluctuations relatives de fréquence du signal y(t) en fonction du temps. On appelle yk les valeurs moyennes des fluctuations du signal y(t) sur les intervalles [tk ; tk+1 ] tel que tk+1 − tk = τ. La stabilité de fréquence d'une horloge s'exprime à partir de l'écart-type des fluctuations relatives de fréquence du signal intégrées sur un temps de moyennage ou d'intégration τ. On définit : 1 σ2y (τ) = < (yk+1 − yk )2 > (1.7) 2 La stabilité relative de fréquence de l'horloge s'exprime à partir de la déviation d'Allan σy (τ). Par 7 y(t) 1.1 HORLOGES ET OUTILS DE LA MÉTROLOGIE TEMP S-F RÉQUENCE yk+1 yk yk+2 Time (s) tk tk+2 tk+1 tk+3 Figure 1.3 – Signal des fluctuations relatives de fréquence y(t) d'une horloge réelle en fonction du temps. Déviation d'Allan y() abus de langage, on parlera souvent de stabilité de fréquence. L'avantage notable de la déviation d'Allan est qu'elle permet de discriminer les types de bruit suivant la pente de σy (τ) comme le montre la figure 1.4. Bruit flicker de phase Bruit blanc de phase  -1 Dérive de fréquence  -1/2  0  1  1/2 Palier flicker Temps d'intégration  Figure 1.4 – Types de bruit pour une pente donnée sur la courbe de déviation d'Allan . Dans la plupart des horloges atomiques passives et pour les durées typiques de 1 à 10 000 s, les fluctuations de yk ne sont pas corrélées : il s'agit d'un bruit blanc de fréquence. Dans ce cas on peut montrer qu'on a une dépendance caractéristique de la stabilité σy (τ) en τ−1/2. Le banc de mesure classiquement utilisé pour la mesure de stabilité de fréquence dans le domaine temporel est indiqué figure 1.5. Un signal de batt ement est obtenu entre le signal à mesurer et une 8 r éférence à l' aide d'un mé langeur. La fréquence du signal de battement est alors analysée à l'aide d'un compte ur de fréquence lui-même pilot é par une r éférence stable . Le compteur est connect é à un ordinateur effectuant le calcul de σy ( τ). Figure 1.5 – Banc de mesure de la stabilité de fréquence d'un oscillateur ou horloge. 1.1.3/ Dans le domaine fréquentiel, on exprime la densité spectrale de puissance (DSP) des fluctuations de phase du signal S φ ( f ) [exprimée en rad2 /Hz (ou dB.rad2 /Hz)]. Elle caractérise la répartition fréquentielle de φ(t). La modulation de phase du signal par le bruit provoque un étalement de la puissance du signal sur une bande de fréquence autour de la fréquence centrale ν0 (voir figure 1.2). La pureté spectrale peut alors être caractérisée pour chaque fréquence ν à une distance f = ν − ν0 de la porteuse par la puissance disponible Pν sur la puissance de la porteuse P0. En présence du seul bruit de phase, on a alors : 2Pν S φ ( f ) = 10 log (1.8) P ν 0 Le spectre correspondant à la densité spectrale de puissance des fluctuations relatives de fréquence y(t) est noté S y ( f ). Les signaux φ(t) et y(t) correspondent par dérivation. Les spectres sont donc dans un rapport j2π f par transformée de Fourier. Il en résulte que leurs densités spectrales sont liées par : f2 S y( f ) = 2 S φ( f ) (1.9) ν0 Le banc de mesure de bruit de phase est représenté sur la figure 1.6. La source à mesurer (oscillateur 1) est asservie en phase à l'aide d'une bouc le à ver rouill age de phase sur une source de référence supposée meilleure. Le détecteur de phase est un mélangeur procurant un signal en tension image de la différence de phase entre les deux signaux (plus de détails [9]). Connaissant la fonction de transfert de l'asservissement, la mesure du bruit en tension en sortie du mélange à l'aide d'un analyseur FFT permet d'extraire le bruit de phase de la source sous test. Évidemment, le bruit mesuré en dehors de la bande passante d'asservissement est celui de l'oscillateur libre. 1.1.4/ Liens entre domaine fréquentiel et domaine temporel Il est possible de lier les résultats de l'analyse temporelle avec ceux de l'analyse fréquentielle. Un modèle classiquement utilisé pour décrire le spectre de bruit de phase d'un oscillateur est celui dit 1.1 Référence LNA Analyseur FFT Oscillateur 1 ν1 Boucle à verouillage de phase Figure 1.6 – Banc de mesure de bruit de phase d'une source de fréquence. de la "loi en puissance". On a ainsi : S φ( f ) = −4 X bi f i (1.10) i=0 Le spectre de bruit de phase tracé dans un diagramme log-log est alors constitué de plusieurs droites de pentes différentes. A chacune de ces pentes correspond un type de source de bruit. De la même manière, on a : 2 X S y( f ) = hi f i (1.11) i=−2 On reporte sur les figures 1.7, 1.8 et 1.9 et le tableau 1.1 issu de [10] les correspondances entre S φ ( f ), S y ( f ) et σ2y (τ). Table 1.1 – Types de bruit, densités spectrales et variance d'Allan. Type de bruit Bruit blanc de phase S φ( f ) b0 S y( f ) h2 f 2 Bruit flicker de phase b−1 f −1 h1 f b−2 f −2 h0 Bruit flicker de fréquence b−3 f −3 h−1 f −1 b−4 f − 4 h−2 f −2 Dérive liné aire de fréquence Sφ ↔ Sy h2 = bν20 σ2y ( τ) ∝ τ−2 h1 = ∝ τ−2 0 b−1 ν02 b−2 h0 = ν 2 0 h−1 = bν−32 0 h−2 = bν−42 0 1 −1 2 h0 τ 2ln(2)h−1 4π2 6 h−2 τ 1 2 2 2 Dy τ 10 Figure – Dens ité spectr ale des fluctuations de phase. Figure 1.8 – Densité spectrale des fluctuations de fréquence. Figure 1.9 – Déviation d'Allan. Principe de base d'une horloge atomique Le principe de base d'une horloge atomique, montré figure 1.10, consiste à asservir la fréquence d'un oscillateur local sur la fréquence de résonance correspondant à la fréquence de transition entre deux niveaux d'énergie d'une espèce atomique. Pour cela on fait interagir un champ électromagnétique appelé champ d'interrogation, dont la fréquence ν est générée à partir d'un oscillateur local, avec un atome présentant une résonance ou transition entre deux niveaux énergétiques à la fréquence νat. Selon le désaccord δ = (ν − νat ) entre la fréquence du signal issu de l'oscillateur et la résonance atomique, l'atome va plus ou moins répondre, c'est à dire absorber plus ou moins les photons du champ électromagnétique d'interrogation. Cette réponse est maximale quand ce désaccord est nul. Afin de quantifier précisément cette réponse, on définit la probabilité de transition P, c'est à dire la probabilité P qu'a l'atome de réaliser la transition lors de l'interaction avec le champ. Dans ce manuscrit, le résonateur atomique consistera en une cellule dans laquelle est présente une vapeur alcaline. Le rôle du résonateur atomique est donc de mesurer cette probabilité de transition afin de comparer la fréquence de l'oscillateur et la fréquence atomique. La réponse du résonateur atomique permet de générer un signal d'erreur qui est utilisé afin de corriger les fluctuations de fréquence de l'oscillateur et asservir la fréquence de l'oscillateur local sur la fréquence atomique. La stabilité de fréquence court terme du signal fourni par l'horloge atomique peut être approximée par : σy ( τ ) ≈ ∆ν 1 −1/2 τ, ν0 S /N (1.12) où ∆ν est la largeur de la résonance atomique à mi-hauteur, ν0 est la fréquence de résonance atomique (9,192 GHz environ pour une horloge à césium) et S /N est le rapport signal à bruit de la résonance détectée dans une bande passante de 1 Hz. On remarque que pour améliorer la stabilité de fréquence court terme, il faut réduire la largeur de la résonance (ce qui consiste à augmenter le temps d'interaction atome-champs d'où l'utilisation de gaz tampon dans le cas d'horloge à cellule) tout en maximisant le rapport signal à bruit. Une autre option est d'exploiter des atomes présentant une fréquence de transition d'horloge plus élevée, principe exploité dans les horloges atomiques optiques de nouvelle génération [11][12][13][14][15]. Figure 1.10 – Principe d'une horloge atomique. 12 1.2/ Types de sources de fréquence La stabilité relative de fréquence d'une horloge est un critère primordial dans un grand nombre d'applications. Cependant, le coût, la taille, le poids et la consommation d'énergie, sont des paramètres tout autant critiques pour les applications industrielles. Le temps de mise en route et la plage de température de fonctionnement sont aussi des aspects importants. Cette section détaille brièvement différents types de références compactes de fréquence disponibles commercialement. 1.2.1/ Les oscillateurs à quartz sont les références de fréquence les plus couramment utilisées et qui équipent aujourd'hui la plupart des appareils électroniques. Le résonateur à quartz est le siège d'une vibration mécanique, il est excité électriquement grâce au phénomène de piézoélectricité. L'application d'un champ électrique va entraîner une déformation du cristal qu'on pourra entretenir par l'application d'une tension électrique périodique. La fréquence de résonance dépend de la taille, de la forme, de l'élasticité et de la dispersion sonore du matériau. Cependant, la fréquence du résonateur change avec le temps en raison de processus de vieillissement. De plus, la fréquence est sensible aux facteurs environnementaux tels que les vibrations, la pression et la température. La figure 1.11 représente le principe d'un oscillateur à quartz. On retrouve le quartz oscillant et la partie électronique qui permet d'entretenir cette oscillation. On trouve plusieurs types d'oscillateur à quartz. Les plus courants sont les oscillateurs à quartz de type XO utilisés dans les montres, les appareils horaires et s'adressant au marché grand public. Ils ont l'avantage d'être très peu encombrants, de l'ordre de 0,02 à 0,05 cm3 pour une consommation de 5 à 10 mW. Leur prix est aussi très attractif, de quelques euros. Les TCXO (Thermally Compensated X-tal Oscillator) exploitent un résonateur à quartz dont la coupe de cristal permet l'obtention d'une insensibilité de la fréquence du résonateur aux variations de température autour d'un point de fonctionnement particulier. Ils sont aussi capables de corriger la variation de fréquence induite par la température. Les TCXO ont un volume de 0,03 à 0,06 cm3 pour une consomm de 10 à 20 mW. Leur stabilité moyenne à la seconde est de 1×10−10 et supérieure à 1×10−9 à 1 journée. On peut les trouver pour une dizaine d'euros. Les OCXO (Oven Controlled X-tall Oscillator) exploitent un cristal placé dans une enceinte thermique régulée qui le maintient à la température à laquelle la fréquence varie le moins en fonction de la variation de cette température. Leurs volumes est de 1 à 3 cm3 pour une consommation de 60 à 300 mW. La stabilité à 1 s est d'environ 5×10−12 pour une stabilité juste inférieure à 1×10−9 à la journée. Les OCXO peuvent coûter jusqu'à plusieurs centaines d'euros. 1.2.2/ Horloge à jet de Césium La figure 1.12 présente le schéma de principe d'une horloge à jet de Césium. Dans une horloge atomique à jet de Césium, un faisceau d'atomes 133Cs est émis par un four à une extrémité d'un tube à vide. Les atomes sont uniformément répartis entre les deux états hyperfins. Une première porte magnétique dévie les atomes qui se trouvent dans un état hyperfin spécifique vers une cavité hyperfréquence dite de Ramsey. Si la fréquence du champ hyperfréquence est égale à la fréquence de transition hyperfine des atomes, leur état change. Une deuxième porte magnétique dévie alors les atomes dont l'état a changé vers un détecteur. Le signal est renvoyé à l'oscillateur local, à par- Figure 1.11 – Schéma dynamique équivalent d'un oscillateur à quartz (montage Pierce). tir duquel la fré quence micro-onde est génér ée , afin de maximiser de façon constante le nombre d'atomes dont l'état change dans la cavité hyperfréquence. Alors que certains dispositifs commerciaux utilisent toujours la déflexion magnétique, les références césium les plus récentes utilisent le pompage optique pour préparer et détecter les états atomiques [16]. La stabilité de fréquence de ces horloges commerciales [17] est de 5×10−12 à 1 s et de l'ordre de 1×10−14 à 1 journée d'intégration. Elles consomment entre 45 et 50 W pour un volume de 30 L. Microsemi vend son modèle 5071A à 70 ke. Figure 1.12 – Représentation simplifiée d'une horloge à jet de Cs [18] 1.2.3/ Horloge à cellule Rb Technique à double résonance La spectroscopie par double résonance requiert deux champs électromagnétiques : un champ optique pour pomper optiquement les atomes et un champ microonde pour interroger la transition microonde d'horloge séparant les deux niveaux d'énergie de l'état fondamental. On considère pour du Rb, un schéma simplifié à 3 niveaux d'énergie avec deux niveaux de l'état fondamental |1i et |2i séparés en fréquence de 6,8 GHz et un état excité |3i distant optiquement de 780 nm (raie D1 ) ou 795 nm (raie D2 ). A l'équilibre thermique, les niveaux |1i et |2i sont équipeuplés. En accordant la fréquence laser sur la transition |1i → |3i les atomes sont pompés optiquement dans le niveau excité |3i avant de relaxer par émission spontanée ou par collisions dans l'état fondamental. Après quelques cycles d'absorption-émission, la population du niveau |1i est grandement réduite comparativement au niveau |2i. Dans ce cas, la vapeur atomique dans la cellule est quasi-transparente à la lumière incidente et la puissance lumineuse transmise 14 importante car le nombre d'atomes pouvant absorber les photons est très réduit. Supposons désormais que l'on injecte au sein de la cavité microonde un signal microonde d'interrogation dont la fréquence égale la différence de fréquence entre les niveaux |1i et |2i. Dans ce cas, la transition |2i → |1i est de nouveau stimulée et le niveau |1i se peuple de nouveau. Une partie de la lumière incidente est alors absorbée par la vapeur atomique et la puissance lumineuse détectée par le photodétecteur sortie de cellule est réduite. |3 > Transmission |2 > |1 > fOL (a) (b) (c) (d) Figure 1.13 – Principe de la technique à double résonance. (a) Ensemble atomique à l'équilibre, les champs électromagnétiques sont désactivés. (b) Le champ optique est activé et après quelques cycles d'absorption-émission, la population du niveau |1i est grandement réduite comparativement au niveau |2i. (c) On injecte un signal microonde d'interrogation dont la fréquence égale la différence de fréquence entre les niveaux |1i et |2i , le niveau |1i se peuple de nouveau . (d) Une partie de la lumière incidente est alors absorbée par la vapeur atomique et la puissance lumineuse déte c tée par le photodétecteur en sortie de cellule est réduite. Horloge atomique compacte Rb Le schéma d'une horloge atomique compacte à Rubidium est montré dans la figure 1.14. Dans cette horloge atomique compacte et peu coûteuse [19][20][21][22][23], la lumière est émise par une lampe à décharge Rb et traverse une première cellule Rb, qui agit comme un filtre passe bande. La lumière filtrée traverse une seconde cellule de Rb et la puissance transmise est mesurée avec un photodétecteur. Lorsque la vapeur de Rb dans la seconde cellule est exposée à un champ oscillant à une fréquence de transition hyperfine exacte (environ 6,834 GHz pour le 87Rb), la transmission de la lumière à travers la cellule est diminuée. L'oscillateur local est ensuite verrouillé en fréquence sur ce minimum. Pour ces horloges, on utilise la technique de la double résonance qui travaille sur 3 niveaux d'énergie. Les horloges commerciales de ce type [22][23] ont une stabilité relative de fréquence à 1 s d'intégration de l'ordre de 1×10−11 et 5×10−12 à 1 journée. Elles consomment une dizaine de Watts pour une volume de 200 à 400 cm3. Leur prix avoisine quelques centaines d'euros. 1.2.4/ Micro-horloge atomique CPT La découverte en 1976 du phénomène physique de piégeage cohérent de population [25], combiné plus tard aux progrès des techniques de microfabrication et l'apparition de diodes laser à semi-conducteur, a permis au début des années 2000 l'émergence de micro-horloges atomiques, combinant un volume de l'ordre de 15 cm3, une consommation de 150 mW et une stabilité relative de fréquence de l'ordre de 10−11 à 1 jour, soit 2 ordres de grandeur meilleure que les OCXO pour un volume et une consommation similaire. La figure 1.15 présente une horloge CPT simplifiée. Le phénomène CPT est un processus d'interférences quantiques se produisant lorsqu'un système 1.2 TYPES DE SOURCES DE FRÉQUENCE 15 Figure 1.14 – Schéma d'une horloge atomique Rb [24]. atomique à 3 niveaux d'énergie interagit avec deux raies optiques cohérentes en phase [25][26]. De telle manière que les deux niveaux de l'état fondamental soient reliés à un état excité commun, un système laser génère deux raies optiques cohérentes en phase et séparées en fréquence généralement par modulation d'une diode laser. Le champ optique bichromatique interagit avec une vapeur alcaline au sein d'une cellule. La cellule contient généralement une pression de gaz tampon pour réduire la largeur de résonance atomique microonde [27]. Un photodétecteur détecte la puissance lumineuse transmise à travers la cellule. La résonance CPT est détectée lorsque la différence de fréquence entre les raies optiques est rigoureusement égale à la fréquence de transition hyperfine des atomes (9,192 GHz pour l'atome de Cs et 6,834 GHz pour l'atome de Rb). Dans ce cas, les atomes sont pompés optiquement dans un état dit état noir, superposition cohérente des niveaux 1 et 2, et deviennent comme découplés de la lumière incidente. On crée un état noir par un phénomène d'interférences quantiques à l'aide de lumière cohérente. Le photodétecteur détecte alors un pic de résonance pouvant être exploité pour asservir la fréquence de l'oscillateur local sur la fréquence de transition atomique. Ces références atomiques miniatures, au très fort potentiel industriel, sont d'un très grand intérêt pour de nombreuses applications civiles et industrielles. Figure 1.15 – Architecture d'une horloge CPT avec modulation du courant de VCSEL [28]. 1.2.5/ Résumé Le tableau 1.2 résume la stabilité relative de fréquence à 1 s et 1 jour d'intégration, la consommation, le volume et le prix des références de fréquence précédemment décrites. Les micro-horloges atomiques commerciales présentent encore un prix peu attractif à l'achat comparativement aux oscillateurs à quartz qu'elles visent à remplacer. Cependant, il est à envisager que la compatibilité de ces horloges avec la production de masse, via les techniques de micro-fabrication, permettra si le nombre de ventes augmente de réduire progressivement le coût de ces horloges. Cette baisse de coût permettra de rendre ces horloges très attractives pour des applications industrielles courantes (voir section 1.3.2). Les figures 1.16 montrent les performances typiques de stabilité de ces références. Les micro-horloges atomiques présentent l'intérêt de combiner un faible volume, une faible consommation et une excellente stabilité de fréquence. Je reporte sur ce graphique pour information les performances d'horloges démontrées au cours de ma thèse exploitant les modules physiques que j'ai conçus. Table 1.2 – Comparatif des différentes sources de fréquence compactes. σy (1s) σy (1 j) Puissance de consommation (mW) Volume (cm3 ) Coût (Euros) TCXO [29] 1×10−10 <1×10−9 10-20 0,03-0,06 ∼10 OCXO [29] 5×10−11 >1×10−9 60-300 1-3 ∼100 Horloge à jet de Cs [17] 5×10−12 1×10−14 45 000-50 000 30 000 70 000 Horloge Rb [23][22] 1×10−11 5×10−13 ∼10 200-400 ∼300-500 Micro-horloge atomique [30] 6×10−10 1×10−11 100-150 10-15 5 000 1 h e u re 1 0 1 s e m a in e 1 jo u r TC XO O Ma H or 1 1 0 log CX thè CS eà jet de 1 0 0 O se AC Ho Cs 1 0 0 0 1 0 0 0 0 SA rlo ge.45 s Rb 1 0 0 0 0 0 1 0 0 0 0 0 0 τ(s ) (a) (b) Figure 1.16 – (a) Stabilités de fréquence typiques des principaux types d'horloge compacte. (b) Stabilité relative de fréquence, consommation et instabilité temporelle des micro horloges atomiques comparativement à d'autres références de fréquence. 1.3/ Micro-horloges atomiques CPT Dans cette section, nous focaliserons notre attention sur le domaine spécifique des micro-horloges atomiques. Nous en présenterons les objectifs de performances ainsi que les applications et marchés visés. Ensuite, nous tâchons de présenter un état de l'art non exhaustif, reportant l'avancement 1.3 MICRO-HORLOGES ATOMIQUES CPT 17 de différents projets menés à travers le monde visant au développement de micro-horloge.
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Louis Blanc, la république au service du socialisme : droit au travail et perception démocratique de l'État
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2 87 § 1. L’INFLUENCE LIBERALE Comment les libéraux pensent-ils le travail et donc le droit au travail après la Révolution industrielle? Lorsque l’on se penche sur la logique historique du libéralisme, trois périodes se dessinent1. On a tout d’abord les Fondateurs (deuxième moitié du XVIIIème siècle) : en France avec les Physiocrates et Condillac, en Grande-Bretagne avec Adam Smith. Ensuite, les Maîtres ou les Classiques : en Grande-Bretagne avec les pessimistes tels que Malthus, Ricardo ; les optimistes en France : avec, J.-B. Say, Bastiat2 ; et aux Etats-Unis : Carey. Stuart Mill fait pour sa part la synthèse entre les optimistes et les pessimistes. Enfin, les Successeurs ou Néo-classsiques qui sortent de notre cadre historique, que nous n’étudierons donc pas car ils rentrent dans le champ doctrinal à partir de la fin du XIXème siècle et au début du XXème. A cette époque la pensée de Louis Blanc est construite. Dès lors, en quoi ces auteurs ont-ils influencé la pensée politique de notre auteur? Comment envisagent-ils le travail et le droit au travail? Et que pense-t-il de leurs argumentations? Pour plus de clarté, nous étudierons particulièrement3 les pensées qui concentrent les préoccupations libérales de l’époque avec les physiocrates (A), celle d’Adam Smith (B), celle de J.-B. Say (C), et pour terminer la synthèse opérée par l’ami de Louis Blanc, Stuart Mill (D). ALES PHYSIOCRATES : LE TRAVAIL DE LA TERRE COMME UNIQUE SOURCE DE RICHESSE Pour les physiocrates (physis : nature)4, seule la terre produit réellement parce que, seule, elle multiplie (un grain de blé semé produit une multitude d’autres grains de blé). Les autres activités humain es ( industrie, commerce ) ne font que transformer ou transporter5. 1 PIETTRE André, Pensée économique et théories contemporaines, Paris, Dalloz, 7° édition, 1979, p. 59. Et P. Leroy-Beaulieu (fin du XIXème siècle). 3 Nous ferons quelques références à Malthus, Bastiat et à Ricardo de façon à éclairer l’argumentation mais sans entrer précisément dans leurs pensées. 4 Il s’agit d’un système de pensée, concevant l’économie politique comme une science, science de la nature autant que de l’homme et, plus encore, une science de l’homme se conformant à des prescriptions « naturelles ». La finalité humaine du système est nette ; l’analyse s’efforce de demeurer objective. (BARRERE Alain, Histoire de la pensée et de l’analyse économique, Paris, Cujas, 1994, p. 165.) 5 « Soit un menuisier qui s’empare d’un morceau de bois, dont il se propose de faire une table. La table achevée ne contiendra pas plus de bois que le menuisier n’en avait au point de départ ; au contraire, car il s’est servi de la 2 88 Seule, par conséquent, l’agriculture laisse un « produit net »1 : c’est le don gratuit de la nature (récoltes, moins les avances, semences, frais de culture, fermages, etc...). Ainsi, « les commerçants et les fabricants [écrivait encore Dupont de Nemours], ne font qu’additionner aux choses la valeur de leur travail ; mais additionner, ce n’est pas multiplier ; conserver, accumuler, transformer sont des choses à la portée de l’intelligence et du travail de l’homme ; en produire n’appartient qu’à Dieu »2. Cette théorie purement matérielle de la production – ou plus clairement : du revenu3 annonce celle de la stérilité de l’échange que reprendra Marx. Les physiocrates appellent stériles les classes commerçantes4. Louis Blanc parlera du « ver rongeur de la production »5 rejoignant en ce sens l’analyse de Fourier. Toujours est-il que la vision du commerce chez les physiocrates se base uniquement sur la notion de valeur. Pour Quesnay « il n’est qu’un échange de valeur pour valeur égale et que relativement à ces valeurs, il n’y a ni perte ni gain entre les contractants »6. Cette vision purement abstraite ne prend pas en compte ce qu’est le commerce lui-même, à savoir comme le souligne Fourier « l’art d’acheter 3 sous ce qui en vaut 6, et de vendre 6 ce qui en vaut 3 »7. Certes la valeur intrinsèque de l’objet reste la même, mais sa valeur d’échange varie. Y a-t-il pour autant production de richesse? Pour les physiocrates nullement car l’échange, même profitable à chacun des coéchangistes puisqu’ils se procurent la jouissance de richesse qu’ils ne pourraient pas obtenir autrement – n’augmente en rien réellement, ni même pécuniairement la richesse. Le commerce est donc stérile. Ainsi, les physiocrates8 ne conçoivent en ce point que les valeurs d’échange et non les valeurs d’usage ; ils n’ont point conscience de l’utilité9. Comment se lime et du rabot, et voici son atelier jonché de déchets inutilisables. » (VILLEY Daniel, NEME Colette, Petite histoire des grandes doctrines économi ques, Paris, Litec, 1996, p. 60.) 1 BARRERE A., op .cit., p. 171. 2 PIETTRE A., op.cit., p. 62, note 1. 3 On trouve, en effet, chez Quesnay l’expression « revenu ou produit net de la culture » (Analyse du Tableau Economique, Les Physiocrates, Guillaumin, p. 60). D’où son souhait du « bon prix » (cf. p. 63, 1°) (PIETTRE A., op.cit., p. 62, note 2.) 4 Nous sommes proches de la vision des canonistes antérieurs à Saint Thomas d’Aquin, qui condamnaient le profit commercial. (VILLEY Daniel, NEME Colette, op.cit., p. 57.) Notons pour plus de précision, que le travail de transport des richesses, c’est-à-dire le travail consacré au commerce, ne provoque ni un accroissement du volume, ni une transformation des richesses réelles. Il est donc improductif, même en valeur monétaire. Il est bien évident que les Physiocrates commettent ici une grave erreur qui vient de ce qu’ils n’ont pas de véritable théorie de la valeur et méconnaissent la notion d’utilité ; la richesse est pour eux matérielle et quantitative. (BARRERE A., op.cit., p. 191.) 5 BLANC L., OT, op.cit., p. 81. 6 BARRERE A., op.cit., p. 195. 7 FOURIER Charles, Le nouveau monde industriel et sociétaire, Paris, La librairie sociétaire, 1966 [1830], t. VI, Chapitre XLIII caractère du commerce, p. 392-402. 8 Plus particulièrement Quesnay sur qui nous reviendrons plus-bas . 9 BARRERE A., op.cit., p. 195. 89 définit alors le travail ? Simplement comme étant celui qui permet à la terre de produire de la richesse circulant ensuite dans l’ensemble du corps social. Dans le schéma physiocratique, le docteur Quesnay1 véritable chef de ce mouvement2, transpose dans la vie économique l’image de la circulation du sang3 dans son Tableau économique (1758)4. L’activité économique est toute entière animée par la circulation du revenu net (seule source de la richesse) à travers les groupes sociaux. Agriculteurs et propriétaires lancent ce revenu dans la société en achetant aux autres classes les produits manufacturés, services, etc..., et celles-ci leur renvoient finalement ce revenu en achetant des denrées5. Le cycle est fermé comme dans le corps humain, le cœur étant ici figuré par le travail agricole. En somme, dans une économie au trois quarts rurale, cette théorie de la circulation semble correspondre aux exigences de la pré-révolution industrielle. Néanmoins, Louis Blanc placera aussi dans sa réflexion l’importance de l’agriculture6 dans la vie économique post industrielle et la nécessaire organisation de celle-ci à travers la grande culture tout comme les physiocrates7 : « Quel problème, d’ailleurs, est plus digne d’éveiller la sollicitude des bons citoyens que celui qui porte sur les progrès de l’agriculture et le sort des cultivateurs? La vie des peuples a-t-elle sa première source autre part que dans la terre? N’est-ce pas avec l’excédant de sa nourriture et de son entretien que le cultivateur solde tous les travaux du commerce, de l’industrie et des arts? A-t-il cessé d’être vrai, ce mot de Sully : Pâturage et labourage sont les mamelles nourricières de l’Etat? Voulons-nous vivre, oui ou non? Voilà ce qu’il s’agit de savoir. Car, cette question de l’agriculture, c’est, à la lettre, une question de vie ou de mort. Je me propose de prouver : 1° Qu’il n’est de salut pour les campagnes que dans l’adoption du système de la grande culture ; 2° Que c’est à l’application du système contraire, au morcellement excessif du sol, que doit être attribué le dépérissement de l’agriculture en France ; 3° Qu’il faut établir en France le système de la grande culture, en le combinant, non pas avec le principe de l’individualisme, mais au contraire avec celui de l’association et de la propriété collective ; 1 Notons que Quesnay a collaboré à L’Encyclopédie de Diderot, articles « Fermiers et Grains ». (BARRERE A., op.cit., p. 166.) Aussi, combien même les physiocrates sont des adeptes de la « philosophie des lumières », ils en représentent une face particulière, que l’on pourrait qualifier de réactionnaire. Ils effectuent, par-dessus l’humanisme de la Renaissance, une sorte de retour à des formes de pensée au parfum médiéval (VILLEY D., NEME C., op.cit., p. 57.) 2 Ibid., p. 56. 3 Découverte par Harvey au siècle précédent. L’idée de circuit existe déjà chez Boisguilbert. (BARRERE A. op.cit., p. 182.) 4 QUESNAY François, Tableau économique, Berlin, Akademie - Verlag, 1965. 5 VILLEY D., NEME C . , op.cit., p. 61. 6 Pour plus de précision il s’y intéressera après la question de l’organisation de l’industrie. On pourrait aussi parler, tout comme chez les physiocrates d'une organisation industrielle de l’agriculture. (VILLEY D., NEME C., op.cit., p. 61.) 7 Ibid. 90 4° Qu’il est aisé d’atteindre ce but progressivement, sans secousse, dans l’intérêt de tous sans exception, par la création d’ateliers sociaux agricoles, institués et dirigés d’après les règles indiquées pour les ateliers sociaux industriels. »1 Toujours est-il que ce système économique apparaît aux physiocrates comme l’expression même d’une raison transcendante : celle de l’Etre suprême. A leurs yeux, il existe un « ordre naturel et essentiel des sociétés »2. Y toucher serait un sacrilège. En ce sens, le devoir du souverain est de consacrer cet ordre providentiel3, d’en assurer le respect, au besoin par la force : c’est pourquoi, paradoxe logique, ces premiers libéraux sont partisans d’un gouvernement fort, d’un « bon despote »4 exécuteur des lois célestes, c’est-à-dire garant de sa non intervention en matière économique, et protecteur, avant l’heure du « laissezfaire, laissez-passer »5 particulièrement en ce qui concerne la liberté du commerce des grains à l’intérieur du royaume6 -, défenseur des lois naturelles7. Louis Blanc, pour sa part, considère que dans tous les cas le système de la concurrence et de l’individualisme est négatif car, dans son esprit, « laissez-faire, c’est laissez-mourir »8. Soit une différence qui s’inscrit dans une logique temporelle car, la réalité socio-économique9 n’est évidemment pas la même en 1789 qu’en 1848, on ne peut alors plus raisonner dans les mêmes termes pour résoudre cette question. Le système physiocratique est une théologie économique protectrice du travail de la terre comme seule source de richesse.10 Et c’est cette théologie qui va peu à peu céder la place à une psychologie présente chez Adam Smith. L’ de la nature allant progressivement céder le pas à l’ordre de l’intérêt individuel.11 Le travail est alors considéré en lui-même et dans tous les secteurs comme une source de richesse. 1 BLANC L., OT, p. 86. Nous envisagerons par la suite précisément l’organisation du travail agricole chez Louis Blanc. 2 VILLEY D., NEME C., op.cit., p. 64. 3 BARRERE A., op.cit., p. 174. (La notion d’ordre providentiel se trouvait déjà chez Saint Thomas. Elle était pour lui un ordre révélé, prescrit par Dieu et connu par l’interprétation du texte révélé, duquel la raison pouvait détruire les éléments constitutifs.) 4 Nous pouvons noter que la doctrine physiocratique a fait d’illustres disciples à l’étranger. Joseph II en Autriche, la Grande Catherine en Russie, le roi Stanislas en Pologne, Gustave III en Suède se sont mis à l’école des physiocrates et ont été inspirés de leurs principes de gouvernement. (VILLEY D., NEME C., op.cit., p. 56. ) 5 Ibid., p. 66. 6 BARRERE A., op.cit., p. 215. 7 VILLEY D., NEME C., op.cit., p. 65. 8 BLANC Louis, Le catéchisme des Socialistes, Paris, Aux bureaux du nouveau monde, 1849, p. 12. 9 Comme nous l’avons vu. 10 Pour plus de précisions sur la pensée physiocratique voir MERGEY Anthony, L'Etat des physiocrates : autorité et décentralisation, Thèse, Droit, Orléans, 2007 et LARRERE Catherine, L’invention de l’économie au XVIIIe siècle, Léviathan, Paris, 1992. 11 PIETTRE A., op.cit., p. 64. 91 B ADAM SMITH : LE TRAVAIL COMME SOURCE DE RICHESSE Adam Smith (1723-1790), généralement considéré comme le « père de l’économie politique »1 construit la base de son système sur l’idée que l’origine de la « richesse des nations »2 réside moins dans la terre que dans le travail de l’homme3 : « le travail est le fond primitif qui fait la richesse des nations »4. Il suit en cela une tradition toute britannique. Des philosophes comme Hobbes, Locke, Berkeley avaient déjà fait du travail la source de la valeur.5 Smith fait remarquer aussi que l’augmentation de la quantité de travail employée dans une société dépend de la quantité de capital qui tient le travail en activité. Ainsi, l’augmentation de ce capital doit être égale au montant des épargnes. Dans son esprit, en ce qui concerne l’affectation du capital réalisée par une mesure artificielle à l’avantage d’une industrie particulière vers laquelle il ne se dirigeait pas naturellement, elle ne peut être qu’un système subversif.6 Les marchés doivent, en cela, être entièrement libres. Le résultat du travail, selon Smith, dans les sociétés évoluées est la constitution du capital (qu’il analyse pour la première fois en distinguant capital fixe et capital circulant) dont le rôle est de rendre le travail encore plus productif.7 Or, il n’y a pas de capital sans épargne. D’où, chez Smith, une éloge de l’épargne et une condamnation du « prodigue ennemi du repos public »8 à l’encontre de l’apologie de la dépense, fréquente chez les mercantilistes9. Il précise en ce sens que l’épargne n’est que de la consommation différée.10 Mais, qui pousse l’homme au travail et à l’épargne, sinon l’intérêt privé? Et comment la compétition des intérêts particuliers n’aboutit-elle pas à un désordre total? C’est que chaque individu, cherchant – sous un régime de liberté – à rendre son effort plus efficace, « travaille nécessairement au plus grand revenu de la société. (...) Ne pensant qu’à son propre 1 Ibid., p. 65. « L’étude d’Adam Smith est très souvent rattachée à celle des classiques anglais on fait de cet auteur, soit le fondateur de l’économie politique scientifique, soit au moins le créateur de l’école classique libérale. » (BARRERE A., op.cit., p. 253.) 2 Titre exacte de l’œuvre : Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations (9 mars 1776). 3 C’est un postulat à développer car Louis Blanc pense la même chose. 4 PIETTRE A., op.cit, p. 65. 5 Ibid. 6 BARRERE A., op.cit., p. 271. 7 Il écrit par exemple : « C’est le capital qui met la terre en culture ; c’est le capital qui met le travail en activité : un impôt qui tendrait à chasser les capitaux du pays tend rait à dessécher toutes les ressources du revenu tant du souverain que de la s ociété. » (SMITH Adam, Recherche sur la nature et les causes de la Richesse des Nations, Paris, Economica, 2000 [1776], t. II, p. 350.) 8 PIETTRE A., op.cit., p. 66. Aussi, SMITH A., op.cit., t. II, p. 427. 9 « L’industrie ne peut augmenter que dans la mesure où le capital augmente, et le capital ne peut augmenter que dans la mesure où l’épargne s’accroît » (SMITH A., op.cit., t. IV, 9, p. 327.) 10 « Ce qui est annuellement épargné est aussi régulièrement consommé que ce qui est annuellement dépensé et à peu près dans le même laps de temps, mais est consommé par une catégorie différente de personnes. » (Ibid., t. II, 3, p. 409) – à savoir les travailleurs productifs que le capital constitué par cette épargne met en œuvre (Ibid., p. 423) cette équivalence entre épargne = consommation différée sera reprise jusqu’à sa critique par Keynes. 92 gain (...), il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n’entre nullement dans ses intention »1. Ici se situe l’apport psychosocial de Smith au libéralisme : sa croyance optimiste en l’organisation spontanée de la vie économique par la libre concurrence des intérêts particuliers.2 De même, chaque Nation, tendant à se spécialiser, travaillera, sans le chercher directement, à l’avènement d’une « vaste république marchande »3. Or, à ceci Louis Blanc, faisant le constat d’une toujours plus grande paupérisation, répond de la manière suivante : « (...) Il semble qu’une invisible main précipite la course des heures ; les événements se pressent, les choses emportent les pensées, le temps n’est pas aux longs ouvrages. Qu’il nous suffise d’avoir dénoncé l’imprudence fatale de ces prétendus hommes d’Etat qui, ayant à étudier des problèmes devenus inévitables, aiment mieux les masquer que les résoudre ; insensé pour qui l’orage même n’est point un avertissement salutaire.»4 Pour notre auteur, s’il y a bien une main invisible, c’est celle qui conduit inéluctablement la société vers la pauvreté à travers la concurrence, soit un retournement du concept contre les libéraux. Chez Louis Blanc la libre concurrence conduit d’un coté à la victoire d’un entrepreneur (le plus fort), un monopole, et de l’autre à une multitude de travailleurs mettant leur travail aux enchères5 (sachant qu’en l’espèce c’est le travailleur qui demandera le moins pour vivre – pour un travail offert qui sera embauché). Or, chez Smith, le moyen pratique qui assure le choc bienfaisant de ces rivalités pour en faire jaillir l’équilibre, c’est le marché avec le jeu libre des prix. De là découle un changement total de perspectives entre ces deux courants. Néanmoins, Smith précise que dans la fixation du prix du travail, un déséquilibre avantage l’entrepreneur par rapport à l’employé car celui-ci travail à long terme tandis que l’ouvrier a besoin de son salaire pour vivre tout de suite. Cette situation permet à 1 « À la vérité, son intention, en général, n'est pas en cela de servir l'intérêt public, et il ne sait même pas jusqu'à quel point il peut être utile à la société. En préférant le succès de l'industrie nationale à celui de l'industrie étrangère, il ne pense qu'à se donner personnellement une plus grande sûreté ; et en dirigeant cette industrie de manière à ce que son produit ait le plus de valeur possible, il ne pense qu'à son propre gain ; en cela, comme dans beaucoup d'autres cas, il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n'entre nullement dans ses intentions ; et ce n'est pas toujours ce qu'il y a de plus mal pour la société, que cette fin n'entre pour rien dans ses intentions. Tout en ne cherchant que son intérêt personnel, il travaille souvent d'une manière bien plus efficace pour l'intérêt de la société, que s'il avait réellement pour but d'y travailler. Je n'ai jamais vu que ceux qui aspiraient, dans leurs entreprises de commerce, à travailler pour le bien général, aient fait beaucoup de bonnes choses. Il est vrai que cette belle passion n'est pas très commune parmi les marchands, et qu'il ne faudrait pas de longs discours pour les en guérir. » (SMITH Adam, op.cit., t. II, p. 301.) 2 PIET TRE A., op.cit, p. 67. 3 Ibid. 4 BLANC L., « Le Socialisme, droit au travail », op.cit., p. 364. 5 BLANC L., QAD, op.cit., t.2, p. 24. 93 l’entrepreneur de fixer seul les conditions de la rémunération.1 Sur ce point Louis Blanc rejoint Smith. Pour notre auteur, ce déséquilibre originel dans les relations de travail fausse le marché et inverse, en conséquence, les effets bénéfiques théoriques de la main invisible. Avec les physiocrates, tout est flux2 : flux de produits, flux de revenus. Avec Smith, tout devient prix ; la production, un assemblage de coûts, donc de prix ; la répartition, une rétribution de facteurs, suivant la loi des prix : le salaire est le prix du travail, le fermage un prix, etc.avec les marchés correspondants3. Louis Blanc, pour sa part, aura une lecture des conséquences du marché beaucoup plus négative4. 1 SMITH Adam, Recherche sur la nature et les causes de la Richesse des Nations, op.cit., p. 75. « Ce qu’est le salaire ordinaire du travail dépend partout du contrat habituellement passé entre ces deux parties, dont les intérêts ne sont pas du tout les mêmes. (...) Il n’est cependant pas difficile de prévoir laquelle des deux parties, dans toutes les circonstances ordinaires, doit avoir l’avantage dans le conflit et forcer l’autre à se soumettre à ses conditions. Les maîtres, étant moins nombreux, peuvent se coaliser beaucoup plus facilement. En outre la loi autorise, ou tout au moins n’interdit pas, leurs coalitions, tandis qu’elle interdit celles des ouvriers. Nous n’avons pas de lois contre les coalitions destinées à diminuer le prix du travail ; mais nous en avons beaucoup contre celles qui sont destinées à l’augmenter. Dans tous les conflits de ce genre, les maîtres peuvent tenir beaucoup plus longtemps. Un propriétaire, un fermier, un maître fabricant ou un marchand, alors même qu’il n’emploi pas un seul ouvrier, pourrait généralement vivre un an ou deux avec les capitaux [stocks] qu’il a déjà acquis. Beaucoup d’ouvriers ne pourraient pas subsister un mois et presque une semaine, un petit nombre pourrait subsister un mois et presque aucun ne pourrait subsister une année sans emploi. A la longue, le maître a peut-être autant besoin de l’ouvrier que celui-ci a besoin de son maître ; mais le besoin n’est pas aussi pressant. » (Ibid.) 2 Pour employer un langage actuel. 3 PIETTRE A., op.cit., p. 67. Ici encore, cette méthode d’analyse dominera toute la pensée classique, jusqu’à Keynes et BEZBAKH Pierre, « Louis Blanc, Keynésien avant l’heure », Le Monde, mardi 2 septembre 2003, p. 5. 4 « Le bon marché, voilà le grand mot dans lequel se résument, selon les économistes de l’école des Smith et des Say, tous les bienfaits de la concurrence illimitée. Mais pourquoi s’obstiner à n’envisager les résultats du bon marché que relativement au bénéfice momentané que le consommateur en retire? Le bon marché ne profite à ceux qui consomment qu’en jetant parmi ceux qui produisent les germes de la plus ruineuse anarchie. Le bon marché, c’est la massue avec laquelle les riches producteurs écrasent les producteurs peu aisés. Le bon marché, c’est le guet-apens dans lesquelles les spéculateurs hardis font tomber les hommes laborieux. Le bon marché, c’est l’arrêt de mort du fabricant qui ne peut faire les avances d’une machine coûteuse que ses rivaux, plus riches, sont en état de se procurer. Le bon marché, c’est l’exécuteur des hautes-œuvres du monopole : c’est la pompe aspirante de la moyenne industrie, du moyen commerce, de la moyenne propriété ; c’est, en un mot, l’anéantissement de la bourgeoisie au profit de quelques oligarques industriels. » (BLANC L., OT, op.cit., p. 5758.) « Serait-ce que le bon marché doive être maudit, considéré en lui-même? Nul n’oserait soutenir une telle absurdité. Mais c’est le propre des mauvais principes de changer le bien en mal et de corrompre toute chose. Dans le système de la concurrence, le bon marché n’est qu’un bienfait provisoire et hypocrite. Il se maintient tant qu’il y a lutte : aussi-tôt que le plus riche a mis hors de combat tous ses rivaux, les prix remontent. La concurrence conduit au monopole : par la même raison, le bon marché conduit à l’exagération des prix. Ainsi, ce qui a été une arme de guerre parmi les producteurs, devient tôt ou tard, pour les consommateurs eux-mêmes, une cause de pauvreté. Que si à cette cause on ajoute toutes celles que nous avons déjà énumérées, et en première ligne l’accroissement désordonné de la population, il faudra bien reconnaître, comme un fait né directement de la concurrence, l’appauvrissement de la masse des consommateurs. » (Ibi., p. 58.) « Mais, d’un autre côté, cette concurrence, qui tend à tarir les sources de la consommation, pousse la production à une activité dévorante. La confusion produite par l’antagonisme universel dérobe à chaque producteur la connaissance du marché. Il faut qu’il compte sur le hasard pour l’écoulement de ses produits, qu’il enfante dans les ténèbres. Pourquoi se modérerait-il, surtout lorsqu’il lui est permis de rejeter ses pertes sur le salaire si 94 « Le bon marché, c’est la massue avec laquelle les riches producteurs écrasent les producteurs peu aisés. C’est, en un mot, l’anéantissement de la bourgeoisie au profit de quelques oligarques industriels. (...) La confusion produite par l’antagonisme universel dérobe à chaque producteur la connaissance du marché. (...) Donc, et nous ne saurions trop insister sur ce résultat , la concurrence force la production à s’ accroître et la consommation à décro ; donc elle va précisément contre le but de la science économique ; donc elle est tout à la fois oppression et démence. »1 Lorsque le marché fonctionne sans entrave, les antagonismes réels apparaissent et non l’équilibre. En effet, pour Louis Blanc, le véritable rapport de force est entre les entrepreneurs et entre les salariés eux-mêmes, à l’intérieur de leur groupe, et non entre entrepreneurs et salariés. Loin de la lecture marxiste du marché dans le cadre d’une lutte des classes (qu’évoque aussi Smith2), Louis Blanc insiste sur l’interdépendance vitale qui lie, au fond, l’entrepreneur et le salarié. Il s’éloigne de la vision antagoniste classique pour un projet socialiste d’union de classe. L’objectif est de rassembler des forces que mal à propos l’on oppose pour produire en commun. Se dessine alors, chez Louis Blanc, le but de la science économique qui est essentiellement descriptif. C’est-à-dire qu’elle explique « la manière dont la richesse se crée, se distribue et s’échange (...) sans rechercher si, (...) elle était répartie conformément aux règles de la justice »3. C’est sur ce dernier point que la pensée de notre auteur se structure. éminemment élastique de l’ouvrier? Il n’est pas jusqu’à ceux qui produisent à perte qui ne continuent à produire, parce qu’ils ne veulent pas laisser périr la valeur de leurs machines, de leurs outils, de leurs matières premières, de leurs constructions, de ce qui leur reste encore de clientèle, et parce que l’industrie, sous l’empire du principe de concurrence, n’étant plus qu’un jeu de hasard, le joueur ne veut pas renoncer au bénéfice possible de quelque heureux coup de dé. » (Ibid.) « Donc, et nous ne saurions trop insister sur ce résultat, la concurrence force la production à s’accroître et la consommation à décroître ; donc elle va précisément contre le but de la science économique ; donc elle est tout à la fois oppression et démence. » (Ibid.) « Ainsi, les fabriques écrasant les métiers ; les magasins somptueux absorbant les magasins modestes l’artisan qui s’appartient remplacé par le journalier qui ne s’appartient pas ; l’exploitation par la charrue dominant l’exploitation par la bêche, et faisant passer le champ du pauvre sous la souveraineté honteuse de l’usurier ; les faillites se multipliant ; l’industrie transformée par l’extension mal réglée du crédit en un jeu où le gain de la partie n’est assuré à personne, pas même au fripon, et enfin, ce vaste désordre, si propre à éveiller dans l’âme de chacun la jalousie, la défiance, la haine, éteignant peu à peu toutes les aspirations généreuses et tarissant toutes les sources de la foi, du dévouement, de la poésie... voilà le hideux et trop véridique tableau des résultats produits par l’application du principe de concurrence. » (Ibid., p. 61.) 1 Ibid., p. 57-58 2 « Les ouvriers désirent obtenir le plus possible, les maîtres donner le moins possible. Les premiers sont disposé à se coaliser afin d’augmenter le salaire du travail, les seconds afin de le diminuer. » SMITH Adam, Recherche sur la nature et les causes de la Richesse des Nations, op.cit., p. 75. 3 BLANC L., DP, op.cit., p. 235. 95 A présent, pour en revenir à Smith, en ce qui concerne uniquement le travail il avance qu’il est « la mesure réelle de la valeur échangeable de toutes les marchandises »1 bien que cette mesure en travail « ne soit pas celle qui sert communément à apprécier cette valeur »2. D’où sa nouvelle définition de la richesse, ou de la fortune, d’un individu : « c’est le pouvoir d’acheter ; c’est un droit de commandement sur tout le travail d’autrui, ou sur le produit de ce travail existant alors au marché »3. En somme, pour lui, un homme sera riche ou pauvre, selon la quantité de travail qu’il pourra commander ou qu’il sera en état d’acheter.4 Rien à voir alors avec une quelconque reconnaissance d’un droit au travail et encore moins concernant la mise en place d’un droit du travail qui viendrait déstabiliser le marché. Il y a chez lui une dépersonnalisation du travail. Il est à présent envisagé comme une chose, un instrument de mesure, un outil, une marchandise. Ce sur quoi Louis Blanc s’oppose complètement : « L’ouvrier vend son travail, soit. Mais n’y a-t-il donc rien dans cette vente qui la distingue de celle d’une table ou d’un joujou? Ce que l’ouvrier vend, quand il dispose de son travail, c’est tout son temps, c’est tout l’ensemble de ses facultés, c’est sa vie, c’est son être. Est-ce donc un marché ordinaire que celui-là? Entre l’homme qui met en vente une table et l’homme qui désire l’acheter, il n’existe aucun concours d’efforts. S’ils ne s’accordent pas, il n’y a pas de raison pour que l’un ou l’autre se plaigne. Le premier attendra qu’un nouvel acheteur se présente ; le second cherchera ailleurs l’objet désiré, ou s’en passera. Mais dans les relations entre le patron et l’ouvrier il entre un élément de permanence, une nécessité de concours et une idée de justice qui donnent à ces relations un caractère absolument distinctif. Il faut qu’ils s’unissent pour produire, et lorsqu’ils se divisent sur la question de savoir quelle portion de la valeur produite doit appartenir au capital sous forme de profits, au travail sous forme de salaire, il y a là un genre de conflit qui, par son importance, sa généralité et son rapport avec la prospérité publique, intéresse la société entière, réclame son attention et sollicite sa vigilance. » Qui plus est, dans la pensée de Smith, comme le travail est associé à la production il doit être divisé5 pour plus de rendement. C’est ainsi qu’à travers l’exemple, devenu célèbre d’une fabrique d’épingle, d’où sort habituellement une vingtaine d’unités par ouvrier et par jour, la parcellisation du travail en 18 opérations distinctes permet ainsi, à chaque ouvrier spécialisé dans un domaine de produire ensemble une moyenne de 4 800 épingles par ouvrier et par jour.6 Ce résultat remarquable pour Smith signale l’élévation de la puissance productive du travail qu’engendre sa division technique. 1 SMITH A., op.cit.,p. 39. Ibid. 3 Ibid. 4 Ibid., p. 29-35. 5 Thème par ailleurs déjà abordé par William Petty. (BARRERE A., op.cit., p. 279.) 6 Ibid., p. 280. 2 96 Louis Blanc aura une autre lecture des bienfaits1 de cette division autoritaire du travail en économie. Il y verra une forme d’aliénation qui prive l’homme de sa « liberté de vocations »2. Cette différence de perception symbolise concrètement la division intrinsèque de deux écoles de pensée. C’est au détour d’un article intitulé « La Liberté » publié le 15 juillet 18503 au Nouveau Monde qu’il répond à Smith. « Toutes les fonctions utiles étant réputées également honorables et leur diversité n’ayant point pour effet de mettre les jouissances d’un côté et les privations de l’autre, (...) un homme né avec du génie ne se trouverait pas relégué, dès sa naissance, dans l’abrutissante obligation de façonner, sa vie durant, à douze heures de travail par jour, des têtes d’épingle ; de sorte que le despotisme du hasard serait chassé du classement des fonctions sociales et remplacé par la première des libertés : La liberté des vocations. »4 Pour Smith, la division du travail est un facteur de progrès technique et économique de grande importance, tandis que pour notre auteur c’est avant tout un travail abrutissant si il n’est pas le reflet des facultés et de la vocation. Smith explique que : « dans une société bien gouvernée, elle donne lieu à cette opulence générale qui se répand jusque dans les dernières classes du peuple »5. En effet, explique-t-il, les ouvriers, après avoir satisfait leurs besoins de subsistance, disposent d’une quantité de leur travail disponible, qu’ils peuvent échanger entre eux, afin que chacun puisse se procurer les choses que, eu égard à sa spécialisation, il ne produit pas. Ainsi se développe une grande abondance parmi les différentes classes de la société, y compris celle des « plus petits particuliers »6. Soit une vision du travail assez éloignée de celle des socialistes qui eux mettent l’accent, non pas sur l’aspect unique de la productivité mais sur la vocation individuelle en fonction des facultés de chacun qui une fois encouragé par l’éducation permet une plus grande productivité car motivé par le plaisir de l’accomplissement personnel. Il y a aussi chez Louis Blanc, cette idée de répartition du travail mais dans un système basé le choix en fonction de ses facultés. Qui plus est, dans la pensée socialiste en général, la question n’est pas de produire pour produire mais de produire pour répondre à des besoins.7 Dans l’hypothèse de Smith, reprise ensuite par Taylor, le salaire se doit d’être élevé. Mais cela relève de la volonté des entrepreneurs et non d’une obligation politique. Or, l’expérience libérale concrète montre bien en 1848 qu’au nom de la compétitivité et de la 1 Euphémisme . BLANC Louis, Questions d’aujourd’hui et de demain, Paris, E. DENTU, Libraire-Editeur, t. III, 1880, p. 227. 3 Ibid. 4 Ibid. 5 SMITH Adam, op.cit., p. 16-17. 6 BARRERE A., op.cit., p. 280. 7 Nous reviendrons sur ces poins fondamentaux dans la suite du propos. 2 97 concurrence ça ne peut être le cas. Il s’agit, bien au contraire, d’optimiser la rémunération en fonction du meilleur rendement possible pour être concurrentiel. C’est ce que Marx appellera la plus-value.1 En ce qui concerne les conséquences sur le salaire, Louis Blanc précise en citant « Turgot : en tout genre de travail, il doit arriver et il arrive que le salaire de l’ouvrier se borne à ce qui lui est nécessaire pour se procurer sa subsistance... »2 ou encore ce que dit un autre auteur plus récent, Jean-Baptiste Say : « Il est difficile que le salaire du manouvrier s’élève au-dessus ou s’abaisse au-dessous de ce qui est nécessaire pour maintenir la classe au nombre dont on a besoin. »3 Ce qui revient à compter sur la mort, comme le précise Malthus, pour résoudre les crises. Rien à voir, au final avec le bien être ou la protection de la vie en général. Dans tous les cas, les salaires ne peuvent que baisser. Louis Blanc reprend pour son compte ces conclusions des théoriciens libéraux et tente d’y trouver un remède. Enfin, et pour clore la discussion sur la pensée économique concernant le travail de Smith, l’origine de la division du travail n’est pas dans la sagesse humaine, mais dans les possibilités qu’elle offre de satisfaire le penchant qui porte les hommes « à trafiquer, à faire des trocs et des échanges »4. Ce penchant qui n’existe pas chez les animaux, est commun à tous les hommes qui, dans une société civilisée, ont besoin à tout instant de l’assistance et du concours des uns et des autres ; mais c’est en vain qu’ils attendraient de la seule bienveillance de leurs semblables. C’est à l’intérêt personnel d’autrui que chacun s’adresse par une proposition du sens suivant : « Donnez-moi ce dont j’ai besoin et vous aurez de moi ce dont vous avez besoin vous-mêmes... Ce n’est pas de la bienveillance du boucher, du marchand de bière et du boulanger, que nous attendons notre dîner, mais bien du soin qu’ils apportent à leur intérêt. Nous ne nous adressons pas à leur humanité, mais à leur égoïsme5 ; et ce n’est jamais de nos besoins que nous leur parlons, c’est toujours de leur avantage »6. Toujours est-il que sans la disposition des hommes à échanger, chacun serait obligé de pourvoir lui-même directement à tous ses besoins. Aussi, il est à noter que l’absence de différences dans les occupations ne donne pas naissance à une grande différence de talents et donc à l’utilité qu’elle présente pour la société, « où chaque homme peut aller acheter, suivant ses besoins, 1 MARX Karl, Salaire, prix et profit, Paris, Editions sociales, 1952, p. 96-97. BLANC L., DP, op.cit., p. 115. 3 bid., p. 116. 4 SMITH A., op.cit., p. 22. 5 Thème qui sera repris et développer par Stirner. 6 SMITH A., op.cit., p. 20. 2 98 une portion quelconque du produit de l’industrie des autres »1 rejoignant ainsi, mais par un autre chemin, la maxime fondamentale de Louis Blanc : « chacun produisant selon ses facultés, consommera selon ses besoins »2. Or, il y a une différence essentielle entre les deux courants car, pour pouvoir faire en sorte que les intérêts individuels s’additionnent afin de former l’intérêt général, Louis Blanc, qui n’est pas totalement contre ce postulat insiste néanmoins sur un préalable nécessaire à la validité de cette équation : c’est que chacun soit en mesure de satisfaire son intérêt personnel! Dans le cas contraire, l’intérêt général ne peut se réaliser. Ce n’est qu’une somme d’intérêts individuels contrariés. De plus, le besoin dont parle Smith n’est-il pas d’autant plus grand que la situation du demandeur est désespérée. L’influence de cette situation sur le prix peut devenir disproportionnée. Quelle limite humaine peut-on fixer? Ces éléments forment le fond de toute l’oeuvre sociale de notre auteur. En cela, Smith à joué un rôle premier dans la construction critique du modèle libéral proposé par Louis Blanc. L’influence de Smith est, on le sait, considérable. Son exposé alerte, vivant, obtient malgré ses défauts (imprécisions3 et contradictions nombreuses4) un immense succès. La finalité hédonistique de son œuvre dominera toutes les écoles libérales.5 En 1810, un auteur allemand, Marwitz, écrit : « Il est un monarque aussi puissant que Napoléon, c’est Adam Smith. »6 Il sera traduit et diffusé en France par J.-B. Say au début du XIXème siècle. 1 BARRERE A., op.cit., p. 281. Nous pouvons ajouter qu’ en ce sens, Adam Smith prône une extension du marché dans le sens ou « un marché très petit n ’ encourage pas l’individu à s’adonner à une seule occupation, car il ne pourrait se procurer, avec son surplus , le sur plus d ’au trui qu’il désire . (...) En termes moderne : l’extension de la division du travail n’est limitée que par le volume de production échangeable sur le marché ».( Ibid., p. 282.) 2 Notons que contrairement aux libéraux l’objectif affiché des socialistes est de laisser s’exprimer les facultés. 3 BARRERE A., op.cit., p. 282. 4 PIETTRE A. op.cit., p. 67. Une contradiction réside, par exemple, dans l’affirmation faite dans la Théorie des sentiments moraux que toute la moralité reposait sur la sympathie, sur l’altruisme. N’y avait-il pas violemment attaqué la Fable des abeilles de Mandeville, au chapitre intitulé « Des systèmes licencieux »? Et maintenant il proclame que la poursuite par chacun de son intérêt égoïste surgit automatiquement – sans que nul ait à la vouloir – la réalisation de l’intérêt général! (VILLEY D., NEME C., op. cit . , p. 76.) « Ce chapitre V consacré au prix réel et au prix en travail, a suscité d’innombrables réactions de sens divers mais, en général, assez et parfois très critiques, en tout temps et de la part de très nombreux économistes. (...) De Charles Rist : « A vrai dire tout ce qui se rapporte à la théorie de la valeur dans la Richesse des Nations est d’une telle imprécision qu’il faut se résoudre à ne pas y chercher une rigueur que Smith n’y a pas mise » (GIDE Charles, RIST Charles, Histoire des Doctrines Economiques, Paris, Sirey, 1929, p. 88 (en note ) et BARRERE A., op.cit., p. 288. ) 5 VILLEY D., NEME C., op.cit., p. 75. 6 Cité par W. Wolowski, préf. A W. Roscher, Principes...1857, I, p. XIV in PIETTRE A., op.cit., p. 67. 99 C J-B. SAY OU L’IMPOSSIBLE SURPRODUCTION DE TRAVAIL : LA LOI DES DEBOUCHES J.-B. Say (1767-1832) est le vulgarisateur d’Adam Smith et le premier professeur en France d’économie politique1. Il se veut clair, méthodique, positif ; on lui doit, dans Traité d’économie politique ou simple exposition de la manière dont se forme, se distribuent et se consomment les richesses2 (1803) la division classique : production, circulation, répartition, consommation3. Cet homme d’action, chef d’entreprise lui-même4, précise nettement les trois facteurs de la production (terre, travail, capital) ; il se fait beaucoup plus qu’Adam Smith, l’apôtre de l’industrie5 en raison de l’essor de la révolution industrielle qui les sépare.6 Ainsi, il s’écarte nettement de la doctrine de son maître concernant la théorie de la valeur. Pour Say, le principe de la valeur n’est pas le travail, mais l’utilité. Par exemple, « une perle trouvée par hasard sur la plage ne représente aucun travail. Elle a de la valeur parce qu’elle est utile : c’est-à-dire parce qu’elle répond à un désir des hommes. »7 Doctrinaire et optimiste, il formule la loi des débouchés tendant à prouver : contre les mercantilistes, la neutralité de la monnaie ; contre les protectionnistes, les bienfaits du libre-échange ; contre les pessimistes, l’impossibilité de crises générales de surproduction. Ce dernier point nous semble particulièrement important dans le cadre de l’étude de Louis Blanc car l’idée est la suivante chez Say : « C’est la production qui crée une demande pour les produits (...) un produit créé offre, dès cet instant un débouché à d’autres produits pour tout le montant de sa valeur (...). Le fait seul de la formation d’un produit ouvre, dès l’instant même, un débouché à d’autres produits. »8 En d’autres termes, la loi des débouchés 1 Né à Lyon d’une famille calviniste, J.-B. Say (1767-1832), volontaire aux Armées, journaliste, membre du Tribunat en 1799, dut sa vocation économique à une lecture fortuite d’Adam Smith. Il publia en 1803 un Traité d’économie politique qui déplut à l’Empereur. Exclu du Tribunat, et ayant refusé un poste administratif, il se fit industriel (filature dans la Pas-de-Calais). Rentré à Paris en 1814, il se vit confier un cours d’économie industrielle créé par la Restauration (1819) et inaugura en 1830 la chaire d’économie politique du collège de France. On lui doit, outre son Traité, un Catéchisme d’économie politique et un Cours complet en 6 volumes.Son petit-fils Léon Say fut ministre des Finances de la III° République, et auteur d’un Dictionnaire d’économie politique. (PIETTRE A., op.cit., p. 72.) 2 SAY, J.-B., Traité d’économie politique ou simple exposition de la manière dont se forme, se distribuent et se consomment les richesses, Paris, Guillaumin, 1841 (1803). 3 Reprise et précisée par Stuart Mill. In VILLEY D., NEME C., op.cit., p. 138. 4 Il fonde une filature dans le Pas-de-Calais. (Ibid., p. 139.) 5 Il présenta d’ailleurs une analyse de l’entrepreneur qui fait de lui précurseur direct de Schumpeter. (PIETTRE A., op.cit., p. 73.) 6 VILLEY D., NEME C., op.cit., p. 141.
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Normes et formes de l'intérêt et du désintéressement à l'heure de la marchandisation du lien communautaire L'archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d'enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. isation et première approche avec l'exemple de la forme « Airbnb ». Nicolas Peirot, doctorant en Sciences de l'Information et de la Communication (laboratoire CIMEOS), ingénieur d'études au Réseau Transition (MSH, Dijon). Université de Bourgogne Franche-Comté. [email protected] : Les échanges marchands évolu eraient vers un modèle plus horizontal et collaborat if. On observe bien la vivacité de ce mouvement au sein des plateformes marchandes 2.0 . Nous proposons alors d'explorer la tension entre don et marchandisation à travers les concepts d'intérêt et de pouvoir d'agir. Notre hypothèse sera celle 'une reconfiguration du don en ligne en un « intérêt au désintéressement ». Pour étayer notre propos, nous reviendrons sur les résultats d'une étude exploratoire menée autour du site Airbnb. Mots-clés : intérêt, don, web 2.0, marchandisation, empowerment Summary: Market exchanges would be evolving into a more horizontal and collaborative model. We can notice the strength of this movement within 2.0 merchant platforms. Then, we propose to explore the tension between giving and commodification through the concepts of interest and empowerment. Our main hypothesis is about a reconfiguration of online giving in a form of " disinterested interest ". We will bring this issue through an exploratory study on Airbnb. Key-words: interest, giving, web 2.0, commodification, empowerment Selon le prospectiviste américain Jérémy Rifkin (2014), l'heure est à la « Troisième Révolution Industrielle ». La « montée en puissance du modèle collaboratif [devrait] progressivement marginaliser un capitalisme sur le déclin » (ibid, 2014). La prédiction est aussi prescription : il s'agit de penser une autre économie à l'heure du capitalisme informationnel. Cependant si cette « autre économie » semble avoir le vent en poupe, ses contours n'en demeurent pas moins flous. Derrière l'apparente plasticité du monde collaboratif se cachent une profusion de nouveaux modèles1 qui recouvrent eux-mêmes une réalité variée, du bistrotier optant pour une SCOP2 à Blablacar en passant par Le Bon Coin. Cependant, si les usages collaboratifs s'étoffent, leur critique aussi. Ces dernières proviennent tant du champ académique, comme le concept de digital labor (Cardon, Casilli, 2015), que de mobilisations collectives, comme cela a pu être le cas avec la « guerre des taxis3 » essuyée par Uber. Dans les deux cas, les « NATU4 » suscitent la crainte chez des professionnels voyant là une concurrence indépassable. Un peu moins exposé médiatiquement, le cas « Airbnb » nous semble bien illustrer les problématiques soulevées par l'économie de la contribution à l'heure du web social. A savoir l'émergence de tensions entre d'une part une culture de la contribution marquée par des logiques de don et perçue comme émancipatrice et d'autre part un capitalisme informationnel marqué par la marchandisation du lien social en ligne et perçu comme réifiant. Seulement, au-delà d'une critique morale de cette instrumentalisation marketing du lien social électronique par des modèles « prédateurs » (Lasne, 2015), il nous apparaît indispensable de comprendre les normes et les formes que convoque précisément cette instrumentalisation. En effet, le développement de ces plateformes s'opère avec la participation, voire même l'approbation des usagers-contributeurs (Dujarier, 2014). Nous souhaitons donc entamer une un questionnement autour des motivations poussant à utiliser ces services. Dans quelle mesure ces plateformes célèbrent-elle l'affirmation du règne néo-libéral par l'avènement d'un homo economicus parfaitement égoïste, acceptant le jeu de l'instrumentalisation communautaire pour satisfaire ses intérêts personnels? Ou au contraire, dans quelle mesure cette marchandisation des échanges « 2.0 » s'accompagne-t-elle d'une irréductible dose d'altruisme, signe d'une 1 Economie circulaire (Lévy, 2010), économie de la fonctionnalité (Bourg & Buclet, 2005), économie sociale et solidaire (Draperi, 2011) ou encore économie collaborative (Botsman & Rogers, 2011) etc. 2 Sociétés coopératives et participatives. Prépondérance des valeurs anti-utilitaristes dans l'étude du web social Pour débuter, rappelons qu'au-delà de sa définition marketing6, Airbnb demeure un dispositif sociotechnique s'inscrivant dans le paradigme du web social, dit « 2.0 » (O'Reilly, 2005). Pour s'en convaincre, nous confrontons la plateforme aux caractéristiques significatives de cette évolution du web (Proulx et Millerand, 2010) : 1) capacité des acteurs à produire des contenus7 2) accessibilité, facilité d'utilisation, 3) collaboration fondée sur la « force des coopérations faibles » (Granovetter, 1973), 4) modèle économique basé sur les contributions, 5) pluralité des pratiques : blog, réseaux socio-numériques, activités pair-à-pair, édition collaborative et bien sûr : sites de vente en ligne proposant une fonction « commentaire ». Cinq caractéristiques auxquelles correspond bien la plateforme Airbnb. 5 Voyageur, hôte ou les deux. Une « plateforme communautaire de location et de réservation de logements de particuliers. Site officiel de Wikipédia, consultable à l'adresse suivante : https://fr.wikipedia.org/wiki/Airbnb 7 Ou « UGC », user-generated content. 6 Rappelons cependant que cette dimension collaborative est loin d'être l'apanage du « web 2.0 », expression assurément galvaudée. D'une part parce qu'elle évoque une révolution technique uniquement (à travers la numérotation logicielle8) alors que le web social apparaît plus comme un agencement « sociotechnique » (Latour, 2007) aboutissant à l'émergence « d'outils sociaux » (Jouët & Le Caroff, 2006). D'autre part parce que ce caractère collaboratif est à envisager comme le « prolongement d'une tendance qui a toujours été présente » (Galibert, 2013). L'histoire de l'Internet est une histoire de la collaboration dans laquelle le web 2.0 apparaît comme une « massification des usages coopératifs, collaboratifs voire communautaires ». Ce dernier point rappelle la dimension communautaire inhérente aux dispositifs communicationnels en ligne, héritée à la fois d'une « éthique scientifique » (Flichy, 2001) et d'une éthique « hacker » libertaire (Himanen, 2001) que l'on retrouve aujourd'hui mobilisée dans le web social. Des valeurs de partage, de créativité, d'autonomie, d'individualisme non possessif qui ont fait pendant longtemps apparaître les communautés en ligne9 comme des collectifs de production alternatifs au tournant néo-libéral (Auray, 2010). Par la valorisation des logiques de don (Mauss, 1999 ; Caillé, 2000) et de reconnaissance qui en découlent (Honneth, 2013), ces communautés « archaïques » du web, relativement protégées de la marchandisation, apparaissent comme les promotrices de formes de contribution altruistes généreuses. Si l'on ajoute à cela une éthique de la discussion (Habermas, 1987) normalisée à travers la « Nétiquette » et permettant de garantir la tenue de discussions « raisonnées et raisonnables », on trouve là les points cardinaux de l'idéal émancipatoire de la communauté virtuelle. II . Pertinence relative du modèle du « don désintéressé » en ligne « En raison du minerai qu'il exploite, il devient indispensable pour le capitalisme cognitif de laisser la coopération spontanée se créer elle-même ». Yann Moulier-Boutang (2007) nous rappelle ici un fait essentiel : la maximisation de la production informationnelle passe par une instrumentalisation subtile des logiques de don. En effet, si le « community management » n'hésite pas à passer par des formes d'injonction collaborative (Lépine, 2000) très fortes, il n'en demeure pas moins que cette pratique issue des sciences de gestion puise ses racines dans l'idéologie d'internet10. L'instrumentalisation marketing du lien communautaire s'opère donc, 8 Un saut de « 1.0 » évoquant un saut majeur. Communautés du libre et communautés épistémiques notamment. 10 Toute la difficulté de l'exercice consistant à s'assurer de l'engagement des internautes tout en préservant une logique de don/contre-don. 9 en apparence, par une adhésion à la dynamique anti-utilitariste du modèle idéal de la communauté virtuelle. Il apparaît cependant nécessaire d'apporter un contrepoids critique à cet idéal du don désintéressé. Cela commence par un retour à sa forme archaïque telle qu'elle est décrite dans l'Essai sur le don de Marcel Mauss (1925). Par déformation, nous n'en retenons principalement aujourd'hui le potlatch, rituel mettant en évidence une lutte de prestige agonistique autour du don. La générosité s'inscrit dans une lutte, le don devient honneur. Dans ce cas de figure, difficile d'ignorer la dimension tout à fait intéressée du don. Bien sûr, sa traduction moderne par les théoriciens du MAUSS s'inscrit dans une logique beaucoup plus pacifiée, plus inspirée de la kula11 que du potlat . Cependant, force est de reconnaître la persistance de telles formes archaïques en ligne à travers les rivalités de reconnaissance et les quêtes de prestige qui peuvent habiter l'éthique « hacker » (Raymond 1998). Une conception appuyée dès 1993 par Howard Rheingold lorsqu'il décrit la participation communautaire comme un « mariage de l'altruisme et de l'intérêt personnel ». L'hypothèse d'un don purement désintéressé en ligne s'avère donc difficilement soutenable. Et cette perspective s'épaissit une fois recontextualisée dans le « 2.0 » marchand. Ainsi pour Michel Bauwens, théoricien du peer-to-peer, la plateforme Airbnb à l'instar de Uber, ne répondrait pas aux critères de l'économie du partage mais bien d'une « économie politique du capitalisme » dans laquelle « rien n'est partagé12! ». 11 Un double cercle de transactions rituelles au cours desquelles s'instaurent des relations statutaires dotées d'une grande stabilité. L'objectif étant de se lier de façon durable par l'échange de biens précieux . Selon Mauss, mieux vaudrait s'inspirer de la kula que du pot lat ch pour penser une autre société. 12 Site officiel du Monde, publié le 26 juin 2015, consultable à l'adresse suivante : http://www.lemonde.fr/entreprises/article/2015/06/25/michel-bauwens-uber-et-airbnb-n-ont-rien-a-voir-avec-l-economie-departage_4661680_1656994.html 13 Ou à ses formes plus subtiles, telle que celle introduite par Herbert Simon (1982) à travers la « rationalité limitée » des acteurs . 14 Voir par exemple « Datacoup ». Site officiel de Les Echos, publié le 4 mars 2014, consultable à l'adresse suivante : http://www.lesechos.fr/04/03/2014/LesEchos/21639-050-ECH_comment-se-reapproprier-nos-donnees.htm III. « L'intérêt au désintéressement » comme concept heuristique Dès lors, comment dépasser ces deux totems aussi structurants que paralysants que sont l'homo economicus et l'homo donator? Comment penser la contribution sans tomber dans le cynisme du calcul systématique ou a contrario dans l'illusion d'un don systématiquement généreux? Serait-il possible de penser des formes intermédiaires dans lesquelles, comme l'a écrit Richard Barbrook (2000), économie marchande et logiques de don « coexistent en symbiose »? Un débat central dans la revue du MAUSS que nous trouvons pertinent de transposer dans une perspective communicationnelle. Pour avancer malgré ce dilemme, repartons du paradoxe du « don pour l'acquisition de reconnaissance15 », remettant en cause la prémisse d'un don purement généreux. Un don intéressé que Fréderic Lordon (2006) propose de lire comme un « intérêt au désintéressement ». Cette conception d'un intérêt « souverain » avance ainsi une vision égoïste du don, prenant pour point de départ le conatus spinoziste, puissance individuelle que chaque chose déploie pour « persévérer dans son être ». Le don ne serait pas premier et apparaîtrait alors comme un fiction collective destinée à endiguer la violence du prendre, qui lui est premier. Cependant, ce « montage social de la donation » n'aurait de chance de fonctionner qu'à condition de tenir caché les intérêts personnels, rappel implacable de la pronation première. La « fiction donatrice » désigne alors cet « intérêt » que les individus (les usagers-contributeurs) auraient à se montrer désintéressés dans la recherche de leurs propres intérêts16 Précisons bien là qu'il s'agit d'un cadre heuristique et non d'une tentative (bien vaine) de compréhension du caractère ontologique de l'action. Cette mobilisation de « l'intérêt au désintéressement » se présente ici plus comme une hypothèse sur ce qui peut habiter les imaginaires et les pratiques de la contribution que comme une théorie générale de l'action17. La question n'est pas de déterminer si la « fiction donatrice » est bien fiction ou même d'identifier les mobiles profonds de l'action. Il s'agit plutôt de comprendre comment la « forme contribution » est représentée, rationnalisée par les usagers. Si cette option ne nous garantit pas de photographier très profond dans les multiples couches du réel, elle constitue néanmoins un bon indicateur du niveau d'infusion des logiques néo-libérales dans le bain des communautés en ligne. Normes et formes de la contribution 2.0 marchande : deux dimensions caractéristiques Afin de questionner les normes et les formes altruistes ou égoïstes de la contribution au sein du web social marchand et de proposer une critique des discours managériaux, il va s'agir d'étudier à la fois le modèle qu'en propose le dispositif sociotechnique étudié mais aussi les pratiques et les représentations qu'en ont les usagers. Pour cela, nous proposons de confronter les traces normatives dessinées par l'entreprise aux discours des utilisateurs. Le premier corpus se compose donc de dix pages web dont le contenu est hébergé sur des supports dont Airbnb est propriétaire ou administrateur : « à propos » Facebook, descriptif Twitter, pages web de la plateforme19. Notre second corpus se compose quant à lui de six entretiens individuels semi-directifs, menés dans une approche « compréhensive » (Kauffmann, 1996). Nous avons utilisé un guide d'entretien organisé autour de trois thématiques : 1) récit spontané d'expériences Airbnb, 2) motivations à l'utilisation du service, 3) usage du système de commentaires. Les entretiens, d'une durée d'une heure environ20, ont été réalisé de visu dont deux avec des utilisateurs Dijonnais et quatre avec des utilisateurs Parisiens. Ce choix repose sur une volonté d'intégrer la situation Parisienne à notre corpus. D'une part parce que la ville est statistiquement la plus sollicitée par les utilisateurs sur le territoire français21, d'autre part parce que la ville a connu une agitation politico-médiatique importante autour d'Airbnb en 201522. Les personnes Pôle de l'intérêt, de l'aimance, l'obligation et de la liberté. Telles que « Comment fonctionne Airbnb? », « A propos », « Devenez hôte », la « Charte d'hospitalité », la « Charte communautaire », le « ». Site du 2015, La mairie a par exemple mandaté les services municipaux afin de contrôler plus de 1500 logements. Site officiel du Figaro, publié le 22 mai 2015, disponible à l'adresse suivante. 18 19 interviewées sont pour la moitié des étudiants et pour l'autre moitié des cadres actifs. La moyenne d'âge est de 31 ans, ce qui inférieur à la moyenne annoncée par Airbnb23. Notons cependant que cette dernière concerne uniquement les hôtes et non les voyageurs. Nos utilisateurs représentent eux les deux 24. Enfin, précisons que les entretiens ont été enregistrés, puis analysés sans logiciel. En revanche, nous avons systématisé notre recherche en nous concentrant sur des faits saillants illustrant l'intérêt, le désintéressement et l'usage de la fonction commentaire. Cette construction méthodologique nous permettra de saisir les logiques prévalant en amont et en aval des usages en mettant en regard stratégies marketing et insertion sociale des usages. Elle nous ouvre ainsi sur une problématique jusqu'ici peu traitée en SIC, à savoir le couple « intérêt/web social ». Cette démarche n'émerge pas ex nihilo, elle vient compléter le versant marchand d'un parcours doctoral centré sur la question de l'engagement 2.0, au sein de communautés de pratique éco-citoyennes. Une double instrumentalisation du modèle émancipatoire de la communauté virtuelle Nous suivons Olivier Galibert (2013) lorsqu'il évoque la dimension « heuristique de chercher de manière systématique les traces éventuelles du modèle émancipatoire de la communauté virtuelle et de sa possible reconfiguration ». Des traces de ce modèle censé encourager la solidarité et l'entraide ressortent effectivement au niveau des discours institutionnels de la plateforme ; qu'il s'agisse de logiques de don : « en laissant un commentaire [) vous avez la possibilité d'exprimer votre gratitude », d'éthique de la discussion : « Les meilleurs commentaires donnent des informations constructives qui aident la communauté » ou de logique de reconnaissance : « Comment devenir Superhost25? ». Cependant, la logique de don de ce modèle nous apparaît immédiatement liée à une doubleinstrumentalisation du lien communautaire. Par la plateforme tout d'abord, dans le cadre d'une injonction participative intense auprès des voyageurs comme des hôtes, comme l'illustrent ce témoignage, puis cette phrase tirée de la section « chart 24 Les trois parisiens ayant tous déjà hébergé et voyagé, les trois dijonnais ayant uniquement voyagé. 25 « Le programme Superhost met à l'honneur les hôtes qui répondent à un ensemble de qualifications reflétant leur engagement, leur réactivité face aux voyageurs, leur sens de l'hospitalité et la qualité de leur logement. Afin de pouvoir identifier ces hôtes extraordinaires [] un badge sera automatiquement affiché sur leurs annonces ». 23 « Je mets des commentaires parce que le système marche comme ça et qu'ils te donnent l'impression que tu n'as pas le choix ». « Laissez un commentaire sur les voyageurs dans les 14 jours qui suivent leur départ ». D'autre part, on retrouve également cette instrumentalisation les usages des internautes. Sans nier l'existence possible de dons désintéressées, le système de commentaires semble fortement associé à l'idée d'un instrument de « contrôle qualité » : « Les commentaires, pour moi, c'est l'équivalent de l'indice confiance sur Amazon ». « Comme il y a le système de commentaires ça évite des mauvais comportements ». Les commentaires apparaissent comme une forme de don moins destiné à instaurer un lien avec les hôtes qu'à rassurer ses pairs sur la qualité du service proposé. La logique de réciprocité s'insère dans un utilitarisme social où le contre-don se révèle sous une forme collective, partagée. Le contre-don sert à améliorer la plateforme dont chacun profite, à écarter les « arnaques » : « Avec les commentaires, on s'entraide pour ne pas faire de conneries. Un peu comme sur Amazon ». De plus, notons que la réciprocité sous forme de commentaires est rendue difficile par le fait que la plateforme sollicite un don d'information simultanément chez l'hôte et le voyageur. Et quand bien même ce contre-don émergerait de manière spontanée du côté des « hôtes », les logiques reconnaissance ne semblent pas pouvoir entamer la logique de « consommation solidaire » des voyageurs : « [les hôtes] ont laissé un commentaire, très basique. Mais de toute manière ce n'était pas vraiment important cette note [] J'attendais plus un service ». La notion de « communauté » est remise en cause, bien que Airbnb se présente comme tel, sur son compte Twitter par exemple : « Airbnb is the world's largest community-driven hospitality company ». La plateforme semble faire coexister deux c d'usagers-contributeurs : les prestataires et les consommateurs, tout en insistant sur l'imbrication de ces deux figures. La plateforme encourage régulièrement les voyageurs à devenir hôte26. L'évolution parallèle de ces deux figures est entérinée par l'absence de charte d'utilisation commune27. Cette logique communautaire à deux temps semble cependant plus développée du côté des hébergeurs qui disposent d'un forum dédié sur la plateforme, dont le nom et la devise « Community Center. Learn, share, connect » laissent entrevoir une ébauche de communauté de pratique (Wenger, 1998)28. En revanche côté « usagers », le discours « communautaire » de Airbnb semble souffrir d'une dimension fortement incantatoire auprès d'utilisateurs rompus à l'instrumentalisation « 2.0 » du lien social électronique. Ces deux témoignages l'illustrent bien : « Le côté communautaire n'existe pas. Je ne vois pas qui pourrait dire « je suis une mec Airbnb » [] Après c'est malin stratégiquement de jouer là-dessus29 ». Avec toute la prudence que nécessite une étude exploratoire, il semblerait que le web 2.0 marchand procède d'une double-instrumentalisation du lien communautaire : par la plateforme, pour qui l'activité communicationnelle est une condition de survie. Mais aussi par les usagerscontributeurs qui associent l'activité communicationnelle à la garantie d'un service de bonne qualité30. Cette seconde forme d'utilitarisme n'exclut pas l'existence de contributions marquées par d'autres intérêts que matériels mais cette logique ne nous semble pas prépondérante dans les activités communicationnelles. En revanche, comme nous allons le voir dans la partie suivante, « contribuer » (par le système de commentaires) dans une logique utilitariste n'exclut pas des logiques d'action marquées elles, par des formes d'intérêt plus altruistes. Des usages 2.0 conçus comme contournement, perçus comme émancipatoires Notre hypothèse d'un « intérêt au désintéressement » ne nous semble donc pas être validée au niveau des formes de la contribution en ligne. La « fiction donatrice » que nous évoquions ne Le bouton « Devenez Hôte » sur la page d'accueil de recherche de logement en témoigne bien. Voyageurs et hôtes disposent respectivement d'une « charte d'hospitalité » et d'une section « Help » prescrivant et proscrivant toute une série de comportements leur permettant de se rencontrer dans les meilleures conditions, mais uniquement autour une relation de . Ainsi si la « charte d'hospitalité » explique aux hôtes « Comment communiquer avec [ses] voyageurs », celle des voyageurs leur indique « Comment [se] comporter en voyageur respectueux ». 28 Aucun des « hôtes » avec lesquels nous nous sommes entretenus n'a cependant utilisé ce service. C'est pourquoi nous ne faisons qu'évoquer ce point. 29 Ou encore : « Airbnb essaie de te faire croire que le monde entier est main dans la main. Ça ne me dérange pas sur le principe. Sauf qu'une plateforme qui se fait des thunes joue avec ces belles pensées ». 30 Ou d'un revenu complémentaire comme en témoigne certains hôtes : « Je le faisais parce que j'avais besoin d'argent mais ce n'est pas forcément un plaisir. Il faut quitter ton appartement, il y a des inconnus chez toi, tu sais que tu as toutes tes affaires avec eux. Je ne partais jamais le coeur léger ». Notons cependant que ce témoignage ne saurait être représentatif de la situation des hébergeurs sur la plateforme, comme l'évoque une étude (Chareyron, Jacquot &Cousin, 2016) commandée par les Echos et consultable à l'adresse suivante : http://www.lesechos.fr/week-end/business-story/enquetes/021703002170airbnb-quand-un-canape-cache-un-professionnel-1201510.php prend pas chez les utilisateurs. Les contributions semblent marquées par une forme d'honnêteté vis-à-vis de leur intérêt premier : la consommation d'un service. Malgré tout, cette dimension utilitariste semble se situer paradoxalement dans une dynamique perçue comme émancipatoire par les usagers-contributeurs au sein de ces communautés en ligne. En effet, les usages de ces plateforme marchande 2.0 s'inscriraient dans une volonté de rupture avec les modèles économiques traditionnels, jugés justement trop contraignants ou institutionnalisés. Ces deux verbatim illustrent bien cette représentation autonomisante : « Si on se prête une perceuse, les magasins de bricolage ne vont pas aimer. Airbnb, c'est pareil. « Tu te sens plus libre, tu te dis « tiens je ne rentre pas dans les clous qu'on m'impose » « Airbnb Dans le contexte actuel, tu as plus envie de donner de l'argent aux gens directement plutôt qu'à des entreprises ». Nous retrouvons ici un idéal de la liberté dont nous pouvons supposer qu'il est li à une projection de l'éthique « hacker » de l'Internet et du web 2.0 : accessibilité et force des coopérations faibles notamment. Autant d'éléments qui se présentent comme un contournement de l'économie capitaliste traditionnelle et qui paradoxalement ne sont pas sans rappeler les caractéristiques d'un processus empowerment de type « néo-libéral ». En reprenant la grille de lecture socio-historique du concept proposée par Marie-Hélène Bacqué et Carole Biewener (2013), nous pouvons en proposer la définition suivante : « une manière de favoriser l'action rationnelle et de maximiser le bien-être individuel dans un contexte déterminé par l'économie de marché". Il y a correspondance avec la définition de l'utilitarisme. Malgré une marchandisation des rapports qui semble totalement intégrée, cette dimension émancipatoire associée à Airbnb s'inscrit dans une volonté de limiter les effets rationnalisants de la marchandisation. Ce point est intéressant car il éclaire des logiques d'action qui s'éloignent d'un utilitarisme pur de la contribution en ligne. Deux témoignages illustrent bien ce propos : « La propriétaire nous a fait faire le tour du quartier, nous a présenté des gens et j'ai trouvé ça très sympa [] Elle nous avait même réservé un taxi Ecogreen qui était venu nous chercher à l'aéroport ». « On avait un problème et je n'ai pas osé appeler [] Je n'avais pas envie de la déranger. Quand tu fais ça c'est pas pour demander toutes les trente secondes où sont les choses ». Si le premier témoignage évoque bien les formes sensibles de marchandisation de l'authentique (Boltanski et Chiapello, 1999), le second laisse entrevoir une forme de don en apparence désintéressé. Limites et perspectives d'une étude à vocation exploratoire La problématisation que nous présentons comporte de nombreuses limites. En premier lieu à un niveau théorique. Nous avons travaillé autour de couples de tensions qui demanderaient à être affinés : homo economicus/homo donator, don/intérêt. Ces axes constituent bien sûr des points d'ancrage dans la réalité empirique. Cependant, leur approfondissement s'accompagnera d'un progrès interprétatif certain. Par ailleurs, nous reconnaissons ici certaines limites méthodologiques. En confrontant stratégie marketing des plateformes et insertion sociale des usages, nous passons à côté d'une dimension pragmatique essentielle. Cette limite peut cependant se muer en ouverture en approchant les usages à travers l'observation netnographique (Kozinets, 2010). Une analyse des annonces et des commentaires nous permettrait de compléter (ou de contrarier) les deux principaux résultats que nous obtenons ici. Premièrement, celui d'une double-instrumentalisation amenant les internautes à adopter des formes discursives en ligne fortement utilitaristes à travers le système de commentaires. Ensuite, celui d'usages 2.0 perçus comme des modes de contournement, nous amenant à identifier une forme de « marchandisation de l'authentique ». Ajoutons cependant à ce sujet que si le « supplément d'âme » qu'offre le système dénote une marchandisation du lien social, il n'en demeure pas moins qu'il peut aussi en créer. La générosité et le désintéressement auraient alors toute leur place. De plus, nous avons pu entrevoir des comportements à « coloration » anti-utilitariste. Ces conclusions appellent une étude plus approfondie. D'une part parce que les traces d'un utilitarisme exalté demandent à être confirmées dans les usages (dans les commentaires). Ensuite parce que les motivations conduisant à l'utilisation de la plateforme pourraient parfois laisser place au désintéressement. La question de « l'intérêt au désintéressement » conserve alors toute sa pertinence et nous conduit à renouveler notre problématisation. Comment repérer empiriquement la nature intéressée ou désintéressée d'une contribution, dans un environnement sociotechnique pensé dans une logique de rationalisation des activités communicationnelles? Références bibliographiques Auray, N. (2010). Le web participatif et le tournant néolibéral : des communautés aux solidarités. In Millerand F., Proulx S., Rueff J., Web social: Mutation de la communication, partie 1, chapitre 2, 33-48. Québec : Presses de l'Université du Québec. Bacqué, M-H., Biewener C. (2013). L'empowerment : une pratique émancipatrice? Paris : La Découverte. Barbrook, R. (2000). L'économie du don high-tech. In Blondeau, L., Libres enfants du savoir numérique. Paris : L'Eclat. Boltanski, L., Chiapello, E. (1999). Le nouvel esprit du capitalisme. Paris : Gallimard. Caillé, Alain. (2000). Anthropologie du don le tiers paradigme. Paris : Desclée de Brouwer. Caillé, A. (2009). Théorie anti-utilitariste de l'action, fragents d'une sociologie générale. Paris : La Découverte. Cardon, D., Casilli A. (2015). Qu'est-ce que le digital labor? Paris : Ina éditions. Dujarier, M-A. (2014). 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Nouvelles architectures et optimisations pour la montée en puissance des lasers à cascade quantique moyen infrarouge Simon Ferre Spécialité : Physique École doctorale : « Physique en Île-de-France » réalisée au Laboratoire Pierre Aigrain de l'École Normale Supérieure présentée par Simon FERRÉ pour obtenir le grade de : Nouvelles architectures et optimisations pour la montée en puissance des lasers à cascade quantique moyen infrarouge soutenue le 12/12/2016 Mme M. M. M. M. Mme M. Marie-Paule Besland Roland Teissier Jean-Yves Duquesne Sebastian Lourdudoss Robson Ferreira Virginie Trinité Mathieu Carras Directrice de recherche IMN, Rapporteur Directeur de recherche IES, Rapporteur Chargé de recherche INSP, Examinateur Professeur KTH, Examinateur Directeur de recherche CNRS, Directeur de thèse Ingénieur de recherche Thales, Co-encadrante Président de mirSense, Membre invité À ma famille, à Céline iv Remerciements Ardu exercice que de remercier toutes les personnes et les organismes ayant contribués à un travail de l'ampleur d'une thèse. Malgré son étalement temporel, spatial et administratif, en ayant appartenu à 5 entités distinctes, sur 4 villes différentes, je m'efforcerai de rendre ici à César ce qui lui appartient. Je m'excuse par avance auprès des oubliés, mais je sais qu 'ils se reconnaîtront et qu'ils ont conscience de l'importance qu'ils ont eu sur le chemin. Je remercie en tout premier lieu Marie-Paule Besland et Roland Teissier pour avoir acceptés d'être les rapporteurs de ce manuscrit, malgré un timing serré. De même, je remercie Sebastian Lourdudoss et Jean-Yves Duquesne d'avoir acceptés d'examiner mes travaux et de participer à mon jury. Comme toute thèse CIFRE, celle-ci s'est déroulée à cheval entre le monde de la recherche académique, ici porté par le Laboratoire Pierre Aigrain (LPA) de l'École Normale Supérieure, et celui de la recherche industriel, au sein de Thales Research and Technology, du III-Vlab et de mirSense. Merci à Dominique Pons, Bruno Gérard et Mathieu Carras pour m'avoir proposé ce sujet de thèse et accueilli au sein du groupe sources optroniques du III-Vlab puis de mirSense. J'ai également une pensée forte pour Philippe Bois, sans toi la thèse et son après au pu être beaucoup plus difficiles. Ainsi j'adresse mes remerciements les plus chaleureux à toute l'équipe du LPA et particulièrement à Robson Ferreira pour avoir accepté d'être mon directeur de thèse. Malgré ma relativement faible présence au LPA, j'ai beaucoup appris grâce à toi, humainement et scientifiquement. Je remercie également toutes les personnes avec qui j'ai pu échanger lors de mes passages au LPA, spécifiquement Francesca, Sukhdeep, Sarah, Camille, Jean, Simon, Matthieu et plus généralement l'ensemble des enseignants-chercheurs, doctorants, post-doctorants et personnels. J'ai pu avoir la chance de profiter des moyens humains et techniques de Thales et de mirSense pendant mes travaux. Je remercie ainsi toutes les personnes du III-V lab, et en particulier l'ensemble du groupe optronique. En particulier, j'adresse mes remerciements aux technologues qui m'ont transmis leur savoir faire et renforcés mon goût pour la fabrication, notamment à Bouzid pour m'avoir guidé sur la voie du QCL, Nicolas, Jean-François, Yannick, Frédéric, Alexandre, Catherine, Olivier, Sophie pour les formations et l'aide quant à l'utilisation des bâtis. Je remercie également l'équipe épitaxie, et spécifiquement Olivier et Axel pour m'avoir éclairés sur l'art de faire croître un cristal. Je remercie également les personnes du LTCA, Paolo, Raphaël, Odile, Didier, Stéphane et Frédéric, et de l'UMR, Sophie, Faycal et Bruno, notamment pour les échanges scientifiques, l'aide en salle blanche et les mauvaises vannes. Après la croissance et la technologie vient le temps du composant. Je remercie ainsi toutes les équipes projets de Thales, notamment du GRP, et du III-Vlab. Hélène, cette thèse n'aurait pas été possible sans toi, Frédéric, merci de m'avoir écouté et guidé dans les moments parfois difficile, Jean-Luc, nous nous reverrons sûrement! Un grand merci également à Fanny, Maryline, Nathalie, Isabelle et Aline qui ont été d'une grande aide pour les aspects non-scientifiques. Enfin, j'adresse un grand merci à tous les stagiaires, doctorants, post-doctorants et apprentis que j'ai eu la chance de connaitre pendant ces trois ans, je ne peux pas vous citer tous, vous êtes trop nombreux! v Au fil de ces travaux, j'ai eu la chance de pouvoir nouer de nombreux partenariats. Ainsi, je souhaitais remercier grandement Frederic Grillot de Telecom Paris pour la forte collaboration sur toute la dernière année de thèse, Alba Peinado et Enric Garcia-Caurel pour les mesures ellipsomètriques ainsi que l'équipe de SOLEIL hébergeant l'ellipsomètre de Mueller, Sebastian Lourdudoss et Wondwosen Metafaria de KTH pour les recroissances InP:Fe, Jean-Yves Duquesne et Danièle Fournier de l'INSP pour les mesures de conductivités thermiques ainsi que toutes les personnes rencontrées lors des conférences, notamment Dan Botez qui aura été le père spirituel d'un axe de ces travaux. Je profite également de ce paragraphe pour remercier grandement Ghasem Razavipour qui m'aura tranmis sa passion pour les composants à transition inter-sousbandes. Enfin, comment écrire ces remerciements sans citer mes collègues de mirSense. Greg, tu auras été un roc dans la tempête, d'une pédagogie, d'une patience et d'une gentilesse constante malgré mon mauvais caractère. Puisse tes raies spectrales être fines! Fahem et Ali, je vous dois beaucoup de ce que je connais aujourd'hui du montage et de la bidouille de banc. 2 I.2 Applications dans le domaine de l'infrarouge.............. 5 I.2.1 Les applications passives reposant sur l'imagerie thermique. 5 I.2.2 Les QCLs comme émetteurs de choix pour les applications infrarouges actives........................ 6 I. 3 Récapitulatif des grandeurs critiques et différenciantes des QCLs de puissance................................ 10 I.4 Présentation du sujet de la thèse.................... 11 II Définitions des figure s de mérites des QCLs 14 II.1 Description générale des QCLs..................... 14 II.1.1 Principes de fonctionnement des QCLs............. 14 II.1.2 État de l'art des QCLs de puissance.............. 15 II.2 Les défis de la fabrication II.2.1 La croissance de la zone active II.2.2 Les deux technologies standards 16 16 18 II.2.3 Le back-end, ou de la criticité du montage et du packaging 22 23 24 II.3.2 Modèle macroscopique : un modèle effectif pour compare r les dispositifs....... 30 II.3.3 Zones actives employées 32 34 35 II.3 Le transport électronique dans la structure II.3.1 Modèle microscopique II.4 Le guidage optique dans le ruban II.4.1 le guide d'onde vertical vi vii TABLE DES MATIÈRES II.4.2 le guide d'onde horizontal 36 II.5 COMLASE : outil de simulation des figures de mérites optiques et thermique............................... 37 37 II.5.1 Présentation de COMLASE II.5.2 Modélisation thermique des QCLs 39 42 II.5.4 Conclusion............................ 44 II.6 Conclusion du chapitre.......................... 44 II.5.3 Modélisation du comportement optique III Optimisation de la puissance émise par un QCL 46....... 47 III.1.1 Étude et optimisation du diélectrique d'isolation par ellipsométrie de Mueller..................... 47 III.1.2 Choix du diélectrique de la couche d'isolation....... 58 61 66 72 III.1.6 Conclusion............................ 81..... III.2.2 Amélioration des performances par enterrement de la zone active............................. 86 III.2.3 Conclusion............................ 87 III.1 Analyse et choix des matériaux constitutifs du QCL III.1.3 Mesures thermiques par la méthode 3ω III.1.4 Mesures thermiques par thermo-réflectance III.1.5 Choix de l'AlN comme couche d'isolation III.2 Optimisation du procédé de fabrication du composant III.2.1 Impact de la géométrie sur les performances III.3 Le rôle clef du back-end 88 88... 92 III.3.3 Conclusion............................ 94 III.4 Conclusion du chapitre.......................... 94 III.3.1 L'embase III.3.2 Amélioration de la thermique par le sens de montage IV Mise en forme du faisceau 98 IV.1 Introduction ................................ 98 IV.2 Mise en forme par couplage à une fibre 99 IV.2.1 Les fibres infrarouges. 100 IV.2.2 Résultats expérimentaux IV.2.3 Conclusion. 102 IV.3 L'utilisation de lasers larges. 102 viii TABLE DES MATIÈRES IV.3.1 Motivations IV.3.2 Procédé de fabrication. 104 IV .3.3 Résultats expérimentaux. 105. 108 IV.3.4 Utilisation d'un ruban à section évasée IV.3.5 Conclusion. 111 IV.4 La rétro-action comme moyen de contrôler le faisceau. 111 IV.4.1 État de l'art de l'utilisation de la rétro-action dans les diodes lasers et les QCLs. 112 IV.4.2 Dispositif expérimental IV.4.3 Rétro-action dans les QCLs larges, multimodes transverses. 114 IV.4.4 Conclusion. 119 IV. 5 Conclusion du chapitre. 120 V Réseaux de QCLs couplés 122 V.1 Introduction. 122 V.1.1 La combinaison incohérente de QCLs. 123 V.1.2 La combinaison cohérente de lasers semi-conducteurs. 123 V.1.3 La combinaison cohérente de QCLs. 125 V.2 Couplage évanescent de micro-rubans uniformes. 127 V.2.1 Principe de fonctionnement V.2.2 Fabrication des composants V.2.3 Résultats expérimentaux à 4,6 μm. 132 V.2.4 Résultats expérimentaux à 8,2 μm. 134 V.2.5 Conclusion. 135 V.3 Couplage évanescent de micro-rubans non-uniformes V.3.1 Étude thermique. 135 V.3.2 Filtrage du mode optique fondamental V.3.3 Conclusion. 140 V.4 Couplage par antiguidage V.4.1 Modélisation de l'antiguidage. 141 V.4.2 Choix du matériau pour l'antiguide V.4.3 Conception des structures antiguidées V.4.4 Briques de fabrication. 142. 144. 150 V.5 Conclusion du chapitre. 151 ix TABLE DES MATIÈRES VI Conclusion et perspectives 154 Annexes 158 A Applications générales dans le domaine de l' frarouge 160 A.1 Le domaine de la Défense. 162 A.2 Les applications médicales. 162 A.3 Loisirs. 163 B Mesures thermiques 164 B.1 Mesures expérimentales avec la méthode 3ω. 164 B.1.1 Résultats pour 1233 nm de SiO2 sur InP . 164 B . 2 Me sures e xpérimentales en thermoré f lectance et fit s des cour bes . 165 B.2.1 BK7 doré. 165 B.2.2 InP doré. 165 B.2.3 InP avec SiO2 doré. 166 B.2.4 Inp avec Si3 N4 doré. 166 B.2.5 InP avec TiO2 doré. 167 B.2.6 InP avec AlN sans préparation de surface, doré. 167 B.2.7 InP avec AlN avec préparation de surface, doré . 168 B.3 Courbes caractéristiques pour le calcul de la résistance thermique en fonction de l'embase. 168 B.3.1 EAlN . 168 B.3.2 ECD AlN. 169 B.3.3 ECD Cu. 169 C Caractéristiques en transmission des fibres chalcogénures utilisées 170 C.1 Fibre F1. 170 C.2 Fibre F2. 171 C.3 Fibre F3. xii Chapitre I Le domaine de l'infrarouge Tout rayonnement électromagnétique peut être décrit conjointement de manière ondulatoire, comme une onde électromagnétique se propageant, ou corpusculaire, comme un flux de particules, les photons. L'énergie des photons composant ce rayonnement permet alors de le classifier. Ainsi, la figure I.1 représente la dénomination attribuée à un rayonnement selon sa longueur d'onde. Figure I.1: Dénomination des domaines spectraux selon la longueur d'onde Les frontières entre chacune des terminologies ne sont volontairement pas représentées, ces délimitations étant arbitraires et variables selon l'application ou le corps de métier considérés. Le domaine du térahertz, pour des longueurs d'onde entre 1 mm et 100 μm, marque la rupture entre les dispositifs du monde de l'électronique et ceux de la photonique. Dans l'ordre décroissant des longueurs d'onde, on rencontre successivement après le térahertz, l'infrarouge (780 nm à 100 μm), le visible (380 nm à 780 nm), l'ultra-violet (10 nm à 380 nm), les rayons X (1 pm à 10 nm) et les rayons Gamma (inférieures à 1 pm). L'infrarouge (IR) est lui-même subdivisé en sous-domaines : le proche-infrarouge (NIR) de 780 nm à 1,4 μm, l'infrarouge courte longueur d'onde (SWIR) de 1,4 μm à 3 μm, le moyen-infrarouge (MWIR) entre 3 μm et 8 μm, l'infrarouge grande longueur d'onde (LWIR) entre 8 μm et 15 μm et l'infrarouge lointain (FIR) au-delà de 15 μm. Le domaine de l'infrarouge est particulièrement intéressant car il correspond au rayonnement électromagnétique émis par un corps à température ambiante, aux 2 3 mouvements vibrationnels des molécules et parce l'atmosphère y présente des fenêtres de transmission. En effet, tout corps émet un rayonnement électromagnétique dont la longueur d'onde dépend de sa température. Dans l'approximation du corps noir, la loi de Planck donne la luminance énergétique spectrale d'un corps avec une température surface T selon la longueur d'onde λ : L(λ, T ) = 2hc2 1 λ5 exp hc − 1 λkB T (I.1) -3 -1 Luminance (W.m.sr ) Ici, h représente la constante de Planck, c la vitesse de la lumière et kB la constante de Boltzmann. La luminance calculée par ce modèle est représentée sur la figure I.2 pour différentes températures : celle du Soleil (5477◦ C), celle d'un réacteur d'avion de chasse (550◦ C) et celle du corps humain (36◦ C). Soleil (5477°C) Réacteur d'avion (550°C) Corps humain (36°C) 1e+12 1e+10 1e+08 1e+06 0 2 4 6 8 10 12 14 Longueur d'onde (μm) 16 18 20 Figure I.2: Emissivité de corps à différentes températures, dans l'approximation du corps noir Plus la surface du corps considéré est froide, plus l'intensité est faible et plus le maximum de son émission est décalé vers les grandes longueurs d'onde. Ainsi un réacteur d'avion verra son maximum de rayonnement dans la gamme 2,5-5 μm et le corps humain aura une signature thermique plus marquée dans la bande 6-14 μm. Nous voyons donc déjà que l'infrarouge moyen est la gamme spectrale de choix pour les domaines où la température des objets entre en ligne de compte. D'autre part, l'atmosphère atténue peu les signaux infrarouges émis dans certaines fenêtres spectrales. Un spectre de la transmission de l'atmosphère est représenté sur la figure I.3, il est généré sur le logiciel ATRAN [1], à partir des données fournies par l'observatoire Gemini [2]. CHAPITRE I. INTRODUCTION 4 Figure I.3: Transmission de l'atmosphère entre 1 μm et 26 μm [2] Les principales molécules responsables de l'absorption sont rappelées sur cette figure. Ainsi l'ozone a un pic d'absorption autour de 9,5 μm, le dioxyde de carbone entre 14 μm et 16 μm. L'eau présente à la fois une forte absorption dans la plage 5,5 μm à 7 μm et de nombreux pics d'absorption au-delà de 17 μm. De cette façon, les signaux infrarouges peuvent se propager sur de grandes distances avec une faible atténuation si leur longueur d'onde est bien choisie. De même, l'eau n'absorbant que dans des plages spectrales bien définies, ils ne seront que faiblement impactés par la présence de brume ou de brouillard en comparaison des domaines du visible et du proche-infrarouge. Comme le montre l'exemple de l'atmosphère, les énergies correspondant à des photons dans l'infrarouge sont du même ordre de grandeur que les énergies de transition entre les états rotationnels et vibrationnels de nombreuses molécules. En effet, au sein d'une molécule, la cohésion de la matière est assurée par les liaisons chimiques entre les atomes. Selon les degrés de liberté dont elles disposent, les atomes de la molécule peuvent avoir différents mouvements périodiques relativement les uns aux autres. À titre d'exemple, les mouvements possibles pour un système de trois atomes sont rappelés dans la figure I.4. Figure I.4: Dénomination des mouvements possibles entre les atomes d'une molécule Les énergies correspondantes à ces mouvements vibratoires sont typiquement CHAPITRE I. INTRODUCTION 5 dans le domaine de l'infrarouge. Ainsi, lorsqu'un rayonnement infrarouge vient impacter une molécule avec une transition entre deux états vibratoires ayant une énergie proche, celui-ci est partiellement ou totalement absorbé. I.2 Applications dans le domaine de l'infrarouge Les propriétés de l'infrarouge que nous venons de voir, à savoir qu'il correspond à l'émission thermique des corps aux températures usuelles, qu'il présente des plages spectrales où il est peu atténué par l'atmosphère par rapport au visible et au proche-infrarouge, et qu'il correspond aux énergies de transitions entre les modes vibratoires de molécules, font que le rayonnement peut être utilisé pour de nombreuses applications, civiles comme militaires. Après quelques exemples pour l'infrarouge en général, nous détaillerons plus avant les utilisations propres aux sources QCLs de puissance. I.2.1 Les applications passives reposant sur l'imagerie thermique La majeure partie des applications passives reposent sur la détection du rayonnement thermique des objets. Nous en présentons ici quelques exemple, et en proposons un panel plus exhaustif dans l'annexe A. La vision assistée suscite un intérêt de longue date pour les applications militaires, notamment pour la vision nocturne. Comme nous l'avons vu précédemment, les corps émettent un rayonnement infrarouge dans une plage spectrale qui dépend de leur température. Ainsi, un déplacement de troupe de nuit est détectable, le corps humain émettant un rayonnement infrarouge - moyen et lointain - plus intense que celui du théâtre d'opération. Un avantage de cette méthode est qu'elle peut aussi permettre de visualiser une scène par temps de brume ou de brouillard, alors que la visibilité est très mauvaise. D'autre part, le rayonnement thermique a également trouvé écho dans le domaine médical. De cette façon, la thermographie infrarouge (IRT) a été développée. Elle offre une méthode de diagnostic non-invasive, rapide, sans-contact et sans source extérieure, pour de nombreuses pathologies [3]. Outre les applications militaires et médicales, les propriétés du rayonnement infrarouge sont régulièrement utilisées pour des usages civils, voire récréatifs. L'imagerie infrarouge est fortement utilisée dans le domaine sportif [4] pour l'arbitrage [5, 6, 7] ou la conception de matériel [8, 4, 9, 10, 11]. L'imagerie thermique a été également développée dans le but de réaliser des systèmes d'aide à la conduite [12, 13] et dans le but de réaliser des véhicules autonomes [14, 15, 16]. Enfin, la thermographie est un outil clef pour l'étude de déperdition thermique des bâtiments [17, 18, 19, 20, 21]. Nous voyons donc que le domain de l'infrarouge répond à de nombreux besoins en termes d'applications. Cependant, les domaines d'activité dont nous avons parlé dans cette partie reposent sur une utilisation passive du rayonnement infrarouge. Beaucoup d'autres applications nécessitent l'emploi d'une source émettant dans le moyen-infrarouge comme nous allons le voir dans la partie suivante. CHAPITRE I. INTRODUCTION I.2.2 6 Les QCLs comme émetteurs de choix pour les applications infrarouges actives Les applications dont nous avons parlées dans la section I.2.1 sont passives. Elles reposent sur la détection du rayonnement infrarouge correspondant à la température des corps observés. Néanmoins, un pan important des domaines applicatifs nécessite un éclairement de la scène par une source infrarouge. Figure I.5: Raies d'absorption de molécules dans le moyen-infrarouge [26] C'est donc naturellement que des systèmes reposant sur l'utilisation de QCLs ont été développés pour détecter la concentration d'un composé chimique dans un CHAPITRE I. INTRODUCTION 7 milieu, qu'il soit solide, liquide ou gazeux [27, 28, 29]. Le principe général est de mesurer l'absorption au travers du composé étudié, de manière directe ou indirecte, pour remonter à sa concentration. L'utilisation de plusieurs longueurs d'onde permet de différencier l'espèce chimique étudiée des espèces interférentes. On se rend donc compte que les sources employées pour de telles applications doivent remplir deux critères en termes de spectre d'émission. D'une part, les raies spectrales émises doivent être très fines devant la largeur de la raie d'absorption des molécules. Celle-ci est de l'ordre de 1 GHz pour des molécules simples. D'autre part, la technologie utilisée doit permettre de pouvoir mesurer facilement les absorptions à plusieurs longueurs d'onde. Deux méthodes sont alors envisageables, soit on utilise un laser unitaire possédant une accordabilité la plus forte possible, soit on assemble plusieurs émetteurs ayant chacun une longueur d'onde différente. Les QCLs apparaissent dès lors comme une solution pouvant répondre à ces deux critères. L'utilisation de réseau à contre-réaction répartie (DFB) permet de faire fonctionner les lasers sur un mode longitudinal unique et fin, de largeur spectrale inférieure à 0,1 cm−1. D'autre part, il est possible d'accorder le laser en changeant le courant injecté ou la température du support laser. Pour augmenter l'accordabilité, on peut aussi juxtaposer au QCL une bande métallique jouant le rôle de radiateur microscopique [30, 31]. Des accordabilités de 9 cm−1 et 14 cm−1 ont été obtenues respectivement à 1270 cm−1 et 2040 cm−1 ainsi que la possibilité de mesurer l'absorption par le N2 O. Une autre solution pour parvenir à une forte accordabilité avec un émetteur unique est de réaliser une architecture de QCL en cavité externe (EC-QCL). Dans cette configuration, le signal émis par une des deux facettes est réinjecté dans le QCL après diffraction par un réseau. L'orientation angulaire du réseau par rapport au laser permet de choisir le mode réinjecté, ce qui va forcer le QCL à émettre sur un seul mode spectral [32, 33]. Des EC-QCLs ont ainsi été rapportés dans la littérature avec des accordabilités de 430 cm−1 (entre 7,6 μm et 11,4 μm). Le remplacement du contrôle manuel de l'angle du réseau par un microsystème opto-électro-mécanique (MOEMS) a permis un balayage beaucoup plus rapide de la plage de longueurs d'onde [34, 33]. De nombreux projets de recherche ont été portés par le III-V lab et mirSense dans le domaine de la spectroscopie. On peut notamment citer des projets ANR comme MEGA (surveillance de la pollution des sols par analyse des épandages et des terrains à proximité des élevages) et MIRIADE (combinaison de barrettes de QCLs pour la mesure des gaz à effet de serre), des projets FP7 comme CLARITY (détection de polluants atmosphériques) et H2020 comme ICSPEC (spectroscopie des hydrocarbures). La détection de drogues et d'explosifs à distance Un cas particulier de la spectroscopie est la détection de substances dangereuses, pour lesquelles une mesure de proximité n'est pas possible, comme c'est le cas pour déceler des drogues ou des explosifs. En imageant la lumière rétro-diffusée, des traces de trinitrotoluène (TNT) et de tétranitrate de pentaérythritol (PETN) ont pu être mises en évidence [35] sur divers matériaux, y compris des vêtements. Ces méthodes intègrent aujourd'hui le plus souvent des QCLs en cavité externe [36, 37]. La détection se fait sur des distances de l'ordre de la dizaine de mètres [35, 38]. 8 Ce domaine est aujourd'hui très dynamique. À titre d'exemple, la société Block MEMS a signé en 2016 un contrat de 9,8 millions de dollars avec le Intelligence Advanced Research Projects Activity (IARPA) pour développer un système à base de QCLs pour détecter des traces d'espèces chimiques dangereuses à une distance minimum de 30 m. Afin d'effectuer des mesures sur des distances les plus longues possibles ces applications privilégient la puissance optique émise et la faible divergence du faisceau, en plus du fonctionnement mono-fréquence. Dans ce domaine, l'équipe a pris part à de nombreux projets. On peut notamment citer des projets ANR comme QUIGARDE (détection hétérodyne de gaz dangereux) et COCASE (détection d'explosifs), ou encore des projets FP7 comme DOGGIES et MIRIFISENS (détection d'explosifs et de drogues). Le développement des lasers couplés par évanescence qui seront traités dans la partie V.2 s'inscrit notamment dans le projet COCASE. La contre-mesure optique Enfin, le développement de sources infrarouges pour la contre-mesure optique directionnelle (DIRCM) est de plus en plus marqué. (a) Image infrarouge d'un avion de combat (source : FLIR) (b) Principe de la contre-mesure optique Figure I.6: Principe de la contre-mesure optique La méthode qui a été utilisée pendant longtemps consistait à déployer un grand nombre de leurres pyrotechniques ou pyrophores afin de perdre le missile. L'image I.7 représente un Lockheed MC-130 déployant ses leurres pyrotechniques. CHAPITRE I. INTRODUCTION 9 Figure I.7: Déploiement des leurres pyrotechniques d'un Lockheed MC-130 Cependant, cette solution n'est pas pratique, les leurres pyrotechniques sont du consommable coûteux, encombrant et non remplaçable en vol. De plus, ils ne permettent pas de contrer les missiles possédant des schémas de modulation avancés, et peuvent même être contre-productifs en améliorant l'éclairement de la scène. Le remplacement de ces solutions par des systèmes optiques a été propulsé par une suite de programmes lancés par l'armée américaine (CIRCM, ATIRCM et LAIRCM) dès 2009 [39] pour la protection de leur flotte d'hélicoptères. Ces systèmes ont été testés sur le terrain en Iraq et en Afghanistan en 2009. En parallèle, la Défense israélienne a lancé le programme MUSIC (Multi Spectral Infrared Countermeasure) basé sur des lasers pour protéger les avions civiles des missiles sol-air tirables à l'épaule (comme les missiles Mistral, Stinger ou Strela). Les contraintes sont très fortes sur ces systèmes en termes de puissance et de qualité de faisceau, afin d'avoir une luminance suffisante pour confondre le missile, mais également en termes de robustesse et de compacité, la charge utile sur les appareils en vol étant très limitée. Ce sont d'ailleurs des problèmes de fiabilité qui ont impossible l'utilisation de laser CO2 à doublage de fréquence. Ce sont alors les oscillateurs paramétriques optiques (OPO) qui ont été choisis comme sources infrarouges dans les systèmes de DIRCM au début des années 90 et déployés sur le terrain dans les années 2000, notamment via le projet LAIRCM sus-cité. Il s'agissait à l'époque des seules sources répondant aux critères de puissance, de fiabilité et de compacité. Les applications DIRCM nécessitent des sources offrant des puissances optiques supérieures à 1 W, avec des divergences de faisceau inférieures à 5 mrad, pouvant être embarquées sur des vaisseaux légers, sans système de refroidissement. Le module de DIRCM, fabriqué par Northrop Grumman, pesait alors 550 kg et ne pouvait équiper que les plus gros avions et hélicoptères de la flotte américaine. I.3 Récapitulatif des grandeurs critiques et différenciantes des QCLs de puissance Comme nous l'avons vu en filigrane de la section I.2.2, tout un panel de grandeurs caractéristiques est important pour répondre aux cahiers des charges des applications répertoriées. Nous avons essayé de les classer suivants quatre grands axes que sont les propriétés optiques, électroniques et thermiques, ainsi que la fabrication au sens large du composant. Cette classification est représentée sur la figure I.9. CHAPITRE I. INTRODUCTION 11 Figure I.9: Classification des performances des QCLs selon quatre axes De manière générale, les problématiques de finesse de raie spectrale, d'accordabilité, de consommation et de coût seront plus critiques pour les applications de type spectroscopie alors que celles de puissance, de dissipation thermique, de qualité de faisceau et d'encombrement seront plus importantes pour des applications militaires comme la spectroscopie à distance ou les contre-mesures optiques. Comme le montre le graphique, l'optimisation des performances des QCLs demande de trouver des compromis entre un panel de paramètres. Nous montrerons dans la suite de ce travail les interactions entre ces paramètres et des méthodes pour améliorer les performances, de manière individuelle ou conjointe. Dans la suite de la thèse, nous indiquerons en marge des titres le, ou les axes sur lesquels il porte particulièrement. Par exemple, l'icône marquera une section portant spécifiquement sur les aspects thermiques. I.4 Présentation du sujet de la thèse Le but de ce travail de thèse est d'étudier les phénomènes limitant la puissance optique émise par les QCLs et de développer des solutions permettant de l'augmenter. Nous séparons dans ce manuscrit ce travail en quatres parties. Dans un premier temps, nous expliquerons le fonctionnement des QCLs. Nous poserons donc au chapitre II les bases du transport électronique et du guidage optique dans les QCLs nécessaires à la compréhension de la suite de la thèse. Nous détaillerons également les procédés de fabrication et de report sur embases standards pour les réaliser, ainsi que les méthodes de caractérisations de leurs performances. Enfin, nous présenterons les outils de modélisation que nous avons utilisés pour simuler les comportements optiques et thermiques des composants. Dans un deuxième temps, nous montrerons au chapitre III comment il est possible d'optimiser le fonctionnement d'un QCL individuel. Nous commencerons par CHAPITRE I. INTRODUCTION 12 présenter une étude approfondie de la couche de passivation. Celle-ci repose sur des mesures expérimentales des propriétés optiques et thermiques des différents matériaux constituants le laser. Nous détaillerons particulièrement la perspective innovante de remplacer les diélectriques usuels par du nitrure d'aluminium (AlN). Nous présenterons ensuite des règles sur la géométrie du composant pour optimiser son fonctionnement, et nous comparerons les performances des structures dites enterrées et en double tranchée. Enfin, nous présenterons les différentes structures de zones actives étudiées tout au long de la thèse. Au chapitre IV, nous verrons que la puissance par unité d'angle solide, c'est-àdire la luminance, peut être contrôlée et améliorée en mettant en forme le faisceau. Nous commencerons par montrer des résultats expérimentaux de l'impact sur le faisceau du couplage d un QCL dans une fibre infrarouge. Nous présenterons ensuite les possibilités d'utiliser une section évasée pour réduire la divergence horizontale du faisceau, ainsi que des règles de dimensionnement. Enfin, nous montrerons expérimentalement qu'il est possible de mettre en forme le faisceau par rétro-injection de la lumière dans le QCL. En dernier lieu, nous étudierons au chapitre V trois architectures pour combiner de manière monolithique et cohérente plusieurs QCLs. Nous débuterons cette étude en rapportant des résultats théoriques et expérimentaux montrant la combinaison de QCLs par évanescence du champ dans des rubans uniformes, donnant lieu à un faisceau bi-lobe. Nous verrons ensuite qu'il est possible de revenir à une émission mono-lobe en utilisant des rubans non-uniformes, toujours couplés par évanescence du champ. II.1 II.1.1 Description générale des QCLs Principes de fonctionnement des QCLs Contrairement à la plupart des diodes lasers à semi-conducteur, l'émission laser dans les QCLs ne reposent pas sur une transition interbande, entre la bande de valence et la bande de conduction. En effet, les diodes lasers émettent des photons issus de la recombinaison de paires électrons-trous à l'interface d'une jonction p-n, on parle alors de composants bi-polaires. Ce principe est représenté dans la figure II.1. Figure II.1: Émission de photons dans une jonction p-n 14 CHAPITRE II. DÉFINITIONS DES FIGURES DE MÉRITES DES QCLS 15 Au contraire, dans le cas des QCLs, un empilement de couches est réalisé pour fabriquer la zone active, correspondant à une succession périodique de puits et de barrières quantiques. Cette hétérostructure provoque une discrétisation des états d'énergie dans la bande de conduction. Les photons sont alors émis par désexcitation des électrons entre des états liés de la bande de conduction, comme montré sur la figure II.2. La longueur d'onde du photon émis correspond à la différence d'énergie entre les deux états de la transition laser. Figure II.2: Émission de photons dans un QCL L'idée d'utiliser des transitions intersousbandes pour amplifier et émettre de la lumière a été théoriquement abordée pour la première fois par Kazarinov [41] en 1971, alors que la première réalisation expérimentale d'un QCL n'a été rapportée qu'en 1994 [42]. Après sa désexcitation, les électrons sont chassés de l'état bas de la transition radiative, typiquement par émission d'un phonon longitudinal optique. Cela permet d'assurer une inversion de population et de faire redescendre leur énergie pour qu'ils puissent être réinjectés vers la période suivante. Le schéma d'émission se répète alors en cascade, le même électron pouvant émettre plusieurs photons. Les trous n'entrant pas directement en compte dans l'émission lumineuse, on parle de composants unipolaires. De plus, les niveaux d'énergie, et les fonctions d'ondes correspondantes, sont fortement liés aux épaisseurs des puits et des barrières, ainsi qu'à leur hauteur. Il devient alors possible de jouer sur la structure quantique, appelé dessin de la zone active, en modifiant l'agencement et la nature des matériaux utilisés afin de changer le comportement du QCL, notamment la puissance et la longueur d'onde émises. C'est un avantage majeur des QCLs dont la longueur d'onde peut balayer plusieurs microns uniquement en changeant la hauteur et la largeur des barrières et des puits, alors qu'il est nécessaire de changer de couple de matériaux pour les diodes lasers. II.1.2 État de l'art des QCLs de puissance Depuis le premier QCL réalisé en 1994, ceux-ci étaient limités à un fonctionnement en régime impulsionnel (PW) ou à température cryogénique. En effet, l'utilisation d'un courant continu provoquait un échauffement trop important du laser, ce qui empêchait son fonctionnement. En l'alimentant avec des impulsions de courant, CHAPITRE II. DÉFINITIONS DES FIGURES DE MÉRITES DES QCLS 16 on réduit la puissance moyenne générée par effet Joule et le laser a alors une température plus basse, proche de celle de son module de refroidissement. C'est à partir de 2002 que l'utilisation de structures enterrées a permis d'obtenir des fonctionnement en régime continu (CW) d'abord à des température atteignable par refroidissement Peltier [43], puis à température ambiante [44, 45, 46]. Les puissances obtenues étaient alors déjà de l'ordre de plusieurs centaines de milliwatts à 20◦ C. Les QCLs de puissance ont d'abord été développés pour répondre aux besoins des applications de contre-mesures qui nécessitent des sources émettant de fortes puissances optiques dans la fenêtre 4-5 μm, qui sont les longueurs d'onde nécessaires aux contre-mesures optiques. C'est donc logiquement dans cette fenêtre que les sources de puissance ont été le plus développées, et que l'on retrouve les records de puissance. Ainsi des puissances de 5,1 W pour des QCLs en régime continu montés sur des embases diamant ont été reportées à 4,6 μm [47]. Des puissances crêtes de 203 W pour des QCLs avec un ruban très large de 400 μm ont été démontrées [48], en comparaison la largeur de QCL fonctionnant en CW est de l'ordre de 10 μm. Ces deux cas ignent parfaitement les limitations aujourd'hui rencontrées par les QCLs de puissance. Dans le but d'augmenter la puissance optique de sortie, on cherche à augmenter le volume de la zone de gain en élargissant le laser. Cependant, en l'élargissant on injecte de plus en plus de courant, et l'effet Joule devient trop important. On est alors obligé d'utiliser le QCL en PW, ce qui réduit la puissance moyenne. Outre le problème de la dissipation de la charge thermique, le fait d'élargir la cavité fait apparaître des modes transverses. Les indices effectifs des modes étant bornés, plus le nombre de modes augmente, plus leurs indices effectifs sont proches les uns des autres. II.2.1 La croissance de la zone active La zone active est crue par MBE ou par épitaxie en phase vapeur aux organométalliques (MOCVD) sur des substrats d'InP dopé n, typiquement avec de l'étain. Son niveau de dopage est de n ≈ 1017 − 1018 cm−3. Il fait également office de couche CHAPITRE II. DÉFINITIONS DES FIGURES DE MÉRITES DES QCLS Longueur d'onde (μm) littérature du laboratoire 3,4-3,55 μm > 400 mW 3,76 μm 1,1 W 4 μm 17 CW/PW Référence CW [52] 260 mW CW [53] >2W 400 mW CW [54] 4,6 μm 5,1 W 2,4 W CW [47] 5,29 μm 312 mW 350 mW CW [55] 6 μm 132 mW 115 mW CW [45] 8,38 μm 204 mW CW [56] 9 μm 2W CW [56] 9,5 μm 150 mW CW [57] 10,6 μm > 100 mW CW [58] 4,6 μm 120 W PW [50] 4,8 μm 203 W PW [48] Table II.1: État de l'art des QCLs de puissance. guidante inférieure. C'est le développement de cette technique de croissance de matériaux qui a permis la réalisation des premiers QCLs [42]. Elle permet de réaliser des couches de matériaux d'excellentes qualités, et d'épaisseurs de l'ordre de la monocouche atomique [59, 60]. Dans le cadre de cette thèse, toutes les zones actives ont été épitaxiées par MBE. Bien que le premier QCL ait été réalisé avec le système de matériaux InGaAs/InAlAs cru sur substrat InP, les équipes de recherche sont rapidement passées sur le doublet GaAs/AlGaAS cru sur GaAs qui était alors plus mature et permettait donc d'obtenir des structures de meilleure qualité cristalline. L'utilisation des QCLs à base de GaAs/AlGaAS est toujours d'actualité pour les QCLs émettant dans le Térahertz [61]. Cependant, le gain des QCLs dépend de la masse effective des électrons −3/2 tel que g ∝ (m?. Les électrons étant plus légers dans l'InGaAs (m?e = 0.041m0 e) pour l'In0,53 Ga0,47 As) en comparaison avec le GaAs (m?e = 0.063m0 ), ce premier permet d'atteindre des gains plus fort, ce qui fait que les QCLs dans le moyeninfrarouge sont aujourd'hui réalisés pour la plupart en InGaAs/InAlAs sur substrat InP. De plus, le décalage de l'offset de bande ∆Ec est au maximum de l'ordre de 400 meV pour les systèmes GaAs/AlGaAS, ce qui rend difficile la réalisation de QCL émettant en dessous de 9-10 μm de longueur d'onde. II.2.2 Les deux technologies standards Une fois la conformité de la plaque épitaxiée vérifiée, les QCLs sont fabriqués en suivant une succession d'étapes. Comme nous le verrons plus en détail dans la partie II.4, les QCLs peuvent être réalisés en architecture double tranchée (DT) ou enterrée (SIBH). Ces deux configurations sont représentées sur la figure II.4. CHAPITRE II. DÉFINITIONS DES FIGURES DE MÉRITES DES QCLS 19 Figure II.4: Représentation schématique des deux configurations possibles pour les QCLs, les QCLs dits à double tranchée (à gauche) et enterré (à droite). En effet, les deux contacts électriques du QCL peuvent être isolés électriquement en utilisant un diélectrique, dans le cas des QCLs DT, où un matériau cristallin semiisolant, dans le cas des QCLs SIBH. De même, on peut être dans une configuration Fabry-Péro t (FP), ou avec un réseau de Bragg distribué (DFB) si l'on so uhaite sélectionner la longueur d'onde . Les QCLs DFB sont majoritairement utilisés dans le cadre d'applications de spectroscopie, et non pour des applications de puissance. Ils ne sont donc pas décrits dans cette thèse. Pour plus d'informations à leur sujet, nous renvoyons le lecteur à la thèse de Maisons [65] ainsi qu'à la littérature pour leur théorie [66] et les résultats obtenus [67, 68, 69, 70, 71]. Nous décrirons dans un premier temps le procédé de fabrication des QCLs DT, puis celui des QCLs SIBH. Fabrication des QCLs DT Les principales étapes de réalisation des QCLs DT sont présentées sur la figure II.5. CHAPITRE II. DÉFINITIONS DES FIGURES DE MÉRITES DES QCLS 20 Figure II.5: Procédé de fabrication des QCLs en architecture DT. La plaque épitaxiée est dans un temps recouverte d'un diélectrique qui servira de masque dur pour la gravure du ruban. De la résine photo-sensible (PR) est ensuite enduite sur la plaque. Le choix de la résine a été optimisée pour obtenir les motifs les plus précis et les moins rugueux sur les flancs possibles. En effet, si le ruban n'est pas trop haut, il y a moins de matériau à graver. Le masque dur, et donc celui de PR peuvent alors être plus fins, ce qui permet d'obtenir des motifs plus petits, mieux résolus et aux flancs moins rugueux. Les motifs des rubans sont écrits dans la PR par photo-lithographie. L'insolation était historiquement faite au sein de l'équipe par l'utilisation de masqueuses manuelles. Nous avons participé pendant cette thèse au portage des procédés de photo-lithographie sur un stepper. C'est un appareil de lithographie sans contact où un système de lentilles vient projeter l'image d'un champ du masque sur la plaque avec un grossissement γ en suivant un programme prédéfini. Une fois le masque de PR révélé, le masque dur est gravé par RIE (Reactive Ion Etching). La gravure se fait principalement chimiquement par RIE, mais la densité d'espèce est faible, ce qui fait que le temps de gravure est long. Une fois le masque dur défini, le masque de PR est retiré et les deux tranchées sont gravées dans le matériau par gravure ICP-RIE (Inductively Coupled Plasma-RIE). La profondeur gravée est suivi in situ par interférométrie laser puis ex situ par profilomètre mécanique ou optique selon la précision nécessaire après la gravure et la taille de l'ouverture. On isole ensuite électriquement le ruban laser avec un diélectrique. Il s'agit usuellement de SiO2 pour des longueurs d'onde plus courtes que 7 μm et de Si3 N4 au-delà. Dans le cadre de ces travaux, de nouveaux matériaux pour la couche isolante ont été étudiés, notamment le TiO2 à la partie III.1.2, et l'AlN à la partie III.1.5. Des procédés de gravure ont été mis au point pendant cette thèse pour graver le diélectrique d'isolation avec une ICP-RIE, notamment pour graver le TiO2. L'utilisation de la gravure ICP-RIE a permis de réduire le temps d'ouverture du diélectrique d'un facteur 10. Les procédés développés pour le TiO2 peuvent être adaptés facilement CHAPITRE II. DÉFINITIONS DES FIGURES DE MÉRITES DES QCLS 21 pour le SiO2 et le Si3 N4 et peuvent permettre de réduire typiquement la durée de grav de 2 heures à une dizaine de minutes. Une fois le via ouvert dans le diélectrique, on dépose le contact métallique supérieur par dépôt physique en phase vapeur (PVD). Des pavés d'or de plusieurs microns sont ensuite crus par électrolyse sur les rubans afin d'améliorer la dissipation thermique et d'éviter les remontées de soudure lors d'un montage Down. Le substrat est ensuite aminci, puis le substrat est poli pour les lasers rapportés dans cette thèse. Le deuxième contact métallique est alors déposé en face arrière. La plaque est finalement clivée en lasers unitaires qui sont montés sur une embase, comme cela sera expliqué dans la partie II.2.3. Figure II.6: Procédé de fabrication des QCLs en architecture SIBH. Un masque dur est également déposé sur la plaque épitaxiée afin de définir le ruban par photo-lithographie, mais les espaces entre les rubans sont entièrement gravés comme montré sur la figure. On ne réalise pas de tranchées étroites comme dans le cas des QCLs DT, on parle alors de configuration simple ruban. Le masque dur et le ruban sont gravés de manière similaire aux lasers DT par RIE et RIE-ICP. Le masque dur est ensuite gardé et l'InP:Fe est recru dans les zones dégagées. Le masque dur sert d'inhibiteur à la croissance et permet de conserver le ruban dégagé. La recroissan ce de l' InP :Fe peut être faite par MOCVD, MOVPE ou HVPE. Des recroissances sur des réalisations antérieures à ce travail de thèse ont été faites en MOCVD et MOVPE, mais de meilleures performances, et notamment de plus faibles courants de fuites, ont été obtenus avec des recroissances HVPE. Nous avons ainsi réalisé des QCLs SIBH de forte puissance et des μSQCLs comme nous le verrons CHAPITRE II. DÉFINITIONS DES FIGURES DE MÉRITES DES QCLS 22 dans les parties IV.3 et V.2. Les recroissances HVPE ont été effectuées en partenariat avec l'université KTH. Pour chaque étape de fabrication, différents paramètres sont vérifiés, agissant comme autant de figures de mérites. Pour les gravures, on observera particulièrement les vitesses de gravure et les profondeurs atteintes au profilomètre mécanique et optique, et on inspectera la qualité des flancs et du fond de gravure au microscope optique et au MEB. Les épaisseurs des diélectriques déposés sont mesurés à l'ellipsomètre pour vérifier qu'il n'y a pas dérive des procédés de dépôts. l'uniformité de l'amincissement est vérifier au palpeur. II.2.3 Le back-end, ou de la criticité du montage et du packaging Après la fabrication technologique, aussi appelé front-end, accomplie, les plaques sont clivées perpendiculairement aux rubans lasers. On définit ainsi des barrettes de lasers par clivage. C'est lors de cette opération que l'on fixe la longueur des lasers et que l'on réalise les facettes. Chaque laser étant séparé électriquement de ses voisins, on peut dès lors réaliser de premières caractérisations sous pointes de tests. On peut tester la résistance de chaque QCL, faire des PIV et des spectres en régime impulsionnel. Dans le cas des lasers utilisés dans cette thèse, c'est après cette étape que l'on effectue sur chaque barrette un dépôt à haute réflectivité (HR). Chaque barrette de QCL est alors débitée en laser unitaire, également par clivage. Il est uniquement possible de vérifier après débitage la résistance des QCLs avec une pointe de tests sous aspiration. En effet, les lasers unitaires sont trop petits pour être préhensible, ils ont des dimensions typiques de 100 à 400 μm de larges pour 1 à 5 mm de long. Il est alors nécessaire de les reporter sur une embase, à la fois pour faciliter la manipulation, mais également pour dissiper la charge thermique. Les embases sont aujourd'hui pour la plupart en cuivre ou en AlN. Comme nous le verrons dans la partie III.3.1, le cuivre présente l'avantage d'avoir une meilleure conductivité thermique que l'AlN. Cependant l'AlN bénéficie d'un coefficient de dilation thermique (CTE) proche de celui de l'InP ce qui permet de réaliser des soudures dites dures (hard-solder). Elles présentent de meilleurs performances en terme de robustesse mécanique et de vieillissement en comparaison soudures dites molles (soft-solder) nécessaires avec des embases ayant un CTE trop éloigné de celui de l'InP, comme c'est le cas pour le cuivre. La soudure dure est faite par une pré-forme d'alliage Au/Sn eutectique, la part d'étain est de l'ordre de 20%, ce qui donne un point de fusion de l'alliage à 280◦. La préforme d'Au/Sn fait entre 4 et 6 μm de haut. Il est possible de souder le QCL sur l'embase soit du côté du substrat, soit du côté des couches épitaxiées. On parle alors respectivement de montages Up et Down. Le montage Up est plus facile à réaliser techniquement, une remontée de soudure sur le substrat ne gênant pas le fonctionnement du laser et il permet de garder visible le laser. (a) Boîtier Butterfly (b) Boîtier HHL Figure II.7: Exemple d'un QCL monté en boîtier butterfly (II.7a) et d'un boîtier HHL (II.7b). Les bo îtier HHL sont con çus pour accueil lir des modules Pel tier plus gros et pou vant dissiper plus de cha leur . Ce sont eux qui sont utilisés pour les QCLs de puissance. II.3 Le transport électronique dans la structure Afin de pouvoir analyser les performances des QCLs et d'extraire des figures de mérites pouvant les comparer entre eux, il est nécessaire de bien comprendre le transport électronique dans la structure. C'est en effet lui qui va dicter de nombreuses grandeurs macroscopiques comme le courant seuil, la puissance maximale ou la plage spectrale de gain. Dans cette partie, nous commencerons par détailler le transport des électrons à l'échelle microscopique. Cela nous amènera dans un second temps à présenter les dessins de zones actives utilisés dans ce travail de thèse. Enfin, nous donnerons un modèle macroscopique du fonctionnement opto-électronique des QCLs duquel nous pourrons tirer des figures de mérites mesurables expérimentalement. CHAPITRE II. DÉFINITIONS DES FIGURES DE MÉRITES DES QCLS II.3.1 24 Le but de cette partie est de pouvoir comprendre le fonctionnement des QCLs à l'échelle microscopique dans le but de pouvoir analyser les structures de bandes des différents dessins de zones actives, et extraire des grandeurs permettant de comparer leurs performances électriques, optiques et thermiques. Pour un traitement exhaustif et détaillé du transport électronique dans les QCLs nous renvoyons le lecteur à l'ouvrage de référence qu'est la Thèse de Terrazi [72]. Calcul des états quantiques La première étape pour la compréhension et la simulation des performances d'un QCL est le calcul des niveaux d'énergie. En effet, les empilements de semiconducteurs formant l'hétérostructure créent une succession de puits et de barrières quantiques dans la bande de conduction, dont résultent des états liés, ainsi que d'autres dans le continuum. Les transitions électroniques considérées au premier ordre ne se font qu'entre les états liés de la structure. Les énergies et les fonctions d'onde des états és sont calculés avec l'équation de Schrödinger indépendante du temps : HΨi (r) = Ei Ψi (r) (II.1) où H est l'opérateur Hamiltonien et Ψi et Ei sont la fonction d'onde et l'énergie de l'état i. Nous la résolvons dans l'approximation de la fonction enveloppe qui stipule que la fonction d'onde Ψi peut se décomposer en deux termes Ψi (r) = Fi (r)u(r) où Fi est la fonction enveloppe, qui varie lentement devant le paramètre de maille, et u(r) varie rapidement devant ce même paramètre. Figure II.8: Potentiel et fonctions d'ondes d'un dessin conventionnel. Sur la figure, on trace Ei + |φi | afin de visualiser conjointement l'énergie et les distributions électroniques de chaque niveau. Comme on peut le voir, chaque période du dessin peut être séparée en deux parties. D'une part, la zone radiative, où l'électron se désexcite vers un état plus bas en énergie en émettant un photon (de l'état en vert, vers l'état en bleu). Cet état bas est principalement dépeuplé par diffusion avec certains modes vibratoires du cristal, les phonons longitudinaux optiques. La zone radiative est typiquement constituée de trois puits. L'électron rentre alors dans une zone dite d'injection. Celle-ci sert essentiellement à le conditionner pour la période suivante, notamment en le thermalisant vers un état dit d'injection (en traits rouges épais sur la figure II.8). L'électron est alors injecté par effet tunnel vers l'état haut de la transition radiative de la période suivante. CHAPITRE II. DÉFINITIONS DES FIGURES DE MÉRITES DES QCLS 26 Équations d'état Le transport électronique peut donc être modélisé par un système de trois états quantiques, comme représenté sur la figure II.9. Figure II.9: Modèle simplifié à trois états du transport électronique dans un QCL. La zone d'injection n'est pas prise en compte, et remplacée par le courant J traversant la barrière d'injection, période après période. Les densités d'électrons ni sur chaque niveau i, ainsi que le flux optique S, peuvent être décrits par le système suivant [74]:  dn3     dt     dn  2  dt dn1      dt    dS   dt J n3 − − Sgc (n3 − n2 ) q τ3 n3 n2 − nther 2 = + Sgc (n3 − n2 ) − τ32 τ2 J n3 n2 = − + + q τ31 τ2 c n3 = (gc (n3 − n2 ) − αtot )S + β nr τsp = (II.5) où q est la charge de l'électron, c la vitesse de la lumière dans le vide, nr l'indice de réfraction, β est la portion de l'émission spontanée couplée au mode optique, αtot = αm + αw représente la somme des pertes optiques aux facettes et de propagation, τsp est le temps de vie de l'émission spontanée, τij est le temps de diffusion d'un électron entre l'état i et l'état j et gc est la section efficace du gain, τ3 représente le temps de vie moyen des électrons sur l'état haut avant désexcitation vers l'état 2 ou 1, ou vers le continuum : 1 1 1 1 = + + τ3 τ32 τ31 τesc ( II.6) Le terme ntherm reflète le repeuplement en électrons de l'état 2 par excitation 2 thermique des électrons de l 'état 1. Il est important de souligner pour la suite les dépendances de gc : 2 Γz32 gc ∝ (II.7) nr λγ32 où γ32 est l'élargissement spectral de la transition 3 vers 2 et λ est la longueur d'onde. On voit dans l'équation II.7 qu'il faut chercher à maximiser le recouvrement Γ du mode avec la zone active ainsi que l'élément de matrice dipolaire z32 traduisant CHAPI TRE II. DÉFINITIONS DES FIGURES DE MÉRITES DES Q CLS 27 le recouvrement des fonctions d'onde des états 2 et 3. En revanche, le gain décroîtra avec la longueur d'onde λ et avec l'élargissement de la transition 3 → 2, plus celle-ci sera étroite, plus le gain spectral sera piqué et intense. L'équation II.5 peut être interprétée comme suit : - l'état haut est peuplé par les électrons injectés depuis la période précédente J (terme ). Il se dépeuple par diffusion vers les autres états liés et du contiq n3 nuum ( ) ainsi que par émission stimulée (Sgc (n3 − n2 )) τ3 - l'augmentation de la population résulte de cette même émission stimulée n3 (Sgc (n3 − n2 )), ainsi que des électrons diffusés depuis l'état haut ( ) et de τ32 nther ceux excités thermiquement depuis l'état 1 ( 2 ). Il se dépeuple vers l'état τ2 n2 1 par diffusion. τ2 - la quantité de photons dans la cavité augmente par émission stimulée, le cgc S milieu présentant du gain ( (n3 − n2 )) ainsi que par émission spontanée nr n3 (β ). L'absorption par le milieu propageant et les pertes miroirs viennent τsp cαtot réduire cette quantité de photons. nr On peut donc trouver à partir de l'équation II.5 les densités de porteurs sur chaque état quantique, et le nombre de photons. On considère pour cela que l'on est dni dS en régime stationnaire, = = 0, et que le nombre de porteurs sur une période dt dt est conservé, et qu'il est égal à la quantité de dopants Nd : X ni = Nd (II.8) i En se plaçant dans un premier temps au seuil (S = 0), on obtient une expression du courant de seuil : (αm + αw )/gc + ntherm 2 (II.9) jth = q τef f La puissance optique émise, P, est directement liée au nombre de photons dans 1 la cavité de volume V par venant à sortir par la face avant, de pertes αm : P = 1 hν V cSαm nΓ (II.10) où Eph = hν est l'énergie des photons, Γ est le recouvrement du mode sur la zone active, n est l'indice de réfraction et c la vitesse de la lumière dans le vide. En différenciant, S par rapport à la densité de courant J, on obtient alors le rendement différentiel : 1 dP Np hν αm = ηi dJ q αm + αw avec ηi = τef f τ2 + τef f (II.11) (II.12) CHAPITRE II.
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Nous avons considéré ici les outils et les parures en os, en bois de cerf, en dent et en coquillage des sépultures collectives de la fin du 4e et du 3e millénaire en Bassin parisien. Les aspects typologiques, techniques, fonctionnels et spatiaux ont été tour à tour examinés afin de préciser le type de pièce, la place et la fonction de ce mobilier. Cette analyse montre qu'il existe une sélection des types d'objets déposés dans les tombes. L'étude de l'usure des objets de parure comme des outils montre que nous avons affaire, en règle générale, à des objets usagés, non pas déposés neufs. L'étude de leur répartition spatiale met enfin en évidence une structure élaborée des dépôts qui semble, par ailleurs, évoluer avec le temps. Au cours du 3 millénaire, en marge des dépôts collectifs, les dépôts individuels paraissent se développer. Aussi, les industries en matière osseuse sont-elles intégrées à une codification qui, au même moment, possède différentes facettes et significations. Abstract We have conducted a detailed study of both tools and ornaments in bone, antler, tooth and shell found in the collective graves of the Paris Basin from the end of the fourth to the end of the third millennium BC. All the typological, technical, functional and spatial aspects were considered in order to determine what kind of artefacts exists and what their function was in funerary practices. This analysis shows that not all the finds known for this period were deposited in collective graves but rather that the grave goods were selected. Following the study of the traces on ornaments and tools, we can state that, for the most part, they were not new when deposited. The spatial distribution of finds in tombs provides evidence of some deposit types which present a chronological evolution. Although the collective function of deposits found is important at the end of the fourth millennium BC, it also exists in parallel with the development of individual deposits during the third millennium BC. This is the reason why all the finds in matter of animal bones are included in a "funerary codification" of practices, which can have, at the same time, different forms and significance. Le mobilier en matière dure animale des sépultures du 3e millénaire n'a jamais fait l'objet de recherches approfondies. Aussi sommes-nous toujours face à un document dont on mesure mal l'insertion et la signification. Afin de mieux comprendre à quoi nous avons affaire, nous avons tenté ici, par le biais d'un inventaire en cours des données disponibles, de discerner ses composants techniques, fonctionnels et spatiaux. C'est ce travail que nous présentons dans les lignes qui suivent. 2. OUTILS ET PARURES EN MATIÈRE DURE ANIMALE : PRÉSENTATION GÉNÉRALE 2.1. État documentaire L'essentiel de la documentation relative au mobilier en matière dure animale du 3e millénaire en Bassin parisien provient des sépultures collectives. Il va sans dire que ces objets sont les moins bien connus de tous car ils proviennent pour la plupart de contextes explorés il y a longtemps. En outre, noyés au milieu des ossements humains, ils ont souvent échappé aux fouilleurs peu méticuleux. L'inventaire réalisé par nos soins dans le cadre du PCR sur le 3e millénaire dans le Centre-Nord de la France nous a donné l'occasion de réactualiser les données concernant quelque 400 sépultures collectives connues à ce jour dans le Bassin parisien. Aussi disposons-nous aujourd'hui d'un corpus plus fiable qui permet d'étudier la composition et la structure des assemblages de matière dure animale et de mesurer leur insertion dans les sépultures collectives. L'élaboration et la caractérisation du corpus ont été effectuées à partir de trois bases de données en partie incomplètes : 1) une base documentaire principale des occupations du 3e millénaire ; 2) une base « industrie osseuse » ; 3) une base « parure ». Ces deux dernières réunissent les données descriptives issues des inventaires de G. Bailloud (1964) et J. Peek (1975). Elles ont été complétées par le dépouillement des revues Gallia Préhistoire 180 Fig. 1 –– Localisation des 14 sépultures étudiées dans le Bassin parisien : 1. La Chaussée-Tirancourt « La Sence du Bois » (Masset, 1995) ; 2. Vers-sur-Selle (Piningre & Bréart, 1985) ; 3. Méréaucourt (Masset, comm. pers.) ; 4. La Croix-Saint-Ouen « Le Prieuré » (Legoff et al., 1995) ; 5. Bazoches-sur-Vesle « Le Bois de Muisemont » (Leclerc, 1993) ; 6. Le Mesnil-sur-Oger « Les Mournouards » (Leroi-Gourhan et al., 1962) ; 7. Loisy-en-Brie « Les Gouttes d 'Or » (Chertier et al., 1994) ; 8. Val - des - Marais « Mont Aimé » (Crubézy & Mazière, 1991) ; 9. Germ igny-l'Évèque « Les Maillets » (Baumann & Tarrête, 1979 ) ; 10. Vignely « La Porte aux Bergers » (Allard et al., 1994 ; Chambon, 2003 ) ; 11. Argenteuil « L'Usine Vivez » (Mauduit et al., 1977) ; 12. Marolles-sur-Seine « Les Gours aux Lions 2 » (Masset et al., 1967) ; 13. Malesherbes « Mailleton » (Richard, 1995) ; 14. Lutz-en-Dunois « Éteauville » (Nouel et al., 1965). Structure du mobilier funéraire en os, bois de cerf, dents et coquillages en Bassin parisien et par l'inventaire récent des objets conservés au Musée des Antiquités Nationales de SaintGermain-en-Laye. L'étude de ces vestiges et de leurs modes de dépôt s'est révélée assez difficile compte tenu limites de la documentation disponible. En effet, plus des trois quarts des sépultures collectives, fouillées au XIXe siècle, livrent des archives de qualité inégale : inventaire succinct du mobilier sans description ni dessin, manque d'information sur la provenance exacte des vestiges. Sur le quart restant, la qualité de la documentation est tributaire de différents facteurs. L'état de conservation de la sépulture et de son mobilier au moment de la découverte est variable. Rappelons que les sépultures collectives ne sont pas des ensembles clos. Le contexte de la découverte nuit parfois à la qualité de l'enregistrement des informations de terrain. Il arrive fréquemment qu'une tranchée de sondage ampute la sépulture. Enfin, l'archivage des documents de fouilles n'est pas toujours fait dans les règles. L'accès aux archives est souvent problématique. Lorsque le site a été publié, les dessins d'objets et les plans de répartition horizontaux et verticaux des vestiges font souvent défaut. 2.2. Présentation du corpus Sur plus de 400 sépultures recensées dans le Centre-Nord de la France, 219 ont livré du mobilier en os, dents, bois de cervidés ou coquillages. Parmi ces sépultures, près des deux tiers contenaient de l'outillage (159) ou de la parure (149). En définitive, plus de la moitié des tombes (55 %) possèdent du mobilier en matières osseuses. Le nombre d'objets répertoriés s'élève à plus de 4 600, dont 85 % d'objets de parure. La plus grande fréquence des objets de parure par rapport aux outils s'explique naturellement par le fait qu'une parure est souvent constituée de plusieurs éléments. Aussi, chaque objet de parure ne doit-il pas être considéré comme une parure a part entière mais comme l'un de ses composants. 3. CARACTÉRISATION DU MOBILIER : TYPES, TECHNIQUES ET FONCTIONS Nous allons nous intéresser ici à différents aspects du corpus et commencer par les types de pièces auxquels nous avons affaire. 3.1. Types et techniques 3.1.1. Outillage et armes Les différents outils ont été regroupés en cinq catégories qui sont, par ordre de fréquence dans les tombes (fig. 2) : 1) les outils perforants, 2) les gaines de hache, 3) les manches, 4) les outils tranchants et 5) les armes. 40 35 30 25 % 20 15 10 5 0 Outils perforants Gaines de hache Manches Outils tranchants Armes Autres Fig. 2 –– Proportions des différentes catégories d'outils et armes dans les sépultures collectives du Bassin parisien. 1) Les outils perforants sont les plus fréquents (40 % de l'outillage des sépultures). Deux types entrent dans cette catégorie : les poinçons 182 Fig. 3 –– Outils et armes en os et bois de cervidé des sépultures du 3e millénaire en Bassin parisien. 1. Gaine de hache lissée, Tinqueux « L'Homme Mort » (Bailloud & Brézillon, 1968) ; 2. Gaine de hache brute, Courjeonnet (Burnez-Lanotte, 1987) ; 3. Manche, Montigny-Esbly (Arnette, 1961) ; 4. Ha che -marteau, Vert- la -Gravelle ( Bailloud, 1964 ) ; 5. Outil tranchant, Congy (Bail loud, 1964) ; 6. Poinçon, Montigny-Esbly (Arnette, 1961) ; 7. Pointe de trait, Montigny-Esbly (Arnette, 1961). (largement majoritaires) et les aiguilles. Les poinçons sont souvent de grands gabarits et réalisés avec des os de cerfs ou de boeufs. Le procédé technique le plus répandu pour obtenir ces poinçons est le sciage en quart de métapode. Ils sont donc fréquemment munis d'une partie Structure du mobilier funéraire en os, bois de cerf, dents et coquillages en Bassin parisien de l'extrémité proximale de l'os (fig. 3, 6). Les aiguilles sont quant à elles généralement réalisées sur des fibulae de Suidés. 2) En pourcentage, les gaines de hache et quelques cas de gaines d'herminettes constituent la deuxième catégorie d'outils (30 %). Façonnées sur des segments médians de ramures, elles sont, dans les sépultures, systématiquement perforées transversalement. On les retrouve avec ou sans leur lame de pierre. Il est probable qu'une partie ait été démanchée. Deux types peuvent être distingués : les gaines dont la perlure naturelle de la ramure est laissée brute (fig. 3, 2) et les gaines dont la perlure a été lissée (fig. 3, 1). Souvent, dans ce deuxième type, étaient incorporés des « bouchons » confectionnés avec des pointes ou des segments transversaux d'andouillers voire des dents ou des fragments d'os. Ce dispositif était destiné à constituer ou reconstituer un plan de frappe à la base de la gaine. Ces plans de frappe permettaient d'accroître l'efficacité de la pénétration de la lame dans le bois. Aussi, ces gaines n'étaient vraisemblablement pas seulement réservées à l'abattage des arbres mais pouvaient certainement aussi être employées pour mettre en forme des objets en bois. 3) Les manches (13 %) sont généralement confectionnés à partir de petits segments d'andouillers, souvent lissés pour leur donner une forme cylindrique (fig. 3, 3). Les plus courants mesurent en moyenne entre 5 et 6 cm de long. On connaît quelques exemples de manches deux fois plus longs et plus étroits. En contexte sépulcral, ces manches sont presque toujours privés de leur insert. 4) Les outils tranchants, qui représentent 8 % de l'outillage, comprennent soit des tranchants frontaux, soit latéraux. Nous avons le plus souvent affaire à des ciseaux et à des racloirs (fig. 3, 5). Ces outils sont confectionnés avec les mêmes procédés techniques que les outils perforants, mais le sciage en deux de métapodes prédomine. Les outils tranchants sont de taille importante car ils sont réalisés, tout comme les poinçons, à partir d'os de boeufs ou de cerfs. 5) Les armes sont peu fréquentes (3 %). Une quinzaine de pointe de jet ont été inventoriées (Marly-le-Roi, Yvelines ; Crécy-en-Brie et 183 Vignely, Seine-et-Marne ; fig. 3, 7). De tous les objets en matière osseuse, la fabrication des armes réclame de loin le plus fort investissement. Elles sont en effet très travaillées, parfaitement régulières, souvent munies d'une soie et de reliefs façonnés. À ces principales catégories, il convient d'ajouter quelques pics (Les Mureaux, Yvelines ; Crécy-en-Brie, Seine-et-Marne), produits à partir d'andouillers de cerf, dont la fonction, en l'absence d'étude tracéologique, reste inconnue. Enfin, quelques pièces encore plus rares, telles les haches-marteaux (Nerville-la-Forêt, Val-d'Oise ; (fig. 3, 4), morphologiquement proches des gaines perforées, ou les masses en bois de cerf (Presles II, Val-d'Oise), pouvaient faire office d'outils ou d'armes (Bailloud, 1964). Le répertoire des techniques de fabrication et des formes d'objets funéraires de la fin du 4e et du 3e millénaire présente, en définitive, une variabilité limitée. L'industrie osseuse est fortement dominée par deux types d'outils récurrents : poinçons et gaines. 3.1.2. Parure La quantité de parures funéraires réalisées en matière dure animale est équivalente à celle des objets fabriqués en matières minérales. Os, dents, bois de cervidés et coquillages ont donné lieu à de nombreuses formes. Il peut s'agir d'objets pas ou très peu façonnés, gardant la forme naturelle du support employé, mais la majorité se compose d'éléments très élaborés, fabriqués sur des segments de matière. Dans la plupart des cas, la modification de la forme originelle du matériau est totale, ce qui ne permet pas toujours d'identifier l'espèce 45 40 35 30 % 25 20 15 10 5 0 Produits élaborés en test Coquillages entiers Os Dents Bois de cervidé Fig. 4 –– Proportions des divers objets de parure dans les sépultures collectives du Bassin parisien. 184 dont il provient. Nous conserverons la distinction peu façonné élaboré pour décrire les produits dans les lignes qui suivent (fig. 4). Coquillages Coquillages entiers L'examen des coquillages portés en parure (25 % des objets) montre une importante diver- sité morphologique correspondant à un large spectre d'espèces (fig. 5, 1 à 7). Les formes choisies sont longues, larges ou globuleuses. Les espèces actuelles, d'origine océanique, sont aussi bien représentées dans ce corpus que les espèces fossiles, provenant de gîtes fossilifères placés à proximité des sites (Taborin, 1974). Au sein de la diversité des espèces les Dentalium sont Fig. 5 –– Parures en matières dures animales des tombes du Bassin parisien. 1 à 12. Coquillage ; 13 à 17. Os ; 18 à 21. Dent ; 22. Bois de cervidé. 1, 2, 7 et 13. Oyes ; 3, 4, 5, 8, 20 et 21. Hypogées indéterminés de la Marne (coll. De Baye) ; 6 et 16. Oyes « la Butte du Moulin » ; 9. Nerville-la-Forêt « la Justice » ; 10, 12 et 22. Vert-la-Gravelle ; 11. Vigneux « la Pierre à Mousseaux » ; 14 et 17. Bury « Saint-Claude » ; 15. Crécy-en-Brie « la Chapelle » ; 18 et 19. Courjeonnet (dessins A. Polloni). Structure du mobilier funéraire en os, bois de cerf, dents et coquillages en Bassin parisien prédominants puisqu'ils représentent 60 % des coquillages employés (136 dentales découvertes à Éteauville et 82 aux Mournouards 3). Les Natica, les Cardium, les Trivia, les Cyprea, les Venericardia, les Purpulla, les Patella, les Pectunculus, les Turitella, les Unio, les Oliva ou les Sycum sont des familles ou des espèces secondaires. Tous les coquillages n'ont pas subi les mêmes aménagements et ceux-ci varient selon la nature de chaque coquille (Taborin, 1974). insi, les dentales sont simplement tronquées à l'extrémité la plus étroite, sans doute pour permettre le passage d'un lien (fig. 5, 7). Quant aux coquillages larges, tels le Cardium ou le Pectunculus, ils ont généralement été percés au niveau du crochet. Les coquilles globuleuses, telles les Natica, Trivia ou Purpulla, sont majoritairement munies d'une ou de plusieurs perforations près de l'ouverture. Le façonnage est parfois un peu plus intensif. Les natices, par exemple, peuvent être abrasées à plat de manière à découvrir la columelle. Ainsi, de nombreux coquillages des hypogées de la Marne (fouille De Baye) sont tronqués de la sorte (fig. 5, 5). Malgré la diversité des formes et des matériaux disponibles, le spectre des espèces privilégiées n'a pas beaucoup évolué depuis le Paléolithique (Taborin, 1993). Os et bois de cervidé Contrairement à l'outillage, où l'os et le bois de cervidé sont représentés autant l'un que l'autre, la parure est bien plus souvent réalisée en os. De plus, les éléments en os bénéficient d'un plus fort investissement technique. Les objets en os sont plus variés que ceux en test, mais, tout comme pour ces derniers, les perles sont majoritaires (fig. 5, 13 à 15). Discoïdes, cylindriques ou sphériques, elles sont généralement fabriquées à partir d'os de gros animaux, boeuf ou cerf, qu'il a fallu entièrement mettre en forme. Les perles tubulaires, quant à elles, étaient confectionnées sur des os plus graciles de petits mammifères, d'oiseaux ou parfois sur andouillers. Les boutons et les appliques biforées sont également bien représentés. Les appliques biforées en os ont une forme et des dimensions qui se rapprochent beaucoup de celles des appliques biforées en test (fig. 5, 16). Elles ont quelquefois été produites sur des fragments de crâne humain. Parmi les types plus rares, quatre sépultures du Bassin parisien ont livré des épingles en os dites « à tête en béquille » (Vinneuf, Yonne ; « l'Usine Vivez » à Argenteuil, Val-d'Oise ; « la Cave aux Fées » à Breuil-en-Vexin, Yvelines et Bury, Oise ; fig. 5, 17). Ce type est particulièrement abondant en Suisse occidentale, dans les groupes à Céramique Cordée et dans le 186 groupe d'Auvernier de la civilisation SaôneRhône (Strahm, 1979 ; Pétrequin et al., 1987–1988). On peut se demander s'il ne s'agit pas d'imports. Les autres types d'objets funéraires en os sont des anneaux (deux exemplaires découverts à « l'Usine Vivez » à Argenteuil, Val-d'Oise et « La Chaise aux Diable » à Dameraucourt, Oise) et quelques pendeloques de formes diverses. Les parures en bois de Cervidé sont peu courantes et surtout représentées par des pendeloques « en quille » réalisées sur des extrémités d'andouiller. Elles ne sont quasiment jamais perforées, mais creusées d'une gorge circulaire à l'extrémité la plus fine, en guise de moyen de suspension. Ces pendeloques proviennent toutes du département de la Marne (« les Hayettes » à Congy, « le Chemin des Bretons » et « la Plaque » à Aulnay-aux-Planches, « Val des Marais » à Vert-la-Gravelle), à l'exception d'une seule, trouvée dans les Ardennes dans le site de Liry (Bailloud, 1964). Dents Les parures sur dents (13 %) se distribuent par petites quantités dans chaque site. Elles sont généralement aménagées au niveau de la racine, par perforation, ou plus rarement par incision. Les espèces les plus fréquemment rencontrées comme support sont les canidés (17 exemplaires à la « Pierre Godon » à Tillayle-Peneux) (fig. 5, 18). Les dents de Suidés, très nombreuses également, proviennent presque exclusivement de tombes situées dans la Marne (41 trouvées dans les hypogées 1 à 7 des « Vignes Basses » à Courjeonnet et 17 aux Mournouards 3 au Mesnil-sur-Oger ; fig. 5, 19). Aussi, ces distributions comportent-elles peut-être un caractère régional. Les dents d'équidés arrivent en troisième position, bien qu'on en connaisse dans six sites seulement. Elles viennent pratiquement toutes des sites de la Bellée à Boury dans l'Oise (33 pièces) et de « l'Usine Vivez » à Argenteuil dans le Val-d'Oise (30 pièces). Un petit nombre de dents de Cervidés, Bovidés (fig. 5, 20), Ursidés, petits mammifères et quelques dents humaines sont dispersées au gré des tombes. Des Canidés, les hommes ont privilégié les canines alors que, pour les Équidés et les Bovidés, se sont les incisives qui dominent. Chez les Cervidés, craches et incisives sont employées. Les molaires et les prémolaires sont, en revanche, peu courantes. Parfois, on rencontre des demi-mandibules complètes de petits animaux, fouine ou hérisson par exemple (fig. 5, 21). Pour clore le chapitre des techniques, il convient de souligner un dernier aspect des parures en os (notamment les perles) et en dents et des outils. Ces derniers, en effet, présentent souvent un aspect brillant voire verni et une coloration tirant sur le brun qui font l'effet, dans les cas les plus réussis, d'une glaçure. Ces attributs peuvent avoir été produits par une chauffe, un traitement thermique adéquat qui colore la matière sans toutefois l'altérer. Les objectifs de ce traitement sont énigmatiques, mais ne sont pas dénués de caractères culturels, peut-être fonctionnels (Sidéra, 2002). Cette pratique, si l'on se fie aux échantillons que l'on a pu observer, n'a en tout cas rien d'anecdotique au 3e millénaire. Elle pourrait même être en forte hausse par rapport aux industries des millénaires précédents et constituer une tendance évolutive. À l'heure actuelle, aucune analyse physicochimique n'a encore été effectuée pour confirmer la pratique du traitement thermique au 3e millénaire. Cette lacune devra être couverte dans un avenir proche. 3.2. Aspects fonctionnels La majorité des outils et des parures comportent des traces d'usure. Ces objets étaient donc déjà usés lorsque les hommes les ont placés dans les sépultures. Quant aux quelques parures et objets découverts sans trace d'usure apparente, il ne s'agit pas pour autant d'objets neufs. Les coquilles nacrées ont souvent des bords brisés, émoussés, et des contours accidentés. Souvent, pour ce type de matériau très fragile, la forme des objets a dû se modifier entre le moment de leur fabrication et celui de leur dépôt dans la tombe. Les perforations des parures sont également fortement usées. Elles sont souvent déformées, parfois brisées. Des dents et des pendeloques ont été réparées : percées de nouveau pour prolonger leur durée d'utilisation. Structure du mobilier funéraire en os, bois de cerf, dents et coquillages en Bassin parisien En comparant des éléments de parure à l'intérieur d'un même lot, il n'est pas rare de constater que ceux-ci présentent aussi différents stades d'usure ; des objets très abîmés côtoient d'autres quasi neufs. Ceci peu s'expliquer par le fait que, pour prolonger l'usage d'une parure déjà assidûment portée, les objets cassés étaient remplacés au fur et à mesure par de nouveaux (Sidéra, 2002 : 223). On peut également envisager que la constitution d'une parure se faisait sur un long laps de temps, les éléments étant ajoutés petit à petit jusqu'à constituer des parures de plus en plus fournies. L'observation de la localisation des traces d'usure permet de se faire une idée de l'agencement des objets et de leur disposition dans une parure. Lorsque des appliques biforées en test ou en os, sont usées vers l'extérieur des perforations ou uniquement entre les deux perforations ou que des dents présentent une usure bilatérale entre la perforation et le sommet, on peut supposer que ces objets étaient soit cousus sur un vêtement ou sur une lanière de cuir, soit intégrés à une résille, dont ils constituaient le décor. Deux types de parures doivent donc être distingués (fig. 6) : – celles constituées d'objets enfilés sur un lien. Cela pouvait être le cas des dentales, coquillages sur lesquels on n'observe aucune trace de déformation spécifiquement liée à la couture, et de nombreuses perles. Ces éléments pouvaient être enfilés par centaines et enroulés autour du cou, des poignets ou de la tête (fig. 6, 1). – celles qui s'intègrent à un costume, à l'instar des Indiens des plaines nord-américaines qui ornent leur vêtement de centaines de dents d'élan (fig. 6, 2) ou de wapiti cousues (CurtisGraybill & Boesen, 1992). Il est donc important de faire la différence entre les éléments mobiles (colliers, bracelets) qui s'ajoutent ou non au costume et les éléments fixes et cousus qui en font partie intégrante. Ces deux types de port de parure n'ont en effet peut-être pas la même signification d'un point de vue social et il serait pertinent de les considérer séparément. Fig. 6 –– Exemples d'utilisation et de port de la parure chez des indiens d'Amérique du Nord. 1 : jeune mariée Wisham ; 2 : femme Cheyenne. Photographies E. Curtis ; d'après Curtis-Graybill & Boesen, 1992). Angélique POLLONI, Maïténa SOHN et Isabelle SIDÉRA 4.2. Distribution spatiale des objets : mobilier collectif et mobilier individuel De façon générale, le mobilier en matière dure animale n'a pas vraiment de spécificité spatiale par rapport aux autres catégories de mobilier. Dans près de la moitié des cas, sa répartition spatiale ne peut être distinguée du reste du mobilier. En revanche, on observe à nouveau La C roix-Saint-Ouen Vers-sur-Selle Vignely Méréaucourt Bazoches-sur-Vesle Malesherbes La Chaussée-Tirancourt Marolles-sur-Seine 2 Argenteuil 2 Lutz-en-Dunois Germigny-l'Évèque Loisy-en-Brie 52 17 Val-des-Marais Mesnil-sur-Oger 2 NMI total Manche Perle dents Gaine Sépultures Outil perçant Au sein des assemblages des 14 sépultures de référence, une certaine variabilité se manifeste dans la manière dont les objets se distribuent dans les tombes (tableau 1). Ainsi existe-t-il toute une série de « combinaisons » possibles, du seul poinçon (La Croix-Saint-Ouen) au lot le plus complet : outils perçants, tranchants, manches, gaines, perles sur dents, perles sur os et bois de cerf, coquillages entiers et coquillages travaillés (Mournouards II). Cet assemblage « idéal » est représenté par portions dans les autres tombes ; la portion élémentaire étant un outil perforant : 13 sépultures ont livré au moins un poinçon. L'abondance des poinçons correspond donc aussi à une dispersion par tombe élevée. À l'opposé, tandis que les parures sur dents constituent une catégorie peu fournie au regard d'autres types, une forte majorité de sépultures en livrent (11 des 14 sépultures). Enfin, alors que les perles élaborées sur coquillages Outil tranchant 4.1. Composition des assemblages dans chaque tombe sont six fois plus nombreuses que les perles sur dents, elles ne sont présentes que dans 9 des 14 sépultures du corpus. Ces derniers éléments sont donc plus fortement concentrés et peut-être devaient-ils former des parures fournies. Une différence dans les modes de dépôts des outils et de la parure est donc d'emblée décelable par la seule considération de la distribution de ces deux catégories dans les tombes. Les divers types d'outils sont distribués de manière cohérente par rapport à leur nombre total. Co quilla ge travaillé DES ASSEMBLAGES Perle os/bois 4. APPROCHE STRUCTURELLE ET SPATIALE Coquillage entier 188 NMI total 1 8 14 13 7 8 7 11 731 253 95 151 113 333 157 664 8 7 24 19 Tabl. 1 –– Distribution du mobilier en matière dure animale dans 14 sépultures du Bassin parisien. Structure du mobilier funéraire en os, bois de cerf, dents et coquillages en Bassin parisien des différences entre l'outillage et la parure. Dans 80 % des cas, ces deux catégories d'objets ne suivent pas la même dynamique spatiale. La parure provient presque exclusivement de la chambre sépulcrale (La Chaussée-Tirancourt, Bazoches-sur-Vesle), principal espace d'inhumation, tandis que l'outillage est davantage dans le vestibule (Les Mournouards, Vers-sur-Selle), l'entrée de la chambre sépulcrale (Germignyl'Évêque), un espace vide marqué par une interruption brutale de la couche sépulcrale ou « témoin négatif » (Méréaucourt). Contrairement à la parure, dont la répartition est relativement homogène, celle de l'outillage et des armes montre de fortes disparités. Il en va de même pour les types d'objets qui les constituent. Si les manches d'outils et les poinçons peuvent être associés aux défunts, les gaines de hache et les outils tranchants sont, en revanche, plus fréquemment à l'écart des inhumations (Méréaucourt, La Chaussée-Tirancourt). Cette observation met l'accent sur les différences de statut des types fonctionnels qui constituent le mobilier funéraire. Elle vient aussi étayer l'hypothèse de l'existence de deux sortes de dépôts dans les sépultures collectives : des dépôts collectifs, destinés à l'ensemble des défunts et des dépôts individuels correspondant à leur équipement personnel (Burn -Lanotte, 1987 ; Sohn, 2002). Ici, la parure est associée aux dépôts dépôt collectif 189 individuels puisqu'elle se trouve auprès des défunts. Les gaines à perforation transversale, au même titre que les haches auxquelles elles sont d'ailleurs encore souvent associées, ressortent au contraire du domaine des offrandes collectives. Parmi les outils, seuls les poinçons semblent avoir eu une fonction funéraire bien plus ambiguë puisqu'on les retrouve indifféremment dans les deux dépôts (fig. 7). 4.3. Structure des dépôts collectifs : chronologie et codes Si l'on en juge par les stratigraphies de la Chaussée-Tirancourt ou de Vers-sur-Selle, les gaines, tout comme les haches, semblent participer à des dépôts plutôt anciens. En outre, ce mobilier est fréquemment associé à de la céramique Seine-Oise-Marne de la fin du 4e millénaire (Chambon & Salanova, 1996). Placés à l'entrée du monument ou dans des zones de structuration de l'espace interne (seuils à Méréaucourt, contre les parois des chambres des hypogées des Mournouards et de Loisyen-Brie, tranchant vers le haut), ces dépôts manifestent des charges symboliques qui vont bien au-delà de l'aspect collectif proprement dit, puisqu'ils peuvent être mis en relation avec la fondation même du monument. Aux Mournouards, il est aussi possible d'établir un dépôt individuel gaine outil tranchant outil perçant manche coquillage coquillage perle travaillé entier os/bois Fig. 7 –– Graphique indiquant le statut collectif ou individuel des objets en matière dure animale dans les 14 sépultures collectives étudiées. perle sur dent Angélique POLLONI, Maïténa SOHN et Isabelle SIDÉRA 190 lien entre les haches et les figures féminines gravées sur les parois, sans toutefois pouvoir prouver leur contemporanéité. L'association hache, gaine et céramique forme la racine de toute une série d'autres assemblages d'objets dont le lot le plus fourni provient de Vers-sur-Selle : un vase, une gaine, plusieurs poinçons, armatures tranchantes, lames et éclats. Mais les assemblages funéraires ne sont pas toujours aussi complets. Les lots de Germigny-l'Évêque et de Marolles-sur-Seine 2 ne comportent, par exemple, pas de céramique. Dans ces tombes, l'association des objets et leur disposition, dans l'antichambre ou à l'entrée de la chambre sépulcrale, sont en tout cas significatives. En effet, des « lots » tout à fait comparables ont été retrouvés dans plusieurs sépultures voisines de notre zone d'étude : céramique, gaine, hache et poinçons à Bardouville en Seine-Maritime (Caillaud & Lagnel, 1967) et céramique, gaine, hache, poinçons et outil tranchant en os, armature tranchante et lame à Porte-Joie 1 dans l'Eure (Billard et al., 1995 ; Sidéra, 2002). Soulignons, à l'intérieur de ces dépôts, l'omniprésence des outils perforants. L'absence de lots aussi fournis dans des sépultures ayant connu une utilisation ancienne et brève (La Croix-Saint-Ouen : un vase de la fin du 4e millénaire et un outil perçant en os) et, à l'inverse, les céramiques typologiquement récentes de certains ensembles (Bardouville, Porte-Joie 1) indiquent une diachronie des dépôts collectifs. Ainsi, la position stratigraphique des lots de la Chaussée-Tirancourt et de Vers-sur-Selle, pourrait indiquer des apports successifs. Au cours de la longue utilisation des sépultures collectives, n'y aurait-il alors pas une évolution des « codes funéraires »? Ces derniers pourraient au départ être associés au monument et formés de quelques objets hautement symboliques et évolueraient vers des dépôts de plus en plus diversifiés évoquant un plus large panel d'activités quotidiennes. Par exemple, alors qu'il n'y a aucune inhumation à proximité, l'antégrotte des Mournouards a livré deux poinçons, une palette en os, des dents de porc et des empreintes de vannerie correspondant, d'après les auteurs, à vase SOM + gaine + hache + poinçons gaine + lame de hache vase SOM + gaine + poinçon ou spatule + industrie lithique vase SOM + gaine Dépôts collectifs de la fin du 4e millénaire Dépôts collectifs du début du 3e millénaire Fig. 8 –– Schéma représentant la position et la composition des dépôts collectifs dans les sépultures collectives du Bassin parisien. Dépôts collectifs de la fin du IVe mill. Dépôts collectifs du début du IIIe mill. Structure du mobilier funéraire en os, bois de cerf, dents et coquillages en Bassin parisien une sorte de « kit » de vannier (Leroi-Gourhan et al., 1962). L' out illage en matière oss euse s'inscrit alors dans deux sortes de dépôts collectifs dont on peut d'emblée souligner la dimension chronologique (fig. 8). Le premier, qui intervient au cours des derniers siècles du 4e millénaire réunit trois composants : vase, hache et gaine. Il est lié à la fondation du monument et peut-être destiné à assurer sa pérennité. Le second, plus fourni (vase, gaine et/ou hache, poinçons, lames, armatures de flèche et éclats de silex) intervient dès les débuts du 3e millénaire. Il dérive peut-être du premier. Bien que nous ayons affaire à un code, celui-ci évoque en tout cas bien plus clairement les domaines variés de la vie des défunts. C'est seulement au cours de cette seconde étape que l'on constate, en parallèle, une augmentation des dépôts individuels. À l'exception des gaines de hache, les outils en matière osseuse peuvent alors aussi se rencontrer hors des lots, dans le cadre de l'équipement personnel d'un défunt. 4.4. Équipement individuel et statut des défunts Près de la moitié des poinçons et la majorité des manches d'outils et des épingles en os proviennent de la couche sépulcrale. Bien que leur appartenance à tel ou tel individu puisse rarement être mise en évidence, au contraire des lames et des armatures en silex, il semble que les poinçons aient quelquefois été déposés par paire auprès des inhumés, comme à Marolles-sur-Seine, Éteauville et Bardouville. Quant aux manches, qui ont pu prolonger des burins (ils contenaient des dents de porc aux Mournouards), il est encore impossible de savoir s'ils accompagnaient des hommes, des femmes ou bien des enfants car les données ne sont pas disponibles. Le seul exemple d'association nette entre des pièces d'outillage en os et un individu concerne un type d'arme, des pointes de jet, fort rare dans les sépultures collectives du Bassin parisien. Ainsi, dans la tombe de Vignely, quatre pointes de jets en os et neuf armatures de flèches tranchantes étaient déposées près des restes déjà bien décomposés d'un sujet immature (fig. 9). En réalité, elles pourraient appartenir au squelette d'un homme, inhumé ultérieurement à proximité immédiate de l'enfant (Chambon, 191 2003) et faire référence à la symbolique de la chasse ou de la guerre, plus directement associée aux sujets mâles adultes. Ce dépôt n'est pas sans parallèle avec celui des huit pointes de jet et des armatures tranchantes en silex retrouvées au sein de la couche sépulcrale de la sépulture collective de Stein aux Pays-Bas (Modderman, 1964) ou des pointes d'armes de trait pédonculées en matière osseuse provenant de Poses « Sur la Mare » dans l'Eure (Billard Legoff, 1996). Contrairement aux outils et aux armes, la parure en matière dure animale peut parfois être mise en rapport avec un squelette et tout particulièrement avec ceux d'enfants d'au moins 4 ou 5 ans (fig. 10). Les exemples de Flavacourt, Troissereux, des Mournouards, Éteauville et Vignely montrent qu'elle a même pu constituer un moyen d'affirmation du statut de certains enfants au sein des sépultures collectives. Sur les sept sujets immatures de la sépulture de Vignely, deux d'entre eux, âgés de 4 à 8 ans étaient accompagnés de parure. Le premier possédait deux dents et une turritelle percées. Avec le second étaient déposées neuf perles en cuivre et une turritelle percée (fig. 9). Les cinq autres enfants ne possédaient aucun objet. Qu'ils soient numériquement plus importants, proportionnels ou inférieurs au nombre de défunts dans une sépulture donnée, leur répartition dans l'espace sépulcral montre en effet que tous les inhumés n'ont pas été également dotés ce qui, pour les débuts du 3e millénaire, rompt avec l'idée de pratiques profondément égalitaires au sein des sépultures collectives. 5. CONCLUSION Pour connaître et évoluer dans l'appréhension du mobilier funéraire en matières osseuses de la fin du 4e et du 3e millénaire, toutes les pistes à notre disposition doivent être exploitées, qu'elles soient technologiques, fonctionnelles ou spatiales. C'est ce que nous avons tenté de présenter ici, en croisant ces trois aspects. Structure du mobilier funéraire en os, bois de cerf, dents et coquillages en Bassin parisien 193 Fig. 10 –– Sépulture du Mesnil-sur-Oger « Les Mournouards » (Marne) : comparaison de la répartition spatiale de la parure en matière dure animale avec celle des inhumés dont le sexe et connu ; en noir les hommes, en blanc les femmes (d'après Leroi-Gourhan et al., 1962). Aussi, cette analyse met-elle en lumière les choix exercés sur la qualité des pièces qui constitu ent les dépôts funéraires. Ceux-ci ne sont pas fortuits, mais réalisés dans une gamme limitée de produits et structurés en fonction d'un code implicite qui, en même temps qu'il concerne les fondations des monuments, concerne un groupe de gens, en même temps qu'il caractérise des individus, caractérise leurs activités . Ces dépôts collectifs ont une structure récurrente, vase(s), gaine(s), hache(s), poinçon(s) et sont soit parmi les plus anciens (dernière moitié du 4e millénaire) soit du 3e millénaire. Une évolution de leur constitution et de leur emplacement apparaît entre cet intervalle. Du plus singulier au plus complet et profus, en fonction des monuments, les assemblages funéraires contribuent probablement aussi à différencier les statuts des sépultures. En marge de ces dépôts, l'individu en tant que tel est aussi traité et parfois « statufié » grâce à un équipement personnel variable selon sa classe d'âge et son sexe. Il ressort que les parures en matière osseuse sont le plus souvent associées aux enfants, mais pas tous, tandis que les armes le sont à quelques hommes adultes. Ces équipements personnels, limités à certains individus, contribuent encore à les différencier entre eux. Cette caractérisation de l'individu semble postérieure aux premiers dépôts collectifs et s'accentuer au cours du 3e millénaire. Certains objets, clairement dévolus au mobilier collectif, comme les gaines de hache et les haches qu'elles contiennent, constituent une symbolique propre et « collective ». D'autres objets, associés systématiquement ou presque à des individus, tels manches d'objets et parures, répondent à une symbolique distincte, peut-être davantage attachée à refléter un ordre social au sein duquel se place une personne donnée. Dans 194 ce schéma binaire, les poinçons en os sont à part. Ils font autant partie des dépôts collectifs et de leur symbolique qu'ils sont relatifs à des possessions individuelles et alors signifiants d'un statut personnel : âge, sexe, fonction sociale. Aussi, par ces différences de statuts individuels et collectifs du mobilier funéraire, est-on à un code qui, même s'il évolue dans le temps, possède en tout cas au même moment différentes facettes et significations. Bibliographie ALLARD P., ANDRÉ M.-F., CHAMBON P., LAFAGE F., PRAUD Y. & VALÉRO C., 1994. La sépulture collective de Vignely « La Porte aux Bergers ». In : Le Néolithique dans le Centre-Ouest de la France. Actes du 21e colloque interrégional sur le Néolithique, Poitiers, 1994. Chauvigny, Association des Publications Chauvinoises : 395–401. ARNETTE S., 1961. Allées couvertes de « SeineOise-Marne » dans la région d'Esbly. Gallia Préhistoire, 4 : 17–89. BAILLOUD G., 1964. Le Néolithique dans le Bassin parisien. Supplément à Gallia Préhistoire, 2. 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Retrouver un territoire d’eau multifonctionnel, Entre Douai et Tournai, la Vallée Scarpe-Escaut. Contribution de l'Histoire au développement territorial durable.. Sciences de l'Homme et Société. UCLouvain (Belgique), 2024. Français. &#x27E8;NNT : &#x27E9;. &#x27E8;tel-04614956&#x27E9;
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Dessèchement ou connexe : 92 occurrences. p. 509, on évoque le dessèchement et la mise en valeur des terrains communaux. Drainage : 23 occurrences. Le volume n'aborde pas la problématique. Le volume n'aborde pas la problématique. Assèchement ou connexe : 1 occurrence (La difficulté d'assèchement de la route, provenant, soit des haies et massifs d'arbres qui la bordent, soit du défaut de pente longitudinale de la voie [...]). [1872/08 RD p. 809]. Dessèchement ou connexe : 100 occurrences.. Un exemple parmi tant d'autres du sens donné au mot dessèchement : p. 275-276 : Le dessèchement de la vallée de la Scarpe s'opère par deux émissaires principaux : la Traitoire, située sur la rive droite de la Scarpe, et le Décours, situé sur la rive gauche. Drainage : 18 occurrences. Très important : Dans le Sud de l'arrondissement de Dunkerque, la zone plate et sablonneuse de 3 1872 (R). 511 1873/02 (EXTR, RD). 1873 /02 ( EXTR , R ). Le volume n'aborde pas la problématique . Le volume n'aborde pas la problématique. 1873/04 (RD). 348 1873/04 (R). 58 1873/08 (RD). 1065 1873/08 (R). 491 1874/04 (R, SUPPL). 1874/04 (RD). 40,971 hectares, que l'on appelle le pays wateringué, est soumise à un système particulier de dessèchement. Cette région exécute relativement peu de drainage et toutes les opérations y consistent uniquement en remplacement de fossés par des files de tuyaux. [1872/08 RD p. 286]. Incontestablement, le drainage est une technique spécifique, et sa particularité réside dans le fait que c'est un réseau souterrain. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dess chement ou connexe : 68 occurrences. Drainage : 10 occurrences. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 37 occurrences. Drainage : 3 occurrences. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 3 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 3 occurrences (2 fois dans le sens correct). Dessèchement ou connexe : 80 occurrences. Concernant les Moëres de Dunkerque, nous trouvons cette phrase qui laisse dubitatif : Elles [les Moëres] pourront user plus largement de leurs moyens de dessèchement artificiel. Que signifie ceci? Que considère-ton à l'époque comme moyen de dessèchement non artificiel (ou naturel)? Drainage : 5 occurrences. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 68 occurrences. Drainage : 11 occurrences. Le volume n'aborde pas la problématique. 360 1874/04 (R). 1874/10 (R). 625 1874/10. 490 1875/04 (RD). 220 1875/04 (R). 48 1875/08 (R). 993 1876/04 (RD). 214 1876/08 (D). 552 1876/08 (R). 730 Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 3 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Le volume n'aborde pas la problématique. Assèchement ou connexe : 1 seule occurrence, mais prise dans le sens correct. Dessèchement ou connexe : 53 occurrences. Drainage : 7 occurrences. Le drainage n'est pas une technique réservée à la seule agriculture (ce qui renforce encore sa spécificité), mais est aussi utilisée dans la construction de voiries (pour en stabiliser correctement l'assise). Voir p. 489. Assèchement ou connexe : 0 occur rence. Dessè chement ou connex e : 17 occurrence s . Drainage : 1 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 7 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 1 occurrence (référence faite au syndicat de dessèchement). Drainage : 0 occurrence . Assèchement ou connexe : 2 occurrences. Dessèchement ou connexe : 70 occurrences. Drainage : 6 occurrences. Assèchement ou connexe : 2 occurrences. Assèchement pris comme synonyme de dessèchement [1876 (RD), p. 47]. Dessèchement ou connexe : 1 occurrence. Une phrase nous permet de bien cerner le fait que les concepts sont différents et concordent avec la définition de Lefevre : (p. 92) Considérant que l'agriculture, la source la plus ancienne et la plus sûre de la prospérité du département, exige un assèchement très énergique et que la salubrité des vallées réclame un dessèchement efficace [...]. [1876 (RD), p. 92]. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 5 occurrences. Drainage : 5 occurrences. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 61 occurrences. La phrase [1876/08 R, p. 192] : le compte-rendu [ndlr : il s'agit du rapport de M. l'ingénieur de Chef des Ponts-et-chaussées, sur la situation du service hydraulique dans le département du Nord.] est 4 divisé en deux séries : la première comprend les dessèchements, les curages, les irrigations et les mises en valeurs de terrains communaux. La seconde : les usines à eau, le drainage et le service de la pêche fluviale constitue la preuve incontestable que dessèchement et drainage constituent des réalités différentes. Drainage : 6 occurrences. [1876/08 R, p. 52, 192, 361, 374 et 395]. p. 52, une remarque portant sur des travaux réalisés à Notre-Dame-Au-Bois (Hameau faisant partie de Bruille-Saint-Amand) permet de comprendre toute la pertinence de la présente recherche : Une observation écrite a été présentée par M. Bouchez, fabricant de tuyaux de drainage, qui se plaint de ce que les racines des arbres plantés par la commune, sur la place dite le Marais communal, viennent souvent obstruer le cours des drains que son père a été autorisé à r en 1856, sous le sol de la route. 1877/04 (RD). 1877/04 (R). Le volume n'aborde pas la problématique. 1877/08 (R). 97 1877/12 (R). 944 1878/04 (RD). 264 1878 /04 (R). 1878/08 (D). 414 1879/04 (RD). 356 1879/04 (R). 80 1879/08 (D). 427 1879/08 (R). 661 1880/01 (EXTR, D). Le volume n'aborde pas la problématique. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 1 occurrence. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 72 occurrences. Drainage : 7 occur rence s. Assè chement ou connexe : 0 occurrence . Dessèchement ou connexe : 5 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Le volume n'aborde pas la problématique. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 6 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 1 occurrence [1879/04 RD p. 186]. Juste pour faire référence à l'assèchement de la vallée. Sans que l'on sache dans quel sens le mot est utilisé. Dessèchement ou connexe : 5 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 2 occur rence s . Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 52 occurrences. Drainage : 1 occurrences. Assèchement ou connexe : 2 occurrences. Dessèchement ou connexe : 32 occurrences. Drainage : 5 occurrences. Le volume n'aborde pas la problématique. 1880/04 (R). 66 1880/08 (R). 711 1880/08. 594 1881/02 (EXTR, R). Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 21 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 50 occurrences. Drainage : 5 occurrences. Assè ou connexe : 4 occurrences Si par deux fois [1880-8, p. 70] [1880-8, p. 452], on parle d'assèchement des prairies, la quatrième, l'on évoque l'assèchement de la Vallée [1880-8, p. 269]. Dessèchement ou connexe : 16 occurrences. On peut prendre ce volume pour évoquer, comme [1880-8, p. 13], le dessèchement mécanique (c'est à dire, réalisée à l'aide d'une machine à vapeur). Jamais, le terme mécanique n'est associé à celui d'assèchement! Drainage : 0 occurrence. Le volume n'aborde pas la problématique. 1881/04 (RD). 419 1881/04 (R). 78 Assèchement ou connexe : 1 occurrence. (On parle d'assèchement des prairies) [1881/04 (RD), p. 30]. Dessèchement ou connexe : 41 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 1 occurrence. (On parle d'assèchement des prairies) [1881/04 (R), p. 30]. Dessèchement ou connexe : 8 occurrences. Drainage : 0 occurrence. 5 1881/08 (R). 800 1881/08 (D). 560 1882/04 (RD). 499 1882/04 (R). 1882/08 (D). 694 1882/08 (R). 872 1883/04. 601 1883/04 (R). 1883/08 (R). 804 1883/08 (D). 638 1884/04 (RD). 707 1884/04 (R). 139 1884/08 (RD). 486 1884/08 (R). 743 Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 61 occurrences. Drainage : 5 occurrences. En page 297, note intéressante sur le service hydraulique du Département du Nord : Le service hydraulique dans le département du Nord comprend les dessèchements et les améliorations agricoles, les curages, les irrigations, les usines à eau établies sur les cours d'eau non navigables, la pêche fluviale pour ces cours d'eau, le drainage et le service hydrométrique et d'annonce des crues. [remarquons au passage le mauvais emploi de ce terme] et On constate que l'assèchement n'est pas repris et que le drainage constitue une ré alité différente que le desséchement. [1881/08 (R), p. 297]. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 27 occurrences. Extrêmement important : de l'abandon des communaux (qui existaient donc encore au XIXème siècle en France. Nous sommes hors périmètre, car il s'agit de la rivière de la Marque (à l'est de Lille). Nous livrons le propos dans sa totalité : M. Des Rotours ; Je désirerais demander une explication en ce qui concerne le projet de dessèchement de la Marque. Ce projet présente un très grand intérêt. Seulement, autant que j'ai pu m'en rendre compte à l'audition, il y a dans les conclusions un point sur lequel il serait bon d'avoir des éclaircissements. Il me semble que le Rapporteur a parlé de l'attribution à la Compagnie concessionnaire des terrains communaux ; ce serait une des conditions dans lesquelles le dessèchement s'opérerait, les communes devraient renoncer à leurs communaux. Ce serait là soulever une très grave question et dans l'intérêt même du dessèchement, je crois qu'il serait très imprudent de la souder à l'opération du dessèchement, car ces terrains communaux forment des parts de marais auxquelles la population tient essentiellement. Je ne voudrais pour mon compte, ni directement, ni indirectement, faire, de l'abandon de ces terrains une condition du dessèchement. [1881/08 (D), p. 404] Drainage : 2 occurrences. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 19 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Le volume n'aborde pas la problématique. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 17 occurrences. Drainage : 1 occurrence. Assèchement ou connexe : 3+1 occurrences mais le terme est ici utilisé comme synonyme de dessèchement ; asséché est utilisé une dans le sens assurer un rapide écoulement aux eaux pluviales et assécher ainsi les talus. Dessèchement ou connexe : 62 occurrences. Drainage : 6 occurrences. Assèchement ou connexe : 2 occurrences dans le sens "assèchement des terres cultivées". [1883 04, p. 467] Dessèchement ou connexe : 25 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Le volume n'aborde pas la problématique. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 42 occurrences. p. 290, on évoque le dessèchement mécanique à Roost Warendin. Drainage : 5 occurrences. Assèchement ou connexe : 1 occurrence. Dessèchement ou connexe : 34 occurrences. Drainage : 3 occurrences. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 28 occurrences. Drainage : 3 occurrences. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 13 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 1 occurrence. Dessèchement ou connexe : 12 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 2 occurrences Ici il est permis de douter du sens donné à ce mots, en effet, nous lisons p. 297 : dresser le plus promptement possible un projet des travaux à exécuter pour l'assèchement des marécages, produits par l'exploitation de la fosse Chabaud-Latour. [rem : à Condé-sur-Escaut] Dessèchement ou connexe : 52 occurrences. Drainage : 4 occurrences. 6 1885/04 (RD). 456 1885/08 (R). 837 1885/08 (R (DOUBLE)). 1885/08 (RD). 490 1886/04 (RD). 658 1886/04 (R). 116 1886/08 (RD). 652 1886/08 (R). 735 1887/04 (RD). 833 1887/04 (R). 311 1887/08 (RD). 582 1887/08 (R). 1888/04 (RD). 606 1888/08 (R). 1068 1889/01/09 (EXTRA (RD)). 1889/01/09 (EX (R)). Assèchement ou connexe : 8 occurrences utilisée en tant que synonyme de dessèchement (pour les 8 items. Exemple (comme l'année précédente) p. 464 : l'assèchement des marécages produits par l'exploitation de la fosse de Chabaud-Latour). [rem : à Condé-sur-Escaut] Dessèchement ou connexe : 14 occurrences. Drainage : 1 occurrence. Assèchement ou connexe : 2 occurrences utilisées en tant que synonyme de dessèchement. Dessèchement ou connexe : 50 occurrences. Drainage : 6 occurrences. (Assèchement ou connexe : 2 occurrences utilisées en tant que synonyme de dessèchement). (Dessèchement ou connexe : 50 occurrence s). (Drainage : 6 occurrences). Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 23 occurrences. Drainage : 3 occurrences. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 8 occurrences. Drainage : 1 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 3 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dess èchement ou connex e : 12 occur rence s . Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 2 occurrences [ 1888/08 (R)] [1888/08 (R), p. 694]. À noter : pour faciliter l'évacuation des crues [remarquons au passage le mauvais emploi de ce terme] et l'assèchement des terres, il serait utile d'apporter aux émissaires de dessèchement un certain nombre d'améliorations signalées depuis longtemps → ce e phrase explique à elle seule les deux concepts : les champs, desséchés à l'aide d'un réseau de canaux doivent être asséchés (en cas d'inondation par exemple) au moyen de ces mêmes canaux. Dessèchement ou connexe : 53 occurrences. Drainage : 4 occurrences. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 25 occurrences. Drainage : 2 occurrences. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe 13 : occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occur . Dessèchement ou connexe : 16 occurrences. Pour la quasi-totalité de ses occurrences : syndicat de dessèchement. Drainage : 0 occurrence. Volume incomplet (non utilisable) Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 8 occurrences. Drainage : 1 occurrence. Assèchement ou connexe : 3 occurrences utilisées comme synonymes de dessèchement. Dessèchement ou connexe : 58 occurrences p. 863 : Se dessèche par le canal. Drainage : 2 occurrences. Le volume n'aborde pas la problématique. Le volume n'aborde pas la problématique. 1889/04. 280 1889/04 (RD). 747 1889/08 (RD). 636 1889/08 (R). 973 Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 10 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 17 occurrences. Drainage : 1 occurrence. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe 11 occurrences. Drainage : 0 occurrence. Assèchement ou connexe : 2 occurrences (p. 782 : Pour faciliter l'évacuation des crues [remarquons au passage le mauvais emploi de ce terme] et l'assèchement des terres il a été reconnu utile d'apporter aux émissaires du dessèchement un certain nombre d'améliorations 7 signalées depuis longtemps). [1889/08 R, p. 782] : ici, nous trouvons les deux mots, avec leur sens exact, réunis dans la même phrase. Dessèchement ou connexe : 61 occurrences. Drainage : 4 occurrences. le service hydraulique, dans le département du Nord, comprend les dessèchements, les améliorations agricoles, les curages, les irrigations, les usines à eau établies sur les cours d'eau non navigables, la pêche fluviale pour les cours d'eau, le drainage et le service hydrométrique et d'annonce de crues. [1889/08, p. 340]. (Assèchement ou connexe : 2 occurrences (p. 782 : l'évacuation des crues [remarquons au passage le mauvais emploi de ce terme] et l'assèchement des terres). [1889/08 R Double, p. 782].) (Dessèchement ou connexe : 57 occurrences.) (Drainage : 3 occurrences.) 1889/08 ( (DOUBLE)). 1890/02/12 (EXTRA (R)). 1890/02/12 (EXTRA (RD))1890/02/19. Le volume n'aborde pas la problématique. Le volume n'aborde pas la problématique. 1890/04 (RD). 597 1890/04 (R). 154 1890/08 (R). 919 1891/04 (R). 154 1892/04 (R). 132 1892/08 (R). 801 1892/08 (D). 1893/04 (R). 614 140 Assèchement ou connexe : 1 occurrence mais sans rapport avec la problématique. Dessèchement ou connexe : 9 occurrences. Drainage : 1 occurrence. Assèchement ou connexe : 1 occurrence mais sans rapport avec la problématique. Dessèchement ou connexe : 4 occurrences. Drainage : 0 occurrence Assèchement ou connexe : 1 occurrence. Dessèchement ou connexe : 44 occurrences. Drainage : 5 occurrences. Le drainage est entré dans les pratiques de l'Agriculture qui l'emploie, presque partout, sur une large échelle [1890 08/R, p. 775]. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connex e : 2 occurrences. Drainage : 0 occurrence Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 1 occurrence. Drainage : 0 occurrence Assèchement ou connexe : 1 occurrence. Dessèchement ou connexe : 39 occurrences. Drainage : 4 occurrences. Assèchement ou connexe : 0 occurrence. Dessèchement ou connexe : 2 occurrences. Drainage : 0 occurrence Assèchement ou connexe : 1 occurrence. Dessèchement ou connexe : 3 occurrences. Drainage : 0 occurrence Total des occurrences pour le terme assèchement : 84 Total des occurrences pour le terme dessèchement : 2807 Total des occurrences pour le terme drainage : 398 49272 (R) : Rapport. (D) : Délibération. (RD) : Rapport et délibération. Remarque générale. De manière très récurrente (et il n'est pas utile d'en faire un inventaire exhaustif), nous constatons l'emploi du terme dessèchement associé à d'autres : - syndicat de dessèchement, - canal de dessèchement, - dessèchement mécanique,... Ceci démontre encore d'avantage la spécificité de ce concept, par opposition à celui de d'assèchement (qui n'est lui jamais utilisé de cette man 1 : Le fonds précité concerne la période 1850-1919. Malheureusement, on y observe deux larges trous. Les années 1894 à 1899 comprises 1902 à 1917 comprises sont manquantes. Pour la présente analyse, nous ne nous basons que sur la série la plus représentatives allant de 1850 à 1893 (comprises). Pour une même année, l'on peut avoir (mais ce n'est pas systématiques) un volume reprenant les procès-verbaux des délibérations (du Conseil Général) et un autre volume reprenant le rapport du Préfet (pour les mêmes réunion). Aussi, certaines informations identiques peuvent figurer dans les deux volumes. Nous nous contenterons donc de fournir le nombre de page pour info, mais, compte tenu de ceci, il n'est pas pertinent de calculer un indice statistique afin de comparer les années entre elles. 2 : Par connexe, nous entendons les différentes déclinaisons du mots (exemple : dessèchement, dessécher, dessèche,...). 8 Annexe 3 Note de réflexion rédigée par Tangui Lefort, en collaboration avec Mathilde Castelli et Mathilde Bouret (Chargés de mission PRnSE) au départ de questions posées par l'auteur. 11 mai 2023. Proposition Réponse collective, en tant que Parc. Ré d action : Tangui, contributions : Mathilde B. et C. 1 : Si l'on décidait de recréer ex nihilo une ou plusieurs zones humides sur le territoire du PNrSE (je ne parle pas d'une mare ou d'un étang, mais d'un ensemble un peu conséquent), où la verriez-vous? Sentez-vous libre dans votre réponse et ne tenez pas compte de contraintes techniques ou d'acceptabilité sociale. Mais dites-moi pourquoi vous choisiriez cet endroit. Le fondement même d’un Parc est de travailler avec les usagers du territoire. Il ne nous viendrait pas à l’ idée d’imposer les choses sans prise en compte des contraintes et aspirations des uns et des autres. Nous n’en avons d’ailleurs pas le pouvoir. Il est donc important de bien insister sur le fait que tout ce qui va suivre s’affranchi de contraintes techniques ou d’acceptabilités sociales ; ou pourquoi pas, de partir du principe que cela est déclenché par un consensus local, une prise de conscience collective et une volonté d’agir ensemble. Si on nous offrait la possibilité de recréer des zones humides, nous disposerions d’éléments de connaissance qui orienteraient nos choix, avec deux postulats de base : - Ne pas créer de la zone humide là où il n’y en a jamais eu, cela n’aurait pas de sens. En d’autres termes : restaurons l’existant et les zones humides « potentielles » ; - Recréer de la zone humide dans les secteurs où c’est écologiquement cohérent, et notamment dans une logique de continuité avec les zones humides fonctionnelles (préférer recréer une mosaïque de milieux humides plutôt qu’une seule grande entité) ; Ainsi, de manière générale, nous partirions sur les secteurs de zones humides potentielles, c’est-à-dire qui ne s’expriment pas malgré un contexte favorable et qui l’étaient probablement dans un passé plus ou moins proche ou des zones humides existantes, mais qui subissent trop de pressions pour être suffisamment fonctionnelles. Autrement dit, il s’agirait de s’intéresser à la mosaïque de parcelles qui ne sont plus humides ou plus suffisamment humides au milieu de celles qui le sont encore. Ces parcelles se retrouvent au sein de la plaine présumée humide de la Scarpe et de son équivalent dans la vallée de l’Escaut. Plus précisément, nous nous orienterions de manière pragmatique vers des secteurs jugés prioritaires : les milieux humides à restaurer identifiés par les Schémas d’aménagement et de gestion des eaux de la Scarpe aval et de l’Escaut ; les zones de tourbières dégradées identifiées par le Conservatoire d’espaces naturels des Hauts de France ; ou encore les corridors humides des différents schémas de trame écologique. Également, nous ne pourrions pas nous empêcher d’intégrer à nos réflexions les zones humides déjà existantes, mais pas assez exprimées, dont les fonctionnalités ne s’expriment pas pleinement, notamment au sein des réservoirs de biodiversité. Nous envisagerions différents types de travaux : reméandrage de la Scarpe, renaturalisation des berges, remise à ciel ouvert des cours d’eau enterrés, création de frayères, suppression des drains de parcelles agricoles, comblement de plans d’eau, étrépages, défrichement de boisements monospécifiques, creusement de mouilles et mares, arasement de merlons de curages, de remblais pour restaurant le champ naturel d’expansion des crues, éradication de certaines espèces exotiques envahissantes (renouées, jussie, crassule...)... le tout visant à recréer des prairies humides, des basmarais et des tourbières, pourquoi pas des boisements humides, bien qu’ils soient encore bien présents en Scarpe-Escaut. Cela sous entendrait en parallèle de travailler sur le partage des eaux entre les usages domestiques, agricoles et industriels et la recharge des nappes à l’échelle du bassin versant pour assurer un niveau des nappes favorables aux zones humides. 2 : Quels usages verriez-vous sur cette nouvelle zone humide (autre que l'aspect didactique)? Nous avons bien conscience que les gestionnaires de milieux naturels, le Département du Nord, le Conservatoire d’espaces naturels ou nos propres équipes seraient débordés par la reconquête de surfaces importantes de zones humides et qu’il faudrait pouvoir s’appuyer sur d’autres types de gestionnaires, développant potentiellement des activités économiques ou de loisir. Néanmoins, avant de parler d’usages, parlons de fonctionnalités, de services rendus par la nature. Les zones humides recréées permettraient de réguler le climat, les inondations, la qualité des eaux, de favoriser notre approvisionnement en eau (recharge des nappes), en biodiversité (pollinisateurs, auxiliaires des cultures...), sans parler des services culturels : reconquête de l’héritage du passé, de nos paysages symboliques, zones d’aménité,... Ainsi, dès l’origine de ces projets, nous mènerions une réflexion sur les usages futurs, dans l’idée de pérenniser les habitats créés à travers une gestion extensive, pour qu’ils puissent exprimer tout leur potentiel, rendre les services recherchés. Nous nous appuierions évidemment sur des usages agricoles, en particulier pour les milieux prairiaux. Les éleveurs sont incontournables pour ce type d’habitats, pour peu qu’ils adoptent des pratiques adaptées à la prairie. L’idée est qu’elles expriment tout leur potentiel de biodiversité. Pour les boisements, dans la même idée, serait recherchée une sylviculture extensive : de la production de bois, oui, mais en circuit local et de manière durable. Pour les bas-marais et tourbières, nous n’envisagerions pas d’usage économique mais plutôt une logique de quiétude pour la nature. Cela questionne donc également les usages de chasse et de pêche et plus largement les loisirs dit « de nature », qui devraient être parfaitement maitrisés et contrôlés, respectueux des habitats et des espèces : pas partout, pas tout le temps, pas trop. Cela passe par des techniques de pêche de type « no kill » et d’abandonner les pratiques de rempoissonnement d’espèces exotiques. Dans le même ordre d’idée, il s’agirait de délimiter des zones de non chasse, restreindre les périodes de chasse, abandonner les pratiques d’élevage, d’agrainage... Pour les loisirs dits « de nature », l’esprit serait le même. Il serait nécessaire de les maitriser dans le temps (bonnes périodes, avec des notions de saison et d’horaires), dans l’espace (pas partout) et en termes de flux. Tout cela nécessite de bien penser les accès, les sentiers, les belvédères... Sous l'Ancien Régime, la Vallée Scarpe-Escaut formait un espace multifonctionnel axé sur l'humide. Les populations y avaient développé des pratiques agropastorales spécifiques et variées, la transformant en un territoire d'eau largement multifonctionnel et productif. Les inondations constituaient un élément d'une hydraulique maîtrisée caractéristique de ce modèle. Un équilibre, à questionner, semblait exister entre une anthropisation contenue et une naturalité manifeste. Motivé par des raisons économiques puis sanitaires, le dessèchement systématique des prairies humides des XVIIIe et XIXe entraîna le passage de l élevage à l'agriculture. Ces mutations firent de la Vallée un territoire monofonctionnel où le rapport à l'eau s'est distendu. L'inondation se mua en un risque dont il fallait se prémunir. À l'inverse de la période précédente, les transformations du territoire furent systématisées et irrémédiables. Aujourd'hui, de l'ONU à l'UE, les zones humides et la restauration des biotopes sont au centre des préoccupations. L'angle d'analyse actuel est celui des fonctions écosystémiques qui privilégie la conservation et la restauration de la biodiversité mais n'accorde qu'une attention mineure aux fonctions productives. L'Histoire peut-elle nous inspirer afin d'imaginer un projet de territoire multifonctionnel centré sur l'humide et de nouveaux usages économiques redéployés? Dans une approche rétroprospective, cette thèse cherche à identifier les modalités d'une nouvelle territorialité au départ de la réhumidification de la Vallée ScarpeEscaut visant au redéploiement de ses services écosystémiques. Elle pose en outre la question de la notion de territoire et s'interroge sur les éléments nécessaires à la mise en place de celui-ci. Thibaut Ghils (Tournai - Belgique) est chercheur indépendant, conférencier et auteur de nombre ux articles ou publications sur la problématique des zones humides en Vallée de la Scarpe et de l'Escaut. Thibaut Ghils Place du Levant 1, 1348 Louvain-la-Neuve, Belgique Tél. : + 32 (0) 10 47 92 20 http://www.uclouvain.be/creat Retrouver un territoire d’eau multifonctionnel en Vallée Scarpe-Escaut UCLouvain Faculté d'architecture, d'ingénierie architecturale, d'urbanisme Louvain research institute for Landscape, Architecture, Built environment (LAB) Centre de recherches et d'études pour l'action territoriale (CREAT) Retrouver un territoire d’eau multifonctionnel, entre Douai et Tournai , la Vallée Scarpe-Escaut Contribution de l'Histoire au d éveloppement territorial dur able Thibaut Ghils docteur en art de bâtir et urbanisme Faculté d'architecture, d'ingénierie architecturale, d'urbanisme UCLouvain.
18,420
2009LIL10117_3
French-Science-Pile
Open Science
Various open science
2,009
Comportement en fatigue des composites monolithiques et sandwiches : détection et suivi de l'endommagement par techniques non destructives
None
French
Spoken
7,555
13,566
I-7-2-8Composite tissus (0°,90°) I-7-2-8-1Courbe de Wöhler Le Tableau I-6 présente également les résultats des essais fatigue en durée de vie pour les composites tissus (0°,90°). Les deux premiers essais au niveau du chargement de 30% ont été conduits au delà de 106 et arrêtés par la suite compte tenu du fait que l’éprouvette ne s’endommageait pas. Les trois essais suivants ont été arrêtés à 106 cycles. Cette différence de conditions expérimentales explique l’écart type si important pour ce niveau de chargement. Amplitude Amplitude Eprouvettes Eprouvettes Eprouvettes Eprouvettes Eprouvettes %UTS (MPa) (1) (2) (3) (4) (5) Moyenne Ecart type 30 56,43 1230000 1524000 106+x 106+x 106+x 106 - 45 84,645 301060 187056 200146 85772 155773 185961 78101 65 122,265 8090 10360 1640 15225 17251 10513 6169 85 159,885 1391 784 225 193 619 642 489 Tableau I-6 : Durée de vie des cinq éprouvettes composites tissées (0-90°) La courbe de Wöhler (Figure I-36) est une régression linéaire obtenue en faisant la moyenne des cinq éprouvettes. 63 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre I : Fatigue des matériaux composites monolithiques Figure I-36 : Courbe de Wöhler d’un composite tissu (0-90°) I-7-2-8-2Courbe d’endommagement Les courbes d’évolution du module d’Young pour les différents niveaux chargements appliqués sont données sur la Figure I-37. Figure I-37 : Evolution normée du module d'Young pour un tissu (0°90°) 64 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre I : Fatigue des matériaux composites monolithiques De même que pour un UD, nous observons une chute initiale du module d’Young. Cette diminution se fait une période beaucoup plus longue de l’ordre de 15 % de la durée de vie. On a donc un premier endommagement beaucoup plus progressif que dans le cas des UD. Ensuite, les courbes présentent un plateau plus ou moins horizontal suivant le chargement appliqué. Il semble que plus le chargement est important plus la pente est grande. Contrairement aux UD, la rupture finale des éprouvettes se fait sans diminution du module d’Young. I-7-2-8-3Endommagement constatées sur les éprouvettes L’endommagement de l’éprouvette présentée Figure I-38 est le résultat de la rupture finale. Le processus d’endommagement observé visuellement est le suivant : 9 fissuration de la matrice qui est perceptible avant l’essai, au niveau de chargement élevé lorsque l’éprouvette est chargée à la contrainte moyenne de sollicitation, 9 rupture rapide des fibres comme le laissant prévoir la déformation peu élevée lors de l’essai de traction, 9 endommagement finale de l’éprouvette par rupture brutale de toutes les fibres. Figure I-38 : Type d’endommagement constaté sur un composite tissu (0-90°) Nous pouvons remarquer que la rupture finale obtenue avec un tissu (0-90°) est beaucoup plus nette que celle obtenue avec un UD. Ceci est du au tissage qui permet de garder une cohésion des fibres dans le sens chaîne. 65 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre I : Fatigue des matériaux composites monolithiques I-7-2-9Composite tissus (-45, +45°) I-7-2-9-1Courbe de Wöhler Sur le Tableau I-7, les résultats des essais fatigue pour les composites tissus (-45-+45°), nous font remarquer que le palier de chargement de 45% est celui où la dispersion est la plus importante. Amplitude Amplitude Eprouvettes Eprouvettes Eprouvettes Eprouvettes Eprouvettes Moyenne %UTS (MPa) (1) (2) (3) (4) (5) Ecart type 30 19,845 106+x 106+x 106+x 106+x 106+x 106 - 45 29,7675 74809 27500 8048 257414 150608 103676 102003 65 42,9975 614 813 513 1725 826 898 481 85 56,2275 240 407 238 222 274 276 76 Tableau I-7 : Durée de vie des cinq éprouvettes composite tissu (-45-+45°) Cette fois-ci, la courbe de Wöhler (Figure I-39) n’est plus linéaire mais plutôt parabolique. Cette forme de courbe correspond bien avec celles présentées dans la littérature. Figure I-39 : Courbe de Wöhler d’un composite tissu (-45-+45°) I-7-2-9-2Courbe d’endommagement Les courbes d’endommagement pour un tissu (-45°, +45°) sont présentées sur la Figure I-40. 66 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre I : Fatigue des matériaux composites monolithiques 1,2 Rapport de modules E(N)/E 1 65% UTS 45% UTS 85% UTS 0,8 0,6 0,4 0,2 0 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 Pourcentage de durée de vie Figure I-40 : Evolution normée du module d'Young pour un tissu (+45°,-45°) Les courbes obtenues pour un chargement de 65 % et 85 % ont le même profil. Elles sont caractérisées par une diminution progressive et continue du module d’Young. La rupture finale apparaît sans une chute préalable importante du module d’Young. De même, que pour les autres composites, un chargement de 65% engendre une diminution plus importante du module qu’un chargement de 85%. La courbe obtenue pour le chargement de 45 % présente une forme plus proche de celle observée expérimentalement pour les tissus. Elle est caractérisée par : 9 une chute importante du module lors des 10 premiers pourcents de vie ; 9 une diminution linéaire jusqu’à 90% de la vie totale ; 9 de nouveau une chute importante du module. Cependant, il est généralement observé un plateau horizontal et non une diminution linéaire. Nous pouvons de même observer que pour les trois niveaux de chargement la diminution du module est plus importante (de 40 à 80%) pour ce composite que pour les deux autres. Ce comportement est contradictoire par rapport aux courbes que l’on trouve dans la littérature. D’autres investigations seront menées pas la suite pour en expliquer les raisons. 67 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre I : Fatigue des matériaux composites monolithiques I-7-2-9-3 Endommage ment constatées sur les composites t issés (+ -45°) L ’ endommagement de l ’ éprouvette suite à l essai de fatigue est présenté sur la Figure I-41. L’endommagement constaté suit l’ordre suivant : 9 rupture progressive de la matrice ; 9 endommagement finale de l’éprouvette combiné à une rupture progressive de la matrice et des fibres par cisaillement. Cet endommagement progressif était prévisible par le fait que la déformation de l’essai statique est très progressive et importante. Figure I-41 : Type d’endommagement constaté sur un composite tissu (-45-+45°) I-8Conclusion de l’étude sur la fatigue des UD et tissus Cette étude expérimentale sur les composites avec des fibres de verre a permis de mettre en évidence les difficultés suivantes : 9 la nécessité de respecter une fréquence d’essais pas trop importante pour les problèmes d’échauffement et viscoélasticité, 9 la géométrie des éprouvettes et plus particulièrement l’utilisation des talons qui conditionne les résultats. Les résultats d’endommagement par fatigue ont montré que les multiples mécanismes d’endommagement qui cohabitent lors de l’essai de fatigue peuvent conduire à des résultats contradictoires. Ainsi, l’utilisation de la courbe de la variation du module d’Young, facile à mettre en place, fournit des informations que sur l’endommagement macroscopique. Elle ne peut être utilisée comme outil de détection de l’endommagement. Il a donc fallu s’orienter vers des indicateurs plus fiables et plus précis. Pour détecter et/ou suivre ces différents types d’endommagement de nombreuses méthodes sont utilisées : la tomographie par ultrasons, l'émission acoustique, l'analyse par ultrasons, la méthode de l'iodure de zinc, la thermographie 68 © 2010 Tous droit s réserv és. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre I : Fatigue des matériaux composites monolithiques infrarouge et d’autres techniques. De toutes ces méthodes la thermographie infrarouge est la méthode la plus rapide et la plus facile à mettre en œuvre . Dans le second chap itre, la technique d ’é valuation de l ’endommagement par thermographie infrarouge sera détaillée et nous utiliserons ég alement une autre technique pour évaluer l’endommagement dans les composites. 69 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre I : Fatigue des matériaux composites monolithiques 70 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre I : Fa tigue des matériaux composites monolithiques I-9Références bibliographiques du chap itre I [BAP90] D. Baptiste, S.J. Wang et D. François, "Comportement en fatigue d’un unidirectionnel en verre/époxy", AMAC 1990. [CUR87] P. T. Curtis et B. B. Moore, A comparison of the fatigue performance of woven and non-woven CFRP laminates in reversed axial loading, International Journal of Fatigue 9, 67-78, 1987. [DAN01] M. B. Daniel, S. L. 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Zweben, Composite Materials and Mechanical Design, Mechanical Engineer's Handbook, 2nd ed., Myer Kutz, Ed., John Wiley & Sons, Inc., New York, 1998. 72 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge 9 Procédure expérimentale (conditions d’essais, type d’éprouvettes,...) 9 Evaluation de l’intégrité des éprouvettes par macrographie 9 Evaluation de l’état initial par ondes ultrasonores 9 Evaluation de l’endommagement par thermographie infrarouge 9 Macrographie des éprouvettes endommagées 9 Evaluation du délaminage par ondes ultrasonores 73 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Th èse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo , Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge II-1Introduction au chapitre II Nous avons étudié les différents types d’endommagement par fatigue observés dans les matériaux composites dans le chapitre I. Le délaminage est considéré comme le mode d’endommagement le plus critique conduisant à l’affaiblissement de la structure et à terme la rupture finale. Dans ce chapitre, une combinaison de deux techniques non destructives est utilisée : la thermographie infrarouge et l’analyse par ondes ultrasonores pour caractériser le délaminage. La méthode par thermographie infrarouge, développée dans ce chapitre, est dite active car nécessitant l’application d’une sollicitation mécanique pour l’utiliser. Elle pourra donc donner des informations au cours de l’essai de fatigue. Au contraire, l’analyse par ondes ultrasonores peut être effectuée sur une éprouvette au repos. Cette méthode sera donc utilisée avant et après les essais pour caractériser l’endommagement. Une observation par macrographie est également utilisée en complément. Dans la première partie du chapitre, la procédure expérimentale et les éprouvettes sont abordées. Par la suite, les différentes techniques complémentaires, sont présentées au fur et à mesure de leur utilisation. Dans chaque partie, l’ordre de présentation est le suivant : l’état de l’art de la technique pour caractériser le délaminage puis le matériel et enfin les résultats et les analyses. La conclusion du chapitre fait le point sur les résultats obtenus par chaque technique et ouvre le champ des possibles perspectives. II-2Procédure expérimentale Pour caractériser le délaminage par fatigue, nous avons élaboré une procédure expérimentale qui permet de suivre l’éprouvette de son état initial par macrographie jusqu’à son état endommagé final par C-scan. 1) La première étape des essais de caractérisation est de contrôler l’état initial du matériau, nous utiliserons une loupe binoculaire pouvant effectuer un grossissement maximale de 60 fois. Par la suite, nous appellerons cette technique « la macroscopie ». La macrographie est la technique de base pour caractériser le délaminage. 2) La deuxième étape est l’utilisation de la technique ultrasonore appelée C-scan pour vérifier l’absence de défauts de fabrication avant l’exécution des essais de fatigue. 74 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge 3) La troisième étape est l’essai de fatigue durant lequel sont utilisées la thermographie infrarouge et des prises de vues avec un appareil photo de grande résolution (10 MPixels) pour caractériser l’endommagement à différents niveaux de chargements. Deux caméras infrarouges placées de part et d’autre de l’éprouvette sont utilisées pour suivre l’endommagement par mesure de la variation de la température en surface. 4) Après l’essai de fatigue, avons observé par macrographie sur la tranche de l’éprouvette quel était le niveau d’endommagement. 5) La macrographie permet uniquement de caractériser le délaminage visible en surface de l’éprouvette., Pour caractériser l’endommagement réel, nous avons de nouveau utilisé le C-scan pour vérifier le niveau exact du délaminage dans le matériau. II-3Définition des éprouvettes Pour être sûr de la localisation de l’initiation de l’endommagement, nous avons décidé de fabriquer des éprouvettes spécifiques pré-endommagées artificiellement. En nous inspirant des différents travaux réalisés sur le délaminage, deux types d’éprouvettes ont été développés. Le premier type présenté sur la Figure II-42 comporte des éprouvettes constituées de 3 plis unidirectionnels (UD) fibres de verre / époxy à 0° dont le pli central est pré-endommagé avant fabrication pour favoriser le délaminage. 0° Pli central coupé 0° 0° Empilement 1 Figure II-42 : 3 plis unidirectionnels avec pli central coupé : Empilement 1 Le second type (Figure II-43a et Figure II-43b) est constitué de 5 plis UD fibres de verre / époxy dont l’orientation des plis est croisée à 0° et 90°. Pour ce type d’éprouvette, deux empilements ont été réalisés. 75 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Le premier empilement est le suivant 0/90/0/90/0 avec le pli central coupé comme précédemment. Ce défaut situé au milieu de l’empilement permettra de vérifier l’aptitude de la thermographie infrarouge à détecter cet endommagement des deux côtés de l’éprouvette. Dans la suite ce type d’éprouvette est appelé « PM » pour Pli Milieu coupé. Le deuxième empilement est 90/0/90/0/90 avec l’un des plis à 0° coupé. Cette éprouvette est utilisée pour vérifier la profondeur de détection de l’endommagement par thermographie infrarouge. L’abréviation pour ce type d’éprouvette est « PD » pour le Pli Décalé coupé. Les lignes en pointillés sur la Figure II-43 représentent le chemin de délaminage souhaité. a) 90 0 90 0 90 Empilement 3 : PD Pli décalé coupé b) 0 90 0 90 0 Empilement 2 : PM Pli central coupé Figure II-43 : Eprouvettes d’essais de fatigue calibrées pré-endommagées Les éprouvettes ont été fabriquées en utilisant la même méthode qu’au chapitre I sauf pour la mise en pression et la cuisson où un autoclave a été utilisé. Le principe de l’autoclave présenté sur la Figure II-44 est que la pression sur la plaque est exercée par la pression ambiante régnant dans l’autoclave. La pression appliquée lors de la fabrication était de 5 bars. Figure II-44 : Fabrication de composite par autoclave 76 © 2010 Tous droits réservés . http :// doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Les dimensions moyennes déterminées à partir de la norme EN ISO 527-4 sur les essais de traction des composites sont présentées sur la Figure II-45. Chaque pli a une épaisseur de 0,75 mm. Figure II-45 : Dimensions moyennes des éprouvettes d’après la norme EN ISO 527-4 Avant de faire les essais, nous avons vérifié l’intégrité des éprouvettes à l’échelle micrographique et mésoscopique. Au niveau micrographique par double pesée et par calcination, nous avons déterminé le taux de porosité et la fraction volumique. Le taux de porosité est de 2% et la fraction volumique des fibres est de 70% pour l’UD et autour de 55% pour les stratifiés croisés conformément à ce qu’on obtient habituellement avec la fabrication en autoclave. Au niveau mésoscopique, nous avons utilisé la macrographie pour vérifier la bonne répartition des plis et le C-scan pour l’état non endommagé. Dans la suite, nous présentons en détails les résultats de la macrographie et ceux du C-scan des éprouvettes à l’état initial. II-4Evaluation de l’intégrité des éprouvettes par macrographie La Figure II-46 présente la loupe binoculaire utilisée pour vérifier l’intégrité du matériau avant et après les essais de fatigue. La macrographie permet également de vérifier l’uniformité des dimensions des différentes éprouvettes utilisées. La manipulation consiste à choisir le meilleur grossissement et l’éclairage adéquat pour la prise de vue macrographique. Par la suite, le niveau de grossissement ne sera pas indiqué seules les dimensions géométriques mesurées sont fournies. 77 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Lampe à éclairer Loupe Figure II-46 : Appareil de macrographie : loupe binoculaire II-4-1Macrographie du premier empilement Les Figure II47 et Figure II-48 présentent les macrographies dans l’épaisseur et de la face du 1er type d’empilement. Zone de pli coupé très riche résine 1 2 3 Figure II47 : Agrandissement 25 fois du 1er empilement, 3 plis UD 0° pli central coupé Sur l’épaisseur de l’éprouvette, nous remarquons que les plis n’ont pas la même épaisseur surtout, le pli central qui est inférieure de 25% et 15% par rapport aux deux autres plis. Sur la photographie présentée sur la Figure II-48, on remarque que l’écartement entre les deux parties du pli coupé est de 11,61 mm. Dans les éprouvettes UD 0°, tous les plis orientés dans la même direction, se déplace librement lors de la polymérisation du composite. Le pli central comporte donc une zone dans laquelle, il n’y a que de la résine. 78 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Zone de pli coupé très riche résine Figure II-48 : Agrandissement 3 fois de la face de l’éprouvette à 3 plis UD 0° pli central coupé Cet écartement indésirable est provoqué par le fait que la pression du moule provoque le déplacement des plis comme le montre la plaque de la Figure II-49. Zone de talons Zone de retrait des plis coupés Zone de test Zone de talons Figure II-49 : Plaque d’éprouvettes UD 0° après fabrication La macrographie du 1er empilement montre que les éprouvettes ne sont pas d’une géométrie parfaite pour effectuer les essais souhaités. Cependant, elles peuvent être utilisées pour effectuer les essais préliminaires et vérifier ainsi la détection du délaminage par thermographie infrarouge. II-4-2Macrographie du second et du troisième empilement Les macrographies du deuxième et troisième empilement présentées sur les Figure II-50 et Figure II-51, respectivement montrent que les éprouvettes après fabrication n’ont aucun endommagement visible à l’interface des plis et que le taux de porosité n’est pas très élevé conformément au résultat de la calcination. L’analyse des éprouvettes avant essais, permet également de vérifier la répartition des plis dans le composite ainsi que la planéité du pli sur la largeur de l’éprouvette. 79 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Ecartement pli coupé Pli 1 Pli 2 Epaisseur Stratifié Pli 3 Pli 4 Pli5 Figure II-50 : Macrographie du 2nd empilement (PM) : 5 plis, pli central coupé Ecart ement pli coupé Pli 1 Pli 2 Pli 3 Pli 4 Pli5 Figure II-51 : Macrographie du 3ème empilement (PD) : 5 plis, pli décalé coupé Dans le cas des plis unidirectionnels (empilement 1), les anomalies géométriques constatées ne permettent pas de mesurer l’épaisseur des plis et de dégager une moyenne pour toutes les éprouvettes. L’étude est donc faite sur les PM et PD uniquement. Les Tableau II-8 et Tableau II-9 indiquent l’épaisseur des plis pour les empilements PM et PD pour trois éprouvettes extraites du lot testé plus loin dans ce chapitre. Les premières lignes de ces tableaux présentent le numéro des plis avec la notation suivante « ij ». Le premier indice représente le numéro du pli et le second représente le coté de l’épaisseur considéré. L’ « Ecart1 et 2 » sur le Tableau II-8 correspond à la zone où il n’y a que de la résine dû au fait que le pli est coupé. Le terme « strati » correspond à l’épaisseur totale du stratifié. 80 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Dans le Tableau II-8 correspondant aux éprouvettes PM, l’écart type pour les 5 plis montre que la dispersion des épaisseurs des plis n’est pas très élevée et que la moyenne des épaisseurs se situe autour de 0,8 mm. La moyenne des épaisseurs des plis des côtés 1 et 2 sont sensiblement les mêmes ce qui démontre une bonne répartition dans le plan. Pli 11 12 21 22 31 32 41 42 51 52 ecart1 ecart2 strati1 strati2 Eprouvettes Moyenne 0,81 0,82 0,81 0,81 0,81 0,83 0,81 0,81 0,80 0,81 1,08 1,03 3,93 4,02 Écart type 0,01 0,01 0,01 0,02 0,01 0,02 0,02 0,02 0,02 0,02 0,13 0,13 0,05 0,06 Tableau II-8 : Répartition de l’épaisseur des plis sur les éprouvettes PM Les trois éprouvettes ont une épaisseur moyenne de 4 mm, cela démontre que la fabrication n’a pas eu d’influence sur les caractéristiques géométriques. Pli 11 12 21 22 31 32 41 42 51 52 Ecart1 Ecart2 Strati1 Strati2 Eprouvettes Moyenne 0,78 0,74 0,78 0,76 0,86 0,85 0,86 0,88 0,91 0,91 1,11 1,27 4,25 4,27 Ecart type 0,03 0,02 0,06 0,05 0,06 0,05 0,03 0,02 0,04 0,00 0,04 0,12 0,08 0,07 Tableau II-9 : Répartition de l’épaisseur des plis sur éprouvettes PD Le Tableau II-9 présente les mêmes résultats pour les éprouvettes PD notamment pour la régularité des épaisseurs, la planéité des plis et pour l’écart des bords du pli coupé. Cependant, une remarque peut être faite concernant la différence des épaisseurs moyennes des plis 1 et 2 (0,78 mm), de celle des plis 3 et 4 (0,86 mm) et de celle du 5ième pli (0,91 mm). Cette observation est confirmée par la macrographie d’une éprouvette PD sur la Figure II-51. Cette différence est peut être due au fait que lors de la fabrication, le deuxième pli coupé permet un déplacement du premier et du second pli. Aucune autre particularité géométrique à part la différence des épaisseurs des plis n’a été observée. De cette analyse macrographique, une bonne répartition des plis a été mise en évidence. La macrographie permet d’estimer l’intégrité surfacique de l’éprouvette en observant l’extérieur de celle-ci. Nous allons utiliser maintenant le C-scan pour observer l’intégrité volumique du matériau. 81 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge II-5Evaluation de l’état initial par ondes ultrasonores Dans cette partie, l’évaluation par ondes ultrasonores de l’intégrité des éprouvettes avant essais de fatigue est réalisée. Mais avant une étude bibliographique sur la détection du délaminage est présentée. Les résultats C-scan sur les éprouvettes endommagées après essais sont présentés à la suite des essais de thermographie infrarouge. II-5-1Bibliographie sur la détection du délaminage par ultrasons II-5-1-1Caractéristiques des ondes ultrasonores La caractérisation par ultrasons est souvent utilisée car elle présente de nombreux avantages (facilité de mise en œuvre, non accessibilité obligatoire aux deux faces d'une pièce, bonne adaptation aux orientations naturelles de la plupart des défauts, possibilité de traverser de fortes épaisseurs, lien avec les caractéristiques mécaniques du matériau,...), mais elle a quelques inconvénients tels que la nécessité de coupler le transducteur à la pièce, la grande sensibilité de la propagation des ultrasons aux degrés d'hétérogénéité ou d'anisotropie du matériau ou des paramètres variables liés aux conditions de mesure telles que la température, le taux d'humidité, l'état de contrainte du matériau, etc. Les ondes couramment utilisées sont les ondes de compression (ou longitudinales), les ondes de cisaillement (ou transversales) et les ondes de Rayleigh (Figure II-52). Direction et sens de propagation Onde Mouvement < direction de propagation Onde Mouvement ⊥ direction de propagation Figure II-52 : Types d’ondes ultrasonores Les vitesses des ondes élastiques longitudinales (cl) et transversales (ct) sont liées aux coefficients élastiques du matériau par les relations : E.(1 − ν ) ρ.(1 + ν )(. 1 − 2.ν ) cA = c = t E 2.ρ.(1 + ν ) 82 © 2010 Tous droits réservés . http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Les relations entre les caractéristiques mécaniques et les vitesses des ondes présentent des formes simples qui se compliquent rapidement lorsqu'on s'éloigne des hypothèses de base. A une échelle macroscopique dans les composites, ces équations restent valables et peuvent être utilisées afin d'évaluer ses caractéristiques mécaniques. La détermination des relations entre les paramètres mécaniques ou ultrasonores et ceux géométriques, physiques ou chimiques liés aux modifications devient l'enjeu de la caractérisation du milieu. L'existence d'un lien entre les ultrasons et un endommagement global du matériau est assurée et les méthodes ultrasonores apparaissent comme les mieux adaptées face à cette problématique. II-5-1-3Principe de la méthode ultrasonique Bernhard présente dans son étude deux principaux types d’évaluation par méthodes ultrasonores. Le premier type qui est une méthode d’émission-réception appelée en anglais « Pulse-echo » (Figure II-53), utilisant un seul capteur. Elle consiste à envoyer une onde ultrasonore dans le composite, à enregistrer et analyser tous les échos des ondes reçues en retour [BER03]. Figure II-53 : Représentation schématique de la méthode ultrasonique “pulse-echo” [BER03] La seconde méthode schématisée par la Figure II-54, la plus utilisée pour évaluer l’état des structures composites, est appelée par transmission. Cette fois-ci deux capteurs sont utilisés, le premier envoie l’onde et l’autre placé du côté opposé reçoit l’onde transmise. Figure II-54 : Représentation schématique de la méthode ultrasonique “par transmission” [BER03] La méthode « pulse-echo » est efficace lorsque l’évaluation se fait proche de la surface parce que l’énergie de l onde décroit en fonction de la profondeur. La méthode par transmission est sensible au défaut de petites tailles. 83 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge II-5-1-4Technique d’imagerie ultrasonore par C-scan Le principe de cette méthode d’auscultation cartographique est présenté sur la Figure II-55. Figure II-55 : Principe d’acquisition de données ultrasonores sous forme de C-scan [BER03] Le cœur de ce système est le capteur d’émission-réception connecté à un système d’affichage. Le système d’acquisition possède une porte électronique interne qui détecte si un écho de retour dépasse un certain seuil spécifié par l’utilisateur dans un intervalle de temps donné. Lorsque le seuil est dépassé, alors le circuit d’acquisition envoie un signal à l'unité d'affichage afin d’activer l’impression. L’imagerie C-scan est idéale pour les pièces composites du fait de leur empilement couche par couche. De ce fait la détection du délaminage est très facile. La plupart des systèmes C-scan actuels sont capables d'afficher les défauts dans une seule couche à la fois [BER03] comme le montre la Figure II-56. Figure II-56 : Images C-scan. a) projection de tous les défauts. b) et c) différentes profondeurs [BER03] II-5-1-5Application des essais ultrasonores pour les matériaux composites Très souvent pour faire les essais C-scan, on utilise un couplant qui peut être du gel ou de l’eau entre le capteur et la pièce pour faciliter la pénétration du signal ultrasonore. 84 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge F. Aymerich et al. [AYM00] ont utilisé une technique d’émission-réception sur des pièces composites immergées dans l’eau pour détecter le délaminage et la fissuration de matrice provoqués par un impact de faible énergie sur un empilement quasi-isotropique de carbone/PEEK. Les paramètres Time Of Flight (TOF) « temps de vol » ou amplitude (AMP) du C-scan dans une direction normale à la plaque ont permis de détecter le délaminage, tandis que l’inclinaison du capteur d’un certain angle permet la détection des fissurations de matrice dans l’épaisseur [AYM00]. Le résultat est présenté sur la Figure II-57. Figure II-57 : C-scan du délaminage et des fissurations matricielles d’un composite impacté à 3,6J [AYM00] II-5-1-6Conditions de l’utilisation des ultrasons pour les composites Les conditions pour effectuer de bonnes mesures par ultrasons C-scan sont : 9 la disposition de la pièce à 90° par rapport au faisceau ultrasonore, 9 l'adaptation de la fréquence du scan à la pièce testée en essayant plusieurs (compromis résolution / pénétration), 9 la disposition des pièces testées dans le champ ultrasonore lointain (zone de Fraunhofer) où l'énergie ultrasonore est plus stable (Figure II-58), 9 la réalisation des essais dans les mêmes conditions ambiantes (température, humidité, etc.). 85 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Champ lointain Variation de l'énergie dans le champ proche Champ proche Figure II-58 : Propagation d’ondes acoustiques à partir d’un capteur ultrasonore II-5-2Etude expérimental : évaluation de l’état initial des éprouvettes II-5-2-1Test d’absorption d’eau Le fait de plonger les éprouvettes dans le bassin d’eau les expose à l’absorption due aux porosités (inférieur à 3 % déterminée par double pesée et calcination) contenues dans les éprouvettes. Nous avons effectué des tests pour vérifier la vitesse d’absorption d’eau et la quantité totale absorbée. La Figure II-59 présente le matériel utilisé pour faire la manipulation. Il s’agit d’un bassin rempli d’eau, un chronomètre et une balance de grande précision 10 milligrammes, utilisée pour mesurer la masse avant et après immersion. Balance précision Bac d’eau thermo -statée de Figure II-59 : Matériels de mesure d’absorption d’eau Avant l'immersion, les éprouvettes sont mises dans une étuve à 70°C pendant 30 min pour éliminer l’humidité éventuellement absorbée à l'air ambiant. 86 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Figure II-60 : Evolution de l’absorption d’eau en fonction du temps d’exposition Le graphique de la Figure II-60 présente l’évolution de la quantité d’eau absorbée en fonction du temps d’immersion dans l’eau. Au bout de 30 min, la quantité d’eau absorbée est de 0,2 ml équivalent à 0,2 g. Cette quantité d’eau n’est pas très significative par rapport à la masse totale de l’éprouvette qui est de 64 g. Étant donné que la surface à analyser des éprouvettes est petite (~37,5 cm2), les essais C-scan sont rapides et durent nettement moins de 30 min. Nous pouvons donc effectuer les essais sans protéger les flans des éprouvettes. II-5-2-2Mesure expérimentale des vitesses de propagation d’ondes Un paramètre important pour les essais C-scan est la vitesse de propagation de l’onde ultrasonore dans le volume de l’éprouvette. Cette valeur est importante parce qu’elle permet l’identification des pics du signal ultrasonore correspondant à l’écho d’entrée du signal et à l’écho de fond (voir figure II-26). Connaissant l’épaisseur "e" de l’éprouvette on peut facilement calculer la vitesse avec la formule suivante : VL = 2 e Δt VL vitesse de propagation de l’onde longitudinale en m/s, Δt temps de parcours en μs et « e » épaisseur en mm . Le montage de mesure de vitesse présenté sur la Figure II-61 est composé d’un capteur ultrasonore couplé à la pièce par du gel, d'un générateur d'ultrasons et d'un oscilloscope numérique pour l'échantillonnage et la visualisation des signaux. 87 © 2010 Tous droits réservés . http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Générateur d'ultrasons Traducteur ultrasonore Oscilloscope Figure II-61 : Dispositif expérimental de mesure de la vitesse des ondes ultrasonores Le graphe A-scan de la Figure II-62 représente la réponse de l’onde ultrasonore en amplitude de l'éprouvette PM. Le temps de parcours correspondant à cet exemple est de 1,3816 μs. Echo d’entrée Echo de fond Figure II-62 : Graphe de mesure de vitesse sur une éprouvette PM Le Tableau II-10 donne les valeurs moyennes des vitesses pour les éprouvettes UD0°, PM et PD et leurs écart-types (quatre éprouvettes de chaque). Eprouvette Vitesse moyenne (m/s) Écart type (m/s) UD0 5948 497 PM 5726 115 PD 5500 97 Tableau II-10 : Mesure de vitesse des éprouvettes UD0°, PM et PD Sur le Tableau II3 l’écart type de la mesure sur les éprouvettes UD est très élevé. Cela est peut être dû à la présence du défaut évoqué lors de la macrographie. Les vitesses obtenues sont utilisées comme paramètre lors des essais C-scan. 88 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge II-5-2-3Essais C-scan Le système de C-scan appelé ‘UT win’ fabriqué par la société ‘Physical Acoustics Corporation’ est utilisé pour scanner les éprouvettes. Sur la Figure II-63 l’axe ‘Z’ est l’axe vertical contenant le capteur ultrasonore. Les axes X et Y représentent les directions du scan. Le capteur envoi une onde longitudinale de fréquence 5 Mhz. La fréquence d’échan nage est de 100 Mhz et les signaux sont moyennés temporellement (sommation de 8acquisitions répétitives). L’axe du scan Y et l’axe d’incrémentation X ont la même résolution de déplacement de 0,5 mm. Capteur ultrasonore Système d’acquisition C-scan Bac d’eau thermo-statée Figure II-63 : Matériel de détection par C-scan La représentation C-scan est basée sur l'utilisation de portes ou « Gate » qui correspondent à la zone dans l’épaisseur que l’on souhaite sonder. La Figure II-64 présente le A-scan de l’empilement UD0°. La première porte "G1" du scan est placée entre la surface et le premier pli. La seconde porte "G2" couvre le second pli et la dernière porte "G3" le troisième pli. Pli coupé Porte de scan G1 G2 G3 Figure II-64 : A-scan et positions des portes de traitement pour un UD 0° Les résultats du C-scan sont souvent présentés sous deux formes : en amplitude ou en temps de vol. Dans le premier cas, la variation de l’amplitude de l’onde reçue est analysée par rapport à l’onde envoyée. Dans le second cas, c’est la variation de la durée du trajet qui est analysée, nous aurons alors une information sur la profondeur des défauts via les vitesses de propagation. 89 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge II-5-2-3-1C-scan des éprouvettes UD 0° Les Figure II-65 et Figure II-66 présentent des images C-scan réalisées sur trois éprouvettes en amplitude (AMP) et en temps de vol (TOF) pour les trois portes d’analyse. Zone riche en résine Figure II-65 : C-scan de trois éprouvettes UD 0° en amplitude Zone riche en résine Figure II-66 : C-scan de trois éprouvettes UD 0° en TOF La première porte G1 correspondant au C-scan du premier pli ne montre pas de particularité (anomalie) en amplitude et en TOF. Sur la porte 2 en amplitude, on remarque que l’amplitude est maximale aux extrémités de l’éprouvette et est à 50% dans la partie centrale des éprouvettes. Sur la porte 3 c’est le phénomène inverse qui se produit. On retrouve donc bien les zones constituées uniquement de résine. Les résultats des essais C-scan confirment les observations relevées lors de l’évaluation par macrographie concernant les anomalies de déplacements des plis lors de la fabrication des éprouvettes, qui finalement se révèlent non calibrées pour détecter correctement le délaminage. Cependant, vu que nous disposons d’un certain nombre d’éprouvettes, elles seront conservées et utilisées pour les essais préliminaires. 90 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge II-5-2-3-2C-scan des éprouvettes PD La Figure II-67 présente le graphe A-scan de l’empilement PD. Les différents pics représentent les interfaces entre les différents plis . G1 G2 G3 G4 Figure II-67 : Graphe A-scan et correspondance physique d’une éprouvette PD Pour évaluer l’état initial du matériau et vérifier qu’il n’y a pas de défauts, une porte est placée à chaque interface. Pour les éprouvettes PD, la porte 1 est définie à l’interface entre le pli 1 et le pli 2. La deuxième porte est définie entre le pli 2 et le pli 3, la troisième porte entre le pli 3 et 4 et la dernière porte est posée à l’interface entre les plis 4 et 5 (Figure II-67). Le premier pic du A-scan est appelé écho d’entrée et correspond à la réflexion de l’onde ultrasonore sur la surface de l’éprouvette. Le dernier pic correspond à l’écho de fond correspondant à la réflexion sur la face inférieure de l’éprouvette. Pour vérifier que la vitesse utilisée est bonne, nous pouvons utiliser le Δt entre l’écho d’entrée et l’écho de fond qui est de 0,729 μs. En faisant le calcul, l’épaisseur obtenue est de 4 mm comparée à la moyenne obtenue par macrographie qui est de 4,27 mm. 91 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge Délimitation des plis coupés Figure II-68 : C-scan de cinq éprouvettes PD en amplitude Les images C-scan des éprouvettes PD sur les Figure II-68 et Figure II-69 montrent qu’il est difficile de faire la distinction entre les plis à 90° et 0° sur les différentes portes. De plus, le pli coupé n’est pas localisable sur la porte 4. Figure II-69 : C-scan de cinq éprouvettes PD en TOF En TOF, les C-scan des éprouvettes PD ne sont pas très précis, néanmoins on arrive à distinguer la forme des fibres à 0° sur les portes 1 et 3 et celle des fibres à 90° sur les portes 2 et 4. Les imprécisions des mesures peuvent être dues au fait que le transducteur ultrasonore n’est pas parfaitement normale à la surface de l’éprouvette lors de la mesure. II-5-2-3-3C-scan des éprouvettes PM Délimitation des plis coupés Figure II-70 : C-scan de trois éprouvettes PM en Amplitude Sur les portes G1 et G3 on peut distinguer les stries des plis à 90°, alors que sur les portes G2 et G4 celles des plis à 0°. On arrive aussi à distinguer sur chaque interface, un mélange de stries à 0° 92 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge et à 90°. Ceci peut s’expliquer par la précision de la définition des portes de mesures. La localisation de l’endroit où le pli est coupé sur la porte G2, par la différence d’amplitude matérialisée par les pointillés, montre bien l’intérêt de l’utilisation du C-scan comme technique d’évaluation du matériau endommagé. Les images en TOF des éprouvettes PM sur la Figure II-71 ne montrent pas de particularité géométrique parce qu’on distingue difficilement les fibres qu’elles soient à 0° ou à 90°. Ce résultat est satisfaisant parce qu’il montre qu’il n’y a aucun endommagement à l’intérieur de la série d’éprouvettes testées. Figure II-71 : C-scan de six éprouvettes PM en TOF II-5-2-4Bilan de l’évaluation de l’état du matériau sain par C-scan Les résultats du C-scan des éprouvettes non endommagées sont très difficiles à interpréter. En effet, aucune discontinuité ayant une impédance différente de celle du matériau tel qu’un délaminage ou un défaut de fabrication n’est présente dans ces éprouvettes. Elles peuvent donc être utilisées pour les essais de fatigue. 93 © 2010 Tous droits réservés. http://doc.univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délaminage par thermographie infrarouge II-6Evaluation de l’endommagement par thermographie infrarouge Les récents progrès des détecteurs infrarouges ainsi que des techniques de traitements d’images infrarouges permettent de détecter de très faibles variations de rayonnement d’objet soumis à des sollicitations mécaniques. Ces variations de rayonnement sont la conséquence d’une variation d’énergie dissipée sous forme de chaleur. Ainsi, tout phénomène générant des déformations et/ou de l’endommagement peut être détecté par thermographie infrarouge dans la limite de la sensibilité des détecteurs utilisés. De nombreux auteurs ont utilisé la thermographie infrarouge pour caractériser des matériaux usuels tels que les matériaux métalliques. Actuellement, on utilise de plus en plus ces techniques pour la caractérisation et l’étude de structures en matériaux composites. Il existe de nombreuses techniques de caractérisation des matériaux composites qui différent par leurs méthodes de mise en œuvre. Les techniques de caractérisation par thermographie infrarouge se divisent principalement en deux catégories : stimulée et active. La thermographie infrarouge stimulée est une technique non destructive. Elle consiste à exciter une structure par une onde thermique ou élastique et d’analyser le champ thermique résultant pour détecter des défauts. Selon la source d’excitation utilisée le nom de la méthode diffère. La source thermique la plus utilisée est l’excitation thermique par des flashs. On peut citer la lock in thermography utilisée par Meola et al [MEO06] pour détecter des défauts de délaminages dans des pièces aéronautiques en composites. Une méthode basée sur l’emploi d’ondes ultrasonores de puissance est utilisée actuellement, on parle alors de vibrothermographie. Dans ce domaine on peut citer les travaux de Rantala [RAN98]. Cependant, cette méthode est limitée aux cas où les ondes acoustiques, ou élastiques, entraînent la vibration de deux surfaces en contact. La thermographie infrarouge active utilise comme source d’excitation des sollicitations mécaniques. Ces sollicitations mécaniques sont souvent des sollicitations cycliques de traction ou de flexion. L’application la plus connue de cette méthode est la détermination de la limite d’endurance initialement développée par Luong [LUO98]. D’autres auteurs comme Steinberger [STE06] utilisent conjointement les sollicitations mécaniques et la thermographie active pour détecter des défauts dans des composites en carbone. II-6-1La température comme indicateur d’endommagement Si on mesure la température en surface, avec un thermocouple ou une caméra infrarouge, d’une éprouvette soumise à une sollicitation cyclique (appelé essai d’auto-échauffement), on remarque 94 © 2010 Tous droits réservés. http:// doc .univ-lille1.fr Thèse de Cheick Ahmed Hyacinthe Sawadogo, Lille 1, 2009 Chapitre II : Caractérisation du délamin age par therm ographie infrarouge une élévation de la température moyenne ainsi qu’une oscillation de celle-ci autour de la valeur m (Figure II-72). Cette évolution de la température est due à des sources de chaleur de différentes natures. Elles peuvent avoir, au moins, deux origines : 9 le couplage thermoélastique, 9 la dissipation intrinsèque.
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67 Archives départementales du Bas-Rhin, 1959 W 1. Procès-verbaux du comité régional des affaires culturelles d'Alsace, séance du 8 octobre 1963. 68 Xavier Laurent, « Les sept merveilles de la France : la loi de programme du 31 juillet 1962 sur les monuments historiques », dans Livraisons d'histoire de l'architecture, 3, 2002, p. 113-125. Xavier Laurent, Grandeur et misère du patrimoine d'André Malraux à Jacques Duhamel, 1959-1973, Paris, 2003 (Mémoires et documents de l'École des chartes n°70, Travaux et documents du comité d'histoire du ministère de la culture n°15), p. 104. 69 Médiathèque de l'architecture et du patrimoine, 81/67/46. L'adjoint au maire, Robert Heitz, à l'architecte en chef des monuments historiques, Bertrand Monnet, 18 juillet 1961. 70 Médiathèque de l'architecture et du patrimoine, 81/67/46. Compte-rendu de la réunion du 3 novembre 1961 relatif aux travaux à effectuer à la cathédrale, au château des Rohan et à l'Ancienne Douane. 71 Médiathèque de l'architecture et du patrimoine, 81/67/46. Le maire de la Ville de Strasbourg, Pierre Pflimlin, à l'architecte en chef des monuments historiques, Bertrand Monnet, 17 novembre 1961. 72 Xavier Laurent, « Les sept merveilles de la France : la loi de programme du 31 juillet 1962 sur les monuments historiques », dans Livraisons d'histoire de l'architecture, 3, 2002, p. 121-122. 788 2. La préparation de la deuxième loi-programme Dès 1963, une deuxième loi de programme est envisagée pour prendre en compte un plus grand nombre de monuments. Une circulaire ministérielle du 25 janvier 1963 invite les conservateurs régionaux des monuments historiques à dresser la liste de tous les monuments qui présentent un intérêt national sur le plan culturel. Les conserva peuvent proposer des monuments classés, seulement inscrits à l'inventaire supplémentaire, voire des édifices qui ne bénéficient d'aucune mesure de protection au titre des monuments historiques qu'il s'agisse d'édifices appartenant à l'État, à des collectivités ou à des particuliers, de travaux de vétusté ou de dommages de guerre. Ils n'ont à tenir compte d'aucune contrainte financière ou technique. Leur liste doit toutefois se limiter à une vingtaine de monuments. Pour pouvoir hiérarchiser les monuments à l'échelle nationale, la circulaire invite les conservateurs régionaux des bâtiments de France à attribuer une note chiffrée aux monuments proposés selon un barème précis : a) Valeur historique du monument ; sa place dans l'histoire de notre pays ; les événements mémorables dont il a été le siège. Par conséquent, la valeur historique et la valeur artistique des monuments comptent plus que l'urgence des travaux, l'importance des édifices sur le plan touristique et leur utilité Bas-Rhin La procédure de sélection comprend quatre étapes. Dans un premier temps, l'architecte en chef des monuments historiques d'Alsace Bertrand Monnet établit des fiches pour chaque édifice intéressant : Bas-Rhin. – 1° Strasbourg, cathédrale (50 points), 2° palais de Rohan (44), 3° église SaintThomas (42), 4° Saverne, château des Rohan (38), 5° Strasbourg, église Saint-Pierre-le-Jeune (37), 6° Ebersmunster, église (37), 7° Sélestat, église Saint-Georges (33), 8° Avolsheim, Dompeter (32), 9° Wissembourg, temple Saint-Jean (30), 10° Haguenau, église Saint-Nicolas (25). Haut-Rhin. – 1° Thann, collégiale Saint-Thiébaut (41), 2° Sigolsheim, église (40), 3° Colmar, église Saint-Martin (39), 4° Neuf-Brisach, remparts (35), 6° Colmar, église des Franciscains (33), 7° Feldbach, église (33), 8° Soultzmatt, église (32), 9° Guebwiller, ancienne église des Dominicains (32), Riquewihr, mur d'enceinte (32), 11° Pfaffenheim75. Dans un deuxième temps, le conservateur régional des bâtiments de France JeanPierre Mougin dresse la liste des monuments d'intérêt national de sa circonscription 76. En Alsace, il retient sept monuments sur les 21 signalés par Monnet : la cathédrale, le château des Rohan de Strasbourg, la collégiale de Thann, l'église Saint-Martin de Colmar, l'église d'Ebersmunster, les remparts de Neuf-Brisach et l'église des Dominicains de Guebwiller. Il établit une deuxième liste de monuments « qui, tout en étant intéressants, ne présentent pas au point de vue de leur restauration ou de leur mise en valeur une urgence et une importance aussi grande que ceux de la première » : l'église de Sigolsheim, le château des Rohan de Saverne, l'église Saint-Pierre-le-Jeune à Strasbourg, l'ancienne abbaye de Murbach, les remparts de Riquewihr et le temple Saint-Jean de Wissembourg, soit six édifices 77. L'église Saint-Thomas de Strasbourg notée 42/50 par Monnet ne figure même pas sur cette deuxième liste. Les travaux de consolidation de la tour de croisée estimés à 400.000 francs n'étaient peut-être pas assez importants pour justifier leur inscription. Les conservateurs régionaux des bâtiments de France envoient à la direction de l'architecture environ 300 propositions pour un total de 450 millions de francs de travaux. 74 Xavier Laurent, Grandeur et misère du patrimoine d'André Malraux à Jacques Duhamel, 1959-1973, Paris, 2003 (Mémoires et documents de l'École des chartes n°70, Travaux et documents du comité d'histoire du ministère de la culture n°15), p. 113. 75 Archives départementales du Bas-Rhin, 1959 W 21. Fiches établies par l'architecte en chef des monuments historiques Bertrand Monnet, 1963. 76 La circonscription du conservateur régional des bâtiments de France à Strasbourg comprend le Bas-Rhin, le Haut-Rhin, la Moselle, la Meurthe-et-Moselle, la Meuse et les Vosges. 77 Archives départementales du Bas-Rhin, 1959 W 21. Le conservateur régional des bâtiments de France au ministre d'État chargé des Affaires culturelles, direction de l'architecture, bureau des travaux et classements, 12 mars 1963. 790 Le coût est jugé prohibitif 78. En septembre 1964, la sous-direction des monuments historiques et des sites à Paris procède donc à une première sélection. Les édifices retenus en Alsace sont la cathédrale de Strasbourg, l'église Saint-Martin de Colmar et les remparts de Neuf-Brisach 79. L'architecte en chef des monuments historiques Bertrand Monnet estime le coût d'une « restauration soignée » à 20.130.000 francs pour la cathédrale de Strasbourg, à 3.822.500 francs pour l'église Saint-Martin de Colmar, et à 2.200.000 francs pour les remparts de Neuf-Brisach 80. Le choix de la cathédrale de Strasbourg est évident : c'est le seul édifice d'Alsace à obtenir la note maximale de 50, le seul dont Monnet avait souligné l'importance nationale sur les plans historique et touristique. La collégiale SaintMartin est sélectionnée car il s'agit d'un « très bel édifice au coeur du vieux Colmar » est « très visité par les touristes. » Or, des éléments décoratifs des façades se détachent et menacent la sécurité du public. En outre, la Ville et le département sont disposés à participer aux travaux. Sur le plan politique, il faut ménager les susceptibilités des HautRhinois. Selon le nouveau conservateur régional des bâtiments de France à Strasbourg Jean Dumas, la cathédrale de Strasbourg et la collégiale Saint-Martin de Colmar sont « les deux édifices les plus chers au coeur des Alsaciens. » Leur inscription dans la deuxième loi de programme « prouverait la vitalité du ministère des Affaires culturelles et serait hautement appréciée, tant par la population locale que par les touristes nombreux à visiter ces deux édifices et les villes qui les possèdent 81. » Le château des Rohan de Strasbourg a sans doute été écarté pour éviter de concentrer les éventuels moyens sur la seule ville de Strasbourg. Les travaux de dommages de guerre qui restent à exécuter ne concernent plus que l'aile des écuries. La collégiale Saint-Thiébaut de Thann, dont la flèche est masquée par un échafaudage depuis une quinzaine d'années, et l'église d'Ebersmunster, « seul exemple d'architecture baroque souabe », sont exclues au profit des remparts de NeufBrisach. À cette époque, le service des monuments historiques recense les exemples d'architecture militaire 82. Les remparts de Neuf-Brisach constituent « l'ensemble le plus complet et le plus significatif de fortification de Vauban », leur classement vient tout juste 78 Xavier Laurent, « Les sept merveilles de la France : la loi de programme du 31 juillet 1962 sur les monuments historiques », dans Livraisons d'histoire de l'architecture, 3, 2002, p. 122-123. 79 Archives départementales du Bas-Rhin, 1959 W 21. Le directeur de l'architecture aux conservateurs des bâtiments de France, 23 septembre 1964. Liste des monuments susceptibles de figurer dans la 2e loiprogramme. 80 Archives départementales du Bas-Rhin. Estimation des travaux à exécuter en vue d'une restauration soignée, 22 octobre 1964. 81 Archives départementales du Bas-Rhin, 1959 W 21. Inventaire des équipements culturels d'Alsace, 1964. 82 Médiathèque de l'architecture et du patrimoine, 80/12/3. Étude L'architecture militaire d'époque classique, enquêtes de 1957 à 1961 par Émile Bonnel. 791 d'être prononcé, et sur le plan touristique, Neuf-Brisach se situe « sur l'it inér aire Col mar Fri bourg et Strasbourg-Bâle » à quelques kilomètre s de la frontière alle mande. Ill. 94 : Les remparts de Neuf-Brisach, photographie d'Émile Bonnel, 1958 (Ministère de la culture, Médiathèque de l'architecture et du patrimoine, MH00254576) Pour Jean Dumas, l'inscription de monuments alsaciens dans la loi programme constituerait « une opération choc 83 » pour le public. La deuxième loi de programme est finalement votée le 28 décembre 1967. Les crédits s'élèvent à 110 millions de francs à répartir sur les années 1968, 1969 et 1970 84. Ils bénéficient à huit monuments historiques appartenant à l'État : cinq monuments qui figuraient déjà dans la première loi de programme (le Louvre, Versailles, Fontainebleau, la cathédrale de Reims et l'hôtel des Invalides) auxquels s'ajoutent l'ancienne abbaye de Fontevrault, la cathédrale Notre-Dame 83 Archives d épartementales du Bas - Rhin , 1959 W 21. Inventaire des équipements culturels d'Alsace, 1964. Journal officiel de la République française, Lois et décrets, 29 décembre 1967, p. C. La préparation du Ve Plan 1. Vers une nouvelle politique de conservation et de restauration des monuments historiques En octobre 1963, le nouveau directeur de l'architecture Max Querrien veut définir une politique d'ensemble en matière de conservation et de restauration des monuments historiques. Pour cela, la direction de l'architecture doit passer « de la méthode du devis à la méthode du programme. » Max Querrien reprend à son compte les anciennes critiques sur le rôle démesuré tenu par les architectes en chef des monuments historiques dans la détermination des travaux à exécuter : À l'heure actuelle les choix qui orientent nos travaux en matière de monuments historiques sont orientés le plus souvent par l'appréciation que nous faisons de la pertinence des devis des architectes en chef. S'agissant de décider qu'un travail sera exécuté, cette pertinence est certes une condition nécessaire mais elle n'est pas une condition suffisante. Nous demandons à nos architectes des monuments historiques d'avoir du goût, du talent et de la sensibilité. Il est naturel que ces diverses qualités les aiguillent vers des monuments qui, mieux que d'autres, en raison de leur époque et de leur valeur architecturale, s'accordent avec leur tempérament. Pour Max Querrien, la direction de l'architecture doit assurer la conservation d'un maximum de monuments : Pour l'administration prise dans son ensemble, le problème des monuments historiques comporte d'autres données auxquelles il faut notamment satisfaire. Nous disposons chaque année d'une enveloppe budgétaire limitée qui ne nous permet pas de faire face. Nous avons le devoir de gérer le patrimoine historique et esthétique de la France en « bon père de famille », c'est-à-dire sans laisser périr des biens qui représentent un capital culturel et [] un capital économique. En face d'options inspirées par le souci de « l'oeuvre », c'est-à-dire par le souci de la restauration parfaite menée jusqu'à son terme sur un monument auquel on est subjectivement sensibilisé, nous devons affirmer une option plus administrative, qui est celle de la conservation du patrimoine. Autrement dit, on ne doit pas, sous prétexte de parfaire la restauration d'un château sur dix, laisser les neuf autres s'écrouler. Par conséquent la politique de conservation et de restauration des monuments historiques doit être ordonnée autour de quatre critères hiérarchisés. Le « sauvetage des monuments en péril » doit être la priorité absolue de l'administration. Cependant, le service des monuments historiques doit tenir compte de « l'utilisation » des monuments, de leur « appartenance patrimoniale », les monuments publics devant être prioritaires par rapport aux monuments privés, et enfin de « l'accomplissement de l'oeuvre », c'est-à-dire d'une restauration parfaite des « monuments témoins » de l'histoire et de l'art national 85. Pour le sous-directeur des monuments historiques et des sites André Coumet, l'établissement du Ve Plan doit « jouer un rôle décisif sur l'avenir des monuments historiques » Il doit permettre au service des monuments historiques de prouver qu'il est capable de gérer les crédits qui lui sont attribués de manière rationnelle et moderne, l'objectif étant d'obtenir leur accroissement. 2. Un état des lieux en 1963-1964 La préparation du Ve Plan (1966-1970) commence. La circulaire ministérielle du 29 mars 1963 invite les conservateurs régionaux des bâtiments de France à établir « un inventaire exhaustif des travaux qu'il conviendrait de réaliser dans un proche avenir sur tous les édifices classés, quels qu'ils soient. » Cette fois-ci, les monuments sont notés sur 100. Le critère le plus important est l'urgence des travaux à réaliser (70 points). Les efforts consentis par les propriétaires viennent en second (10 points). La valeur historique des monuments, leur valeur artistique, leur importance sur le plan touristique et leur utilité viennent en dernier (5 points chacun). Les travaux doivent être classés suivant leur degré d'urgence et divisés par tranches opératoires. Les autorités locales et les associations de sauvegarde du patrimoine sont sollicitées pour élaborer les propositions 87. En Alsace, l'inventaire des travaux s'élève à 13.750.000 francs pour les travaux de dommages de guerre (2.180.000 francs pour les monuments appartenant à l'État et 11.570.000 francs pour les monuments n'appartenant pas à l'État) 88 et à 19.250.000 francs pour les travaux de vétusté (1.490.000 francs pour les bâtiments civils et palais nationaux, 85 Médiathèque de l'architecture et du patrimoine, 80/10/ 64. Note du directeur de l'architecture Max Querrien au sous -directeur des monuments historiques, André Coumet, 10 octobre 1963. 86 Médiathèque de l'architecture et du patrimoine, 80/10/64. Note pour le directeur de l'architecture, 19 novembre 1963. 87 Archives d épartement ales du Bas-Rhin, 1959 W 21. Le ministre d'État chargé des Affaires culturelles aux conservateurs régionaux des bâtiments de France, 29 mars 1963. 88 Médiathèque de l'architecture et du patrimoine 80/10/64. Inventaire exhaustif des travaux à réaliser sur les édifices classés (circulaire du 29 mars 1963) dommages de guerre. 794 6.735.000 francs pour les monuments appartenant à l'État, et 11.025.000 francs pour les monuments n'appartenant pas à l'État) 89. Voilà le programme des travaux à mener jusqu'à la fin de l'année 1970, date à laquelle le gouvernement souhaite que la réparation des dommages de guerre dans les monuments historiques soit achevée. En 1964, Jean Dumas remplace Jean-Pierre Mougin au poste de conservateur régional des bâtiments de France à Strasbourg et comme correspondant permanent du ministre des Affaires culturelles en Alsace. IV. Le budget des Cultes de l'État Les ordonnances de 1944 maintiennent le statut confessionnel de l'Alsace comme les lois de 1919 l'avaient fait après la Première Guerre mondiale. En 1945, Charles Émile 89 Médiathèque de l'architecture et du patrimoine, 80/10/64. Inventaire exhaustif des travaux à réaliser sur les édifices classés (circulaire du 29 mars 1963) vétusté. 90 Archives départementales du Bas-Rhin, 1959 W 21. Inventaire des équipements culturels d'Alsace, 1964. 795 Altorffer reprend (jusqu'en 1949) la direction du service des cultes d'Alsace et de Lorraine à Strasbourg. A. Le budget ordinaire des Cultes : une longue stagnation En 1946, les crédits inscrits au budget des Cultes du ministère de l'Intérieur pour la construction et la réparation des édifices cultuels du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle sont fixés à 1.955.000 francs : 1.500.000 francs pour le culte catholique, 415.000 francs pour le culte protestant et 40.000 francs pour le culte israélite. En francs constants, ces sommes représentent près du double de celles inscrites au budget de 1938. De 1946 à 1956, les crédits pour la construction et la réparation des édifices cultuels du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle augmentent à peine. En 1956, ils s'élèvent à 2.146.000 francs : 1.600.000 francs pour le culte catholique, 500.000 francs pour le culte protestant et 46.000 francs pour le culte israélite 91. En francs constants, ils ne représentent que la moitié des crédits inscrits au budget de 1938. Tableau 47 : Évolution des crédits du budget des Cultes du ministère de l'Intérieur pour la construction et la réparation des édifices cultuels du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle entre 1938 et 1956 Année Montant des crédits en francs Montant des crédits en francs constants courants (valeur 1938) 1938 174.300 174.300 1946 1.955.000 319.447,68 1956 2.146.000 88.058,61 Comme avant guerre, c'est le chef du service des Cultes à Strasbourg qui, après avis du préfet pour les communes ou des autorités ecclésiastiques supérieures pour les paroisses, décide de l'attribution de subventions et de leur montant. Ce dernier est fonction de l'importance de la dépense et de la situation financière de la commune ou de la paroisse. De 1947 à 1956, 107 subventions (12.145.000 francs) vont aux édifices du culte catholique, subventions (3.780.000 francs) au culte protestant, et 9 subventions (303.000 francs) au culte israélite pour un montant total de 16.228.000 francs. Le taux des 91 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1957, rapports et délibérations, p. 125-127. 796 subventions attribuées par l'État correspond en moyenne au pourcentage dérisoire de 1,27 % du montant des travaux. Pendant la même période, l'effort du conseil général du BasRhin s'élève à 80 millions de francs et ses subventions à 10 % du montant des travaux 92. B. Des crédits ordinaires et des indemnités de dommages de guerre jugés insuffisants La loi du 28 octobre 1946 sur les dommages de guerre proclame l'égalité et la solidarité de tous les Français devant les charges de la reconstruction. Mais le barème adopté par le ministère de la reconstruction et de l'urbanisme (bordereau général V) laisse à la charge des communes et des fidèles une part élevée des dépenses de reconstruction à l'identique de leurs édifices cultuels. En novembre 1951, le conseil général du Haut-Rhin dénonce cette situation et demande le relèvement du barème 93. En vain. En décembre 1957, l'association des maires et le conseil général du Bas-Rhin signalent à leur tour que le barème appliqué par le ministère de la reconstruction et du logement pour l'attribution des indemnités de dommages de guerre laisse à la charge des communes et des fidèles 30 à 40 % du coût de la reconstruction à l'identique de leurs églises. Ils estiment que les crédits inscrits au budget des Cultes de l'État pour la construction et la réparation des édifices cultuels sont insuffisants vu les efforts considérables entrepris par les communes et les paroisses pour la reconstruction des églises sinistrées et la construction de lieux de cultes dans les nouveaux quartiers urbains. Ils émettent le voeu que les crédits du budget des Cultes d'Alsace et de Lorraine soient augmentés de façon à fixer à 30 % maximum le taux des subventions accordées par l'État à la construction et à la réparation d'édifices cultuels. Le pasteur Fricker conclut : J'aurais aimé que ce point soit discuté en présence de M. le ministre des finances (Pierre Pflimlin) pour lui demander justement, en tant que président de notre assemblée départementale, aide et soutien pour régler cette uloureuse question. [] Je voudrais prier l'assemblée départementale de considérer la chose comme très grave. Il serait évidemment regrettable à beaucoup de points de vue que, pour la reconstruction de nos églises des deux confessions, nous rencontrions des difficultés. Non seulement, ce serait ressenti douloureusement sur le plan de la politique générale, 92 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1957, rapports et délibérations, p. 125-127. 93 BNUS M.500.122. Conseil général du Haut-Rhin, 2e session ordinaire de l'année 1951 (17 octobre 1951), e 2 session extraordinaire de l'année 1951 (27 novembre 1951), rapports du préfet, procès-verbaux des délibérations, p. 451. Les crédits inscrits au budget des Cultes du ministère de l'Intérieur pour la construction et la réparation des édifices cultuels du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ne semblent pas avoir été augmentés, ni le barème du MRL modifié. L'État n'intervient quasiment plus dans le financement des édifices du culte d'Alsace : les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin sont contraints d'augmenter leur participation. V. Les crédits départementaux pour les édifices cultuels du Bas-Rhin et du Haut-Rhin Les conseils généraux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin sont rétablis sous le régime de la loi de 1871 par l'ordonnance du 20 avril 1945. A. Le crédit départemental pour la construction et la réparation des édifices cultuels dans le Bas-Rhin Dans le Bas-Rhin, le crédit pour la construction et la réparation d'édifices cultuels, qui figurait au budget départemental jusqu'en 1939, est inscrit à nouveau au budget départemental de 1946 et fixé à 350.000 francs (chapitre 30, « Contribution du département aux dépenses extraordinaires des communes et des établissements publics », article 2, « Subvention pour la construction et la réparation d'édifices cultuels ») 95. Malgré plusieurs demandes en 1946, la commission départementale n'octroie aucune subvention sur ce crédit. Elle motive son refus par la situation financière précaire du département 96. Il faut attendre le 15 avril 1948 pour que la commission départementale alloue une première subvention de 25.000 francs à la fabrique d'église du Hohwald pour 94 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1957, rapports et délibérations, p. 125-127. Proposition de voeu N°58 de M. Ehm, subvention de l'État pour la construction d'églises. 95 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1946 et session extraordinaire de décembre 1946, rapports et délibérations, p. 148. 96 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1946 et session extraordinaire de décembre 1946, rapports et délibérations, p. 336. Rapport de la commission départementale, séance du 4 décembre 1946. Demande de subvention de la commune de Flexbourg pour la réparation de l'horloge de l'église. Demande de subvention de la commune d'Ichtratzheim pour la réparation de l'église. Demande de subvention de la commune d'Avolsheim pour le raccordement de l'église « Dompeter » au réseau électrique du village. 798 l'installation d'une conduite 'eau au presbytère 97. En décembre 1948, elle accorde cinq subventions correspondant à 10 % du montant des dépenses : 90.000 francs à la commune de Scherwiller pour la réparation de la charpente et de la couverture de l'église paroissiale, 64.000 francs pour la remise en état de l'église catholique de Lipsheim, 40.000 francs pour les travaux de réfection de la toiture de l'église de Duttlenheim, 30.000 francs pour la réparation de l'église de Hohengoeft, et 61.600 francs pour les travaux de réparation du presbytère catholique de Hochfelden 98. À cette occasion, la commission départementale décide qu'à partir de 1949, toutes les demandes de subventions pour la construction et la réparation d'édifices cultuels devront être groupées et lui être soumises en fin d'année pour lui permettre d'effectuer une répartition équitable des crédits 99. Mais en mai 1949, la commission départementale revient sur sa décision d'attendre la fin de l'année pour répartir les crédits prévus pour les édifices cultuels : elle alloue une subvention de 75.000 francs à la commune de Schirrhein pour la reconstruction et l'agrandissement de son église catholique 100. En 1948, le chanoine Georges Bornert (MRP, Molsheim) 101 sollicite une subvention pour la réparation de l'ancienne maison abbatiale d'Altorf, inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques. Le bâtiment de la fin du XVIe siècle abrite le presbytère, les logements de deux instituteurs, et les deux salles de classe de l'école des filles. Aucune réparation sérieuse n'y a été entreprise depuis plus de cinquante ans. La commune a entrepris une première tranche de travaux mais sa situation financière l'empêche de couvrir le reste de la dépense 102. Suivant le voeu de Bornert, la commission départementale demande à la commune d'établir deux demandes de subventions séparées, l'une pour les travaux du presbytère et l'autre pour les travaux dans les logements des instituteurs et les salles de classe de l'école des filles, ainsi qu'une demande d'autorisation 97 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 1re session ordinaire de 1948, rapports et délibérations, p. 184. Rapport de la commission départementale, séance du 15 avril 1948. Subvention à la fabrique d'église du Hohwald. 98 BNUS . M.500.042 . Conseil général du Bas Rhin, 2e session ordinaire de 1948, session extraordinaire de décembre 1948 et session extraordinaire de janvier 1949, rapports et délibérations, p. 187-188. Rapport de la commission départementale, séance du 8 décembre 1948. 99 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1948, session extraordinaire de décembre 1948 et session extraordinaire de janvier 1949, rapports et délibérations, p. 187. Rapport de la commission départementale, séance du 8 décembre 1948. 100 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, session extraordinaire d'avril 1949 et 1re session ordinaire de 1949, rapports et délibérations, p. 95. Rapport de la commission départementale, séance du 2 mai 1949. Reconstruction et agrandissement de l'église catholique de Schirrhein, participation financière du département. 101 Nouveau dictionnaire de biographie alsacienne, 4, p. 303. Notice par Georges Knittel. Georges Bornert (1897-1964). 102 BNUS M.500.042. Par conséquent, le chanoine Bornert « demande que le crédit pour l'entretien des édifices cultuels soit réinscrit au prochain budget et majoré en tenant compte de la dépréciation de l'argent », d'autant que « les crédits actuellement prévus sont vraiment dérisoires en proportion du budget départemental et ne dépassent pas ceux inscrits à titre de subventions accordées aux diverses associations. » Bornert souligne le caractère indispensable de ce crédit : L'entretien et les réparations des édifices cultuels – et je pense surtout aux églises classées monuments historiques – imposent actuellement des charges écrasantes, auxquelles elles ne peuvent faire face de par leurs propres moyens, aux communes et aux fabriques d'église, ces dernières généralement appauvries par la dépréciation continuelle de l'argent. D'autre part, les Beaux-Arts, qui ne disposent paraît-il que d'un crédit annuel d'un milliard pour l'ensemble de la France, ne peuvent pas être d'une aide très efficace et surtout rapide pour préserver ces édifices d'un état de délabrement souvent tel qu'il ne peut laisser qu'une impression fâcheuse aux nombreux visiteurs étrangers. Le préfet Paira, se défend de toute attitude négative à l'égard des demandes de subventions pour travaux de construction et de réparation d'édifices cultuels. Il explique : La commission départementale a refusé uniquement dans les cas précis où il s'agissait de travaux de reconstruction, étant donné que ces travaux doivent être intégralement financés par le MRU et qu'il eût été quelque peu illogique de substituer le département à l'État, à qui ces dépenses incombent normalement. C'est la raison pour laquelle il y a eu quelques refus. 105 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1948, session extraordinaire de décembre 1948 et session extraordinaire de janvier 1949, rapports et délibérations , p. 89. Budget primitif de 1949. 106 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, session extraordinaire d'avril 1949 et 1re session ordinaire de 1949, rapports et délibérations, p. 34. Budget supplémentaire de 1949. 801 Le président de la commission départementale Ernest Koessler (MRP, Truchtersheim) signale que les demandes sont rares : le problème vient donc des nouvelles équipes municipales, qui ignorent pour la plupart l'existence de ces crédits. Après discussion, le conseil général décide, qu'en cas de besoin, le crédit départemental pour la construction et la réparation des édifices cultuels sera porté à 500.000 francs au budget supplémentaire (décision modificative n°2) 107. Après l'intervention du chanoine Bornert, la commission départementale n'applique plus de barème rigoureux pour répartir les crédits à sa disposition pour la construction et la réparation d'édifices cultuels : elle alloue 50.000 francs pour les « travaux de reconstruction de l'église de Zittersheim détruite par un incendie », soit 50 % du montant de la subvention l'État 108, 64.000 francs pour les « travaux de rénovation du presbytère de Willgottheim », soit 20 % de la dépense 109, etc. Mais en décembre 1949, « la commission départementale constate que le crédit de 350.000 francs inscrit au budget du département n'a permis de donner dans les cas intéressants, que des subventions extrêmement minimes pour des travaux importants réalisés aux édifices cultuels » : 50.000 francs pour la reconstruction de l'église de Sand, soit 3 % du montant des travaux, ou 75.000 francs pour la reconstruction et l'agrandissement de l'église catholique de Schirrhein, soit 0,8 % du montant de la dépense. 107 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, session extraordinaire d'avril 1949 et 1re session ordinaire de 1949, rapports et délibérations, p. 173-174. Voeu N°98 de M. le chanoine Bornert, concernant la réinscription au budget départemental de crédits pour l'entretien des édifices du culte. 108 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, session extraordinaire d'août 1949, 2e session ordinaire de 1949, sessions extraordinaires de décembre 1949 et janvier 1950, rapports et délibérations, p. 191. Rapport de la commission départementale, séance du 1er septembre 1949. Travaux de reconstruction de l'église de Zittersheim détruite par un incendie, participation financière du département. 109 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, session extraordinaire d'août 1949, 2e session ordinaire de 1949, sessions extraordinaires de décembre 1949 et janvier 1950, rapports et délibérations, p. 191. Rapport de la commission départementale, séance du 13 octobre 1949. Travaux de rénovation du presbytère de Willgotheim, participation financière du département. 110 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, session extraordinaire d'août 1949, 2e session ordinaire de 1949, sessions extraordinaires de décembre 1949 et janvier 1950, rapports et délibérations, p. 191. Rapport de la commission départementale, séance du 1er décembre 1949. Construction et réparations d'édifices cultuels, participation financière du département. 802 Lors de la session extraordinaire du conseil général de janvier 1950, les conseillers généraux MRP déposent huit voeux relatifs à la construction et à la réparation d'édifices cultuels. Klock et Meck dénoncent « la grande misère (des) églises et notamment des édifices cultuels sinistrés. » Ils soulignent « le profond attachement de (la) population croyante à leurs églises et édifices cultuels » et ils ajoutent « que nul peut discuter la haute valeur morale de la contribution spirituelle apportées par les églises au redressement national. » Ils demandent donc que le MRU « seconde par tous les moyens à sa disposition les efforts des paroisses qui veulent reconstruire ou réparer leurs édifices cultuels endommagés par la guerre », que le conseil général porte de 350.000 à 5 millions de francs les crédits départementaux pour la construction et la réparation d'édifices cultuels et que ces crédits « seront intégralement répartis entre les paroisses qui en feront la demande et ceci au prorata de la répartition de la population entre les différentes confessions 111. Le président de la commission départementale Ernest Koessler demande qu'ils soient portés à 4.500.000 francs au budget supplémentaire 114. Malgré cette 111 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, session extraordinaire d'août 1949, 2e session ordinaire de 1949, sessions extraordinaires de décembre 1949 et janvier 1950, rapports et délibérations, p. 337. Voeu N°31 de MM. Klock et Meck et leurs collègues du MRP, concernant la grande misère de nos églises et notamment des édifices cultuels sinistrés. 112 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, session extraordinaire d'août 1949, 2e session ordinaire de 1949, sessions extraordinaires de décembre 1949 et janvier 1950, rapports et délibérations, p. 337. Voeu n°246 de M. Ehm et ses collègues du MRP, concernant le paiement des dommages de guerre pour la réparation des édifices cultuels. 113 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 1re session ordinaire de 1950, rapports et délibérations, p. 111. Rapport de la commission départementale, séance du 13 avril 1950. N°76. Remise en état des orgues de l'église protestant Saint-Pierre-le-Jeune à Strasbourg, participation financière du département. N°77. Rénovation du chauffage de l'église paroissiale d'Altorf, participation financière du département. 114 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 1re session ordinaire de 1950, rapports et délibérations, p. 198. Voeu N°35 de M. Koessler, concernant l'augmentation des crédits pour la reconstruction et la réparation des édifices cultuels et des presbytères. 803 augmentation, la commission départementale doit fixer des critères plus stricts. En mai 1950, elle accorde une subvention de 61.000 francs pour le renouvellement des installations de chauffage de l'église et la réparation de la clô du presbytère à Griesheim-sur-Souffel. À cette occasion, elle décide « de limiter à l'avenir le taux de participation du département pour ce genre de dépenses au maximum de 8 % vu qu'elles présentent un certain caractère somptuaire 115. » En juin 1950, la commission départementale précise ses critères d'attribution dans un sens plus restrictif : En raison, toutefois, du grand nombre de demandes de participations financières présentées par les communes ou paroisses, votre commission permanente a estimé qu'à l'avenir devront seules être prises en considération celles concernant les travaux aux édifices cultuels, presbytères et cimetières présentant un caractère extraordinaire et de nécessité, à l'exclusion donc des dépenses somptuaires et d'entretien courant, y compris les installations de chauffage. Mais le chanoine Bornert s'oppose à la définition de critères absolus et souhaite que la commission départementale continue à se prononcer sur les cas particuliers 117. La commission départementale transige lorsqu'il s'agit de monuments historiques. En septembre 1950, elle octroie une subvention de 100.000 francs pour la restauration des orgues Silbermann de l'église protestante Sainte-Aurélie à Strasbourg : 50.000 francs sur les crédits pour la construction et la réparation des édifices cultuels, et 50.000 francs sur les crédits pour l'entretien des monuments historiques 118. En novembre, elle alloue 86.000 francs à l'église Sainte-Richarde d'Andlau : 40.000 francs pour la restauration de la crypte, 115 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 1re session ordinaire de 1950, rapports et délibérations, p. 116. Rapport de la commission départementale, séance du 2 mai 1950. N°122. Renouvellement des installations de chauffage de l'église, réparation de la clôture du presbytère à Griesheim-sur-Souffel, participation financière du département. 116 BNUS M.500.042 . Conseil général du Bas-Rhin , 2e session ordinaire de 1950, session extraordinaire de décembre 1950, p. 90. N°204 . Édifices cultuels. Participation financière pour la construction et la réparation des édifices cultuels et presbytères. 117 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1950, session extraordinaire de décembre 1950, p. 260. N°204. Édifices cultuels. Participation financière aux constructions et réparations des édifices cultuels et des presbytères. 118 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1950, session extraordinaire de décembre 1950, p. 170. Rapport de la commission départementale, séance du 21 septembre 1950. N°243. Édifices cultuels. Restaur des orgues de l'église protestante Sainte-Aurélie à Strasbourg, participation financière du département. 804 soit 10 % du montant des travaux, et 46.000 francs pour la rénovation du chauffage central, soit 8 % du coût des travaux 119. Ill. 96 : Crypte de l'église Sainte-Richarde d'Andlau, photographie de Maurice Thaon, vers 1947 (Ministère de la culture, Médiathèque de l'architecture et du patrimoine, APMH00172903) En avril 1953, la commission départementale décide de fixer uniformément à 10 % le taux des subventions pour la construction et la réparation d'édifices cultuels. Lorsqu'un reliquat de crédits reste disponible en fin d'exercice, la commission garde toutefois la possibilité de relever le taux des subventions « dans les cas les plus dignes d'intérêt. » Elle décide que les demandes de subventions devront lui être présentées avant le vote du budget primitif, c'est-à-dire avant la deuxième session ordinaire de l'année en cours pour l'année suivante, afin que le montant des crédits à inscrire au budget départemental puisse être 119 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1950, session extraordinaire de décembre 1950, p. 173. Rapport de la commission départementale, séance du 9 novembre 1950. N°311. Construction et réparation d'édifices cultuels, participation financière sollicitée par la paroisse catholique d'Andlau pour la restauration de la crypte et la rénovation du chauffage centrale de l'église. 805 adapté aux besoins 120. C'est que les besoins restent très supérieurs aux disponibilités : le crédit de 4.500.000 francs inscrit au budget primitif de 1953 pour la construction et la réparation d'édifices cultuels étant épuisé dès le 4 juin 121, le conseil général doit voter un crédit supplémentaire de 4.777.244 francs pour pouvoir répondre aux nombreuses demandes. Les devis de travaux de construction et de réparation d'édifices cultuels s'élevant déjà à 300 millions de francs pour 1954, le conseil général vote un crédit extraordinaire de 15 millions de francs au budget primitif de 1954 (chapitre 30, article 8) 122. En 1956, la situation budgétaire s'améliore. La commission départementale revient sur les critères d'attribution de subventions. Elle décide « qu'à l'avenir, les travaux de restauration ou d'installation de chauffage, de vitraux et d'orgues dans les églises pourront être subventionnés par le département », à condition toutefois d'avoir reçus l'approbation de la commission diocésaine d'art sacré 123. Les besoins restent importants : un crédit complémentaire de 9.500.000 francs doit être inscri au budget supplémentaire de 1956 124. Au début des années 1960, la croissance démographique et la création de nouveaux quartiers urbains nécessitent la construction de nombreux édifices cultuels : les demandes de subventions se multiplient, et les charges du département augmentent. En 1961, le conseil général estime qu'il faut fixer de nouveaux critères d'attribution 125. En 1963, une commission spéciale composée des conseillers généraux Grau, Tubach, Henrich, du pasteur Fricker, de l'abbé Humbert et du Dr. Ritter est chargée d'étudier de nouvelles modalités d'intervention du département dans le financement des travaux intéressants les édifices cultuels. Le rapport de la commission spéciale soumis à la commission départementale établit de nouveaux principes qui ont reçu l'approbation des autorités ecclésiastiques. Désormais, les associations et paroisses ne peuvent bénéficier de l'aide du département qu'à condition d'avoir obtenu une participation de la commune intéressée, 120 BNUS M.500.083. Conseil général du Bas-Rhin, délibérations de la commission départementale, année 1953, p. 19. Séance du 20 avril 1953. N°206. Conditions d'attribution des subventions. 121 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1953, session extraordinaire de novembre-décembre 1953, rapports et délibér ations, p . 120-122. N°220. Édifices cultuels, construction, reconstruction et réparation des édifices cultuels , subventions. 122 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 2e session ordinaire de 1953, session extraordinaire de novembre-décembre 1953, rapports et délibérations, p. 249. N°220. Édifices cultuels, constructions, reconstructions et réparations des édifices cultuels, subventions. 123 BNUS M.500.083. Conseil général du Bas-Rhin, délibérations de la commission départementale, année 1956, p. 35. Séance du 9 juillet 1956. N°278. Subventions, constructions et réparations aux édifices cultuels. 124 BNUS M.500.083. Conseil général du Bas-Rhin, délibérations de la commission départementale, année 1956, p. 49. 125 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 1re session ordinaire de 1961, rapports et délibérations, 1961, p. 64. N° 134. Édifices cultuels. Participation financière du département . 806 sauf cas exceptionnel. Le rapport distingue les travaux de construction d'édifices cultuels et les travaux de grosses réparations et rénovations dans les édifices cultuels. Les travaux de construction de lieux de culte, de presbytères, de foyers et de maisons d'oeuvre peuvent être subventionnés. Par contre, la construction de cimetières n'est plus subventionnée car s'agit d'une opération purement communale. Le montant des subventions pour la construction des lieux de culte et des presbytères est forfaitaire. Il dépend du coût moyen de la construction fixé par l'architecte des bâtiments de France chargé de l'inspection des édifices cultuels en accord avec l'autorité ecclésiastique. Quand la dépense est inférieure au plafond, le montant de subvention est fixé suivant le coût réel de la construction. Il s'élève à 10 % pour les lieux de culte et 7,5 % pour les presbytères. Les dépenses d'acquisition de mobilier, d'orgues, d'autels et de chaires sont subventionnables, celles concernant les vitraux également. Les travaux de reconstruction d'églises sinistrées peuvent faire l'objet d'une subvention de 10 %, déduction faite de l'indemnité de dommages de guerre. Dorénavant, les subventions ne sont plus versées en capital : la commune ou la paroisse contracte un emprunt à 30 ans et 5,5 % d'intérêts, le département en assure l'amortissement. Le bon sens de Zell est salué par le président du conseil général Henri Meck, et les conclusions du rapport adoptées 128. Graphique 21 : Évolution du crédit départemental pour la construction et la réparation d ' édifices cultuels dans le Bas - Rhin de 1945 à 1964 60000000 50000000 Anciens francs courants 40000000 30000000 Anciens francs constants (valeur 1945) 20000000 1964 1963 1962 1961 1960 1959 1958 1957 1956 1955 1954 1953 1952 1951 1950 1949 1948 1947 0 1946 10000000 Tableau 48 : Évolution du crédit départemental pour la construction et la réparation d'édifices cultuels dans le Bas-Rhin de 1945 à 1964 (en anciens francs courants) Exercices Budget Total supplémentaire 1946 350.000 francs - 350.000 francs ( budget 127 BNUS M .500 .042. Conseil général du Bas - Rhin, 1re session ordinaire de 1963, session extraordin aire de mai 1963 , session extraordin aire du 29 juin 1963, rapports et délibérations, p. 130-133. Délibérations, séance du 7 janvier 1964. N°32. Financement des travaux intéressant les édifices cultuels. 128 BNUS M.500.042. Conseil général du Bas-Rhin, 1re session ordinaire de 1964, session extraordinaire de mai 1964, rapports et délibérations, p. 92-93. Délibérations, séance du 25 mai 1964. N°53. Financement des travaux intéressants les édifices cultuels . 808 extraordinaire) 1947 350.000 francs - 350.000 francs 1948 350.000 francs - 350.000 francs 1949 350.000 1950 francs 215.600 francs 565.000 francs (budget ordinaire) (report) 3.500.000 francs 2.397.297 francs 4.500.000 francs (report) + 1.000.000 de francs (augmentation) 1951 4.500.000 francs 1.179.751 francs 5.679.751 francs (report) 1952 4.500.000 francs 4.061.161 francs 8.561.161 francs (report) 1953 4.500.000 francs 3.060.628 francs 12.337.872 francs (report) + 4.777.244 francs (augmentation) 1954 15.000.000 francs 5.127.191 (budget francs 20.127.191 francs (report) aire) 1955 12.000.000 francs 17.547.994 (report francs 25.212.994 francs D.M.1) 4.335.000 – (francs (diminution D.M.2) 1956 12.000.000 francs 13.743.432 (report (francs 35.243.432 francs D.M.1) 9.500.000 + francs (augmentation D.M.2) 1957 15.000.000 francs 22.889.129 francs 37.889.129 francs 809 (report D.M.1) 1958 15.000.000 francs - 15.000.000 francs 1959 20.000.000 francs - 20.000.000 francs 1960 20.000.000 francs? 49.000.000 francs 1961 40.000.000 francs - 80.000.000 francs 32.000.000 francs (D.M.2) 1962 25.000.000 francs - 1.500.000 francs 23.500.000 francs (D.M.2.) 1963 30.000.000 francs - 30.000.000 francs 1964 30.000.000 francs 1.250.000 francs 31.250.000 francs B. 129 BNUS M.500.377b, Département du Haut - Rhin, exercice 1945, compte des recettes et des dépenses départementales. 130 BNUS M.500.377b, Département du Haut-Rhin, exercice 1946, compte des recettes et des dépenses départementales. La commission départementale est favorable aux subventions départementales pour la construction des nouvelles églises. Mais elle cherche à limiter le saupoudrage des crédits. Elle décide donc : 1° de reporter au budget de l'exercice 1950 la totalité du crédit de 3.000.000 inscrit au budget départemental de 1949 en vue de subventionner la réparation et la construction des édifices cultuels et des presbytères ; 2° de demander au conseil général de se prononcer sur la question de principe qui se pose au sujet du financement des nouvelles constructions ; 3° d'ajourner à une date ultérieure l'examen des demandes de subventions présentées par les municipalités pour l'année 1949 131. La commission de l'administration générale et la commission des finances du conseil général se montrent prudentes : Soucieuse de conserver à ce crédit la destination qui lui avait été affectée à l'origine, à savoir d'aider à l'entretien et à la conservation des édifices cultuels et presbytères que les communes ne peuvent pas assurer par leurs seuls moyens, tenant compte, d'autre part, de la modicité du crédit qui ne permettrait en aucun cas de subventionner efficacement des constructions nouvelles, propose que la commission départementale étudie en priorité – et en recueillant tous renseignements utiles sur l'urgence et la nécessité des travaux ainsi que sur les possibilités financières des communes – les demandes de subventions pour réparation des édifices cultuels et presbytères, avant de procéder à tout examen de demandes concernant des constructions nouvelles 132. Lors de la discussion générale en mai 1950, Modeste Zussy (RPF, Thann) fait remarquer que le crédit de 3.000.000 de francs étant à peine suffisant pour l'entretien et la réparation des édifices cultuels, aucune subvention pour la construction de nouvelles églises ne pourra être versée, et Jacques André (RPF, Masevaux) se dit favorable à une augmentation des crédits pour pouvoir subventionner la construction de nouvelles églises 133. Suivant la décision du conseil général, le préfet établit un projet de répartition des crédits pour la construction et la réparation des édifices cultuels dans lequel : Il a été tenu compte, d'une part, de l'importance et de l'urgence des travaux, et d'autre part, de l'importance de l'effort fiscal de la commune considérée, comparé à la charge de l'entreprise. 131 B NUS M.500.122. Conseil général du Haut-Rhin, 1re session extraordinaire de 1950 (30 janvier 1950), 1 session ordinaire de 1950 (3 mai 1950), rapports du préfet, procès-verbaux des délibérations, p.82-83. 132 BNUS M.500.122. Conseil général du Haut-Rhin, 1re session extraordinaire de 1950 (30 janvier 1950), 1re session ordinaire de 1950 (3 mai 1950), rapports du préfet, procès-verbaux des délibérations, p. 255. 133 BNUS M.500.122. Conseil général du Haut-Rhin, 1re session extraordinaire de 1950 (30 janvier 1950), re 1 session ordinaire de 1950 (3 mai 1950), rapports du préfet, procès-verbaux des délibérations, p. 256-257. re 811 Ont été classés en 1re urgence les travaux de conservation et les grosses réparations, en 2e urgence les travaux d'entretien et d'embellissement et en 3e urgence les dépenses somptuaires. Le projet préfectoral porte sur 28 demandes de subventions pour des travaux de réparation d'édifices cultuels et sur trois demandes pour des travaux de constructions nouvelles. Les propositions de subventions pour travaux de réparations s'élevant à 5.495.000 francs, il ne resterait que 505.000 francs à répartir pour les travaux de constructions neuves. Mais la commission départementale ne parvient toujours pas à statuer. Les crédits de 1949 et 1950 sont donc reportés au budget de 1951 et l'affaire soumise au conseil général 134. Lors de la première session ordinaire de mai 1951, Édouard Fuchs (Habsheim) lance la polémique en accusant le sénateur et président du conseil général, Georges Bourgeois (RPF, Ensisheim), et le sénateur président de la commission départementale, Modeste Zussy (RPF, Thann) d'être incompétents : La première année, 3 millions sont à répartir on ne sait ce qu'il faut en faire La deuxième année, encore 3 millions à répartir la commission départementale ne sait pas davantage se tirer d'affaire. Je pose donc la question : d'où viennent ces indécisions et ces lenteurs? Peut-être du fait que siègent, au sein de cette commission, deux parlementaires, dont l'un en assure la présidence et l'autre la conseille (sic), ce qui est bien son rôle. Permettez-moi de dire que je trouve étrange – alors que dans toutes les commissions on a toujours de la peine à trouver les crédits nécessaires pour satisfaire aux besoins – que la commission départementale ait des crédits à sa disposition et ne trouve pas le moyen d'en faire une juste répartition. Voilà ce que je voulais dire à ce sujet. Cette situation provient peut-être du fait que lors du dernier renouvellement de la commission départementale (en 1949), on n'a pas su s'entourer des compét et des expériences qui au raient été indispensables Cela explique peut-être aussi pourquoi on n'a pas encore l'habitude de faire ce simple travail de répartition des crédits mis à sa disposition. Sachez pourtant qu'on attend, dans le département, l'attribution de ces crédits avec une certaine impatience, car dans bon nombre de cas les dépenses sont déjà engagées. Il est inadmissible que vous ne sachiez pas répartir les crédits dont vous avez pourtant la disposition. Dans sa réponse à Fuchs, le président Bourgeois prend la responsabilité de ce retard : 134 BNUS M.500.122. Conseil général du Haut-Rhin, 1re session ordinaire de 1951, rapport présenté au conseil général dans sa 1re session ordinaire de 1951 sur l'ensemble des travaux de la commission départementale, p. 43 et 114. Séances du 6 novembre et du 29 décembre 1950. 812 Je vais vous avouer que si cette répartition des crédits des deux dernières années ne s'est pas faite, j'en suis responsable. Je décharge donc entièrement la commission départementale qui, à un certain moment m'avait suivi, pour faire prendre la décision au conseil général au cours de cette session. Si cela n'a pas été fait, je vais vous en donner la raison. Il m'a paru, dans une période comme celle que nous traversons, après une guerre qui a si durement éprouvé nos édifices cultuels – et vous le savez fort bien – qu'il serait préférable de ne répartir que des sommes importantes permettant d'entreprendre les grosses réparations indispensables ou des constructions d'édifices. [] Je ne pense pas, monsieur Fuchs, que vous ayez un monopole quelconque dans la défense de tout ce qui concerne les édifices cultuels et presbytères et que vous leur portiez un intérêt plus grand que les deux parlementaires que vous aviez mis en cause. [] Vous savez bien que, dans ce domaine, nos sentiments sont les mêmes. Zussy rappelle la complexité de la question : En tout cas, si nous n'avons pas réparti les crédits prévus pour l'entretien des églises, édifices cultuels et presbytères, dites-vous bien que c'est précisément parce que la commission départementale a à coeur d'examiner toutes les demandes. La préfecture ne peut pas – ce n'est d'ailleurs pas son rôle – être exactement renseignée sur les conditions dans lesquelles sont présentées ces demandes. La préfecture les enregistre et les transmet à la commission départementale. Certaines demandes émanent de communes florissantes alors que d'autres communes, plus pauvres, n'ont pas encore présenté leur demande de crédit. Nous avons donc préféré, plutôt que de risquer de commettre des injustices, voir l'ensemble des demandes ; ainsi on ne pourra pas nous reprocher d'avoir donné des crédits à des communes riches et d'en avoir refusé à des communes moins favorisées 135. En juillet 1951, les membres de la commission départementale parviennent enfin à se mettre d'accord sur un tableau de répartition des crédits pour les travaux de réparation des édifices cultuels 136. Pour éviter qu'un tel retard se reproduise, le conseil général du Haut-Rhin scinde les crédits pour les édifices cultuels de 1952 en deux parties : un crédit de 3 millions de francs pour la réparation des édifices cultuels et des presbytères, dont la répartition est faite, comme par le passé, par la commission départementale (chapitre 21, article 13a), et 135 BNUS M.500.122. Conseil général du Haut-Rhin, 1re session extraordinaire de l'année 1951 (15 janvier 1951), 1re session ordinaire de l'année 1951 (7 mai 1951), rapports du préfet, procès-verbaux des délibérations, p. 277-281. 136 BNUS M.500.122. Conseil général du Haut-Rhin, 2e session ordinaire de 1951, rapport présenté au conseil général dans sa deuxième session ordinaire de 1951 sur l'ensemble des travaux de la commission départementale, p. 81-83. Séance du 3 juillet 1951. Sub vention s aux commun es pour la construction et la réparation d'édifices cultuels et de presbytères. 813 un nouveau crédit de 6 millions de francs pour les constructions nouvelles d'édifices cultuels, dont la répartition est faite par le conseil général (chapitre 21, article 13b)137. Effet, il s'agit de deux types de dépenses bien distincts : la réparation des édifices cultuels est le plus souvent à la charge des communes propriétaires tandis que la construction de nouvelles églises est financée par les établissements cultuels (fabriques d'églises et consistoires), avec l'appui éventuel des communes. Le barème adopté par la préfecture pour l'octroi des subventions est très complexe : Une réduction de 5 % a été appliqu pour les travaux de deuxième urgence, et une réduction de 10 % pour les travaux de troisième urgence. Pour calculer le taux de la subvention, il a été fait usage d'un barème, fixant, d'une part, le pourcentage applicable à la dépense par habitant et, d'autre part, celui applicable à l'effort fiscal par habitant. Le taux de la subvention est égal au total de ces deux pourcentages, diminué éventuellement de la réduction prévue pour les travaux de deuxième et de troisième urgences. En janvier 1952, le président Bourgeois estime que « le mode de calcul adopté pour la réparation d'édifices cultuels et de presbytères, ne répond pas aux conditions économiques actuelles et n'est pas équitables. » Le préfet propose « une autre solution (qui) consisterait à substituer au barème précité, en ce qui concerne la dépense par habitant, un barème partant d'une dépense par habitant de 500 francs, c'est-à-dire que serait éliminé tout projet représentant une dépense par habitant de moins de 500 francs 138. » Mais sur l'avis du rapporteur de la commission de l'administration générale Joseph Perrin (RPF, Altkirch), le conseil général décide de ne pas modifier son barème d'attribution 139. Pour les travaux de construction d'édifices cultuels, le conseil général renonce à établir un barème : L'établissement d'un barème pour cette répartition est pratiquement impossible, l'érection d'églises ou de chapelles de secours étant, en général, l'oeuvre d'établissements cultuels qui ne disposent le plus souvent, à cet effet, que du produit de collectes réalisées parmi les fidèles 140. 137 BNUS M.500.122. Conseil général du Haut-Rhin, 2e session ordinaire de l'année 1951 (17 octobre 1951), 3e session extraordinaire de l'année 1951 (27 novembre 1951), rapports du préfet, procès-verbaux des délibérations, p. 430. 138 BNUS M.500.122. Conseil général du Haut-Rhin, 1re session ordinaire de l'année 1952 (28 avril 1952), rapports du préfet, procès-verbaux des délibérations, p. 54-55. Rapport N°28. Subventions aux communes nécessiteuses pour la réparation des édifices cultuels et des presbytères. 139 BNUS M.500.122. Conseil général du Haut-Rhin, 1re session ordinaire de l'année 1952 (28 avril 1952), rapports du préfet, procès-verbaux des délibérations, p. 215. Rapport N°28. Subventions aux communes nécessiteuses pour la réparation des édifices cultuels et des presbytères. 140 BNUS M.500.122. Conseil général du Haut-Rhin, 2e session ordinaire de l'année 1954 (28 septembre 1954), 2e session extraordinaire de l'année 1954 (23 novembre 1954), rapports du préfet, procès-verbaux des délibérations, p. 132-136. Rapport N°28. Subventions pour la construction d'édifices cultuels. 814 Par conséquent, le conseil général continue de fonder sa répartition sur l'importance et la destination des dépenses, l'avancement des travaux et la situation de la commune. Le crédit inscrit au budget départemental de 1954 pour la construction d'églises n'est pas épuisé. Le reliquat de 2.880.000 francs est reporté au budget de 1955 mais il est affecté aux travaux de réparations des édifices cultuels et des presbytères. Alfred Willem (PCF, Munster) prend la parole pour dénoncer l'octroi de subventions aux édifices cultuels, « vu que l'on utilise certains de ces édifices pour la propagande électorale » ; le président Georges Bourgeois ne prend même pas en compte son intervention et passe au point suivant de l'ordre du jour 141! La répartition de l'ensemble des crédits pour les édifices cultuels de 1955 (constructions et réparations) est soumise au conseil général lors de son assemblée plénière de novembre. Willem refait une tentative ; on ne lui accorde guère plus d'attention qu'à la session de printemps 142. C'est d'ailleurs la première et la seule fois entre 1945 et 1958 qu'un conseiller général remet en cause l'existence des crédits en faveur des édifices cultuels dans le Haut-Rhin.
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L’héroïsation du consommateur : l’homme présenté par la rhétorique publicitaire comme augmenté par sa consommation de la technologie. Sciences de l'information et de la communication. 2015. &#x27E8;dumas-04353974&#x27E9;
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) Scène 1 Le film publicitaire début sur une vue d’ensemble du lieu de l’action, filmée avec une légère hauteur, expliquant instantanément la situation initiale. Ainsi on voit en arrière-plan un bâtiment aux nombreuses baies vitrées, avec à gauche un jardin composé de beaucoup d’arbres aux rares feuilles mortes. En première-plan, occultant partiellement le jardin, on voit un drone à quatre hélices et quatre « pattes », ces dernières tenant un colis de poste, en train de voler. On en aperçoit beaucoup d’autres disséminés un peu plus loin dans le paysage. Le temps est ensoleillé mais les couleurs sont froides On suppose que c’est une journée d’hiver. La caméra bouge légèrement, nous montrant toujours la même scène mais avec un peu plus de recul, afin d’élargir le champ de vision et de bien saisir la situation. Scène 2! HE! On change ensuite de plan pour nous montrer, à travers une des vitres des nombreuses baies vitrées, le visage d’un homme âgé. Il porte un costard et a les cheveux blancs. On aperçoit le reflet de la situation extérieure dans la vitre. L’homme observe la scène de dehors, il a un air inquiet. La caméra nous montre alors de nouveau l’extérieur mais filmé cette fois à la taille de l’homme, nous donnant à voir ce qu’il voit lui, à l’image d’un point de vue interne, la vitre en moins, la caméra se trouvant a priori de l’autre côté, à l’extérieur. Le plan se recentre de nouveau sur l’homme en costard, qui se retourne alors vers un groupe de personne, positionné face à la baie vitrée, pour s’adresser à eux. C’est le début du dialogue, il essaie de rassurer le groupe : « je pense que nous pouvons le faire... n’est-ce pas?». On devine alors qu’il est le patron de ces personnes, il essaie d’être rassurant mais ne l’est pas, son expression est celle de quelqu’un d’inquiet, voire presque paniqué. Son « n’estce pas? » sonne comme un besoin de confirmation de la part de son public, il n’est pas sur lui-même de ce qu’il dit. C’est d’ailleurs à ce moment que la caméra se tourne vers le groupe : personne ne répond et personne ne semble rassuré à l’exception d’un jeune homme au milieu et à l’avant du groupe. Il porte lui aussi un costard. Il est le seul à bouger, se tournant vers ses collègues à sa gauche, le reste du groupe le fixant lui, et non l’interlocuteur initial, puis regardant de nouveau son patron. Immédiatement il prend les devants et s’avance vers lui. On change alors de plan pour prendre du recul et voir la scène en entier. Le jeune homme s’avance vers son patron, pose une main sur son épaule, geste rassurant, en disant calmement et doucement « c’est ok John ». Sans s’arrêter, il se tourne pour s’adresser à son tour au groupe : « Restez simplement calme et les plus silencieux possible, tout le monde comprend ». Sa main gauche sur l’épaule de son patron, l’autre main étant levée et dirigée vers le groupe, bougeant au rythme de ses paroles, montrant sa détermination et l’érigeant en figure d’autorité. La caméra montre alors le groupe, un homme remet ses lunettes sur son nez en acquiesçant de la tête, le plan s’élargit pour montrer l’ensemble des personnes hocher la tête en signe d’approbation tout en regardant les autres. C’est donc une approbation générale. Scène 3 On change alors de plan. On y voit le groupe sortir du bâtiment, le jeune homme distinctement en tête, suivi du patron puis immédiatement après du reste du groupe. Le jeune homme avance sûrement, le reste suit le rythme mais avec moi d’assurance. La caméra! HP! change en suite de prise de vue pour se mettre face au groupe de tête, le jeune homme en avant. Le groupe regarde derrière la caméra. Le leader ordonne alors doucement et posément : « pas de mouvements brusques ». La caméra nous montre alors ce à quoi le groupe est confronté, à savoir une « armée » de drones portant des colis et se maintenant dans les airs. Sc ène 4 Suite à cette scène angoissante, le plan se coupe pour revenir au groupe qui immédiatement panique et se met à crier et courir dans tous les sens. On voit le jeune homme tenter en vain de calmer ses collègues. Puis le plan s’élargit, on voit les drones se mettent immédiatement eux aussi en mouvement, volant dans tous les sens, rasant les têtes des membres du groupe désormais éparpillé. Ils les attaquent, tout le monde panique et on voit un homme tomber et perdre ses lunettes. La caméra fait alors un gros plan sur ces dernières en train de « rouler » sur le sol et de se casser. Puis on voit une femme rentrer dans la cabine du gardien de parking. La prise de vue change pour la montrer vue d’en haut : elle s’enferme afin de se protéger, à l’image de l’héroïne Mélanie du film de Hitchcock. On repasse en vue à hauteur d’homme et on voit un drone foncer sur la vitre, s’y écraser et la briser partiellement. La femme crie de terreur. La musique est angoissante et forte, elle est celle d’un film d’épouvante, lorsque la victime tente en vain de fuir son agresseur. La caméra film alors le parking où l’on voit un colis tomber sur un voiture. On voit d’ailleurs, au premier-plan à gauche, l’avant de la voiture stationnée à côté avec les quatre cercles du signe Audi. Les drones volent toujours dans tous les sens en arrière plan, les cris continuent également. ! HH! Sc ène 5 Le plan change. La caméra fait un gros plan sur le visage du jeune homme. Son visage est serein, il aborde même un léger sourire de désolation en jetant un bref coup d’œil au spectacle dont il est témoin. Puis il s’engouffre dans sa voiture Audi.! HI! Scène 6 On le voit alors dans sa voiture, toujours confiant, les deux mains sur le volant. A la fenêtre, un drone apparaît. Ce dernier regarde dans la voiture et le conducteur qui ne montre aucun signe de panique. Le drone reste en place et le jeune homme enclenche son GPS qui apparaît alors à l’écran. Puis la caméra fait un gros plan sur le levier de vitesse que le conducteur enclenche. La voiture démarre et quitte le parking. Différents plans montrent la voiture s’en allant, on aperçoit que des drones la suivent.! HY! Scène 7 La caméra fait un gros plan sur le visage du conducteur qui, regardant en face de lui, il se rend compte que des drones le suivent et que d’autres arrivent en face. Puis un gros plan se fait sur le tableau de bord. Celui-ci, à l’image du tableau de bord d’un pilote d’avion de chasse, détecte le drone et le prend en viseur. Une fois cible verrouillée, le viseur auparavant jaune devient rouge et le « pilote » donne un coup de volant sur la gauche pour dévier la voiture de sa trajectoire au dernier moment. Le drone qui se situait en face de la voiture vient percuter un de ceux qui la suivaient, n’ayant pas eu le temps de réagir au mouvement de la voiture. On voit d’autres drones se prendre des fils électriques ou s’écraser sur le pont sous lequel passe l’Audi. Le message suivant apparaît :! IK! Scène 8 La caméra nous montre de nouveau le « jeune homme-pilote ». il regarde derrière lui d’un bref coup d’œil, constate que plus aucun drone ne le suit, et arbore un sourire satisfait et triomphant. Le message suivant apparaît :! I'! Scène 9 On revoit une dernière fois la voiture roulant seule sur une route sans encombre Le slogan Puis avec un effet de lumière de rouge, à l’image de celle des phares arrière, qui nous éblouissent, la baseline de la marque ainsi que son logo apparaissent à l’écran.! I"! Interprétation (éléments iconiques codés) Comme le mentionne explicitement la description du film publicitaire, ce scénario est construit autour de la peur de la technologie. Or la marque Audi nous dit que bien que la haute technologie, telle que les drones, soit devenir « terriblement » présente, au point d’en devenir inquiétante, la technologie ne doit pas être effrayante. Basé sur le film d’angoisse Les Oiseaux de Hitchcock131, le film publicitaire met en opposition la technologie effrayante et dangereuse des drones avec celle rassurante et avancée de sa nouvelle voiture. Si on reprend le schéma actanciel de Greimas132, on a ainsi la technologie à la fois comme adjuvant et comme opposant. Audi utilise ainsi ici ce que nous appellerons une rhétorique de la maîtrise. Dans les premières scènes, on identifie clairement la menace technologique que constitue les drones. Immédiatement, une première opposition se fait entre le patron qui panique et ne sait pas comment s’adresser à ses employés, lui-même cherchant à être rassuré, et le jeune homme qui garde son calme, trouve les bons mots pour tranquilliser son patron et guider ses collègues. Il endosse alors rapidement le rôle de leader, car il est celui qui sait maîtriser ses émotions. Ensuite, une fois le groupe dehors, il se retrouve directement confronté à la menace. La vision d’horreur que constitue ce rassemblement d’« robots oiseaux » se traduit sur le visage des membres du groupe. Le jeune homme donne alors son ultime recommandation afin d’inciter au contrôle de soi, mais tout le groupe se met à paniquer et, une fois de puis, il est le seul à maîtriser sa peur. S’en suit alors une exagération de la panique, où tout le monde crie, tombe, panique, court dans tous les sens. Les adultes paniquent à l’image des enfants dans le film de Hitchcock qui, à plusieurs reprises, sont attaqués en groupe par les oiseaux. Et cette analogie des collègues de travail, ne sachant que faire sinon écouter les instructions du leader, avec les enfants attaqués et paniqués qui s’en remettent, légitimement aux « grandes personnes », ne fait qu’accentuer cette opposition entre ceux qui ont la force de se maîtriser et ceux qui ne l’ont pas. De plus, les drones sont omniprésents mais on ne sait pas trop ce qu’ils font exactement aux personnes. C’est le fouillis. Il convient de noter qu’ils ne touchent à personnes, il n’y a pas de mise en scène de confrontations directes, pas de blessés, pas de sang ou autre. La vision de la crainte en la technologie n’est pas poussée à l’extrême, car elle doit rester en arrière plan face à la rhétorique de la maîtrise, primordiale ici puisque c’est l’idée que le consommateur doit retenir de la publicité : Audi maîtrise la technologie avancée. Lorsque l’on retrouve le protagoniste du scénario, on le voit serein, avec un léger sourire signifiant à la fois moquerie et pitié, de manière très nuancée. Ce n’est pas qu’il se moque, c’est qu’il a fait ce qu’il pouvait et que le spectacle devant ses yeux lui apparaît grossier, presque comique. Cette expression réaffirme la supériorité de sa maîtrise. Il entre alors dans sa voiture. Une autre dimension, fortement liée à la première, apparaît alors : la sécurité de l’intérieur V.S. l’insécurité et le danger de l’extérieur. D’autant que le drone ne l’attaque pas, lui même étant intimidé par cette maîtrise et par la technologie avancée de la voiture. S’ajoute à la rhétorique de la maîtrise celle de la sécurité, les deux allant de paire : la technologie Audi assure sécurité et soumission à la volonté de l’homme, soit du conducteur. Lors de la fuite du protagoniste, la rhétorique publicitaire aborde le thème de la maîtrise du véhicule, de sa maniabilité sur la route, et donc indirectement de sa sécurité. Le jeune homme n’est pas un pilote de Formule 1, et pourtant il arrive à semer les drones grâce à sa maîtrise et à la haute technologie de la voiture, incarnée par le tableau de bord aux capacités exagérées!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 131 132! Les Oiseaux, sorti en France en mai 1963, réalisé par Alfred Hitchcock! Algirdas Julien Greimas, Sémantique Structurale, 1966, édition PUF! I#! pour le film, comme le souligne un message apparaissant en bas de l’image, la véritable tableau de bord ne permettant pas de détecter les drones. Ce film publicitaire est donc construit comme un véritable mini-film, ou mini-Hitchcock, avec une situation de départ problématique, un possible dénouement, un acte imprévu de panique, et la réussite du héros, ou protagoniste, qui sort vainqueur et triomphant de ses mésaventures. Ici aussi, on remarque cependant que les actions s’enchaînent de manière presque automatique, à l’image de l’analyse du film publicitaire Wonderlove133. Il s’agit certes de répondre à un impératif de durée, le film publicitaire devant être le plus court possible, cependant le protagoniste ne semble à aucun moment faire réellement face à une difficulté, il ne perd jamais son sang-froid, les drones ne le touchent pas. Valeurs En somme, par ce film publicitaire, la marque Audi cherche à affirmer son positionnement de marque de haute technologie tout en prenant la position d’une marque sûre. Audi signifie ainsi qu’avec ses voitures, les risques d’accidents ou de problèmes techniques ne sont pas à craindre. La technologie est au service du consommateur, et rien d’autre puisqu’elle est maîtrisée, aussi bien par son créateur, Audi, que par son utilisateur, le conducteur.!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! ANNEXE 4 - Fiches de lecture ANNEXE 4.a - Umberto Eco, De Superman au Surhomme, 1978 L’objet principal de ce travail d’étude et de recherche est d’interroger la figure du héros et son utilisation au sein des publicités portant sur les nouvelles technologies. L’ouvrage d’Umberto Eco a été une ressource primordiale dans le travail de définition préalable et indispensable à toute étude. Il a donc été utilisé comme ressource théorique tout au long de ce travail de recherche, et plus spécifiquement en introduction et première partie, pour la validation de notre première hypothèse. Dans cet ouvrage, Umberto Eco effectue un travail de recherche sur la figure du héros à travers les différentes productions romanesques. Il s’intéresse notamment aux romans feuilletons et ses protagonistes, en interrogeant les clefs du succès de ce genre littéraire et les ficelles de sa construction. Il se demande ainsi comment fonctionne l’idéologie de la consolation, soit en somme, comment le héros du roman-feuilleton console le lecteur de ne pas être un surhomme. Par ces recherche, l’auteur a donc pu nous fournir une analyse détaillée de la figure du héros, nous permettant en introduction de préciser la définition du terme même de héros, et de nous appuyer en première partie sur les deux figures types du héros qu’il identifie dans son ouvrage et qu’il explicite en conclusion, à savoir le Superman et l’Everyman. Il nous a donc offert une typologie pertinente, synthétique et explicite sur laquelle nous avons pu nous appuyer tout au long de ce travail d’étude. Les propos et recherches d’Umberto Eco nous ont également aidé à légitimer nos choix et partis-pris dans la définition du terme et de la figure du super héros, que l’auteur aborde dans son chapitre Le mythe de Superman134. En effet, l’univers des comics books est ample et complexe, Umberto Eco nous a alors permis de pallier notre manque de maîtrise dans ce domaine, nous aidant à rapidement structurer notre vision de ce qui constitue le fil rouge de ce travail de recherche. !!!!!!!! !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 134! Umberto Eco, De Superman au Surhomme, 1978, Le Livre de Poche, pp.113-145 IE ! Par ailleurs, pour la validation de notre deuxième hypothèse, appuyée notamment par l’analyse sémiologique de la campagne Wonderlove135 d’Orange, les propos de l’auteur sur le contexte d’apparition du super héros et les précisions qu’il apporte sur son rôle social de sauveur ainsi que sur sa prétendue homosexualité, nous ont permis, lors de nos analyses sémiologiques, de faire émerger l’idée d’une décrédibilisation de la figure du super héros par une utilisation de cette dernière dans un contexte qui ne lui est culturellement pas associé, le mettant en scène dans une situation de séduction ne lui étant pas légitime. L’ouvrage nous a ainsi permis de s’intéresser à cette dimension, que nous n’avions pas relevée auparavant, et à l’interroger.!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 135 ! Annexe 3.a – Analyses sémiotiques, film Orange « Wonderlove », p.49 IP! ANNEXE 4.b – Jean Baudrillard, Le Système des objets, 1968 Au cours de notre travail d’étude et de recherche, nous avons abordé la question de la figure du héros sous l’angle du produit présenté dans la publicité en postulant, en deuxième hypothèse, un glissement de l’héroïsme, identifié en première partie, sur le produit technologique même. Pour ce faire, nous nous sommes appuyés sur les analyses sémiologiques de l’ensemble des campagnes Orange136 dans lesquelles nous avons, entre autre, interrogé le rôle et la place du produit technologique que représentent le Smartphone et la 4G Orange. Le sous-chapitre de l’œuvre de Jean Baudrillard intitulé Système méta- et dysfonctionnel: gadgets et robots137, nous a alors aidé à mieux cerner les enjeux propres aux objets technologiques. L’auteur analyse en effet ces derniers sous l’angle de la notion d’automatisme qu’il explique par le fait que l’homme, dans toutes ses créations puis consommations techniques, recherche le fantasme du « tout marche tout seul », l’objet se trouvant alors physiquement chargé de signes de modernité faisant le plus souvent illusion. A lumière de cette notion nous nous sommes alors intéressés à la signification des différents services proposés par Orange et à la manière dont ce mythe de l’automatisme constamment présent confère une connotation « magique » aux technologies présentées, permettant à la rhétorique publicitaire de les assimiler aux supers pouvoirs des supers héros. Or ce point constitue une étape importante dans la mise à l’épreuve de notre deuxième hypothèse, d’autant que l’idée d’une connotation « magique » précédemment citée émerge rapidement dans notre développement et est étudiée à la suite de la question d’héroïsation du produit technologique. Associer le produit technologique à des supers pouvoirs vient conférer une dimension surnaturelle à la technologie, dimension qui s’avère être intrinsèquement liée à la vision et la symbolisme de la technologie même selon la t’œuvre de Jean Baudrillard, ce dernier venant renforcer nos propos. C’est ensuite sur les propos de l’auteur concernant l’obsession dont fait l’objet l’automatisme que nous nous sommes appuyés pour justifier un point essentiel de notre analyse. Selon lui en effet, l’automatisme possède une dérive, liée à l’obsession dont il fait l’objet, qui peut se résumer par la création d’objets sans réelles fonctions mais pour « la!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 136 137 ! Annexe 3.b – Analyses sémiotiques, tableau synthétique, p.61 Jean Baudrillard, Le Système des objets, 1968, Gallimard, pp.151-188 IH! beauté du mécanisme pur »138. Ainsi, en reliant cette vision de l’auteur avec le schéma actantiel de Greimas 139 appliquée à notre analyse sémiologique de la campagne Wonderlove140, l’objet technologique apparaît comme but en soi, et non comme adjuvant dans la rhétorique publicitaire technologique. La notion d’automatisme développée dans l’œuvre de Jean Baudrillard nous a donc permis d’avancer dans notre développement et la validation de notre seconde hypothèse puisqu’elle est venu appuyer et préciser nos interprétations sémiologiques.!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 138 Jean Baudrillard, Le système des objets, 1968, Gallimard, p.159 Algirdas Julien Greimas, Sémantique Structurale, 1966, édition PUF 140 Annexe 2 – Analyses sémiotiques, film Orange « Wonderlove » 139! II! RÉSUMÉ DU MÉMOIRE La campagne Wonderlove d’Orange, sortie en mars 2014, a recours à une analogie entre les supers pouvoirs des supers héros et les services offerts par la 4G de la marque. L’ensemble du film publicitaire est alors construit sur la mise en scène d’un super héros tourné en dérision s’opposant à un consommateur Orange équipé de sa technologie et triomphant dans la conquête de la super héroïne . Cette campagne, déclinée en plusieurs films, soulève la question des relations entre consommation, technologie et figure du héros dans la rhétorique publicitaire. C’est par une héroïsation du consommateur que le discours publicitaire s’adresse à ses récepteurs, usant de la pluralité de la figure du héros, entre super héros et protagoniste ordinaire, pour générer un mécanisme d’identification chez le consommateur, à la fois présent et valoriser dans le discours. Dans le cadre des publicités sur des produits technologiques, cette héroïsation vient paradoxalement « humaniser », dans une certaine mesure, un système communicationnel technique et froid, répondant à un paradigme de la conversation visant à repenser le discours de marque en faveur d’une relation marqueconsommateur moins marchande. Dans la mesure où la place du produit technologique dans la rhétorique publicitaire apparaît central, l’héroïsation à l’œuvre ne possède pas qu’une unique direction mais est également effective sur la technologie même. Cette double héroïsation est ainsi visible par une automatisation de l’enchaînement des actions narratives ainsi que par un produit technologique qui constitue un but en soi bien plus qu’un moyen. Elle insuffle également au discours technologique une connotation magique que l’on retrouve dans la définition même du héros et qui vient unifier l’acte de consommation à l’utilisation de la technologie. C’est alors que la magie à l’œuvre conduit à envisager l’héroïsation sous un autre angle qui lui est dérivé : la consommation du produit technologique permet d’accroître le champ des possibles de l’homme, venant ainsi toucher du doigt la thématique de « l’homme augmenté ». Sous-jacent à la double héroïsation, le discours publicitaire se charge de promesses futuristes d’augmentation de la nature de l’homme tout abordant, en creux, les risques de dérive liés au progrès technologique. Une rhétorique de la maîtrise présente en arrière-plan vient donc englober le idoyer techno-consommatoire que renferme le procédé rhétorique publicitaire qu’est l’héroïsation.! IY! MOTS-CLEFS Héros, Superman, rhétorique publicitaire, technologie, homme augmenté, automatisme, conversation!!! YK!.
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L'identit ance Céline Chatelin, Nathalie Dubost L'identité de rôle comme source de compréhension des conflits en gouvernance Céline CHATELIN-ERTUR* et Nathalie DUBOST* VALLORE M – Orléans - France Conférence AAIG 2012, Mai 24-25 IAE – EM Lyon * Correspondance : [email protected] Nathalie.dubost@univ -or leans.fr UFR DEG - IAE- rue de Blois BP 6739 45067 ORLEANS Cedex 1 L'identité de rôle comme source de compréhension des conflits en gouvernance Résumé Les travaux sur le conseil d'administration/de surveillance considèrent plus ou moins implicitement qu'en interne, ces dispositifs de gouvernance fonctionnent à l'unisson, notamment lors de la ratification et de la surveillance des décisions stratégiques. Cette recherche propose d'examiner le jeu des administrateurs à la lumière de la théorie de l'identité qui apporte un éclairage intéressant sur la question des facteurs d'émergence des conflits. En croisant cette approche avec celle des courants disciplinaire et cognitif en gouvernance, nous montrons que la rencontre des identités de rôle des administrateurs est sources de conflits cognitifs dont l'expression en séance dépend en partie du niveau d'engagement des administrateurs. Nous montrons aussi mière de la théorie de la dissonance cognitive Festinger (1957) que les conflits d'intérêts envisagés comme un type particulier de conflit cognitif. Empiriquement, l'étude qualitative porte sur le fonctionnement du conseil de surveillance d'un établissement public de santé faisant l'objet du plus gros projet hospitalier actuellement en France. Les résultats montrent que les rôles des administrateurs et le niveau d'identification à ces rôles sont sources de différents types de conflits cognitifs au sein du conseil. Au regard de ces sources de conflits, nous discutons finalement de la fonction cognitive de ce dispositif de gouvernance. Abstract Studies on board of directors or on supervisory board implicitly considered these internal governance mechanisms as working in unison when strategic decision are ratified and monitored. Our study put forward an exploration of the game between directors in regard to the theory of identity so as to enlighten the key factors of conflict emergence. 2 Introduction « La focalisation sur la création de valeur pour les actionnaires semble avoir contribué à une déformation de la conception de l'entreprise dont la pluralité est ignorée ainsi que sa richesse essentielle, l'homme », Caby et Hirigoyen (2001) Dans leur revue sur les recherches en gouvernance, Hambrick et al. (2008) font le constat suivant : les différents cadres d'analyse utilisés pour étudier la gouvernance des organisations, et notamment le fonctionnement du Conseil d'Administration (CA par la suite), reposent en majorité sur l'hypothèse que cet organe « parle d'une seule voix ». Ainsi, selon la théorie de l'agence, le Conseil doit trouver les moyens d'aligner les intérêts du dirigeant sur les siens, mais peut-on affirmer que les administrateurs partagent les mêmes intérêts? De même, dans la théorie de l'intendance, l'administrateur est présenté comme un homme ressources qui, en collaboration avec le dirigeant, va apporter ses conseils dans l'élaboration de la stratégie ; mais là encore, peut-on considérer que cette « contribution cognitive » est commune à tous les membres du CA? Il semble dès lors plus réaliste de reconnaître que les administrateurs diffèrent par leur engagement, par leurs motivations à représenter diverses parties prenantes, et par leur vision des objectifs prioritaires à atteindre. C'est pourquoi Huse et al. (2011) incitent les chercheurs en gouvernance à ouvrir la « boîte noire » du CA pour analyser son fonctionnement, et à mobiliser des cadres théoriques permettant de renouveler les hypothèses de départ sur la relation d'agence existant entre les administrateurs et le dirigeant. Cet article propose d'apporter des éléments de réponse à deux questions de recherche. Tout d'abord, pour qui agissent les membres d'un CA? Partagent-ils le même point de vue quant aux intérêts qu'ils représentent et qu'ils sont censés défendre? Dans un deuxième temps, quelle est la nature de ces conflits (d'intérêt, cognitifs)? Ces conflits sont-ils exprimés? Wirtz (2006, p.98) montre que la nature des conflits au sein du conseil d'administration peut être abordée en fonction du stade du développement de l'entreprise, et précise que, concernant les conflits cognitifs, la connaissance de l'identité des individus autour du projet collectif s'avère primordiale. Dans cet objectif, nous proposons de rapprocher les travaux sur la gouvernance disciplinaire et cognitive (Charreaux, 2002 ; Guery-Stevenot, 2006 ; Wirtz, 2006) de la théorie de l'identité. En mobilisant ce cadre théorique, selon lequel l'identité des acteurs a une influence sur leur comportement, il nous semble possible, en repérant dans un premier temps les identités en jeu pour chaque administrateur, de mieux comprendre l'origine des conflits 3 d'intérêt et des conflits cognitifs susceptibles d'émerger. Nous souhaitons également comprendre si ces conflits potentiels restent latents, ou s'ils s'expriment réellement au sein du CA. Dans une première partie, nous présentons la théorie de l'identité et montrons en quoi elle peut nous aider à comprendre l'apparition de conflits au sein du conseil ; nous revenons pour cela sur la distinction faite par les chercheurs concernant la nature des conflits (d'intérêt et cognitifs) et les rôles de la gouvernance (disciplinaire et cognitive). Nous nous appuierons sur la théorie de la dissonance de Festinger (1957) pour proposer une approche unifiée des conflits en gouvernance. Nous terminons cette partie avec trois propositions de recherche sur les facteurs d'émergence et de révélation des conflits. Afin de confronter au terrain ces propositions, nous menons actuellement une recherche auprès du conseil de surveillance d'un Etablissement public hospitalier. Nous détaillons dans une deuxième partie la démarche de recherche, et nous présentons les résultats des quatre premiers entretiens que nous avons menés, d'autres étant à venir. Nous terminons par une discussion de ces résultats préliminaires. I. Cadre théorique : Identité, conflits et gouvernance Ouvrir la boite noire d'un conseil d'administration ou mieux encore d'un conseil de surveillance, c'est poser la question des interactions entre ses membres lors de deux phases au moins de la prise de décision : la ratification et la surveillance (Fama et Jensen, 1983). Le déroulement la délibération est un moment clé de la vie d'une organisation, qu'il s'agisse du jeu des acteurs, de leur implication, des conflits potentiels et in fine du rôle du conseil en tant que dispositif central de gouvernance. Dans cette perspective, après un bref rappel des fondements théoriques de la gouvernance et des conflits qu'elle est supposée encadrer, nous présenterons les apports de la théorie de l'identité pour comprendre le comportement des acteurs. Nous proposerons alors un modèle d'émergence des conflits au sein du conseil. 1.1 Les conflits dans les théories de la gouvernance Les conflits sont au coeur des problématiques des organisations dans la mesure où ils peuvent intervenir dans le processus décisionnel, tant au niveau des choix de création de valeur (investissement) que de sa répartition à l'égard des partenaires. Les conflits représentent donc une variable clé de la pérennité des organisations. Dans le champ de la gouvernance, l'objet d'étude étant le comportement décisionnel du dirigeant, les conflits sont au coeur de l'analyse. 4 Depuis les premiers débats généralement associés à Berle et Means (1932), deux voies complémentaires de recherche sur les conflits et leur gouvernance sont à l'oeuvre. Elles sont principalement centrées sur les relations entre le dirigeant et les autres parties prenantes. D'une part, le courant standard contractualiste, notamment la théorie de l'agence, considère les conflits d'intérêt (sur la répartition de la valeur) comme source première d'inefficience. En effet, en reconnaissant l'existence d'intérêts divergents entre acteurs, cette approche introduit la notion de coûts d'agence qu'il convient de minimiser par différents dispositifs (Jensen et Meckling, 1976). Dans cette perspective, la gouvernance est envisagée comme un système de réduction des coûts potentiels engendrés par les relations entre le dirigeant et les actionnaires (courant standard de la gouvernance actionnariale, Schleifer et Vischny, 1997) ou l'ensemble des parties prenantes (courant standard élargi de la gouvernance partenariale, Charreaux et Desbrières, 1998). Dans cette approche classique, la gouvernance est de nature disciplinaire. Les mécanismes qui encadrent la latitude du dirigeant visent à réduire les conflits d'intérêts par incitation et/ou sanction. Le conseil d'administration est considéré comme un mé e dont la discipline à l'encontre du dirigeant s'exprime par l'indépendance des membres du conseil et par son pouvoir de révocation. Sous cet angle disciplinaire, la gouvernance est envisagée comme un frein à la destruction de valeur (Wirtz, 2006). Le CA et a fortiori le CS disciplinent d'une seule voix le comportement décisionnel du dirigeant. D'autre part, le courant cognitiviste, mobilisé plus récemment dans le champ de la gouvernance, regroupe les théories basées sur la connaissance1 considérée comme facteur premier d'efficience des organisations. Il s'agit d'examiner le processus décisionnel sous l'angle de la représentation du monde par les individus. Les schémas cognitifs des acteurs de la décision sont censés jouer un rôle central dans la capacité de l'organisation à créer de la valeur. Le problème organisationnel ne se situe plus au niveau des conflits d'intérêts mais au niveau des conflits cognitifs entre dirigeant et administrateurs en particulier. Ces conflits renvoient à des conceptions différentes de l'environnement qui engendrent potentiellement des désaccords interindividuels sur les enjeux décisionnels et sur leur mise en oeuvre. Pour cerner plus précisément le concept de conflit cognitif, les travaux de Festinger (1957) sur le concept de cognition sont éclairants. Nous allons voir en quoi ils conduisent à regrouper au sein d'une même famille unifiée les conflits d'intérêt et les conflits cognitifs. Théoricien de 1 Voir Charreaux (2002) pour une analyse critique des apports des différents courants cognitivistes pour la 5 référence de la dissonance cognitive, il introduit la cognition comme unité élémentaire de sa théorie (Vaidis ; 2011). Les cognitions sont un « ensemble de connaissances, opinions ou croyances concernant l'environnement, soi-même, ou le comportement d'autrui ». Comme l'affirme le psychosociologue David Vaidis (Op. Cit, p. 13) dans son ouvrage dédié aux travaux de Festinger, il s'agit « d'unités personnelles de compréhension et d'assimilation du monde [] un construit général pour désigner les attitudes, croyances, valeurs ». Ainsi selon lui, « l'être humain disposerait d'une multitude de cognitions pour construire sa réalité ». Plusieurs types de relations entre éléments de cognition d'un même individu sont envisagés par Festinger. Celle qui nous intéresse plus particulièrement pour délimiter le concept de conflit cognitif est la relation dite inconsistante (ou dissonante) entre deux cognitions c'est-àdire incompatibles entre elles. L'état de dissonance qui en découle se manifeste chez l'individu concerné par un état d'inconfort 'il cherche alors à réduire. Cette relation d'incompatibilité des cognitions chez un individu donné peut à notre sens, être transposée dans le cadre des conflits cognitifs interindividuels2 pour mieux en cerner les implications comportementales au niveau des administrateurs. Sur la base de la définition précédente de la cognition, il y a conflit cognitif entre deux individus lorsqu'il y a incompatibilité de leurs connaissances, croyances ou valeurs donc quand il y a désaccord sur ces éléments de cognition. Au même titre que la dissonance propre à un individu engendre un comportement3 visant à réduire cet état d'inconfort, le conflit cognitif entre individus se traduit par des tensions qui provoquent alors des stratégies d'ajustement. Comme le suggère Charreaux (2006, p. 3 Ces stratégies sont qualifiées de modes de réduction de la dissonance (Vaidis Op. Cit, p. 12) qui font l'objet d'un important courant de recherche. 4 Charreaux (2002, in 2006, p. 68) affirme qu'« une grande différence de nature entre les conflits d'intérêts et cognitifs [] est qu'autant on a intérêt à réduire au maximum les conséquences des conflits d'intérêts – sources 6 pas ajustée, ces conflits cognitifs sont considérés comme source potentielle de dysfonctionnement en raison des problèmes persistants de coordination (Hogdson, 1998). Cette incompatibilité persistante peut être envisagée comme une contribution cognitive négative aux arbitrages de création de valeur. Charreaux (2002) explique ainsi le rôle cognitif des actionnaires en modélisant les effets des conflits cognitifs dans le cas particulier de l'arrivée d'un actionnaire de contrôle. Il introduit les notions de coûts managériaux cognitifs, de supplément de valeur lié à l'apport cognitif du nouvel actionnaire et de gain cognitif. Ce modèle visant plus largement à revenir sur les facteurs explicatifs de la structure de propriété est un argument majeur pour « reconsidérer le rôle de la gouvernance en fonction de sa capacité à identifier et à mettre en oeuvre les investissements créateurs de valeur » (Charreaux, Op. Cit, p. 104). Ainsi, dans l'approche cognitive, la gouvernance change de nature. Elle devient habilitante. Autrement dit, les mécanismes qui encadrent la latitude du dirigeant visent à aider ce dernier en gouvernant les conflits cognitifs par un processus d'ajustement qui vise à réduire leurs conséquences en termes de dysfonctionnement et à favoriser leur contribution cognitive à l'élaboration de la stratégie (Charreaux, Op. Cit). La gouvernance habilitante alors envisagée en dynamique comme un levier de création de valeur. Le CA ou le CS constituent sous cet angle des dispositifs cognitifs potentiellement contributeurs à la création de valeur. Cette approche cognitive des conflits et leur démarcation conceptuelle nous conduit à revenir sur la différence entre conflits d'intérêts et conflits cognitifs qui se pose avec encore plus d'acuité entre le dirigeant et les administrateurs certes, mais aussi entre administrateurs. La littérature distingue en effet les conflits d'intérêts qui portent sur un désaccord en matière de choix de répartition de la valeur et les conflits cognitifs, associés quant à eux à une incompatibilité sur les choix de création de valeur. 7 croyances et des valeurs relatives à la redistribution des richesses entre parties prenantes. Leur incompatibilité si elle persiste (donc si les cognitions des acteurs demeurent divergentes) caractérise des conflits d'intérêt. Autrement dit, les conflits d'intérêt sont des conflits cognitifs non ajustés portant sur des aspects de redistribution des richesses. En tant que tels, ces conflits d'intérêt engendreraient bien des coûts cognitifs nets puisque l'absence, l'impossibilité ou l'inadéquation d'ajustement engendre des problèmes de coordination5. Par conséquent la réduction des conflits d'intérêts dans l'approche standard peut être relue à la lumière des travaux de Festinger comme un ajustement des cognitions relatives aux conséquences redistributives d'un choix de création de valeur. Il en résulte que la gouvernance a pour objet la dissonance interindividuelle endogène à tout dispositif : il s'ensuit que la gouvernance peut être disciplinaire ou habilitante, selon le type de conflits cognitifs en jeu qui nécessite un processus d'ajustement. En combinant ces approches, et sur la base de la définition de la gouvernance proposée par Charreaux (1997), nous proposons une relecture de la gouvernance permettant d'en unifier les différentes fonctions. La gouvernance est un ensemble des mécanismes qui encadrent en dynamique le comportement décisionnel du dirigeant, par un processus d'ajustement des conflits cognitifs de création et de répartition de la valeur. Le processus de décision, notamment (mais pas seulement) dans la phase de ratification et de surveillance au sein du Conseil suppose donc de repérer ces différents types de conflits cognitifs, et comment ils émergent au sein d'un Conseil. 1.2 L'apport de la théorie de l'identité : aux origines de l' des conflits La théorie de l'identité propose d'analyser le comportement des individus en repérant les rôles que ceux-ci détiennent au sein de leurs réseaux de relations. Piliavin et al. (2002) prennent l'exemple suivant : une même personne peut être décrite à travers sa profession, sa situation familiale, et ses activités de bénévolat. Ces trois situations diffèrent par leur contexte, leur objet et le type de relations qui les sous-tendent, et donc par le rôle détenu par la personne 5 De type comportement déviant sur l'appropriation de la valeur, tel qu'analysé dans le courant standard contractualiste. Sous cet angle, il s'agit non seulement du comportement d'expropriation par le dirigeant tout autant que de l'incitation abusive mise en place par l'actionnaire, d'adossement de la rémunération de l'agent à des indicateurs boursiers dont l'effet d'addiction a été démontré par Jensen. 8 dans chaque cas. Stryker (1980) explique ainsi que chaque personne possède une identité pour chacun de ces rôles, d'où le terme d'identité de rôle. Les travaux sur l'identité de rôle apportent des éléments de compréhension sur l'origine des conflits ainsi que sur leur expression effective. • A l'origine des conflits : les constituants cognitifs de l'identité de rôle Callero (1994) donne aux rôles la définition suivante : « ce sont les comportements que l'on attend en fonction des positions identifiées dans la structure sociale ». Ces attentes sont censées guider les actions des individus et faciliter les échanges entre eux. Certains rôles peuvent donner lieu à une formalisation et être « officialisés », par exemple une description de poste ; d'autres peuvent être tacites, informels, comme dans le cas d'une famille ou d'une relation d'amitié. L'analyse du fonctionnement du CA ou du CS peut être enrichie en s'interrogeant dans un premier temps sur l'identité de rôle des administrateurs. En effet, plutôt que d'aborder le Conseil comme un ensemble homogène oeuvrant dans une même direction, nous proposons d'analyser comment chaque administrateur perçoit son rôle au sein de ce dispositif, afin de mettre à jour les différentes identités de rôles en présence. Golden-Biddle et Rao (1997) ont montré que les administrateurs mettent en scène le rôle du CA à partir de leurs attentes, qui sont elles-mêmes façonnées par la vision qu'ils détiennent de l'organisation. Cette vision et ces attentes caractérisent le schéma mental et ses éléments constitutifs que sont les cognitions abordées dans la section précédente. Cette mise en scène6 conditionne à son tour le comportement de l'administrateur au sein du groupe : par exemple, le fait de percevoir l'organisation comme une qui privilégie des relations durables induit auprès des administrateurs la volonté d'atténuer, voire d'éviter, les conflits qui pourraient menacer cette situation. En outre, les chercheurs montrent qu'en procédant ainsi, les administrateurs satisfont leurs besoins personnels d'estime de soi. Notre étude se situe dans cette perspective de recherche7 et insiste sur l'identité de rôle des administrateurs comme facteur de compréhension de leur comportement. 6 Nous nous référons à la notion d'enactment de Weick, selon laquelle l'acteur construit ses représentations dans l'action. 7 Nous défendons une démarche interactionniste et contextualiste qui conduit à considérer que les effets de la gouvernance ne sont pas déterminés a priori, mais sont plutôt « énactés » lors du jeu des administrateurs. 9 Pour aborder plus précisément cette identité de rôle, nous nous référons aux travaux des chercheurs qui distinguent trois dimensions autour du rôle (Dong et al., 2010 ; Koch et Schultze, 2011) : - La position sociale qui renvoie à un statut reconnaissable au sein d'une organisation. Dans le cadre de notre recherche, il s'agit du statut d'administrateur ; - Le comportement et les pratiques liées à l'accomplissement et au contenu du rôle ; - Les attentes, c'est-à-dire les normes, les croyances et les attitudes, ainsi que les objectifs associés au rôle. La position sociale (statut) et le comportement effectif de l'acteur (expérience) peuvent être associés à des facteurs d'apprentissage et d'évolution du schéma mental des acteurs. Comme le suggère Wirtz (2006, p. 277) sur la base de la théorie du changement institutionnel proposée par North (2005), « pour un individu donné, son schéma mental évolue en fonction d'un processus d'apprentissage, qui fait intervenir ses expériences personnelles [] », mais aussi dans une large mesure des mécanismes de transmission culturels. » En ce sens, les deux premières dimensions de l'identité de rôle proposées par Dong et alii. peuvent être regroupées en une dimension, celle des pratiques contextualisées de l'acteur qui vont l'accompagner dans son rôle. Ainsi le statut de l'administrateur et son expérience contribuent à façonner le contenu du rôle En outre, au sein de la dimension « attentes », nous proposons de distinguer deux aspects : - les intérêts défendus (les objectifs) qui peuvent être source de désaccords sur l'allocation des richesses entre partenaires représentés. - et les caractéristiques du rôle (normes, croyances et attitudes associées au rôle) qui renvoient à la représentation du rôle de l'administrateur en tant que garant de l'intérêt social par sa participation à la ratification et à la surveillance des décisions stratégiques. Ainsi, nous proposons de réaliser une cartographie du Conseil en faisant apparaître, pour chaque administrateur, les trois éléments qui fondent son identité de rôle, tel que le propose le schéma suivant : 10 Schéma 1 : les trois éléments de l'identité de rôle Les intérêts défendus (je suis là pour défendre les intérêts de) Les caractéristiques associées (pour remplir ce rôle, je pense qu'il faut être) Le contenu (mon rôle consiste à) En croisant les travaux sur l'identité de rôle et sur les conflits cognitifs, nous constatons que les attentes (intérêts défendus, caractéristiques du rôle) et le contenu du rôle sont les constituants cognitifs de l'identité de rôle. En conséquence, la rencontre des identités de rôle des administrateurs est un facteur d'origine ou d'émergence des conflits cognitifs. L'analyse de la cartographie nous donne une première lecture des conflits susceptibles d'émerger au sein du Conseil. D'après la section précédente, les intérêts défendus peuvent être associés aux cognitions de type allocatif c'est-à-dire concernant les conséquences des décisions sur la répartition de la valeur entre les parties prenantes. Cette première dimension de l'identité est un facteur d'émergence de conflits concernant la répartition de la valeur entre parties prenantes. En outre, le contenu et les caractéristiques du rôle renvoient à des cognitions axiologiques sur la finalité de l'organisation et ses valeurs dont les administrateurs sont supposés être les garants. Il s'ensuit une diversité potentielle dans les visions relatives à la création de valeur, qui peut mener au conflit de type productif. Les conflits cognitifs axiologiques introduits par Charreaux (2002) relatifs par exemple aux enjeux éthiques ou d'équité rentrent selon nous dans la catégorie de conflit de productif. En somme, l'étude des identités des administrateurs et leur rapprochement apparaît comme une première réponse à la question « Au sein du Conseil, quels sont les conflits potentiels et de quelle nature sont-ils? ». 11 Schéma 2 : les trois éléments de l'identité de rôle et la nature des conflits potentiels associés Intérêts défendus de type allocatif Conflits de type productif Caractéristiques associées Contenu Toutefois, cette première lecture des conflits nous semble devoir être prolongée en soulevant la question suivante : les conflits mis à jour à l'aide des identités de rôles sont-ils exprimés? Un conflit peut-il rester latent, c'est-à-dire être ressenti mais non ouvertement exposé? Comment un conflit potentiel devient-il un conflit réel, c'est-à-dire exprimé? • Identification et conflits réels Pour qu'un conflit passe d'un état de latence à un état de réalité, cela suppose que les administrateurs expriment leurs points de vue et rentrent en désaccord. Il se produit donc ce que Golden-Biddle et Rao (1997) désignent sous le terme de processus d'action, par lequel les administrateurs cherchent à remplir leur rôle. Or, d'après Stryker et Burke (cité dans Piliavin et al., 2002), ce passage à l'acte suppose une forte identification au rôle : plus le répondant se définit à travers un rôle donné, plus son identification à ce rôle est forte. Dans ce cas, le rôle représente plus qu'un ensemble de « règles normatives » ; il sert également de schéma cognitif structurant l'interprétation des évènements et qui guide les choix de comportements. Ainsi, nous pouvons faire l'hypothèse que les administrateurs ayant une forte identification à leur rôle sont plus motivés pour exprimer leurs points de vue ; dès lors, si les points de vue divergent, les conflits ne sont plus potentiels, ils sont exprimés et deviennent réels. Inversement, une faible identification au rôle a pour conséquence une faible in citation à dépasser le stade du constat de divergences dans les intérêts et/ou dans les pratiques : l'administrateur ne partage pas les mêmes points de vue mais ne va pas l'exprimer, d'où des conflits potentiels mais non réels. 1.3 Vers la compréhension des conflits : Modèle et propositions Alors que les conflits apparaissent comme une donnée dans les théories de la gouvernance, nous souhaitons approfondir leur description et comprendre d'où ils viennent. Le recours à la théorie de l'identité et son rapprochement des travaux sur les conflits en gouvernance contribuent selon nous à cet objectif. Le schéma ci-dessous présente notre modèle de recherche : Schéma 3 : le modèle de la recherche L'identité de rôle comme facteur de compréhension des conflits en gouvernance Identités de rôle Intérêts P1 contenu caractéristiques P2 Conflits potentiels De type allocatif De type productif P3 Identification au rôle Conflits réels De type allocatif De type productif Dans un premier temps, nous souhaitons mesurer les identités de rôles des administrateurs, à travers trois dimensions : les intérêts défendus, le contenu de leur rôle et les caractéristiques qu'ils lui associent. En rapprochant les identités des administrateurs sur chaque dimension, nous aboutissons à une première grille de lecture des conflits potentiels, en différenciant les conflits cognitifs de type 13 allocatif (divergences d'intérêts sur la répartition de la valeur entre parties prenantes) et les conflits cognitifs de type productif (divergence sur les valeurs et choix de création de richesse). Nos propositions de recherche sont les suivantes : P1 : au sein du Conseil, la perception par l'acteur d'une incompatibilité des intérêts présents est source de conflits potentiels cognitifs de type allocatif, P2 : au sein du Conseil, la perception par l'acteur d'une incompatibilité au niveau des contenus et des caractéristiques de rôles est source de conflits potentiels cognitifs de type productif. Dans un deuxième temps, ayant repéré les conflits potentiels élevés, souhaitons comprendre si ces conflits sont exprimés, pour devenir réels. L'identification au rôle, définie comme le degré d'attachement au (ou d'engagement dans le) rôle, nous semble une variable pertinente, d'où la proposition suivante : P3 : Plus l'acteur est identifié à son rôle, plus il exprime les conflits potentiels cognitifs qu'il perçoit. II. Etude qualitative – Résultat préliminaires Afin de tester notre modèle des facteurs d'émergence et d'expression des conflits en gouvernance, nous présentons le choix méthodologique retenu (2.1) puis les premiers résultats de l'investigation empirique (2.2). 2.1 Démarche méthodologique et choix du cas Cette étude vise deux objectifs. D'une part, il s'agit d'examiner les facteurs d'émergence des conflits entre administrateurs. Nous cherchons notamment à identifier les différents types de conflits potentiels tels que la littérature permet de les identifier (P1 et P2). D'autre part, il s'agit de comprendre comment ces conflits s'expriment effectivement et si l'identité de rôle est un facteur explicatif plausible de l'expression de ces conflits (P3). Compte tenu de la nature qualitative des relations envisagées, nous avons opté pour une démarche qualitative hypothético-déductive de type infirmationniste (Charreaux, 2006, p 91). L'objectif est de tester la plausibilité théorique des relations envisagées dans notre modèle et 14 par réplication ultérieure à d'autres cas, de tester la généralisabilité théorique des facteurs d'émergence et de révélations des conflits entre administrateurs. Dans cette perspective, le choix du cas doit être conduit afin de disposer d'un contexte organisationnel dans lequel les conflits existent et sont révélés notamment au sein du conseil d'administration ou de surveillance. Il convient donc de repérer un cas se trouvant dans une situation de déséquilibre ou de changement organisationnel susceptible de solliciter fortement les schémas mentaux des administrateurs. Autrement dit le cas doit concerner des acteurs exposés à des enjeux organisationnels importants les conduisant à ratifier et à surveiller les choix d'investissement et leurs conséquences en termes de répartition de la valeur entre les parties prenantes. Le cas retenu est le conseil de surveillance d'un centre hospitalier régional faisant actuellement l'objet du plus important investissement hospitalier en France (environ 700 millions d'euros), jugé par le directeur financier comme « un coût monstrueux ». Cet établissement est tenu par l'Agence régionale de santé, de mettre en place un plan de retour à l'équilibre en vue de garantir la soutenabilité du projet du nouvel hôpital qui devrait être opérationnel en 2015. De plus, le secteur er est sujet à une réforme importante du fonctionnement et de la gouvernance des hôpitaux, depuis la loi Hôpital Patient Santé Territoire (HPST) initiée en 2007 et ayant pour objectif de renforcer l'autonomie des établissements de santé sous le contrôle accru des Agences régionales de santé (ARS). Ces dernières, par délégation ministérielle déterminent le niveau d'activité sur le territoire concerné et allouent les dotations financières pour les missions d'intérêt général. Celles-ci correspondent dans le cas étudié à environ 15% des ressources de l'établissement. Les 85% restant sont produits par l'activité. Depuis 2007, la gouvernance du cas étudié a évolué dans le cadre de la loi. L'annexe 1 présente les questions du guide d'entretien en lien avec les thèmes ci-dessus. Deuxièmement, une fois retranscrits, (base de données textuelles) nous avons codifié ces entretiens à partir des variables et des codes associés retenus dans notre guide d'entretien. Actuellement, nous avons pu retranscrire 4 entretiens décrits dans le tableau suivant. Tableau 1 : Description des répondants (3 Administrateurs, 1 membre du Directoire) E1 E2 collège 3 personnalité qualifiée Représentant usagers 30 min tel E3 collège 2 Représentant du personnel Représentant. personnel médical 2H15 E4 collège 3 personnalité qualifiée Représentant usagers 1H30 Collège représenté collège 4 avec voix consultative Directoire Durée 2h âge/expérience 30 ans expérience dans le secteur sanitaire Nc dernière année avant retraite 40 ans dans l'établissement Genre M F M F nombre d'années au CS 1 an 1 an 25 ans 7 ans Personnel soignant - mandat syndical Bénévolat Présidence de diverses Associations de patients, au niveau local et national, membre de la Cour des Comptes Direction d'une caisse d'assurance maladie Profession/activités Total du corpus textuel (nb de mots) Contribution au corpus textuel Bénévolat Présidence d'associations de patients 74 ans 2 027 926 8 468 10 651 9% 4% 38% 48% 16 Afin de tester les relations théoriques proposées nous présentons dans le tableau suivant les relations codifiées attendues et les mesures choisies. Tableau 2 : Propositions théoriques et codification Propositions théoriques P1 : au sein du Conseil, la perception par l'acteur d'une incompatibilité des intérêts présents est source de conflits potentiels cognitifs de type allocatif, Codes (cf. Annexe1) R (rôle) ; IRi (identité de rôle : dimension intérêts défendus) ; CIRip (conflit d'intérêt potentiel lié aux intérêts défendus attach au rôle) Relations IRi multiples => CIRip potentiels multiples P2 : au sein du Conseil, la perception par l'acteur d'une incompatibilité au niveau des contenus et des caractéristiques de rôles est source de conflits potentiels cognitifs de type productif. R (rôle) ; IRcont et IRcar (identité de rôle : dimensions contenu et caractéristiques) ; CIRcont_p et CIRcar_p (Conflit potentiel lié aux contenu et caractéristiques du rôle) IRcont et IRcar multiples => CIRcont_p et CIRcar_p potentiels multiples P3 : Plus l'acteur est identifié à son rôle, plus il exprime les conflits potentiels cognitifs qu'il perçoit. 2.2. Résultats préliminaires Dans un premier temps, nous présentons les résultats concernant la plausibilité de P1 et P2 selon lesquelles l'identité de rôle est à l'origine de conflits cognitifs potentiels (2.2.1). Dans un deuxième temps, nous présentons les résultats concernant la plausibilité de P3 selon laquelle le degré d'identification au rôle explique l'expression des conflits cognitifs (2.2.2). 2.2.1. Identité de rôle et conflits potentiels Le tableau ci-dessous présente de façon synthétique pour chaque répondant les trois dimensions de l'identité de rôle : 17 Tableau 3 : la mesure de l'identité de rôle Intérêts défendus par le répondant Equilibre financier, efficience, maîtrise des risques aide technique expertise financière Répondant 2 Usagers Le bâti et les soins Représenter les usagers Répondant 3 Personnel soignant, représentant syndical Répondant 4 Usagers Les patients Mandat syndical : représenter le personnel hospitalier et défendre la qualité des soins Apporter le regard des usagers en lien avec les dispositifs institutionnels. Avoir une bonne connaissance du fonctionnement de l'hôpital , et avoir les c ompétences ( formation) pour représenter les usagers en général. In siste sur la préparation des conseils (lecture des documents, consultations d'autres membres du CS, participation à d'autres commissions ) Répondant 1 Directoire Les salariés La qualité des soins l'environnement du patient et Contenu Caractéristiques et Etre créatif et pédagogue Pas de caractéristiques particulières , même si des intér êts catégoriels sont représentés Savoir prendre la parole avec diplomatie Se distancier des gers pour mieux les représenter. Ne pas avoir peur de s'exprimer. Concernant les intérêts défendus par les répondants, on constate une nette différence entre le répondant 1, pour qui l'intérêt à défendre est avant tout l'équilibre financier, et les trois autres répondants qui mettent en avant le patient (abordé également sous l'angle de la qualité des soins et de l'environnement du patient). Le répondant 4 parle également de la défense des salariés dont les problèmes et les difficultés peuvent menacer le bon fonctionnement de l'hôpital et la qualité des soins à l'égard du patient. En interrogeant dans un second temps chaque répondant, on voit apparaître deux modalités distinctes des intérêts défendus au sein du CS. Ces conflits sont ressentis par le répondant 1, membre du directoire : selon lui, le Conseil n'est pas assez vigilant sur la prise de risque financier, et est préoccupé par des problématiques locales telles que l'emploi. Curieusement, ce répondant ne parle pas de l'intérêt des patients, qui sont pourtant mis en avant par les trois autres répondants. En revanche, les répondants 2, 3 et 4 (administrateurs) ont le sentiment que l'intérêt des patients est défendu, même s'ils mentionnent la préoccupation de la direction pour l'équilibre budgétaire. Le répondant 3 résume cette situation avec la phrase suivante : 18 «Je ne crois pas qu'ils veulent casser l'hôpital public [] mais c'est qu'ils ont une approche comptable des choses et qu'ils défendent l'hôpital d'une autre façon que nous ». Ainsi, concernant notre proposition P1, nous constatons que ce n'est pas tant la diversité des intérêts recensée auprès des répondants qui est source de conflits potentiels, mais plutôt la perception qu'a chaque répondant de cette diversité. Dans notre étude de cas, nous observons que seul le répondant 1 (membre du Directoire) ressent divergence quant aux intérêts défendus, qui sont source de conflits potentiels de type allocatif. En revanche, les autres administrateurs ne perçoivent pas de conflits potentiels, car ils estiment que l'intérêt qu'ils défendent est pris en compte. On retrouve ici une illustration de la relation d'agence qui toutefois, malgré la divergence d'intérêts, montre que les mandants, contrairement à l'agent, ne perçoivent pas de conflits. Notre proposition P1 est donc validée. On note d'ailleurs dans la citation précédente, l'emploi des pronoms « ils » et « nous », qui démontrent que le répondant 3 ne conçoit pas le Conseil comme une entité homogène. Cependant il semble que la différence ne porte pas tant sur les intérêts défendus, que sur la façon d'y arriver. Ceci nous amène à commenter les deux autres dimensions de l'identité de rôle des membres du Conseil : le contenu et les caractéristiques du rôle. Concernant le contenu du rôle, nous distinguons deux niveaux d'analyse : un premier niveau qui consiste à identifier comment chaque administrateur perçoit le contenu de son rôle ; et un deuxième niveau qui consiste à identifier si cette perception est partagée, l'objectif étant de repérer les sources de conflits potentiels sur le contenu. La lecture du tableau 2 permet de différencier les répondants sur l'expertise mise en avant pour accomplir leur rôle. Les répondants 1 et 4 mentionnent la nécessité d'avoir une expertise : financière pour le premier, qui parle même de la nécessité de faire de la pédagogie auprès des autres membres du Conseil, qui, selon lui, ne maîtrisent pas les problématiques financières ; et institutionnelle pour le second, relative à la connaissance du secteur sanitaire et social (environnement juridique, organisation administrative, représentations associatives). L'expertise est en revanche absente des réponses des deux autres répondants : pour le répondant 2, le contenu du rôle consiste à représenter les usagers (pas de détails concrets). Le répondant complète sa réponse en expliquant qu'il est présent au Conseil depuis peu de temps. Le répondant 3 fait référence à un mandat qui le distingue d'autres membres qui ont été nommés. 19 Ainsi, les cognitions différentes mises en évidence concernant le contenu du rôle laissent présager des conflits potentiels de type productif. Les quatre répondants mentionnent effectivement des conflits potentiels : un répondant distingue les politiques qui ont leurs préoccupations électorales, et les personnalités qualifiées qui exercent une fonction représentative. Un dant résume cette perception en disant que « chacun est sur son créneau ». Un autre révèle cette polarisation des contenus de rôles de la manière suivante : « Il faut à la fois construire un outil qui soit utile pour la population mais qui ne soit pas trop cher ». Il apparaît que la diversité ressentie sur le contenu de rôle est plus marquée que celle relative aux intérêts défendus. Ce ressenti révèle des conflits potentiels sur des sources de création de valeur. Enfin, sur le plan des caractéristiques associées au rôle (valeurs, attitudes), nous distinguons là encore deux niveaux d'analyse : un premier niveau qui consiste à identifier quelles sont les caractéristiques nécessaires pour être administrateur ; et un deuxième niveau qui consiste à identifier si chaque administrateur perçoit l'existence de profils différents au sein du Conseil, l'objectif étant de repérer les sources de conflits potentiels sur les caractéristiques du rôle. On constate une certaine hétérogénéité dans les réponses obtenues. Tous les répondants mettent en avant des caractéristiques particulières différentes, hormis le deuxième. Le répondant 1 (Directoire) mentionne la créativité nécessaire « pour faire évoluer l'institution ». Le répondant 4 (Usagers) mentionne la capacité à prendre la parole dans un espace protocolaire qui peut être intimidant. Cette prise de parole est également la caractéristique mise en avant par le répondant 3 (Personnel soignant, Représentant syndical). Il souligne la difficulté pour certains d'exprimer leur point de vue, soit par manque d'assurance, soit par les jeux de pouvoir au sein du Conseil qui font que certains ne vont pas oser aller à l'encontre du point de vue de certains membres. Il précise que le Directeur général et ses collaborateurs parlent d'une même voix : « Chacun est tenu. Les seuls qui ont véritablement une liberté d'expression Il y a le Président du CS qui a une vraie liberté de parole, le Président de la CME, et puis parfois un représentant du personnel. » Ces cognitions différentes laissent encore augurer de conflits potentiels de type productif. Ces conflits sont repérables auprès des répondants. Les caractéristiques attribuées varient selon les répondants qui pour certains peuvent se retrouver sur certaines caractéristiques : le répondant 1 distingue deux es en fonction des caractéristiques qui lui semblent nécessaires : le 20 groupe des « créatifs » » et celui des « notables », ceux qui « suivent », qui sont plutôt en quête de « reconnaissance sociale, de prestige, et d'un intérêt intellectuel ». Pour leur part, les répondants 3 et 4 discernent deux groupes en fonction de leur prise de parole (régulière ou inexistante). Enfin, le répondant 2 considère quant à lui que le « Conseil a sa raison d'être », signifiant qu' « il n'y a pas de profils distincts ». Pour conclure sur la plausibilité de nos deux propositions P1 et P2, nous avons montré que les diverses identités de rôle sont à l'origine de conflits potentiels au sein du Conseil, à condition que les membres perçoivent une divergence entre l'identité des autres et la leur. Les intérêts défendus, première dimension de l'identité, génèrent potentiellement des conflits de type allocatif. Le contenu et les caractéristiques de rôles, deux autres dimensions de l'identité, génèrent potentiellement des conflits de type productif. Ces conflits portant eux-mêmes sur les décisions de création et de répartition de la valeur, nous avons donc montré que l'identité de rôle est un facteur de compréhension du modèle cognitif des administrateurs et de leurs interactions lors des débats sur les sources de création et de répartition de la valeur. 21 Tableau de synthèse 5 : Identité de rôle des membres du Conseil et conflits potentiels sur la gestion de la valeur (allocation/création) Ré pondant Intérêts défendus Contenu du rôle IRcont « ce que je fais » 1 Equilibre et risque financiers, Efficience Expertise financière Caractéristiques du rôle (IRcar) « mes attitudes » Réduire les charges Innovation Changement Dégager des recettes supplémentaires Qualité des soins au Patient en lien avec le Personnel et l'environnement fonctionnel Surveiller la valeur à l'égard des patients « tout doit être conçu pour les soins. Il s'agit de voir comment les patients retrouvent leur place dans les décisions » Prise de parole ; diplomatie Ceux qui prennent la parole (les notables intimidants) et les autres (intimidés) Coûts pour le patient (tarification) ; gestion des carrières des personnels hospitaliers et conditions d'exercice des soins Garantir la qualité pour le patient (dignité) + équité d'accès au soin Droits des usagers et de leur famille Accès au soin de qualité pour tous Mais sous « budget contraint » Créativité donne mandat au représentant syndical des soignants 2 Le Bâti et les soins Fonction de représentation des usagers 3 Les patients Fonction de représentation patients et personnel 4 Salariés, Qualité des soins et Environne ment du patient Expertise institutionnelle, connaitre le fonctionnement des établissements et du secteur donc formation indispensable Liens perçus avec la gestion de la valeur En termes En termes de d'allocation de la sources de création valeur de valeur « je ne pense pas qu'il y ait vraiment des groupes distincts. le Conseil a luimême sa raison d'être » Le tableau ci-après résume le résultat du test de plausibilité de nos propositions de recherche : 22 Tableau 6 : le résultat des propositions de recherche P1 et 2 Proposition P1 : au sein du Conseil, la perception par l'acteur d'une incompatibilité des intérêts présents est source de conflits cognit ifs de type alloc atif P2 : au sein du Conseil, la perception par l'acteur d'une incompatibilité au niveau des contenus et des caractéristiques de rôles est source de conflits cognitifs de type productif Résultat • Confirmée • Contenus de rôles : confirmée • Caractéristiques : confirmée En résumé, il semble que les conflits potentiels proviennent essentiellement des différences entre membres du CS concernant leur façon de concevoir leur identité dans le contenu et dans les caractéristiques (expériences des membres, attitudes et valeurs). Tableau 7 : l'identification au rôle Répondant Identification 1 Le répondant a été contacté par l'actuel DG, suite à une situation problématique d'un point de vue financier. Son rôle d'expert financier est donc essentiel compte tenu du contexte. « J'ai un travail intéressant et un devoir de réserve » Est là sur demande : « C'est Mme X qui m'a proposée de faire partie du CS, c'est elle qu'il faut interroger, elle est là depuis bien plus longtemps que moi ». Se présente comme spectatrice plutôt que partie prenante à la discussion, parle « d'humilité » dans sa position. Identité ancrée dans une histoire familiale « J'ai un attachement plus que professionnel à l'hôpital, je pense que c'est une vie qui a été consacrée à l'hôpital depuis ma naissance quasiment » « C'est d'avoir été choisi par les collègues à travers les élections pour les représenter,j'ai cette fierté là où j'assume cette responsabilitéc'est un honneur d'une certaine façon c'est valorisant ». Parcours professionnel lui donnant une véritable connaissance du système sanitaire et social ; Participe à de nombreuses commissions au niveau national ; Volonté de porter la parole des usagers en interne et à l'extérieur ; « Je suis une grande affective », « Il m'est arrivé certaines fois de dire que c'est dramatique pour l'établissement quand il y a des problèmes, des situations d'enfants ». Forte 2 3 4 Faible Forte Forte A la lecture de ces différents tableaux, il apparaît, d'après notre proposition numéro 3, que les répondants 1, 3 et 4 vont exprimer les conflits qu'ils perçoivent en relation avec les autres membres du CS. Plus précisément, le répondant 1 perçoit un écart important sur les intérêts devant être défendus en Conseil : il va exprimer des conflits cognitifs de type allocatif. Les autres répondants ne vont pas exprimer leurs conflits, non pas en raison d'une faible identification à leur rôle (hormis pour le répondant 2), mais parce qu'ils ne perçoivent pas à la base de conflits par rapport aux autres membres. Ensuite, les répondants 1, 3 et 4 perçoivent un écart important sur le contenu du rôle de l'administrateur : ils vont donc exprimer leurs conflits cognitifs de type productif en raison de leur forte identification D'après notre modèle, le répondant 2, bien que percevant également un écart important sur le contenu du rôle de l'administrateur, ne va pas exprimer ce conflit en raison de sa faible identification. Enfin, les répondants 1, 3 et 4 perçoivent un écart important sur les caractéristiques du rôle de l'administrateur : ils vont donc exprimer ces conflits car ils s'identifient fortement à leur rôle. Le tableau suivant reprend pour chaque répondant leur situation sur le plan de l'expression des conflits en fonction de nos propositions : 24 Tableau 8 : Prédictions pour chaque répondant d'après nos propositions théoriques Répondant Va-t-il exprimer des conflits de type allocatif? Oui, car forte identification et écart perçu élevé CIRi_r = 1 Va-t-il exprimer des conflits de type productif? Oui, car forte identification et écarts perçus importants sur le contenu et les caractéristiques CIRcont_r = 1 CIRcar_r = 1 2 Non, car faible identification CIRI CIRi_r = 0 Non, car faible identification (même si écart perçu élevé) CIRcont_r = 0 CIRcar_r = 0 3 Non, car forte identification mais écart perçu faible CIRi_r = 0 Oui, car forte identification et écarts perçus importants sur le contenu et les caractéristiques CIRcont_r = 1 CIRcar_r = 1 4 Non, car forte identification mais écart perçu faible CIRi_r =0 Oui car forte identification et écarts perçus importants sur le contenu et les caractéristiques CIRcont_r =1 CIRcar_r =1 1 Note : un score de 0 signifie qu'il n'y a pas de conflit exprimé, un score de 1 signifie que le conflit est exprimé. Le modèle appliqué au cas nous permet donc pour chaque niveau de conflits cognitifs, d'identifier différents groupes d'administrateurs : Ê Au niveau des conflits de type allocatif : 1 répondant sur 4, fortement identifié, devrait être exprimé un désaccord sur les aspects d'allocation/répartition des richesses. Ê Au niveau des conflits de type productif : 3 répondants sur 4, fortement identifiés devraient exprimer leur désaccord sur les aspects productifs des décisions présentées en séance. Nous constatons qu'en raison du degré d'identification des administrateurs, le conseil de surveillance devrait être un lieu de débat animé au niveau de la création de valeur et de sa répartition. Afin de tester la plausibilité de P3 selon laquelle plus l'identification au rôle est élevée, plus les conflits potentiels sont exprimés, nous avons repéré les éléments suivants (Annexe 2) : - les éléments textuels relatifs aux décisions proposées par le directoire - qui ont fait l'objet de réels débats et qui ont été vécues comme des désaccords par les répondants. - Les décisions mentionnées par les administrateurs ont été codées selon que les désaccords (cognitions incompatibles) qu'elles ont engendrés sont exprimés en termes de répartition 25 (CIRi_r) ou de création de valeur (CIRcont_r et CIRcar_r). Pour ce dernier type de désaccord, toute référence par l'administrateur à des valeurs liées au soin de santé pour arguer le désaccord est codifiée. Ces valeurs sont considérées comme étant liées au contenu ou aux caractéristiques du rôle tel qu'il est perçu par l'administrateur. Nous avons ensuite mis en relation le degré d'identification de chacun avec le type de conflits exprimés. Le tableau ci-dessous présente la synthèse des désaccords décrits par chaque répondant selon qu'ils révèlent une incompatibilité des cognitions en termes d'intérêts défendus (conflit cognitif de type allocatif) ou en termes de valeurs liées au coeur de métier (soin de santé) et donc à l'arbitrage en termes de création de valeur (conflit cognitif de type productif). Tableau 9 : Incompatibilité cognitive avérée sur les décisions de création et de répartition de la valeur, en fonction du degré d'identification des administrateurs Répondant Degré d'identifica -tion Va-t-il exprimer des conflits de type allocatif? Résultat 2 FAIBLE CIRi_r = 0 Conclusion (d'après tab 8) Acceptée 1 FORT CIRi_r =1 3 FORT 4 FORT Va-t-il exprimer des conflits de type productif? Résultat CIRcont_r =0 CIRcar_r = 0 Conclusion (d'après tab 8) Acceptée Acceptée Acceptée CIRcont_r = 0 CIRcar_r = 0 Rejetée Rejetée CIRi_r =1 Rejetée CIRcont_r =1 CIRcar_r =1 CIRi-r = 0 Acceptée Il apparaît au regard de ces résultats que l'identification au rôle est un paramètre important dans l'expression des conflits. Plus précisément, nous constatons que lorsque l'identification est faible, ce qui est le cas du répondant 2, aucun conflit n'est exprimé. En revanche, une forte identification au rôle, bien que nécessaire pour passer du conflit latent au conflit réel, n'est pas suffisante. En effet, ces résultats montrent que globalement ceux qui expriment leurs désaccords sont les membres les plus identifiés à leur rôle. En contrepoint, le répondant (2) le plus faiblement identifié à son rôle, affirme ne pas avoir vécu de conflits et met l'accent sur le droit à la parole et les remarques qui peuvent être faites par d'autres répondants (et sur lesquels il s'appuie), 26 notamment un des plus identifiés. De plus, les deux types de conflits sont exprimés. Les désaccords vécus proviennent pour certains répondants du contenu des rôles (entre les visions de l'expert financier ou institutionnel et du représentant des usagers et/ou des patients) et dans une moindre mesure des caractéristiques de ces rôles (prise de parole pour défendre l'intérêt du patient en jeu face à la créativité managériale). Les conflits de type allocatif proviennent effectivement de désaccords relatifs aux impacts du retour à l'équilibre budgétaire sur la valeur pour les patients et les personnels (hausse des tarifications de soin, d'hébergement). Toutefois, trois résultats négatifs concernant les répondants 1, 3 et 4 fortement identifiés sont à souligner. Premièrement, concernant le répondant 3, nous constatons que malgré l'absence de conflits potentiels sur les aspects allocatifs des décisions du directoire, il affirme avoir exprimé en séance son désaccord sur des implications non acceptables de tarification d'activité (Annexe 2). L'absence de conflits potentiels (faible écart sur les intérêts défendus) n'exclut donc pas la possibilité d'apparition et d'expression simultanée de conflit en séance. La forte identification de ce répondant peut expliquer cette configuration particulière dans laquelle la convergence des intérêts a priori ne garantit pas un accord systématique. Deuxièmement, concernant le répondant 4, nous constatons une situation symétriquement opposée à celle du répondant 3. En effet, bien qu'exposé à des conflits potentiels en lien avec les caractéristiques du rôle d'administrateur, sa forte identification ne suffit pas à les exprimer. Cette « voix silencieuse » peut trouver des éléments d'explication au niveau de l'identité de ce répondant. Sa forte implication bénévole au profit des usagers ainsi qu'au niveau institutionnel national (membre de la Cour des Comptes) et sa longue expérience professionnelle à la direction d'une Ca d'assurance maladie sont autant d'arguments de son identité qui finalement apparait comme une superposition de multiples rôles en simultanés. Nous pouvons supposer alors que cette voix silencieuse résulte d'un arbitrage entre ces divers rôles parmi lesquels l'expertise financière et les contraintes budgétaires s'imposent comme un principe de réalité qui neutralise la prise de parole en tant que représentant des usagers. Cet arbitrage interne peut résulter aussi d'un état de dissonance cognitive qu'il conviendrait de mesurer tout en considérant dans cet arbitrage la possibilité de s'appuyer sur le rôle des administrateurs les plus proches cognitivement et qui prennent la parole pour plusieurs comme cela nous a été relaté par le répondant 2. Troisièmement, malgré sa forte identification, le répondant 1 (Directoire) n'exprime pas ses désaccords relatifs au contenu et caractéristiques associés à son rôle. Cela s'explique comme 27 nous l'aborderons en discussion, par le fait que le conseil de surveillance collectivement n'exerce pas de contraintes sur les initiatives managériales qui finalement sont ratifiées. Les divergences latentes de ce répondant par rapport aux membres du Conseil n'ont pas lieu de s'exprimer puisque ses propositions sont ratifiées sans réelles difficultés. Nous observons donc qu'un degré d'identification élevé ne suffit pas à révéler les conflits mais il peut en revanche en faire émerger. Autrement dit, un acteur fortement identifié peut ne pas entrer dans une logique conflictuelle lors de la délibération alors même qu'il est en désaccord potentiel. De même, il peut provoquer des conflits réels alors qu'il n'est pas en désaccord a priori. Notre proposition P3 est donc infirmée ce qui nous conduit à revenir sur la variable d'identification au rôle, notamment en ce qui concerne le répondant 3. Le degré d'identification de l'administrateur correspond à son degré d'engagement dans son rôle. Si l'on observe le répondant 3, son engagement est d'ordre moral. Les désaccords de type productif révèlent dans le contexte particulier de l'hôpital, une remise en cause par les décisions managériales, des valeurs fondatrices de la fonction de soin de l'hôpital. Le répondant 3 l'exprime à plusieurs reprises (Annexe 2). Voici un extrait de sa réponse à la question suivante : Pensez-vous que les membres du CS partagent globalement la même vision des objectifs à atteindre? « Je pense que les acteurs au jour d'aujourd'hui qui sont dans le conseil de surveillance sont attachés à l' hôpital public, à cette valeur importante C'est une adhésion à une vision de comment est-ce qu'on défend l'hôpital public. Est-ce qu'on le défend par une gestion saine et rigoureuse (j'en suis persuadé) mais il ne faut pas déshumaniser les décisions hors un certain nombre de fois, ils sont un peu aveugles dans les décisions qu'ils prennent ils ne se rendent pas compte. Parce qu'en déshumanisant certaines décisions on va provoquer un déséquilibre financier. Si par exemple, on supprime les durées intermédiaires des échelons (ralentissement de la progression de carrière), le marché du travail étant très tendu au niveau infirmier par exemple, si les infirmières savent qu'elles n'arriveront pas au bout à l'hôpital ici, à la moindre occasion, le personnel est mobile maintenant, il ira travaillé dans une clinique où l'offre est plus intéressante. En particulier chez les jeunes la mobilité est forte. Il y a donc certaines décisions il faut bien mesurer : en apparence on a fait une économie mais elle peut avoir des conséquences qui fait qu'après on est obligé de prendre du personnel intérimaire qui va couter beaucoup plus cher. Donc finalement ces conflits portent sur des décisions opérationnelles qui montrent des désaccords. Ces conflits trouvent leur origine dans des façons différentes d'appréhender les valeurs de l'hopital? Ah OUI!. Parce que quelque part ça les remet en cause non? Alors nous ce qu'on dit c'est que pour avoir une qualité des soins il faut que les gens soient le mieux possible au travail. Tout particulièrement ceux qui sont directement confrontés [] à des passages dans la 28 vie des patients qui sont pas évidents la gestion de la mort, des familles en cas de décès, ou d'annonce de maladies graves, des choses comme ça [] Alors on s'habitue à tout [] c'est des trucs qui sont très très violents Quand vous avez un directeur qui lui est pas confronté la plupart du temps ils sont à l'abri de cette violence quotidienne que les collègues supportent ; on se dit qu'à travers certaines décisions quand même que des fois ils ne se rendent pas compte!!! Mais quand on a des gens qui prennent une décision comme ça sur un bout de papier et qui disent « Non Non maintenant ça va être comme ça alors on leur dit « oui, mais les gens vont foutrent le camp » ; « Oh on verra, on verra » ; et les gens s'en vont, réellement [] Donc les représentations des conséquences d'une décision donnée sont différentes entre les acteurs?OUI Ça ne remet pas en cause leur attachement aux valeurs communes de l'hôpital? OUI c'est comme ça que je le vois. Nous proposons ci-dessous une cartographie de l'identification des administrateurs à leur rôle et des conflits réels du conseil de surveillance. On pourrait également faire une carte à partir des conflits potentiels, voire les superposer. Ces résultats préliminaires donnent plusieurs éléments de preuve concernant la plausibilité théorique de nos propositions. Nous pouvons ainsi considérer que : - Au sein du conseil de surveillance, la perception de la diversité des identités de rôle (dans tout ou partie de ses trois dimensions) est source de conflits cognitifs potentiels sur les conséquences redistributives ou productives des décisions du directoire. - les administrateurs identifiés à leur rôle peuvent exprimer leur désaccord s'ils perçoivent des écarts importants par rapport aux autres administrateurs sur leur identité de rôle. Les types de désaccord sont corrélés à tout ou partie des dimensions de leur identité de rôle.
26,616
5b4551728b3f8bb1d0fdf6ec6680da97_7
French-Science-Pile
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7,832
17,274
0.3 1.8 0.9 2.8 0.1 11.9 0.7 5.5 0.4 0.7 1.4 0.0 0.5 3.8 3.7 0.2 2.5 1.0 0.2 3.8 1.0 0.6 0.4 0.9 4.9 0.2 1.4 1.6 0.8 44.8 73.6 0.5 0.9 6.9 1.7 0.8 0.6 9.2 1.0 1.4 2.9 3.6 0.4 1.9 0.8 2.3 0.1 10.2 0.6 4.9 0.3 0.7 1.1 0.0 0.4 3.4 3.1 0.2 2.7 0.9 0.2 3.8 1.4 0.5 0.6 1.1 4.1 0.2 1.3 1.8 0.9 41.7 67.9 0.5 1.1 9.8 2.2 1.2 0.7 8.8 1.1 1.3 2.8 3.7 0.4 1.9 0.7 2.0 0.1 10.5 0.5 4.5 0.2 0.6 0.9 0.0 0.4 3.0 3.1 0.2 3.0 1.1 0.2 3.8 1.4 0.4 0.6 1.1 4.0 0.2 1.2 1.9 0.9 39.5 66.5 0.5 1.2 9.7 2.5 1.2 0.8 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933038818 Pays partenaires commerciaux de l’OCDE En pourcentage du total des échanges de marchandises de l'OCDE 2002 2012 Chine, 5.0% Chine, 9.7% Autres pays de l'OCDE, 29.0% Autres pays de l'OCDE, 29.0% OCDE G7, 48.2% OCDE G7, 37.6% Autres pays hors OCDE, 17.8% Autres pays hors OCDE, 23.8% 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933036253 PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2014 © OCDE 2014 83 MONDIALISATION • ÉCHANGES ÉCHANGES EN VALEUR AJOUTÉE Les données sur les échanges en valeur ajoutée offrent des estimations statistiques de la (des) source(s) de la valeur ajoutée (par pays et par secteur) lors de la production de biens et de services qui sont exportés (et importés). L’initiative conjointe de l’OCDE et de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les échanges en valeur ajoutée (ÉVA) permet de remédier à ce problème en mesurant la valeur ajoutée par chaque pays dans la production des biens et services qui sont consommés à l’échelle mondiale. Définition La base de données OCDE-OMC comprend un certain nombre d’indicateurs qui permettent de mieux comprendre la nature des chaînes de valeur mondiales, ainsi que la façon dont la valeur est créée et le lieu où elle est créée. Les indicateurs présentés sont élaborés à partir de tableaux d’entrées-sorties à l’échelle mondiale et offrent pour chaque économie une estimation de la valeur ajoutée totale produite en amont à l’étranger qui résulte de la demande finale intérieure, et de la valeur ajoutée totale produite en amont dans l’économie considérée qui résulte de la demande finale étrangère. La part de la valeur ajoutée étrangère intégrée dans les exportations indique dans quelle mesure les exportations brutes d’un pays reposent sur une valeur ajoutée qui est produite en dehors de l’économie considérée (et importée). La valeur ajoutée locale intégrée dans la demande finale étrangère indique quel est le poids relatif de la valeur ajoutée locale intégrée, via des exportations finales directes ou des exportations indirectes de produits intermédiaires passant par d’autres pays, dans la demande des consommateurs finals étrangers (consommation des ménages, des organisations caritatives, des administrations publiques et investissement). La valeur ajoutée étrangère intégrée dans la demande intérieure finale indique quel est le poids relatif de la valeur ajoutée d’origine étrangère qui est intégrée dans les biens et services finaux (achetés par les ménages, les administrations publiques, les institutions sans but lucratif au service des ménages comme produits de consommation ou acquis aux fins d’investissement). Comparabilité Il importe de souligner que les indicateurs présentés dans la base de données ÉVA sont des estimations. Les statistiques officielles brutes sur les échanges internationaux produites par les organismes statistiques nationaux débouchent en effet sur une incohérence entre les données relatives aux exportations totales et aux importations totales à l’échelle mondiale, sachant que cette divergence est encore plus marquée lorsqu’on examine les échanges bilatéraux entre pays partenaires. Les tableaux d’entrées-sorties à l’échelle mondiale à partir desquels sont élaborés les indicateurs ÉVA éliminent naturellement ces écarts, notamment ceux imputables à des différences de traitement national des réexportations et du commerce de transit (via des plaques tournantes comme les Pays-Bas ou Hong Kong, par exemple), afin de donner une image cohérente des échanges mondiaux. Les exportations et importations totales des pays pour lesquels des données sont présentées concordent avec les estimations des comptes nationaux officiels. En revanche, les positions commerciales bilatérales qui figurent ici peuvent différer de celles publiées par les organismes statistiques nationaux. En bref Le contenu en valeur ajoutée étrangère des exportations a globalement augmenté au cours des vingt dernières années, portant la moyenne non pondérée de l’OCDE à 29 %. Néanmoins, on observe des différences marquées entre les économies à cet égard. La part de la valeur ajoutée étrangère dans les exportations dépend clairement de la taille des économies et de leur structure de spécialisation. Les petites économies tendent à se caractériser par des exportations intégrant une plus forte proportion de valeur ajoutée étrangère, tandis que les grandes économies se distinguent par une plus grande diversité de l’offre de biens intermédiaires d’origine locale et sont donc moins tributaires des importations étrangères de produits intermédiaires. Pour des pays d’Asie comme la Chine, l’Inde et la Corée en particulier, mais aussi pour la Pologne, la Hongrie, la Turquie et le Luxembourg, la part de la valeur ajoutée étrangère dans les exportations a sensiblement augmenté depuis le milieu des années 90. Les effets prononcés qu’a eus la crise économique sur les échanges internationaux ressortent aussi clairement du tableau, compte tenu de la baisse de la part de la valeur ajoutée étrangère dans les exportations brutes entre 2008 et 2009. 84 Sources • OCDE (2013), Statistiques du commerce international par produit, Éditions OCDE. Pour en savoir plus Publications analytiques • OCDE (2013), Interconnected Economies: Benefiting from Global Value Chains, Éditions OCDE. Publications statistiques • OCDE (2013), Statistiques de l’OCDE sur les échanges internationaux de services, Éditions OCDE. Publications méthodologiques • OCDE (2013), OCDE-OMC Note conceptuelle: Trade in value-added: concepts, methodologies and challenges, Paris, OCDE. Bases de données en ligne • OCDE/OMC (2013), OCDE-OMC : Statistiques du commerce en valeur ajoutée, (Base de données). Sites Internet • Mesurer les Échanges en Valeur Ajoutée : Une initiative conjointe de l’OCDE et de l’OMC, http://oe.cd/tiva-fr. PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2014 © OCDE 2014 MONDIALISATION • ÉCHANGES ÉCHANGES EN VALEUR AJOUTÉE Part de la valeur ajoutée étrangère dans les exportations brutes En pourcentage Allemagne Australie Autriche Belgique Canada Chili Corée Danemark Espagne Estonie États-Unis Finlande France Grèce Hongrie Irlande Islande Israël Italie Japon Luxembourg Mexique Norvège Nouvelle-Zélande Pays-Bas Pologne Portugal République slovaque République tchèque Royaume-Uni Slovénie Suède Suisse Turquie UE-28 OCDE Afrique du Sud Brésil Chine Fédération de Russie Inde Indonésie 1995 2000 2005 2008 2009 18.7 11.8 27.2 39.0 23.5 15.1 23.7 30.1 20.6 37.2 8.4 26.5 17.8 13.3 26.6 38.4 33.2 28.6 21.9 6.9 42.8 26.5 19.3 17.4 34.7 15.4 28.9 35.6 32.1 20.7 30.7 27.8 23.2 11.2 .. .. 11.8 9.7 11.9 10.7 9.7 14.7 24.4 13.5 31.8 42.7 30.9 18.0 32.9 26.2 27.0 50.1 8.9 31.4 24.5 25.3 46.2 50.6 37.2 33.8 25.3 9.9 55.5 31.8 14.7 20.2 38.2 23.3 27.1 48.3 39.2 18.4 37.5 31.6 27.8 15.3 .. .. 16.1 11.5 18.8 12.5 12.8 19.3 25.6 13.0 32.3 42.2 25.1 17.6 37.7 32.0 27.8 47.9 11.1 34.1 24.8 24.0 49.1 47.0 38.9 38.0 27.1 13.8 56.9 30.7 14.5 19.6 34.4 30.7 26.4 48.0 40.6 20.3 41.1 32.8 29.3 20.8 .. .. 16.6 13.0 36.4 8.2 19.5 17.8 27.8 13.9 35.3 40.4 21.3 20.7 43.4 33.9 24.9 38.2 14.6 36.7 27.3 25.8 45.0 45.6 35.7 34.9 22.8 19.4 59.5 30.6 14.8 21.4 36.7 30.6 35.5 48.4 39.8 18.9 39.0 35.0 30.4 26.3 .. .. 21.1 11.5 33.3 7.4 23.7 17.4 26.6 12.5 31.6 35.0 19.5 18.5 40.6 32.0 20.7 33.2 11.3 33.8 24.8 23.2 39.9 42.3 36.6 30.6 20.1 14.8 58.9 30.3 15.3 18.4 35.9 27.9 32.4 44.4 39.4 17.3 34.4 33.6 28.5 21.8 .. .. 16.5 9.0 32.6 6.9 21.9 14.4 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933038837 Valeurs ajoutées domestiques et étrangères En pourcentage du PNB, 2009 Valeur ajoutée domestique contenue dans la demande finale étrangère Valeur ajoutée étrangère contenue dans la demande finale domestique 70 60 50 40 30 20 10 0 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933036272 PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2014 © OCDE 2014 85 MONDIALISATION • ÉCHANGES ÉCHANGES EN VALEUR AJOUTÉE : RÔLE DES BIENS INTERMÉDIAIRES ET DES SERVICES Les données sur les échanges en valeur ajoutée (ÉVA) soulignent l’importance que revêtent dans de nombreuses économies les importations intermédiaires utilisées pour produire des biens et services destinés à l’exportation. Elles mettent en évidence la nécessité d’avoir accès aux productions intermédiaires les plus efficientes – qu’elles soient d’origine locale ou importées – pour être compétitif sur les marchés internationaux, et le fait que les droits de douane prélevés sur les importations peuvent nuire à la compétitivité des exportateurs des secteurs d’aval. Ces données soulignent également le rôle crucial joué par les services d’amont dans la production des biens exportés et, par conséquent, l’importance de garantir l’accès des producteurs aux services les plus efficients (qu’ils soient, là encore, fournis par des entreprises nationales, par des filiales étrangères ou sous forme d’importations directes). Définition Les produits intermédiaires réexportés correspondent à la part des importations intermédiaires qui sont utilisées (indirectement et directement) pour produire des biens et services destinés à En bref Dans la plupart des économies, environ un tiers des importations intermédiaires est destiné au marché d’exportation. Comme on pouvait s’y attendre, plus la taille d’une économie est réduite, plus cette part est élevée. Néanmoins, même aux États-Unis et au Japon, les deux pays de l’OCDE pour lesquels cette proportion est la plus faible, elle s’établit respectivement à 17 % et 23 % à l’échelle de l’ensemble de l’économie, sachant que ces pourcentages sont nettement plus élevés pour certains produits importés. Ainsi, au Japon, près de 40 % de toutes les importations intermédiaires de matériel de transport sont intégrés in fine dans les exportations. Dans d’autres pays, la part des importations intermédiaires intégrées dans les exportations est sensiblement plus élevée. En Hongrie, par exemple, deux tiers de l’ensemble des importations intermédiaires sont destinés au marché d’exportation après avoir subi des opérations de transformation, cette proportion atteignant 85 % pour les importations intermédiaires de produits électroniques. En Chine, en Corée et au Mexique, environ trois quarts de l’ensemble des importations intermédiaires de produits électroniques sont intégrés dans les exportations. La base de données ÉVA révèle également que près de 80 % des importations intermédiaires chinoises de produits textiles sont intégrés in fine dans des exportations. Les services représentent environ deux tiers du PIB dans la plupart des économies développées. Pourtant, en termes bruts, les échanges déclarés de services représentent à peine plus d’un quart du commerce total de biens et services des pays de l’OCDE. La prise en compte de la valeur ajoutée imputable aux services dans la production de biens montre cependant que le secteur des services contribue à hauteur de plus de 50 % aux exportations totales des États-Unis, du Royaume-Uni, de la France, de l’Allemagne et de l’Italie, et à hauteur de près d’un tiers dans le cas de la Chine, la part des services – fournis tant par des prestataires étrangers que nationaux – dans les exportations étant significative (généralement un tiers) pour tous les produits manufacturés. 86 l’exportation, en pourcentage des importations intermédiaires totales (par catégorie d’importations). La valeur ajoutée totale imputable aux services locaux intégrée dans les exportations brutes mesure la contribution totale du secteur des services aux exportations en termes de valeur ajoutée, que celle-ci corresponde à des exportations directes de services ou qu’elle soit intégrée dans des exportations de biens dont la production fait appel à des services intermédiaires. Les données relatives à l’indicateur présenté sont ventilées en deux catégories, permettant de distinguer la valeur ajoutée attribuable aux exportations directes de services et celle intégrée dans les exportations de biens. Comparabilité Il importe de souligner que les indicateurs présentés dans la base de données ÉVA sont des estimations. Les statistiques officielles brutes sur les échanges internationaux produites par les organismes statistiques nationaux débouchent en effet sur une incohérence entre les données relatives aux exportations totales et aux importations totales à l’échelle mondiale, sachant que cette divergence est encore plus marquée lorsqu’on examine les échanges bilatéraux entre pays partenaires. Les tableaux d’entrées-sorties à l’échelle mondiale à partir desquels sont élaborés les indicateurs ÉVA éliminent naturellement ces écarts, notamment ceux imputables à des différences de traitement national des réexportations et du commerce de transit (via des plaques tournantes comme les Pays-Bas ou Hong Kong, par exemple), afin de donner une image cohérente des échanges mondiaux. Les exportations et importations totales des pays pour lesquels des données sont présentées concordent avec les estimations des comptes nationaux officiels. En revanche, les positions commerciales bilatérales qui figurent ici peuvent différer de celles publiées par les organismes statistiques nationaux. Sources • OCDE (2013), Statistiques du commerce international par produit, Éditions OCDE. Pour en savoir plus Publications analytiques • Beltramello, A., K. De Backer et L. Moussiegt (2012), "The export performance of countries within global value chains (GVCs)", OECD Science, Technology and Industry Working Papers, No. 2012/02. • De Backer, K. et N. Yamano (2012), "International comparative evidence on global value chains", OECD Science, Technology and Industry Working Papers, No. 2012/03. • OCDE (2013), Interconnected Economies: Benefiting from Global Value Chains, Éditions OCDE. Publications statistiques • OCDE (2013), Statistiques mensuelles du commerce international, Éditions OCDE. Publications méthodologiques • OCDE (2013), OCDE-OMC Note conceptuelle: Trade in value-added: concepts, methodologies and challenges, Paris, OCDE. Bases de données en ligne • OECD/OMC (2013), OCDE-OMC : Statistiques du commerce en valeur ajoutée, (Base de données). Sites Internet • Mesurer les Échanges en Valeur Ajoutée : Une initiative conjointe de l’OCDE et de l’OMC, http://oe.cd/tiva-fr. PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2014 © OCDE 2014 MONDIALISATION • ÉCHANGES ÉCHANGES EN VALEUR AJOUTÉE : RÔLE DES BIENS INTERMÉDIAIRES ET DES SERVICES Intermédiaires réexportés en pourcentage du total des importations de biens intermédiaires En pourcentage pour les industries selectionnés, 2009 Transport et Textiles, articles Production du bois, Produits chimiques et Métaux de base et Véhicules Agriculture, chasse, Produits alimentaires, Machines et matériel entreposage, postes Activités du secteur d'habillement, cuir et papier et du carton, produits minéraux fabrication automobiles et sylviculture et pêche boissons et tabac d'équipement et des entreprises chaussures imprimerie et édition non métalliques d'ouvrages en métaux matériels de transport télécommunications Allemagne Australie Autriche Belgique Canada Chili Corée Danemark Espagne Estonie États-Unis Finlande France Grèce Hongrie Irlande Islande Israël Italie Japon Luxembourg Mexique Norvège Nouvelle-Zélande Pays-Bas Pologne Portugal République slovaque République tchèque Royaume-Uni Slovénie Suède Suisse Turquie UE-28 OCDE Afrique du Sud Brésil Chine Fédération de Russie Inde Indonésie 26.0 27.6 46.5 57.4 34.9 35.9 21.8 60.4 20.0 62.8 15.0 27.9 31.6 12.5 42.1 85.3 55.7 19.4 21.8 5.4 77.7 13.8 34.2 54.1 73.3 32.1 24.8 48.8 34.0 23.5 39.8 35.1 45.1 11.9 .. .. 19.6 20.7 44.1 11.1 18.1 16.8 25.2 21.4 38.3 48.5 26.9 32.5 16.7 49.3 14.5 49.1 9.6 20.7 22.5 8.3 37.7 64.2 41.9 17.1 17.3 5.5 30.4 14.8 36.1 44.9 64.9 29.3 16.4 41.5 30.0 16.7 32.4 22.4 38.5 10.9 .. .. 19.4 16.5 32.1 8.7 17.6 15.1 49.1 20.0 71.9 69.2 34.4 19.9 50.2 59.2 48.0 81.5 14.2 36.1 50.5 23.8 69.8 51.5 44.5 46.0 46.5 14.8 74.5 51.6 39.5 38.5 52.0 70.4 62.0 85.3 68.4 34.7 79.5 45.2 60.9 33.6 .. .. 23.6 11.7 80.6 18.9 33.1 38.0 39.7 14.2 52.8 43.2 25.4 41.6 35.1 32.5 23.8 61.7 12.4 34.1 26.4 14.7 47.4 63.6 21.7 43.6 29.0 12.2 81.7 30.8 19.6 29.6 40.3 39.9 35.5 58.4 51.4 25.0 60.5 45.7 46.4 24.1 .. .. 22.9 14.9 49.2 22.0 27.4 19.7 56.7 21.8 52.0 60.2 34.8 35.0 57.8 52.9 32.5 56.4 18.2 39.7 42.5 21.9 56.5 60.9 38.8 42.6 36.0 22.1 80.8 31.0 42.3 38.3 72.9 42.0 36.6 63.1 60.5 32.3 59.5 54.7 67.6 26.5 .. .. 24.3 16.4 49.1 31.4 20.9 21.1 70.7 34.5 64.0 65.3 41.5 29.0 62.3 59.6 36.4 72.4 27.5 52.7 47.1 21.7 69.9 49.8 43.0 42.4 52.0 38.6 88.8 45.0 62.8 37.3 63.8 59.3 51.5 73.4 68.6 53.5 76.9 69.6 74.0 50.2 .. .. 34.0 19.3 52.3 37.5 19.8 10.7 64.5 25.2 64.9 63.3 38.9 32.7 54.5 54.2 26.5 63.2 18.8 49.6 43.4 22.5 72.7 50.4 40.5 29.4 41.6 32.1 80.9 53.6 51.8 26.6 59.2 43.6 34.4 67.9 55.5 35.6 62.3 60.6 63.2 28.3 .. .. 34.4 18.4 48.8 32.1 37.5 33.3 68.3 19.1 78.2 83.1 57.5 31.0 54.2 59.3 44.5 56.2 19.5 48.3 63.1 27.4 74.2 60.7 34.8 38.6 37.7 38.3 86.9 56.9 33.7 24.0 63.3 59.5 74.4 83.4 70.9 35.0 77.3 66.8 50.2 42.4 .. .. 26.2 13.9 37.9 24.0 27.7 16.2 42.8 18.2 41.6 50.4 20.9 33.4 49.0 71.8 29.1 59.3 10.7 33.5 27.1 45.3 45.7 69.3 34.8 33.2 24.0 12.6 87.8 29.1 43.9 27.7 39.3 34.7 34.6 40.3 38.8 23.2 47.9 39.1 46.1 23.6 .. .. 32.2 10.6 37.7 23.6 20.2 16.3 36.1 13.6 49.8 42.7 21.1 28.3 43.6 27.0 21.0 46.2 9.6 60.6 24.2 15.8 43.5 71.3 47.8 51.3 23.8 9.1 75.7 18.2 34.3 27.3 46.1 28.3 23.1 38.0 31.8 21.3 32.1 44.7 49.1 17.6 .. .. 15.9 9.1 42.1 17.1 41.2 10.8 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933038856 Valeur ajoutée domestique directe provenant du secteur des services contenue dans les exportations brutes En pourcentage des exportations brutes % Valeur ajoutée étrangère provenant du secteur des services contenue dans les exportations % Valeur ajoutée domestique indirecte provenant du secteur des services contenue dans les exportations brutes (provenant des intrants domestiques) % Valeur ajoutée domestique directe provenant du secteur des services contenue dans les exportations 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933036291 PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2014 © OCDE 2014 87 MONDIALISATION • IDE ET BALANCE DES PAIEMENTS INVESTISSEMENT DIRECT ÉTRANGER IDE et balance des paiements L’investissement direct étranger (IDE) est un élément central du processus d’intégration économique internationale. L’IDE crée des liens directs, stables et durables entre les économies. Il favorise les transferts de technologies et de savoir-faire entre les pays, et permet à l’économie d’accueil de promouvoir plus largement ses produits sur les marchés internationaux. L’IDE représente aussi une source de fonds supplémentaire pour l’investissement productif, et peut constituer, dans un cadre d’action publique adéquat, un vecteur important de développement. Définition L’IDE se définit comme un investissement réalisé par une entité résidente d’un pays donné dans le but d’acquérir un intérêt durable dans une entreprise résidente d’un autre pays. La notion d’intérêt durable suppose qu’il existe une relation à long terme entre l’investisseur direct et l’entreprise, et que l’investisseur exerce une influence notable sur la gestion. Cette influence est évaluée à l’aune de la participation au capital, qui doit représenter au moins 10 % des droits de vote. Les stocks d’investissements entrants à une date donnée désignent les investissements directs détenus par des nonrésidents dans l’économie déclarante ; les stocks d’investisse- En bref L’IDE a reculé en 2012, après deux années consécutives de reprise. Les sorties d’IDE au niveau mondial ont diminué de 20 % en 2012 pour s’établir à 1 331 milliards USD, alors qu’elles avaient augmenté de 20 % en 2010 et 2011, demeurant à un niveau comparable à l’IDE sortant enregistré en 2010 mais bien en-deçà de leur pic historique de 2007 (2 173 milliards USD). Les investisseurs de l’OCDE représentent 74 % environ des sorties mondiales d’IDE (982 milliards USD), soit une baisse de 23 % par rapport à 2011. Les trois premiers pays investisseurs sont les ÉtatsUnis, le Japon et le Royaume-Uni, qui totalisent 44 % des sorties mondiales d’IDE. Les investisseurs de l’Union européenne ont réalisé globalement 21 % des sorties mondiales d’IDE (soit 282 milliards USD), un repli par rapport au pourcentage constant observé depuis 2009 (autour de 30 %) et un niveau bien inférieur à celui de 2008, lorsque l’UE réalisait à elle seule 51 % de l’IDE sortant au niveau mondial. En 2012, quatre pays ont accueilli à eux seuls 40 % des e n t r é e s m o n d i a l e s d ’ I D E : l a C h i n e q u i , av e c 253 milliards USD, se taille la part du lion, les États-Unis (166 milliards USD), le Brésil (65 milliards USD) et le Royaume-Uni (63 milliards USD). Les pays de l’OCDE ont été destinataires de 42 % seulement des entrées mondiales d’IDE (contre 87 % en 2000), qui se sont établies à 578 milliards USD, soit un repli de 37 % par rapport à 2011. L’indice de restrictivité de la réglementation de l’IDE de l’OCDE montre que des différences majeures subsistent entre les pays eu égard aux restrictions appliquées à l’investissement direct étranger. Les pays d’Asie et ceux disposant d’importantes matières premières appliquent généralement plus de restrictions. Lorsqu’il est combiné à des indicateurs mesurant d’autres aspects de l’IDE, cet indice aide à expliquer les différences dans la capacité des pays à attirer les investisseurs étrangers. 88 ments sortants sont les investissements directs détenus par l’économie déclarante à l’étranger. Les flux correspondants se rapportent aux investissements réalisés pendant une période donnée. Un solde négatif des flux témoigne généralement de cessions d’actifs ou de remboursements de montants importants au titre de prêts interentreprises. L’indice de restrictivité de la réglementation de l’IDE de l’OCDE mesure le caractère restrictif des règles d’un pays en matière d’IDE, en fonction de quatre types de restrictions : seuils autorisés pour les participations étrangères, mécanismes de filtrage ou d’autorisation, restrictions à l’emploi d’étrangers à des postes clés et restrictions à l’exploitation. Comparabilité La comparabilité des statistiques d’IDE s’est beaucoup améliorée ces dernières années, mais des asymétries demeurent entre les entrées et les sorties d’IDE. La composition de l’agrégat UE a varié dans le temps : EU 15 jusqu’en 2003 ; EU 25 entre 2004 et 2006 ; puis EU 27 pour 200712. Les données ne tiennent pas compte des entités à vocation spéciale (EVS) pour ce qui concerne l’Autriche, la Hongrie, le Luxembourg (stocks d’IDE uniquement) et les Pays-Bas. L’indice de restrictivité de la réglementation de l’IDE de l’OCDE est appliqué à 22 secteurs. Il a été établi à ce jour pour six exercices : 1997, 2003, 2006, 2010, 2011 et 2012. Les restrictions sont notées sur une échelle de 0 (secteur ouvert) à 1 (secteur fermé). L’absence de note correspond à l’absence de restrictions. Sources • OCDE (2013), Statistiques de l’OCDE sur l’investissement direct international (Base de données). Pour en savoir plus Publications analytiques • OCDE (2013), Examens de l’OCDE des politiques de l’investissement, Éditions OCDE. Publications statistiques • OCDE (2010), Measuring Globalisation: OECD Economic Globalisation Indicators 2010, Éditions OCDE. Publications méthodologiques • OCDE (2010), Définition de référence de l’OCDE des investissements directs internationaux 2008, Quatrième édition, Éditions OCDE. Sites Internet • Investissement international, www.oecd.org/daf/ investissement. PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2014 © OCDE 2014 MONDIALISATION • IDE ET BALANCE DES PAIEMENTS INVESTISSEMENT DIRECT ÉTRANGER Stocks d’IDE sortants et entrants Millions de dollars des EU Stocks d'IDE sortants Stocks d'IDE entrants 1990 1995 2000 2010 2011 2012 1990 1995 2000 2010 2011 2012 Allemagne 130 760 Australie 37 491 Autriche 4 747 Belgique 40 636 Canada 84 813 Chili .. Corée .. Danemark .. Espagne 15 652 Estonie .. États-Unis 616 655 Finlande 11 227 France 110 121 Grèce .. Hongrie .. Irlande .. Islande 75 Israël .. Italie 60 195 Japon 201 440 Luxembourg .. Mexique .. Norvège 10 889 Nouvelle-Zélande 3 320 Pays-Bas 105 085 Pologne .. Portugal .. République slovaque .. République tchèque .. Royaume-Uni 236 118 Slovénie .. Suède 50 720 Suisse 66 087 Turquie .. Zone euro .. UE-28 .. OCDE 1 786 030 Afrique du Sud 15 010 Brésil .. Chine .. Fédération de Russie .. Inde .. Indonésie .. 233 107 60 484 11 832 80 690 118 106 .. .. .. 31 037 .. 885 506 14 993 204 430 .. 278 .. 179 758 106 319 238 452 .. .. 22 521 7 676 172 348 539 .. 139 345 330 665 727 73 143 142 481 .. .. .. 2 736 756 23 301 .. .. 2 420 .. .. 486 750 95 978 24 820 179 773 237 647 11 154 .. 73 117 129 192 256 1 531 607 52 109 445 087 5 852 1 279 27 925 663 9 091 180 274 278 441 .. .. 22 937 6 065 305 458 1 018 19 793 373 738 923 366 870 123 260 232 176 3 668 .. .. 5 410 736 32 325 .. .. 20 141 2 609 .. 1 365 645 413 525 176 510 873 864 636 712 54 772 143 160 222 242 653 228 5 698 4 273 559 137 662 1 482 281 42 623 20 435 340 110 11 466 68 973 489 654 831 110 176 516 108 717 188 002 16 101 956 025 44 444 66 732 3 334 14 923 1 626 819 8 179 372 955 1 032 802 22 509 .. 9 099 676 16 881 287 89 453 191 349 317 210 366 301 96 911 6 672 1 356 021 378 671 189 546 943 201 660 746 74 889 171 530 231 081 656 690 4 729 4 663 142 133 773 1 478 618 48 041 23 861 330 793 11 521 70 815 519 977 955 854 156 644 98 520 207 342 18 843 981 283 52 849 72 225 4 209 13 214 1 696 243 7 821 376 677 1 063 132 27 681 .. 9 297 425 17 680 184 78 473 206 187 424 780 361 452 109 519 6 204 1 461 761 424 489 212 269 911 609 715 053 91 847 196 410 248 890 635 605 5 879 5 077 750 151 374 1 540 087 44 960 34 079 379 982 12 165 73 978 559 132 1 037 700 159 322 131 039 236 524 19 019 988 550 57 367 71 253 4 412 15 176 1 793 240 7 387 402 782 1 129 376 29 668 .. 9 700 880 18 860 133 .. 270 864 502 750 387 217 118 167 12 394 74 067 80 333 11 098 58 388 112 850 .. .. .. 65 916 .. 505 346 5 132 84 931 .. 569 .. 147 365 60 009 9 850 .. 22 424 12 404 8 065 68 699 109 .. .. .. 233 305 .. 12 636 34 245 .. .. .. 1 460 888 9 198 .. .. .. .. .. 104 367 111 310 21 363 112 960 123 182 .. .. .. 110 291 .. 680 066 8 465 191 433 .. 11 304 .. 129 5 741 65 347 33 508 .. 41 130 19 836 25 728 115 756 7 843 18 973 1 297 7 350 226 626 2 617 31 089 57 064 .. .. .. 2 134 773 15 014 .. .. 345 .. .. 462 564 118 858 31 165 181 650 212 723 45 753 .. 73 585 156 347 2 611 1 421 017 24 272 259 773 14 113 22 856 127 088 497 22 367 121 169 50 322 .. 97 170 25 282 28 070 243 730 34 233 32 043 4 761 21 647 463 134 3 278 93 998 86 810 18 812 .. .. 4 501 698 43 451 .. .. 32 204 20 278 .. 943 791 508 794 161 144 950 027 591 873 154 646 134 230 140 250 628 333 16 474 2 623 646 86 697 955 138 35 025 90 780 285 572 11 784 60 237 328 055 214 890 156 589 363 010 174 569 67 706 586 069 215 639 111 685 50 283 128 505 1 162 649 14 598 347 163 617 703 186 980 .. 7 569 970 13 104 535 153 133 682 346 1 569 604 490 560 205 603 160 735 927 452 546 024 153 060 1 002 717 586 999 168 338 133 660 140 092 617 031 16 960 2 879 531 89 227 953 938 29 058 84 541 290 479 12 656 65 014 339 250 225 785 180 791 350 977 182 581 73 641 606 956 203 111 111 822 51 290 120 569 1 184 547 15 157 344 100 644 912 134 665 .. 7 643 400 13 466 932 134 350 695 103 1 906 908 454 949 206 454 185 804 980 687 604 257 164 380 968 338 636 972 201 300 147 230 145 958 627 661 19 349 3 057 326 96 636 997 854 24 763 102 512 339 727 10 065 74 403 363 677 205 754 117 436 402 949 211 764 81 358 611 231 235 113 117 149 55 810 136 443 1 341 827 15 467 378 344 665 596 183 736 .. 8 034 994 14 323 071 .. 718 870 2 159 551 497 820 226 370 211 900 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933038875 Stocks d’IDE En pourcentage du PIB, 2012 ou dernière année disponible IDE sortants 250 IDE entrants 310 200 150 100 50 0 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933036310 PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2014 © OCDE 2014 89 MONDIALISATION • IDE ET BALANCE DES PAIEMENTS INVESTISSEMENT DIRECT ÉTRANGER Flux entrants et sortants d’investissement direct Millions de dollars des EU Flux sortants d'investissement direct Flux entrants d'investissement direct 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2007 2008 2009 2010 2011 2012 Allemagne 170 650 Australie 16 972 Autriche 39 034 Belgique 80 141 Canada 64 621 Chili 2 573 Corée 19 720 Danemark 20 624 Espagne 137 078 Estonie 1 746 États-Unis 414 039 Finlande 7 202 France 164 341 Grèce 5 247 Hongrie 3 622 Irlande 21 150 Islande 10 181 Israël 8 604 Italie 90 795 Japon 73 545 Luxembourg 73 364 Mexique 8 256 Norvège 10 442 Nouvelle-Zélande 3 702 Pays-Bas 55 618 Pologne 5 410 Portugal 5 494 République slovaque 600 République tchèque 1 621 Royaume-Uni 325 473 Slovénie 1 865 Suède 38 811 Suisse 51 036 Turquie 2 106 Zone euro .. UE-28 1 252 662 OCDE 1 935 681 Afrique du Sud 2 966 Brésil 7 067 Chine 17 155 Fédération de Russie 44 927 Inde 17 281 Indonésie 4 675 72 617 33 921 29 395 220 595 79 236 8 041 20 251 13 264 74 573 1 112 329 080 9 279 154 747 2 413 2 230 18 912 -4 206 7 210 66 870 127 981 11 737 1 157 20 376 -239 68 202 4 413 2 736 529 4 322 182 437 1 465 31 298 45 312 2 549 .. 977 925 1 643 813 -3 134 20 457 56 742 56 736 19 257 5 900 69 647 15 470 10 007 7 527 39 660 7 256 17 197 6 320 13 072 1 549 310 383 5 681 107 142 2 055 1 885 26 617 2 291 1 695 21 277 74 698 6 709 9 604 19 159 -308 34 473 4 701 817 905 950 39 325 260 25 910 26 428 1 554 .. 387 322 911 915 1 151 -10 084 43 890 34 450 15 928 2 249 121 533 24 957 9 995 24 538 34 721 8 331 23 278 -109 37 846 142 301 079 10 168 64 576 1 558 1 149 22 350 -2 357 9 088 32 657 56 276 20 842 15 050 23 238 591 68 345 7 228 -7 494 946 1 168 39 489 -212 20 193 79 342 1 464 .. 477 943 1 051 965 -76 11 589 57 954 41 116 15 346 2 664 52 215 13 814 21 896 96 875 52 144 19 539 20 355 13 347 36 611 -1 454 409 005 5 016 59 609 1 774 4 682 -1 166 23 5 329 53 677 114 300 9 053 12 636 26 514 2 520 41 049 8 169 14 919 491 -328 106 663 118 28 207 53 500 2 349 .. 553 875 1 283 451 2 785 -1 029 48 400 48 635 12 608 7 713 66 951 13 430 15 310 -33 820 55 457 20 063 23 627 5 386 -4 081 952 388 293 7 546 37 210 678 11 152 18 526 -3 197 2 352 29 767 122 515 9 688 23 404 20 766 -509 4 352 728 1 916 -74 1 343 77 723 -273 30 511 30 081 4 074 .. 281 828 981 844 4 369 -2 832 62 400 28 423 8 553 5 422 80 223 45 530 31 159 93 448 116 809 12 534 1 784 11 815 64 277 2 725 221 166 12 455 96 240 2 112 5 447 24 712 6 822 8 798 40 209 22 548 -28 265 31 552 7 993 3 440 119 406 23 582 3 063 3 583 10 446 200 068 1 515 28 849 32 446 22 047 .. 856 720 1 360 535 5 695 34 585 156 249 54 468 25 483 6 929 8 093 46 801 6 845 193 575 61 520 15 150 3 311 1 827 76 843 1 729 310 091 -1 142 64 060 4 490 6 313 -16 421 917 10 877 -10 814 24 417 11 195 27 729 10 237 4 984 4 540 14 833 4 656 4 685 6 449 88 678 1 944 36 855 15 137 19 504 .. 538 522 1 059 904 9 007 45 058 171 535 75 856 43 407 9 318 22 461 27 472 9 304 60 966 22 733 12 911 2 249 3 942 10 406 1 839 150 443 718 24 216 2 435 1 997 25 717 86 4 438 20 078 11 938 20 667 16 605 16 637 -1 293 38 612 12 936 2 707 -6 2 929 76 375 -653 10 034 28 945 8 409 .. 359 860 649 252 5 696 25 949 131 057 27 752 35 597 4 878 57 432 36 685 838 77 020 28 399 14 244 1 094 -11 549 39 875 1 600 205 851 7 359 33 628 330 2 204 42 807 246 5 510 9 179 -1 251 35 661 22 563 17 043 636 -7 325 13 879 2 646 1 770 6 147 50 587 359 -64 32 161 9 036 .. 371 722 736 597 1 228 48 506 243 703 31 668 27 396 13 771 48 982 66 076 10 628 119 130 39 667 22 096 4 661 12 712 26 841 341 230 224 2 552 38 582 1 144 5 856 23 566 1 108 10 765 34 355 -1 758 13 302 23 553 19 617 4 312 19 924 20 652 11 160 2 145 2 323 51 133 999 9 262 23 854 16 047 .. 465 500 915 808 6 004 66 661 280 000 36 868 36 498 19 242 6 567 56 422 5 762 -36 603 43 034 29 296 4 999 1 309 27 063 1 517 166 411 3 553 25 094 1 741 13 786 38 329 1 087 9 482 16 026 1 730 -1 690 15 453 12 732 2 201 11 661 6 067 8 919 2 827 10 614 62 683 -59 16 149 1 177 12 519 .. 230 349 577 857 4 572 65 263 253 400 30 188 23 996 19 404 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933038894 Flux des investissements directs Milliards de dollars des EU, 2012 IDE sortants 140 IDE entrants 253 282 388 982 230 166 578 120 100 80 60 40 20 0 -20 -40 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933036329 90 PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2014 © OCDE 2014 MONDIALISATION • IDE ET BALANCE DES PAIEMENTS INVESTISSEMENT DIRECT ÉTRANGER Indice de restrictivité de la réglementation de l’IDE 2012 Allemagne Australie Autriche Belgique Canada Chili Corée Danemark Espagne Estonie États-Unis Finlande France Grèce Hongrie Irlande Islande Israël Italie Japon Luxembourg Mexique Norvège Nouvelle-Zélande Pays-Bas Pologne Portugal République slovaque République tchèque Royaume-Uni Slovénie Suède Suisse Turquie UE-28 OCDE Afrique du Sud Brésil Chine Fédération de Russie Inde Indonésie Total index IDE Secteur primaire Industries manufacturières 0.023 0.128 0.106 0.040 0.173 0.057 0.143 0.033 0.021 0.018 0.089 0.019 0.045 0.032 0.029 0.043 0.167 0.118 0.052 0.265 0.004 0.225 0.085 0.240 0.015 0.072 0.007 0.049 0.010 0.061 0.007 0.059 0.083 0.059 .. 0.076 0.055 0.101 0.407 0.180 0.280 0.318 0.069 0.078 0.150 0.035 0.198 0.150 0.250 0.056 0.011 0.023 0.181 0.015 0.155 0.079 0.000 0.135 0.241 0.060 0.130 1.000 0.000 0.394 0.156 0.325 0.062 0.050 0.006 0.000 0.025 0.160 0.000 0.138 0.000 0.013 .. 0.128 0.010 0.188 0.454 0.157 0.407 0.324 0.000 0.075 0.000 0.023 0.110 0.000 0.000 0.000 0.000 0.000 0.000 0.009 0.000 0.000 0.000 0.000 0.112 0.020 0.000 0.077 0.000 0.103 0.000 0.200 0.000 0.000 0.000 0.000 0.000 0.023 0.000 0.000 0.000 0.000 .. 0.022 0.010 0.025 0.189 0.092 0.053 0.070 Électricité Distribution Transport Média Communication 0.000 0.075 1.000 0.023 0.110 0.000 0.417 0.000 0.000 0.000 0.197 0.084 0.000 0.000 0.000 0.000 0.562 0.770 0.000 0.000 0.000 0.100 0.000 0.200 0.000 0.000 0.000 0.000 0.000 0.023 0.000 0.000 0.500 0.000 .. 0.119 0.010 0.025 0.463 0.030 0.064 0.110 0.000 0.075 0.000 0.023 0.110 0.000 0.000 0.000 0.000 0.000 0.000 0.009 0.000 0.000 0.000 0.000 0.112 0.020 0.000 0.000 0.000 0.175 0.000 0.200 0.000 0.000 0.000 0.000 0.000 0.023 0.000 0.000 0.000 0.000 .. 0.022 0.010 0.025 0.233 0.050 0.250 0.435 0.200 0.267 0.182 0.114 0.277 0.413 0.508 0.083 0.075 0.150 0.550 0.092 0.150 0.150 0.167 0.125 0.204 0.403 0.200 0.667 0.075 0.528 0.350 0.283 0.083 0.092 0.083 0.075 0.075 0.114 0.150 0.292 0.250 0.383 .. 0.230 0.193 0.275 0.633 0.350 0.179 0.423 0.025 0.200 0.000 0.023 0.710 0.188 0.563 0.000 0.225 0.000 0.250 0.009 0.048 0.113 0.000 0.000 0.112 0.264 0.363 0.200 0.000 0.663 0.125 0.200 0.000 0.298 0.000 0.000 0.000 0.248 0.000 0.200 0.467 0.200 .. 0.167 0.298 0.550 1.000 0.350 0.395 1.000 0.000 0.400 0.000 0.023 0.575 0.000 0.500 0.000 0.000 0.000 0.110 0.009 0.000 0.000 0.000 0.000 0.112 0.395 0.000 0.480 0.000 0.350 0.000 0.400 0.000 0.075 0.000 0.000 0.000 0.023 0.000 0.200 0.000 0.000 .. 0.107 0.010 0.025 0.750 0.100 0.425 0.410 Services financiers Services marchands 0.005 0.133 0.002 0.024 0.077 0.017 0.050 0.002 0.002 0.002 0.042 0.011 0.054 0.020 0.005 0.009 0.119 0.037 0.018 0.000 0.002 0.133 0.067 0.233 0.002 0.003 0.017 0.002 0.010 0.024 0.002 0.002 0.067 0.000 .. 0.035 0.052 0.108 0.510 0.432 0.329 0.206 0.000 0.078 0.322 0.248 0.110 0.013 0.000 0.363 0.113 0.000 0.000 0.046 0.003 0.056 0.000 0.000 0.112 0.020 0.000 0.000 0.000 0.100 0.313 0.200 0.000 0.000 0.000 0.000 0.000 0.023 0.000 0.051 0.000 0.125 .. 0.067 0.260 0.025 0.350 0.175 0.563 0.579 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933038913 Indice de restrictivité de la réglementation de l’IDE 2012 0.45 Fermé = 1; Ouvert = 0 0.40 0.35 0.30 0.25 0.20 0.15 0.10 Moyenne de l'OCDE 0.05 0.00 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888933036348 PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2014 © OCDE 2014 91 MONDIALISATION • IDE ET BALANCE DES PAIEMENTS BALANCE DES PAIEMENTS Le solde des opérations courantes correspond à la différence entre les recettes courantes en provenance de l’étranger et les paiements courants à destination de l’étranger. Si ce solde est positif, l’économie pourra utiliser l’excédent pour rembourser une partie de sa dette extérieure, acquérir des actifs étrangers ou prêter des fonds au reste du monde. S’il est négatif, ce déficit devra être financé par des emprunts extérieurs, ou par la liquidation d’avoirs extérieurs acquis antérieurement. Définition Les opérations courantes sont constituées des opérations suivantes : exportations et importations de biens, importations et exportations de services (voyages, transport international de marchandises et de passagers, assurances et services financiers, etc.) ; flux de revenus, composés de salaires et traitements, de dividendes, d’intérêts et d’autres revenus d’investissement (à savoir les revenus de la propriété dans le système de comptabilité nationale) ; transferts courants, tels que les transferts des administrations publiques (la coopération internationale), les envois de fonds des travailleurs et d’autres transferts comme les dons, les héritages, les prix de loteries. En bref Les soldes des opérations courantes en pourcentage du PIB sont négatifs depuis 2000 pour les pays de l’OCDE suivants : Australie, République tchèque, Grèce, Italie, Mexique, Nouvelle-Zélande, Pologne, Portugal, Espagne, RoyaumeUni et États-Unis. La raison tient en partie au mode de traitement des bénéfices des entreprises d’investissement direct, mais aussi à la crise financière mondiale et à ses effets persistants sur les flux d’échanges mondiaux. La balance des investissements de portefeuille ainsi que la balance des échanges de biens ont eu un impact significatif sur l’évolution des soldes des opérations courantes, jusqu’à la crise récente qui a frappé l’économie mondiale. Les pays de l’OCDE qui ont enregistré un excédent de leur balance des opérations courantes tout au long de la période de crise (depuis 2007) sont l’Autriche, le Danemark, l’Allemagne, Israël, le Japon, la Corée, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Norvège, la Suède et la Suisse. La balance des opérations courantes, selon la moyenne établie pour la période 2009-12, présente un déficit qui atteint 5 % du PIB, voire plus, en Grèce, en Islande, au Portugal et en Turquie. Des excédents de plus de 5 % ont été enregistrés au Danemark, en Allemagne, au Luxembourg, aux Pays-Bas, en Norvège, en Suède, en Suisse et dans la Fédération de Russie. S’agissant des économies émergentes, l’Indonésie a enregistré en 2012 le premier déficit de ses paiements courants depuis le début de la série statistique, en 2000. La balance des opérations courantes de l’Afrique du Sud est en déficit depuis 2002, tandis que celle de la Chine et de la Fédération de Russie est excédentaire depuis 2000, signe dans le cas de cette dernière de la bonne santé de ses exportations de ressources naturelles et, dans le cas de la Chine, de l’importance de ses exportations manufacturières. 92 Les revenus d’investissement comprennent les bénéfices réinvestis (c’est-à-dire non distribués sous forme de dividendes à l’investisseur direct) des filiales étrangères. En général, les bénéfices des entreprises d’investissement direct sont traités comme s’ils étaient transférés à l’étranger à l’investisseur direct, la partie qui reste effectivement dans l’économie de résidence des entreprises d’investissement direct apparaissant sous la forme d’un revenu d’investissement direct bénéfices réinvestis (débit) dans les comptes courants et, (avec le signe opposé) comme des investissements directs étrangers dans le compte financier. Comparabilité Les données sont empruntées aux statistiques de la balance des paiements, établies conformément à la 5e édition du Manuel de la balance des paiements (MBP5) du Fonds monétaire international (FMI). Les données concernant l’Australie, le Canada, le Chili et la Corée (en partie) sont déjà actualisées et présentées conformément à la nouvelle édition du Manuel (MBP6). D’ici la fin de 2014, la plupart des pays de l’OCDE seront passés de la 5e à la 6e édition du Manuel. Le FMI assure un suivi rigoureux des statistiques de la balance des paiements publiées par ses pays membres, dans le cadre de réunions régulières de statisticiens spécialistes de la balance des paiements. Les données sont donc relativement comparables d’un pays à l’autre. Étant donné que tous les bénéfices des entreprises d’investissement direct sont considérés comme étant rapatriés vers l’investisseur direct – alors que ces entreprises peuvent en pratique en conserver une grande partie dans leur économie de résidence – l’existence d’entreprises de ce type dans une économie tend à réduire le solde de ses opérations courantes. Il convient aussi de noter que les revenus des investissements de portefeuille jouent un rôle d’importance croissante dans le solde des opérations courantes. Sources • OCDE (2013), Principaux indicateurs économiques, Éditions OCDE. Pour en savoir plus Publications analytiques • OCDE (2012), Les systèmes de financement des crédits à l’exportation dans les pays membres et les économies non membres de l’OCDE, Éditions OCDE. Publications méthodologiques • Fonds monétaire international (FMI) (2009), Balance of Payments and International Investment Position Manual, 6ème édition, FMI, Washington DC. • OCDE, et al. (2002), Manual on Statistics of International Trade in Services, Les Nations-Unies. Bases de données en ligne • Principaux indicateurs économiques • Perspectives économiques de l’OCDE : statistiques et projections Sites Internet • Sources & méthodes des Perspectives économiques de l’OCDE, www.oecd.org/fr/eco/perspectives/sources-etmethodes.htm. PANORAMA DES STATISTIQUES DE L’OCDE 2014 © OCDE 2014 MONDIALISATION • IDE ET BALANCE DES PAIEMENTS BALANCE DES PAIEMENTS Balance des opérations courantes En pourcentage du PIB Allemagne Australie Autriche Belgique Canada Chili Corée Danemark Espagne Estonie États-Unis Finlande France Grèce Hongrie Irlande Islande Israël Italie Japon Luxembourg Mexique Norvège Nouvelle-Zélande Pays-Bas Pologne Portugal République slovaque République tchèque Royaume-Uni Slovénie Suède Suisse Turquie UE-28 OCDE Afrique du Sud Brésil Chine Fédération de Russie Inde Indonésie 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 -1.8 -3.9 -0.7 4.0 2.5 .. 2.8 1.6 -4.0 -5.3 -4.0 7.7 1.4 -7.8 -8.6 -0.4 -10.1 -1.5 -0.5 2.5 13.5 -2.9 14.9 -4.5 2.0 -6.0 -10.4 -3.4 -4.6 -2.9 -2.9 4.2 11.7 -3.7 .. .. -0.1 -3.8 1.7 .. -1.0 4.8 0.0 -2.1 -0.8 3.4 2.1 .. 1.7 2.5 -4.0 -5.1 -3.7 8.4 1.8 -7.2 -6.1 -0.7 -4.6 -1.5 -0.1 2.1 8.8 -2.6 16.1 -2.0 2.6 -3.1 -10.3 -8.3 -5.1 -2.3 0.1 5.0 8.0 2.0 .. .. 0.3 -4.2 1.3 .. 0.3 4.3 2.0 -3.7 2.7 4.5 1.7 .. 1.3 2.8 -3.3 -10.6 -4.2 8.5 1.3 -6.5 -6.9 -1.1 1.5 -0.9 -0.8 2.8 10.2 -2.0 12.6 -3.5 2.6 -2.8 -8.2 -7.9 -5.4 -2.1 1.0 4.7 8.5 -0.3 .. .. 0.8 -1.3 2.4 .. 1.4 4.0 1.9 -5.4 1.7 3.4 1.1 -1.2 2.4 3.4 -3.5 -11.3 -4.5 4.8 0.7 -6.6 -8.0 0.0 -4.8 0.6 -1.3 3.2 8.3 -1.1 12.3 -3.7 5.5 -2.5 -6.4 -6.0 -6.0 -1.7 -0.8 6.9 12.9 -2.5 .. .. -1.0 0.7 2.6 8.4 1.4 3.5 4.6 -6.2 2.2 3.2 2.3 2.6 4.7 2.2 -5.3 -11.2 -5.1 6.0 0.5 -5.8 -8.6 -0.6 -9.8 1.4 -0.9 3.7 12.1 -0.9 12.7 -5.5 7.6 -5.3 -8.3 -7.8 -5.2 -2.0 -2.5 6.6 13.0 -3.6 .. .. -3.0 1.7 3.6 10.0 0.2 0.6 5.0 -5.9 2.2 2.0 1.8 1.5 2.2 4.3 -7.4 -9.9 -5.6 3.4 -0.5 -7.6 -7.4 -3.5 -16.2 3.1 -1.7 3.7 11.3 -1.0 16.5 -7.8 7.4 -2.4 -10.3 -8.5 -1.0 -1.8 -1.7 6.8 13.6 -4.4 .. .. -3.4 1.6 5.9 11.1 -1.2 0.1 6.2 -5.8 2.8 1.8 1.4 4.6 1.4 3.0 -9.0 -15.3 -5.8 4.1 -0.6 -11.4 -7.4 -3.6 -23.9 4.2 -2.6 3.9 10.1 -0.8 16.4 -8.1 9.3 -3.8 -10.7 -7.9 -2.0 -2.8 -1.7 8.7 14.4 -6.0 .. .. -5.3 1.2 8.5 9.7 -1.0 3.0 7.5 -6.7 3.5 1.9 0.8 4.2 2.1 1.3 -10.0 -16.0 -4.9 4.1 -1.0 -14.6 -7.2 -5.4 -16.1 3.5 -2.4 4.8 10.0 -1.4 12.5 -7.9 6.7 -6.2 -10.1 -5.2 -4.3 -2.2 -4.1 9.3 8.6 -5.8 .. .. -7.0 0.2 10.1 6.0 -0.6 2.4 6.2 -4.9 4.9 -1.3 0.1 -3.4 0.6 2.6 -9.6 -9.1 -4.6 2.6 -1.8 -14.9 -7.3 -5.6 -24.6 1.3 -2.9 3.3 5.4 -1.8 15.9 -8.7 4.3 -6.5 -12.6 -6.0 -2.1 -0.9 -5.5 9.0 1.7 -5.4 .. ..
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Etude du «temps» et de l’ «aspect» dans la langue arabe à travers les travaux de grammairiens français et arabes
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‫للدراسا ا‬ ‫اللغوياااا داية اااا‬ ‫المجلة مفهرسة في المواقع اآلتية‪:‬‬ ‫موقع المجلة‬ ‫موقع الجامعة‬ ‫–‬ ‫اإلشراف العام‪:‬‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬طــالــب طــاهر النه ـ ــاري‬ ‫رئيس التحرير‪:‬‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬عبــدالكريـم مصلح أحمد البحلة‬ ‫نائب رئيس التحرير‪:‬‬ ‫د‪ .‬عصام واصل‬ ‫مدير التحرير‪:‬‬ ‫أ‪.‬م‪.‬د‪ .‬فؤاد عبدالغني محمد الشميري‬ ‫املحررون‪:‬‬ ‫أ‪.‬م‪.‬د‪ .‬خضرمحمد أبو جحجوح (فلسطيسن)‬ ‫أ‪.‬م‪.‬د‪ .‬ألطاف إسماعيل الشامي (اليمن)‬ ‫أ‪.‬م‪.‬د‪ .‬علي بن جاسرالشايع (السعودية)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬أمين عبدهللا محمد اليزيدي (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬سعيد أحمد البطاطي (اليمن)‬ ‫أ‪.‬م‪.‬د‪ .‬علي حمود السمحي (اليمن)‬ ‫أ‪.‬م‪.‬د توفيق عبده سعيد الكناني (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬عاطف عبدالعزيز معوض (مصر)‬ ‫أ‪.‬م‪.‬د‪ .‬محمد البركاتي (السعودية)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬خالد يسلم بلخشر(اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬عبدالحميد سيف الحسامي (السعودية)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬نعيمة سعدية (الجزائر)‬ ‫التصحيح اللغوي‪:‬‬ ‫القسم اإلنجليزي‬ ‫القسم العربي‬ ‫ُ‬ ‫د‪ .‬عبدهللا علي الغ َبس ي‬ ‫د‪ .‬عبدهللا محمد خليل‬ ‫‪1‬‬ ‫الهيئة العلمية واالستشارية‪:‬‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬عبدالحميد بورايو (الجزائر)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬إبراهيم محمد الصلوي (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬إبراهيم تاج الدين (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬عبدالكريم أسعد قحطان (كوريا الجنوبية)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬أحمد علي األكوع (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬أحمد مقبل املنصوري (اإلمارات)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬عبدالكريم إسماعيل زبيبة (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬علوي الهاشمي (البحرين)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬إنعام داود سلوم (العراق)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬فكري عبداملنعم السيد النجار (اإلمارات)‬ ‫)‪Prof. Marie-Madeleine BERTUCCI (France) Prof. Panchanan Mohanty (India‬‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬جمال محمد أحمد عبدهللا (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬محمد أحمد شرف الدين (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬حافظ إسماعيلي علوي (املغرب)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬محمد خير محمود البقاعي (السعودية)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬حليمة أحمد عمايرة (األردن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬محمد عبداملجيد الطويل (مصر)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬حميد العواض ي (أمريكا)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬محمد محمد الخربي (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬حيدر محمود غيالن (قطر)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬منير عبده أنعم (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬رشيد بن مالك (الجزائر)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬نصر الحجيلي (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬سعاد سالم السبع (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬هاجد بن دميثان الحربي (السعودية)‬ ‫أ‪.‬م‪.‬د‪ .‬سالل أحمد املقطري (اليمن)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬هند عباس علي حمادي (العراق)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬سليمان العايد (السعودية)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬يحيى أحمد يحيى الصهباني (السعودية)‬ ‫أ‪.‬د‪ .‬عادل العنس ي (اليمن)‬ ‫‪2‬‬ ‫املسؤول املالي‬ ‫اإلخراج الفني‬ ‫علي أحمد حسن البخراني‬ ‫محمد محمد علي سبيع‬ ‫اآلداب‬ ‫للدراسات اللغوية واألدبية‬ ‫مجلة علمية فصلية محكمة‬ ‫تصدر عن كلية اآلداب‬ ‫جامعة ذمار‪ ،‬ذمار‪،‬‬ ‫الجمهورية اليمنية‪.‬‬ ‫العدد (‪)13‬‬ ‫مارس ‪2022‬م‬ ‫‪ISSN:2707-5508‬‬ ‫‪EISSN: 2708-5783‬‬ ‫الترقيم املحلي‪:‬‬ ‫(‪)2020 - 1631‬‬ ‫جميعا ً‬ ‫ً‬ ‫مجانا بدون أي مقابل للمستفيد أو الجهة‬ ‫هذه الدورية إحدى دوريات الوصول الحر‪ ،‬تتاح محتوياتها‬ ‫املنتمي إليها‪ ،‬ويسمح للمستفيد بالقراءة والتحميل والنسخ والتوزيع والطباعة والبحث ومشاركة النص الكامل‬ ‫للمقاالت‪ ،‬واستعمالها ألي غرض آخر قانوني دون الحاجة إلى تصريح مسبق من الناشر أو املؤلف‪ .‬بموجب‬ ‫ترخيص‪. Commons Attribution 4.0 International License :‬‬ ‫‪3‬‬ ‫تصدرمجلة "اآلداب" العلمية املحكمة‪ ،‬عن كلية اآلداب‪ ،‬جامعة ذمار‪ ،‬بالعربية واإلنجليزية والفرنسية‪ ،‬وفقا للقواعد اآلتية‪:‬‬ ‫‪ -1‬أن تتسم األبحاث باألصالة واملنهجية العلمية السليمة‪.‬‬ ‫‪ -2‬أن تخضع البحوث للتحكيم العلمي حسب األصول العلمية املتبعة‪.‬‬ ‫‪ -3‬تكتــب البحــوث بلغــة ســليمة‪ ،‬وتراعــى فيهــا قواعــد الضــب ودقــة األشــكال ‪-‬إن وجــدت‪ -‬بصــيغة (‪ ،)Word‬بحجــم (‪ ،)14‬وبخـ‬ ‫(‪ )Simplified Arabic‬بالنسبة إلى األبحاث باللغة العربية‪ ،‬وبخـ (‪ )Times New Roman‬لألبحــاث باإلنجليزيــة والفرنســية‪،‬‬ ‫وتكون العناوين الرئيسة بخـ غــامق‪ ،‬وبحجــم (‪ .)16‬علــى أن تكــون املســافة بــين األســطر (‪1،5‬ســم)‪ ،‬وهــوام( (‪2،5‬ســم) مــن‬ ‫كل جانب‪.‬‬ ‫‪ -4‬أن يصحح لغويا من قبل الباحث‪.‬‬ ‫‪ -5‬أن يرفق معه ملخصان بالعربية واإلنجليزية‪ ،‬على أال يتعدى كل منهما الـ‪ 200‬كلمة في فقرة واحدة‪ ،‬ويشتمالن على‬ ‫العناصر اآلتية‪ :‬املوضوع‪ ،‬املنهجية‪ ،‬والنتائج‪ ،‬ويرفق معهما كلمات مفتاحية بحيث تتراوح بين ‪ 6-4‬كلمات باللغتين‪.‬‬ ‫‪ -6‬أن يرفق معه ترجمة لعنوان البحث‪ ،‬والوصف الوظيفي للباحث‪ ،‬واملؤسسة التي ينتمي إليها‪ ،‬والبريد اإلليكترونى‬ ‫الخاص به‪.‬‬ ‫‪ -7‬ال يتجاوز البحث (‪ )30‬صفحة‪ ،‬بما فيها األشكال والجداول واملالحق‪ ،‬وفي حال الزيادة يدفع الباحث ألف ريال يمني عن كل‬ ‫صفحة‪.‬‬ ‫‪ -8‬توثق الهوام( في نهاية األبحاث على النحو اآلتي‪:‬‬ ‫أ‪ -‬املخطوطات‪ :‬اسم املؤلف‪ ،‬عنوان املخطوط‪ ،‬مكان حفظه‪ ،‬رقمه‪ ،‬الورقة‪.‬‬ ‫ب‪ -‬الكتب‪ :‬اسم املؤلف (املؤلفين)‪ ،‬عنوان الكتاب‪ ،‬بلد النشر‪ ،‬ومكانه‪ ،‬وتاريخه‪ ،‬الطبعة‪ ،‬الصفحة‪.‬‬ ‫ج‪ -‬الدوريات‪ :‬اسم املؤلف‪ ،‬عنوان املقال‪ ،‬اسم املجلة‪ ،‬رقم العدد وتاريخه‪ ،‬الناشر‪ ،‬الصفحة‪.‬‬ ‫د‪ -‬الرسائل الجامعية‪ :‬اسم صاحب الرسالة‪ ،‬عنوانها‪ ،‬القسم‪ ،‬الكلية‪ ،‬والجامعة‪ ،‬تاريخ إجازتها‪ ،‬الصفحة‪.‬‬ ‫‪ -9‬ترسل األبحاث بصيغتي ‪ Word‬و‪ PDF‬باسم رئيس التحرير على البريد اإللكتروني للمجلة‪[email protected] :‬‬ ‫‪ -10‬تتولى املجلة إبالغ الباحث باستالم بحثه‪ ،‬وقرار املحكمين حول صالحيته للنشر من عدمه‪ ،‬أو إجراء التعديالت‪ ،‬ورقم‬ ‫العدد الذي سوف ينشر فيه‪.‬‬ ‫‪ -11‬ترتب األبحاث عند النشر حسب تاريخ ورودها إلى املجلة‪.‬‬ ‫ً‬ ‫‪ -12‬يدفع الباحثون من داخل اليمن أجور النشر البالغة (‪ )25000‬ريال يمني‪ ،‬ومن خارج اليمن (‪ً )150‬‬ ‫دوالرا أمريكيا أو ما‬ ‫يعادلها‪ ،‬في حين يدفع أعضاء هيئة التدريس في جامعة ذمار مبلغا وقدره (‪ )15000‬ريال يمني‪ ،‬كما يدفع الباحث أجور‬ ‫إرسال النسخ الورقية من العدد‪.‬‬ ‫‪ -13‬تورد املبالغ إلى حساب رقم (‪ )211084‬في البنك التجاري اليمني ‪ -‬فرع ذمار‪ ،‬الجمهورية اليمنية‪ .‬وال يعاد املبلغ إذا رفض‬ ‫البحث من قبل املحكمين‪.‬‬ ‫لالطالع على األعداد السابقة يرجى زيارة موقع املجلة عبر الراب اآلتي‪http://jthamararts.edu.ye :‬‬ ‫عنوان املجلة‪ :‬كلية اآلداب ‪ -‬جامعة ذمار‪ ،‬هاتف (‪.)00967509584‬‬ ‫العنوان البريدي‪ :‬ص‪.‬ب (‪ ،)87246‬كلية اآلداب ‪ -‬جامعة ذمار‪ .‬ذمار‪ ،‬الجمهورية اليمنية‪.‬‬ ‫‪4‬‬ ‫•‬ ‫•‬ ‫•‬ ‫ٌ‬ ‫اءة في تركيب (الس َّيما) مع تحقيق رسالة َ"ك ْشف َ‬ ‫العما عن معاني ِ َّ‬ ‫للم ْزجاجي (ت‪1265.‬هـ)‬ ‫قر‬ ‫ِ‬ ‫السيما" ِ‬ ‫د‪ .‬محمد عادل شوك‪7..................................................................................................................................................‬‬ ‫ّ‬ ‫ّ‬ ‫النحويين‬ ‫املشبه باملفعول به في استعمال بعض‬ ‫د‪ .‬فهد بن عبد هللا الخلف‪46..........................................................................................................................................‬‬ ‫الترجمة اآللية إشكاالت لسانية حاسوبية في الضمير واملوصول والزمن النحوي‬ ‫د‪ .‬يحيى بن أحمد عبدهللا اللتيني‪62.................................................................................................................................‬‬ ‫•‬ ‫املعارضات األدبية في مرآة النقد‪ -‬قراءة في نموذج أدبي أندلس ي‬ ‫د‪ .‬ليلى سالم البدراني‪83...............................................................................................................................................‬‬ ‫•‬ ‫عتبات النص في نفح الطيب من غصن األندلس الرطيب ‪ -‬مقاربة سيميائية‬ ‫د‪ .‬فاطمة بنت جابراملسهري‪108....................................................................................................................................‬‬ ‫العتبات النصية في ديوان (دفتر من أرق) لعبد الرحمن العتل‬ ‫د‪ .‬أمل بنت محسن العميري‪138.....................................................................................................................................‬‬ ‫ّ‬ ‫ّ‬ ‫ثنائية البصر والبصيرة في ديوان (هوام( الذات)‬ ‫•‬ ‫•‬ ‫•‬ ‫•‬ ‫•‬ ‫•‬ ‫•‬ ‫•‬ ‫•‬ ‫د‪ .‬حمود بن محمد النقاء‪167.........................................................................................................................................‬‬ ‫ْ‬ ‫َ َ َّ‬ ‫يم َّي ِة َع ْمرو ْبن َب َّر َاقة َ‬ ‫اله ْم َدا ِن ّي‬ ‫وب ِفي ِم ِ‬ ‫جم ِاليات األسل ِ‬ ‫ِ‬ ‫ّ‬ ‫َ ُْ ُ َ‬ ‫ايد الش َم ِر ّي‪207...........................................................................................................................................‬‬ ‫د‪ .‬ف َّوازبن ز ٍ‬ ‫جماليات املكان في ديوان (يا دارمية) ليوسف حسن العارف‬ ‫د‪ .‬إبراهيم عمرعلي املحائلي‪234.....................................................................................................................................‬‬ ‫البعد ّ‬ ‫النفس ي في رواية رائحة الفحم لعبد العزيز الصقعبي‬ ‫د‪ .‬صالح بن سالم الحارثي‪ ،‬د‪ .‬زياد محمود مقدادي‪277....................................................................................................‬‬ ‫سيميائية الشخصية في رواية (ألف امرأة في جسدي)‬ ‫أماني عبدهللا عبدالرحمن القرني‪318.............................................................................................................................‬‬ ‫تجليات التراث الشعبي في رواية (فئران ّأمي حصة) لسعود السنعوس ي‬ ‫جراح بن أحمد بن راكان الشمري‪353..............................................................................................................................‬‬ ‫ّ‬ ‫الرقمي‬ ‫توظيف قصص األطفال في األدب‬ ‫د‪ .‬أمل بنت محمد التميمي‪391.......................................................................................................................................‬‬ ‫كينونة النص األدبي الرقمي في ضوء (غرف ومرايا) ِل َلب ْي َبة ّ‬ ‫خمار‪ -‬رؤية أنطولوجية‬ ‫ِ‬ ‫د‪ .‬هدى عبدالرحمن الدريس‪424....................................................................................................................................‬‬ ‫•‬ ‫اتجاهات الدارسات السعوديات أثناء تعلمهن اللغة اإلنجليزية بوصفها لغة ثانية نحو التواصل في القاعات الدراسية‬ ‫املختلطة في الواليات املتحدة‬ ‫د‪ .‬خلف نايف الحربي‪7................................................................................................................................................‬‬ ‫•‬ ‫دراسة تحليلية للوقت واملظهرفي اللغة العربية ومقارنتهما بمفهوم الوقت في اللغة الفرنسية‬ ‫د‪ .‬طالل املرزوقي ‪31.....................................................................................................................................................‬‬ ‫‪5‬‬ 6 Etude du «temps» et de l’ «aspect» dans la langue arabe à travers les travaux de grammairiens français et arabes Dr. Mots clés : aspect, temps, achevé, inachevé, système verbal arabe, accompli, inaccompli. Professeur assistant en linguistique, Section des langues européennes, Faculté des arts, Université Roi AbdulAziz, Arabie saoudite 31 * DOI: 10.53286/2118-000-013-016 An Analytical Study of" Time "and" Aspect "in Arabic Language, Comparing them to “Time” in French Dr. Talal Al-Marzoqi* [email protected] Received on: 08/09/2021 Accepted on: 10/12/2021 Abstract: The research aims to address the linguistic tense in Arabic language and its concept, comparing it with the concept of time in French language. When looking at French language, we find that linguists classify eight linguistic tenses that can be clearly expressed. As for Arabic language, linguists only mention two forms: the perfect and the non-perfect, so that it has become common for French linguists to classify the actual system in Arabic language as a system that depends on ‘aspect’ and not on time. Ancient and contemporary linguists, as well as orientalists, differed in defining these two forms. Sometimes they give them a time value and some other times they give them an aspect value. Based on our belief in the importance of this aspect for language scholars or translators, we will present a historical, analytical, critical and theoretical study of this subject, which is still controversial, despite the attempt of some linguists to address it. Keywords: Aspect, Tense, Perfect Tense, Non-perfect Tense, Actual System. Assistant Professor in Linguistics, European Languages Section, Faculty of Arts, King Abdulaziz University, Saudi Arabia. * 32 ‫دراسة تحليلية للوقت واملظهرفي اللغة العربية ومقارنتهما بمفهوم الوقت في اللغة الفرنسية‬ ‫د‪ .‬طالل املرزوقي‬ ‫*‬ ‫‪[email protected]‬‬ ‫تاريخ االستالم‪2021/09/08 :‬م‬ ‫تاريخ القبول‪2022/12/10 :‬م‬ ‫ملخص‪:‬‬ ‫يهدف البحث إلى تناول الزمن اللغوي في اللغة العربية ومفهومه‪ ،‬ومقارنته بمفهوم الزمن في‬ ‫اللغة الفرنسية‪ .‬فعندما ننظر إلى اللغة الفرنسية نجد أن اللغويين يصنفون ثمانية أزمنة لغوية‬ ‫يمكن التعبير عنها بوضوح‪ ،‬أما في اللغة العربية فاللغويون ال يذكرون إال شكلين‪ ،‬هما‪ :‬التام‪ ،‬وغير‬ ‫التام‪ ،‬حتى أنه أصبح من املألوف لدى اللغويين الفرنسيين تصنيف النظام الفعلي في اللغة العربية‬ ‫نظاما يعتمد على املظهر)‪ (aspect‬وليس على الوقت‪ .‬وقد اختلف علماء اللغة القدماء واملعاصرين‪،‬‬ ‫وأيضا املستشرقين في تعريف هذين الشكلين‪ ،‬فتارة يعطونهما قيمة زمنية وتارة أخرى يعطونهما‬ ‫قيمة مظهرية )‪ .(aspectuelle‬وقد تم تقسيم البحث إلى ثالثة أقسام‪ ،‬هي‪ :‬اللغويون العرب القدماء‪,‬‬ ‫واملستشرقون‪ ،‬واللغويون العرب املعاصرون‪ .‬وانطالقا من إيماننا بأهمية هذا الجانب بالنسبة‬ ‫لدارس ي اللغة أو املترجمين‪ ،‬فسوف نقوم بطرح دراسة تاريخية وتحليلية ‪ -‬نقدية ونظرية لهذا‬ ‫املوضوع الذي ما زال موضع خالف‪ ،‬رغم محاولة بعض اللغويين معالجته‪.‬‬ ‫الكلمات املفتاحية‪ :‬املظهر‪ ,‬الزمن‪ ,‬التام‪ ,‬غير التام‪ ,‬النظام الفعلي‪.‬‬ ‫* أستاذ اللغويات املساعد ‪ -‬قسم اللغات األوروبية ‪ -‬كلية اآلداب ‪ -‬جامعة امللك عبدالعزيز ‪ -‬اململكة العربية السعودية‬ ‫‪33‬‬ Introduction: Le système verbal de la langue arabe n’est pas organisé de la même manière qu’en français. Si en français on relève un minimum de huit formes verbales (présent, passé composé, imparfait, plusque-parfait, futur simple, conditionnel présent, conditionnel passé, passé simple) morphologiquement distinctes, en arabe les linguistes ne distinguent que deux formes: accompli (forme suffixée) et inaccompli (forme préfixée). A ces deux formes, les grammairiens arabes et les arabisants ont donné différentes interprétations selon leurs valeurs tantôt temporelles (les grammairiens arabes), tantôt aspectuelles (les arabisants). Autrement dit, les premiers voient le système verbal de la langue arabe dans le temps et les seconds le voient dans l’aspect. Cet article se propose de donner une vision générale sur les études réalisées au sujet du système verbal de l’arabe et de mettre en valeur les arguments linguistiques avancés antérieurement par les grammairiens arabes (anciens ou modernes) et les sémitisants pour défendre leur point de vue. Egalement, nous essayerons d’éclairer le lecteur à propos du fonctionnement du système verbal de la langue arabe. Nous nous limiterons ainsi à trois axes que nous estimons représentatif à cet égard: premièrement, la grammaire classique qui représente l’état primitif de la recherche sur le système verbal arabe. Deuxièmement, les sémitisants et leurs recherches sur ce système. Et troisièmement, les travaux réalisés par les grammairiens arabes durant la deuxième moitié du XX e siècle. Dans cette étude des trois axes, la dimension historique mais surtout l’évolution interne de la recherche grammaticale en rapport avec le temps et l’aspect seront prises en considération. Ainsi on analysera trois principales interprétations du verbe: d’abord, l’interprétation temporelle que l’on retrouve chez les anciens grammairiens arabes dont le concept grammatical était tourné vers l’idée de temps, ensuite l’interprétation aspectuelle faite par les sémitisants, et enfin, 34 l’interprétation tantôt temporelle tantôt aspectuelle comme on les retrouve dans les nouveaux travaux sur la langue arabe. • Les anciens grammairiens arabes et la conception temporelle: Il existe deux principaux courants linguistiques que l’on peut qualifier d’écoles dans le monde arabe: l’école de Bassora représentée par SĪBAWEIHI et l’école de Kouffa que nous présenterons ici à travers les travaux d’AL FARRÁ. 1.1. L’école de Bassora à travers les écrits de SĪBAWEIHI (765-797) Dans son livre intitulé le Kitāb (le livre), SĪBAWEIHI cite les trois parties du discours (le nom, le verbe et la particule), et ajoute que «les verbes ou "actions" sont des schèmes tirés de la prononciation des faits des noms»(1). D’après lui les verbes sont dérivés des noms d’action ou maşdar et expriment: 1- Ce qui est passé. 2- Ce qui adviendra et n’est pas arrivé. 3- Ce qui advient et n’a pas cessé. Autrement dit, le passé, le futur et le présent. Selon SĪBAWEIHI, il y a deux traits essentiels qui caractérisent le verbe: premièrement, tout verbe exprime un procès et deuxièmement, tout procès est situé dans le temps, c’est-à-dire, un passé, un présent ou un futur. Le verbe réfère au temps, ex.:dahaba (il est parti) désigne un procès dans ce qui est passé du temps, et sa-yadhabu (il partira) désigne ce qui adviendra dans le temps. Le verbe est ainsi défini par deux traits: il exprime un procès et il le situe dans le temps. SĪBAWEIHI insiste sur l’importance et la priorité de la temporalité dans le verbe. Le verbe est fait pour ce qui est passé (du temps) et ce qui n’en est pas passé ; il situe le procès dans le temps et il signifie que le nom d’action s’est réalisé et c’est le procès. Enfin, lorsqu’il parle du procès, il le spécifie comme passé ou non passé et non pas comme achevé ou inachevé. 35 Dans la même veine, dans un paragraphe consacré à ce qui est correct dans la langue, SĪBAWEIHI cite les deux exemples suivants comme corrects et bons: 1- " átay – tu - ka áms" Suis venu-je -toi hier "Je suis venu chez toi hier" 2- « sa - átī -ka ġadan" Modalité future- je viens-toi demain "Je viendrai chez toi demain"(2). Il ajoute également que les deux phrases suivantes sont incorrectes parce qu’elles sont contradictoires: 3- *" atay - tu - ka ġadan" suis venu –je -toi demain "Je suis venu chez toi demain" 4- * " sa -átī -ka áms" Modalité future –je viens-toi hier "Je viendrai chez toi hier". Dans les deux derniers exemples, le grammairien arabe a remarqué l’incompatibilité de la forme accomplie de ataytu (je suis venu) avec l’autonome temporel ġadan (demain), ainsi que l’incompatibilité de la forme sa –àtī-ka (je viendrai) qui est constituée de la modalité sa du futur avec la forme inaccomplie àtī-ka et l’autonome temporel du passé àms (hier): c’est pourquoi il les a jugés incorrects. 36 On constate que SĪBAWEIHI a vu essentiellement une expression temporelle dans les formes verbales ou "schèmes". Cela se reflète surtout dans la classification basée sur des valeurs temporelles qu’il a réalisée: Pour ce qui est passé on emploie mādī (le passé). Il s’agit de la forme à désinences suffixées (l’accompli). Pour ce qui adviendra et n’est pas arrivé on emploie le mudāriε le (présent) et le āmr. Le mudāriε est la forme à désinences préfixées (inaccompli), le āmr est celle de l’impératif. Pour « ce qui advient et n’a pas cessé », on emploie le mudāriε. Ainsi, le mādī exprime le passé et le mudāriε exprime le présent et le futur. Et le āmr (impératif) est pris aussi comme un temps futur alors que c’est un mode. 1.2. L’école de Kouffa à travers les écrits d’AL FARRÁ (IXe siècle) L’origine du verbe et les temps de l’arabe selon l’école de Kouffa, ne sont pas ceux que l’on retrouve dans l’école de Bassora. L’un des principaux représentant de l’école de Kouffa, AL FARRÁ, pense qu’il existe une troisième forme verbale a côté des deux autres formes (faεala /yafεalu) citées par tous les grammairiens avant lui. Il s’agit de la forme en fāεil. Ainsi, selon lui, le temps est exprimé en arabe par les trois formes verbales suivantes: 1- « Le « mādī exprime le temps passé. 2- Le mudāriε réfère aux temps présent et futur, 3- Le dā’im (c’est la forme du participe actif du verbe dont le schème est: cύcvc, ex. (fāεil) (faisant) et qui semble correspondre au "permansif" »3. Ceci constitue la principale nouveauté d’AL FARRÁ, qui a été selon Al- mahzūmī reprise par tous les grammairiens de l’école de Bassora, et même par certains grammairiens de la période 37 contemporaine. Car les grammairiens de l’école de Bassora considèrent que cette forme ajoutée par AL FARRÁ (le participe actif fāεil), est rattachée au nom et non pas au verbe. En fait, c’est la confusion entre modes et temps qui a provoqué cette polémique sur le participe mais aussi sur l’impératif. 2. Le système verbal dans les études des sémitisants Le terme aspect a été appliqué à l’arabe pour la première fois par H. Reckendorf en 1895. La majorité des sémitisants ont repris cette acception tout en y ajoutant la dichotomie: accompli/ inaccompli. • La forme verbale à indices personnels suffixés dite à l’accompli exprime une action achevée (ex.: ‘akal-ta,"tu as mangé" où l’indice personnel -ta est suffixé). • La forme à des indices personnels préfixés ou discontinues dite à l’inaccompli exprime une action inachevée (ex.:ta ‘kulu -2ème personne masculin singulier, traduit par "tu manges", où ta- est préfixé au lexème verbal). Dans ce qui suit, nous présenterons brièvement le point de vue de quelques sémitisants qui me semble représentatif sur cette question. 2.1. Marcel Cohen Dans son livre intitulé Le système verbal sémitique et l’expression du temps (1924), Marcel Cohen étudie la question de l’aspect et du temps en langues sémitiques. Sur le système verbal sémitique en général: «Deux oppositions ressortent avec netteté, la première consiste en ceci: il y a d’une part des formes qui expriment un commandement ou une impulsion (impératif, jussif), d’autre part des formes destinées surtout à l’énonciation (soit dans une proposition indépendante, soit dans celles des propositions subordonnées qui construisent ce qu’on peut appeler dans l’ensemble le système de l’indicatif. 38 La seconde opposition est intérieure au système de l’indicatif. Il s’y rencontre deux formes qu’on dénomme en général, d’une manière impropre, des temps, ces formes servent à distinguer deux aspects de l’action, qui sont l’accompli et l’inaccompli»(4). Selon lui le système verbal sémitique est caractérisé par deux oppositions, la première opposition est modale (impératif, indicatif) et la seconde est aspectuelle concernant l’indicatif même (accompli, inaccompli). Ainsi ces deux formes de base (accompli, inaccompli) semblent caractériser l’ensemble du sémitique. Il émet même l’hypothèse qu’il n’existe à l’origine des langues sémitiques qu’une seule forme (celle de l’imparfait) et que la seconde forme n’est apparue que plus tard « (...) une forme est commune à presque toutes les langues et elle seule peut être attribuée sûrement au sémitique commun (et sans doute au chamito-sémitique), c’est la forme d’imparfait. Le fait notable qui vient d’être exposé incite à faire l’hypothèse suivante: le sémitique commun, au lieu de deux formes, n’en avait qu’une, à désinences personnelles préfixées, dépourvue de la distinction entre accompli et inaccompli»(5). Parallèlement, M. Cohen confirme l’existence du temps en langues sémitiques, et émet l’hypothèse de l’évolution du système verbal sémitique après la période "ancienne", de l’expression de l’aspect vers l’expression du temps: «Si on observe le développement de chacune des langues après la période ancienne, on voit que, grâce à des innovations diverses, la notion de temps situé y est en fin de compte plus ou moins exprimée par le verbe. Les instruments employés à cet usage ont été soit les anciennes formes simples, parfait et imparfait, soit des formes nouvelles, surtout des temps composés»(6). En bref, le grammairien français défend l’hypothèse de la coexistence de l’aspect et du temps en sémitique. Pour lui l’opposition "accompli / inaccompli" constitue le point de départ essentiel, de cette dichotomie. Il tire deux formes temporelles parfait et imparfait qui marquent respectivement l’achèvement et l’inachèvement du procès dans un temps quelconque. 39 En outre, M. Cohen souligne la fonction aspectuelle et temporelle que peut avoir la dichotomie (forme suffixée/forme préfixée). Selon lui « le parfait a été senti depuis longtemps comme appartenant surtout au domaine du passé: les actions achevées ne sont-elles pas, en grande majorité, situées dans le temps écoulé? C’est ainsi que le parfait arabe, constamment employé dans les récits, fait dans l’ensemble (mais non exclusivement) figure de passé (…) l’imparfait est plus embarrassant, puisqu’il a généralement, du point de vue de temps, une valeur principale double: présent et futur, et, en outre, des emplois de passé»(7). 2.2. Henri FLEISCH Le système du verbal arabe établi par Henri Fleisch est différent de celui de M. Cohen. H. Fleich signale que « le temps ressort de la phrase, il est exprimé subsidiairement par différents éléments de la phrase autres que le verbe. L’expression du temps en temps que tel demeure extérieure au verbe en temps que tel»(8). On constate alors un détachement du temps à l’aspect, car il reprend cette classification et y introduit une troisième formule après avoir éliminé la valeur temporelle de la forme suffixée, et la valeur itérative de la forme préfixée, considérées généralement comme temporelles: 1- « En principe, l’accompli énonce un procès achevé. 2- En principe, l’inaccompli énonce un procès (état ou action) en cours de réalisation. 3- En principe, le temps ressort de la phrase »(9). Puisqu'en tête de chaque affirmation se trouve la précision « en principe », se trouve-t-il d’autres valeurs attachées aux deux formes de l’arabe ? Si oui, quelles sont ces valeurs ? Dans cette citation, on relève également une coupure entre temps et aspect. Le grammairien insiste sur le fait que les deux formes expriment l’aspect, alors que le temps ressort du contexte. En 40 effet, H. Fleisch dans cette étude (1957) défend une idée contradictoire à celle développée dans ses études ultérieures (1974), où il adopte la distinction histoire/discours introduite par Benveniste. Il a modifié son principe d’atemporalité de départ, comme on le voit dans la phrase suivante: «l’accompli est la forme verbale du récit historique. Il a donc par lui-même, en ce cas, une valeur de temps passé, celle d’un aoriste»(10). Les différentes remarques qu’il a faites sur l’accompli et l’inaccompli peuvent mieux nous éclairer la pensée de cet auteur: • L’accompli: Bien que H. Fleisch parte de l’idée que la catégorie de l’aspect domine l’arabe, il affirme de l’autre côté que cette langue couvre le temps dans ses grandes divisions: passé, présent et futur. En distinguant "récit" et "discours", comme faisait E. Benveniste pour le français, H. Fleisch s’aperçoit que dans le récit, l’accompli finit par constituer un temps et exprime par lui-même un passé. Alors que « dans le discours, l’aspect retrouve son égalité d’expression avec le temps passé: le procès est alors normalement situé sur les deux plans: celui du temps passé et celui de l’aspect: l’accompli»(11). Parallèlement, selon H. Fleish, l’aspect dans le discours peut avoir deux valeurs: soit l’accompli, soit le résultatif. H. Fleisch montre le problème qui se pose à l’arabe: celui qu’un seul signifiant peut renvoyer à deux signifiés. Par exemple, la forme suffixée en arabe qui exprime l’aspect accompli exprime aussi le temps passé. Il confond toutefois ce qui est grammatical (aspect grammatical: accompli) avec ce qui est lexical (aspect lexical: résultatif). Enfin, il semble que la distinction faite par H. Fleisch entre discours et récit est très avantageuse pour distinguer les valeurs aspectuelles et temporelles des deux formes arabes (forme suffixée / forme préfixée). Cependant l’auteur ne montre pas assez les critères qui permettent de savoir dans quelles positions la forme suffixée donne un temps ou un aspect /temps. 41 • L’inaccompli: Comme signalé plus haut d’après H. Fleisch l’inaccompli n’exprime que l’aspect inaccompli alors que le temps ressort de la phrase. L’auteur ajoute qu’« avec l’inaccompli, les choses sont plus simples: la langue arabe dissocie temps et aspect, le procès est uniquement situé sur le plan de l’aspect, le temps ressort de la phrase et le temps à considérer ici sont d’abord le présent et le futur»(12). Enfin, le grammairien affirme que le temps relève de la phrase. Il suggère implicitement l’existence d’une affinité entre l’inaccompli et le temps présent. En réalité, l’inaccompli est un aspect qui exprime un procès en cours de réalisation, on l’emploie ainsi en discours. Cet aspect coïncide avec le moment de l’énonciation. L’inaccompli « est compris spontanément comme se déroulant dans le présent»(13) conclut-il. 2.3. Silvestre de Sacy Dans son livre intitulé Grammaire Arabe A l’usage Des Elèves De L’école Spéciale , S. de Sacy rejoint la vision des grammairiens arabes en donnant des valeurs temporelles aux deux formes arabes (forme suffixée /forme préfixée). Il dit que « les deux formes temporelles des verbes ont par ellesmêmes des valeurs déterminées, l’une signifiant le passé, l’autre le présent ou le futur»(14). S. de Sacy dépasse même la vision des grammairiens arabes quand il attire l’attention vers un point important longtemps négligé par ces derniers: l’existence des "temps composés" « qui sont formés par l’addition du verbe substantif kāna (être). Le prétérit du verbe kāna, joint au prétérit d’un verbe quelconque, lui donne la signification du plus-que-parfait, ou prétérit antérieur: j’avais lu »(15). D’après S.de Sacy « le verbe indique essentiellement l’existence du sujet avec relation à un attribut. Cette existence et cette relation sont ou passées, ou présentes, ou futures (…). Mais l’existence d’un sujet et sa relation à un attribut peuvent encore être considérées par rapport à d’autres époques: et de là naissent des temps relatifs, des passés et des futurs antérieurs et postérieurs ; ce qui multiplie les formes dont les verbes sont susceptibles pour indiquer les circonstances du temps» (16). D’après lui, 42 il existe deux temps simples, auxquels on peut joindre quelques temps composés dans la langue arabe. Il nomme "prétérit" la première forme des temps simples normalement nommé en arabe madi, c'est-à-dire, passé. Quant à la seconde connue comme modariε en arabe, elle est qualifiée d’"aoriste" par S. de Sacy. Bien que le nom modariε signifie normalement: « semblable, parce qu’il a différents accidents qui lui sont communs avec le nom: il est susceptible d’indiquer par lui-même le présent ou le futur (…): je nommerai ce temps, à cause de sa double destination, aoriste, mot dérivé du grec, qui signifie indéfini» (17) écrit-il. Enfin, S.de Sacy attire l’attention sur la complexité de l’expression temporelle en arabe. Effectivement, la question du temps en arabe est difficile à traiter. Ainsi, le grammairien a-t-il ressenti toute la difficulté qu’on rencontre quand on veut étudier le système temporel de l’arabe, difficulté que les grammairiens ont passée sous silence et à laquelle ils ne se sont pas arrêtés. 3. L’analyse du temps vu par les grammairiens modernes arabes Nombreux sont les grammairiens et linguistes arabes modernes qui se sont opposés à l’idée fort répandue chez les sémitisants. D’après ces derniers, l’arabe ne possèderait pas un système temporel mais seulement un système aspectuel. Les positions des grammairiens modernes constituent la deuxième étape de la réflexion sur le statut de la notion de verbe en arabe. Leurs opinions, à part de rares exceptions, ne diffèrent pas de celles des anciens. A la lecture des travaux des grammairiens modernes arabes, on constate que leurs réactions diffèrent l’un de l’autre. Ils se divisent ainsi: 1. Les grammairiens qui rejettent catégoriquement l’idée de l’absence du temps en arabe, et l’interprétation aspectuelle de la valeur des deux formes arabe. 2. Les grammairiens qui reprochent aux sémitisants de ne pas se pencher de plus près sur la langue pour analyser toutes les composantes du système verbal dans un cadre homogène. 43 3. Les grammairiens qui voient que les travaux des sémitisants une nouvelle perspective pour la recherche linguistique sur l’arabe. Ils reconnaissent l’existence d’une polarité temps /aspect qui parcourt le système verbal de l’arabe. C’est à travers les écrits de deux grammairiens modernes arabes, AL-MAHZūMī et Tamām Hāsān, que nous tenterons d’exposer ces divergences de points de vue. 3.1. AL-MAHZūMī: Réformiste plutôt que novateur, AL-MAHZūMī se réclame du courant Kouffa. Il pense que la vision des sémitisants peut être vraie pour les langues sémitiques à un état ancien et il attire l’attention sur le fait que le verbe n’est pas apte à exprimer seulement le temps mais qu’il peut aussi traduire l’achèvement ou non de l’action. AL-MAHZūMī critique les sémitisants surtout W. Wright qui, selon lui, a suivi le découpage des anciens grammairiens, croyant comme eux qu’il n’existait que deux formes dans le système verbal de l’arabe. Il lui reproche alors de ne pas avoir tenu compte des autres formes verbales dont la forme fāεil. Soulignant également que chez les anciens grammairiens arabes la division du temps grammatical n’obéit pas à la division du temps vécu, il demande de ne pas les confondre. Il souligne enfin l’insuffisance de la recherche sur le temps à partir des formes simples uniquement. Il faut prendre aussi en considération les formes composées d’après lui. A propos du verbe et les "temps", AL-MAHZūMī établit la classification suivante: • Le passé (le mādī) A. La forme (faεala) suffixée exprime: - Une action qui s’est déroulée dans un passé absolu (indéfini, non situé). - Une action qui s’est déroulée effectivement dans le passé et est susceptible de se répéter. 44 - Une action simultanée au discours. - Une action présentée comme si elle s’était effectivement déroulée, puisqu’il est certain qu’elle se déroulera. - Dans les procès comportant une bénédiction (ou une malédiction). B. La forme (qad faεala) qad + forme suffixée exprime: - Une action qui s’est déroulée dans un passé proche du présent. C. Les formes (kāna faεala / kāna qad faεala / qad kāna faεala) exprime un "passé lointain" ou en arabe (mādī baεīd). • Le présent (le hādīr) ou l’actuel A. La forme simple yafεalu exprime: - Une action qui se réalise au moment présent. - Une action qui se réalisera dans le futur. - Une vérité générale. - Une habitude, une règle générale. - Une action qui ne se produit pas dans un temps précis mais qui se produit dans tous les temps. - Une action postérieure à une action passée. B. La forme kāna yafεalu exprime - Une action durative dans le passé. Enfin AL-MAHZūMī représente la catégorie verbale du dā’īm (qui est un mode participial), comme un temps susceptible de traduire qu’une action se continue dans le passé ou dans le futur. Il suit ainsi l’école de Kouffa. 45 3.2. Tamām Hāsān Tamām Hāsān a analysé la question de l’aspect qu’il appelle al-jiha (littéralement: la direction, l’orientation "de l’événement"). Selon lui, l’aspect joue un rôle de différenciation entre les formes verbales qui expriment "le temps". Il distingue l’ambiguïté du mot "temps" et le fonctionnement des "temps" et de "l’aspect"18. Qu’est-ce que cela signifie donc ? En ce qui concerne le premier point, le grammairien évoque deux temps, le temps vécu et le temps grammatical. Alors que le premier «désigne une quantité mesurable par des unités précises telles que les secondes, minutes, heures, nuits, jours et mois, etc. (…) il ne peut en aucun cas intervenir pour préciser le rôle des formes verbales aussi bien seules qu’en contexte. Le temps grammatical en revanche est considéré comme faisant partie du verbe et lié à l’action, ce que n’est pas le temps vécu»(19). Ainsi, il divise le temps grammatical morphologiquement et contextuellement: 1- Le temps morphologique vu dans le contexte de la forme verbale seule. Trois termes verbaux, selon lui, caractérisent l’arabe: - La formefaεala exprime l’achèvement d’une action dans le passé. - La forme yafεalu marque la réalisation d’une action dans l’actuel ou le futur. - La forme ifεal a le même rôle que yafεalu. 2- Quant au fonctionnement du temps en contexte, l’auteur insiste beaucoup sur l’importance que doivent avoir les temps composés, notamment le rôle primordial que jouent les adverbes de temps. Il essaye d’établir diverses structures temporelles et aspectuelles avec chaque type de phrases (affirmative, interrogative, négative). Son analyse détaillée des formes verbales et de toutes leurs combinaisons lui a permis d’établir une classification basée sur les valeurs de temps mais également de l’aspect dans toutes les 46 constructions à caractère temporel. Soit, simples en faεala ou en yafεalu ou composées (combinaison du verbe à l’auxiliaire (kāna), à (qad), ou à des "semi-auxiliaires" du type māzāla (équivalent à "ne pas cesser"), kāda (équivalent à "faillir"), dalla (continuer, ne pas cesser). Mais ces nuances "aspectuelles" qu’il a dégagées, ne sont, pour bon nombre d’entre elles, que des "modes d’actions" qu’il n’a pas réussi à distinguer nettement de l’aspect proprement dit. Conclusion: Après la présentation des opinions diverses des grammairiens anciens et modernes ainsi que des sémitisants, on peut faire les remarques suivantes: tout d’abord, concernant les anciens, nous remarquons que les représentants des deux écoles Bassora et Kouffa s’accordent tous sur ce qui est relatif au verbe du point de vue morphologique. Quant à la division du verbe (temps), les deux écoles diffèrent surtout quand les grammairiens de l’école du Kouffa rejettent complètement un élément de la théorie des grammairiens de l’école du Bassora considérant l’impératif comme faisant partie de la grande division du temps: passé, présent et futur. Cette confusion entre temps et mode caractérise toutes les définitions des grammairiens du Bassora aussi bien les anciens que les modernes. De plus, les grammairiens arabes n’ont vu que des valeurs temporelles dans les deux formes de l’arabe. Ainsi en consultant les définitions des grammairiens arabes on peut considérer les valeurs temporelles comme essentiels. Par contre, ils ont ignoré l’aspect, et cela semble provenir du fait que l’aspect dans l’analyse des langues est une acquisition de la linguistique moderne. On constate par ailleurs que le concept de temps grammatical chez les grammairiens classiques n’est pas dissocié de son acception extralinguistique, les deux plans étant souvent mêlés. L’ambiguïté terminologique n’a pas cessé de créer de nombreux problèmes qui ne font qu’aggraver les choses et les compliquer. On a vu que les anciens établissent leur propre terminologie en attribuant au temps "présent", par exemple, deux termes distincts morphologiquement: hadir et hāl. Ils ont, en outre, mélangé ces derniers avec celui du dā’īm. 47 Il s’avère également que le découpage (passé, présent et futur), dans la grammaire traditionnelle ne dépend pas d’une perspective linguistique mais d’une vision extralinguistique. Autrement dit, certains grammairiens établissent la triple opposition, non par le fonctionnement des schèmes verbaux, mais par des critères extérieurs à la langue même. Quant à eux, le principal apport des études des sémitisants sur le système verbal de l’arabe est l’introduction de la dimension aspectuelle comme trait distinctif essentiel du système verbal. En guise de conclusion de la partie consacrée au point de vue des sémitisants, on peut retenir les points suivants: il y a une affinité entre l’accompli et le temps passé d’une part et l’inaccompli et le présent / futur d’autre part, cette affinité a été soulignée d'une manière directe ou indirecte par les trois sémitisants cités dans l’article. Les trois auteurs ne sont pas parvenus à systématiser cette affinité, parce que l’inaccompli ne réfère pas toujours au présent ou au futur, tandis que l’accompli renvoie le plus fréquemment au passé. De même, les "temps composés" sont négligés par eux, comme H. Fleich qui a insisté sur les deux formes simples de l’arabe et a ignoré les formes composées, imitant dans cette démarche les anciens grammairiens arabes. Seul M. Cohen a essayé d’aborder la question des "temps composés" en arabe. Chez les grammairiens modernes, l’importance accordée par les modernes aux formes composées est significative. Les composants temporels jouent, selon eux, un rôle capital pour la détermination des temps composés, ce qui n’est pas observé par les anciens. Toutefois, sur le fond, ils n’ont pas pris suffisamment de distance par rapport à la vision grammaticale classique. La démarcation avec la tradition ne couvre pas la totalité du phénomène du "temps" en arabe, en dépit des mises au point considérables telles la distinction entre "temps psychologique" et "temps grammatical" ou l’extension de l’expression temporelle aux "formes composées" etc. En ce qui concerne la notion d’aspect avancée et les travaux réalisés dans ce domaine par les sémitisants, les modernes ont réagi différemment. Certains ont réagi négativement, considérant comme (non 48 approfondie) l’interprétation aspectuelle des deux formes arabe faite par eux, ne reflétant pas la réalité de la langue arabe selon les modernes. D’autres ont choisi une démarche plus objective et plus ouverte aux opinions de ces sémitisants, ils n’ont cependant pas réussi à aller au-delà de la simple reconnaissance de l’existence de cette catégorie, ni à éviter l’amalgame entre l’aspect et les autres catégories comme le temps et mode d’action. Nous pouvons enfin dire que les différentes approches ont contribué à une meilleure compréhension du système verbal arabe, et aussi proposé un nombre considérable d’interprétations souvent adéquates. Ce présent travail n’est qu’une suite de leurs travaux, ils ont le mérite d’avoir mis le doigt sur les lacunes avant nous. S’il y a eu une certaine divergence en ce qui concerne l’analyse du système verbal de l’arabe à propos du temps et de l’aspect, c’est parce que ces derniers sont étroitement liés non seulement dans la langue arabe mais dans plusieurs autres langues. John Lyons affirme d’ailleurs qu’« il faut bien admettre qu’il n’y a pas, et saurait y avoir, en grammaire universelle, de distinction tranchée entre le temps et l’aspect »20. Dire que la langue arabe est une langue aspectuelle non temporelle est donc un point de vue très discutable, chaque langue exprime le temps à sa manière. Transcriptions 49 ‫ء‬ ‘ ‫ا‬ ā ‫ب‬ b ‫ت‬ t ‫ث‬ t ‫ج‬ j ‫ح‬ H ‫خ‬ h ‫د‬ d ‫ذ‬ d ‫ر‬ r ‫ز‬ z ‫س‬ s ‫ش‬ š ‫ص‬ S ‫ض‬ D ‫ط‬ T ‫ظ‬ z ‫ع‬ ε ‫غ‬ ġ ‫ف‬ f ‫ق‬ q ‫ك‬ k ‫ل‬ l ‫م‬ m ‫ن‬ n ‫ة‬ h ‫و‬ w ‫ي‬ y 50 Notes en bas de pages: (1) TROUPEAU, La notion de temps chez Sibawaih: 44. (2) Nous traduisons. (3) al- mahzūmī, Madrasatu al-kufati wa manhaguha fi dirasati al-lugati wa an-nahwi:107. (4) Cohen, Le système verbal sémitique et l’expression du temps:10. (5) Ibid, 16-17. (6) Ibid, 52. (7) Ibid, 53. (8) Fleisch, Etudes sur le verbe arabe:171. (9) Ibid: 170, 171. (10) Ibid: 13. (11) Ibid, 182. (12) Ibid: 184. (13) Ibid: 184. (14) De Sacy, Grammaire arabe à l’usage des élèves de l’école spéciale des langues orientales vivantes : 114. (15) Ibid: 148. (16) Ibid: 147, 148. (17) Ibid: 148. (18) Hāsān, Al-lugāh ālεārābyāh mεnāhā w mābnāhā, Mātbāεāt ālHayat alεāmmāh lilktub:240. (19) Ibid: 242. (20) Lyons, Sémantique linguistique, Librairie Larousse:310. Bibliographie 1) AL- MAHZUMI, Madrasatu al-kufati wa manhaguha fi dirasati al-lugati wa an-nahwi, Matbaεati almaεrifati, Bagdad, 1955. 2) COHEN, Le système verbal sémitique et l’expression du temps , Publications de l’école des langues orientales vivantes, Paris, 1924. 3) DE SACY SILVESTRE : Grammaire arabe à l’usage des élèves de l’école spéciale des langues orientales vivantes, institut du monde arabe, Paris,1986. 4) FLEISCH, 1- Etudes sur le verbe arabe. In Mélanges L.Massignon, 1957. 51 5) FLEISCH, Sur l’aspect dans le verbe en arabe classique, Revue Arabica, Leiden, 1974. 6) HASAN, Tammam, Al-lugāh ālεārābyāh mεnāhā w mābnāhā, Mātbāεāt ālHayat alεāmmāh lilktub, Le Caire, 1973. 7) FLEISCH,Traité de Philologie arabe, Dar El- Machreq, Beyrouth, 1986. 8) LYON, Sémantique linguistique, Librairie Larousse, 1990. 9) MESSAOUDI : Temps et aspect, Approche de la phrase simple en arabe écrit, Geuthner, Paris,1985. 10) MOURELATOS Alexander: Events, Processes and states. In linguistics and philosophy, Reidet Publishing company, Boston, vol2,1978. 11) RECKENDORF, Die Syntaktischen Verhaltnisse Des Arabischen, Kessinger Publishing, 1895. 12) TESNIERE : Théorie structurale des temps composés, Mélanges Charles BALLY, Genève, 1982. 13) TROUPEAU, La notion de temps chez Sibawaih, G.L.E.C.S (Groupe de Linguistique d’Etudes Chamitosémitiques) , 1985.  52 Arts for Linguistics and Literary Studies Quarterly Peer Reviewed Scientific Journal for linguistics and literary studies issued by the Faculty of Arts General Supervision Prof. Talib Al-Nahari Prof. Abdulkareem Mosleh Al-Bahlah Deputy Chief Editor Dr. Esam Wasel Editorial Manager Dr. Fuad Abdulghani Mohammed Al-Shamiri Editors: Dr. Altaf Ismail Al-Shami (Yemen) Dr. Khader Muhammad Abu Jahjouh (Palestine) Prof. Ameen Abdullah Mohammed Al-yazedi (Yemen) Dr. Tawffeek Abdou Saeed Al-Kinani (Yemen) Prof. Saeed Ahmed Al -Batati (Yemen) Prof. Atef Abdulaziz Moawadh (Egypt) Prof. Khaled Yaslm Blakhsher (Yemen) Prof. Abdulhameed Saif Al-Hosami (Saudi Arabiya) Dr. Ali Bin Jasser Al-Shaya (Saudi Arabia) Dr. Ali Hamoud Al-Samhi (Yemen) Prof. Mohammed Al-brkati (Saudi Arabiya) Prof. Naima Sadia (Algeria) This version is corrected by: English Part Dr. Abdullah Mohammed Khalil 1 Arabic Part Dr. Abdullah Al-Ghobasi Scientific and advisory board Prof. Ibrahim Mohammed Al-Solwi (Yemen) Prof. Abdul Hamid Bourayou (Algeria) Prof. Ibrahim Tajaldeen (Yemen) Prof. Abdulkareem Asa'ad Kahtan (South Korean) Prof. Ahmed Ali Al-Akwa'a (Yemen) Prof. Abdulkareem Ismail Zabiba (Yemen) Prof. Ahmed Moqbel Almansori (UAE) Prof. Alwi Al-Hashemi (Bahrain) Prof. Aunt David Sallom (Iraq) Prof. Fekry Abdelmonm EL-Sayed EL-Nagar (UAE) Prof. Panchanan Mohanty (India) Prof. Marie-Madeleine BERTUCCI (France) Prof. Gamal Mohammed Ahmed Abdullah (Yemen) Prof. Mohammed Ahmed Sharaf Aldeen (Yemen) Prof. Hafiz Ismaili Alawi (Morocco) Prof. Mohammed Khair Mahmoud Al-Beqai (Saudi Arabiya) Prof. Halima Ahmed Amayreh (Jordan) Prof. Mohammed Abdulmajeed Al-Taweel (Egypyt) Prof. Hamid Al-Awdhi (America) Prof. Mohammed Mohammed Al-kharbi (Yemen) Prof. Hayder Mahmoud Ghailan (Qatar) Prof. Munir Abdo Anam (Yemen) Prof. Rasheed Bin Malek (Algeria) Prof. Nasr Mohammed Al-Hogaili (Yemen) Prof. Suad Salem Al-Saba (Yemen) Prof. Hajid Bin Demethan Al-Harbi (Saudi Arabiya) Prof. Salal Ahmed Al-Maktari (Yemen) Prof. Suliman Al-Abed (Saudi Arabiya) Prof. Adel Abdulghani Al-Ansi (Yemen) Prof. Hind Abbas Ali Hammadi (Iraq) Prof. Yahya Ahmed Yahya Al-sohbani (Saudi Arabiya) Financial Officer Technical Output Ali Ahmed Hassan Al-Bakhrani Mohammed Mohammed Subia 2 Arts for Linguistic and Literary Studies A Quarterly Peer Reviewed Journal Issued by the Faculty of Arts, Thamar University, Dhamar, Republic of Yemen, )Vol. 13) March : 2022 ISSN: 2707-5508 EISSN: 2708-5783 Local No: )1631- 2020( This is an open access journal which means that all content is freely available without charge to the user or his/her institution. 3 Publishing Rules The scientific peer reviewd journal 'Al-Adab" (i.e. Arts) is issued by the Faculty of Arts، Thamar University. It is written in Arabic، English and French according to the following rules : 1. The research paper must be original، follow the proper scientific methodology، and has not been published elsewhere. 2. The research paper will be refereed according to high scientific standards. 3. The research paper has to be written in perfect language with respect for latest research design and accuracy of forms and figures – if included – in word form; font size (14) in (simplified Arabic) for Arabic papers and (Times New Roman) for English and French papers. Title and subtitles have to be boldfaced in (16) font size. 4. To be linguistically corrected by the Researcher. 5. To be attached with two abstracts; English and Arabic and not exceeding each of them more than 200 words. They should include the following elements: subject، methodology، and results. They should be accompanied with key words that extends from 4 to 6 in both languages. 6. 7. 8. To be attached with a translation for the Title، author's profile، author's institution and his email. Maximum number of pages is (25) including charts، figures and appendix. In case of more than 30 pages، YR 1000 should be paied as extra fees for each page. Documentation has to be at the end of the research paper as follows: a. Manuscripts: Name of manuscript، its place، its number and type of paper. b. Books: Name of the author، title of the book، place and date of publishing، page number. c. Periodicals: Author's name، title of the article، name of the Periodical، date and number of issue، page number. d. Theses: Researcher's Name، title of the thesis، faculty، university, date, page، number. 9. Research papers are required to be sent in Word and PDF forms to the editor journal's email، [email protected]. 10. The journal will inform the researchers with the initial approval of their papers after receiving them. Later on، they will be informed with referees reports about validity of publishing، rquested changes، or rejection، and then the No. in which his/her paper will be published in. 11. Research papers will be organized according to the date of their receiving by the journal. 12. Publishing fee is YR 25000 inside Yemen and $ 150 or its equivalence outside Yemen. Thamar University teaching staff has to pay YR 15000. The scholar also has to pay sending fee for hard copies of the jounal. 13. Money has to be deposited to the Journal's account No.(211084) at Yemen Commercial Bank، Thamar، Yemen. The fees must not be payed back whether the research is published or rejected. Note: For having a look on the previous issues of the journal، please viit the journal's website as follows: http://jthamararts.edu.ye Jornal Address: Faculty of Arts، Thamar University، Tell: 00967-509584 P.O. pox. 87246، Faculty of Arts، Thamar University، Dhamar، Republic of Yemen. 4 • 5 Contents A Reading in the Structure of Lasiyama ‘Especially’ with the Investigation of the Message Kashf Al-Amaa‘ an Ma’aany Lasiyama ‘Removing the Ignorance on the Meaning of Especially’ by Al-Mazjaji (Died in 1265 AH) Dr. Mohammed Adel Shouk…………………………………………………………………………………………………………………………7 • The Semi-object in the Use of Some Grammarians Dr. Fahad Bin Abdullah Al-khalaf…………………………..……………………………………………………………………………………46 • Machine Translation Computational Linguistic Problems in the Pronoun, the Relative, and the Grammatical Tense Dr. Yahya Bin Ahmed Abdullah Al-Lateeni……………………………………………………………………………………………………62 • Literary Pastiches in the Mirror of Criticism A Reading in an Andalusian Literary Model Dr. Laila Salem Al-Badrani………………………………………………………………………………………………………………………….83 • Thresholds of the Text in The Fragrance of Perfume from the Andalusia Wet Branch A Semiotic Approach Dr. Fatima Bint Jaber Al-Mashari………………………………………………………………………………………………………………108 • Text Thresholds in Daftar Min Araq ‘A Notebook of Insomnia’ Diwan, by Abdulrahman Al-Atl Dr. Amal Bint Mohsen Al-Amiri…………………………………………………………………………………………………………………138 • Duality of Sight and Insight in the Diwan of Margins of the Self Dr. Hamoud Bin Mohammed Al-Naga…………………………………………………………………..……………………………………167 • Aesthetic of Style in Amro Bin Barraga Al-Hamdani's Mimiyah. Dr. Fauwaz Bin Zayed Al-Shammari……………………………………………………………………………………………………………207 • The Aesthetics of Place in the Diwan of Ya Dar Maiya by Youssef Hasan Al-Aarif Dr. Ibrahim Omar Ali Al-Mahaili………………………………………………………………………………………………………….……234 • The Psychological Dimension in the Novel of The Smell of Coal by Abdulaziz Al-Saqabi Dr. Saleh Bin Salem Al-Harthy, Dr. Ziyad Mahmoud Miqdadi………………………………………………………………………277 • The Semiotics of the Character in the Novel: A Thousand Women in My Body Amani Abdullah Abdulrahman Al-Qarni……………………………………………………………………………………………………318 • The Manifestations of Folklore in Saud Al-Sanousi's novel My Mother Hassa's Mice Jarrah Bin Ahmed Bin Rakan Al-Shammari…………………………………………………………………………………………………353 • Employing Children's Stories in Digital Literature Dr. Amal Bint Mohammed Al-Tamimi………………………………………………………………………………………………………391 • The Existence of the E-Literary Text in Light of Rooms and Mirrors by Labiba Khammar An Ontological Vision Dr. Huda Abdulrahman Al-Ddreis………………………………………………………………………………………………………………424 • Female Saudi ESL Learners’ Attitudes Toward Communication in Mixed Gender Classes in the USA Dr. Khalaf Naif Alharbi……………………………………………………………………………………………………………………….………7 • Etude du «temps» et de l’ «aspect» dans la langue arabe à travers les travaux de grammairiens français et arabes Dr. Talal Almarzoqi ……………………………………………………………………………………………………………………………………31 6.
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Religion, sainteté et pouvoir en Provence angevine, première maison d'Anjou, modèle et miroir du monde angevin (1246-1382)
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Cependant, Charles II ne tira pas longtemps avantage de la présence de Célestin V à la tête de la chrétienté car le souverain pontife, s’estimant peu apte à continuer à assumer cette lourde tâche décida d’abdiquer, avant de s’enfuir vers les Pouilles. Ayant réuni les cardinaux, Il donna sa démission le 13 décembre 1294, après un court pontificat. Son successeur s’affirma très rapidement une personnalité très différente. Les rapports entre Boniface VIII et Charles d’Anjou furent de ce fait d’une autre nature que ceux qui avaient présidé aux relations entre le roi et le pape au temps de Célestin V. Charles II et Boniface VIII. Dix jours après l’abdication de Célestin V, le conclave se réunit pour lui désigner un successeur. Les cardinaux choisirent rapidement le nouveau chef de l’Eglise, car Benedetto Caetani fut élu dès le premier jour, le 24 décembre 1294. Il prit le nom de Boniface VIII. Tout aussitôt, Pierre de Morrone vint lui faire sa soumission, mais se vit refuser l’autorisation de retourner à son ancien ermitage. Le nouvel élu n’était plus jeune à ce moment-là. Il devait avoir dépassé la soixantaine78. Benedetto était issu d’une famille résidant à Anagni, au sud de Rome et qui avait, toujours, eu des contacts privilégiés avec la cour pontificale. Né vers 1235, il semble avoir passé une partie de son adolescence dans la petite ville de Todi, en Ombrie, dont l’un de ses oncles devint évêque en 125279. Benedetto fut, peut-être chanoine à Anagni entre 1250 et 126080. Il suivit une formation de juriste à Bologne si on tient compte du contenu d’une lettre du 3 juillet 1303 où il se rappelait de son temps d’étudiant81. On le retrouve en février 1264 à Orvieto, lieu de résidence de la cour des papes depuis l’automne 1262. Quelques jours plus tard, il portait pour la première fois le titre de chapelain du pape signalant par là son appartenance à la curie romaine. Il se retrouva vite placé au cœur de grandes affaires politiques de son temps qui concernaient l’Eglise. En effet, en 1265, il fit partie, avec la fonction de chancelier, d’une mission en France aux côtés du cardinal Simon de Brie. Il s’agissait alors de contacter 77 G. Digard, ibidem, t. I, p.188. A. Paravicini Bagliani, Boniface VIII, op. cit., p. 25-26. 79 Ibidem, p. 29. 80 Ibidem, p. 25. 81 Ibidem, p. 33. 78 Charles d’Anjou pour lui proposer d’accéder à la couronne de Sicile82. Il assuma d’autres missions importantes à travers l’Europe chrétienne83.Quand Innocent IV fut élu pape, le 21 janvier 1276, il fut nommé notaire du souverain pontife, fonction éminente puisque son titulaire était chargé de la correspondance politique. De son côté, Charles d’Anjou le nomma son « familier » et « son clerc et conseiller ». En revanche, Benedetto Caetani avait manqué plusieurs occasions d’être élu pape car aussi bien Innocent IV qu’Adrien V ou encore Jean XXI ne connurent qu’un court pontificat. Cependant, Nicolas III qui s’était retrouvé sur le trône de Saint-Pierre en 1277 en fit son conseiller pour certaines affaires délicates, comme la correspondance avec Rodolphe de Habsbourg, celui-ci sollicitant du pape son couronnement impérial ou une réflexion sur le problème de la pauvreté au sein des franciscains84. Le 12 avril 1281, il fut amené à la dignité de cardinal-diacre par Martin IV qui venait d’être élu pape le 22 février 1281.Finalement, il fut élu à la tête de l’Eglise, à la suite du renoncement de Célestin V. Le nouveau souverain pontife possédait une forte personnalité, autoritaire, disposant d’une bonne expérience de juriste et de diplomate et soucieux de réaffirmer les prérogatives de l’Eglise au sein de la chrétienté ce qui contribua, notamment, à détériorer fortement les relations du Saint-Siège avec Philippe IV, le roi de France pour aboutir à l’affaire d’Anagni en septembre 1303. Ce prélat était, selon les dires de Martin IV, « un homme au jugement profond, fidèle, clairvoyant, zélé, circonspect »85. Boniface VIII possédait de biens matériels importants provenant de cadeaux, de revenus et de bénéfices sur investissements de capitaux au cours de sa longue carrière86. Alors qu’il n’était que cardinal, Benedetto Caetani fut en bonnes relations avec Charles d’Anjou. Cependant, les premiers contacts avec le fils de celuici, Charles II, déclenchèrent, chez le futur pape, une certaine rancœur à l’égard du roi de Sicile. Les relations amicales et de confiance entre Charles d’Anjou et Benedetto Gaetani Martin IV, dans la suite de la citation que nous venons de mentionner plus haut à propos du caractère de Benedetto Gaetani, soulignait, également, que le cardinal était « rempli de zèle pour l’honneur des Anjou ». Effectivement, quand il était devenu notaire du pape, l’Angevin lui conféra le titre de « conseiller » comme nous l’avons déjà mentionné plus haut87. Le roi de Sicile ne se contenta pas de gratifier Benedetto Gaetani de cet honneur. Il en sollicita, également, les services pour arbitrer un litige entre le marquis d’Este et l’archevêque de Ra- 82 Ibidem, p. 35-36. Il fut membre de la légation du cardinal Ottobono Fieschi en Angleterre en 1267 et collecteur de décimes au Danemark en 1269. 84 Ibidem,p. 42-43. 85 o Regestres Martin IV, n 302, 6 février 1302, cité par A.Paravicini, op. cit, p. 46. 86 A. Paravicini Bagliani, Boniface VIII, p. 60-63. 87 A. Kiesewetter minimise la portée de cette distinction en faisant remarquer que durant la vingtaine d’années du règne de Charles d’Anjou, près de dix mille personnes la reçurent également. Bonifacio VIII gli Angioni, dans Cherch?, p.177. Martin IV, lui aussi ami du roi de Sicile, connaissait bien la qualité des relations existant entre la maison de France et celle d’Anjou avec le futur Boniface VIII. En effet, il le chargea au début de 1282 de recevoir la déposition de Philippe III sur la vie de Louis IX, le frère de Charles d’Anjou, lors du procès de canonisation du défunt roi de France. Ce fut, sans doute en raison de ces considérations, que le pape fit intervenir Benedetto Caetani auprès du roi de Sicile pour que celui-ci renonçât au duel prévu à Bordeaux, pour le début juin 1282 avec Pierre III d’Aragon, ce combat singulier devant décider du sort de la Sicile. Les relations entre Boniface VIII et Charles d’Anjou furent, donc, bonnes durant tout le règne de l’Angevin. Les premiers contacts entre Charles II et le cardinal Gaetani ne se réalisèrent pas, pourtant, dans une ambiance sereine. L’affaire de Gaète et la rancœur de Benedetto Caetani Charles II, libre, avait été couronné et était rentré, en juillet 1289, à Naples, la capitale d’un royaume toujours amputé de sa partie insulaire. La guerre contre le roi d’Aragon avait repris du fait de ce dernier. Ses troupes, à la tête desquelles, se trouvait, outre Jacques d’Aragon, l’amiral Ruggero di Lauria, débarquèrent à Gaète, en un point, pas trop éloigné des états pontificaux et du royaume, menaçant ainsi Naples. Les assaillants ne purent s’emparer de la cité de Gaète qui opposa une vive résistance et ils furent eux-mêmes cernés par l’armée de Charles-Martel, le fils de Charles II, et de Robert d’Artois. Cette situation paraissait favorable, pour Charles II, pour obtenir une revanche sur les Siciliens. Cependant, l’Angevin ne mit pas à profit les difficultés rencontrées par ses adversaires et admit le principe de la conclusion d’une trêve jusqu’à la Toussaint 1291, soit de plus de deux ans, le roi d’Angleterre ayant joué le rôle de médiateur dans cette affaire. Le pape, Nicolas IV, se méfiant sans doute des options pacifiques du roi de Naples avait chargé deux cardinaux de s’intéresser aux négociations pour éviter que les intérêts de l’Eglise, suzeraine du royaume fussent préservés. Charles II ne tint pas compte de la présence de deux prélats et conclut un accord avec le roi d’Aragon. Or, l’un des deux cardinaux était Benedetto Caetani qui pouvait passer, ainsi, aux yeux du pape pour un incompétent. Le prélat en tint, longtemps, rancune à Charles II. Cependant, quand il accéda au trône pontifical, le 24 décembre 1294, Boniface VIII sut faire passer les intérêts de l’Eglise avant ses sentiments personnels. Nous avons indiqué précédemment, comment il avait reconnu la validité de la découverte faite par celui qui n’était alors que Charles de Salerne des reliques de sainte Marie-Madeleine à Saint-Maximin en Provence et quelles mesures avaient prises par lui pour assurer le développement du culte de l’amie du Christ dans le comté. Il avait notamment facilité la construction d’un monastère à l’endroit de la découverte et permis que le nouveau sanctuaire fut tenu par les Dominicains, proches des Angevins. Nous ne nous intéresserons, ici, qu’aux évènements purement politiques. Si la question sicilienne restait toujours à régler, il fallait d’abord réguler les relations entre le seigneur supérieur, le pape et le vassal du royaume, l’Angevin. 88 C.Riccio, Saggio di Codice diplomatico formato sulle antiche scripture dell’Archivio di Stato di Napoli, o supplemento I, Naples, 1882, 198-199, n CLXXXXVI. 225 Le règlement de la relation entre le pape et le roi de Naples, son vassal. En effet, quand en 1266, Charles d’Anjou avait accédé au trône de Sicile, il avait accepté de verser un cens annuel de huit mille onces d’or soit quarante-mille florins d’or, chaque année au mois de juin à la chambre apostolique. En cas de défaut de sa part, des sanctions avaient été prévues allant jusqu’à la destitution, en cas de carence pendant trois ans89. Or, les versements étaient intervenus de façon irrégulière entre les mains du créancier notamment, en raison des difficultés financières rencontrées par le monarque angevin. De ce fait au moment de l’élection de Boniface VIII, le retard s’élevait à vingt-quatre mille onces pour une période allant de juin 1291 à juin 1294. Théoriquement et, conformément aux accords initiaux, l’Angevin pouvait être sanctionné par le pape. Boniface VIII accepta la demande faite par Charles II pour proroger le paiement d’un an. Le souverain renonça à réclamer un paiement de deux cents mille florins auquel le Saint-Siège pouvait prétendre en raison de l’élection d’un nouveau pape. A priori, il s’agissait là d’une faveur faite par le souverain pontife à son vassal. En réalité, le cens ne fut pratiquement jamais payé, entre 1295 et 1303, en raison de la faiblesse financière du royaume. Toutefois, étant données les sanctions prévues en cas de retard ou de non-paiement, la question de ce règlement annuel permettait de rappeler de façon régulière à l’Angevin qu’il tenait le royaume de la papauté. En quelque sorte, le souverain-pontife maintenait au dessus de la tête du roi une épée de Damoclès90.Il avait besoin de la force militaire angevine pour régler la toujours préoccupante affaire de l’ile de Sicile qui « ne fut pas un des problèmes mais le problème central du pontificat de Boniface »91. Le pape s’attela à cette tâche et finit par obtenir par la diplomatie ce que les armes n’avaient pu réussir. Ce fut le traité d’Anagni du 12 juin 1295. Normalement, Charles II, grâce à l’action du pape, aurait du être l’un des bénéficiaires principaux de cet accord. Le traité d’Anagni et ses suites Le traité d’Agnani mettait un terme au long conflit opposant la maison d’Aragon à celle d’Anjou. Charles II se trouvait sur les lieux de conclusion de l’accord, en compagnie de Barthélémy de Capoue. A priori, tous les différents semblaient être réglés. Une des clauses principales résidait en l’abandon par Jacques d’Aragon de la Sicile. L’île devait être remise au Saint-Siège. Par ailleurs, les terres conquises par l’Aragonais, dans le sud de l’Italie, devaient être restituées à Charles II. Boniface réconciliait Jacques d’Aragon, sa mère, son frère Frédéric et tous les Siciliens avec l’Eglise. Du fait de cet acte du souverain-pontife, Charles de Valois et Philippe le Bel renonçaient à toute investiture sur le royaume d’Aragon. Jacques devait épouser Blanche d’Anjou, la fille de Charles II et les enfants de celui-ci devaient être libérés. Pour faciliter cette union, le pape prit à sa charge la dot de la fiancée 92. Toutefois, les 89 A. Kiesewetter, Bonifacio VIII gli Angionii, op. cit, p. 184-185. Selon l’expression de A.Kiesewetter, ibidem, p.187. 91 V.Salvadert y Roca, El tratado de Anagni y la expansion mediterranea de la Corona de Aragon, dans, Estudios de Edad Media de la Corona de Aragon, V (1952), p. 239. 92 G. Digard, op. cit., t. I, p. 217-218 et 224. 90 226 efforts de Boniface VIII furent finalement vains pour faire rentrer la Sicile dans le royaume. Les Siciliens s’opposèrent à la partie de l’accord qui les concernait. En effet, quand Alphonse III était mort le 18 juin 1291, il n’avait aucun héritier pouvant lui succéder. Son testament avait prévu que Jacques lui succéderait en terre d’Aragon mais que le frère cadet de celui-ci Frédéric. Ainsi, se trouvèrent séparées les couronnes de Sicile et d’Aragon. Quand intervint le traité d’Anagni, les Siciliens entendirent transformer une situation de fait en une consolidation juridique. Ils proposèrent alors, lors d’un parlement, à Frédéric de le proclamer roi. Malgré la pression du pape et celle de Jacques II qui était en voie de réconciliation avec Charles II, le parlement de Catane le reconnut comme roi et il fut couronné le 25 mars 1296. Ainsi, si l’accord d’Anagni avait permis un rapprochement entre Charles II et Jacques d’Aragon ainsi qu’entre celui-ci et la Maison de France, tout de nouveau restait à faire du côté de la Sicile. Le souverain pontife continua la même politique, celle qui consistait à aider son vassal dans son entreprise de reconquête de l’ile. Il trouva le moyen d’assurer des ressources financières à Charles II93.Il agit, surtout, dans le domaine diplomatique, s’attachant à impliquer Jacques II, dans une alliance, avec le roi de Naples. Ce ne fut pas chose facile d’attirer le roi d’Aragon dans cette coalition, car il avait des préoccupations sur le sol espagnol. En effet, il s’était attaché à la conquête du royaume de Murcie94. D’autre part, aller combattre sur le sol sicilien, c’était se lancer dans une guerre fratricide contre son cadet Frédéric. Devant la réticence du roi d’Aragon, le pape imagina, en mars 1297, une combinaison politique très compliquée pour faire revenir le trône de Sicile à la famille angevine. D’après le montage de Boniface VIII, Charles II devait abdiquer du royaume de Sicile pour se retirer dans son comté de Provence. La place, ainsi laissée vacante, devait, alors, être occupée par son fils Robert d’Anjou, le troisième dans la ligne de succession des fils de l’Angevin. Cette solution avait pour inconvénient d’écarter les droits de Charles-Robert, le fils de CharlesMartel, premier enfant de Charles II qui était décédé. Boniface avait prévu, en conséquence, de tenir compte de cette situation en proclamant Charles-Robert, comme héritier légitime de la couronne de Hongrie en raison du mariage de Charles II avec Marie de Hongrie, sœur du dernier roi de descendance Arpad, Ladislas IV. Quant à Frédéric, s’il perdait ainsi, le trône de Sicile, il recevait, en compensation, l’empire latin de Constantinople qui restait, cependant, à conquérir. Finalement, le bel édifice construit par le pape ne put se réaliser. En effet, Charles II refusa de se contenter du comté de Provence et Frédéric se refusa de se prêter aux desseins du souverain-pontife95. L’attitude de Jacques II évolua pour différentes raisons. Tout d’abord, le rapprochement avec les Angevins fut scellé par le mariage de sa sœur Yolande avec le prince héritier Robert 93 G. Digard, op. cit., t. I, p. 263-264. J.-M. Del Estal, Conquista y anexion de las tierras de Alicante, Elche, Orihuela y Guardamar al reino de Valencia por Jaime II de Aragon (1296-1308), Alicante, 1982, p. 168-171, 183-268. 95 A. Kieseweter, Bonifacio VIII, op. cit, p.194-197. en mars 1297. Ensuite, le pape lui fit différentes concessions sur le plan territorial, en lui donnant l’investiture sur la Corse et la Sardaigne, convoitées par le souverain aragonais. Il fut couronné le 6 avril 1297. Pour permettre au roi d’Aragon de se financer, Boniface VIII lui accorda un certain nombre de faveurs. Après l’avoir nommé gonfalonier de l’Eglise, le 20 janvier 1297, il imposa au clergé d’Aragon un décime de quatre ans à verser à leur roi, au mois de février. Une grande expédition financée essentiellement par Boniface VIII, grâce aux subsides récoltés auprès des prélats et des princes français désireux de racheter auprès du Saint Père leurs vœux de croisade, fut mise sur pied. Mais elle ne remporta pas de victoire décisive96. Au contraire, elle subit une grave défaite à Falconaria, près de Trapani, où fut fait prisonnier l’un des fils de Charles II, Philippe de Tarente, le premier novembre 1299. Cette situation d’échec, malgré de fortes dépenses qui avaient mis à mal aussi bien les finances pontificales que celles de Charles II, finit par entraîner la détérioration des relations entre le pape et le roi de Naples. Des relations détériorées entre Charles II et Boniface VIII Les difficultés financières du royaume furent l’une des causes indirectes de cet infléchissement dans les rapports entre les deux souverains. Charles II commença à rechercher une solution pacifique de son conflit avec Frédéric III de Sicile, sans en aviser le pape97. L’ayant appris, celui-ci réagit brutalement en adressant un courrier, le 9 janvier 1300, faisant le bilan pour l’année précédente de l’action de Charles II. Il reprochait au roi de Naples son incapacité et sa myopie politique pour avoir initié une négociation de paix séparée avec Frédéric. Il laissait sous-entendre sa détermination, pour le cas où l’Angevin persisterait dans cette voie, de le destituer et de confier le royaume à Frédéric ou à un autre. Cette missive pouvait donc passer pratiquement comme une lettre de rupture entre les deux hommes. Ce n’était, d’ailleurs, pas la première fois, que le souverain-pontife s’adressait avec une telle violence à son vassal. Déjà, lors de la préparation de l’expédition de Sicile entre le pape, Charles II, Charles de Valois et d’autres seigneurs, en 1297, le souverain pontife avait insulté, le 4 mars, le roi de Naples, le traitant, notamment, de « vilain ribaud ». Charles II prit fort mal cette agression verbale du pape et Charles de Valois ainsi que deux cardinaux durent déployer de gros efforts pour réconcilier les deux hommes98. La recherche d’une solution sicilienne par Charles était, bien sûr, dictée par une faiblesse financière de plus en plus préoccupante du royaume. Cependant, les ambitions du roi de Naples du côté de la Hongrie motivaient également ce souhait d’un prochain règlement du conflit avec Frédéric III. La décision prise de façon unilatérale, en août 1300, par Charles II, d’envoyer son petit-fils Charles-Robert à la rencontre du prétendant André de Venise provoqua la fureur du pape qui y vit un nouveau risque de remettre à plus tard une nouvelle expédition en direction de la Sicile. Comme à titre de représailles, Boniface VIII s’opposa à une mainmise directe des 96 R. Caggesse, Roberto d’Angio, t. I, p. II. A. Kiesewetter, Bonifacio VIII, op. cit, p.200. 98 A. Paravicini Bagliani, Boniface VIII, op. cit, p.308-309. 97 228 Angevins sur la principauté d’Achaïe. Une union matrimoniale conclue entre Isabelle de Villeharduin et Philippe de Savoie, approuvée par Charles II à la demande du pape, prévoyait que la principauté resterait par héritage entre les mains de la maison de Savoie. Néanmoins ce fut l’appel de Boniface VIII à Charles de Valois, comme athlète du Christ, chargé de la défense de l’Eglise, et l’échec du prince français, qui causèrent une grave crise dans les relations entre seigneur supérieur et vassal. Le pape décida de faire appel au frère du roi de France, car il s’en tenait à son idée d’une guerre à outrance à Frédéric pour récupérer le bien de l’Eglise. Il ne pouvait plus compter ni sur Charles d’Anjou, comme nous venons de le voir, ni sur Jacques II, qui, désormais se souciait peu d’aller combattre contre son frère, maître de la Sicile. Boniface fit, donc, appel à Charles de Valois, frère de Philippe le Bel, qui se trouvait sur le sol italien depuis la fin de l’année 1298. Contacté en 1301, Charles de Valois prépara son expédition au début 1302. Finalement, le prince français connut l’échec et conclut un accord avec le roi de Sicile, à Caltabelotta, le 29 août 1302. D’ailleurs, Charles II, qui avait prévu cette possibilité, l’avait autorisé à traiter avec Frédéric III. Ce traité de paix ou trêve laissait aux combattants un intervalle pour que les forces en présence pussent récupérer avant une reprise des hostilités. Cependant, le texte ne contenait aucune clause remettant en cause la domination aragonaise, d’alors, sur la Sicile99. En effet, le traité prévoyait que Frédéric conservait à titre viager son domaine et ses pouvoirs, comme roi de Sicile, ce territoire devant revenir aux Angevins de Naples à sa mort. Pour consolider les relations entre ceux-ci et Frédéric III, ce dernier devait épouser Eléonore, une fille de Charles II. Tandis que Charles II donnait son approbation à cet accord, Boniface VIII le rejeta catégoriquement, dans un premier temps. Cependant, il se trouvait en lutte contre le roi de France Philippe IV et par ailleurs, il ne trouvait plus de champions pour reprendre la lutte contre Frédéric III. De ce fait, il finit par accepter le traité de Caltabelotta, après avoir obtenu quelques modifications mineures du texte initial. Ainsi, Frédéric consentit à reconnaître la suzeraineté de l’Eglise sur l’île ainsi que le principe du versement d’un tribut au Saint-Siège, comme vassal. Si l’affaire sicilienne fut plusieurs fois à l’origine de refroidissements dans les relations entre Charles II et le souverain pontife, il fut un domaine dans lequel le pape persista dans une attitude favorable pour la maison d’Anjou : il concernait la Hongrie. Les Angevins en Hongrie avec l’aide de la papauté100 Si nous parlons de papauté et non pas d’un souverain-pontife nommément, c’est parce que trois papes furent concernés par cette affaire hongroise, Boniface VIII et ses successeurs Benoît XI et Clément V. Charles d’Anjou avait pu marier son fils Charles de Salerne à une princesse hongroise, Marie, fille du souverain magyar Béla IV. A ce dernier avait succédé Ladislas IV, frère Marie qui mourut le 10juillet 1290, sans laisser d’enfant. Marie, à cette époque, n’avait pu faire valoir ses droits à la couronne, ni ceux de son fils aîné, Charles99 B. Rocco, La pace de Caltabelotta, 1302 e la ratificatio di Bonifacio VIII, 1303, Acireale, 1987, p. 51-89. Balint Homan, Gli Angioini di Napoli in Hungaria, 100 229 Martel. De ce fait, le trône était revenu au dernier Arpad de sexe masculin, encore en vie André le Vénitien, couronné le 28 juillet 1290. L’Eglise manifesta également sa désapprobation par l’envoi d’un légat pontifical sur place. Si une grande partie du pays resta fidèle à son nouveau roi, un certain nombre de nobles de la partie ouest de la Hongrie ainsi que de nombreux Croates prirent le parti de Marie et de son fils. L’épouse de Charles réussit à faire proclamer roi Charles-Martel dans les premiers jours de janvier 1291. André le Vénitien refusa de s’incliner. Boniface VIII prit, de façon déterminée, le parti des Angevins. Le souverain pontife était soucieux d’imposer le pouvoir de l’Eglise sur l’ensemble des royaumes de la chrétienté et cette affaire lui donnait l’occasion d’exercer sur le royaume magyar les droits féodaux de la papauté. Le 24 février 1297, par un même acte il reconnaissait Robert, le fils de Charles II, comme héritier du royaume de Sicile et Charles-Robert (ou Carobert), celui de Hongrie, en raison du décès de Charles-Martel, frère du premier et père du second. Cependant, l’affaire hongroise n’en était pas réglée pour autant. En effet, à la mort d’André le Vénitien au début de l’année 1300, les Angevins firent couronner, dans les meilleurs délais, Carobert, mais sans que fut remise à ce dernier la couronne de saint Etienne. Certains, de ce fait, émirent des doutes sur la validité de la cérémonie du sacre. Les nobles de haut rang de Hongrie décidèrent, alors, de mettre sur le trône un autre petit-fils de Béla IV, le roi de Bohème, Venceslas. Finalement, ce fut le fils de celui-ci qui reçut la couronne le 26 août 1301, sous le nom de Ladislas V de Hongrie. Boniface VIII resta ferme dans son désir de voir à la tête du royaume magyar un Angevin, en l’occurrence Carobert. Il envoya, en conséquence, dans ce pays, le légat, Nicolas Boccasini, cardinal-évêque d’Ostie pour tenter d’entrainer l’adhésion du clergé hongrois en faveur du petit-fils de Marie de Hongrie, sans beaucoup de succès. Le pape employa une autre procédure pour arriver au but qu’il s’était fixé. En effet, il convoqua les deux rois désignés par les deux partis différents en Hongrie pour rendre son arbitrage. Par décision du 31 mai 1303, il reconnut Carobert, comme roi de Hongrie, interdisant à son rival de prendre ce titre et d’en assumer les fonctions. Ce fut la dernière intervention de Boniface VIII dans ce dossier hongrois pour lequel il fit preuve d’une belle constance dans sa prise de position à l’égard des Angevins. En effet, il décéda le 12 octobre 1303, peu de temps après ce qui a été appelé l’attentat d’Anagni. Le successeur de Benedetto Caetani ne fut autre que Benoît XI qui poursuivit la même ligne que son prédécesseur : il nomma à l’archevêché d’Estergom un partisan de Carobert et ce prélat réussit à entrainer en faveur de ce dernier tout le haut clergé hongrois et les grands barons du royaume. Ces défections provoquèrent le retrait de Ladislas V, qui emporta avec lui la couronne de saint Etienne. L’ex roi renonça au trône de Hongrie. Le Saint-Siège dut de nouveau intervenir en raison d’un rebondissement dans cette affaire hongroise. En effet, un autre descendant de Béla IV fut couronné par de simples évêques mais reçut, à cette occasion, la fameuse couronne : Othon, duc de Bavière. La papauté réagit à cet événement et Clément V, élu le 5 juin 1305, ordonna à Othon d’abandonner le titre et 230 les fonctions dont il s’était emparé de façon indue. Finalement, Othon, constatant son impuissance à pouvoir résister à tous ceux qui s’opposait à lui, préféra s’incliner. Un nouveau couronnement de Carobert eut lieu le 15 juin 1309 au cours duquel, en l’absence de couronne de saint Etienne, le petit-fils de Marie de Hongrie ne reçut d’un diadème, spécialement fabriqué à cet effet. Finalement, la couronne symbolique, ayant pu être récupérée, elle fut imposée sur la tête de Carobert, le 27 août 1310, permettant à ce dernier d’être reconnu comme le véritable successeur du premier roi chrétien de Hongrie. Ainsi, la nature des relations entre Boniface VIII et Charles II changea au cours des neuf années de pontificat du premier nommé précédées d’un temps de cardinalat pendant lequel Benedetto Caetani put avoir l’occasion d’être en rapport avec l’Angevin. Bilan des relations Boniface VIII-Charles II Nous suivrons l’analyse consacrée à Boniface VIII, qui a été faite, par Andreas Kiesewetter101. L’historien allemand a distingué trois phases dans les relations entre le souverain pontife et Charles II. Une convergence d’intérêts et une étroite collaboration entre les deux hommes caractérisent la première, qui se situa pendant le cardinalat et les premières années du pontificat de Boniface. Cette période ne fut cependant pas exempte de quelques tensions, comme au moment de l’élection de Célestin V, suivie de la tentative de Charles II d’imposer ses idées au nouveau pape. La seconde séquence vit se manifester une divergence profonde sur un certain nombre de points. La question sicilienne fut la cause principale de ces désaccords qui allèrent jusqu’à une quasi-rupture en 1300. Les deux hommes n’avaient plus la même vision des choses concernant la politique à mener vis-à-vis du maître de la Sicile, Frédéric III, placé sur le trône de la grande île par ses sujets siciliens. Alors que Boniface ne sut jamais que penser à la manière forte, faisant de la reprise du territoire insulaire, une affaire de principe, Charles, en politicien réaliste, se rendait compte de la difficulté pour trouver une solution non pacifique au problème consécutif aux Vêpres Siciliennes de 1282. Le temps s’écoulait sans que furent notés beaucoup de succès militaires et les problèmes financiers de son royaume et, par contrecoup, ceux du comté de Provence devenaient plus difficiles à résoudre. Pendant que les regards du pape restaient braqués sur la Sicile, ceux de Charles se tournaient vers l’Europe centrale et vers l’est. Enfin, tout à la fin de son existence, le pape, parfois à contre-coeur, comme pour le traité de Caltabelotta, se résolut de s’incliner devant la réalité des faits et à aider Charles II à réaliser en partie ses desseins en l’aidant comme pour l’arrivée d’un Angevin sur le trône hongrois, y trouvant d’ailleurs l’intérêt de l’Eglise de place le royaume magyar dans sa vassalité. En dehors de ces affaires qui concernent surtout le pouvoir temporel, nous verrons que dans le domaine spirituel, celui du choix et de la nomination des évêques, une bonne entente régna entre les deux hommes. Cette question sera étudiée en détail ultérieurement. A. Kiesewetter, Bonifacio VIII, op. cit., p. 210-211. A partir de ces observations, comment apprécier l’attitude de Charles II lors de l’attentat d’Anagni ? On peut remarquer que le roi de Naples n’intervint pas pendant les tragiques événements survenus dans la cité italienne. Nous ne possédons aucune information sur une action de Charles II en faveur de Boniface VIII. Cependant, quand il fut informé, ce qui permet de supposer qu’il n’était pas au courant de l’entreprise de Philippe de Nogaret, il condamna l’agression commise contre le souverain-pontife. Il ordonna d’arrêter tous les auteurs de ce fait qui avaient trouvé refuge dans le royaume et de confisquer leurs biens102. Cependant, à la demande de Philippe le Bel, Charles II pardonna et rendit leur liberté à ceux qui avaient aidé le conseiller du roi de France dans son entreprise contre le pape à Anagni. Fautil penser que par ces actions non dépourvues d’une certaine ambigüité, Charles II voulut, d’une part, remplir ses devoirs de vassal du souverain pontife et d’autre part tenir compte de son appartenance à la famille capétienne ? En tous cas, le roi de Naples se trouvait débarrassé d’un suzerain devenu de plus en plus difficile à supporter. Nicola Boccasini fut élu le 22 octobre 1303 et prit le nom de Benoît XI. Nous avons vu que ce nouveau pape poursuivit l’action de son prédécesseur en Hongrie, en faveur du petit-fils de Charles II, Carobert. Cependant, il ne resta que peu de temps à la tête de la chrétienté car il trouva la mort le 7 juillet 1304, dans un accident domestique alors qu’il résidait à Pérouse. C’est dans cette ville qu’eut lieu l’élection de Bertrand de Got qui s’était toujours tenu à l’écart de la querelle au sein du Sacré Collège entre les deux clans rivaux des Orsini et des Colonna. Il choisit le nom de Clément V. Le nouvel élu était un homme de compromis, soucieux de ménager tout le monde et susceptible d’apaiser les tensions entre l’Angleterre et la France. Il décida de ne pas s’installer en Italie, mais de séjourner plutôt, sur le territoire de son vassal, le comte de Provence. Avignon constitua l’une de ses résidences103. Clément V resta à la tête de la chrétienté jusqu’au 20 avril 1314, date de son décès. Son pontificat fut, donc, d’un peu plus de dix ans. Charles II, étant mort le 5 mai 1309, ce même pontificat peut se diviser en deux parts à peu près égales. La première se déroula du vivant de Charles II, pour cinq ans et demi, approximativement. La seconde, alors que Robert avait succédé à son père dura pratiquement cinq années. Pendant cette période, on peut relever deux décisions favorables de Clément V en faveur du fils de Charles II. Le souverain pontife prit également la défense de Robert d’Anjou quand celui-ci fut l’objet d’une tentative de condamnation de la part de l’empereur Henri VII. A Clément V, succéda sur le trône de saint Pierre, un pape à forte personnalité et les relations entre le roi de Naples et ce dernier furent souvent difficiles durant la longue période pendant laquelle Jean XXII fut à la tête de la chrétienté. A la mort de ce pape, les rapports entre le roi de Naples et le Saint-Siège, avec Benoît furent plus sereins. Il convient, donc, d’aborder celles entretenues par Robert pendant son long règne, de 1309 à 1343, au cours duquel se succédèrent sur le Saint-Siège, outre Clément V, des papes à forte personnalité comme Jean XXII (1316-1334) ou Benoît XII (1334-1342). 4. Robert d’Anjou et Clément V Quand Robert, le nouveau roi de Naples arriva au pouvoir, les deux hommes avaient eu différentes occasions de se connaître car Charles II, durant les dernières années de son règne, lui avait confié une partie des prérogatives qu’il détenait. Robert était, donc, vicaire-général du royaume de Sicile depuis 1296 et, par une bulle de 1297, Boniface VIII l’avait reconnu comme héritier du royaume et des autres domaines détenus par les Angevins. Le fils de Charles II avait obtenu le commandement de la ligue guelfe de Toscane, de la part de la ville de Florence. Comme par ailleurs, son père, pendant les années 1306 et 1307, avait passé la plus grande partie de son temps en Provence, donc en dehors du royaume, Robert avait géré les affaires intérieures de celui-ci, dont l’affaire des Templiers. Toutes ces circonstances avaient donné lieu à des contacts entre Clément V et Robert d’Anjou. La situation de la Provence, à l’intérieur du royaume d’Arles et de Vienne, était toujours la même, les liens entre les deux entités politiques, comté et empire, restant aussi lâches. En revanche, la situation de l’Eglise commençait à être préoccupante dans l’esprit du pape, notamment avec la France. Philippe le Bel insistait pour obtenir la condamnation posthume de Boniface VIII et continuait sa politique d’expansion territoriale aux dépens de l’empire et de la papauté. Un de ses représentants imagina alors un plan de restructuration du royaume d’Arles. Plan de restauration du royaume d’Arles au profit des Angevins D’autre part, à la tête de l’empire, avait été élu Henri VII qui entendait faire respecter les droits qu’il détenait sur le royaume d’Arles et, donc, sur la Provence. Dans ces conditions, le pape craignait de ne plus pouvoir compter sur le roi de Naples pour protéger la papauté. Un des proches de Clément V reprit la vieille idée de faire de Robert et de l’empereur des alliés et non plus des ennemis. De ce fait, le cardinal Stefaneschi pensa à un mariage entre Robert et la fille d’Henri VII, Béatrice de Luxembourg. Cette union des deux familles devait se traduire, également, dans un partage territorial. D’après ce projet, le royaume d’Arles et de Vienne redeviendrait une véritable puissance politique, constituant une sorte d’Etat tampon entre le royaume de France et l’empire. La puissance retrouvée du roi d’Arles, à la tête d’un territoire très étendu et contigu du royaume de France, aurait pour mérite de limiter les ambitions de Philippe le Bel. Ce projet de rétablissement de ce royaume, héritier de l’ancien royaume de Bourgogne convenait à Robert d’Anjou. En effet, ce dernier n’avait jamais renoncé à y placer un représentant de la maison d’Anjou104. En contrepartie de cette transmission du royaume d’Arles à l’Angevin, il était prévu que celui-ci ferait à l’empereur de larges concessions en Italie. Ainsi, au final, se trouveraient trois puissants états : le royaume de France, l’empire et, entre les deux, le royaume d’Arles. Il s’agissait donc d’une restructuration complète des relations entre trois grandes puissances de la chrétienté sous la tutelle spirituelle de la papauté. Des pourparlers s’engagèrent, dès 1309, pour la réalisation de ce projet entre le pape, Clément V, le roi de Naples et ses représentants et ceux d’Henri VII, se poursuivant l’année suivante, sans finalement aboutir à un résultat. Il est difficile de connaître les raisons précises de cet échec. Le roi de France, n’était pas, vraiment, partie prenante dans ces discussions. Il voyait mal s’installer, à sa frontière rhodanienne, un Etat puissant plutôt que trois entités territoriales et politiques de moindre importance comme l’étaient le Viennois, le comté de Savoie ou le comté de Provence. Philippe le Bel pouvait craindre de retrouver aux frontières de son royaume un puissant Etat avec à sa tête 104 P. Fournier, Le royaume d’Arles, op cit., p. 353. 233 l’empereur. Du côté des négociateurs, Robert de Naples et Henri VII, campèrent sur des positions inconciliables quant aux concessions réciproques qu’ils devaient se consentir105. Si le bel échafaudage intellectuel ne permit pas aux Angevins de devenir rois d’Arles et de Vienne, les troubles en Italie qui continuaient entre Guelfes et Gibelins permirent à Robert d’obtenir une promotion de la part du pape, l’accession à la fonction de vicaire pontifical. Roi de Naples et pape en lutte, ensemble, contre les partisans italiens de l’empereur Henri VII Pendant que s’enlisaient les discussions, les luttes continuaient en Italie. En juin 1310, Robert d’Anjou pénétra en Piémont et arriva à convaincre les habitants d’Asti de ne pas respecter l’engagement qu’ils avaient pris à l’égard de l’empereur de ne pas rendre hommage au roi de Naples 28 juillet 1310). Quelques semaines plus tard, le 12 août, le fils de Charles II obtint la soumission de la cité d’Alexandrie. A la fin du mois de septembre, Robert fut accueilli triomphalement à Florence, ville appartenant à une grande coalition guelfe où se retrouvaient également Bologne, Lucques, Sienne, Prato et San Gemignano106. Par ailleurs, au mois d’août (le 19), Clément V l’avait nommé recteur de la Romagne qui venait d’entrer dans le patrimoine de l’Eglise107. L’affaire de Ferrare, quelques années plus tard, confirma cette collaboration entre pouvoir royal et pouvoir pontifical, avec la nomination de Robert d’Anjou comme vicaire pontifical. Ferrare était une principauté indépendant mais vassale de l’Eglise. Un conflit éclata entre les fils du maître de celle-ci, le marquis Azzo d’Este au décès de ce dernier. Chacun des trois frères prétendant à la succession chercha des alliés pour faire triompher ses prétentions, rendant nécessaire l’intervention du suzerain de la principauté, le Saint-Siège. L’un des frères, Fresco, qui tenait la ville, par ailleurs héritier désigné par le défunt, fit appel à Bologne et à Venise. Le pape décida d’intervenir en sa qualité de suzerain de Ferrare. Finalement vaincue et obligée de traiter, Venise abandonna la lutte et laissa la principauté à son sort. Les Ferrarais s’opposèrent à la domination pontificale, maintenant à leur tête, Fresco. Clément V préféra céder le gouvernement direct de la ville, y nommant un vicaire pontifical, en la personne du roi de Naples, Robert, le 15 mars 1314. Sur ordre du souverain pontife, désormais, tous les princes et les peuples de la péninsule devaient prêter hommage à ce dernier.108 Cependant, cette nomination n’eut guère de résultats bénéfiques. En effet, les Ferrarais se soulevèrent contre cette mesure. Ainsi, ce qui aurait pu passer pour un honneur conféré par le souverain-pontife au roi de Naples se transforma en un camouflet subi par l’Angevin. Clément V, par ailleurs, n’hésita pas à prendre la défense de Robert d’Anjou quand Henri VII le fit condamner à mort le 26 avril 1313 pour se venger de l’aide apportée par le roi de Naples aux guelfes insurgés contre le pouvoir impérial, comme nous l’avons vu précédemment . Clément V mourut le 20 avril 1314 à Roquemaure (Gard actuel), quelques mois seulement après Henri VII, décédé à Sienne le 24 août 1313. Le conclave destiné à désigner son successeur se réunit à Carpentras. Il fut long à se prononcer à ce sujet et ce fut seulement le 7 août 1316 que l’Eglise connut son nouveau pape en s’accordant sur le nom de Jacques Duèse, après un long affrontement entre les Italiens et les Gascons. Le nouvel élu exerça son long pontificat de près de seize ans, sous le nom de Jean XXII. Durant ce pontificat, il ne connut qu’un seul roi de Naples et comte de Provence : Robert d’Anjou. 105 Ibidem, p.354-358. V. Vitale, Il dominio della parte guelfa, p.130. 107 Regestra Clementis V, no 10347. 108 Caggese, op cit, t.I, p.201. 5. Robert d’Anjou et Jean XXII Jacques Duèse né à Cahors, à une date non précisée, dans une famille aisée de cette cité, était juriste de formation après des études à Cahors, à Orléans, puis, sans doute, à Montpellier. Il était docteur et professeur dans les deux droits, civil et canonique. C’était un homme d’ordre et d’autorité, bon organisateur. Au cours d’une lente carrière, il avait occupé différentes fonctions au sein de l’Eglise, notamment l’épiscopat de Fréjus et d’Avignon, c'est-à-dire dans le comté de Provence. Il y résida souvent pendant ses temps d’épiscopat entre 1301 et 1306. Il reçut le chapeau de cardinal, des mains de Clément V, en décembre 1312. Quand il fut élu, c’était un quasi vieillard dont l’âge exact reste inconnu à l’heure actuelle. Il connaissait bien, d’autre part, Robert d’Anjou, car le père de celui-ci l’avait nommé chancelier de Provence, en 1308. En effet, Jacques Duèse avait été un proche de Louis d’Anjou et après la mort de celui-ci, son père Charles le prit à son service. C’est sans doute pour celà que lorsqu’il fut élu pape, il fut considéré comme une créature de la cour angevine 109. Enfin, ce fut lui qui, plus tard, procéda à la canonisation du fils de Charles II, Louis d’Anjou, le 7 avril 1317. Pour en terminer avec cette courte présentation de Jean XXII, il convient de rappeler que depuis le mois de mars 1309, le pape résidait en terre de Provence étant donné qu’Avignon était propriété de la Maison d’Anjou et ne passant entre les mains de la papauté qu’en 1348. Robert en arrivant sur le trône de Naples, représentait pour l’Eglise un rempart contre les prétentions hégémoniques de l’empereur, soutenu par les Gibelins, et il fut tout naturellement le chef autour duquel se rallièrent les Guelfes, partisans du pape en terre italienne. De ce fait roi de Naples se trouvèrent ensemble pour lutter contre le roi des Romains. Cependant, sa conception politique basée sur un système monarchique nationaliste et dynastique finit par se heurter à la volonté de l’Eglise de voir les princes gouvernant les différents s’incliner devant elle. Or, Jean XXII s’avéra être un partisan convaincu de ce que les historiens ont appelé la théocratie pontificale. Dans ces conditions, Robert d’Anjou et Jean XXII finirent par avoir des divergences sérieuses, y compris dans le domaine religieux. Entreprises communes de Jean XXII et Robert d’Anjou, en Italie du Nord La descente en Italie de l’empereur Henri VII, commencée avec succès en 1310, se termina par l’échec de l’Allemand. Il avait assiégé Florence en 1313 en pure perte, perdant un temps précieux, mis à profit par le roi de Naples pour se faire élire seigneur à Parme, Crémone, Brescia, Bergame, Lodi et Florence, en quelques mois, au début de cette même année 1313110. Le procès qu’avait engagé l’empereur contre le roi de Naples s’était soldé par un résultat négatif du fait de la position de Clément V, en faveur de Robert d’Anjou. Devant l’attitude du pape, il n’avait pu être couronné à Saint-Pierre, Rome étant sous la menace des troupes du roi de Naples. Finalement, Henri VII mourut le 24 août 1313 de maladie. Avec sa mort, la défaite du gibelinisme avait été consommée en Italie centrale. Cependant, quand arriva sur le trône pontifical, il restait menaçant en Italie du Nord, notamment dans la grande ville de Milan. Celle-ci était tenue par Mattéo Visconti quand les milices du roi de Naples aidées par les guelfes lombards avaient tenté de reprendre en mains cette cité en septembre 1314. En plus de Milan, les gibelins détenaient, dans cette partie de la péninsule, Pavie, Alexandrie, Vérone et Mantoue, 109 R. Caggese, Roberto d’Angio, op. cit., T. II, p.12. R.Caggese, ibidem, t.I, p.188.
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30 MATÉRIEL ET MÉTHODES 31 I-MATERIEL I-1 Matériel Végétal Le matériel végétal, constitué de deux tubercules d'igname blanche non germés d'environ deux mois après récolte et un tubercule germé de Dioscorea rotundata, importés d'Afrique de l'Ouest a été achetés au marché tropical international (Honest Tropical Food) à Atlanta dans l'État de Géorgie. Dioscorea rotundata est un monocotylédone de forme variable, ovoïde, oblongue ou en forme de massue allongée. Cette espèce d'igname est originaire d'Afrique et est la plus cultivée de nos jours. I-2 Matériel technique, réactifs et solutions pour l'étude des protéines I-2-1 Appareillage Le Tableau II représente les matériels techniques utilisés pour l'expérimentation et l'amplification des gènes des protéines. 32 Tableau II : Matériels techniques utilisés pour l'étude des protéines Désignation Un couteau à précision (Bonjour, USA) Quantité 1 Boîtes de pétris de 150 x 25 mm (Fisher Scientific, USA). 30 Une Chambre de croissance EGC-15 (Environmental Growth Chambers, Chagrin Falls, Ohio, USA) Un mixeur (Modèle 31BL91, WARING commercial, USA) Une micro-centrifugeuse du type Beckman, AllegraTM 21R (Beckman Coulter, USA) Un Biophotomètre (Eppendorf, USA) 1 Un thermocycleur (Eppendorf Mastercycler Nexus Thermal Cycler Eco, USA} Une électrophorèse (ThermoFisher Scientific, USA) 1 Un thermocycleur de type PE9600 thermal cycler (Perkin Elmer Corp, Norwalk, CT, USA) 1 1 Rôle Découpage des tubercules d'igname en tranche d'épaisseur égale. Boites d 'incubation des tranches d'igname (3 lots de 5 pour chaque igname ) Incubation des échantillons dans les conditions expérimentales Broyage des morceaux d'igname lyophilisés Centrifugation des extraits de protéines totales et des acides nucléiques Détermination de la concentration de l'extrait d'ARN et d'ADN Amplification des fragments d'ADN de l'igname Séparation sur gel des protéines totaux et l'ADN complémentaire synthétisé de l'igname Les réactions du polymorphisme de longueur des fragments amplifiés en anglais AFLP (amplified fragment-length polymorphism) I-2-2 Produits chimiques et Réactifs Les produits chimiques et réactifs utilisés dans cette étude sont énumérés dans le Tableau III, IV et V. Tableau III : Produits Chimiques et réactif s de l'extraction génétique Désignation Ethanol (Fisher Scientific, USA) Rôle L'éthanol à 75% a été utilisé pour éliminer les contaminants du genre protéines, lipides etc Acétone (Fisher Scientific, USA) Serre à précipiter l'extrait brut des protéines de l'igname Azote liquide (Fisher Scientific, Permet la congélation immédiate des tranches USA) d'igname afin de les conserver à -80°C Le PVP a pour rôle d'éliminer l'excès de (Fisher Scientific, USA) glucides, polyphénols et mucilage Tris Borate EDTA (TBE) Fisher Donne une claire résolution aux fragments de Scientific, USA DNA dont les bandes apparaissent serrées et distinctes ARN later (Ambion INC, USA) Stabilise l'ARN pour éviter sa dégradation Tampon d'extraction des protéines Détergent dont le rôle est de détruire la (EB), Fisher Scientific (Tableau II) membrane cellulaire pour extraction l'ADN Colorant d'extraction (Dye), Coloration des protéines pour la visualisation Fisher Scientific (Tableau II) après l'électrophorèse Le Bleu de Coomassie Brillant Colorant du gel pour visualiser les bandes (CBB) R-250 et le Bleu de d'ADN. Coomassie Brillant (CBB) G-250 (Fisher Scientific) Méthanol, Acide acétique glacial, Serre de solution à la coloration du gel quand on d'eau stérile (Fisher Scientific, y ajoute le bleu de coomassie et de solution de USA) décoloration du gel pour visualiser les bandes Ammonium persulfate (APS) et Ammonium Persulfate est un agent oxydant qui N,N,N',N- s'engrène avec le TEMED pour catalyser la Tétramethylethylendiamine polymérisation de l'acrylamide and bis- (TE ) acrylamide dont les concentrations déterminent la grosseur des pores du gel. 35 Tableau IV : Produits utilisés pour l'étude des protéines de Dioscorea rotundata sur l'électrophorèse Produits Concentrations Tris-Hcl, pH7,5 50 mM EDTA 50 mM DTT 5 mM Triton X-100 0,3 % Ascorbate de sodium 0,3 % PMSF 0,19 mg/mL Tris-HCl, pH 6,8 187,5 mM SDS 6% Glycérol 30 % Bleu de Bromophénol 0,03 % (p/v) DTT 1,25 mM Mélange d'Acrylamide/Bis-Acrylamide 30 % Gel de séparation 14 % Tris pH 8,8 1,5 M (poids/volume) SDS 10 % APS-TEMED 10 % Mélange d'acrylamide/Bis-Acrylamide 30 % Tampon d'extraction Colorant d'extraction Gel de focalisation Tris pH 6,8 1M 3,99% SDS 10 % (poids/volume) APS-TEMED 10 % 36 Tableau V : Produits des Kits d'isolation d'ARN « Promega SV Total RNA » et le kit « Promega Access RT-PCR » (Promega Corp.) utilisés pour l'étude des protéines de Dioscorea rotundata Kits Produits β-mercaptoethanol (BME) Tampon de lyse d'ARN Concentration 97.4 % Pour un flacon de 10 préparations, ajouter 100 μL of BME a 10 mL Tampon de lyse d'ARN Tampon de dilution d'ARN (Tampon Blue) DNase I (lyophilisé) Promega SV Total ARN MnCl2 Tampon de core jaune Solution de DNase stop (concentrée) Solution de lavage d'ARN (concentrée) Eau sans nucléase AMV (Avian Myeloblastosis Virus) Reverse Transcriptase Tfl (Thermus flavus) DNA Polymérase Promega Access RTPCR AMV/Tfl 5X tampon de réaction MgSO4 Mélange de nucléotides (dNTP : dATP, dCTP, dGTP et dTTP) Control positive de l'ARN avec un site porteur Amorce sens qui s'hybride avec séquence complémentaire sur le brin anti-sens Amorce anti-sens se liant quant à elle au brin sens Eau sans nucléase 37 Mélange eau sans nucléase au DNase I selon les indications sur le flacon 0.09M Ajouter 8 mL de 95% éthanol à la 5.3 mL de DNase Stop concentré Pour un flacon de 10 préparations, ajouter 20 mL of 95% éthanol a 11.8 mL de solution de lavage ARN concentrée 5 U/μL 5 U/μL 25 mM 10 mM chacun 1,25 attomoles/μL : 1,25 10-18 moles/μL) 15 μM 15 μM Les séquences des amorces utilisées pour amplifier les fragments d'ADN differenntiellements transcrits sont présentées dans les tableaux Tableau VI et Tableau VII. Tableau VI : Combinaisons d'amorces à trois bases EcoR I/trois bases Mse I utilisées pour l'amplification des fragments de restriction 39 Tableau VII : Combinaisons d'amorces à deux bases EcoR I/trois bases Mse I utilisées pour l'amplification des fragments de restriction 40 II METHODES II-1 Prétraitement des ignames Les deux tubercules achetés, Igname I (YI) et Igname II (YII) et le tubercule germé (IG) sains ont été minutieusement choisis. Ces tubercules ont été abondamment lavés avec de l'eau du robinet et leurs surfaces désinfectées avec de l'éthanol à 75 % pendant 5 minutes. Ils ont été enfin rincés à l'eau pure sans RNase. Les ignames épluchées ont été finalement traités avec de l'ARN Later, un réactif pour stabiliser et protéger l'ARN cellulaire afin de prévenir la dégradation des ARNs durant l'expérimentation. Toutes les expériences ont été réalisées en absence de RNase/DNase. II-2 Échantillonnage des ignames Un couteau à précision a été utilisé pour couper trois tranches de 10 mm à l'extrémité proximale de chaque tubercule. Les tranches ont été placées dans des boîtes de Pétri (150 x 25 mm) pour incubation (Figure 7) pour des analyses ultérieures. La section proximale des ignames a été choisie pour réaliser cette étude sur la base des études d'Irlande et Passam (1984) indiquant que les enzymes batatasins, induisant la dormance dans le tubercule d'igname, sont plus élevés dans l'extrémité proximale que dans les parties distales et du milieu. II-3 Simulation de l'igname post-récolte Les échantillons couverts dans des boîtes de Pétri ont été incubés dans une chambre de croissance EGC-15 (Environmental Growth Chambers, Chagrin Falls, Ohio) pendant 0, 2, 4, 7, et 15 jours à 32 °C ± 2 °C, 50 % ± 5 % d'humidité relative et une photopériode de 12/12 h grâce à des lampes incandescentes pour stimuler les conditions subtropicales et tropicales postrécolte. Les échantillons d'igname germée ont été utilisés comme référence de fin de dormance au jour 0. Les échantillons ont été immédiatement congelés dans de l'azote liquide et conservés à - 80°C au fur et à mesure de leur terme d'incubation. Les disques d'igname congelés dans des boîtes de Pétris ont été lyophilisés et broyées en poudre fine avec un mixeur (modèle 31BL91, WARING commercial, USA) pendant 30 secondes et stockés à 8°C pour des analyses enzymatiques subséquentes des protéines et d'extraction d'ARN. 41 Figure 7 : Représentation schématique des boîtes de pétri contenant des tranches d'igname. Seules quatre dernières boites de pétri ont été incubées dans la chambre de croissance respectivement pendant 2, 4, 7, et 15 jours. II-4 Étude des protéines totales II-4-1 Extraction des protéines Totales Les protéines totales ont été extraites des échantillons d'igname selon le procédé d'Egnin et Prakash (1997). Ainsi, 1 mL de tampon d'extraction a été ajouté et bien mélangé à 150 mg de chaque poudre igname dans une microcentrifugeuse tube de 2 mL. Les échantillons ont été soumis à trois cycles successifs de gel-dégel à -70 ̊C pendant 10 minutes et à une température ambiante de 21-25 ̊C. Les échantillons ont été centrifugés à une vitesse maximale de 14000 rpm (Beckman, AllegraTM 21R, USA) pendant 10 minutes à 4 ̊C et le surnageant a été par la suite transféré dans un nouveau tube stérile et étiqueté comme extrait brut. Trois cents microlitres (300 μL) d'extrait brut ont été précipités avec 1200 μL d'acétone glacé, incubés sur glace pendant 20 minutes et centrifugés à une vitesse maximale de 14000 rpm pendant 15 minutes. Le surnageant est éliminé à l'aide une pompe à vide et le culot est dissout dans 80 μL de tampon d'extraction (EB) dilué au 1/3. Les extraits de protéines totaux ont été analysés sur gel SDS-PAGE. II-4-2 Électrophorèse sur gel de polyacrylamide et coloration au Bleu de Coomassie Dans cette étude, l'électrophorèse sur gel en gradient dénaturant a été utilisé pour la séparation des protéines où l'agent dénaturant est le sodium dodecyl sulfate (SDS). En effet, 10 μL de 3X SDS de dye, colorant d'extraction (Tableau IV) ont été ajoutés à 20 μL de chaque échantillon d'extrait de protéine. L'ensemble a été bien mélangé et rassemblé au fond du tube après une brève centrifugation pendant 30 secondes. Les échantillons ont été incubés à 70 ̊C pendant 10 min, refroidis sur de la glace pendant 5 min puis rassemblé au fond du tube par une brève centrifugation pendant 30 secondes. Les tubes contenant ces échantillons ont été placés dans un bac de glace. L'électrophorèse sur un gel polyacrylamide à 14 % SDSPAGE (Tableau IV) a été réalisée à une tension constante de 150 V pendant 2 heures. Après électrophorèse, le gel a été coloré avec 0,1 % de bleu de Coomassie Brillant (CBB) R-250 et 0,01 % CBB G-250 dans une solution de 40 % de méthanol, 10 % d'acide acétique glacial et 50 % d'eau pendant 30 min pour visualiser les bandes. Le gel a été ensuite trempé pendant 2 heures et sous agitation dans une solution de décoloration constituée de 30% méthanol, 10 % d'acide acétique glacial et 60 % d'eau stérile. Le solvant de décoloration a été changé plusieurs fois jusqu'à décoloration complète de la matrix du gel, c'est à dire 43 élimination du SDS de la matrix. La photo du gel a été enfin prise à l'aide d'un appareil photo de type « FOTODYNE® UV Transilluminator/Digital System » qui est aussi un excellent système pour la visualisation et la photographie numérique de l'ADN séparé par électrophorèse sur gel. Le transilluminateur UV émet une lumière UV à 300 nm, optimale pour l'ADN fluorescent coloré au bromure d'éthidium. II-5 Étude de longueur de fragments amplifiés de l'igname La méthode de DNA fingerprinting de Peter Vos (1995) a été utilisée dans cette d'étude à la différence que le polyvinylpyrrolidone a été ajouté à la solution de tampon de lyse des cellules de l'igname. II-5-1 Extraction des acides ribonucléiques totaux L'ARN total a été isolé à partir de poudre d'igname à l'aide du Kit d'isolation d'ARN « Promega SV Total RNA, USA ». Une étape supplémentaire de centrifugation a été ajoutée au protocole d'extraction de l'ARN total après addition de 2% de polyvinylpyrrolidone (PVP) au tampon de lyse des cellules. L'addition du PVP a pour but d'éliminer l'excès de glucides, polyphénols et mucilage avant de procéder à l'étape de dilution du tampon. Soixante-quinze mg de chaque échantillon ont été mélangés à 1,25 mL de tampon de lyse d'ARN contenant 2 % de PVP dans un tube de microcentrifugeuse de 2 mL et centrifugé à la vitesse maximale de 14000 rpm pendant 3 min dans une microcentrifugeuse Beckman Coulter (AllegraTM 21R, USA). Puis 200 μL du surnageant ont été transférés dans un tube propre et 400 μL de tampon de dilution ont été ajoutés et mélangés par inversion. Le mélange a été chauffé à 70 °C pendant 3 min, pour une récupération optimale de l'ARN total et centrifugé à 14000 rpm pendant 10 min. Par la suite le surnageant a été transféré dans un nouveau tube stérile de microcentrifugeuse sans ARN par pipetage pour éviter de perturber le culot. Un volume de 228,6 μL d'éthanol à 95% a été ajouté au surnageant et mélangé par pipetage. Le mélange a été soigneusement transféré dans une colonne de microcentrifugeuse collectée à un tube de collection, puis centrifugé à 13000 rpm pendant 1 min. Le tube de collection est vidé de son contenu après centrifugation, et 600 μL de solution de lavage SV ARN sont ajoutés à l'assemblage de ne et centrifugés à nouveau 13000 rpm pendant 1 min. Le tube de collection est vidé à nouveau, puis placé sur un rack. Cinquante microlitres de solution froide 44 de DNase I contenant 40 μL de tampon de base jaune (Yellow Core Buffer), 5 μL (0,09 M MnCl2) et 5 μL de DNase I ont été appliquées directement sur la surface de la membrane à l'intérieur du panier d'essorage de l'assemblage de colonne et incubées à 25°C pendant 15 min. Deux cents microlitres de solution d'arrêt SV DNase sont ajoutés directement pour couvrir la toute la surface de la membrane du panier d'essorage contenant les échantillons et centrifugés à 13000 rpm pendant 1 min. II-5-2 Synthèse de l'Acide désoxyribonucléique complémentaire L'ADN complémentaire (ADNc) a été généré à partir de l'ARN total de l'igname en utilisant un kit « Promega Access RT-PCR » (Promega Corp, USA.), combinant la transcription inverse et la Réaction de Chaine Polymérase dans un même tube et en ciblant spécifiquement les ARNm contenus dans l'ARN total selon les instructions du fabricant. Un mélange réactionnel a été préparé selon les volumes des réactifs du tableau cidessous (Tableau VIII). 45 Tableau VIII : Composition du mélange réactionnel pour la synthèse de l'ADN complémentaire Réactifs Volume Concentration Eau sans nucléase 7 μL Tampon de réaction (AMV/Tfl5X) 10 μL 1X Mélange de nucléotides (dNTPs) 1.2 μL 10 mM de chaque nucléotide Amorce (sens) 3,4 μL 50 pmoles Amorce (anti-sens) 3,4 μL 50 pmoles 2 μL 25 mM Transcriptase inverse (AMV) 1,5 μL 5u/μL Tfl ADN polymérase 1,5 μL 5u/μL Échantillon d'ARN ou Control 20 μL Volume final 50 μL MgSO4 46 Trente microlitres (30 μL) de ce mélange réactionnel ont été transférés dans six tubes de PCR et 20 μL d'échantillon d'ARN extrait des échantillons d'igname préalablement incubés pendant 0, 2, 4, 7, 15 jours et de l'igname germée y ont été ajoutés puis centrifugé brièvement à 14000 rpm pendant 30 secondes. Le mélange réactionnel final ainsi obtenu de chaque échantillon a été soumis à une réaction de RT-PCR conformément aux instructions du fabricant selon le programme du Tableau IX. 47 Tableau IX : Programme de l'amplification de l' ADNc Synthèse du premier brin de l'ADNc 48 °C pendant 45 minutes 1 cycle ↓ Inactivation d'AMV Reverse-Transcriptase Dénaturation de l'amorce ARN/ADNc ↓ Synthèse du second brin et amplification par PCR 94 °C pendant 2 minutes 1 cycle 94 °C pendant 30 secondes Dénaturation 60 °C pendant 1minutes Hybridation 68 °C pendant 2 minutes Extension 68 °C pendant 7 minutes 40 cycles 1 cycle 48 20 μL du produit de la RT-PCR ont été visualisés après électrophorèse sur un gel d'agarose de 1,5 % et la concentration de l'ADNc obtenue a été mesurée au spectrophotomètre (Biophotomètre Eppendorf, USA ). II-5-3 Polymorphisme de longueur de fragments de amplifiés L'ARN fingerprinting a été réalisé en utilisant les kits « AFLPTM Analysis System I » à trois nucléotides sélectifs de l'enzyme EcoR I, trois autres nucléotides de Mse I d'amorces sens et le « AFLPTM Analysis System II » à deux nucléotides sélectifs de l'enzyme EcoR I, trois autres nucléotides de Mse I d'amorces sens pour régénérer les gènes différentiellement exprimés en trois étapes selon le protocole du fabricant avec les modifications suivantes : - 500 ng de l'échantillon d'ADNc ont été utilisés pour effectuer la réaction de cDNA-AFLP, - l'étape de dilution (1 : 50) après la réaction de pré-amplification a été supprimée en raison de la concentration de l'ADNc, - l'étape du marquage radioactif de l'amorce a aussi été supprimée. Malgré cette modification, la méthode de RNA fingerprinting s'est effectuée en trois étapes. II-5-3-1 Digestion du cDNA par deux endonucléases de restriction La digestion du cDNA a été réalisée pendant 2h à 37 °C avec deux enzymes de restriction à la fois, EcoR I qui est la première enzyme isolée de la souche RY13 de l'espèce Escherichia coli et Mse I isolée de l'espèce de Micrococcus sp., suivie immédiatement de la ligature des produits de la digestion à la double chaîne d'adaptateur d'EcoR I et Mse I selon la procédure de l'AFLP GIBCOBRL. Adaptateur EcoR I : 5'- CTCGTAGACTGCGTACC-3' 3 ' - CATCTGACGCATGGTTAA -5 ' Adaptateur Mse I : 5'- GACGATGAGTCCTGAG-3' 3'-TACTCAGGACTCAT-5 ' En effet, la digestion de l'ADNc a été réalisée en mélangeant dans un tube stérile de PCR de 0,2 mL, 5 μL de 5X Tampon de réaction, 5 μL de 500 ng/μL d'ADNc, 2 μL de EcoR I/Mse l, pour un volume réactionnel final de 25 μL avec de l'eau distillée. Le contenu a été mélangé au vortex pendant 2 secondes, suivi d'une brève centrifugation de 30 secondes à 13000 rpm. Le mélange a été incubé pendant 2 h à 37 °C. Une seconde incubation a été faite à 70 °C pendant 15 minutes pour inactiver les endonucléases de restriction. Le tube contenant le mélange a été placé sur la glace après une brève centrifugation à 13000 rpm pendant 30 secondes. Le tube témoin contenant 5 μL de tampon 5X, 2,5 μL de 250 ng/μL d'ADNc d'Arabidopsis, 2 μL de EcoR I/Mse l et 15,5 μL d'eau distillée a été traité dans les mêmes conditions que pour les échantillons. Des adaptateurs de séquences bien connues et spécifiques aux enzymes de restriction EcoR I et Mse I ont été immédiatement ajoutés dans le tube de digestion pour effectuer une ligature préférentielle des adaptateurs aux extrémités des fragments de restriction EcoR I/Mse l issus de la digestion afin de générer une matrice pour l'amplification au lieu des fragments EcoR I/ EcoR I et Mse I/Mse l. Ainsi dans cette étude 24 μL de solution d'adaptateur de ligature et 1 μL de T4 d'ADN ligase ont été ajoutés au tube de digestion. Le contenu du tube a été incubé à 20 °C ± 2 °C pendant 2 heures après une brève centrifugation de 30 secondes à 13000 rpm pour rassembler toute la solution au fond du tube. Le mélange de la ligature a été par la suite dilué au dixième (1:10) avec une solution tampon TE (utilisée par la suite pour les réactions d'amplification de l'AFLP). II-5-3-2 Amplification des fragments de restriction La première amplification a été réalisée à l'aide d'amorces de séquences complémentaires aux séquences des adaptateurs et des sites de restriction. Vingt cycles de PCR (94 oC à 30 sec, 56 oC à 60 sec et 72 oC à 60 sec) de fragments de ADNc (ADN génomique) ont été effectuées à l'aide d'un mélange contenant 5,6 μL de matrice d'ADNc dilué à partir de mélange de ligature, 40 μL de mélange d'amorces de pré-amplifications composés d'une paire d'amorce sélectionnée de Mse I contenant un nucléotide sélectionné Mse I + C (5′GATGAGTCCTGAGTAAC-3′) et une amorce sélectionnée d'EcoR I contenant aussi un nucléotide sélectionné EcoR I + A (5′-GACTGCGTACCAATTCA-3′) pour l'AFLP® System Analysis I et une paire d'amorce sélectionnée composée d'une amorce Mse I contenant un nucléotide sélectionné Mse I + C (5′-GATGAGTCCTGAGTAAC-3′) et une amorce sélectionnée d'EcoR I sans nucléotide EcoR I + 0 (5′-GACTGCGTACCAATTC-3′) pour l'AFLP® System Analysis II, 5 μL de tampon 10X PCR plus Mg et 0.4 μL de 5 unités/μL d'ADN polymérase Taq. Les produits de PCR issus de la réaction de pré-amplification sont dilués et sont utilisés comme matrice pour l'amplification. Cette deuxième amplification est une amplification 50 sélective utilisant des amorces identiques à celles utilisées de la pré-amplification mais prolongées à l'extrémité 3' par trois nucléotides sélectionnés de Mse I+3 (5′GATGAGTCCTGAGTAANNN-3′) et trois nucléotides sélectionnés d'EcoR I+3 (5′GACTGCGTACCAA NNN-3′) pour l'AFLP® System Analysis I et trois nucléotides sélectionnés Mse I+3 (5′-GATGAGTCCTGAGTAANNN-3′) et deux nucléotides sélectionnés d'EcoR I+2 (5′-GACTGCGTACCAATTCNN-3′) pour l'AFLP® System Analysis II. N représente les nucléotides A, C, G ou T. L'amplification sélective a été effectuée en utilisant EcoR I et Mse I amorces de l'AFLP Systèmes I et II avec des paires de nucléotides sélectionnées (Tableaux VI et VII). L'amplification sélective a été effectuée en mélangeant dans un micro-tube de 0,2 mL, 5 μL de chaque matrice d'ADNc issue de la pré-amplification, 5 μL d'une mixture (5 μL d'amorce d'EcoR 1 et 45 μL d'amorce de Mse 1) de paires d'amorces sélectives du système AFLP I ou II contenant des dNTPs et 10 μL de mixture contenant 79 μL d'eau distillée, 20 μL de solution tampon 10X pour PCR plus du Mg et 1 μL de 5 unités/μL d'ADN polymérase Taq. II-5-3-3 Électrophorèse sur gel et coloration au nitrate d'argent Les produits des réactions de PCR, les fragments amplifiés, ont été visualisées par électrophorèse sur des gels d'acrylamide et les fragments d'ADN ont été révélés grâce à la technique de coloration au nitrate d'argent. En effet, 20 μL d'échantillon (solution de fragments amplifiés) d'AFLP ont été dénaturés à 90°C pendant 3 minutes et immédiatement refroidis par immersion dans un seau de glace. Quatre microlitres de colorant formamide (9,8 mL de formamide, 0,2 mL de 0,5 M d'EDTA, 5 mg de Bleu de Bromophénol et 5 mg de cyanol xylène dans 100 mL d'eau pure) ont été ajoutés à chaque échantillon d'AFLP. Les échantillons ont été soumis à un gel de polyacrylamide à 6 % (90 mL d'acrylamide 40 % / Bis (19:1), 60 mL de TBE 10X, 252 g d'urée et 600 mL de ddH2O, 150 μL de l'APS et 15 μL de TEMED) (Sambrook et al., 1989 ; Simoes- 51 Araujo et al., 2002), sous une tension constante de 300 V pendant 2 heures après au moins 1 heure de polymérisation et 30 minutes de pré-rodage. La méthode de coloration au nitrate d'argent de Bassam et al. (1991) modifié par Lui, Prakash et Jarret (1995) a été utilisée pour visualiser les fragments différentiellement exprimés sur des gels séquentiels polyacrylamide dénaturés. La plaque d'électrophorèse avec le gel attaché, a été placée dans un Bac à 7,5 % d'acide acétique pendant 15 minutes sous agitation modérée pour arrêter la réaction, puis rincée 2 fois avec de l'eau pure pendant 2 minutes. Le gel lavé a été placé dans un bac avec une solution d'argent 20 minutes sous agitation modérée. Le gel a été retiré de la solution de nitrate d'argent, rincés à l'eau pendant 10 secondes et immédiatement placé dans une solution glacée de révélation jusqu'à ce que les bandes soient visibles. Le gel avec les bandes clairement visibles a été alors transféré dans la solution d'acide acétique pour arrêter la réaction. La plaque contenant le gel a été placée dans un bac contenant 4 % de NaOH et agitée lentement jusqu'à ce que le gel se détache de la plaque de verre. Le gel lavé avec de l'eau a été transféré sur du papier Whatman 3 MM, séché et scanné pour un dépistage moléculaire. II-6 Analyses des données Dans cette étude, la teneur en protéines de l'igname a été analysé sur un gel SDS- PAGE et l'expression des gènes à différents temps (0, 2, 4, 7, 15 jours) au cours de la dormance de l'igname. Les fragments dérivés transcrits générés par cDNA-AFLP ont révélé une expression d'empreintes en fonction des paires de combinaisons d'amorces utilisées. Les différents fragments transcrits exprimés au cours de la dormance de l'igname pendant un temps donné ont été comparé et compté. 52 RESULTATS ET DISCUSSION 53 I RÉSULTATS I-1Analyse des protéines totales L'analyse des gels SDS-PAGE de l'extrait de Dioscorea rotundata incubé aux jours 0, 2, 4, 7, et 15 a montré un profil de bandes. Ces bandes présentent une augmentation légère au cours des 15 jours d'incubation par rapport au témoin au jour 0. Le profil de bande de l'igname germée a révélé une légère décroissance (Figure 8). 54 Figure 8 : Analyse des protéines totales purifiées par SDS-PAGE Panneau A : Profil des protéines de YI Panneau B : Profil des protéines de YII M : Marqueur IG : Igname germée D : Dioscorine 55 I-2 Analyse de l'ARN total L'ARN total a été isolé des tubercules d'igname pour la synthèse d'ADNc. Ainsi l'ARN total séparé sur une matrice de gel d'agarose à 1% a présenté deux distinctes et visibles bandes de l'ARN : Une grosse bande (28S) et une petite bande (18S). L'ARN total isolé en ajoutant 2% de PVP à l'extraction a donné une concentration de 817 ng/L avec une absorbance relative A260/A280 de 1,85 alors que celui extrait sans PVP a présenté une concentration de 299,2 ng/μL avec une absorbance relative A260/A280 égale à 1,43. En suivant la procédure de l'isolation de l'ARN avec le kit « SV Total RNA Isolation System » la pureté de L'ARN isolé doit se situer dans un intervalle d'absorbance relative A260/A280 de 1,7 à 2,1. L'extraction de l'ARN sans PVP a donné des bandes diffuses de la grande et la petite sous-unité de l'ARN (Figure 9). 56 Figure 9 : L'ARN total isolé à partir du tubercule d'igname sur gel d'agarose. Les flèches indiquent 28S et 18S qui sont respectivement les grandes et les petites sousunités de l'ARN des échantillons YI et YII. 57 I-3 Analyse des ADNc générés à partir D'ARNm L'ADNc des ignames I et II synthétisé par la réaction de transcription inverse-PCR a donné au biophotomètre une concentration de 1307,8 ng/μL avec une absorbance relative A260/A280 égale à 1,76. Cet ADNc a été visualisé en électrophorèse sur un gel d'agarose à 1 % et à 1,5 % pour évaluer sa qualité et la concentration du gel approprié. En définitive, l'ADNc a montré un spectre de bandes appropriées avec une meilleure résolution avec le gel à 1,5 % (Figure 10). 58 Panneau A Panneau B Figure 10 : Comparaison de l'ADNc généré à partir de l'ARN total de l'igname I et II dans les mêmes conditions expérimentales afin de déterminer la concentration de gel d'agarose à meilleurs résolution. Panneau A : ADNc de YI visualisé sur un gel d'agarose à 1 %. Panneau B : ADNc de YII visualisé sur un gel d'agarose à 1,5 % CR : Positif Contrôle du kit « Promega Access RT-PCR » 59 I-4 Expression du profil de l'igname Dix-neuf combinaisons de paires d'amorces de nucléotides sélectionnés ont exprimé des fragments différentiellement transcrits, EcoR I-AA/Mse I-CAG ; EcoR I-AG/Mse I-CTA ; EcoR I-AG/Mse I-CTG, etc. (Tableau X). Toutefois, 5 modèles des 19 ont été obtenus avec une sélection de 5 différentes combinaisons de paires d'amorces reproductibles et représentatives des autres. Au cours des 5 jours précis d'incubation aucun fragment différentiellement transcrit n'a été détecté dans les empreintes du cDNA-AFLP de l'igname I avec la combinaison de la paire d'amorces E-TC/M- (Figure 11). 60 Tableau X : Répartition des résultats issus de combinaisons d'amorces EcoR I/Mse I utilisées pour le polymorphisme de longueur de fragments amplifiés. Figure 11 : Expression du profil des fragments transcrits d'ADNc-AFLP d'ARN messager des ignames I et II utilisant la combinaison de paire d'amorces E-TC/M-CTC. M : Marqueur en paire de bases YI : Igname I IG : Igname germée 62 Des motifs des bandes de YI et YII sont apparus avec les sélections de bases d'amorce à deux nucléotides EcoR I et de base d'amorce à trois nucléotides Mse l du cDNA-AFLP, EAA/M-CAG, E -TG/M-CTG, et E-AG/M-CAT (Figures 12 à 16). Ces résultats ont tous présenté un motif de bandes de régulations au cours des 15 jours d'incubation. Les empreintes du cDNA-AFLP ont montré des motifs de bandes de différentes tailles. L'igname I (YI) et l'igname II (YII) dans la Figure 12 avec la paire d'amorce E-AA/MCAG ont montré deux épaisses et visibles bandes de fragments différentiellement transcrits pour YI entre 6000 et 8000 bp, et entre 2500 et 3000 bp au jour 0 et deux épaisses et visibles bandes de fragments entre 4000 et 5000 bp, puis 1000 et 2000 bp pour YII. Au cours des 15 jours d'incubation ces bandes de fragments ont montré une réduction d'expression induite (flèche a). Les bandes d'expression induite accrue (flèche b) sont apparues dans l'igname YI et YII au jour 7 de l'incubation, pendant que l'expression transitoire des bandes (flèche d) s'est déclenchée lors de l'incubation. Les motifs d'empreintes du DNA - AFLP des ignames YI et YII de la Figure 14 ont montré à peu près les mêmes profils de bandes de différentes tailles. Deux épaisses et visibles bandes de fragments différentiellement transcrits ont été observés au jour 0 entre 5000 et 6000 bp, puis 3000 et 4000 bp et une autre bande au jour 2 autour de 3000 bp présentant par la suite une expression induite réduite. L'igname germée quant à elle, a montré une épaisse bande de fragment différentiellement transcrit autour de 3000 bp. La combinaison d'amorce E-AG/M-CAT dans la Figure 16 a montré de différents motifs de bandes pour l'igname YI et YII. Les deux plus épaisses bandes autour de 4.200 bp et 1.800 bp au jour 0 ont montré une réduction de l'expression induite de fragments différentiels transcrits pour l'igname I. 63 Figure 12 : Expression du profil des fragments transcrits d'ADNc-AFLP d'ARN messager des ignames I et II utilisant la combinaison de paire d'amorces E-AA/M-CAG. Flèche a : Expression induite décroissante. Flèche b : Expression induite accrue Flèche d : Expression transitoire M : Marqueur base paire YI : Igname I YII : Igname II IG : Igname germée 64 Figure 13 : Expression schématique élaborée à l'aide « Microsoft Word Hand Free Drawing » de l'ADNc-AFLP d'ARN messager des ignames I et II utilisant la combinaison de paire d'amorces E-AA/M-CAG. Flèche a : Expression induite décroissante. Flèche b : Expression induite accrue Flèche d : Expression transitoire M : Marqueur base paire YI : Igname I YII : Igname II IG : Igname germée 65 Figure 14 : Expression du profil des fragments transcrits d'ADNc-AFLP d'ARN messager des ignames I et II utilisant la combinaison de paire d'amorces E-TG/M-CTG. Flèche a: Expression induite décroissante Flèche b: Expression induite accrue Flèche d: Expression transitoire M : Marqueur base paire YI : Igname I YII : Igna me II IG : igname germ ée 66 Figure 15 : Expression schématique élaborée à l'aide « Microsoft Word Hand Free Drawing » de l'ADNc-AFLP d'ARN messager des ignames I et II utilisant la combinaison de paire d'amorces E-TG/M-CTG. Flèche a: Expression induite décroissante Flèche b: Expression induite accrue Flèche d: Expression transitoire M : marqueur base paire YI : igname I YII : ig name II IG : igname germée 67 Figure 16 : Expression du profil des fragments transcrits d'ADNc-AFLP d'ARN messager des ignames I et II utilisant la combinaison de paire d'amorces E-AG/M-CAT. Flèche a : Expression induite décroissante Flèche b : Expression induite accrue Flèche c: Expression induite constitutive M : Marqueur base paire YI : Igname I YII : Igname II IG : Igname germée 68 Figure 17 : Expression schématique élaborée à l'aide « Microsoft Word Hand Free Drawing » de l'ADNc-AFLP d'ARN messager des ignames I et II utilisant la combinaison de paire d'amorces E-AG/M-CAT. Flèche a : Expression induite décroissante Flèche b : Expression induite accrue Flèche c: Expression induite constitutive M : Marqueur base paire YI : Igname I YII : Igname II IG : Igname germée 69 Les motifs d'expression présentés par les bandes de l'ADNc-AFLP avec les combinaisons de paires d'amorces à deux bases EcoR I et trois bases Mse I, E-AA/ -CAG, ETG/M-CTG et E-AG/M-CAT ont montrés diverses expressions au cours des 15 jours d'incubation. Un total de 15 visibles bandes (5%) ont montré une expression réduite constante (flèche a), 25 bandes (8 %) une accrue constante (flèche b), 9 bandes (3 %) une expression transitoire, et 268 bandes (84 %) une expression constitutive (Les Figures 12, 14 et 16). Par conséquent, 16 % de fragments différentiels transcrits sont différentiellement régulés et 84 % sont exprimés de manière constitutive. Les motifs de fragments différentiels transcrits obtenus par la méthode de cDNA-AFLP dans les ignames I et II utilisant les paires d'amorces sélectives contenant trois nucléotides EcoR I et trois nucléotides Mse I, comme E-ACG/M-CTG et E-ACT/M-CTT sont présentés dans les Figures 18 et 20. Ils ont tous montré différents profils de bandes. 70 Figure 18 : Expression du profil des fragments transcrits d'ADNc-AFLP d'ARN messager des ignames I et II utilisant la combinaison de paire d'amorces E-ACG/M-CTG. Flèche a: Expression induite décroissante Flèche b : Expression induite accrue. Flèche d: Expression transitoire M : Marqueur base paire YI : Igname I YII : Igname II IG : Igname germée. 71 Figure 19 : Expression schématique élaborée à l'aide « Microsoft Word Hand Free Drawing » de l'ADNc-AFLP d'ARN messager des ignames I et II utilisant la combinaison de paire d'amorces E-ACG/M-CTG. Flèche a: Expression induite décroissante Flèche b : Expression induite accrue. Flèche d: Expression transitoire M : Marqueur base paire YI : Igname I YII : Igname II IG : Igname germée. 72 Le cDNA-AFLP utilisant combinaison d'amorces sélectives E-ACT/M-CTT (Figure 20) a également montré de différents modes d'expression à travers les 15 jours d'incubation. Le gel a montré une moyenne de 99 bandes visibles dont 21 (21 %) bandes ont été différentiellement régulés; 4 bandes (4 %) ont présenté une expression induite décroissante; 9 bandes (9 %) ont présenté une expression induite accrue et 8 (8 %) se sont exprimées de manière transitoire au cours des 15 jours. Soixante-dix-neuf des bandes exprimées (79 %) sont des gènes de constitution. L'épaisse bande de fragment transcrit de l'igname germée avec cette amorce est apparue autour de 3000 bp. 73 Figure 20 : Expression du profil des fragments transcrits d'ADNc-AFLP d'ARN messager des ignames I et II utilisant la combinaison de paire d'amorces E-ACT/M-CTT. Flèche a: Expression induite décroissante Flèche b: Expression induite accrue M : Marqueur base paire YI : Igname I YII : Igname II IG : Igname germée 74 Figure 21 : L'expression schématique élaborée à l'aide « Microsoft Word Hand Free Drawing» des fragments transcrits de l'ADNc-AFLP d'ARN messager des ignames I et II utilisant la combinaison de paire d'amorces E-ACT/M-CTT. Flèche a: Expression induite décroissante Flèche b: Expression induite accrue M : marqueur base paire YI : Igname I YII : Igname II IG : Igname germée 75 En comptant les bandes du profil d'expression exprimée sur les cinq (5) gels de la Figure 12 à la Figure 20 avec les cinq (5) combinaisons de paires d'amorces sélectionnées, 28 fragments de dérivés transcrits, représentant environ 5 % du total des fragments de dérivés transcrits, ont présenté une expression induite décroissante (réprimées). Quarante-quatre (44) fragments de dérivés transcrits ont montré un profil d'expression induite accrue, soit à peu près de 8 % du total des fragments de dérivés transcrits et 19 fragments de dérivés transcrits induits soit 4 % ont été transcrits transitoirement. Environ 501 fragments de dérivés transcrits ont montré un profil d'expression de gènes constitutifs correspondant à peu près 83 % du total des fragments de dérivés transcrits. Dans cette étude de la dormance le polymorphisme de longueur de fragments amplifiés avec 19 différentes combinaisons d'amorces sélectionnées a révélé un total d'environ 2250 fragments dérivés transcrits au cours du processus de la dormance. Ces résultats ont suggéré que seulement 17 % (5 % en régression, 8 % en croissance et 4 % transitoire) des gènes montrent des profils d'expression en période de dormance. Par la méthode du cDNA-AFLP, les fragments différentiellement transcrits des protéines ont été isolé et analysé. L'analyse de tous profils des fragments différentiellement transcrits des protéines en utilisant différentes amorces primaires révèle une cinétique de régulation des gènes des protéines au cours au cours de la dormance. 76 II- DISCUSSION Les protéines, codées par les gènes dictent la fonction cellulaire. Des milliers de gènes exprimés dans une cellule particulière déterminent la fonction de cette cellule. Les flux d'informations entre les ADN, les ARN et les protéines donnent à la cellule un contrôle potentiel d'autorégulation de ses fonctions à tout instant en ajustant la quantité et le type de protéines fabriquées. Dans le cas de l'étude de l'igname, beaucoup d'approches d'études ont été menées pour comprendre la complexité du génome de l'igname qui reste jusqu'à présent incompris à cause des contraintes biologiques. La méthode du polymorphisme de longueur des fragments amplifiés s'est avérée très appropriée pour l'analyse génomique. Dans cette étude l'évolution des protéines totale et des gènes différentiellement exprimés pendant 15 jours au cours du stockage post-récolte ont été analysée. II-1 Analyse des protéines totales Dans les deux panneaux de l'analyse des protéines, les bandes de la principale protéine des ignames ont présenté une augmentation légère et constante. Selon les études de Conlan et al. (1995), Hou et al. (1999), et Hou et al. (2001) sur D. cayenensis et D. batatas; Liao et al. (2004) sur D. alata L, D. alata L var. purpurea, et D. Japonica et Lu et al. (2012), la principale protéine des tubercules D. rotundata extraite avec une solution tampon alcaline (Borate ou tampon Tris-HCL buffer, pH 8,3), soumis à une électrophorèse SDS-PAGE et analysés avec un anticorps polyclonal révèle une dioscorine purifiée avec un poids moléculaire de 32 kDa. La dioscorine représente plus de 80% des protéines totales dans les tubercules de D. rotundata (Harvey et Boulter, 1983 ; Conlan et al., 1995 et Gao Qi et al., 2014). Les bandes de protéines observées dans cette étude représentent la dioscorine selon les études précédentes. Shewry (2003) a révélé par une étude antérieure que les principales protéines des tubercules d'igname sont codées par des membres de famille de gènes des classes A et B. Les séquences des protéines des membres de ces deux classes sont à 67–75% identiques à celles de Dioscorea cayenensis dont rotundata est une sous-espèce. De tous les gènes de la dioscorine transcrits progressivement au cours du développement du tubercule, Liu et al en 2017 a isolé cinq isoformes dont Da-dio5 est l'isoforme le plus important. Ce gène subit l'impact de l'action de cinq phytohormones (acide gibbérellique, acide salicylique, acide indole-3-acetique, acide abscisique, et éthylène) de trois abiotiques stress (forte température, basse température et la 77 sècheresse). Ses travaux ont montré que les gènes de la dioscorine ont accumulé progressivement les transcrits au cours du développement des tubercules ce qui explique le profil des bandes des gènes de la dioscorine exprimés dans l'igname I et II. Ce profil est semblable dans les deux ignames. L'augmentation légère et constante de la dioscorine observée dans les ignames étudiées peut s'expliquer par le fait que la dormance est généralement associée à une activité métabolique endogène minimum, résultant en une très faible perte de protéines essentielles, de l'amidon et des sucres (Hariprakash et al., 1996 ; Hamadina, 2011). Les protéines de réserve, produits métaboliques synthétisés dans les organes de multiplication de la plante sont nécessaires pour soutenir la germination des tubercules et la croissance des pousses des nouvelles plantes, comme les semis (Conlan et al., 1995 ; Shewry, 1995 ; Hamadina et Togun et al., 2015). Liu (2017) a aussi montré dans ses travaux que les expressions de la dioscorine ont progressivement diminué dans les tubercules mères pendant la germination et la repousse de l'igname comme notre étude l'a montré. En effet, la levée de la dormance résulte en une augmentation de l'activité métabolique conduisant à la germination et résultant à une diminution du taux de dioscorine accompagnée d'une mobilisation des sucres due à certaines activités enzymatiques de réductions comme l'anhydrase carbonique, le dihydroascorbate réductase et le monodehydroascorbate réductases (Onwnuene, 1978 ; Passam et al., 1977 ; Hamadina et Togun, 2015 ; Liu et al, 2017). Les gènes de la dioscorine dans l'igname germée a montré un taux relativement inférieur à celle des ignames I et II. Ce résultat est similaire à celui rapporté dans l'étude faite sur D. cayenensis et D. batatas par Conlan et al. (1995) ; Hou et al. (2001). En effet, des travaux antérieurs ont montré que l'expression des gènes de la dioscorine diminue graduellement jusqu'à devenir indétectable au cours de la germination et de la pousse (Liu et al. 2017). Les protéines de réserve (dioscorine) des tubercules d'igname utilisées par la plante au cours de la germination et de la plantule peuvent expliquer la légère baisse du taux de dioscorine indiquant que les ignames germées sont au début du stage de levé de dormance. La nature et l'identité des autres bandes ne peuvent pas être confirmées par le fait qu'il n'y a pas d'anticorps pour les analyser par la méthode de Western blot. Ces études physiologiques et biochimiques ont montré des faiblesses à élucider les indices physiologiques et développementales dans les tubercules. Les études génétiques semblent être une approche utile pour mieux comprendre l'aspect moléculaire des gènes exprimés différentiellement au cours des processus de développement. 78 II-2 Analyse de l'ARN total Le Polyvinylpyrrolidone a permis d'éliminer l'excès de glucides, polyphénols et mucilage de l'igname. Donc l'ARN total isolé avec 2 % de PVP a permis d'avoir une meilleure qualité d'ARN comparé à celui isolé sans PVP. II-3 Analyse des ADNc générés à partir d'ARNm La transcription inverse d'ARNm de l'igname a régénéré une bonne qualité d'ADNc (1307,8 ng/μL) avec une absorbance relative A260/A280 de 1,76. La synthèse de l'ADNc est influencée par la qualité de l'ARN total isolé des tubercules (Huang et al., 2001). Sylvie et al. (1995) ont montré des modèles identiques ayant permis de sélectionner une population d'ADNc de chromosomes 17 ou 19 spécifiquement colorés au stage de métaphase sur un gel agarose à 1 %. II-4 Expression du Profil de l'Igname en période de dormance par la technique du cDNA- AFLP A tout temps donné la quantité des protéines reflète une balance entre sa synthèse et sa dégradation biochimique selon les conditions dans lesquelles se trouvent les cellules. Le control de ces processus joue un rôle déterminant dans le profil de gènes codants les protéines. La synthèse des protéines commence par une transcription de l'ADN en ARN messager puis une translation de l'ARN en protéine c'est pourquoi l'ARN messager de l'ARN total extrait (Protocole du kit Promega) contenant les informations codées des cellules de l'igname au cours des temps d'incubation de notre étude a été ciblé. Cinq profils d'expressions obtenus avec cinq différentes combinaisons de paires d'amorces sélectionnés des quatre-vingt paires de combinaisons d'amorces primaires sélectionnées et étudiées ont été présentés. Les fragments dérivés transcrits obtenus avec la paire d'amorce E-TC/M-CTC n'ont pas été amplifiés probablement à cause d'un mauvais ou un faible appariement. McClelland et al. (1995) ont noté que la quantité de fragments dérivés transcrits amplifiés est fonction non 79 seulement de la concentration initiale du type d'ADN complémentaire, mais aussi dépend également de la qualité d'une correspondance particulière entre l'amorce et la matrice. Comme résultat, d'abondants fragments dérivés transcrits avec une pauvre correspondance avec la paire d'amorce sélective E-TC/M-CTC n'ont pas été amplifiés. Les profils d'expressions des dérivés de fragments transcrits détectés avec les 5 différentes paires de combinaisons d'amorces sélectionnées de EcoR I/Mse I (E-AA/M-CAG, E-TG/M-CTG, E-AG/M-CAT, E-ACG/M-CTG et E-ACT/M-CTT) pour étudier l'igname I et II ont révélé trois différents motifs d'expression régulée en utilisant la méthode de AFLP comme indiquée dans la patate douce (Bachem et al., 1996) et le manioc (Huang et al., 2001). Ces profils des empreintes génétiques de l'expression de fragments différentiellement transcrits sont presque similaires pour l'igname I et II, bien que les motifs de fragments différentiels transcrits montrent des changements radicaux en intensité et en poids moléculaires pour chaque bande individuelle au cours des intervalles de jours de dormance 0, 2, 4, 7, et 15 pour chaque paire de combinaison d'amorces. Selon McClelland et al. (1995), la probabilité d'observer une bande de fragment différentiel transcrit est fonction non seulement d'une parfaite concordance d'amorces, mais aussi de l'abondance de l'ARN. Ainsi, les plus rares ARNs seront moins représentés parmi les fragments visibles différentiels transcrits sur le gel, et dans la plupart des cas, ils ne seront pas visibles. La cinétique de différents fragments différentiels transcrits exprimée de l'ensemble des dix-neuf différentes paires de combinaisons d'amorces sélectionnées d'EcoR I/Mse I ont révélé des profils réguliers de polymorphisme de longueur de fragments des gènes amplifiés durant la dormance. L'analyse génomique de ignames I et II a montré que les ARN messagers transcrits aux temps de point de notre étude utilisant ces différents amorces primaires sélectionnées ont révélé un profil de régulation intense des transcrits de gènes des protéines au cours de la dormance. Dix-sept pour cent (17 %) de fragments différentiels transcrits exprimées ont été régulés de manière croissante ou décroissante et transitoire stable (5 % ont présenté un profil d'expression induite décroissante, 8 % un profil d'expression induite accrue et 4 %, un profil transitoire) et 83 % étaient constitutives. Le polymorphisme important observé peut s'expliquer par la présence d'une forte variabilité génétique (Hamrick et al., 1992). Ces résultats sont comparables à ceux obtenus Huang et al. (2001) dans le manioc (1 % de gènes en décroissance, de 7 % en croissance, de 2 % transitoire et 90 % expressions constitutives). Le profil de la régulation des trois expressions du polymorphisme des gènes dans les profils d'empreintes d'ARN fingerprinting dans cette étude a reflété l'état exact du niveau de 80 dormance dans l'igname pendant la post-récolte et les processus biologiques et physiologiques importants qui se sont impliqués. L'approche moléculaire des gènes exprimés a montré que YI et YII étaient à différents stades de dormance. Hashimoto et al. (1972) et Hamadina, Craufurd et al. Les fragments dérivés transcrits révélés représentent les motifs d'expression des gènes qui ont été actifs pendant la dormance, donc le résultat de notre étude suggère que la dormance peut être contrôlée à travers la régulation de ces transcrits. Pour plus d'explications complémentaires sur le processus physiologiquement régulé de la dormance, il sera nécessaire dans les travaux futurs de se concentrer sur la sélection, l'isolement et le séquençage des fragments différentiels transcrits putatifs basés sur leur motif d'expression différentielle et la recherche des homologies des séquences dans les banques de données. Cette étude du profil génomique est un moyen d'étude pour cerner les gènes importants de l'igname pendant le processus de dormance ou le processus de germination. Ces futures études pourraient aider les ingénieurs généticiens à manipuler les gènes de l'igname pour une meilleure qualité. L'étude profil génomique basé sur les gènes différentielllement transcrits de l'igname être donc une base intéressante de départ à l'étude les gènes importants présents dans l'igname dormant en vue de lever la dormance ou de la prolonger dans un but de conservation.
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En effet, pourquoi ne pas admettre, et dans un soucis d'anticipation d'une procédure collective, et dès lors que cela est la volonté du débiteur, l'ouverture d'une liquidation amiable dans la procédure de conciliation. On peut se demander si les chefs d'entreprises de mauvaise foi ne vont pas tenter d'en profiter au détriment de l'intérêt des créanciers. Une telle crainte, d'ailleurs légitime, pourrait être dissipée par l'intervention d'un juge qui pourrait user de ses pouvoirs d'investigation afin d'empêcher toute fraude de la part du dirigeant. Plus concrètement, la technique de la liquidation amiable doit se dérouler sous contrôle judiciaire1510. Pour l'auteur cité, défenseur de cette solution, la liquidation amiable pourrait par exemple convenir à des débiteurs en difficulté qui n'éprouvent plus la motivation et la force nécessaires pour poursuivre l'exploitation de l'activité, et pour ce faire, souhaitent se retirer « honorablement ». Il en résulte qu'il revient au débiteur comme pour toute procédure contractuelle de prévention, de déclencher la procédure en sollicitant du président du tribunal la nomination d'un liquidateur pour procéder à la mise en oeuvre de l'opération de liquidation. Il peut également y être incité après sa convocation par le président du tribunal de commerce ou par celui de grande instance. La mise en oeuvre de la liquidation amiable judiciaire doit pouvoir permettre le désintéressement de l'ensemble des créanciers du débiteur. Le comité d'entreprise ainsi que le ministère public devraient être informés de l'ouverture de la procédure de liquidation amiable1511. Quant aux conditions d'ouverture, celles retenues pour la conciliation pourrait bien convenir en raison de leur pragmatisme. Ainsi décrite, la liquidation amiable est une solution intéressante pour un débiteur certes de bonne foi, mais 1507 Art. L. 640-1 C. com. La liquidation est l'une des propositions du rapport présenté en 2001 par le sénateur J.-J Hyest, il s'agit plus précisément du rapport de l'office parlementaire d'évaluation de la législation portant Prévention et traitement des difficultés des entreprises : une évaluation des procédures et de leur mise en oeuvre, 2001. 1509 Y. Chaput, Prévention des difficultés des entreprises, Propos « partiaux » sur le rapport Hyest, RLDA, mai 202, n° 49, p. 5. 1510 Y. Chaput, la liquidation amiable sous contrôle judiciaire d'une entreprise en difficulté, in Mélanges Michel Cabrillac, Litec, 1999, p 677. 1511 Y. Chaput, art. préc. In Mélanges Michel Cabrillac. 832. Toutefois d'après un autre auteur1513, son application aux procédures de prévention et plus spécifiquement à la conciliation peut s'avérer délicate voire impossible. En effet, selon Monsieur Gaël Couturier dans son ouvrage précité1514, la finalité du droit de la prévention est la sauvegarde de l'entreprise. Or cette finalité n'est pas celle de la liquidation qui au contraire, entraine la disparition de l'entreprise sociétaire. Cette finalité fait donc obstacle à l'utilisation de la liquidation amiable dans le cadre des procédures amiables des difficultés. Par voie de conséquence, la conciliation et encore moins le mandataire ad hoc ne sauraient accueillir la liquidation amiable en leur sein en tant que technique contractuelle de prévention. 833. Quoi que séduisante, et partiellement fondé, l'argument tiré de la finalité ne semble pas pour autant convainquant pour exclure le bénéfice de la liquidation amiable du domaine de la prévention amiable. Il ne doit pas emporter la conviction de tous au regard de la philosophie nouvelle des procédures de prévention de la cessation des paiements. 834. D'abord, s'agissant de la conciliation, Monsieur Couturier omet de relever volontairement ou involontairement que la procédure de conciliation, d'après l'article L. 6114 du code de commerce, pouvait bénéficier au débiteur qui se trouve en état de cessation des paiements à condition que cet état ne date pas de plus de quarante cinq jours. Ce faisant, en admettant la cessation des paiements dans une procédure dite contractuelle, le législateur ne verrait aucun obstacle à ce que la fonction de sanction attachée à la cessation des paiements s'applique dans ces procédures. Pour dire simple, étant donné que la cessation des paiements demeure, malgré la dilution de sa fonction depuis la réforme de 2005, la condition d'ouverture des procédures collectives de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire1515, il n'est pas exclu que la finalité poursuivie par la conciliation ne soit figée au stade de la sauvegarde 1512 Selon l'expression du Professeur Chaput, La liquidation amiable sous contrôle judiciaire d'une entreprise en difficulté, op. cit. 1513 G. couturier, Droit des sociétés et droit des entreprises en difficulté, LGDJ, 2013, p. 216 1514 G. Couturier, op. cit. p. 216. 1515 Pour le redressement judiciaire et la liquidation judiciaire de droit français, v. respectivement les articles L. 631-1 du code de commerce et L. 640-1 du code de commerce. Il ressort de la combinaison de ces textes de loi que l'ouverture de ces deux procédures collectives est conditionnée par la constatation d'un état de cessation des paiements du débiteur, situation qu'on retrouve dans la procédure de conciliation. Le délai de quarante cinq jours ne doit faire perdre de vue que le débiteur est bel et bien en état de cessation des paiements. 422 de l'entreprise. Au contraire, la conciliation peut avoir intérêt à liquider l'entreprise si le maintien de celle ci en activité s'annonce difficile en termes de prospection. 835. Ensuite, depuis l'ordonnance du 12 mars, il est possible d'opérer une cession partielle ou totale de l'entreprise mais qui ne pourrait être mise en oeuvre que dans le cadre d'une procédure ultérieure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire »1516. Autrement dit, la conciliation n'entend pas seulement procéder à la sauvegarde de l'entreprise, mais elle peut servir désormais de cadre à préparer une liquidation future de l'entreprise. En effet, d'après le texte de l'article L. 640-1 du code de commerce cité, « la procédure de liquidation judiciaire est destinée à mettre fin à l'activité de l'entreprise ou à réaliser le patrimoine du débiteur par une cession globale » de l'entreprise. L'affirmation selon laquelle, les procédures de prévention à l'image de la conciliation, tendent à la sauvegarde de l'entreprise n'est donc vraie qu'en partie. Le maintien de l'exploitation dépend de la volonté du débiteur, c'est à lui que revient la décision du maintien en exercice de son activité. Pour dire vrai, les procédures de prévention ont deux finalités, ceux de permettre la sauvegarde de l'entreprise mais aussi de procéder au traitement des difficultés au moyen de la liquidation de l'entreprise. En cela, la liquidation amiable semble parfaitement compatible avec la procédure de conciliation de même que le mandat ad hoc. En effet, dans cette dernière, le caractère souple de sa mise oeuvre permet au président du tribunal, de décider de la solution adaptée à la situation du débiteur. Dès lors, si la volonté du débiteur est de procéder à la liquidation de son entreprise, il ne devrait pas avoir, d'un point de vue strictement juridique, d'obstacle à la réalisation de l'opération à condition que toutes les vérifications soient faites par le tribunal pour désintéresser les créanciers1517. b) La reconnaissance d'un droit d'initiative à certains créanciers dans la procédure de sauvegarde de droit français 836. Les procédures de prévention se singularisent par leur caractère volontaire. Seuls les débiteurs peuvent requérir leur déclenchement en sollicitant le tribunal. Contrairement aux 1516 1517 Art. L. 611-7 alinéas 1. Y. Chaput, art. préc. 423 procédures collectives, les créanciers sont exclus du droit d'initiative de ces procédures. Cette solution a toujours existée dans le droit antérieur et la loi de 2005 et les différentes modifications l'ont perpétuée davantage en fermant le prétoire de la saisine aux créanciers en matière de procédure de prévention. Il peut donc paraître surprenant de vouloir reconnaître un droit d'initiative aux créanciers puisque par hypothèse la loi le leur interdit. Pourtant, il ya de bonnes raisons de penser que ce droit d'initiative pourrait être reconnu à certains créanciers du débiteur en sauvegarde. En effet, l'ordonnance du 12 mars 2014 a considérablement rééquilibré les pouvoirs des créanciers1518 en leur permettant de proposer un plan concomitamment à celui du débiteur. Cette nouvelle mesure qui peut être considérée comme un pas significatif vers la contractualisation du droit des procédures collectives1519 peut constituer une source d'espoir pour les créanciers. En effet, en vertu du principe du parallélisme des formes, si le législateur permet désormais aux créanciers du débiteur membre d'un comité de proposer un plan alternatif qui peut d'ailleurs être retenu par le tribunal, c'est qu'il est possible également de leur reconnaitre le droit de déclencher l'ouverture d'une procédure de sauvegarde. Puisque cela revenant au même, même si les créanciers sollicitent l'ouverture d'une sauvegarde, le débiteur conservera toujours son droit de proposition d'un plan de sauvegarde. Donc en définitive, il ne perd rien, au contraire, le fait que ses créanciers saisissent le tribunal démontre leur bonne volonté de collaboration au succès du plan. Ce faisant, même si l'initiative de l'ouverture de la sauvegarde émane des créanciers, le débiteur ne perd pas droits. Ainsi, les délais de paiements pourront toujours lui être accordés1520. Finalement, au regard de la reforme de 2014 citée, il faut s'attendre à ce que le droit d'initiative en matière de prévention des difficultés leur soit reconnu. 2- L'amélioration des solutions proposées par la nouvelle réforme de l'acte uniforme 837. Les principales solutions instituées par le nouvel acte uniforme concernent l'adoption de la procédure de conciliation d'une part et d'autre part l'institution d'une procédure de règlement préventif simplifiée au profit des petites entreprises. Ces deux procédures marquent une évolution importante du dispositif de prévention de droit Ohada. Toutefois loin de 1518 F.-X. Lucas, « Présentation de l'ordonnance portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives », BJE, 01 mars 2014 n° 2, P. 111 ; M. Rolain, art. préc. v. également Art. L. 62630-2 C.com. 1519 M. Rolain, art. préc. 1520 Art. L. 626-30, « chaque projet de plan peut notamment prévoir des délais de paiement, des remises » 424 constituer des solutions intangibles, elles doivent encore être améliorées sur certains points afin d'être meilleures. Le premier point d'amélioration possible concerne les mesures incitatives instituées en faveur du débiteur. Pour donner plus de chance à l'entreprise d'être sauvée, l'implication des créanciers publics est plus que nécessaire (a). Le deuxième point a trait au régime du règlement préventif qui doit être clarifiée pour une meilleure efficacité (b). enfin pour ce qui est du dernier point à améliorer, il vise l'association du débiteur dans la fixation de la rémunération de l'expert en règlement préventif (c). a) L'élargissement du domaine de la procédure de conciliation aux créanciers publics 838. Le législateur Ohada n'a pas jugé opportun la reconduction de la solution de droit qui consiste à faire des créanciers publics des partenaires indispensables dans le dispositif de prévention. En effet, alors que les créanciers publics occupent une place de choix dans le dispositif de prévention de droit français1521, le droit Ohada semble ne pas accorder un rôle important à ces derniers. Et pourtant dans l'espace Ohada, les créances des administrations publiques sont très importantes et à ce titre, les créanciers de ces organismes devraient être invités à participer aux négociations. La solution adoptée par le législateur africain est d'autant curieuse qu'il reconnaît lui-même que les créanciers publics peuvent être titulaires de créances dont la connaissance par l'expert désigné dans le cadre de la procédure de règlement préventif1522peut permettre de donner d'une exacte information sur la situation du débiteur. En ne retenant que les créanciers privés, le nouveau texte de loi compromet les chances de sauvetage de l'entreprise. En effet, puisqu'ils ne sont pas concernés par la procédure de conciliation, les créanciers publics dont la masse créancière est souvent très importante, peuvent utiliser tous les voies de recours de droit commun pour obtenir le paiement de leur dette. En conséquence, ces actions qu'ils sont en droit d'exercer sur le débiteur peuvent aggraver la situation financière du débiteur. 1521 J.- C. Vallens, « Les remises de dettes publiques », petites affiches 11 juin 2008 n° 117, p. 10 ; A. Lienhard, Sauvegarde des entreprises : remises de dettes des créanciers publics, D. 2007, p. 428 ; R. Valiot, L. Le nève et F. Abitbol, « Les abandons de créances publiques, Gaz. Pal. des 13-14 avril 2007, p. 9 ; P. Gourdain, « Remises des créances : le frein de l'article R. 626-13 du code de commerce, D. 2007, p. 2546 ; B. Lagarde « le fabuleux destin des dettes publiques », Gaz. Pal. des 13-14 avril 2007, p. 3 ; F. Demalle, « Les nouvelles possibilités de participer au remboursement des entreprises en difficulté ouvertes aux créanciers publics par le décret du 5 février 2007, cahiers du droit de l'entreprise, 2007, n° 2, p. 35. L'exemple du droit français permet d'apprécier l'importance de cette catégorie de créanciers dans le dispositif de prévention. En effet, les créanciers publics c'est à dire les administrations financières (trésor public, la douane) et les organismes sociaux en particulier l'Ursaff1523, peuvent faciliter la conclusion de l'accord en acceptant des sacrifices afin d'aider le débiteur à redresser l'entreprise. Ces sacrifices peuvent se présentent sous la forme soit de remises dettes ou l'octroi des délais de paiement au débiteur. Les remises de dettes sont prévues par l'article L.626-6 du code de commerce. Ce texte qui est en principe prévu pour la procédure de sauvegarde est également applicable par renvoi à la procédure de conciliation et à la procédure de redressement judiciaire. Ces abandons de créances publiques doivent être accordés "dans les conditions similaires à celles que lui octroierait, dans les conditions normales de marché, un opérateur économique privé placé dans la même situation"1524. Les remises portent indistinctivement sur les créances privilégiées et les créances chirographaires, faute de distinction dans les textes, peu importe également que les dettes concernées soient antérieures ou postérieures au jugement d'ouverture de la conciliation1525. 840. Ces remises ont pour objet de faciliter la restructuration financière de l'entreprise en difficulté, la poursuite de son activité économique et le maintien de l'emploi1526. Il en résulte qu'elles sont aussi un moyen de faciliter le recouvrement ultérieur des créances, en permettant la poursuite d'activité du débiteur1527. Les créances concernées par ces remises de dettes revêtent un domaine large mais se résument pour l'essentiel aux impôts directs dus à l'état et aux collectivités locales et aux impôts indirects pour lesquels seuls les pénalités entrent le champ d'application des remises1528. 841. De surcroît, les remises peuvent porter sur tout ou partie de ces dettes, ce qui constitue une mesure favorable au redressement du redevable. A coté des remises stricto sensu, le code de commerce1529 prévoit aussi la possibilité pour les créanciers publics tels que définis ci dessus, de fournir d'autres efforts, tels que, des cessions de rang de privilège ou d'hypothèque, l'abandon de sûretés ou encore la possibilité pour le débiteur de bénéficier des délais de 1523 Union de recouvrement pour la sécurité sociale et les allocations familiales . J.-L. Vallens, "Les remises de dettes "LPA, 11juin 2008 n°117, p.10. 1525 J.-L. Vallens, art. préc., n°117, p.10. 1526 F.Perochon, op.cit.n° 153. 1527 J.-L. Vallens, art. préc. n°117, p.10. 1528 J.-L. Vallens, art. préc. n°117. p. 10. 1529 Art. L.626.6 al.3 C.com 1524 426 paiement. Cette dernière mesure incitative est contenue dans l'article L.611-6 du code de commerce. En effet, d'après cette disposition1530si au cours de la procédure, le débiteur est "mis en demeure" poursuivi par un créancier, le juge qui a ouvert cette procédure peut, à la demande et après avoir été éclairé par le conciliateur faire application des articles 1244-1 à 1244-3 du code civil. En revanche, sont exclus du bénéfice des remises de dettes, notamment au titre des impôts indirects, la TVA, la part salariale des contributions et cotisations sociales, ainsi que l'acompte de taxe professionnelle1531. On peut cependant regretter le critère d'exigibilité des créances posé par les textes, ce qui pour certains auteurs pourrait fragiliser ou empêcher le débiteur de résorber ses difficultés. Une généralisation du critère aurait été préférable dans un souci d'éviter la faillite de l'entreprise. L''acceptation du dossier n'est pas acquise à l'avance en raison de la complexité des dossiers et surtout de la brièveté du temps en conciliation. Cela a fait dire que, ces remises risquent de ne pas être fréquentes dans la conciliation1532. Le rôle que pourrait jouer les créanciers publics dans la prévention de la cessation des paiements à travers les remises de dette dans l'espace Ohada est donc incontestable. En effet, la solution adoptée par le droit Ohada amène à penser qu'une entreprise ne peut avoir que des créanciers privés. Ce qui parait peu probable surtout pour les entreprises de l'espace Ohada où les créances publiques sont encore très importantes. 844. Pour des besoins spécifiques à la pratique des affaires en France, la règle de l'ancienneté a été retenue. Ainsi, dans la procédure de conciliation, il est possible au débiteur de négocier un accord avec ses principaux créanciers alors qu'il est en état de cessation des paiements. La nouvelle réforme intervenue en droit OHADA n'a pas adoptée la position française puisque 'après l'article 2 nouveau de l'acte uniforme « la conciliation est une procédure destinée à éviter la cessation des paiements de l'entreprise par la conclusion d'un accord avec ses principaux créanciers et, le cas échéant, cocontractants » Ce choix est doit être approuvé ce serait rendre cohérent le système par rapport à la fonction de cessation des paiements. En outre, cette solution permet d'éviter de brouiller les pistes1534 et de permettre au débiteur d'avoir une claire vision dans le choix de ses procédures 1535. Cela permet comme cela été démontré en droit français, d'éviter de créer une concurrence entre les différentes procédures notamment entre la conciliation et le redressement judiciaire et la liquidation des biens1536 par référence à la cessation des paiements. 845. Toutefois, les deux systèmes garderaient la même approche de la prévention judiciaire. Le règlement préventif et la sauvegarde excluent la cessation des paiements et se singularisent par une omniprésence judiciaire avec toutefois une forte incitation à la 1533 Sous réserve que cet état ne date pas de plus de quarante cinq jours. M. Rolain, art. préc. 1535 La multiplication des procédures en droit français a suscité des critiques de la part de certains auteurs qui pensent que l'avènement d'une nouvelle sauvegarde au lieu de la simplicité recherchée, participe au contraire, à rendre le dispositif plus complexe et complique le choix des dirigeants. Le chef d'entreprendre peut avoir du mal à opérer un choix entre les trois procédures distinctes notamment les petites entreprises qui ne disposent pas souvent de conseils. V. L. Assaya, J. Day et M. Petitjean, « Réforme du droit des entreprises en difficulté : l'ordonnance du 12 mars 2014 », LPA, 18 avril 2014 n° 78, P. 78. 1536 M. Bayle, « L'enchainement des procédures de prévention et de traitement de la cessation des paiements », LPA, 23 octobre 2008 n° 213, P. 3 ; E. Mouial-Bassilana et H. Laurence-Caroline, « L'agencement des différentes procédures instaurées par la loi de sauvegarde », LPA, 14 juin 2007 n°119, P. 39 ; A. Brunet, « Sauvegarde, conciliation et redressement judiciaire : L'illusion diversification des procédures destinées à sauver les entreprises en difficulté », Etudes de droit privé offertes à Paul Didier, Economica, 2008. 1534 428 contractualisation du coté français , l 'association des créanciers du débiteur dans l'é laboration du plan de sauvegarde ayant franchi une étape importante récemment avec la nouvelle ordonnance du 12 mars 2014 laquelle a consacré un équilibre des pouvoirs entre le débiteur et ses créanciers1537. En outre pour les raisons de pragmatisme et d'efficacité, il aurait été indiqué que la conciliation version droit Ohada ne soit pas enfermée dans un délai comme c'est le cas avec le mandat ad hoc en droit français. Il devrait revenir au président de la juridiction compétente de déterminer le contenu de la mission du conciliateur en fonction de l'évolution de la situation de l'entreprise. Pourtant, il est regrettable de constater à la lecture de la réforme que les rédacteurs du texte aient affecté le délai de trois mois avec possibilité de prorogation d'un mois soit finalement quatre mois en tout1538. L'institution du règlement préventif simplifié est la preuve de la prise en compte de la dimension informelle de l'entreprenariat dans l'espace Ohada. L'ancien règlement préventif de droit Ohada ne permettait pas à toutes les entreprises de bénéficier de cette procédure. Autrement dit, le règlement préventif n'était pas adapté à toutes les catégories socioprofessionnelles de l'espace Ohada. Ainsi la création de la nouvelle procédure de règlement préventif simplifiée rend les petites entreprises éligibles à cette procédure puisqu'elle est leur destinée. 847. La procédure de règlement préventif simplifiée concerne les toutes petites entreprises1540 qui n'emploient pas ou presque pas de salariés1541 peu importe quelles réalisent un chiffre d'affaire très faible ou important. Cette procédure simplifiée constitue une véritable opportunité pour le secteur informel de l'espace Ohada qui regorge beaucoup d'entreprise de taille TPE. Son institution peut être perçue comme une réponse aux exigences particulières du 1537 F.-X. Lucas, art. préc. ; M. Rolain, art. préc. Art. 4-4 nouveau de l'avant projet d'amendements cité. 1539 Les articles 5-9 ; 5-10 et 5-1 font référence à la confidentialité de la procédure 1540 Article 1-3 du nouvel AUPCAP. Ce texte définit la petite entreprise comme celle « toute entreprise individuelle, société ou autre personne morale de droit privé dont le nombre de travailleurs est inférieur ou égal à vingt (20), et dont le chiffre d'affaires est n'excède pas cinquante millions (50. 000. 000) de francs CFA, hors taxes, au cour des douzes derniers mois précédant la saisine de la juridiction compétente ». 1541 C.-Saint-Alary-Houin, Droit des entreprises en difficulté, 9è éd. LGDJ traitement des dossiers impécunieux1542. Son caractère simplifié évite sa longueur. Elle est donc économique pour les plus petites entreprises qui ne disposent pas toujours suffisamment de moyens pour supporter les frais des procédures. 848. Par ailleurs, la durée du règlement préventif simplifié est plus brève que celle du règlement préventif de droit commun. Alors que le règlement préventif de droit commun est de trois mois plus un1543, le règlement préventif simplifié est d'une durée inférieure soit deux mois quinze jours1544. Le caractère court de la durée devrait se justifier par la rapidité de la procédure, l'une de ses vocations premières. Ensuite, cette brièveté devrait suffire à réduire si possible l'instrumentalisation de la procédure. L'avant-projet d'amendement préconisait une durée de 2 mois et demie1545 soit 45 jours. La nouvelle n'a donc pas retenu le délai initial tel que voulu par les initiateurs du projet de réforme. Quoi qu'il en soit, comme nous l'avons démontré à propos de la procédure de conciliation de droit français, il est tout à fait maladroit de subordonner le règlement des difficultés d'une entreprise à des questions de délai puisque les entreprises présentent des difficultés de nature diverse. Par conséquent, le traitement de certaines difficultés peut prendre plus de temps que d'autres. Il aurait donc été judicieux de laisser le président du tribunal qui ouvre la procédure, à l'image du mandat ad hoc, le pouvoir de définir au cas par cas la mission du conciliateur sans fixer de délai. 849. Enfin on pourrait aussi se demander si cette nouvelle procédure va revêtir un caractère facultatif à l'image de la liquidation simplifiée de droit français1546. Autrement dit, sera-t-il permis pour le petit débiteur qui bien que respectant les conditions d'application du règlement préventif, de l'esquiver et solliciter en lieu et place le règlement préventif de droit commun? Le caractère facultatif doit être envisagé dans le cadre d'une procédure qui demeure purement volontariste même si la crainte qu'elle ne soit jamais choisie par les débiteurs en raison de sa durée qui est plus brève que celle du règlement préventif de droit commun. 1542 A. Martin-Serf, « La liquidation judiciaire simplifiée : encore plus simplifiée mais en concurrence avec le rétablissement professionnel? », Gaz. Pal., 03 janv. 2015 n° 3 P. 23. 1543 Article 9 ali néa 1er et 13 alinéa 2 nouveau AUC PAC. 1544 Article 24-4 nouveau AUPCAP.. 1546 En effet, dans cet ordre juridique, la liquidation judicaire simplifiée devenait obligatoire si le débiteur, ne possédant aucun bien immobilier, employait au plus un salarié et réalisait un chiffre d'affaires hors taxes d'au plus 300 000 euros. En revanche, l'application demeurait facultative si le débiteur dépassait les seuils précédents, sans dépasser d'autres seuils fixés par la loi. 430 C- La sanction de la violation de l'obligation de confidentialité des procédures préventives 850. La confidentialité est l'une des caractéristiques essentielles des procédures préventives prévues en droit français et en droit OHADA. Les dirigeants y attachent une importance particulière car elle leur permet dans un cadre organisé sous l'égide d'un mandataire de justice et sous le contrôle du président du tribunal compétent d'entamer les négociations en vue de faire face aux difficultés de l'entreprise. La règle de la confidentialité permet ainsi de rassurer le chef d'entreprise sur le fait que les discussions et les renseignements transmis resteront secrets. Les législateurs français et Ohada ont tenu à une application assez étendue de ce principe puisque toues les personnes qui participent à une l'une des procédures préventives doit en avoir connaissance. Par conséquent tous les participants à un mandat ad hoc ou à une procédure de conciliation1547 doivent respecter la règle de la confidentialité. D'une manière générale, la confidentialité est respectée dans les dossiers de prévention1548. Toutefois, le risque de divulgation des difficultés de l'entreprise qui entreprend une démarche préventive existe. En effet, la presse peut se faire l'écho de l'ouverture d'une procédure de conciliation en citant nominativement le nom du débiteur concerné1549, ce qui peut fragiliser les négociations engagées par le débiteur avec ses partenaires. Or en dépit des exigences posées par les articles L. 611-15 du code de commerce et de l'article 5-1 du nouvel acte uniforme, il n'existe aucune sanction en cas de violation de la règle de confidentialité. Pourtant, la mise en oeuvre d'un régime de responsabilité de droit commun pourrait limiter le risque de violation de la règle de confidentialité. Il existe donc en la matière une certaine ité. La règle de confidentialité pourra être violé autant de fois que possible et en l'absence de tout dispositif coercitif, l'auteur de la violation du mécanisme de la confidentialité ne sera pas inquiété. C'est pourquoi, pour être efficace, l'obligation de confidentialité doit être assortie d'une obligation de réparation fortement dissuasive en cas de violation L'action en responsabilité pourrait être ouverte par le dirigeant, le conciliateur devant le président du tribunal compétant qui a ouvert la procédure concernée. 1547 Pour le droit français, v. art. L. 611-15 C. com. et pour le droit OHADA, v. art. 5- 1 nouvel AUPCAP. 1548 D. Caramali, « Droit des entreprises en difficulté : quelques suggestions d'amélioration », D. 2013 p. 2417 1549 D. Caramali,art. préc.p. 40 1550 D. Caramali,art. préc. p. 41 431 ParagrapheII: La diffusion des procédures préventives 851 . Comme cela a été relevé dans nos développements précédents, la prévention n'est pas une notion juridique. Elle relève plutôt d'un état d'esprit, d'une volonté individuelle du dirigeant qui en éprouve le besoin. Aussi, n'étant pas encrée dans la culture de la plupart des dirigeants d'entreprise, il est nécessaire que les solutions de prévention qui sont instituées soient diffusées de la manière la plus large que possible. Cette diffusion sera l'affaire de certains acteurs dont le rôle sera quotidiennement, et selon leur niveau de responsabilité, d'oeuvrer à l'implantation psychologique de la prévention en tant technique de gestion de l'entreprise. Les objectifs fixés à cette diffusion doivent une dimension transfrontalière (A) et ne pas se limiter seulement au plan interne. Mais cela exige que, les acteurs jouent leur partition en les relayant dans l'exercice de leurs fonctions respectives (B). A- Les objectifs de la diffusion 852. Ces objectifs peuvent se résumer à trois éléments essentiels, l'indispensable divulgation des procédures dans chaque ordre juridique respectif (1) leur reconnaissance en droit français et en droit européen (2) et enfin un meilleur encadrement des organes de la prévention en droit Ohada (3). 1- La nécessaire connaissance des procédures de prévention en droit interne et dans chaque espace communautaire respectif 853. Si au niveau législatif des textes sont prévus pour permettre aux dirigeants de s'attaquer aux difficultés des entreprises, leur sauvegarde ne pourra être effective que si les procédures ainsi instituées sont connues des personnes qui sont censées les mettre en oeuvre. Ainsi, une campagne nationale et régionale sur le thème de la prévention1551 pourrait permettre de renforcer leur connaissance auprès des chefs d'entreprise. Plus concrètement, il s'agira de lancer une vaste campagne d'information et de sensibilisation à l'échelle nationale 1551 A. Outin-Adam et S. Bienvenu, « Relancer le réforme des textes sur la prévention et le traitement des difficultés des entreprises, Axes de réflexion préconisés par la CCIP », Semaine juridique entreprises et affaires 2003, n°27 p. 1114. 432 et communautaire1552. Ce mouvement de sensibilisation devrait aussi se décliner au niveau local via le relais que sont les experts comptables et les avocats. En effet, il apparaît bien souvent que les chefs d'entreprise ignorent l'existence de ces mécanismes de prévention. Comme cela a été très justement souligné par des auteurs1553 « la prévention - anticipation est avant tout un problème d'information et de communication ». Il est donc impérieux que tout dirigeant soit informé de l'existence de ces solutions si au cours de l'exploitation de son activité, il arrivait à rencontrer des difficultés, il pourrait réagir et faire face à ces difficultés. Il faut que le dirigeant soit rassure par l'existence des ces mesures et qu'il se dise qu'elles constituent un réel espoir de sauvegarde de son entreprise. Le dirigeant en difficulté doit savoir qu'en se rendant au tribunal compétent, il pourra évoquer ses problèmes non pas avec un juge mais plutôt avec un autre chef d'entreprise voire un autre partenaire1554. Pour cela, il doit réagir très rapidement car la prévention est incompatible avec la négligence, car il y a un temps pour la prévention qu'elle soit amiable ou judiciaire. Passée cette période, les chances d'éviter la cessation des paiements sont quasiment impossibles et la seule alternative qui reste est dans la majorité des cas la liquidation judiciaire. Ce qu'il faut donc dire aux dirigeants, que la prévention doit être considérée pour eux comme une technique de gestion de l'entreprise. Ce faisant, il faut promouvoir tant au plan interne comme au plan communautaire ces outils de traitement amiable ou judiciaire des difficultés des entreprises. Au plan interne, et s'agissant du droit français, les dirigeants doivent savoir qu'il existe désormais deux techniques de prévention amiables de la cessation des paiements 1555 et trois procédures judiciaires de pré judiciaire de la cessation des paiements1556. Pour le droit Ohada, les dirigeants des entreprises de l'espace Ohada doivent désormais se familiariser avec la procédure de conciliation mais aussi le règlement préventif, qui demeure toujours l'unique procédure judiciaire de prévention dont le concordat préventif constitue la technique de mise en oeuvre1557. 1552 On songe ici, aux pays membres de l'Ohada qui doivent promouvoir la prévention au niveau de la zone Ohada. 1553 A. Outin-Adam et S. Bienvenu, art. préc. 1554 A. Outin-Adam et S. Bienvenu, art. préc. 1555 On pense dans cette hypothèse aux procédures de conciliation et de mandat ad hoc 1556 Sont visées ici la procédure de sauvegarde de droit commun et les deux autres procédures dérivées que sont la sauvegarde accélérée et la sauvegarde financière accélérée, cette dernière étant considérée depuis la réforme de 2014 comme une variante de la première en ce qu'elle a fait perdre le caractère financier obligatoire à l'ouverture d'une telle procédure. V. sur la refonte de la sauvegarde financière accélérée après l'ordonnance du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises en difficulté et des procédures collectives, L. Assaya, J. Day et M. Petitjean, Réforme du droit des entreprises en difficulté : l'ordonnance du 12 mars 2014, Petites affiches, 18 avril n° 78, P. 6 ; L.-C. Henry, L'ordonnance n°2014-3 du 12 mars 2014 et l'ouverture des procédures, Gaz. Pal., 08 avril 2014 n° 98, P. 15. 1557 S. Kokou Evelamenou, Le concordat préventif en droit Ohada, Thèse de doctorat, université Paris –Est 2012. 433 854. Au plan communautaire, l'effort doit être mené de la même manière que dans l'ordre interne. Il s'agira dans cette optique de mandater chaque Etat membre afin de faire connaître aux autres Etats membre de l'union, les mesures de prévention contenues dans son ordonnancement juridique de sorte à aboutir à une harmonisation des procédures de prévention. Si pour le droit Ohada, le problème de la connaissance ne se pose pas en raison de l'harmonisation du droit des entreprises en difficulté dans l'espace communautaire africain, en revanche, s'agissant du droit français, le problème de la reconnaissance des procédures de prévention par les autres États membres pourrait se poser nécessairement. 2- La nécessaire reconnaissance des procédures de prévention de droit français en droit européen 855. Pour rappel, le droit français de la prévention s'articule autour de cinq procédures en la matière. Il y a d'une part les deux procédures amiables que sont le mandat ad hoc et la conciliation, et d'autre part, la procédure de sauvegarde avec ses deux démembrements, la sauvegarde accélérée et la sauvegarde financière accélérée. Toutes ces procédures ne sont pas logées à la même enseigne au niveau du droit communautaire européen. Autrement dit, elles ne sont pas toutes considérées comme des procédures collectives d'insolvabilité1558 au regard de l'article premier du règlement du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité1559. Le règlement est en effet applicable aux procédures qui entrainent le dessaisissement partiel ou total du débiteur ainsi que la désignation d'un syndic. 856. Dès lors trois critères principaux sont exigés pour l'application du règlement. D'abord, excepté les entreprises d'assurance, les établissements de crédit et autres entreprises d'investissement et de placement collectif, le règlement reste applicable à tous les débiteurs des procédures collectives de droit français. Ensuite, le règlement concerne les procédures fondées sur l'insolvabilité1560 du débiteur c'est-à-dire la situation dans laquelle le passif du débiteur est supérieur à son actif. De ce point de vue, sont concernées en droit français, le 1558 La notion de procédure d'insolvabilité n'est pas définie par le règlement. La convention de Genève Unidroit sur les titres intermédiés la définit comme « une procédure collective judiciaire ou administrative, y compris une procédure provisoire, dans laquelle les actifs et les activités du débiteur sont soumis au contrôle ou à la supervision d'un tribunal ou d'une autre autorité compét aux fins de redressement ou de liquidation », V. cette définition dans Convention de Genève Unidroit sur les titres intermédiés, 9 oct. 2009, art. 1 er, cette convention est consultable sur le site de Unidroit : www.unidroit.org. 1559 Ph. Roussel Galle, Bref aperçu sur le règlement du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité, Petites affiches, 13 mars 2007 n° 52, P. 3 1560 V. pour plus de détails sur cette notion, ns développements supra, n° 751 434 redressement judiciaire et la liquidation judiciaire puisque dans ces deux procédures, le débiteur doit être nécessairement et obligatoirement en état de cessation des paiements. La question se pose en revanche pour la sauvegarde puisqu'elle figure désormais au nombre des procédures d'insolvabilité visées par l'annexe A du règlement de 2000. Il est en revanche notable que le mandat ad hoc et la conciliation sont exclus du champ de vision du règlement et par voie de conséquence ces deux techniques de prévention ne figurent pas dans l'annexe A du dit règlement. Si pour le mandat ad hoc, la solution peut se comprendre aisément en raison de son caractère purement confidentiel, l'exclusion de la conciliation est discutable et le souhait de sa reconnaissance par le texte serait la bienvenue. En effet, comme le relève un auteur1563, la typologie des procédures collectives actuelles est différente de celles qu'on pouvait constater dans le droit antérieur. Non seulement leur nombre est croissant mais surtout elles sont fondées de plus en plus sur des critères qui tiennent compte du paysage économique. 858. A ce titre, il y a des procédures de redressement fondées sur l'insolvabilité et des procédures fondées sur le risque d'insolvabilité parfois même sur de simples difficultés financières. De ce point de vue, le règlement dans sa rédaction actuelle parait inadapté au nouveau contexte économique et le projet de sa révision est le bienvenu. Ce faisant, l'argument qui consiste à exclure la conciliation du domaine d'application du règlement motif pris de ce qu'elle n'entrainerait pas dessaisissement du débiteur d'une part et d'autre qu'elle demeurerait une technique confidentielle de traitement des difficultés parait discutable1564. 1561 V. sur les arguments qui ont justifiés la reconnaissance de la sauvegarde par le règlement et sur la question de la désignation d'un administrateur en sauvegarde, solution écartée en ce quelle aurait conduit à l'application de solutions variables à la même procédure, Ph. Roussel Galle, art. préc . 1562 C. Saint-Alary-Houin, Droit des entreprises en difficulté , 9 èd., op.cit. p. 937. 1563 J.-L. Vallens, « Réviser le règlement communautaire CE 1346/2000 sur les procédures d'insolvabilité », Rev. proc. coll. mai-juin 2010, études 13. 1564 Ph. Roussel Galle, art. préc. 435 859. D'abord, comparativement à la sauvegarde, la conciliation se présente comme une procédure d'insolvabilité puisqu'elle admet comme condition d'ouverture la cessation des paiements, ce qui n'est le cas de la sauvegarde. Aussi, le règlement ne définit toutefois pas ce qu'est « l'insolvabilité » du débiteur. En revanche, face à l'impossibilité de parvenir à un critère harmonisé, il laisse le soin aux lois nationales d'en définir le contenu en raison de la disparité des termes utilisés par chaque législation. Ce qui n'empêche pas malgré, ce paysage juridique bigarré, l'existence d'une réelle volonté commune de recherche de solutions de redressement et de sauvetage des entreprises et le souci de concilier des intérêts à priori inconciliables1565. 860. Ensuite, le critère de dessaisissement partiel ou total est inopérant dans la mesure où il a été supprimé en sauvegarde. Ce n'est donc pas un critère déterminant pour être éligible au règlement. En outre, la question relative à la confidentialité de la conciliation est beaucoup moins avérée, dans la mesure où plusieurs de ses autres caractéristiques montrent bien qu'elle y échappe par moment, avec notamment la présence du ministère public ou même la publicité du jugement d'homologation de l'accord. Pour dire simple, la procédure de conciliation, à l'instar de la sauvegarde devrait figurer à l'annexe A du règlement en tant procédure d'insolvabilité. Puisque le critère d'insolvabilité c'est-à-dire la cessation des paiements n'est plus désormais un critère de distinction entre les procédures amiables et les procédures collectives, il est donc logique qu'une procédure d'insolvabilité ne soit plus c ée par référence à ce critère. 861. Dans cette même perspective, il devrait désormais exister deux catégories de procédures d'insolvabilité. D'une part celles qui opèrent un dessaisissement partiel ou total du débiteur. D'autre part, celles qui n'entrainent pas un quelconque dessaisissement du débiteur. Dans le premier, seront concernées le redressement judiciaire et la liquidation judiciaire et dans le second cas, les sauvegardes et la conciliation. Ainsi, la reconnaissance de la conciliation permettrait aussi au niveau communautaire de faire application des règles de compétences de juridictionnelle. Ainsi, la décision d'ouverture d'une procédure de conciliation en France devrait produire ses effets dans tous les autres Etats membres sans aucune formalité. La loi applicable serait alors la loi du for. Dans cette approche de droit prospectif, serait il envisageable de parler de procédures européennes de prévention des 1565 Rédaction Lextenso, Etude comparative des différentes procédures d'insolvabilité, Gaz. Pal., 5 mai 2015 n° 125, P. 7. 436 difficultés des entreprises? En tout état de cause, en attendant l'entrée du nouveau règlement européen insolvabilité au printemps 2017, il est regrettable de constater une fois de plus l'exclusion de la conciliation du domaine dudit règlement1566. En revanche, l'adoption d'une définition suffisamment large de la notion de procédures collectives qui peut désormais inclure qu'une partie des créanciers dès lors qu'elle est importante permet de rendre éligibles les deux procédures de sauvegarde accélérée1567. Par conséquent, elles feront partie du champ d'application du nouveau règlement européen relatif aux procédures d'insolvabilité. 3- L'encadrement juridique des organes de la prévention en droit Ohada 862. L'efficaci té du s ystème de prévention traitement du droit Ohada passe aussi par la formation des juges chargés d'appliquer les mécanismes de prévention prévus à cet effet (a) mais aussi par un meilleur encadrement des organes déjà existants (b). a) La formation des juges de la prévention 863. On ne saurait envisager ou imaginer une véritable prévention de la cessation des paiements si les acteurs qui sont chargés d'appliquer les mécanismes destinés à mettre fin à cet état ne sont pas suffisamment outillés. Dans l'espace Ohada, cette approche ne doit pas être une vue de l'esprit. Les juges africains doivent être afin de donner plus de dynamisme au droit OHADA. Plusieurs raisons pourraient justifier cette solution. D'abord avant toute autre considération, il y a une véritable crise de la justice africaine due au manque de connaissance des magistrats dans la résolution de certains litiges. Le spectacle auquel il est souvent donné de voir dénote bien souvent l'impuissance et de la médiocrité de certains juges dont la formation au rabais confrontée aux dossiers complexes finit par se montrer au grand jour. Un jugement inédit rendu par le tribunal de MFOUNDI1568 1566 V. Legrand, « Le nouveau règlement européen relatif aux procédures d'insolvabilité transfrontalières : premier aperçu », Petites affiches, 22 janvier 2015, n° 16, p. 8. Le même argument avancé sous l'empire du règlement n°1346 du 29 mai 2000 persiste toujours. En effet, les nouveaux rédacteurs indiquent une fois de plus que seul le caractère public de la procédure doit être retenu en ce qu'il permet l'intégration de la procédure dans l'annexe A du dispositif, car c'est le gage de la protection des créanciers pour qu'ils puissent présenter leurs créances. Pour un aperçu plus large de la réforme de l'insolvabilité, M. Menjucq, Le nouveau règlement insolvabilité : quelles évolutions? Bulletins Joly Entreprises en difficulté, 01 juil. 2015 n°4, p. 259 ; L. C. Henry, Harmonisation, vous avez dit harmonisation? De l'influence du règlement insolvabilité révisé Bulletins Joly Entreprises en difficulté, 01 mai 2015 n°3, p. 133. 1567 V. Legrand, art. préc. 1568 E. M. Koumba, Prévenir les difficultés des entreprises, op. cit. n° 274, p. 231. 437 au Cameroun peut être cité à titre d'illustration. Saisi dans le cadre d'une procédure en règlement préventif, le juge de la juridiction compétente. a éprouvé des difficultés à délimiter la ligne de démarcation entre la cessation des paiements et celui de la situation financière difficile mais non irrémédiablement compromise. Dans cette affaire, le magistrat avait dans un premier temps admis le règlement préventif, car il avait jugé que la situation de l'entreprise était certes difficile mais non irrémédiablement compromise comme le prévoyait l'ancien l'article 2, alinéa 1 de l'acte uniforme relatif aux procédures collectives d'apurement du passif. Mais contre toute attente, il changeait sa décision plus tard, en arguant cette fois ci que la situation de l'entreprise était plus grave qu'il ne l'avait envisagée. Dès lors, la situation de l'entreprise est irrémédiablement compromise, la procédure indiquée devrait donc être celle du redressement judiciaire et non celle du règlement préventif. En clair, le juge devrait dans cette affaire constater d'office la cessation des paiements du débiteur au regard des informations fournies et statuer si le délai de trente jours qu'il doit accorder au débiteur pour déclarer lui-même cet état de cessation des paiements n'est pas respecté1569. Il est certain comme nous l'avons déjà souligné que le risque de confusion entre ces concepts était possible. De ce point de vue, les hésitations observées dans l'attitude des juges africains pour se sortir de ces écueils terminologiques ne doivent pas surprendre. Mais cela dénote tout de même l'impérieuse nécessité de maitriser toutes les subtilités de la matière. La formation des juges s'impose plus que jamais. La formation devrait être orientée à deux objectifs D'abord une formation théorique est nécessaire. En cela, l'ERSUMA c'est à dire l'Ecole Régionale de la Magistrature de Porto Novo au Bénin doit jouer un rôle majeur. Les conditions de formation doivent être les plus rigoureuses possibles. La formation ne doit pas se limiter seulement au seul droit des entreprises en difficulté mais à l'ensemble des matières au confluent de cette matière car le droit des entreprises est une discipline carrefour. Cette école doit pour cela être dotée de tous les moyens nécessaires à la bonne formation des futurs juges appelés à appliquer le droit Ohada, car, il ne faut se méprendre sur cette exigence, la sécurité des affaires en dépend largement. 865. Ensuite comme le droit Ohada est un droit embryonnaire, la formation doit s'exercer sur un plan pratique à travers des colloques, des conférences animées par des praticiens, 1569 Article 29 alinéa 2 de l'acte uniforme 438 notamment des avocats, des professeurs d'université, des greffiers, des banquiers et des juristes d'entreprises. Enfin, s'agissant plus particulièrement de la prévention, elle n'est donc pas encore encrée dans la pratique des affaires. Or la prévention nécessite certaines qualités de la part des juges. Ces derniers doivent être des partenaires et non des adversaires du dirigeant. Or justement, c'est là la difficulté. Il est en effet difficile pour le juge d'ôter son habit de juge sanction et de se replacer dans ceux d'un véritable partenaire de l'entreprise en difficulté. C'est pourtant à ce niveau que des efforts au niveau africain doivent se faire. Il faut parvenir à vaincre cette appréhension que les africains ont de la justice, cette peur à tort ou à raison que les dirigeants d'entreprise africain éprouvent l'égard des tribunaux mais qu'on peut comprendre1570. 866. Pour cela, les juges africains pourraient bénéficier dans le cadre de partenariat de l'expertise des juges français en la matière. En effet, les tribunaux de commerce ont développé des cellules de prévention spécialisées qui aident les chefs d'entreprise à exposer leurs difficultés en toute confidentialité. Ces cellules d'écoute qui sont beaucoup présentes au tribunal de commerce de Paris pourraient d'être d'un apport précieux pour les juges africains. En outre, le droit Ohada est un droit transfrontalier qui n'est plus étranger aux juristes et avocats français qui y consacrent désormais beaucoup d'articles et de conférence. La plupart des actes uniformes sont pour la plupart pour ne pas dire tous des reprises ou des adaptations du droit français antérieur. Ainsi, dans le cadre dette formation, ces hommes de droit français « africanisés » n'éprouveront pas de difficultés à apporter leur savoir faire à leurs homologues africains. Mais pour que cette formation puisse produire un effet significatif sur les décisions qui pourront être rendues, certains maux inhérents à la justice africaine devront être résolus. En effet, l'instrumentalisation politique de l'appareil judiciaire1571, les problèmes de corruption1572, le manque de moyens financiers, la vétusté des locaux, l'absence de moyens informatiques pour assurer la rapidité des décisions, sont autant de problèmes auxquels il faudra apporter des réponses courageuses et appropriées. Les pouvoirs publics devraient donc en faire une priorité s'ils souhaitent vraiment voir l'Afrique jouer un rôle majeur dans l'économie mondiale. 1570 Les chefs d'entreprise privilégient d'une manière générale les arrangements à l'amiable que les solutions judiciaires. D'abord parce que, régler un litige devant les tribunaux est perçu comme une infamie, déshonneur en raison de l'image de chef qu'on a auprès des siens. Ensuite, la plupart du temps, ils ignorent clairement l'existence de ce mode de résolution des contentieux ou encore plus anecdotique, pour le petit dirigeant, tribunal est synonyme de prison. 1571 J. Dubois De Gaudusson, « Le statut de la justice dans les Etats d'Afrique francophone », in la justice en Afrique, documentation française, 1990, p. 10. 1572 S. Coulibaly, La pratique du contentieux administratif Malien de l'indépendance à nos jours, Thèse de doctorat Nice 2007, p. 336.
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Busy : un marqueur du progressif en anglais d’Afrique du Sud. Sciences de l'Homme et Société. 2021. &#x27E8;dumas-03542401&#x27E9;
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Busy : un marqueur du progressif en anglais d’Afrique du Sud ’Juana ndrina HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés Busy : un marqueur du progressi ’ N’Juana FLANDRINA Sous la direction de GARDELLE Laure UFR Langues étrangères Mémoire de master 2 Langues Littérature et Civilisation Etrangère et Régionale – 30 crédits Parcours : anglophone Année universitaire 2020-2021 Re ements Je souhaite tout d’abord remercier ma directrice de mémoire, Mme Gardelle Laure, qui, par sa bienveillance et ses conseils les plus précieux, m’a permis de donner le meilleur de moi-même dans l’écriture de ce mémoire et d’aller plus loin dans le développement de mes idées. Je remercie également mon entourage familial mais aussi amical qui m’a soutenu tout au long de ce processus fastidieux en s’intéressant à mon projet et en croyant en moi même lorsque je n’y croyais pas. Et je remercie spécialement ma mère pour m’avoir encouragé et motivé du début à la fin, d’avoir été mon plus grand soutien émotionnel et d’être toujours présente lorsque j’ai beso d’elle. C’est grâce à toutes ces personnes que ce mémoire a pu voir le jour, Merci à vous. ................ 3 Sommaire................................................................................................................................ ................ 5 Introduction............................................................................................................................................. 7 Partie I....................................................................................................................................... 10 Busy dans le contexte sud-africain : anglais, afrikaans et contacts linguistiques...................... 10 Chapitre 1 - Spécificités linguistiques de l’anglais d’Afrique du Sud.................................................. 11 1.1 : Contexte historique................................................................................................................... 11 1.2 : L’anglais : une langue seconde?............................................................................................... 13 1.3 : L’anglais d’Afrique du Sud : une variété parmi d’autres.......................................................... 14 1.4 : l’anglais synonyme de réussite?............................................................................................... 16 1.5 : Indigénisation de la langue........................................................................................................ 17 1.5.1 : Caractéristiques phonologiques de l’anglais d’Afrique du Sud......................................... 18 Chapitre 2 - Busy et le progressif en néerlandais et en afrikaans.......................................................... 21 2.1 : Influence néerlandaise sur le progressif.................................................................................... 21 2.2 : Construction du progressif busy en néerlandais et en afrikaans................................................ 25 Chapitre 3 - Busy : comparaisons entre South African English et anglais dit ‘standard’...................... 30 3.1 : Busy en anglais dit ‘standard’.................................................................................................... 30 3.1.1 : Busy et disparités de sens selon les variétés d’anglais....................................................... 34 3.2 : Fonctionnement de la grammaticalisation................................................................................. 35 3.2.1 : Une grammaticalisation commune à toutes les variétés de SAfE?................................... 39 3.3 : Le progressif « Be + ing » : un parallèle relatif......................................................................... 41 3.3.1 : Comprendre la notion d’aspect........................................................................................... 41 3.3.2 : Progressif en anglais dit ‘standard’ et verbes d’état........................................................... 45 3.3. 3 : Exceptions ou compatibilité due au contexte?.................................................................. 47 3.3.4 : Etudes menées sur l’acceptation des verbes d’état au progressif....................................... 51 3.4 : Le cas du South African English............................................................................................... 54 Partie II...................................................................................................................................... 57 Analyse du progressif « be busy + ing » en contexte sud-africain............................................ 57 Chapitre 1 - Collecte des données et difficultés rencontrées................................................................. 58 1.1 : Collecte des données................................................................................................................. 58 1.2 : Difficultés et limites du corpus................................................................................................. 60 5|Page Chapitre 2 - Busy et l’aspect progressif en South African English....................................................... 62 2.1 : Busy au progressif décrivant une situation ‘en cours’............................................................... 62 2.2 : Busy au progressif décrivant d’autres formes de point de vue interne...................................... 64 2.3 : Quelle construction choisir dans ces contextes?...................................................................... 66 Chapitre 3 – Busy et le « progressive meaning »................................................................................... 70 3.1 : Busy au progressif exprimant le futur........................................................................................ 70 3.2 : Busy au progressif exprimant l’habitude et la répétition........................................................... Cependant, en anglais d’Afrique du Sud, le cas est différent car busy n’a plus seulement la fonction de qualifier un élément, mais il est aussi utilisé dans le but d’exprimer la forme progressive lorsqu’il est placé dans la construction « be + busy + verbe + ing ». Il est donc devenu un « semi-auxiliaire » selon Mesthrie (1999) qui explique que son utilisation assez similaire au « be + ing » de l’anglais ‘standard’ a donc fait évoluer sa fonction grammaticale. En effet, ce changement grammatical semble avoir été très fortement influencé par le contexte social sud-africain, qui se trouve être très différent du contexte européen car celui-ci semble remonter au temps des premières colonies européennes qui se sont installées en Afrique du Sud. Ces colonies furent d’abord des colonies néerlandaises puis britanniques qui ont apporté avec elles leur langue, entre autre l’anglais et le néerlandais. Nous nous intéresserons un peu plus à la place du néerlandais et son influence sur la langue des descendants néerlandais restés et installés en Afrique du Sud : l’afrikaans. La situation linguistique en Afrique du Sud est d’autant plus particulière que selon le recensement de 1991, le nombre de locuteurs utilisant l’anglais comme langue maternelle s’élève à seulement 10% de la population (d’après un recensement plus récent en 2001, ce chiffre serait descendu à 8,2% (Meierkord, 2005 ; Gervais Lambony, 2004). La majorité de la population étant noire africaine, ces derniers parlent majoritairement des langues africaines telles que le zoulou qui est la langue la plus parlée selon Gervais-Lambony (2004), le xhosa, le tswana et bien d’autres dans leur cercle privé, et il semblerait que 45% de la population aient quelques connaissances de l’anglais même s’ils ne l’utilisent pas dans leur sphère privée (Gough, 1996). L’afrikaans quant à elle, n’est parlé que par environ 13% de la population mais cela ne l’a pas empêché d’influencer l’anglais et son utilisation. Le transfert de l’afrikaans à l’anglais sera étudié dans ce mémoire car celui-ci semble expliquer la particularité de l’utilisation de busy. Cette particularité se reconnait par le fait que dans l’anglais dit ‘standard’, busy n’est associé qu’à des types d’activités qui représentent la notion « d’être occupé ». Par exemple, dans la phrase « You are busy having a party with all your family » la notion d’occupation est claire car on entend l’individu est occupé à faire la fête avec sa famille. En revanche, l’influence de l’afrikaans est visible dans la phrase suivante « We are busy being colonised all over again » car la notion d’occupation est beaucoup moins claire ; il semble difficile d’être occupé à se faire coloniser car cela ne représente pas une activité mais plutôt un état passif. D’après les recherches de Mesthrie (2002) mais aussi de Hibbert (2012), la forme « be busy + verbe + ing » serait donc un transfert de l’afrikaans besig om te qui signifierait littéralement « to be busy to » et exprimerait une action dans sa forme continue (c’est-à-dire sous sa forme progressive). La raison de notre intérêt pour cette forme est la suivante : en anglais sud-africain mais aussi en afrikaans, cette notion d’occupation s’étendrait également à des verbes d’état comme il a été démontré dans le second exemple avec le verbe « to be ». Les spécificités de cet aspect progressif sont le cœur même de ce mémoire et seront donc étudiées plus en profondeur car nous verrons qu’en plus d’être utilisé avec des verbes d’état, busy en tant que semi-auxiliaire peut être utilisé à la voix passive mais aussi en empruntant la forme littérale de l’afrikaans : « we are busy to » dans le même sens progressif. Cependant, les chercheurs s’accordent à dire que le cas de busy est plus complexe qu’un simple transfert d’une langue à une autre et qu’il n’est tout de même pas totalement équivalent à l’utilisation standard du progressif. Tous ces aspects ont donc mené à l’interrogation suivante : busy en anglais d’Afrique du Sud est-il un marqueur du progressif au même titre que « be + ing » en anglais standard? Etant donné que le sujet n’a que très peu été traité, il est particulièrement difficile voire impossible de trouver des corpus déjà constitués sur le sujet. C’est pourquoi, afin d’étudier ces questions, j’ai développé un corpus d’occurrences provenant d’une centaine de sites sudafricains tels que des archives, des sites d’universités, des blogs et des journaux en lignes. Cette collecte d’occurrences sera essentielle dans mon travail de recherche et permettra de mettre en avant des données plus récentes. Nous étudierons premièrement les recherches qui ont déjà pu être effectuées sur le sujet par quelques chercheurs et leur avis plus approfondi sur la forme grammaticalisée de busy mais aussi l’influence de l’afrikaans sur celui-ci et le parallèle indissociable de « be busy+ ing » et « be+ ing » qui expriment tout deux le progressif. En seconde partie nous verrons comment ces idées se placent face à la réalité des occurrences les plus récentes et pertinentes qui pourraient indiquer le fonctionnement de cette grammaticalisation. Chapitre 1 - Spécificités linguistiques de l’anglais d’Afrique du Sud En Afrique du Sud, l’anglais détient une place particulière au sein de la société car cette langue est fortement influencée par son passé colonial mais est également perçue comme une langue de libération au regard de l’afrikaans qui, bien que parlée par plus de locuteurs, serait perçue différemment (Heugh, 2013). Le passé est donc grandement responsable du niveau d’influence qu’ont les autres langues présentes sur le territoire sur l’anglais et de l’hétérogénéité elle-même de l’anglais, ou devrait-on plutôt dire des anglais de l’Afrique du Sud. Il est donc important de mettre en avant les raisons du plurilinguisme sud-africain. 1.1 : Contexte historique L’Afrique du Sud compte aujourd’hui 45 millions d’habitants, cependant elle compte également 11 langues considérées comme langues officielles sur le territoire sud-africain. Cette diversité linguistique est le fruit d’années de colonisations et de révoltes de natifs qui ont chacun, plus ou moins, conservé leur héritage linguistique au cours du temps. Les premières colonisations européennes en Afrique du Sud datent de 1652, lorsque la East India Company, un groupe de navigateurs néerlandais, se sont installées dans la région de Table Bay (dans la ville de Cape Town). Cette colonie s’est installée dans un but purement commercial car ces derniers considéraient le Cap de Bonne Espérance comme une zone propice à un passage plus fluide et rentable de commerce. Durant près de 150 ans, cette colonie perdura dans la région, gagnant du pouvoir sur les chefs de tribus Xhosa du territoire, jusqu’à ce que les anglais ne décident de s’emparer de la zone afin, également, de bénéficier des avantages économiques que celle-ci pouvait garantir. C’est pourquoi, en 1806, ils envahirent la région, créant de fortes divisions entre ces deux puissantes colonies et forçant les néerlandais à se déplacer plus loin sur le territoire sud-africain. Les « 1820 settlers » (c’est-à-dire les nouveaux arrivants britanniques qui se sont installés en masse à partir de cette date à Algoa bay dans la région du Western Cape) devinrent majoritaire et revendiquèrent l’anglais comme l’unique langue officielle de la Cape Colony (la colonie qui s’est donc étendue dans les terres sudafricaines). Les natifs noirs étaient contraints d’apprendre l’anglais car ils travaillaient à cet a g e endroit. Cette revendication permit à l’anglais de s’installer plus rapidement sur le territoire, en plus des nouvelles colonies britanniques qui se sont formées tout au long du XIXe siècle. Entre 1848 et 1862, des colons provenant du nord de l’Angleterre se sont installés dans l’est du pays, dans une région appelée Natal. Figure 1 Afrique du Sud durant la colonisation. Source : Universität Duisburg Essen (2021). Cet événement continua de renforcer l’influence britannique, poussant les descendants des premiers colons néerlandais (appelés les Boer Voortrekkers) à s’enfoncer plus loin dans les terres, et dans un même élan, à repousser les peuples natifs du Zululand et du Swaziland situés dans cette zone. Les Boer Voortrekkers ont donc réussi à créer 2 états dans l’est du pays : le Orange Free State et la South African Republic (aussi connues sous le nom de « région du Transvaal »). De sérieux conflits éclatèrent entre les 2 colonies et les natifs tels que l’Anglo-Boer/South African War entre 1815 et 1915, mais c’est l’accession au pouvoir du Pro-Afrikaner National Party qui renforça les inégalités entre les colons blancs anglophones ou afrikanophones les noirs sud-africains dont la langue maternelle varie selon l’ethnie. Durant le contexte de l’apartheid qui sévit tout au long du XXe siècle, et dont le principe était de créer un régime de développement séparé, les écoles exclusivement blanches enseignaient a g e l’anglais aux élèves tandis que les écoles exclusivement noires enseignaient les langues maternelles africaines. Ce système empêchait donc les élèves noirs d’accéder à une connaissance complète de l’anglais car dans le meilleur des cas celui-ci était enseigné par des enseignants noirs dont l’anglais était donc forcément la seconde langue. L’afrikaans pouvait également être enseigné à partir du secondaire mais dans la majorité des cas, les élèves noirs les plus pauvres n’arrivaient pas jusque-là car ils devaient travailler et subvenir aux besoins de leurs familles. C’est donc ce contexte d’oppression systémique et de séparation qui renforcé le caractère plurilingue de l’Afrique du Sud. Alors que durant l’apartheid, seuls l’anglais et l’afrikaans étaient reconnus comme langues officielles, aujourd’hui toutes les langues africaines (zoulou, xhosa, ndebele, sepedi, sésotho, setswana, siSwati, tshivenda et xitsonga) ont également été reconnues au même titre que les deux langues d’origine européennes. De plus, afin de renforcer l’égalité entre les langues, chaque province d’Afrique du Sud se doit d’enseigner au moins deux langues. Dans la majorité des provinces, l’anglais est la deuxième langue enseignée (Gouvernement sud-africain, 2021). 1.2 : L’anglais : une langue seconde? La situation de l’anglais est beaucoup plus complexe qu’elle n’y parait car seuls 8,2% de la population affirme avoir l’anglais comme langue maternelle mais il est difficile d’évaluer concrètement combien de personnes parlent anglais. En effet, l’anglais étant très majoritairement perçu comme une seconde langue, il devient plus compliqué de jauger à partir de quel moment une personne peut considérer celle-ci comme sa deuxième langue. Serait-ce lorsque cette personne est capable d’avoir une conversation complexe en anglais? Ou doit-on également prendre en compte les personnes qui disent ne connaitre que les bases rudimentaires de la langue sans vraiment être capables de l’utiliser dans une situation. De plus, une bonne partie de la population noire souffre toujours des conséquences de l’apartheid et n’a donc pas eu accès à l’apprentissage de l’anglais à l’école. De plus, alors que le South African English est reconnu comme une variété de l’anglais (en comparaison de l’anglais britannique ou américain), le Black South African English (c’est-àdire l’anglais parlé par les personnes noires en Afrique du Sud) mais aussi le South African Indian English (l’anglais parlé par les Indiens venus en Afrique du Sud au cours du XIXe siècle 13 | P a g e et pour qui l’anglais fut la langue qui leur a été enseignée) sont aussi reconnus comme des variétés de l’anglais spécifique à l’Afrique du Sud. Ces variétés diffèrent en majorité à travers leur prononciation influencée par les langues maternelles des locuteurs mais cela n’empêche pas de soulever le questionnement de la légitimité de chacune de ces variétés d’anglais. 1.3 : L’anglais d’Afrique du Sud : une variété parmi d’autres Dans son article publié en 1997, Hibbert identifie quatre variétés d’anglais : « conservative SAfE (South African English) » qui se démarque par les implications politiques que celui-ci engage à cause d’un accent relativement proche de l’anglais britannique ; « acceptable SAfE » qui ne se démarque que par son accent différent du précédent ; « extreme SAfE » qui n’est pas considérée comme une variété acceptable d’anglais ; et enfin, celle qui soulève le plus de questions, « Black South African English BSAfE » car cette dernière impliquerait que toutes les personnes noires d’Afrique du Sud parleraient le même anglais. Notons que la population noire est majoritaire sur le territoire, cela signifierait que les autres variétés seraient fortement minoritaires. Or, ce point de vue élude complètement les notions de statut socio-économique et de position géographique sur le territoire comme cela pu être expliqué précédemment. Etant donné la quantité de variétés d’anglais en Afrique du Sud il est donc difficile de parler d’un unique anglais qui serait utilisé par la population. Le simple fait que ces variétés diffèrent par leur prononciation rend le sujet plus complexe. De plus, face à ses disparités, il devient également plus difficile de savoir si, dans le cadre du sujet actuel de ce mémoire et même si on sait uniquement que la différence se fait majoritairement par la prononciation, toutes les variétés présentent en Afrique du Sud adoptent les mêmes codes grammaticaux et lexicaux. En effet, il est légitime de soulever la question des réelles disparités entre les variétés car une personne qui parle le South African Indian English a un bagage culturel différent d’une personne qui parle le Black South African English. De plus, un individu dont la première langue est le zoulou et un autre dont la première langue est le tswana ont tous deux des langues africaines en tant que première et seront donc tous deux considérés comme des locuteurs du Black South African English alors que leurs langues maternelles diffèrent considérablement. Cela signifie que les transferts qui pourraient apparaitre du tswana à l’anglais ou du zoulou à l’anglais ne seront pas les mêmes. De ce fait, parler d’un seul et unique Black South African English commun à toutes les personnes noires vivant en Afrique du Sud semble particulièrement réducteur. Zerbian (2012) reconnait cette difficulté à ne recenser qu’un Black South African English, reconnaissant ce dernier comme étant hétérogène car certains locuteurs peuvent aussi avoir plusieurs langues maternelles différentes ce qui crée donc plusieurs types de BSAfEs et des niveaux de compétences en anglais relativement variables car tous n’ont pas accès à la même exposition linguistique en anglais. Malheureusement, ce mémoire ne constituant que la phase prélimin d’un travail de recherche beaucoup plus long, les spécificités de chacune des variétés présentent sur le territoire sud-africain ne seront pas plus détaillées. Cependant, Gervais-Lambony (2004), mais également Hibbert (1997) affirment que l’anglais (sans pour autant préciser laquelle des différentes variétés d’anglais présentes dans le pays) est utilisé comme une lingua franca, c’est-à-dire que c’est la langue de communication qui est utilisée par les locuteurs lorsque ces derniers ne partagent pas le même bagage linguistique. Cela signifie qu’une personne ayant le xhosa comme première langue face à une autre qui parle l’afrikaans choisiront tous deux d’utiliser l’anglais afin de communiquer car c’est la seule langue relativement connue des deux parties (ou plus). Elle devient donc un pont afin de garantir la communication entre tous les locuteurs. En revanche, il affirme également que lors de débats politiques locaux, ce n’est pas uniquement l’anglais qui est utilisé afin de garantir la compréhension générale mais un mélange de toutes les langues en fonction de l’audience. « Si le conseillé municipal qui vous parle s’exprime en zoulou, dans la région de Johannesburg il va parler par exemple un peu de sotho pour faire plaisir aux Sotho dans l’assistance et il va même mettre un peu d’anglais si des Blancs sont là. Quand la salle va poser des questions, chacun va se lever à son tour et parler dans sa langue et, dans la plupart des cas, cela ne pose pas de problème. » (Gervais-Lambony, 2004, p122) Cela signifie donc que l’anglais n’est pas nécessairement vu comme la seule langue permettant de faciliter la communication parmi les locuteurs de plusieurs autres langues, mais plutôt qu’elle représente l’un des onze moyens de communication présents en Afrique du Sud. Car, en effet, dans une région aussi riche linguistiquement, il n’est pas rare de retrouver des phénomènes de transfert entre les langues et de ‘code-switching’. Ce dernier est un phénomène définissant la capacité de certains locuteurs à mélanger plusieurs langues dans une même phrase sans que ce mélange ne porte atteinte à la compréhension de cette dernière car les locuteurs 15 | P a g e partagent le même savoir linguistique. Cela signifie que, contrairement au processus utilisé dans le cas d’une lingua franca dans une région, c’est-à-dire que les locuteurs ne se comprennent pas mutuellement et sont donc dans l’obligation d’utilisée une même langue commune afin de permettre la communication, dans le cas du code-switching, les locuteurs se comprennent parfaitement et peuvent tout à fait changer de langue en cours de route sans que cela ne pose un problème de compréhension. C’est donc ce phénomène qui est décrit par Gervais-Lambony (2004) lorsque celui-ci décrit la manière dont se déroule les débats locaux. 1.4 : l’anglais synonyme de réussite? Le cas est différent à grande échelle et avec l’influence de la mondialisation car il semblerait que l’anglais soit de plus en plus utilisé dans la mesure où celui-ci facilite la communication à l’international. Cela expliquerait, en partie, pourquoi cette langue est perçue comme la langue de la libération contrairement à l’afrikaans qui serait plutôt perçu comme la langue de l’oppresseur d’après Gough (1996). Cette vision semble s’expliquer par le contexte dans lequel chacune de ces langues est utilisée. Gough (1996) et Gervais Lambony (2004) expliquent tous deux que la majorité des personnes qui utilisent l’anglais sont des personnes vivant dans les grandes villes alors que les autres langues sont plutôt associées au langage des personnes vivant à la campagne ou provenant de la classe populaire. De plus, ils affirment que l’anglais est la première langue utilisée au gouvernement, mais aussi dans les domaines des affaires et du commerce. L’afrikaans, bien que plus employé que l’anglais selon les recensements mais aussi utilisée en priorité dans les institutions scolaires et universitaires, ne semble pas avoir ce type de rayonnement. En effet, selon Heugh (2013), les populations les plus pauvres auraient tendances à favoriser l’anglais comme moyen d’instruction pour leurs enfants car cela leur assurerait de plus grandes chances d’accéder à un plus haut palier de l’échelle sociale. Khokhlova (2015) reprend le même argument que Gough (1996) et Gervais-Lambony (2004) concernant l’utilisation de l’anglais dans les domaines du commerce et de l’industrie, mais ajoute également que le fait que la majorité des membres du gouvernement, la police et les services civils étaient afrikaans durant l’apartheid mais aussi longtemps après, semble avoir influencé la vision négative qu’ont les populations locales au regard de l’afrikaans. Celle-ci n’est donc pas du tout perçue comme une langue de libération comme l’anglais car elle rappelle énormément cette période d’oppression et d’injustice qui aura sévi durant des années en Afrique du Sud. Le cas de l’afrikaans comme moyen d’ascension sociale, cependant, ne semble pas avoir été un sujet particulièrement étudié même si celle-ci était utilisée en tant que lingua franca dans les zones rurales du territoire. L’influence de l’afrikaans dans le pays nécessiterait une étude beaucoup plus approfondie sur la question, cependant ce mémoire n’a pas pour vocation d’étudier l’afrikaans en elle-même mais bien l’utilisation du progressif qui en a découlé en anglais d’Afrique du Sud. 1.5 : Indigénisation de la langue Malgré le taux relativement moyen de personnes qui disent parler ou avoir des connaissances en anglais (environ 45% de la population sud-africaine), la langue a connu une forme d’indigénisation par les autres langues présentes sur le territoire (Gough, 1996). Le processus d’indigénisation est un processus durant lequel une langue est influencée par les autres langues locales d’une région. C’est-à-dire que, dans le cas de l’Afrique du Sud, les langues africaines telles que le zoulou ou le xhosa, impactent la prononciation des personnes dont ces langues sont les premières langues lorsqu’ils parlent anglais. Cela explique pourquoi le Black South African English se démarque tant par sa prononciation différente de l’anglais standard. Dans le cas du BSAfE, la prononciation diffère de l’anglais standard du fait que les voyelles longues de l’anglais standard deviennent courtes (ex : book, nurse...) par exemple, car il n’existe pas de voyelles longues dans ces langues africaines ; c’est pourquoi il devient plus simple pour le locuteur natif de ces langues de conserver le type de prononciation qui lui est familier même si cela influence sa seconde langue. Le SAfE en général a également perdu la rhoticité présente en anglais dit ‘standard’, c’est-à-dire que les « r » ne sont pas aussi marqués que dans l’anglais dit ‘standard’ (Hickey, 2019). Et, en effet, c’est cette indigénisation qui est responsable de l’émergence de toutes les variétés d’anglais qui ont été présentées plus tôt en partie 1.3. Comment ces variétés prennent-elles vie? Bekker (2019) parle de koinéisation lorsqu’il se réfère aux premiers contacts linguistiques qui ont eu lieu dans les régions du Cap et du Natal, deux régions où les anglais se sont installés durant le XIXe siècle. Cette notion de koinéisation serait responsable de l’émergence de nouveaux anglais tels que le Cape English (CE) et le Natal English (NE) car ce principe se a g e définit par le mélange des dialectes d’une région avec une autre langue. Dans ces deux cas, c’est alors le mélange de l’anglais avec certaines langues africaines déjà présentes. Il semblerait donc que l’élément principale à l’origine de cette émergence soit la langue maternelle du locuteur car celle-ci est plus susceptible de se transférer sur la seconde langue. On pourrait donc se dire que le processus est le même avec l’afrikaans sur l’anglais car l’on retrouve certaines propriétés linguistiques de l’afrikaans en anglais sud-africain. En effet, Bekker (2019) ne soulève aucune opposition à l’évidence des emprunts de l’afrikaans à l’anglais. De plus, contrairement à l’indigénisation qui est un principe beaucoup plus profond d’assimilation d’une communauté dans une autre, la koinéisation ne comprend que le mélange linguistique sans prendre en compte la partie sociale du concept. Cela signifie que si l’on ne se concentre que sur les phénomènes de transfert d’éléments linguistiques d’une langue à une autre, il serait peut-être alors préférable de ne parler que de koinéisation de la langue car c’est par ce processus que la variété du South African English semble s’être développé. 1.5.1 : Caractéristiques phonologiques de l’anglais d’Afrique du Sud D’après Hickey (2019), les caractéristiques linguistiques de l’anglais sud-africain sont définissables par les éléments suivants : « Part of the endonormative reorientation of English in South Africa has been the appearance of features unique to this country, lexical features [...] but also phonological features such as the KIT-BIT split [...], a development of the KIT set where the words kit [kɪt] and bit [bət] show different vowels. These are conditioned by the consonantal environment, with the higher vowel occurring in the environment of velars (kit, lick, gift), in word-initial position (it, in), after /h/ (hit, hick) and usually before /ʃ/ (dish, swish). The schwa vowel typically occurs before anterior consonants (labials and alveolars), e.g. swim, tin, sit, sip, with a particularly retracted variant occurring pre-laterally, e.g. bill. When compared to the two other major Southern Hemisphere Englishes, Australian and New Zealand English, South African English has a more retracted BATH vowel [...]. This may have been part 18 | P a g e of the nineteenth-century input, but its presence in Afrikaans would point to the prior existence of [ɑ:] in South Africa. » (Hickey, 2019, p.7) Ces particularités, majoritairement phonologiques, sont issues des contacts coloniaux qui ont eu lieu entre les colons néerlandais et les populations déjà présentes. Hickey (2019) ne précise pas le taux d’influence de l’afrikaans sur l’anglais d’aujourd’hui mais il est clair que celle-ci a fortement influencé le South African English d’aujourd’hui. Puisqu’historiquement, l’afrikaans provient du néerlandais, cette langue est très majoritairement parlée par les descendants des colons néerlandais qui sont venus s’installer sur le territoire. Ces descendant étant restés en contact durant des siècles avec les populations locales, il n’est donc pas étonnant de retrouver des traces de ce fameux contact linguistique sur l’anglais. D’après plusieurs études menées sur le sujet, l’influence néerlandaise sur l’afrikaans est particulièrement visible à travers le nombre conséquent de mots importés de l’afrikaans en anglais à cause des contacts importants qui ont eu lieu lors de l’arrivée des Anglais au cap de Bonne Espérance. D’après Khoklova (2015) mais aussi Bekker (2019), il n’était pas rare d’avoir des mariages entre Anglais et Afrikaners qui influençaient donc d’autant plus l’emprunt de mots d’une langue à l’autre. Quelques exemples d’emprunts courants en anglais sud-africain comprennent des noms d’animaux ou de plantes (meerkat au lieu de « suricate »), de nourriture (koeksister, qui décrit un type de doughnut trempé dans du sirop), des concepts plus abstraits (voetsak, exprimé lorsqu’une personne veut chasser un chien) et bien d’autres (Kohklova, 2015). De plus, l’influence de l’afrikaans est d’autant plus visible car celle-ci s’est transférée dans la construction du progressif en anglais sud-africain. Finalement, ce chapitre a permis de comprendre que le caractère plurilingue de l’Afrique du Sud s’est développé au fur et à mesure du temps à cause de la colonisation par les néerlandais qui ont répandus l’afrikaans, mais aussi par les anglais dans la région. Cette colonisation est aujourd’hui responsable d’abord de l’émergence du South African English mais également de la présence des nombreuses variétés d’anglais qui se sont développées au cours du temps sur le territoire car l’anglais est devenu la langue de la réussite pour les populations les plus modestes ; mais aussi, la colonisation est responsable de l’importance du code-switching et du bilinguisme qui sont devenus des normes en Afrique du Sud. La population n’éprouve pas de réelle difficulté a g e à échanger dans des langues différentes car chaque communité a réussi à conserver son héritage linguistique et à le développer au point de devenir l’une des onze langues officielles du pays. Un tel contact linguistique a également mis en avant le phénomène de transfert d’une langue à une autre au cours du temps et, bien que l’afrikaans ne soit pas tout à fait considéré comme une langue de réussite au regard de l’anglais, celui-ci s’est intégré dans l’anglais de la région par sa construction du progressif. Le chapitre 2 se concentrera sur les origines du fonctionnement de cette construction du progressif en néerlandais et en afrikaans afin de mieux comprendre jusqu’à quel point celle-ci est présente en anglais à travers l’utilisation de l’adjectif busy au progressif. Chapitre 2 - Busy et le progressif en néerlandais et en afrikaans Comme cela a pu être précédemment expliqué dans le chapitre 1, l’anglais sud-africain est fortement influencé par les autres langues du territoire et plus particulièrement par l’afrikaans dans sa construction du progressif. Cette influence est profonde car elle remonte à l’ancêtre de l’afrikaans : le néerlandais. Ce dernier, suite aux contacts coloniaux, est devenu l’afrikaans en Afrique du Sud et a réussi à se transférer de la langue anglaise. Il s’agit alors de mettre en avant la façon dont ce transfert linguistique a pu s’effectuer à travers l’utilisation du progressif en South African English, et plus particulièrement, comprendre le fonctionnement de ce progressif exprimé par l’adjectif busy. 2.1 : Influence néerlandaise sur le progressif Selon Breed & al (2017), le néerlandais et l’afrikaans ont recours aux mêmes types de périphrases dans le but d’exprimer le progressif dans une situation donnée. Cela signifie que pour décrire une action relativement courte d’un point de vue interne à cette dernière (c’est-àdire que le locuteur fait le choix de présenter le procès de cette manière, voire chapitre 3.3.1 sur l’aspect) en néerlandais tout comme en afrikaans, on retrouve des constructions particulièrement similaires. Toujours selon Breed & al (2017), il y en aurait trois qui exprimeraient toutes cette même notion de description d’une action en cours. Ces trois constructions sont les suivantes : 1. aan het en néerlandais et aan die/’t en afrikaans qui signifieraient « on the », c’est une construction prépositionnelle car celle-ci se forme à partir d’une préposition; o Par exemple : Honde is oral rond aan die aas. 2. L’utilisation des verbes de positions cardinaux, c’est-à-dire des verbes qui décrivent des positions basiques effectuées par une personne (« sit » être assis ou s’asseoir, « stand » être debout ou se lever, « lie » être couché ou se coucher et « walk » marcher) suivis de la préposition en qui signifie « and » en anglais et d’un verbe à l’infinitif. Cette construction se forme alors de la façon suivante : CPV (Cardinal Position Verb) + en (and) + V (Verb) et pourrait être traduite par la construction anglaise suivante « sit/stand/lie/walk + and + V » (sit/staan/lê/loop + en + V en afrikaans) ; o Par exemple : Dis die dat jy so loop en glimlag. it.be.PRS DEM REL 2SG.SUBJ so walk and smile ‘That is why you are walking around smiling.’ (Breed & al, 2017, p.318) 3. Et enfin, la construction besig met/(om) te en néerlandais et besig om te en afrikaans qui se traduisent littéralement par « busy with » ou « busy to » (être occupé à). o Par exemple : Ze waren een volle dinsdag 3PL.SBJ be.PL.PST ART.INDF.SG entire Tuesday bezig met verhuizen. busy with move.INF ‘They were moving all day Tuesday.’ (Breed & al, 2017, p.316) Ces trois constructions existent en néerlandais car elles s’utilisent à des fréquences plus ou moins grandes et dans différents contextes. D’après Flecken (2015), en néerlandais c’est la première construction, c’est-à-dire aan die qui se forme à partir d’une préposition, qui est la plus utilisée des trois car elle exprimerait des concepts plus abstraits et pourrait donc être plus libre grammaticalement contrairement aux deux autres qui subissent des restrictions de contexte. En revanche, d’après les recherches de Breed & al (2017), en afrikaans ce serait bien la construction besig om te qui est la plus utilisée car ce serait elle qui permettrait une plus grande liberté de contextes dans lesquelles celle-ci pourrait être utilisée. Il y a donc une assez grande différence d’utilisation des mêmes constructions entre les deux langues, et ce, même si ces langues proviennent d’un même passé linguistique. Les spécificités de ces contextes, et plus g e particulièrement ceux de l’utilisation de la forme besig om te seront mis en avant dans l’étude de cette construction. Le graphique suivant, également issue de l’étude de Breed & al (2017) montre le degré d’influence des langues germaniques mais aussi plus particulièrement du néerlandais sur la construction du progressif en afrikaans : Figure 2 Construction du progressif des langues germaniques. Source : Breed & al (2017) Le graphique ci-dessus sépare donc les différentes constructions du progressif qui sont similaires dans plusieurs langues germaniques (c’est- à-dire les langues issues d’un même passé linguistique germanique ; ici le danois, le suédois ou encore l’allemand). On remarque alors la présence du « prepositional progressive » qui englobe les constructions du progressif qui utilisent des prépositions (par exemple : aan die en afrikaans) ; les formes CPV en V en afrikaans y sont également représentés dans la catégorie des « postural progressive » (soit les constructions du progressif formées à partir des verbes de positions cardinaux énoncés précédemment : « sit », « lie » et « stand »). En revanche, alors que loop (« walk ») est aussi considéré comme une forme CPV en V, elle figure dans une autre catégorie sur ce graphique car elle semble être à la jonction entre les formes périphériques qui utilisent un mot externe dans leur construction, et les formes « locational » qui mettent en avant la position géographique afin de former leur construction du progressif. Loop en V (walk and V) n’est donc pas totalement un autre type de construction à 23 | P a g e lui seul mais fait bien partie de la deuxième catégorie de construction mises en avant : les CPV en V. Cette affirmation se confirme à travers le tableau suivant où l’on peut observer que la forme loop en V se retrouve dans la catégorie des constructions formées à partir de verbes de positions cardinaux (CPV) : Figure 3: Tableau des différentes formes du progressif en néerlandais et en afrikaans. Source: Breed & al (2017). Enfin, dans le graphique (figure 2) on retrouve également les formes périphériques (peripheral forms) qui se caractérisent par l’utilisation d’un mot qui, ajouté à un verbe, devient l’élément formant la construction de l’aspect d’une phrase, ici le progressif. C’est dans cette construction dite périphérique que « busy » ainsi que « hold » et « keep » forment leur progressif. Leurs constructions sont, cependant, différentes les unes des autres, bien que ces trois mots proviennent de la même catégorie. C’est-à dire que bien que l’on retrouve le même système d’emprunt d’un mot externe, leur utilisation et leur formation varient entre elles. La différence se trouve dans le fait que « keep » et « hold » expriment plutôt la notion de continuité d’une action (par exemple : « I keep on working » ; Breed & al, 2017) alors que busy détient un sens beaucoup plus large du progressif. C’est pourquoi nous ne nous intéresserons qu’à la formation de busy. Dans la catégorie des formes périphériques nous retrouvons besig om te + verbe en afrikaans qui se traduira par busy to en anglais. Plus précisément, besig om en afrikaans est effectivement la traduction littérale de busy to en anglais, mais te ne peut pas vraiment se traduire car il représente simplement un marqueur de l’infinitif qui s’appliquera alors sur le verbe qui le suit. C’est pourquoi on retrouvera des occurrences telles que « busy to explore » lorsque cette construction est utilisée et non pas juste « busy exploring » car même si l’on pourrait être tenté de conjuguer le verbe suivant afin de marquer le progressif (comme cela peut se faire lorsque l’on choisit de marquer le progressif par la forme ‘be + ing’), ce n’est pas nécessaire dans ce type de construction étant donné que cela modifie le sens de la phrase. En ce sens, même si « busy exploring » existe en anglais dit ‘standard’, il n’aura pas la même signification « d’être en train de » comme « busy to explore » en anglais sud-africain, mais plutôt « d’être occupé à ». De plus, la forme bezig met en néerlandais se traduit littéralement par « busy with » et subi la même construction que la précédente avec te en tant que marqueur de l’infinitif, mais cette dernière n’est presque jamais utilisée en afrikaans. Cependant, à la différence de « busy to » qui impose un verbe à l’infinitif (« busy to explore »), la construction bezig met te/ « busy with » ne semble pas complètement imposer cet infinitif, et ce, même si te conserve le même rôle dans les deux constructions car il arrive qu’on ne retrouve que bezig met sans le marqueur de l’infinitif te. Malgré ce cas de figure où le marqueur de l’infinitif est absent, la première phase de traduction de Breed & al (2017) dans l’exemple suivant en néerlandais met en avant cet élément intéressant : bezig met verhuizen. busy with move.INF (Breed & al, 2017, p.316) « Busy with » est suivi d’un infinitif « move » (et non « moving ») alors qu’il n’y a aucun marqueur de l’infinitif. Cette différence, présente en néerlandais, n’est pas possible en a e afrikaans. Cette dernière conserve systématiquement la construction contenant le marqueur de l’infinitif te sous la forme empruntée du néerlandais : besig om te en afrikaans. Les deux constructions bezig met te (néerlandais) et besig om te (afrikaans) se démarquent donc dans l’obligation ou non d’avoir le marqueur te qui impose l’emploi d’un infinitif sur le verbe qui suit. Breed & al (2017) indiquent également dans leur recherche que la présence de « om » dans la construction en néerlandais a évolué avec le temps. En effet, « om » (traduit « to ») en néerlandais n’était au départ qu’une simple préposition dont la fonction était seulement d’exprimer la notion de but (dans le même sens que « à » dans « aller à » sert à indiquer une notion de but). Cependant, il s’est grammaticalisé au point de devenir un complément dans la construction de busy dans ce contexte. Cela signifie qu’au lieu de mettre en avant la notion de but comme cela a pu être le cas avant, « om » dans la construction bezig om te devient le complément qui sert à marquer la différence entre la notion d’être occupé qui est habituellement associée à bezig (busy) et le fait d’être engagé dans une action, d’être en train de faire quelque chose (en opposition directe avec le fait de ne rien faire). Breed & al (2017) précisent également que la signification lexicale de bezig en néerlandais et de besig en afrikaans est d’abord de se concentrer sur le sujet qui agit (c’est-à-dire la personne qui est occupée à faire quelque chose) sans tenter de mettre en avant l’aspect progressif. En revanche, son utilisation en afrikaans est presque exclusivement réservée au fait d’exprimer le progressif, alors que ce n’est que très rarement le cas en néerlandais. Il semblerait que ce soit là l’une des différences qui séparent bezig (néerlandais) et besig (afrikaans).
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Renault, Cu nanowhiskers embedded in Nb nanotubes inside a multiscale Cu matrix: The way to reach extreme mechanical properties in high strength conductors Scripta Mater., vol. 57, 2007, 245 - 248. https://doi.org/10.1016/j.scriptamat.2007.04.001. [90] L. Thilly, M. Véron, O. Ludwig, F. Lecouturier, J. P. Peyrade, S. Askénazy, High-strength materials: in-situ investigations of dislocation behaviour in Cu-Nb multifilamentary nanostructured composites, Philos. Mag. A, vol. 82, 5, 2002, 925 - 942. https://doi.org/10.1080/01418610208240010. [91] C. Arnaud, F. Lecouturier, D. Mesguich, N. Ferreira, G. Chevallier, C. Estournès, A. Weibel, C. Laurent, High strength – High conductivity double-walled carbon nanotube – copper composite wires, Carbon, vol. 96, 2016, 212 215. https://doi.org/10.1016/j.carbon.2015.09.061. 57 [92] D. Mesguich, C. Arnaud, F. Lecouturier, N. Ferreira, G. Chevallier, C. Estournès, A. Weibel, C. Josse, C. Laurent, High strength-high conductivity carbon nanotube-copper wires with bimodal grain size distribution by spark plasma sintering and wire-drawing, Scr. Mater., vol. 137, 2017, 78 - 82. https://doi.org/10.1016/j.scriptamat.2017.05.008. [93] C. Guiderdoni, C. Estournès, A. Peigney, A. Weibel, V. Turq, C. Laurent, The preparation of double walled carbon nanotube/Cu composites by spark plasma sintering, and their hardness and friction properties, Carbon, vol. 49, 2011, 4535 - 4543. https://doi.org/10.1016/j.carbon.2013.02.049. [94] C. Guiderdoni, C. Estournès, A. Peigney, A. Weibel, V. Turq, C. Laurent, The preparation of double-walled carbon nanotube/Cu composites by spark plasma sintering, and their hardness and friction properties, Carbon, vol. 49, 13, 2011, 4535 - 4543. https://doi.org/10.1016/j.carbon.2011.06.063 58\n\nChapitre II Fils composites Ag-Cu à faible teneur en Ag 59 60 II.1 Introduction\n\nL'étude de l'état de l'art des conducteurs renforcés spécifiques pour une application en champs magnétiques intenses a permis de mettre en évidence l'importance de la mise en place d'une voie d'élaboration composite pour la mise en oeuvre de fils conducteurs. En effet, les fils composites présentent des résistivités électriques bien plus faibles que les fils d'alliages. Ce chapitre porte sur l'étude de la microstructure, des propriétés mécaniques ainsi que la résistivité électrique de fils composites Ag-Cu dont la teneur en argent est inférieure à 10 % vol. Pour ce faire, des barreaux composites vont être frittés par SPS à partir de poudres composites Ag-Cu. Ces poudres seront élaborées à partir du mélange entre une poudre commerciale de cuivre et l'ajout de la quantité choisie de microfils d'argent. Le choix de l'ajout de moins de 10 % vol. Ag est fait pour limiter l'augmentation de la résistivité électrique des futurs fils. Les barreaux obtenus serviront de précurseurs pour la mise en forme de fils fins par tréfilage à température ambiante. La microstructure des barreaux et des fils sera étudiée par MEB et EBSD. Les propriétés mécaniques et la résistivité électrique des fils seront investiguées à 293 et 77 K. Lors de l'étude, différentes notations sont utilisées, la nomenclature est la suivante : 1Ag-Cu/NR 5Ag-Cu/R 1Ag-Cu400/8 10Ag-Cu500/0,5 1, 5, 10 : pourcentage volumique de microfils d'argent, NR : poudre non réduite R : poudre réduite, 400, 500, 600 : température de frittage SPS, 8, 0,5 : diamètre de l'échantillon.\n\nII.2 Elaboration des poudres composites Ag-Cu\n\nLes poudres composites sont élaborées à partir d'une poudre sphérique de cuivre commerciale à laquelle sont mélangés des microfils d'argent. L'utilisation des microfils d'argent a deux intérêts : le premier est d'apporter un renfort mécanique aux fils conducteurs en insérant une seconde phase au sein du matériau et le second est d'obtenir une microstructure filamentaire la plus fine possible. En effet, comme l'étude bibliographique l'a démontré, le renforcement mécanique des fils conducteurs est d'autant plus important si la seconde phase est de petite taille et orientée dans le sens de l'étirage. Les microfils ont été sélectionnés dans le but d'insérer un renfort ayant déjà une morphologie 1D. Il est attendu que ces microfils s'orientent et se déforment dans le sens de l'étirage. Ainsi, les fils composites Ag-Cu présenteront une microstructure 61 à base de grains d'argent ultra-fins plus rapidement que si la seconde phase avait été introduite sous la forme de particules sphériques. II.2-1 Les microfils d'argent\n\nLa synthèse des microfils d'argent est réalisée selon la méthode de Sun et Xi [1] et adaptée par l'équipe de A. Lonjon au CIRIMAT [2]. Cette méthode consiste en une réduction à partir de AgNO3 (pureté 6N) dans une solution d'éthylène glycol et de poly(vinyl pyrrolidone) (PVP, masse molaire moyenne en masse : Mw = 55 000 g/mol). Le ratio initial PVP/AgNO3 est de 3,51. L'éthylène glycol sert à la fois de solvant et d'agent de réduction, le PVP, quant à lui, sert à contrôler la croissance du fil d'argent. Le PVP enrobe le microfil d'argent au fur et à mesure de sa croissance. Ainsi, la croissance est unidirectionnelle. Le temps de réaction nécessaire à la synthèse des microfils est de 1 h à 160 °C sous agitation 400 tour/min. Dans ce cas, l'utilisation de platine comme germe de croissance n'est pas nécessaire car la température est suffisante pour former des nucléi d'argent et ainsi démarrer la croissance des microfils. Une fois les microfils d'argent synthétisés, ils sont séparés des particules d'Ag par centrifugation pendant 2 minutes à 2000 tour/min. Le PVP est ensuite éliminé grâce à une succession de lavages sous ultrasons à l'éthanol dans lequel il est soluble. Les fils ainsi obtenus sont présentés sur la Figure II.1. Ils ont un diamètre moyen de 200 nm et une longueur allant de 20 à 50 μm (Fig II.1).\n\nFigure II.1 : Images de MEB des microfils d'argent. II.2-2 La poudre de cuivre commerciale\n\nLe choix d'une poudre de cuivre micrométrique commerciale est fait pour faciliter un éventuel transfert d'échelle du procédé. La poudre de cuivre utilisée est une poudre micrométrique sphérique commerciale (Alfa Aesar) dont la granulométrie donnée par le fournisseur est reportée dans le Tableau II.I. L'observation de cette poudre par MEB (Fig. II.2) permet de confirmer la morphologie sphérique des particules de cuivre. La taille de ces particules est comprise entre 0,5 et 1,5 μm avec la présence de grosses particules (> 4 μm). 62\n\nFigure II.2 : Image de MEB de la poudre de cuivre commerciale\n\nTableau II.I : Caractéristiques morphologiques de la poudre de cuivre commerciale. Morphologie d10 (μm) d50 (μm) d90 (μm) Sphérique 0,51 0,83 2,66\n\nBien que le cuivre commercialisé par Alfa Aesar soit d'une pureté de 99 %, il est important de connaitre la nature des impuretés présentes. La présence de certains éléments en solution solide dans le cuivre peut avoir des effets désastreux sur la résistivité électrique des futurs fils conducteurs (Fig. II.3) [3].\n\nFigure II.3 : Effet de la présence d'élément en solution solide dans le cuivre sur la résistivité électrique du cuivre à température ambiante [3]. 63\n\nEn effet, un élément comme le fer augmente la résistivité électrique de 0,1 μΩ.cm/100ppm à température ambiante. Les différents éléments présents dans le cuivre et leur teneur sont reportés dans le Tableau II.II. Les teneurs des différentes impuretés dans le cuivre commercial étant très faibles, la résistivité électrique des futurs fils ne devrait pas être détériorée.\n\nTableau II.II : Impuretés présentes dans la poudre de cuivre commerciale. Ag C Fe Pb Sn Al Ni Zn Si\n\n(ppm) (ppm) (ppm) (ppm) (ppm) (ppm) (ppm) (ppm) (ppm) < 20 60 < 20 < 20 < 20 < 20 < 20 < 10 < 20\n\nII.2-3\n\nLe mélange des poudres composites Ag-Cu Quatre lots de 14 g de poudres composites contenant 0,5, 1, 5 et 10 % vol. Ag sont préparés. La poudre composite est obtenue par l'ajout de la quantité nécessaire de cuivre dans une suspension de microfils d'argent dispersés dans de l'éthanol sous agitation par ultrasons. Après homogénéisation de la suspension, l'éthanol est évaporé à l'aide d'un évaporateur rotatif (80 °C) afin d'obtenir une poudre sèche. Les observations MEB des poudres composites après l'étape de mélange montrent une dispersion homogène des microfils d'argent dans la poudre de cuivre jusqu'à une teneur de 5 % vol. Ag (Fig. II.4a, b, c, d, e, f). En effet, la poudre 10Ag-CuNR présente une certaine inhomogénéité de la répartition des microfils d'argent caractérisée par la formation de fagots de fils (Fig. II.4 g, h). Les microfils n'ont pas été dégradés pendant le mélange. L'observation des particules de cuivre à un fort grossissement (Fig. II.4b) permet de constater que certaines présentent un aspect rugueux. Cette rugosité est caractéristique de la présence d'oxydes de cuivre à leur surface [4]. Figure II.4 : Image de MEB des poudres composites après l'étape de mélange. a), b) 0,5Ag-CuNR, c), d) 1Ag-CuNR, e), f) 5Ag-CuNR, g), h) 10Ag-CuNR\n\nLa présence de ces oxydes est confirmée par l'analyse de la poudre 1Ag-CuNR par diffraction des rayons X (DRX). Sur le diffractogramme (Fig II.5), outre la présence des pics caractéristiques du cuivre et de l'argent, des pics démontrant la présence d'oxyde de cuivre Cu2O sont indexés. La présence de CuO n'est quant à elle pas détectée. Les oxydes en surface des grains de cuivre pourraient gêner la densification au cours du frittage par SPS, il est donc nécessaire de soumettre la poudre composite à un traitement de réduction sous H2.\n\nFigure II.5 : Diagrammes de DRX de la poudre composite 1Ag-CuNR après l'étape de mélange. II.3 Réduction des oxydes de cuivre sous H2 II.3-1 Généralités sur la réduction des oxydes de cuivre sous H2\n\nLe cuivre possède deux états d'oxydation (Cu(+I) et Cu(+II)) qui correspondent respectivement à l'oxyde cuivreux Cu2O et à l'oxyde cuivrique CuO. La présence de ces deux oxydes va avoir un impact néfaste sur le frittage d'une poudre de cuivre par SPS. De plus, de par leur caractère fragile, ils vont réduire les chances de tréfilage sans rupture des fils après l'obtention du barreau précurseur. A température ambiante et sous air, le cuivre s'oxyde et forme une couche de Cu2O. L'oxyde CuO est formé à partir de l'oxydation de Cu2O mais jamais directement via l'oxydation du cuivre métallique. Ainsi, le cuivre sera en présence soit de Cu2O seul soit du couple Cu2O et CuO. Sous air, une couche de Cu2O empêche l'avancée de l'oxydation, ce qui permet au cuivre de s'oxyder uniquement à des températures supérieures à 100 °C. Le frittage par SPS d'une poudre de cuivre présentant une teneur en oxygène de 0,2 - 0,5 % mass. a mis en évidence la décomposition des oxydes Cu2O et CuO provoquant la formation de gaz qui sont à l'origine de porosités [5]. De plus, pour des nanoparticules de cuivre, la couche d'oxyde peut représenter environ 20 % du volume 66 d'une particule. L'élimination de cette couche superficielle d'oxyde lors d'un traitement thermique de réduction sous hydrogène permet de diminuer la température de frittage de 650 à 260 °C dans le cas de nanoparticules de cuivre [6]. Une poudre de CuO pur se réduit sous 2 entre 150 et 300 °C. La réduction de CuO apparaît avant la réduction de Cu2O. CuO est réduit en présence de H2 selon deux mécanismes : - un mécanisme de réduction séquentiel : 2 CuO (s) + H2 (g) → Cu2O (s) + H2O (g) (II.1) Cu2O (s) + H2 (g) → 2 Cu (s) + H2O (g) (II.2) - un mécanisme de réduction direct : CuO (s) + H2 (g) → Cu (s) + H2O (g) (II.3) Ces mécanismes dépendent beaucoup du débit et de la concentration en hydrogène [7]. La taille des particules influe sur la température de réduction. Des particules nanométriques de cuivre ont pu être réduites sous H2 à une température proche de 90 °C. II.3-2 Réduction de la poudre composite Ag-Cu sous H2\n\nLa réduction des poudres, en plus d'éliminer les oxydes présents à la surface des particules de cuivre, doit permettre de pré-fritter la poudre composite. En effet, si après réduction la poudre reste fluide, l'étirage est impossible et les fils cassent dès le début du processus d'étirage [4]. Il est impératif que la poudre présente un aspect cohésif après réduction. La température de réduction utilisée doit permettre de pré-fritter la poudre en créant des cous de frittage mais elle ne doit pas être trop élevée pour éviter tout phénomène de croissance granulaire. Pour les mêmes raisons, le temps de réduction ne doit pas non plus être trop long. Le dispositif de réduction se compose d'un four tubulaire dont la température est régulée grâce à un régulateur thermique West 2050 et un thermocouple. Le débit de H2 est quant à lui régulé à l'aide d'un débitmètre massique contrôlé par un régulateur Brookes 154. L'étape de réduction consiste en un traitement thermique sous un flux de H2 (15 L/h). La montée en température est effectuée à 150 °C/h et est suivie d'un palier d'une heure à la température maximale. Le refroidissement est réalisé à l'aide d'un ventilateur orienté sur le four. L'échantillon réduit n'est retiré du four que lorsque la température du four est inférieure à 30 °C afin d'éviter toute ré-oxydation de la poudre. De plus, une purge de N2 de 30 min est nécessaire pour s'assurer qu'il n'y ait plus de H2 dans le réacteur avant de l'ouvrir. Dès la sortie du four, il est possible de noter le changement de couleur de la poudre (Fig. II.6). En effet, après la réduction la poudre prend une teinte plus claire, ce qui peut déjà indiquer l'élimination de Cu2O. La poudre qui était 67 fluide avant la réduction est cohésive à la sortie du four. Comme le montre la Figure II.6b, la poudre composite présente une certaine cohésion. Une température de réduction de 160 °C est suffisante pour que 0,5Ag-CuR et 1Ag-CuR présentent un aspect cohésif. Cependant, il a été nécessaire d'augmenter la température de réduction à 220 et 280 °C pour respectivement 5Ag-CuR et 10Ag-CuR car une teneur en argent plus élevée dans la poudre est préjudiciable au pré-frittage des particules de cuivre. Figure II.6 : Poudre 1Ag-Cu, a) avant et b) après traitement de réduction sous H2. Figure II.7 : Diagrammes de DRX de la poudre composite 1Ag-CuNR (─) et 1Ag-CuR (─). 68 Figure II.8 : Images de MEB des poudres composites après l'étape de réduction. a), b) 0,5Ag-CuR, c), d) 1Ag-CuR, e), f) 5AgCuR, g), h) 10Ag-CuR. 69\n\nIl a été possible d'élaborer 14 g de poudre composite contenant entre 0,5 et 10 % vol. de microfils d'argent dispersés de façon homogène dans une poudre sphérique micrométrique de cuivre. Le mélange homogène est obtenu grâce à une mise en suspension des microfils et de la poudre de cuivre dans de l'éthanol suivie d'une étape d'évaporation de l'éthanol avec à un évaporateur rotatif. La poudre composite, après mélange, présente une oxydation de surface (Cu2O) des particules de cuivre. La présence de cet oxyde étant néfaste lors des étapes de frittage et d'étirage, il est donc éliminé par un traitement de réduction de 1 h à 160 °C sous H2. De plus, le traitement de réduction a permis de pré-fritter la poudre composite. Cet état pré-fritté est nécessaire pour permettre le tréfilage des fils sans rupture. Cependant, afin d'obtenir une poudre composite cohésive, il a été nécessaire d'augmenter la température de réduction à 220 et 280 °C respectivement pour 5Ag-CuR et 10Ag-CuR. II.4 Barreaux Ag-Cu préparés par SPS II.4-1 Principe du procédé\n\n\n\nSPS\n\nLe frittage par SPS est un procédé de métallurgie des poudres où la densification est réalisée grâce à l'application simultanée d'un courant pulsé de forte intensité et d'une charge uni-axiale. Ce procédé présente comme atout majeur une montée en température très rapide, ce qui a pour effet de limiter certaines modifications microstructurales telles que le grossissement de grains. En effet, la montée en température est assurée par le passage d'un courant électrique de forte intensité et de basse tension à travers les électrodes puis à travers les pistons, la matrice (généralement en graphite) et également l'échantillon lorsque celui-ci est conducteur. Lorsque la poudre est isolante, la matrice qui est souvent en graphite est chauffée par effet Joule et les transferts d'énergie thermique permettent le chauffage de l'échantillon. La technologie SPS permet de densifier efficacement en quelques minutes de nombreux métaux en appliquant des montées en température rapides. Le traitement thermique court limite la croissance granulaire. Il est souvent rapporté que la densification est obtenue à plus basse température (quelques centaines de degrés) que dans les méthodes classiques. Une compréhension partielle des mécanismes associés au frittage par SPS conduit à de nombreuses hypothèses pour expliquer l'efficacité de cette technologie. La première hypothèse est celle à l'origine du nom de cette technologie. Elle expliquerait les capacités du SPS par la formation d'étincelles et de plasma lors du frittage [9]. Cette hypothèse ne fait pas l'unanimité et est même réfutée par certains auteurs [10]. La densification rapide lors du frittage SPS viendrait de la mise en température rapide [11]. Le déplacement de la matière sous 'effet d'un champ électrique pourrait être un des mécanismes permettant l'explication des performances du SPS [12]. Cependant, des travaux sur des modèles remplaçant le 70 phénomène d'électromigration par un phénomène de thermodiffusion montreraient là aussi que la densification lors du frittage est expliquée par des vitesses de chauffage très rapides [13]. Une autre hypothèse étudiée est celle d'une surchauffe locale due à la concentration des lignes de courant aux points de contacts entre les particules. Cette surchauffe serait à l'origine d'une fusion, elle aussi locale, qui entraînerait la formation de points de contact qui facilitent la densification [14]. II.4-2 Préparation des barreaux par SPS\n\nPour l'obtention de fils composites Ag-Cu nano-structurés possédant une matrice de cuivre pur, il est primordial de limiter la formation de solutions solides lors du frittage SPS. Dans la gamme de teneur en argent utilisée pour l'élaboration de ces fils composite, le diagramme de phase Ag-Cu présente une zone de solution solide riche en cuivre (Fig. II.9). Afin d'éviter la formation de cet alliage Cu-Ag les barreaux composites devront être frittés aux températures les plus faibles possibles. L'effet de la formation d'un alliage Cu-Ag lors du frittage SPS sera développé dans le chapitre III.\n\nFigure II.9 : Diagramme de phase cuivre-argent [15]. II.4-2-1 Etat de l'art du frittage SPS du cuivre\n\nDans l'optique de la mise en oeuvre de fils composites nano-structurés, il semble nécessaire que le précurseur de tréfilage ait des grains de la taille la plus faible possible. La croissance granulaire lors du frittage SPS étant très limitée, cette technique est parfaitement adaptée. En effet, le barreau aura une taille 71 de grain équivalente à celle de la taille des particules composant la poudre qui sera consolidée si celles-ci sont monocristallines. Il sera ainsi plus aisé de contrôler la microstructure du barreau. Dans le cas du cuivre dont la taille des particules choisie est de 1 μm, il est démontré que la croissance granulaire lors d'un frittage compris entre 400 et 800 °C caractérisé par une montée en température de 80 °C/min, une pression de 50 MPa et un temps de maintien de 6 min est limitée pour des températures de frittage inférieures à 700°C. La densification de ces échantillons après frittage est comprise entre 77 et 98 % [16]. Le frittage, sous forme d'une pastille de 0,9 g, d'une poudre ultrafine de cuivre, dont la taille est centrée sur 35 nm, a été étudié pour des températures comprises entre 75 et 260 °C avec une montée en température de 50 °C/min [6].\n\nFigure II.10 : Densité relative de pastilles de cuivre pour différentes températures de frittage par SPS [6]. La pastille de cuivre frittée à 260 °C présente une densification de 87 % et met en évidence la diminution de la température nécessaire à la densification d'un échantillon de cuivre lorsque la taille des particules diminue. Le frittage par SPS a déjà démontré sa capacité à consolider des échantillons pulvérulents sous forme de barreaux précurseurs servant à la mise en oeuvre de fils. En effet, des lots de 14 g de poudre de cuivre pur [4, 8] ou de poudre composite CNT-Cu [4, 17, 18] dont la taille des particules de cuivre est micrométrique (environ 1μm) ont été consolidés en deux cycles. Le premier cycle sert à amorcer le retrait de la poudre. Le second cycle est caractérisé par une température comprise entre 600 °C et 700 °C, une pression uni-axiale de 25 MPa et un temps de maintien à température maximale de 5 min [4]. Les barreaux ainsi obtenus présentent une densité relative comprise entre 85 et 95%. La présence de porosités des barreaux est souhaitée car elle facilite la déformation sans rupture lors de l'étirage en favorisant la rotation et le réarrangement des grains. Les barreaux présentent une microstructure à grains isotropes dont la granulométrie est celle de la poudre ayant été consolidée. De plus, aucune texturation n'est observée. D'après l'état de l'art du frittage du cuivre par SPS, il semble réaliste de fritter les poudres composites Ag- 72 Cu dont les particules de cuivre sont d'une taille micrométrique dans une gamme de températures allant de 400 à 500 °C tout en obtenant une densification comprise entre 85 et 95 %. II.4-2-2 Cycle de frittage\n\nLe cycle de SPS a été choisi en se basant sur le cycle utilisé par C. Arnaud lors de sa thèse [4]. Cependant, dans ces travaux de thèse sur les fils composites Ag-Cu, le cycle sera effectué en une seule étape. Les frittages SPS ont été réalisés à la PNF2 à Toulouse. La poudre est placée dans une matrice en WC/Co, et non en graphite car sa résistance mécanique en cisaillement ne serait pas suffisante pour résister aux contraintes radiales exercées lors de la compression de la poudre. Une feuille de papier graphite (Papyex®) d'épaisseur 0,2 mm est placée contre la paroi du moule de diamètre 8.4 mm. Ainsi, après le cycle SPS, le barreau sera plus facile à démouler. De plus, elle évite toute interaction entre la poudre et la matrice en WC/Co. Une fois la feuille de Papyex® mise en place, le diamètre utile est de 8 mm. Le cycle est réalisé sous vide (pression résiduelle < 10 Pa) et la température est contrôlée à l'aide d'un thermocouple placé dans un trou usiné à mi-hauteur de la matrice (5 mm de profondeur et 1,8 mm de diamètre). Les pistons étant trop courts, deux galets sont introduits entre la poudre et le piston. Les galets permettent d'avoir une course complète du piston et évitent donc un arrêt de la mise sous pression.\n\nLa Figure II.11 présente le montage SPS. Figure II.11 : a) Photographie de la matrice WC/Co et du thermocouple lors de la mise en place dans le SPS et b) schéma du moule SPS. Avant le frittage, un pré-chargement de 25 MPa est appliqué sur la poudre avec le SPS afin de rendre l'état de compaction initiale de la poudre le plus reproductible possible. Les paramètres d'impulsions par défauts de la machine, 12 On : 2 Off, sont utilisés et la température est contrôlée au moyen d'un thermocouple. Lors du cycle SPS, l'échantillon est chauffé jusqu'à 350°C avec une rampe de montée de 25 °C/min puis jusqu'à la température maximale à 50 °C/min où un palier est appliqué pendant 5 min. La 73 montée en pression se fait pendant la première minute du palier en température puis la pression est maintenue à 25 MPa pendant les 4 minutes restantes. La pression est relâchée progressivement durant le refroidissement. Le barreau est retiré du SPS lorsque que la chambre a atteint une température inférieure à 100 °C sans quoi, le barreau risquerait de s'oxyder. Le cycle de frittage est représenté sur la Figure II.12. Les recommandations issues de l'état de l'art conduisent à appliquer des températures de frittage de 400 ou 500 °C.\n\nFigure II.12 : Consignes de température et de pression du traitement SPS. Après consolidation, les barreaux obtenus ont un diamètre de 8 mm et une longueur moyenne de 30 mm. Le Papyex® est éliminé par usinage. Après\n\ncette\n\nétape, le diamètre du barreau est compris entre 7,1\n\net\n\n7,6 mm (Fig. II.13). Figure II.13 : Photographies d'un barreau SPS, a) recouvert de Papyex® après démoulage, b) usiné.\n\nII.4-2-3 Courbe de densification et densité\n\nLa densité finale a été évaluée par la méthode d'Archimède sur les barreaux de cuivre après usina . Les mesures de densification relative sont données avec une erreur de 1%. Les densités relatives de barreaux sont de 94,5 ± 1 %. Les valeurs de densités relatives des barreaux sont reportées dans le Tableau II.III.\n\nTableau II.III : Densification des barreaux composites Ag-Cu Densification (%) 0,5Ag-Cu400-8 95,4 1Ag-Cu400-8 93,7 5Ag-Cu500-8 95,5 10Ag-Cu500-8 93,5\n\nLes courbes de densification (Fig. II.14) ont été calculées à partir du déplacement enregistré, de la densité relative finale mesurée, ainsi que des dimensions finales du barreau. Le déplacement enregistré inclut le retrait du cuivre ainsi que la dilatation thermique des éléments en graphite du montage et de la matrice en WC/Co. Lors de sa thèse [4], C. Arnaud a effectué un traitement SPS sur un barreau déjà fritté, ce qui a permis de mettre en évidence le déplacement lié aux différents éléments du montage. Le déplacement maximal (en valeur absolue) lié à la dilatation thermique du montage est de 0,12 mm, ce qui représente une erreur maximale de 1% sur les densités calculées pour les courbes de densification.\n\nFigure II.14 : Courbes de densification et température en fonction du temps de frittage des poudres composites a) 0,5AgCuR et b) 1Ag-CuR frittées à 400 °C et c) 5Ag-CuR et d) 10Ag-CuR frittées à 500°C. 10Ag-Cu500 présente une montée en température non linéaire due à un problème de régulation (Fig. II.14c). Ce problème de régulation lors du frittage des poudres composites est survenu une seule fois au cours de ces travaux. Il est dû à un mauvais contact entre les électrodes, les pistons, les galets et l'échantillon 75 qui ne permet pas une bonne circulation du courant électrique. C'est pourquoi la pression de contact lors de la montée en température a été augmentée à 3 MPa par la suite. Malgré l'étape de pré-compaction, il est possible de noter une différence de densité à cru entre les échantillons. La densification des poudres commence à une température proche de : 160°C pour 1Ag-Cu400, 220 °C pour 5Ag-Cu500 et 280 °C pour 10Ag-Cu500. Ces températures correspondent aux températures de réduction qui ont permis le pré-frittage de ces poudres. Au début du palier à 400 °C la densité relative de 0,5Ag-Cu400 et 1Ag-Cu400 est respectivement de 84 et 81 %. 0,5Ag-Cu400 atteint une densification maximale de 95% un peu avant la fin du palier de température sous une pression de 25 MPa. Elle est de 93 % pour 1Ag-Cu400. Dans le cas de 5Ag-Cu500 et 10Ag-Cu500 la température de frittage plus grande permet d'observer un ralentissement de la densification à une température d'environ 475 °C pouvant indiquer la fin de la densification sous l'effet de la température. Cependant, lors du palier de température à 500 °C, la mise sous pression permet un gain de densification supplémentaire de 2 à 5 %. Durant ce palier, la densification atteint un plateau correspondant à la densité relative finale de 95 et 93 % respectivement pour 5Ag-Cu500 et 10Ag- 500. Malgré un temps de frittage plus court dû à une température de frittage plus faible, 0,5Ag-Cu400 et 1AgCu400/8 présentent une densité relative équivalente à celle de 5Ag-Cu500 et 10Ag-Cu500. Il est possible d'observer que la mise sous pression (25 MPa) lors du palier en température a permis d'atteindre des densités relatives équivalentes pour tous les échantillons malgré des températures et des temps de frittage différents. II.4-3 Microstructure et texture des barreaux\n\nLes images de MEB des sections transversales de 1Ag-Cu400/8 (Fig. II.15a) 5Ag-Cu500/8 (Fig. II.15b) et 10Ag-Cu500/8 (Fig. II.15c) ont été prises en mode électrons rétrodiffusés pour améliorer le contraste entre Ag (apparaissant en blanc sur les images) et Cu (en gris). Les zones noires correspondent, quant à elles, à la porosité. 1Ag-Cu400/8 présente une distribution discrète d'argent traduisant une répartition unitaire des microfils d'argent au sein de la matrice de cuivre. L'observation d'une seconde phase d'argent plus grossière dans 5Ag-Cu500/8 pourrait être due au frittage de petits groupes de microfils d'argent. Dans le cas de 10Ag-Cu500/8, la répartition non-homogène de domaines d'argent pouvant atteindre plusieurs micromètres est le résultat du frittage des amas de microfils observés dans la poudre composite (Fig. II.8h). Afin de connaitre la distribution de tailles de grains des barreaux, ceux-ci ont été analysés par EBSD (Fig. II.16) 76\n\nFigure II.15 : Images de MEB des sections transversales de a) 1Ag-Cu400/8, b) 5Ag-Cu500/8 et c) 10Ag-Cu500/8. Figure II.16 : Cartographies de tailles de grains obtenues par EBSD et les distributions de tailles de grains de Cu et Ag correspondantes pour : a) 1Ag-Cu400/8 et b) 5Ag-Cu500/8 et c) 10Ag-Cu500/8. Sur la cartographie, Ag est coloré en rouge, Cu est coloré avec une nuance de vert en fonction de la taille des grains, les joints de grains sont colorés en noir, et la porosité est représentée par des zones noires. 77 Les images de la coupe transversale de 1Ag-Cu400/8 (Fig. II.16a) montrent que les microfils d'argent sont dispersés de manière homogène dans la matrice de Cu constituée de grains micrométriques isotropes contenant des macles thermiques. La distribution de taille de grains de cuivre (d10 = 0,40 μm; d50 = 0,91 μm; d90 = 1,88 μm) et d'argent (d10 = 0,11 μm; d50 = 0,17 μm; d90 = 0,26 μm) reflète l'absence de croissance granulaire lors du frittage à 400 °C. De plus, la présence d'une seconde phase d'argent confirme la microstructure composite. Les observations de la coupe transversale de 5Ag-Cu500/8 (Fig. II.16b) et de 10Ag-Cu500/8 (Fig. II.16c) mettent en évidence l'absence de croissance granulaire lors du frittage à 500 °C. En effet, la distribution de tailles de grains de cuivre de 5Ag-Cu500/8 (d10 = 0,31 μm; d50 = 0,97 μm; d90 = 2,23 μm) et de 10Ag-Cu500/8 (d10 = 0,28 μm; d50 = 0,76 μm; d90 = 1,91 μm) sont similaires à celle de 1Ag-Cu400/8. Cependant, la distribution de la taille des grains d'argent reflète une légère croissance granulaire de l'argent pour 5Ag-Cu500/8 (d10 = 0,22 μm; d50 = 0,25 μm; d90 = 0,72 μm) et une croissance plus importante pour 10Ag-Cu500/8 (d10 = 0,24 μm; d50 = 0,50 μm; d90 = 1,11 μm). Cette croissance de l'argent pourrait être permise par la ce de groupes de quelques microfils et d'amas de microfils respectivement pour 5Ag-Cu500 et 10Ag-Cu500. Les cartographies d'orientation de 1Ag-Cu400/8 (Fig. II.17) selon la direction d'étirage (DE), la direction normale (DN) et la direction tangentielle (DT) ne montrent aucune texturation du barreau après frittage SPS.\n\nFigure II.17 : Cartographies d'orientation obtenues par EBSD, d'une coupe transversale de 1Ag-Cu400/8 selon la direction a) DT, b) DN et c) DE. La microdureté Vickers de 1Ag-Cu400/8, 5Ag-Cu500/8 et 10Ag-Cu500/8 est respectivement de 119, 114 et 103 HV0,2. En comparaison, la microdureté du cuivre recuit standard est de l'ordre de 45-50 HV0,2. 78 Des barreaux de 14 g ont été élaborés par SPS à partir des poudres composites dont la teneur en argent est comprise entre 0,5 et 10 % vol. Ag. Les poudres 0,5Ag-CuR et 1Ag-CuR ont été frittées à 400°C tandis que 5Ag-CuR et 10Ag-CuR l'ont été à 500 °C. Les barreaux présentent tous une densité relative de 94 ± 1 %. Il est souhaitable que la densification ne soit pas totale afin de faciliter la déformation du barreau lors de l'étape d'étirage, en favorisant la rotation et le réarrangement des grains. Les investigations MEB et EBSD ont permis d'observer que : - tous les barreaux sont composés de deux phases. L'argent est réparti de façon homogène dans la matrice de cuivre sauf pour 10Ag-Cu500/8, - 1Ag-Cu400/8 présente des microfils d'argent dispersés de manière homogène dans la matrice de Cu. La croissance granulaire est absente pour cette température de frittage, - 5Ag-Cu500/8 et 10Ag-Cu500/8 ne présentent pas de croissance granulaire pour les grains de cuivre. Cependant, les grains d'argent montrent une légère croissance pour 5Ag-Cu500/8. Cette croissance est plus importante pour 10Ag-Cu500/8, - la microstructure des barreaux est formée de grains isotropes présentant des macles thermiques. Aucune texturation n'est observée dans les barreaux. Ces barreaux vont servir de précurseurs pour le tréfilage de fils fins. II.5 Elaboration des fils composites Ag-Cu par tréfilage\n\nUne façon de nano-structurer des matériaux polycristallins est d'appliquer des méthodes de déformations plastiques sévères. Une déformation plastique sévère (SPD : Severe plastic deformation, en anglais) est un terme générique décrivant un groupe de techniques de travail des métaux impliquant de très grandes déformations. Parmi ces techniques, on peut citer : - l'extrusion coudée à aire égale (ECAE : Equal Channel Angular Extrusion), - la torsion sous haute pression (HPT : High Pressure Torsion), - le forgeage multiple (MDF : Multi-Directional Forging), - le laminage multiple (ARB : AccumulativeRoll-Bonding), - l'extrusion et compression cyclique, - l'extrusion-torsion (TE : Twist Extrusion), - l'étirage et empilement multiple (ADB : Accumulative Drawing and Bundling), L'élaboration de fils conducteurs renforcés par ADB, comme explicité dans le chapitre I, a déjà démontré sa capacité à élaborer des fils nano-structurés à hautes contraintes à la rupture. Cependant, sa 79 complexité de mise en oeuvre semble être un frein à l'industrialisation de tels conducteurs. La déformation par tréfilage, qui est une méthode largement employée dans la fabrication de fils à l'échelle industrielle, semble être une méthode de mise en oeuvre à privilégier.\n\nII.5-1 Principe du procédé d'élaboration de fils par tréfilage\n\nLe tréfilage permet de mettre en forme des métaux en les déformant plastiquement. Lorsque le taux de déformation vraie η appliqué au fil est supérieur à 5, on considère le procédé d'étirage comme une technique de déformation plastique sévère [19]. Afin de réduire sa section, le fil est étiré à travers une ière présentant un angle de travail α (Fig. II.18). Les filières permettent de mettre en forme les conducteurs à un diamètre souhaité tout en contrôlant l'écrouissage en choisissant un taux de réduction et un angle de filière [20] adaptés au métal à déformer. Fili re /2\n\nFil Figure II.18 : Schéma d'une filière de tréfilage. Le taux de réduction de section (RA(%)) lors du passage du fil dans une filière est défini par la formule (II.4) : RA(%) = Si −Sf Si Øf 2 × 100 = (1 − ( Ø ) ) × 100 i (II.4) Si est la section initiale, Sf est la section finale, Øi est le diamètre initial, Øf est le diamètre final. Le taux de déformation vraie (η) est défini par (II.5) : η = ln A0 Af (II.5) A0 est la section initiale, Af est la section finale. Comme expliqué dans le chapitre I, il est possible de tréfiler les fils à différentes températures. La méthode la plus répandue est le tréfilage à température ambiante. La Figure II.19 représente le chariot 80 mobile entrainant un fil à travers une filière conique. La seconde est le tréfilage cryogénique [21-23] comme utilisé à l'IFW à Dresde (Allemagne). Avec cette méthode, il est nécessaire d'utiliser un caisson rempli d'azote liquide en amont du chariot mobile. Comme le montre la Figure II.20, la filière conique ainsi que le fil sont immergés dans l'azote liquide, ce qui permet de déformer le fil à 77 K. Des fils de cuivre pur ont été élaborés, par tréfilage à température ambiante et la température de l'azote liquide (LNT), à partir de barreaux de cuivre frittés par SPS. La campagne de tréfilage à LNT a été mise en oeuvre en collaboration avec J. Freudenberger, à l'IFW. La méthode d'élaboration est décrite en annexe D et la microstructure des fils étudiée par MEB et EBSD ainsi que les propriétés mécaniques et la résistivité électrique des fils sont présentées en Annexe E.\n\nLa complexité de la méthode de déformation cryogénique\n\nêtre un frein majeur à une future industrialisation. C'est pourquoi les fils seront élaborés par tréfilage à température ambiante. Figure II.19 : Banc d'étirage à température ambiante au LNCMI, Toulouse. Figure II.20 Banc d'étirage à LNT à l'IFW, Dresde.\n\nII.5-2 Conditions de tréfilage\n\nL'étirage a été effectué au LNCMI sur un banc d'étirage développant une force de traction maximale de 100 kN et ayant une longueur de 16 mètres (Fig. II.21) 81\n\nFigure II.21 : Banc d'étirage du LNCMI. Les barreaux obtenus par SPS étant trop courts (30 mm environ) pour être directement étirés, ils sont placés dans une gaine en acier inoxydable. La Figure II.22 représente la gaine en acier inoxydable de diamètre 20 mm et de longueur 210 mm ainsi que le barreau SPS. L'étirage est réalisé à une vitesse de 3 m/min. Un lubrifiant adapté à l'étirage de l'acier est utilisé pour éviter le grippage de la gaine dans la filière en carbure de tungstène.\n\nAvant chaque passage dans une filière, il est nécessaire d'appointer la gaine, c'està-dire réduire la section de sa tête afin qu'elle puisse passer à travers la filière et qu'il soit possible de la saisir avec les mors auto-serrants\n\ndu\n\ncha\n\nriot. Figure II.22 : Gaine acier inoxydable et barreau SPS. Neuf passes successives avec des filières réduisant la section de la gaine de 15 % par passe permettent l'obtention d'une gaine de diamètre 10.62 mm. Il est possible de calculer la longueur théorique du barreau SPS à la fin de l'étirage de la gaine car il se déforme de façon homothétique avec conservation du volume. Quand le diamètre de la gaine est réduit de moitié, le fil Ag-Cu a un diamètre de 4 mm environ et une longueur moyenne de 120 mm. Il est donc assez long pour être étiré seul. La Figure II.23 \n\nreprésent\n\ne un fil après l'étape de dégainage. La gaine est retirée par usinage et le fil de cuivre est étiré jusqu'à un diamètre final de 0,198 mm (Fig. II.24). Lors de l'étirage des fils composites Cu-Ag seuls, un lubrifiant adapté au tréfilage du cuivre est utilisé et le taux de réduction de section appliqué est de 15 %. Le tréfilage de ces fils Ag-Cu ne nécessite aucun traitement thermique. Des prélèvements ont été effectués pour les diamètres compris entre 1,023 et 0.198 mm afin d'effectuer les caractérisations microstructurales, électriques et mécaniques. Les prélèvements ont une longueur minimale de 170 mm pour pouvoir réaliser un essai de traction à température ambiante et à 77 K. 82\n\nFigure II.23 : Barreau de diamètre 4 mm après dégainage. La tête et la queue du fil sont repérées afin de toujours tréfiler l'échantillon dans le même sens. Figure II.24 : Evolution du diamètre (ø) de l'échantillon lors de l'élaboration des fils. Le Tableau II.IV reporte le taux de déformation vraie des fils en fonction de leurs diamètres.\n\nTableau II.IV : Taux de déformation vraie à différents diamètre\n\nlors de l'élaboration des fils. Diamètre (mm) 8 4 1,023 0,809 0,506 0,401 0,293 0,198 Taux de déformation vraie 0 1,39 4,11 4,58 5,52 5,99 6,61 7,38\n\nII.5-3 Microstructure et texture des fils II.5-3-1 Densité relative\n\nLes densités relatives des fils de diamètre 4 mm sont mesurées par la méthode d'Archimède. Les valeurs de densités relatives sont reportées dans le Tableau II.V. Lors de l'étirage, les mécanismes de déformations permettent d'éliminer la porosité restante dans les barreaux grâce au mouvement des grains ainsi qu'à leur déformation. La densité relative des fils de diamètres inférieurs est probablement plus élevée mais les prélèvements présentent une masse trop faible pour des mesures fiables.\n\nTableau II.V : Densifications des barreaux et des fils composites\n\nAg-Cu Echantillon 0,5Ag-Cu400 1Ag-Cu400 5Ag-Cu500 10Ag-Cu500 Diamètre (mm) 8 4 8 4 8 4 8 4 Densification (%) 95,4 98,6 93,7 98,7 95,5 98,1 93,5 98,0 83\n\nII.5-3-2 Microstructure et texture\n\nLes images de MEB en mode rétrodiffusé des sections longitudinales et transversales des fils composites de diamètre 1 mm sont représentées sur la Figure II.25.\n\nFigure II.25 : Images de MEB des sections longitudinales de : a) 1Ag-Cu400/1, c) 5Ag-Cu500/1 et e) 10Ag-Cu500/1 et des sections transversales de : b) 1Ag-Cu400/1, d) 5Ag-Cu500/1 et f) 10Ag-Cu500/1. L'étirage a permis d'orienter les microfils dans le sens de l'étirage. Les images de MEB des sections longitudinales permettent l'observation de filaments d'argent parallèles les uns aux autres et longs de plusieurs micromètres. Les microfils d'argent de 1Ag-Cu400/1 semblent très fins. Ils sont clairement observés pour 5Ag-Cu500/1 et 10Ag-Cu500/1. Un certain degré d'agglomération de l'argent est à noter pour 10Ag-Cu500/1. Ces résultats sont confirmés par l'observation des sections transversale de ces fils. La microstructure des fils de diamètre 0,5 mm a été étudiée par EBSD. Les cartographies de phases, de la 84 section transversale de 1Ag-Cu400/0,5, 5Ag-Cu500/0,5 et 10Ag-Cu500/0 sont présentées sur la Figure II.26. Une cartographie de phases dans le sens longitudinal de 1Ag-Cu400/0,5 est représentée sur la Figure II.27.\n\nFigure II.26 : Cartographies de phases des sections transversales de : a) 1Ag-Cu400/0,5, b) 5Ag-Cu500/0,5 et c) 10AgCu500/0,5, obtenues par EBSD. Les grains de cuivre sont colorés avec une nuance de vert en fonction de la taille des grains et les grains d'argent sont colorés en rouge. Les histogrammes représentent la distribution de la taille des grains. Le cuivre et l'argent ont le même groupe d'espace, 225 ou (F m -3 m), mais ont des paramètres de maille cubique à faces centrées différents (aCu = 0,361 nm et aAg = 0,408 nm). Comme l'analyse EBSD n'est pas très sensible aux paramètres du réseau, l'analyse EDS a été utilisée afin de discriminer les phases. L'utilisation de l'EDS limite la détection à un diamètre de grain de 0,14 μm. Les distributions de la taille des grains de cuivre observées sur les coupes transversales de 1Ag-Cu400/0,5 (d10 = 0,14 μm; d50 = 0,20 85 μm; d90 = 0,32 μm ; Fig. II.26a), 5Ag-Cu500/0,5 (d10 = 0,14 μm; d50 = 0,20 μm; d90 = 0,34 μm; Fig. II.26b) et 10Ag-Cu500/0,5 (d10 = 0,14 μm; d50 = 0,19 μm; d90 = 0,30 μm; Fig. II.26b) sont équivalentes. Il en va de même pour la distribution de tailles des grains d'argent et ce malgré une légère croissance granulaire après le frittage de 5Ag-Cu500 et 10Ag-Cu500. En effet, les microfils d'argent observés dans ces différents fils présentent la même distribution étroite (d10 = 0,14 μm; d50 = 0,17 μm; d90 = 0,21 μm). La valeur du d10 de 0,14 μm correspond à la limite de détection par EBSD mais il y a très probablement des grains plus fins au sein des fils. L'affinement de la microstructure dans le sens transversal s'accompagne d'un allongement des grains dans le sens de l'étirage. En effet, la section longitudin de 1Ag-Cu400/0,5 (Fig. II.27) présente des grains de cuivre et d'argent longs de plusieurs micromètres dans le sens de l'étirage.\n\nFigure II.27 : Cartographie de phase de la section longitudinale de 1Ag-Cu400/0,5. Les grains de cuivre et d'argent sont respectivement colorés en vert et en rouge. Les cartographies d'orientation de 1Ag-Cu400/0.5 en section transverse (Fig. II.28a) et en section longitudinale (Fig. II.28) montrent que le cuivre et l'argent possèdent deux orientations principales : <111> et <001> suivant l'axe de tréfilage. Les orientations <111> et <001> correspondent aux textures préférentielles obtenues lors de la déformation par étirage des métaux à structure cubique à faces centrées.\n\nFigure II.28 : Cartographies d'orientation de 1Ag-Cu400/0,5 obtenues par EBSD. a) coupe transversale analysée selon la direction d'étirage et b) coupe longitudinale analysée selon la direction d'étirage (la partie de gauche présente la texture du cuivre et la partie de droite celle de l'argent). 86\n\nLes barreaux 1Ag-Cu400/8 et 1Ag-Cu600/8 ont pu être étirés sans rupture sous forme de fils fins de diamètre final 0,198 mm. L'étude de la microstructure des fils a mis en évidence l'affinement de la microstructure durant le tréfilage à température ambiante. En effet, le barreau 1Ag-Cu400 (Fig II.29a) présente une valeur de d50 égale à 0,91 μm alors qu'elle est de 0,20 μm pour le fil de diamètre 0,5 mm (Fig. II. 29b).\n\nFigure II.29 : Comparaison de la taille des grains de cuivre de : a) 1Ag-Cu400/8 et b) 1Ag-Cu400/0,5. Les fils présentent une texture caractéristique de la déformation par étirage des métaux cfc avec deux orientations préférentielles <111> et <001> le long de l'axe de tréfilage (Fig II.30b). Figure II.30 : Cartographies d'orientation obtenues par EBSD, d'une coupe transversale de : a) 1Ag\n\nCu400/8 et b) 1Ag-Cu400/0,5, analysées selon l'axe de tréfilage."
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Le manuel avancé de classe 10 organise une concurrence entre deux méthodes de représentation graphiques d'une même série statistique de variable continue, elles-mêmes appuyées sur deux tableaux de distribution différents. Dans la première méthode, la variable statistique continue est discrétisée par intervalles disjoints. Dans la deuxième méthode, la variable statistique continue est présentée continûment par intervalles adjacents. Quelle méthode l'enseignant proposera-t-il et quelle méthode l'élève devra-t-il utiliser pour décrire une distribution des effectifs? En fait dans les exercices proposés, le regroupement en classes n'est pas à charge d'élève puisque le tableau de distribution est fourni avec l'énoncé de l'exercice. Ce tableau détermine le graphique attendu. Parmi huit exercices proposés dans ce manuel, sept concernent le regroupement en classes égales disjointes dont les extrémités sont des nombres entiers et un seul concerne le regroupement en classes égales adjacentes dont les extrémités sont des nombres décimaux non entiers. Chaque fois, les classes sont données par l'auteur. Le regroupement en classes inégales, absent du programme, n'est proposé ni dans le manuel ni dans le livre d'exercices. Pourtant, dans une partie du livre d'enseignants de l'ensemble avancé, intitulée « connaissance complémentaire », l'auteur introduit la méthode pour tracer l'histogramme dans le cas où les classes d'un regroupement sont inégales en donnant une formule pour calculer la hauteur du rectangle : Connaissance complémentaire En général, les intervalles qui déterminent les classes sont de même largeur. Mais dans certaines situations, il n'est pas obligé que les classes soient égales. Dans le cas où les classes sont inégales, pour tracer le diagramme en colonnes, la hauteur de la colon ne qui représente la classe i-ième est comme suit : hi = c ni li où ni est l'effectif de la ième classe, li est largeur de cette classe, c étant une constante choisie par nous-mêmes. Si c égale 1, l'aire d'une colonne qui représente l'effectif égale à l'effectif de cette classe. S'il n'y a pas d'espace entre les colonnes, le nombre des individus appartenant à l'intervalle [a ; b] (où a < b) est égal approximativement à la somme des aires des colonnes se trouvant entre deux droite x = a et x = b ». (Livre d'enseignant de classe 10, l'ensemble avancé, p. 96 Chercher l'individu le plus grand noté x max et le plus petit noté x min. Tous les individus appartiennent au segment [a ; b] où a ≤ x min et x max ≤ b ; a et b sont choisis tel qu'il y ait aucune classe vide52 (contenant aucun individu) lors de regroupement en classes. Etape 2 : Préciser le nombre des classes (noté k) et diviser le segment [a ; b] en k classes (en fait, c'est k-1 demi-intervalles et un segment) disjointes et non vides suivantes : [ x 1 ; x 2 ), [ x 2 ; x 3 ),, [ x 2 k −1 ; x k ), [ x k ; x k +1 ] où x 1 = a, x k +1 = b Chaque individu appartient à une et seulement une classe de ces k classes . ( Livre d'enseignants de classe 10, l' ensemble é lémentaire , p . 149) On pourrait ainsi voir dans cette recommandation aux enseignants une raison de procéder à un regroupement en classes inégales à partir d'une série et le livre d'enseignants explique la méthode pour le faire, si nécessaire. Mais dans les tâches proposées aux élèves, on ne rencontre pas de série où un tel regroupement serait nécessaire et le regroupement en classes est systématiquement effectué par le manuel en classes égales. Comme le dit le Livre d'enseignants, quand les classes sont inégales, l'effectif d'une classe ne se lit pas comme la hauteur sur l'axe des ordonnées mais peut se lire comme l'aire du rectangle dont la largeur est comptée dans l'unité qui a été choisie dans la construction de l'histogramme. En conséquence, la présence des classes inégales apporte dans l'histogramme une lecture d'aire des rectangles qui se substitue avantageusement à la lecture fonctionnelle de la hauteur sur l'axe des ordonnées qui doit être suivie d'une multiplication par la largeur. Ce que l'on lit sur l'axe des ordonnées ce n'est pas l'effectif mais la densité des effectifs. Cette dernière notion n'est pas présentée par le manuel et n'est certainement pas un objet d'enseignement dans l'institution vietnamienne. Quand le regroupement se fait à classes égales, l'effectif peut être lu aussi bien comme la hauteur sur l'axe des ordonnées que comme l'aire du rectangle dont la largeur est unitaire. Conclusion sous forme de deux hypothèses de recherche Hypothèse 1 (H1) Dans l'institution vietnamienne, il existe un contrat didactique à propos de l'objet d'histogramme que l'on peut énoncer ainsi : L'élève n'a pas à sa charge de faire le regroupement en classes d'une série statistique donnée. Le regroupement des données statistiques en classes est toujours fait en classes égales et il est à la charge de l'enseignant. Selon qu'il sera en classes disjointes nous Analyse de l'exercice 1 ou non, le graphique attendu est un diagramme en colonnes disjointes ou un diagramme en colonnes adjacentes. Hypothèse 2 (H2) Dans l'institution vietnamienne actuelle, la notion d'aire d'un rectangle n'est pas mobilisable dans les tâches mathématiques attachées à l'histogramme. Les deux exercices (1 et 2) du questionnaire sont conçus pour tester ces hypothèses de recherche. I.2. Présentation de l'exercice Le questionnaire s'adresse aux élèves de classe 10 après enseignement de la statistique et aussi aux enseignants qui enseignent la statistique. Le sujet ci-après est la partie commune distribuée en feuille à chaque élève et à chaque enseignant : On a mesuré la taille des 66 joueurs d'un club de basket-ball. On a constitué le tableau suivant : Classe de taille (mètre) [1,60 ; 1,70[ [1,70 ; 1,75[ [1,75 ; 1,80[ [1,80 ; 1,85[ [1,85 ; 1,95[ [1,95 ; 2,05[ Nombre de joueurs 16 15 18 7 8 2 On a demandé à élèves d'un lycée vietnamien de représenter graphiquement les données du tableau. Voici cinq représentations graphiques qu'ils ont réalisées : Graphique 1 98 Graphique 2 Graphique 3 Graphique 4 Graphique 5 1. Parmi les représentations graphiques proposées, lesquelles considérez-vous comme correctes? 2. Parmi les représentations graphiques proposées, lesquelles considérez-vous comme incorrectes? Justifiez vos réponses. 3. Écrire la légende sur l'axe horizontal et sur l'axe vertical pour chaque représentation graphique acceptée comme correcte. - A l'élève il est proposé de résoudre individuellement l'exercice 1 dans une feuille de réponse avec la demande de lire attentivement l'exercice et de répondre aux questions proposées. Voici un ensemble de 4 exercices. Lisez attentivement les questions et répondez aux questions, s'il vous plait. Merci de votre participation. _____________________ ________________ Vos nom et prénom : Classe : Lycée : Exercice 1 : 1) 2) 3) 99 Analyse de l'exercice 1 - A l'enseignant il est demandé de donner ses réponses sur une autre feuille avec des questions préparées pour lui comme suit : Voici 4 exercices à propos de la statistique enseignée en classe 10. Pour chacun d'eux, nous vous prions de répondre à la question suivante : Proposeriez-vous un tel exercice en classe 10? Si oui, quelle réponse attendez-vous d'un élève de classe 10? Sinon, comment le modifieriez-vous? Merci de votre participation au questionnaire. ____________________________________________________________________ Fiche de réponses : Votre nom et prénom : Vous êtes enseignant(e) du lycée : Avez-vous enseigné à l'aide du programme expérimental entre les années 2004 et 2006? Exercice 1 : Proposeriez-vous cet exercice en classe 10? Oui Non La réponse que vous attendez d'un élève de classe 10 : Votre modification éventuelle de l'exercice : I.3. Analyse a priori Quels sont les choix qui organisent le questionnaire? Les variables de situation 1) Le tableau de distribution est commun à tous les graphiques. Les données sont d'emblée regroupées en classes inégales (contre égales) qui sont représentées graphiquement sur l'axe des abscisses par des intervalles soit adjacents soit disjoints. Classe de taille (mètre) [1,60 ; 1,70[ [1,70 ; 1,75[ [1,75 ; 1,80[ [1,80 ; 1,85[ [1,85 ; 1,95[ [1,95 ; 2,05[ Nombre de joueurs 16 15 18 7 8 2 Tableau 10. Distribution commun 2) Tous les graphiques sont « fonctionnels » au sens qu'ils utilisent un repère cartésien (contre les graphiques circulaires). 3) Il n'y a pas de légende ni sur l'axe des abscisses ni sur l'axe des ordonnées (contre avec légende). 4) Le graphique est tracé sur un fond quadrillé pour favoriser la lecture d'aire mais sans précision d'unité d'aire (contre feuille vide) Les différents graphiques Le graphique 1 est un diagramme en rectangles adjacents dont les hauteurs sont égales aux effectifs des classes correspondantes mais dont les largeurs sont toutes égales (conformément à l'histogramme de l'institution vietnamienne). Les largeurs des rectangles ne sont donc pas proportionnelles aux largeurs des classes dans le tableau. Pourtant, l'aire53 de chaque rectangle est égale à l'effectif de la classe. Ainsi ce diagramme respecte la lecture fonctionnelle d'un diagramme en rectangles et la lecture par l'aire d'un histogramme. Graphique 1 - Le graphique 2 est un diagramme en rectangles adjacents. Dans ce diagramme, l'aire de chaque rectangle est égale à l'effectif de classe correspondant et la proportionnalité des largeurs des classes inégales est respectée sur l'axe des abscisses. La rupture du contrat se trouve dans le fait que la hauteur du rectangle ne peut pas être lue comme l'effectif de classe à cause des classes inégales. C'est-à-dire il n'y a pas de lecture fonctionnelle sur l'axe des ordonnées sauf à attacher à l'axe des ordonnées la densité d'effectifs au lieu des effectifs eux-mêmes (la densité d'effectifs est le quotient de l'effectif par la largeur de classe exprimée en unités de classe54. Ce graphique est conforme à la définition de l'histogramme présente dans les manuels universitaires. 53 Dans ce contexte, l'unité d'aire est l'aire d'un carré du quadrillage. 54 Dans cet exercice la largeur de classe-unité est égale à 0,5. Analyse de l'exercice 1 Graphique 2 - Le graphique 3 est aussi un diagramme en rectangles adjacents. Sur l'axe des ordonnées, on peut lire l'effectif d'une classe par la hauteur du rectangle et sur l'axe des abscisses, la proportionnalité des largeurs des classes est conservée graphiquement. C'est le graphique le plus conforme à l'institution vietnamienne. Pourtant, il ne respecte pas la propriété attribuée à l'histogramme de proportionnalité des aires et des effectifs. Graphique 3 - Le graphique 4 est un diagramme en segments qui conserve la lecture fonctionnelle des effectifs sur l'axe des ordonnées par les hauteurs des segments. Les valeurs sur l'axe des abscisses sont des valeurs isolées comme dans le cas d'un caractère qualitatif ou d'un caractère quantitatif discret. Il ressemble formellement au diagramme en segments introduit en classe 7 et devient donc un diagramme conforme à l'institution vietnamienne de classe 7. 102 Mais la substitution des rectangles par des segments fait disparaître l'aire comme quantité graphiquement évaluable. Graphique 4 - Le graphique 5 est un diagramme en colonnes/rectangles disjoints qui est proche le graphique 4 mais avec des « segments épais », c'est-à-dire des rectangles de même largeur que celle de classe-unité. L'aire existe donc dans ce diagramme et elle est proportionnelle aux effectifs. Les valeurs sur l'axe des abscisses sont des valeurs isolées du caractère qualitatif. Ce graphique 5 ressemble formellement au diagramme en rectangles introduit en classe 7 et au premier diagramme du manuel avancé de la classe 10. Graphique 5 Ainsi les cinq diagrammes proposés varient sur les valeurs différentes de la variable didactique V qu'est le couple (tableau, graphique). de l exercice 1 Paramètres du tableau : En fait, le tableau des données peut être : ordonnées brutes non ordonnées un tableau des données égales regroupé en classes inégales Schéma 2. Arbre des possibilités du tableau des données Dans notre choix, ce paramètre de tableau est fixe. C'est que le tableau représente une distribution des effectifs regroupés en classes inégales. Deux éléments importants dans ce choix sur le tableau sont : - le regroupement en classes qui est un choix conforme à l'institution vietnamienne, - l'inégalité des classes qui est une rupture du contrat didactique relatif au tableau de données. Le tableau 1 suivant présente les possibilités des choix pour le tableau des données (les cases en fond gris font partie de notre choix) : Tableau des données Conformité à l'institution vietnamienne ordonnées oui Tableau des données brutes non-ordonnées oui égales oui Tableau des données regroupées en classes inégales non Tableau 11. Tableau des possibilités des choix sur le tableau des données Paramètres du graphique : nous distinguons la représentation graphique des classes du tableau des données sur l'axe des abscisses, l'interprétation des hauteurs des rectangles sur l'axe des ordonnés et la présence ou l'absence de légendes sur les axes. Concrètement, nous faisons le choix sur les valeurs suivantes : - Sur l'axe des abscisses les classes sont représentées graphiquement par : + les intervalles ou les valeurs isolées Si intervalles, alors : + les intervalles sont égaux ou inégaux (c'est-à-dire leurs largeurs sont tous égales ou bien elles sont proportionnelles à celles des classes du tableau donné), + les intervalles sont adjacents ou disjoints - Sur l'axe des ordonnées : + la hauteur d'un rectangle est égale à l'effectif de classe ou non, + la hauteur d'un rectangle est égale à la densité d'effectif de la classe ou non 104 + la légende non écrite sur l'axe des ordonnées est « Effectif » ou « Densité d'effectif ». - Pas de légendes Chaque association de valeurs données aux deux premiers paramètres dicte l'égalité ou la non-égalité entre l'effectif de la classe et l'aire du rectangle (cette comparaison se fait seulement quand l'aire existe dans le graphique). Axe des abscisses adjacents égaux Intervalles disjoints adjacents Axe des ordonnées Aire-Effectif Légende sur l'axe des ordonnées Graphique Le tableau 3 présente tous les graphiques possibles (les cases en fond gris font partie de notre choix) : aire = effectif Effectif G1 hauteur = densité d'effectif aire ≠ effectif aire = effectif Effectif G5 hauteur = densité d'effectif aire ≠ effectif aire ≠ effectif G3 hauteur = densité d'effectif aire = effectif Effectif Densité d'effectif aire ≠ effectif hauteur = densité d'effectif aire = effectif pas d'aire Effectif G4 hauteur ≠ effectif pas d'aire G2 inégaux disjoints Valeurs isolées disjoints Tableau 12. Arbre des combinaisons possibles axe des abscisses-axe des ordonnées Les cases vides de la dernière colonne expriment des graphiques possibles mais non utilisés dans le questionnaire. Voici le tableau 4, réduction du tableau 3 aux graphiques choisis : Intervalles Axe des abscisses Valeurs isolées égaux adjacents disjoints inégaux adjacents Axe des ordonnées Aire-Effectif hauteur = effectif hauteur = effectif hauteur = effectif aire = effectif aire = effectif aire ≠ effectif hauteur = densité aire = effectif pas d'aire Légende sur l'axe des Graphique ordonnées Effectif G1 Effectif G5 Effectif G3 Densité G2 d'effectif Effectif G4 Tableau 13. Tableau réduit des choix sur l 'axe des absc isses- axe des ordonnées Analyse de l'exercice 1 Graphique Aire-Effectif adjacents hauteur = densité d'effectif ou = effectif aire = effectif Densité d'effectif g1 Ou effectif disjoints Légende sur l'axe des ordonnées Axe des ordonnées hauteur = densité d'effectif = effectif aire = effectif Densité d'effectif g5 Ou effectif disjoints Axe des abscisses pas d'aire Effectif g4 aire = effectif Effectif G1 aire = effectif Effectif G5 aire ≠ effectif Effectif G3 disjoints adjacents adjacents égaux inégaux Valeurs isolées hauteur = densité d'effectif disjoints égaux Intervalles Valeurs isolées Intervalles Tableau des données regroupées en classes égales Tableau Tableau des données regroupées en classes inégales Graphique Le tableau 5 ci-après associe le tableau 1 et tableau 3 en ajoutant les possibilités induites par un regroupement en classes égales. Ce tableau résume nos choix pour la variable V1(tableau, graphique) et compare nos choix avec les attentes de l'institution vietnamienne (partie grisée représente nos choix). aire = effectif Densité d'effectif G2 pas d'aire Effectif G4 Tableau 14. Tableau réduit des choix sur l'axe des abscisses-axe des ordonnées Dans ce tableau, gi est pour décrire le graphique utilisé dans l'institution vietnamienne qui ressemble Gi, c'est-à-dire : g1 (méthode 2, Manuel de classe 10, l'ensemble avancé) 106 g5 (méthode 1, Manuel de classe 10, l'ensemble avancé) g4 (manuel de classe 7) Stratégies S fonction : Stratégie « lecture fonctionnelle » (stratégie analytique) La lecture fonctionnelle dans le graphique fait comparer la hauteur d'un rectangle et l'effectif de la classe correspondant pour vérifier la proportionnalité entre eux. Pour les graphiques satisfaisant cette égalité, les trois réponses prévisibles sont comme suit : - le graphique G3 est correct55 car on voit en plus la proportionnalité des largeurs des intervalles (intervalles inégaux) et celles des classes (la réponse la plus conforme à l'institution vietnamienne). - les graphiques G1 et/ou G5 seront pris comme corrects en considérant les intervalles égaux comme représentant des classes égales, + si on choisit en plus la représentation adjacente des intervalles, c'est le graphique G1 qui est correct, + par contre, si on accepte la représentation disjointe des intervalles, le graphique G5 qui est correct. - le graphique G4 est correct si le segment est considéré comme un rectangle aplati (aire nulle) Le schéma suivant résume les réponses possibles d'après la S : fonction adjacents G1 égaux aire non nulle G5 G1, G4, G5 disjoints G4, G5 G1, G3, G4, G5 aire nulle G4 inégaux G 3 Schéma 3. Discrétisation des graphiques en utilisant S air S fonction : Stratégie « aire » (stratégie gé o métrique) La lecture d'aire dans le graphique fait comparer 'effectif d'une classe et l'aire du rectangle correspondant pour vérifier l'égalité ou la proportionnalité selon l'unité d'aire choisie. Les graphiques G1, G2, G5 satisfont cette égalité mais les graphiques choisis pour les correctes dépendent à la représentation graphique des largeurs des intervalles : 55 Il faut comprendre que ce graphique est correct dans le cadre de cette stratégie. 107 Analyse de l'exercice 1 - la proportionnalité des largeurs des intervalles et celles des classes dans le graphique fait choisir le graphique G2 comme correct. D'après la statistique descriptive dans livre universitaire, le graphique G2 est l'histogramme correct, - l'égalité des intervalles fait choisir le graphique G1 et G5, + si on considère la représentation adjacente des intervalles, le graphique G1 est correct, + inversement, si on considère la représentation disjointe des intervalles, le graphique G1 est correct. Le schéma suivant résume les réponses possibles d'après la égaux air : adjacents G1 disjoints G5 G1, G5 G1, G2, G5 inégaux S G2 Schéma 4. Discrétisation des graphiques en utilisant S classe S air : Stratégi e « classes ég ales » Le contrat didactique sur des classes égales fait accepter seulement les graphiques avec des classes égales ou fait ramener à classes égales par un découpage : - Découper des classes inégales en sous-classes égales : accepter le graphique G2 et refuser le graphique G3 : Graphique 2 Graphique 2' Sur le graphique G2, par un découpage binaire, le premier rectangle de hauteur 8 qui représente la classe [1,60 ; 1,70[ est divisé en deux rectangles égaux de même hauteur 8 qui 108 correspondent à deux sous-classes égales [1,60 ; 1,65[ et [1,65 ; 1,70[. Maintenant, comme ces deux sous-classes sont égales, la lecture hauteur-effectif donne l'effectif 8 pour chacune. Puis, par une réunion de ces deux sous-classes en additionnant leurs effectifs, on obtient la classe initiale et la somme 16 qui est celui de classe initiale et il satisfait l'information dans le tableau donné. Ensuite, les deux derniers rectangles sont divisés de même façon, et finalement, le graphique G2 devient G2'. voit que ce graphique G2' correspond au tableau de distribution des effectifs (Tableau 4) dont le regroupement est transformé en 10 classes égales (les lignes en fond gris et en lettres foncés sont pour les nouvelles sousclasses): Classe de taille (mètre) [1,60 ; 1,65[ [1,65 ; 1,70[ [1,70 ; 1,75[ [1,75 ; 1,80[ [1,80 ; 1,85[ [1,85 ; 1,90[ [1,90 ; 1,95[ [1,95 ; 2,00[ [2,00 ; 2,05[ Nombre de joueurs 8 8 15 18 7 4 4 1 1 Tableau 15. Distribution des effectifs en classes égales Ce découpage conduit le lecteur à accepter le graphique G2. Analyse de l'exercice 1 Le schéma suivant résume les réponses possibles d'après la S classe adjacents G1 intervalles égaux G1, G4, G5 aire non nulle G5 G4, G5 G1, G4, G5, G2 G4 aire nulle disjoints G2 découpage Schéma 5. Discrétisation des graphiques en utilisant Sclasse En résumé voici un diagramme de Venn qui présente la répartition des graphiques d'après les stratégies possibles : Sfonction G3 G5 G2 G1 Saire G4 Sclasse Figure 1. Diagramme de Venn des trois stratégies Rectangle : S fonction Triangle : S air Ovale : S classe Couples des graphiques à observer : • Couple (G2, G3) : G2 ne s'appuie pas sur une lecture fonctionnelle (par contre, il s'appuie sur une lecture d'aire) tandis que G3 s'appuie seulement sur une lecture fonctionnelle. Nous prévoyons que ce couple ne peut pas être choisi. • Couple (G1, G3) : G1 et G3 s'appuient sur une lecture fonctionnelle avec des intervalles adjacents mais diffèrent sur la proportionnalité des largeurs des intervalles et des classes. 110 • Couple (G1, G5) : Ces deux graphiques sont acceptables par les trois stratégies et ne diffèrent que par la disjonction des rectangles. I.4. Analyse a posteriori Le questionnaire a été proposé aux élèves et aux enseignants, concrètement : - les élèves de classes 10 à Ho Chi Minh ville entre mars et mais 2008 (Viêt-Nam). C'est juste après avoir appris la statistique qui a eu lieu au début de deuxième semestre dans l'année scolaire, - les enseignants des lycées à Ho Chi Minh ville et en province qui ont donné des cours de statistique, c'est-à-dire qui ont enseigné dans des classes 10. Nom de l'établissement/Région Élève Enseignant 2 classes 10 (seconde) du lycée Le Hong Phong de HCM ville 2 classes 10 (seconde) du lycée Vo Thi Sau de HCM ville 1 classe 10 (seconde) du lycée Mac Dinh Chi de HCM ville 1 classe 10 (seconde) du lycée Nguyen Huu Cau de HCM ville Ho Chi Minh ville Provinces (Dong Nai, Phan Thiet, Tien Giang) Effectif Total 57 77 208 42 32 40 72 32 Table au 16 : Distribution des effectifs des participant s à l'expérimentation Les conditions de passation ont été les suivantes : • Elève : Chacun reçoit un questionnaire56 composant 4 exercices et un ensemble57 de 5 feuilles de réponse ayant les versos vierges pour brouillon. On a demandé à l'élève de résoudre individuellement les exercices, de donner des réponses écrites sur les feuilles fournies et d'effectuer si nécessaire des calculs sur les versos. La passation a duré une heure et demi. Chaque séance donne lieu à une observation et toutes les feuilles sont récupérées. • Enseignant : L'enseignant reçoit le même questionnaire que l'élève ainsi qu'un ensemble de 4 feuilles de réponses avec des questions qui lui sont réservées. On attend des réponses écrites de sa part 56 Cette partie est commune pour le début dans l'analyse a posteriori l'ensemble de 4 questions du questionnaire. 57 Une feuille par question, sauf question 3, on distribue deux feuilles dont la deuxième est une feuille quadrillé millimétrique pour tracer le graphique. 111 Analyse de l'exercice 1 les fiches nous étant retournées quelque temps après (il n'y pas, pour lui, de durée fixe pour répondre au questionnaire). Réponses des enseignants Dans le tableau à double entrée suivant, on lit la répartition du nombre des enseignants qui participent au questionnaire. En ligne, c'est le nombre des enseignants qui acceptent de proposer ou non cet exercice à l'élève ; en colonne, c'est le nombre de ceux qui donnent ou ne donnent pas leurs choix des graphiques comme corrects et incorrects. Choix des graphiques Proposer l'exercice 1 à l'élève Oui Non Sans réponse Total Oui Non Total 22 12 17 18 3 38 39 30 3 72 34 Tableau 17. Répartition des enseignants Le tableau des choix observés dont les cases marquées d'un « X » sont pour les graphiques déclarés corrects et dont les cases vides sont pour les graphiques déclarés incorrects : G1 G2 G3 G4 G5 Nombre d'enseignants 3 X 1 X 23 X X 2 X X 1 X 3 X X 1 X X 2 Caractéristique du choix Aucun graphique n'est correct G4 est le seul correct G3 est le seul correct Couple (G3, G5) comme deux corrects Couple (G3, G4) comme deux corrects G1 est le seul correct Couple (G1, G5) comme deux corrects Couple (G1, G3) comme deux corrects Tableau 18. Combinaisons observées des graphiques choisis comme corrects de 34 enseignants Le tableau ci-après est celui de distribution des effectifs des graphiques choisis comme corrects58 : Graphique G1 G2 G3 G4 G5 Nombre de choix de l'enseignant 6 0 28 2 3 Tableau 19. Distribution des effectifs des graphiques corrects donnés par e nseignant Un autre tableau à double entrée59 (tableau), symétrique par la diagonale, est pour résumer les nombres de choix des graphiques avec la relation relative des couples de graphiques. Les 58 Comme l'enseignant peut choisir plusieurs graphiques comme corrects, la somme totale des graphiques choisis est supérieure nombre de réponses. 112 cases diagonales sont pour les graphiques choisis comme le seul correct ; la dernière ligne est celle du tableau 8 : G1 G1 3 G2 0 G3 2 G4 0 G5 1 Total 6 G2 0 0 0 0 0 0 G3 2 0 23 1 2 28 G4 0 0 1 1 0 2 G5 1 0 2 0 0 3 Tableau 20: Nombres de couples des graphiques choisis comme corrects Analyses 1) Couple ( G 2, G3) Parmi les 28 choix du G3, 23 enseignants ont choisi G3 comme le seul correct, par contre aucun enseignant ne choisit G2 comme correct. De façon quasi-unanime G3 est choisi et G2 est rejeté. La stratégie Sfonction est dominante et la notion d'aire ne prend aucune place dans les réponses des enseignants. On retrouve la stratégie rejeter le graphique G2. Ainsi : S fonction dans leurs explications pour Enseignant 5 : « Dans le graphique 2, les ordonnées sont fausses » Enseignant 42 : « Graphique 2 est incorrect car l'ordonnée de classe [1,60 ; 1,70[ est fausse » Ces enseignants ont lu les hauteurs des rectangles sur l'axe des ordonnées puis ils les comparent aux effectifs dans le tableau et trouvent que certaines sont fausses. Par contre, même s'il n'y a aucun choix sur le graphique G2 comme correct, nous trouvons l'usage de la stratégie Sclasse (stratégie de classes égales) à travers l'explication d'un enseignant pour refuser certains graphiques : Enseignant 1 : « Le fait de considérer que les deux classes [1,60 ; 1,65[ et [1,65 ; 1,70[ ont le même effectif qui est la moitié de l'effectif de classe [1,60 ; 1,70[ est faux. » C'est un « découpage-lecture » pour ramener le graphique au cas des classes égales mais cet enseignant n'accepte pas l'hypothèse de répartition uniforme dans la classe qui justifierait l'égalité des effectifs des deux sous-classes lors d'une division binaire de classe initiale. Puis, pour refuser le graphique G3, cet enseignant utilise la même stratégie S classe : Enseignant 1 : « Le fait de considérer que les deux classes [1,60 ; 1,65[ et [1,65 ; 1,70[ ont le même effectif que la classe [1,60 ; 1,70[ est faux ». Les enseignants donnent au maximum deux graphiques comme corrects, c'est pour quoi nous pouvons établir ce tableau de deux entrées pour voir des couples choisis. Analyse de l'exercice 1 Une interprétation possible est qu'il a fait la somme de deux effectifs de deux sous-classes en trouvant que le résultat est beaucoup plus que l'effectif de classe initiale. 2) Couple (G1, G3) Il n'est pratiquement pas présent ce qui peut s'interpréter par l'importance que donnent les enseignants à la proportionnalité de largeurs des classes à celles des intervalles. 3) La disjonction des rectangles est refusée par presque tous les enseignants. Enseignant 42 : « Graphique 5 est incorrect car c'est un graphique pour décrire des données continues regroupées en classes, donc il ne faut pas des espaces entre des intervalles». Enseignant 48 : « Les graphiques 4 et 5 sont incorrects car le manuel de classe 10 n'introduit pas ces formes » 4) Contrat didactique sur le regroupement en classes Les 16 réponses de refus de proposer cet exercice à l'élève illustrent la force du contrat didactique sur le regroupement des données en classes égales. Elles proposent de modifier les classes du tableau de données en classes égales ou bien de remplacer le tableau par un autre tableau : Enseignant 19+41 : « Modifier le tableau des données (des classes égales) comme celui donné dans le manuel » Enseignant 44 : « L'élève n'apprend que des tableaux avec des classes de même tailles, donc il faut modifier des classes » « il faut modifier des graphiques-solutions car il n'y a pas de graphique juste » « Remplacer le tableau de distribution des effectifs regroupées en clases étant des intervalles égales ». Pour répondre à la question « La réponse que vous attendez d'un élève de classe 10 », certains enseignants attendent que l'élève sache montrer que le tableau des données est erroné à cause des classes inégales : Enseignant 45 : « L'élève doit montrer que le tableau des effectifs regroupés en classe n'est pas juste car les classes n'ont pas de même largeurs (dans les cours, on n'enseigne que la division en classes égales) » Enseignant 49 : « L'élève répond que les graphiques donnés sont tous faux car le sujet a donné des classes de largeurs inégales ». 5) Trois enseignants qui ne trouvent aucun graphique correct ont refusé G3 en avançant comme raison le fait qu'il n'y a pas d'espace entre l'origine O et les intervalles sur l'axe des abscisses. Il est vrai que les manuels laissent toujours un tel espace lequel est quelquefois hachuré pour coder la réduction de la distance. Ces enseignants refusent l'identification par translation entre 0 et 1,60 sur l'axe des réels. Cette pratique courante dans les diagrammes statistiques ne l'est pas dans les graphiques fonctionnels. Réponses des élèves Nous avons reçu 206 réponses d'élèves pour l'exercice 1 alors que 207 élèves ont participé au questionnaire car il y a un élève qui ne résout pas cet exercice (mais il résout les trois autres du questionnaire). 114 Le tableau suivant présente une distribution des 5 graphiques déclarés corrects par les élèves : Graphique G1 G2 G3 G4 G5 Nombre de choix de l'élève 30 3 119 45 105 Tableau 21. Distribution des effectifs des graphiques corrects donnés par élève Tableau 11 nous organisons les choix des élèves : G1 G2 G3 G4 G5 Nombre d'élèves 17 x 26 x x 20 x 68 x x 29 x x 4 x x x 9 x x x 3 x 3 x x 10 x x 2 x x x 6 x x 7 x x x 1 x x x x 1 Les choix Aucun graphique n'est correct G5 est le seul correct Couple (G4, G5) le seul correct G3 est le seul correct Couple (G3, G5) le seul correct Couple (G3, G4) le seul correct G1 est le seul correct Couple (G1, G5) le seul correct Couple (G1, G4) le seul correct Couple (G1, G3) le seul correct Tableau 22. Combinaisons observées des graphiques choisis comme corrects de 206 élèves Analyses 1) Couple (G2 ; G3) G3 est encore le graphique le plus choisi mais dans une proportion moindre que chez les enseignants. Le couple (G2 ; G3) n'apparaît pas : les deux stratégies Sfonction et Sclasse sont prises séparément. Elève L13 : « Graphique 2 est incorrect car la classe [1,60 ; 1,70[ contient 16 joueurs mais ce graphique ne représente qu'une valeur moins de 10 » Par contre apparaît fortement le couple (G3 ; G5). Nous reviendrons plus loin sur l'analyse de ce fait. 2) Couple ( G 1, G3) Ce couple est choisi par 7 élèves et rejeté par 3 élèves. 2a) Couple (G1, G3) seul accepté Les élèves suivent la stratégie fonctionnelle sans tenir compte de la largeur des intervalles sur l'axe des abscisses et en rejetant la disjonction des rectangles. 2b) Couple (G1, G3) seul rejeté Elève V73 : « Les correctes sont 2, 4, 5. Le graphique G1 est incorrect car les largeurs des classes sur l'axe des abscisses doivent inégales. Le graphique 3 est incorrect car chaque carré dans le graphique représente une unité de valeur. La colonne [1,60 ; 1,70[ représente la valeur de 16 doit être représentée par 16 carrés ». C'est le seul élève qui déclare lire « aire-effectif» dans l'histogramme Il utilise la stratégie aire pour rejeter G3. Elève V72 : « Les graphiques corrects sont les graphiques 2, 4, 5 ». Dans le graphique 1, les colonnes sont faussement tracées ; les largeurs des classes ne sont pas égales donc les largeurs des colonnes doivent être différentes. Même raison que l'élève V73 Dans le graphique 3, si on prend l'exemple de demi-intervalle [1,60 ; 1,70[ il correspond à l'effectif 16 mais le graphique se présente en deux colonnes égales, alors l'effectif doit être égale à 32 ⇒ c'est faux ». Quelle stratégie suit-il? Il a procédé à une lecture « hauteur-effectif » après un découpage de classe. C'est-à-dire il coupe le rectangle qui représente l'effectif de classe [1,60 ; 1,70[ en deux demi-rectangles égaux puis il lit la hauteur de chaque demi-rectangle comme l'effectif de chaque demi-classe. C'est la stratégie Sclasse qu'il a suivie comme l'enseignant 1, mais cet élève accepte l'hypothèse de l'égalité des effectifs de deux sous-classes lors d'une bidivision de la classe initiale. 3) Les graphiques G4 et G5 A la différence des enseignants, ces graphiques sont beaucoup choisis par les élèves qui les ont rencontrés en classe 7. D'ailleurs G5 présent en classe 10 en tant qu'ensemble de rectangles disjoints est préféré à G4 qui n'apparaît jamais seul dans les réponses. La disjonction des rectangles est donc acceptée par la moitié des élèves alors qu'aucun enseignant ne l'acceptait. Pour ceux qui ne prennent que le couple (G4 ; G5), il y en a 20, c'est peut-être la façon d'accepter des classes inégales comme si ces classes étaient des valeurs isolées d'une variable qualitative. Elève V58 : « Les trois graphiques 1, 2, 3 sont incorrects car les données sont regroupés en classes dans le tableau tandis que sur les graphiques, on ne prend qu'une seule valeur pour représenter toute la classe » Cette réponse peut être interprétée comme suit : 116 - dans le graphique 1, en regardant le rectangle qui représente l'effectif de classe [1,80 ; 1,85[, cet élève ne lit qu'un côté à gauche60 du rectangle comme un segment qui joint le point (1,80 ; 0) et le point (1,85 ; 7) et il considère qu'il y a 7 joueurs de même taille 1,80m. C'est pour quoi cet élève a dit qu'une seule valeur (1,80m) appartenant à l'intervalle (exemple [1,60 ; 1,70[ ) est prise pour représenter toute la classe (dans l'exemple : [1,60 ; 1,70[ ). Elève L35 : « Il y a 16 joueurs de tailles appartenant à [1,60 ; 1,70[ mais c'est pas surement qu'il y ait un même nombre de 8 joueurs dont leurs tailles appartiennent à [1,60 ; 1,65[ et à [1,65 ; 1,70[» C'est un « coupement-lecture » en n'acceptant pas l'hypothèse sur la division d'une classe en deux sous-classes des effectifs égaux car cela fait perdre l'information. Le fait que (G3 ; G5) soit largement préféré au (G1 ; G5) qui était plus attendu peut s'interpréter ainsi : - on rejette les rectangles adjacents à largeurs égales (puisque les classes sont inégales) - on accepte les rectangles disjoints comme si la variable était qualitative (non plus la taille mais la classe de taille) 60 Cette classe est un intervalle fermé à gauche et ouvert à droite. Analyse de l'exercice 1 4) Contrat didactique sur le regroupement en classes Elève V54, V68 : « Graphique 2 et 3 sont incorrects car les largeurs des classes ne sont pas égales » Ici, il y a sous-entendue l'idée sous-entendue de ne pas accepter un regroupement en classes inégales. Puisque l'élève n'a jamais rencontré de données regroupées en classes inégales, il ne sait donc pas dire que les classes doivent être égales comme l'enseignant (sachant que les savoir complémentaire sur la méthode pour tracer le diagramme en colonnes au cas des données regroupées en classes inégales ne se trouve que dans Livre d'enseignants). C'est pourquoi il trouve « quelque chose étrange » ici en voyant que les largeurs des rectangles sont inégales et la prend comme raison pour rejeter ces graphiques. 5) Notons que 'absence du point d'origine O sur l'axe des abscisses est invoquée plusieurs fois pour rejeter G1, G2 et G3. I.5. Conclusion L'obligation faite aux enseignants et aux élèves dans le questionnaire de choisir des graphiques associés à une distribution en classes inégales, construite comme une rupture du contrat didactique relatif au regroupement en classes, a permis non seulement de valider les hypothèses 1 et 2 mais a mis en lumière deux autres phénomènes didactiques relatifs à l'enseignement de la statistique au Vietnam : - Le recours à l'analogie fonctionnelle pour construire et lire des diagrammes en segments n'est pas remise en cause avec les diagrammes en colonnes ; - Le découpage des savoirs relatifs à la nature des variables statistiques (qualitatives ou quantitatives discrètes en classe 7 et quantitatives continues en classe 10) ne s'accompagne pas d'une rupture sur la nature de la représentation graphique : beaucoup d'élèves choisissent des diagrammes en segments ou en rectangles disjoints car ils reconnaissent à ces diagrammes la capacité de représenter correctement une distribution de variable continue. Le rejet des segments ou des rectangles disjoints chez les enseignants ne relève-t-il pas d'une soumission très forte au manuel reconnu comme le représentant de l'institution d'enseignement? Les enseignants seraient garants des rapports institutionnels. Cette interprétation est confirmée par le grand nombre de refus de réponses de la part des enseignants. L'absence de l'aire dans les rapports institutionnels relatifs à l'histogramme est corrélative à celle de la notion de densité d'effectifs dans le programme et les manuels. Quel est l'effet de cette double absence sur la vie institutionnelle de la courbe polygonale qui est introduite à la suite de l'histogramme? Quelle signification cette courbe porte-elle? Analyse de l'exercice 2 II. Exercice 2 II.1. Quelques éléments d'analyse institutionnelle vietnamienne à propos de l'objet courbe polygonale Après l'introduction du diagramme en colonnes (histogramme), les deux manuels de classe 10, le manuel élémentaire et le manuel avancé, introduisent la courbe polygonale comme une autre façon de décrire une distribution des effectifs/fréquences regroupées en classes (égales). Le manuel élémentaire A partir du tableau de distribution des fréquences de la taille de 36 élèves, (Manuel de classe 10, l'ensemble élémentaire, p. 116) ce manuel propose une définition de la courbe et une technique pour la tracer : Courbe polygonale des fréquences : Le tableau de distribution des fréquences regroupées en classes (tableau 4) précédent peut être décrit par une courbe polygonale dont la méthode de tracer est comme suit : Dans le plan rapporté à un repère cartésien, préciser les points (ci ; f i), i = 1, 2, 3, 4 où ci est la moyenne numérique de deux extrémités de classe i ( ci est appelé la valeur représentante61 de la classe i). Tracer les segments joignant le point (ci ; f i) et le point (c i + 1; f i + 1), i = 1, 2, 3, on obtient une courbe polygonale appelée courbe polygonale des fréquences (Figure 35) 61 Ces mots sont soulignés par le manuel. Analyse de l'exercice 2 (Figure 35. Courbe polygonale des fréquences de la taille (cm) de 36 élèves) (Manuel de classe 10, l'ensemble élémentaire, p. 116) La légende de l'axe des abscisses est « taille » et celle de l'axe des ordonnées est « fréquence ». Les traits pointillés aident à lire les coordonnées des points (ci ; f i), i = 1, 2, 3, 4, qui sont en nombre égal aux classes du tableau. Les traits pleins joignant ces points forment la courbe polygonale. Analyses - Cette présentation prépare un milieu fonctionnel pour l'objet courbe polygonale. La technique pour tracer la courbe ressemble totalement à celle de la représentation graphique d'une fonction numérique. Cette technique s'appuie seulement sur le tableau de données regroupé en classes (égales) sans avoir besoin de passer par l'histogramme. Comment l'institution vietnamienne relie-t-elle l'histogramme et la courbe polygonale? - Dans certains manuels universitaires cette courbe est présentée à partir de l'histogramme mais l'axe des ordonnées porte les densités d'effectifs ou de fréquences. Voici par exemple la présentation de la courbe polygonale intitulée « polygone des effectifs » : Pour donner de la distribution une image « plus continue », certains auteurs préconisent de tracer une ligne brisée reliant les points d'abscisse x c j (centre de classe) et d'ordonnée n j / h j qui, sur l'histogramme des effectifs présentés dans la figure 2.18, sont situés au milieu des côtés supérieurs des rectangles. Deux points complètent le schéma aux extrémités de façon à ce que le graphique possède la même propriété que l'histogramme des effectifs : la surface délimitée par cette courbe et l'axe des abscisses doit valoir n. Cette représentation porte le nom de polygone des effectifs. 120 Chapitre C2 : mises à l'épreuve d'hypothèses sur des contrats didactiques Analyse de l'exercice 2 (DROESBEKE Jean-Jacques, 2001, Éléments de statistique, Editions de l'Université de Bruxelles, p. 46) Ce manuel présente ensuite le polygone des fréquences dont il dit qu'il est parfois appelé « graphe de densité locale » lorsque les amplitudes des classes sont relativement petites. En calculant la surface sous la courbe du manuel vietnamien, on trouvera que son aire, calculée avec une unité égale à celle d'un rectangle de hauteur 1% et de largeur égale à 6 (la largeur commune aux classes), est inférieure à la somme totale des fréquences exprimées en %, c'est-à-dire inférieure à 100 contrairement à la propriété mise en avant par les manuels universitaires quand ils font le parallèle entre une telle courbe et la courbe de densité d'une distribution théorique. En effet : Aire sous courbe polygonale = (16,7% + 33,3% ) + (33,3% + 36,1% ) + (36,1% + 13,9% ) + 84,7% <100% 2 2 2 Regardons maintenant le livre d'enseignant de l'ensemble élémentaire qui donne la solution pour l'Activité 1 proposée dans le manuel. Analyse de l'exercice 2 (Diagramme en colonnes cour gonal fré C On voit qu'il y a effectivement un passage du diagramme en colonnes des fréquences regroupées en classe à la courbe polygonale des fréquences. En traçant les deux diagrammes sur le même repère, ce livre fait un lien entre ces deux diagrammes : le diagramme en colonnes est un intermédiaire graphique entre le tableau de distribution des fréquences regroupées en classes et la courbe polygonale des fréquences. Mais la conservation de l'aire des rectangles du diagramme n'est pas prise en compte pour la construction de la courbe. Et aucune remarque n'invite à s'intéresser à la forme de cette courbe. Un type de tâche concernant la courbe polygonale se trouve dans le livre d'exercices corrigés : il s'agit de comparer deux distributions d'effectifs par leur courbe polygonale. Voici l'un des exercices corrigés : Exercice 19 Soit le tableau de distribution des effectifs regroupés en classes : Le poids des élèves de classe 10A et 10B du lycée L. 122 Chapitre C2 : mises à l'épreuve d'hypothèses sur des contrats didactiques Analyse de l'exercice 2 Classe de poids [30 ; 36) [36 ; 42) [42 ; 48) [48 ; 54) [54 ; 60) [60 ; 66) Total Effectif 10A 1 2 5 15 9 6 38 10B 2 7 12 13 7 5 46 Etablir le tableau de distribution des fréquences regroupées en classes avec les classes données dans le tableau. Tracer dans le même plan de repère les courbes polygonales des fréquences regroupées en classes du poids des élèves de deux classes 10A et 10B. Puis comparer les poids des élèves de classe 10A et ceux des élèves de classe 10B. Quel est le pourcentage des élèves de classe 10A pesant au moins de 42kg? Même question pour les élèves de classe 10B. Calculer la moyenne, l'écart type des données de classe 10A et 10B. Dans quelle classe les élèves sont-ils les plus lourds? (Livre d'exercices corrigés de l'ensemble élémentaire, p. 162) La solution de la question 19b : (Figure 59. Les courbes polygonales des fréquences regroupées en classes du poids des élèves des classes 10A et 10B) (Livre d'exercices corrigés de l'ensemble élémentaire, p. 173) 123 Analyse de l'exercice 2 Deux courbes polygonales sont tracées sur le même repère cartésien. Chacune joint six points correspondant à six classes proposées dans l'énoncé. Les deux courbes se coupent en un seul point, donc une partie de la courbe 10A est au-dessus de la courbe 10B et une autre partie de la courbe 10A est au-dessous celle de 10B. Ce graphique permet : - de comparer visuellement les formes : - d'étudier la position relative des deux courbes, - de comparer les aires sous les deux courbes. Quelle est la solution attendue par le manuel? Et quelle technique utilise-t-il? Voici le corrigé du livre : En observant deux courbes polygonales, on voit que : parmi les élèves pesant au plus 45kg, les élèves de classe 10B occupent un pourcentage plus grand que ceux de classe 10A. Et parmi les élèves pesant au moins 51kg, les élèves de classe 10B occupent un pourcentage plus grand que ceux de classe 10A. (Livre d'exercices corrigés, l'ensemble élémentaire, p. Le manuel avancé Dans ce manuel, la courbe polygonale des effectifs est introduite pour décrire le tableau de distribution des effectifs de la manière suivante : Exemple 4 : Considérer le tableau de l'exemple 2 (tableau 4), la courbe polygonale pour décrire le tableau 4 est tracé de manière suivante : Tracer deux droites perpendiculaires. Sur la droite horizontale (utilisé comme l'axe numérique), marquer les points A 1, A 2, A 3, A 4, A 5 où A i est le point milieu du 124 Chapitre C2 : mises à l'épreuve d'hypothèses sur des contrats didactiques Analyse de l'exercice 2 segment (ou du demi-intervalle) qui détermine la ième classe (i=1, 2,, 5). A chaque point A i, tracer le segment A i M i qui est perpendiculaire à la droite horizontale et sa longueur égale l'effectif de la ième classe : en concrète, A 1 M 1 = 6,, A 5 M 5 = 3. Tracer les segments M 1 M 2, M 2 M 3, M 3 M 4, M 4 M 5, on obtient une polygonale. C'est la courbe polygonale des effectifs qui décrit le tableau 4. courbe (Manuel de classe 10, l' ensemble avanc é, p . 166) Rappelons-nous que les classes données dans le tableau 4 sont disjointes et que le diagramme correspondant présenté dans le manuel est un diagramme en colonnes disjointes : (Manuel de classe 10, l'ensemble avancé, p. 165) Comme dans le manuel élémentaire, la courbe polygonale est tracée à partir d'un tableau de distribution en classes égales. A la différence du manuel élémentaire, il s'agit d'une courbe d'effectifs. Il n'associe pas la courbe au diagramme en colonnes. Une telle association se traduirait par cette figure : 125 Analyse de l'exercice 2 où l'aire sous la courbe polygonale ne prendrait aucun sens. Mais, alors que cela se fait dans l'ensemble « élémentaire », nous ne retrouvons aucune association entre un diagramme et une courbe polygonale dans l'ensemble « avancé » même lorsqu'il est demandé de tracer la courbe polygonale à partir d'un tableau de distribution en classes adjacentes.
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French-Science-Pile
Open Science
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Image Processing Methods Applied to the Magneto-Electro-Encephalography Inverse Problem. domain_other. Ecole des Ponts ParisTech, 2005. English. &#x27E8;NNT : &#x27E9;. &#x27E8;pastel-00001593&#x27E9;
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Inversement, il existe une technique qui permet d’éviter l’assemblage complet de la matrice mais qui permet de calculer le produit d’un vecteur par cette matrice avec une complexité de n log n. Il s’agit de la méthode multipôle rapide (FMM) qui a déjà été appliquée avec succès au problème direct de la MEEG[69]. La parallélisation de cette technique est également possible. Cette méthode permet d’atteindre des tailles de maillage inaccessibles à l’alternative précédente. Dans le cadre du problème inverse (EEG par exemple), notamment pour des sources distribuées, les algorithmes ont souvent recours à la matrice de gain Heeg dont la taille est beaucoup plus modeste et indépendante des maillages des interfaces. La quantité d’intérêt devient alors le nombre d’opérations nécessaires à une multiplication de Heeg par un vecteur. Dans le cas de l’assemblage et de l’inversion directe, il y a un coût fixe de l’ordre de n3A opérations et un coût par produit de nS × neeg opérations. Pour la FMM, il n’y a aucun coût fixe et le coût par produit est de nA ×nS +niter K n log n+ neeg ×nA , niter étant le nombre d’itérations nécessaires à la résolution itérative du système 2.25. Or, [69] montre que K est grand et la table 2.2 montre que niter est également important. S’ajoute à cela que le rendement des processeurs est bien meilleur pour des calculs matriciels comme la décomposition nécessaire à l’inversion de la matrice A. L’approche FMM dans le problème direct ne peut donc être rentable, pour le problème inverse, que pour des tailles de maillages extrêmement élevées. Se pose alors la question de la génération de tels maillages, de leur impact sur la précision du problème direct et finalement de leur influence sur la précision des localisations effectuées en problème inverse. 65 2. Une formulation symétrique pour la BEM Nous ne remettons pas en question la méthode FMM qui est une avancée indéniable, nous émettons juste une mise en garde contre une éventuelle utilisation abusive. 66 Chapitre 3 Application à l’estimation de conductivité Dans ce chapitre, nous présentons une application de la formulation symétrique de la BEM que nous avons menée sur le problème de la tomographie par impédance électrique. Ces travaux ont été publiés à la conférence NFSI 2005 [23] et dans [24]. 3.1 Introduction De nombreuses études ont démontré la grande sensibilité du problème inverse MEEG à la valeur des conductivités électriques [84, 5, 35, 58, 72, 108], la valeur de la conductivité de la couche osseuse se montrant particulièrement critique dans le cas de l’EEG. Par ailleurs, les premières études portant sur la conductivité des tissus furent menées in vitro [42] sur des prélèvements effectués sur des animaux. Ce type d’étude présente deux inconvénients majeurs. Premièrement, la conductivité des tissus morts diffère de celle des tissus vivants1 . Deuxièmement, il existe probablement des différences notables entre les comportements des tissus chez l’homme et chez l’animal puisque des études postérieures ont démontré une grande variabilité inter-sujet, ne serait-ce que chez l’homme. L’anisotropie de certains tissus tels que les fibres nerveuses peut, de plus, être vue comme une forme de variabilité intra-sujet.Si l’on ajoute à cela, le fait que la conductivité électrique des cellules nerveuses change durant leur activité, on obtient une explication partielle à la grande variabilité des conductivités mesurées ou estimées pour les tissus rencontrés dans la tête[36]. Parallèlement à cela, l’évolution conjointe des moyens matériels consacrés aux études MEEG (tant du point de vue de leurs performances que de leur implantation) et des algorithmes de problème direct et inverse en MEEG rend possible l’utilisation de modèles de tête réalistes spécifiques à chaque sujet. Ces modèles réalistes, obtenus à partir de la segmentation d’une IRM anatomique du sujet, sont pour la plupart constitués de différents volumes de conductivité isotrope constante. Ces modèles dits réalistes ne constituent donc qu’une approximation simplificatrice et les valeurs de conductivité que l’on souhaite attribuer à chaque compartiment ne sont pas forcément les plus proches possibles des valeurs réelles mais plutôt celles fournissant la meilleure adéquation entre les simulations menées sur ce modèle simplifié et la réalité. On parle alors de conductivité effective ou de conductivité équivalente. 1 à cause de processus de dégradation chimique 3. Application à l’estimation de conductivité Nombre d’études ont été menées in vivo pour essayer d’estimer les conductivités des milieux présents dans la tête[92, 112, 59, 37]. Parmi les techniques non invasives, si l’on écarte les techniques prometteuses basées sur l’IRM de diffusion[113] malheureusement aveugles au crâne, deux se démarquent. La technique dite des Somatosensory Evoked Fields(SEF) [47, 13] provoque l’activation d’une source très focale dans le cerveau grâce à la stimulation électrique d’un nerf. La localisation et l’amplitude de cette source sont évaluées grâce au problème inverse en MEG(peu sensible aux conductivités). Connaissant ensuite la source et le modèle de tête, on ajuste par un algorithme de gradient les valeurs des conductivités recherchées afin de minimiser l’écart entre le problème direct EEG (plus sensible aux conductivités) et les mesures EEG effectuées durant la même expérience. La technique dite d’Electric Impedance Tomography(EIT) repose sur la même idée sauf que la source de courant est extérieure. Il n’est donc pas nécessaire d’avoir recours à la première phase avec la MEG puisque l’on peut contrôler le lieu et l’intensité de l’injection de courant. L’EIT peut en outre être pratiquée de deux manières différentes. Soit on induit un courant à l’intérieur de la tête grâce à un champ magnétique variable, on parle alors d’induced EIT [43]. Soit on injecte un courant à la surface du scalp, on parle alors de injected current EIT [92]. La dernière technique peut être mise en oeuvre dans un contexte clinique assez facilement dans la mesure où elle ne nécessite ni MEG ni équipement particulier pour l’induction de courant, ce qui n’est pas le cas des deux précédentes techniques. C’est dans ce cadre que nous avons suivi les grandes lignes de [48] pour le développement d’une formulation symétrique de la BEM pour l’EIT. 3.2 Tomographie par impédance électrique avec la méthode symétrique Nous utilisons la formulation symétrique de la BEM que nous avons exposée dans le chapitre 2 pour développer des algorithmes d’EIT. Dans cette formulation, les inconnues sont le potentiel électrique en chaque sommet et sa dérivée normale sur chaque triangle. Comme nous le montrons dans cette section, il est facile, à partir de la seconde grandeur, de modéliser les courants d’injection de l’EIT. Une approche symétrique par BEM de l’EIT présente également l’avantage de ne nécessiter aucun assemblage de matrice supplémentaire, la matrice du problème direct étant suffisante. Nous développons deux algorithmes basés sur une descente de gradient minimisant une erreur de simulation. L’un est destiné aux expériences où la quantité de courant injectée est connue, l’autre aux expériences où elle est inconnue. Dans toute cette section, on conserve les mêmes notations que dans le chapitre 2. Là encore, la totalité de ce qui suit se généralise de manière immédiate à des topologies plus complexes que celle de notre modèle de tête à couches imbriquées. 3.2.1 Adaptation de la BEM symétrique au problème direct de l’EIT Nous nous intéressons, dans ce qui suit, au problème direct de l’EIT. Étant données une géométrie (donnée par les surfaces Sj ), des conductivités associées aux différents milieux délimités par ces surfaces, la valeur et l’emplacement des courants d’injection, on 68 3. Application à l’estimation de conductivité souhaite simuler la valeur du potentiel électrique sur toutes les électrodes. Pour reformuler la BEM symétrique dans le cas de l’EIT, il faut supprimer les termes source et modifier les conditions aux interfaces pour tenir compte de l’injection (et l’extraction) de courant. Pour ce faire, on repart du théorème de représentation 1 du chapitre 2. Pour les interfaces S1 , S2 , ..., SN −1 , il n’y a ni terme source, ni injection de courant et les équations (2.17) et (2.18) donnent respectivement σi Ni,i−1 VSi−1 − (σi + σi+1 )Nii VSi + σi+1 Ni,i+1 VSi+1 − D∗i,i−1 pSi−1 + 2D∗ii pSi − D∗i,i+1 pSi+1 = 0 pour i = 1, . . . , N − 1 (3.1) et Di,i−1 VSi−1 − 2Dii VSi + Di,i+1 VSi+1 −1 −1 − σi−1 Si,i−1 pSi−1 + (σi−1 + σi+1 )Sii pSi − σi+1 Si,i+1 pSi+1 = 0 pour i = 1, . . . , N − 1. (3.2) Une attention particulière doit être accordée au dernier milieu ΩN . La conductivité de l’air étant nulle, la seconde équation n’a plus de sens et ne doit plus être considérée. On utilise le théorème 1 pour exprimer la limite interne de la dérivée normale du potentiel dans ΩN . La limite externe étant nulle, on a − pSN = − pSN + σN NN,N −1 VSN −1 − D∗N,N −1 pSN −1 − σN NN N VSi + D∗N,N pSN. 2 (3.3) En substituant la valeur du courant d’injection j à pSN et en isolant les termes faisant apparaître cette grandeur dans le membre de droite, les équations (3.2), (3.1) et (3.3) forment un système d’équations intégrales similaire à celui de l’approche symétrique du problème direct en EEG, exceptionPfaite du membre de droite. On décompose j sur une base de fonctions P0 sur SN : j = k jk ψk et la forme discrétisée du système s’écrit Aσ (V p)T = f σ (j) (3.4) où Aσ est la matrice symétrique du problème direct de l’EEG (la matrice A de (2.25)), (V p)T est le vecteur d’inconnues du même problème direct (système 2.25) et f σ (j) le terme source donné par µ ¶T j −1 ∗ ∗ f σ (j) = 0 ... 0 − DN −1 N j − σN SN −1 N j − DN N j + = Fσ j 2 où Fσ est la matrice correspondante. La manière de discrétiser le courant d’injection j utilisée ici paraît beaucoup plus naturelle que les monopôles dans le scalp utilisés dans [92]. 3.2.2 Validation Nous établissons d’abord une relation classique connue sous le nom de principe de réciprocité : Théorème 2 (Principe de Réciprocité) Soit Ω un ouvert de frontière ∂Ω. Soit VEEG le potentiel électrique généré par le courant source Jp dans le problème direct de l’EEG. 69 3. Application à l’estimation de conductivité Soit VEIT le potentiel électrique généré par le courant d’injection j dans le problème direct de l’EIT. On a la relation suivante : Z Z Jp · ∇VEIT = j VEEG (3.5) Ω ∂Ω R R Ce théorème est une conséquence de l’identité de Green Ω ∇·a = ∂Ω a·n. On applique cette identité une première fois au champ de vecteurs a = σVEIT ∇VEEG , Z Z Z (∇ · σ∇VEEG ) VEIT + σ∇VEEG · ∇VEIT = σVEIT ∂n VEEG Ω Ω ∂Ω puis une seconde fois au champ de vecteurs a = σVEEG ∇VEIT : Z Z Z (∇ · σ∇VEIT ) VEEG + σ∇VEIT · ∇VEEG = σVEEG ∂n VEIT. Ω Ω ∂Ω On applique la formule (1.5) pour VEIT et VEEG à la différence des deux précédentes relations et on obtient le résultat désiré. Ce théorème montre que le champ électrique de l’EIT ∇VEIT peut être vu comme un lead field pour le problème direct de l’EEG. En utilisant pour l’EIT un courant d’injection de la forme j = δr1 − δr2 dans la relation (3.5), on obtient l’identité Z Jp (r) · ∇VEIT = VEEG (r1 ) − VEEG (r2 ). (3.6) Ω Dans le cas d’une source d’EEG dipolaire Jp (r) = q δr0 , la relation (3.6) permet de valider le problème direct de l’EIT, soit avec des formules analytiques dans le cas d’une géométrie sphérique, soit avec un problème direct EEG pour des géométries réalistes. 3.2.3 Problème inverse en EIT On effectue une série d’expériences EIT sur un même sujet : pour chaque expérience m, on dispose des numéros des électrodes d’injection et d’extraction im et em et du potentiel électrique sur chacune des autres électrodes. On note rk la position de l’electrode numéro k. A la différence du "Complete Electrode Model" utilisé dans [60], aucune mesure n’est effectuée au niveau des électrodes d’injection et d’extraction. Dans cette section, nous exposons deux algorithmes d’estimation des conductivités adaptés à deux types de conditions expérimentales distinctes. Cas d’un courant d’injection connu On note λm l’intensité du courant d’injection de telle sorte que £ ¤ jm (r) = λm um (r) = λm δrim (r) − δrem (r). Etant donnée une distribution de conductivité σ, on note V (σ, jm ) la solution du problème direct d’EIT correspondant. On cherche à retrouver la distribution de conductivités σ minimisant l’erreur de simulation E(σ) = M X kV (σ, jm ) − vm k2meas(m). m=1 70 (3.7) 3. Application à l’estimation de conductivité où vm désigne le vecteur contenant les mesures effectuées à l’expérience m. On note k k2meas(m) la norme L2 discrète prise sur les électrodes de mesures2 de la mesure m. X kV − vm k2meas(m) = |V (rk ) − vm (rk )|2 k∈{i / m ,em } Cette erreur de simulation est minimisée par un algorithme de descente de gradient. Algorithme 1 Descente de gradient itérative pour σ, dans le cas d’un courant d’injection connu Initialise σ répéter pour chaque expérience m = 1, . . . , M faire calculer V (σ, jm ) solution de (3.4) pour n = 1, . . . , N faire calculer ∂σn V solution de (3.9) fin pour fin pour calculer ∇σ E à l’aide de (3.8) effectuer une recherche linéaire pour trouver α minimisant E(σ − α∇σ E) σ ← σ − α∇σ E jusqu’à k∇E(σ)k < seuil Le calcul du gradient de l’erreur de simulation (3.7) est immédiat et donne M X ­ ® ∇σ E(σ) = 2 V (σ, jm ) − vm , ∇σ V (σ, jm ) meas(m) (3.8) m=1 ­ ® où ·, · meas(m) est le produit scalaire associé à la norme k. · kmeas(m) X ­ ® V1 (rk ) V2 (rk ) V1 , V2 meas(m) = k∈{i / m ,em } Dans notre modèle à conductivité constante par domaine σ = (σ1 , . . . , σN ) et le terme ∇σ V est le vecteur des N dérivées partielles (∂σ1 V, . . . , ∂σN V ) , chacune étant la solution d’un système linéaire : Aσ (∂σi V ∂σi p)T = −(∂σi Aσ ) (V p) + ∂σi f σ (jm ) (3.9) Le calcul de ∂σi Aσ est très simple. Il suffit de remplacer dans Aσ les blocs où n’apparaît pas σi par des blocs nuls et de remplacer σi par 1 et les σi−1 par −σi−2. Cas d’un courant d’injection inconnu Pour des raisons pratiques et techniques, mesurer précisément le courant d’injection n’est pas toujours aisé ou possible. C’est la raison pour laquelle nous introduisons un second algorithme pour lequel l’intensité du courant d’injection est supposé inconnu. On adapte l’erreur à minimiser en conséquence et cette dernière devient E(σ) = min {λm } 2 M X kV (σ, λm um ) − vm k2meas(m). m=1 c’est-à-dire en excluant les électrodes d’injection et d’extraction 71 3. Application à l’estimation de conductivité La linéarité de V par rapport à l’intensité des sources rend possible et aisé le calcul des λm optimaux : ­ ® V (σ, um ), vm meas(m) ® λ̂m = ­. (3.10) V (σ, um ), V (σ, um ) meas(m) L’erreur se réécrit E(σ) = M X kλ̂m V (σ, um ) − vm k2meas(m). m=1 En réinjectant ces modifications dans (3.8), on a ∇σ E(σ) = 2 M X ­ ³ λ̂m V (σ, um ) − vm , ∇σ ´® λ̂m V (σ, um ) meas(m). (3.11) m=1 L’utilisation de l’algorithme 1 reste valide si l’on remplace λm par λ̂m dans E(σ) et ∇E(σ) en utilisant (3.10). Il est alors nécessaire de fixer l’une des conductivités de manière arbitraire, nous choisissons celle du scalp σN. Cette nécessité provient de deux relations de linéarité intervenant dans l’équation (1.5). • La solution du problème direct de l’EIT est inversement proportionnelle au vecteur des conductivités σ. Plus précisément, si l’on multiplie toutes les conductivités par un scalaire, la solution du système (3.4) est modifiée de telle sorte que le potentiel solution est multiplié par l’inverse de ce scalaire alors que sa dérivée normale n’est pas affectée. • Le principe de superposition des solutions se traduit dans l’équation (1.5) par une linéarité de la solution par rapport à l’intensité de la source Jp. Cela se traduit par les relations V (σ, α um ) = α V (σ, um ) et V (α σ, um ) = 1 V (σ, um ) ∀α ∈ R∗. α Il existe donc une relation d’indétermination entre σ et λm du type V (σ, λm um ) = V (α σ, α λm um ) pour tout α 6= 0. Fixer l’une des composantes du vecteur σ revient à lever cette indétermination. 3.2.4 Expérimentations numériques Dispositif expérimental Les mesures de potentiel ont été réalisées à l’aide d’un casque EEG à 32 voies et 20 couples d’électrodes d’injection/extraction ont été choisis. Le courant d’injection a été appliqué successivement à ces couples d’électrodes. Pour ce courant, nous avons choisi d’utiliser un signal en créneau d’une fréquence de 110 Hz et d’une intensité de 0.1 mA. La fréquence d’échantillonnage du dispositif EEG était de 10 kHz et les potentiels ont été moyennés sur plus de 1000 répétitions sans artefact. Pour chaque paire d’électrodes d’injection, on a défini le potentiel d’EIT mesuré vm comme la valeur maximale du potentiel moyenné, ce maximum se produisant au même instant sur toutes les électrodes de mesure. Le courant d’injection n’ayant pu être mesuré précisément, nous avons utilisé la technique d’estimation des conductivités exposée dans 3.2.3. Il n’a donc pas été possible pour cette partie expérimentale d’estimer la valeur intrinsèque des conductivités de tous les milieux mais seulement leur rapport avec la conductivité du scalp. 72 3. Application à l’estimation de conductivité Modèle de tête et assemblage des matrices Les maillages des interfaces on été obtenus grâce à la segmentation d’une IRM anatomique du patient traitée avec le logiciel ASA3 . Les maillages obtenus étaient d’une qualité suffisante pour les calculs de BEM et n’ont nécessité aucun post-traitement. Les maillages des interfaces cerveau-crâne, crâne-scalp et scalp-air présentaient respectivement 510, 510 et 1222 sommets. Pour des conductivités données, la matrice du système EIT et la matrice du terme source ont été assemblées en respectivement 8 et 5 minutes4 . La mise à jour de ces matrices pour d’autres valeurs de conductivité est immédiate puisqu’il s’agit de simples multiplications de blocs par des scalaires. Estimation des conductivités Les deux variantes de l’algorithme proposé ont été implémentées en MATLAB. Tab. 3.1 – Données synthétiques, pour σcerveau = 1.2, σcrane = 0.0308, σscalp = 1. conductivités fixées σscalp = 1 σscalp = 1 σcerveau = 1.2 σscalp = 1 σcerveau = 1.8 initialisation conductivités estimées σcrane = 0.1 σcrane = 0.0317 σcerveau = 1.12 σcerveau = 1.12 temps de calcul 648 s σcrane = 0.1 σcrane = 0.0309 543 s σcrane = 0.1 σcrane = 0.0259 669 s Une première série de tests a été menée sur des données synthétiques. Ces dernières ont été simulées à l’aide du problème direct de l’EIT calculé sur le modèle à trois couches décrit ci-dessus pour des valeurs de conductivités σcerveau = 1.2, σcrâne = 0.0308 et σscalp = 1. Les résultats de ces tests sont présentés dans la Table 3.1. Nous avons remarqué qu’en pratique la méthode d’estimation n’était pas suffisamment sensible à la valeur de la conductivité du cerveau : la dérivée partielle ∂σbrain E(σ) est beaucoup plus faible que la dérivée partielle ∂σskull E(σ), si bien que durant une optimisation simultanée sur ces deux conductivités, celle du cerveau ne change que très peu. Pour quantifier ce phénomène, nous avons minimisé le coût par rapport à σcrâne (donc à σscalp et σcerveau fixés) et nous avons calculé la variabilité de la conductivité du crâne optimale par rapport à la conductivité fixée pour le cerveau. A titre d’exemple, un changement de l’ordre de 50% de la valeur de σcerveau peut n’occasioner une variation de la valeur de σcrâne que de 16% environ. Les résultats de l’expérience sur les données réelles sont présentés dans la Table 3.2. Pour cette expérience, l’optimisation a été réalisée uniquement sur la valeur de σcrâne σscalp (σcerveau et σcerveau fixés). Le rapport σcrâne obtenu est de l’ordre de 25, ce qui est cohérent avec les résultats précédemment obtenus dans la littérature pour ce type d’estimation [47, 13, 53, 92, 48]. P La fonction de coût normalisée E(σ)/ m=1,...,M kvm k2meas(m) mesure l’adéquation entre les mesures et le modèle. La Figure 3.1 montre le graphe de cette fonction pour les données réelles : 3 4 Advanced Source Analysis, ANT PC de type Pentium 4 à 3 Ghz disposant de 2 GB de mémoire RAM sous Linux 73 3. Application à l’estimation de conductivité Tab. 3.2 – Données réelles conductivités fixées σscalp = 1 σcerveau = 1 σscalp = 1 σcerveau = 1 σscalp = 1 σcerveau = 1.2 initialisation conductivités estimées temps de calcul σcrane = 0.02 σcrane = 0.0408 485 s σcrane = 0.1 σcrane = 0.0407 597 s σcrane = 0.1 σcrane = 0.0394 594 s Coût Normalisé 0.7 0.6 0.5 0.4 0.3 0.2 0.1 0 0 20 40 60 80 σscalp / σcrâne 100 120 140 150 zoom sur la région du minimum 0.08 0.075 0.07 0.065 0.06 0.055 0.05 10 20 30 σscalp / σcrâne 40 50 Fig. 3.1 – Coût normalisé pour le jeu de données réelles (en haut). Zoom sur la région du minimum (en bas). En ligne pleine : courant d’injection estimé. En pointillés : courant d’injection connu. 74 3. Application à l’estimation de conductivité • La courbe pleine en bleu représente le cas du courant d’injection estimé • La courbe en pointillés en rouge représente le cas du courant d’injection connu (fixé à λ̂m (σopt ) où σopt est la valeur de la conductivité optimale pour l’estimation à courant inconnu) Un zoom sur la zone du minimum (Figure 3.1, en bas) montre l’existence d’un minimum marqué dans les deux cas. Il n’est pas surprenant de constater que la connaissance du courant d’injection rend la fonction à minimiser encore plus convexe. 3.3 Discussion Dans ce chapitre, nous avons montré comment une implémentation de l’EIT peut être développée à partir de la formulation symétrique de la BEM. Cette nouvelle approche présente deux avantages • Une formulation physique beaucoup plus naturelle des courants d’injection que dans l’EIT obtenue avec une BEM double couche traditionnelle • Un coût calculatoire modeste car la matrice du symétrique du problème direct EEG est suffisante pour mener les calculs. Aucun assemblage de matrice supplémentaire n’est nécessaire. Il n’est cependant pas possible à l’issue de ces travaux de conclure à un gain de précision grâce à cette nouvelle approche. Une étude systématique visant à cette comparaison devrait être envisagée afin de vérifier si la précision supérieure de la formulation symétrique de la BEM pour le problème direct de l’EEG, notamment pour des rapports de conductivité importants, peut mener à une différence notable de précision pour l’EIT. 75 3. Application à l’estimation de conductivité 76 Deuxième partie Problème Inverse Chapitre 4 Introduction Transformer les appareils de mesure que sont l’EEG et la MEG en modalités d’imagerie du cerveau nécessite la résolution d’un problème inverse. Il consiste à reconstruire une distribution de sources ayant pu donner naissance aux mesures observées. La non-unicité d’une telle distribution pointe une première et grande différence entre le problème direct et le problème inverse. En fait, le problème inverse n’est pas injectif et plusieurs configurations de sources peuvent expliquer un même jeu de mesures. Une seconde différence capitale réside dans l’aspect temporel. Cet aspect est exclu de la modélisation du problème direct grâce à l’approximation quasi-statique alors que les méthodes les plus efficaces en problème inverse tirent parti d’une forme de cohérence temporelle. Dans cette partie, nous consacrons le présent chapitre à la définition de certains concepts de base et aux notations. Un chapitre est ensuite consacré à un état de l’art des méthodes inverses s’attardant sur quelques techniques classiques. Il est suivi d’un chapitre traitant des méthodes d’images prérequises qui sont adaptées dans le chapitre suivant au problème inverse en MEEG. Le dernier chapitre est consacré aux expériences numériques. 4.1 Les sources à estimer Dans l’introduction de ce mémoire, nous avons montré que les deux principaux phénomènes électriques intervenant dans l’activité cérébrale sont le potentiel d’action et le potentiel post-synaptique. Ces deux phénomènes interviennent à une échelle microscopique : celle du neurone. Le PPS peut être modélisé par un dipôle de courant alors que le PA peut lui être modélisé à l’aide d’un quadrupôle dont l’influence sur le potentiel électrique et le champ magnétique décroît plus rapidement avec la distance. L’activité électrique d’un neurone est en fin de compte modélisée par un dipôle de courant élémentaire. L’activité d’un neurone seul est cependant imperceptible à l’EEG ou à la MEG1. Pour obtenir un signal mesurable à l’une de ces deux modalités, il faut cumuler l’activité de plusieurs millions de neurones2. L’existence de sources macroscopiques provient de la juxtaposition de deux facteurs conjoints : • Une cohérence spatiale due à l’agencement des neurones dans certaines parties du cerveau. On peut citer notamment les cellules pyramidales du cortex qui montrent une direction privilégiée dans leur arborescence dendritique, la direction normale à 1 2 l’intensité d’un tel dipôle équivalent est d’environ 20 f A.m l’intensité typique d’un dipôle visible en MEG/EEG est de 10 nA.m 4. Introduction la surface du cortex étant clairement avantagée. Ce point est illustré à la figure 4.1. • Une mise en synchronie des potentiels post-synaptiques lors de l’activation d’une zone du cortex. Il s’agit là d’une forme de cohérence temporelle dans l’activité des neurones qui participe au renforcement du signal MEG/EEG. En dehors des assemblées corticales de cellules, la structure dipolaire disparaît et les sources plus profondes donnent naissance à des champs de type multipolaire dont l’intensité décroît beaucoup plus vite avec la distance. C’est la raison pour laquelle la MEG et l’EEG sont beaucoup moins sensibles à ces sources (bien que des sources profondes aient pu être localisées en EEG[62] et en MEG[109]). Nous introduisons maintenant les deux principaux modèles utilisés pour représenter les sources corticales macroscopiques. Le dipôle est utilisé comme une conséquence directe de ce qui précède. Les multiples sont utilisés comme une forme de source paramétrique permettant d’expliquer avec peu de paramètres les mesures générées par une assemblée de dipôles répartis sur une surface contiguë. On parle de patch. 4.1.1 Dipôle de courant équivalent C’est le modèle de source de courant le plus utilisé. Il est capable de représenter correctement l’activité électrique d’une surface pouvant atteindre quelques cm2 de matière grise. Une immense majorité des techniques de reconstruction l’utilise comme source. En notant p la position d’un tel dipôle et q3 son moment, le champ magnétique et le potentiel électrique générés dans un milieu homogène de conductivité unité sont donnés par 1 r−p q· , 4π kr − pk3 µ0 r−p Bdip (r) = q×. 4π kr − pk3 Vdip (r) = (4.1) (4.2) La source dipolaire que nous venons de décrire n’est que le cas particulier d’une approche plus générale que nous décrivons ici. 4.1.2 Sources multipolaires Ce modèle de source a d’abord été développé en électrocardiographie[66] où les sources macroscopiques présentent une structure moins dipolaire qu’en MEG. Il a ensuite été porté en MEG, plus de 15 ans après, par Mosher et al. dans [83, 65]. Dans ce qui suit, nous nous basons sur [83] pour dresser une brève présentation des multipôles magnétiques. Dans cette approche, on cherche à modéliser une source de courant suffisamment étendue pour ne pas pouvoir être supposée ponctuelle, et donc, modélisée à l’aide d’un seul dipôle mais suffisamment petite pour que son extension spatiale soit négligeable devant la distance la séparant des capteurs. On considère ici, un modèle sphérique de tête et on s’intéresse à la composante radiale du champ magnétique. Dans ce cadre, les courants volumiques n’apportent aucune contribution et seuls les courants primaires comptent. On pose Br (r) = rr · B(r) cette composante. L’équation de Biot-Savart donne Z 0 Z r µ0 r × Jp (r0 ) r µ0 M(r0 ) Br (r) = · = ·. (4.3) r 4π Ω d(r, r0 )3 r 4π Ω d(r, r0 )3 3 c’est à l’unité de q, l’ Ampère-mètre, que l’on doit le terme de dipôle de courant 80 4. Introduction A Configuration d’une Cellule pyramidale Surface Corticale − − − − − − − B Cellule pyramidale − Structure dipolaire d’une Cellule pyramidale E (lignes pleines) B (pointillés) B E E Repartition des Cellules pyramidales Scalp Crâne Gyrus Sulcus Matière Blanche V V V V V V V V Cortex V V C Cellules Pyramidales V Fig. 4.1 – Le dipôle de courant équivalent. M = r0 × Jp (r0 ) est la densité de moment magnétique ou magnétisation. La représentation multipolaire des sources est basée sur un développement en série de Taylor. Pour une fonction scalaire ψ, on a au voisinage de x, ∞ X ψ(r + x) = (x · ∇)n ψ(r)/n!. n=0 On applique ceci à ψ = d(r, r0 ). En tenant compte que ∇r = I, ∇rn = ∇(r ·r)n/2 = nrn−2 r et que ∇d(r, r0 )n = −∇0 d(r, r0 )n = n d(r, r0 )n−2 d(r, r0 ), on obtient d(r, r0 + x)−3 = d(r, r0 )−3 + 3 d(r, r0 )−5 (x · d(r, r0 )) + . . .. On suppose que le support de Jp est centré autour de r0 et on suppose que pour tout x de ce support, on a d(r, r0 ) >> kxk. Cela permet d’utiliser le développement proposé dans (4.3). Z ¡ ¢ 3 M(r0 + x) µ0 r M(r + x) + · x · (r − r ) +. dx Br (r) = 0 0 4π kr − r0 k3 Ω kr − r0 k2 81 4. Introduction Comme kxk << kr − r0k, on peut négliger les termes d’ordres supérieurs. Si on considère Jp = q.δr0 alors seul le premier terme est non nul et on retrouve la source dipolaire classique. Dans le cas où le support de Jp n’est pas réduit à {r0 }, le nombre de termes à prendre en considération dépend de l’étendue de la source4. Le développement de ces modèles de sources dans un cadre plus général que celui de la composante sphérique du champ magnétique pour un modèle sphérique est possible. De plus, il existe un autre type de modélisation de sources par développement multipolaire. Ce sont les multipôles de courant. Nous renvoyons à [65] et [64] pour une présentation détaillée de tous les modèles multipolaires utilisés en MEG. 4.2 EEG et MEG, des visions différentes d’un même phénomène La MEG et l’EEG mesurent deux grandeurs physiques issues du même phénomène physique et sont régies par des équations communes. Il n’en demeure pas moins que ces deux modalités donnent accès à des informations qualitativement différentes. Pour s’en convaincre, on se place encore une fois dans le cadre d’un modèle de tête sphérique qui malgré son côté très simplificateur permet de bien fixer quelques idées. Le premier fait remarquable est probablement l’absence de sensibilité de la MEG aux conductivités électriques alors que ces dernières (et notamment la faible conductivité du crâne) sont à l’origine de la limitation de la résolution spatiale de l’EEG. Les courants volumiques sont un exemple de notion que ne partagent pas l’EEG et la MEG. Cette notion n’a de sens que dans le cadre de la MEG et encore, ces courants n’ont aucune influence sur la composante radiale du champ magnétique. Les courants primaires étant la grandeur d’intérêt en MEG, c’est la raison pour laquelle la plupart des machines de MEG sont équipées de capteurs disposés de manière radiale. En contrepartie, le champ magnétique n’est pas affectée par une source dipolaire radiale, ce qui rend la MEG aveugle à beaucoup de sources potentielles. L’EEG ne souffre pas de ce défaut et possède une sensibilité à toutes les orientations de sources. De plus, le potentiel électrique ayant une décroissance moindre que le champ magnétique, l’EEG possède un "champ de vision" plus profond que la MEG. Finalement, chaque modalité est aveugle à un certain type de source. Une distribution de sources radiales sera invisible pour la MEG alors qu’une boucle de courant ne génère aucun potentiel susceptible d’influer sur les mesures EEG. Fort heureusement, 60% de la surface du cortex se trouve dans les sillons (où la normale au cortex est tangentielle et non radiale). Cela a pour effet de limiter l’aveuglement de la MEG. Une modulation de ces explications qualitatives doit également être prise en compte du fait du caractère non sphérique de la tête, l’insensibilité devant être remplacée par une sensibilité notablement moindre. Enfin, certains travaux tendent à utiliser le caractère complémentaire des informations fournies par la MEG et l’EEG [9]. 4 plus précisément de la valeur de ses différents moments, c’est de cela qu’il est question ! 82 4. Introduction 4.3 Un problème mal posé Le problème inverse en MEEG fait partie de ces problèmes dit mal posés au sens de Hadamard. Etant donné un opérateur H, le problème inverse consistant à résoudre Hx = m pour m donné est dit bien posé au sens de Hadamard quand il vérifie les trois conditions suivantes : • pour tout m, il existe au moins une solution x au problème • pour tout m, la solution x est unique • la solution x dépend continûment de m Pour le problème inverse MEEG, x est la source que l’on cherche à reconstruire et m et le jeu de mesures MEEG. Bien que pour chaque jeu de mesures, on puisse trouver une distribution de sources expliquant les mesures, le problème est mal posé car les deux autres conditions ne sont pas systématiquement vérifiées : • comme nous l’avons évoqué précédemment, il existe des distributions de sources silencieuses à la MEG ou à l’EEG. Une solution au problème inverse ne peut donc être déterminée qu’à l’une de ces distributions près. Ce point est contourné par de nombreuses méthodes inverses en contraignant la source à reconstruire. Si l’on cherche par exemple à expliquer un jeu de mesures à l’aide d’un dipôle de courant équivalent, le problème est sur-contraint et ce phénomène disparaît. • la solution x ne dépend pas continûment de m de telle sorte qu’un bruit d’un niveau très faible s’ajoutant aux mesures m peut créer un grand écart entre la solution à ce problème et celle du problème non perturbé. Pour s’affranchir de cette hypersensibilité au bruit, toutes les méthodes inverses s’autorisent une marge d’erreur sur les mesures que l’on nomme dans ce contexte variance résiduelle. A ces deux problèmes théoriques cruciaux s’ajoute une limitation pratique résidant dans la sous-détermination numérique du problème due au faible nombre de mesures (typiquement 200). 4.4 Définitions, notations Dans ce qui suit, nous introduisons quelques notations et quelques concepts communs à plusieurs méthodes inverses que nous présentons par la suite. Dans la plupart de ces méthodes, on ne fait pas référence de manière explicite à la méthode directe utilisée ou au modèle de tête employé. Tout ceci est contenu dans la matrice de gain. Les définitions qui suivent sont uniquement données pour des sources dipolaires. Leur extension à des sources multipolaires ne pose aucun problème mais alourdirait inutilement cet exposé. De même, plusieurs des méthodes inverses que nous présentons ensuite peuvent s’adapter à des sources multipolaires, nous le signalerons le cas échéant. 4.4.1 Matrice de gain, lead field et forward field Lorsque les sources sont modélisées à l’aide de dipôles, le principe de superposition montre que le problème direct est linéaire par rapport au moment du dipôle. Ainsi, pour un dipôle situé en p ∈ R3 possédant un moment q ∈ R3 et un point d’observation r ∈ R3 , il existe un vecteur g(r, p) tel que la mesure en r s’exprime m(r) = g(r, p) · q 83 4. Introduction g(r, p) est le vecteur de Lead Field associé à l’emplacement p et au point d’observation r. Le moment du dipôle est souvent décomposé dans la base canonique de R3 (ex , ey , ez ) de telle sorte qu’on a q = qx ex + qy ey + qz ez . Cette base est souvent appelée source5 régionale ou dipôle tournant6 [87] et sert de modèle d’activation locale en p. Les trois composantes du vecteur g(r, p) sont formées en résolvant successivement le problème direct (MEG ou EEG) sur trois dipôles placés en p et de moment respectifs ex , ey et ez . Des formes explicites de ce vecteur sont données pour différents cas dans [86]. Dans le cas de plusieurs dipôles situés en p1 , . . . , pp et de moments respectifs q1 , . . . , qp , il suffit d’ajouter les contributions individuelles de chaque dipôle et chaque mesure mk pour 1 ⩽ k ⩽ m peut donc se mettre sous la forme m(r) = p X g(r, pj ) · qj , j=1 m(rk ) pouvant être une mesure de potentiel en EEG ou une mesure d’une composante du champ magnétique en MEG. On peut mettre cette écriture sous forme matricielle et on a      gT (r1 , p1 ) . . . gT (r1 , pp ) q1 m(r1 )      ..  .. .. .. ... m= (4.4) =   .  = Gq. qp m(rm ) gT (rm , p1 ) . . . gT (rm , pp ) G est appelée matrice de gain. Elle lie les moments des q dipôles aux m mesures MEG ou EEG. Chaque colonne de G représente la signature d’un dipôle élémentaire sur toutes les mesures et est appelée forward field ou vecteur de gain associé à ce dipôle. De manière similaire, chaque ligne de la matrice G représente un vecteur du lead field regroupant les vecteurs de lead field de chaque mesure. 4.4.2 Modèles spatio-temporels Le modèle précédent peut être étendu de manière immédiate à T échantillons temporels. Pour ce faire, il suffit de juxtaposer les T échantillons des moments des dipôles dans une matrice Q à T colonnes remplaçant le vecteur q. Le produit de cette matrice avec la matrice G (à gauche) fournit une matrice M à T colonnes qui remplace le vecteur m et qui contient les échantillons temporels des mesures. Dans ce modèle, chaque ligne de Q représente le décours temporel d’un dipôle élémentaire. Si aucune contrainte n’est mise sur le décours de chacun des 3 dipôles élémentaires de la source régionale, le moment résultant semble tourner dans le temps (d’ou le terme rotating dipole). Cette liberté n’étant pas toujours souhaitable, on contraint souvent le moment de chaque dipôle à avoir une orientation fixée u en ne laissant en variable libre dans le temps que l’amplitude du moment s. Formellement, cela s’écrit     qx (1) . . . qx (T ) ux £ ¤  qy (1) . . . qy (T )  =  uy  s(1) . . . s(T ) = u sT. uz qz (1) . . . qz (T ) 5 6 regional source rotating dipole 84 4. Introduction Dans ce cadre, l’équation (4.4) devient     g(r1 , p1 ) · u1 . . . g(r1 , pp ) · up s1 (1) . . . s1 (T ) m(r1 , 1) . . . m(r1 , T )      .. .. .. .. .. .. . ... ... ... M= = . . . sp (1) . . . sp (T ) m(rm , 1) . . . m(rm , T ) g(rm , p1 ) · u1 . . . g(rm , pp ) · up | {z }| {z }  A({pi ,ui }) ST (4.5) Avec cette formulation, les paramètres de notre problème direct sont la position des sources pi et leurs orientations ui qui en sont les paramètres non linéaires ainsi que leurs amplitudes qui constituent les paramètres linéaires. 85 4. Introduction 86 Chapitre 5 Etat de l’art des méthodes inverses Les méthodes de résolution du problème inverse en MEEG peuvent être scindées en deux catégories. Les méthodes paramétriques d’une part, assimilent la source à un ensemble de dipôles dont il s’agit alors d’estimer les paramètres tant linéaires (amplitudes des dipôles) que non linéaires (positions et moments des dipôles). Cela donne lieu à des problèmes d’optimisation non-linéaires sur-contraints, qui sont donc bien posés mais difficiles à résoudre d’un point de vue algorithmique. Les modèles multipolaires sont généralement intégrés dans ce cadre en se contentant d’augmenter le nombre de paramètres à estimer et permettent de représenter des sources moins focales. Les approches distribuées ( ou approches image) quant à elles, utilisent comme source une distribution de dipôles répartis sur le cortex de moments perpendiculaires à la surface de ce dernier. Ainsi posé, le problème inverse ne requiert que l’estimation de paramètres linéaires : l’amplitude des dipôles. Le problème d’optimisation afférant possède en un certain sens des caractéristiques opposées à celui issu des méthodes paramétriques. Le nombre de dipôles étant bien plus grand que le nombre de mesures, le problème est très largement souscontraint et une régularisation est nécessaire pour établir une solution d’intérêt parmi toutes les solutions possibles. La dépendance linéaire aux paramètres recherchés rend l’aspect algorithmique moins délicat. Ces méthodes sont davantage dédiées à la détection d’activation hautement non focales sur des surfaces étendues. Les méthodes paramétriques et distribuées ne sont donc pas concurrentes mais plutôt complémentaires. Dans la suite de cette section, nous parcourons une sélection de méthodes inverses de ces deux catégories en soulignant leur domaine de validité. 5.1 Estimation par moindres carrés Dans un cadre réaliste, les mesures MEEG peuvent être modélisées comme le résultat d’un problème direct entaché d’une erreur de mesure contenue dans une matrice de bruit spatio-temporel N. M = A({pi , ui }) ST + N (5.1) 5. Etat de l’art des méthodes inverses M, A et S sont les matrices introduites en 4.4.2. Pour déterminer pi , ui et S à partir de M, l’approche la plus directe est de fixer le nombre de sources p et d’utiliser un algorithme de minimisation non linéaire pour trouver le minimum de l’erreur quadratique entre les mesures effectuées et celles calculées à l’aide du problème direct. Cette erreur s’écrit sous la forme ° °2 JLS ({pi , ui }, S) = °M − A({pi , ui }) ST °F. (5.2) La minimisation de (5.2) peut se réécrire en tenant compte de l’expression analytique du minimum de JLS par rapport à sa variable linéaire S. Pour un ensemble de paramètres {pi , ui } la valeur de S qui minimise JLS est S = A({pi , ui })# M. A# est le pseudoinverse[46] de A. La quantité (5.2) peut donc s’écire : ° °2 ° °2 ° °2 JLS ({pi , ui }, S) = °M − A(A# M)°F = °(I − A A# )M°F = °PA⊥ M°F (5.3) On omet d’écrire les dépendances en {pi , ui } des termes impliquant A pour des raisons de clarté. PA⊥ M est le projecteur orthogonal sur le noyau de AT. La minimisation de JLS peut être menée sur la forme 5.3 grâce, par exemple, à une méthode du simplex [41]. D’autres simplifications peuvent être menées sur JLS à l’aide de SVDs[87]. Cette technique peut être appliquée successivement à chaque instant d’un bloc de données ou sur tout le bloc simultanément. Dans le premier cas, les dipôles recherchés peuvent bouger d’un instant au suivant, on parle de dipôle mobile (moving dipole). Dans le second cas, le dipôle est contraint à posséder une position et une orientation fixe sur tout l’intervalle temporel et l’ajustement aux moindres carrés est effectué sur toute la matrice M. Ce modèle qui a montré son efficacité en MEG et en EEG dans de nombreux cas est appelé le dipôle fixe (fixed dipole). C’est encore le plus utilisé de nos jours dans des contextes cliniques ou expérimentaux. Le point faible de ces méthodes reste la détermination du nombre p de dipôles a priori. Bien que de nombreux algorithmes essayant d’ajuster ce nombre de manière automatique aient été proposés, ce problème est encore résolu en pratique par des experts humains : des reconstructions sont calculées avec des nombres de dipôles différents et la solution la plus plausible dans le contexte est retenue. Ceci est crucial dans la mesure où l’adéquation aux données est d’autant meilleure d’un point de vue quantitatif que le nombre de dipôles a priori est grand. Mais cela ne préjuge pas de l’aspect qualitatif que seul l’expert peut juger. De plus, la non-convexité de la fonctionnelle JLS augmente avec p, entraînant des chances accrues de ne trouver qu’un minimum local lors de la minimisation. La seule parade à ce problème est l’utilisation d’algorithmes de recherche de minima globaux rarement très commodes et efficaces. Les méthodes analytiques que nous exposons plus loin semblent résoudre ce problème du nombre de sources de manière plus élégante et automatique. 5.2 Méthodes de balayage Ces méthodes évitent les problèmes de non-convexité rencontrés avec l’estimation par moindres carrés. Elles balayent à la recherche d’une source une région d’intérêt qui peut varier d’un unique emplacement au volume du cerveau tout entier. Un telle méthode peut 88 5. Etat de l’art des méthodes inverses être mise en oeuvre par filtrage spatial ou par classification de signaux. Ces techniques ne nécessitent pas d’a priori sur le nombre de sources recherchées, ce qui comble une deuxième faiblesse de l’estimation par moindres carrés. 5.2.1 Beamforming Le beamformer est une technique qui tente de simuler le signal d’une électrode virtuelle profonde. Pour ce faire, on cherche le signal y(t) de cette électrode virtuelle sous la forme d’une combinaison linéaire des signaux des autres électrodes. On note w cette combinaison linéaire et on a y(t) = w · m(t). Le vecteur w est déterminé de manière à réagir aux signaux émanant de l’emplacement p (pour un dipôle source p,q). De plus, y(t) doit être nul si p n’est pas l’emplacement d’une vraie source. Pour procéder à un balayage, le vecteur w est adapté à chaque itération pour tester un nouvel emplacement. On surveille alors le niveau de sortie de l’électrode virtuelle pour trouver les sources. La technique du beamforming est issue du traitement des signaux RADAR et SONAR et a du subir quelques adaptations pour être appliquée au problème inverse MEEG. De bonnes revues sur cette technique figurent dans [116] et [68]. La forme la plus simple du beamformer balaye une seule position de dipôle caractérisé par sa position p et son moment normalisé u. Le vecteur w associé est le vecteur de forward field associé à ce dipôle renormalisé w = a(p, u)/ka(p, u)k2. Ce vecteur produit bien une réponse égale à 1 en p,u mais sa sélectivité est incontrôlable et inquantifiable car d’autres dipôles (de même orientation et de position voisine par exemple) peuvent présenter un forward field très corrélé.
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Vander Linden et al. (1994) le définissent comme étant un mouvement transitoire vers la position debout sollicitant un déplacement du centre de gravité depuis une position stable 44 1.3. hémiplégie et passage assis-debout vers une position moins stable. Tully et al. (2005) le définissent comme étant une action nécessitant l'interaction coordonnée des segments corporels pour amener le centre de gravité de la personne dans une direction horizontale puis verticale en maintenant l'équilibre. Enfin, Cachia (2008) le définit comme étant une action nécessitant une transition d'une base de support assez grande lors de la station assise à une base de support considérablement plus réduite lors de la station debout. Malgré les différentes définitions, le but du PAD reste le même : être capable de déplacer le corps d'une situation assise vers une situation debout et inversement pour le PDA. A ce but, il peut s'ajouter la qualité avec laquelle ce mouvement est effectué. Dans le cas des sujets hémiplégiques, le mouvement est comparé à celui des sujets témoins/sains ((Brière et al., 2010)). Cependant, aucune définition spécifique d'un bon PAD/PDA n'existe. 1.3.2 Chronologie du PAD/PDA Il est possible de simplifier le découpage du PAD en le divisant uniquement en 2 phases (phase préparatoire et phase de lever), séparées par l'instant de perte de contact avec le siège, lui-même déterminé le plus souvent par une plateforme de force disposée sous l'assise (Bestaven (2008), Hirschfeld et al. (1999), Mazzà et al. (2005), Bahrami et al. (2000), Johnson et al. (2010)). Il est aussi possible de diviser le mouvement du PAD en plus de 2 phases (Millington et al. (1992), Burnett et al. (2011), Van Lummel et al. (2013), Kralj et al. (1990), Prinz et al. (2007) Yamada and Demura (2009), Yamada and Demura (2010)). Les évènements qui séparent ces phases sont basés soit sur des données cinématiques (Millington et al. (1992) et Burnett et al. (2011)), sur des données dynamiques (Kralj et al. (1990), Prinz et al. (2007)) soit sur les deux (Yamada and Demura (2009) et Yamada and Demura (2010)). La table 1.2 ci-dessous résume certains de ces découpages. Chapitre 1. Contexte et problématique Numéro de la phase du PAD Données cinématiques et dynamiques 1 Début flexion du tronc → Début extension genoux Début flexion du tronc → Perte de contact du siège Réaction au sol/Poids total>0.2 → Perte de contact du siège 2 Début extension genoux → Flexion maximale du tronc Perte de contact du siège → Flexion dorsale de cheville max Perte de contact du siège → Pic de la réaction au sol 3 Début extension du tronc → Fin extension tronc et genoux Flexion dorsale de cheville max → Fin extension de la hanche Pic de la réaction au sol → Réaction au sol/Poids=1 4 Fin extension de la hanche → Réaction vertical au sol<1% Poids Table 1.2 – Découpage du PAD (Millington et al. (1992), Burnett et al. (2011), Van Lummel et al. (2013), Kralj et al. (1990), Prinz et al. (2007), Yamada and Demura (2009), Yamada and Demura (2010)). Le critère avant la flèche représente le début de la phase du PAD et le critère après la flèche représente la fin de la phase du PAD. Il est cependant difficile pour les auteurs de déterminer la fin du PAD (Bestaven (2008)). Effectivement, la fin du PAD est sensible à plusieurs paramètres (dynamiques et cinématiques). Par exemple, la réaction au sol peut être égale au poids mais la fin d'extension du tronc ou des genoux ne sont pas encore complètement achevées. En outre, certains auteurs n'indiquent pas le découpage du passage assis-debout. A titre d'exemple, deux parmi les études du passage assis-debout des sujets hémiplégiques ont précisé le découpage du passage assis-debout sans pour autant donner beaucoup de détails : pour Cheng et al. (1998), le début du PAD se base sur une consigne verbale (« start » de l'expérimentateur) et sa fin sur un paramètre dynamique (force verticale niveau des pieds = poids du sujet) ; pour Lomaglio and Eng (2005), le début du PAD est basé sur un paramètre dynamique (début de variation des forces au sol) et la fin sur un paramètre cinématique (maximum de la hauteur de l'acromion). On ne trouve qu'une seule étude sur les sujets hémiplégiques dont la chronologie du PAD et du PDA est détaillée (Roy et al. (2006)). Figure 1.7 – Découpage du passage assis-debout et debout-assis (Roy et al. (2006)) basé sur la force verticale (VRF) au sol et à l'assise (figure en haut) et sur les angles articulaires du membre inférieur (figure en bas). Dans le détail, Roy et al. (2006), ont finement découpé le PAD et le PDA selon 8 évènements (Figure 1.7) : - début du PAD (EV1-O), - point de transition du PAD lorsque les forces sont similaires au sol et à l'assise (EV2-T), - perte de contact avec le siège lorsque la composante verticale de la force à l'assise est nulle (EV3-SO), - fin du PAD lorsque les angles articulaires du membre inférieur deviennent nuls (EV4-E), - début du PDA lorsque les angles articulaires du membre inférieur finissent d'être nuls (EV5-O), - prise de contact avec le siège lorsque la composante verticale de la force à l'assise finit d'être nulle (EV6-SO), - point de transition du PDA lorsque les forces sont similaires au sol et à l'assise (EV7-T), - fin du PDA (EV8-E). Cependant, le seuil du début du PAD et le seuil de la fin du PDA n'ont pas été indiqués. Notons que pour utiliser les angles articulaires nuls des membres inférieurs comme indicateur de fin du PAD et de début du PDA, il faut que les sujets aient les membres inférieurs bien droits (= 0◦ ) lorsqu'ils sont en position debout. Enfin, tous ces exemples d'études cités dans ce paragraphe montrent qu'il n'existe pas, à notre connaissance, de consensus sur la méthode de découpage du passage assis-debout et debout-assis. Chapitre 1. Contexte et problématique 1.3.3 Stratégies Deux principales stratégies utilisées par les sujets hémiplégiques, ont été identifiées (Mazzà et al. (2006)) : 1. Les personnes inclinent leur tronc vers l'avant et seulement après avoir positionné leur centre de gravité au-dessus de la base de , commencent à se lever, 2. Les personnes inclinent leur tronc et se lèvent en même temps. La première stratégie favorise la stabilité alors que la deuxième favorise la vitesse. Ces deux types de stratégies ont été identifiées par une autre étude pour les personnes âgées (Papa and Cappozzo (2000)). La Table 1.3 présente ces deux types de stratégies (Figure 1.8) identifiées par différentes études (études pour des personnes âgées et des sujets hémiplégiques) (Hughes et al. (1994), Papa and Cappozzo (2000), Mazzà et al. (2006), Bestaven (2008)) : une qui favorise la stabilité, l'autre qui favorise la vitesse. Figure 1.8 – Stratégies du passage assis-debout sans assistance.(Hughes et al. (1994)). 1.3. hémiplégie et passage assis-debout Etudes Hughes et al. (1994) Papa and Cappozzo (2000), Mazzà et al. (2006) Bestaven (2008) Stratégi e 1 (favorise la stabilité) Stratégie 2 (favorise la vitesse) La quantité de mouvement est faible et sert à positionner le centre de gravité au-dessus de la base de support, avant de se lever Le sujet utilise pour se lever la quantité de mouvement horizontale du centre de gravité développée grâce à la flexion du tronc Les personnes s'inclinent vers l'avant et seulement après avoir positionné leur centre de gravité au-dessus de la base de support, commencent à se lever Les personnes s'inclinent et se lèvent en même temps Les sujets amènent en priorité le centre de gravité au-dessus du polygone de sustentation avant la perte de contact avec le siège ce qui assure la stabilité du corps à l'instant de la perte de contact avec le siège La composante antéro-postérieure de la vitesse du centre de gravité est importante, ce qui permet de transférer plus facilement l'énergie cinétique créée pendant la flexion du tronc. Table 1.3 – Deux stratégies du PAD par référence bibliographique Hughes et al. (1994), a ajouté à ces deux stratégies une troisième stratégie qui est la combinaison des stratégies 1 et 2. Par ailleurs, il a été montré qu'un PAD effectué avec un degré élevé d'inclinaison du tronc nécessite un travail des muscles extenseurs du dos alors qu'un PAD effectuée avec un degré faible d'inclinaison du tronc exige plus d'efforts au niveau du genou (Scarborough et al. (2007)). Chapitre 1. Contexte et problématique 1.3.4 Etat des connaissances sur le PAD/PDA 1.3.4.1 Outils et variables biomécaniques pour l'analyse du PAD/PDA des sujets hémiplégiques L'étude du passage assis-debout/debout-assis des sujets hémiplégiques et du passage assisdebout/debout-assis assisté est communément menée à l'aide d'outils de mesures de données dynamiques (plateforme de forces, dynamomètre), de données cinématiques (systèmes de capture de mouvement) ou à l'aide de données électromyographiques (EMG de surface). A partir des données dynamiques et cinématiques, différentes variables biomécaniques (mesurées ou calculées) sont définies en fonction de l'objectif des études : - pour identifier des stratégies motrices des sujets hémiplégiques, Mazzà et al. (2006) utilisent la trajectoire du centre de gravité. - pour déterminer les retombées d'un entraînement sur le passage assis-debout des sujets hémiplégiques, Cheng et al. (2001) ont utilisé la durée du PAD et le débattement (écart entre valeur maximale et minimale) du centre de pression. Les forces verticales au sol ont été utilisées pour calculer l'asymétrie lors du passage assis-debout. Pour le même objectif, Howe et al. (2005) ont utilisé la durée du PAD. - pour étudier l'influence de différents facteurs géométriques ou posturaux (hauteur de la chaise, positionnement des pieds) sur le passage assis-debout, de Souza Rocha et al. (2010), Roy et al. (2006) et Roy et al. (2007) ont utilisé les forces verticales au sol et les moments articulaires aux genoux pour calculer l'asymétrie. - pour étudier l'asymétrie, le lien entre l'asymétrie et d'autres paramètres telle que la per de l'asymétrie et les efforts articulaires, Cheng et al. (1998), Cheng et al. (2001) et Lomaglio and Eng (2005) ont utilisé les forces verticales au sol et les moments articulaires aux genoux. Pour le même objectif, Brière et al. (2013) ont utilisé les activations musculaires du quadriceps pour calculer l'asymétrie. - pour étudier l'influence d'une aide de type accoudoirs (Ellis et al. (1984) et Alexander et al. (1991)), d'une barre (Bahrami et al. (2000)), d'un poteau (Vena et al. (2015)), d'une poignée-barre (O Meara and Smith (2006), Kinoshita (2012) et Kinoshita et al. (2015)) ou d'un dispositif mécanisé (Burnfield et al. (2012)) sur le passage assis-debout, les auteurs utilisent : o o o o o la durée du mouvement, le degré d'inclinaison du tronc, le débattement du centre de pression, le centre de gravité et sa vitesse linéaire, les forces verticales mesurées au sol, 50 Etudes Variables Durée du PAD/PDA DCP Cheng et al. (1998) Cheng et al. (2001) Lomaglio and Eng (2005) Howe et al. (2005),Mazzà et al. (2006) × × × × × Roy et al. (2006) × CDG FV sols × × × MA AMg Asymétrie × × × × × × × Roy et al. (2007) Brière et al. (2010) de Souza Rocha et al. (2010) Brière et al. (2013) × × × × × × × × × × Table 1.4 – Différentes variables analysées par référence bibliographique pour le PAD/PDA des sujets hémiplégiques. DCP : débattement du centre de pression ; CDG : centre de gravité ; FV sols : forces verticales au sol ; MA : moments articulaires ; AMg : activations musculaires des extenseurs du genou. 51 Chapitre 1. Contexte et problématique Variables Durée du PAD/PDA Etudes Ellis et al. (1984) Alexander et al. (1991) Anglin and Wyss (2000) Bahrami et al. (2000) O Meara and Smith (2006) Burnfield et al. (2012) Jeyasurya et al. (2013) Vena et al. (2015) Kinoshita et al. (2015) T DCP CDG Vitesse CDG FV sols F mains MA AM × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × × Table 1.5 – Différentes variables analysées par référence bibliographique pour le PAD/PDA assist é. T : inclinaison du tronc ; DCP : débattement du centre de pression ; CDG : centre de gravité ; Vitesse CDG : vitesse du centre de gravité ; FV sols : forces verticales au sol ; F mains : Forces au niveau des mains ; MA : moments articulaires ; AM : activation musculaire du membre inférieur. On note que l'asymétrie est calculée pour la plupart des études du passage assisdebout/debout-assis des sujets hémiplégiques (8 sur 10). Selon les auteurs, l'asymétrie est calculée comme : 1. Différence entre le maximum du moment articulaire résultant du genou parétique et du genou non parétique (Roy et al. (2007)), 2. Différence entre le maximum de la force verticale du pied parétique et du pied non parétique en pourcentage du poids du sujet (Cheng et al. (1998), Cheng et al. (2001)), 52 1.3. hémiplégie et passage assis-debout 3. Quotient entre le maximum de la force verticale du pied parétique et celle du pied non parétique (Lomaglio and Eng (2005)), 4. Quotient entre la différence de la force verticale du pied parétique et du pied non parétique et la force verticale du pied non parétique à 4 instants différents du mouvement (Roy et al. (2006)), 5. Quotient entre la différence entre le maximum de la force verticale du pied parétique et du pied non parétique le maximum de la force verticale du pied non parétique (de Souza Rocha et al. (2010)), 6. Quotient entre la moyenne de la force verticale du pied non parétique et la somme des moyennes des forces verticales des deux pieds (Brière et al. (2010), Brière et al. (2013)). Chapitre 1. Contexte et problématique Etudes Ordres de grandeur (PAD) Ordres de grandeur (PDA) Cheng et al. (2001) [2] 41.86±20.87% (sans risque de chute) 52.87±18.42% (avec risque de chute) 41.86±20.87% (sans risque de chute) 52.87±18.42% (avec risque de chute) 43.81±22.21% (sans risque de chute) 47.26±16.5% (avec risque de chute) 43.81±22.21% (sans risque de chute) 47.26±16.5% (avec risque de chute) Lomaglio and Eng (2005) [3] 0.84±0.2 (à l'instant de perte de contact avec le siège) Cheng et al. (1998) [2] 17.2±22.8% (position symétrique des pieds, à l'instant de perte de contact avec le siège, hauteur de la chaise = 120% de la longueur des jambes) 11±18.9% (position symétrique des pieds, à l'instant de perte de contact avec le siège, hauteur de la chaise = 120% de la longueur des jambes) Roy et al. (2007) [1] 33.72±26.28 Nm (position symétrique des pieds) 24.05±24.78 Nm (position symétrique des pieds) Brière et al. (2010) 40 à 70% (position symétrique des pieds) de Sou za Roch a et al. (2010) [5] 0 à 50% (position symétrique des pieds, selon les sujets et la hauteur de la chaise) Brière et al. (2013) [6] 52±3% (paralysie qualifiée légère) ; 57±7% (paralysie qualifiée modérée) ; 60±5% (paralysie qualifiée sévère) Roy et al. (2006) [4] Table 1.6 – Ordres de grandeur de l'asymétrie lors du PAD et du PDA des sujets hémiplégiques. [1], [2], [3], [4], [5], [6] sont les numéros des 6 méthodes de calcul (section 1.3.4.1). 54 1.3. hémiplégie et passage assis-debout En ce qui concerne la durée, la Figure 1.9 que la durée est variable selon les études. Les différences entre les études peuvent être dues au découpage du mouvement (Paragraphe 1.3.2), à une caractéristique du groupe étudié, à leur risque de chute ou au fait que le groupe est réalisé un entraînement ou pas (Cheng et al. (2001) et Howe et al. (2005)). L'entraînement étant un exercice important pour les sujets hémiplégiques, des informations à ce sujet sont détaillées dans le paragraphe suivant. Figure 1.9 – Durée du PAD et du PDA des sujets hémiplégiques par référence bibliographique. 1.3.4.2 Influence de l'entraînement sur le PAD/PDA des sujets hémiplégiques Il a été montré qu'un entraînement de 6 mois visant à encourager la symétrie des sujets hémiplégiques, peut améliorer le PAD et du PDA (diminution de la durée, diminution de l'asymétrie, diminution du débattement latéral du centre de pression). Ceci n'a pas été le cas pour un groupe qui n'a pas effectué l'entraînement (Cheng et al. (2001)). Cet entraînement inclus, en plus du programme de réhabilitation conventionnel, des entraînements qui consistent à se tenir debout d'une manière symétrique et de faire des essais répétitifs de passage assis-debout/debout-assis (Cheng et al. (2001)). Howe et al. (2005) a aussi montré une diminution de la durée du PAD et du PDA après 4 ou 8 semaines d'entraînement par rapport à la base (0 semaine), chez le même groupe. Cependant cette diminution n'était pas significative pour le même groupe, et la durée du PAD et du PDA n'a montré aucune différence significative entre les deux groupes (avec et sans entraînement en plus) ni après 4, ni après 8 semaines. Différemment de Cheng et al. (2001), cet entraînement consiste à effectuer 12 sessions de 30min de traitement en plus, pour une durée de 4 semaines. Néanmoins, comme pour l'étude de Cheng et al. (2001), cet entraînement en plus comprenait des exercices qui visent à améliorer la symétrie, sans plus de précision sur le type de ces exercices. Enfin, les 55 Chapitre 1. Contexte et problématique programmes d'entraînements qui encouragent la symétrie des sujets hémiplégiques et donc encouragent l'appui du cô parétique rejoignent les recommandations de la Haute Autorité de Santé selon lesquelles il est recommandé de charger le membre inférieur parétique (HAS (2012)). 1.3.4.3 Influence de l'asymétrie et corrélation avec d'autres facteurs lors du PAD/PDA des sujets hémiplégiques Cheng et al. (1998), ont supposé que plus l'asymétrie est forte lors du PAD et du PDA, plus le risque de chute est important. Leurs résultats ont montré une asymétrie plus forte pour les sujets avec risque de chute par rapport aux sujets sans risque de chute, cependant cette différence s'est avéré non significative.Lomaglio and Eng (2005) ont montré qu'une vitesse du PAD importante est liée à une asymétrie réduite. Brière et al. (2010) ont montré que, dans le cas des sujets atteints d'une hémiplégie qualifiée de sévère (selon l'ordre de grandeur de l'asymétrie), l'asymétrie n'est révélée que par le calcul basé sur les forces verticales au sol, et non lorsqu'il est basé sur les efforts articulaires des genoux. Par contre, dans le cas des sujets atteints d'une hémiplégie qualifiée de légère (toujours selon l'ordre de grandeur de l'asymétrie), l'asymétrie basée sur les forces verticales ou sur les efforts articulaires au niveau des genoux est comparable à ceux des sujets sains. Enfin, Roy et al. (2007) ont conclu qu'une forte asymétrie des moments d'extension des genoux est associée à la faiblesse des extenseurs du genou parétique. L'asymétrie pourrait être liée à la hauteur de l'assise, mais les résultats sont contradictoires : l'asymétrie n'a pas été influencée par la hauteur de la chaise quand celle-ci a été modifiée de 100 à 120% de la longueur des jambes (Roy et al. (2006)), mais ce n'a pas été le cas lorsque celle-ci a été modifiée de 100 à 130% de la longueur des jambes (de Souza Rocha et al. (2010)). Cette asymétrie semble aussi directement liée à la qualité d'exécution du PAD : pour un PAD réussi ou meilleur il a été conclu que la capacité à charger le membre inférieur parétique est importante (Lomaglio and Eng (2005)). 1.3.4.4 Influence des facteurs posturaux lors du PAD/PDA Il a été montré que le positionnement des pieds influence des variables biomécaniques lors du PAD et du PDA (Brunt et al. (2002), Roy et al. (2006), Roy et al. (2007), de Souza Rocha et al. (2010)) : l'asymétrie est augmentée lorsque le pied parétique est positionné en avant du pied non parétique (Roy et al. (2006)), alors qu'elle est réduite lorsque le pied parétique est positionné en arrière du pied non parétique (Roy et al. (2006), Roy et al. (2007)). L'asymétrie est également augmentée lors du PAD, lorsque le pied non parétique est positionné sur un palier (élevé par rapport au sol) (de Souza Rocha et al. (2010), Brunt et al. (2002)). En plus 56 1.3. hémiplégie et passage assis-debout de l'influence du positionnement des pieds sur l'asymétrie, l'activation musculaire du membre inférieur parétique a augmenté (de 39%) lors du PAD, ainsi que les forces antéro-postérieure et verticale mesurées au sol, lorsque le pied non parétique est positionné sur un palier par rapport au positionnement symétrique . Chapitre 1. Contexte et problématique Figure 1.10 – Inclinaison du tronc lors du PAD assisté/non assisté par référence bibliographique. L'inclinaison du tronc est mesurée par rapport à l'horizontale pour Alexander et al. (1991) et calculée par rapport à la verticale pour les autres références bibliographiques. Les valeurs maximales de l'inclinaison du tronc sont présentées pour l'étude de Burnfield et al. (2012), l'écart entre la valeur maximale et la valeur initiale pour Alexander et al. (1991) alors que pour les autres c'est le débattement (écart entre valeur maximale et minimale) de l'inclinaison du tronc. Globalement, la présence d'un point d'appui, d'une poignée ou d'un dispositif d'aide contribue au succès du PAD, en diminuant les actions mécaniques au niveau des genoux. En effet, la présence d'accoudoirs a diminué les forces tibio-fémorales de 47% pour une assise haute, et 33% pour une assise basse (Ellis et al. (1984)), la présence de barres d'appui pour les mains a réduit les moments articulaires aux genoux et aux hanches de plus de 50% (Bahrami et al. (2000)), et une poignée-barre utilisée en position haute et basse réduit le moment articulaire total de 15% (Kinoshita (2012)). Ces conclusions ne sont cependant pas unanimes. En effet, si Jeyasurya et al. (2013) ont montré que l'utilisation d'une ceinture au niveau du bassin réduit le moment articulaire au genou de 77%, ce moment articulaire n'a pas été réduit lorsqu'une barre horizontale ou verticale est utilisée. De même, O Meara and Smith (2006) a montré que l'utilisation d'une poignée-barre unilatérale introduit une asymétrie mais ne réduit pas significativement les moments articulaires totaux des genoux par rapport à un PAD non assisté. Par ailleurs, dans la même étude, O Meara and Smith (2006) a montré que la poignéebarre incite les sujets à positionner leur centre de gravité plus en arrière par rapport à la base de support (des pieds) à l'instant de perte de contact avec le siège et la vitesse antéropostérieure a été réduite. Il est aussi possible d'étudier l'influence de la variation de position d'une assistance dans les trois directions. La modification de la position latérale (droite/gauche) d'une poignée58 1.3. hémiplégie et passage assis-debout barre introduit une asymétrie bas ée sur les moments articulaires ré sultan ts aux genoux : ce moment augmente du côté de la poignée-barre et diminue du côté opposé (O Meara and Smith (2006)). Concernant la position verticale (haute/basse) d'une poignée-barre, Kinoshita et al. (2015) ont montré qu'elle influence l'inclinaison du tronc, le déplacement du centre de gravité par rapport aux chevilles et la force antéro-postérieure mesurée au sol. En effet, la position basse augmente l'inclinaison du tronc, le déplacement du centre de gravité par rapport aux chevilles et diminue la force antéro-postérieure par rapport au PAD sans assistance des sujets sains. A l'inverse, la position haute réduit l'inclinaison du tronc et augmente la force antéropostérieure au sol. Concernant la position antéro-postérieure, Vena et al. Figure 1.11 – Illustration des poteaux utilisés comme des poignées pour se lever. (Vena et al. (2015)). En plus des dispositifs d'aide fixe (poignée, barres, poteaux), une étude biomécanique a examiné la différence qu'apporte l'utilisation d'un dispositif de Vera-lift (Figure 1.12) au PAD naturel (Burnfield et al. (2012)). Cette étude conclut que le PAD avec le dispositif de Vera-lift est différent du PAD naturel : un tel dispositif supprime quasiment l'inclinaison du tronc, modifie globalement la position angulaire du pelvis, des hanches, des genoux et des chevilles, tout en diminuant de façon attendue l'activité musculaires des membres inférieurs. 59 Chapitre 1. Contexte et problématique Figure 1.12 – Dispositif Vera-lift (Burnfield et al. (2012)). Il existe d'autres prototypes de dispositif d'assistance pour aider au PAD pour lesquels il n'a pas été réalisé à ce jour d'études biomécaniques. A titre d'exemple, le prototype de l'Université Ritsumeikan (Figure 1.13) qui utilise une sorte de tablette pour aider les personnes âgées à se lever et qui en plus, semble inciter les sujets à incliner leur tronc, contrairement au dispositif Vera-lift. Figure 1.13 – Prototype d'un dispositif d'assistance de l'Université Ritsumeikan (Nagai et al. (2003)). Des travaux ont débuté au LAMIH et au LATIM en collaboration avec d'autres partenaires cliniques et industriels, pour réaliser des études biomécaniques sur un dispositif d'assistance muni d'une poignée mobile posée sur une tablette, dans le cadre du projet VHIPOD (ANR – TECSAN 2012). Ce projet a pour objectif de concevoir un véhicule électrique individuel de transport en station debout pour les personnes hémiplégiques avec aide à la verticalisation (Figure 1.14). 60 1.3. hémiplégie et passage assis-debout Figure 1.14 – Illustration du dispositif Vhipod souhaité. Dans l'objectif de concevoir un tel dispositif (Figure 1.14), une plateforme expérimentale composée d'une poignée mobile posée sur une tablette a été fabriquée pour les expérimentations du passage assis-debout des sujets hémiplégiques. Ces essais biomécaniques et les résultats attribués seront présentés en Chapitre 4. 1.3.4.6 Conclusion Le passage assis-debout/debout-assis est une activité essentielle de la vie quotidienne, qui est fortement affectée par l'hémiplégie. Il peut être évalué à l'aide de nombreux indicateurs biomécaniques. Les stratégies utilisées par les sujets atteints pour réaliser un PAD ont été classées en deux catégories selon qu'elles favorisent la stabilité ou la vitesse. De plus, un entraînement influence positivement des variables biomécaniques (ex. réduire l'asymétrie) caractérisant le PAD et le PDA des sujets atteints d'hémiplégie, et les résultats concernant le chargement du membre parétique et le travail en vue d'augmenter la symétrie du geste, qui est fortement influencée par les facteurs posturaux, rejoignent les recommandations de la Haute Autorité de Santé. Enfin, s'il n'existe pas directement de résultats concernant l'assistance au PAD des sujets hémiplégiques, des résultats obtenus sur d'autres types de population (population âgée et population saine) témoignent de l'influence positive (ex. réduction des moments articulaires aux genoux) que peut avoir une assistance sur le passage assis-debout. Ainsi, l'influence d'une assistance sur le PAD démontre le potentiel du bienfait que peut avoir une aide adaptée aux difficultés motrices dont souffrent les sujets hémiplégiques. Chapitre 1. Contexte et problématique 62 Chapitre 2 Matériels et Méthodes 2.1 Introduction Au regard du manque d'études sur le passage assis-debout/debout-assis (PAD/PDA) assisté des sujets hémiplégiques, ce deuxième chapitre présente les matériels et les méthodes mis en oeuvre pour étudier ce mouvement. Deux types d'aides ont été choisis pour étudier le PAD et le PDA assisté : ancrage fixe (poignée fixe) et ancrage mobile (poignée posée sur une tablette mobile). Ce chapitre présente uniquement les matériels et méthodes communs aux études des différents types d'aides. La population ayant participé à l'étude du PAD/PDA avec ancrage fixe est différente de celle qui a participé à l'étude du PAD/PDA avec ancrage mobile. Par conséquent, le protocole et la population sont décrits dans les chapitres 3 et 4. Ce chapitre se décompose en trois parties : les matériels utilisés pour l'ensemble des expérimentations, les méthodologies expérimentales et de traitement des données communes aux différentes études, et enfin les variables biomécaniques retenues pour étudier le PAD/PDA. 2.2 Matériels commun Afin de pouvoir enregistrer le mouvement des sujets lors du passage assis-debout et mesurer les efforts appliqués pour effectuer ce mouvement, des systèmes de capture de mouvements (VICON) et des plateformes expérimentales équipées de plateformes de forces ont été utilisés lors des expérimentations. Les expérimentations ont eu lieu sur deux sites : au CHRU de Brest et au LAMIH de l'université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis. Les deux sous-chapitres suivants, décrivent en détail les systèmes de VICON et les plateformes de forces. Chapitre 2. Matériels et Méthodes 2.2.1 Système de capture de mouvements Deux systèmes de capture de mouvements VICON c différents sont utilisés pour les expérimentations de PAD/PDA : - Un système VICON Nexus à Valenciennes. Ce système est muni de 10 caméras cadencées à 100 Hz et de définition 1400×1400 pixels chacune. - Un système VICON Workstation à Brest. Ce système est muni de 9 caméras cadencées à 120 Hz et de définition 1280×1024 pixels pour 7 caméras et 1600x1280 pixels pour les 2 dernières. Les caméras sont disposées autour du dispositif expérimental (Figure 2.1) : deux en avant, deux en arrière et deux à côté et quatre (sur Valenciennes) ou trois (sur Brest) aux coins de la salle selon le lieu de l'expérimentation. Deux caméras vidéo numériques synchronisées complètent ce système de mesure pour rappel visuel des actions réalisées. Elles filment le sujet durant son mouvement de face et de profil. Figure 2.1 – Scène expérimentale au CHRU de Brest et au LAMIH à l'université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis. 2.2.2 Plateformes de forces et plateformes expérimentales Des plateformes de forces (Table 2.1) sont utilisées pour mesurer les efforts appliqués par l'usager pendant le PAD/PDA sur les plateformes expérimentales 1 (au niveau de la poignée et assise et sur le sol) et 2 présentées ci-après. 2.2. Matériels commun Plateforme de force de la poignée (PE1 et Commune(utilisée PE2) à Brest et à Valenciennes) Plateforme de force à l'assise (PE1 et PE2) Type P. Type E.M. Plateforme de force du pied gauche (PE1) Utilisée à Brest Type Type Plateforme de force du pied gauche (PE2) P. Type Plateforme de force du pied droit (PE2) Utilisée à Valenciennes P. Plateforme de force du pied gauche (PE1) Type P. Plateforme de force du pied droit (PE1) 5500 N (Fx,Fy) 21 000 N (Fz) AMTI BP6001200-1000 2224 N (Fx,Fy) P. Plateforme de force du pied droit (PE1) EX 114.45-200 500 N (Fx,Fy) 2000 N (Fz) PX 2000 4480 N (Fz) Sensix 600400 5000 N (Fx,Fy) 1000 N (Fz) AMTI BP400600 1000 2225 N (Fx,Fy) 4450 N (Fz) Kistler 9286BA 2500 N (Fx,Fy) 10 000N (Fz) Table 2.1 – Types et plages de mesures des plateformes de forces. P. : Portées ; E.M. : Etendues de mesures. L'axe z est l'axe perpendiculaire à la surface des plateformes de forces. PE1 : platforme expérimentale 1. PE2 : platforme expérimentale 2. Ces plateformes de forces ont été utilisées pour deux plateformes expérimentales 1 et 2 (figure 2.2)(figure 2.3). La plateforme expérimentale 1 (figure 2.2) permet l'étude du passage assis-debout et debout-assis assisté par une poignée fixe mais réglable. Alors que la plateforme expérimentale 2 (figure 2.3) permet un passage assis-debout et debout-assis assisté par une poignée posée sur une tablette mobile. Ces deux plateformes seront détaillées dans les chapitre 65 Chapitre 2. Matériels et Méthodes 3 et 4 respectivement. Figure 2.2 – Plateforme expérimentale 1 : avec ancrage fixe (poignée fixe, réglable). Figure 2.3 – Plateforme expérimentale 2 : avec ancrage mobile (poignée fixée sur une tablette mobile). commun 2.3 2.3.1 Méthodologie commune Placement des marqueurs rétro-réfléchissants 42 marqueurs réfléchissants sphériques (diamètre d'environ 20mm) (Figure 2.4) ont été apposés en des points anatomiques (Table 2.2) comme recommandé par l'ISB (International Society of Biomechanics) pour les membres inférieurs et supérieurs (Wu et al. (2002) et Wu et al. (2005)) et selon Pradon and Cheze (2003) pour le Vertex de la tête et pour les marqueurs de la cervicale C7, la Thoracique T8, le Xiphoïde et le Manubrium pour le tronc. Ces marqueurs permettent de diviser le corps en 14 segments (Tête, tronc, bras gauche et bras droit, avant-bras gauche et droit, main gauche et main droite, cuisse gauche et cuisse droite, jambe gauche et jambe droite, pied gauche et pied droit). De plus, 12 marqueurs techniques additionnels ont été placés sur les segments corporels correspondant. Les marqueurs techniques servent à reconstruire les marqueurs anatomiques en cas de perte de marqueurs. Figure 2.4 – Placement des marqueurs rétro-réfléchissants. Les marqueurs blancs sont des marqueurs apposés sur des points anatomiques et les marqueurs noirs sont des marqueurs techniques. Les marqueurs techniques (m2, m8, m21, m26, m41, m42, m43, m48, m49, m50, m51, 67 Chapitre 2. Matériels et Méthodes m52) ont été positionnés sur les 12 segments corporels. Les positions anatomiques des 42 autres marqueurs sont listées en Table 2.2. M Position anatomique M Position anatomique m1 Acromion droit m27 Condyle externe gauche m3 Epicondyle latéral droit m28 Condyle interne gauche m4 Epicondyle médial droit m29 Malléole latérale gauche m5 Styloïde radial droit m30 Malléole médiale gauche m6 Styloïde ulnaire droit m31 Métatarse 5 droit m7 Acromion gauche m32 Métatarse 1 droit m9 Epicondyle latéral gauche m33 Métatarse 1 gauche m10 Epicondyle médial gauche m34 Métatarse 5 droit m11 Styloïde radial gauche m35 Talon droit m12 Styloïde ulnaire gauche m36 Talon gauche m13 Manubrium m37 Lombaire L4 m14 Cervicale C7 m38 Vertex m15 Xiphoïde m39 Tempe gauche m16 Thoracique T8 m40 Tempe droit m17 Epine iliaque antérieure droite m44 Métacarpe 2 gauche m18 Epine iliaque antérieure gauche m45 Métacarpe 5 gauche m19 Epine iliaque postérieure droite m46 Métacarpe 5 droit m20 Epine iliaque postérieure gauche m47 Métacarpe 2 droit m22 Condyle externe droit m24 Malléole latéral droite m23 Condyle interne droit m25 Malléole médiale droite Table 2.2 – Liste des marqueurs et leur position anatomique. M : Marqueur 2.3.2 Compensation des pertes de marqueurs et filtrage des données Malgré le soin apporté au positionnement des caméras, des marqueurs peuvent être occultés. La reconstruction des marqueurs perdus est faite après l'enregistrement des acquisitions et après le dépouillement des acquisitions brutes. Elle consiste à remplir le vide créé par la perte des marqueurs, durant quelques instants du mouvement. L'instant auquel la perte a eu lieu influence le choix de la méthode utilisée pour la reconstruction. Lorsque la perte n'a lieu ni au début ni à la fin, mais durant le mouvement, la reconstruction est faite manuellement à l'aide du logiciel Nexus R, par interpolation polynomiale 2.3. Méthodologie commune ou en copiant la partie de la trajectoire perdue d'un autre marqueur voisin appartenant au même segment corporel (si la durée de perte n'est pas courte). Cette méthode de reconstruction ne peut pas être utilisée lorsque la perte du marqueur a lieu au début ou à la fin de l'acquisition. Dans ce cas, la reconstruction est faite à l'aide de Matlab R, en utilisant une acquisition statique debout contenant tous les marqueurs. 2.3.3 Les signaux cinématiques et dynamiques sont filtrés pour éliminer les bruits de mesures. Un filtre passe-bas (Butterworth d'ordre 2) est choisi (Vena et al. (2015) et O Meara and Smith (2006)). Deux passes d'ordre 2 sont réalisées pour éliminer le déphasage. La fréquence de coupure choisie est de 6Hz. Un exemple de deux signaux brut et filtré est présenté en Figure 2.5. Cette figure montre que l'allure du signal porteur n'a pas changé et les bruits mesurés ont été diminués. Chapitre 2. Matériels et Méthodes Figure 2.5 – Force verticale mesurée au pied gauche. Orange : signal brut (non filtré) ; Noir : signal filtré. 2.3.4 Calcul des centres articulaires Le calcul des centres articulaires permet de déterminer les points proximaux et distaux des segments corporels. Pour calculer les centres articulaires des épaules et des hanches, plusieurs méthodes sont possibles : la méthode de circumduction ou celle de Schmidt et al. (1999) pour les épaules, et des équations de régressions spécifiques aux hanches ( Tylkowski et al. (1982), Bell et al. (1989), Davis et al. (1991), Leardini et al. (1999)). L'objectif de la présente thèse étant d'étudier le passage assis-debout des sujets hémiplégiques qui ne peuvent se tenir sur une seule jambe, voire même bouger leur membre paralysé, il est impossible d'adopter la méthode de circumduction. Pour un souci d'homogénéité, la méthode choisie pour calculer les centres articulaires des sujets hémiplégiques a été aussi utilisée pour calculer les centres articulaires des sujets sains. En ce qui concerne les centres articulaires des épaules, ils ont été calculés directement à partir de l'acromion. La position du centre articulaire de l'épaule est considérée à 7cm en dessous de l'acromion (Schmidt et al. (1999)) et cela par rapport à l'axe y (axe longitudinal) du référentiel de l'épaule (Annexe A, Figure A.3). En ce qui concerne les centres articulaires des hanches, la différence de calcul entre les méthodes citées au début du paragraphe (Tylkowski et al. (1982), Bell et al. (1989), Davis et al. (1991), Leardini et al. (1999)) a été étudiée par l'ingénieur de recherche au CHRU de Brest pour un seul sujet en position statique. La différence maximale entre la méthode de Leardini et al. (1999) et les autres méthodes a été 70 mm de plus selon l'axe Y et de 12mm de plus selon l'axe Z de la Figure 2.6. Comme il n'y a pas beaucoup de différence entre les méthodes à disposition, la méthode choisie a été celle de Leardini et al. (1999), (Figure 2.6) : cette méthode utilise les marqueurs externes positionnés sur les points anatomiques pour le calcul. Les équations de régression utilisées pour le calcul des centres articulaires des hanches (Leardini et al. Figure 2.6 – Repère et marqueurs anatomiques du bassin (Leardini et al., 1999) PSISs : les Epines iliaques postérieures ASISs : les Epines iliaques antérieures HJCs : les centres articulaires de la hanche ( no mmé dans ce rapport : OHD - hanche droite et OHG -hanche gauche ) Les centres articulaires des coudes, poignets, genoux et chevilles sont considérés comme étant le milieu des deux marqueurs apposés sur les bords externe et interne de chaque articulation. Par exemple, le centre articulaire du coude est le milieu de l'épicondyle latéral droit (m3) et de l'épicondyle médial droit (m4) (Figure 2.4) 71 Chapitre 2. Matériels et Méthodes 2.3.5 Calcul des repères locaux Les repères locaux liés aux membres inférieurs (cuisses, jambes, pieds) et aux membres supérieurs (bras, avant-bras, mains) sont basés sur les recommandations de l'ISB (Wu et al. (2002), Wu et al. (2005)). Le repère local du bassin est basé sur le repère présenté en Figure 2.6 de Leardini et al. (1999). Ceux des deux épaules sont basés sur les recommandations de « l'International Shoulder Group » (van der Helm and Pronk (1995)). Tous les repères locaux sont des repères orthonormés directs dont : - l'axe Y est l'axe longitudinal du segment, - l'axe X est l'axe sagittal du segment, - l'axe Z est l'axe transversal du segment. Un exemple du calcul du repère local des bras est présenté en Figure 2.7 et en Table 2.3. Les autres repères locaux sont présentés en Annexe A (de la Figure A.1 et Table A.1 à la Figure A.8 et Table A.8). Figure 2.7 – Repères loc che 2.3. Méthodologie commune Origine du repère du bras droit : OBD OBD = (m3 + m 4)/2 Axe longitud inal du bras droit : YBD YBD = OEpD − OBD - A = m4 − m3 Axe antéro-postérieur du bras droit : XBD XBD = A ∧ YBD Axe transversal du bras droit : ZBD ZBD = XBD ∧ YBD Origine du repère du bras gauche : OBG OBG = (m9 + m10 )/2 Axe longitudinal du bras gauche : YBG YBG = OEpG − OBG - A = m10 − m9 Axe antéro-postérieur du bras gauche : XBG XBG = A ∧ YBG Axe transversal du bras gauche : Z BG ZBG = X BG ∧ YBG Table 2.3 – Calcul des repères locaux des bras droit et gauche. 2.3.6 Calcul des angles articulaires Les angles articulaires sont calculés par la méthode d'Euler. Pour calculer les angles α, β et γ qui sont les angles de rotation entre les segments corporels ou entre un segment corporel et le repère global, il est nécessaire de calculer les matrices de rotation d'un segment corporel par rapport à un autre. Les matrices de rotation sont les suivantes : Matrice de rotation de α représentant la rotation autour de l'axe Z de α rad   cos(α) −sin(α) 0   Rz (α) = sin(α) cos(α) 0    0 0 1 (2.4) Matrice de rotation de β représentant la rotation autour de l'axe X de β rad   1 0 0    Rx (β) = 0 cos(β) −sin(β)    0 sin(β) cos(β) (2.5) Matrice de rotation de γ représentant la rotation autour de l'axe Y de γ rad   cos(γ) 0 sin(γ)    Ry (γ) =  0 1 0    −sin(γ) 0 cos(γ) 73 (2.6) Chapitre 2. Matériels et Méthodes Le produit de ces 3 matrices des rotations (Rz (α) × Rx (β) × Ry (γ) ) donne la matrice de rotation entre 2 segments qui permet de passer du segment 2 (s2) au segment 1 (s1).   cos(α)cos(γ) − sin(α)sin(β)sin(γ) −sin(α)cos(β) cos(α)sin(γ) + sin(α)sin(β)cos(γ)  = cos(α)cos(β) sin(α)sin(γ) − cos(α)sin(β)cos(γ)  −sin(α)cos(β) sin(β) cos(β)cos( ) (2.7) Or la matrice de rotation SS12 R entre 2 segments peut être obtenue par l'équation suivante : S1 S2 R   sin(α)cos(γ) + cos(α)sin(β)sin(γ)  S1 S2 R = S01 R × S02 R (2.8) où S01 R est la matrice de rotation entre la base du repère local du segment 1 et la base du repère global associé au laboratoire et S02 R est la matrice de rotation entre la base du repère global associé au laboratoire et la base du repère local du segment 2. L'angle α est calculé en utilisant les éléments de cette matrice SS12 R1,2 = −sin(α)cos ( β) et SS 12 R2,2 = cos(α)cos(β). α= S1 R1,2 arctan(− SS12 ) S2 R2,2 (2.9) γ= S1 R3,1 arctan(− SS21 ) S2 R3,3 (2.10) β = arcsin(SS12 R3,2 ) (2.11) L'angle α est l'angle de flexion/extension et sera celui utilisé dans la présente thèse. 2.3.7 Calcul du centre de gravité corporel Le centre de gravité corporel est le barycentre des centres de gravité segmentaires. Pour calculer le centre de gravité corporel, le corps humain est divisé en 14 segments : la tête, le tronc, les bras gauche et droite, les avant-bras gauche et droit, les mains gauche et droite, les cuisses gauche et droite, les jambes gauche et droite et les pieds gauche et droit. La formule utilisée pour calculer le centre de gravité corporel est la suivante : −→ OG = P i −−→ mi × OGi Mt (2.12) −−→ où mi est la masse du segment i, OGi est la position du centre de gravité du segment i −→ dans le repère global (repère du laboratoire), Mt est la masse du sujet et OG est la position 74 2.3. Méthodologie commune du centre de gravité global dans le repère global. Masse d'un segment i Pour calculer la masse d'un segment, une table anthropométrique a été utilisée. Par absence d'une table anthropométrique adaptée pour des sujets hémiplégiques, la table anthropométrique utilisée est celle de De Leva (1996). Elle se base sur une population de jeunes sportifs et a été retenue également pour le calcul des centres de gravité segmentaires des sujets sains. Malgré que cette table anthropométrique ne soit pas adaptée aux sujets hémiplégiques, elle a été quand même utilisée pour calculer les centres de gravité segmentaires de ces sujets pour deux raisons : - par manque d'une table anthropométrique adaptée aux sujets hémiplégiques - pour utiliser la même table anthropométrique pour les deux populations participant à la même étude. Notons que le découpage corporel correspond à celui de De Leva (1996). Ce qui permet de calculer la masse du segment i à partir des coefficients de masse segmentaire (coefm ) (Table 2.4) en utilisant la formule suivante : mi = coefmi × M t ( 2.13 ) Segments Coefficient de la masse pour les hommes en %(coefm ) Coefficient de la masse pour les femmes en %(coefm ) Tête 6.94 6.68 Tronc 43.46 42.57 Bras 2.71 2.55 Avant-bras 1.62 1.38 Mains 0.61 0.56 Cuisse 14.16 14.78 Jambes 4.33 4.81 Pieds 1.37 1.29 Table 2.4 – Liste des coefficients de la masse segmentaire (De Leva (1996)) Position du centre de gravité du segment i Comme pour la masse segmentaire, le découpage corporel correspondant à celui de De Leva (1996) permet de calculer la position des centres de gravité de chaque segment en utilisant les rayons de girations segmentaires de cet auteur (Table 2.5). 75 Chapitre 2. Matériels et Méthodes Segments Position longitudinale du cdg pour les hommes en %(coefpi ) à partir du point proximal du segment concerné Position du cdg longitudinal pour les femmes en %(coefpi )à partir du point proximal du segment concerné Tête 59.76 58.94 Tronc 51.38 49.64 Bras 57.72 57.54 Avant-bras 45.74 74.74 Mains 79 74.74 Cuisse 40.95 36.12 Jambes 44.59 44.16 Pieds 44.15 40.14 Table 2.5 – Liste des coefficients de la position des centres de gravité segmentaires (De Leva (1996)) La position du centre de gravité segmentaire dans le repère global est calculée par l'équation suivante : − −→ i −−→ OG i = 0 T × O i Gi (2.14) où 0i T est la matrice homogène de passage entre le repère du segment i et le repère global, −−→ Oi Gi est la position du centre de gravité du segment i dans le repère du segment i (Oi est le centre du repère du segment i). La position du centre de gravité du segment i dans le repère du segment i est calcul par l'équation suivante : −−→ → Oi Gi = Li (1 − coefpi )/100)− yi (2.15) → où Li est la longueur du segment i et − yi est l'axe y du segment i . La longueur du segment i est calculée à l'aide des centres articulaires proximaux et distaux sauf pour les segments tronc et tête. 2.3. Méthodologie commune Figure 2.8 – Centres articulaires et points anatomiques utilisés pour le calcul des longueurs segmentaires (Li). OT : Vertex ; Oc : Manubrium ; OEpD : centre articulaire de l'épaule droite ; OB D : centre articulaire du coude droit ; OAvD : centre articulaire du poignet droit ; OM D : Centre articulaire des métacarpes droits ; OHD : centre articulaire de la hanche droite ; OCD : centre articulaire du genou droit ; OJD : centre articulaire de la cheville droite ; OP D : centre articulaire des métatarses droits ; OEpG : centre articulaire de l'épaule gauche ; OBG : centre articulaire du coude gauche ; OAvG : centre articulaire du poignet gauche ; OM G : Centre articulaire des métacarpes gauches ; OHG : centre articulaire de la hanche gauche ; OCG : centre articulaire du genou gauche ; OJG : centre articulaire de la cheville gauche ; OP G : centre articulaire des métatarses gauches.
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De Ubu Bas à L'anomalo bicefalo. Dario Fo et Franca Rame mettent Berlusconi en scène Brigitte Urbani Brigitte Urbani. De Ubu Bas L anomalo . Dario Fo Franca Rame mettent Berlusconi en scène. Chroniques italiennes, Département études italiennes et roumaines, Université Sor , 2011. 063 HAL ubmitted De Ubu Bas à L'anomalo bicefalo. Dario Fo et Franca Rame mettent Berlusconi en scène Brigitte Urbani Préambule Dernière comédie publiée à ce jour1, L'anomalo bicefalo représente sans doute l'aboutissement du chemin parcouru par Dario Fo et Franca Rame depuis le début de leur carrière. Thématiques, jeux de scène, expédients techniques, mais aussi obstacles rencontrés c'est un bouquet (que l'on espère non final) qu'offre aux spectateurs et aux lecteurs fidèles ce magistral duo entre deux acteurs dont le génie inventif, l'audace et la virtuosité ne peuvent que susciter l'admiration. En effet, totalisant cent cinquante ans à eux deux – comme ils se sont plu à le rappeler sur scène au public2 –, ils mettent en oeuvre toute la maturité de leur talent et la force d'un engagement dont la valeur a été internationalement reconnue par l'attribution du prix Nobel en 1997, dans ce « dramma sarcastico » sans pareil. Pour une meilleure appréciation de cette pièce et de celle qui l'a précédée, Ubu RoiUbu Bas, sans doute n'est-il pas inutile de rappeler à grands traits quelles furent les grandes étapes de la carrière du couple. On se rappelle que, parti de sketches satiriques, Dario Fo passe à de courtes pièces lesques, puis à un genre de comédie loufoque qui n'est pas encore à proprement parler politique, mais où sont dénoncées les irrégularités et les complicités de l'Italie d'alors. Les années 1963-1967 sont une nouvelle étape avec passage à la satire historico-politique, et marquent une nette évolution vers un engagement délibéré. En 1968 le couple rompt avec le théâtre bourgeois et le public conservateur, au profit d'un théâtre lié aux luttes ouvrières et étudiantes, dont le but est un véritable programme politique : c'est l'époque de l' "Associazione Nuova Scena", puis celle du collectif "La Comune", au cours desquelles naissent Mistero buffo et Morte accidentale d'un anarchico. 1 terrain »3 puis la montée de Berlusconi au pouvoir donnèrent lieu à ce qui fut appelé, au niveau national et international, « l'anomalie italienne »4, et marquèrent le début de la spectacularisation de la vie politique. Dans ce contexte Dario Fo et Franca Rame ne pouvaient manquer de « descendre sur le terrain » eux aussi. Depuis les années 70 le théâtre de Fo suit deux schémas de base : la « giullarata », composée d'un ou plusieurs monologues (sur le modèle de Mistero buffo ou de Storia della tigre), et la comédie grotesque sur le modèle de Settimo : ruba un po' meno (n°1). Ce sont ces deux mêmes schémas que le couple reprend pour mettre en scène l'actuel "premier". En 2001 Dario Fo et Franca Rame proposent les monologues Il grande bugiardo. L'irresistibile ascesa di un inarrivabile bateleur et Ubu Roi-Ubu Bas ; en 2002 est à l'affiche Da Tangentopoli all'irresistibile ascesa di Ubu Bas ; en 2003, ils passent du monologue à la comédie avec L'anomalo bicefalo. On sait que leurs textes sont par excellence "mobiles", que leurs spectacles depuis toujours sont de constants works in progress dont la publication écrite n'est qu'une étape – plus achevée que les précédentes, certes, mais étape quand même – et qu'ils se modifient au fur et à mesure de la chronique. D'où les titres ci-dessus énumérés, changeants dans leur énoncé mais identiques en substance. C'est pourquoi nous limiterons notre étude aux deux textes émanant de cette série de spectacles qui ont été publiés en 2006 par les éditions Fabbri, accompagnés de DVD enregistrés en 2005 à Milan : Ubu Roi-Ubu Bas et L'anomalo bicefalo5. Il va sans dire depuis les premières versions du monologue (printemps 2001) et de la comédie (2003) sont intervenus des changements qui ont modifié le texte6. Qu'il suffise de dire qu'en mai 2001 l'Italie était à la veille des élections, que Berlusconi n'était pas encore revenu au pouvoir, que le spectacle se plaçait donc dans la ligne d'une campagne anti-berlusconienne. Les représentations qui suivirent se déroulèrent sous Berlusconi, mais quand les deux textes furent publiés, en 2006, le gouvernement venait de changer, comme le déclare avec satisfaction le prologue d'Ubu Roi-Ubu Bas : Qualcuno ha detto che oggi, a metà del 2006, è iniziata una nuova era : quella in cui la speranza che le cose possano cambiare non è più un'utopia. 2 pour cela disposer des versions de l'avant, pendant et après Berlusconi 7. Notre but est de montrer que ces deux spectacles, dans leur état publié, résultent d'un jeu savant de réécritures, et que leur but est de faire un procès non seulement à Berlusconi mais aussi à la population qui l'a porté et maintenu au pouvoir ; nous tenterons enfin de mettere en évidence, dans la dernière pièce, une habile et efficace mise en scène de la censure. Un jeu de réécritures Dans le prologue à Ubu Roi-Ubu Bas, Fo raconte qu'il a retrouvé dans sa bibliothèque une édition de l'Ubu roi d'Alfred Jarry, une pièce écrite à la fin du XIXe siècle par un auteur âgé de moins de vingt ans, un spectacle grotesque dont la relecture l'a stupéfié : Uno spettacolo che se la prendeva con i dittatori e con coloro che spudoratamente mettevano in campo tutti i trucchi della politica pur di conquistare il potere assoluto. Con egual forza l'opera satirica si scagliava contro i « boccaloni », cioè quella gran parte della popolazione che si lasciava blandire dalle promesse più ipocrite, ingoiando ogni fandonia quasi con voluttà. (p. 8) Comme l'indique clairement son titre, la pièce de Fo s'annonce explicitement comme étant une réécriture du texte de Jarry. En effet, une rapide lecture de l'Ubu roi du jeune dramaturge français ne peut manquer de surprendre, tant, à un siècle de distance, les ressemblances avec la situation italienne sont étonnantes8. Par exemple on y lit plusieurs fois qu'Ubu ne veut que s'enrichir. Devenu roi de Pologne, pour plaire au peuple il organise un jeu : une course à qui gagnera une malle remplie d'or (avec un petit cadeau pour chaque participant), et voilà aussitôt le « bon roi » acclamé par la foule (II, 7). Sa première préoccupation est de réformer (dans le sens qui lui est favorable) la justice et les finances (III, 2) : PÈRE UBU : Je vais d'abord réformer la justice, après quoi nous procéderons aux finances. PLUSIEURS MAGISTRATS : Nous nous opposons à tout changement. PÈRE UBU : Merdre. D'abord les magistrats ne seront plus payés MAGISTRATS : Et de quoi vivrons-nous? Nous sommes pauvres. PÈRE UBU : Vous aurez les amendes que vous prononcerez et les biens des condamnés à mort. Son plaisir sera de « décerveler » les gens. À la fin il est contraint de prendre la fuite mais il se réfugie à Paris où il compte bien se faire nommer « Maître des Finances » (V, 4)! Il y avait là une trame à exploiter. Et Fo de nous livrer le récit d'une réécriture qu'il attribue (ou feint d'attribuer) à un célèbre clown, Jean-Jacques Cajou, auteur présumé d'un Ubu Bas ; et de décrire à grands traits la représentation que son homologue français donna de cette pièce parodique sous un chapiteau de cirque. Or parlant de Cajou et de sa reprise clownesque du texte de Jarry9, Dario Fo glisse, en un élégant fondu enchaîné, vers la réécriture berlusconienne que lui-même en propose. Dans Ubu Roi-Ubu Bas – l'adjectif « bas » se réfère à la petite taille du protagoniste – Fo fait le récit de la montée au pouvoir de Silvio Berlusconi sans le nommer, soulignant le 7 L'édition Fabbri d'Ubu Bas mentionne que le spectacle a été représenté pour la première fois en octobre 2002 à Milan, et que le texte publié a été « riveduto e aggiornato il 7 agosto 2006 ». 8 Édition consultée : Alfred Jarry, Ubu roi, in Ubu, Gallimard, coll. Folio, 1978, pp. 27-132. 9 Le clown Cajou, que Fo dit avoir personnellement rencontré dans les années 50 (il avait plus de 60 ans mais exerçait encore avec brio, affirme-t-il), a bien existé. Mais a-t-il ou non monté un Ubu pour le cirque, nous n'avons pas été en mesure de le vérifier. 3 grotesque de cette ascension et les scandales que, paradoxalement, personne n'essaya d'empêcher. L'anomalo bicefalo reprend ces mêmes éléments, mais sous la forme d'une comédie à plusieurs personnages, organisée selon une diégèse joyeusement extravagante. Ce dernier spectacle apparaît donc comme une réécriture aboutie d'Ubu Bas, certains courts passages communs aux deux spectacles participant d'un jeu intertextuel d'une pièce à l'autre10. Jeu de réécritures, L'anomalo l'est d'entrée, dès l'ouverture du premier acte, et Fo nous y a préparés dès le prologue en soulignant, comme il le fait souvent, que sa clef d'écriture est « il grottesco della satira », et en se référant à ceux qu'il a toujours avancés comme étant ses modèles, Aristophane, les jongleurs médiévaux, Molière. Anastasia, l'actrice recrutée pour jouer le rôle de la deuxième épouse de Berlusconi, Veronica Lari, doit d'abord donner une preuve de ses talents et lit un passage de Lisistrata, la célèbre tirade où la protagoniste enjoint les femmes grecques de se refuser à leurs maris tant qu'ils continueront à faire la guerre. Loin d'être une pure et simple traduction du texte d'Aristophane, il s'agit d'une réécriture actualisée du début de la pièce, toute colorée de la situation internationale contemporaine. Car de même que le gouvernement d'Athènes a envoyé des jeunes gens en Sicile pour aider son alliée Agrigente qui occupe Syracuse, l'Italie a envoyé des soldats en Irak pour aider les Américains, le prétexte étant que « quei giovani di Atene non sono là per combattere, ma solo per mantenere la pace, per aiutare gli sconfitti a far nascere democrazia » (p. 11). Mensonges, clame Lisistrata, il y a eu des morts parmi ces soldats de la paix : « L'amore ha bisogno della vita e della pace, la guerra solo della menzogna e della morte » (p. 12). Réécritures aussi, « a tormentone » (utilisons une expression chère à l'auteur), de motifs que le lecteur (ou spectateur) fidèle a plaisir à retrouver d'une pièce à l'autre, et qui scandent efficacement l'engagement de l'auteur dans la dénonciation des scandales. Par exemple, la course entre théâtre et actualité, accompagnée de la remarque selon laquelle les politiques copient le couple Fo-Rame mais ne leur paient pas les droits d'auteur11. 4 viso, cancellano tutti i fermenti della ragione, mentre con la satira, nello sghignazzo, si ride, si spalanca la bocca, ma nello stesso tempo si spalanca anche il cervello e i chiodi della ragione si ficcano in fondo al cranio senza più uscirne. (p. 10) L'idée du cerveau « che si spalanca » est exprimée dès les premières comédies de Fo, à la différence qu'elle concernait alors un personnage et passait par le canal d'une identification du spectateur à ce personnage14 ; une idée réitérée qui exprime la foi en la valeur éducative et civique du théâtre satirique. Au début des années 2000, l'éducation du public présente la même urgence. Depuis 1994 la figure berlusconienne va et vient sur la scène politique, et de manière si ahurissante que pour la raconter le seul genre narratif possible est le conte, la « fiaba ». C'est une réécriture de l'Ubu de Jarry en forme de fable qui est effectuée Fo avec Ubu Bas. Fo se fait jongleur et raconte de manière épique, utilisant le filtre de la prétendue mise en scène de Cajou. En somme un giullare (Fo) raconte le spectacle d'un autre giullare (Cajou) qui lui-même a raconté le spectacle d'un précédent giullare (Jarry) : une double distanciation, en somme, où est répété à maintes reprises que tout cela n'est qu'une « fiaba », une « favola », l'histoire étant trop invraisemblable. « Ubu viveva in uno Stato immaginario » raconte Fo au début (p. 9). Bien vite il est fait « chevalier cavaliere. E, come nelle favole, cavalca, cavalca, finché un giorno viene incastrato » (p. 13). Mais il saura s'en sortir! L'histoire mise en scène dans L'anomalo est encore plus invraisemblable : un Berlusconi bicéphale, à qui on a greffé la moitié du cerveau de Vladimir Poutine et qui soudain devient tout bon, en vertu des lois mathématiques et physiques selon lesquelles deux charges négatives ont pour effet une charge positive!, et où ce n'est plus seulement l'assistance qui s'effare et s'indigne, comme dans Ubu Bas, mais Berlusconi lui-même, à l'écoute de ses propres méfaits! La différence entre les deux spectacles se situe au niveau du moment de prise de conscience du public. 5 À la différence que Berlusconi est un personnage grotesque, non point un clown. Le prologue d'Ubu Bas est centré sur l'ignorance et l'inculture de ce personnage qui traite ses détracteurs de « clown buffoneschi » : une bonne occasion pour Fo de rappeler qui sont/étaient « i clown e con loro i buffoni » : Avvertiamo subito che clown, giullare e buffone fanno parte della medesima categoria. [] Se il nostro ex presidente del Consiglio conoscesse, per esempio, Molière o Shakespeare, saprebbe che i giullari stanno dentro le loro commedie e le loro tragedie come fulcro portante della situazione scenica e sono ancora loro che, attraverso le esibizioni mimate e sproloquianti del grottesco, aiutano lo spettatore a intendere il gioco satirico dell'opera. (p. 8) Dario Fo et Franca Rame font les clowns. Par leurs mises en scène caricaturales, leurs exagérations absurdes, leurs histoires paradoxales, ils soulignent le grotesque, la folie de la situation italienne, un pays de droit, de science et de culture gouverné par le personnage le plus corrompu et ignorant qui soit. Ce faisant, ils adressent un procès au président du Conseil et, à travers lui, à la population italienne. Un triple procès Le premier des procès, qui saute aux yeux dans les deux spectacles, concerne bien entendu le protagoniste : de manière faussement voilée dans Ubu Bas, puis de façon directe dans L'anomalo bicefalo. Dario Fo, en effet, feignant de décrire le clown Cajou et racontant l'étonnante et fabuleuse ascension de l'Ubu Bas dont il jouait le rôle, emprunte les éléments composant le "héros" à la personne et à la carrière du président du Conseil, construisant une image reconnaissable d'entrée et destinée à être de plus en plus ressemblante. Il commence par l'aspect physique, pointant trois détails immédiatement identifiables : le sourire, la taille, les cheveux : Cajou, che era il capocomico della compagnia, sfoggiava un sorriso meraviglioso, costante, veramente accattivante (mostra il sorriso). Ogni tanto questo sorriso gli si bloccava sulla faccia come un ghigno. [] Lo scopo di quel sorriso era parte della sua filosofia : piacere sempre a tutti. Fiducia e simpatia! Ancora, recitava una specie di « complesso » riguardante la sua statura, forse anche morale, per cui si preoccupava di sollevarsi infilando dei rialzi nelle scarpe. Aveva persino inventato delle gomme che si pompavano PIUM, PIUM e levitava (esegue una breve pantomima). Purtroppo, ogni tanto, all'improvviso PIIII si sgonfiavano (mima di scendere di livello). Essendo quasi calvo si era sistemato in capo una specie di moquette. Infatti per pettinarsi usava un piccolo aspirapolvere (ne imita il suono). La moquette era frutto di un trapianto composto da peli e capelli strappati perfino da sotto le ascelle e da altri luoghi più intimi. [] (pp. 9-10) C'est dès qu'il passe à l'évocation du parcours professionnel que du présumé portrait de Cajou on passe au portrait d'Ubu Bas : un début de carrière comme chanteur (« cantava sulle navi accompagnato da un chitarrista napoletano », p. 10) uni à la prodigieuse capacité de vendre tout type de produit (« Da piazzista inimitabile riusciva a vendere ogni genere di merce a chicchessia [] vendeva l'impossibile! p. 10), la coutume de jurer, en particulier sur la tête de ses enfants, la manie de se déclarer semblable à quiconque (« quando incontrava gruppi di lavoratori si rivolgeva loro gridando : "Operai, io sono un operaio come voi!", p. 10) De manière évidente bien que le nom ne soit pas prononcé, ce portrait devient celui de Berlusconi, tant les faits sont "énormes", tels l'acquisition de certaines amitiés qui lui seront utiles, par exemple quand il achète trois radios censées être monopole d'État : Allora, nell'immediato dopoguerra, non c'era ancora la televisione15. [] Ma a questo punto incontra un altro amico []. Questo amico compie un gesto di generosità nei confronti di Ubu : inventa una legge, anzi un decreto fatto apposta per lui, per permettergli di gestire quelle tre radio e usare le antenne dello Stato! (p. 11) puis la multiplication des affaires louches et la corruption afférante, les procès suivis d'amnisties, le titre de « cavaliere », la possibilité de devenir premier ministre avec un casier judiciaire on ne peut plus chargé (alors que pour être « bidello » un casier vierge est indispensable), les quatre-vingt-seize avocats engagés pour le défendre, le non obstacle du conflit d'intérêts, la victoire aux élections – car la population, fascinée, lui accorde sa confiance – une popularité qui ne cesse de croître, la modification des lois à son propre avantage, y compris celle concernant « il falso in bilancio » Ajoutons que la rapidité de l'énoncé – qui réduit l'aventure au statut de fable – offre au spectateur abasourdi un magistral pamphlet. Si, dans le monologue, ces méfaits sont dénoncés par un « giullare » stimulé par la narration d'une aventure aussi invraisemblable, dans L'anomalo le procès s'opère de manière directe par le biais d'un usage original du théâtre dans le théâtre. En effet, dans la comédie, outre les multiples allusions et déclarations bien ciblées qui parsèment le dialogue entre le metteur en scène et l'actrice Anastasia (et qui culminent avec le titre de « premier della Repubblica di Bananas », p. 16), par trois fois sont déclinés les vices, trafics et méfaits de Berlusconi, selon trois techniques différentes très réussies qui, en vertu d'un des principes exposés par Fo lui-même dans les Lezioni di teatro, vont dans le sens de l'épuration. Le premier procès est dirigé par Veronica elle-même qui, chargée par le médecin d'aider son époux à retrouvrer la mémoire, pressée de questions par un Berlusconi amnésique et plein de bons sentiments, fait étalage, tantôt discrètement tantôt avec acrimonie, des griefs qu'elle a contre lui et des méfaits dont il s'est rendu coupable. 7 specie dopo che ci siamo sposati. Balle sulle storie a proposito di altre tue donne Scoperto, giuravi : « Non è vero! Lo giuro sulla testa dei miei figli, delle mogli, di mia madre, di mio padre partigiano in Svizzera » [] Frottole sulle tue gabole finanziarie, maneggi da capogiro con le tue oltre [] 64 società off-shore (pp. 28-29) À partir de là commence la vertigineuse liste des méfaits de l'amnésique : les sociétés anonymes, les fausses déclarations (« Falso in bilancio per 1500 miliardi? », p. 29), le détournement des lois (« come sei arrivato a governare l'Italia per la seconda volta, hai tolto immediatamente il reato di falso in bilancio Ti sei tolto il "tuo" falso in bilancio, caro Silvio Berlusconi! », p. 29), la collusion avec la mafia, la corruption des juges, les fraudes fiscales, l'affiliation à la loge P2, les faux témoignages, l'hypocrisie démontrée avec quiconque, partis politiques et population, etc. etc., avec, pour couronner le tout, une insolente satisfaction jubilatoire (« mi fa una gran rabbia quando ti compiaci dei tuoi maneggi », p. 32). Dario Fo fait ainsi jouer à Veronica, qui vit séparée de son époux dont elle ne supporte plus les fréquentations ni les manèges, le rôle d'avocat accusateur, tandis que l'accusé, qui conserve néanmoins les traits liés à sa nature – les sottes plaisanteries, les ridicules pirouettes justificatrices – est partagé entre émerveillement pour ses propres prouesses et contrition pour tant de méfaits commis. D'où, dans le second acte de la pièce, un deuxième procès sous forme de confession inséré selon un deuxième niveau de théâtre dans le théâtre. Il s'agit du discours aux parlementaires prononcé par Berlusconi repenti et diffusé à la télévision, une confession-autoaccusation qui à la fois est une synthèse et un complément du procès dialogué effectué par Veronica car le pénitent y reconnaît la sottise de bien des déclarations effectuées au niveau international (et donc diffusées, entre autres, par les chaînes de télévision) : Sto parlando a voi, senatori, o meglio, avvocati divenuti senatori, sono io che vi ho costretti a entrare in politica per fabbricarmi nuove leggi che mi salvassero dalla galera. [] voglio ancora ringraziarvi con tutto il cuore per come mi avete difeso anche quando sono andato letteralmente via di testa, quando ho dato dei disturbati mentali ai giudici ; ho detto che tutta la magistratura è un cancro da estirpare ; ho insultato il responsabile socialista tedesco definendolo addirittura un kapò ; ho dichiarato che i musulmani non possiedono cultura, specie quella scientifica, mettendo nei guai l'amico Bush. [] E ancora gaffes, battute infelici su chicchessia. [] (pp. 50-51) D'où, suprême geste d'honnêteté de sa part, l'exigence publiquement affirmée d'un procès qui doit le condamner. Le troisième procès, plus synthétique encore, a lieu quand Silvio est redevenu Berlusconi, à la suite des séances d'électrochoc ordonnées par ceux que la conversion du "premier" mettait en danger – le risque d'une nouvelle opération "Mani pulite" en somme – et dont l'effet, hautement apprécié par le patient, a été l'apparition immédiate d'une foisonnante chevelure. Une militante berlusconienne est chargée d'interviewer le convalescent, lequel, redevenu lui-même et ayant retrouvé la mémoire, se trouve pris de court devant les nouveautés intervenues : ANASTASIA-MILITANTE : [] Signor Presidente, alcuni suoi ministri vogliono sapere se lei è ancora deciso irrevocabilmente a presentarsi domani all'apertura del suo processo. REGISTA-SILVIO : Che processo? ANASTASIA-MILITANTE : Quello sospeso qualche mese fa per la corruzione dei giudici [] E c'è pericolo che saltino anche tutte le altre leggi. REGISTA-SILVIO : Quali altre? 8 ANASTASIA-MILITANTE : La tassa di successione, la cancellazione del falso in bilancio , il rientro di capitali sporchi, il condono edilizio, il condono fiscale spalmadebiti della società di calcio REGISTA-SILVIO : Niente panico! Da domani si bloccano tutte le leggi abbrogate e si ripristinano. ANASTASIA-MILITANTE : Dicono che non si può. (pp. 56-57) D'où, devant une situation qui semble fermée, cette affirmation grotesque : « sciolgo il Parlamento, sciolgo il mio partito, sciolgo la Repubblica e da domani saremo una monarchia! Mi chiamerò Silvio I » (p. 57). Une déclaration effarante qui, dans le cadre d'un autre niveau de théâtre dans le théâtre (l'interview), est effectuée en direct devant les représentants du gouvernement. Ce revirement, qui confirme la maxime selon laquelle Berlusconi dit toujours une chose et son contraire, s'est opéré à la suite de l'intervention médicale pilotée par l'entourage politique du président du Conseil. Avec le procès à Silvio Berlusconi, Dario Fo et Franca Rame font donc aussi un procès à ceux qui lui ont apporté leur aide. Dans Ubu Bas Dario Fo s'amuse à appeler « Ubu » le pays imaginaire où règne le héros et à affubler ses amis du préfixe « Ubu » ou du suffixe « Bu ». D'où, dans le récit de son ascension au pouvoir, l'évocation d'abord de l'ami Ubu-Crax, qui a promulgué « un decreto fatto apposta per lui, per permettergli di gestire quelle tre radio e usare le antenne dello Stato »17 (p. 11), puis, dès qu'Ubu Bas veut se lancer à la conquête du pouvoir politique, la formation d'un parti au nom moderne et sportif, « Alé Bu », conjointement à l'arrivée d'autres amis intéressés, tel le « picciotto Dell'Utri-Bu », et l'alliance avec le parti nordique, le « Norten », dirigé par Ubu-Bos et ses colonnels18 dont Fo s'amuse à imiter le langage, par un nouvel idiolecte de son cru. Dans L'anomalo Veronica, faisant le procès de son époux, fait implicitement celui de tous ceux qui lui ont accordé leur soutien ou ont profité de sa position. C'est en grande partie à cause des « alligators » qui formaient la cour de Silvio qu'elle a quitté Arcore : « Alligatori, tutti acquattati a livello d'acqua, sotterrati in apnea, e come si gettava il cibo, tutti : haaaaam! haaaaam! ad afferrare le prebende proprio come caimani » (p. 33). Dans son discours de confession le "premier" repenti, tout en les remerciant pour leur fidélité, les traite néanmoins de « leccapiedi » (« voi, generosi, non avete mai torto la bocca mai un cenno di dissenso Grazie! Grazie per la vostra più che smaccata piaggeria! », p. 51). Et à la fin de l'histoire, ce sont ces mêmes amis et profiteurs qui veulent le faire opérer à nouveau afin de conserver position et privilèges. Dans chacun des deux spectacles Dario Fo ne ménage pas non plus les partis de gauche – il le fait depuis les années 60 – qu'il accuse de n'être pas intervenus pour bloquer cette ascension. 9 Dans L'anomalo la critique de la gauche à un niveau international est présente dans l'idée même du sujet de la pièce : un Berlusconi avec la moitié du cerveau de Poutine! Poutine présenté comme « il comunista ideale » (p. 12). Le récit de l'antefatto tourne sarcastiquement en dérision les points communs aux deux hommes : outre le fait que Poutine a mis au gouvernement des dirigeants de la mafia russe, lui aussi veut donner l'image du chef d'État jeune et sportif et (comme le confirment, films à l'appui, les sites internet) s'exhibe devant les caméras en train de disputer des matches de judo ou de karaté : d'où le kimonopijama offert à son hôte à son arrivée en Sicile, d'où l'évocation grotesque des deux hommes en kimono quand les terroristes pénètrent de nuit dans la villa. La gauche est raillée dans sa faiblesse et sa versatilité. « L'opposizione [] non reagisce mai per educazione » dit Anastasia (p. 15) ; nombre de communistes sont passés dans le camp opposé, tel Bondi, porte-parole de Berlusconi, « un ex comunista che lui adora », raille Veronica (p. 24), passé de militant comuniste à militant berlusconien ; ou Giuliano Ferrara, que le metteur en scène singe pesamment. Le clou du spectacle a lieu à la fin de l'acte I, quand l'actrice Anastasia, épuisée de devoir feindre ce qu'elle n'est pas et de jouer un rôle qu'elle réprouve, finit par exploser et avouer qu'elle était elle-même communiste avant de devenir militante berlusconienne, puis se venge en déclarant à son tour, comme Fo dans Ubu Bas, que la gauche n'a rien fait contre les conflits d'intérêt pendant les cinq années qu'elle a gouverné. « E alla fine il vostro governo ha lasciato libero Berlusconi di gestirsi tutti gli affari suoi, fregandosene della Costituzione! » (p. 38) lance-t-elle au metteur en scène de gauche, lequel entreprend une grotesque danse du désespoir, piétinant la photo de D'Alema et faisant valser avec lui le D'Alema de caoutchouc qui était auparavant son fétiche. La chanson finale, le « tango del compromesso », d'une part permet à l'auteur de renouer avec ses comédies de jeunesse (où les chansons tenaient une place non négligeable19), d'autre part reprend et stigmatise pour la énième fois le thème du compromis de la gauche avec la droite, dénoncé depuis les tout débuts de la carrière du couple. Avec Anastasia, qui soudain se révèle ex-communiste devenue fanatique de Berlusconi, Fo vise toute une partie de la population qui s'est laissé hypnotiser par le "cavaliere". Dans Ubu Bas, c'est avec de gros rires qu'il synthétise et mime les réactions du bon peuple aux promesses de nouveau miracle économique lancées par le candidat. Si le Président de la République se borne à émettre des « Uhu Uhu », « altra gente al contrario grida : "Lasciatelo provare Se Ubu è riuscito a ottenere tanto successo e tanta fortuna per se stesso, riuscirà a ottenerne anche per il suo Paese, e anche per noi! (Pausa. Gran risata) Che cazzata! »20 (p. 15). D'où le silence atterré du public – un certain pourcentage de de l'assistance est forcément visé – un silence que Fo jongleur est contraint de rompre. Dans L'anomalo, l'attaque au public, selon une habitude21 chère aux auteurs, est encore plus directe. Quand Veronica a débité une bonne liste des méfaits dont Silvio s'est rendu 19 Pensons aux chansons de Gli arcangeli et de Settimo, par exemple (et plus généralement aux comédies des années 60). 20 Andrea Di Michele rappelle ainsi les faits : « Il 26 gennaio 1994 Berlusconi registrò e inviò a tutte le televisioni pubbliche e private un suo "messaggio alla nazione", nel quale esponeva i motivi che lo avevano spinto al grande passo. Si trattava di un video studiato nei minimi dettagli, sulla base di un'accorta strategia comunicativa del tutto inedita nella storia della comunicazione politica dell'Italia repubblicana. Berlusconi appariva seduto nello studio della sua villa di Arcore, in atteggiamento sorridente e disinvolto, con la foto della famiglia alle spalle . Il suo discorso era volto a trasmetterere agli spettatori fiducia e entusiasmo e a chiedere loro il sostegno necessario per un progetto che si prefiggeva di portare al governo "persone con la testa sulle spalle e di esperienza consolidata", guidate da un imprenditore che prometteva gli stessi successi ottenuti nel mondo dell'economia e che invitava gli italiani a "costruire insieme, per noi e per i nostri figli, un nuovo miracolo italiano" ». (op. cit., p. 364). le finale de Settimo, de Isabella, de La colpa è sempre del diavolo, de Morte accidentale 10 coupable, ce dernier s'exclame, stupéfait : « Ma che truffaldo! Dio! Oddio!!! (Ride divertito) E ci sono ancora dei coglioncioni Milioni di coglioncioni che continuano a votare per me! » (p. 31). Plus loin, en conclusion au discours de repentir qu'il adresse aux parlementaires, il lance : « Beato quel popolo che non ha bisogno di eroi ma solo di leccapiedi come il nostro! » (p. 51). Dans Ubu Bas Fo raillait les gens de gauche trop confiants dans les capacités de réflexion de la population, laquelle, selon eux, ne pouvait être influencée par la télévision (« non crederai mica alla favola che con la possibilità di avere tre televisioni e la pubblicità si riesca a influenzare la gente in periodo di elezioni?! Ma chi ci crede?! Ma su da noi la gente ragiona con la propria testa, non con la pubblicità! » [] Che stronzata! », p. 25) et ainsi attaquait férocement cette même population, aussi « décervelée » que celle de l'Ubu Roi de Jarry. Dans L'anomalo c'est Anastasia qui représente la population lobotomisée, comme le démontre de façon éclatante l'éloge qu'elle fait du "premier", tout pétri des clichés que l'on a coutume d'entendre : ANASTASIA : [] Lei si deve vergognare E voi, tutti voi della sinistra dovreste baciare la terra dove Silvio mette i piedi un uomo che ha arricchito l'Italia! [] ANASTASIA : La smetta! Sono berlusconiana! E meno male che c'è un uomo della sua forza, del suo coraggio! (p. 34) Le finale de Ubu Bas clôt dans la dérision le discours sur la situation présente de l'Italie, une dérision d'autant plus amère pour le lecteur d'aujourd'hui que le monologue, publié en 2006, alors que le danger semblait écarté – et que le seul souci était d'en conserver la mémoire – s'avère valable encore de nos jours. une somme énorme en dédommagement d'une phrase qui lui avait déplu, MultiThématiques eut peur d'avoir un procès sur les bras. D'où, en réponse, une fracassante provocation de la part du couple : la diffusion de la pièce sur « Planet », mais privée de la bande son. L'effet fut considérable au niveau international (quarante-cinq journaux en parlèrent, dit Fo, et souvent en première page) ; diffuser une pièce muette signifait dénoncer au monde entier que la censure existait bel et bien en Italie. Le résultat fut une victoire : le spectacle fut proposé une seconde fois, avec sa bande son. La télévision italienne berlusconienne, ses programmes et ses effets sur les téléspectateurs sont critiqués avec virulence dans la pièce. Dans Ubu Bas on a vu Fo ironiser sur les capacités des gens à conserver leur lucidité devant les discours du président du Conseil. Dans L'anomalo il va plus loin puisque le sujet de la pièce est la préparation d'un film de satire antigouvernementale destiné à la télévision. Cette télévision berlusconienne est déclarée "décervelante" par Veronica elle-même qui, répondant aux questions de son époux, affirme énergiquement qu'elle envoie leurs enfants à la « scuola steineriana »23 et leur interdit de regarder le petit écran : « [] questa scuola si preoccupa di non condizionare l'autonomia creativa dei bambini cominciando col liberarli dalla schiavitù della televisione », car même les programmes pour enfants sont « un disastro psichico e perfino morale, per dei bambini! » (p. 42). La suite du dialogue est un bon coup de trique contre le public, agressé par la bouche de Berlusconi lui-même, lequel, après s'être vexé de l'interdiction maternelle, se justifie en insultant les téléspectateurs : ANASTASIA-VERONICA : Scusa, eri tu stesso a commentare : « Io vorrei fare dei programmi più raffinati, colti, davvero spiritosi. Ma se la gente ama solo la schifezza, il rimbecillimento, cosa ci posso fare? » REGISTA-SILVIO : Certo, hai in mente quell'insetto, una specie di cammeo, che vive nel deserto e si ciba solo di escrementi? ANASTASIA-VERONICA : Come no? Lo stercorario! REGISTA-SILVIO : Appunto. Allo stercorario, per vederlo felice, non puoi dargli che merda. (pp. 42-43) D'où des programmes centrés sur des quizz, des films violents ou érotiques, des émissions visant l'émotionnel (telles les retrouvailles avec des êtres "perdus de vue"). Quant à l'information, elle passe par un canal filtrant. 12 D'où d'une part, dans la fiction, une peur chez les acteurs (le metteur en scène n'a trouvé personne pour jouer les différents rôles de la pièce, c'est pourquoi lui-même se charge de tous les rôles masculins ; et si Anastasia a accepté, c'est parce qu'elle est en grandes difficultés financières) qui fait dire au metteur en scène que le théâtre aujourd'hui « va in rovina » (p. 16). Et d'autre part, dans la réalité, une opération de nettoyage des studios de télévision, d'où sont expulsés les acteurs trop hardis ou les journalistes désobéissants : ANASTASIA : [] Adesso che ha in mano tutto il potere i media, sette televisioni le sette piaghe d'Egitto va giù pesante. Ha visto come ha cacciato dalle TV di Stato giornalisti importantissimi, Biagi, Santoro, messo sotto controllo Deaglio Comici : Luttazzi A Sabina Guzzanti e ai coautori della trasmissione, Maltese Travaglio, ha chiesto, attraverso il suo avvocato Previti, la bellezza di venti milioni di euro [] Non va dimenticato Paolo Rossi è stato censurato [] L'ha defenestrato prima ancora che riuscisse a recitare un elogio alla democrazia in Atene scritto da Tucidide25 Tucidide che già come tutti sanno nel V secolo avanti Cristo faceva satira antiberlusconiana! (p. 17) D'où la constatation ironico-amère du metteur en scène : « Di questo passo in televisione non è rimasto più un comico c'è soltanto lui! » (pp. 17-18). Un acteur comique du même niveau que ses télévisions, comme l'illustre l'évocation des blagues qui ne font rire que lui, des tours « gogliardici » lors des rencontres politiques internationales, ou de son hobby de chanteur de charme. ès qu'il se réveille de son opération, sa préoccupation ne va pas à son gouvernement et à ses ministres, mais au festival de San Remo au cours duquel il doit chanter avec Apicella. En somme, avec ce spectacle, Dario Fo et Franca Rame ne se contentent pas de « mettere il re in mutande », ils le laissent « con le chiappettine al vento » (p. 17). D'où l'agressivité de la censure quand la pièce fut jouée pour la première fois ; d'où, suite aux évolutions du texte, une volonté évidente de mettre la censure en scène dans la version publiée en 2006. 13 par le renversement final, l'ensemble est à nouveau mis en abyme et nous ramène au cadre "réel" : le metteur en scène n'était lui-même qu'un acteur, le tournage du film étant piloté par un vrai « regista ». Et donc, en synthèse, nous avons là une pièce garnie de renversements de situations, comme il y en a toujours eu chez Fo ; à la différence que ces renversements, adressés délibérément à l'attention du public, ont une fonction bien plus polémique que dans les pièces précédentes. Tout au long du spectacle court le fil rouge des mots ou des phrases à ne pas prononcer sous peine d'être traîné devant les tribunaux et condamné à de lourdes amendes (on sait que la réputation d'une personnalité s'évalue au chiffre exigé, comme le signale Fo dans le prologue à propos de la plainte déposée par le sénateur Dell'Utri : un million d'euros pour une phrase!). D'où une ostentation de prudence, qui par exemple se glisse malicieusement dans ce passage où le metteur en scène résume l'antefatto à Anastasia : - ANASTASIA : [] dopo'sta tragedia ci ritroviamo il premier massimo con due cervelli uno russo e uno italiano Deve sentirsi un po' confuso mi verrebbe da dire un po' rincogl REGISTA : No, no non lo dica! ANASTASIA : No, non lo dico Allocchito, va bene? (p. 15) Précedemment, quand Anastasia a lu le monologue de Lisistrata, réécrit et adapté à la situation internationale contemporaine, le metteur en scène s'est empressé de dire : « Sia chiaro, il testo che ha recitato è di Aristofane, non mio » (p. 12)28. Autre scène relative à ce qu'il est bon de dire ou de ne pas dire : quand Anastasia et le metteur en scène, pour un mot qui ne se trouvait pas dans le texte mais que l'actrice a inventé sur le moment, sortent soudain de leurs rôles d'acteurs-personnages pour redevenir Dario Fo et Franca Rame, et entament une prise de bec sur le verbe « spuzzolentare ». Utiliser (et donc inventer) un verbe qui n'est pas dans le dictionnaire, est-ce digne d'un prix Nobel? Et Fo de feindre d'attaquer Franca pour ce mot inconvenant qu'elle lui a prêté. Les réactions des "victimes" qui portent plainte sont tournées en ridicule et, conformément à la technique du "ribaltone" chère à Fo, se retournent contre les plaignants. (p. 29)30. De même le public est impliqué lors du "sketch" sur le terme « spuzzolentare ». Enfin quand, profitant d'un changement de scène, Fo explique aux spectateurs (démonstration à l'appui, comme en témoigne le DVD) le "truc" du "nanerottolo", il met en pratique une distanciation qui rend évidente la caricature épique, volontairement « antinaturalistica », du personnage et de la situation. La pièce néanmoins, dans sa succession d'emboîtements, se termine par une victoire – et sans doute peut-on saluer là une des rares comédies de Dario Fo qui "se terminent bien". La victoire finale, en effet, révèle au public que le spectacle joué par le couple est en réalité l'histoire de la création de cette même comédie, une entreprise qui était risquée mais qui a réussi, puisque l'ultime renversement de situation nous apprend que les parties filmées ont été diffusées au niveau international. Les dernières minutes de la pièce mettent concrètement en scène la rage vengeresse qu'éveillent l'information et la dénonciation par la satire des turpitudes et des scandales. Déjà, à la fin du premier acte, alors qu'Anastasia venait de dévoiler ses véritables convictions politiques, elle s'exclamait : « [] volete diffamare, sputtanare il nostro presidente ovunque! E poi piangete se vi censurano! La lingua dovrebbero tagliarvi, la lingua! » (p. 38), reprenant un discours à plusieurs reprises tenu par Fo au sujet des « giullari » médiévaux, à qui on pouvait aller jusqu'à couper la langue pour les faire taire. En fin de spectacle, elle change encore de visage et, de berlusconienne qu'elle s'était déclarée à l'issue de d'acte I, se révèle militante extrémiste, membre actif et agent secret d'une loge maçonique que les auteurs se divertissent à appeler VPLM2 (Volontari Protezione Libertà Milano 2), en écho à la loge P2. Et Fo de nous plonger dans un climat à mi-chemin entre espionnage et science-fiction, métaphorisant par ce biais la violence agressive de la censure. Il y a d'abord la torture par le biais de venimeux insectes, puis le « bûcher sacrificiel » – l'incendie du studio, que le metteur en scène incrédule qualifie de « nuova forma di censura soft » (p. 59)31. Le terme de « rogo » est évidemment choisi pour la référence à l'hérésie qu'il implique : le metteur en scène et auteur-acteur hérétique, coupable d'avoir voulu outrager « l'Unto del Signore benedetto dallo Spirito Santo » (p. 15 la preuve que la résistance peut ne pas être vaine : « Questo ci dimostra che soltanto se ci si muove, se ci si dà da fare, e non si accetta di stare col culo in umido, si riesce ad ottenere un risultato » (p. 8). La diffusion de L'anomalo à la télévision, puis la dernière version de la pièce, une comédie grotesque et invraisemblable – en vertu de la maxime chère à Fo d'une course entre réalité politique et théâtre, une course insensée où le théâtre a du mal à distancer la réalité, tant celle-ci est paradoxale, absurde, folle – est bien la preuve que le théâtre a une fonction civique. Si Dario Fo et Franca Rame n'ont pas gagné la bataille contre Berlusconi et les siens, du moins sont-ils parvenus à « spuzzolentarli »32, et ont-ils au moins gagné – pour leur part – une bataille contre la censure. 32 Et ils continuent à le faire : Dario Fo n'est pas tendre avec le Président du Conseil dans l'une de ses dernières productions, L'apocalisse rimandata (2008). Outre les traits habituels contre Berlusconi et ses transplantations capillaires, ses petites amies pulpeuses ou les multiples procès qu'il a sur le dos, est aussi effectué, de manière très ouverte, un procès à l'Italie, à l'État, à la population. Le livre se termine – comme souvent, nous y sommes habitués – sur une agression délibérée aux lecteurs : « Eh no : è troppo tardi, coglioni! » (Parma, Guanda, coll. Fenici tascabili, 2009, p. 201)..
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UNIVERSITE DE NICE SOPHIA-ANTIPOLIS FACULTE DE MEDECINE DE NICE THESE D'EXERCICE EN MEDECINE Par Leslie ROGEAU Née Crit des Membres du Jury : Mon sieur le Professeur HOFLIGER Philippe Président Monsieur le Professeur STACCINI Pascal Assesseur Monsieur le Docteur DARMON David Directeur Monsieur le Docteur GASPERINI Fabrice Co-directeur 3 Au Professeur HOFFLIGER, Vous me faites l'honneur de présider ce jury. Votre engagement pour notre enseignement est un véritable modèle pour moi. Veuillez recevoir, Monsieur le Professeur l'expression de mon profond respect. Au Professeur STACCINI, Vous me faites l'honneur de faire partie de ce jury. Je vous suis extrêmement reconnaissante pour la réactivité et disponibilité dont vous avez fait preuve à mon égard dès lors que j'ai formulé le souhait de vous voir faire partie de ce jury. Permettez-moi de vous exprimer mon plus grand respect et ma gratitude. Au Docteur DARMON, Un grand merci pour le temps que tu m'as accordé pendant cette longue année de travail, malgré toutes tes responsabilités. Merci de m'avoir transmis ta passion pour la médecine générale. Merci pour ta franchise, ton dynamisme, ta bienveillance et surtout pour ta patience. J'ai gagné en confiance grâce à toi, ce qui n'était pas chose facile. Mille merci David, j'ai beaucoup appris à tes côtés et je t'adresse toute ma gratitude pour cela. Au Docteur GASPERINI, Merci d'avoir accepté de co diriger cette thèse avec David. Je tenais réellement à ta présence au sein de ce jury. Merci pour la vision que tu m'as transmise de la médecine générale. Merci de m'avoir fait confiance pour débuter en tant que remplaçante au sein dans ton cabinet. J'ai beaucoup appris à tes côtés, sois rassurée de ma plus grande reconnaissance. 6 Aux médecins que j'ai remplacés : Merci à David, Fabrice, Maud, Denis, Jean Christophe, Stéphanie, Sophie de m'avoir fait confiance pour vous remplacer. Aux secrétaires et aux autres : Marie Renée, merci pour ta bienveillance lors de mon passage à Antibes . J'ai vite appris grâce à to i. Karin e TOUSSIN, la meilleure secr étaire de tout Roquefort les Pins , qu'aurais je fais sans toi merci pour ta disponibilité. A mes voisins : A Maryke et Guy, vous me fait es l'honneur de venir ce soir. Merci à vous deux pour votre bienveillance et v otre bonne hum eur. Un très bon anniversaire à toi Guy. On a de la chance de vous avoir . Aux filles de la peskett team, mes plus belles rencontres : A Mathilde, merci pour ton soutien, ta bonne humeur et ta folie. J'ai passé les meilleurs moments de ma vie d'é tudiant e à tes côtés. Tu as toujours su être là quand il le fallait. Reviens vite dans le sud avec ton super Jules. A Margaux, la reine du style. Merci pour ton soutien . Je suis fière de te compter parmi mes amies les plus proches. Reviens vite toi aussi, tu me manques tellement (et je t'emmènerai voir les tortues de Florides!) A Johanna, merci d'être restée sur Nice . Merci de me faire sortir de chez moi pour discuter de tout et de rien au Café Paulette. Je suis tellement contente que tu aies enfin trouvé ta voie, tu le mérites. Je suis ravie que tu aies rencontré Claude Éric. A la peskett team : Peskett, au leader de l'équipe, que de bons moments passés ensemble. Merci pour ta lég endaire bonne humeur. Et quel couple incroyable vous formez toi et Manu . Pierre, mon pitou, et dire qu'au début je me suis dit « c'est qui ce geek? » maintenant tu es le number one!! Quel dommage que tu sois parti si loin Xavier, monsieur Jack Daniels, tu as enfin trouvé ta Roxy girl, la belle Gwendoline. Quel beau mariage vous avez fait et quel EVJF incroyable. Clément, merci pour ton écoute, tes conseils, nos fous rires. Que de bons moments passés ensemble. On est presque cousins maintenant! Loïc, à toi lolo, dommage que tu ne sois pas là mais ce n'est que partie remise. Prends soin de ta jolie Sabou. Alexis, que de bons moments passés ensemble. Aux autres : Tiara, mille merci pour ton écoute, ton soutien, tes conseils, pour toutes nos soirée passées ensemble, toujours plus folles et improbables. A nos discussions interminables dans ma voiture, et à nos goûts musicaux étranges de fin de soirée (« J'ai compris tous les mots, j'ai bien compris merci »). Merci d'avoir toujours eu les mots pour me remonter le moral. Tiara, tu es une femme exceptionnelle. Lulu et Carl, merci à vous deux, pour votre bienveillance. Merci à toi lulu, pour ton écoute, ta patience et tes conseils. Merci à toi Carl pour tes conseils « thèse », tu m'as beaucoup aidée. Merci pour tout ce 7 que tu apportes à Éric. Merci pour votre générosité. Vous représentez beaucoup à mes yeux. Bisous à vous et à votre magnifique Émilie. Bianca et Chichou, merci pour votre éternelle bienveillance, douceur et gentillesse. Vous êtes une de mes plus belles rencontres. Camille et Benjamin, avec vous on ne s'ennuie jamais! A toutes ces supers soirées passées ensemble! Merci d'être là tous les deux ce soir. Christine et Stéphane, vous êtes la preuve que l'on peut rester « jeunes et fous » avec des enfants tout en étant de supers parents! Vous êtes incroyables. Merci pour tous ces bons moments passés ensemble. Julie Benard, à ma co pilote de D4, qu'aurais je fais sans toi? Merci pour tout ce que tu m'as apporté à cette époque. Quelle belle petite famille vous faites avec Faf et Louise. Perrine, tu me manques tellement reviens vite d'Australie. Cela fait maintenant 18 belles années que l'on se connait, je t 'aime ma Petouche. Martin, merci pour ton écoute, ton soutien, ton humour (particulier). Je ne m'ennuie jamais quand tu es là. Merci d'être là ce soir. Justine, merci d'être venue nous rassurer ce 13 avril 2016. Merci de supporter avec moi le caractère de cochon d'Éric Audrey, à notre soirée thèse conjointe. Ravie de passer ce moment à tes cotés avec tous nos amis. Bisous à toi et Gauthier. Julie Auda, merci d'être là ce soir. A nous deux qui avons surpris tout le monde. Quel parcours! On aura quand même bien profité. Édouard, doudou! Merci pour ton éternelle bonne humeur. Une belle trouvaille pour notre peskett team. Bérengère, Laëtitia, Carole, Henri, Hervé et Victor, merci pour votre présence aujourd'hui. 8 A mes parents : Enfin votre première thèse de médecine, il en aura fallu du temps, mais mieux vaut tard que jamais. Merci à toi Maman, qui a toujours été à mes côtés quels que soit les moments. Tu es un véritable exemple, et ce depuis toute petite. Ma super maman, ma confidente, ma meilleure amie Je t'aime. Merci à toi papa, d'avoir réussi à supporter quatre femmes à la maison. Merci pour ta sérénité, ta patience, ta force sur humaine, ton esprit affuté et pour tes blagues (merci « rires et chansons ») je t'aime. A mes soeurs Merci à toi ma grande soeur, pour ton GRAND coeur, tu as toujours été d'un précieux soutien, une oreille attentive. Un modèle, tout simplement. Merci d'avoir égayé ma vie d'étudiante lors de nos collocations. J'admire ton parcours, je suis si fière d'être ta soeur. Je t'aime ma Dodie chou « poussière d'étoile »! Merci à ma petite soeur, la tornade! Je suis tellement fière de toi, je te souhaite une vie professionnelle à la hauteur des efforts que tu as fournis tout au long de tes études Merci pour cette super colloc' de D4 et à cette phrase mythique « je le vois même dans le reflet de la table ». Je t'aime Mathou. A toutes nos soirées passées et futures entre soeurs (« Les Rogeau sont de sortie »). Quel bonheur d'être trois! A la famille ACQUILINA : Brigitte, André, Fabrice, Diego, Gabin, Aurore, Olivier, Ninon, Colline, Marion, Jérôme et Romane. A mes beaux-parents : Christine, ma maman de coeur. Merci pour ta gentillesse, tes conseils avisés et pour nos discussions. François, merci pour votre bienveillance, merci d'avoir modifié la date de votre vol pour pouvoir être là ce soir. Merci à vous deux de m'avoir accueillie à bras ouverts dans votre famille, quelle fierté d'en faire partie! A mes beaux-frères et aux autres : Antho, dès les premiers instants j'ai su que je n'allais pas m'ennuyer avec toi. Sacha va apprendre beaucoup de choses avec toi (pas que des bonnes choses cela dit), sacré tonton « Foufou ». J'admire ta force. Jérém, à nos batailles de « gestes », même si je gagne toujours. Merci d'avoir accepté d'être le parrain de Sacha. Merci de m'avoir amené une copine, Olivia est super(be). Joss, merci de rendre heureuse ma grande soeur. 9 Aux amours de ma vie : A Sacha, mon bébé, ma crevette, mon Sachachou, mon amour d'amour. Merci d'avoir donné un sens à ma vie . Merci de nous donner autant d'amour . Tu as ensoleillé nos vies depuis que tu es là . J 'espère que tu seras fière de moi ce soir . J'ai fait ce travail avec ta photo en face de moi , ce qui m 'a permis de garder le moral pendant toute cette dure et longue année. Je t 'aime mon Sachou. A Éric, le meilleur pour la fin. Enfin, nous y voilà, le grand jour de ma soutenance est arrivé. Merci d'avoir pris autant de temps pour corriger ma thèse. Je ne te remercierai jamais assez pour les mots que tu m'as dit lors de ta première lecture. Sache que si j'ai mis autant de rigueur pour cette thèse c'est pour que tu sois fière de moi. C'est si important à mes yeux Bientôt 4 ans que nos regards se sont croisés et depuis, l'amour de notre vie est né, notre plus grande fierté. Nous avons traversé de nombreuses épreuves ces dernières années, mais malgré les difficultés, nous ne nous sommes jamais quittés, nous avons su surmonter tout ça ensemble. « Sur la musique on va on vient, on s'éloigne et on revient, puis tu t'élances et je te tiens, je te retiens du bout des doigts pour te ramener contre moi » Merci pour ta folie des grandeurs, ta sensibilité, ton grand coeur, ton amour (même si tu le montres à ta façon), et à l'importance que tu accordes à la famille. Merci pour tes traductions de chansons (« je suis une crêpe »), pour tes regards et ton sourire (quand tu t'empêches de rire à mes bêtises). Merci d'être ce papa formidable que tu es devenu au fil des jours. J'ai hâte de continuer cette aventure que représente la vie avec toi, hâte d'aboutir tous nos projets présents et à venir. J'aurai tellement de choses à te dire mais ce qui est sûr c'est que, « je sais bien que je l'ai trop dit mais je te le dis quand même je t'aime » « Rire souvent et beaucoup, mériter le respect des gens intelligents et l'affection des enfants, gagner l'estime des critiques honnêtes et endurer les trahisons de ceux qui ne sont pas de vrais amis, apprécier la beauté, trouver ce qu'il y'a de mieux dans les autres, laisser derrière soi un monde un peu meilleur, par un bel enfant, un jardin fleuri, ou une condition sociale moins dure, savoir qu'une vie seulement a respiré plus facilement grâce à vous, voilà ce qu'est la réussite » Frédéric Lenoir Table mat Résumé : 13 Abstract 14 TABLE DES ABREVIATIONS : 15 Table des tableaux et figures 16 INTRODUCTION : 17 METHODE : 19 Critères d'inclusion et d'exclusion 19 Sources d'informations et stratégie de recherche 21 Sélection des études 22 Extraction des données 23 Évaluation de la qualité des études 23 RESULTATS 24 Sélection des études 24 Caractéristiques des études retenues 26 La demande de visite à domicile 26 3.3.1 Différents moyens pour demander une visite à domicile 26 3.3.2 La régulation des appels 31 3.3.3 Les motifs de demande d'une visite à domicile 34 3.3.4 Alternatives aux visites à domicile 43 La visite à domicile après acceptation 46 3.4.1 Organisation : 46 3.4.2 Moyens et matériels utiles au bon déroulement d'une visite à domicile 47 Coordination des soins 52 Continuité des soins 57 3.6.1 Permanence des soins 57 Évaluation méthodologique 63 DISCUSSION 67 CONCLUSION 82 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 83 ANNEXES 101 Annexe 1 : Prise en charge financière de la visite à domicile 101 Annexe 2 : Grille d'extraction des données 103 Annexe 3: Cochrane Collaboration's tool for assessing risk of bias 104 Annexe 4: Revised Assessment Of Multiple Systematic Reviews (R-AMSTAR) 106 Annexe 5 : Niveau de preuve des recommandation selon l'HAS 108 Annexe 6 : Articles exclus 109 Annexe 7 : Caractéristiques des études incluses 110 Annexe 8 : Synthèse des recommandations européennes et anglophones : 139 Annexe 9 : Évaluation méthodologique des Revues Systématique et des Méta-analyses selon la grille R-AMSTAR. 156 Annexe 10 : Risque de biais des études contrôlées randomisées selon Cochrane Collaboration's tool 159 Annexe 11 : Ligne directives des visites à domicile d'après le South Staffordshire Local Medical Commitee, General practitioners visiting guidelines 170 Annexe 12: Accord de Bon Usage des Soins (AcBUS) : 171 11 Annexe 13 : Modèle d'ordonnance d'une prescription médicamenteuse par téléphone dans le cadre de la régulation médicale 172 Annexe 14 : Listing des médicaments : trousse d'urgence 173 Annexe 15 : Domaines fondamentaux pour l'évaluation initiale des soins à domicile d'après l'American Medical Association, disponible dans le « Medical Management of the Home Care Patient » 181 Annexe 16 : Évaluation méthodologique détaillée 182 12 Résumé : Introduction En 2001, la France, était le pays européen qui réalisait le plus de visites à domicile (VAD). Une diminution de 20% des VAD en France entre 2002 et 2003 s'est produite par le bais d'une revalorisation tarifaire des VAD des médecins généralistes (MG) obtenue en contrepartie d'un engagement de ces derniers d'en réduire leur nombre. La VAD est un acte ressenti comme chronophage et peu rentable pour le MG alors qu'elle peut constituer un complément précieux et enrichissant aux informations recueillies au cabinet médical. Objectifs Identifier les éléments du processus de visite à domicile, ainsi que leurs alternatives, afin d'améliorer la qualité des soins aux patients. Les objectifs secondaires étaient : la proposition de critères qualités d'une VAD pour améliorer l'organisation des soins et de proposer un référentiel concernant la qualité des soins dans le cadre des visites à domicile. Méthode Revue de la littérature selon la méthode PRISMA en interrogeant 2 bases de données (Medline, Cochrane) sans limite temporelle jusqu'à octobre 2017 . L'examen des références des articles inclus et de la littérature grises a été fait manuellement, ainsi que la recherche dans les bases institutionnelles européennes et anglo-saxonnes. Résultats 37 documents ont été identifiés. Les essais contrôlés randomisés étaient majoritaires (n= 12), suivis des revues systématiques de la littérature (n= 11), des recommandations (n= 8), des études observationnelles (n=4), et des enquêtes postales transversales (n=2). La consultation téléphonique et le triage des appels par des IDE, réduisaient le nombre de VAD du MG de 39% (p<0,001) contribuant à une augmentation de leur pertinence. Abstract Background In 2001, France was the largest consumer of physician-conducted home visits in Europe. Between 2002 and 2003, France witnessed a reduction of 20% of physicians home visits. GP committed to reduce the number of their home visits in return of a fee increase. Home visit can offer a valuable supplement to the informations collected at the medical office. Nonetheless, physicians consider it as a time consuming and a low-profitable care. Objective To identify the elements that improve the quality of healthcare delivered by the GPs in home visits, and their alternatives.The secondary objectives are: propose home visit's quality criteria to improve home health care management and to propose a quality framework for home care visits. Methods Literature review using the PRISMA method by querying 2 databases (Medline, Cochrane) with no time limit until October 2017. References of the included articles and of the grey literature were examined manually. The European and anglo-saxon institutional databases were handsearched. Results 37 documents were identified. The majority were randomized controller (n= 12), followed by systematic reviews (n= 11), expert guidelines (n= 8), observational studies (n= 4), cross-sectional mail surveys (n= 2). Telephone counselling and nurse triage reduced the number of GP visits by 39% (p<0.001). Home follow-up for people over 65 years of age after a hospitalization by a general practitioner and/or a nurse led to a decrease in admissions to retirement homes (p<0.05) and decrease in the number of rehospitalizations (p= 0.03, RRR 23%). Seniors refusing "preventive" home visits had a higher mortality and admission rate to retirement homes ((RR= 1,5 (IC 95%= 1,3-1,7, p<0,0001)). Telemonitoring is an alternative to home visiting, reducing mortality from all causes (RR 0.66, 95% CI (0.54 - 0.81) p<0.0001)). Telemonitoring (p = 0.008) and telephone support (p <0.0001), reduce the rate of hospitalization for chronic heart failure. Systematic visits after hospital discharges did not significatly improve the patients quality of life, neither influenced the use of emergency services and/or hospitalizations. Conclusion We have identified different criteria to improve the quality of home visits. Those allowing to reduce the workload of the general practitioner, such as the use of online appointment services, the telephone triage delegated to a trained nurse under medical supervision. Communicating effectively the reason behind home visits demands allows the GP to optimize his activity. TABLE DES ABREVIATIONS : AcBUS : Accord de Bon Usage des Soins AMA : American Medical Association AMU : Aide Médicale U rgence A SIP san té : Agence des Systèmes d'information partagés de Santé AVC : Accident Vasculaire Cérébral BPCO : Broncho Pneumopathie Chronique Obstructive CNAM : Caisse Nationale d 'Assurance Maladie CN GE : Collège National de Généralistes Enseignant CODAMUPS-TS : Comité départemental de l'aide médicale urgente , de la permanence des soins et des transports sanitaires ECR : Essai Contrôlé Random isé EPOC : Cochrane Effective Practice and Organisation of Care Review Group HAS : Haute Autorité de Santé ICC : Insuffisance Cardiaque Chronique IDE : Infirmière diplômée d'État IGA : Inspection Générale de l'Administration IGAS : Inspection G énérale des Affaires Sociales MG : Médecin généraliste MT : Médecin traitant NGAP : Nomenclature Générale des Actes Professionnels NHS : National Health Service PDS : Permanence de soins PVD : Programme de visite à domicile RACGP: The Royal Australian College of General Practioners RBP: Re commandation de Bonne Pratique RRR: Réduction du Risque Relatif SAMU: Service d 'A ide Médicale Urgente SFMG : Société Français e Médecine Générale SIGLE: System for Information on Grey Literature SMUR: Service Médicale d'Urgence Régionale TCAM : Taux d'accroissement annu el moyen VAD : Visite à domicile 15 Table des tableaux et figures Figure 1: Diagramme de flux de l'inclusion pour l'analyse 25 Figure 2: Sample house call checklist (« INHOMESS » Impairments / Immobility, Nutrition) The home visit. Am Fam Physician. 1990 51 Figure 3: Système de coordination d'appui mis en place par le réseau ARESPA 56 Tableau 1: Critères d'inclusion et d'exclusion des articles 20 Tableau 2: Équation de recherche bibliographique 21 au3: Bases institutionnelles européennes et anglo-saxonnes 22 Tableau 4: Comparaison des différents types de systèmes de prise de rendez-vous selon Knight A. et Lembke T. 30 Tableau 5: Principaux motifs de VAD selon Cauthen et Scanameo ; J Fam Pract 1981, Geriatrics 1995 37 Tableau 6 : Suggestion d'équipement nécessaire pour une VAD selon l'American Family Physician 48 Tableau 7: Grille "EVALADOM" 49 Tableau 8: « Elements of a home assessment » d' après l'American Medical Association Home Care Advisory Panel. Guidelines for the medical management of the home care patient . Arch Fam Med 1993 50 Tableau 9: Régulation de la demande de soins non programmés en Europe. « Revue française des affaires sociales ». Pourtant, le MG exerçant en libéral est le professionnel de santé qui se déplace le plus au domicile des patients. En France, 93% des visites sont effectuées par des MG en 2010 (2). Les informations recueillies lors d'une visite à domicile complètent celles recueillies lors d'une consultation au cabinet, concernant le contexte socio-économique, religieux et familial (5). Les VAD permettent de fournir des soins de santé de base, et préviennent le déclin fonctionnel des patients physiquement ou mentalement fragiles confinés au domicile (6). Le médecin peut réaliser une évaluation gériatrique multidimensionnelle personnelle (diagnostic domiciliaire) et familiale (7)(8). On retrouve également des bienfaits d'ordres relationnels (9) avec le renforcement de la relation malade/médecin. Ainsi, il existe une réelle ambivalence entre l'utilité des VAD et la perte de temps occasionnée pour le MG. L'objectif de ce travail de recherche était d'identifier les éléments du processus de visite à domicile ainsi que leurs alternatives, afin d'améliorer la qualité des soins aux patients : Les objectifs secondaires étaient : - La proposition de critères qualités d'une VAD pour améliorer l'organisation des soins. - Proposer un référentiel concernant la qualité des soins dans le cadre des visites à domicile. 17 Graphique 1: Évolution des visites de généralistes libéraux en taux d'accroissement annuel moyen (TCAM) 18 METHODE : Nous avons conduit une revue systématique de la littérature selon les recommandations internationales du groupe PRISMA (Preferred Reporting Item for Systematic reviews and MetaAnalysis) (10)(11). Critères d'inclusion et d'exclusion Nous avons inclus les articles selon les critères suivants (tableau 1) : Les articles dont l'objectif principal était centré sur la réalisation d'une visite à domicile par le MG avec ou sans la collaboration d'une infirmière diplômée d'état (IDE). Les articles devaient traiter d'une des étapes du déroulement d'une VAD, c'est à dire de la demande initiale, et/ou du déroulement de la visite au domicile après acceptation, et/ou du suivi avec la continuité et la coordination des soins. Les études devaient traiter des visites réalisées pendant et/ou en dehors des heures d'ouvertures normales des cabinets médicaux. Les études traitant des alternatives aux VAD ont été incluses. Nous avons étudié une population sans retenir de limite d'âge. Seuls les articles en français et en anglais ont été inclus. Les études éligibles étaient les méta-analyses, les revues systématiques, les recommandations des sociétés savantes, les essais contrôlés randomisés (ECR), les études observationnelles ainsi que les revues narratives. Ont été exclus, les études portant sur les VAD réalisées par d'autres professionnels de la santé (IDE, ergothérapeute, kinésithérapeute, médecin spécialiste), ainsi que les études ne traitant pas des visites à domicile. Toute publication parue avant la date de début de d'étude, répondant à ces critères a été étudiée (octobre 2017). 19 Critères d'inclusion - Articles traitant des visites à domicile réalisées - par le médecin généraliste - à domicile Études portant sur les critères à prendre en compte lors de la demande de VAD - Études ne traitant pas des visites - Études réalisées par d'autres professionnels de santé Études sur le déroulement d'une visite à domicile lorsque le médecin est arrivé sur les lieux - Études portant sur la continuité et la coordination des soins au décours d'une VAD - Études portant sur des visites à domicile réalisées pendant et en dehors des heures d'ouvertures du cabinet - Études portant sur les alternatives aux VAD - Objectifs en lien avec l'ensemble du déroulement d'une visite à domicile - Population : de tout âge - Langue : français, anglais - Période : toute publication parue avant le début de l'étude (octobre 2017) - Type d'étude : Méta-analyses, revues systématiques, essais contrôlés randomisés études observationnelle, recommandations des sociétés savantes et institutions, revue narrativ e. Tableau 1: Critères d'inclusion et d'exclusion des articles 20 Sources d'informations et stratégie de recherche Nous avons recherché les articles en langue anglaise et française dans les bases de données documentaires MEDLINE via Pub Med et la COCHRANE database. Le tableau 2 présente les équations de recherche utilisées associant les concepts de visite à domicile associés aux termes « médecin de famille » ou « médecine générale » ou « médecin généraliste ». Nous avons ciblé les revues de la littérature et les essais. D'autre part, nous avons fait une recherche manuelle au sein des références bibliographiques des études incluses et au sein de la littérature grise. Des ressources supplémentaires ont été étudiées à la recherche d'articles pertinent : Google, Google scholar, ainsi que dans les bases institutionnelles européennes et anglo-saxonnes (tableau 3). (((((« community PubMed medicine"[MH] "gatekeeping"[MH] OR practice"[MH] "physicians, OR OR "general "physicians, family"[MH] practitioners"[MH] primary care"[MH]))) OR OR "general OR ("general practice"[MH] OR ("general practice"[TW] OR "practice, general"[TW] OR "family doctor "[TW] OR "primary care practitioner "[TW] OR "family doctor"[TW] OR "primary care physician"[TW] OR "GP/FM"[TW] OR "general practitioner"[TW])))) AND (("house calls"[MH] OR ("house calls"[TW] OR "home visits"[TW] OR "call, house"[TW] OR "home visit"[TW] OR "visit, home"[TW] OR "visits, home"[TW] OR "calls, house"[TW] OR "house call"[TW]))) Sort by: Relevance Filters: Guideline ; Review; Clinical Trial; English; French MeSH descriptor : Home visit Tableau 2: quation de recherche bibliographique Bases institutionnelles européennes  Haute Autorité de Santé (HAS) Bases institutionnelles anglo-saxonnes - États-Unis d'Amérique :  Collège National des Généralistes  American Family Physician Enseignants (CNGE)  American Medical Association  Société Française Médecine Générale  American Academy of home care Physicians (SFMG)  WONCA EUROPE - Canada :  The College of Family Physicians of Canada (CFPC)  Ontario College of Family Physicians - Royaume-Uni :  National Health Service (NHS)  Drug and Therapeutics Bulletin  Graham Road Surgery  South Staffordshire Local Medical Committee  Australie : Royal Australian College of General Practitioners (RACGP) Tableau3: Bases institutionnelles européennes et anglo-saxonnes Sélection des études La sélection des études était effectuée par un seul opérateur (RL), l'auteur de la revue. En cas de doute, un second opérateur était consulté (DD). En cas de divergence, consensus était recherché. En l'absence d'un tel consensus, un troisième opérateur (GF) pouvait être sollicité pour arbitrer et trancher. Le processus de sélection des articles était réalisé en trois étapes : - Analyse du titre et du résumé de l'article. - Analyse par lecture du corps des articles - Recherche manuelle pertinente des références bibliographiques de chaque article retenu. A chaque étape, les doublons étaient exclus ainsi que les études ne répondant pas aux critères d'inclusions et d'exclusions, conformément aux critères préalablement définis dans le tableau 1. 22 Extraction des données L'extraction des données était faite selon un formulaire préétabli (annexe 2). Elle était effectuée par l'auteur de la revue (RL) puis soumise à une vérification par un deuxième lecteur (DD). Les données recherchées concernaient : le nom de l'auteur principal, l'année de publication, le pays, la population étudiée, l'objectif étudié, le type de l'étude, les principaux résultats (effets des VAD sur la qualité des soins et leurs alternatives) et leurs significativités. Évaluation de la qualité des études Les essais randomisés contrôlés étaient évalués par le Cohrane Risk of Bias Tool for randomized controlled trials (12)(annexe 3). Cet outil analyse la sélection, évalue le respect de l'aveugle et les biais liés à la mesure des résultats et permet de classifier les essais en 3 catégories, à faible risque de biais, à risque incertain et à risque élevé. La qualité méthodologique des revues systématiques et des métaanalyses était évaluée à l'aide de la grille R-AMSTAR (13)(annexe 4). Si la revue n'intégrait pas la qualité de ses études dans la formulation de sa conclusion ou si l'évaluation de leurs méthodes était jugée insuffisante, les références étaient analysées à la recherche de l'article au plus haut niveau de preuve. La gradation des recommandations (A, B, C ou Accord d'Experts (AE)) était fondée sur le niveau de preuve des études venant à l'appui des recommandations, selon la HAS (annexe 5). 23 RESULTATS Sélection des études Les équations de recherche nous ont permis d'identifier 189 articles, 122 articles sur Medline et 67 sur Cochrane (figure 1). Nous avons retenu 18 études sur MEDLINE ainsi que 6 revues de la littérature sur la base de données Cochrane. La recherche manuelle au sein des références bibliographiques des études incluses et au sein de la littérature grise, a permis d'inclure 7 études pertinentes. La recherche au sein des 14 bases institutionnelles européennes et anglo-saxonnes (tableau 3) a permis d'inclure 6 recommandations de bonnes pratiques (RBP). Trente-sept documents ont été finalement inclus pour l'analyse qualitative. Dans la base de données MEDLINE, 104 études ont été exclues pour les raisons suivantes (annexe 6) : 3 doublons, 41 études ne traitaient pas des visites à domicile, 32 études concernaient la réalisation de visites à domicile par d'autres professionnels de santé (sages-femmes, pharmaciens, éducateurs thérapeutiques, ergothérapeutes), 19 études étaient introuvables ou sans abstract disponible et 9 études étaient des interventions complexes. Sur la base de données Cochrane, 61 revues systématiques ont été exclues pour les raisons suivantes : 39 revues ne traitaient pas des visites à domicile ; 15 abordaient les visites à domicile par d'autres professionnels de santé ; 2 revues ont été retirées de la base de données Cochrane pour des erreurs de publication ; 2 revues traitaient du virage ambulatoire, et 3 revues concernaient des interventions complexes. 24 IDENTIFICATION SELECTION INCLUSION ELIGIBILITE Medline N= 122 Cochrane N= 67 Exclusion : 3 doublons a Articles sélectionnés pour la lecture du titre et du résumé : N= 186 Articles éligibles pour lecture intégrale et pour l'analyse des références : N= 18 (MEDLINE) ; N= 6 (Cohrane) Exclusion: Medline : N= 101 ; Cohrane N= 61 :  80 Études ne traitaient pas des VAD  47 Études sur VAD réalisées par d'autres professionnels de santé ou collaboration  19 sans abstract et/ou non accessible  12 Interventions complexes  2 retraits de publication (erreur)  2 Virage ambulatoire Articles issus de l'examen des références bibliographiques et de la littérature grise N= 7 Recommandations issues de l'examen des bases institutionnelles européennes et anglo-saxonnes : N= 6 recommandations Articles inclus pour l'analyse qualitative N= 37 (18 Medline, 6 Cochrane) Figure 1: Diagramme de flux de l'inclusion pour l'analyse 25 Caractéristiques des études retenues Les caractéristiques des 37 documents retenus pour l'analyse finale sont résumées dans la figure 1. Les essais contrôlés randomisés étaient majoritaires (n= 12), suivis des revues systématiques de la littérature ((n= 11) dont 5 méta-analyses), des recommandations (n=8), des études observationnelles comparatives (n=4), et des enquêtes postales transversales (n=2). Les caractéristiques des études incluses sont détaillées dans l'annexe 7 : le(s) nom(s) de(s) l'auteur(s), l'année de publication, le pays, la période de recrutement, le design de l'étude, la population étudiée et son âge, l'effectif global, la durée du suivi, la provenance du financement et l'existence ou non de conflit d'intérêt, ainsi que leurs sultats. Les recommandations spécifiques aux visites à domicile, issues des bases institutionnelles européennes anglo-saxonnes, sont détaillées dans l'annexe 8. La demande de visite à domicile 3.3.1 Différents moyens pour demander une visite à domicile 3.3.1.1 Le Téléphone En France, le ministère des Solidarités et de la Santé (2016)(Référence légale)(14) stipule que, tout patient demandeur d'une VAD en dehors des heures d'ouverture des cabinets médicaux (soir, nuit, week-end et jours fériés), peut solliciter un médecin de garde. Soit par le biais du numéro téléphonique « 15 », ou bien par le numéro spécifique réservé à la permanence des soins mis en place par chaque région. En Australie, le site du « Royal Australian College of General Practitioners » (RACGP)(Grade des recommandations : Accord d'Experts (AE))(15)(annexe 8) a mis à la disposition des médecins des recommandations sur la bonne utilisation du téléphone et des moyens de communication électroniques tels que : - Tout appel téléphonique mis en attente par le personnel administratif du cabinet, doit être précédé de la question suivante « s'agit-il d'une urgence médicale? ». - Si le cabinet médical dispose d'un message téléphonique de mise en attente, il doit inclure les numéros à appeler en cas d'urgence. - L'ensemble du personnel doit être en mesure de savoir quels appels téléphoniques nécessitent d'être transférés au MG. 26 - Chaque jour, le MG doit consacrer un créneau horaire pour prendre et/ou renvoyer des appels téléphoniques. La retranscription des appels téléphoniques importants dans les dossiers médicaux des patients est une nécessité. - Pour les patients avec un handicap, les médecins ainsi que le personnel administratif du cabinet doivent être informés des moyens de communication alternatifs existants : le « National Relay Service » pour les patients atteints de surdité, et le « Translation and Interpreter Service » pour les personnes non anglophones. Au Royaume-Uni le « South Staffordshire Local Medical Committee » (16)(Grade des recommandations : AE)(annexes : 8 et 11) a mis en place des recommandations destinées aux MG afin d'améliorer la gestion des visites à domicile. Lorsqu'un patient demande des soins médicaux (généralement par téléphone), son interlocuteur (MG, IDE, secrétaire) est préalablement formé au triage et, est soutenu par un protocole d'aide à la prise de décision. Si le problème médical ne peut pas être solutionné par un simple conseil téléphonique, le médecin évalue alors l'aptitude du patient à prendre la voiture pour se rendre au cabinet médical. Le transport ne doit pas causer une aggravation ou une détérioration de l'état de santé actuel. Si l'état de santé du patient semble de nature grave, un transfert à l'hôpital dans le meilleur délai doit être organisé (ambulance, 999). En l'absence de signe de gravité, le médecin programme une VAD dans un délai approprié. Il est possible, dans certaines situations, que le médecin délègue la VAD à un autre membre de l'équipe de soins (ex. IDE). 3.3.1.2 Internet Que ce soit en cabinet libéral individuel ou de groupe, en maison médicale ou même dans une structure salariée, les systèmes de prise de rendez-vous (RDV) par internet constituent un nouvel outil, alternatif et/ou complémentaire à la prise de RDV par téléphone. Selon une étude réalisée en 2016 par l'Union Régionale des Professionnels de Santé (URPS) de l'Ile de France) (Grade des recommandations : AE)(17), une quinzaine de plateformes proposant des services de gestion de RDV pour les MG a été répertoriée. Une offre pléthorique qui a incité la même URPS à rédiger et présenter en février 2018, une charte pour la protection des utilisateurs des plateformes de rendez-vous médicaux en ligne. De nombreux éditeurs ont déjà signé cette charte dont les principes de base sont le respect de la déontologie médicale, et la confidentialité des données et du secret médical (18). Biard P. (Grade des recommandations C ; Faible niveau de preuve)(2016)(19) dans une étude observationnelle suivait 9 praticiens (7 médecins, 1 ostéopathe, 1 podologue) et 3 secrétaires au sein d'une maison médicale à Avoine, afin d'évaluer un logiciel de prise de RDV en ligne. Le recueil des 27 données était réalisé au cours d'entretiens semi dirigés. Ce système a été défini comme rassurant, car permettait aux patients de prendre rendez-vous à toute heure, même lorsque le secrétariat était saturé par les appels téléphoniques, ainsi qu'en dehors des heures d'ouverture du secrétariat. Les relations entre le médecin et le patient n'ont pas été modifiées par ce logiciel. Il apportait des bénéfices aux médecins dans leurs organisations professionnelles, tels que la possibilité de donner un RDV au patient depuis internet sans être physiquement présent au cabinet, l'accès à l'agenda depuis un smartphone, connaître par avance le motif de la consultation ainsi que la diminution du dérangement en consultation pour les prises de RDV. Au niveau du secrétariat, cela permettait de diminuer le nombre d'appels téléphoniques via l'ergonomie et les fonctionnalités du système. En Australie, Knight A. et Lembke T. (2013)(20)(Grade des recommandations C, faible niveau de preuve) ont proposé un article comparant les différents types de systèmes de prise de rendez-vous (tableau 4). Chaque système a été décrit, ainsi que leurs avantages et leurs inconvénients. Cet article était issu de l'expérience des deux auteurs, après 7 années de collaboration avec l'« Australian Primary Care Collaboratives (APCC) ». Ainsi les médecins pouvaient adapter et choisir leur système de prise de rendez-vous à leurs besoins, mais également pour répondre au mieux aux besoins de leurs patients et de leurs personnels. Le but de cet outil était de : - De donner un RDV au bon moment (urgence, avant le travail, pendant le week-end) - De faire une réservation en adéquation avec les horaires de travail ou de transport - De planifier les RDV de manière à minimiser l'attente - D'obtenir un RDV ou une VAD avec le médecin habituel - D'obtenir un RDV ou une VAD en urgence si nécessaire - De proposer des RDV ou VAD à courte ou longue échéance selon le besoin Les bénéfices seraient, un remplissage optimal du planning, d'améliorer la continuité des soins, un meilleur respect des horaires de travail et une diminution du stress du médecin. Il améliorerait la flexibilité du planning du médecin pour répondre aux urgences, aux problèmes familiaux ou pour l'éducation thérapeutique. Le médecin pourrait finir à l'heure, prendre des pauses pour le repas ou autres, tout en maitrisant le flux de patient pour équilibrer les recettes. La maximisation de l'efficacité des systèmes de prise de rendez-vous en médecine générale aurait le potentiel de rapprocher les et les médecins pour les soins opportuns et créerait un environnement de travail durable. » Définition Avantages Inconvénients - Absence de prise de - Début de journée : - Inadapté pour les RDV aucune consultation personnes qui - Système de « file programmée. travaillent et/ou d'attente » - Médecin fini à l'heure dépendent des - Averti le patient qu'il veut transports lorsque c'est son tour - Durée de consultation : - Peut entraver la flexible - Moins de triage - Perd la capacité - File d'attente augmente d'influer sur l'arrivée l'efficacité du système, et des patients évite le « goulot - Difficulté pour d'étranglement » planifier des soins structurés en l'absence de RDV - Possibilité de retard de plusieurs heures et mécontentement des patients. - Stress sur le médecin si salle d'attente pleine : risque d'erreur diagnostic possible « Book on the day » - Remplissage du - Adapté pour : personnes - Difficulté pour planning chaque matin handicapées, personnes planifier des soins - Dès que planning âgées et travailleurs. structurés complet : les gens - Flexibilité pour les - Le matin, possibilité de rappel le lendemain imprévus et sans impact submerger la capacité matin sur RDV programmés du système téléphonique et du personnel. « Supersaturate » - RDV réservés en - Système accessible pour -Système de couleur fonction de la demande tous : aux personnes avec peut être complexe et du patient des besoins chroniques devenir rapidement 29 - RDV urgent : en prévisibles mais répond illisible. Absence de doublon ou réalisé à la également aux personnes règle commune pour les pause déjeuner ou en avec des besoins aigus. « couleurs » utilisées en fin de journée fonction du motif. - En fonction du motif - Excès de patients, de la : attente, stress du couleurs de RDV/VAD médecin différentes. -Surcharge de travail administratif du réceptionniste (triage, création RDV, courriers, mail) « Care out » - Règle de base : - Place pour les - La demande de soins débuter la journée avec demandes de soins aigus aigus peut augmenter le 1/3 des RDV disponible le jour même temps d'attente pour - Se rendre disponible - Planification des VAD, les autres RDV (urgences, VAD) des engagements - Possibilité de défaut - Ajuste la taille du professionnels ainsi que de remplissage du planning en fonction de les soins structurés pour planning la demande les patients avec une maladie chronique. « Advanced access » - Système le plus - Débute la journée avec - Temps de mise en reconnu en soins suffisamment de RDV oeuvre plus long primaires pour répondre à la - Engagement du - Mesure et façonne la demande médecin important demande - Pas de restriction des - Nécessité d'une - Fait correspondre la RDV futurs formation du personnel capacité de la pratique - Flexibilité pour les à la demande médecins et les patients médecin - Prévoit les imprévus - Priorise la continuité des - Besoin d'une (VAD, urgences) soins importante coopération - Réduit l'accumulation - Soins aigus /chroniques : du MG mais rarement de travail. organisés sans délai. faisable. Tableau 4: Comparaison des différent s types de s ystème s de prise de rendez-vous selon Knight A. et Lembke T. 3.3.1.3 Sur place En Australie, afin d'améliorer l'accès aux soins, le site du RACGP (21)(annexe 8) conseille aux MG de faire une fiche pratique d'informations sur la politique du cabinet médical, destinée aux patients. Cette fiche doit être régulièrement mise à jour et être disponible tant au cabinet médical que sur le site internet du cabinet médical. Elle doit être conforme au Code de conduite du « Medical Board of Australia » et être sous forme photocopiée, dactylographiée ou informatique contenant, au minimum, les informations suivantes :  L' adresse et les numéros de téléphones du cabinet médical  Les heures d'ouvertures du cabinet médical pour les consultations et les VAD, ainsi que les modalités pour obtenir des soins en dehors des horaires d'ouvertures du cabinet.  Inscrire les numéros de téléphone en cas d'urgence.  Les principes de facturations du cabinet  La politique de communication (réception et retour d'appels téléphonique concernant la santé des patients ; messagerie sécurisée, SMS).  La politique de gestion de l'information sur la santé des patients  Les modalités de suivi des résultats médicaux.  Les modalités pour poser des questions ou porter plainte sur une prise en charge (numéros de téléphone) Pour rendre cette fiche accessible pour tous, le RACGP insiste particulièrement sur l'importance de tenir informé les patients avec handicap (illettrés, malvoyant) par la présence d'illustrations picturales, d'une police adéquate, ainsi que les patients étrangers par le biais d'exemplaires en différentes langues. 3.3.2 La régulation des appels Parmi les appels téléphoniques, un certain nombres concernent une demande de soins non programmés. Le médecin a pour rôle de distinguer les situations urgentes, de celles qui vont nécessiter une consultation médicale différée ou d'un conseil téléphonique. Les MG en exercice, ont accès à des formations dédiées à la régulation libérale, dans le cadre de la Formation Médicale Continue (FMC). Cependant ces formations se restreignent souvent à l'exercice de la régulation libérale seule ou au Centre de Réception et de Régulation des Appels (CRRA) et n'englobent pas la pratique quotidienne du cabinet. La gestion des appels téléphoniques et la reconnaissance des situations urgentes correspondent aux objectifs de compétences des MG d'après le consensus de la 31 WONCA (2002)(22)(Grade des recommandations : AE), et aux objectifs de formation du Collège National des Généralistes Enseignants (CNGE)(23)(Grade des recommandations : AE), édités en mars 2009 dans leur référentiel métier. En France, lors de la conférence des présidents des Sections généralistes des unions professionnelles régionales de médecins libéraux, a été élaboré un référentiel professionnel du Médecin Généraliste intitulé « MG Form » (1999)(24)(Grade des recommandations : AE)(annexe 8). Ce travail a pour vocation d'être utilisé dans divers domaines tels que la formation, l'élaboration de recommandations pour la pratique, la construction de bilans de compétences et de démarches d'assurance-qualité. Ce référentiel permet, entre autres, d'assurer une régulation efficace des appels reçus au cabinet ou en centre de régulation. Il repose sur l'apprentissage à l'identification :  Du degré de gravité actuel ou potentiel de la situation ayant motivé l'appel  D'une éventuelle détresse des fonctions vitales  Des conditions extérieures (res et contraintes) susceptibles d'influer sur la réponse à apporter à la situation Selon l'appréciation de la situation, le MG doit :  Informer le centre 15 et demander : une intervention immédiate du SAMU ou une mise en alerte du SAMU en attendant un bilan de situation plus précis du MG qui se rend sur place  Se rendre sur les lieux de l'appel urgent  Donner les conseils et la conduite à tenir dans l'attente d'une visite différée Bunn F. et al. (2005)(25)(R-AMSTAR 33/44) ont présenté une revue de la littérature dont l'objectif était d'évaluer d'une part, l'impact des consultations téléphoniques et du triage sur l'utilisation des soins de santé et, d'autre part, l'impact sur la sécurité et la satisfaction des patients. Neuf études ont été incluses. 32 Varley A. et al. (2016)(26) ont réalisé une analyse à postériori des données de l'essai ESTEEM, concernant la prise de décision lors des consultations téléphoniques de triage par des IDE ayant reçu la même formation. Le programme de formation « CDSS » (logiciel d'aide à la prise de décision clinique), a été créé spécifiquement pour les consultations de triage téléphonique. Cette étude permettait de déterminer si, les caractéristiques des IDE (infirmière « praticienne » (droit de prescription) ou infirmière libérale (absence de droit de prescription), expériences cliniques antérieures, niveau d'expérience au triage et perception de la préparation au triage, années d'expériences, statut de diplômé), avaient un impact sur la prise de décision lors du triage téléphonique. Des questionnaires postaux ont été envoyés aux IDE ayant reçu la formation « CDSS ». Trente-cinq IDE avaient retourné des questionnaires complets. Les IDE « praticiennes » étaient plus susceptible de gérer l'appel en totalité, sans orienter le patient pour une consultation ultérieure avec un MG ou une IDE au cabinet (risque d'orientation au cabinet : 0,66 IC à 95% (0,51-0,81)), que les IDE libérale (risque d'orientation au cabinet : 0,90 IC à 95% (0,88-0,93)). Les IDE qui se considéraient bien préparées avaient un risque de suivi ultérieur au sein du cabinet médical de 0,57 IC à 95% (0,40-0,75) et celles qui se sentaient mal ou modérément préparées avaient un risque de 0,79 IC à 95% (0,740,85). En Australie, le RACGP (21) propose un protocole d'aide à la programmation et au tri des demandes reçues pendant les heures d'ouverture du cabinet. Pour que ce système soit efficace, l'ensemble de l'équipe (administrative et médicale) doit être en mesure de comprendre la politique de tri des patients. Le médecin ou le membre du personnel médical qui reçoit une demande de consultation ou de VAD, doit être capable d'orienter le patient vers la solution la plus adaptée. Il repose sur l'identification des problèmes médicaux urgents afin de pouvoir bénéficier rapidement d'une assistance médicale adaptée. Lors d'une demande urgente, même si le planning du médecin est complet, une solution doit être trouvée. En Australie le personnel médical, paramédical (IDE) et administratif (secrétaire), bénéficient d'une formation externe ou intégrée dans la pratique. Cette formation permet l'apprentissage à l'identification des différents types de soins demandés et de les prioriser. A la suite de cette formation la secrétaire doit, bien qu'elle n'ait pas accès au dossier médical du patient, être capable de communiquer une réponse adaptée à l'appel. Un site internet d'aide au triage est accessible sur : http://www.gptriage.info/sample-triage-policy.html. 3.3.3 Les motifs de demande d'une visite à domicile La France reste le pays d'Europe où il subsiste un grand nombre de déplacements de MG hors cabinet. L'article L. 162-3 du code de la sécurité sociale, précise « que les consultations médicales sont données au cabinet du praticien, sauf lorsque l'assuré ne peut se déplacer en raison de son état ». Le 1er octobre 2002 a été signé l'AcBUS (27)(28)(Annexe 12)(Référence légale) qui a réorganisé les VAD afin de limiter leur nombre en réduisant les visites injustifiées. Les VAD sont justifiées selon des critères médicaux, environnementaux et médico-administratifs. Dans des cas exceptionnels, les adultes en bonne santé peuvent également avoir besoin d'être examinés à domicile. Par exemple, en cas de pathologie rendant leur déplacement compliqué (ex.: problème rhumatologique douloureux). Les soins hors cabinet justifiés peuvent, à ce titre, bénéficier d'une « majoration de déplacement » (MD) dans les conditions fixées par la Nomenclature Générale des Actes Professionnels (annexe 1). En contrepartie, le médecin peut décider de ne pas faire rembourser la part du déplacement pour les visites qui sont jugées « injustifiées » ou pour « convenance personnelle ».
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Ce n'est qu'en 2006 que la notice, destinée aux patients, déconseille pour la première fois l'utilisation de la Dépakine® chez la femme enceinte. Cependant, dix années supplémentaires seront nécessaires, ainsi qu'une importante médiatisation pour que les patientes se voient imposer la signature d'un protocole d'accord de soins les informant de l'ensemble des risques encourus. 4.2 La chronologie de l'Affaire de la Dépakine® (23) En France, les familles d'enfants nés de mères ayant consommé de la Dépakine® au cours de leur grossesse se sont constituées en association, l'APESAC, acronyme d'Association d'Aide aux Parents d'Enfants Souffrant du Syndrome de l'Anti-Convulsivant. Au cours de l'année 2011, des familles ont saisi la justice. Dans le cadre de procédures au civil, une quinzaine d'expertises sont en cours. Un lien de cause à effet a été mis en évidence dans certains des cas, entre la prise du médicament et les malformations et retards de développement chez les enfants. En 2015, quatre familles ont alors déposé une plainte contre X pour les chefs d'accusation de tromperie aggravée et de blessures involontaires. Ces mêmes chefs d'accusation font l'objet d'une enquête préliminaire, ouverte par le parquet de Paris, et confiée aux gendarmes de l'OCLAESP, spécialisés dans les affaires sanitaires. Les informations relatives à la grossesse inscrites dans le RCP de la Dépakine® ont connu des évolutions, au cours du temps : (24) Année Informations relatives à la grossesse 1986 Prévenir votre médecin si vous êtes enceinte. 1995 Consulter rapidement votre mé decin en cas de grossesse ou de désir de grossesse. Votre médecin jugera de l'utilité de poursuivre le 2000 En cas de grossesse ou de désir de grossesse, prévenez votre médecin. En effet, votre traitement devra éventuellement être adapté et une surveillance particulière devra être mise en route. Au moment de la naissance, une surveillance attentive du nouveau-né sera nécessaire. 2004 En cas de désir de grossesse, prévenez votre médecin, une surveillance particulière devra être mise en place. En cas de grossesse, votre traitement devra éventuellement être adapté. Il est important de ne pas arrêter le traitement car il existe un risque de réapparition de crises pouvant avoir des conséquences pour vous ou votre enfant. Au moment de la naissance, une surveillance attentive du nouveau-né sera nécessaire. 2006 En début de traitement, le médecin s'assurera que vous n'êtes pas enceinte et prescrira si besoin une méthode de contraception (cf. rubrique Grossesse et allaitement). L'utilisation de ce médicament est déconseillée, sauf avis contraire de votre médecin, pendant la grossesse. Si vous découvrez que vous êtes enceinte pendant le traitement, consultez rapidement votre médecin lui seul pourrait adapter le traitement à votre état. 2009 L'utilisation de ce médicament est déconseillée tout au long de la grossesse et chez les femmes en âge de procréer sans contraception efficace. Prévenez votre médecin de votre désir de grossesse avant d'interrompre votre contraception, afin qu'il puisse éventuellement adapter votre traitement et programmer une surveillance particulière de votre grossesse. De même, prévenez immédiatement votre médecin si vous découvrez que vous êtes enceinte. Dans tous les cas, vous ne devez pas interrompre votre traitement antiépileptique de vous-même sans l'accord de votre médecin car il existe un risque de réapparition des crises pouvant avoir des conséquences néfastes pour vous et votre enfant. 2010 L'utilisation de ce médicament est déconseillée tout au long de la grossesse et chez les femmes en âge de procréer sans contraception efficace. La prise de ce médicament au cours de la grossesse est susceptible d'entraîner des malformations du foetus, des troubles de la coagulation chez le nouveauné, des troubles du développement et des troubles autistiques chez l'enfant. Avant d'interrompre votre contraception, prévenez votre médecin de votre désir de grossesse afin qu'il puisse éventuellement adapter votre traitement et programmer une surveillance particulière de votre grossesse. De même, prévenez immédiatement votre médecin si vous découvrez que vous êtes enceinte. Dans tous les cas, vous ne devez pas interrompre votre traitement antiépileptique de vous-même sans l'accord de votre médecin. 2011 Vous ne devez pas prendre ce médicament si vous êtes enceinte ou en âge de procréer, sauf indication contraire de votre médecin. Si vous êtes en âge de procréer, vous devez utiliser une contraception 39 efficace pendant le traitement. La prise de ce médicament au cours de la grossesse est susceptible d'entraîner des malformations du foetus, des troubles de la coagulation chez le nouveau-né, des troubles du développement et des troubles autistiques chez l'enfant. Avant d'interrompre votre contraception, prévenez votre médecin de votre désir de grossesse afin qu'il puisse éventuellement adapter votre traitement et programmer une surveillance particulière de votre grossesse. De même, prévenez immédiatement votre médecin si vous découvrez que vous êtes enceinte. Dans tous les cas, vous ne devez pas arrêter votre traitement de vous-même sans l'accord de votre médecin. 2014 L'exposition in utero au valproate de sodium entraîne un risque de malformation d'environ 11 %un risque de troubles neurodéveloppementaux vant atteindre jusqu'à 30 à 40 % des enfants d'âge préscolaire exposés in utero au valproate. Les enfants exposés in utero au valproate présentent un risque élevé de troubles graves du développement (intellectuel et moteur) et du comportement (jusqu'à 30 à 40 % des cas) et/ou de malformations (environ 10 % des cas). Si vous êtes une fille, une adolescente, une femme en âge de procréer ou une femme enceinte, votre médecin spécialiste ne pourra vous prescrire le valproate qu'en cas d'inefficacité ou d'intolérance aux autres traitements. Si vous êtes une femme en âge de procréer, vous devez utiliser une contraception efficace pendant votre traitement. Si vous envisagez une grossesse, vous ne devez pas interrompre votre traitement sans en avoir parlé avec votre médecin et convenu d'un autre traitement si cela est possible. Votre médecin discutera de cela avec vous mais vous devez suivre les conseils donnés à la rubrique 2 de cette notice. Si vous êtes une femme en âge de procréer, votre médecin ne pourra vous prescrire le valproate qu'en cas d'échec des autres traitements. Le valproate est dangereux pour l'enfant à naître s'il est pris pendant la grossesse. Le valproate expose à un risque s'il est pris pendant la grossesse. Plus la dose est élevée, plus les risques sont importants ; toutefois toutes les doses exposent à ce risque. Les enfants exposés in utero au valproate présentent des risques élevés de malformations graves et de troubles du développement (intellectuel et moteur) et du comportement. Les malformations rapportées incluent la spina bifida (malformation osseuse de la colonne vertébrale, dont un premier cas est publié en 198113), des malformations de la face, de la lèvre supérieure et du palais, du crâne, du coeur, des reins, des voies urinaires et des organes génitaux ainsi que des membres. Si vous prenez du valproate pendant la grossesse, vous avez un risque plus élevé que les autres femmes d'avoir un enfant atteint de malformations. Le valproate étant utilisé depuis de nombreuses années, il est établi que près de 10 % des enfants nés de mères traitées par valproate pendant la grossesse présentent des malformations, contre 2 à 3 % des enfants dans la population générale. On estime que jusqu'à 30 à 40 % des enfants d'âge préscolaire dont les mères ont pris du valproate pendant la grossesse présentent des troubles du développement dans leur petite enfance. Les enfants nés de mères traitées par le valproate ont un risque important de présenter des malformations et des troubles graves du développement qui peuvent se révéler lourdement handicapants. Si vous prenez du valproate et pensez être enceinte, consultez immédiatement votre médecin. N'arrêtez pas votre traitement sans que votre médecin vous l'ait conseillé. Interrogez votre médecin spécialiste sur la prise d'acide folique. L'acide folique peut diminuer le risque général de spina bifida et de fausse couche précoce inhérent à toute grossesse. Néanmoins, il est peu probable qu'il diminue le risque de malformations associées à l'utilisation du valproate. 2020 Programme de prévention de la grossesse Le valproate est un tératogène puissant entraînant un risque élevé de malformations congénitales et de troubles neuro-développementaux chez les enfants exposés in utero au valproate (voir rubrique 4.6). Le valproate ne doit pas être utilisé chez les enfants de sexe féminin et les femmes en âge de procréer sauf en cas d'inefficacité ou d'intolérance aux autres traitements. Si aucun autre traitement n'est possible, se conformer au programme de prévention de la grossesse ci-après. DEPAKINE est contre-indiqué dans les cas suivants : Chez les femmes enceintes, sauf en l'absence d'alternative thérapeutique appropriée (voir rubriques 4.3 et 4.6). Chez les femmes en âge de procréer, sauf si toutes les conditions du programme de prévention de la grossesse sont remplies (voir rubriques 4.3 et 4.6). Conditions du programme de prévention de la grossesse Le prescripteur doit s'assurer que : Les situations individuelles sont évaluées au cas par cas, en impliquant la patiente dans la discussion afin de garantir son engagement, de discuter des options thérapeutiques et de s'assurer qu'elle a compris les risques et les mesures nécessaires pour réduire ces risques ; Le risque de survenue de grossesse est évalué chez toutes les patientes de sexe féminin ; La patiente a bien compris et pris conscience des risques de malformations congénitales et de troubles neuro-développementaux, y compris l'ampleur de ces risques pour les enfants exposés in utero au valproate ; 41 La patiente comprend la nécessité d'effectuer un test de grossesse avant le début du traitement et pendant le traitement, en tant que de besoin ; La patiente a été conseillée en matière de contraception et est capable de se conformer à la nécessité d'utiliser une contraception efficace (pour plus de détails, voir la sous-rubrique « Contraception » de cet encadré), sans interruption, pendant toute la durée du traitement par valproate ; La patiente comprend la nécessité qu'un médecin spécialiste expérimenté dans la prise en charge de l'épilepsie réévalue régulièrement (au moins chaque année) le traitement ; La patiente comprend la nécessité de consulter son médecin dès qu'elle envisage une grossesse afin d'en discuter en temps voulu et de recourir à des options thérapeutiques alternatives avant la conception, et ceci avant d'arrêter la contraception ; La patiente comprend la nécessité de consulter en urgence son médecin en cas de grossesse ; La patiente a reçu la brochure d'information patiente ; La patiente a reconnu avoir compris les risques et précautions nécessaires associés à l'utilisation du valproate (formulaire annuel 'accord de soins). Ces conditions concernent également les femmes qui ne sont pas sexuellement actives, sauf si le prescripteur considère qu'il existe des raisons incontestables indiquant qu'il n'y a aucun risque de grossesse. Enfants de sexe féminin Les prescripteurs doivent s'assurer que les parents/soignants des enfants de sexe féminin comprennent la nécessité de contacter le médecin spécialiste aussitôt que les premières menstruations surviennent chez l'enfant de sexe féminin qui utilise du valproate. Le prescripteur doit s'assurer que les parents/soignants des enfants de sexe féminin ayant leurs premières menstruations, reçoivent une information complète sur les risques de malformations congénitales et de troubles neuro-développementaux, y compris l'ampleur de ces risques, pour les enfants exposés au valproate in utero. Chez les patientes chez lesquelles les premières menstruations sont apparues, le médecin spécialiste prescripteur doit réévaluer annuellement la nécessité du traitement par valproate et envisager l'ensemble des options thérapeutiques alternatives. Si le valproate est le seul traitement approprié, la nécessité d'utiliser une contraception efficace et toutes les autres conditions du programme de prévention de la grossesse doivent être discutées. Tous les efforts doivent être faits par le médecin 42 spécialiste pour passer à un traitement alternatif chez les enfants de sexe féminin, et cela avant la puberté ou l'âge adulte. Test de grossesse Une grossesse doit être exclue avant l'instauration du traitement par valproate. Le traitement par valproate ne doit pas être instauré chez les femmes en âge de procréer sans l'obtention d'un test de grossesse négatif (test de grossesse plasmatique d'une sensibilité d'au moins 25 mUI/mL), confirmé par un professionnel de santé, afin d'éliminer toute possibilité d'utilisation involontaire du produit pendant la grossesse. Ce test de grossesse doit être répété à intervalles réguliers pendant le traitement. Contraception Les femmes en âge de procréer qui reçoivent du valproate doivent utiliser une contraception efficace, sans interruption et pendant toute la durée du traitement par valproate. Ces patientes doivent recevoir une information complète sur la prévention de la grossesse, ainsi que des conseils en matière de contraception si elles n'utilisent pas de contraception efficace. Au moins une méthode de contraception efficace (de préférence une méthode dont l'efficacité ne dépend pas de l'utilisateur, telle qu'un dispositif intra-utérin ou un implant), ou deux méthodes de contraception complémentaires incluant une méthode barrière, doivent être utilisées. Lors du choix de la méthode de contraception, les situations individuelles ivent être examinées au cas par cas, en impliquant la patiente dans la discussion afin de garantir son engagement et son observance des mesures choisies. L'ensemble des conseils relatifs à une contraception efficace doivent être suivis, même en cas d'aménorrhée. Médicaments contenant des oestrogènes Une utilisation concomitante avec des médicaments contenant des oestrogènes, y compris les contraceptifs hormonaux contenant des oestrogènes, peut potentiellement entraîner une diminution de l'efficacité du valproate (voir rubrique 4.5). Les médecins prescripteurs doivent surveiller la réponse clinique (contrôle de l'épilepsie) à l'initiation ou à l'arrêt des médicaments contenant des oestrogènes. A l'inverse, le valproate ne réduit pas l'efficacité des contraceptifs hormonaux. Planification de grossesse Chez les femmes envisageant une grossesse, un médecin spécialiste expérimenté dans la prise en charge de l'épilepsie doit réévaluer le traitement par valproate et envisager l'ensemble des options thérapeutiques alternatives. Tous les efforts doivent être faits pour passer à un traitement alternatif approprié avant la conception et cela, avant que la contraception ne soit arrêtée (voir rubrique 4.6). Si un changement de traitement est impossible, la patiente devra recevoir des conseils supplémentaires au regard des risques que le valproate présente pour l'enfant à naître, afin de l'aider à prendre une décision éclairée concernant son projet familial. En cas de grossesse En cas de grossesse chez une femme utilisant du valproate, celle-ci doit être immédiatement orientée vers un médecin spécialiste afin de réévaluer le traitement par valproate et d'envisager des options alternatives. Les patientes dont la grossesse a été exposée au valproate ainsi que leurs partenaires doivent être orientés vers un médecin spécialisé ou expérimenté en tératologie pour évaluation et conseil (voir rubrique 4.6). Le pharmacien doit s'assurer que La carte patiente est donnée lors de chaque dispensation de valproate et que les patientes comprennent son contenu ; Les patientes sont informées de ne pas arrêter d'elles-mêmes le traitement par valproate et de contacter immédiatement un médecin spécialiste si elles envisagent ou suspectent une grossesse. Documents d'information Afin d'aider les professionnels de santé et les patientes à éviter toute exposition foetale au valproate, le titulaire de l'autorisation de mise sur le marché leur fournit des documents d'information visant à renforcer les mises en garde relatives à la tératogénicité (malformations congénitales) et foetotoxicité (troubles neuro-développementaux) du valproate et délivrer des recommandations aux femmes en âge de procréer concernant l'utilisation de valproate, ainsi que des détails sur le programme de prévention de la grossesse. Une carte patiente et une brochure d'information patiente doivent être fournies à toutes les patientes qui utilisent du valproate. Un formulaire annuel d'accord de soins doit être utilisé et dûment complété et signé au moment de l'instauration du traitement et lors de chaque réévaluation annuelle du traitement par valproate par le médecin spécialiste et la patiente (ou son représentant légal). Tableau 1 : Evolution des RCP de la Dépakine® de 1986 à 2020 44 À la suite de sa création, l'association n'a cessé de mener des actions de façon à alerter sur les risques tératogènes de la Dépakine® : En 2013, l'APESAC sollicite l'ANSM de façon à faire modifier les annexes de l'AMM (notice et RCP) ainsi que les conditions de prescription de la Dépakine®. En 2014, l'EMA procède à une réévaluation, à l'échelle européenne, des conditions de prescription du valproate de sodium. En 2015, Les recommandations européennes relatives aux nouvelles conditions de prescription de la Dépakine® entrent en vigueur. Ainsi, les praticiens ne doivent plus prescrire de valproate de sodium aux femmes en âge de procréer et aux femmes enceintes. Dorénavant, la prescription du valproate est réservée aux médecins spécialistes et une feuille d'accord de soin, informant des dangers pour le foetus doit obligatoirement être signée par les patientes. (25) En 2016, l'APESAC, en collaboration avec le Ministère de la santé, fait rédiger le Protocole National de Diagnostic et de Soins (PNDS). En 2017, l'apposition du pictogramme « danger » pour la femme enceinte sur les boîtes d'antiépileptiques et des autres médicaments tératogènes est imposée par décret. En 2018, le pictogramme apposé sur les boîtes de médicaments tératogènes contient maintenant le terme « interdit » chez la femme enceinte. Figure 1 : Pictogramme « grossesse » (26) 45 En 2018, l'ANSM publie un rapport sur le risque de troubles neurodéveloppementaux précoces associé à l'exposition in utero à l'acide valproïque et aux autres traitements de l'épilepsie en France. La Dépakine® fait désormais partie de la liste des médicaments sous surveillance renforcée. 4.3 Les conséquences législatives et réglementaires (27) Au sens de l'article 1245-3 du code civil, l'existence des effets indésirables liés à l'utilisation des médicaments ne rend pas les produits de santé défectueux. En effet, selon cet article, un produit est considéré comme étant défectueux lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre. Il s'agit en effet d'une appréciation de la sécurité en fonction de ce qui est légitimement attendu. Cette attente repose notamment sur les annexes de l'AMM. La notice est donc devenue un élément capital dans la caractérisation de la défectuosité des médicaments. En effet, un effet indésirable attendu n'est pas considéré comme constitutif d'un défaut intrinsèque du médicament, mais, si celui-ci n'a pas été mentionné dans la notice, ce défaut d'information manifeste un défaut extrinsèque du médicament. L'affaire de la Dépakine® a donné lieu à un arrêt de la Cour de cassation le 27 novembre 2019 (Civ. 1re, 27 nov. 2019, n° 18-16.537, D. 2019. 2297). Il a alors été reproché aux juges de ne pas avoir répondu aux conclusions du laboratoire Sanofi qui invoquait les dispositions de l'article 1245-10, 5° du code civil, en argumentant sur le fait que la notice de la Dépakine® était conforme à la réglementation édictée par l'autorité compétente. le cadre de l'affaire de la Dépakine®, le 22 mai 2011, un collège d'experts a émis un rapport confirmant les effets tératogènes de la Dépakine® et attribue la cause des troubles de l'enfant au médicament. A la suite de la constatation que de nombreux effets tératogènes du valproate de sodium avaient été régulièrement cités dans la littérature médicale entre les années 1986 et 1995, l'arrêt d'appel a relevé le fait que la notice de la Dépakine® indiquait seulement « En cas de grossesse ou de désir de grossesse, prévenez votre médecin. En effet, votre traitement devra éventuellement être adapté et une surveillance particulière devra être mise en route. Au moment de la naissance, une surveillance attentive du nouveau-né sera nécessaire. Le 2 juillet 2020, la justice a reconnu la responsabilité de l'État. Le tribunal a également estimé que la responsabilité était partagée par le Laboratoire pharmaceutique Sanofi et des médecins prescripteurs de la Dépakine®. L'État a été condamné par le tribunal administratif de Montreuil à indemniser trois familles dont les enfants sont considérablement atteints après avoir été exposés in utero à la Dépakine®. En effet, la justice estime que l'État a engagé sa responsabilité et a manqué à sa mission de contrôle en ne prenant pas les mesures adaptées. Un communiqué de l'APESAC mentionne que le tribunal a conclu à la responsabilité de l'État à hauteur de 20 % à 40 % en fonction de la date de naissance des enfants atteints. (28) Le 3 Août 2020, le laboratoire Sanofi annonce sa mise en examen pour « homicides involontaires ». 4.4 Dépakine® : Etat de la situation L'ANSM et la CNAMTS publient les résultats d'une étude épidémiologique inscrite dans le cadre des actions établies afin de réduire les risques liés à l'exposition à l'acide valproïque durant la grossesse. Cette étude a débuté en 2015 et a été réalisée à partir des données du SNIIRAM. Elle a montré que plus de 14 000 femmes ont consommé du valproate de sodium au cours de leur grossesse entre les années 2007 et 2014. (29) Parmi ces femmes, 4 300 ont subi une interruption volontaire de grossesse, et sur les 8 816 accouchements documentés, 115 enfants sont mort-nés. Au total 8 701 nouveau-nés ont été exposés à l'acide valproïque in utero au cours de cette période. Par la suite, le nombre d'exposition au médicament au cours de la grossesse par an a diminué de 42,4 % de 2007 2014. Entre les années 2010 et 2014, 66 femmes enceintes des suites d'une procréation médicalement assistée se sont vues prescrire du valproate de sodium entre 60 jours avant le début de la grossesse et 15 jours après. Sur ces 66 grossesses, 53 bébés sont nés vivants. Une autre étude menée par l'ANSM et la CNAMTS, rendue publique en 2017, comparant les risques de malformations chez les enfants exposés au valproate de sodium in utero versus les enfants non exposés, a révélé une multiplication par 4 du risque de malformation chez les enfants exposés in utero lorsque leur mère était traitée pour épilepsie et par 2 chez les enfants exposés in utero lorsque leur mère était traitée pour bipolarité. (30) Il est estimé que le nombre 48 total d'enfants exposés in utero à l'acide valproïque souffrants d'au moins une malformation congénitale majeure sur la période s'étendant de 1967 (année de commercialisation de l'acide valproïque) à 2016 se situe entre 2 150 et 4 100. Une autre étude, menée par les mêmes auteurs, a comparé les risques d'apparition de troubles du développement et les prises en charge par des professionnels tels que des orthophonistes, orthoptistes et psychiatres chez les enfants âgés de moins de 6 ans exposés in utero au valproate de sodium et chez les enfants non exposés, et confirme l'augmentation du risque de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants exposés. Le 22 juin 2015, l'IGAS a été saisie par la ministre des affaires sociales et de la santé d'une mission d'enquête sur les spécialités pharmaceutiques à base de valproate de sodium (Dépakine®®, Dépakote®, Dépamide®, Micropakine® et génériques). Bien que le risque tératogène ait été suspecté puis établi depuis les années 1980, l'intérêt de la spécialité dans le traitement de l'épilepsie a parfois justifié la poursuite de son utilisation lors de grossesses. Au niveau européen, une réévaluation du rapport bénéfice/risque de ces produits chez les femmes en â de procréer a été effectuée. A la suite de cette réévaluation, l'ANSM a transmis de nouvelles règles de prescription de ces médicaments aux médecins le 26 mai 2015. Le rapport de l'IGAS a pour objectif la reconstitution de la chronologie des évènements et des choix concernant ces médicaments afin d'analyser les modalités de prise de décision permettant une réévaluation de la balance bénéfice/risque de la prescription du valproate de sodium pendant une grossesse, en tenant compte : o De l'évolution des connaissances scientifiques o Des décisions prises dans différents pays, notamment européens o Des conditions d'utilisation des spécialités contenant ce principe actif Ce rapport s'intéresse plus particulièrement à la question de l'information délivrée aux patientes et aux médecins prescripteurs. - Des troubles autistiques, mis en évidence avec certitude à compter de 2013. L'IGAS met en évidence ce qu'elle qualifie d'une certaine inertie, de la part des autorités de santé et du laboratoire, en ce qui concerne l'information des médecins prescripteurs et des patientes. En effet, la notion de retard de développement n'est apparue dans le RCP qu'au cours de l'année 2006, bien que le laboratoire l'ait suggéré dès l'année 2003. La notion de risques dans la notice est apparue encore plus tardivement, et date de l'année 2010. De plus, les annexes de l'AMM des médicaments génériques n'ont été actualisées qu'en juin 2015, date d'application des décisions de l'EMA par l'ANSM. Par ailleurs, le rapport met en exergue l'absence d'information sur la prise en compte des signaux de pharmacovigilance. En effet, une période d'incertitude existe entre la formulation d'une hypothèse et la preuve scientifique formelle d'un effet indésirable. Les documents d'information officiels ne donnent pas d'explications, comme le requiert l'application du principe de précaution. Le Directeur Général de l'ANSM a déclaré que la pharmacovigilance se positionnait en priorité et a alors déployé les moyens disponibles en conséquence. L'organisation de cette dernière doit être améliorée de façon à corriger les défauts et les faiblesses repérés par l'IGAS. 5. Levothyrox® 5.1 Le développement du Levothyrox® (32) Le Levothyrox® est un médicament contenant de la lévothyroxine sodique (L-T4), une hormone appartenant à la famille des hormones thyroïdiennes. Il est principalement utilisé en tant que traitement substitutif, en remplacement de la thyroxine naturelle lorsque celle-ci n'est plus suffisamment sécrétée par la glande thyroïde. Cette insuffisance de sécrétion est appelée hypothyroïdie et peut être causée par la thyroïde ellemême ou par l'insuffisance de fonctionnalité d'une autre glande qui commande la sécrétion thyroïdienne, telle qu'une maladie ou une ablation de l'hypophyse. Le Levothyrox® peut également être utilisé lorsque l'on cherche à freiner l'excitation de l'hypophyse sur la thyroïde, notamment dans le traitement de certains goitres. La lévothyroxine est une hormone thyroïdienne de synthèse à marge thérapeutique étroite, par conséquent, l'équilibre thyroïdien des patients traités par ce médicament est sensible aux variations de dose, même faibles. La lévothyroxine est la dénomination commune internationale attribuée par l'OMS, et correspond à la dénomination pharmaceutique de l'hormone thyroïdienne naturelle appelée lthyroxine par les biologistes, pour signifier que la molécule active est un acide aminé de forme Lévogyre. Le Levothyrox® a obtenu l'AMM en 1982. Son brevet est détenu par les laboratoires pharmaceutiques Merck et a une durée de validité de 20 ans, donnant l'exclusivité de production de Levothyrox® au laboratoire Merck. 5.2 La chronologie de l'affaire du Levothyrox® (33) Différentes autorités de santé ont demandé aux laboratoires fabricants de médicaments contenant de la lévothyroxine sodique de resserrer les spécifications de teneur en substance active. A la suite d'une étude de pharmacovigilance conduite en 2010 sur les médicaments contenant de la lévothyroxine en France, l'ANSM a formalisé la demande, en février 2012, adressée aux fabricants de spécialités à base de lévothyroxine sodique, dont le laboratoire Merck. Pour répondre à cette demande, Merck a développé la nouvelle formule du Levothyrox® afin de garantir une teneur en substance active plus constante entre les lots et durablement, au cours de la durée de conservation du médicament. Ces fluctuations de teneur en substance active étaient liées à la présence d'un excipient à effet notoire ; le lactose ; entrant dans la composition des comprimés. La substance active de la nouvelle formule, la lévothyroxine sodique, est identique à celle de l'ancienne formule. Le changement réside uniquement dans la composition en excipients du médicament : - le mannitol remplace le lactose monohydraté qui a été supprimé car il s'agissait d'un excipient responsable de la dégradation progressive de la substance active au cours du temps. - l'acide citrique anhydre a été ajouté. En septembre 2016, l'ANSM a réalisé une étude de bioéquivalence entre l'ancienne formule et la nouvelle formule. Cette étude permit d'établir la bioéquivalence entre les deux formules. En effet, les deux principes actifs, administrés à la même concentration étaient à l'origine des mêmes effets. En Mars 2017, l'ANSM a demandé au laboratoire Merck de procéder au changement de formule de son médicament, notamment en remplaçant le lactose par du mannitol, dépourvu d'effet notoire à la dose où il est présent dans les comprimés. L'objectif recherché par ce changement de formule était de garantir une meilleure stabilité dans le temps de la lévothyroxine sodique. En effet, il s'agit là d'un élément d'une haute importance, puisqu'une très faible variation de dose de l'hormone peut impacter significativement l'équilibre thyroïdien du patient. A la suite de ce changement de formule, des patients ont commencé à se plaindre d'effets indésirables tels que des intenses fatigues, des crampes musculaires, des vertiges, des maux de tête, des pertes de cheveux Une pétition rassemblant plus de 300 000 signatures est alors lancée le 24 juin 2017, réclamant un retour à l'ancienne formule. En août 2017, un numéro vert est ouvert par l'ANSM afin de répondre aux nombreuses questions des patients. La ministre de la santé, Madame Agnès Buzyn, évoque alors un problème d'information et fait état de 9 000 cas d'effets indésirables signalés. Le 11 septembre 2017, elle déclare qu'il n'y a pas de fraude, de complot, ni même d'erreur, mais uniquement un problème d'information des patients qui ont été surpris par un changement de formule et qui chez certains patients causait des effets indésirables. En effet, l'information relative au changement de formule du Levothyrox® a été transmise, selon le Directeur Général de l'ANSM, via des courriers envoyés aux professionnels de santé. Cependant, il existe aujourd'hui de nombreux outils de communication, il est par conséquent possible de se demander si l'information uniquement transmise par courrier n'aurait pas pu être communiquée d'avantage, notamment via les outils digitaux. Madame Agnès Buzin explique également que l'origine de ces effets indésirables peut être liée aux difficultés à redoser correctement le Levothyrox® mais que ceux-ci tendent à disparaître lorsque le patient atteint l'équilibre avec son dosage. 52 Face à ce début de crise sanitaire, la ministre de la santé annonce, en septembre 2017, le retour temporaire de l'ancienne formule du Levothyrox® ainsi que la mise à disposition de différentes alternatives thérapeutiques. Le 15 septembre 2017, le dossier est saisi par la justice. Une enquête est alors confiée au pôle de santé publique du tribunal de grande instance de Marseille. Le 11 octobre 2017, l'ANSM fait paraître le premier rapport de pharmacovigilance. (34) Le rapport fait état de 14 600 déclarations d'effets indésirables recensées depuis le changement de formule. La liste des effets indésirables déclarés est longue et impressionnante, mais aucun effet nouveau n'est observé : le profil clinique des effets indésirables rapportés avec la nouvelle formule du Levothyrox® est semblable à celui de l'ancienne formule. Il est ensuite noté que les éventuels déséquilibres induit par le passage de l'ancienne à la nouvelle formule nécessitent une adaptation du dosage permettant un rétablissement de la TSH dans les normes. Par ailleurs, le rapport de l'enquête évoque la présence de signes cliniques chez des patients dont la TSH se situe dans les normes. Se pose alors l'hypothèse que les effets indésirables pourraient être expliqués par d'autres facteurs qu'une dysthyroïdie et nécessite d'avantage d'investigations. Devant les 44% de patients ayant des effets indésirables mais une TSH dans les normes, certains spécialistes ont évoqué un effet nocebo, qui correspond à l'alter-égo néfaste de l'effet placébo. Ce terme provient du latin « je nuirai », et est de nature psychologique. L'effet nocébo est donc le fruit de la conviction qu'une substance ou qu'une pratique médicale peut être nuisible. Depuis le 2 octobre 2017, l'ancienne formule du Levothyrox® est de retour dans les pharmacies sous le nom d'Euthyrox®. Le nombre de boîtes est limité et les conditions de délivrance sont strictement encadrés. Le 31 octobre 2017, un membre de l'assemblée nationale déclare que la crise du Levothyrox® correspond à une crise médiatique et à une crise sanitaire, et que celle-ci est incomparable avec celle du Mediator®. Il annonce également que toutes les études de bioéquivalences ont été réalisées rigoureusement et que la réelle source du problème réside dans le manque d'information et de communication au sujet du changement de formule du médicament. Le 30 janvier 2018, le second rapport de pharmacovigilance est rendu public. (35) Il évoque un nombre de signalements d'effets indésirables en augmentation. Malgré ce nombre élevé de 53 déclarations, cette proportion est considérée comme étant sous-évaluée en raison de la complexité du système de déclarations, de la mauvaise ou de la non-information des patients relative à l'existence de ce dispositif ainsi que de la sous-notification des professionnels de santé. Cependant, la sous-notification des cas de pharmacovigilance souvent évoquées dans ce type d'enquête comme une limite à l'interprétation des données revêt une importance moindre dans l'affaire du Levothyrox® en partie grâce à la mise à disposition d'un dispositif de déclaration facilité par l'intermédiaire du portail de signalement du ministère. Le rapport fait également état des cas de « doublons », c'est-à-dire des cas déclarés auprès des CRPV et du laboratoire Merck. En parallèle de l'évocation de l'augmentation du nombre de cas, ce second rapport rappel une fois encore le nombre de malades victimes d'effets indésirables malgré une TSH dans les normes. En effet, sur les 1745 cas retenus, ils étaient seulement 394 en hypothyroïdie et 179 en hyperthyroïdie versus 1172 avec une TSH normale. Enfin, comme le rapport précédent, cette seconde enquête de pharmacovigilance propose une discussion des données au sein d'un groupe de travail intégrant des sociétés savantes ainsi qu'une mise en regard de ces données avec celles des diverses études réalisées par le pôle Epidémiologie des produits de santé de l'ANSM. 5.3 Les conséquences législatives et réglementaires (33) L'affaire du Levothyrox® compte trois procédures importantes au regard de leur ampleur ainsi que des décisions qui en découlent. La première procédure s'est déroulée auprès du TGI de Toulouse en novembre 2017. Un collectif des victimes du nouveau Levothyrox® demandait dans un référé une mise à disposition de l'ancienne formule, ce à quoi le TGI de Toulouse a donné une décision favorable aux patients. Un an plus tard, ce même tribunal a ordonné la réalisation d'expertises médicales. La seconde procédure s'est déroulée à Marseille, en mars 2018, avec l'ouverture d' information judiciaire contre X. L'instruction a été placée sous l'autorité d'un juge du pôle de santé publique du TGI. Cette procédure fait suite à une enquête préliminaire ouverte 54 quelques mois plus tôt pour atteintes involontaires à l'intégrité physique, tromperie et mise en danger de la vie d'autrui. Quelques mois plus tard, cette instruction judiciaire a été élargie au chef d'accusation homicide involontaire. Actuellement, le lien entre les patients décédés et la prise du produit n'a jamais été mis en évidence. Enfin, une troisième procédure menée auprès du TGI de Lyon a commencé en octobre 2017 par 108 premières assignations dans le but d'obtenir 10 000 euros du laboratoire Merck pour préjudice d'angoisse et défaut d'information. Cette procédure s'est amplifiée jusqu'à atteindre un nombre de 4000 dossiers. Au cours du mois de mars 2019, le TGI de Lyon a débouté les 4 113 patients de l'action collective menée pour le motif défaut d'information. Le jugement rendu annonce que l'entreprise avait agi en conformité avec la réglementation et retient que la qualité et la valeur thérapeutique de la nouvelle formule du Levothyrox® étaient certaines et que les informations contenues dans sa notice étaient suffisamment pertinentes et précises. Après avoir été déboutés par le tribunal d'instance de Lyon, les plaignants ont fait appel de la décision de justice. Le 7 janvier 2020, le procès en appel contre le laboratoire Merck s'est ouvert. Les plaignants accusent à nouveau le laboratoire de défaut d'information lors de la mise en place de la nouvelle formule du Levothyrox® et réclament, chacun, comme en première instance, 10 000 € en réparation de leur préjudice moral. La Cour d'appel de Lyon a reconnu le 25 juin 2020 que le laboratoire Merck avait commis « une faute », en procédant au changement de formule du Levothyrox en 2017 et en n'ayant pas informé les patients de ce changement. Le laboratoire a, été condamné à verser 1000 euros à chaque plaignant, au titre de « préjudice moral ». L'avocat des plaignants, Maître Christophe Leguevaques a indiqué « La Cour considère qu'il y a eu un préjudice moral subi par toutes les parties ». (36) Le troisième et dernier rapport de pharmacovigilance du 4 juillet 2018 fut publié et est consultable sur le site de l'ANSM. Encore une fois, les auteurs du rapport évoquent leur impossibilité à expliquer le nombre si élevé de signalements d'effets indésirables et concluent que les résultats de ce nouveau rapport démontrent que les données de pharmacovigilance, de 55 nature déclarative par définition, ne suffisent plus à la formulation d'hypothèses relative à ce dossier. 5.4 Levothyrox® : Etat de la situation (33) La cause de l'affaire du Levothyrox® demeure un mystère scientifique, qui sera peut-être éclaircie avec le temps. Cette crise sonne comme une répétition de traits observés dans d'autres crises, avec l'alarme lancée par des patients en premier lieu. Ensuite, l'alerte a été suivie par une médiatisation très forte et s'est incarnée dans la figure de ce que l'on appelle des lanceurs d'alerte. A l'image des autres affaires, la judiciarisation s'est très rapidement mise en place. Afin de pallier les crises sanitaires, les rôles importants des politiques et de l'administration ont conduit à la mise en place de lois et de règlements. Quoiqu'il advienne, l'affaire du Levothyrox® marque également un tournant. En effet, il y a eu, initialement, l'ampleur du nombre de patients mis en danger. Ce nombre s'élève à 3 millions, soit presque un français sur vingt. Certes, la gravité des effets indésirables est moindre comparé à d'autres scandales sanitaires, mais le nombre de malades concernés par les problèmes liés au changement de formule du médicament est très élevé. L'affaire du Levothyrox® se distingue également des autres affaires par le fait qu'il s'agisse de la première crise sanitaire dont les réseaux sociaux ont été vecteurs. Ensuite, les médias traditionnels ont relayé l'information et ont imposé cette affaire à l'agenda des politiques, soulignant ainsi leur importance en tant que trait d'union entre dirigeants et citoyens. Cet enchainement a mis en lumière une certaine carence de la veille numérique des autorités de santé, qui ont su y remédier en développant de nouveaux outils et de nouvelles mesures de suivi des réseaux sociaux. Au-delà du défaut d'information dont les autorités de santé ont reconnu leur responsabilité, l'affaire du Levothyrox® laisse aujourd'hui encore des questions en suspens : Pourquoi avoir demandé un changement de formule alors que les éléments connus aujourd'hui révèlent le fait que les effets indésirables liés à l'ancienne formule semblaient être marginaux? Pourquoi ne pas s'être contenté de réduire de trois à deux ans la durée de péremption de l'ancienne formule afin de répondre au souci d'instabilité dans le temps repéré et comment expliquer le fait que la nouvelle formule n'ait quant à elle qu'une durée de péremption de deux ans? Enfin, sur le versant médical, nous pouvons nous demander s'il existe des interactions jusqu'alors méconnues entre la substance active (la lévothyroxine) et les deux nouveaux 56 excipients (le mannitol et l'acide citrique) susceptibles d'expliquer les effets indésirables liés à la nouvelle formule. En ce qui concerne l'aspect financier, l'ANSM se trouve au centre d'une contradiction, à la fois pierre angulaire de la sécurité sanitaire mais aussi victime des contraintes budgétaires, notamment depuis que cette dernière est financée par l'Etat. Les conséquences des scandales sanitaires se traduisent donc à différents niveaux : tout d'abord par les divers drames vécus par les patients, puis à plus long terme avec les procès, ayant lieu parfois de nombreuses années après le scandale, et enfin avec les évolutions législatives et réglementaires engendrées par ces crises. Ces différents scandales sanitaires ont conduit à une remise en cause du lien de confiance à la base de la relation entre les patients, les professionnels de santé, les laboratoires pharmaceutiques et les autorités de santé. Au coeur de ces conflits, le médicament, bien souvent considéré comme un produit de consommation courante. Cependant, le médicament n'est pas un produit de consommation anodin. Aucun médicament n'est sans risque et tous sont susceptibles d'être à l'origine d'effets indésirables en fonction de la sensibilité des patients. C'est pourquoi le médicament est soumis à un cadre réglementaire très stricte, dont nous allons étudier la mise en place dans la partie suivante. PARTIE II : La politique du médicament L'article L.5111-1 du CSP définit le médicament comme « toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines ou animales, ainsi que toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l'homme ou chez l'animal ou pouvant leur être administrée, en vue d'établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique. » (37) Au début du XIXème siècle, l'essentiel des traitements disponibles se résumait à des préparations magistrales et officinales, dispensées par les pharmaciens aux patients. Aujourd'hui, d'après l'article L5121-1 du CSP, le premier type de préparation se définit comme « tout médicament préparé selon une prescription médicale destinée à un malade déterminé en raison de l'absence de spécialité pharmaceutique disponible. » et le second comme tout médicament préparé en pharmacie, inscrit à la pharmacopée ou au formulaire national et destiné à être dispensé directement aux patients approvisionnés par cette pharmacie. » (38) A l'époque, le médicament correspondait uniquement à une préparation magistrale ou officinale, destinée à un ou quelques patients précisément définis. Désormais, un même médicament est destiné à des milliards de patients au polymorphisme différent, avec des habitudes de vies parfois opposées. Un produit entrant dans la catégorie « médicament » est alors immédiatement encadré par une réglementation stricte qui s'applique à trois niveaux : (39) - Son AMM : En France, cette dernière est délivrée par l'ANSM qui évalue le rapport bénéfice/risque du produit. Au niveau européen, l'AMM est délivrée par l'EMA. Après la mise sur le marché, l'ANSM possède aussi une importante mission de pharmacovigilance qui a été renforcée au fil des crises et scandales sanitaires successifs. (L'AFSSAPS a été créée à la suite de l'affaire du sang contaminé en 1993 et transformée en 2012 en l'ANSM à la suite du scandale du Mediator® de 2009). - Son circuit de distribution : en France, celui-ci est exclusivement constitué d'officines de pharmacie (qui s'approvisionnent auprès de grossistes-répartiteurs) et de pharmacies à usage intérieur (PUI) des établissements de santé (qui s'approvisionnent auprès des fabricants directement). 58 - Son prix : un médicament possède également un aspect économique, régulé différemment selon les pays. En France, c'est le CEPS qui fixe le prix des médicaments remboursables aux assurés sociaux à la suite d'une négociation avec l'entreprise pharmaceutique. Le prix trouve son équilibre entre besoins sanitaires et contraintes de financement. L'exploitation commerciale du médicament est protégée par un brevet. Ces différentes notions s'articulant autour du médicament nécessitent une surveillance et une réglementation approfondie de ce dernier. I. Mise en place d'une réglementation du médicament (40) Les médicaments sont rendus de plus en plus disponibles et accessibles. Leur consommation ne va donc cesser d'augmenter. Ainsi, à partir de l'année 1945 une politique de régulation du médicament se met en place, afin d'encadrer ce produit non anodin. En effet, le 5 mai 1945, l'ordonnance relative à l'institution d'un Ordre national des pharmaciens est publiée au Journal Officiel du 6 mai 1945. Par la suite, afin d'organiser d'avantage cette politique du médicament et d'en légiférer les règles, le Code de la Pharmacie nait par décret du 6 novembre 1951 et est publié au Journal Officiel du 20 novembre de la même année. Quelques temps avant que ne soit établie la responsabilité du Thalidomide® dans la malformation de nombreux nouveau-nés, la réforme du visa en France intervient le 4 février 1959, avec la fondation de la Commission d'AMM. Six ans plus tard, la directive 65/65/C2 est adoptée et marque le début d'une harmonisation communautaire dans le domaine des médicaments. Cette réforme de l'année 1959 s'inscrit dans un contexte favorable au renforcement des contrôles. Plusieurs mesures de précautions sont ensuite officialisées : un rapport d'expertise pharmacologique et toxicologique suggère la mise en place obligatoire d'une date de péremption sur le conditionnement. Les dispositions de l'ordonnance de l'année 1959 sont en partie reprises par l'ordonnance du 23 septembre 1967 relative à l'AMM. Cette ordonnance est adoptée pour placer la réglementation pharmaceutique française en conformité avec la directive européenne de l'année 1965. L'AMM réunit alors le visa et l'autorisation de débit. (41) De façon à faciliter l'élaboration des dossiers d'AMM, tout en prenant en compte les pratiques des industriels, les pouvoirs publics s'intéressent à la normalisation des expertises En effet, 59 les protocoles des essais requis pour l'AMM sont régulièrement précisés via des arrêtés. Ces protocoles sont définis en fonction des compétences scientifiques et techniques. Plus tardivement apparaît la notion de protection des personnes participant aux essais cliniques. Le Code de Nuremberg, en 1947, autorise l'expérimentation humaine des médicaments, sous respect d'un certain nombre de conditions dont la première est le consentement volontaire. Depuis l'année 1988, ces essais cliniques sont réglementés par la loi Huriet-Sérusclat qui a donné un cadre légal à des principes d'éthique. Plusieurs accidents graves, et notamment le scandale sanitaire du Thalidomide®, révèlent brutalement à l'opinion publique l'existence des risques liés à l'utilisation des médicaments, et la nécessité de prendre en compte ces risques et de les mesurer dans les divers contrôles effectués. Ces accidents ont certainement favorisé, de la part des patients, l'exigence de la sécurité, au moment où s'accélère la généralisation de l'accès aux soins. Au début des années 1970, la création d'un service de pharmacovigilance est promue par les industriels français. Cette initiative est appuyée par le ministère de la Santé et permet la création du Centre National de la Pharmacovigilance en 1973. Cette grande avancée est suivie en 1975 par la mise en place de la Banque d'Information Automatisée sur le Médicament. Ces deux créations ont permis d'importants progrès relatifs à la circulation de l'information sur les médicaments commercialisés. Cependant, seuls les professionnels de santé sont concernés par cette information. Cette initiative met en exergue le fait que les industriels sont de plus en plus sensibles à l'existence des risques thérapeutiques liés à l'utilisation des médicaments dont les effets indésirables ne sont pas tous connus au moment de leur mise sur le marché. Les années 1980-1990 sont marquées par une rupture, provoquée par un ensemble de facteurs. Les évènements les plus connus sont sans ute l'épidémie de SIDA, l'affaire du sang contaminé et les scandales sanitaires suivants. En janvier 1994, l'accord-cadre Etat-SNIP définit pour une durée de trois ans la politique conventionnelle ayant trait aux médicaments et organise la signature des conventions entre les industries pharmaceutiques et l'Etat. Les laboratoires s'engagent à la diminution de leurs dépenses relatives à la promotion des médicaments et à promouvoir leur bon usage. Ils 60 s'engagent, par ailleurs, à rendre accessible certaines données. Concernant le prix d'un médicament fixé par convention, celui-ci pourra être revu plusieurs fois au cours de l'année, à la baisse ou à la hausse, en fonction du volume des ventes. Toujours dans une démarche de renforcement de la sécurité sanitaire, il est annoncé dans le journal Le Monde, en septembre 1994, la mise en place de mesures destinées à la lutte contre la corruption des médicaments, notamment concernant les AMM. Ces mesures sont introduites dans le CSP. Au cours de la même année, des recommandations de bonnes pratiques médicales relatives aux pathologies sont instaurées. Elles portent le nom de RMO et sont mises en place afin d'éviter les prescriptions abusives. Par la suite, en juillet 1998, la loi relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme est promulguée et publiée au Journal Officiel. Cette loi engendre la transformation de l'AFSSAPS, qui est responsable de la sécurité sanitaire des médicaments et des produits de santé. En Juin 2001, la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, Elisabeth Guigou, présente un « Plan médicaments » dont les objectifs sont au nombre de trois : améliorer le bon usage des médicaments, développer les médicaments génériques et agir sur la régulation des dépenses de santé. L'année suivante, le Syndicat national de l'industrie pharmace tique se transforme en « Les Entreprises du Médicaments », plus connu sous l'appellation LEEM. Il s'agit de l'organisation professionnelle des entreprises du médicament agissant en France. A la suite de la création du LEEM, en août 2004, la loi relative à l'assurance maladie est promulguée et publiée au Journal Officiel. Cette loi envisage la création d'une Haute Autorité de Santé ayant pour mission notamment l'évaluation de l'efficacité des médicaments. En février 2007, la loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire relatif au domaine des médicaments est promulguée et publiée au Journal Officiel. La refonte de la politique du médicament En France, les modalités de contrôle et de surveillance des médicaments traduisent une volonté de protéger la santé publique, celle-ci étant considérée comme un bien d'intérêt général. Toutefois, ces mesures ont été régulièrement redéfinies, ou précisées, influencées par de nouvelles exigences, parfois permises grâce aux progrès techniques et scientifiques, établies via un accord, plus ou moins parfait, entre les producteurs, les pouvoirs publics et les consommateurs. Les transformations connues par le contrôle des produits pharmaceutiques ne sont pas linéaires. En effet, un acquis scientifique, un changement de contexte politique, un accident, une crise, un scandale sanitaire peuvent influer sur les modalités de la surveillance des produits conduite par les pouvoirs publics comme sur les pratiques d'encadrement par les industriels, sans que ces changements soient forcément simultanés ou liés. De ce fait, la réalisation d'un objectif de sécurité optimale en matière de médicaments résulte des interactions entre les différents acteurs concernés par l'ensemble du cycle de vie des médicaments, de leur production à leur utilisation. Il peut être alors intéressant de rechercher en quoi l'évolution de ces interactions a pu agir sur les formes du contrôle et de surveillance des médicaments et sur les finalités de ce contrôle. En outre, cette sécurité est l'un des principaux éléments de la définition légale du médicament. A la suite du scandale sanitaire du Mediator®, le Président de la République de l'époque a annoncé une refonte de la politique du médicament. (40) En effet, ce dernier annonce vouloir renforcer le système de pharmacovigilance au travers de procédures se voulant plus réactives et plus efficaces et garantir d'avantage l'indépendance des relations entre les 62 différents acteurs du domaine du médicament en préconisant plus de transparence et d'impartialité. En janvier 2011, l'IGAS remet son rapport sur le Mediator® au ministre du Travail et de la Santé. Le rapport est organisé autour des principaux temps de la vie du médicament ainsi qu'autour de l'analyse des principales responsabilités identifiées par la mission. (43) Dans le prolongement de ce travail, les ministres avaient souhaité que l'IGAS remette un deuxième rapport, portant sur le système de pharmacovigilance ainsi que sur la gouvernance de la chaîne du médicament. La mission s'est appuyée sur une analyse de la littérature, sur de nombreuses auditions et sur plusieurs comparaisons internationales. Ce rapport souligne ainsi les limites actuelles du système de pharmacovigilance, le caractère quasi inexistant d'une chaîne du médicament et propose des solutions pragmatiques afin d'améliorer le dispositif. (44) En février 2011, des assises sur le médicament sont lancées, avec pour objectif la restauration de la confiance dans le système de sécurité sanitaire des médicaments et des produits de santé. Six groupes de travail structurent ces assises : (45) - Groupe 1 : Optimiser les conditions d'octroi de l'AMM. - Groupe 2 : Accroître et renforcer le système de surveillance des médicaments. - Groupe 3 : Encadrer les prescriptions hors AMM. - Groupe 4 : Renforcer l'information sur les médicaments. - Groupe 5 : Perfectionner la gouvernance et iser les activités des divers organismes intervenant sur les médicaments. - Groupe 6 : Renforcer le contrôle et l'évaluation des dispositifs médicaux. En mai 2011, un projet de loi de finances est présenté en Conseil des ministres. Ce projet de loi propose un système d'indemnisation des dommages subis par les patients ayant été exposés au Mediator® et à ses génériques. Un mois plus tard, le rapport de synthèse des assises du médicament est remis au ministre du Travail, de l'Emploi et de la Santé. A cette même date, l'IGAS publie deux rapports d'information sur le Mediator® : l'un est déposé par la Commission des affaires sociales en conclusion des travaux de la mission sur le Mediator® et la pharmacovigilance, l'autre est réalisé au nom de la mission commune d'information sur : « Mediator® : évaluation et contrôle des médicaments ». Le ministre du Travail et de la Santé expose, à la même période, les différents axes de la réforme de la politique du médicament.
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Propriétés électrochimiques et réponse structurale du polymorphe gamma'-V2O5 vis-à-vis de l'insertion du lithium et du sodium
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Propriétés électrochimiques et réponse structurale du polymorphe gamma’-V2O5 vis-à-vis de l’insertion du lithium et du sodium Marianne Safrany Renard To cite this version: Marianne Safrany Renard. Propriétés électrochimiques et réponse structurale du polymorphe gamma’V2O5 vis-à-vis de l’insertion du lithium et du sodium. Matériaux. Université Paris-Est, 2017. Français. NNT : 2017PESC1185. tel-01799564 HAL Id: tel-01799564 https://theses.hal.science/tel-01799564 Submitted on 24 May 2018 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents , whether they are published or not . The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad , or from public or private research center s . L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non , émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés . THESE Pour obtenir le grade de DOCTEUR DE L’UNIVERSITE PARIS-EST CRETEIL VAL DE MARNE Ecole doctorale : SIE Sciences, Ingénierie et Environnement Spécialité « Sciences des Matériaux » Présentée et soutenue publiquement Par Madame SAFRANY RENARD Marianne Le 14 décembre 2017 Titre : Propriétés électrochimiques et réponse structurale du polymorphe ’-V2O5 vis-à-vis de l’insertion du lithium et du sodium JURY Mme. Claire HEROLD M. Patrick ROZIER M. Sylvain FRANGER M. Nicolas EMERY Mme. Rita BADDOUR-HADJEAN M. Jean-Pierre PEREIRA-RAMOS Directrice de recherche CNRS Maître de conférences, Univ. Toulouse 3 Professeur, Univ. Paris-Sud 11 Chargé de recherche CNRS Directrice de recherche CNRS Directeur de recherche CNRS Rapporteur Rapporteur Examinateur Examinateur Directrice de thèse Invité Remerciements Ce travail de thèse a été effectué au sein du Groupe d’Electrochimie et de Spectroscopie des Matériaux (GESMAT) de l’Institut de Chimie et des Matériaux Paris-Est de Thiais (ICMPE – UMR7182). Je tiens à remercier M. Michel Latroche, directeur de l’ICMPE de m’avoir accueillie au sein de l’institut. Je remercie également M. Jean-Pierre Pereira-Ramos, directeur de recherche CNRS et responsable de l’équipe GESMAT de m’avoir permis de travailler au sein de son équipe. Je tiens également à le remercier pour sa disponibilité, ses conseils et son aide continue tout au long de ces travaux. Cette thèse a été dirigée par Mme. Rita Baddour-Hadjean, directrice de recherche CNRS au GESMAT et à ce titre, je tiens particulièrement à lui adresser un grand merci pour tout ce qu’elle m’a appris dans le domaine des relations structure-propriétés électrochimiques des matériaux d’électrodes. Je la remercie pour son encadrement sans faille, rédaction comprise. J’ai apprécié ses encouragements ainsi que sa vision sur le métier de chercheur. Merci également à M. Nicolas Emery, chargé de recherche CNRS au GESMAT pour toute l’aide apportée durant ces trois ans, notamment pour les longues discussions concernant les aspects cristallographiques de ce travail et la formation au logiciel GSAS. Je souhaite également remercier Mme. Claire Hérold, directrice de recherche à l’Institut Jean Lamour de l’Université de Lorraine et M. Patrick Rozier, maître de conférence au Centre Inter-Universitaire de Recherche et d’Ingénierie des Matériaux de Toulouse d’avoir accepté d’évaluer ce travail en tant que rapporteurs. Mes remerciements vont aussi à M. Sylvain Franger, professeur à l’Institut de Chimie Moléculaire et des Matériaux d’Orsay d’avoir bien voulu examiner ce travail. Je remercie également les personnes de l’ICMPE qui m’ont aidé durant ces années de thèse : Mme. Gladys Bernari, Gestionnaire administrative et financière des équipes ESO (Electrochimie et Synthèse Organique) et GESMAT pour toute l’aide administrative depuis mon arrivée à l’Institut. Merci également à MM. Benjamin Villeroy, Christian Vard et Rémy Pirès, assistants ingénieurs pour leurs aides respectives à la préparation du composé 3 mécano-broyé, à l’assistance lors des derniers montages de piles boutons et à la caractérisation par microscopie électronique à balayage. Je tiens aussi à remercier tous les membres de l’équipe GESMAT : Diane Muller-Bouvet, Barbara Laïk pour toutes nos discussions, scientifiques ou non, autour d’un café et Stéphane Bach pour les pauses critiques cinéma/séries. Ne plus entendre vos cris depuis le bout du couloir risque de me manquer! Un grand merci à Da Huo, ATER au GESMAT, avec qui j’ai partagé mon bureau pendant presque deux ans, pour son aide au quotidien, notamment en ce qui concerne la mise en place des expériences d’impédance, mais aussi pour sa bonne humeur et son sourire communicatif (et ses raviolis chinois et perles de coco!) qui ont égayé le laboratoire durant ses deux années de présence parmi nous. J’ai également une pensée pour tous les anciens doctorants et stagiaires qui ont croisé ma route lors de ces années à l’ICMPE. Je pense notamment à Nguyen Huynh Le, Alicia Contreras, Rachida Lherdoum, Julie Lewi, Boris Slautin, Thomas Cavoué et Quentin Denoyelle pour les bons moments passés ensemble. Pour terminer je souhaite évidemment remercier mes proches qui ont rendu tout cela possible. Tout d’abord ma mère et mon père (mais aussi beau-papa) qui m’ont toujours poussée à faire mieux et sans qui je n’en serais pas là aujourd’hui. Merci à mon frère et à ma petite sœur pour leur affection qui m’a beaucoup apporté ces dernières années malgré la distance et mes longues absences. Je remercie également ma grand-mère et mon papé, leur carrière d’enseignants en physique-chimie n’étant évidemment pas étrangère à mes choix de parcours universitaire et professionnel. Une pensée également pour tous mes amis qui m’ont encouragée durant ces trois ans ainsi qu’à ma belle-famille et leur soutien depuis Marseille. Enfin j’adresse mes remerciements les plus affectueux à mon mari pour m’avoir accompagnée tout au long de cette thèse et pour sa patience et ses encouragements quotidiens. Ce mémoire leur est particulièrement dédié. 4 Sommaire SOMMAIRE Introduction générale.................................................................................... 9 CHAPITRE I : LES BATTERIES LITHIUM-ION ET SODIUM-ION : ANALYSE BIBLIOGRAPHIQUE............................................................................................................ 17 I.1. Les batteries lithium-ion.......................................................................... 18 I.1.1. Principe de fonctionnement...................................................................... 18 I.1.2. Les matériaux d’électrode positive.............................................................. 20 I.1.3. Les matériaux d’électrode négative et les électrolytes....................................... 25 I.2. Les batteries au sodium...........................................................................26 I.2.1. Les matériaux d’électrode positive.............................................................. 31 I.2.2. Les matériaux d’électrode négative............................................................. 41 Bibliographie du chapitre I.............................................................................. 44 CHAPITRE II. RAPPELS SUR LE MECANISME D’INSERTION ELECTROCHIMIQUE DU LITHIUM DANS α-V2O5......................................... 51 Introduction................................................................................................ 52 II.1. L’insertion électrochimique du lithium dans α-V2O5.................................................. 52 II.1.1. Structure de V2O5................................................................................. 52 II .1.2. Mé canisme structural pendant le fonctionnement électrochimique de V2O5............. 54 APhases électrochimiques LixV2O5 formées dans le domaine de composition 0 < x ≤ 1................................................................................ ................................ .55 BR éversibilité des mécanismes structuraux dans le domaine de composition 0 < x ≤ 1.................................................................................................................................... 58 CPhases électrochimiques LixV2O5 formées dans le domaine de composition 1 ≤ x ≤ 2................................................................................................................ 59 DRéversibilité des mécanismes structuraux dans le domaine de composition 0 < x ≤ 2................................................ ................................ ................................ 62 II.1.3. Activité électrochimique de la phase γ-LiV2O5................................................63 II.2. La forme polymorphe γ'-V2O5.................................................................. 65 II.2.1. Synthèse chimique de γ'-V2O5................................................................... 65 5 Sommaire APremière étape : synthèse du bronze γ-LiV2O5....................................................... 65 BDeuxième étape : obtention de γ'-V2O5..................................................................67 II.2.2. Structures comparées de γ'-V2O5 et α-V2O5.................................................. 67 ADescription structural e par affinement Rietveld des diagrammes de diffraction des rayons X................................................................................................................ 67 BDescription structurale à l’échelle atomique par spectroscopie Raman et calculs DFT..................................................................................................................... 70 Conclusion................................................................................................ 75 Bibliographie du chapitre II............................................................................. 76 CHAPITRE III. ETUDE DE L’INSERTION ELECTROCHIMIQUE DU LITHIUM DANS γ'-V2O5............................................................................ ................ 81 Introduction................................................................................................ 82 III.1. Synthèse et caractérisation de γ'-V2O5.......................................................82 III.2. Etude électrochimique et structurale de l’insertion du lithium dans γ’-V2O5....... 89 III.2.1. Etude électrochimique........................................................................... 89 AFenêtre de tension 2,5 4 V................................................................................ 90 BFenêtre de tension 2,15 4 V..............................................................................94 III.2.2. Etude des changements structuraux impliqués pendant le premier cycle de déchargecharge.......................................................................................... 100 AChangements structuraux impliqués au cours de la première décharge..................... 101 BChangements structuraux impliqués au cours de la première charge........................ 113 CCyclages dans des domaines de composition restreints.......................................... 116 III.2.3. Etude de la cinétique de la réaction d’insertion des ions lithium dans γ’-V2O5 par spectroscopie d’impédance complexe......................................................118 APrincipe de la spectroscopie d’impédance complexe............................................. 119 BE tude de la cinétique de la réaction d’insertion des ions lithium au cours de la première dé charge.............................................................................................................. 123 Conclusion................................................................................................131 Bibliographie du chapitre III........................................................................... 133 6 Sommaire CHAPITRE IV. ETUDE DE L’INSERTION ELECTROCHIMIQUE DU SODIUM DANS γ'-V2O5.......................................................................................... 135 Introduction .............. ................................................................................ 136 IV.1. Etude électrochimique et structurale de l’insertion du sodium dans γ’-V2O5................................................................................................... 137 IV.1.1. Etude électrochimique ......................................................................... 137 IV.1.2. Etude des changements structuraux pendant le fonctionnement à température ambiante.................................................................................................. 146 AChangements structuraux impliqués au cours de la première décharge..................... 147 BChangements structuraux impliqués au cours de la première charge et caractérisation de l’électrode après 70 cycles...... ................................................................................ 153 IV.1.3. Résolution structurale de la phase γ-Na0,97V2O5.......................................... 157 AAnalyse qualitative à partir du diagram me des rayons X et du spectre Raman........... 157 BA ff in ement Rietveld de la phase γ-Na0,97V2O5 ....... ................................................ 163 CDescription structurale à l’échelle atomique par spectr os copie Raman.... ................ 182 IV.1.4. Etude de la cinétique de la réaction d’insertion des ions sodium dans γ’-V2O5 par spectroscopie d’impédance complexe......................................................188. AEtude cinétique de la première décharge............................................................. 189 BEtude cinétique de la première charge................................................................ 197 IV.1.5. Mécanisme structural pendant la charge à 50°C : résultats préliminaires.............. 199 IV.2. Etude du composé γ’-V2O5 mécano-broyé : Effet de la taille des cristallites....... 203 IV.2.1. Protocole de mécano-broyage et caractérisation des poudres mécano-broyées........203 IV.2.2. Effet du broyage sur les performances électrochimiques................................. 207 2 IV.2.3. Etude des changements structuraux pour le composé mécano-broyé...................212 IV.2.4. Etude de la cinétique de la réaction d’insertion des ions sodium dans le composé mécano-broyé par spectroscopie d’impédance complexe...............................218 AEtude cinétique de la première décharge.............................................................219 BEtude cinétique de la première charge................................................................ 226 IV.3. Mise en place de mesures par spectroscopie Raman in situ/operando : Premiers résultats.................................................................................................. 228 IV.3.1. Dispositif expérimental........................................................................ 229 IV.3.2. Etude in situ/operando de la première décharge...........................................232 7 Sommaire Conclusion............................................................................................... 240 Bibliographie du chapitre IV...........................................................................243 Conclusion générale................................................................................... 247 ANNNEXES............................................................................................. 253 Annexe 1. Aspects expérimentaux en électrochimie.............................................254 Annexe 2. Techniques de caractérisation utilisées...............................................259 Annexe 3. Approche par somme de liaisons de valence........................................269 Annexe 4. Sélection de la solution la plus probable à l’aide du test de Hamilton......... 271 Annexe 5. Fiches ASTM et indexation des composés étudiés................................. 275 8 Introduction générale Introduction générale L’Energie est vitale pour l’homme qui en consomme depuis toujours de différentes manières. Depuis la domestication du feu il y a 500 000 ans, il a appris à exploiter les sources d’énergie disponibles dans la nature. Durant les trois derniers siècles, la maitrise progressive de différentes techniques de transformation de l’énergie (machine à vapeur, développement de l’électricité, invention du moteur à explosion...) ont permis l’accroissement de l’énergie disponible avec pour conséquence une transformation radicale de notre société. Ainsi, en 200 ans en France, la consommation énergétique a été multipliée par 14 tandis qu’en même temps l’espérance de vie est passée de moins de 30 ans à 79 ans [1]. L’énergie est ainsi essentielle au développement économique et à l’amélioration des conditions de vie. La question énergétique est ainsi au cœur des préoccupations internationales. L'économie mondiale se trouve en effet face un défi majeur : répondre aux besoins croissants en énergie tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre (GES). La production d'énergie contribuerait en effet aux deux tiers des émissions de GES. Les systèmes actuels reposent essentiellement sur trois ressources énergétiques fossiles : le gaz naturel (22 %), le pétrole (36 %) et le charbon (25 %). L’émission de GES engendrée par ces sources d’énergie a atteint un niveau tel qu’il devient une menace pour l’avenir de la planète. Depuis plusieurs dizaines d’années, la communauté de la recherche met en garde contre le dérèglement climatique notamment à travers le Groupe International sur l’Evolution du Climat (GIEC) qui a été créé en 1988 par l’Organisation des Nations Unies (ONU). Selon J. M. Chevalier, professeur à l'Université Paris Dauphine [2], l'un des défis majeurs de ce siècle est de résoudre « l'équation de Johannesburg » : produire davantage d'énergie pour contribuer au développement économique des plus pauvres tout en réduisant les émissions de GES. Mais comment maintenir la croissance économique tout en allant vers des énergies moins carbonées? L’opinion publique mondiale prenant peu à peu en compte ces problématiques, une transition énergétique ouvrant la voie aux énergies renouvelables est en cours. La plupart des sources d’énergies renouvelables (solaire, éolien), sont intermittentes et doivent donc être associées à un système de stockage de l’énergie. Parmi ces systèmes, le stockage électrochimique est une solution efficace et pratique. Au-delà du développement de modules stationnaires à grande échelle, ce type de stockage de l’énergie s’est énormément 9 Introduction générale développé ces dernières dizaines d’années car il est parfaitement adapté à la mobilité, de par le poids et le volume faible de ce genre de dispositifs. Ainsi, il convient actuellement aux technologies mobiles (domaine de la communication) et aux véhicules individuels (domaine de la mobilité). Parmi les différents systèmes de stockage de l’énergie sous forme chimique, la batterie lithium-ion (LIB) s’est imposée dans ces deux derniers domaines au regard de l’énergie et de la puissance que ce type de dispositif peut restituer [3]. La LIB est en effet la technologie la plus performante du fait de sa grande densité d’énergie massique et volumique, sa densité de puissance, sa durée de vie et son degré de sécurité, même si puissance et sécurité sont des points qui demandent encore des améliorations. Le diagramme de la Figure 1 indique clairement la supériorité de la LIB en termes de performances par rapport aux systèmes aqueux à électrolyte acide comme les batteries au plomb ou les batteries alcalines Ni-Cd et Ni-MH (si l’on excepte la batterie Li-métal dont la maturité technologique n’a jamais été atteinte du fait des problèmes importants de sécurité liée à la réactivité du lithium et sa croissance dendritique en cyclage). Figure 1. Principales technologies pour le stockage électrochimique de l’énergie dans le diagramme de Ragone [3]. Ainsi, les LIB équipe aujourd’hui l’immense majorité des dispositifs électroniques mobiles et leur part dans le véhicule électrique est amenée à atteindre 100% d’ici quelques années. Cela entrainera probablement, d’ici moins de 50 ans, le renouvellement complet du parc automobile mondial [4]. Il est donc légitime de se poser la question des réserves de lithium. En effet, dans le cas fort probable d’une utilisation intensive de cette ressource suite à la 10 Introduction générale pénurie de pétrole, une insuffisance en élément lithium est envisagée par certaines études d’ici une centaine d’années [5]. Surtout, la position géographique mondiale de ces ressources est inégale [6] et étant donné le contexte géopolitique mondial actuel, une dépendance forte à un petit nombre de pays est à proscrire dans le cadre d’un développement durable généralisé. Pour ces raisons, d’autres technologies de batteries sont examinées à travers le monde. Les ressources illimitées en sodium, ion alcalin aux propriétés chimiques proches du lithium, justifient les recherches visant la chimie d’insertion de cet élément dans divers réseaux hôtes. Il faut signaler que les premières réactions d’insertion du sodium ont été réalisées par diverses équipes françaises et américaines dans les années 1980 avant d’être délaissées au profit des réactions avec les ions lithium. En effet, les travaux de C. Delmas et coll. [7] avaient montré l’intérêt d’oxydes lamellaires de type NaxCoO2 de symétrie monoclinique présentant des tensions de travail assez élevées entre 3,5 V et 2 V mais de faibles capacités. D’autres travaux précurseurs sur des chalcogénures de métaux de transition (NaxTiS2, NaxTaS2) ont été rapportés par K.M. Abraham [8], avec des tensions et des rechargeabilités intéressantes. En 1993, J. P. Pereira-Ramos et coll. ont étudié l’insertion du sodium dans la birnessite de manganèse de structure lamellaire [9]. En 1989, le même groupe s’est intéressé au bronze Na0,33V2O5 [10], mettant en évidence des capacités spécifiques intéressantes, de l’ordre de 80 mAh g-1 mais une durée de vie insatisfaisante. Une longue parenthèse a duré ensuite jusqu’en 2011, date à laquelle les travaux précurseurs de S. Komaba et coll. ont démontré le concept de batterie sodium-ion (SIB) en utilisant une électrode positive à base d’oxyde lamellaire et une négative de carbone dur désordonné [11]. Aujourd’hui la technologie SIB représente l’alternative la plus sérieuse au lithium, comme en témoigne la recherche sur ce système qui émerge à nouveau aujourd’hui au niveau mondial, avec un nombre exponentiel de publications depuis 2010 [12, 13]. Une grande variété de matériaux d’électrode positive et négative a été proposée. De nombreux oxydes ont été étudiés comme cathodes potentielles de SIBs : Na CoO2 [14], Na2/3(Fe1/2Mn1/2)O2 [15], NaMnO2 [16], NaCrO2 [17], NaxVO2 [18, 19], Na1,5+yVO3 [20], Na0,33V2O5 [21, 22]. Cependant, un bon compromis entre une capacité satisfaisante, une bonne stabilité de cette capacité en cyclages et une tension de travail élevée n’a pas encore été atteint. Les matériaux lamellaires présentant un espace inter-feuillets de Van der Waals constituent des charpentes idéales pour l’intercalation d’espèces hôtes cationiques, des distorsions 11 Introduction générale structurales modérées étant attendues de ces réseaux ouverts. Parmi ces structures, le pentoxyde de vanadium est un composé modèle très intéressant. La forme orthorhombique α-V2O5 a été identifiée depuis les années 70 comme matériau cathodique attractif de batteries au lithium et a fait l’objet de nombreuses études [23, 24]. Ce n’est que très récemment, en 2015, que l’insertion électrochimique du sodium a pour la première fois été étudiée à température ambiante dans α-V2O5 [25]. J. P. Pereira-Ramos et coll. ont démontré qu’il était possible de cycler réversiblement l’oxyde orthorhombique α-V2O5 en milieu sodium à température ambiante : une capacité réversible de 120 mAh g-1 est mise en évidence au potentiel de 1,6 V vs. Na+/Na au régime C/10 [26]. Ces performances encourageantes motivent la poursuite du développement des oxydes de vanadium comme cathodes de batteries au sodium. Une approche alternative pour identifier des composés polymorphes stables de V2O5 consiste à considérer l’extraction d’espèces métalliques M des bronzes MxV2O5. Une telle démarche permet de bénéficier de nouveaux agencements structuraux présentant des empilements originaux (simples, doubles, plissés...), avec à la clé une capacité spécifique plus élevée. J. M. Cocciantelli et coll. ont appliqué cette stratégie avec succès pour obtenir la forme polymorphe γ’-V2O5 à partir de l’oxydation du bronze γ-LiV2O5 [27]. Une structure en feuillets déformée encore plus ouverte que α-V2O5 (distance inter-feuillets de 5,05 Å au lieu de 4,35 Å) a été décrite [27]. Néanmoins, en dépit de ces caractéristiques structurales intéressantes, les propriétés d’insertion de γ’-V2O5 n’ont encore jamais été étudiées, que ce soit vis-à-vis du lithium ou du sodium. Cette carence ainsi que l’expertise du groupe d’Electrochimie et de Spectroscopie des Matériaux (GESMAT) dans le domaine des oxydes de vanadium nous a amenés à nous intéresser à la forme polymorphe γ’-V2O5. L’objectif de ce travail de thèse a consisté à réaliser l’étude de l’insertion électrochimique du lithium et du sodium dans γ’-V2O5. Une attention particulière est portée sur les mécanismes mis en jeu pendant les processus électrochimiques, qui nous a conduit à développer systématiquement, en complément de l’étude du comportement électrochimique, des études structurales combinant les informations fournies par la diffraction des rayons X et la spectroscopie Raman. Ce mémoire de thèse est structuré de la façon suivante : le premier chapitre présente une analyse bibliographique des performances de matériaux d’électrodes pour accumulateurs 12 Introduction générale lithium-ion et sodium-ion. La littérature récente relative aux batteries sodium-ion est particulièrement développée, notamment en ce qui concerne les matériaux d’électrode positive. Dans un second chapitre, le mécanisme d’insertion électrochimique du lithium dans le composé parent α-V2O5 est rappelé. Une description des différentes phases lithiées LixV2O5 (0 < x ≤ 2) mises en jeu est détaillée et l’intérêt de la forme polymorphe γ’-V2O5, produit de l’oxydation de la phase lithiée γ-LiV2O5 est présenté. Les caractéristiques structurales de γ’-V2O5 feront l’objet d’une attention particulière. Des résultats récents obtenus grâce à la mise en œuvre combinée de spectroscopie Raman et calculs DFT permettront notamment de mettre en évidence les similarités et distinctions structurales de γ’-V2O5 et α V2O5. Le troisième chapitre présente l’étude de l’insertion électrochimique du lithium dans γ’-V2O5. Les caractéristiques électrochimiques, l’étude cinétique par spectroscopie d’impédance complexe et les changements structuraux intervenant pendant la réaction d’insertion, étudiés par diffraction des RX et spectroscopie Raman, sont décrits. Dans le quatrième chapitre, l’insertion électrochimique du sodium dans γ’-V2O5 est détaillée. L’étude des changements structuraux par diffraction des rayons X et spectroscopie Raman pendant la décharge et la charge permet de déterminer la nature du mécanisme mis en jeu pendant les réactions électrochimiques. Un dispositif permettant d’effectuer des mesures par spectroscopie Raman operando est décrit et des résultats préliminaires sont présentés. La formation électrochimique d’une nouvelle phase sodiée, γ-Na0,97V2O5, dont l’existence n’avait encore jamais été reportée, est démontrée. La résolution structurale de cette phase fait l’objet d’une section dédiée. Des performances électrochimiques remarquables sont mises en évidence. Un compromis très intéressant en termes de capacité spécifique, de tension de fonctionnement et de stabilité en cyclage est obtenu, qui permet de situer l’oxyde γ’-V2O5 parmi les matériaux d’électrode positive les plus performants pour batterie au sodium. Enfin, une conclusion générale résume les résultats majeurs obtenus au cours de ce travail de thèse et propose des perspectives. 13 Introduction générale Références 1http://www.ined.fr/. 2J. M. Chevalier et A. Grandjean, Conférence sur le couple énergie environnement, Séminaire Développement durable et économie de l'environnement organisé par la chaire Développement durable de l'Ecole polytechnique EDF et par l'Iddri (Institut du développement durable et des relations internationales), 20 mai 2008. 3J. M. Tarascon, M. Armand, Issues and challenges facing rechargeable lithium batteries. Nature 414 (2001) 359-367. 4http://www.ffe.de/en, R.C.F.E.E. 5C. Grosjean, P. H. Miranda, M. Perrin, M. and P. Poggi, Assessment of world lithium resources and consequences of their geographic distribution on the expected development of the electric vehicle industry. Renew. Sust. Energ. Rev. 16 (2012) 1735-1744. 6Meridian International Research, The trouble with lithium 2, under the microscope (2008) 7C. Delmas, J. J. Braconnier, C. Fouassier, P. Hagenmuller, Electrochemical intercalation of sodium in NaxCoO2 bronzes, Solid State Ion. 4 (1981) 165-169. 8K. M. Abraham, Intercalation positive electrodes for rechargeable sodium cells, Solid State Ion. 7 (1982) 199-212. 9S. Bach, J.P. Pereira-Ramos, N. Baffier, Electrochemical sodium insertion into the sol-gel birnessite manganese dioxide, Electrochim. Acta 38 (1993) 1695-1698. 10S. Bach, N. Baffier, J. P. Pereira-Ramos, R. Messina, Electrochemical sodium intercalation in Na0.33V2O5 bronze synthesized by a sol-gel process, Solid State Ion. 37 (1989) 41-49. 11S. Komaba, W. Murata, T. Ishikawa, N.Yabuuchi, T. Ozeki, T. Nakayama, A. Ogata, K. Gotoh, K. Fujiwara, Electrochemical Na insertion and solid electrolyte interphase for hardcarbon electrodes and application to Na-ion batteries, Adv. Funct. Mater. 21 (2011) 38593867. 12N. Yabuuchi, K. Kubota, M. Dahbi, S. Komaba, Research developments on sodium-ion batteries, Chem. Rev. 114 (2014) 11636–11682. 13https://lejournal.cnrs.fr/articles/batterie-sodium-ion-une-revolution-en-marche 14R. Berthelot, D. Carlier, C. Delmas, Electrochemical investigation of the P2–NaxCoO2 phase diagram, Nat. Mater. 10 (2011) 74-U3. 14 Introduction générale 15N. Yabuuchi, M. Kajiyama, J. Iwatate, H. Nishikawa, S. Hitomi, R. Okuyama, R. Usui, Y. Yamada, S. Komaba, V. P2-type Nax[Fe1/2Mn1/2]O2 made from earth-abundant elements for rechargeable Na batteries, Nat. Mater. 11 (2012) 512-517. 16X. Ma, H. Chen, G. Ceder, G. Electrochemical properties of monoclinic NaMnO2, J. Electrochem. Soc. 158 (2011) A1307-1312. 17S. Komaba, C. Takei, T. Nakayama, A. Ogata, N. Yabuuchi, Electrochemical intercalation activity of layered NaCrO2 vs. LiCrO2, Electrochem. . 12 (2010) 355358. 18M. Guignard, C. Didier, J. Darriet, P. Bordet, E. Elkaim, C. Delmas, P2-NaxVO2 system as electrodes for batteries and electron-correlated materials, Nat. Mater. 12 (2013) 74-80. 19D. Hamani, M. Ati, J. M.Tarascon, P. Rozier, NaxVO2 as possible electrode for Na-ion batteries, Electrochem. Comm. 13 (2011) 938-941. 20G. Venkatesh, V. Pralong, O. I. Lebedev, V. Caignaert, P. Bazin, B. Raveau, Amorphous sodium vanadate Na1.5+yVO3, a promising matrix for reversible sodium intercalation, Electrochem. Comm. 40 (2014) 100-102. 21S. Bach, N. Baffier, J. P. Pereira-Ramos, R. Messina, Electrochemical sodium intercalation in Na0.33V2O5 bronze synthesized by a sol-gel process, Solid State Ionics 37 (1989) 41-49. 22H. M. Liu, H. S. Zhou, L. P. Chen, Z. F. Tang, W. S. Yang, Electrochemical insertion/deinsertion of sodium on NaV6O15 nanorods as cathode material of rechargeable sodium-based batteries, J. Power Sources 196 (2011) 814-819. 23M.S. Whitthingham, Lithium batteries and cathodes, Chem. Rev. 104 (2004) 4271–4301. 24K. West, B. Zachau-Christiansen, T. Jacobsen, S. Skaarup, Lithium insertion into vanadium pentoxide bronzes, Solid State Ionics 76 (1995) 15–21. 25C. Delmas, H. Cognac-Auradou, J.M. Cocciantelli, M. Menetrier, J.P. Doumerc, The LixV2O5 system: An overview of the structure modifications induced by the lithium intercalation, Solid State Ionics 29 (1994) 257–264. 26D. Bouvet, R. Baddour-Hadjean, M. Tanabe, L. T. N. Huynh, L. M. P. Le, J. P. PereiraRamos, Electrochemically formed α’-NaV2O5: a new sodium intercalation compound, Electrochim. Acta 176 (2015) 586-593. 27J. M. Cocciantelli, P. Gravereau, J. P. Doumerc, M. Pouchard, P. Hagenmuller, On the preparation and characterization of a new polymorph of V2O5, J. Sol. State Chem. 93 (1991) 497-502. 15 16 Chapitre I : Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique Chapitre 1 Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique 17 Chapitre I : Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique I.1. Les batteries lithium-ion Le développement des applications portables actuelles et futures (téléphones, ordinateurs, véhicules électriques...) dans notre société est à l’origine de la forte demande de sources d’énergie autonomes. Ceci pousse les chercheurs à innover sans cesse et à améliorer les mécanismes de stockage de l’énergie via le développement de batteries. La nécessité de la bonne utilisation des sources d’énergie et les contraintes imposées par la protection de l’environnement favorisent la recherche de systèmes électrochimiques avancés, possédant une densité d’énergie élevée, à grande durée de vie, à coût modéré qui seraient capables de fonctionner avec une efficacité accrue et une pollution limitée. Le critère de sécurité est bien sûr toujours primordial. A l’heure actuelle, parmi les différentes technologies de batteries, les batteries lithium-ion (LIBs) sont les plus performantes en termes de densité d’énergie et de puissance, de durée de vie et de sécurité. Pour ces raisons, ces batteries sont présentes dans des secteurs d’application variés comprenant la microélectronique, les téléphones portables, les outils, les capteurs, les satellites, le vélo à assistance électrique, la voiture électrique, etc. Le principe de fonctionnement de telles batteries repose sur l’insertion réversible d’une quantité d’ions lithium dans un matériau hôte couplée au stockage d’une quantité équivalente d’électrons dans chacun des matériaux d’électrode positive et négative utilisés. Le stockage d’ nergie électrique est réalisé grâce au système complet : électrode négative en lithium ou carbone graphite/électrolyte aprotique contenant des ions lithium/électrode positive matériau d’intercalation du lithium. Ces systèmes constituent des dispositifs de stockage d’énergie très performants du fait de leur haute tension de fonctionnement (3,6 V), de leur forte densité d’énergie (200 Wh kg-1) et de leur grande durée de vie (> 1000 cycles). Les LIBs ont été pour la première fois commercialisées par Sony Energitech en 1991 (batterie LiCoO2-graphite). I.1.1 Principe de fonctionnement Le principe de fonctionnement d’un générateur électrochimique est basé sur la conversion d’une énergie chimique en énergie électrique au travers de deux réactions d’oxydoréduction s’opérant aux deux électrodes négative et positive. Dans une LIB, l’électrode positive et l’électrode négative sont des matériaux d’intercalation du lithium. Typiquement, il s’agit de 18 Chapitre I : Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique carbone graphite à l’électrode négative et d’un oxyde lithié de cobalt LiCoO2 à l’électrode positive. Le fonctionnement d’une LIB est illustré sur la Figure 1.1. Au cours de la décharge (utilisation), le réducteur (LiC6) situé à l’électrode négative va céder des électrons au circuit extérieur via une réaction d’oxydation électrochimique qui, outre le transfert d’électrons, s’accompagne de l’extraction des ions lithium de la structure hôte selon la réaction électrochimique suivante : LixC6 → 6C + x Li+ + x e- A l’électrode positive, la réaction de réduction électrochimique suivante a lieu : Li1-xCoO2 + x Li+ + x e- → LiCoO2 Pendant le processus de décharge, les ions Li+ sont donc produits à l’électrode négative, transportés par migration d’une électrode à l’autre à travers l’é rolyte conducteur ionique et consommés à l’électrode positive via une réaction d’insertion. Au cours de la charge, un courant de sens opposé est imposé grâce à un générateur extérieur, et ce sont les phénomènes inverses qui ont lieu : oxydation à l’électrode positive (extraction de lithium) et réduction à l’électrode négative (insertion de lithium). Figure 1.1. Principe de fonctionnement de la LIB en dé charge. La caractéristique essentielle de ce système est son fonctionnement assuré par un transfert réversible d’ions lithium entre les deux électrodes positive et négative grâce à l’utilisation 19 Chapitre I : Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique d’un électrolyte conducteur ionique, c’est le principe des batteries dites « rocking-chair » ou « lithium-ion ». L’équation globale correspondant à ce système est la suivante : Li x C 6 + Li1-xCoO2 ↔ LiCoO2 + 6C L’énergie délivrée par une telle batterie correspond à la variation d’enthalpie libre ΔG de cette réaction. La tension de fonctionnement du système le plus répandu LiCoO2/graphite avec un életrolyte organique est proche de 3,8 V. D’une façon générale, la forme stable du matériau d’électrode positive est sa forme réduite. De ce fait, la batterie doit être chargée préalablement avant utilisation. Dans une LIB, le choix des matériaux d’électrode positive et négative est déterminant sur les caractéristiques de densité et d’énergie-puissance. Les principaux critères définissant un bon matériau d’électrode sont : une bonne réversibilité électrochimique et structurale, une capacité massique et volumique élevée, une bonne conductivité mixte électronique et ionique, une grande durée de vie et une bonne stabilité chimique vis-à-vis de l’électrolyte. Par ailleurs, pour être intégrés dans des systèmes commercialisables, les matériaux d’électrode doivent répondre au cahier des charges suivant : faible coût, faciles à mettre en œuvre industriellement, non toxiques et fiables du point de vue sécurité. I.1.2. Les matériaux d’électrode positive Le choix du couple des matériaux d’insertion d’électrode positive et négative déterminera le niveau de tension de la cellule. Le diagramme tension-capacité de la Figure 1.2 [1] illustre l’enjeu en chimie du solide du choix approprié d’un couple redox et d’une structure afin de moduler la tension et la capacité d’accueil des ions lithium dans la structure et donc au final la densité d’énergie et la durée de vie. Comme l’illustre la Figure 1.2, les matériaux d’électrode positive peuvent être classés en deux catégories [2, 3] : Les composés dits « basse tension » non lithiés, comme TiS2, V6O13, V2O5, LiV3O8 et MnO2, généralement utilisés pour les batteries lithium-métal et dont les potentiels moyens sont respectivement de 2,1; 2,4 ; 2,8 ; 2,8 ; 3 V vs. Li+/Li; Les matériaux lithiés fonctionnant à plus « haute tension » (3,5 V4,5 V vs. Li+/Li) tels que LiCoO2, LiMn2O4, LiFePO4 et leurs formes substituées qui, couplés à l’utilisation d’une 20 Chapitre I : Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique électrode négative en carbone, constituent des matériaux de choix pour les LIBs. Seuls ces derniers composés ont acquis une maturité industrielle. Figure 1.2. Principaux matériaux d’intercalation dans les batteries au lithium et lithium-ion [1]. Figure 1.3. Evolution du potentiel en fonction de la capacité spécifique de certains matériaux d’électrodes positives, régime C/5, 20° C [4]. La Figure 1.3, qui représente les cycles typiques de charge-décharge de ces derniers matériaux, renseigne sur leur tension moyenne de fonctionnement ainsi que les capacités spécifiques atteintes. LiCoO2, dont les propriétés réversibles d’insertion du lithium ont été mises en évidence pour la première fois par l’équipe de J. B. Goodenough [5], est jusqu’à aujourd’hui, le matériau 21 Chapitre I : Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique d’électrode le plus répandu grâce à son importante commercialisation initiée par la firme Sony en 1991 . Cet oxyde lithié possède une structure lamellaire 2D de type α-NaFeO2, avec une succession de plans de cobalt et de plans de lithium (Figure 1.4a [6]). L’oxyde lithié de cobalt présente de nombreux avantages car, outre sa facilité de préparation, il conduit à des potentiels élevés situés entre 3 et 4,2 V vs. Li+/Li (Figure 1.3) grâce au pouvoir très oxydant du couple Co4+/Co3+. Une capacité spécifique élevée est disponible, de l’ordre de 140 mAh g-1, qui correspond à environ 0,5 lithium échangé, soit la moitié de sa capacité théorique (274 mAh g-1). En effet, l’extraction du lithium au-delà de cette valeur provoque des pertes de capacités dues essentiellement à une série de changements structuraux qui déstabilisent la structure ainsi qu’à une instabilité électrolytique à haut potentiel [7, 8]. Les formes lamellaires substituées LiCo1/3Ni1/3Mn1/3O2 (Li-NMC) et LiNi1/2Mn1/2O2 introduites pour la première fois par T. Ohzuku et coll. [9, 10] sont très performantes avec des capacités de 200 mAh g-1 dans certaines conditions [10]. La composition Li-NMC possède en outre des propriétés structurales intéressantes puisqu’elle n’affiche que 1-2% de changement de volume dans la gamme 0 < x < 0,7 (dans Li1-xCo1/3Ni Mn1/3O2) [11]. (a) (b) (c) Figure 1.4. Structure cristalline de (a) LiCoO2 (b) LiMn2O4 (c) LiFePO4 [6]. Une autre famille d’oxydes lithiés, présentant cette fois une structure spinelle a fait l’objet de nombreux travaux. Cette famille est représentée typiquement par le composé LiMn2O4 initialement décrit par M. M. Thackeray et coll. [12]. Du point de vue structural, LiMn2O4 présente une structure cubique spinelle directe (groupe d’espace Fd-3m) qui peut être représentée par la formule suivante [Li]8a[Mn2]16dO4 [13]. Les atomes de lithium occupent des 22 Chapitre I : Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique sites tétraédriques 8a alors que les atomes de manganèse sont en position 16d (sites octaédriques), les atomes d’oxygène sont placés dans les sites 32e formant un empilement compact du type réseau cubique à faces centrées (Figure 1.4b). Cette spinelle de manganèse cumule les avantages d’un faible coût et d’une absence de toxicité. Sa tension moyenne est de 4,1 V vs. Li+/Li (Figure 1.3). Elle peut aussi fonctionner à 3 V mais ses performances sont médiocres dans ce domaine de potentiel [14]. LiMn2O4 pose également des problèmes de performances en cyclages dans la région 4 V, notamment à température relativement élevée (55°C). Les raisons sont multiples et font intervenir notamment la dissolution du manganèse [15], et l’oxydation de l’électrolyte [16]. Certains auteurs invoquent les variations de volume importantes que subit la structure en fonctionnement au voisinage de 3 V [17]. Les substitutions partielles de Mn par d’autres métaux de transition pour former des composés du type LiMn2-xMxO4 où M = Cr, Ni permettent de pallier de façon efficace le problème de dissolution du manganèse et de disposer de candidats potentiels pour la nouvelle génération de matériaux cathodiques fonctionnant à 5 V, notamment la composition LiNi0,5Mn1,5O4 [18] (Figure 1.3). LiFePO4 qui appartient à la famille des olivines, est un matériau particulièrement utilisé sur le plan appliqué. Cet intérêt tout particulier pour les matériaux de type phosphate est lié à leur stabilité structurale très importante, due à la forte covalence de la liaison P-O. De plus, leur faible coût en fait des candidats intéressants pour la production de modules de grandes dimensions. LiFePO4 présente une structure hexagonale compacte distordue de type 3D dans laquelle les octaèdres MO6 (M=Fe, Li) et les tétraèdres PO4 sont liés par des arêtes et des sommets (Figure 1.4c). Les phosphates de fer sont donc très intéressants du point de vue de la sécurité (émission de gaz limitée), mais également pour leur faible coût et leurs performances élevées (170 mAh g-1, 80-110 Wh kg-1), stables dans le temps, en température et à des régimes de cyclage élevés [19-21]. L’inconvénient majeur de LiFePO4 est sa faible conductivité électronique (≈ 10-9 S cm-1 à température ambiante) et ionique, ce qui limite ses performances électrochimiques mais cet obstacle a pu être levé par des nombreux travaux d’optimisation ayant abouti à des procédés d’enrobage (« coating ») de carbone, de diminution de la taille des cristallites (jusqu’à quelques dizaines de nanomètres) ou de dopage approprié. Les dix dernières années ont été fécondes en résultats tant sur le plan fondamental que sur le plan appliqué [22]. Des centaines de publications et de brevets ont été produits sur des procédés de synthèse variés pour préparer des poudres LiMPO4 « optimisées » pour les applications batteries. La synthèse à l’état solide est la méthode la plus « robuste » et la plus 23 Chapitre I : Les batteries ithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique conventionnelle utilisée industriellement pour préparer des poudres pour les LIBs, du fait de son apparente relative simplicité, idéale pour la production continue à grande échelle. Les synthèses en solution sont plus versatiles, avec la possibilité d’utiliser un grand éventail de solvants : aqueux, organiques, polyols, ou plus récemment, liquides ioniques. Pour plus de détails, on peut se référer à une revue exhaustive sur la synthèse de matériaux nanostructurés pour les LIBs [23]. En ce qui concerne l’utilisation réelle de LiFePO4 dans les cellules commerciales pour les applications à longue durée de vie (i.e. Une recherche ciblée vers les polymorphes de LiVOPO4 a également été développée, avec à la clé des capacités importantes autorisées par l’utilisation des deux couples redox du vanadium V4+/V3+ et V5+/ V4+ [27, 28]. En ce qui concerne l’augmentation de la tension de travail, la préparation de la triplite LiFeSO4F a été couronnée de succès et concurrence favorablement LiFePO4 [29]. La différence la plus spectaculaire entre la forme ordonnée (tavorite) et désordonnée (triplite) de LiFeSO4F concerne leur réactivité électrochimique par rapport au lithium, qui a lieu à 3,6 V vs Li+/Li pour la forme tavorite contre 3,9 V pour la triplite (Figure 1.5). Le potentiel redox de 3,9 V est le plus élevé jamais reporté pour le couple redox Fe3+/Fe2+ dans un composé inorganique. Il excède de 450 mV celui de LiFePO4. Figure 1.5. Performances électrochimiques de LiFeSO4F (a) tavorite et (b) triplite [29]. 24 Chapitre I : Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique I.1.3 Les matériaux d’électrode négative et les électrolytes Le premier concept d’accumulateur au lithium (batterie lithium-métal) était fondé sur l’utilisation du lithium métal comme électrode négative. Un des avantages du lithium est sa faible masse molaire, d’où une capacité massique théorique très élevée (3883 mAh g-1), mais aussi son pouvoir fortement réducteur (E0 = -3,03 V vs. ENH) qui couplé à une électrode positive, engendre une tension élevée (Figure 1.2). Cependant, le lithium présente des inconvénients majeurs qui sont liés à sa réactivité dans la plupart des électrolytes à l’origine d’une rechargeabilité insuffisante. Dans certains cas ultimes, la formation de dendrites à sa surface peut mener à des courts circuits mettant en jeu la sécurité du système [30]. C’est en 1980 que le concept d’intercalation de l’électrode positive a été transposé à l’électrode négative, et l’utilisation du carbone graphitique comme matériau d’intercalation du lithium a ainsi été proposé pour la première fois par R. Yazami et P. Touzain [31, 32]. Le potentiel moyen de fonctionnement de l’électrode LixC6 (0 < x < 1) est d’environ 150 mV vs. Li+/Li très proche de celui du lithium, et la capacité théorique atteinte lors de la réduction du graphite au stade final LiC6 est égale à 372 mAh g-1 qui ne représente que 10% de la capacité atteinte par le lithium métal [33]. Cette véritable avancée dans le domaine des électrodes négatives est à l’origine du concept de batterie « lithium-ion », et à la commercialisation de ce f avec, à la clé, des performances inégalées en termes de durée de vie et de sécurité. Dans le but d’augmenter la capacité et de minimiser les pertes irréversibles à la négative par formation d’une couche de passivation (appelée « solid electrolyte interface » ou SEI) [34, 35], de nombreux travaux se sont développés selon deux directions : l’amélioration des matériaux carbonés et la recherche de nouvelles alternatives à l’électrode de graphite. Pour de plus amples détails, nous renvoyons à une revue [36] faisant le point sur ces aspects. L’électrolyte est également un élément crucial en termes de performances, de sécurité et de coût [37, 38]. Les électrolytes liquides sont constitués d’un sel de lithium et d’un solvant aprotique, car tout proton mobile est inévitablement réduit en hydrogène à bas potentiel, et dipolaire pour favoriser une bonne dissolution du sel de lithium et donc une meilleure conductivité de l’électrolyte. Ils affichent des conductivités de l’ordre de 10-2/10-3 S cm-1 à température ambiante. Après plusieurs années de recherche, le choix des alkylcarbonates s’est finalement imposé car c’est celui qui respecte le mieux ce cahier des charges. Les solvants les plus employés sont des composés à forte constante diélectrique (εT > 30) comme par exemple le carbonate de propylène (PC) ou le carbonate d’éthylène (EC). Or une forte constante 25 Chapitre I : Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique diélectrique liée à un moment dipolaire élevé (μ), engendre une forte viscosité (η) comme le montre le Tableau 1.1 qui rassemble les propriétés physic o- chimiques de quel ques solvants utilisés dans les batteries Li-ion. C’ est la raison pour la quelle ces solvants sont utilisés en mélange avec des co-solvants de plus faible viscosité afin d’améliorer la conductivité ionique de l’électrolyte par abaissement de viscosité globale. Parmi les co-solvants utilisés, on peut citer le carbonate de diméthyle (DMC) ou le carbonate de diéthyle (DEC). Le sel de lithium doit être stable et très soluble dans le solvant utilisé sur une large plage de température. Il doit également avoir un poids moléculaire assez faible et ne pas être la cause de réactions indésirables avec composants de la batterie. Enfin, il doit être non toxique et si possible bon marché. Tableau 1.1. Propriétés des alkylcarbonates utilisés à 25°C. On trouve de nombreux sels de lithiums tels que LiPF6, LiASF6, « LiTFSI » (LiN(SO2CF3)2, LiBF4, LiClO4, « LiBOB » (LiB(C2O4)2). LiPF6 est le sel le plus utilisé à l’échelle industrielle. Il offre par rapport aux autres sels un bon compromis entre conductivité ionique, stabilité et coût. La composition la plus utilisée est basée sur LiPF6 dissous dans un mélange de carbonate d’éthylène (EC), carbonate de propylène (PC) et carbonate de diméthyle (DMC) connue sous la dénomination « LP30 ». Le Tableau 1.2 donne un aperçu sur les avantages et inconvénients de ces sels. 26 Chapitre I : Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique Sels de lithium Avantages Inconvénients LiPF6 -Conductivité très élevée -Excellente stabilité électrochimique -Faible toxicité LiAsF6 -Conductivité élevée -Excellente stabilité -Très hygroscopique (formation de HF en présence de trace d’eau) -Prix élevé -Instabilité thermique - Toxique (non utilisé industriellement) LiClO4 -Bon marché -Conductivité moyenne -Excellente stabilité - Coût modéré LiBF4 -Dangereux et explosif (non utilisé industriellement) -Faible conductivité LiTFSI - Coût modéré -Non toxique - Excellente stabilité thermique Li BOB -Bonne stabilité thermique - Faible conductivité - Eventuelle corrosion du collecteur du courant en aluminium aux potenti els élevé s -Coût élevé Tableau 1.2. Comparaison des caractéristiques de quelques sels utilisés dans les batteries lithium-ion. 27 Chapitre I : Les batteries lithium-ion et sodium-ion : Analyse bibliographique I.2. Les batteries au sodium Comme nous l’avons vu précédemment, la technologie de batteries Li-ion est la plus performante des systèmes de batteries, et son essor s’explique par sa capacité à répondre à différentes applications du plus petit module pour les capteurs, la microélectronique aux ordinateurs et maintenant aux véhicules électriques. En outre, cette technologie est mature également pour le stockage stationnaire pour faire face au développement rapide des énergies renouvelables intermittentes. Cette perspective de production de gros modules va renchérir le coût de ces batteries avec des incertitudes d’approvisionnement en lithium, les ressources en lithium étant centralisées dans des pays politiquement et économiquement instables (Figure 1.6). A l’heure actuelle, un tiers du lithium mondial produit est déjà absorbé par l’industrie des batteries Li-ion. Figure 1.6. Distribution géographique des réserves de lithium. D’après Meridian International Research, 2007. Li Abondance du cristal /1000 ppm 0,01 Na 26 Disponibilité Prix (euros kg-1) centralisé 6,40 Masse molaire (g mol-1) 6,94 mondial 0,22 23 Rayon ionique (Å) 0,76 E° (V vs. Li+/Li) 1,02 0,33 0,00 Tableau 1.3. Grandeurs caractéristiques associées au lithium et au sodium.
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La gestion transfrontalière de la pandémie et la contestation politique. Les Cahiers de l’OPPEE, 3, 2023. &#x27E8;hal-04353925&#x27E9;
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La gestion transfrontalière de la pandémie et la contestation politique Bernard Cherubini, HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. PRÉSENTATION Premier organisme de ce type au sein de l’université de Bordeaux, l’Observatoire des politiques publiques en situation d’épidémie et post-épidémique est doté d’un savoir universitaire destiné à observer en temps réel la crise sanitaire et l’après-crise pandémique au prisme de l’analyse scientifique. Les acteurs et actrices se mobilisent pour contribuer à des solutions pratiques. L’Observatoire a vocation à être un organisme scientifique de source universitaire, produisant une analyse sur la nature et le traitement des politiques publiques liées à la crise épidémique actuelle. Créé dans le cadre de la « mission Covid-19 » de l’université de Bordeaux, l’Observatoire est rattaché à l’Institut de recherche Montesquieu (IRM – UR 7434). Ce numéro 3 des Cahiers de l’OPPEE sur la gestion transfrontalière de la pandémie et la contestation politique part d’un constat, celui de la mise en sommeil des expériences de collaboration transfrontalière dans le domaine de la santé publique, qui faisait apparaître une transnationalisation des politiques publiques en santé, au profit de la mise en exergue de l’exercice des compétences nationales. Face à l’urgence, les États ont mis place des plans sanitaires différents au sein même de l’Union européenne, comme dans d’autres situations transfrontalières. Les frontières ont été souvent présentes comme des barrières protectrices face aux dangers d’une contamination venue de l’étranger, sous peine de voir naître les contestations, freinant d’autant l’émergence d’une réponse globale, à la hauteur des enjeux et des menaces de propagation du virus à l’échelle mondiale. Coordination scientifique de ce numéro des Cahiers de l’OPPEE • Bernard CHERUBINI, Maître de conférences d’ethnologie HDR, IRM-CMRP (université de Bordeaux) Coordination éditoriale du numéro • Alexandre FRAMBÉRY-IACOBONE, Post-doctorant OPPEE (IRM, université de Bordeaux) En partenariat avec L’université de Bordeaux, l’OPPEE, et ses partenaires, n’entendent donner aucune approbation ni improbation aux idées émises dans les différentes contributions qui composent cette production ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs et autrices. SOMMAIRE Introduction : La transnationalisation des politiques publiques à l’épreuve de l’état d’urgence sanitaire........................................................................................................... 1 Bernard CHERUBINI La pandémie de Covid-19 à la frontière entre la Guyane et le Brésil : implications politiques et conséquences des gestions nationales....................................................... 11 Stéphane GRANGER Impact de la Covid-19 sur le travail informel dans l’Ouest de la Guyane : fermeture de la frontière, conséquences économiques et sociales................................................. 29 Gaëlle LEBEAU Les migrations dans les Balkans occidentaux en temps de pandémie de Covid-19 : enjeux politiques et conséquences économiques........................................................... 49 Nebojsa Vukadinovic La gestion de la pandémie de Covid-19 à la frontière franco-espagnole.................... 63 Géraldine BACHOUÉ PEDROUZO Menace extérieure et situation interne. Remarques sur la réponse de Donald Trump à la pandémie de Covid-19................................................................................................ 81 Éric ROUBY Hors thème : La pandémie de Covid-19 en Afrique : appréhension, spécificités et géopolitique..................................................................................................................... 93 Alhadji Bouba NOUHOU À propos des auteurs et au trices . ................................................................................. 111 Résumés des articles................................ ..................................... ................................ 113 Indications bibliographiques....................................................................................... 119 La transnationalisation des politiques publiques à l’épreuve de l’état d’urgence sanitaire Bernard CHERUBINI Co-directeur de l’OPPEE IRM-CMRP (UR 7434) université de Bordeaux Nous avions abordé, il y a déjà une dizaine d’années, avec notre collègue sociologue François Vedelago, la question du dépassement des frontières dans un numéro de la revue Sociolog ie santé consacré à la « transnationalisation des politiques publiques de santé »1. Nous venions tout juste de fêter le dixième anniversaire de la « loi Kouchner », la loi de santé publique du 4 mars 2002, qui replaçait la prévention et la promotion de la santé à une plus juste place au sein du système de santé. Ces dispositifs permettaient de mieux aborder les enjeux de la spatialisation et de la territorialisation, ceux de la régionalisation et de la décentralisation, tant sur le plan théorique que dans la pratique, en particulier au niveau de la gouvernance des territoires de santé. Les régions transfrontalières voyaient s’ouvrir de nouvelles perspectives de coopération sanitaire et la possibilité de rompre avec « le nationalisme méthodologique », pour reprendre une expression de Ulrich Beck2. François Vedelago collaborait à l’époque depuis plusieurs années avec des collègues italiens sur la régionalisation du système de santé italien et avait noté comment les élus locaux, au croisement des influences transnationales et des demandes sociales localisées, étaient confrontés à des difficultés majeures pour construire des discours de légitimation de leur action3. Dans sa contribution à propos de la coopération transfrontalière franco-italienne, Carmela Maltone nous rappelle que la coopération interrégionale trouve ses racines juridiques dans la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière de 1980, complétée par deux autres Conventions de 1996 et 1998, a été mise en route pour la période 2007-2013, en particulier à travers le programme Alcotra (Alpes Latines de Coopération Transfrontalière), au profit des territoires situés des deux côtés des Alpes. La santé ne figure hélas pas parmi les priorités fixées par les instances en charge de ce programme. Mais en mars 2012, l’OPSA (Observatoire transalpin de Promotion de la santé) est toutefois mis en place après trois années 1 CHERUBINI Bernard et VEDELAGO François (dir.), Sociologie santé, no 36, octobre 2012. BECK Ulrich, Qu’est-ce que le cosmopolitisme?, Paris, Aubier, 2006. 3 VICARELLI Giovanna et VEDELAGO François (dir.), « Décentralisation, Système de santé : l’exemple italien », Sociologie santé, no 32, octobre 2010. 2 1 de gestation, piloté par la région Piémont, avec des actions concernant des programmes communs de santé autour de l’usage du tabac et de l’alcool, la dépendance des personnes âgées, l’accès aux soins des jeunes et des populations précaires4. Les actions conjointes conduites à ce niveau auront permis de donner vie à une coopération transfrontière, certes modeste, mais durable. De la même façon, nos préoccupations universitaires en matière de prévention et de promotion de la santé au sein de l’ISPED (Institut de santé publique, d’épidémiologie et de développement) à l’université de Bordeaux nous avaient donné l’opportunité d’effectuer un rapprochement avec le département de sociologie et de santé publique de l’université du Pays basque (UPV/EHU) dans le but de bâtir un programme conjoint de formation en promotion de la santé et développement social, entre nos deux universités et entre la région Aquitaine (devenue depuis Nouvelle-Aquitaine) et la Communauté Autonome du Pays basque. La difficulté rencontrée au niveau des différences d’approches en matière d’intervention en promotion de la santé a considérablement retardé ce projet, nous laissant avec une réelle expérience de coopération transfrontalière dans le domaine médical, à partir du Centre hospitalier de la Côte basque à Bayonne, véritable catalyseur d’une coopération sanitaire transfrontalière interservices (urgences, neurologie, hématologie, radiologie)., avec les hôpitaux de Saint-Sébastien et de Pampelune5. Tout cela peut-il voler en éclats à l’occasion de la mise en place des mesures d’urgence qui prétendent être devenues nécessaires pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 à l’échelle européenne? La proclamation de l’état d’urgence sanitaire par le président de la République française, le 16 mars 2020, semble avoir mis sous l’éteignoir de nombreux dispositifs d’intervention en santé publique, en particulier dans les domaines de la prévention et de la promotion de la santé, de pratiques de collaborations territoriales, notamment transfrontalières, et, par voie de conséquence, placé au second rang des compétences rudement acquises de travail de proximité et d’échanges interprofessionnels. Nous discuterons ici de ces états de fait et de plusieurs de ces conséquences sur plusieurs territoires sur lesquels nous avions eu l’occasion d’intervenir au cours des années précédentes, en particulier en Guyane française6 et à La Réunion, après avoir très sommairement donné un premier aperçu des interférences entre géopolitique et politiques de lutte contre la pandémie de Covid-19. MALTONE Carmela, « Au-delà des frontières nationales : l’exemple de la coopération francoitalienne », Sociologie santé, no 36, octobre 2012, p. 159-170. 5 BAUDUER Frédéric, « Collaboration transfrontalière dans le domaine de la recherche et de la territorialisation des actions de santé : le paradigme basque », dans Cherubini Bernard (dir.), Agir pour la promotion de la santé, Toulouse, Érès, 2011, p. 129-145. 6 Voir dans CHERUBINI Bernard, « Situations sanitaires et ethnicité : une lecture de la dynamique des relations interethniques en Guyane française », dans Mam Lam Fouck Serge (dir.), Comprendre la Guyane d’aujourd’hui, Matoury, Ibis Rouge éditions, 2007, p. 577-600 ; CHERUBINI Bernard , « Intervenir en situation d’interculturalité : du pluralisme ethnique guyanais à la santé communautaire transfrontalière », Sociologie santé, no 36, 2012, p. 121-143. I. État d’urgence sanitaire, mesures d’urgence et géopolitique L’état d’urgence sanitaire en France et les mesures équivalentes prises à l’échelle mondiale ont donné lieu à une vaste série de régulation des flux migratoires et des déplacements au niveau des frontières, terrestres, maritimes et aériennes. Dans un des premiers ouvrages de synthèse issus de leur projet de réseau PoSoc19, Jean-Michel De Waele et Ahmet Insel abordent la question des politiques sanitaires mises en place pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 selon la nature des régimes politiques afin de voir comment les différentes cultures politiques nationales s’adaptent à ces nouvelles situations7. La répartition des cas examinés (Brésil, États-Unis, République tchèque, Chili, Turquie, Maroc, Cameroun, Russie, Belgique, Italie, Japon, Suède) entre régimes autoritaires et démocraties consolidées, pays riches ou pauvres, systèmes politiques parlementaires ou présidentiels, fédéraux ou centralisés, d’Europe, d’Asie, d’Amérique, d’Afrique, met en évidence les rigidités et les souplesses d’adaptation des systèmes politiques et des architectures institutionnelles, en vigueur dans chaque pays. La pandémie a révélé le degré et le type de confiance des citoyens à leur gouvernement, le rapport au savoir, les tendances souterraines en œuvre dans les sociétés, notamment des remises en cause des systèmes démocratiques au nom des principes considérés comme supérieurs à ceux-ci. De son côté, Pascal Boniface insiste plus particulièrement sur le duel qui oppose la Chine aux États-Unis, sur le rêve d’une Europe puissante, toujours dans l’attente d’un sursaut, et sur la fin du modèle occidental8. Le modèle de domination de l’Europe en œuvre depuis 1492, puis occidental avec la montée en puissance des États-Unis, qui aura duré cinq siècles, semble révolu. Les « non-occidentaux » n’ont pas le même point de vue que les Occidentaux, toujours aussi arrogants, mais aveuglés face au ressentiment des pays émergents, au rejet profond des valeurs américaines. Face à la crise du Covid-19, les solutions sont de toute évidence multilatérales et demandent que le monde occidental descende de son piédestal. Autre débat, la mondialisation aurait-elle tué la mondialisation? Au 31 décembre 2019, les Français pouvaient se rendre dans 127 pays sans visa, obtenir un visa sur place à leur arrivée dans 42 pays. Trois mois plus tard, ils ne peuvent plus aller nulle part. En avril 2020, 150 pays avaient fermé leurs frontières. La globalisation était supposée avoir effacé les frontières. Dans le cadre de cette épidémie, le droit de sortir de votre pays vous est retiré et aucun autre ne peut vous accueillir9. Pour certains ressortissants de pays européens, comme les Roumains travaillant comme ouvriers agricoles saisonniers en Allemagne, mais aussi au Portugal, en Italie ou en Espagne, le confinement dans ces pays a fait que ces travailleurs se sont retrouvés du jour au lendemain sans emploi. Un million et demi de personnes ont passé les frontières dans les 7 DE WAELE Jean-Michel et INSEL Ahmet (dir.), Quand la pandémie bouleversa le monde, Bruxelles, Bruylant, 2022. 8 BONIFACE Pascal, Géopolitique du Covid-19. Ce que nous révèle la crise de coronavirus, Paris, Éditions Eyrolles, 2020. 9 Ibid., p. 143-144. 3 semaines qui ont suivi l’annonce du confinement de l’Italie10. En mars 2020, la circulation intraeuropéenne entre les 27 États membres de l’Union européenne a été stoppée net. Les liaisons entre le continent européen et le Royaume-Uni, à la suite du Brexit acté le 31 janvier 2020, a été frappé de plein fouet, en particulier via le transport ferroviaire en Eurostar, plaçant l’entreprise en situation de grande difficulté économique11. De ce bref aperçu des conséquences politiques, économiques, sanitaires enregistrées au niveau des frontières, on retiendra en particulier que les politiques sanitaires se sont repliées sur des perspectives de gestion nationales, locales, au détriment des projets déjà mis en place ou projetés au niveau de la coopération régionale européenne dans les zones transfrontalières. Les chercheurs en anthropologie de la santé ayant travaillé sur des épidémies ou crises sanitaires antérieures (sida en particulier) ont assisté à cette mise à l’écart des expériences acquises dans la gestion des épidémies qui s’étaient progressivement articulées sur la coopération régionale transfrontalière. On peut citer ici l’exemple des politiques de prévention mises en place en Guyane française avec les équipes brésiliennes et surinamiennes sur les fleuves et les zones aurifères de l’intérieur. II. Une santé communautaire transfrontalière en Guyane française? La Guyane française, avec ses 84 000 km2, superficie presque équivalente à celle du Portugal, de l’Autriche ou encore de la région Nouvelle-Aquitaine, ses 230 000 habitants (évaluation 2010, probablement plus de 300 000 en 2020), son éloignement et sa position géographique (à 7500 km de Paris, près de l’équateur, sur le littoral amazonien), a deux frontières fluviales et maritimes, l’une avec le Brésil, l’autre avec le Suriname, qui la poussent à coopérer avec ces pays voisins pour améliorer l’efficacité de ses dispositifs de prévention en santé (VIH, dengue, alcoolisme, toxicomanie, etc.). La situation sanitaire dans ces zones transfrontalières doit être abordée de façon différente sur la côte et dans l’intérieur du pays. La zone littorale ouest compte un hôpital de taille appréciable dans la ville de Saint-Laurent-du-Maroni, et plusieurs centres de santé, d’anciens dispensaires, le long du fleuve Maroni, dont l’activité médicale et préventive concerne les populations de nationalité française, surinamienne, étrangères et sans nationalité (certains membres des communautés de « marrons »12 n’ont pas d’état civil). 10 HEEMERYCK Antoine, « Travail, soi, autoritarisme : (in) Gouverner par la pandémie en Roumanie », dans Selim Monique (dir), Anthropologie d’une pandémie, Paris, L’Harmattan, 2020, p. 31-48. 11 DENIZEAU-LAHAYE Charlotte, « Eurostar et la crise Covid-19 », dans Antoine Aurélien, Blick Andrew, Gadbin-George Géraldine et Gibson-Morgan Elizabeth (dir), La France et le RoyaumeUni à l’épreuve de la pandémie de Covid-19, Paris, Mare & Martin, 2022, p. 161-176. Jusque dans les années 1990, les « Bushinenge » ou « Noirs Marrons » représentaient environ 6 % de la population totale mais, en 2002, cette répartition avait déjà fortement évolué : la proportion des « Bushinenge », par exemple, aurait déjà atteint « 20 % de la population guyanaise », selon PRICE Richard et PRICE Sally, « Les marrons : vingt pour cent de la population de la Guyane », Dérades, no 8, 2002, p. 51-61. 4 Du côté du fleuve Oyapock à l’est de la Guyane qui marque la frontière avec le Brésil, on s’appuie uniquement sur les centres de santé. Les inégalités d’accès aux structures sanitaires et aux soins sont importantes d’une zone à une autre, d’un village à l’autre. Si l’on considère que l’éducation pour la santé recouvre deux dimensions, l’une théorique et l’autre éducative, on retiendra principalement que, dans le premier cas, c’est le fait qu’un individu ou une collectivité devienne partie prenante de son état de santé qui est fondamental et que, dans le second cas, c’est le processus d’accompagnement, la démarche éducative, des personnes et des groupes dans le développement de leurs capacités de bien-être et d’adaptation qui est essentielle. C’est du reste, une démarche identique qui conduira une anthropologue travaillant auprès des communautés Ndjuka, Diane Vernon, à s’impliquer dans des programmes de prévention du sida sur le fleuve Maroni, conçus en fonction d’objectifs relevant directement de l’éducation pour la santé13. Plus récemment, au début des années 2000, on s’est préoccupé d’assurer la prévention du sida sur le fleuve Maroni par l’intermédiaire d’équipes mobiles d’intervention et de prévention qui organise des séances d’information dans les villages14. De son côté, la Cellule Études et Recherche en Santé Publique créée par le conseil général de la Guyane et septembre 2004 s’était intéressée à un projet de santé communautaire dans le Haut-Maroni et le Haut-Oyapock qui était en cours d’élaboration du côté de la Croix Rouge. Il ne s’agissait néanmoins à cette date que d’un projet à développer. Un peu plus tard, l’appel à projets du Groupement régional de santé publique (GRSP) de la Guyane, lancé en janvier 2008, avait identifié quatre projets de prévention et d’éducation pour la santé qui pouvaient faire l’objet d’une subvention : (1) Périnatalité, sexualité et contraception, (2), Pathologies liées au sida, (3) Conduites addictives, (4) Accès à la prévention et aux soins15. Dans le premier cas, il est rappelé qu’il s’agit, parmi les actions possibles, de « développer des actions de prévention en direction des populations du fleuve », de « développer des actions d’information et de prévention à l’éducation à la sexualité », de « sensibiliser les parents et les hommes aux grossesses précoces ». Dans le second cas, celui du sida, le public cible reste la population générale. Dans le troisième cas, celui des conduites addictives, le public n’est pas davantage ciblé selon des variables ethniques ou territoriales, si ce n’est la nécessité de s’adresser aux populations des « communes les plus éloignées » qui sont loin d’être épargnées. Enfin, dans le dernier cas, celui de l’accès à la prévention et aux soins, il est rappelé que le PRAPS (programme régional d’accès à la prévention et aux soins) reste une priorité et qu’il s’agit toujours de s’adresser aux « populations précaires ». VERNON Diane, « Un exemple d’anthropologie appliquée : un programme de prévention du sida pour les Noirs Marrons de Guyane », dans Benoist Jean et Desclaux Alice (dir.), Anthropologie et sida. Bilan et perspectives, Paris, Karthala, 1996, p. 117-128. 14 CARDE Estelle, L’accès aux soins dans l’Ouest guyanais. Représentations et pratiques professionnelles vis-à-vis de l’altérité : quand usagers et offre de soins viennent « d’ailleurs », thèse dactyl., médecine, Toulouse 2005. 15 Source : Préfecture de la Guyane, Cayenne, Groupement régional de santé publique, appel à projets 2008, 4 janvier 2008. Dans ces projets de promotion de la santé, il s’agit principalement d’associer les gens aux actions qui les concernent directement ou indirectement et que ce processus requiert la participation effective et concrète de la communauté, donc un renforcement de l’action communautaire et de la participation communautaire, tout en sachant que le concept de communauté, tel qu’il est utilisé au niveau de l’OMS (Organisation mondiale de la santé), désigne avant tout les « dynamiques locales et communautaires », la démarche en santé communautaire, sans pour autant donner une définition précise et définitive à ce concept de communauté. Cela signifie, en particulier, que la participation directe et active des populations aux programmes de prévention sanitaire qui les concernent devrait ainsi être privilégiée, en même temps que la consultation des groupes et des communautés dans le cadre plus vaste de l’expression de la démocratie sanitaire que le législateur a voulu faciliter. Mais ce qui peut venir troubler quelque peu ces perspectives, c’est la mauvaise maîtrise des données démographiques, la méconnaissance des flux migratoires et la croissance rapide de la population guyanaise. On a assisté, encore récemment, au début des années 2000, à un accroissement important des migrations transfrontalières, en particulier de ressortissants de nationalité brésilienne, surinamienne, et à une augmentation notable des immigrés en provenance du continent sud-américain16 qui viennent bouleverser des équilibres difficilement atteints en matière de couverture sanitaire et sociale, accroître les inégalités spatiales et sociales dans le domaine sanitaire (accès aux soins et à la prévention), accroître les vulnérabilités sanitaires et sociales17. La question de l’accès aux soins et à la prévention reste très largement dépendante de l’amélioration de ces situations de tension qui interfèrent avec la mise en application de toute politique de l’immigration. Une question mérite alors d’être posée, celle de l’utilité de l’anthropologie, de sa démarche et de ses données recueillies, dans la mise en place de programmes en éducation pour la santé et en promotion de la santé, en général et dans le cas particulier de la Guyane française. Faut-il y voir une incapacité à solliciter, utiliser ou associer les compétences et les connaissances des chercheurs en sciences humaines et sociales, et plus particulièrement en anthropologie? Faut-il y voir plutôt une réticence ou une attitude délibérée? Les obstacles à la collaboration entre sciences biomédicales et sciences humaines sont depuis un certain temps assez bien documentés. On a déjà pu lister quelques cas de collaborations fécondes entre épidémiologie et anthropologie, en particulier en Guyane française, au sein de l’Institut Pasteur, à propos de la prévalence du virus HTLV-1 particulièrement forte dans certaines zones, comme celle du Maroni18. Mais la collaboration des anthropologues avec des chercheurs d’autres disciplines médicales ou de santé publique se traduit le plus souvent par la négociation de leur place dans « le monde de l’intervention » et de la dimension scientifique de leur démarche19. La place faite à la sociologie et à l’anthropologie de la santé au 16 La population immigrée est difficile à évaluer : un nombre de 70 000 à 90 000 était fréquemment avancé dans les années 2004-2006. 17 On peut citer également : la forte natalité (29,8 naissances pour 1000 habitants en 1997), la jeunesse de la population (35,6 % ont moins de 15 ans en 1999). 18 Voir dans PERREY Christophe et DE THE Guy, Le souple et le dur, Paris, CNRS Éditions, 2009. 19 Voir dans VIDAL Laurent, Faire de l’anthropologie. Santé, science et développement, Paris, La Découverte, 2010. 6 sein du Comité scientifique dirigé par le professeur Jean-François Delfraissy durant toute la période de l’état d’urgence sanitaire n’en est qu’une nouvelle illustration. Conclusion : tirer profit des acquis de la promotion de la santé, à l’exemple de La Réunion ? La Réunion est une île de l’océan Indien qui n’a donc pas de frontières terrestres avec d’autres pays. En revanche, les flux migratoires générés par les pays de la zone, par voie maritime ou aérienne, viennent alimenter les discussions au moment où sont prises les décisions en matière de confinement et de fermeture du trafic aérien. De plus, la présence des immigrés déjà sur l’île au moment de l’arrivée de l’épidémie a mené à questionner la possibilité de recours thérapeutiques issus d’un pluralisme médical déjà bien actif dans certains quartiers et réactive les réflexes xénophobes que la politique de la ville, en particulier, avait plus ou moins réussi à canaliser dans des démarches de projets de proximité, le plus souvent inspirées des principes de la santé communautaire et de la participation active des usagers de l’espace de soins et de prévention en santé publique20. Dès la mise en place des mesures de lutte contre l’épidémie de Covid-19 à La Réunion, on a pu s’inquiéter de la faiblesse de la contribution des acteurs de première ligne en intervention sociale, éducation pour la santé, qui sont supposés bien connaître un terrain déjà très actif au niveau des dispositifs d’ateliers santé ville (ASV), de prévention de l’alcoolisme et autres addictions, auprès de publics à risque, depuis déjà un certain nombre d’années21. Autrement dit, des mesures mises en place dans un contexte de développement de la promotion de la santé, de la démocratie sanitaire, seraient devenues peu opérationnelles dans ce contexte d’urgence sanitaire, d’état d’urgence sanitaire, qui prendrait le pas sur des démarches d’action communautaire, de proximité et participative. Si tel était le cas, on ne pourrait que faire le constat d’une régression par rapport aux acquis du travail associatif mis en place depuis les premières générations de contrats de ville et d’ateliers santé ville (ASV), comme peuvent en témoigner les recherches de Zoé Vaillant sur la commune de Saint-Paul, effectuées dans le courant des années 2002-2006, en géographie de la santé22, ou encore nos propres travaux sur l’intervention sociale et le développement social urbain, dans les années précédentes23. 20 Voir CHERUBINI Bernard, « Jalons pour une anthropologie politique de la pandémie de COVID-19 », dans Cherubini Bernard (dir.), La Covid-19 et l’état d’urgence sanitaire (mars 2020-juillet 2022), Paris, LGDJ-Institut Louis Joinet, 2023, p. 195-203. Nous reprenons ici dans leur intégralité les arguments précédemment exposés dans cet article. 21 Nous avons eu l’occasion, par exemple, de travailler en 1997, sur une étude sociale préalable à la définition d’objectif CLI, avec notre partenaire du CERDASES (Centre d’études régionales et de développement pour l’action sociale et l’économie sociale), sur les secteurs de Bras Fusil et Petit Saint-Pierre à Saint-Benoît, totalisant à l’époque 27 000 habitants (38 000 habitants en 2017). 22 VAILLANT Zoé, La Ré union , koman i lé ? Territoires, sant é, société, Paris, PUF-Le Monde, 2008. 23 Voir CHERUBINI Bernard, « Le milieu de vie, le sentiment communautaire : pour une autre approche de la santé publique à La Réunion », dans Le Gall Didier et Roinsard Nicolas (dir. ), 7 par le dialogue permanent entre les représentants des habitants, de la de de -19, lorsque celles-ci concernent les lieux et les modes de vie des habitants de certains quartiers, dans leur dimension intergénérationnelle, plus ou moins en relation avec des comportements à risques déjà identifiés dans des politiques de lutte contre les addictions l alcoolisme, les violences intrafamiliales. Au niveau transfrontalier, on peut citer l’exemple de Thiérache, un territoire qui s’étend en grande partie sue le département de l’Aisne en Picardie et côté belge, sur les provinces du Hainaut et de Namur. Des projets y sont menés en prévention et promotion de la santé, en particulier celui intitulé Thiérache santé prévention (2013-2014), adossé au contrat local de santé (CLS) transfrontalier qui concerne les jeunes, les seniors, leurs aidants proches, la prévention des addictions en i aux projets locaux existants24. Du strict point de vue de la promotion de la santé, nous avons eu maintes fois l’occasion de rappeler que la participation de type communautaire était indispensable pour mener des actions préventives en santé publique, qui plus est dans une société polyculturelle. Ce que l’on appelle désormais des territoires de santé bénéficieraient d’un maillage local d’acteurs et de référents associatifs plutôt bien rodés à la participation communautaire et à l’exercice de la démocratie sanitaire. Cette donnée de base de l’intervention sanitaire et sociale en promotion de la santé intervient-elle dans la conduite des actions en cours au titre de la lutte contre l’épidémie de Covid-19? La réponse est bien entendu négative, dans la mesure où l’état d’urgence sanitaire a relégué au second plan nombre d’acteurs qui intervenaient au quotidien dans ces dispositifs d’accompagnement des personnes en grande difficulté et qui œuvraient dans le champ de la prévention (éducation pour la santé, promotion de la santé), en se focalisant sur des territoires de proximité qui en métropole pouvaient bénéficier, parfois depuis plusieurs années, de collaborations transfrontalières. L’analyse de ces situations transfrontalières fait ici l’objet d’une approche pluridisciplinaire orientée vers des approches politistes (Vukadinovic, Rouby), juridiques (Bachoué Pedrouzo), géographiques (Granger), économiques (Lebeau), s’appliquant à des contextes européens (Espagne, Balkans occidentaux), Nord-Américains (États-Unis) et Sud-Américains (Guyane Chroniques d’une autre France : La Réunion. Genres de vie et intimités créoles, Paris, L’Harmattan, 2010, p. 43-60 ; CHERUBINI Bernard, « Ville et santé : vers une remobilisation progressive des acteurs et des usagers », dans Cherubini Bernard (dir.), Agir pour la promotion de la santé. Une politique ouverte à l’innovation?, Toulouse, Érès, 2011, p. 51-75. 24 HOUIOUX Geneviève et LORENZO Philippe, « En Thiérache, la santé n’a pas de frontière », La Santé en action, no 428, juin 2014, p. 31-32. 8 française, Brésil, Surinam). Nous avons choisi également d’intégrer dans ce numéro une approche politiste de la situation de la Covid-19 en Afrique (Nouhou). Ce tableau reste limité à l’exposé d’un nombre restreint de situations transfrontalières. Leur comparaison, avec l’élargissement des exemples à rassembler, reste un chantier à venir pour mieux comprendre ce que pourrait être l’avenir d’une Europe de la santé en mesure de faire face à une pandémie mondiale et consolider les capacités d’analyse et d’intervention des organisations mondiales en santé. La pandémie de Covid-19 à la frontière entre la Guyane et le Brésil : implications politiques et conséquences des gestions nationales Stéphane GRANGER Docteur en géographie Professeur d’histoire-géographie à Cayenne Chargé de cours à l’Université de Guyane et l’INSPE Membre du Comité scientifique de l’OHM-Oyapock (CNRS) La pandémie de Covid-19 qui s’est abattue sur le monde principalement entre 2020 et 2021 a eu comme conséquence un renforcement des frontières politiques comme barrières sanitaires, pour protéger les populations de la propagation du virus. Cette politique a provisoirement mis fin à un processus de relative ouverture et d’intégrations régionales croissantes facilitant les mobilités dans le cadre de la mondialisation des échanges, à l’image des frontières intérieures de l’espace Schengen dans l’Union européenne. Mais là comme ailleurs, la pandémie a entraîné la fermeture quasi totale des frontières, entravant des mobilités transfrontalières aussi bien légales qu’informelles. C’est pour lutter contre ces dernières que les frontières extérieures notamment maritimes de l’Union européenne avaient déjà fait l’objet d’un renforcement de leur fonction filtrante, puisqu’elles offrent souvent un voisinage avec des États ou continents moins développés. L’une de ces frontières extérieures est particulièrement sensible et atypique, puisqu’elle sépare une région membre à travers la France de l’Union européenne, la Guyane, d’un pays, voire d’une puissance émergente de l’Amérique du Sud, le Brésil, qui ont eu des politiques que l’on pourrait qualifier d’opposées quant à la gestion de la pandémie. Notre propos, croisant sources locales, témoignages, écrits antérieurs et travaux universitaires récents, est de montrer dans quelle mesure cette situation a pu influer sur la gestion de la crise sanitaire à leur frontière, avec des politiques nationales s’imposant ou tentant de s’imposer à une région transfrontalière informelle et solidaire. Politiques qui ont par ailleurs été combattues par des pouvoirs locaux désirant s’affirmer ou combattre une implication considérée insuffisante ou inadéquate des États concernés. 11 I. L’Oyapock, une frontière européenne en Amérique du Sud A. Une frontière atypique Peu de Français savent que la plus longue frontière terrestre française les sépare non pas d’un État européen comme l’Espagne, mais d’un État sudaméricain, le plus étendu et le plus puissant : le Brésil. En effet, 730 kilomètres séparent la Collectivité territoriale d’outremer de Guyane de l’État brésilien d’Amapá. Avec une superficie de 83 534 km2 égale à celle de l’Autriche, la Guyane est le seul territoire français d’outre-mer continental, caractéristique qui lui permet d’avoir deux frontières avec des pays souverains. À l’Ouest, le fleuve Maroni la sépare du plus petit État d’Amérique du Sud, le Surinam, ancienne colonie néerlandaise ayant acquis son indépendance en 1975. À l’Est, le fleuve Oyapock et au Sud la ligne de partage des eaux atlantiques et amazoniennes la sépare du géant brésilien. La Guyane, en tant que Collectivité territoriale d’outremer (un statut fusionnant les compétences d’un conseil départemental et d’un Conseil régional), est une partie intégrante de la République française. La CTG (Collectivité territoriale de Guyane) jouit donc d’un pouvoir exécutif régional élu, avec des compétences plus étendues dans certains domaines que les régions de l’Hexagone, comme la paradiplomatie ou diplomatie locale ; cependant, comme dans la France hexagonale, le préfet représente l’État et est responsable des services publics nationaux, notamment du maintien de l’ordre et de la sécurité sanitaire à travers l’ARS (Agence régionale de la Santé), dépendant du ministère du même nom. D’autre part, à l’instar des autres départements-régions et collectivités d’outre-mer comme la Martinique, la Guadeloupe, Saint-Martin, la Réunion et Mayotte, elle fait partie des Régions ultrapériphériques de l’Union européenne, c’est-à-dire situées hors du continent européen, ce qui la fait bénéficier de certains fonds communautaires destinés à réduire les inégalités régionales. Les subventions et redistributions nationales et communautaires permettent ainsi à ce territoire assez peu productif de jouir d’un niveau de vie nettement supérieur à ses voisins, tout en étant la plus pauvre région française avec Mayotte. L’économie est dominée par les retombées du Centre spatial guyanais à Kourou, « port spatial de l’Europe », alors que les relativement faibles exportations d’or (notamment illégal), de bois, crevettes et poissons subissent une forte concurrence de pays voisins aux moindres coûts de production. Cependant, malgré le chômage élevé, la Guyane connaît une forte immigration venue d’abord de son voisinage géographique (Surinam, Brésil) et culturel (Haïti) plus pauvre, mais désormais issue de pays ou régions de plus en plus lointains : Pérou, Afrique occidentale (Sahara occidental compris), et du Moyen-Orient, Syrie et Afghanistan principalement. Ces flux migratoires auraient donc dû être affectés par la fermeture des frontières, d’autant plus qu’ils ne sont pas arrivés directement en Guyane, mais ont transité par le Surinam et surtout le Brésil. 12 Si le Brésil, neuvième puissance économique mondiale à ce moment, est de ce fait considéré comme une puissance émergente, ses régions du Nord et du Nord-Est connaissent encore des indicateurs de développement relativement faibles, contrairement au Sud et aux régions de Rio de Janeiro et surtout São Paulo. La Guyane est ainsi frontalière de l’État d’Amapá, un des plus petits États, des moins peuplés et des plus récents (1988) de la Fédération, moins pauvre cependant que les États défavorisés du Nord-Est. Le Brésil est en effet un État fédéral, même si les compétences des unités fédérées sont bien moins étendues que celles des États-Unis ou de ’Allemagne, par exemple. Cependant, celles-ci ne connaissent pas l’échelon préfectoral, les compétences des gouverneurs élus s’étendent donc, contrairement à la Guyane, à l’ordre et à la santé publics. En outre, du fait d’une politique d’attribution de visas plus généreuse que celle de l’Union européenne ou des pays du Nord d’une façon générale, le Brésil est depuis quelques années la destination de nouveaux flux migratoires en provenance d’Afrique subsaharienne, d’Haïti et du Moyen-Orient, dont une partie se dirigera ensuite vers la Guyane. La frontière entre la France à travers la Guyane, et le Brésil, ne sépare donc pas seulement deux États membres de deux regroupements économiques distincts (Union européenne et Mercosud), deux territoires à niveau de vie différent, mais également deux systèmes politiques, l’un plus unitaire et centralisé, l’autre fédéral. Ce dernier fait a eu son importance dans la gestion de la pandémie de Covid-19 sur l’Oyapock entre 2020 et 2022. Cependant, cette frontière se caractérise par une forte hybridation, expliquée par un certain éloignement des centres de décision régionaux et nationaux, souvent difficilement accessibles. Cela a permis la mise en œuvre de solidarités transfrontalières grâce à la complémentarité entre les deux rives. La commune de Saint-Georges, du côté français, se trouve à un peu moins de 200 km de Cayenne, par une route seulement ouverte en 2003 comportant un point de contrôle routier à mi-chemin nécessitant des papiers en règle. Côté brésilien, la ville d’Oiapoque est reliée à la capitale régionale Macapá par 560 km d’une route dont une centaine de kilomètres est encore à asphalter, ce qui la rend difficilement praticable en saison des pluies. Paradoxalement, l’ouverture du pont sur l’Oyapock en 2017, reliant ces deux communes, s’est accompagnée d’une présence policière accrue prétendant diminuer l’ampleur des mobilités transfrontalières. Celles-ci, a que les migrations et l’importance des familles binationales ou originaires simultanément des deux rives, ont contribué à créer une identité spécifiquement oyapockoise qui sera mise à mal par les mesures sanitaires1. got, Georges uve de la de : habiter de B. La pandémie de Covid-19 en Guyane et au Brésil, des origines différentes Apparue d’abord en Chine en 2019, d’où son nom de Covid-19, et signalée dès janvier 2020 en Europe, la pandémie de SRAS-CoV-2 atteignait l’Amérique du Sud en février. Les premiers cas en Guyane sont venus de France hexagonale et ceux du Surinam des Pays-Bas. Au Brésil, si c’est d’Italie que seraient venus, comme en Argentine, les premiers cas du fait des liens privilégiés avec ce pays d’où vient une partie de leur population, la diffusion dramatique de la maladie à Manaus a probablement été favorisée par la présence d’entreprises chinoises dans la zone franche de cette grande ville industrielle au cœur de l’Amazonie brésilienne, dont des cadres revenaient de congés du Nouvel An dans leur pays d’origine. Dans l’Amapá, dans la capitale Macapá plus précisément, l’une des hypothèses est le retour de vacances de nombreux fonctionnaires fédéraux originaires des États du Sud-Est comme São Paulo, plus précocement contaminés depuis l’Europe. En revanche, du fait d’un certain isolement, la ville frontalière d’Oiapoque a été plus tardivement atteinte. Les premiers cas connus en Guyane, diagnostiqués le 4 mars 2020, étaient domiciliés à Saint-Laurent-du-Maroni, mais revenaient tous de France hexagonale. Quatre des cinq premières personnes infectées avaient participé à une cérémonie évangélique à Mulhouse, qui a constitué l’un des premiers clusters du territoire français. Du fait probablement d’une population jeune et assez dispersée, la maladie se diffusa peu, surtout par des cas importés des Antilles et de l’Hexagone. Aussi, quand le confinement national fut décidé le 16 mars, suivant les recommandations de l’OMS s’agissant d’une pandémie, la Guyane ne connaissait que onze cas avérés. Comme il en avait la compétence, le préfet aurait pu déroger à un confinement qui n’apparaissait pas forcément nécessaire par rapport à l’Hexagone, mais la Guyane manquait cruellement de masques et de gel hydroalcoolique ; d’autre part une rapide saturation des lits d’hôpitaux était à craindre en cas d’aggravation de l’épidémie, ce qui ne manqua d’ailleurs pas de se produire, mais après la levée du confinement... La Guyane suivit donc strictement, dans le cadre de la politique d’urgence sanitaire, les dates décidées au niveau national : confinement à partir du 16 mars, déconfinement le 11 mai, et fermeture des frontières2. Comme l’écrivit la géographe Margot Schneider3, celle-ci constituait la « première immobilité imposée de manière universelle à l’ensemble des citoyens d’un État ». 2 GRANGER Stéphane, « La pandémie de Covid-19 en Guyane, un révélateur des tensions propres à une société ultramarine » [en ligne], Études caribéennes, no 49, août 2021. URL : http://journals.openedition.org/etudescaribeennes/21528 3 SCHNEIDER got, op. cit. 14 La frontière acquérait ainsi une nouvelle fois, mais plus drastiquement, une fonction de barrière sanitaire, afin d’empêcher la propagation du virus sur la rive française alors préservée. En effet, outre l’interdiction mutuelle de traverser des viandes et produits frais provenant de l’autre côté de la frontière du fait des épidémies de fièvre aphteuse et de la maladie de la mouche-carambole, des mesures de protection, assez réduites toutefois, avaient déjà été appliquées dans l’Amapá en août 2014 quand cet État fut atteint par l’épidémie de chikungunya passée par la Guyane. De fait, la Guyane et l’Amapá, en raison de leur situation amazonienne, de leur structure socio-économique peu développée et de l’éloignement de leurs centres de décision nationaux comme régionaux, ont toujours souffert d’un équipement sanitaire insuffisant, malgré la présence ancienne de maladies infectieuses telles la malaria ou le HIV, et n’étaient donc pas en mesure de supporter une crise sanitaire d’ampleur4. II. Une région transfrontalière aux prises avec les politiques nationales A. Les premières mesures : confinement et interdiction des mobilités transfrontalières En droite ligne des recommandations de l’OMS, outre les mesures de confinement qui furent les mêmes que dans l’Hexagone avec l’obligation notamment de la fameuse attestation de déplacement dérogatoire, les frontières furent fermées le 19 mars 2020, deux jours après la fermeture des frontières extérieures de l’Union européenne, mais de façon unilatérale et sans concertation 4 GRANGER Stéphane et DE VILHENA SILVA Gutemberg, « Enjeux transfrontaliers en période de pandémie de la Covid-19 : le cas de la circulation sur l’Oyapock entre Guyane française et Brésil » [en ligne], Confins, 51, 2021, publié le 27 septembre 2021 [consulté le 23 janvier 2022]. avec les États voisins, même si le Brésil ferma les siennes à la même date. Le pont binational de l’Oyapock resta néanmoins ouvert sur des créneaux extrêmement limités afin de permettre le retour en Guyane des résidents en déplacement au Brésil ou en Amérique du Sud, avec tests et isolement temporaire obligatoires. Pour renforcer les mesures nationales de confinement, les autorités françaises interdisaient toute circulation fluviale autre que policière, militaire ou médicale, avec patrouilles policières fluviales sur le Maroni et l’Oyapock pour empêcher les transports de passagers ou de produits illicites, renforcées par l’arrivée de militaires de l’Hexagone. Les mobilités furent particulièrement visées : les postes de contrôles routiers (PCR) d’Iracoubo et de Régina, chacun à mi-chemin de Cayenne et de la frontière (du Surinam pour le premier, du Brésil pour le second), désormais franchissables seulement pour motifs impérieux, isolèrent les régions frontalières du reste du territoire. Si les liaisons aériennes avec l’Hexagone et les Antilles furent maintenues, l’unique compagnie aérienne assurant la liaison Guyane-Brésil, la Brésilienne Azul, cessa en revanche d’exploiter cette dernière qui n’avait plus lieu d’être jusqu’à nouvel ordre, isolant totalement la Guyane du reste de l’Amérique du Sud. Elle ne revint pas malgré l’amélioration de la situation sanitaire. La levée du confinement obligatoire (qui ne concerna pas la frontière à ce moment, comme nous le verrons ultérieurement) en mai 2020 s’accompagna de la décision préfectorale d’un couvre-feu valable à partir de 18 heures et tous les dimanches, qui fut cité en exemple au niveau national. Au Brésil, en dépit de la rapide aggravation de la situation sanitaire, le président Bolsonaro brilla par son scepticisme assumé et un certain immobilisme, qui se traduisirent par la démission de plusieurs ministres de la Santé qui avaient davantage pris conscience de la gravité de la situation. Jair Bolsonaro se refusa par exemple à imposer un confinement strict, qui aurait selon lui porté un préjudice encore plus grand du fait de l’importance du travail informel et des faibles revenus d’une grande partie de la population, confinement par ailleurs impossible à imposer aux nombreux villages indigènes de l’Amapá du fait de leur mode de vie collectif et de leur activité agricole vivrière. D’autre part, peu convaincu par l’efficacité des vaccins, il retarda même leur mise en service au Brésil alors que lui-même fut atteint par une forme bénigne, ce qui lui fit probablement minimiser l’ampleur de l’épidémie.
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Vološinov entre la psycholinguistique et la «sciences des idéologies»
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Cahiers de l’ILSL, n° 24, 2008, pp. 59-75 Volo!inov entre la psycholinguistique et la «sciences des idéologies» Sergueï TCHOUGOUNNIKOV Université de Bourgogne, Dijon Résumé : Il est question de la généalogie conceptuelle de l’«idéologie» et de la «psychologie sociale» chez Volo!inov afin de recontextualiser sa pensée et de la réintroduire dans la réflexion occidentale sur la sémiologie des phénomènes idéologiques. Cet arrière-plan de la tradition sémio-idéologique (Condillac, Tracy) permet d’expliciter certains enjeux et moteurs de la conception de Volo!inov et du programme du Cercle de Bakhtine. On y retrouve tous les éléments qui fondent la conception de l’«idéologie» chez Volo!inov et qui permettent de la considérer comme relevant de la tradition sensualiste pré-marxiste. L’analyse comparée de la sociologie morphologique de G. Simmel et de la linguistique sociologique de Volo!inov permet de définir leurs objets comme «formalisme organique», qui se situent dans la continuation de la tradition morphologique allemande. Cette analyse généalogique aboutit aux conclusions suivantes : 1) l’idéologème ou le «signe idéologique» de Volo!inov sont des modifications conceptuelles de la notion «romantique» de «forme interne» ; 2) le «signe idéologique» est défini comme résultat du mélange d’une «perception» et d’une «idée». Cette optique, qui implique le caractère «idéologique» de la perception, rattache la conception de Volo!inov à la tradition psycho-sémiotique inaugurée par Condillac ; 3) Les «accents sociaux», les «évaluations sociales» étant liés à la genèse des notions, la dimension sémantique des langues naturelles est pénétrée par la composante idéologique ; 4) la conception du «signe idéologique» est dialogique : elle permet de définir le dialogue en tant que «forme naturelle», «primitive» ou «organique» du langage. Volo!inov fait sien le modèle de la communication d’origine romantique fondé sur la réalisation d’une «forme interne». Mots-clés : Volo!inov ; Cercle de Bakhtine ; Simmel ; idéologème ; forme interne ; signe idéologique ; valeur ; accent social ; dialogisme ; formalisme ; psychologie. sociale. 60 Cahiers de l’ILSL, N° 24, 2008 Le problème essentiel des réflexions de Volo!inov sur le langage consiste à répondre à la question suivante : les phénomènes idéologiques sont-ils inhérents au langage, ou, au contraire, ne sont-ils qu’un effet particulier de 1 «construction» . Il s’agit d’une même dichotomie qui oppose l’école d’A. Potebnja et les formalistes sur la question de la «poéticité» : est-ce une propriété intrinsèque de la langue ou est-ce un effet constructif, dérivé d’une «visée» particulières ? La conception de Volo!inov étant fondée sur deux notions : celle d'«idéologie» et celle de «psychologie sociale», il convient de commencer par analyser leurs portées. On s’intéressera à la généalogie conceptuelle de l’«idéologie» et de la «psychologie sociale» chez Volo!inov afin de recontextualiser sa pensée, de la réintroduire dans la réflexion occidentale sur la sémiologie des phénomènes idéologiques. En effet, cet arrière-plan de la tradition sémio-idéologique permet d’expliciter certains enjeux et moteurs de la conception de Volo!inov et de conduire par conséquent à une meilleure compréhension du programme du Cercle de Bakhtine dont cette conception fait partie. LA GENEALOGIE DE LA «PSYCHOLOGIE SOCIALE» Quand Volo!inov aborde l’idéologie pour établir les lois de son développement dans la conscience, il suit une démarche déjà traditionnelle. En effet, tous les fondateurs du marxisme ont essayé de présenter le mécanisme de la genèse de l’idéologie et de définir ses relations avec la conscience (K. Marx, A. Labriola, G. Plexanov, V. Lénine, N. Buxarin). Selon G. Tihanov, la compréhension de l’idéologie par les marxistes russes oscille entre deux pôles : tantôt elle est un produit secondaire, simple «reflet» des infrastructures ; tantôt c’est une force productive capable d’influencer l’infrastructure (Tihanov, 2002, p. 325). Les idéologies étant tributaires de la «mentalité du peuple» ou de la «psychologie de l’époque» (G. Plexanov), le projet de la «psychologie sociale» semble liée à la «psychologie des peuples», Völkerpsychologie, fondée sur l’idée du psychologisme universel «supra-individuel» et de la nature collective de la conscience. Ses principes ont été élaborés par H. Steinthal, M. Lazarus et W. Wundt entre 1850 et 1920 (cf. Wundt, 1900). Pour N. Buxarin, la «psychologie sociale» est une solution chimique à partir de laquelle se cristallise l’idéologie. L’idéologie systématise la «psychologie sociale». De l’autre côté, l’idéologie est rigide et statique, elle est à cet égard dépendante de la «psychologie sociale», plus mobile et sensible aux changements (Le matérialisme historique, 1921) (Tihanov, 2002, p. 325-326.). G. Tihanov voit dans l’instabilité des relations entre 1 Ce terme est compris au sens du formalisme russe, à savoir comme «forme» par opposition au «matériau» ou encore comme système ou corrélation fonctionnelle où les éléments tirent leurs significations des fonctions qu’ils remplissent dans l’ensemble de l’œuvre. S. Tchougounnikov : Volo!inov, psycholinguistique et idéologie 61 l’idéologie et la «psychologie sociale» le même mécanisme qu’on trouve dans la «philosophie de la vie» de Georg Simmel (1858-1918), où les forces de la croissance organique sont en conflit permanent avec celles de solidification et de consolidation (ib., s. 326). En effet, Volo!inov se réfère à Simmel quand il parle de «l’idéologie quotidienne» (zjiznennaja ideologija, littéralement la psychologie de tous les jours, la psychologie de la vie). Ainsi, le terme de "iznennaja ideologija, ("izn’ = vie), laisse percevoir l’influence de Lebensphilosophie, «philosophie de la vie» de G. Simmel sur la conception de Volo!inov posant l’unité de l’idéologie et de la «psychologie sociale». Les ouvrages essentiels de G. Simmel, professeur à l’Université de Berlin (1901-1914) et de Strasbourg (depuis 1914) ont été traduits et pu2 bliés en Russie entre 1898 et 1928 . Selon lui, les conflits vécus par l’individu s’enracinent dans le mécanisme de la «vie». La «vie» se réalise par les limitations qu’elle se donne elle-même en créant les formes. La forme et la limite supérieure, c’est la mort que la vie porte en elle-même. En dépassant ses propres limitations, la «vie» crée la «vie plus intense» et la «plus-quela-vie» (Mehr-Leben et Mehr-als-Leben). Ce sont des formations relativement stables. Créés par la «vie», elles s’opposent à sa nature coulante et changeante. Mehr-Leben et Mehr-als-Leben sont des formes de la culture : ainsi, la «philosophie de la vie» se transforme chez Simmel en «philosophie de la culture». La «vie» de la culture passe par l’engendrement de nouvelles formes culturelles. En vieillissant, ces formes pétrifiées deviennent un frein pour le développement de la vie. Eliminées, elles sont remplacées par de nouvelles formes condamnées à vivre le même destin. La tragédie de la culture réside dans la fatalité de ces conflits du devenir. La culture moderne est cette lutte de la vie contre le principe de la forme. La «vie» ou le «devenir» du langage pour Volo!inov s’accomplit dans le «milieu idéologique», où apparaissent les «formes langagières organiques». Volo!inov définit l’«idéologie quotidienne» comme ensemble de l’expérience de la vie et de ses expressions langagières. Ce terme correspond à ce que la litté3 rature marxiste appelle «la psychologie sociale» (Plexanov). L’«idéologie quotidienne» (équivalente à la «psychologie sociale») est chez Volo!inov une source des «significations idéologiques». Par la suite, ces dernières se trouvent transformées en produits idéologiques au sens propre. Cette «idéologie quotidienne» constitue le milieu naturel où s’accomplissent les actes (postupki) et se développent les «idéologèmes». Extraits de ce milieux, ils deviennent des «monuments morts» des idéologies révolues. L’idéologie dominante, soutenue par les formes de la «parole externe», forme une «conscience officielle». Cette dernière peut éventuel2 Problèmes de la philosophie de l’histoire, Moskva, 1898 ; La religion, M., 1909 ; La différentiation sociale, M., 1909 ; Le conflit de la culture moderne, Ptg, 1923 ; Goethe, M., 1928. 3 Cité dans : Tihanov, 2002, p. 327. 62 Cahiers de l’ILSL, N° 24, 2008 lement entrer en conflit avec la «conscience non-officielle», c’est-à-dire avec la «parole interne» de l’individu. Le langage est posé par Volo!inov comme un élément de la supers4 tructure, il semble suivre à cet égard le point de vue de Marr . Volo!inov fait dériver le langage de l’interaction sociale. Le langage est né dans l’espace interdiscursif, son élément naturel. Cet espace correspond à l’extériorisation de la conscience sociale. Le langage dans ses formes sociale de réalisation (dialogiques, interactives, etc.) est l’«idéologie quotidienne» ou la «psychologie sociale» effective. Selon G. Tihanov, les développements de Volo!inov mènent à la conclusion que le langage pour lui n’est pas en réalité une superstructure. La raison en est qu’il participe aux idéologies sans en faire partie. C’est dans ce sens qu’il est «neutre» à l’égard de toute fonction idéologique. Le Mot (slovo) ne fait qu’accompagner toute «création idéologique» (Tihanov, 2002, p. 327-329). Pourtant, ce support langagier est actif, car toute «activité idéologique» est non seulement accomplie mais aussi commentée ou «évaluée socialement» par lui. LA NATURE DU SIGNE IDEOLOGIQUE Le signe idéologique chez Volo!inov est tributaire du substrat matériel qui conditionne tout phénomène idéologique. Il est un effet sensoriel ou perceptif plutôt qu’intellectuel. C’est dans sa qualité d’objet sensoriel ou perceptif qu’il s’oppose au «mot neutre», dit encore signe «externe», «nonidéologique», objet de la linguistique formelle. Le «signe idéologique» apparaît alors comme un équivalent de l’effigie (Abbild) de la linguistique de Humboldt. Il s’agit d’une extraction par l’«opération de l’esprit» d’une configuration déterminée des éléments sensoriels constitutifs de la perception d’un objet donné. Pour Volo!inov, la matérialité du phénomène implique sa portée idéologique et vice versa. En outre, le fonctionnement idéologique est lié aux éléments matériels ou sensoriels dans le langage : intonation, modulation de la voix, choix et disposition des mots, gestes. Traditionnellement, ces éléments sont définis comme résidus ou vestiges du langage gestuel primitif (Condillac). Enraciné dans la sensation ou perception, dans les constituants sensoriels du psychisme, le «signe idéologique» s’approcherait alors du «langage gestuel» ou du «langage d’action» (Condillac). Ce langage originaire se constitue comme une liaison systématique de certains ensembles perceptifs avec des mouvements corporels précis. Cela permet de supposer la nature essentiellement sensorielle ou perceptive de la «langue de classe» dans l’école marriste. L’«effet de classe» dans la langue relèverait alors de la dimension archaïque du «langage d’action». Cette émergence de la dimension sensorielle ou perceptive 4 Cf. surtout Volo!inov, 1930, p. 48-66. S. Tchougounnikov : Volo!inov, psycholinguistique et idéologie 63 expliquerait la dimension «transgénétique», celle «de classe», distincte de la compréhension purement intellectuelle, fondée sur les signes abstraits. DE LA «FORME INTERNE» A LA «LANGUE DE CLASSE» Le mécanisme de croissance idéologique de la conscience présenté par Volo!inov n’est pas clair. En effet, la parole externe est intégralement conditionnée par la parole interne et cette dernière est une restitution exacte des signes externes émis par le milieu. On ne comprend plus comment la conscience peut accéder à une «croissance idéologique» par le retour différés des signes. Le modèle de Humboldt permet de comprendre ce processus de croissance idéologique de la conscience. Humboldt cherche à examiner le «cycle complet» qui va de la naissance de la langue dans l’esprit jusqu’à son retour et sa réaction sur l’esprit émetteur. Lors de la perception d’un objet externe, la «liaison synthétique» de «l’activité des sens» et de l’«action interne de l’esprit» engendre la représentation. Cette dernière se trouve investie dans l’objet en faisant ainsi retour à son point d’origine. Ainsi, cette formation de l’objet dans la pensée participe à sa perception effective. Cette «activité subjective» (subjective Thätigkeit) de l’esprit dite aussi «liaison synthétique» ([synthetische] Verbindung) conditionne la 5 perception renouvelée de l’objet. Comme chez Humboldt, l’acquisition et l’utilisation du langage est pour Volo!inov un processus productif. Ce dernier implique l’objectivation ou l’extériorisation des représentations. Ce processus aboutit à l’engendrement des produits discursifs externes (énoncés). Etant extériorisé, ces produits discursifs acquièrent de nouvelles formes d’existence. Ils deviennent des «objets idéologiques», des «idées pour la conscience». La visibilité du «Mot», cet effet de son extériorisation, conditionne chez Volo!inov l’apparition des idéologèmes. En se matérialisant, le «Mot» se transforme en un objet idéologique, objectif et perceptible. Toute mise en discours est idéologique dans la mesure où c’est une mise en forme. L’idéologie apparaît comme dépendante des sensations, son émergence passe par la faculté de sensibilité. L’idéologie infiltre le sujet par les organes de sens. Les récepteurs mêmes constituent des instruments de la propagation idéologique. Le produit discursif extériorisé qui réfracte la réalité externe devient de nouveau un objet de réfraction pour le locuteur. Le locuteur établit nécessairement une relation entre son «énoncé» et ses propres présuppositions de départ. C’est ainsi qu’on voit se créer une rupture 5 Humboldt écrit : «L’activité subjective forme dans la pensée un objet. Car aucune forme de représentation ne peut être considérée comme la contemplation passive d’un objet déjà existant. L’activité des sens doit s’associer de manière synthétique à l’activité interne de l’Esprit. La représentation se détache de cette association, elle devient l’objet de la force subjective de l’Esprit et revient à celui-ci comme cet objet perçu sous une forme nouvelle. La représentation est donc transférée dans cette véritable objectivité sans pour autant être arrachée à la subjectivité» (Humboldt, 1998, S. 182). 64 Cahiers de l’ILSL, N° 24, 2008 entre le point de départ et le point d’arrivé. Il en découle le redoublement entre l’idée ou la notion de départ et l’idée ou la notion d’arrivé. Cette rupture se trouve à l’origine de la transformation de la conscience du locuteur. Celle-ci s’accomplit dans l’intervalle entre la non-matérialité de la parole interne de départ et la matérialité de la parole externe. C’est ainsi que Volo!inov réinterprère une des dichotomies fondamentales de la linguistique de Humboldt. La transformation ou la croissance idéologique de la conscience s’accomplit par l’effet de feed-back, entre la représentation de départ et la représentation d’arrivée. Il s’agit du changement sémantique de type «saltationniste», c’est-à-dire par bond ou par saut. La «forme prégnante» (Abdruck) de la linguistique de Humboldt, cet intermédiaire morphogène dit aussi «forme interne», se trouve remplacé chez Volo!inov par le déterminisme du «signe idéologique». L’intériorisation de ce dernier suit un parcours analogue pour se situer à l’origine de l’«arrachement» ou du «détachement» (losreissen) et de l’«objectivation» des représentations. Ainsi, le déterminisme interne de nature ethnopsychologique cède la place au déterminisme externe de nature sociale. L’instance de la «forme interne» est remplacée par l’instance de la «langue de classe». AUX ORIGINES DE L’IDEOLOGIE Les notions d’«idéologème» et de «signe idéologique» sont fondamentales 6 dans le projet «sociologique» du Cercle de Bakhtine. Le signe idéologique est défini comme fonction de «réfraction», ce phénomène est chargé d’un fort potentiel évaluatif (il est porteur de l’évaluation sociale). Il réalise «la perception par le nous» (my-pere"ivanie, «nous-perception») à la différence de la «perception par le moi» (ja-pere"ivanie, «moi-perception»). Le signe idéologique conditionne la perception en tant que «fait de conscience» ou «fait social» (Bakhtine (Volochinov) [1927] 1980). Le «signe idéologique» correspond à un vécu social, partagé ou collectif : ainsi, aucun vécu personnel, «non-dialogique» ou «monologique» n’est possible. Pour P. Medvedev, l’idéologème, l’évaluation sociale est une fusion du psychologique et du social (Bakhtine (Medvedev) 1928] 1993). Dans l’art, c’est une matérialisation dans les formes artistiques des valeurs d’un milieu social donné. Ainsi, le psychisme est social, et par conséquent idéologique. La compréhension de l’«idéologie» par le Cercle de Bakhtine est loin d’être orthodoxe. Le sens marxiste du terme (l’idéologie comme une fausse conscience) est relativement tardif, il apparaît après le déclin de la psychologie empiriste et associationniste. Le terme d’«idéologie» signifie chez Volo!inov l’«anthropologie». Par conséquent, si «toute signification est idéologique», c’est qu’elle est sociale ou anthropologique. L’«idéologie» est définie par Volo!inov comme des stades successifs du développe6 Introduit dans : Bakhtine (Volochinov) [1929] 1977. S. Tchougounnikov : Volo!inov, psycholinguistique et idéologie 65 ment de la compréhension du monde et de l’attitude à son égard (Volo!inov, 1930, s. 55). Volo!inov cite comme exemple d’un tel reflet de l’organisation socio-économique par la sémantique une guerre entre deux tribus ennemis. La tribu triomphante occupe le territoire des vaincus. Elle est alors une classe dominante dans ce groupe humain croisé. Mais ces deux tribus ont leurs noms sacrés ou totémiques, leurs divinités tribales. Les noms des vainqueurs signifieront alors «ce qui est bon», tandis que les noms des vaincus signifieront «ce qui est mauvais». La même opposition marquera les noms des couches sociales. Ainsi, le nom «Pélasgues», tribu jadis puissante mais vaincue par les Romains, commença à signifier chez ces derniers la «plèbe». De l’autre côté, le nom de la tribu caucasienne légendaire de «Kolkhv» acquit le sens «paysan» ou «esclave» depuis la domination des Kolkhvs par les Géorgiens. Cette «idéologie» primitive ou anthropologique, constitutive de l’espèce, se trouve inscrite aux stades primitifs de la genèse psycho-linguistique. Cette définition large de l’idéologie conduit à son sens étymologique. Initialement la notion d’idéologie élaborée par A. Destutt de Tracy (17541836) et les «idéologues» de la fin du XVIIIe siècle est avant tout celle d’une «science des idées» (Destutt de Tracy, [1801] 1970). Il s’agissait de l’étude des combinaisons d’images qui, en s’associant, formaient, les différents concepts. Au départ l’idéologie est considérée comme conscience ou plutôt les deux ne sont pas distinguées. Pour Destutt de Tracy, l’idéologie, science inventée par Condillac, «est une partie de la zoologie». Destutt affirme le lien de la pensée et de la sensation. La faculté de penser consiste à éprouver une foule d'impressions, de modifications. Ces divers états de la pensée sont définis comme idées ou perceptions, comme «des choses que nous sentons». «Penser – c’est toujours sentir quelque chose», et penser, «c’est sentir». «Penser ou sentir, c’est […] la même chose qu’exister», car l’absence de sentiments signifie l’absence d’existence (Destutt de Tracy, [1801] 1970, p. 391). Il s’agit d’une définition sensualiste et ontologique de la pensée. La «faculté de penser ou d’avoir des perception» renferme quatre facultés élémentaires : la sensibilité ; la mémoire ; le jugement et la volonté (ib., p. 391). «La faculté de juger ou le jugement est encore une espèce de sensibilité ; car c'est la faculté de sentir des rapports entre nos perceptions» (ib., p. 394). Ces rapports sont «des sensations internes du cerveau, comme les souvenirs». «La faculté de sentir des rapports est une conséquence presque nécessaire de celle de sentir des sensations». De cette faculté de sentir viennent toutes les connaissances. Savoir consiste 1) à percevoir des rapports entre nos perceptions et 2) porter un jugement sur ces rapports. Percevoir un rapport et porter un jugement, c’est la même chose. Pour pouvoir le faire, il faut avoir en même temps deux idées distinctes (ib., p. 395). 66 Cahiers de l’ILSL, N° 24, 2008 Aucune des idées ou perceptions ne sont des idées simples. Elles sont toutes composées, c'est-à-dire formées par plusieurs de ces facultés élémentaires. Les idées composées se forment avec des éléments tels que sensations, souvenirs, jugements et désirs. Une sensation éprouvée pour la première fois, uniquement «sentie», est une idée absolument simple. Elle relève d’un seul acte intellectuel. Si nous on y joint le jugement, dès lors elle cesse d'être une idée simple pour devenir une idée composée. Celle-ci apparaît comme jonction de l'action de sentir et de l’action de juger (ib., p. 399). Tous les systèmes de signes, tous les langages conventionnels ont tous pour base commune les actions qui manifestent les pensées et en sont les «signes naturels». «Le langage d'action est donc le langage originaire ; il est composé de gestes, de cris, d’attouchements; il s'adresse à la vue, à l'ouïe , au tact» (ib., p. 420). La propriété la plus importante des signes consiste à combiner les idées élémentaires, à en former des idées composées et à fixer ces composés dans la mémoire. Les «idées abstraites et généralisées» n'ont pas d'autre soutien dans l’esprit que le signe qui les représente. C’est que «nos perceptions purement intellectuelles sont très-légères, et par là même très-fugitives parce que les mouvements internes par lesquels elles s'opèrent ébranlent très-peu le système nerveux ; or, le signe en s'y joignant, les fait participer à l'énergie de la sensation dont il est la cause». Ce signe «constate et fixe le résultat d'opérations intellectuelles dont le sentiment disparaît», il devient une «formule sensible». Celle-ci est employée dans des combinaisons ultérieures, quoique le mode de sa formation reste oublié (ib., p. 421). On voit ainsi s’esquisser chez Tracy une corrélation entre la nature sensible de la pensée et l’objet de l’«idéologie». La mise en rapport des perceptions ou encore la production des «idées composées» implique l’acte de juger, définissable aussi comme acte de comparer ou d’évaluer. Dans ce modèle le «langage d’action» ou le «langage gestuel» fournit un substrat matériel nécessaire pour le maintien et l’affirmation des «perceptions purement intellectuelles», à savoir pour la production des «idées composées». Ce «substrat matériel» primitif transparaît et reste opérant dans tous les signes du langage dans la mesure où ils sont fondés sur les «signes naturels» originaires. Ce «substrat matériel», lié à la couche primitive du langage gestuel, fournit un matériau sémiotique aussi bien aux «perceptions intellectuelles» qu’aux signes du langage dit «signes d’institution» (Condillac). On y retrouve ainsi tous les éléments qui fondent la conception de l’«idéologie» chez Volo!inov et qui permettent de la considérer comme relevant de la tradition sensualiste pré-marxiste. Cette division entre les «idées simples» et les «idées composées» implique la dimension des valeurs dont il sera maintenant question. S. Tchougounnikov : Volo!inov, psycholinguistique et idéologie 67 DE LA VALEUR A L’EVALUATION Remontant à l’origine du langage, la notion de valeur (évaluation) est fondamentale dans le projet de la «linguistique sociale» chez Volo!inov. Elle touche aux couches primitives de la conscience langagière et sociale. L’évolution du langage se définit comme la croissance ou la transmutation des «valeurs» (des «accents sociaux») constitutives d’une langue donnée. Ainsi, les «significations» des noms tribaux et totémiques sont réévalués selon le statut social des tribus croisées. La stratification des significations s’accroît avec la stratification de la société et la formation des élites politiques. Pour Volo!inov, «tous les termes sociaux» ainsi que «les termes des grades sociaux» sont «des anciens noms tribaux». La notion d’évaluation se trouve assimilée à celle de «signe interne» et de «parole interne». Comprendre signifie attribuer une signification à un signe. Pour faciliter la compréhension, le signe doit être constant et contenir une attitude évaluative. Le langage externe est gouverné par la parole interne. Est interne tout signe externe doué de «valeur». La valeur est comprise comme le signe-porteur d’évaluation. En tant que «marque évaluative» le signe intègre la vision du monde (krugozor) collective, c’est-à-dire, le système des valeurs collectives. Ainsi, le passage du signe dans la parole interne constitue la condition nécessaire de la communication verbale. Selon Volo!inov, la conscience se développa parallèlement au développement linguistique et dans les échanges verbaux. La conscience est un «ruisseau des mots» dit «parole interne». Aucune «pensée» ne se passe de «parole interne». Pour être senties ou perçues les sensations purement physiologiques (faim, soif) doivent être exprimées à l’intérieur du sujet dans le matériau de la parole interne» (Volo!inov, 1930, s. 60). Cette expression du vécu ou du perçu est dès le début conditionnée par le milieu social collectif où vit le sujet. La «perception» est aussi conditionnée par ce milieu. Tout «besoin naturel» pour qu’il devienne un désir humain vécu et perçu doit nécessairement traverser la réfraction idéologique ou sociale. L’expression la plus élémentaire s’accompagne d’une intonation et d’un geste précis. Par là, elle se trouve marquée de façon sociologique et historique par l’époque et par l’appartenance de classe du locuteur. Tout cela constitue la mise en forme historique et sociale de l’expression de ce besoin naturel (faim, soif). Ainsi, tout énoncé possède une «visée sociale» qui relève de son contexte socio-historique. Les commentateurs anglo-saxons ont beaucoup insisté sur l’origine néo-kantienne de la notion de valeur dans le cercle de Bakhtine. La critique par Bakhtine, Medvedev, Volo!inov du formalisme dans les études littéraires et en linguistique est faite au nom de la «valeur», définie comme «idéologème», «signe idéologique», «pont idéologique», «intonation», «mot bivocal». Or ce terme de valeur fait partie de la problématique soulevée par le néo-kantisme. Le terme même de Urteil, qui signifie aussi bien jugement que verdict explique l’articulation du projet «dynamique» de la critique dialogique et sociologique comme une synthèse des esthétiques kantienne 68 Cahiers de l’ILSL, N° 24, 2008 et marxiste. Ainsi, H. Rickert définis les critères qui permettent «la détermination d’une réalité possible» comme Wert (valeur) et Geltung von Werten (validité de valeurs) (Orth, 1997, p. IV). Ces termes de «valeur» et de «validité de valeurs» doivent saisir l’hétérologie ou hétérothèse de la «réalité culturelle». De même pour E. Cassirer «Humboldt et Kant affirment la priorité de la forme sur la matière ; cette priorité […] est une priorité de la 7 valeur». On peut aussi y voir l’influence de Nietzsche, si importante pour le siècle d’argent russe. Pour Nietzsche, la notion de valeur est liée au mécanisme de la compréhension («comprendre, c’est évaluer») et à la dimension anthropologique («l’homme est l’animal estimateur par excellence»). Le thème des valeurs est intrinsèque à sa philosophie (le motif de la «transévaluation», «apprécier la valeur des valeurs», la valeur comme «vérité», la «table des valeurs» dans Zarathoustra). Cette notion trouve chez Nietzsche une application «philologique» : il y a recours dans le contexte de l’interprétation du texte. La notion de valeur accentue l’initiative créatrice ou le projet de l’interprète lui-même, en contribuant ainsi au thème de la «volonté de puissance». Le texte n’est pas subi par l’interprète dans la mesure où ce dernier ne reflète pas passivement les images et les signification. L’interprétation du texte est façonnée par l’interprète, c’est une production, une construction de formes. Configuration expressive, elle résulte d’une «certaine mise en forme» (cf. Granier, 1982, p. 63-65 ; Nietzsche, 1993). On lit dans la Volonté de puissance : «Le pouvoir créateur chez les êtres vivants, quel est-il ? C’est le fait que tout ce qui constitue pour chacun son «monde extérieur» représente une somme de jugements de valeur ; que vert, bleu, rouge, dur, tendre sont des jugements de valeur héréditaires et le signe de ces jugements» (Nietzsche, 1947, p. 218). Nietzsche utilise ici le même exemple que la psychologie expérimentale de son temps pour illustrer le concept d’«élément» commenté auparavant. Enfin, il faut souligner l’influence des sciences économiques de l’époque sur l’articulation du concept de valeur en sciences humaines. Tel est la cas de Saussure, chez qui cette métaphore économique apparaît dans le chapitre 3 du Cours. On y trouve la comparaison saussurienne de «l'économie politique et l'histoire économique» avec la linguistique comme «les sciences travaillant sur des valeurs» : «C'est que là, comme en économie politique, on est en face de la notion de valeur ; dans les deux sciences, il s'agit d'un système d'équivalence entre des choses d'ordres différents : dans ( l'une un travail et un salaire, dans l'autre un signifié et un signifiant» Saussure, [1916] 1969, p. 115-116) ainsi que les célèbres métaphores monétaires du Cours, celle d’«une pièce de cinq francs» et d’«un écu» (ib., p. 159, 160, 164). La notion de «valeur» détermine les topoï de l’économie et de la politologie marxistes tels que la distinction entre deux types de valeur selon le 7 cité dans Hansen-Løve, 1972, p. 71. S. Tchougounnikov : Volo!inov, psycholinguistique et idéologie 69 type de production (valeur d'usage et valeur d'échange) ; la «valeur-travail», la «force de travail» en tant que créatrice de valeur, le caractère «fétiche» de la marchandise (Marx, 1969, p. 139-381). G. Simmel, une des références de Volo!inov, fonde sur cette notion de valeur sa Philosophie de l’argent publiée en 1900. Cet ouvrage participe aux discussions autour de la notion de valeur monétaire, le sujet qui faisait l'objet de débats intenses chez les politologues, les économistes et les sociologues. La publication posthume du livre 3 du Capital de Marx par Engels en 1894 a réanimé ces débats et a donné l'occasion d'aborder la fonction de la monnaie et du capital dans la société, préparant une transition vers la question de la valeur éthique. Simmel cherche à redéfinir l’acte social, «objet du sociologue», par le biais de l’argent perçu «comme modèle de base de ‘l’interaction sociale» : l’acte social, l’interaction sociale» 8 est l’échange. L’échange est «la concrétisation de l’interaction entre les hommes», il extériorise et matérialise les interactions humaines. Cette incorporation des interrelations humaines dans les objets s’effectue par le biais de la valeur, car elle rend possible l’échange des objets hétérogènes. La valeur apparaît comme moyen d’effacer l’hétérogénéité naturelle des choses. Dans la société «moderne» l’échange a fini par acquérir «une vie propre». Il en découle que «les égalisations des valeurs dans l'échange se font automatiquement, par simple calcul» (ib., p. 197). L’échange efface et remplace les valeurs, où plutôt toutes les valeurs se trouvent réduites à la seule valeur d’échange : «L'échange n'a donc pas besoin d'être précédé d'un processus d'évaluation ; la valeur découle elle-même de l'acte d'échange» (ib., p. 197). Un tel rôle de la «valeur d’échange» fonde le projet d’une science relativiste où «les concepts centraux de vérité, de valeur, d'objectivité» s'imposent «comme des effets de l'échange» (ib., p. 198). C’est tout naturellement que Simmel passe de la valeur économique aux valeurs éthiques. Au début des années 1890, Simmel avance une critique radicale des concepts éthiques fondamentaux. Le concept de l'argent repose sur sa compréhension de l'échange car «l'essence de l'argent s'est développée à partir de l'échange» (ib., p. 198). La valeur qui résulte de l’échange est indifférente. La vitesse de l’échange neutralise les valeurs intrinsèques : l’argent crée «la nouvelle valeur». Ainsi, Simmel emprunte la position et la terminologie de Nietzsche. La valeur est relative dans le sens qu’elle élargit toujours la «distance psychique» entre les individus et les objets (ib., p. 202-202). Simmel est un penseur relativiste à même titre que Saussure. L’enjeu d’une «nouvelle valeur» de l’échange incarnée dans l’argent s’approche de la fonction des termes saussuriens de valeur et d’arbitraire. Le relativisme linguistique aboutit à la séparation de la forme et de la matière, à l’évacuation de la matière du champ d’analyse. Dans ce contexte l’anti8 Cf. Simmel et les normes sociales, 1996, p. 192-193. 70 Cahiers de l’ILSL, N° 24, 2008 saussurisme de Volo!inov et son insistance sur les composantes perceptives du sens pourraient être interprétés comme une tentative de réintroduire le substrat matériel dans un objet linguistique. Cela signifie la suppression de la distance psychique entre l’individu et l’objet et la re-motivation du signe par le biais des valeurs. Une telle re-motivation viserait à rendre le signe «matériel» voire «idéologique», à lui restituer ses «valeurs». Il en résulterait la fusion du sujet et de l’objet et l’élimination du clivage «relativiste» entre les deux. L’enjeu consisterait alors à liquider la division du psychisme, celle qui a été valorisée à cette époque par le formalisme russe comme la source de l’effet esthétique (la fameuse loi de «défamiliarisation»). L’esthétique formaliste se fonde sur l’introduction du discontinu dans le psychisme, elle valorise l’aliénation psychique inhérente. En effet, le formalisme y voit un effet productif. La critique du formalisme linguistique par Volo!inov (ainsi que la critique du formalisme «littéraire» par Medvedev) semble révéler alors ses enjeux. Il s’agit d’opposer au modèle formaliste et relativiste de l’«homme divisé» l’idéal de l’«homme intégral». Indépendamment de la question de l’influence de Simmel sur Volo!inov, c’est l’étude typologique de ces deux pensée qui s’avère intéressante. En effet, ils apparaissent tous les deux comme des figures emblématiques de penseurs de la fin du siècle. Parmi les dominantes de leurs pensées on peut mentionner les suivantes : • le relativisme Lié surtout à la question de «valeurs», le «panthéisme empirique» de Simmel pose la dualité de l’argent, symbole et marchandise, qui représente en soi la relativité économique des objets (ib., p. 195-198) et vise à dissocier la valeur et la substance9. Le relativisme, ce leitmotiv du début du XXème siècle, marque également la pensée de Volo!inov, qui tantôt semble céder à la tentation relativiste (par exemple, sa distinction entre le «corps inerte» du signe et l’«accent social» qui l’anime) tantôt cherche à dépasser ses dangers en multipliant les déterminismes auxquels est soumis le psychisme. • l’économisme Chez Simmel, la recherche sur la «psychologie de l’argent» cède place à la recherche sur le «philosophie de l’argent» en passant par «la sociologie de l’argent» (ib., p. 105-109). Ces métamorphoses de l’approche gardent néanmoins un «noyau économique» stable, en reflétant la mode de la pensée «économiste», celle qui reste fortement présent dans les développements de Volo!inov. 9 Ainsi, «l’argent commence par exercer la fonction monétaire parce qu’il est une valeur ; par la suite, il devient une valeur parce qu’il exerce cette fonction» (cité par O. Rammstedt dans : Simmel et les normes sociales, 1996, p. 199). S. Tchougounnikov : Volo!inov, psycholinguistique et idéologie 71 • le sociologisme Le projet de «psychologie sociale chez Simmel et Volo!inov témoigne de l’interpénétration des concepts de «psychologie» et de «sociologie» qui est dans l’air du temps. Chez Simmel, la «psychologie sociale» apparaît comme discipline intermédiaire entre la psychologie et la sociologie, capable d’embrasser la totalité des phénomènes sociaux. Le terme sozial est à la mode, il se trouve ajouté à toutes les disciplines constituées : ainsi, on voit foisonner dans l’Allemagne de l’époque des concepts croisés tels que Sozialökonomie, Sozialphilosophie, Sozialgeschichte, Sozialpolitik (Simmel, 1981, p. 54). Le projet de Volo!inov ne fait que suivre cette tendance commune des sciences humaines de l’époque. • le dialogisme Le but de la sociologie de Simmel consiste à étudier la «fonction de socialisation», à savoir l’«interaction» humaine appréhendée avant tout comme une «forme». Toute «forme sociale» relève d’une interaction qui se ( manifeste par le biais des formes Simmel et les normes sociales, 1996, p. 200). Il s’agit de concevoir les fondements du dialogisme et la typologie des formes dialogiques. C’est dans cette perspective de l’«échange en tant que valeur primordiale» que se croisent les approches de Simmel et de Volochinov. • le morphologisme Aussi bien le projet de «sociologie formale» de Simmel que celui de «linguistique sociale» de Volo!inov se fondent sur l’idée d’interaction entre la forme et le matériau. Pour Simmel la forme est une «représentation symbolique ou matérialisable dans les institutions». En tant que «formation du devenir», elle constitue la condition de l’histoire et de l’historicité. Toute forme est conceptuelle car tout concept impose une forme à «l’ensemble de l’être», au flux organique du devenir (Simmel, 1981, p. 36). La forme est une information héréditaire : c’est pourquoi, dans la Philosophie de l’argent, Simmel en parle en termes biologiques ou organiques : «Avec la réification […] de l’esprit on obtient la forme qui permet une conservation et une accumulation du travail de la conscience ; la forme est parmi les catégories historiques de l’humanité la plus importante et la plus riche en conséquences. Elle transforme en fait historique ce qui est tellement pro10 blématique en biologie, à savoir la transmission d’un acquis […]» . Le «formalisme organique» de Simmle et de Volo!inov – de même que la «forme vécue» des auteurs allemands opposée par P. Medvedev au «formalisme stérile» de l’OPOIAZ – se situent ainsi dans la continuation de la tradition morphologique allemande. 10 Cité par J. Freund dans : Simmel, 1981, p. 36. 72 Cahiers de l’ILSL, N° 24, 2008 CONCLUSION Le signe idéologique est défini par Volo!inov comme résultat du mélange d’une perception et d’une idée. Cette définition s’insère dans la pensée de l’«intégration psycho-sémiotique», traditionnelle depuis Condillac. Cette optique génétique implique le caractère «idéologique» de la perception. En effet, les «valeurs» qui assurent la compréhension sont intégrées dans les significations à titre de résidus perceptifs. Les valeurs participent nécessairement du mot dans la mesure où ce dernier apparaît comme «un achèvement du concept» (Humboldt). Les «accents sociaux», les «évaluations sociales» étant liés à la genèse des notions, la dimension sémantique des langues naturelles est atteinte ou pénétrée par la composante idéologique. A cet égard, il y a une incohérence chez Volo!inov qui reste à mi-chemin entre la vision génétique et la vision fonctionnelle du langage. D’un côté, il semble définir les «accents sociaux» comme des éléments dynamiques qui viennent investir ou infléchir le corps inerte du signe langagier neutre (une perspective fonctionnelle). D’un autre côté, la perspective générique chez Volo!inov (le développement parallèle de la conscience et du langage) suggère que les «accents sociaux», les «idéologèmes» sont des éléments intrinsèques du système langagier, dont la croissance est parallèle à celle des concepts. L’idéologème ou le signe idéologique sont des modifications conceptuelles de la notion de «forme interne». Le rôle des «valeurs» dans l’achèvement des concepts posé par Volo!inov le place dans la tradition morphologique allemande où la morphogenèse est pensée comme réalisation du principe de «forme interne» (croissance libre ou organique de l’intérieur de l’organisme) opposé au principe de «forme externe» (croissance gouvernée de l’extérieur par l’application à l’organisme d’une forme étrangère ou mécanique). Du «signe idéologique» au dialogue en tant que «forme naturelle» ou organique du langage. L’examen précédent du concept de «signe idéologique» chez Volo!inov permet de expliciter certaines implications de la notion de «dialogisme», fondamentale dans le programme du Cercle de Bakhtine. L’interaction dialogique, selon Volo!inov, révèle ses caractéristiques traditionnelles et donc intelligibles, à savoir : le dialogue comme «forme naturelle» de la vie du langage à la différence du monologue comme une forme artificielle ou non-organique. Ces développement continuent la ligne «anti-Lumière» des penseurs allemands dits «romantiques». La valeur du dialogue consiste en outre dans son ancienneté. En effet, le dialogue se caractérise par l’émergence des éléments archaïques tels que gestes, intonation, inflexions de la voix, bref par la croissance du rôle des éléments «primitifs». Le dialogue s’approche alors du statut de la poésie dans l’idéologie et dans la poétique romantiques. Ensuite, la valeur du dialogue est liée à son oralité. En effet, le dialogue en tant que parole orale ou encore vivante s’oppose d’un côté au S. Tchougounnikov : Volo!inov, psycholinguistique et idéologie 73 monologisme en tant que forme artificielle ou non-organique du langage et de l’autre à la parole écrite. Volo!inov développe ainsi la tendance phonocentrique inaugurée en linguistique par la pensée romantique. Ce procédé continue la ligne «phonocentrique» de Herder qui s’oppose à la métaphore «optique» dans le modèle langagier des Lumières. Enfin, le dialogue chez Volo!inov s’oppose au monologue en tant que domaine des signes motivés à l’ensemble de signes non-motivés ou conventionnels. En d’autres termes, dans le langage le dialogue fait jouer des relations internes contre les relations externes. En effet, pour la tradition romantique allemande en linguistique la distinction entre l’oral et l’écrit correspond à celle entre les signes motivés et les signes conventionnels. La motivation des signes dans le dialogue s’accomplit par l’intermédiaire des sons articulés, elle relève de l’ouïe. Les sons articulés impliquent une relation interne ou motivé qui s’opposent à la relation externe ou arbitraire. Le signe idéologique de Volo!inov apporte une réponse à l’ancienne discussion en linguistique sur la localisation du sens – dans les signes ou dans les têtes des interlocuteurs ? Pour Volo!inov, le sens n’est pas dans la langue, il se situe dans les consciences des interlocuteurs. Volo!inov fait sien le modèle de la communication d’origine romantique fondé sur l’idée de «forme interne» de la pensée où la compréhension est posée comme une non-compréhension partielle. Ces marges de la compréhension conditionnent la flexibilité de la conscience, une zone mobile de croissance des significations réalisée par l’intermédiaire du «signe idéologique». © Sergej Tchougounnikov 74 Cahiers de l’ILSL, N° 24, 2008 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES — BAKHTINE, M. 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13,400
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7,499
17,640
Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX MARCHÉS D’IMPORTATION (%) VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE: PRINCIPAUX DONATEURS (millions de $EU courants) 2005 valeur % Banque mondiale Institutions de l'UE France Banque africaine de dév. Suisse 40,3 22,6 5,3 4,0 2,2 53 30 7 5 3 2010 valeur % 11,5 6,2 2,7 2,6 1,7 44 24 10 10 6 Principaux donateurs 2005 97 % % Données non disponibles. 94 % % Données non disponibles. Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX PRODUITS D’IMPORTATION (% des importations de marchandises) Principaux donateurs 2010 Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). 348 Données non disponibles. 1 0 20 30 40 50 60 10 $EU Les secteurs pour lesquels on ne dispose pas de données ne sont pas inclus. Banque africaine de dév. Institutions de l'UE Banque mondiale Suisse FODI % % Données non disponibles. % Données non disponibles. Source : Secrétariat de l’OMC PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 TCHAD L’AIDE POUR LE COMMERCE – PANORAMA 2013 TRADE INDICATORS INDICATEURS COMMERCIAUX (OUTCOMES) (RÉSULTATS) DEVELOPMENT INDICATEURS DE INDICATORS DÉVELOPPEMENT (IMPACTS) (IMPACTS) Indicateur 2005 2011 2005 2010 Croissance du PIB (%) 17,3 3,1 Chômage (% de la population active totale) Indicateur n.d. n.d. 45,3 Nombre d'exportateurs n.d. n.d. Pop. active féminine (% de la pop. active totale) 45,4 Concentration des exportations de produits (de 0 à 1) n.d. n.d. APD nette reçue (% du RNB) 9,0 6,2 ACR sur les marchandises notifiés à l'OMC n.d. 1 Droits d'importation perçus (% des recettes fiscales) n.d. n.d. AIE sur les services notifiés à l'OMC n.d. 0 Service total de la dette (% des exportations totales) n.d. n.d. Secteurs de services faisant l'objet d'engagements au titre de l'AGCS 2 2 Indice du développement humain (de 0 à 1) 0,31 0,33 Sources : PNUD, Indicateurs du développement humain ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. Droits de douane (%) Importations: moyenne simple des droits NPF appliqués 18,0 17,8 Importations: moyenne pondéré des droits NPF appliqués n.d. n.d. Exportations: moyenne pondérée appliquée 0,5 1,1 Exportations: franchise de droits (valeur en %) 94,7 90,7 PRODUIT INTÉRIEUR BRUT PIB par habitant (PPA, $ internationaux courants) Sources : Base de données Comtrade de l’ONU ; Banque mondiale, Exporters Dynamics Database ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde ; OMC, Profils commerciaux et tarifaires. EXPORTATIONS DE MARCHANDISES PAR RÉGION (%) 2005 2005 2011 n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. Afrique Asie Communauté d'États indépendants Europe Moyen-Orient Amérique du Nord Amérique du Sud et centrale Changement de pourcentage 2005-2011 +11 % 1 374 941 2011 1 531 1 348 0 500 $ internationaux courants Tchad Pays à faible revenu 1 500 1 000 2 000 PIB par habitant ($ EU constants) Source : OMC, Profils commerciaux et tarifaires INDICATEURS DE FACILITATION DES ÉCHANGES Délai d'exportation Délai d'importation 2005 75 38 2005 102 55 2011 20 40 -2 % 2005 308 296 2011 301 367 101 43 0 JOURS Tchad 78 46 2011 Changement de pourcentage 2005-2011 60 80 100 120 Pays à faible revenu 0 50 100 $ EU constants Tchad Pays à faible revenu 150 200 250 300 350 400 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 4 867 Coûts d'exportation 2005 2011 2 169 Coûts d'importation 2005 2 266 1 833 2011 0 $ EU Tchad 2 000 5 902 5 715 8 525 2 717 4 000 6 000 8 000 10 000 Population vivant avec moins de 1,25 $/jour (PPA) (%) Population vivant avec moins de 2 $/jour (PPA) (%) 2005 2005 Part des revenus détenue par les 2 déciles supérieurs de la population 2005 Données non disponibles. Données non disponibles. Données non disponibles. 2010 2010 2010 Données non disponibles. Données non disponibles. Données non disponibles. Pays à faible revenu Indice de performance logistique 2007 2010 SCORE LE PLUS BAS 0 1 Tchad Pays à faible revenu SCORE LE PLUS ÉLEVÉ 2 3 4 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 5 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 12http://dx.doi.org/10.1787/888932844961 PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 349 TOGO L’AIDE POUR LE COMMERCE – PANORAMA 2013 Indicateurs de l’aide, du commerce et du développement pour le Togo INVESTMENT ANDET INVESTISSEMENT FINANCING FINANCEMENT (INPUTS) (APPORTS) TRADE PERFORMANCE PERFORMANCES COMMERCIALES (OUTPUTS)(PRODUITS) Indicateur (millions de $EU courants) 2005 2008 2010 Δ:05-10 Indicateur 2005 2008 2011 Δ:05-11 Formation brute de capital fixe dont: secteur public 334,7 58,5 442,1 100,2 598,9 249,5 79 % 326 % Ratio du commerce au PIB (%) 92 88 80 -12 Export. de services commerciaux en % des export. totales 19 23 n.d. n.d. dont: secteur privé 276,2 341,9 349,4 26 % Import. de services commerciaux en % des import. totales n.d. Apports financiers extérieurs Entrées d’IED Dette extérieure à long terme et versements du FMI Versements d’aide non concessionnelle liée au commerce Versements au titre de l’Aide pour le commerce Envois de fonds et rémunération des salariés 77,0 23,9 41,1 -47 % 9,9 51,6 127,7 1184 % 0,0 0,0 0,0 0% 9,0 99,2 36,6 305 % 192,5 337,1 333,1 73 % Sources : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC) ; Banque mondiale, Statistiques de la dette internationale. VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE PAR SECTEUR (millions de $EU courants) 21 21 n.d. Biens intermédiaires hors combustibles (% des exp. de marchandises) 80 62 81 1 Biens intermédiaires hors combustibles (% des imp. de marchandises) 37 36 44 6 Source : Secrétariat de l’OMC FLUX COMMERCIAUX (millions de $EU courants) 2 000 2005 9 1 000 500 0 37 Biens Services Biens Services comm. comm. Tourisme Ressources min. et ind. extractives Agriculture, sylviculture, pêche Services bancaires et financiers Services aux entr. et autres services 2 4 25 2 4 Communications 2 6 Politique et réglem. commerciales 0 5 15 20 25 10 $EU Les secteurs pour lesquels on ne dispose pas de données ne sont pas inclus. Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE: PRINCIPAUX DONATEURS (millions de $EU courants) 2005 France Allemagne Belgique Luxembourg Institutions de l'UE 2010 Canada Banque mondiale Institutions de l'UE Belgique Italie valeur % 6,3 1,1 0,5 0,5 0,4 70 12 6 6 5 valeur % 22,1 10,4 1,2 0,8 0,7 60 28 3 2 2 Principaux donateurs 2005 98 % Principaux donateurs 2010 96 % Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). 350 +33% +63% +222% +76% +495% Autres Services Services relatifs aux voyages services comm. de transports Services relatifs Autres Services aux voyages services comm. de transports 2011 2005 % 2011 % Ghana Burkina Faso Bénin UE-27 Mali 20 18 12 10 7 Chine Burkina Faso Bénin Niger Ghana 13 11 11 9 6 Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX PRODUITS D’EXPORTATION (% des exportations de marchandises) 2005 Prod. et distribution d’énergie Transports et stockage 2010 +107% Importations CINQ PRINCIPAUX MARCHÉS D’EXPORTATION (%) Ajustement lié au commerce 1 +57% +99% 250 200 150 100 50 0 Exportations Source : Secrétariat de l’OMC 2010 Industrie +65% 1 500 +112% 2005 Aide pour le commerce totale Services commerciaux Total Exportations Importations % Chaux, ciment, matériaux de construction 27 Engrais bruts 10 Articles en matières plastiques, n.d.a. 9 Coton 8 Cacao 6 2011 % Coton 31 Chaux, ciment, matériaux de construction 14 Articles en matières plastiques, n.d.a. 6 Engrais (autres que ceux du groupe 272) 5 Engrais bruts 5 Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX MARCHÉS D’IMPORTATION (%) 2005 % 2011 % UE-27 Chine Côte d'Ivoire Brésil Inde 42 13 6 3 2 UE-27 Chine Thaïlande Ghana Inde 37 18 4 3 3 Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX PRODUITS D’IMPORTATION (% des importations de marchandises) 2005 % Produits pétroliers 29 Chaux, ciment, matériaux de construction 7 Médicaments 5 Barres, profilés, etc., en fer ou acier 4 Froment et méteil non moulus 4 2011 % Produits pétroliers 14 Chaux, ciment, matériaux de construction 8 Médicaments 4 Véhicules automobiles de transport 4 de passagers (sauf bus) Barres, profilés, etc., en fer ou acier 3 Source : Secrétariat de l’OMC PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 TOGO L’AIDE POUR LE COMMERCE – PANORAMA 2013 TRADE INDICATORS INDICATEURS COMMERCIAUX (OUTCOMES) (RÉSULTATS) Indicateur DEVELOPMENT INDICATEURS DE INDICATORS DÉVELOPPEMENT (IMPACTS) (IMPACTS) 2005 2011 2005 2010 1,2 3,9 Chômage (% de la population active totale) n.d. n.d. Croissance du PIB (%) Indicateur Nombre d'exportateurs n.d. n.d. Pop. active féminine (% de la pop. active totale) 50,5 50,5 Concentration des exportations de produits (de 0 à 1) 0,07 0,12 APD nette reçue (% du RNB) 4,0 13,3 ACR sur les marchandises notifiés à l'OMC n.d. 2 Droits d'importation perçus (% des recettes fiscales) 21,9 24,9 AIE sur les services notifiés à l'OMC n.d. 0 Service total de la dette (% des exportations totales) 2,4 4,4 5 5 Indice du développement humain (de 0 à 1) 0,42 0,43 Secteurs de services faisant l'objet d'engagements au titre de l'AGCS Sources : PNUD, Indicateurs du développement humain ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. Droits de douane (%, 2006 et 2011) Importations: moyenne simple des droits NPF appliqués 12,0 11,9 Importations: moyenne pondéré des droits NPF appliqués 10,4 11,1 Exportations: moyenne pondérée appliquée 6,9 3,3 Exportations: franchise de droits (valeur en %) 66,5 61,3 PRODUIT INTÉRIEUR BRUT PIB par habitant (PPA, $ internationaux courants) Sources : Base de données Comtrade de l’ONU ; Banque mondiale, Exporters Dynamics Database ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde ; OMC, Profils commerciaux et tarifaires. EXPORTATIONS DE MARCHANDISES PAR RÉGION (%) 2005 71,6 13,5 0,0 10,0 0,2 1,1 1,9 Afrique Asie Communauté d'États indépendants Europe Moyen-Orient Amérique du Nord Amérique du Sud et centrale Changement de pourcentage 2005-2011 2005 +21 % 858 941 2011 54,9 32,8 0,0 9,1 1,0 0,2 0,5 2011 1 042 1 348 0 300 $ internationaux courants Togo Pays à faible revenu 900 600 1 200 1 500 PIB par habitant ($ EU constants) Source : OMC, Profils commerciaux et tarifaires INDICATEURS DE FACILITATION DES ÉCHANGES Délai d'exportation Délai d'importation 34 2005 24 2011 46 38 2005 28 2011 0 JOURS Togo Changement de pourcentage 2005-2011 10 20 30 +7 % 2005 253 296 43 2011 55 269 367 43 40 50 60 Pays à faible revenu 0 50 100 $ EU constants Togo Pays à faible revenu 150 200 250 300 350 400 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. Coûts d'exportation 2005 Coûts d'importation 2005 463 2 169 841 2 266 1 109 2011 0 $ EU Togo 1 833 940 2011 500 1 000 1 500 2 000 2 500 2 717 3 000 Population vivant avec moins de 1,25 $/jour (PPA) (%) Population vivant avec moins de 2 $/jour (PPA) (%) 2006 2006 38,7 % 69,3 % Pays à faible revenu Indice de performance logistique Part des revenus détenue par les 2 déciles supérieurs de la population 2006 42,4 % 2010 2010 2010 Données non disponibles. Données non disponibles. Données non disponibles. 2007 2010 SCORE LE PLUS BAS 0 1 Togo Pays à faible revenu SCORE LE PLUS ÉLEVÉ 2 3 4 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 5 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 12http://dx.doi.org/10.1787/888932846006 PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 351 TRINITÉ-ET-TOBAGO AIDFORTRADE A GLANCE 2013 L’AIDE POUR LEAT COMMERCE – PANORAMA 2013 Indicateurs de l’aide, du commerce et du développement pour le Trinité-et-Tobago INVESTMENT ANDET INVESTISSEMENT FINANCING FINANCEMENT (INPUTS) (APPORTS) Indicateur (millions de $EU courants) TRADE PERFORMANCE PERFORMANCES COMMERCIALES (OUTPUTS)(PRODUITS) 2005 2008 2010 Δ:05-10 Indicateur 2005 2008 2011 Δ:05-11 Formation brute de capital fixe dont: secteur public n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. Ratio du commerce au PIB (%) 106 105 104 -2 Export. de services commerciaux en % des export. totales 8 5 n.d. n.d. dont: secteur privé n.d. n.d. n.d. n.d. Import. de services commerciaux en % des import. totales 8 3 n.d. n.d. Biens intermédiaires hors combustibles (% des exp. de marchandises) 25 26 n.d. n.d. Biens intermédiaires hors combustibles (% des imp. de marchandises) 36 36 n.d. n.d. Apports financiers extérieurs Entrées d’IED Dette extérieure à long terme et versements du FMI Versements d’aide non concessionnelle liée au commerce Versements au titre de l’Aide pour le commerce Envois de fonds et rémunération des salariés 939,7 2 800,8 549,4 -42 % n.d. n.d. n.d. n.d. 1,5 0,0 0,2 -90 % 2,4 0,5 1,3 -45 % 92,4 94,5 119,9 30 % Source : Secrétariat de l’OMC FLUX COMMERCIAUX (millions de $EU courants) Sources : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC) ; Banque mondiale, Statistiques de la dette internationale. VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE PAR SECTEUR (millions de $EU courants) 15 000 12 000 9 000 6 000 3 000 0 +40% +63% –2% –22% Biens Services Biens Services comm. comm. 2005 2010 2011 Source : Secrétariat de l’OMC 2 Aide pour le commerce totale 2005 2005 États-Unis Jamaïque UE-27 Barbade Guyana Ajustement lié au commerce Tourisme Ressources min. et ind. extractives 1 2 Agriculture, sylviculture, pêche Services bancaires et financiers Prod. et distribution d’énergie Communications Transports et stockage Politique et réglem. commerciales 0 0.5 1.0 1.5 2.0 $EU Les secteurs pour lesquels on ne dispose pas de données ne sont pas inclus. VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE: PRINCIPAUX DONATEURS (millions de $EU courants) 2005 Japon Institutions de l'UE PNUD Canada France 2010 États-Unis BIAD France Institutions de l'UE Australie valeur % Principaux donateurs 2005 1,7 0,7 0,0 0,0 0,0 69 27 2 1 1 100 % valeur % Principaux donateurs 2010 0,6 0,3 0,2 0,1 0,1 47 23 13 8 5 –9% +4% +76% –61% –36% Autres Services Services relatifs aux voyages services comm. de transports Services relatifs Autres Services aux voyages services comm. de transports % 59 7 7 4 3 2010 États-Unis UE-27 Jamaïque Barbade Suriname % 48 9 6 3 3 CINQ PRINCIPAUX PRODUITS D’EXPORTATION (% des exportations de marchandises) % 31 21 15 9 8 2010 Produits pétroliers Produits chimiques inorganiques Huiles brutes de pétrole Gaz naturel Alcools, phénols, etc., et leurs dérivés % 31 13 12 12 6 Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX MARCHÉS D’IMPORTATION (%) 2005 États-Unis Brésil UE-27 Venezuela, Rép. bolivarienne du Colombie % 29 14 12 6 6 2010 États-Unis Gabon Colombie UE-27 Brésil % 28 13 9 9 7 Source : Secrétariat de l’OMC 96 % Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). 352 Importations –1% Source : Secrétariat de l’OMC 2005 Produits pétroliers Gaz naturel Huiles brutes de pétrole Produits chimiques inorganiques Alcools, phénols, etc., et leurs dérivés Services aux entr. et autres services Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). 500 400 300 200 100 0 Exportations CINQ PRINCIPAUX MARCHÉS D’EXPORTATION (%) 1 2010 Industrie Services commerciaux Total Exportations Importations CINQ PRINCIPAUX PRODUITS D’IMPORTATION (% des importations de marchandises) 2005 Huiles brutes de pétrole Machines et appareils de chauffage et de réfrigération et leurs parties % 30 2010 Huiles brutes de pétrole % 31 5 Minerais de fer et leurs concentrés 4 Produits pétroliers 4 2 Minerais de fer et leurs concentrés Véhicules automobiles de transport de passagers (sauf bus) 3 Véhicules automobiles de transport de passagers (sauf bus) Navires, bateaux, engins flottants Autres machines spécialisées pour industries particulières et leurs parties 3 2 2 Source : Secrétariat de l’OMC PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 TRINITÉ-ET-TOBAGO AIDFORTRADE A GLANCE 2013 L’AIDE POUR LE COMMERCE –ATPANORAMA TRADE INDICATORS INDICATEURS COMMERCIAUX (OUTCOMES) (RÉSULTATS) Indicateur DEVELOPMENT INDICATEURS DE INDICATORS DÉVELOPPEMENT (IMPACTS) (IMPACTS) 2005 2011 Indicateur 2005 2010 5,8 -1,4 Chômage (% de la population active totale) 8,0 5,3 43,2 Croissance du PIB (%) Nombre d'exportateurs n.d. n.d. Pop. active féminine (% de la pop. active totale) 43,2 Concentration des exportations de produits (de 0 à 1) 0,14 0,12 APD nette reçue (% du RNB) 0,0 0,0 ACR sur les marchandises notifiés à l'OMC n.d. 3 Droits d'importation perçus (% des recettes fiscales) 5,5 n.d. AIE sur les services notifiés à l'OMC n.d. 2 Service total de la dette (% des exportations totales) n.d. n.d. Secteurs de services faisant l'objet d'engagements au titre de l'AGCS 32 32 Indice du développement humain (de 0 à 1) 0,73 0,76 Sources : PNUD, Indicateurs du développement humain ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. Droits de douane (%, 2006 et 2011) Importations: moyenne simple des droits NPF appliqués 7,8 7,5 Importations: moyenne pondéré des droits NPF appliqués n.d. 5,7 Exportations: moyenne pondérée appliquée 0,2 0,0 Exportations: franchise de droits (valeur en %) 97,9 99,7 PRODUIT INTÉRIEUR BRUT PIB par habitant (PPA, $ internationaux courants) Sources : Base de données Comtrade de l’ONU ; Banque mondiale, Exporters Dynamics Database ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde ; OMC, Profils commerciaux et tarifaires. EXPORTATIONS DE MARCHANDISES PAR RÉGION (%) 2005 0,1 0,1 0,0 6,9 0,0 61,7 30,0 Afrique Asie Communauté d'États indépendants Europe Moyen-Orient Amérique du Nord Amérique du Sud et centrale Changement de pourcentage 2005-2011 +29 % 2005 20 058 28 771 2010 4,6 1,5 0,1 9,9 0,1 50,4 32,2 2011 25 951 37 236 0 5 000 10 000 15 000 20 000 25 000 $ internationaux courants Trinité-et-Tobago Pays à revenu élevé, hors OCDE 30 000 35 000 40 000 45 000 PIB par habitant ($ EU constants) Source : OMC, Profils commerciaux et tarifaires INDICATEURS DE FACILITATION DES ÉCHANGES Délai d'exportation 2005 14 2011 14 14 Délai d'importation 2005 2011 Trinité-et-Tobago 16 2005 Changement de pourcentage 2005-2011 9 102 16 758 19 15 10 0 JOURS +13 % 26 20 2011 10 329 18 707 20 30 Pays à revenu élevé, hors OCDE 0 5 000 10 000 $ EU constants Trinité-et-Tobago Pays à revenu élevé, hors OCDE 15 000 20 000 25 000 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 693 Coûts d'exportation 2005 2011 802 843 864 Coûts d'importation 2005 908 2011 Trinité-et-Tobago 1 002 1 000 500 0 $ EU 1 100 1 260 1 500 2007 Donneés non disponibles. 2010 Donneés non disponibles. SCORE LE PLUS BAS 0 Population vivant avec moins de 2 $/jour (PPA) (%) 2005 2005 Part des revenus détenue par les 2 déciles supérieurs de la population 2005 Données non disponibles. Données non disponibles. Données non disponibles. 2010 2010 2010 Données non disponibles. Données non disponibles. Données non disponibles. Pays à revenu élevé, hors OCDE Indice de performance logistique Trinité-et-Tobago Population vivant avec moins de 1,25 $/jour (PPA) (%) 1 SCORE LE PLUS ÉLEVÉ 2 3 4 Pays à revenu élevé, hors OCDE Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 5 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 12http://dx.doi.org/10.1787/888932846025 PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 353 TUNISIE AIDFORTRADE A GLANCE 2013 L’AIDE POUR LEAT COMMERCE – PANORAMA 2013 Indicateurs de l’aide, du commerce et du développement pour la Tunisie INVESTMENT ANDET INVESTISSEMENT FINANCING FINANCEMENT (INPUTS) (APPORTS) TRADE PERFORMANCE PERFORMANCES COMMERCIALES (OUTPUTS)(PRODUITS) Indicateur (millions de $EU courants) 2005 2008 2010 Δ:05-10 Indicateur 2005 2008 2011 Δ:05-11 Formation brute de capital fixe dont: secteur public 6 886,1 973,8 10 551,6 1 263,9 10 749,7 n.d. 56 % n.d. dont: secteur privé 5 912,3 9 287,7 n.d. n.d. 723,0 2 638,5 1 400,9 94 % Ratio du commerce au PIB (%) Export. de services commerciaux en % des export. totales Import. de services commerciaux en % des import. totales Biens intermédiaires hors combustibles (% des exp. de marchandises) Biens intermédiaires hors combustibles (% des imp. de marchandises) 90 27 14 34 58 1 255,6 1 078,6 1 714,2 37 % 145,7 78,8 443,1 204 % Apports financiers extérieurs Entrées d’IED Dette extérieure à long terme et versements du FMI Versements d’aide non concessionnelle liée au commerce Versements au titre de l’Aide pour le commerce Envois de fonds et rémunération des salariés 114,5 304,2 493,0 331 % 1 392,7 1 977,0 1 970,2 41 % Sources : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC) ; Banque mondiale, Statistiques de la dette internationale. VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE PAR SECTEUR (millions de $EU courants) 115 23 12 40 60 105 20 12 n.d. n.d. 15 -7 -2 n.d. n.d. Source : Secrétariat de l’OMC FLUX COMMERCIAUX (millions de $EU courants) Services commerciaux Total 25 000 20 000 15 000 10 000 5 000 0 Exportations Importations Exportations Importations 2 500 –15% +68% 2 000 +55% 1 500 +130% +11% +44% 1 000 +56% +15% +52% 500 0 Biens Services Biens Services Autres Services Services relatifs aux voyages comm. comm. services comm. de transports Services relatifs Autres Services 2005 2011 aux voyages services comm. de transports Source : Secrétariat de l’OMC +80% CINQ PRINCIPAUX MARCHÉS D’EXPORTATION (%) Aide pour le commerce totale 2005 114 2005 UE-27 Libye Algérie Maric Turquie 493 2010 Ajustement lié au commerce Tourisme Ressources min. et ind. extractives Industrie 1 Services aux entr. et autres services 21 Transports et stockage 20 29 4 4 13 11 7 6 261 40 131 Politique et réglem. commerciales 1 2 0 50 100 150 200 250 300 $EU Les secteurs pour lesquels on ne dispose pas de données ne sont pas inclus. Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE: PRINCIPAUX DONATEURS (millions de $EU courants) 2005 valeur % Japon France Institutions de l'UE Allemagne Italie 41,0 29,1 18,1 16,9 5,4 36 25 16 15 5 2010 valeur % Espagne Fonds arabe Japon Institutions de l'UE France 153,0 139,2 78,2 48,4 29,9 31 28 16 10 6 Principaux donateurs 2005 2005 Autres vêtements en matières textiles, n.d.a. % 2010 % 13 Huiles brutes de pétrole 13 Huiles brutes de pétrole 10 10 Vêtements pour hommes ou garçonnets, autres qu'en bonneterie Équipement pour la distribution d'électricité, n.d.a. Vêtements pour femmes ou fillettes, autres qu'en bonneterie 9 Autres vêtements en matières textiles, n.d.a. Équipement pour la distribution d'électricité, n.d.a. 6 Engrais (autres que ceux du groupe 272) 5 5 Interrupteurs, commutateurs, etc. pour circuits électriques 5 8 Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX MARCHÉS D’IMPORTATION (%) 2005 UE-27 Libye Chine Fédération de Russie États-Unis % 70 4 3 3 3 2010 UE-27 Chine Fédération de Russie États-Unis Turquie % 61 6 5 4 3 Source : Secrétariat de l’OMC 97 % Principaux donateurs 2010 91 % Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). 354 % 73 4 3 2 2 CINQ PRINCIPAUX PRODUITS D’EXPORTATION (% des exportations de marchandises) 55 Prod. et distribution d’énergie 2 Communications 2010 UE-27 Libye Algérie États-Unis Inde Source : Secrétariat de l’OMC 1 Agriculture, sylviculture, pêche Services bancaires et financiers % 80 5 2 1 1 CINQ PRINCIPAUX PRODUITS D’IMPORTATION (% des importations de marchandises) 2005 Produits pétroliers % 8 Tissus de coton 6 2010 Produits pétroliers Interrupteurs, commutateurs, etc. pour circuits électriques % 8 Interrupteurs, commutateurs, etc. pour circuits électriques 4 Tissus de coton 4 Huiles brutes de pétrole 3 4 Véhicules automobiles de transport de passagers (sauf bus) 3 Véhicules automobiles de transport de passagers (sauf bus) Équipement pour la distribution d'électricité, n.d.a. 4 2 Source : Secrétariat de l’OMC PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 TUNISIE AIDFORTRADE A GLANCE 2013 L’AIDE POUR LE COMMERCE –ATPANORAMA TRADE INDICATORS INDICATEURS COMMERCIAUX (OUTCOMES) (RÉSULTATS) Indicateur DEVELOPMENT INDICATEURS DE INDICATORS DÉVELOPPEMENT (IMPACTS) (IMPACTS) 2005 2011 Indicateur 2005 2010 4,0 -1,8 Chômage (% de la population active totale) 14,2 14,2 26,9 Croissance du PIB (%) Nombre d'exportateurs n.d. n.d. Pop. active féminine (% de la pop. active totale) 26,4 Concentration des exportations de produits (de 0 à 1) 0,02 0,03 APD nette reçue (% du RNB) 1,2 1,3 ACR sur les marchandises notifiés à l'OMC n.d. 6 Droits d'importation perçus (% des recettes fiscales) n.d. 8,6 AIE sur les services notifiés à l'OMC n.d. 0 Service total de la dette (% des exportations totales) 13,6 10,4 Secteurs de services faisant l'objet d'engagements au titre de l'AGCS 20 20 Indice du développement humain (de 0 à 1) 0,67 0,70 Sources : PNUD, Indicateurs du développement humain ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. Droits de douane (%, 2006 et 2011) Importations: moyenne simple des droits NPF appliqués 26,8 16,0 Importations: moyenne pondéré des droits NPF appliqués 20,2 14,4 Exportations: moyenne pondérée appliquée 1,7 0,5 Exportations: franchise de droits (valeur en %) 92,5 95,2 PRODUIT INTÉRIEUR BRUT PIB par habitant (PPA, $ internationaux courants) Sources : Base de données Comtrade de l’ONU ; Banque mondiale, Exporters Dynamics Database ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde ; OMC, Profils commerciaux et tarifaires. EXPORTATIONS DE MARCHANDISES PAR RÉGION (%) 2005 9,0 2,4 0,1 81,7 1,4 1,0 0,7 Afrique Asie Communauté d'États indépendants Europe Moyen-Orient Amérique du Nord Amérique du Sud et centrale Changement de pourcentage 2005-2011 2005 2011 11,3 2,6 0,1 78,6 1,2 1,7 0,7 +31 % 7 182 6 518 2011 9 415 10 867 0 6 000 8 000 2 000 4 000 $ internationaux courants Tunisie Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure 10 000 12 000 PIB par habitant ($ EU constants) Source : OMC, Profils commerciaux et tarifaires INDICATEURS DE FACILITATION DES ÉCHANGES Délai d'exportation Délai d'importation 16 2005 24 13 2011 2005 20 2005 28 17 2011 10 0 JOURS Tunisie Changement de pourcentage 2005-2011 +15 % 29 2 654 2 434 2011 3 051 3 422 22 20 30 Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure 0 1 500 2 000 2 500 500 1 000 $ EU constants Tunisie Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure 3 000 3 500 4 000 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. Coûts d'exportation 2005 760 2011 773 Coûts d'importation 2005 1 375 600 858 2011 0 $ EU Tunisie 1 148 500 1 000 1 340 Population vivant avec moins de 1,25 $/jour (PPA) (%) Population vivant avec moins de 2 $/jour (PPA) (%) 2005 2005 1,4 % 1 584 1 500 Part des revenus détenue par les 2 déciles supérieurs de la population 2005 8,1 % 2 000 47,9 % Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure Indice de performance logistique 2010 2010 2010 Données non disponibles. Données non disponibles. Données non disponibles. 2007 2010 SCORE LE PLUS BAS 0 Tunisie 1 SCORE LE PLUS ÉLEVÉ 2 3 4 Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 5 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 12http://dx.doi.org/10.1787/888932846044 PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 355 TURQUIE AIDFORTRADE A GLANCE 2013 L’AIDE POUR LEAT COMMERCE – PANORAMA 2013 Indicateurs de l’aide, du commerce et du développement pour la Turquie INVESTMENT ANDET INVESTISSEMENT FINANCING FINANCEMENT (INPUTS) (APPORTS) 2008 TRADE PERFORMANCE PERFORMANCES COMMERCIALES (OUTPUTS)(PRODUITS) Indicateur (millions de $EU courants) 2005 2010 Δ:05-10 Indicateur 2005 2008 2011 Δ:05-11 Formation brute de capital fixe dont: secteur public 101 574,2 145 289,5 137 658,3 15 935,1 28 217,5 28 318,3 36 % 78 % Ratio du commerce au PIB (%) Export. de services commerciaux en % des export. totales 47 25 dont: secteur privé 85 639,2 117 072,0 109 340,0 28 % Import. de services commerciaux en % des import. totales Apports financiers extérieurs Entrées d’IED Dette extérieure à long terme et versements du FMI Versements d’aide non concessionnelle liée au commerce Versements au titre de l’Aide pour le commerce Envois de fonds et rémunération des salariés 10 031,0 19 504,0 9 038,0 -10 % 40 595,2 68 553,0 46 498,6 15 % 314,6 782,1 1 983,7 531 % 132,4 611,0 720,6 444 % 887,0 1 476,0 874,0 -1 % Sources : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC) ; Banque mondiale, Statistiques de la dette internationale. VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE PAR SECTEUR (millions de $EU courants) Aide pour le commerce totale 2005 132 Tourisme Ressources min. et ind. extractives 1 1 Agriculture, sylviculture, pêche 3 3 Transports et stockage 2 20 52 662 Politique et réglem. commerciales 0 100 200 300 400 500 600 700 800 $EU Les secteurs pour lesquels on ne dispose pas de données ne sont pas inclus. Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE: PRINCIPAUX DONATEURS (millions de $EU courants) 2005 valeur % France Japon Allemagne Institutions de l'UE Espagne 44,2 37,8 20,2 12,6 11,8 33 29 15 10 9 2010 valeur % Japon Espagne France Allemagne Institutions de l'UE 588,7 51,5 26,5 23,5 16,0 82 7 4 3 2 Principaux donateurs 2005 96 % Principaux donateurs 2010 98 % Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). 356 8 8 -1 47 46 8 Biens intermédiaires hors combustibles (% des imp. de marchandises) 52 52 50 -2 Source : Secrétariat de l’OMC FLUX COMMERCIAUX (millions de $EU courants) Services commerciaux Total 250 000 200 000 150 000 100 000 50 000 0 Exportations Importations Exportations +109% Importations 25 000 +25% 20 000 +83% 15 000 +111% +80% 10 000 +133% +73% +40% +43% +91% 5 000 0 Biens Services Biens Services Autres Services Services relatifs aux voyages comm. comm. services comm. de transports Services relatifs Autres Services 2005 2011 aux voyages services comm. de transports Source : Secrétariat de l’OMC % 57 7 4 3 2 2010 UE-27 Iraq Fédération de Russie États-Unis Émirats arabes unis % 47 5 4 3 3 CINQ PRINCIPAUX PRODUITS D’EXPORTATION (% des exportations de marchandises) 60 31 12 Communications 1 8 Source : Secrétariat de l’OMC Industrie 1 Prod. et distribution d’énergie 2 9 -4 Biens intermédiaires hors combustibles (% des exp. de marchandises) 38 2005 UE-27 États-Unis Iraq Fédération de Russie Émirats arabes unis Ajustement lié au commerce Services aux entr. et autres services 56 21 CINQ PRINCIPAUX MARCHÉS D’EXPORTATION (%) 721 2010 Services bancaires et financiers 53 20 2005 Autres vêtements en matières textiles, n.d.a. Véhicules automobiles de transport de passagers (sauf bus) Barres, profilés, etc., en fer ou acier % 2011 % 6 Barres, profilés, etc., en fer ou acier 5 6 Appareils récepteurs de télévision, etc. 4 Vêtements pour femmes ou fillettes, autres qu'en bonneterie 4 Véhicules automobiles de transport de passagers (sauf bus) Produits pétroliers Autres vêtements en matières textiles, n.d.a. Véhicules spéciaux de transport de marchandises 4 5 4 4 3 Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX MARCHÉS D’IMPORTATION (%) 2005 UE-27 Fédération de Russie Chine États-Unis Suisse % 45 11 6 5 3 2010 UE-27 Fédération de Russie Chine États-Unis Iran % 39 12 9 7 4 Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX PRODUITS D’IMPORTATION (% des importations de marchandises) 2005 Huiles brutes de pétrole Transactions spéciales non classées Véhicules automobiles de transport de passagers (sauf bus) % 7 5 4 Or à usage non monétaire (sauf minerais) 3 Produits pétroliers 3 2011 % Transactions spéciales non classées 15 Produits pétroliers 6 Déchets et débris de fonte, de fer 4 ou d'acier Véhicules automobiles de transport 4 de passagers (sauf bus) Or à usage non monétaire (sauf minerais) 3 Source : Secrétariat de l’OMC PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 TURQUIE AIDFORTRADE A GLANCE 2013 L’AIDE POUR LE COMMERCE –ATPANORAMA TRADE INDICATORS INDICATEURS COMMERCIAUX (OUTCOMES) (RÉSULTATS) Indicateur DEVELOPMENT INDICATEURS DE INDICATORS DÉVELOPPEMENT (IMPACTS) (IMPACTS) 2005 2011 Indicateur 2005 2010 Croissance du PIB (%) 8,4 8,5 Chômage (% de la population active totale) 10,6 11,9 Nombre d'exportateurs 28,7 40 089 48 010 Pop. active féminine (% de la pop. active totale) 25,4 Concentration des exportations de produits (de 0 à 1) 0,01 0,01 APD nette reçue (% du RNB) 0,1 0,1 ACR sur les marchandises notifiés à l'OMC n.d. 19 Droits d'importation perçus (% des recettes fiscales) n.d. 1,4 AIE sur les services notifiés à l'OMC n.d. 0 Service total de la dette (% des exportations totales) 36,6 36,7 Secteurs de services faisant l'objet d'engagements au titre de l'AGCS 77 77 Indice du développement humain (de 0 à 1) 0,67 0,70 Sources : PNUD, Indicateurs du développement humain ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. Droits de douane (%, 2006 et 2011) Importations: moyenne simple des droits NPF appliqués 9,6 9,6 Importations: moyenne pondéré des droits NPF appliqués 3,8 4,9 Exportations: moyenne pondérée appliquée 1,3 1,5 Exportations: franchise de droits (valeur en %) 87,6 85,9 PRODUIT INTÉRIEUR BRUT PIB par habitant (PPA, $ internationaux courants) Sources : Base de données Comtrade de l’ONU ; Banque mondiale, Exporters Dynamics Database ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde ; OMC, Profils commerciaux et tarifaires. EXPORTATIONS DE MARCHANDISES PAR RÉGION (%) 2005 4,9 3,4 6,9 59,7 12,8 7,4 0,7 Afrique Asie Communauté d'États indépendants Europe Moyen-Orient Amérique du Nord Amérique du Sud et centrale Changement de pourcentage 2005-2011 +47 % 2005 11 465 6 518 2011 7,7 5,7 10,7 49,8 18,3 4,2 1,7 2011 16 885 10 867 0 5 000 10 000 $ internationaux courants Turquie Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure 15 000 20 000 PIB par habitant ($ EU constants) Source : OMC, Profils commerciaux et tarifaires INDICATEURS DE FACILITATION DES ÉCHANGES Délai d'exportation Délai d'importation 20 2005 14 2011 24 15 2011 2005 4 887 25 2011 28 5 741 3 422 22 10 +17 % 2 434 20 2005 0 JOURS Turquie Changement de pourcentage 2005-2011 20 30 Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure 0 3 000 4 000 1 000 2 000 $ EU constants Turquie Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure 5 000 6 000 7 000 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 713 Coûts d'exportation 2005 2011 990 Coûts d'importation 2005 935 1 063 2011 0 $ EU Turquie 1 148 500 1 000 1 375 1 340 Population vivant avec moins de 1,25 $/jour (PPA) (%) Population vivant avec moins de 2 $/jour (PPA) (%) 2005 2005 2,0 % 1 584 1 500 Part des revenus détenue par les 2 déciles supérieurs de la population 2005 6,9 % 2 000 48,3 % Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure Indice de performance logistique 2010 2008 2007 2008 4,2 % 2010 Données non disponibles. SCORE LE PLUS BAS 0 Turquie 1 SCORE LE PLUS ÉLEVÉ 2 3 4 Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 45,1 % 5 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 12http://dx.doi.org/10.1787/888932846063 PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 357 TUVALU AIDFORTRADE A GLANCE 2013 L’AIDE POUR LEAT COMMERCE – PANORAMA 2013 Indicateurs de l’aide, du commerce et du développement pour le Tuvalu INVESTMENT ANDET INVESTISSEMENT FINANCING FINANCEMENT (INPUTS) (APPORTS) 2005 2008 2010 Δ:05-10 Formation brute de capital fixe dont: secteur public n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. Ratio du commerce au PIB (%) 61 71 n.d. n.d. Export. de services commerciaux en % des export. totales n.d. n.d. n.d. n.d. dont: secteur privé n.d. n.d. n.d. n.d. Import. de services commerciaux en % des import. totales Apports financiers extérieurs Entrées d’IED Dette extérieure à long terme et versements du FMI Versements d’aide non concessionnelle liée au commerce Versements au titre de l’Aide pour le commerce Envois de fonds et rémunération des salariés 0,0 1,7 1,5 7600 % n.d. n.d. n.d. n.d. 0,0 0,0 0,0 0% 0,9 4,4 1,6 73 % Indicateur n.d. n.d. n.d. n.d. Biens intermédiaires hors combustibles (% des exp. de marchandises) n.d. n.d. n.d. n.d. Biens intermédiaires hors combustibles (% des imp. de marchandises) n.d. n.d. n.d. n.d. Source : Secrétariat de l’OMC FLUX COMMERCIAUX (millions de $EU courants) Services commerciaux Total n.d. n.d. 15 Sources : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC) ; Banque mondiale, Statistiques de la dette internationale. 10 Exportations Importations 5 VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE PAR SECTEUR (millions de $EU courants) 0 1 +56% 8 Exportations Importations +115% +31% 6 +36% 4 2 0 Biens Services Biens Services comm. comm. 2005 Aide pour le commerce totale +33% Données non disponibles. n.d. 20 n.d. 2005 2005 2008 2011 Δ:05-11 Données non disponibles. Indicateur (millions de $EU courants) TRADE PERFORMANCE PERFORMANCES COMMERCIALES (OUTPUTS)(PRODUITS) +55% –9% +37% Autres Services Services relatifs aux voyages services comm. de transports Services relatifs Autres Services aux voyages services comm. de transports 2008 Source : Secrétariat de l’OMC 2 CINQ PRINCIPAUX MARCHÉS D’EXPORTATION (%) 2010 Ajustement lié au commerce Tourisme Ressources min. et ind. extractives Industrie Agriculture, sylviculture, pêche 1 Services bancaires et financiers Services aux entr. et autres services 2005 % Fidji 78 Nouvelle-Zélande 18 Indonésie 2 Australie 2 Données non disponibles. Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX PRODUITS D’EXPORTATION (% des exportations de marchandises) % 1 Prod. et distribution d’énergie % % Communications Transports et stockage Données non disponibles. 1 Données non disponibles. Politique et réglem. commerciales 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 $EU Les secteurs pour lesquels on ne dispose pas de données ne sont pas inclus. Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE: PRINCIPAUX DONATEURS (millions de $EU courants) 2005 valeur % Japon Australie 0,9 0,1 93 7 Principaux donateurs 2005 100 % Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX MARCHÉS D’IMPORTATION (%) 2005 % 2008 % Australie 34 Fidji 24 Fidji 20 Australie 18 Sigapour 18 Nouvelle-Zélande 17 Nouvelle-Zélande 10 Japon 16 Chine 5 Taipei, Chinese 11 Source : Secrétariat de l’OMC CINQ PRINCIPAUX PRODUITS D’IMPORTATION (% des importations de marchandises) 2010 Japon Nouvelle-Zélande Australie Corée valeur % Principaux donateurs 2010 0,7 0,5 0,3 0,1 45 29 20 6 100 % Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). 358 % Données non disponibles. % Données non disponibles. Source : Secrétariat de l’OMC PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 TUVALU AIDFORTRADE A GLANCE 2013 L’AIDE POUR LE COMMERCE –ATPANORAMA TRADE INDICATORS INDICATEURS COMMERCIAUX (OUTCOMES) (RÉSULTATS) DEVELOPMENT INDICATEURS DE INDICATORS DÉVELOPPEMENT (IMPACTS) (IMPACTS) Indicateur 2005 2011 Croissance du PIB (%) -4,1 1,0 Chômage (% de la population active totale) Indicateur 2005 2010 6,5 n.d. Nombre d'exportateurs n.d. n.d. Pop. active féminine (% de la pop. active totale) n.d. n.d. Concentration des exportations de produits (de 0 à 1) n.d. n.d. APD nette reçue (% du RNB) 24,4 26,2 ACR sur les marchandises notifiés à l'OMC n.d. 2 Droits d'importation perçus (% des recettes fiscales) n.d. n.d. AIE sur les services notifiés à l'OMC n.d. 0 Service total de la dette (% des exportations totales) n.d. n.d. 0 0 Indice du développement humain (de 0 à 1) n.d. n.d. Secteurs de services faisant l'objet d'engagements au titre de l'AGCS Sources : PNUD, Indicateurs du développement humain ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. Droits de douane (%) Importations: moyenne simple des droits NPF appliqués n.d. 7,7 Importations: moyenne pondéré des droits NPF appliqués n.d. n.d. Exportations: moyenne pondérée appliquée n.d. 4,8 Exportations: franchise de droits (valeur en %) n.d. 12,8 PRODUIT INTÉRIEUR BRUT PIB par habitant (PPA, $ internationaux courants) Sources : Base de données Comtrade de l’ONU ; Banque mondiale, Exporters Dynamics Database ; Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde ; OMC, Profils commerciaux et tarifaires. EXPORTATIONS DE MARCHANDISES PAR RÉGION (%) 2005 2005 0,0 100,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 Afrique Asie Communauté d'États indépendants Europe Moyen-Orient Amérique du Nord Amérique du Sud et centrale Changement de pourcentage 2005-2011 Donneés non disponibles. Donneés non disponibles. Donneés non disponibles. 2011 n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. n.d. 2011 Donneés non disponibles. Donneés non disponibles. $ internationaux courants Tuvalu Upper middle income countries PIB par habitant ($ EU constants) Source : OMC, Profils commerciaux et tarifaires INDICATEURS DE FACILITATION DES ÉCHANGES Délai d'exportation 2005 Donneés non disponibles. 2011 Donneés non disponibles. Délai d'importation 2005 Donneés non disponibles. 2011 Donneés non disponibles. 10 0 JOURS Tuvalu 20 30 Changement de pourcentage 2005-2011 2005 +8 % 1 574 2 434 2011 1 700 3 422 40 50 60 70 80 90 Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure 0 1 500 2 000 2 500 500 1 000 $ EU constants Tuvalu Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure 3 000 3 500 4 000 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. Coûts d'exportation 2005 Donneés non disponibles. 2011 Donneés non disponibles. Coûts d'importation 2005 Donneés non disponibles. 2011 Donneés non disponibles. $ EU Tuvalu 2007 Donneés non disponibles. 2010 Donneés non disponibles. SCORE LE PLUS BAS 0 Population vivant avec moins de 2 $/jour (PPA) (%) 2005 2005 Part des revenus détenue par les 2 déciles supérieurs de la population 2005 Données non disponibles. Données non disponibles. Données non disponibles. 2010 2010 2010 Données non disponibles. Données non disponibles. Données non disponibles. Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure Indice de performance logistique Tuvalu Population vivant avec moins de 1,25 $/jour (PPA) (%) 1 SCORE LE PLUS ÉLEVÉ 2 3 4 Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 5 Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde. 12http://dx.doi.org/10.1787/888932846082 PANORAMA DE L’AIDE POUR LE COMMERCE 2013 : SE CONNECTER AUX CHAÎNES DE VALEUR - © OCDE, OMC 2013 359 URUGUAY AIDFORTRADE A GLANCE 2013 L’AIDE POUR LEAT COMMERCE – PANORAMA 2013 Indicateurs de l’aide, du commerce et du développement pour le Uruguay INVESTMENT ANDET INVESTISSEMENT FINANCING FINANCEMENT (INPUTS) (APPORTS) TRADE PERFORMANCE PERFORMANCES COMMERCIALES (OUTPUTS)(PRODUITS) Indicateur (millions de $EU courants) 2005 2008 2010 Δ:05-10 Indicateur Formation brute de capital fixe dont: secteur public 2 873,1 586,4 6 241,3 1 471,0 7 415,5 2 039,9 158 % 248 % Ratio du commerce au PIB (%) 56 65 54 Export. de services commerciaux en % des export. totales 25 24 27 1 dont: secteur privé 2 286,7 4 770,3 5 375,6 135 % Import. de services commerciaux en % des import. totales 19 14 15 -4 Biens intermédiaires hors combustibles (% des exp. de marchandises) 46 49 n.d. n.d. 847,4 1 809,4 1 626,9 92 % Biens intermédiaires hors combustibles (% des imp. de marchandises) 42 34 n.d. n.d. Apports financiers extérieurs Entrées d’IED Dette extérieure à long terme et versements du FMI Versements d’aide non concessionnelle liée au commerce Versements au titre de l’Aide pour le commerce Envois de fonds et rémunération des salariés 1 626,0 682,4 417,2 -74 % 44,2 54,4 13,1 -70 % 3,8 4,3 24,0 533 % 76,7 107,9 102,9 34 % Sources : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC) ; Banque mondiale, Statistiques de la dette internationale. VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE PAR SECTEUR (millions de $EU courants) Aide pour le commerce totale 2005 4 Tourisme Ressources min. et ind. extractives Agriculture, sylviculture, pêche 1 Services bancaires et financiers 10 2 1 Services aux entr. et autres services 1 Prod. et distribution d’énergie 9 Communications 1 Transports et stockage Politique et réglem. commerciales 8 0 2 4 6 10 $EU Les secteurs pour lesquels on ne dispose pas de données ne sont pas inclus. Source : OCDE, Base de données sur les activités d’aide du CAD (SNPC). VERSEMENTS AU TITRE DE L’AIDE POUR LE COMMERCE: PRINCIPAUX DONATEURS (millions de $EU courants) 2005 Institutions de l'UE Japon Espagne États-Unis Canada 2010 Japon Italie BIAD Espagne Institutions de l'UE valeur % 1,4 1,2 0,5 0,4 0,1 37 33 12 12 3 valeur % 10,2 7,2 2,3 2,3 1,0 42 30 9 9 4 Principaux donateurs 2005 FLUX COMMERCIAUX (millions de $EU courants) Services commerciaux Total Exportations Importations Exportations Importations 12 000 2 500 +268% +177% 10 000 +148% 2 000 8 000 1 500 6 000 1 000 +162% +37% +99% +156% +92% 4 000 +112% 500 +142% 2 000 0 0 Biens Services Biens Services Autres Services Services relatifs aux voyages comm. comm.
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2020EHES0024_12
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Conférer le titre, enseigner la profession, transmettre l’identité. Les formations d’ingénieurs au prisme de leurs enseignements socio-économiques : perspectives croisées Belgique-France
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97 CHENNE CARRERE, « L’ingénieur est-il responsable de la crise », L’ingénieur est-il responsable de la crise, 1933. 98 Sa formule rhétorique, qui ne sous-entend pas une discussion réelle de la responsabilité des ingénieurs dans la crise économique de 1929, introduit un propos qui s'inscrit pleinement dans les positions de l'USIC sur le développement de l'industrie. Dans la filiation de Frédéric Le Play, l'auteur considère l'industrie comme le ferment des conflits sociaux et de la misère, la mission sociale de l'ingénieur étant alors d'agir, tant sur le plan des conditions de travail qu'au plan social, pour favoriser la « paix sociale ». S'appuyant sur ce constat, il critique alors l'orientation trop « matérialiste » et rationnelle de la formation de l'ingénieur, cherchant à concilier la science avec « l'irrationalité » voire le spiritualisme, tel que le faisaient avant lui des personnages tels qu'Henry Le Chatelier et que fera durant cette même période Jean Coutrot. Voir notamment Olivier D ARD, Jean Coutrot: de l ’ ingéni eur au prop hète , Presses Universitaires Franc-comtoise , 1999 ; Odile HENRY, « De la sociologie comme technologie sociale. La contribution de Jean Coutrot, 1895-1941 », Actes de la recherche en sciences sociales, 153, p. 48-64 ; Michel MARGAIRAZ, « Jean Coutrot 1936-1937: l’Etat et l’Organisation Scientifique du Travail », Genèses, 4, 1991, p. 95-114. 99 Il tire de sa critique du matérialisme une remise en cause des modes d'enseignement qu'il voit comme l'une des raisons du « matérialisme » ambiant : « A combien de nous ici, quelles que soient les écoles où nous sommes passées et les maîtres qui nous ont enseigné, à combien de nous a-t-on parlé d'autres lois que mécaniques ou physiques? Même l'économie politique nous a été enseignée à coup de graphiques et de formules (je dirais même en sortant du sujet: même une partie de la psychologie...) » ; Chenne Carrere, « L’ingénieur est-il responsable de la crise », loc. Cit. 100 Qui devient ainsi, on le verra, un spécialiste des questions d'enseignement au sein du mouvement. — 138 — Chapitre II. Les prémices d'une reformulation de l'ingénieur et de son enseignement : 1930-1943 SECTION 2. L'USIC AU CROISEMENT DES MOUVEMENTS « MODERNISATEURS » ET DES QUESTIONS D'ENSEIGNEMENT La crise de 1929 et ses effets différés sur les économies occidentales constituent, on l'a dit, autant de vecteurs d'accélération de la production et de la diffusion de nouveaux savoirs ayant trait à l'administration des affaires et de l'économie. Va éclore un mouvement de « modernisation »101 de l'économie visant notamment à en « rationaliser » la gestion à différents niveaux, dynamique qui va de pair avec un renouvellement des élites industrielles, incarné notamment par la littérature consacrée à la « figure du chef » et au commandement102, dans lequel les ingénieurs sont appelés à prendre une place considérable. Paradoxalement, les différents mouvements qui composent cette « avant-garde modernisatrice » vont néanmoins peu s'intéresser à la question de leur formation aux nouveaux savoirs promus, ceci d'autant plus qu'ils sont souvent assimilés à des savoirs techniques relevant de formations de moindre niveau. Ces discussions vont être restreintes à des dynamiques interindividuelles entraînant, comme on pouvait le voir dès les années 1920 pour l'Organisation Scientifique du Travail, un morcellement des enseignements qui concorde avec les conceptions dominantes dans les deux pays, se traduisant par une inscription – unilatérale – de ces savoirs dans certains programmes de formation103, comme on le verra dans la seconde partie. En Belgique, le développement de tels cours est moindre – les conceptions des enseignements socio-économiques les associant aux disciplines académiques – et s'opère essentiellement à travers quelques « pionniers » et leur recherche, tel Oscar Peters. En France, on constate au contraire un engouement plus prononcé pour de tels enseignements, engouement qui s’accroît à partir des années 1930 et s'insère parfaitement dans la conception « fonctionnelle » du système éducatif théorisée par Guillet, justifiant que l'on s'intéresse particulièrement à ce cas. De fait, comme on pouvait le voir dans les positions exprimées lors des congrès de l'enseignement technique, ce n'est pas tant un nouvel ingénieur qu'il s'agit de former que de nouvelles « fonctions » de l'ingénieur qu'il s'agit de constituer, quand bien même le terme n'est pas toujours utilisé. En l’occurrence, ces connaissances sont directement associées à la formation des « chefs » auxquels il s'agit de transmettre des compétences spécifiques, et différenciées. Adossés à la formation d'ingénieur d'un « profil » particulier et, finalement, relativement spécialisé – tel l'ingénieur-économiste ou l'ingénieurorganisateur – ces savoirs sont principalement considérés comme relevant de formations complémentaires. Dans ce cadre n'émerge aucun « projet » d'enseignement commun à la modernisation et se distinguent tout au plus des tentatives disparates d'intégrer des savoirs en 101 F. DENORD et O. HENRY, « La “modernisation” avant la lettre », art. cit. 102 Y. COHEN, Le siècle des chefs, op. cit. 103 A. MOUTET, « Ingénieurs et rationalisation. De l’industrie de la Grande Guerre au Front Populaire », art. cit. — 139 — Chapitre II. Les prémices d'une reformulation de l'ingénieur et de son enseignement : 1930-1943 fonction des « spécialisations » considérées, les prises de position en faveur d'une systématisation de ces enseignements étant en réalité relativement rares, et ce au sein même de ces mouvements. Incarnée par des organisations dédiées , ce mouvement de transformation « cognitive » de la division sociale du travail va particulière ment se manifest er autour des mouvements dits de « modernisation » de l'économie, s'appuyant largement sur la formalisation mathématique et semblant rétrospectivement avoir eu un rôle majeur tant dans la transformation des conceptions de l'ingénieur que dans celle de son enseignement. Parmi ces mouvements, ceux réunis autour des « sciences du travail » se singularisent en apparaissant comme une avant-garde, aussi bien du point de vue de leur organisation 104 et de leur institutionnalisation plus précoce105 que de leurs interactions avec le monde de l'enseignement106. Il faut toutefois tempérer le rôle que ces mouvements ont pu avoir dans la réflexion sur les formations d'ingénieurs en prenant la juste mesure de leur implication dans les débats qui y furent consacrés. En effet, la situation témoigne plus d'une distance entre ces mouvements de « rationalisation » et les questions de formation des ingénieurs, distance où convergent à la fois les fayoliens et les tayloriens, comme on a pu le voir dans le cas français. En l'occurrence, le « projet éducatif »107 que constitue l'OST est avant tout conçu à destination des ouvriers et contremaitres108. Il s'agit autant d'inculquer à ces catégories 104 Les mouvements d'Organisation Scientifique du Travail s'appuient depuis le Congrès International réuni à Bruxelles en octobre 1925 sur le Comité International de l'Organisation Scientifique (CIOS), qui va impulser la création l'année suivante de regroupements nationaux, dont le Comité National Belge pour l'Organisation Scientifique (CNBOS) et le Comité National de l'Organisation Française (CNOF): É. GEERKENS et A. MOUTET, « La rationalisation en France et en Belgique dans les années 1930 », art. cit.. Largement soutenue par une dynamique internationale depuis l'origine – comme en témoigne la tenue des congrès internationaux à Prague en 1924, Bruxelles en 1925, Rome en 1927, Paris en 1929, Amsterdam en 1932, Londres en 1935 pour ne citer que ceux-là la création de ces organismes est en réalité principalement impulsée par les représentants français qui voient dans le CNOF, lequel est une évolution de structures pré-existantes, l'occasion de regrouper les deux tendances dominantes de l'époque en France, Tayloriens et Fayoliens. Le CNOF publiera a partir de 1929 un bulletin conservé à la Bibliothèque Nationale de France sous la côte 4-V-10743. 105 Ainsi, la présence des « sciences du travail » au sein du Bureau International du Travail constitue autant un facteur d'institutionnalisation qu'il reflète celle-ci ; voir notamment Thomas CAYET, Rationaliser le travail, organiser la production. Le Bureau International du Travail et la modernisation économique durant l’entre-deux-guerres, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2010. 106 Aimée MOUTET, « Les “Centraux” et la rationalisation de la production dans l’industrie française », in Jean-Louis BORDES, Annie ION et Pascal DESABRES (dir.), L’ingénieur entrepreneur : Les centraliens et l’industrie, PU Paris-Sorbonne, 2011, p. 107 Plus qu'une méthode ou une technique d'organisation du travail, l'OST est alors pensée réellement comme un vaste projet devant convaincre les individus de sa nécessité et les amener à intérioriser une « rationalité » des pratiques: « Pour que l'OST soit pratiquée efficacement, il faut que tous les agents de production, des chefs d'industrie aux manœuvres, en comprennent la grande importance. Pour mieux dire, ils doivent non seulement en connaître les principes et les procédés mais les avoir pratiqués jusqu'à se les être rendus habituels. D'où un enseignement et encore plus une éducation. Cet enseignement et cette éducation doivent commencer pour tous dans les familles et les écoles primaires, se continuer pour les ouvriers et les contremaîtres dans les écoles professionnelles de l’État ou des usines, se parfaire pour les ingénieurs et directeurs dans les hautes écoles techniques de l'industrie ou du commerce, et même être répandus dans le public, par exemple, par le cinéma et la radio »: Joseph Wilbois, « Enseignement et questions générales », Bulletin du CNOF, 1 octobre 1929, p. 14. Ce « projet éducatif » se retrouve chez Le Chatelier qui voyait dans cet enseignement le moyen d'apprendre aux élèves, dès leur enfance, à organiser chacun de leur temps rationnellement, afin, dans leur vie professionnelle, de pouvoir être pleinement efficaces ; Henri Le Chatelier, « L’enseignement de l’Organisation, discours prononcé à la séance d’ouverture du Congrès International de l’Organisation Scientifique du travail, Palais des Académies, Bruxelles », X information, 6, 25 novembre 1925. 108 Dans ce cadre, la priorité accordée dans un premier temps à l'organisation de l'atelier au détriment, par exemple, de celle du bureau d'études ou de l'administration, converge ég vers l'importance attribuée à l'éducation ouvrière. — 140 — Chapitre II. Les prémices d'une reformulation de l'ingénieur et de son enseignement : 1930-1943 sociales un « esprit rationnel » que de les contrôler109 et d'en limiter, dans le cas des contremaîtres, leur pouvoir dans la division du travail. Ainsi, l'effort pédagogique d'une organisation comme le CNOF va porter essentiellement sur ces catégories, s'intéressant à la fois aux méthodes pour enseigner l'OST à ces catégories de travailleurs 110 et à l'étude de la structure de leur enseignement initial. A l'inverse, ces mouvements ne semblent pas s'être directement intéressés à la formation initiale des ingénieurs, associant généralement leur connaissance de l'OST à la « pratique » et la subordonnant à l'apprentissage de son utilisation « en situation »111, étant entendu que la « rationalité » de l'esprit est un acquis de l'enseignement des ingénieurs. Dans cette perspective, la formation des « organisateurs », au contraire de celles des « organisés », est adossée à la pratique 112, relevant dans ce cas d'une formation complémentaire ayant lieu après l'école et complétant l'expérience individuelle. Si ce report de la formation aux savoirs ayant trait à la rationalisation du travail et des affaires après le cursus initial est motivé par des considérations pédagogiques qui se perpétueront113, on peut penser qu'il n'est pas sans lien avec la stabilisation des 109 Les mouvements rationalisateurs s'impliquent ainsi dans la « gestion de l'intime », ce qui est particulièrement sensible à travers notamment l'enseignement ménager à destination des femmes qui met en évidence l'ambition morale de ces doctrines, associées, notamment chez Le Chatelier, à un mode de reproduction et de domination ; O. HENRY, « Femmes & taylorisme », art. cit 110 Le CNOF tend par exemple à s'ériger en « expert » de l'enseignement de la rationalisation aux travailleurs ( CNOF, « Comment enseigner les principes d'études de mouvement aux chefs d'atelier et contremaitres », Bulletin du CNOF, décembre 1932, p. 163) tout autant qu'en expert de la rationalisation de l'enseignement (CNOF, « Étude des temps dans l'enseignement », Bulletin du CNOF, mai 1931, p. 163). Il publie ainsi une analyse de l'enseignement agricole dans les écoles primaires en juillet 1931, un article s'intéressant à la « coordination dans l'enseignement secondaire » en février 1935, et organisant du 31 mai au 4 juin 1936 un congrès au Havre consacré à « l'étude des questions relatives à l'organisation de l'enseignement du second degré ». 111 Cette conception relève de l'idée popularisée par Le Chatelier que l'ingénieur possède, de par son bagage mathématiques, les aptitudes et la « rationalité » requises par l'OST, et qu'il ne lui manque que la pratique nécessaire à sa position particulière. 112 C'est ce qui préside à la création de l'École d'Organisation Scientifique du Travail en 1934, qui se donne pour but de « préparer à l'exercice de leurs fonctions, conformément aux méthodes de l'organisation scientifique, et de perfectionner les chefs et les agents de toutes les entreprises industrielles, commerciales et administratives »: CNOF, « L'École d'Organisation Scientifique du Travail », Bulletin du CNOF, novembre 1934, p. 313. La composition du Comité de Patronage de l'époque témoigne de l'intégration du CNOF dans les élites industrielles, scientifiques et ingéniériales de l'époque : Henry Le Chatelier, Georges Charpy, Louis Lumière, Maurice d'Ocagne, Léon Guillet (tous les 5 membres de l'institut), Hippolyte Luc (Directeur Général de l'enseignement technique), Henri Garnier (Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris), René Duchemin (Confédération Générale de la Production Française), Charles De Fréminville (Président de la Société des Ingénieurs Civils et président d'honneur du CNOF), Louis Férasson (Président du CNOF, Vice-président de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris, membre du Conseil Supérieur du Travail) ; sont également membres d'honneur les directeurs du CNAM, de Polytechnique, de l'École Centrale de Paris, de l'École des Ponts et Chaussées, de l'école des Hautes Études Commerciales, de l'École Nationale des Arts et Métiers (de Paris), et de l'École Supérieure d'Agronomie. 113 Cette idée d'un enseignement nécessairement pratique et d'une formation « séquentielle » conçue à travers différents « temps », est latente dans le projet de création d'une école nationale d'administration présenté en 1938 par le président du CNOF de l'époque, l'ingénieur général Robert Lelong : « On est amené ainsi à envisager chez tout homme d'action trois formations successives: au facteur savoir correspond la formation de technicien qui permet de concevoir et de fixer l'action; au facteur pouvoir correspond la formation d'organisateur qui précise les moyens de réaliser et au facteur vouloir qui comprend la lutte contre tous les obstacles correspond tout spécialement la formation du négociateur qui permet de s'assurer du concours des hommes. Il est essentiel de poser les fondements de ces trois fonctions dans l'éducation familiale et dans la période d'instruction qui précède l'entrée dans la carrière. C'est l'enseignement proprement dit, c'est-à-dire la formation technique, qu'on développe surtout dans cette période. La formation de l'organisateur et celle du négociateur ne s'acquièrent que par la pratique. On peut les entreprendre de bonne heure en développant en conséquence la partie éducative des programmes et des exercices scolaires. Mais dans l'évolution qui transforme continuellement toute les formes de l'activité humaine, il faut poursuivre une formation continue au cours de la carrière, tout au moins en ce qui concerne les agents destinés aux emplois supérieurs. Cette formation doit se développer sans arrêt sous l'impulsion persévérante des chefs, avec interposition — 141 — Chapitre II. Les prémices d'une reformulation de l'ingénieur et de son enseignement : 1930-1943 configurations professionnelles et des « modèles » de formations initiales qui en résultent. En effet, ainsi restreints aux formations complémentaires, les discours sur la formation à l'OST n'entrent pas en conflit avec les conceptions dominantes de l'enseignement scolaire de l'ingénieur, n'ouvrant pas la porte à une forme de spécialisation du cursus commun 114. L'exemple de la « formation sociale » de l'USIC durant les années 1920 est éclairé différemment par cette perspective, liant son silence à la volonté de maintenir les principes « généralistes » des formations et la hiérarchisation qui en résulte, tout autant que cet exemple éclaire différemment le silence de ces organisations, qui possèdent leur propres organes de formation et pour qui le monopole – doctrinal – sur la formation à la rationalisation est donc un enjeu en soi. A cette tendance récurrente de la restriction de la transmission de ces savoirs aux formations complémentaires s'ajoutent, enfin, les réticences et les controverses que ces doctrines génèrent au sein de la population professionnelle 115. Leur pénétration au sein des groupes d'ingénieurs ainsi qu'au sein de l'industrie fait l'objet d'une véritable lutte tant intellectuelle que professionnelle, en ceci qu'elle engage autant des représentations des savoirs légitimes dans l'activité que des conceptions antinomiques de l'ingénieur 116. Ces luttes doivent par ailleurs se comprendre à deux niveaux. En premier lieu existe au sein du groupe des ingénieurs une opposition à ces savoirs qui ne s'explique pas uniquement sous l'angle d'une « résistance au changement » ou d'une opposition aux transformations de la profession et au développement des savoirs socio-économiques. Au contraire, ces oppositions doivent être appréhendées en prenant en compte le fait qu'elles sont également porteuses de revendications et de propositions quant au renouveau des relations entre sciences et industrie. Ceci permet de mettre en évidence des positions relativement invisibles et minoritaires mais qui contribuent néanmoins à façonner la matrice cognitive, notamment en proposant une conception des savoirs socio-économiques qui ne passe pas nécessairement par un développement des savoirs de rationalisation. En second lieu, il convient d'appréhender la défense de la « rationalisation » et sa diffusion à travers son « enchâssement » dans des processus de segmentation internes au groupe des ingénieurs qui lient les différentes propositions à des segments particuliers et non à l'ensemble des ingénieurs117. Ceci permet de mettre en évidence à la fois des interprétations s'il y a lieu d'un enseignement méthodique, tel que celui des écoles de guerre et de l'école d'OST » : Lelong, « A propos d’un projet d’école d’administration », Bulletin du CNOF, 1 octobre 1938, p. 21, in BNF, 4-V-10743. La dissociation entre les trois types de facteurs que sont le savoir, le pouvoir et le vouloir est une préfiguration d'un autre triptyque qui apparaîtra dans les années 1960 avant de s'imposer dans les années 1980 : savoir, savoir-faire et savoir-être. 114 Le compte-rendu du congrès de l'Organisation Scientifique du Travail de Londres en 1935 par le président Louis Ferrasson est particulièrement révélateur de cet état de fait. Il déclare en effet : « Au groupe de l'enseignement et formation professionnelle, on a confronté les méthodes utilisées en cette matière dans les différents pays. (...) Les différents délégués ont été à peu près d'accord pour reconnaître que s'il paraissait difficile d'envisager une formation unique pour les hautes positions administratives, il était dangereux de spécialiser par trop les jeunes gens avant vingt ans »; Louis Férasson, « VIe congrès de l’organisation scientifique du travail », Bulletin du CNOF, 11 novembre 1935, pp. 277–278. 115 Odile HENRY, « Renouvellement des élites économiques françaises et invention du management, 1880-1917 », Les élites économiques en France et en Europe, Université Paris-Dauphine, 2010. 116 Ce que l'on a vu précédemment à travers les positions de Paul Boucherot, mais aussi, dans une certaine mesure, dans les réactions nombreuses à l'encontre des propos de Fayol dans les débats de 1916-1917. 117 L'analyse qu'effectue Odile Henry sur les savoirs mobilisés par les ingénieurs-conseils et les organisateurs-conseils met en évidence cette segmentation cognitive reposant également sur des luttes entre professionnels ; voir O. HENRY, Les guérisseurs de l’économie, op. cit. — 142 — Chapitre II. Les prémices d'une reformulation de l'ingénieur et de son enseignement : 1930-1943 divergentes, comme la querelle bien connue entre fayoliens et tayloriens 118, mais également les dynamiques de renouvellement de ces savoirs qui vont par exemple se traduire durant les années 1930 par l'importance accordée aux courants des différentes « sciences psychologiques » ainsi qu'à la rationalisation de l'économie119. Ainsi, il est nécessaire de comprendre que , quoique participant d'un même « effort de modern isation », ces savoir s n ' en sont pas m oins portés par des agents et des mou vements hétéroclite s, conduisant à un morcellement en sa voirs hétérogènes, sinon concurrents . Il est donc difficile de mettre en évidence une volonté de systématisation de l'intégration dans les curricula de ces différents savoirs socio-économiques issus de mouvements et de fractions opposés de la profession voire de l'industrie – en l'absence de prises de position au sein de ces mouvements pour une telle systématisation. Dans le prolongement des années 1920 et des conceptions pédagogiques dominantes de l'époque, laissant une certaine marge de manœuvre aux institutions sur ces questions, l'intégration de ces savoirs au sein des programmes repose essentiellement sur des dynamiques internes aux institutions, à leur proximité – notamment inter-individuelle – avec des courants intellectuels et/ou professionnels voire, dans certains cas, sur la réaffirmation de l'héritage historique des institutions120. Cette pluralité – manifeste à l'intérieur même de la « nébuleuse » qui émerge – tend à cliver l'espace des institutions. Ainsi, si celles-ci connaissent une évolution de fond traduite par un accroissement de la « sensibilité » aux savoirs socio-économiques au sens large, leur apparente propagation occulte l'hétérogéné voire l'antagonisme des formes d'enseignement qui se développent. Les transformations du corpus des savoirs mobilisables impulsées par des segments de la profession d'ingénieur vont néanmoins avoir des conséquences sur les conceptions de l'enseignement et sur la progressive formulation d'une « autre formation » de l'ingénieur au sein de l'USIC. Positionnée dans une forme de « bienveillance critique » à l'égard de ces doctrines de rationalisation, qu'elle conteste autant qu'elle y adhère 121, l'Union Sociale, de par sa proximité tant idéologique que sociale avec ces mouvements dont nombre de ses membres font partie, va être particulièrement sensible à ces évolutions. L'« examen » des savoirs qui va s'opérer au sein de l'USIC à la suite des Congrès de l'Enseignement semble rétrospectivement refléter des débats qui lui 118 A. MOUTET, « Ingénieurs et rationalisation. De l’industrie de la Grande Guerre au Front Populaire », art. cit. 119 Ce renouvellement des savoirs économiques, notamment par le biais, on le verra, des ingénieurs polytechniciens, contribuera à substituer le « néo-capitaliste » que constituait l'organisation de l'économie par les producteurs développée autour de Clémentel par une organisation « technocratique » de l'économie dont l'organisation est confiée à des « experts » possédant des techniques spécifiques, constituant la genèse du mouvement néolibéral français ; François DENORD, Néo libéralisme version française, Paris, Demopolis, 2008. 120 On pense à l'importance de l'économie mathématique à Polytechnique, qui ne date pas de l'entre-deux-guerres mais s'affirme dès le tournant du siècle notamment sous l'impulsion de Clément Colson, avant de s’accroître par la suite : Lucette LE VAN-LEMESLE, « Cauwès et Colson, le juriste et l’ingénieur : une ou deux conceptions du service public? », Revue d’histoire moderne et contemporaine,, 2005, p. 75-87. 121 L'enquête de 1927-1928 est ainsi consacrée à la « rationalisation dans la vie économique », celle de 1924-1925 portait quant à elle sur l'autorité et traitait longuement de psychologie et de commandement. Le programme de conférences et les articles de l'Écho mettent en évidence cet intérêt pour les savoirs d'organisation et de rationalisation ; parmi ceux-ci, notons la conférence de Charles de Fréminville, centralien et futur président du CNOF, le 20 juin 1920, sur l'organisation de la production, ou encore celle du 15 octobre 1922 par le Polytechnicien Paul Vanuxem intitulée « A la manière de M. Henry Fayol ». Cette dernière met en évidence la proximité plus grande de l'USIC avec les fayoliens qu'avec le courant taylorien, même si certaines personnalités comme Le Chatelier sont évoquées voire sont invitées à contribuer occasionnellement à l'activité du mouvement. — 143 — Chapitre II. Les prémices d'une reformulation de l'ingénieur et de son enseignement : 1930-1943 sont extérieurs, les positions qui s'y expriment devant être lues à l'aune des débats sur la rationalisation des entreprises et de l'économie ou de c eux sur « les » psychologies122 , quoique n' y faisant pas directement référence . Cependant, plus qu'un simple miroir, les positions exprimées au sein de l'Union Sociale apparaissent comme les prémices d'une refondation de la conception de l'ingénieur et de son enseignement. La conjonction de la sensibilité particulière de l'USIC à l'égard de la formation et de sa proximité avec l'évolution des savoirs va en favoriser l'appropriation par le syndicat catholique, véritable catalyseur qui va esquisser les bases d'une nouvelle définition de l'ingénieur. Cette redéfinition de l'ingénieur à partir de la redistribution de ses savoirs légitimes va être en grande partie l'objet et le produit de l'enquête menée par l'Union Sociale en 1934-35 : « L'ingénieur qu'il nous faut. Comment les préparer et les former à leurs tâches professionnelles d'aujourd'hui? ». Liée à l'accroissement de la salarisation et au développement des fonctions d'encadrement intermédiaires123, l'enquête se présente sous la forme d'un questionnaire prioritairement destiné aux jeunes et aux patrons. La question de la situation des ingénieurs, tant au niveau des conditions de travail et d'emploi qu'à celui de sa position dans la division sociale du travail, est tout d'abord posée, avant de s'intéresser à l'adéquation entre formation et emploi, notamment concernant les nouveaux emplois qui se développent. Constituant plus une base pour lancer l'enquête dans les sections locales qu'une grille impérative, le questionnaire va connaître une utilisation différenciée : à l'étude de la revue, il apparaît que sa dernière partie, consacré à la formation, a été plus utilisée dans l'animation des débats au sein du groupement. Abordant la définition de l'ingénieur à partir des savoirs, l'enquête va consister, à travers des articles et des rapports fournis par les sections locales, en un inventaire contribuant à poser les jalons d'un projet éducatif global qui n'est cependant pour l'instant pas formulé comme tel. Non directive, l'enquête va avoir pour principal effet d'impulser la formulation des pistes mises en évidence durant les années précédentes par le syndicat, sans pour autant pouvoir en contrôler les orientations. Ceci se traduit par ce qui apparaît comme deux séries de positions pouvant être mises en évidence, l'une tendant à reproduire la segmentation entre les différentes catégories de « culture générale », « formation morale », « formation économique » et « formation sociale » et la seconde semblant amalgamer celles-ci dans un même ensemble de réflexion. 122 Ces derniers, quoique moins connus encore aujourd'hui, vont pourtant contribuer à façonner les mouvements rationalisateurs, à les accompagner et à modeler différentes pratiques professionnelles au sein des populations concernées tel que les ingénieurs-conseils et les conseils en organisation ; O. HENRY, Les guérisseurs de l’économie, op. cit, p. 309-359. 123 Le préambule se base sur le constat des transformations économiques et sociales qui ont bouleversé la carrière des ingénieurs et annonce que l'enquête a pour objectif d'interroger les manières de répondre aux nouvelles positions de l'ingénieur : « Enfin, il est indéniable que l'ingénieur peut de moins en moins se borner à être un technicien pur. Il est aussi souvent un conducteur d'hommes, et quand il monte en grade il doit posséder un ensemble de connaissances financières, économiques ou « administratives » dont l'importance est de plus en plus considérable » ; « Les ingénieurs qu'il nous faut. Comment les préparer et les former à leurs tâches professionnelles d'aujourd'hui? », Écho de l'USIC, juin 1934, p314. — 144 — Chapitre II. Les prémices d'une reformulation de l'ingénieur et de son enseignement : 1930-1943 A. De nouveaux savoir s pour de nouveaux ingénieurs : pérennité de la domination d'une conception « morcelée » de l'ingénieur Reflet des présupposés qui ont présidé à l'enquête – on y parle de « besoins nouveaux », de « changements de valeurs », on y insiste sur le caractère « trop négligé encore et cependant d'importance croissante » de la formation sociale et on liste les moyens d'y remédier – le questionnaire constitue en lui-même une illustration des positions dominantes au sein du syndicat. Ainsi, l'interrogation sur la répartition des rôles entre, notamment, les formations et les groupements professionnels124, inscrit l'enquête dans l'héritage d'une division sociale des tâches éducatives. Les modalités pédagogiques envisagées apparaissent comme autant de contraintes qui déterminent largement le déroulement de l'enquête en orientant les débats sur un modèle d'enseignement mis en œuvre par l'USIC – tel que la réflexion et le partage en groupes – restreignant les possibilités de formulation de nouvelles conceptions de l'ingénieur et de sa formation. Cette « pesanteur » des conceptions dominantes et l’ambiguïté de l'enquête vis-à-vis du propre rôle de l'USIC comme organe de formation est également sensible dans les positions qui « encadrent intellectuellement » les débats. Ceci se caractérise par les prises de positions inaugurales de la « tutelle » symbolique du mouvement en la personne de ses membres jésuites. Ceux-ci publient en décembre 1934 deux articles qui fixent à la fois « l'objectif moral » de la réflexion et un certain horizon organisationnel. Dans le premier, le Père Henri du Passage esquisse une « silhouette morale »125 de l'ingénieur tandis que, dans un second article, l'aumônier de l'USIC, le Père de Roux126, fait la transition entre cet ingénieur « idéal » et l'acquisition d'un « caractère » par une formation morale et chrétienne. Défendant tant une vision d'un ingénieur assimilé aux positions de pouvoir que la légitimité de l'activité de l'USIC et, par extension, des mouvements catholiques, ces positions insistent sur le caractère « complémentaire » de la formation sociale qui, parce qu'elle est morale et chrétienne, ne devrait être transmise et contrôlée que par des individus légitimes, autrement dit les mouvements catholiques et les prêtres. Légitimée par l'importance symbolique et intellectuelle des jésuites au sein du mouvement, cette conception irrigue la majorité des positions exprimées au cours de l'enquête dans l’Écho de l'USIC. Si le débat aborde la définition des savoirs légitimes de l'ingénieur, allant des « Humanités » à la formation catholique, il n'en n'émerge pas la formulation d'un projet pédagogique global qui subsumerait les différences entre savoirs à travers l'objectif de former un nouvel ingénieur. De fait, les débats apparaissent comme une réinterprétation des oppositions « classiques » entre « culture générale » et « spécialisation » transposées ici à un objet plus spécifique dont il s'agit de graduer 124 « Comment un ingénieur déjà mêlé à l'action peut-il parfaire et compléter sa formation générale, profiter de l'expérience d'autrui ou mettre la sienne au service de ses collègues? » ; ibid. 125 Henri du Passage, « La silhouette morale de l'ingénieur », Écho de l'USIC, décembre 1934, pp. 586-597. 126 Octave de Roux, « Le problème de l'ingénieur », Écho de l'USIC, décembre 1934, pp. 598-613. — 145 — Chapitre II. Les prémices d'une reformulation de l'ingénieur et de son enseignement : 1930-1943 l'ampleur à conférer au sein des programmes127. Ainsi, le débat se restreint finalement à une conception des projet s d' enseignement relativement c lassique et foc alisée sur une répartition entre le milieu scolaire, à qui il convient de prendre en charge les savoirs fondamentaux, et les groupements professionnels tels que l'USIC, qui doivent , eux, se charger d 'une éducation spécialisée. Si ces positions peuvent paraître a priori contradictoires avec l'objectif apostolique du mouvement – qui pourrait laisser croire à une volonté affirmée d'extension et d'expansion de ses conceptions – elle s'inscrivent néanmoins dans la filiation de la conception et de la mise en œuvre de la formation sociale au sein du mouvement, qui va largement déterminer son appropriation des nouveaux savoirs. a. Un reflet de la croissance des préoccupations économiques Cette conception « fonctionnelle » de l'ingénieur est sensible à travers la controverse sur « l'économie » qui précède de peu le lancement « officiel » de l'enquête, suite à un article rédigé par Charles Lalande, docteur en droit et ancien centralien128. Cet article est révélateur du processus d'appropriation des controverses qui s'opère alors au sein de l'USIC et de l'écho que reçoivent notamment les courants « modernisateurs » au sein du syndicat. Dès l'introduction, l'auteur se satisfait de voir la conception « scientifique » de l'économie recevoir un accueil favorable dans l'espace public129. Le propos de Charles Lalande fait écho à la popularisation de ce qu'il qualifie « d'économétrie », conception largement inspirée par les travaux menés alors par le groupe X-Crise et que l'auteur tente d' r au sein de l'Union Sociale. Fondé en 1931, ce groupe vise, comme le souhaitait l'article à l'origine de sa fondation 130, à étudier de façon critique les différentes doctrines économiques en compétition afin que les « élites intellectuelles » que sont les ingénieurs justifient de leur réputation. Prenant appui sur une contestation de la vision « doctrinaire » de l'économie, où s'opposeraient marxisme 127 On peut ainsi citer la conférence de Werquin (ancien élève d'HEI) en janvier 1935 (Werquin, « Les déficiences dans la formation des ingénieurs», Écho de l'USIC, janvier 1935, p.23) qui constate des « déficiences » en matière administrative et les renvoie, s'appuyant sur Fayol, à des formations complémentaires, réaffirmant le rôle de l'USIC concernant le facteur social en notant que l'Union est de ceux qui s'efforcent de préparer à cette fonction, appelant les jeunes à assister aux conférences. Le numéro de février 1935 reproduit plusieurs articles consacrés à cette enquête qui l'aborde sous la question de la culture générale : une conférence de Mgr de Solage, recteur de l'Institut Catholique (Bruno de Solage, « Culture générale et spécialisation technique », Écho de l'USIC, février 1935, p.99), un article de Liouville publié dans l'Enseignement Chrétien (Albert Liouville, « La culture générale de l'ingénieur », loc.cit.,) ; l'article de Telliez, membre de la section de Caen ( Telliez, « Culture générale, culture spécialisée », loc.cit., p.115). 128 L'article en question ne semble pas avoir été rédigé dans le cadre de l'enquête, n'y faisant pas référence et précédent de quelques mois l'article d’Henri du Passage, qui cadrera l'enquête au sein du mouvement . 129 Il fait ici référence à la presse de droite et aux parlementaires du même bord. Charles Lalande, « Les ingénieurs et l’économie politique », Écho de l’USIC, septembre 1934, pp.518-519. 130 Le groupe est fondé par trois polytechniciens – Gérard Bardet, André Loizillon et John Nicoletis – suite à une série d'articles dans X-Information, le bulletin des anciens de polytechnique, à l'initiative du premier le 25 août 1931. Quoique les articles n'aient pas reçu immédiatement un grand écho, le groupe prit rapidement de l'ampleur après sa création, alors que la crise résonne aux yeux de nombre d'observateurs et notamment de nombreux ingénieurs, comme la faillite du modèle dominant d'appréhension du monde social et économique que représentait jusqu'ici la vision libérale de l'économie et de l'organisation industrielle et économique qu'il impliquait. CENTRE POLYTECHNICIEN D’ÉTUDES ECONOMIQUES , De la récurrence des crises économiques. X-Crise, son cinquantenaire, 1931-1981, Paris, Economica, 1982. — 146 — Chapitre II. Les prémices d'une reformulation de l'ingénieur et de son enseignement : 1930-1943 et libéralisme voire certains courants tels que les valoisiens, les fondateurs de ce groupe en appellent à une étude objective de l'économie qui dépasse les clivages idéologiques et fasse de cette discipline une véritable science131. Continuité de la « pensée d'ingénieur »132 et de l'insertion précoce de Polytechnique dans les sciences économiques par l'intermédiaire de Clément Colson puis de Jacques Rueff qui enseignent successivement à l’École, cette conception « scientifique » de l'économie133, fait écho au saint-simonisme des élèves de l'institution et aux tentatives de refonder l'économie sur les bases « rationnelles » des mathématiques, prémices du mouvement néolibéral français 134. Si elle n'est pas nouvelle et s'inscrit pleinement dans la tradition de l'enseignement économique dispensé à l’Éco Polytechnique, cette conception de l'économie trouve cependant en XCrise un espace de régénération et de diffusion sans précédent. Dans un contexte de floraison d'analyses économiques et sociales, le groupe X-Crise se distingue en effet par son positionnement, par sa composition et bien plus encore par son fonctionnement. Passant de 20 membres à 500 en à peine 18 mois, le groupe initial est particulièrement homogène dans sa composition. En effet, si pour satisfaire son objectif « d'impartialité », il regroupe dès l'origine une pluralité de positions politiques, il n'en reste pas moins que le recrutement de ses membres est déterminé par leur formation initiale et leur devenir probable à la tête de hautes fonctions privées ou publiques. Fondatrice du groupe et de l'esprit de son activité, cette « diversité homogène » demeure lorsque le cercle des membres s’agrandit en s'ouvrant aux non polytechniciens à la fin 1933, lorsqu'il devient le Centre Polytechnien d'Études Economiques. Ainsi, plus qu'un groupe réellement homogène idéologiquement, le mouvement X-crise constitue avant tout un « lieu neutre »135, qui, par sa composition et son inscription dans un réseau de lieux neutres et d'organisations diverses « engage des fractions opposées du patronat et participe à la neutralisation des divergences, à la conciliation des points de vue »136. L'activité centrale du groupe et de ses membres est de mettre en discussion les bases d'une nouvelle organisation sociale reposant sur un fonctionnement « rationnel », s'accordant notamment, au-delà des divergences politiques137, sur la notion de plan et/ou d'interventionnisme plus ou moins limité de l’État. Organe de discussion et de diffusion caractérisé par sa relative pluralité 138, X-Crise va, par son activité, contribuer à produi re et plus encore à diffuser au sein de l'élite une conception 131 Un éditorial du bulletin d'octobre 1935 est particulièrement révélateur à ce propos, affirmant : « A côté d'organismes qui poursuivent scientifiquement des recherches économiques sans se préoccuper de leurs applications, il existe actuellement des sociétés et Comités qui, au contraire, dans un souci prédominant d'impartialité, fournissent arguments et documents pour servir certaines institutions et certains intérêts. Le CPEE ne vise ni à élaborer, ni à défendre certaines doctrines, ni à être un institut de recherche statistique de plus. Il doit tenter de rassembler et critiquer les travaux de ces organismes en vue d'organiser leur application à la vie économique réelle qu'il est, par ailleurs, particulièrement à même d'analyser objectivement » ; Jacques B ranger , « Perspectives d’activité », Bulletin du CPEE, octobre-novembre 1935. 132 François VATIN, « L’esprit d’ingénieur : pensée calculatoire et éthique économique », Revue Française de SocioÉconomie, 1, 2008, p. 131-152. 133 Cette « scientifisation » de la discipline se comprend également par rapport à sa propre évolution, comme le montre F. DENORD, Néo libéralisme version française, op. cit. 134 M. FISCHMAN et E. LENDJEL, « La contribution d’X-Crise à l’émergence de l’économétrie en France dans les années trente », art. cit. 135 L. BOLTANSKI et P. BOURDIEU, « La production de l’idéologie dominante », art. cit. 136 F. DENORD et O. HENRY, « La “modernisation” avant la lettre », art. cit. 137 Ce consensus est ainsi repris à la fois par le dirigisme du courant collectiviste, le courant néolibéral qui postule que le marché n'est pas naturel et que l'action de l’État est d'imposer des régulations législatives qui en permette l'existence, et par le réformisme du courant centriste. — 147 — Chapitre II. Les prémices d'une reformulation de l'ingénieur et de son enseignement : 1930-1943 « scientifique » de l'économie considérée comme une discipline appliquée. Réinterprétant, au prisme de la crise , les dis cours de contestation d'un gouvernement de l'économie monopolisé par le patronat dont les intérêts sont trop directement liés à leur intérêts de classe et par les politiques dont les activités ne se basent pas sur la rationalité, les membres du groupe promeuvent une gestion « technique » de l'économie qui soit l'affaire de spécialistes et s'appuie sur la formalisation mathématiques et l'usage des statistiques. Préfiguration des hauts fonctionnaires « technocrates »139, cette nouvelle catégorie d'agents destinés à remplacer les capitalistes traditionnels par des techniciens, et ce par le biais de la gestion, est ainsi pensée au travers tant de leurs compétences « rationnelles » et notamment mathématiques que de leur orientation pratique. C'est pourquoi ils appellent les ingénieurs, et en premier lieu les polytechniciens dont ils sont pour une partie au moins issus, à s'intéresser à l'économie, sans pour autant directement prendre partie pour une transformation des formations. Il n'en demeure pas moins que, si X-crise n'est alors pas le seul mouvement à se faire le défenseur d'une économie rationnelle, sa composition et son fonctionnement lui confèrent cependant un rayonnement sans pareil, notamment au sein du groupe des ingénieurs. Ce renouvellement de la discipline économique dans l'espace social est particulièrement sensible dans les propos tenus par Charles Lalande dans les pages de la revue de l'USIC. Conception mathématique et scientifique de la discipline, intérêt pour des savoirs économiques pensés en lien avec l'action, critique des compétences économiques des dirigeants140, sa position témoigne de l'influence exercée, sinon directement par X-Crise, au moins par la popularisation de ses conceptions, et en reprend les principaux traits : « Cette science ressemble beaucoup à la mécanique du fluide (...) en sériant ces facteurs, on peut l'étudier théoriquement par les mêmes méthodes et suppléer aux expériences qui sont difficiles à organiser par l'étude intelligente de l'histoire. Je ne suis pas le seul à penser ainsi. C'est tellement vrai que certains ont cru utile d'inventer un 138 L'organisation et l'activité du groupe X-Crise puis du CPEE se caractérise en effet par la diversité tant des intervenants que des membres. Côté intervenants, se retrouvent un grand nombre des intellectuels de l'époque, de différentes tendances et dont la contribution aux travaux d'X-crise se limite pour la majorité à leur seule interventions ponctuelles. On peut ainsi citer pour la seule année 1936-1937 relatée dans la préface de René Brouillet qui était alors secrétaire du CPEE : Gaëtan Pirou, George Darmois, Marc Bloch, Maurice Halbwachs, Jean Ulleman ou encore Célestin Bouglé ; la rétrospective du mouvement note également la présence de Raoul Duchemin (président du CNPF), Charles Spinasse (futur ministre de l'économie de Blum), François Simiand (Collège de France), René Gilloin (futur chargé de mission à Vichy auprès de Pétain et Darlan) ; CENTRE POLYTECHNICIEN D’ÉTUDES ECONOMIQUES, De la récurrence des crises économiques. X-Crise, son cinquantenaire, 1931-1981, op. cit. Pour ce qui est des membres, on peut constater là encore la pluralité des organisations représentées : partisans de la gauche réformiste comme Charles Spinasse et socialiste comme Jules Moch, ou encore de la droite comme Jacques Rueff ; représentants du patronat comme Ernest Mercier ou Auguste Detoeuf ; syndicalistes comme Louis Vallon et René Belin pour la CGT ou Gaston Tessier pour la CFTC, pour ne citer que les plus connus. Cette pluralité des organisations se traduit d'ailleurs, au sein même du mouvement, par des sous-groupes représentants des membres suffisamment proches. 139 G. BRUN, Technocrates et technocratie en France. 1918-1945, op. cit. 140 Il déclare ainsi que cette ignorance de l'économie par les dirigeants a deux raisons : « les uns la connaissent sans comprendre faute de culture scientifique, ce sont les juristes, les autres pourraient la comprendre mais ne la connaissent pas, ce sont les ingénieurs » ; Charles Lalande, « Les ingénieurs et l’économie politique », Les ingénieurs et l’économie politique, 1934 pp.518-519. — 148 — Chapitre II. Les prémices d'une reformulation de l'ingénieur et de son enseignement : 1930-1943 mot nouveau: l'économétrie pour désigner l'étude scientifique des phénomènes économiques et la distinguer, sans confusion possible, des bavardages prétentieux et vains dans lesquels, depuis ses grands fondateurs, a dégénéré l'économie politique (...) Qu'on ne m 'objecte pas l'influence de la psychologie sur les phénomènes économiques. Elle n'a pas plus d'influence qu'en thermodynamique, le régime des eaux ou la température ambiante. Aucune science n'a jamais exigé pour être applicable qu'on soit maître de tous les facteurs qu'on met en jeu, il suffit qu'on soit maître de certains de ces facteurs et qu'on puisse les utiliser pour compenser les effets des autres. A la vérité la seule différence entre les méthodes de l'économie politique et de la thermodynamique est que la seconde est utilisée par des hommes de science, alors que les dirigeants des affaires économiques s'apparentent plutôt aux médecins de Molière. A mon avis, c'est là qu'est le mal: l'ignorance économique presque générale des dirigeants de l'économie »141.
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Various open science
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Commercial Circulations and Globalization of Urban-Rural Relations in Tanzania. Mwanjelwa, rural markets and Chinese products. Suds, 2023, 287, pp.131-163. &#x27E8;10.4000/suds.372&#x27E9;. &#x27E8;hal-04326972&#x27E9;
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Figure 11. Marché d’Ibililo, au carrefour de routes marchandes anciennes et récentes (Racaud 2014) L’intégration double via le commerce agricole et d’objets importés contribue au développement des marchés ruraux. Le réseau s’est densifié avec par exemple la création du marché de Kyimo au milieu des années 2010. Par ailleurs, le développement du commerce de la banane a conduit à la saturation du site initial du marché de Kiwira et celui d’Ibililo. Dans ce dernier village, le marché a été déplacé en 2013 à la périphérie du village pour accueillir les camions de produits agricoles, les vendeurs et les clients. Ce marché illustre le fait que les espaces ruraux les mieux connectés à la ville sont les plus dynamiques (Chaléard et Dubresson 1999). L’intégration des espaces ruraux dans le marché agricole urbain est donc un moteur de leur intégration à la route transnationale des objets importés. Cette complémentarité contribue à des relations urbain-rural singulières intégrées à des logiques de réseaux plus globaux. Originalités et interrelations des espaces marchands en réseau 21 Cette partie appréhende les interrelations singulières entre les espaces marchands et les circulations commerciales, d’abord par l’angle des activités et des revenus entre la ville et la campagne, puis à travers le prisme de leurs transformations mutuelles. Interdépendances urbain-rural en matière d’activités et de revenus Les commerçants de Mwanjelwa et les vendeurs itinérants combinent souvent le commerce et l’agriculture dans leurs activités et leurs revenus. La plupart des commerçants de Mwanjelwa, dont une grande partie est d’ailleurs originaire de la région, tiennent une boutique et sont aussi engagés dans l’agriculture. Par exemple, Rose et Dismas, originaires de Mwakaleli dans le Rungwe district, partagent le temps de travail entre Mbeya et le village. En effet, pour les tâches agricoles cruciales comme le semis ou la récolte, ils restent au village tandis qu’un proche issu du cercle familial gère la boutique (entretien du 6 novembre 2015). Les commerçants ruraux sont plus fréquemment au champ. Si une bonne partie des tâches agricoles est assurée par un autre membre du ménage la plupart du temps, ces vendeurs travaillent au champ au moins une journée par semaine. Leur calendrier hebdomadaire d’activités est donc marqué par la complémentarité du commerce et de l’agriculture, tel celui de Samuel qui cultive les lundis et samedis, vend les mardis, mercredis, jeudis et vendredis dans des marchés périodiques, les dimanches étant consacrés à l’église (entretien du 12 septembre 2014). Ces combinaisons agriculture-commerce ou multi-activités ancrées dans le local et le global, sont une manifestation locale de circulations transnationales. Les interdépendances entre l’agriculture et le commerce se traduisent de plus par une circulation du capital entre ces deux activités. L’agriculture permet en particulier aux plus âgés, ceux qui ont pu hériter la terre, de constituer un capital réinvesti dans une boutique. Par contre, pour les plus jeunes, le commerce est un moyen d’accumuler et d’acquérir de la terre. Les circulations commerciales offrent des opportunités de dépasser des blocages urbains et ruraux, comme le manque d’emplois non précaires, ou la difficulté d’accéder à la terre. Par exemple, Juma n’a pas hérité de terres de ses parents paysans parce que ces derniers ne pouvaient céder une part d’une propriété déjà trop réduite. En 2008, Juma a commencé la vente itinérante et en 2010 il a pu acheter une parcelle à Kyimo d’où il est originaire et où son épouse cultive du vivrier marchand. S’il obtient plus de revenus avec le commerce, il estime que les deux activités sont importantes et nécessaires (entretien du 10 septembre 2014). La majorité des marchands admet que le commerce est nécessaire parce que l’agriculture ne procure pas assez de revenus. De plus, l’agriculture procure des revenus saisonniers, alors que les revenus du commerce sont réguliers, fussent-ils limités. Néanmoins, une part des revenus tirés de récoltes peut être réinvestie dans le commerce. Ces moyens d’existence sont complémentaires puisque le capital circule entre le commerce et l’agriculture. Cette évolution s’inscrit dans le processus de « désagrarianisation », c’est-à-dire un phénomène de long terme dans les espaces ruraux d’ajustement des activités professionnelles, de réorientation des sources de revenus, de changement d’identification sociale et de relocalisation des ruraux à l’é de modes de vie exclusivement paysans (Bryceson 1996). Les circulations marchandes de produits bon marché sont particulièrement propices à ce mouvement qui, en retour, produit des relations urbain-rural spécifiques. Ces systèmes d’activités et de revenus du commerce et de l’agriculture atténuent les frontières entre l’urbain et le rural, dont les relations sont articulées à des logiques de réseaux plus globaux, notamment les routes marchandes transnationales. Ces dernières, du moins leurs ramifications rurales, dépendent de l’agriculture qui reste une source de revenus importante pour près de la moitié des urbains (URT 2010). C’est aussi une ressource essentielle des ruraux, c’est-à-dire des consommateurs au pouvoir d’achat certes modeste, mais suffisant pour induire des circulations marchandes structurantes de réseaux commerciaux. Transformations mutuelles des circulations et des espaces marchands Les interrelations entre les circulations et les espaces marchands peuvent se lire à travers leurs effets sur les marchands et les consommateurs puisqu’au-delà de la matérialité des objets, ce sont aussi des idées qui circulent et des rapports sociaux qui évoluent. Les acteurs engagés dans ces circulations d’articles bon marché sont connectés à une gamme plus variée de lieux marchands. Les vendeurs itinérants et les commerçants sont familiers des quartiers marchands qu’on peut qualifier de vitrines de la mondialisation. Les commerçants, des importateurs aux petits marchands ruraux, sont des intermédiaires de la mondialisation, des vecteurs de nouveaux horizons, de la mode, dont les jeunes vendeurs eux-mêmes sont d’ailleurs les vitrines. Les revenus quotidiens, fussent-ils modestes, sont néanmoins attractifs du fait de leur potentielle régularité, contrairement aux revenus agricoles dépendants des saisons, par ailleurs incertains et pour lesquels le pouvoir de négociation est rarement en faveur des paysans. Pour les cadets sociaux, jeunes et femmes, qui considèrent qu’ils acquièrent l’indépendance financière et un statut social (entretiens septembre 2014), ce commerce est un moyen de reprendre le pouvoir et de parvenir à une certaine mobilité sociale. Le rêve partagé par la plupart des itinérants est en effet d’obtenir une boutique en ville, ce à quoi ils parviennent parfois, comme en témoigne le développement de Mwanjelwa où bon nombre de boutiques sont tenues par d’anciens itinérants. De plus, l’essor du commerce des objets bon marché modifie les habitudes de consommation et le rapport à l’ailleurs. La demande d’objets globalisés, un exemple archétypal étant la casquette américaine, est symbolique d’une société de consommation de masse et donc de changements des rapports aux objets. En matière d’habillement, l’effet de mode est important, et les prix bas sont adaptés au renouvellement des produits dans une société où l’essentiel du pouvoir d’achat est faible. Comme le faisait remarquer un de mes enquêtés, « les chaussures d’Italie coutent 120 000 [45€], les chaussures de Chine 25 000 [9€]. Les Chinoises, après deux ou trois mois, un nouveau style arrive, je sais que j’en achèterai d’autres »12 (entretien le 23 avril 2020). Julius, un importateur, souligne la dimension éphémère des produits et la forte compétition du marché : « il faut être créatif, les gens ont besoin de nouvelles choses, les articles démodés ne se vendent pas, même en baissant le prix »13 (entretien le 29 novembre 2016). Ce renouvellement accéléré des produits en fonction de la mode modifie le rapport aux objets, tant en ville qu’à la campagne, et s’inscrit dans l’entrée de l’Afrique dans l’ère de la consommation de masse (Kernen et Kahn Mohammad 2014). La disponibilité et le moindre coût sont des atouts pour ces produits qui bénéficient pourtant d’une image ambivalente à propos de la qualité. Les consommateurs sont conscients que la qualité est souvent faible, du moins pour la gamme la moins onéreuse et donc la plus accessible, « parfois ces produits causent beaucoup de problèmes dans les maisons, de nombreuses maisons ont des incendies, pourquoi le feu? C’est à cause des prises électriques chinoises [...] on achète cela, ce n’est pas du fond du cœur, c’est à cause des conditions économiques »14 (entretien du 8 novembre 2015). La correspondance entre la qualité et le pouvoir d’achat limités est révélatrice de ce que Kaplinsky et Farooki Notre traduction, citation originale « shoes from Italy is 120,000, shoes from China is 25,000. I know, I’ll buy another one [ ]. Chinese, after two, three months, it will come a new design”. 13 Notre traduction, citation originale “you need to be creative [...] people need new things, you don’t sell old fashion, even if you cut the price”. 14 Notre traduction, citation originale “sometimes these products, they cause lot of problems in houses, many houses have this fire. Why this fire? Because of Chinese switch [...] we buy it, it’s not from the heart, it’s because of the [economic] conditions”. 12 23 (2011) montrent au sujet des marchés des pays du Sud : les normes et les barrières d’entrée sont plus faibles parce qu’il y a moins de pression des consommateurs sur les producteurs. Les interrelations entre les circulations et les espaces marchands peuvent également se lire à partir de l’urbanisme commercial à Mbeya. Le rôle d’échange remonte à la création de la ville, sa situation stratégique à l’échelle de la sous-région, la présence du corridor Dar es-Salaam – Zambie, et une économie agricole régionale dynamique, qui ont renforcé sa fonction commerciale. Mwanjelwa s’est certes développée à partir des acteurs du bas, les petits commerçants, mais elle a aussi bénéficié d’investissements de l’État dans les infrastructures de transport. Par ailleurs, la puissance publique, Mbeya City, est intervenue directement dans la planification de Mwanjelwa avec le projet de Mwanjelwa Complex qui n’a cependant pas eu les répercussions attendues sur l’attractivité de Mwanjelwa. Ce sont bien les acteurs marchands qui produisent la centralité commerciale, soit en marge de la puissance publique, avec par exemple le marché de Mwanjelwa, espace marchand purement produit par des acteurs privés, soit dans le cadre d’arène conflictuelle comme à SIDO. Le développement de l’activité commerciale a renforcé la position de Mbeya sur la route transnationale car les importateurs de Mbeya contournent le quartier de Kariakoo et se connectent directement aux comptoirs asiatiques ou moyen-orientaux. Mbeya est un lieu d’ancrage, au sens d’« anchoring place » pour Krätke et al. (2012, p. 10), pour le réseau global de circulations des marchandises grâce à son quartier commercial, Mwanjelwa, grâce à sa situation géographique, grâce à ses infrastructures et grâce à ses acteurs : innombrables petits commerçants urbains, itinérants ruraux, importateurs, investisseurs immobiliers, business men chinois opérant à Mbeya, mais également la puissance publique. Cet ensemble d’acteurs et de lieux, connectés à plusieurs échelles, fait système, un système dont les éléments ruraux et agricoles invisibles au premier abord, sont néanmoins importants. Le développement de la route transnationale des articles made in China va ainsi de pair avec une économie rurale intégrée dans un marché agricole libéralisé et avec une amplification des relations urbain-rural attestée par les mobilités et les complémentarités d’activités et de revenus. Ces dynamiques, fruits de la conjonction de moteurs externes (relations sino-tanzaniennes anciennement établies) et internes (situation géographique, arrière-pays dynamique intégré aux marchés urbains), produisent des relations urbain-rural singulières et des formes urbaines originales. Mwanjelwa n’a pas adopté le modèle du supermarché, du shopping mall ou ne propose pas de boutiques avec des façades marquées par des signes asiatiques. Conclusion : une mondialisation originale des relations urbain-rural En plaçant les relations urbain-rural à l’intersection du champ des mondialisations discrètes et de l’urbanisation par les flux de marchandises, cet article a montré comment les circulations d’objets importés affectent le principal quartier marchand de Mbeya et ses relations avec son arrière-pays rural. Mwanjelwa dispose de relations fonctionnelles – commerciales – privilégiées à plusieurs échelles, et elle est ainsi une centralité intégrée dans la route transnationale des produits bon marché importés de Chine à partir de laquelle s’organisent des relations urbainrural que l’on peut qualifier de ramifications discrètes de la mondialisation. Cette centralité est aussi/ également marquée par la persistance de dispositifs commerciaux socialement ancrés et 24 essentiellement produits par les marchands. La boutique reste le dispositif majeur, car elle correspond aux normes des clients et à l’environnement économique. Certes, cet espace est de plus en plus convoité par des acteurs extérieurs à la région, mais le capital reproduit le modèle commercial de la boutique plutôt qu’il ne le transforme en dispositifs inspirés du supermarché ou du shopping mall. Si la mondialisation fait l’unité du monde, des territoires dans les Suds présentent toujours des originalités fortes (Lombard et al. 2006). Le projet porté par Mbeya City, qui correspond à une modernité importée, ne parvient pas à se diffuser dans les pratiques des acteurs qui assurent les circulations marchandes. L’ancrage territorial de Mwanjelwa se lit donc à travers la forme urbaine mais il dépasse le cadre de la ville puisque l’aire immédiate de cette centralité est un espace rural fortement intégré à la ville par des relations d’interdépendances. Ces dernières se manifestent par les mobilités urbain-rural, par les complémentarités entre les activités et les revenus issus de l’agriculture du commerce d’objets importés, par la dépendance (relative) des fournisseurs urbains qui ont besoin des vendeurs itinérants pour écouler (une part de) leur marchandise, tandis que les seconds ont besoin des premiers pour s’approvisionner en vue de satisfaire une clientèle rurale dont les revenus sont pour une bonne part issue de l’agriculture. La géographie de la route marchande globale dépend du dynamisme de l’agriculture, un des moteurs de l’économie de Mbeya et une activité majeure des espaces ruraux. L’analyse par le prisme du réseau des espaces marchands, puis par leurs interrelations, inspirée de la méthode d’analyse multi-scalaire de la spatialité des relations de production transnationales (Hagemann et Beyer 2020) a intégré le point de vue des acteurs, l’échelle urbain-rural (mobilités, circulation des revenus) et a remplacé la firme par le quartier marchand de Mwanjelwa. Cette démarche s’inscrit dans les champs des relations urbain-rural et des mondialisations discrètes. Elle se départit de l’approche de l’approvisionnement alimentaire urbain, dominante dans les études sur les relations urbain-rural dans lesquelles les espaces ruraux sont envisagés comme des espaces de production agricole. Ici, on a renversé la perspective en considérant les espaces ruraux comme des marchés de consommation, des espaces de demande de produits globalisés, sans gommer le lien avec l’agriculture, activité majeure de plus en plus combinée à d’autres activités, les circulations marchandes urbain-rural s’inscrivant ainsi dans une trajectoire de « désagrarianisation » (Bryceson, 1996). La géographie des relations urbain-rural (Chaléard et Dubresson 1999) est complétée dans cet article par une autre perspective, celle des connexions à la globalisation, permettant ainsi d’intégrer les complémentarités urbain-rural et les complémentarités entre les échelles locales et globales. Les acteurs, souvent d’extraction paysanne, pratiquent le commerce d’articles bon marché dans une logique de décloisonnement, combinant les attributs de l’urbanité, de la ruralité et leurs articulations à l’échelle globale. Ceci confirme que des sociétés rurales en Afrique sont caractérisées par la multi-activité dans différents lieux et qu’elles exploitent de plus en plus les complément ités urbain-rural et la diversité des lieux à différentes échelles (Charlery de la Masselière 2013). De plus, l’article montre l’émergence de formes spécifiques 25 de la mondialisation, dans des espaces considérés comme périphériques mais qui sont pourtant intégrés à la mondialisation : les espaces discrets de la mondialisation (Choplin et Pliez 2015). En Tanzanie, la route des produits importés de Chine se superpose partiellement sur celle des produits agricoles, du moins entre Dar es-Salaam et la campagne, ce qui indique que les nouvelles routes suivent en partie les anciennes et que ces dernières contribuent au développement des premières. Dans l’Ouest camerounais, région dont le contexte géographique présente des similarités avec les Uporoto (densité de population rurale, agriculture intégrée à l’urbain, réseau de marchés dense, proximité d’une métropole régionale), les centralités commerciales des villes secondaires et les réseaux denses de marchés ruraux, dans des campagnes dynamiques, sont aussi des éléments majeurs d’intégration des relations urbainrural à la mondialisation (Racaud 2018). On observe également le déploiement du capitalisme global dans le Sud-Ouest tanzanien qui s’appuie sur les infrastructures de transport majeures (Tanzam et Tazara) et secondaires. Ce mouvement repose aussi sur des circulations intangibles qui nourrissent des rapports inédits aux objets, dont la demande en objets périssables en lien avec la mode. Sans le consommateur, pas de route marchande, pas de déploiement du capitalisme, « or, la plus-value passe en effet dans la fabrication en amont du désir de consommer et de s’identifier à telle ou telle marchandise » (Weber 2016, p. 7). Les campagnes africaines, qui plus est celles intégrées au marché urbain via les cultures alimentaires commerciales, sont bien des espaces de consommation dont la population en valeur absolue augmente. La demande en « produit chinois ‘moderne’ matérialise un rêve de développement et d’accession à une modernité consumériste » (Kernen 2014, 17). Il y a donc un marché, peu importe qu’il soit « périphérique ». Les espaces ruraux, dont leurs relations avec l’ur , sont bien quelque part sur la carte de la mondialisation. Bibliographie : Agergaard J, Fold N. Gough K, eds. 2009. Rural Urban Dynamics: Livelihoods, Mobility and Markets in African and Asian Frontiers. London, Routledge. 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PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 206  20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 France Géorgie Grèce Hongrie Inde Irlande Islande Israël Italie Japon Kazakhstan Kirghizistan* Kosovo* Koweït Lettonie Liechtenstein Luxembourg Macédoine du Nord Malte Maroc Mexique Moldova* Norvège Ouzbékistan Pays-Bas Pologne Portugal République slovaque Roumanie Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, autres Oui, IM Non Oui, autres Non Oui, IM Oui, autres Oui, IM Non Oui, IM Non Non Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Royaume-Uni Serbie Singapour Slovénie Suède Suisse Tchéquie Türkiye Turkménistan* Ukraine Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP + LOB COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  207 Luxembourg A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum Le Luxembourg compte 84 conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Soixante-deux de ces conventions sont conformes au standard minimum. Le Luxembourg a signé l’IM en 2017, déposé son instrument de ratification le 9 avril 2019, et notifié ses conventions fiscales non conformes. L’IM est entré en vigueur pour le Luxembourg le 1 er août 2019. Les conventions qui seront modifiées par l’IM deviendront conformes au standard minimum une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. Le Luxembourg met en œuvre le standard minimum par l’inclusion de la déclaration du préambule et de la règle COP92. B. Conclusion Aucune juridiction n’a signalé de préoccupation relative à ses conventions conclues avec le Luxembourg. Synthèse de la réponse de la juridiction – Luxembourg 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard Afrique du Sud Allemagne Andorre Arabie saoudite Arménie Autriche Azerbaïdjan Bahreïn Barbade Belgique Botswana Brésil Brunei Darussalam Bulgarie Canada Chine (République populaire de) Chypre* Corée Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, autres Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, autres Oui, IM 3. Signature d’un instrument de mise en conformité Oui, IM Oui, IM Non Non Non 4. Recours à la disposition relative au standard minimum COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP 92 Pour ses conventions notifiées aux fins de l’IM, le Luxembourg choisit d’appliquer la disposition de la déclaration du préambule (article 6 de l’IM) et la règle COP (article 7 de l’IM). Le Luxembourg a formulé une réserve conformément à l’article 6(4) de l’IM afin de ne pas appliquer l’article 6(1) concernant les conventions qui contiennent déjà la version adéquate du préambule (une convention). Le Luxembourg a également formulé une réserve conformément à l’article 7(15)(b) de l’IM afin de ne pas appliquer l’article 7(1) concernant les conventions qui contiennent déjà une règle COP (une convention). PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 208  19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 Croatie Danemark Émirats arabes unis Espagne Estonie États-Unis Fédération de Russie Finlande France Géorgie Grèce Guernesey Hong Kong (Chine) Hongrie Île de Man Inde Indonésie Irlande Islande Israël Italie Japon Jersey Kazakhstan Kosovo* Lettonie Liechtenstein Lituanie Macédoine du Nord Malaisie Malte Maroc Maurice Mexique Moldova* Monaco Norvège Ouzbékistan Panama Pays-Bas Pologne Portugal Qatar République démocratique populaire lao* République slovaque Roumanie Royaume-Uni Saint-Marin Sénégal Serbie Seychelles Singapour Slovénie Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, autres Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, autres Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Oui autre Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, autres Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM COP COP COP COP COP LOB détaillée COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  209 72 73 74 75 76 77 78 79 80 81 82 83 84 Sri Lanka Suède Suisse Tadjikistan* Taipei chinois* Tchéquie Thaïlande Trinité-et-Tobago Tunisie Türkiye Ukraine Uruguay Viet Nam Non Non Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Non Non Non Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM Non Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 210  Macao (Chine) A. Macao (Chine) n’a pas adhéré à l’IM. Macao (Chine) a indiqué dans sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs avoir pris des mesures (autres qu’au titre de l’IM) afin de mettre en œuvre le standard minimum dans ses conventions avec le Cabo Verde, le Mozambique*, le Portugal et le Viet Nam. B. Conclusion Aucune juridiction n’a signalé de préoccupation relative à ses conventions conclues avec Macao (Chine). Synthèse de la réponse de la juridiction – Macao (Chine) 1 2 3 4 1.Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard 3. Signature d’un instrument de mise en conformité 4. Recours à la disposition relative au standard minimum Cabo Verde Mozambique* Portugal Viet Nam Non Non Non Non Non Non Non Non COP COP PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  211 Macédoine du Nord A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum La République de Macédoine du Nord compte 48 conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Aucune de ces conventions n’est conforme au standard minimum. La République de Macédoine du Nord a signé l’IM en 2020. Les conventions qui seront modifiées par l’IM deviendront conformes au standard minimum une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. La République de Macédoine du Nord a signé un instrument bilatéral de mise en conformité concernant sa convention avec la Suisse. La République de Macédoine du Nord met en œuvre le standard minimum par l’inclusion de la déclaration du préambule et de la règle COP93. B. Conclusion Recommandation Il est recommandé que la République de Macédoine du Nord prenne les mesures nécessaires afin que l’IM prenne effet au regard de ses conventions fiscales notifiées aux fins de l’IM, car ces conventions ne seront modifiées par l’IM (et ne deviendront conformes au standard minimum) qu’une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. Synthèse de la réponse de la juridiction – République de Macédoine du Nord 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard 3. Signature d’un instrument de mise en conformité 4. Recours à la disposition relative au standard minimum Albanie Allemagne Arabie saoudite Autriche Azerbaïdjan Bélarus Belgique Bosnie-Herzégovine Bulgarie Chine (République populaire de) Croatie Danemark Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Oui, IM Non Oui, IM Non Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP 93 Pour ses conventions notifiées aux fins de l’IM, la République de Macédoine du Nord choisit d’appliquer la disposition de la déclaration du préambule (article 6 de l’IM) et la règle COP (article 7 de l’IM). PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 212  13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 Émirats arabes unis Espagne Estonie Fédération de Russie Finlande France Hongrie Inde Iran* Irlande Israël Italie Kazakhstan Kosovo* Koweït Lettonie Lituanie Luxembourg Maroc Moldova* Monténégro Norvège Pays-Bas Pologne Qatar République slovaque Roumanie Royaume‑Uni Serbie Slovénie Suède Suisse Taipei chinois* Tchéquie Türkiye Ukraine Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, autres Non Non Oui, IM Oui, IM COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  213 Malaisie A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum La Malaisie compte 74 conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Quarante-quatre de ces conventions sont conformes au standard minimum. La Malaisie a signé l’IM en 2018, déposé son instrument de ratification le 18 février 2021, et notifié ses conventions fiscales non conformes alors en vigueur. Le 10 novembre 2022, la Malaisie a formulé une notification supplémentaire afin d’élargir la liste de conventions qui seront couvertes par l’IM. L’IM est entré en vigueur pour la Malaisie le 1er juin 2021. Les conventions qui seront modifiées par l’IM deviendront conformes au standard minimum une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. La Malaisie met en œuvre le standard minimum par l’inclusion de la déclaration du préambule et de la règle COP94. B. Conclusion Aucune juridiction n’a signalé de préoccupation relative à ses conventions conclues avec la Malaisie. Synthèse de la réponse de la juridiction – Malaisie 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard Afrique du Sud Albanie Allemagne Arabie saoudite Australie Autriche Bahreïn Bangladesh* Belgique Bosnie-Herzégovine Brunei Darussalam Cambodge* Canada Chili Chine (République populaire de) Corée Croatie Danemark Égypte Émirats arabes unis Espagne Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Non Oui, autres Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM 3. Signature d’un instrument de mise en conformité Non Non Non Non 4. Recours à la disposition relative au standard minimum COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP 94 Pour ses conventions notifiées aux fins de l’IM, la Malaisie choisit d’appliquer la disposition de la déclaration du préambule (article 6 de l’IM) et la règle COP (article 7 de l’IM). PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 214  22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73 74 Fédération de Russie Fidji* Finlande France Hong Kong (Chine) Hongrie Inde Indonésie Iran* Irlande Italie Japon Jordanie Kazakhstan Kirghizistan* Koweït Liban* Luxembourg Malte Maroc Maurice Mongolie Myanmar* Namibie Norvège Nouvelle-Zélande Ouzbékistan Pakistan Papouasie–Nouvelle-Guinée Pays-Bas Philippines Pologne Qatar République arabe syrienne* République démocratique populaire lao* République slovaque Roumanie Royaume-Uni Saint-Marin Seychelles Singapour Soudan* Sri Lanka Suède Suisse Tchéquie Thaïlande Türkiye Turkménistan* Ukraine Venezuela* Viet Nam Zimbabwe* Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non Non Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Non Non Non Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non Non Non Non Oui, IM Non Non Oui, IM Non Non Non Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Non Oui, IM Non Non Non Non Non Oui, IM Non Non Oui, IM Non Non Oui, IM Non COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  215 Maldives A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum Les Maldives comptent une convention fiscale en vigueur 95, avec les Émirats arabes unis, comme l’indique leur réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Cette convention n’est pas conforme au standard minimum. Les Maldives n’ont pas signé l’IM. Les Maldives ont indiqué dans leur réponse au questionnaire d’examen par les pairs avoir pris des mesures (autres qu’au titre de l’IM) afin de mettre en œuvre le standard minimum dans leurs conventions avec les Émirats arabes unis. B. Conclusion Aucune juridiction n’a signalé de préoccupation relative à ses conventions conclues avec les Maldives. Synthèse de la réponse de la juridiction – Maldives 1 1. Partenaires de convention 2. Conformité avec le standard 3. Signature d’un instrument de mise en conformité Émirats arabes unis Non Non 4. Recours à la disposition relative au standard minimum 95 Les Maldives ont également conclu un accord avec le Bangladesh*, qui a été ratifié le 23 décembre 2021. PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 216  Malte A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum Malte compte 78 conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Cinquante-six de ces conventions sont conformes au standard minimum. Malte a signé l’IM en 2017 et a déposé son instrument de ratification le 18 décembre 2018. L’IM est entré en vigueur pour Malte le 1er avril 2019. Les conventions qui seront modifiées par l’IM deviendront conformes au standard minimum une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet 96. Malte n’a pas notifié ses conventions avec le Botswana, la Bulgarie et Monaco aux fins de l’IM, mais a indiqué dans sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs avoir pris des mesures (autres qu’au titre de l’IM) afin de mettre en œuvre le standard minimum dans ses conventions avec le Botswana, la Bulgarie, les États-Unis, la Géorgie, la Moldova*, Monaco et le Monténégro. Malte met en œuvre le standard minimum par l’inclusion de la déclaration du préambule et de la règle COP97. B. Conclusion Aucune juridiction n’a signalé de préoccupation relative à ses conventions conclues avec Malte. Synthèse de la réponse de la juridiction – Malte 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard Afrique du Sud Albanie Allemagne Andorre Arabie saoudite Arménie Australie Autriche Azerbaïdjan Bahreïn Barbade Belgique Botswana Bulgarie Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, autres Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non 3. Signature d’un instrument de mise en conformité Oui, IM 4. Recours à la disposition relative au standard minimum COP COP COP COP COP COP COP COP Non COP COP COP Non Non 96 Malte a choisi de remplacer, en vertu de l’article 35(3) de l’IM, l’expression « périodes d’imposition commençant à l’expiration ou après l’expiration d’une période » par « périodes d’imposition commençant à compter du 1er janvier de l’année qui commence à compter de l’expiration d’une période », pour une application unilatérale de l’article 35(1)(b) et (5)(b) (Entrée en vigueur) de l’IM. 97 Pour ses conventions notifiées aux fins de l’IM, Malte choisit d’appliquer la disposition de la déclaration du préambule (article 6 de l’IM) et la règle COP (article 7 de l’IM). PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  217 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 Canada Chine (République populaire de) Chypre* Corée Croatie Danemark Égypte Émirats arabes unis Espagne Estonie États-Unis Fédération de Russie Finlande France Géorgie Grèce Guernesey Hong Kong (Chine) Hongrie Île de Man Inde Irlande Islande Israël Italie Jersey Jordanie Kosovo* Koweït Lettonie Liban* Libye* Liechtenstein Lituanie Luxembourg Malaisie Maroc Maurice Mexique Moldova* Monaco Monténégro Norvège Pakistan Pays-Bas Pologne Portugal Qatar République slovaque Roumanie Royaume-Uni Saint-Marin Serbie Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, autres Non Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Non Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP Non Non Oui, IM Oui, IM Non Non Non Oui, IM COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 218  68 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78 Singapour Slovénie Suède Suisse Syrie* Tchéquie Tunisie Türkiye Ukraine Uruguay Viet Nam Oui, IM Oui, IM Non Oui, autres Non Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM COP COP COP COP Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM COP COP COP COP COP PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  219 Maroc A. Le Maroc a signé l’IM en 2019 et a notifié ses conventions bilatérales non conformes. Les conventions qui seront modifiées par l’IM deviendront conformes au standard minimum une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. Le Maroc met en œuvre le standard minimum par l’inclusion de la déclaration du préambule et de la règle COP98. B. Conclusion Recommandation Il est recommandé que Maroc prenne les mesures nécessaires afin que l’IM prenne effet au regard de ses conventions fiscales notifiées aux fins de l’IM, car ces conventions ne seront modifiées par l’IM (et ne deviendront conformes au standard minimum) qu’une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. Synthèse de la réponse de la juridiction – Maroc 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard 3. Signature d’un instrument de mise en conformité 4. Recours à la disposition relative au standard minimum Allemagne Arabie saoudite Autriche Bahreïn Belgique Bénin Bulgarie Cameroun Canada Chine (République populaire de) Corée Côte d’Ivoire Croatie Non Non Non Non Non Oui autre Non Non Non Non Non Non Non Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM 98 Pour ses conventions notifiées aux fins de l’IM, le Maroc choisit d’appliquer la disposition de la déclaration du préambule (article 6 de l’IM) et la règle COP (article 7 de l’IM). PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 220  14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 Danemark Égypte Émirats arabes unis Espagne États-Unis Éthiopie* Fédération de Russie Finlande France Gabon Ghana Grèce Guinée* Hongrie Inde Indonésie Irlande Italie Japon Jordanie Koweït Lettonie Liban* Lituanie Luxembourg Macédoine du Nord Madagascar Malaisie Mali* Malte Norvège Oman Pakistan Partenaires conventionnels de l’UMA (Algérie*, Libye*, Mauritanie, Tunisie) Pays-Bas Pologne Portugal Qatar Roumanie Royaume-Uni Rwanda* Sénégal Serbie Singapour Slovénie Suisse Syrie* Tchéquie Türkiye Ukraine Viet Nam Zambie Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Oui, autres Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Non COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  221 Maurice A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum Maurice compte 44 conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Vingt-trois de ces conventions sont conformes au standard minimum. Maurice a signé l’IM en 2017 et a déposé son instrument de ratification le 18 octobre 2019. L’IM est entré en vigueur pour Maurice le 1er février 2020. Les conventions qui seront modifiées par l’IM deviendront conformes au standard minimum une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. Maurice n’a pas notifié sa convention avec l’Inde aux fins de l’IM, mais a indiqué dans sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs avoir pris des mesures (autres qu’au titre de l’IM) afin de mettre en œuvre le standard minimum dans ses conventions avec le Bangladesh*, le Botswana, Cabo Verde, l’Inde, Jersey, Madagascar*, le Mozambique*, l’Ouganda*, le Rwanda* et la Tunisie. L’Inde a notifié sa convention avec Maurice aux fins de l’IM. Maurice met en œuvre le standard minimum par l’inclusion de la disposition de la déclaration du préambule et de la règle COP99. B. Conclusion Aucune juridiction n’a signalé de préoccupation relative à ses conventions conclues avec Maurice. L’Inde a notifié sa convention avec Maurice aux fins de l’IM, ce qui équivaut à une demande de mise en œuvre du standard minimum. Synthèse de la réponse de la juridiction – Maurice 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard 3. Signature d’un instrument de mise en conformité 4. Recours à la disposition relative au standard minimum Afrique du Sud Allemagne Bangladesh* Barbade Belgique Botswana Cabo Verde Chine (République populaire de) Chypre* Congo Croatie Égypte Émirats arabes unis Non Oui, autres Non Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP Non Non Non Non 99 Pour ses conventions notifiées aux fins de l’IM, Maurice choisit d’appliquer la disposition de la déclaration du préambule (article 6 de l’IM) et la règle COP (article 7 de l’IM). Maurice a indiqué que même s’il accepte l’application de la règle COP aux fins de l’IM, il a l’intention d’adopter dans la mesure du possible une règle LOB au moyen de négociations bilatérales. PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 222  14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 Estonie Eswatini France Ghana* Guernesey Inde Italie Jersey Koweït Lesotho* Luxembourg Madagascar* Malaisie Malte Monaco Mozambique* Namibie Népal* Oman Ouganda* Pakistan Qatar Royaume‑Uni Rwanda* Seychelles Singapour Sri Lanka Suède Thaïlande Tunisie Zimbabwe* Oui, autres Non Oui, IM Non Oui, IM Non Non Non Non Oui, autres Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Non Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM Non Non Non Non Non Oui, IM Non Oui, IM Non Non Oui, IM Non Non Non Non Oui, IM Non Non COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP COP PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  223 Mauritanie A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum La Mauritanie compte six conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs, y compris la Convention en matière d’impôts sur le revenu de l’Union du Maghreb arabe conclue avec quatre partenaires (la Convention UMA). Aucune de ces conventions n’est conforme au standard minimum. La Mauritanie n’a pas signé l’IM. B. Conclusion La Mauritanie a élaboré un plan de mise en œuvre du standard minimum dans ses conventions conclue avec les Émirats arabes unis, la France, la Sénégal et la Tunisie. La Mauritanie a indiqué dans sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs qu’elle prévoyait de signer l’IM, et de notifier les conventions devant être couvertes par l’IM. Autres conventions Le tableau ci-après répertorie les conventions non conformes, qui ne font pas l’objet d’un instrument de mise en conformité, d’une déclaration générale relative à l’application d’une règle détaillée de limitation des avantages, et pour lesquelles aucune mesure n’a été prise en vue de mettre en œuvre le standard minimum. 1. Partenaires conventionnels 2. Membre du Cadre inclusif 1 2 4 3 Algérie* France Maroc Partenaires conventionnels de l’UMA (Algérie*, Libye*, Maroc, Tunisie) 5 6 Sénégal Tunisie Non Oui Oui Oui (Maroc, Tunisie), Non (Algérie*, Libye*) Oui Oui PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 224  Mexique A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum Le Mexique compte 60 conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Trois de ces conventions sont conformes au standard minimum. Le Mexique a signé l’IM en 2017 et déposé son instrument de ratification le 15 mars 2023, et a notifié ses conventions fiscales non conformes. L’IM est entré en vigueur pour le Mexique le 1 er juillet 2023. Les conventions qui seront modifiées par l’IM deviendront conformes au standard minimum une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. Le Mexique a signé un instrument bilatéral de mise en conformité concernant sa convention avec l’Allemagne. Le Mexique met en œuvre le standard minimum par l’inclusion de la disposition de la déclaration du préambule et de la règle COP associée à la règle LOB100. B. Conclusion Aucune juridiction n’a signalé de préoccupation relative à ses conventions conclues avec le Mexique. Synthèse de la réponse de la juridiction – Mexique 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard 3. Signature d’un instrument de mise en conformité 4. Recours à la disposition relative au standard minimum Afrique du Sud Allemagne Arabie saoudite Argentine Australie Autriche Bahreïn Barbade Belgique Brésil Canada Chili Chine (République populaire de) Colombie Non Non Non Oui, autres Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Oui, IM Oui, autres Oui, IM COP COP COP COP + LOB COP COP COP COP COP Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM COP COP + LOB COP COP + LOB 100 Pour ses conventions notifiées aux fins de l’IM, le Mexique choisit d’appliquer la disposition de la déclaration du préambule (article 6 de l’IM) et la règle COP (article 7 de l’IM). Le Mexique a également adopté la règle simplifiée de limitation des avantages en vertu de l’article 7(6) de l’IM. Le Mexique a formulé une réserve conformément à l’article 6(4) de l’IM afin de ne pas appliquer l’article 6(1) concernant les conventions qui contiennent déjà la version adéquate du préambule (quatre conventions). Le Mexique a également formulé une réserve conformément à l’article 7(15)(b) de l’IM afin de ne pas appliquer l’article 7(1) concernant les conventions qui contiennent déjà une règle COP (trois conventions). PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  225 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 Corée Costa Rica Danemark Émirats arabes unis Équateur* Espagne Estonie États-Unis Fédération de Russie Finlande France Grèce Hong Kong (Chine) Hongrie Inde Indonésie Irlande Islande Israël Italie Jamaïque Japon Koweït Lettonie Lituanie Luxembourg Malte Norvège Nouvelle-Zélande Panama Pays-Bas Pérou Philippines Pologne Portugal Qatar République slovaque Roumanie Royaume-Uni Singapour Suède Suisse Tchéquie Türkiye Ukraine Uruguay Non Non Non Non Non Oui, autres Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Oui autre Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM COP COP COP + LOB COP COP COP COP COP + LOB COP COP COP + LOB COP COP COP COP COP COP + LOB COP COP COP + LOB COP COP COP COP COP COP COP + LOB COP COP COP COP COP COP COP COP COP + LOB COP COP COP COP COP COP COP COP COP + LOB PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 226  Monaco A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum Monaco compte onze conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Huit de ces conventions sont conformes au standard minimum. Monaco a signé l’IM en 2017 et a déposé son instrument de ratification le 10 janvier 2019. L’IM est entré en vigueur pour Monaco le 1er mai 2019. Les conventions qui seront modifiées par l’IM deviendront conformes au standard minimum une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. Monaco n’a pas notifié sa convention avec Malte aux fins de l’IM, mais a indiqué dans sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs avoir pris des mesures (autres qu’au titre de l’IM) afin de mettre en œuvre le standard minimum dans ces conventions avec Malte et le Mali*. Monaco met en œuvre le standard minimum par l’inclusion de la déclaration du préambule et de la règle COP101. B. Conclusion Aucune juridiction n’a signalé de préoccupation relative à ses conventions conclues avec Monaco. Synthèse de la réponse de la juridiction – Monaco 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard France Guernesey Liechtenstein Luxembourg Mali* Malte Maurice Monténégro Qatar Saint-Kitts-et-Nevis Seychelles Oui, IM Oui, IM Oui, autres Oui, IM Non Non Oui, IM Oui autre Oui, IM Non Oui, IM 3. Signature d’un instrument de mise en conformité 4. Recours à la disposition relative au standard minimum COP COP COP COP Non Non COP COP COP Non COP 101 Pour ses conventions notifiées aux fins de l’IM, Monaco choisit d’appliquer la disposition de la déclaration du préambule (article 6 de l’IM) et la règle COP (article 7 de l’IM). PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  227 Mongolie A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum La Mongolie compte 26 conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Aucune de ces conventions n’est conforme au standard minimum. La Mongolie a signé l’IM en octobre 2022 et a notifié ses conventions non conformes. Les conventions qui seront modifiées par l’IM deviendront conformes au standard minimum une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. La Mongolie met en œuvre le standard minimum par l’inclusion de la déclaration du préambule et de la règle COP102. B. Conclusion Recommandation Il est recommandé que la Mongolie prenne les mesures nécessaires afin que l’IM prenne effet au regard de ses conventions fiscales notifiées aux fins de l’IM, car ces conventions ne seront modifiées par l’IM (et ne deviendront conformes au standard minimum) qu’une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. Synthèse de la réponse de la juridiction – Mongolie 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard 3. Signature d’un instrument de mise en conformité Allemagne Autriche Bélarus Belgique Bulgarie Canada Chine (République populaire de) Corée Fédération de Russie France Hongrie Inde Indonésie Italie Kazakhstan Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Non Oui, IM Non Oui, IM Oui, IM 4. Recours à la disposition relative au standard minimum COP COP COP COP COP COP + LOB COP COP + LOB COP COP + LOB 102 Pour ses conventions notifiées aux fins de l’IM, la Mongolie choisit d’appliquer la disposition de la déclaration du préambule (article 6 de l’IM) et la règle COP (article 7 de l’IM). PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 228  16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 Kirghizistan* Malaisie Pologne République populaire démocratique de Corée* Royaume-Uni Singapour Suisse Tchéquie Türkiye Ukraine Viet Nam Non Non Non Non Non Oui, IM Oui, IM Non Non Non Non Non Non Non Non Oui, IM Oui, IM Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM COP COP COP COP COP COP COP PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  229 Monténégro A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum Le Monténégro compte 43 conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Aucune de ces conventions n’est conforme au standard minimum. Le Monténégro n’a pas signé l’IM. Le Monténégro a indiqué dans sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs avoir pris des mesures (autres qu’au titre de l’IM) afin de mettre en œuvre le standard minimum dans ses conventions avec la Pologne, la République slovaque, la Slovénie et la Tchéquie. Le Monténégro a indiqué dans sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs qu’il prévoyait d’adhérer à l’IM. Dans leurs réponses au questionnaire d’examen par les pairs, la Hongrie, l’Italie et la Suède ont indiqué que leurs conventions avec le Monténégro ne soulevaient pas de préoccupations importantes en matière de chalandage fiscal, au regard de leurs juridictions respectives. B. Conclusion Le Monténégro a élaboré un plan de mise en œuvre du standard minimum dans ses conventions avec l’Albanie, l’Allemagne, l’Autriche, l’Azerbaïdjan, le Bélarus, la Belgique, la Bosnie-Herzégovine, la Bulgarie, la Chine (République populaire de), la Croatie, le Danemark, l’Égypte, les Émirats arabes unis, la Fédération de Russie, la Finlande, la France, la Hongrie, l’Irlande, l’Italie, la Lettonie, la Macédoine du Nord, la Malaisie, Malte, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, la Roumanie, le Royaume-Uni, la Serbie, le Sri Lanka, la Suède, la Suisse, la Türkiye et l’Ukraine. Le Monténégro a indiqué dans sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs qu’il prévoyait de signer l’IM, et de notifier les conventions devant être couvertes par l’IM. Synthèse de la réponse de la juridiction – Monténégro 1 3 4 5 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard 3. Signature d’un instrument de mise en conformité Pologne République slovaque Slovénie Tchéquie Non Non Non Non Non Non Non Non 4. Recours à la disposition relative au standard minimum Autres conventions 1 2 3 4 5 1. Partenaires conventionnels 2. Membre du Cadre inclusif Albanie Allemagne Autriche Azerbaïdjan Bélarus Oui Oui Oui Oui Oui PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 230  6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 Belgique Bosnie-Herzégovine Bulgarie Chine (République populaire de) Chypre* Croatie Danemark Égypte Émirats arabes unis Fédération de Russie Finlande France Hongrie Iran* Irlande Italie Koweït Lettonie Macédoine du Nord Malaisie Malte Moldova* Norvège Pays-Bas Portugal République populaire démocratique de Corée* Roumanie Royaume‑Uni Serbie Sri Lanka Suède Suisse Türkiye Ukraine Oui Oui Oui Oui Non Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Non Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Non Oui Oui Oui Non Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  231 Montserrat A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum Montserrat compte deux conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Aucune de ces conventions n’est conforme au standard minimum. Montserrat n’a pas adhéré à l’IM. Montserrat a indiqué dans sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs avoir pris des mesures (autres qu’au titre de l’IM) afin de mettre en œuvre le standard minimum dans sa convention avec le Royaume-Uni. Dans sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs, la Suisse a indiqué que sa convention avec Montserrat ne soulevait pas de préoccupations importantes en matière de chalandage fiscal, au regard de sa juridiction. B. Conclusion Aucune juridiction n’a signalé de préoccupation relative à ses conventions conclues avec Montserrat. Synthèse de la réponse de la juridiction – Montserrat 1 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard 3. Signature d’un instrument de mise en conformité 4. Recours à la disposition relative au standard minimum Royaume‑Uni Non Non COP Autres conventions 1 1. Partenaires conventionnels 2. Membre du Cadre inclusif Suisse Oui PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024 232  Namibie A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum La Namibie compte onze conventions fiscales en vigueur, comme l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs. Aucune de ces conventions n’est conforme au standard minimum. La Namibie a signé l’IM en septembre 2021, et a notifié ses conventions non conformes. Les conventions qui seront modifiées par l’IM deviendront conformes au standard minimum une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. La Namibie met en œuvre le standard minimum par l’inclusion de la disposition de la déclaration du préambule et de la règle COP associée à la règle LOB103. B. Conclusion Recommandation Il est recommandé que la Namibie prenne les mesures nécessaires afin que l’IM prenne effet au regard de ses conventions fiscales notifiées aux fins de l’IM, car ces conventions ne seront modifiées par l’IM (et ne deviendront conformes au standard minimum) qu’une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. Synthèse de la réponse de la juridiction – Namibie 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard 3. Signature d’un instrument de mise en conformité 4. Recours à la disposition relative au standard minimum Afrique du Sud Allemagne Botswana Fédération de Russie France Inde Malaisie Maurice Roumanie Royaume‑Uni Suède Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Oui, IM Non Non Non Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM COP + LOB COP + LOB COP + LOB COP + LOB COP + LOB COP + LOB COP + LOB COP + LOB COP + LOB COP + LOB COP + LOB 103 Pour ses conventions notifiées aux fins de l’IM, la Namibie choisit d’appliquer la disposition de la déclaration du préambule (article 6 de l’IM), la règle COP (article 7 de l’IM) et la règle LOB simplifiée (article 7(6) de l’IM). La Namibie a déclaré, conformément à l’article 7(17)(a) de l’IM, que même si elle accepte d’appliquer uniquement la règle COP de manière provisoire, elle a l’intention d’adopter, dans la mesure du possible, une règle LOB venant compléter ou remplacer la règle COP via des négociations bilatérales. PRÉVENTION DE L’UTILISATION ABUSIVE DES CONVENTIONS FISCALES – SIXIÈME RAPPORT D’EXAMEN PAR LES PAIRS SUR LE CHALANDAGE FISCAL © OCDE 2024  233 Nigéria A. Progrès dans la mise en œuvre du standard minimum Le Nigéria compte 16 conventions fiscales en vigueur, ainsi que l’indique sa réponse au questionnaire d’examen par les pairs, dont l’Acte additionnel multilatéral A/SA 5/12/18 portant adoption des règles communautaires pour l’élimination de la double imposition en matière d’impôts sur les revenus, les capitaux et les successions et la prévention de la fraude et de l’évasion fiscale entre les États membres de la CEDEAO (l’Acte additionnel de la CEDEAO) conclu avec 14 partenaires. L’une de ces conventions, l’Acte additionnel de la CEDEAO, est conforme au standard minimum. Le Nigéria a signé l’IM en 2017 et a notifié ses conventions non conformes. Les conventions qui seront modifiées par l’IM deviendront conformes au standard minimum une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. Le Nigéria met en œuvre le standard minimum par l’inclusion de la déclaration du préambule et de la règle COP104. B. Conclusion Recommandation Il est recommandé que Nigéria prenne les mesures nécessaires afin que l’IM prenne effet au regard de ses conventions fiscales notifiées aux fins de l’IM, car ces conventions ne seront modifiées par l’IM (et ne deviendront conformes au standard minimum) qu’une fois que les dispositions de l’IM auront pris effet. Synthèse de la réponse de la juridiction – Nigéria 1 2 3 4 5 6 7 1. Partenaires conventionnels 2. Conformité avec le standard 3. Signature d’un instrument de mise en conformité 4. Recours à la disposition relative au standard minimum Afrique du Sud Belgique Canada Chine (République populaire de) Espagne États membres de la CEDEAO (Bénin, Burkina Faso, Cabo Verde, Côte d’Ivoire, Gambie*, Ghana*, GuinéeBissau*, Guinée Conakry*, Libéria, Mali*, Niger*, Sénégal, Sierra Leone, Togo) France Non Non Non Non Non Oui autre Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM Oui, IM COP COP COP COP COP COP Non Oui, IM COP 104 Pour ses conventions notifiées aux fins de l’IM, le Nigéria choisit d’appliquer la disposition de la déclaration du préambule (article 6 de l’IM) et la règle COP (article 7 de l’IM).
46,806
2016AIXM4301_9
French-Science-Pile
Open Science
Various open science
2,016
Evaluation de la performance des ouvrages hydrauliques en remblai soumis à la présence de végétation arborescente
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French
Spoken
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167 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques 2. Synthèse et discussion des résultats obtenus 2.1. Synthèse des résultats d’évaluation de la performance des tronçons de digue du Petit Rhône Les résultats des trois applications réalisées sur les digues du Petit Rhône visant à évaluer leur performance vis-à-vis des mécanismes de détérioration par érosion interne et affouillement sont synthétisés respectivement sur le Tableau 29 et le Tableau 30. Un bref descriptif des tronçons de digue du Petit Rhône rive gauche, secteur du Mas de Cazeneuve et secteur du bois de Beaumont est disponible en ANNEXE 5. Ces tableaux présentent pour chacun des trois sites : les résultats de chaque critère fonctionnel permettant l’évaluation d’un indicateur de performance vis-à-vis du mécanisme de détérioration étudié (le cas échéant en considérant la végétation et sans la considérer) ; le résultat de l’indicateur de performance correspondant. Pour l’évaluation de la performance vis-à-vis du mécanisme de détérioration par érosion interne (Tableau 29), nous notons que la prise en compte de la végétation arborescente a une influence non négligeable sur la dégradation de la performance des critères fonctionnels concernés par la végétation, soit : C1, EI et C4, EI, pour les trois tronçons de digue évalués, ainsi que sur le score de l’indicateur de performance. Par exemple, pour le tronçon, Mas Cazeneuve l’évaluation de C1, EI passe de bonne (score de 9) à mauvaise (score de 2) avec la prise en compte de la végétation arborescente. Ainsi, la performance vis-à-vis de l’érosion interne passe de mauvaise (score de 3) à passable (score de 6) respectivement avec et sans prise en compte de la végétation arborescente, soit un écart de trois points sur l’échelle quantitative avec changement de deux catégories. Les résultats de performance du tronçon du Bois de Beaumont sont assez similaires avec ceux obtenus pour le Mas Marignan : dégradation d’un point sur l’échelle quantitative si prise en compte de la végétation mais sans changement de catégorie contrairement au tronçon du Mas de Cazeneuve (Tableau 29). La prise en compte de la végétation arborescente dans le modèle d’évaluation de la performance vis-à-vis du mécanisme d’érosion interne permet d’affiner celui-ci et de se rapprocher de la performance réelle de ces ouvrages. L’évaluation de la performance des trois tronçons vis-à-vis du mécanisme de détérioration par affouillement montre que la prise en compte de la végétation arborescente n’est pas négligeable dans la dégradation de la performance des critères fonctionnels. Les critères C1, AFF et C3, AFF ne sont pas évalués car les tronçons ne possèdent pas de protection du corps de digue et de la fondation. Par contre l’effet de la dégradation de l’évaluation de C2, AFF «Résistance à l’affouillement du corps de digue côté cours d’eau » due à la présence de végétation est avéré pour le tronçon du Mas de Cazeneuve (Tableau 30) qui passe d’une performance médiocre à mauvaise lorsque la végétation arborescente est prise en compte (soit une perte de deux points sur l’échelle et un changement de catégorie). Il n’y a pas eu d’effet sur le score de la digue de Marignan bien que de gros arbres étaient tout de même présents. Il ressort de ces applications qu’un travail de réflexion est encore nécessaire autour de la formalisation de l’indicateur IE2.1 «Aspect de la population d’arbres » ou bien sur la prise en compte la présence d’arbres dans l’évaluation du composant « fondation ». La végétation arborescente n’est pas prise en compte dans l’évaluation de C2, AFF du tronçon du Bois de Beaumont car celle-ci n’est présente que côté zone protégée de la digue (Tableau 30). Nous rappelons que les formalisations et les structures d’agrégation des indicateurs d’état permettant l’évaluation de chacun des critères fonctionnels n’étaient pas achevées lors de l’application réalisée sur les digues du Petit Rhône. La mauvaise formalisation des indicateurs d’état IE4.1, IE4.2 et IE4.3 et les informations limitées disponibles sur les tronçons du Mas de Cazeneuve et du bois de Beaumont expliquent l’absence de résultats pour l’évaluation de C4, AFF puis de l’indicateur de performance IP, EI pour ces tronçons (Tableau 30). Les indicateurs d’état ont été modifiés, complétés 168 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques et / ou affinés à la suite de ces applications de terrain lors d’une séance de travail spéciale avec le groupe d’expertise. 169 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Tableau 29. Synthèse des résultats des applications réalisées sur les tronçons de digue du petit Rhône. Evaluation de la performance par le modèle des critères fonctionnels et de l’indicateur de performance avec ou sans prise en compte de la végétation arborescente vis-à-vis du mécanisme de détérioration par érosion interne. Localisation Mas de Marignan Végétation 6 Mas de Cazeneuve 2 Bois de Beaumont 5 C1, EI Sans végétation 8 C2, EI C3, EI 6 10 Végétation 3 9 4 10 6 8 4 10 / C4, EI Sans végétation 5 C5, EI C6, EI C7, EI C8, EI IP, EI Sans végétation 6 8 10 6 10 Végétation 5 9 7 10 8 10 3 6 8 8 10 8 10 4 5 Tableau 30. Synthèse des résultats des applications réalisées sur les tronçons de digue du petit Rhône. Evaluation de la performance par le modèle des critères fonctionnels et de l’indicateur de performance avec ou sans prise en compte de la végétation arborescente vis-à-vis du mécanisme de détérioration par affouillement. Localisation Mas de Marignan C1, AFF Végétation Sans végétation / / C2, AFF Végétation Sans végétation 5 5 C3, AFF Végétation Sans végétation / / C4, AFF 3 Végétation 3 IP, EI Sans végétation 3 Mas de Cazeneuve / / 3 5 / / / / / Bois de Beaumont / / / 7 / / / / / 170 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques 2.3. Vérification de la reproductibilité et de la répétabilité des résultats L’utilisation par les ingénieurs des grilles de formalisation permettant l’évaluation de chacun des indicateurs d’état a permis de faire apparaitre les améliorations nécessaires à apporter à la description initiale. En effet, certaines grilles ont suscité des interrogations auprès des ingénieurs évaluateurs qui n’ont de fait, pas pu évaluer les indicateurs correspondants. Nous nous sommes également attachés à vérifier la reproductibilité des notations entre les différents ingénieurs pour les autres indicateurs. La dispersion des notes attribuées aux différents indicateurs d’état est importante à caractériser afin de vérifier la reproductibilité des évaluations de chaque indicateur à partir de sa grille de formalisation. Nous présentons une partie des traitements effectués afin de vérifier la reproductibilité de l’utilisation des grilles réalisées pour les indicateurs relevant de l’évaluation de la performance du corps de digue vis-à-vis du mécanisme de détérioration par érosion interne du tronçon de Marignan. 2.3.1. Reproductibilité et répétabilité des notations des indicateurs d’état par les « experts » Nous comparons en premier lieu la reproductibilité de l’utilisation des grilles à travers les résultats des notations individuelles de chacun des trois experts. La Figure 88 représente les notations de chacun des indicateurs d’état relatifs à l’évaluation par le modèle du critère C1, EI « Perméabilité du corps de digue ». Nous considérons que le changement d’un point sur l’échelle de notation n’influe pas sur la qualité de la formalisation de l’indicateur (influence à partir d’un écart supérieur à deux points). Dans cet exemple, c’est le cas des indicateurs IE1.3 et IE1.6. Les indicateurs IE1.2, IE1.4 et IE1.5 ont obtenu les mêmes notations. Une précision a dû être apportée à la formalisation de l’indicateur d’état IE1.7 « Degré de décomposition de la souche ou des racines ligneuses d’un individu ». En effet, le fait que des racines ligneuses puissent être en décomposition sur un individu vivant était envisagé dans la première version de la grille mais cette possibilité amène à trop d’interrogations quant à l’attribution d’une note. La discussion consensuelle entre les experts a abouti à la décision de ne prendre en compte que les individus morts pour IE1.7. Figure 88. Représentation des notations des indicateurs d’état relatifs au critère C1, EI « Perméabilité du corps de digue» par chacun des trois experts (IE : Indicateur d’Etat ; Ci : critères) La Figure 89 illustre les notations des indicateurs d’état réalisées par les experts pour l’ évaluation de C2, EI « Résistance du corps de di gue à l’érosion interne ». Les grilles des indicateurs IE 2.3 « Sensibilité du corps de digue à l’érosion interne pour la charge permanente de la crue de référence », IE2.4 « Sensibilité de la discontinuité pour la charge permanente de la crue de référence » et IE2.5 « Dur ée de la cru e » sont à améliorer en modifiant et affinant les r éférence s précédemment établies. En effet, dans les trois cas, l’un des experts donne une note variant de plus de deux points par rapport aux deux autres. L’expert 3 donne par exemple une note de 0 à l’indicateur IE2.5. La reproductibilité des notations est donc discutable. Il s’agit de comprendre les raisons qui 171 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques entraînent ces écarts de notations et à modifier en conséquence l’échelle de notation ou la définition de l’indicateur. Figure 89. Représentation des notations des indicateurs d’état relatifs au critère C2, EI « Résistance à l’érosion interne du corps de digue » par chacun des trois experts (IE : Indicateur d’Etat ; Ci : critères) 2.3.2. Evaluations des critères fonctionnels et d’un indicateur de performance à partir des notations individuelles des indicateurs d’état par les « experts » Nous calculons les scores des critères fonctionnels C1, EI et C2, EI pour les trois experts (Figure 90). Le critère C3, EI a été évalué à dire d’ « expert » comme très bon (note de 10) par les trois experts puisque aucun ouvrage traversant ni terrier d’animaux n’a été relevé sur le terrain. Figure 90. Représentation des résultats obtenus par le modèle pour l’évaluation des critères fonctionnels pour chacun des trois experts (C1, EI « Perméabilité du corps de digue », C2, EI « Résistance du corps de digue à l’érosion interne » et C3, EI « Singularité dans le corps de digue ») Seul C1, EI montre une différence de score entre les experts. L’expert 1 qui avait noté l’indicateur IE1.7 comme très bon (10) obtient après calcul par le modèle un score passable (6) pour le critère C1, EI. Les deux autres experts obtiennent un score médiocre (4). Ces résultats montrent que le poids de l’indicateur IE1.7 dans le modèle d’agrégation n’est pas négligeable. La nécessité d’amélioration de la grille de formalisation de cet indicateur est également confirmée par les différences observées au niveau du résultat du critère. Notons que pour comprendre plus finement l’influence de chaque indicateur sur le résultat final, nous aurions pu envisager de réaliser une analyse de sensibilité. 172 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Malgré les différences observées entre les notations des indicateurs d’état IE2.3, IE2.4 et IE2.5, nous n’obtenons aucun écart entre les résultats du critère C2, EI pour les trois experts. Le modèle d’agrégation compense les écarts de note entre les indicateurs mais pour plus de sécurité vis-à-vis des résultats l’amélioration des grilles est tout de même nécessaire. Finalement, le résultat du calcul par le modèle de la performance du corps de digue pour chacun des experts donnent un score de 7 soit, une performance passable du corps de digue vis-à-vis du mécanisme de détérioration par érosion interne. Ce résultat est notamment dû au fait que le critère, C2, EI, a un poids plus important que C1, EI dans le modèle d’agrégation des critères fonctionnels. Lors de la notation consensuelle des experts (Figure 82), le résultat de performance du corps de digue obtenu est également passable : score de 6, soit une variation d’un point sur l’échelle de notation sans changement de catégorie. Les résultats obtenus par chaque expert pour l’évaluation des critères fonctionnels et l’indicateur de performance du corps de digue vis-à-vis du mécanisme d’érosion interne reflètent leur opinion. Il en est de même pour les autres composants de l’ouvrage (fondation et interface) ainsi que pour les autres tronçons évalués. Concernant l’évaluation des tronçons vis-à-vis du mécanisme d’affouillement, les résultats n’ont pas été comparés puisque le développement des grilles et des modèles d’agrégation n’était pas achevé au moment de l’application terrain. 2.3.3. Reproductibilité des notes par l’ensemble des évaluateurs Pour vérifier la reproductibilité des notations des indicateurs d’état à partir des grilles développées, nous testons les différences de l’ensemble des notes attribués par chaque évaluateur en scindant ces derniers en deux groupes : «experts » et « ingénieurs » (ingénieurs confirmés, ingénieur débutant, ingénieurs stagiaires). Pour ces deux groupes nous avons calculé, à partir des notes individuelles de chaque évaluateur, un minimum, un maximum et une moyenne. La Figure 91 illustre les résultats obtenus pour l’évaluation de C1, EI « Perméabilité du corps de digue ». Figure 91. Graphique représentant les notations des indicateurs d’état par les groupes d’évaluateurs « experts » et « ingénieurs » et résultat de l’évaluation du critère C1, EI « Perméabilité du corps de digue » à partir du modèle développé pour ces deux groupes Nous observons peu de différence entre les moyennes des deux groupes d’évaluateurs. Comme dans le cas des comparaisons des notations individuelles entre les trois experts, aucun écart entre les résultats des deux groupes ne dépasse un point. A l’intérieur de chaque groupe, nous observons les variations de note minimale et maximale pour les différents indicateurs d’état. L’indicateur d’état IE1.7 comporte des écarts importants autant pour le groupe d’« experts » que pour celui d’« ingénieurs ». Des précisions dans la formalisation de cet indicateur ont été apportées notamment par le fait que la décomposition est désormais prise en compte uniquement sur des individus morts 173 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques (partie 4, chap. 1, section 2.3.1). La différence des résultats de C 1 , EI est acceptable puisque nous obtenons une différence d’un point sur l’échelle de notation entre les deux groupes. Ces résultats tendent à montrer que les formalisations réalisées semblent suffisamment précises pour être utilisées par des ingénieurs non qualifiés. 174 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Chapitre 2. Applications sur des barrages en remblai Dans le cadre du projet RISBA, la performance vis-à-vis du mécanisme de détérioration par érosion interne de 3 barrages italiens et 4 barrages français a été évaluée en utilisant les modèles développés (Figure 92). Parmi ces sept ouvrages, nous avons rencontré différents types de petits barrages, aucun d’eux n’étant ausculté. Nous avons réparti ces ouvrages en deux grandes catégories par rapport à la présence ou non de systèmes de drainage et en sous-catégories en fonction du type d’étanchéité (étanchéité interne ou masque) (Figure 92). Figure 92. Les différentes applications réalisées sur des petits barrages L’évaluation de la performance vis-à-vis de l’érosion interne implique trois fonctions : étanchéité, drainage et résistance à l’érosion interne. La fonction d’étanchéité présentée dans la partie 3 (partie 3, chap. 4, section 2, Figure 71) concernait les barrages en remblai homogène. D’autres indicateurs doivent être évalués dans le cas des autres types de barrages pour l’évaluation de l’étanchéité intrinsèque de l’ouvrage. Ces indicateurs d’état sont extraits de Curt (2008) et listés dans le Tableau 31. Les indicateurs d’état spécifiques à l’évaluation de la végétation arborescente restent inchangés. 175 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Tableau 31. Indicateurs d’état de la fonction d’étanchéité pour les autres types de barrages étudiés Type de barrage Barrage en remblai avec masque amont en béton Indicateurs d’état - Barrage en remblai avec masque amont en argile - Fonction étanchéité du remblai Barrage en remblai zoné - Fissuration des dalles Qualité du béton Mouvement différentiel au niveau des joints Intégrité des joints Glissement du talus amont Perméabilité du matériau du masque Fissures de retrait, dessiccation Perméabilité du matériau du noyau Gradient hydraulique Côte d’arase supérieure du noyau par rapport aux plus hautes eaux (PHE) Quel que soit le type de barrage, l’étanchéité intrinsèque de la fondation est évaluée par l’indicateur d’état « Perméabilité de la fondation ». Cet indicateur est noté à dire d’expert. Pour les ouvrages en remblai équipés de systèmes de drainage, les indicateurs d’état directs « Fuites, indices de fuites » et / ou « Zone humide en zone de pied aval » (dans le cas du composant fondation) permettent l’évaluation de la fonction drainage du remblai et de la fondation. Dans le cas où les indicateurs d’état directs ne sont pas activés, la fonction drainage du remblai et de la fondation est évaluée à l’aide des indicateurs d’état suivants :     état visuel de l’exutoire du tapis drainant (Curt, 2008) ; état visuel du collecteur de drainage et / ou de la canalisation d’évacuation (Curt, 2008) ; état visuel de l’environnement de l’exutoire du tapis drainant (re à la densité de végétation arborescente présente au niveau de cet exutoire) ; Zone humide loin du pied aval (uniquement pour la fondation) (Curt, 2008). Pour l’ensemble des types de barrages, la fonction de résistance à l’érosion interne est évaluée à l’aide de l’indicateur d’état « Sensibilité à l’érosion interne pour la retenue au niveau normal des eaux ». La notation des indicateurs d’état pour l’évaluation de la performance des trois barrages italiens (Grengia, O... et A...) a été réalisée par trois ingénieurs experts : deux ingénieurs italiens (identifiés indistinctement comme « experts 1 » et un ingénieur français (identifié « expert 2 »). Lors des notations individuelles, les deux experts italiens ont noté les indicateurs d’état de manière consensuelle. Pour les barrages français, deux ingénieurs (1 ingénieur expert et 1 ingénieur « junior ») ont réalisé les évaluations. Les notations sont ensuite assemblées par consensus, dans une note unique pour chacun des indicateurs. Nous présentons dans ce chapitre les résultats de l’évaluation du barrage de Grengia en Italie, puis une synthèse des résultats obtenus pour les autres barrages évalués et enfin une discussion est menée autour des résultats obtenus. L’ANNEXE 6 présente un bref descriptif des autres barrages évalués ainsi que les résultats détaillés. 176 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques 1. Evaluation du barrage de Grengia (Italie) 1.1. Description du barrage Le barrage de Grengia est situé à une altitude d’environ 480 m dans la région de Cunéo. Il a été construit en 1971 et a une double fonction : d’une part, il permet l’irrigation des cultures de kiwis et de pêchers situées en aval et d’autre part, il permet la pratique de la pêche sportive. Ce barrage en remblai est de type homogène et a été réalisé en déblai-remblai. Il ne possède aucun système de drainage. Il a une hauteur d’environ 10 m pour une capacité maximale avoisinant les 30 000 m3. L’ouvrage a été équipé en 2005 de piézomètres et de bornes topographiques. Cependant, ces instruments d’auscultation n’étant pas relevés, nous considérons ce barrage comme non équipé. En 2012, des essais géotechniques visant à statuer sur la stabilité de l’ouvrage ont été réalisés. Deux sondages carottés, ainsi que deux essais pénétrométriques SPT ont permis de connaître respectivement la constitution stratigraphique du remblai et de la fondation ainsi que ses principales caractéristiques géotechniques. Une végétation arborescente est présente sur le bord aval du couronnement de l’ouvrage (Figure 93). Figure 93. Répartition homogène des arbres sur le couronnement aval du barrage de Grengia, Italie (photo : Mériaux P., 2014) Différentes essences d’arbres matures bordent ce couronnement. Nous y rencontrons des conifères (pin, épicéa...) et un feuillu (chêne). Sur certains profils, des souches sont présentes (toujours sur le couronnement aval de l’ouvrage). Les propriétaires témoignent de coupes d’arbres effectuées en 2004. 1.2. Evaluation des indicateurs d’état Après avoir pris connaissance de l’ensemble des informations disponibles à travers le dossier d’ouvrage et des renseignements apportés par le propriétaire, un profil, à la fois représentatif de l’ouvrage et intéressant vis-à-vis du diagnostic de la végétation arborescente, a été choisi par le groupe d’experts vers le point le plus haut du barrage (Figure 94). 177 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Figure 94. Profil choisi par le groupe d’experts pour l’évaluation de la performance du barrage de Grengia (Italie) vis-à-vis du mécanisme de détérioration par érosion interne – (photo : Bambara G., 2014) Sur ce profil de 5 m de largeur rive à rive, la crête a une largeur de 10 m. Le talus aval présente une rupture de pente : 80% en haut, puis 70% en aval. La végétation arborée sur le couronnement aval du profil est abondante : entre 2 et 5 individus par 10 m2. On y retrouve 3 individus vivants : 3 conifères et 2 individus morts (conifères) et 1 ayant rejeté (feuillu) après coupe en 2004. Le diamètre des individus est supérieur à 30 cm. Afin d’illustrer l’évaluation des indicateurs d’état spécifiques à la végétation arborescente, nous présentons les notations réalisées sur les indicateurs d’état relatifs à l’évaluation de la performance de la fonction étanchéité du remblai de l’ouvrage (Tableau 32). En fonction des informations disponibles, certains de ces indicateurs ne peuvent pas être évalués par les experts et, le cas échéant, sont notés « non renseigné (NR) ». Le Tableau 32 présente les notes de l’ensemble des indicateurs d’état données par les experts de manière individuelle et consensuelle afin d’évaluer la performance du composant remblai du barrage de Grengia vis-à-vis du mécanisme de détérioration par érosion interne. L’ANNEXE 7 donne les notes des indicateurs d’état permettant d’évaluer la performance des autres composants (fondation et interface remblai-fondation). 178 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Tableau 32. Notation des indicateurs d’état pour l’évaluation de la performance du composant « remblai » du barrage de Grengia (NR : Non Renseigné) Composant Fonctions Etanchéité du remblai Remblai (zone 2 de l’ouvrage) Résistance à l’érosion interne du remblai Indicateurs d’état Notes experts 1 Notes expert 2 Notes consensuelles Fuites ou indices de fuites 10 10 10 Perméabilité du remblai 5 5 5 Densité des individus 3 3 3 Volume racinaire par individu 3 3 3 Type de structure racinaire par individu 3 5 5 Degré de décomposition de la souche ou des racines ligneuses d’un individu 6 4 5 Fontis cône d’affaissement 10 10 10 Tassement différentiels NR NR NR Fuites localisées et chargées 10 10 10 Sensibilité du remblai à l’érosion interne pour la retenue à niveau normal des eaux 4 4 4 Aucune fuite ou indice de fuite n’a été observé sur le remblai sensu stricto, les experts ont donc noté les autres indicateurs d’état permettant l’évaluation de la performance de la fonction étanchéité. Le diagramme radar présenté en Figure 95 illustre les résultats de la notation individuelle des indicateurs d’état par les experts. 179 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Figure 95. Evaluation individuelle par les experts des indicateurs d’état relatifs à la performance de la fonction étanchéité du barrage de Grengia Le diagramme radar (Figure 96) illustre les résultats de la notation consensuelle des indicateurs par les experts. Figure 96. Evaluation des indicateurs d’état relatifs à la performance de la fonction étanchéité (notation consensuelle) du barrage de Grengia La notation individuelle ou par consensus de la perméabilité intrinsèque du remblai est la même pour les experts 1 et l’expert 2 : note de 5, soit une perméabilité intrinsèque médiocre. Deux indicateurs présentent les mêmes notes en individuel et par consensus : « Densité des individus » et « Volume racinaire par individu ». Le profil choisi présente entre 2 et 5 individus par 10 m2 (Figure 94). 180 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques L’indicateur d’état « Densité des individus » a par conséquent été évalué comme mauvais (note égale à 3) conformément aux références établies lors de la formalisation de cet indicateur que ce soit lors de la notation individuelle ou consensuelle. Pour évaluer l’indicateur d’état « Volume racinaire par individu », le groupe d’experts a mesuré le diamètre au collet des plus gros individus. Ce dernier étant supérieur à 30 cm, l’indicateur a été évalué comme mauvais (note égale à 3) quel que soit le type de notation (individuelle ou consensuelle). Pour ces deux indicateurs d’état, les grilles de formalisation établies permettent une évaluation reproductible par différents utilisateurs. L’indicateur d’état « Type de structure racinaire des individus » a été évalué par le groupe d’experts à partir de la clef d’aide à l’identification de la structure racinaire potentielle d’un individu basée sur des paramètres déterminant la structure racinaire d’un arbre (type de sol, accès à l’eau). Compte tenu de ces paramètres, la végétation arborescente du barrage de Grengia présente potentiellement une structure racinaire mixte (racines horizontales et pivots). Lors de la notation individuelle, les résultats diffèrent entre les experts 1 (note de 3) et l’expert 2 (note de 5). En effet, la description des références de cet indicateur est difficile à réaliser et des améliorations doivent encore être produites pour permettre à l’expert d’estimer la structure racinaire d’un individu. Par prudence, la discussion consensuelle entre les experts les amène à évaluer l’indicateur d’état « Type de structure racinaire des individus » comme étant médiocre (note égale à 5) car conformément aux références établies lors de la formalisation de cet indicateur, ils supposent une structure racinaire mixte. Enfin, la note de 5 (médiocre) pour l’indicateur « Degré de décomposition de la souche ou des racines ligneuses d’un individu» a été attribuée de façon consensuelle par les experts sur la base des éléments fournis dans la grille de formalisation, compte tenu de l’état de dégradation de la souche de conifère (Figure 97 a) et des rejets observés sur la souche de chêne (Figure 97 b). Lors de la notation individuelle des experts, des résultats différents ont été donnés (Figure 95). En effet, la coupe des arbres qui date d’une dizaine d’années ne permet pas aux experts de se baser sur les connaissances dont nous disposons actuellement (évolution de la décomposition des racines jusqu’à 4 années de vieillissement pour les conifères et 6 années de vieillissement pour les feuillus). Cependant, au vu du bon état général des souches de conifères et du rejet important de la souche issus d’un feuillu qui démontre qu’elle n’est pas totalement morte, l’extrapolation qui a été faite par l’expert 2 (spécialisé en barrages et en végétation) reste proche de la note donnée dans les références établies de l’indicateur d’état «Degré de décomposition de la souche ou des racines ligneuses d’un individu ». Ainsi, pour les racines ligneuses de conifères de milieu montagnard coupés depuis 4 années, les références donnent une note passable (6-7), l’expert 2 a quant à lui extrapolé globalement une note médiocre (4) pour ce profil. La grille de formalisation actuelle va être complétée dans les prochaines années pour prendre en compte des durées plus longues de décomposition. Figure 97. Souche de conifère morte (a) et souche de chêne ayant rejeté (b) sur le couronnement aval du barrage de Grengia, Italie (photo : Bambara G., 2014) 181 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques 1.3. Evaluation de la performance des fonctions et de la performance des composants de l’ouvrage vis-à-vis du mécanisme de détérioration par érosion interne La performance de la fonction étanchéité du remblai a été calculée par le modèle en considérant, d’une part, les indicateurs relatifs à la végétation dans son état actuel (note obtenue : 2), d’autre part, sans considérer la présence de la végétation, en imaginant le barrage comme n’ayant jamais eu d’arbres (note obtenue : 5) (Figure 98). Nous pouvons en conclure que la présence de végétation dégrade de façon non négligeable la performance de cette fonction. Figure 98. Evaluation par le modèle de la performance de la fonction étanchéité du remblai avec et sans prise en compte de la végétation Nous présentons sur la Figure 99, les évaluations de la performance du remblai, de l’interface remblai-fondation et de la fondation meuble vis-à-vis du mécanisme d’érosion interne obtenues par le modèle. Figure 99. Evaluation par le modèle de la performance des composants du barrage de Grengia vis-à-vis du mécanisme de détérioration par érosion interne Nous relevons que les notes de performance obtenues par le modèle reflètent l’opinion des experts sur la sécurité de cet ouvrage vis-à-vis du mécanisme d’érosion interne. 182 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Finalement, le modèle indique une performance mauvaise à médiocre. Le composant remblai du barrage a une performance plus défavorable que l’interface et la fondation :   mauvaise étanchéité due aux caractéristiques intrinsèques du barrage et à la présence de grands arbres dont certains ont été coupés, ce qui laisse présager la présence de racines décomposées et donc de chemins préférentiels pour l’eau ; performance médiocre de la fonction de résistance à l’érosion interne résultant d’une évaluation médiocre de l’indicateur « Sensibilité du remblai à l’érosion interne» (résultant elle-même de la forte pente du talus aval). Dans le cas où la végétation arborescente n’aurait pas été prise en compte, le composant remblai aurait eu une performance médiocre au même titre que la fondation et l’interface remblai-fondation. Pour la fondation, la performance médiocre résulte :   de la note de 4 attribuée à l’indicateur «Sensibilité de la fondation à l’érosion interne» du fait d’un gradient admissible (calculé par les experts à partir de la géométrie et de la résistance à l’érosion du matériau) évalué « médiocre » ; de la performance « médiocre » de la fonction étanchéité du fait de la « Fuite d’eau claire» observée par les experts lors de l’évaluation des indicateurs. En effet, la présence de fuites d’eau claire est un indicateur direct permettant d’obtenir directement l’évaluation de la performance de la fonction d’étanchéité. Si une fuite est présente, la performance de la fonction étanchéité sera au mieux médiocre selon la grille de formalisation établie de l’indicateur d’état « Fuite d’eau claire ». C’est le cas pour le barrage que nous évaluons étant donné que la fuite d’ claire n’est pas importante. Pour l’interface remblai – fondation, la performance médiocre (note obtenue de 4) s’explique de la même manière que pour la fondation. Ces résultats permettent de cibler les principaux points faibles de l’ouvrage qu’il est nécessaire de traiter et d’aller vers la proposition d’actions correctives comme par exemple un traitement de la végétation (extraction des arbres et des souches, apport de matériaux et retalutage). 2. Synthèse et discussion des résultats obtenus Cette partie synthétise sous forme de tableaux les résultats obtenus pour les autres applications réalisées dans le cadre du projet RISBA (Figure 92). Nous rappelons que l’ANNEXE 6 fournit un bref descriptif de chaque barrage. Un tableau par composant est présenté : remblai (Tableau 33), fondation (Tableau 34) et interface remblai-fondation (Tableau 35). Nous donnons :     La dénomination du barrage évalué ; La partie de l’ouvrage concernée par la présence de végétation arborescente pour l’évaluation du remblai de l’ouvrage (Figure 55). NB : pour l’évaluation de la fondation ou de l’interface, nous nous trouvons forcément en zone 4. S’il n’y a pas de végétation, l’indicateur d’état « Densité des individus » est égal à 10 ; La performance des différentes fonctions évaluées par le modèle en considérant la présence de végétation, puis sans la considérer (pour les fonctions étanchéité et drainage) ; La performance du composant vis-à-vis du mécanisme de détérioration par érosion interne en considérant la présence de végétation arborescente, puis sans la considérer. Cette démarche permet de comparer l’influence de la présence de végétation arborescente sur l’évaluation de la performance de chaque composant de l’ouvrage. La végétation arborescente vient en 183 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques effet dégrader l’évaluation de la performance de chacun des composants comme nous pouvons par exemple l’observer lors de l’évaluation de la performance du remblai du barrage Français des G... qui passe d’une bonne performance (score de 8) sans prise en compte de la végétation arborescente à une mauvaise performance (score de 3) avec la prise en compte de la végétation (Tableau 33). Par contre, dans le cas du barrage italien d’A..., nous n’observons pas de différences entre les résultats de performance avec ou sans prise en compte de la végétation. Pour ce barrage équipé d’un dispositif d’étanchéité par masque amont en béton conventionnel, la bonne performance de la fonction de résistance à l’érosion interne (score de 9) donne une bonne performance du composant remblai. Le poids du résultat de la performance de la fonction de résistance à l’érosion interne est plus élevée que celui de la fonction d’étanchéité ce qui permet d’obtenir une bonne performance du composant remblai (score de 9) suite à leurs combinaisons (Tableau 33) : les très bonnes caractéristiques de résistance à l’érosion interne contrecarrent l’apparition de ce phénomène même en cas d’une augmentation potentielle d’eau dans l’ouvrage du fait de la présence d’arbres. Pour les autres barrages qui ne possèdent pas de dispositif d’étanchéité et où la performance de la fonction de résistance à l’érosion interne est au maximum passable, l’influence de la présence de végétation arborescente sur le résultat de performance du composant considéré n’est pas nég able. A la suite de ces applications, une restitution des résultats a été réalisée avec le groupe d’experts. La formalisation de quatre indicateurs d’état a dû être améliorée. Pour deux de ces indicateurs, les écarts entre les notes des différents ingénieurs étaient trop importants d’une part du fait de la difficulté de certains des ingénieurs à utiliser la grille formalisation correspondante ou à cause de l’absence de données. Une meilleure définition a dans ce cas été donnée : c’est le cas de l’indicateur d’état « Sensibilité à l’érosion interne pour la retenue au niveau normal des eaux » permettant d’évaluer la performance de la fonction résistance à l’érosion interne et de l’indicateur d’état spécifique à la végétation arborescente « Type de structure racinaire par individu » permettant d’évaluer la performance de la fonction étanchéité. D’autre part, les données relatives à certains indicateurs d’état n’étaient pas disponibles, ce qui ne permettait pas d’utiliser le modèle. Ainsi, les indicateurs d’état préalablement établis : «Perméabilité du matériau », « Compactage » et « Granulométrie » ont été remplacés par un indicateur d’état unique : « Perméabilité du remblai » ce dernier permet à présent d’utiliser les données relatives à la perméabilité du matériau, au compactage ou à la granulométrie sans être pénalisé par l’indisponibilité d’une de ces données. Les références de l’indicateur d’état direct « Fuite d’eau claire » ont été modifiées afin d’être moins pénalisantes selon l’état de la fuite observée. Cette modification a notamment été réalisée suite à l’évaluation du barrage de Grengia où une note de 3 (mauvaise) aurait été trop pénalisante. Si la présence de fuites est avérée, la note pourra être au mieux de 5 soit évaluation médiocre. 184 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Tableau 33. Synthèse des résultats d’évaluation de la performance des fonctions et du composant « remblai » des barrages avec ou sans prise en compte de la végétation arborescente Composant Dénomination du barrage Remblai Barrage d’O... – Italie Barrage d’A... – Italie Barrage des G... France Barrage de P..P.. – France Barrage des B... – France Barrage des V... – France Perf. étanchéité (végétation) Perf. étanchéité (sans végétation) Perf. drainage (végétation) Perf. drainage (sans végétation) Perf. de résistance à l’érosion interne Perf. remblai (végétation) Perf. remblai (sans végétation) Parties 4 voire 3 2 7 / / 4 3 5 Parties 2 et 3 4 8 / / 9 9 9 Parties 2 et 3 4 8 3 8 4 3 8 Parties 1 voire 2 3 8 / / 6 3 8 Parties 3 et 4 5 7 7 8 5 5 8 Zone évalué avec présence de végétation Non évaluable par le modèle (informations insuffisantes) mais évaluation de la végétation sur deux profils P1 (zone 2 et 3) et P2 (zone 4) 185 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Tableau 34. Synthèse des résultats d’évaluation de la performance des fonctions et du composant « fondation » des barrages avec ou sans prise en compte de la végétation arborescente Composant Nom du barrage Barrage d’O... – Italie Barrage d’A...– Italie Fondation Barrage des G... France Barrage de P..P.. – France Barrage des B... – France Barrage des V... – France Type de barrage Remblai homogène sans drains ni instruments d’auscultation Remblai avec masque amont en béton sans drains ni instruments d’auscultation Remblai avec masque amont en argile drainé mais sans instruments d’auscultation Remblai homogène sans drains ni instruments d’auscultation Remblai zoné drainé (que le remblai) mais sans instruments d’auscultation Remblai zoné drainé mais sans instruments d’auscultation Perf. étanchéité (végétation) Perf. étanchéité (sans végétation) Perf. drainage (végétation) Perf. drainage (sans végétation) Perf. de résistance à l’érosion interne Perf. remblai (végétation) Perf. remblai (sans végétation) 2 6 / / 4 3 4 9 / / / 9 10 / / 6 / 8 4 / 8 / / Non évaluable par le modèle (informations insuffisantes) 3 4 / / / Non évaluable par le modèle (informations insuffisantes) 186 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Tableau 35. Synthèse des résultats d’évaluation de la performance des fonctions et du composant « interface remblai-fondation » des barrages avec ou sans prise en compte de la végétation arborescente Composant Nom du barrage Barrage d’O... – Italie Barrage d’A... – Italie Interface remblaifondation Barrage des G... France Barrage de P..P.. – France Barrage des B... – France Barrage des V... – France Type de barrage Remblai homogène sans drains ni instruments d’auscultation Remblai avec masque amont en béton sans drains ni instruments d’auscultation Remblai avec masque amont en argile drainé mais sans instruments d’auscultation Remblai homogène sans drains ni instruments d’auscultation Remblai zoné drainé (que le remblai) mais sans instruments d’auscultation Remblai zoné drainé mais sans instruments d’auscultation Perf. étanchéité (végétation) Perf. étanchéité (sans végétation) Perf. drainage (végétation) Perf. drainage (sans végétation) Perf. de résistance à l’érosion de contact Perf. remblai (végétation) Perf. remblai (sans végétation) 2 6 / / 3 2 3 4 8 / / 9 9 9 Pas d’évaluation de l’interface remblai-fondation car barrage drainé en remblai et en fondation Non évaluable par le modèle (informations insuffisantes) 3 4 / / 3 (à dire d’expert) 3 3 Pas d’évaluation de l’interface remblai-fondation car barrage drainé en remblai et en fondation 187 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques Chapitre 3. Synthèse La prise en compte de l’élément « végétation arborescente » dans les modèles d’évaluation de la performance des ouvrages hydrauliques en remblai vis-à-vis des mécanismes de détérioration par érosion interne et affouillement permet une amélioration des modèles existants. Elle vient dégrader l’évaluation de la performance de l’ouvrage. La prise en compte de la végétation arborescente dans les modèles permet donc de mieux représenter la réalité de ces ouvrages concernés par la présence de végétation et donc d’être plus sécuritaire vis-à-vis du risque lié aux mécanismes initiés ou aggravés par celle-ci. La robustesse de ces modèles a été vérifiée par le fait qu’ils sont capables de reproduire le raisonnement d’un expert. La procédure que nous avons suivie lors des applications nous permet de justifier ce point car il a été demandé aux experts de donner une note globale pour chaque critère fonctionnel ou fonction et pour l’indicateur de performance global (pour les digues) ou de chaque composant (pour les barrages) sans utilisation du modèle d’évaluation de la performance. La comparaison des résultats obtenus avec et sans utilisation du modèle quasiment comparables. Les évaluateurs qui ont pu réaliser la notation des différents indicateurs d’état lors des applications ont montré un vif intérêt à cette méthode. L’utilisation de la grille de formalisation pour la notation de chacun des indicateurs d’état leur a été explicitée avant le début de l’évaluation et ils ont pu facilement s’approprier cet outil. D’autre part, l’application des modèles sur des ouvrages réels a permis de :   vérifier que l’utilisation des indicateurs d’état à évaluer était répétable et reproductible, cette propriété est renforcée par le fait que plusieurs des évaluateurs n’étaient pas familiers avec ce type de méthode d’évaluation ; vérifier les formalisations des agrégations des indicateurs d’état pour l’obtention de la performance de chaque fonction (barrages) ou critère fonctionnel (digues). Le résultat obtenu par le modèle doit correspondre à l’avis de l’expert. Les modifications nécessaires ont ensuite été réalisées lors de séances de restitution auprès du groupe d’experts : une séance suite aux applications menées sur les barrages et une séance suite aux applications menées sur les digues. D’autres applications sont encore nécessaires afin de calibrer et valider les modèles développés. 188 Partie 4. Applications des modèles développés sur des cas réels d’ouvrages hydrauliques 189 Partie 5. Apports de la thèse et perspectives Partie 5 Apports de la thèse et perspectives Chapitre 1. Apports de la thèse Chapitre 2. Perspectives de la thèse 188 Partie 5. Apports de la thèse et perspectives 189 Partie 5. Apports de la thèse et perspectives Chapitre 1. Apports de la thèse Ce chapitre permet de synthétiser notre contribution pour l’évaluation de la performance des ouvrages hydrauliques en remblai tant au niveau méthodologique qu’opérationnel.
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f1f8bb41811728d99e9618ce16fc0e70_4
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Open Science
Various open science
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). Actes du Quatrième atelier Qualité des Données et des Connaissances (QDC 2008). Université de Sophia Antipolis, pp.101, 2008. &#x27E8;hal-00462378&#x27E9;
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Citons pour finir la méthode des k plus proches voisins (k-ppv ou k-NN). C’est cette méthode que nous avons utilisée dans notre approche. Les k-ppv sont en effet très simples à mettre en œuvre et permettent une implémentation rapide pour également fournir des résultats satisfaisants (Yang (1999)) ce qui a en partie motivé notre choix pour cet algorithme. De plus, cette méthode reste robuste sur des cas de données incomplètes, ce qui est assez fréquent pour des articles de blogs. Cette approche sera détaillée dans la section suivante. 3 L’algorithme des k plus proches voisins Le principe de l’algorithme des k-ppv (Cover et Hart (1967)) est de mesurer la similarité entre un nouveau document et l’ensemble des documents ayant été préalablement classés. Ces documents peuvent être considérés comme un jeu d’apprentissage, bien qu’il n’y ait pas de réelle phase d’apprentissage avec les k-ppv. Cet algorithme revient à constituer un espace vectoriel dans lequel chaque document est modélisé par un vecteur de mots. Un tel vecteur a pour dimension le nombre de mots de la base d’apprentissage. Chaque élément de ce vecteur est en effet constitué du nombre d’occurrences d’un mot issu de la base d’apprentissage. Les documents classés sont ordonnés de manière décroissante afin que le premier document soit celui ayant obtenu le meilleur score de similarité avec le document devant être classé. Suivant la valeur de k, il est ainsi effectué un classement des k documents les plus proches. La mesure de similarité la plus couramment utilisée est le calcul du cosinus de l’angle formé par les deux vecteurs de documents. Le cosinus entre deux vecteurs A et B vaut le produit scalaire de ces vecteurs A et B divisés par le produit de la norme de A et de B. Après avoir déterminé quels étaient les k plus proches voisins, il faut définir une méthodologie afin d’attribuer une classe au nouveau document. Il existe dans la littérature deux approches classiques décrites spécifiquement dans (Bergo (2001)) afin de répondre à cette problématique : - soit proposer de classer le document dans la même catégorie que celui ayant obtenu le meilleur score de similarité parmi le jeu d’apprentissage, - soit, si k > 1 de considérer les k documents les mieux classés. Alors nous pouvons attribuer la classe suivant plusieurs options. Une première méthode peut être de calculer parmi les k documents les plus proches, pour chaque catégorie, le nombre de documents appartenant à cette catégorie (1). Une seconde propose de prendre en compte le rang des k documents (2). Il s’agit pour toutes les catégories, d’effectuer la somme des occurrences d’une catégorie multipliée par l’inverse de son rang. Prenons par exemple un document d à classer parmi quatre classes, C1, C2, C3 et C4. Définissons k = 6. Considérons le classement suivant de dnew avec le jeu d’apprentissage D contenant les documents di : documents d1 d2 d3 d4 d5 d6 classe des documents C2 C2 C4 C4 C1 C4 rang 1 2 3 4 5 6 En utilisant la première approche (1), nous aurions attribué la classe C4 à dnew. En effet la classe C4 est celle qui possède le plus de documents parmi les k plus proches voisins (trois documents). La seconde approche (2) aurait quant à elle classé dnew dans C2. Nous obtenons en effet avec cette mesure par exemple pour la classe C1 : un seul document dans la classe au cinquième rang soit C1 = 1/5 = 0,2. Nous obtenons pour les autres classes C2 = 1,5, C3 = 0 et C4 = 0,75. Nous utiliserons dans nos expérimentations la première approche (1), celle-ci étant la forme la plus répandue comme décrite dans (Yang et Liu (1999)) en utilisant deux paramètres : - le seuil de classe, fixant un nombre minimal de termes devant appartenir à une classe pour qu’un nouveau document soit attribué à cette classe, - le seuil de similarité en dessous duquel, les candidats ne seront plus admis parmi les k plus proches voisins car étant jugés d’une similarité trop éloignée. 4 Les différentes approches utilisées Nous proposons dans ce papier des approches constituant des nouvelles représentations du corpus original en utilisant des connaissances grammaticales. Afin d’obtenir de telles connaissances, nous utilisons un étiqueteur grammatical. 4.1 L’étiqueteur grammatical TreeTagger Nous avons fait le choix de l’étiqueteur grammatical TreeTagger (Schmid (1995)), qui permet d’étiqueter des textes dans plusieurs langues dont le français. Il utilise des probabilités conditionnelles d’apparition d’un terme en fonction des termes précédents. Les probabilités sont construites à partir d’un ensemble de tri-grammes (constitués de trois étiquettes grammaticales consécutives). Le TreeTagger propose par exemple les résultats suivants pour la phrase : Les étiquettes grammaticales apportent une information supplémentaire. Les étiquettes grammaticales apportent une information supplémentaire. DET :ART NOM ADJ VER :pres DET :ART NOM ADJ SENT le étiquette grammatical apporter un information supplémentaire. La première colonne correspond au terme traité (forme fléchie), la seconde nous renseigne sur la catégorie grammaticale de ce terme et la dernière nous donne sa forme lemmatisée. Nous proposons, avec ses informations, différentes approches présentées dans la section suivante. 4.2 Les méthodes expérimentales Nous proposons d’utiliser des combinaisons de mots avec les catégories Nom (noté N), Verbe (V) et Adjectif (A). Cette approche consiste à reconstituer un corpus ne contenant que les mots appartenant à la combinaison définie. Prenons par exemple la combinaison V_N. Le corpus reconstitué ne contiendra que des verbes et des noms. Nous noterons ces méthodes M1, M2,..., M7 pour les combinaisons N, V, A, N_V, N_A, V_A et N_V_A. Nous définissons également les méthodes F et L pour respectivement le corpus avec des formes fléchies et le corpus sous forme lemmatisée1. La section suivante propose de présenter le protocole d’évaluation suivi et les résultats obtenus avec nos différentes approches. 5 Experimentations Afin de mener nos expérimentations, nous proposons de comparer les performances de l’algorithme des k-ppv en utilisant diverses méthodes. Nous utiliserons les appellations définies dans la section 4.2. Cette évaluation comprend plusieurs étapes : - Suppression des balises html et des mots outils (mots génériques revenant souvent dans le texte comme “donc”, “certain”, etc.) du corpus. - Application d’une des méthodes présentées. - Application d’un processus de validation croisée en segmentant les données en cinq sousensembles et utilisation des k-ppv pour catégoriser les articles. - Obtention d’une matrice de confusion et calcul du taux d’erreur. Le taux d’erreur, permettant de mesurer le taux d’articles mal classés, est défini ainsi : taux d’erreur = nombre d’articles mal classés nombre total d’ articles Nous définissons également le Tf-Idf (Term Frequency x Inverse Document Frequency) qui servira à réaliser une normalisation de nos données lors de nos expérimentations : Wij = tfij.log2 (N/n) avec : 1 La forme lemmatisée du corpus a été obtenue avec le TreeTagger QDC 2008 – 68 – N. Béchet et I. Bayoudh - wij = poids du terme Tj dans le document Di, - tfij = fréquence du terme Tj dans le document Di, - N = nombre de documents dans la collection, - n = nombre de documents où le terme Tj apparaît au moins une fois. Nous utilisons, dans le cadre de l’application des k-ppv, une valeur de 2 pour le seuil de classe et de 0.2 pour le seuil de similarité, valeurs jugées comme les plus appropriées à nos travaux de manière expérimentale. Rappelons que ces mesures peuvent impliquer que certains articles soient considérés comme non classés Nous proposons tout d’abord de mesurer l’apport d’une normalisation (le Tf-Idf) et d’une lemmatisation sur notre corpus en utilisant les approches L (forme lemmatisée) et F (forme fléchie). Le tableau 1 présente le taux d’erreur obtenu avec l’application de ces approches. Il montre que la lemmatisation du corpus a tendance à dégrader les résultats en termes de taux d’erreur. Cependant, en appliquant le Tf-Idf, cette tendance s’inverse avec de meilleurs résultats pour la forme lemmatisée (méthode L), cette approche obtenant le plus faible taux d’erreur de ce tableau. Les tableaux 2 et 3 présentent les matrices de confusions obtenues en utilisant TAB. 1 – Tableau évaluant l’apport de la normalisation et de la lemmatisation l’approche L et F avec le Tf-Idf dont les taux d’erreurs du tableau 1 sont issus. Ces tableaux montrent que l’approche utilisant les lemmes est meilleure que celle conservant les formes fléchies pour toutes les classes exceptée la classe alimentation. Nous constatons de plus que le nombre d’articles non classés est significativement plus important pour la méthode F (135 pour la méthode L contre 256 pour la méthode F). Ces résultats s’expliquent par le fait qu’une lemmatisation lève certaines ambiguïtés pouvant par conséquent influencer le classement établi par l’algorithme des k-ppv. TAB. 3 – Matrice de confusion obtenue en utilisant l’approche F avec normalisation Nous comparons ensuite dans le tableau 4 la méthode L avec normalisation, ayant obtenu le plus faible taux d’erreur, avec les méthodes M1 à M7 décrites dans la section 4.2. Nous constatons tout d’abord que sans l’utilisation du Tf-Idf, les méthodes M1, M4, M5, M6 et M7 réduisent le taux d’erreur obtenu par la méthode L, la méthode M4 minimisant ce taux. Nous montrons par ces résultats que les mots sélectionnés par ces méthodes sont plus porteurs de sens que ceux sélectionnés par les autres méthodes. Les méthodes M2 et M3, respectivement les méthodes contenant les verbes et les adjectifs, possèdent en effet moins d’informations que les noms (M1) ou les diverses combinaisons de catégories grammaticales (M4 à M7). La méthode M4 (les noms et les verbes) confirme ces bons résultats en tenant compte de l’application du Tf-Idf. Elle ne parvient cependant qu’à égaler la méthode L, là ou toutes les autres approches augmentent le taux d’erreur. Ces expérimentations montrent que les verbes et les adjectifs contiennent moins d’informations utiles comparé aux noms. Elles permettent aussi de montrer que l’association des noms_verbes, verbes_adjectifs et noms_verbes_adjectifs se révèlent être assez équivalente en termes d’informations alors que l’association noms_verbes permet une classification plus fine. TAB. 4 – Tableau évaluant l’utilisation d’outils grammaticaux 6 Conclusions Nous avons présenté dans cet article une catégorisation automatique d’articles de blogs afin de répondre aux besoins de la Société PaperBlog dans ce domaine. Nous avons pour cela QDC 2008 – 70 – N. Béchet et I. Bayoudh utilisé l’algorithme des k plus proches voisins que nous avons confronté à diverses approches utilisant des informations grammaticales. Celles-ci ont montré des résultats satisfaisants sans effectuer de normalisation, mais restent limitées dans le cas contraire. Nous avons également identifié quelles catégories grammaticales étaient les plus porteuses de sens. Cela nous permet d’envisager de futures approches permettant d’effectuer des pondérations suivant les catégories grammaticales. Nous avons par exemple établi que les noms sont les plus porteurs de sens et pourraient se voir attribuer un poids plus important dans le cadre de l’utilisation de l’approche des k-ppv. Nous envisageons pour finir d’expérimenter nos méthodes avec d’autres méthodes de catégorisations. Remerciements Nous remercions la Société PaperBlog, en particulier Nicolas Verdier et Maxime Biais, pour la participation à ces travaux ainsi que pour le partage des données qui ont pu être expérimentées. Références Bergo, A. (2001). Text categorization and prototypes. Technical report. Borko, H. et M. Bernick (1963). Automatic document classification. J. 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QDC 2008 – 72 – Comment déterminer les définitions les plus pertinentes d’un sigle donné? Application au Domaine Biomédical Ma thieu Roche , Viol aine Prince LIRMM , Université Montpellier 2 – CNRS UMR5506 , { mroche,prince}@lirmm . fr Rés umé . Nos travaux sont fondés sur la tâche de désambiguïsation de sigles qui peuvent posséder plusieurs définitions (ou expansions). Notre approche permet de déterminer, pour un sigle donné (par exemple, "SIG"), la définition adaptée (par exemple, "Service d’Information du Gouvernement"). Pour ce traitement, les mesures de qualité FD et FDC sont proposées afin de classer les définitions par pertinence. Ces mesures s’appuient sur des approches statistiques et sur le nombre de pages retournées par des moteurs de recherche. Une é valuation de ces mesures de qualité est effectu ée sur des données bio médicales . 1 Introduction L’étude des entités nommées est une tâche utile pour de nombreuses applications en fouille de textes telles que la recherche et/ou l’extraction d’informations. Dans cet article, nous nous intéressons à une entité nommée spécifique appelée "sigle". Un sigle est un ensemble de lettres initiales servant d’abréviation, par exemple le sigle SIG peut être associé à la définition (aussi appelée expansion) "Système d’Information Géographique". Cette forme réduite des entités nommées est utile lorsque celles-ci se répètent de manière très fréquente dans les textes. Avec la masse de données numériques aujourd’hui disponibles en différentes langues, les sigles sont très utiles et très présents aussi bien dans des textes de thème général (par exemple, SNCF, ANPE, etc) ou spécialisés (par exemple, TAL, IA, etc). Le problème qui se pose tient au fait qu’un même sigle peut posséder plusieurs sens (problème lié à la polysémie). À titre d’exemple, SIG peut signifier "Service d’Information du Gouvernement", "Services Industriels de Genève", "Solde Intermédiaire de Gestion", "Système d’Information Géographique". Chacune des définitions appartient à un domaine particulier (politique, industrie, banque, informatique). Précisons que les sigles issus d’un domaine général ne sont pas nécessairement adaptés pour un domaine spécialisé. Par exemple, le sigle SIG issu d’un domaine biomédical a une signification extrêmement différente comparativement aux expansions précédemment proposées pour ce sigle : "strong ion gap", "small inducible gene", etc. Les travaux issus du projet ProSigles1 traitent de l’extraction des sigles dans les textes (Matviico et al. (2008)) et de la mise en œuvre d’une fonction de rang pour classer les définitions des sigles (Roche et Prince (2007)). Nous montrerons de quelle manière l’approche 1 Projet financ é par le Scientifique de ’ 2, Mesures de qualité pour déterminer les définitions de sigles pertinentes présentée dans cet article se distingue de nos travaux précédents. Le but de l’étude présentée ici consiste à sélectionner les définitions les plus pertinentes dans un contexte donné (domaine). La définition adaptée d’un sigle qui n’est pas défini dans un document peut alors être retrouvée par notre approche (Roche et Prince (2007)). Ceci peut être utile pour les tâches de classification de textes. Une deuxième tâche appropriée à notre approche serait d’enrichir des requêtes de domaines généraux ou spécialisés dans le cadre de la recherche documentaire. Par exemple en biologie, un utilisateur pourrait effectuer une requête avec le sigle "TU" dans une base de données bibliographique spécialisée telle que Medline. Plusieurs définitions sont possibles pour ce sigle2. Ainsi, en déterminant la définition adaptée, notre méthode permettrait d’améliorer significativement la recherche documentaire par l’expansion de la requête originale. Cette expansion pourrait par exemple être une disjonction (opérateur "OR") du sigle et de sa définition afin de retourner un nombre de documents plus important (amélioration du rappel). La conjonction du sigle et de la définition (opérateur "AND") permettrait quant à elle d’obtenir des documents plus pertinents (amélioration de la précision). La section 2 résume l’état de l’art sur les méthodes d’extraction des définitions des sigles dans les textes. La section 3 présente une mesure de qualité que nous avons mise en œuvre pour classer ces différentes définitions. L’évaluation de cette mesure est alors proposée en section 4. Enfin, une discussion et quelques perspectives à notre travail sont proposées en sections 5 et 6. 2 Résumé de l’état de l’art De nombreuses méthodes pour extraire les sigles et leur(s) définition(s) ont été développées (Yeates (1999); Larkey et al. (2000); Chang et al. (2002)). La plupart des approches de détection de sigles dans les textes s’appuie sur l’utilisation de marqueurs spécifiques. La méthode développée par Yeates (1999) consiste dans un premier temps à séparer les phrases par fragments en utilisant de tels marqueurs (parenthèses, points, etc) comme frontières. L’étape suivante a pour but de comparer chaque mot de chacun des fragments avec les fragments précédents et suivants. Ensuite, les couples sigles/définitions sont testés. Les candidats sigles sont retenus si les lettres des sigles sont mises en correspondance avec les premières lettres des définitions potentielles. Dans notre cas, le couple "SIG / Système d’Information Géographique" est un candidat sigle. La dernière étape consiste à utiliser des heuristiques spécifiques pour retenir les candidats pertinents. Ces heuristiques s’appuient sur le fait que les sigles ont une taille plus petite que leur définition, ils sont en majuscule, les définitions des sigles ayant une longueur importante ont tendance à posséder davantage de mots outils (par exemple, les articles et les prépositions), etc. De nombreuses approches (Larkey et al. (2000); Chang et al. (2002)) utilisent des méthodes similaires fondées sur la présence de marqueurs associés à des heuristiques spécifiques. Certains travaux récents (Okazaki et Ananiadou (2006b)) consistent à associer ces approches à des mesures statistiques spécifiques (likelihood LF) pour améliorer la qualité des méthodes d’acquisition de dictionnaires. 2 Définitions données par le logiciel Acromine (http ://www.nactem.ac.uk/software/acromine/) : testosterone undecanoate, thiourea, thi ouracil, tubercul in units, toxic unit, Tetra nychus ur tica e, T unde canoate, tra nscription unit , traumati c ulcers, transrecta l ultrasonography , temperature, transvaginal ultrasonography QDC 2008 – 74 – M. Roche et V. Prince Dans notre cas, nous ne recherchons pas les définitions des sigles dans les textes mais nous nous intéressons au classement des définitions propres aux sigles. Ainsi, comme nous allons le montrer dans les sections suivantes, notre approche a davantage de similarités avec les travaux de Turney (2001) qui utilisent le Web pour établir une fonction de rang. 3 Mesure de qualité pour filtrer les définitions des sigles 3.1 Mesures statistiques Dans la littérature, de nombreuses mesures de qualité sont utilisées afin d’effectuer un classement par intérêt décroissant. Ces mesures sont issues de domaines variés : recherche de règles d’associations (Azé (2003); Lallich et Teytaud (2004)), extraction de la terminologie (Daille (1994); Roche (2004)), etc. Notre approche consiste à sélectionner la définition d’un sigle à partir d’une liste d’expansions possibles. Le but est donc d’effectuer un classement par pertinence en utilisant des mesures statistiques ; les définitions les plus pertinentes devant être placées en début de liste. Une des mesures couramment utilisée pour calculer une certaine forme de dépendance entre deux mots est l’Information Mutuelle (Church et Hanks (1990)) : I(x, y) = log2 P (x, y) P (x)P (y) (1) Une telle mesure a tendance à extraire des co-occurrences rares et spécifiques (Daille (1994); Thanopoulos et al. (2002); Roche (2004)). Dans notre cas, P (x, y) permet d’estimer la probabilité d’apparition des couples de mots (x,y) où x et y sont voisins dans cet ordre. Après diverses approximations, la formule (1), peut s’écrire de la manière suivante où nb représente le nombre d’occurrences des mots et des couples de mots : IM (x, y) = log2 nb(x, y) nb(x)nb(y) (2) L’Information Mutuelle au Cube (Daille (1994)) est une mesure empirique qui s’appuie sur l’Information Mutuelle mais en privilégiant davantage les co-occurrences fréquentes. Une telle mesure est définie par la formule (3). IM 3(x, y) = log2 nb(x, y)3 nb(x)nb(y) (3) Cette mesure est utilisée dans bon nombre de travaux liés à l’extraction des termes nominaux ou verbaux (Vivaldi et al. (2001); Claveau et Sébillot (2003)) ou des entités nommées (Downey et al. (2007)) dans les textes. Précisons que l’utilisation de la fonction log2 dans ces différentes formules n’est pas nécessaire. En effet, la fonction log2 est strictement croissante, l’ordre couples de mots donné par les mesures n’est donc pas affecté avec l’application ou non de la fonction log2. Mesures de qualité pour déterminer les définitions de sigles pertinentes 3.2 Les mesures F D et F DC Le principe de la mesure FD (Filtrage des Définitions) consiste à classer les définitions potentielles des sigles selon leur pertinence. Par exemple, dans un texte traitant de sport, la définition pertinente du sigle JO est (souvent) "Jeux Olympiques" alors que ce même sigle propre à des documents juridiques a (souvent) pour définition "Journal Officiel". Ainsi, notre mesure donnée par la formule (4) calcule la dépendance entre le sigle et les définitions potentielles via des requêtes avec un moteur de recherche. Dans la formule (4), nb(q) retourne le nombre de pages issu de la requête q (q est ici constitué des sigles et des définitions). Ces mesures s’appuient sur l’information mutuelle et l’information mutuelle au cube afin d’attribuer un score à chaque définition defi. Notons que dans ces mesures, nb(sigle) n’est pas pris en compte car cette valeur représente une constante qui ne modifie pas l’ordre des définitions. FDIM (defi ) = nb(defi and sigle) nb(defi ) FDIM 3 (defi ) = nb(defi and sigle)3 nb(defi ) (4) La mesure de base proposée a une limite majeure liée au fait que le score ne prend pas en compte le contexte. Ainsi, nous proposons de considérer ce dernier pour effectuer un choix plus pertinent de la définition à associer à chaque sigle. L’ajout d’informations contextuelles à la mesure F D (formules (4)) permet la construction des formules (5). Le principe de ces mesures contextuelles est d’appliquer des approches statistiques sur un ensemble qui est propre au domaine étudié. La dépendance des sigles et des définitions est alors calculée à partir des seules pages partageant un contexte proche. C représente ici un ensemble de mots du domaine définis par l’expert. Par exemple, pour calculer le score à associer à la définition "Jeux Olympiques" adaptée au sigle JO avec un contexte C = {sport, compétition}, nous effectuons la requête JO and "Jeux Olympiques" and sport and compétition qui correspond à defi and sigle and C. Les requêtes sont effectuées avec le moteur de recherche Exalead3. En effet, dans la suite de nos travaux, nous souhaitons utiliser toute la richesse de la recherche avancée de ce moteur de recherche qui permet notamment de gérer les mots ayant une orthographe approchée ou phonétique. La détermination du contexte pourrait être automatisée selon les applications à effectuer. Par exemple, le contexte peut être caractérisé par les mots les plus représentatifs (mots les plus fréquents par exemple) des documents possédant le sigle à définir. Pour la désambiguïsation de sigles issus de requêtes, les mots propres à ces dernières qui sont donnés par l’utilisateur peuvent être exploités pour construire un contexte. FDCIM (defi ) = nb(defi and sigle and C) nb(defi and C) FDCIM 3 (defi ) = nb(defi and sigle and C)3 nb(defi and C) (5) L’algorithme PMI-IR (Pointwise Mutual Information and Information Retrieval) de Turney (2001) consiste à interroger le Web via le moteur de recherche AltaVista pour déterminer des 3 http ://www.exalead.fr/ QDC 2008 – 76 – M. Roche et V. Prince synonymes appropriés. À partir d’un terme donné noté mot, l’objectif de PMI-IR est de choisir un synonyme parmi une liste donnée. Ces choix, notés choixi, correspondent aux questions du TOEFL. Ainsi, le but est de calculer, pour chaque mot, le synonyme choixi qui donne le meilleur score. Ces mesures s’appuient comme dans nos travaux sur l’information mutuelle c’est-à-dire la proportion de documents dans lesquels les deux termes sont présents. Notre approche a deux différences majeures par rapport à l’approche de Turney (2001). Notre mesure utilise le contexte C pour déterminer la pertinence des définitions par rapport à un domaine. Par ailleurs, dans nos travaux, nous nous appuyons sur l’information mutuelle au cube qui donne des résultats souvent plus pertinents (Vivaldi et al. (2001); Downey et al. (2007)). De plus, une différence majeure marque les travaux proposés ici comparativement à ceux présentés dans (Roche et Prince (2007)). En effet, la fonction de rang dans (Roche et Prince (2007)) est propre au calcul de dépendance des mots constituant les définitions des sigles. Le défaut majeur d’une telle mesure de qualité tient au fait qu’elle ne permet pas d’attribuer un score aux sigles ayant une définition composée d’un seul mot. Cette situation est, dans le domaine général, assez rare. De telles définitions sont cependant très fréquentes dans les données biomédicales sur lesquelles nous nous appuyons dans nos expérimentations présentées dans la section suivante. Le nombre de définitions potentiellement pertinentes proposées à l’utilisateur sont souvent dépendantes des applications. À titre d’exemple, avec le moteur de recherche généraliste Exalead, cinq termes "proches" des requêtes des utilisateurs sont proposés. Cette quantité (de l’ordre de cinq) pourrait être adaptée à notre problématique. En effet, nous pouvons nous retrouver dans une situation similaire lors de l’exploitation de notre approche associée à des moteurs de recherche spécialisés pour proposer quelques définitions pertinentes à l’utilisateur qui effectue des requêtes composées de sigles ambigus. 4 Expérimentations Dans nos expérimentations, nous nous sommes appuyés sur le classement de définitions propres aux données biologiques. L’application Acromine4 permet d’extraire ces définitions dans les textes issus de la base de données bibliographique Medline (Okazaki et Ananiadou (2006a,b)). Ces définitions sont ordonnées par fréquence décroissante. Un tel classement se révèle souvent pertinent (Roche (2004)). Notons que l’utilisation d’Acromine dans ces travaux a pour seul objectif d’obtenir une première estimation de la qualité globale du classement effectué. De nombreux dictionnaires existent pour lesquels aucun classement n’est effectué. Ainsi, nous proposons dans cette section de comparer le classement proposé par nos mesures de qualité comparativement à Acromine. Concrètement, le but de nos expérimentations consiste à évaluer si les premières définitions données par Acromine se retrouvent parmi les premières définitions données par les mesures de qualité FD et FDC. Les premiers quarts, tiers et moitiés 4 http :// www .nactem.ac. /software/acromine/ – 77 – QDC 2008 Mesures de qualité pour déterminer les définitions de sig les pertin entes (parties entières inférieures) des définitions données Acromine seront considérés dans nos expérimentations5. Par exemple, le tableau 1 montre différents classements pour un sigle donné (TU) par (1) l’application Acromine, (2) FDIM, (3) FDIM 3. Lorsque nous nous intéressons à la première moitié des définitions données par Acromine, trois définitions sont également présentes dans la première moitié des définitions données par FDIM ( 63 = 50%) et cinq définitions se retrouvent parmi la première moitié des définitions données par FDIM 3 ( 36 = 83%). Notons que dans l’exemple du tableau 1, la définition qui obtient le meilleur score avec FDIM 3 est un mot du domaine général très fréquent sur le Web ("température") qui n’est d’ailleurs pas nécessairement pertinent pour un domaine spécialisé. Rang 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 Classement par fréquence (Acromine) testosterone undecanoate thiourea thiouracil tuberculin units toxic unit Tetranychus urticae T undecanoate transcription unit traumatic ulcers transrectal ultrasonography temperature transvaginal ultrasonography Classement obtenu par FDIM T undecanoate tuberculin units toxic unit temperature Tetranychus urticae transrectal ultrasonography thiouracil testosterone undecanoate transvaginal ultrasonography transcription unit thiourea traumatic ulcers Classement obtenu par FDIM 3 temperature tuberculin units thiourea Tetranychus urticae testosterone undecanoate toxic unit thiouracil T undecanoate transcription unit transrectal ultrasonography transvaginal ultrasonography traumatic ulcers TAB. 1 – Classement des douze définitions du sigle TU. L’ensemble des résultats de nos expérimentations est présenté dans le tableau 2. Nous avons évalué 200 sigles de deux lettres tirés aléatoirement parmi les sigles issus du logiciel Acromine6. Dans cette étude, 8138 définitions ont été traitées. Chaque définition nécessite l’exécution de 2 requêtes pour les mesures FD et FDC (avec C = {Medline}). Ainsi, globalement, nos expérimentations ont engendré 32552 requêtes à partir du moteur de recherche Exalead. Le choix d’un moteur de recherche généraliste est motivé par la généricité de l’approche que nous avons mise en œuvre qui doit s’adapter à de multiples domaines. Des moteurs de recherche documentaire spécialisés pourraient bien entendu être adaptés à la méthode ici proposée. Le tableau 2 montre que l’utilisation de l’information mutuelle au cube améliore toujours nos mesures de qualité (FD et FDC) par rapport à l’information mutuelle. Par ailleurs, nous remarquons que FDC améliore les résultats par rapport à FD dans le cas de l’utilisation de l’information mutuelle. Dans le cas de l’information mutuelle au cube, les résultats de FDC sont très proches lorsque l’on considère les premiers quarts et tiers des sigles donnés par Acromine. Pour la première moitié, les résultats sont légèrement dégradés. Ceci peut s’expliquer par le 5 Nos futurs travaux pourront s’appuyer sur des mesures d’évaluation plus adaptées pour estimer la qualité des fonctions de rang tels que les courbes ROC et les aires sous ces dernières (Roche et Kodratoff (2006)) 6 Expériences menées durant la semaine du 3 décembre 2007. Premières définitions de sigles issus d’Acromine FDIM FDIM 3 FDCIM FDCIM 3 1/4 35.0 46.1 39.0 46.2 1/3 41.3 49.6 46.6 49.5 1/2 53.8 61.0 57.9 58.3 TAB. 2 – Pourcentage de définitions retrouvées parmi les premières données par Acromine (200 sigles représentant 8138 définitions). choi x du context e C (mot "Medline") qui n’ est pas nécessairement adapté. À titre d’exemple avec la mesure FDC associée à l’information mutuelle, les scores du sigle TU présenté dans le tableau 1 sont am éliorés par rapport à FD (sur la base de la première moitié des sig les retournés par les mesures ). Ceci n’est cependant pas le cas avec l’ information mutuelle au cube. Cette situation peut s’expliquer par la présence très fréquente de mots assez généraux associés au sigle qui sont privilégiés par l’information mutuelle au cube. Par exemple, la définition "température" est placée en neuvième position avec FDCIM alors qu’elle était en quatrième position avec FDIM. Cependant, cette définition non pertinente est en première position avec FDIM 3 et FDCIM 3. Comme nous allons le présenter dans les sections suivantes, le choix des mesures statistiques et du contexte sont primordiaux et nos futurs travaux seront notamment dédiés à déterminer les mesures et contextes les plus appropriés. 5 Discussion des mesures statistiques et de leurs extensions possibles De nombreux développements propres aux mesures statistiques pourraient être menées. Premièrement, une étude plus approfondie du paramètre 3 propre à l’information mutuelle au cube pourrait être effectuée afin de déterminer le paramètre le plus adapté à notre approche. Deuxièmement, d’autres mesures statistiques pourraient être testées (Guillet et Hamilton (2007)). Nous pourrions alors évaluer si l’information mutuelle au cube est la mesure de qualité la plus adaptée à notre problématique. Par exemple, dans (Roche et Prince (2007)), des expérimentations avec la mesure de Dice (Smadja et al. (1996)) ont montré des résultats moins satisfaisants que l’information mutuelle au cube. Soulignons que les mesures de qualité fondées sur l’information mutuelle sont simples et efficaces car elles nécessitent peu d’informations. En effet, ces mesures s’appuient sur un nombre d’exemples (dans notre cas, le nombre de pages retournées avec les mots des définitions) sans nécessité de déterminer les contre-exemples7. En effet, ces derniers sont souvent 7 utiles pour de nombreuses mesures de qualité : Rapport de Vraisemblance (Dunning (1993)), Conviction (Brin et al. (1997)), J-mesure (Goodman et Smyth (1988)), Moindre Contradiction (Azé (2003)), etc. QDC 2008 Mesures de qualité pour déterminer les définitions de sigles pertinentes plus complexes à déterminer dans le cadre d’approches non supervisées sur la base de données statistiques issues du Web. 6 Conclusion et perspectives Les fonctions de rang que nous avons présentées permettent de proposer à l’utilisateur les définitions d’un sigle adaptées au domaine. Pour ce faire, nos algorithmes utilisent différentes mesures fondées sur la proportion de documents dans lesquels le sigle et les définitions sont présents ensemble dans des documents Web. Ces mesures évaluées sur un domaine spécialisé (biologie) en nous appuyant sur un moteur de recherche généraliste (Ex alead) donnent des résultats satisfaisants. Dans nos prochains travaux, outre l’étude plus approfondie des mesures statistiques à utiliser, nous souhaitons nous intéresser à l’exploitation du contexte selon la tâche à réaliser. Par exemple, dans nos précédents travaux présentés dans (Roche et Prince (2007)), le contexte était formé des mots les plus fréquents dans les documents à définir. Un contexte plus riche pourrait être composé des mots respectant des fonctions grammaticales (nom, verbe, adjectif, etc), des mots rares, des entités nommées, des syntagmes présents dans les documents. Pour la recherche documentaire fondée sur les systèmes de requêtes présentés en introduction, les contextes pourraient être formés des mots clés associés au sigle lors d’une requête. En effet, dans le domaine des moteurs des recherche, divers statistiques ont montré qu’environ 70% des requêtes sont composées de plus d’un mot. Ces différents mots peuvent alors être utilisés comme contexte pour notre mesure FDC. Références Azé, J. (2003). Extraction de Connaissances dans des Données Numériques et Textuelles. Thèse de Doctorat, Univ. de Paris 11. Brin, S., R. Motwani, et C. Silverstein (1997). Beyond market baskets : generalizing association rules to correlations. In Proceedings of ACM SIGMOD’97, pp. 265–276. Chang, J., H. Schütze, et R. Altman (2002). Creating an online dictionary of abbreviations from medline. Journal of the American Medical Informatics Association 9, 612–620. Church, K. W. et P. Hanks (1990). Word association norms, mutual information, and lexicography. 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'%( ) * + (,-./01 02/134 5. 65.'& $7 8. 8 & $ &7. & 8.' & 8. 7 9 $.# :8 $ ; < =.'$7 > $.! $7? 7 = $ 8. B <8< 8 & 8 @ $7 $7 $7. A. < = @ C 7 7. < = $ 8 8 7 $ 8. < =.C # >D 8 & 8 $ & 8 E C D6 : ;? CD 6?AA $ F"G?& >H H! $ $ 8..6H A. $7 $ 8 & 7. =.' @ # @. 8..! & < = $. $ 8 I 8 =& $.! $ $ @ J < # @ &. 8 I 7 & & & 8.C = < & K < & 8 $. & $ D &.+ @ 8 B <8< & 7 L & = & $ 7.#. 2. C = 8. M. # B <8< @. N. # = &. /. # 8 8 Q DC 2008 & – 84 – 8. ' $ $ =.G @ $D . = 8 7? A 7 K $.* 8 = 8. $$ O $ " 6 $ 6 & 7. C J & 7 & 7. $ & @ &. # # & + = $.*.* & >!? " # > C"+( $.?20P1AA. $ ". & 8 +%4F $ 8 $ 8 ∀ ∃ Q? 8 ∀ ? #?A? QAA.?A? +%4F? AAA. R. 7 $ # $ 7?: ;A 8 $ $?: $ ;A. – 85 – QDC 2008 $ $ ( %& '% % %) = & $7.# 8? 7 L $ A 8 $ 8?B <8< & A :8.! 8 ; $ 8? 7 7 8 $ A. '. & & 7.* & 8 & & @ & 9.* 7.# & 7 & $ & @ $ &'C7 & D8 I @ D & 8.! 7 J $ 7 8. & $7 $ 8 $ 8 $.C7 8 7 $7 $.+ $7.C $ 8 8. & 9 @?. 8 8. QDC 2008 $7 & – 86 – A $ 8 J. $ #.'* ) # $? @ A B <8< I 8 $.! $7.! 7 < = 7 8 I..' 8 7 8 #. 9 D.+ & $7 7.#. $7 8 I 7.+ $ $ $ 8 &..* <= 8 $ & D 7 & &$ =&. # $7 7 $ 7 7 $ =.+ = 7 $ $.# &. & $ 7 & 7 7 7 7 I $ +. 7 8 7 @&! 8. @& S @& $ @& 7 & : &S & ; > D @& @& S D @& S D $ <= @& S." @& $. $H.+ 7.( = $7 7 & 7 &L $7 &L. $ & & 8 $ 8 8. Q – 87 – QDC 2008 + % * &L & < = 7 $.C $.!.O I 8., &? < $ > 8 & & 7 A $ 7 & & 7 O. 8. G & $ & $ $.! &.(.! & 7 7 7 8 & 8 & 8 $.!. & $ # 7.! 8 & & & & & 7 &? K 7 8 & & 7 K & $$ : <= 7 7 $ 8 & 8 "., % & & 7 8 &. & 7 $$ =. & D $ 8 7K & $ 8 8?20P3A &L A 8 & O > % &? < = $ > & 7 8 & 7 A. O ( > =. & QDC 2008 8 & 7 &, &?, &?2030AA <??M112A & 8 $ 7.?200PAA $ 8 & 7 TA.' = ; 7? & $. ; 7. K # & & : – 88 –. &? < % $ >. & 7 8 & 7 A? > 2. M. N. & 7 & 7 8 A. 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Z S & & $ & & &.! &H & S& & $ $ & 6.G& & $ S $. &S & – 91 – & & & .4 QDC 2008 Index des auteurs –A– Akoka, J., 1 –N– Nugier, S., 1 –B– Bayoudh, I., 63 Béchet, N., 63 Berti-Équille, L., 1 Boucelma, O., 1 Bouzeghoub, M., 1, 11 Briand, H., 51 –P– Peralta, V., 1, 11 Pham, N.-K., 39 Prince, V., 73 –Q– Quafafou, M., 1 –R– Ritschard, G., 31 Roche, M., 73 –C– Clément, D., 21 Comyn-Wattiau, I., 1 Cosquer, M., 1 –S– Sisaïd-Cherfi, S., 1 –D– Do, T.-N., 39 Duquennoy, D., 21 –Z– Zighed, D. A., 31 –E– Etcheverry, L., 11 –F– Fraňová, M., 83 –G– Goasdoué, V., 1 Guillet, F., 51 –K– Kedad, Z., 1 Kodratoff, Y., 83 –L– Laboisse, B., 21 Lallich, S., 39 Lenca, P., 39 –M– Marcellin, S., 31 Marinica, C., 51 Micheaux, A., 21 93.
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5.1.3.3. L'implication L'implication est l'élément fondamental pour inscrire les actions dans la durée. Elle est l'élément discriminant par rapport aux autres formes de solidarité. Elle est aussi ce qui peut justifier, pour partie, la valeur des choses, et plus seulement le prix (Wilde O., 1854-1900450). On dit souvent qu'on ne connaît la valeur des choses que lorsqu'elles viennent à manquer ; l'implication est un moyen de connaître cette valeur avant que ces choses ne viennent à manquer et de devoir les reconstruire. Cette implication est l'élément qui, à notre sens, peut inscrire dans la durée la responsabilité de former, d'éduquer et de sensibiliser par la gestuelle ce que l'on doit à la société et à l'importance de le préserver. Sans l'implication, c'est-à-dire en étant seulement bénéficiaire, ce type d'actions supprimerait les facteurs d'insatisfaction (Frederik Herzberg) et répondrait aux besoins de sécurité de la pyramide de Maslow. Le fait d'être impliqué et de participer à la réalisation des actions procure des facteurs de satisfaction et apporte une réponse simultanée aux besoins primaires et secondaires de la pyramide de Maslow. L'implication contraint également au réalisme. Elle tempère les demandes irréalistes et les comportements individualistes. La figure suivante schématise les valeurs en interaction de l'implication : responsabilité, formation et satisfaction. 448 CARTIER S., Chronique d'un déluge annoncé, crise de la solidarité face aux risques naturels, Paris, Grasset, 2002, 373 p. 449 CARTIER S., Solidarité recherche tiers absent, 2007, page 199. 450 Paraphrase d'Oscar Wilde : « Aujourd'hui, les gens connaissent le prix de toute chose et la valeur d'aucune. » 379 Responsabilité Implication Education/formation Facteurs de /sensibilisation satisfaction Figure 37 : valeur de l'implication 5.1.4. Territorialisation du métier de l'assurance La territorialisation du métier de l'assurance intègre : soit une logique de territoire, soit une logique de réseaux, soit une logique de filière, soit une combinaison d'une ou plusieurs de ces dimensions, tout en combinant des objectifs de court, moyen et long termes. En dehors des obligations légales, si toutefois elles sont respectées, l'environnement est dépourvu de relations hiérarchiques (Zardet V. & Noguera, 2009451) : seuls les effets de domination subsistent (Perroux, 1948452). A travers l'Assurance-Twiza, l'intention est de clarifier ces effets de domination, de les atténuer et de les cristalliser au moyen « d'engagements négociés ». Ces relations dans l'environnement 1 qui ne sont ni horizontales, ni verticales 1 peuvent être illustrées par des relations obliques par lesquelles le dominant a l'illusion de contraindre le dominé par l'exercice de contraintes diverses et de degrés variés. Ces relations produisent des effets pervers : finalement, le dominant comme le dominé sont aliénés. La Twiza peut être une instance où dominant et dominé peuvent se fréquenter, et non plus seulement se côtoyer, pour 451 NOGUERA F . , ZARDET V., Mythes et réalités de la contractualisation de l'action publique : les cas de contrats de développement territoriaux, L'Harmattan Collection management, 2009. 452 PERROUX ., Esquisse d'une théorie de l'économie dominante, Economie appliquée, vol. 1, 1948. 380 produire des engagements négociés et contractualisés par lesquels chacun a la possibilité d'exister pour finalement coexister. La théorie socioéconomique nous enseigne que les relations horizontales 1 la coopération 1 ne peuvent exister et être efficaces que grâce à une dose de directivité. Les pouvoirs publics mià-part, et dans la limite du droit, la directivité, nous semble-t-il, ne peut s'exprimer qu'au moyen d'une autorité et d'une guidance qui permettra à chacun de trouver ses marques. 5.1.4.1. Les outils de pilotage et de gestion du risque Afin de fiabiliser et de faciliter la mise en oeuvre l'Assurance-Twiza, nous proposons deux outils synoptiques, complémentaires à la fois aux outils de management socioéconomique et au système de mesure du risque de l'assurance. Ces outils sont inspirés de la grille de compétences : la grille d'impact des risques et la grille de prévention des risques. 5.1.4.1.1. Grille d'impact des risques La grille d'impact des risques se présente comme suit : 381 Tableau 45 : Grille d'impact des risques GRILLE D'IMPACTS DES RISQUES DANS LA TWIZA EN DEBUT DE PERIODE Effets Tiers/RC ASSURER Personne Patrimoine écologie NON ASSURER économique Consommation S1 S2 S3 S4 S5 S6 S7 S8 S9 S10 S11 S12 S13 S14 ASSURER personne Patrimoine écologique économique Consommation Client OBSERVATIONS S15 RISQUES Humain technique _ _ _ financier _ _ _ _ Tiers _ _ _ Juridique _ _ _ Sécurité _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ Image Naturel sociaux Législatif VULNERABILITE LEGENDE : Impact Fort Impact moyen - Impact Faible Aucun Impact A réaliser ©ISEOR La lecture en ligne permet de mesurer l'importance des effets par nature du risque. Par exemple, les risques techniques peuvent avoir des effets multiformes et mettre en péril la mutualité et la société. Les décisions qui peuvent en découler sont de privilégier des actions de nature à réduire les risques techniques. Pour la cotation, nous proposons la matrice suivante : Tableau 46 : matrice de la cotation de risque 12345467689ABCADE2FC5CA 58A 5647CA 3CA 7CF9A 5647CA A A A 3CA A A A 7CF9A A A A Il s'agit d'une simplification pour aider à la décision et à la compréhension des aspects techniques de l'assurance. Ces règles de classification (faible, moyen, élevé) sont décidées aux niveaux de la direction générale et de la direction technique car elles engagent l'ensemble 382 de la mutualité. Bien entendu, ces grilles peuvent avoir des déclinaisons plus détaillées par domaine et par unité de nature de risque. La figure suivante montre le processus d'identification et de mesure des risques : Figure 38 : Identification et mesure du risque Effet de sommation spatioCONDITIONS DE VIE COMPOSANTS ORGANISATION DE LA VIE SURTEMPS PRIX 3 C-IP temporelle SURCONSOMMATION FORMATION/ EDUCATION Actuariat PRODUCTION MISE EN OEUVRE STRATEGIQUE POTENTIEL/RISQUES RISQUES HUMAIN TECHNIQUE Expertise EFFETS PERSONNE FINANCIER PATRIMOINE JURIDIQUE ECONOMIQUE TIERS ECOLOGIQUE NATUREL CONSOMMATION SOCIAL LEGISLATIF IMAGE SECURITE 383 5.1.4.1.2. Figure 39 : articulation risques-compétences Effets Grille d'impacts des Décès risques Incendie Risques X Y Risques Effet Techniqu e Grille de prévention Image Opérations des risques X Y Opération Electricit Maçonne é rie Personnes X Y Efficacité Grille de compétences ISEOR La grille de compétences453 permet également de rechercher les compétences non disponibles dans la Twiza et ainsi de recruter le ou les professionnels nécessaires. Elle permet également de prévoir les formations nécessaires aux membres de la Twiza et de prévoir les conditions de travail nécessaires (matériel par exemple). 453 Pour approfondir , cf . SAVALL H. & ZARDET V., Ingénierie stratégique du roseau, préface de Serge Pasquier, Economica, 1995, 517 p., page 381. 385 5.1.4.2. Nouvelles formes de partenariat Cette section s'intéresse à la projection de l'Assurance-Twiza dans l'environnement normalisé et des nouvelles approches qu'elle pourrait induire. Globalement, la stratégie collective des assurances consiste à faire plus que ce qui existe déjà pour trouver des solutions aux problématiques environnementales qui se posent avec plus d'acuité. Ainsi par exemple, en Algérie, une loi en 2003 renforce les sanctions prévues en cas de défaut de l'assurance "catastrophe naturelle", sans grand succès. Il ne serait pas étonnant alors de voir les assurés faire plus que ce qu'ils font déjà et chercher à contourner les règles. Globalement, ce qui se profile, c'est : plus de probabilité, plus de produits, plus d'exclusion et plus de surveillance et de contrôle. Comme les banques, les assurances doivent respecter des règles de prudence (Slovency I et II). Ces règles prévoient qu'à chaque risque doit être associé un montant spécifique de capital, sur la base de modèles mathématiques dits « Value at risk », de la même manière que le prévoit Bale II pour les banques (Attali J., 2008454). Ces règles sont complexes, mal appliquées et source de déséquilibres. « Ce qui s'est passé pour les banques se passera pour les assureurs : pour réduire les exigences de fonds propres, les compagnies chercheront, comme l'ont fait les banques, à contourner ces règles ; et pour cela, avec des montages de même nature que ceux utilisés par les banques dans les années passées, elles regrouperont leurs actifs en des instruments spéculatifs, qu'elles sortiront de leurs fonds propres »455. Assureurs et clients semblent chercher à contourner les règles. De la même manière que les assureurs cherchent à contourner les règles, les clients cherchent à contourner les règles des assureurs et de l'environnement normatif. Cette logique, qui veut que "nous fassions aux autres ce que nous ne voudrions pas que l'on nous fasse", multiplie les comportements déviants. Progressivement, le résultat est à l'inverse de ce qui est attendu. Les nouvelles formes de partenariats que peut nous inspirer l'Assurance-Twiza sont des éléments de réponse qui s'inscrivent dans des « stratégies proactives qui permettent de mieux intégrer les normes »456 dans l'intention de « faire surgir une nouvelle relation afin de ne pas 454 ATTALI J. et Al., Rapport de la commission pour la libération de la croissance française, XO, Editions la Documentation Française, 2008, page 216. 455 ATTALI J., Le principal risque aujourd'hui vient des assureurs, Slate.fr | Finance – 15/09/2009 456 SAVALL H. & ZARDET V., Tétranormalisation : défis et dynamique, Economica, 2005, page 19. 386 rester sourds à ce monde qui vient et muets à l'égard de ceux qui nous quittent »457. L'intention est de contribuer à « limiter les effets pervers de cette Tétranormalisation aujourd'hui relativement désintégrée et prolifique » (Savall H. & Zardet V., 2005, page 109), d'atténuer les effets de « la globalisation qui a généré l'éclatement, l'explosion des institutions. Chaque citoyen, travailleur, minorité ethnique est encerclé de dangers auxquels il ne peut opposer comme seul défense légitime que son droit d'être un individu, c'est-à-dire de posséder un certain contrôle sur son existence et celle de ses enfants.[] La confiance, la disposition à l'action, sont d'autant plus opérationnelles qu'elles émanent d'une prise de conscience et d'une dynamique de proximité. Il est plus facile « d'initier » dans un département qu'au niveau national et, pire encore, européen. Rien ne peut remplacer le sens de la responsabilité personnelle et le droit des gens à avoir une vie autonome dans un environnement où leurs intérêts fondamentaux – ne pas être exclus, bannis, menacés dans leur intégrité – sont protégés. Il faut redonner au temps sa valeur du moyen et long terme Notamment en participant à restaurer la motivation de l'individu, par le biais de son développement, de sa créativité, du respect qu'on lui doit.»458 5.1.4.2.1. Recherche de convergence avec les normes Sous l'apparent éclatement du paysage normatif, il nous semble qu'il est possible de rechercher les convergences entre les différentes normes, les risques ou les actions d'amélioration du risque. La recherche de convergence entre les différentes thématiques normatives, les risques, la responsabilité sociale et les intérêts individuels peut faciliter l'intégration des normes et une stratégie proactive 'intégration de ces normes ; elle peut également aller au-delà. L'hypothèse implicite des assurances, de l'efficacité des normes et de leur respect montre la convergence d'intérêt entre l'assurance et les normes. Cependant cellesci ne s'intéressent que rarement « aux adoptions de façade » et n'ont pas non plus conscience qu'elles sont en concurrence avec ces normes. Il est illusoire de croire en les mécanismes de régulation que l'assurance emploie pour contraindre ses clients à adopter ses propres normes, alors que ceux-ci subissent des pressions bien plus contraignantes et persuasives émanant d'autres institutions ou groupes de pression. 387 pour une organisation et pour son environnement, [] cela n'empêche pas des acteurs de poursuivre leurs pratiques habituelles »459. La recherche de convergence entre les différents intérêts et normes peut être un outil précieux pour persuader des partenaires potentiels à collaborer avec les différentes Twizas, par leur compétence et leur financement ; elle peut ainsi accroître leur performance et efficacité. L'outil développé par l'Iseor nous semble pertinent afin de compléter les grilles de gestion de risque et de compétences ; il peut ainsi être utile dans l'argumentaire pour persuader les partenaires potentiels à coopérer ou synchroniser certaines de leurs actions pour une plus grande efficacité globale. La grille des convergences et spécificités suivante est un exemple décliné par action entre l'assurance Twiza et l'Etat: Tableau 48 : Convergences spécificités état assurance Twiza Thèmes Convergences Spécificités Assurance Twiza Habitations Etat Habiller une maison Dégâts des eaux Paysage citadins Santé Impact écologique Conditions de vie au travail Certifications ISO Satisfaction clients Réduction de contrôle Extension de garantie Justice/dépôt de plainte RC client Satisfaction du citoyen Image Gestion de conflits Normes BIT Accidents du travail ISEOR Cette grille de convergence et de spécificités peut être étendue à d'autres parties prenantes et détaillée par institution étatique. L'intention est double : accroître la performance des Twizas vers la recherche de qualité intégrale, mais aussi fléchir la production normative et les effets de domination en élargissant les espaces de jeux coopératifs. Cette stratégie consiste aussi à 459 Crista. 388 repérer l'ensemble des acteurs qui peuvent se sentir menacés par ces dispositifs et qui peuvent menacer soit leur fonds de commerce (Savall H. & Zardet V., 2005) soit leur légitimité. 5.1.4.2.2. Partenariat avec les institutions et les organisations La prolifération des institutions, des normes produites 1 entre autres 1 par ces institutions et des conflits et concurrences entre ces normes peut se retrouver et se confronter dans l'espace de négociations qu'est la Twiza. La présence des institutions est souhaitable car elle leur permettrait, à travers les discussions et la recherche de solutions, de se rendre compte des injonctions contradictoires, de leur faisabilité et parfois de leur inutilité. Confrontée à la diversité des acteurs auxquels s'adressent les normes, les institutionnels peuvent réaliser le caractère trop contingent de certaines normes. Par exemple, une loi interdit l'exploitation du sable dans les cours d'eau sur tout le territoire national ; or, si cette loi est assurément pertinente dans le nord au sens où elle protège les nappes phréatiques, elle perd de son sens dans le sud du fait que le sable soit abondant ; cette interdiction risque même de produire des effets pervers en facilitant le débordement des oueds (fleuves souvent secs). Le principe de précaution nous semble être une opportunité à saisir sous peine de déploiement de mécanismes similaires et des effets pervers qui les accompagnent. Cependant, pour le moment, il semble provoquer un « désarroi stratégique » des décideurs stratèges, au même titre que la tétranormalisation (cf. section 21233). Il semble générer une incertitude juridique qui ouvre la voie à des contentieux juridiques en responsabilité les plus innovants et à des risques pour les décisions de police administrative (Attali J., 2008460). Ce qui semble être en cause, c'est la faible portée normative de l'article 5 de la charte de l'environnement et de l'article 7, qui autorise les citoyens à participer aux décisions publiques de précaution. L'incertitude des connaissances scientifiques, les dommages graves et irréversible pour l'environnement (article 5), « le devoir de prendre part à la préservation et l'amélioration de l'environnement » (article 2) et le droit de s'informer et de participer à la décision publique (article 7) peuvent effectivement 1 à défaut de stratégies proactives 1 introduire une incertitude juridique461. 460 ATTALI J. et Al., Rapport de la commission pour libér croissan française, XO, Editions la Documentation e, 2008, page 91. Pour l'Algérie, cf. loi n° 03-10 du 19 juillet 2003 relative à la protection de l'environnement dans le cadre du développement durable. Elle se base sur les principes du nouveau droit de l'environnement adoptés au niveau international. Néanmoins, il nous semble que, sous son apparente imprécision, cette incertitude incite à beaucoup plus de précision de la part des opérateurs. L'absence de définition du dommage, de sa gravité et de l'irréversibilité contraint les opérateurs à mesurer et à évaluer l'impact potentiel de leur activité. L'incitation à la décision collective et l'énonciation du devoir de chacun favorisent des pratiques démocratiques pour intégrer le plus de dimensions possible dans la décision. Finalement, l'hostilité de la nature n'est pas si inédite que ça : elle renvoie à des époques où la seule technologie matérielle ne suffisait pas à se prémunir contre les éléments naturels (cf. section 111). C'est dans ce sens qu'il ne nous semble pas incongru de revenir à des techniques du type Twiza, renforcées par des outils non logocentriques (les trois piliers de l'approche qualimétrique) et fiabilisées par des outils de type management socioéconomique. Ce qui est inédit, c'est que l'activité humaine est à l'origine du surcroît de la violence de la nature et que ces approches doivent, à terme, modifier cette activité. Le principe de précaution permet pour l'instant d'avoir une approche qui préserve la composante sociale et l'approche démocratique. C'est en cela qu'il nous semble être une opportunité qu'il s'agit de saisir sous peine, dans un avenir peut être pas si lointain, d'une mise en oeuvre de type dictatoriale de la préservation et de l'amélioration de l'environnement. Le partenariat avec les institutions, comme nous l'avons présenté dans le chapitre 3, doit permettre de préciser au fur et à mesure de sa déclinaison une guidance qui produise une norme ponctuelle adaptée à l'espace temps et non immuable. Instituer un principe d'humilité face à l'illusion de l'omnipotence et de l'omniscience des institutions « qui contribuent à développer des forces centrifuges, ce qui aboutit à l'éclatement, la désarticulation, l'incompatibilité partielle entre les normes des différents pôles. L'une des voies pour lutter contre cette tendance consiste à développer la concertation entre les institutions, [] les organisations publiques et privées, [] la contractualisation et la rémunération incitative »462. 5.1.4.2.3. La coassurance Habituellement, la coassurance est un partage des risques horizontal entre différents assureurs sur un contrat dont l'engagement peut être important. Les assurances sont souvent spécialisées et n'ont que rarement un portefeuille dit équilibré. Cette spécialisation est une forme de compétence dans l'optique de la prévention des risques qui peut accroître la performance dans le cadre d'une coassurance-Twiza. La recherche d'un co-assureur ne se fait plus seulement en fonction de sa capacité de couvrir les engagements, mais de la qualité de l'information qu'il détient par rapport aux risques à prévenir. La participation d'un autre assureur à l'assurance peut l'inciter à développer ses propres assurances Twiza et également, à son tour, à proposer des coassurances. L'intérêt est également une réduction plus large des risques environnementaux en laquelle l'assurance qui a essaimé trouve son compte. La « co-compétition » se trouve ainsi facilitée, de même qu'une réduction des risques du fait d'une forme de modèle "en tâche d'huile". Dans la théorie des organisations, le modèle "en tâche d'huile" consiste à améliorer l'organisation dans un service en espérant que celui-ci fera tâche d'huile sur les autres services. Or, l'expérience nous a enseigné que les autres services se liguent pour détruire le service en question plutôt que de prendre exemple et qu'il faut donc au moins agir sur deux services. L'émission de télévision "le maillon faible" nous semble illustrer ce cas. On constate que, généralement, « les maillons faibles » se liguent spontanément pour éliminer « les maillons forts ». Afin d'éviter et de prévenir ces difficult , il nous semble qu'il est impératif de développer des coopérations et partenariats avec les concurrents. 2.4 De la bancassurance à « l'assurabanque »? La bancassurance est un simple mécanisme de distribution des produits d'assurance par la banque. Ce mécanisme de distribution, surtout pour les assurances-dommages, accroît l'effet de distance entre les clients et l'assurance. Il ne concerne que la distribution ; en cas de réclamation, de modification de contrat ou autre, le client se retrouve face à l'assurance pour la première fois. L'assurance permet à la banque de couvrir les crédits qu'elle octroie. La banque n'a qu'une connaissance partielle des risques, à savoir les risques financiers liés aux crédits, qu'elle étudie sur la base des revenus. Or, l'ensemble des risques ont ou peuvent avoir un impact financier. De la même manière, il nous semble que les assurances ne font que distribuer des produits bancaires, élaborer par leurs filiales (qui sont souvent d'anciennes banques rachetées) et l'assurance n'intervient que marginalement dans l'adaptation des produits. L'idée de « l'assurabanque » correspond au fait que l'assurance ait une connaissance supérieure des risques, notamment dans le cadre des développements du produit assuranceTwiza. Elle nous semble donc plus à même de distribuer des produits financiers que l'inverse. Cette distribution ne concerne pas uniquement le crédit, mais aussi l'épargne. Par exemple, elle peut inciter à une forme d'épargne collective, cyclique et stratégique pour que les clients constituent une forme de provision face à un risque qui n'est pas pris en compte dans les actions de la Twiza. Elle peut ainsi y apporter une solution via l'économie marchande. Ce type d'épargne peut également mobiliser pour corriger progressivement les risques dans le cadre de l'octroi d'un crédit et ainsi fiabilis er les remboursements. Elle peut constituer l'apport des clients pour la libération du crédit. Dans le cadre du crédit, l'assurance, par sa connaissance plus étendue des risques, peut mieux accompagner le client dans son activité et, dans le cadre de la Twiza, apporter des garanties supplémentaires en impliquant des parties, non plus seulement sur la base de la richesse personnelle du client, mais aussi sur la loyauté des personnes. Bien que nous pensions qu'il est préférable de privilégier l'implication par l'actionnariat plutôt que par le crédit, l'intention est aussi de privilégier la transformation monétaire plutôt que la création monétaire et l'investissement productif plutôt que l'investissement spéculatif. 5.2. Marketing-vente L'état de la demande à laquelle font face les organismes d'assurance, est multiple et complexe. Selon la grille d'analyse de Kotler Ph. et Murphy P.E. (1973463) et les situations, la demande de produits d'assurance est à la fois une demande négative (gharar), une non demande (indifférente aux produits), une demande latente (de gestion des risques, de conseil et pas tant de produits d'assurance), une demande décroissante ou demande pleine, une demande malsaine (fraude) et demande surabondante (trop de souscriptions). Lorsque l'entreprise doit répondre d'une manière synchronisée à ces demandes, les solutions préconisées sont souvent contradictoires. Elle doit respectivement mettre en oeuvre un marketing de conversion, de stimulation, de développement, de maintenance ou un remarketing, un contre marketing et un démarketing. Le marketing socio-économique propose de dépasser la dichotomie entre l'offre et la demande par une approche interactive en revalorisant le rôle de l'offre. « L'environnement externe n'existe pas en soi. C'est une notion contingente à l'entreprise et à sa stratégie actuelle et future : l'entreprise peut progressivement identifier son environnement pertinent, selon une démarche heuristique. [] Et peu à peu, par une démarche interactive, les contours de l'environnement pertinent vont se préciser et se modifier »464. Il s'agit d'intérioriser l'environnement externe ; « les collaborateurs sont considérées alors comme de véritables capteurs internes d'informations externes » (ibid. page 144). Pour la mise en oeuvre de ce concept de marketing-vente intégré, « il nous faut penser l'articulation, atténuer les frontières, provoquer le dialogue, en un mot : revenir à la place du marché, au sens premier du terme. Celle qui définit le lieu de l'échange, la place où l'on négocie, où l'on marchande, où l'on commerce tout simplement, avant d'acheter et de vendre »465. L'assurance-Twiza peut être une de ces places de marchés où il convient de piloter les relations marchandes en mobilisant le concept de « l'entrepreutrialité » du commercial et du client (salarié d'une manière général), qui porte toutes les fonctions de 463 KOTLER P. & MURPHY P. E., The Major Tasks of Marketing Management, Journal of Marketing, vol. 37, n°4, octobre1973, pages 42-49. 464 SAVALL H. & ZARDET V., Ingénierie stratégique du roseau, préface de Serge Pasquier, Economica, 1995, 517p., page 139. 465 BARTH I., La vente : une discipline des sciences de gestion à inventer bilan d'étape, Congrès AOM/ISEOR, Lyon, mars 2006. 393 l'homme (Barth I., 1994)466. Isabelle Barth (2006), propose de piloter par « la valeur du lien » (relation entre les hommes et les transactions), par « le mandat » (relation entre l'organisation et ses commerciaux), par la « charge commerciale » (toute information, décision et acte de l'organisation contient une charge commerciale qui génère un différentiel) et par « le contrat qui est l'élément fondateur de la vente » (clarification et explicitation de la relation d'échange). 5.2.1. La contractualisation et l'évaluation « L'un de ses (du marketing socio-économique) objectifs majeurs est de créer une véritable étude de marché « permanente », c'est-à-dire fréquemment réactualisée, connectée en temps réel au pilotage stratégique. [] Elle permet une meilleure adéquation de la qualité interne et de la qualité externe des produits. [] Intérioriser l'environnement externe de l'entreprise, c'est aussi remettre en cause la notion de contrainte que l'environnement exercerait sur elle. [] Volonté partagée d'action pour transformer l'existant » (Savall H. & Zardet V., 1995, page 141). Une organisation orientée vers le client repose sur la connaissance du marché (Li T. et Calantone R. J., 1998467) par laquelle l'information devient une ressource stratégique (Glazer R., 1991468). « L'élément central de la relation client est la création de valeur lors de transactions répétées, à la fois pour la firme et pour le client final »469. Les consommateurs sont des sources d'information, d'innovation et de compétences qui peuvent être exploitées par les firmes dans le but d'améliorer la valeur de l'offre (Prahalad C. K. et Ramaswamy V., 2004470). La satisfaction du client dépasse le moment où le client achète un produit ; elle s'inscrit dans une collaboration à long terme entre les firmes et clients (Vargo S. L. et Lusch R. F., 2004471). 466 BARTH I., Proposition pour un marketing interne-externe innovant, éléments théoriques et de mis en oeuvre. Cas d'expérimentation, Université Lumière Lyon 2, juillet 1994. 467 LI T., et CALANTONE R. J., The impact of market knowledge competence on new product advantage: conceptualization and empirical examination, Journal of Marketing, 1998, 62, pages 13-29. 468 GLAZER R., Marketing in an information-intensive environment: strategic implications of knowledge as an asset, Journal of Marketing, octobre 1991, 55, pages 1-19. 469 C4lin Gur4u & Fons C., La relation client comme source d'avantage concurrentiel : un modèle expérimental des stratégies génériques, AIMS, 2008. 470 PRAHALAD C. K. et RAMASWAMY V., The Future of Competition: Co-Creating Unique Value with Customers, 2004, Boston: Harvard Business School Press. 471 VARGO S. L. & LUSCH R. F., Evolving to a New Dominant Logic for Marketing, Journal of Marketing, 2004, 68: 1, pages 1-17. La gestion de la connaissance des clients est un facteur clé du succès du développement de nouveaux produits (Cooper G. G. et Kleinschmidt E.J., 1994472, Nonaka I. et Takeuchi H. 1995473; Joshi K. D. et al. 2004474). « Les Knowledge Management Systems peuvent faciliter l'intégration de connaissances clients dispersées, accélérer la réplication de bonnes pratiques dans le temps et l'espace et réduire les coûts de la recherche et de la transformation de connaissances clients disponibles pour les managers de développement de nouveaux produits »475. Le rôle du pilotage est central. Il permet de stimuler, de synchroniser et de toiletter le tableau de bord de pilotage « d'intelligence marketing, le prolongement naturel de telles pratiques innovantes est alors la mise en oeuvre d'un contrôle marketing décentralisé »476. Le Plan d'Action Prioritaire (Pap), le Contrat d'Activité Périodiquement Négociable (CAPN) et le Plan d'Action Stratégique INTerne EXterne (Pasintex) sont des outils qui contribuent à apporter l'énergie nécessaire dans un processus de décentralisation synchronisée. Ils apportent stimulations et informations pour l'orientation client d'une organisation. Ils sont également des outils-contrats qui peuvent prolonger l'action de l'organisation à l'extérieur des ses frontières sans rupture, en articulant les avantages recherchés de l'organisation et des clients. Dans le cadre des Assurances-Twizas, pilotage ponctuel d'actions trans- organisationnelles, ces outils peuvent contribuer à la dynamique globale de cette métaorganisation. 5.2.1.1. La contractualisation : POMP, PASINTEX, PAP, CAPN477 L'Assurance-Twiza est un système d'échange généreux, d'où la nécessité de contractualiser sur un certain nombre d'années en fonction du nombre de clients et de sa nature. Chacun des assurés signe un contrat d'assurance classique, muni d'une grille d'impact des risques et personnalisé par la visite technique. Un outil simple et synoptique qui permet au client de visualiser les risques qu'il encourt, ceux qui sont assurés, exclus (non assurés mais assurables) 472 COOPER R. G. & KLEINSCHMIDT E. J., Determinants of timeliness in product development, Journal of Product innovation Management, vol. 11, 1994, pages 381-96. 473 NONAKA I., TAKEUCHI H., The Knowledge-Creating Company, Oxford University Press, 1995. 474 JOSHI K. D., SARKER S., Knowledge transfer among face-to-face information systems development team members: examining the role of knowledge, source, and relational context, Proceeding of the 37th HICSS, 2004. 475 BELBALY N. & HOUZE E., Etude empirique de l'effet de la création de connaissances sur le processus de développement de nouveaux produits, AIMS, 2007. 476 SAVALL H. & ZARDET V., Ingénierie stratégique du roseau, préface de Serge Pasquier, Economica, 1995, 517 p., page 146. 477 SAVALL H. & ZARDET V., Maîtriser les coûts et performances cachés, Economica, 1987. et non assurés. L'investissement dans la transaction en première année ou période est un investissement conséquent pour l'assurance en termes de budget-temps qu'il convient d'amortir sur la durée de l'Assurance-Twiza. Le premier outil-contrat rédigé est le POMP (cf. section 3211) : Produit Objectif, produit Méthodes, produit Prestations. Celui-ci permet de clarifier et de donner une visibilité des objectifs de la Twiza et du rôle de l'assurance et des clients. Ce document général contenant les principes encadrant les actions futures de la Twiza sera actualisé et corrigé au fur et mesure de l'avancement dans le temps de l'Assurance-Twiza. La deuxième phase consiste à conduire un diagnostic socioéconomique pour exploiter le potentiel de connaissance des clients et repérer les convergences entre les clients et l'assurance. Durant cette phase, il s'agit également de construire la grille de compétences des acteurs. Cette phase comprend également la restitution du diagnostic (effet miroir), la synthèse (hiérarchisation de l'effet miroir) et l'expression du non-dit sur la base 1 entre autres 1 de la connaissance du risque de l'actuariat et du réseau d'experts. Cette phase est importante car elle dépasse le cadre de l'Assurance-Twiza : elle joue le rôle d'une séance de formationconcertation et de sensibilisation des risques à partir du vécu des clients. Il convient également de sélectionner un ou deux clients qui seront formés à ces méthodes et à ces outils et qui accompagneront le professionnel durant toute les phases, afin qu'ils puissent reproduire les actions menées lors des périodes suivantes et ainsi alléger le budget-temps de l'assurance. L'assurance-entreprise et l'assurance-organisation comportent certaines particularités que nous avons exposées dans le chapitre 3, notamment le rôle principal des intervenants internes qui pilot cette phase. L'intérêt d'autonomiser les acteurs est triple : rendre supportable dans le temps l'investissement de l'assurance, les doter de la capacité de conduire des Twizas en dehors du cadre de l'Assurance-Twiza et faire face à un véritable partenaire capable d'apporter la contradiction et d'innover d'une manière constructive. Cette phase de diagnostic aboutit à l'actualisation de la grille d'impact des risques ; c'est une première production de valeur pour l'assurance. L'information issue de ces diagnostics est que l'assurance maîtrise mal en général. Les différents niveaux de consolidation des grilles d'impact des risques et des grilles de compétence permettront, à l'échelle de l'agence, de préparer les inter-Twizas futures et ainsi de mutualiser certaines actions. 5.2.1.1.1. PASINTEX Munis et guidés par les outils précédents, accompagnés par le commercial, les acteurs rédigent le PASINTEX (cf. tableau 49). Les clients seront incités à avoir une cohérence entre les actions stratégiques internes et externes. L'ordonnancement des bénéficiaires sera induit par les besoins des convergences des stratégies internes pour réaliser des objectifs. La stratégie interne est pilotée par les six domaines de dysfonctionnement du management socioéconomique ; l'ordonnancement des bénéficiaires sera induit par les besoins de stratégie interne similaires pour plus d'efficacité. A l'échelle de l'agence, certains besoins de stratégie interne, formation ou matériel par exemple, peuvent être mutualisés sur plusieurs AssurancesTwizas et, au-delà du gain économique, ils préparent progressivement les inter-Twizas. Les es de prévention de risque pour les clients qui ne ront pas pendant la sont à titre à indicatif. Elles sont destinées essentiellement à donner une vue globale de la Twiza et donner une cohérence à la stratégie interne de la Twiza. Les périodes suivantes seront précisées et actualisés. Tableau 49 : simulation PASINTEX 1 Twiza MRH479 Année 1 Année 2 Année 3 Observations 1er sem 2ème sem 1er sem 2ème sem 1er sem 2ème sem Réduire les risques de dégats des eaux réparer l'étanchéité améliorer l'écoulement de l'eau sur élever les portes d'entrés habiller la maisons glissement de terrains Prévoir le matériel nécéssaire et les formations négocier les matières 1ère formations maçonnerie emprunter et acheter le matériel recruter maçon © ISEOR Le PASINTEX peut servir à l'agence ou à la direction régionale pour mutualiser certaines actions. Par exemple, dans le cas présent, la négociation d'achat de matières premières peut être regroupée pour donner plus de pouvoir de négociation à l'acheteur et réduire les coûts des Twizas. De même, les formations, au-delà de la réduction de leur coût, permettent aux différents acteurs de se connaître et d'échanger leur savoir-faire sous le contrôle d'un professionnel qui filtre et améliore les solutions qui se dessinent. 5.2.1.1.2. Plan d'Actions Prioritaires Apres avoir pris connaissance des actions mutualisées, les acteurs proposent un Plan d'Actions Prioritaires (PAP), pré-évalué grâce à une balance économique et ainsi permettant ainsi de maîtriser les projets inflationnistes. L'agence contrôle le PAP proposé et, à son tour, propose des modifications, des améliorations et des précisions. Le PAP (cf. Tableau 50) est un outil à la fois technique 1 qui permet d'ordonner les actions, de lutter contre la dispersion des acteurs, l'évaluation intinere de la réalisation des tâches 1 et un outil politique 1 de concertation, de décentralisation, de synchronisation et de coopération. Tableau 50 : Plan d'Action Prioritaire Axes stratégiques Actions prioritaires Personnes concernés (porteurs d'actions) Planning prévisionnel schématique J Traduction des objectifs stratégiques en actions prioritaires Principe de Stimulation Répartition dans l'espace Principe de Décentralisation F M A M Observations J Répartition dans le temps Principe de Synchronisation Points sensibles Principe de Pigilance © ISEOR 5.2.1.1.3. CAPN Le Contrat d'Activités Périodiquement Négociable (CAPN) contient, pour partie, une individualisation des actions prioritaires collectives, des actions individuelles nécessaires à la réalisation de la Twiza et, éventuellement, des actions d'inter-Twizas. Le CAPN contient également des objectifs de résultats immédiats et des objectifs de création de potentiel. Les résultats immédiats sont ceux qui concernent la Twiza en cours ; ceux de la création de potentiel sont les actions qui préparent la Twiza suivante et la formation de l'inter-Twiza. Par exemple, l'intégration aux différents processus de pilotage du bénéficiaire de la Twiza N+1 le prépare à piloter la Twiza dont il sera bénéficiaire. En N+2, il aura participé à deux reprises aux différentes phases de la Twiza et pourra représenter sa Twiza dans l'inter-Twiza qui sera destinée à guider différentes Twizas. Les objectifs doivent être variés et expliciter les actions de réduction de dysfonctionnements et de risques. Ils ont pour intention d'accroître les compétences, la responsabilité et la rigueur dans le comportement. Le tableau suivant présente la matrice du CAPN : 399 Tableau 51 : matrice CAPN Type d'objectifs Résultat immédiat Objectifs Moyens alloués Coefficient Niveau de départ Niveau d'arrivée Action ou tâche Moyen spécifique Caractère critique Progression souhaitée pour la qualité ou la concrète alloué par de l'action pour la réalisation de la Twi . l'assurance ou une réalisation de la Ex. : prix public constaté réduction à autre Twiza pour Twiza obtenir. réaliser l'objectif ou la qualité de l'objectif Création de potentiel © ISEOR Nous pouvons également signaler que le pilotage de l'Assurance-Twiza prépare les salariés de l'assurance au développement de l'entreprise, par une formation pratique au management. Les commerciaux sont ainsi préparés à l'ouverture de nouvelles agences dont ils peuvent devenir les directeurs dans le cadre d'un plan de carrière classique. Le personnel de la direction peut également être formé de la même manière dans le cadre des agences virtuelles à l'échelle de chaque direction ou par un détachement ponctuel à l'échelle d'agences. 5.2.1.2. L'évaluation L'ensemble de ces outils, qui irrigue l'ensemble de l'organisation et de la méta-organisation, forme le tableau de bord de pilotage actif qui modifie profondément le fonctionnement de l'assurance. Habituellement, les tableaux de bord des assurances ne se soucient que du suivi et de la connaissance d'événements passés. Le marketing, la vente et la gestion des risques ne sont pas intégrés et génèrent des contradictions permanentes, tantôt la fonction de « police » prenant le dessus, tantôt la logique commerciale et laxiste en fonction de l'importance du client. Il n'est pas rare de voir les assurances indemniser des risques exclus pour des clients importants et indemniser partiellement, ou totalement, des risques pourtant non assurés. L'articulation des outils permet l'articulation entre indicateurs locaux et indicateurs stratégiques (cf. figure 40) qui donne une cohérence supérieure à l'assurance en intégrant les problématiques locales et globales, la vente, le risque et la gestion des ressources humaines. Cette nouvelle approche permet « l'anticipation ; des processus de changement permanent, 400 continu et créatif ; une pénétration permanente dans l'entreprise par des images de son environnement externe, technique de captage partagées »480 et une gestion effective du risque. Figure 40 : architecture des tableaux de bord de pilotage IS : Indicateur stratégique Il : Indicateurs Locaux 13 © ISEOR Kotler P. (1964) alerte sur le fait que bien que « le développement de nouveaux produits est une des bases de la survie et de la croissance des entreprises, il est en même temps coûteux et risqué »481. Il recommande donc d'identifier chaque étape du développement du produit. Il nous semble donc nécessaire de maîtriser les coûts des Twizas pour fiabiliser la rentabilité de l'Assurance-Twiza. A l'ensemble des outils présentés précédemment, nous devons ajouter la balance économique dont nous présentons une simulation. 480 SAVALL H. & ZARDET V., Ingénierie stratégique du roseau, préface de Serge Pasquier, Economica, 1995, 517 p., page 151. 481 KOTLER P., Marketing Mix Decisions for New Products, Journal of marketing research, vol.1, n° 1, février 1964, pages 43 à 49. 5.2.1.2.1. Simulation d'une balance économique d'Assurance-Twiza Le client a la liberté de constituer son propre réseau, ce qui nous permet de diminuer les coûts de prospection. Le client « tête de réseau » se convertit temporairement en commercial. Les nouveaux clients permettent donc une augmentation du chiffre d'affaires. Les coûts de gestion sont aussi diminués étant donné qu'ils sont gérés collectivement. La satisfaction des clients est supérieure grâce à une prise en compte supérieure de leurs préoccupations. Cependant, l'Assurance-Twiza implique, pour l'assurance grand public, une diminution de la prime par la restitution d'une partie de la prime pour financer les travaux de limitation des risques. Eventuellement, une implication supérieure à son réseau d'experts sera nécessaire et en augmentera donc le coût. L'Assurance-Twiza nécessite aussi un investissement initial supérieur en termes de gestion du projet et de limitation des risques. On peut le résumer ainsi dans la balance économique suivante : Tableau 52 : balance économique simulation Assurance Twiza CHARGES PRODUITS SURCROIT DE CHARGES (1) SURCROIT DE PRODUITS (3) Coût des experts 5 000 DA 225 000 DA Coût de gestion du projet Twiza 2 600 DA Produit financier 9 000 DA Restitution primes 40 000 DA 47 600 DA 234 000 DA (476 euros) (2340 euros) REDUCTION DE CHARGES (2) FINANCIER Coûts de prospection Coûts de gestion des contrats Coûts de gestion du risque REDUCTION DE PRODUITS (4) 2 200 DA 2 700 DA N.E 4 900 DA (50 euros) TOTAL CHARGES (1-2) 42 700 DA (427 euros) TOTAL PRODUITS (3-4) RESULTAT DE L'OPERATION (produits - charges) 234 000 DA (2340 euros) 191 300 DA (1913 euros) © ISEOR Cette balance économique résume les coûts-performances de la première année. Le but recherché est l'autofinancement. Nous pouvons ainsi, par exemple régler le nombre de clients minimum à atteindre pour une Assurance-Twiza. La prime restituée doit avoir aussi une utilité 402 réelle pour le client ; le nombre minimum à atteindre doit être fonction de cette contrainte aussi. L'Assurance-Twiza nous permet donc de réduire les coûts de la revente. Au fur et à mesure que les actions sont mises en oeuvre, elle réduit le risque. La réduction du risque nous permet d'améliorer la qualité du produit en y intégrant de nouvelles garanties, donc d'obtenir une amélioration permanente de la qualité du produit. Nous mobilisons ici le concept de la chaîne de valeur de Porter. CHARGES PRODUITS SURCROIT DE CHARGES (1) Coût de gestion du projet Twiza Restitution de primes SURCROIT DE PRODUITS (3) 1 500 DA 225 000 DA 40 000 DA Produit financier 9 000 DA N.E 41 500 DA (415 euros) REDUCTION DE CHARGES (2) FINANCIER Coûts des experts : Coûts de gestion des contrats Coûts de gestion du risque REDUCTION DE PRODUITS (4) 13 500 DA 2 800 DA N.E 16 300 DA (163) TOTAL CHARGES (1-2) 25 200 DA TOTAL 234 000 DA (252 euros) PRODUITS (3-4) (234 euros) RESULTAT DE L'OPERATION (produits - charges) 208 812 DA (2088 euros) © ISEOR L'Assurance-Twiza tente de concilier, par une multi-hybridation, des performances sociales et économiques. L'hybridation des ressources humaines (salariat et bénévolat) et financières (cotisations et dons) permet l'autofinancement et la création de valeurs économiques et sociales. La conciliation du moderne et du traditionnel, du formel et de l'informel, permet de limiter l'exclusion. L'assurance accroît sa légitimité d'entreprise citoyenne, tantôt en compensant les dommages causés, tantôt en définissant des projets contractuels pour limiter les risques. Pour illustrer nos propos, une loi récente relative aux constructions inachevées vient d'être promulguée. Elle impose, dans un délai de cinq ans, d'achever les constructions, du moins la partie visible. En effet, on observe, par exemple, qu'une grande majorité des nouvelles constructions ne sont pas habillées de l'extérieur. Les causes sont multiples, mais les propriétaires évoquent souvent un arbitrage entre le confort intérieur et le « superflu ». Pour l'Etat, il s'agit de mettre fin à « l'anarchie urbanistique ». Pour les assurances, une maison non-habillée représente une multitude de s importants, tels que les dégâts causés par les eaux. Ces derniers sont dans ce cas systématiquement exclus (non assurés). La loi pose un problème de mise en oeuvre concrète sur le terrain : les moyens sont limités face à l'ampleur de sa mise en application. Les agents d'urbanisme ont déjà fort à faire pour l'application 404 d'autres normes telles que les constructions illicites, le respect des zones commerciales, agricoles, inondables, etc. L'Assurance-Twiza Multi-Risques-Habitation peut jouer un rôle de médiation et de régulation. Les simulations que nous avons menées nous ont permis de sensibiliser les clients potentiels sur leur propre intérêt à isoler leur maison. Les risques qui intéressent l'assurance sont nombreux, au-delà des dégâts des eaux, notamment sur la santé. 5.2.1.2.2. Le volume à atteindre Traditionnellement le volume à atteindre dans le cadre du développement de nouveaux produits est déterminé par le moment où les revenus totaux sont égaux au total des coûts (Break-Even Volume483). Dans notre cas, il s'agit d'une restitution de la prime, la prime étant le bénéfice en cas de non-indemnisation. La charte des Assurances-Twizas permet de ne pas augmenter le risque de faillite de l'assurance au-delà de ses prises des risques habituelles. 405 L'innovation consiste à prévenir les risques et ainsi diminuer la part de l'indemnisation. Les deux indicateurs que nous proposons pour la maîtrise quantitative du risque sont : • - Total dépenses Twizas 5 (probabilité * dommage) (T-1) - (probabilité *dommage) (T). • - Total dépenses Twizas 5 Indemnisation (T-1) - indemnisation (T) L'ensemble constitué par les outils et du tableau de bord de pilotage est primordial pour la maîtrise de ces deux indicateurs. Leur articulation et leur utilisation à chaque niveau de la méta-organisation constituent un « système d'information organisationnel, fonctionnel, humainement intégré et stimulant », le « SIOFHIS »484 (cf. figure 41). Les assurances « s'arrêtent au stade SIOF dans leur développement » « qui se caractérise par une accumulation d'informations produites, diffusées, reçues sans être assimilées par les acteurs. Dans d'autres cas, elles s'arrêtent au SIOFHI et se caractérisent par un ensemble d'informations ne débouchant pas sur la réalisation d'actes »485. La figure suivante montre les différents outils de liaisons entre les paliers hiérarchiques, jusqu'aux clients, pour l' assurance Twiza . 483 KOTLER P., Marketing Mix Decisions for New Products, Journal of marketing research, vol.1, n° 1, février 1964, pages 43 à 49. 484 ZARDET V., Contribution des systèmes d'informations stimulants à l'efficacité de l'entreprise. Cas d'expérimentation, thèse de doctorat, Université Lumière Lyon 2, 1986, 473 pages. 485 YAMUREMYE H., Contribution de pratiques de délégation concertée à l'amélioration du fonctionnement des équipes de direction. Cas d'expérimentations innovantes dans des PME burundaises, thèse de doctorat, Université Lumière Lyon 2, 2001. 406 Figure 41 : SIOFHIS de l'Assurance-Twiza Grille d'impact des Directions générales risques Grille de prévention Directions des risques Grille de Directions compétences régionales PASINTEX Agences PAP Commerciaux CAPN Clients Ces outils de mise en oeuvre stratégique et de contractualisation permettent l'évaluation des projets en cours de déroulement et après leur réalisation. 407 5.2.2. Marketing sociétal intégré L'action de l'actuariat, couplée à la segmentation marketing du marché, conduit à une atomisation de l'offre des produits d'assurance : souvent les produits sont devenus de simples garanties. L'intention est de revenir à une parcellisation moins importante des produits, en concevant des produits évolutifs qui intègrent, au fur et mesure, de nouvelles garanties en fonction de l'avancement de la prévention des risques. Il s'agit de reconnaître la porosité des frontières virtuelles et donc la conductance des risques. Une approche centrée sur l'homme (théorie de l'homme éclaté, cf. tableau 54) peut contribuer à redonner une cohérence à cet ensemble parcellisé. A ce stade de notre réflexion, il nous semble que trois produits peuvent structurer les Assurances-Twizas et que les autres produits sont que des garanties à intégrer au fur et mesure. Les préventions de risques de ces produits s'alimentent les unes les autres. Tableau 54 : Produit structurant l'assurance-Twiza A ssurances "personnes" Assurances "dommages Assurances "entreprises" aux biens" Naissance, vie-décès, formations Habitat, initiales, formation nuptialité, continue, chômage, transports, crédit, responsabilité du travail, santé, activités, santé, civile, location, écologie, etc. consommation, accidents, épargne, retraite, consommation, Vie professionnelle, accident écologie, épargne, investissements, crédits, etc. responsabilité civile, etc. Figure 42 : les trois grands produits centrés sur l'homme Assurance Dommage aux biens G Citoyen A Assurance Personnes R A N Producteur Consommateur T Assurance Entreprise Cette approche se conçoit dans le cadre de la coopération avec les institutions qui gèrent les risques ; les produits d'assurance restent complémentaires aux autres systèmes de protection. Il s'agit de redonner une cohérence à la gestion des risques, afin de mieux gérer les priorités. Comprendre les réalités anthropologiques nous semble également être une démarche essentielle car elles déterminent, pour partie, le mode de fonctionnement inconscient de la société. Ce déterminisme est à tempérer par la capacité d'autonomie des individus. Comprendre les déterminismes, sans pour autant préjuger de la supériorité d'une valeur sur l'autre, peut permettre d'être vigilant sur certains points, sur les excès d'une valeur ou d'une autre, et ainsi de les tempérer et de les prendre en compte dans le fonctionnement des Twizas. Par exemple, comprendre les modèles familiaux ruraux peut être d'une aide précieuse pour comprendre comment les individus réinventent les systèmes amicaux et de voisinage dans le milieu citadin. En Algérie, Claudine Chaulet constate qu'« une natalité élevée alliée à une baisse de la mortalité provoque l'augmentation de la taille des familles. En conséquence, dans une même famille, on assiste à la croissance du nombre de frères qui, selon le modèle familial en vigueur, sont appelés à cohabiter. Les séparations matérielles deviennent alors inévitables et sont nombreuses (installations hors agriculture, en ville ou à l'étranger) sans pour autant 409 que le modèle familial, en tant que système de référence, soit perdu »486. En fonction des modèles familia , Emmanuel Todd (1988487) fait correspondre des valeurs plus ou moins fortes 1 égalité, autorité, liberté, etc. 1 qui peuvent rejaillir sur le fonctionnement des Twizas et dont il convient de prévenir les excès. Ces modèles familiaux ont des stratégies de résolution de problèmes. Il peut être utile de les connaître pour s'en inspirer et les adapter. Par exemple, traditionnellement, une des stratégies de sortie de l'illettrisme dans la famille communautaire consiste à envoyer un des enfants étudier à l'école (généralement le premier ou le deuxième). Celui-ci aura pour charge de recueillir ses neveux les plus âgées pour les préparer à l'école et leur donner plus de chance de réussite scolaire. Dans le cadre d'Assurances-Twizas-personnes, on peut s'interroger sur qui peut jouer ce rôle ponctuellement.
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L'engagement de la responsabilité du fait des produits défectueux en l'absence de certitude sur la causalité et la défectuosité du produit Benjamin Ménard L'engagement de la responsabilité du fait des produits défectueux en l'absence de certitude sur la causalité et la défectuosité du produit Benjamin Ménard ATER à l'université Jean Moulin Lyon 3 Il résulte de l'article 1386-9 du Code civil que pour engager la responsabilité du producteur sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, la victime doit apporter la preuve de son dommage, du défaut du produit et du lien de causalité entre le défaut et le dommage. En la matière, les décisions récentes de la Cour de cassation démontrent, s'il en est besoin, que la mise en oeuvre de ces conditions n'a pas livré tous ses secrets. Il en est plus précisément ainsi lorsque la preuve du défaut du produit ne pouvait être apportée avec certitude. Tel était le cas dans l'arrêt délivré par la cour d'appel de Lyon le 27 août 2015. Dans cette affaire, après avoir consommé de la viande achetée la veille dans une boucherie, un enfant est contaminé par une souche de la bactérie Salmonella. Ses parents agissent alors contre la boucherie en réparation des dommages causés par l'infection sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux. D'emblée, il faut dire que 'analyse de cette décision peut difficilement faire l'économie d'un rapprochement avec le contentieux de la vaccination contre l'hépatite B : si dans un cas la preuve de la défectuosité du produit (le vaccin) ne pouvait pas être scientifiquement apportée, dans l'autre elle ne le pouvait plus, la viande ayant été consommée. Il est ensuite aisé de comprendre que l'incertitude sur la défectuosité n'en rend pas moins incertain le lien de causalité. Est-ce alors à dire que ces doutes scientifiques soient de nature à priver la victime de toute indemnisation? Rappelons sur ce point le virage opéré par la première Chambre civile de la Cour de cassation dans ses arrêts du 22 mai 2008 (Cass. 1re civ., 22 mai 2008, n° 05-20317 et 06-10967, D. 2008, p. 1544, obs. I. Gallmeister et p. 2894, obs. P. Jourdain ; RTD civ. 2008, p. 492, obs. P. Jourdain ; RTD com. 2009, p. 200, obs. B. Bouloc ; JCP 2008, II, 10131, note L. Grynbaum, et I, 186, n° 3, obs. P. Stoffel-Munck ; RLDC 2008/51, n° 3102, note Ph. Brun et C. Quézel-Ambrunaz ; RDC 2008, p. 1186, obs. J.-S. Borghetti) et du 26 septembre 2012 (Cass. 1re civ., 26 sept. 2012, n° 11-17.738, D. 2012, p. 2304, obs. I. Gallmeister ; ibid. p. 2853, note J.-S. Borghetti ; ibid. p. 2376, Ch. Radé ; D. 2013, p. 40, obs. Ph. Brun ; ibid. p. 2802, obs. I. Darret-Courgeon ; RTD civ. 2013. 131, obs. P. Jourdain), tous deux Bacaly n° 8 - juillet 2015-décembre 2015 rendus à l'occasion d'une sclérose en plaques développée suite à une vaccination contre l'hépatite B. Invoquant auparavant une impossibilité probatoire, les hauts magistrats décident, depuis ces arrêts, que la preuve du triptyque dommage, défaut et lien de causalité « peut résulter de présomptions, pourvu qu'elles soient graves, précises et concordantes ». Aussi, en mobilisant le jeu des pré somptions du fait de l'homme qu'autorise l'article 1353 du Code civil, le juge est-il désormais en mesure de présumer ce qui ne peut être démontré scientifiquement. Dans la décision présentée, confirmant l'argumentation des premiers juges, la cour d'appel de Lyon fait précisément application de cette solution pour décider « qu'il existait en l'espèce des présomptions graves, précises et concordantes permettant de retenir que le jeune Heddy K. avait été contaminé par la bactérie de la salmonelle ensuite de l'ingestion de la viande achetée à la Boucherie ». Des affres de la causalité aux affres de la preuve, le sujet combine assurément tous les éléments pour rendre la problématique des plus complexe, et ce tant au niveau de son opportunité théorique que de sa mise en oeuvre technique. Nous nous contenterons ici d'une analyse technique de la solution. Ainsi, après s'être positionnés sur la présence du lien causal, les magistrats lyonnais ont ensuite caractérisé le défaut du produit. La preuve du lien de causalité. L'argument du demandeur en appel, la boucherie, était, sinon habile, à tout le moins prévisible : les conditions posées à l'article 13869 précité n'étaient pas suffisamment établies. S'agissant de celle relative au lien causal, il est ainsi avancé qu'aucun élément ne permettait de conclure avec assurance que la viande achetée à la boucherie était précisément celle à l'origine de la maladie, la bactérie en question pouvant provenir d'autres aliments que la volaille. Ce n'est pourtant pas la solution que la cour d'appel a bien voulu retenir. En effet, la concordance entre l'achat de la viande et la maladie pouvait être établie, d'une part, eu égard aux conditions déplorables d'hygiène et de conservation des produits relevées dans l'établissement et, d'autre part, en raison de ce que les symptômes d'une intoxication alimentaire étaient apparus chez l'enfant seulement quelques heures après la consommation de la viande. Ce dernier indice, tenant dans le faible laps de temps entre l'ingestion du produit et l'apparition de la maladie, n'est d'ailleurs pas sans rappeler celui utilisé dans les arrêts de la première Chambre civile de 2008 et de 2012. En s'appuyant sur une présomption, la cour d'appel démontre à nouveau ici qu'aux certitudes de la « causalité scientifique » peut désormais se substituer les vraisemblances de la « causalité juridique ». La preuve de la défectuosité du produit. Tentant de prouver la rupture du lien causal et, par la même occasion, l'absence de défectuosité du produit, l'établissement invoquait de surcroît une rupture de la chaîne du froid due à un Bacaly n° 8 - juillet 2015-dé 2015 mauvais transport. En clair, le défaut du produit serait apparu postérieurement à la vente. L'argument ne tardait pourtant pas à se retourner contre l'appelant, la cour d'appel de Lyon affirmant que telle défense inclinait à admettre « implicitement que la bactérie était présente dans le produit vendu puisqu'une rupture de la chaine de froid ne pouvait donner naissance à la bactérie mais seulement conduire à sa prolifération ». À quoi les magistrats ont pu ajouter, suite aux conclusions d'un expert, que l'origine de la maladie (contamination par une souche de salmonelle) et le mauvais état sanitaire de l'établissement étaient suffisants pour conduire à des présomptions graves, précises et concordantes de défectuosité du produit. Appréciation du raisonnement des juges. Si la solution ici rendue ne nous semble souffrir d'aucune critique, le raisonnement déployé par les juges permet de porter au débat une question qui a pu retenir doctrine et jurisprudence, celle de la preuve du défaut. Dans une première lecture, cette décision paraît s'inscrire en tout point dans les solutions de 2008 et de 2012. Plus précisément, il ressort clairement en l'espèce que les mêmes éléments de fait ont servi à établir tout à la fois le lien causal et le défaut. D'aucuns ont pourtant critiqué cette manière de raisonner, laquelle serait contraire à la lettre de l'article 1386-9 qui évoque distinctement ces deux conditions (Cf. notamment en ce sens, P. Jourdain, obs. préc. et J.S. Borghetti, note préc.). La Cour de cassation elle-même a eu l'occasion de rappeler que « la seule implication du produit dans la réalisation du dommage ne suffit pas établir son défaut » (Cass. 1re civ., 22 octobre 2009, n° 08-15171). Probablement au fait de cette position de la Haute juridiction, les magistrats lyonnais n'ont ici pas manqué de reprendre mot pour mot ce principe, en prenant néanmoins le soin d'ajouter que « la preuve du caractère défectueux du produit peut être apportée par des présomptions graves, précises et concordantes ». Prise dans son intégralité, l'affirmation apparaît en son fond comme un leurre ; la décision présentée met bien en lumière cette confusion constante entre la preuve du défaut et la preuve de la causalité. Faut-il alors l'en blâmer? Sauf à défendre un retour à la position antérieure à 2008, nous ne le pensons pas. L'application de la solution consistant à présumer la défectuosité ne peut d'ailleurs, nous semble-t-il, qu' aboutir à un raisonnement circulaire conduisant à prouver le défaut à partir de la causalité et la causalité à partir du défaut. Un arrêt récent du 12 novembre 2015 vient confirmer cette vision dans une motivation aux allures de principe : « le juge du fond peut, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, estimer que les éléments de fait invoqués par le demandeur, [] constituent des présomptions graves, précises et concordantes, de nature à prouver le défaut du vaccin et l'existence d'un lien de causalité de celui-ci avec la maladie du demandeur, nonobstant que la recherche médicale n'établit pas Bacaly n° 8 - juillet 2015-décembre 2015 de lien entre la vaccination et la survenance de la maladie » (Cass.
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3.3.1.8 Différence de traitement de la consonne [ʕ] Cette consonne pharyngale est vocalisée dans certaines localités de la wilaya de Tizi Ouzou (Ath Aissi, Ath Yanni, ).24 Dans ces endroits, les locuteurs remplacent la consonne par l'allongement de la voyelle qui suit ou qui précède, selon les contextes. Sur ce critère de variation, on peut partager les parlers kabyles en trois groupes : D'abord, un groupe où la pharyngale [ʕ] est vocalisée systématiquement. Ce qui donne naissance à un paradigme de voyelles longues. Exemples : [aː] comme dans [aːðaw] (ennemi), [ɔː] comme dans [sɔː] (posséder), [eː] comme dans [eːwəð] (répéter, refaire). Puis un groupe intermédiaire où la vocalisation de la consonne [ʕ] existe dans certains lexèmes et certains contextes, mais elle reste un phénomène marginal. Enfin, un groupe où cette consonne n'est jamais vocalisée. C'est notamment le cas de tous les parlers de l'Est de la Kabylie. 3.3.1.9 Différences de traitement de la consonne emphatique [ðˁ] Dans la ville de Béjaïa et les communes limitrophes ainsi, qu'en Kabylie extrême orientale, la dentale fricative [ðˁ] est réalisée [tˁ] dans tous les contextes. Voici quelques exemples : - [aðˁɑrˁ] > [atˁɑrˁ] (pied) - [ðˁrˁo] > [tˁrˁo] (se passer, se réaliser) - [aðˁo] > [atˁo] (vent) 3.3.1.10 Variation dans la tension consonantique Bien que la tension consonantique soit distinctive en kabyle, cette dernière est sujette à la variation. En effet, un même lexème peut être réalis é avec une tendu e Voir l'article André BASSET sur le sujet « Autour de [ɛ] en Ka bylie, phénomène secondaire » G.L . E . C . S , 2, 1934-37, P. 50. 24 ~ 78 ~ 3-La variation en berbère dans un parler donné et être réalisé avec sa correspondante simple dans un autre parler. Voici quelques exemples de variation régionale : Tableau 17 : exemples de la variation liée à la tension consonantique Réalisation avec une consonne simple [θisisθ] (araignée) [aqʒun] (chien) [θisirθ] (moulin) [ibki] (singe) [qim] (rester, s'asseoir) Réalisation avec une consonne tendue [θisːiθ] [aqəʒːun] [θisːirθ] [ibəkːi] [qːim] Sur ce critère de variation, on peut difficilement tracer des isoglosses entre les parlers kabyles. Car il n'y a pas de tendance claire. Cependant, d'après nos observations sur le terrain, les réalisations avec une tendue sont plus répandues dans la région ouest de la Kabylie (Kabylie du Djurdjura). 3.3.1.11 Traitement inégal de l'affriquée [ts] En kabyle, par rapport au S. Ph. ~ 3-La variation en berbère - Cette affriquée apparaît dans le pronom complément au régime direct de la troisième personne du féminin singulier. Exemple : « yugar-itt » [juʝarits] (il est plus grand qu'elle). - Elle peut aussi être la correspondante tendue de la sifflante [s]. Exemple : [fsi] (fondre) donne à l'aoriste intensif [fətsːi] - Enfin, elle est le résultat d'une assimilation de la particule prédicative [ð] et du [θ] comme marque initiale du féminin. Exemple : « d tamɣart » (c'est une vieille) est toujours réalisé [tsːamʁɑrˁθ] dans ce groupe de parlers. Exception faite pour les parlers de la région d'Ath Yanni qu'on peut classer dans ce groupe, mais ils réalisent cette assimilation en [tː]. Enfin, le troisième groupe comprend certains parlers de la vallée de la Soummam25 qui poussent encore plus loin l'affrication de la dentale occlusive [t]. Dans ces parlers, la dentale [t] est souvent réalisée [ts]. Voici quelques illustrations : Tableau 18 : exemples d'une variation liée au traitement de l'affriquée [ts] Réalisations dans le 3ème groupe [θamðints] (ville) [θuʃːənts] (femelle du chacal) [θaʁzalts] (gazelle) [rˁoħənts] (elles sont parties) 3.3.1.12 Réalisations dans les deux autres groupes [θamðint] [θuʃːənt] [θaʁzalt] [rˁoħənt] Cas de métathèse Dans quelques rares cas, la différence de prononciation est due au phénomène de la métathèse. Voici quelques exemples : Tableau 19 : exemple d'une variation liée à la métathèse Réalisations sans métathèse [fsəχ] (s'évanouir) [θifχəts] (piège) [əfk] (donner) [ajəfki] (lait) Réalisations avec métathèse [χsəf] [θiχfəts] [əçf] [ajəçfi] 25 Ce phénomène d'affrication est particulièrement répandu dans les daïras (sous-préfectures) d'Amizour et de Barbacha. Les locuteurs de ces parlers ont même un verbe spécial pour désigner leur particularisme phonétique. Ils utilisent le verbe « sttuttuy » [stsutsːuj] qui veut dire « utiliser le [ts] d'une manière intensive ». Voir notre corpus où ce phénomène est bien localisé à travers la réalisation du lexème « tamdint » ~ 80 ~ 3- La variation en berbère [χləðˁ] (mélanger ) [mʁi] ( ger , pousser) [χðˁəl] [ʁmi] 3.3.2 Variation lexicale à l'intérieur du kabyle De même que certaines unités phonétiques changent d'une région à une autre, certaines unités lexicales sont aussi différentes d'une région à une autre. 3.3.2.1 Cas de lexèmes de souche berbère vis-à-vis de lexèmes empruntés Dans certains cas, le phénomène est dû à l'emprunt. Dans ce cas de figure, un lexème est emprunté à l'arabe ou au français dans certaines régions alors que l'équivalent de souche berbère est conservé dans d'autres régions. Ce qu'engendre une différence lexicale entre les parlers kabyles. Voici quelques exemples de différences lexicales dues aux emprunts : Tableau 20 : exemples d'une variation liée au phénomène de l'emprunt Dans les régions qui utilisent l'emprunt Kteb (Ecrire) Mas (Toucher (verbe)) Fteḥ (ouvrir) Lmefteḥ (clef) Itqel (lourd (il est)) Xfif (léger (il est)) Axerfi (mouton) Ṣṣif (été (la saison)) Rbiɛ (printemps) Lehwa, lgerra (pluie) Menhu? (qui?) Aɛlayan (grand de taille) Wezzeɛ (vider, déverser) Ṭlam (obscurité) 3.3.2.2 Dans les régions qui utilisent le mot de souche berbère Aru Nnal Ldi Tasarutt Ẓẓay F sus Ike rri A neb du Tafsut Ageffur Anwa? (pour le masculin) et anta? (pour le féminin) Aɣezzfan Senɣel Tallast Cas de lexèmes de souche berbère Dans ce cas de figure, les signifiants impliqués dans la variation sont d'origine berbère. Voici quelques exemples : Tableau 21 : exemples d'une variation liée à l'usage de lexèmes berbères différents Le mot berbère utilisé dans certaines régions Aqcic (garçon) Ibki (singe) Le mot berbère utilisé dans d'autres régions Aqrur Iddew ~ 81 ~ 3-La variation en berbère Tiqcicin (filles) Aydi (chien) Ariḍa26 (jusqu'à présent) Acekkuḥ (cheveux) Imira (maintenant) Tullas Aqjun Ar tura Acebbub Tura Remarque : dans certains parlers, les deux variantes lexicales cohabitent en tant que synonymes. Par exemple, « aqcic/aqrur » sont synonymes dans certains parlers, alors que seule la variante « aqcic » est connue dans d'autres parlers. 3.3.2.3 Le cas de l'emprunt de lexèmes différents Dans certains cas, la différence lexicale vient du fait que tel parler a emprunté un mot étranger pour désigner une réalité, alors que tel autre parler a emprunté un autre mot pour désigner la même chose. Voici quelques exemples : Tableau 22 : exemple d'une variation liée à l'usage d'emprunts différents Emprunt A Lqaḍ (pince) Iqeffazen (gants) Ttamber (timbre) Lǧar (voisin) Aḥcayci (couleur verte) Lawan (le moment de) Ɛeṭṭel (tarder) Emprunt B Akellab Liggat Tafigurt Amɛacer27 Arbiɛi Lmaḥel Ṭul 3.3.3 Variation sémantique à l'intérieur du kabyle La différence linguistique entre les parlers kabyles, peut venir aussi du fait que certains lexèmes ont un sens dans un parler A et ils ont un autre sens dans un parler B. Ce que constitue une différence sémantique. Ce type de variation touche à la fois les emprunts et les lexèmes d'origine berbère. Voici quelques exemples : Tableau 23 : exemples d'une variation sémantique en kabyle Le signifiant kabyle Ggami [gːam] Amelḥan [aməlħan] Le signifié 1 Refuser Le signifi é 2 Etre incapable Beau Salé 26 « ariḍa » est un adverbe de temps qui provient de la lexicalisation accompagnée d'un glissement sémantique de l'expression adverbiale « ar iḍ-a » (jusqu'à cette nuit). 27 « amɛacer » est attesté à Souk El Tenin (en kabyle Extrême orientale) d'après O. KIRECHE (2010, p. 43) ~ 82 ~ 3- La variation en berb ère Azegzaw [azəʝzaw] Nanna [nanːa] Lǧameɛ [ldʒaməʕ] Leḥlawat [ləħlawat] Bzeg [vzəʝ] Caḍ [ʃaðˁ] Abeḥri [avəħri] Aɣebbar [aʁwəbːɑrˁ] Afrux [afrˁoχ] Lqec [lqəʃ] Axenfuc [aχənfuʃ] Ddu [dːu] Tamtunt Bleu Grand-mère (ma) Ecole Gâteaux Mouiller Suffire Brise, rhume Poussière Oiseau Meubles Bouche Aller avec, accompagner Vert Tante paternelle (ma) Mosquée Bonbons Etre enflé Roussir Vent, rhume Pluie Coq Vêtements Nez Marcher Levure Galette, pain traditionnel kabyle Remarque : ce phénomène, bien que marginal, cause beaucoup de problèmes à la standardisation du kabyle. Il pose la question de « quel sens donner à l'entrée dans le dictionnaire? ». Cette question peut être résolue de deux façons : Donner un sens polysémique au mot quand cela est possible. Par exemple : mettre dans le dictionnaire que l'entrée « Amelḥan » peut se traduire par « beau » ou « salé » selon le contexte. Dans les cas où le choix du sens polysémique ne se révèle pas judicieux, le lexicographe peut choisir le sens le plus fréquent en Kabylie. Par exemple, le mot « nanna » veut dire « tante paternelle (ma) » dans la plupart des parlers kabyles. Il a aussi le sens de « grand-mère (ma) » en Kabylie extrême orientale. Donc, il faut choisir le premier sens, puisqu'il est plus fréquent. 3.3.4 Variation morphosyntaxique à l'intérieur du kabyle Comme dans toutes les langues, la morphosyntaxe est le compartiment qui résiste le plus aux changements linguistiques. Les différences qui émanent de la morphosyntaxe entre les différents parlers kabyles sont rares. Néanmoins, nous avons noté quelques-unes. 3.3.4.1 Cas des particules d'orientation « d » et « n » Les particules d'orientation « d » et « n », spécifient la direction de l'action. D'ailleurs, on les utilise presque exclusivement avec les verbes d'action. Par exemple, dans le parler de Zerrouda (Izerruden), présent dans notre corpus, situé en Kabylie extrême occidentale (Commune de Tirmitin, Daïra de Draâ Ben Khedda), la particule « n » n'est pas attestée. 3.3.4.4 Cas des prépositions « deg » et « seg » La préposition « deg » signifie « dans », et la préposition « seg » signifie « de, provenance ». Ces deux prépositions varient énormément d'une région à une autre en Kabylie. D'abord, ils varient phonétiquement. Dans de nombreux parlers occidentaux, ces deux prépositions deviennent, respectivement, « di » et « si » quand elles précèdent un nom qui débute avec une consonne. Exemple : « yusa-d si Marikan » (il est venu d'Amérique). En revanche, dans de nombreux parlers orientaux, ces deux prépositions sont abrégées en « g » quel que soit le contexte. Elles varient aussi dans l'usage, ce qui est la conséquence du changement phonétique, signalé dans le paragraphe précédent. Beaucoup de parlers de Kabylie orientale ont perdu l'opposition entre ces deux prépositions. Du fait que les deux sont abrégées en « g ». Ces parlers utilisent la même forme pour les deux prépositions. Exemple : « atan g taddart » (il est au village) / « yuɣal-d g taddart » (il est revenu du village). Enfin, une autre divergence liée à ces deux prépositions, concerne une poignée de parlers, dans la région d'At Jennad (commune de Timizart), où ces deux prépositions deviennent « i » quand elles précédent un nom avec une initiale consonantique. Exemple : « atan i taddart » / « yuɣal-d i taddart ». Voici un tableau récapitulatif de ces divergences : Tableau 25 : variation morphosyntaxique (cas des prépositions "deg" et "seg") « deg » devant une voyelle « deg » devant une consonne « seg » devant une sonne « seg » devant une voyelle 3.3.4.5 En Kabylie occidentale « g » [gw] En Kabylie orientale «g» Dans la région de Timizart29 «g» « di » «g» «i» « si » «g» «i» « seg » «g» « seg » Position des pronoms personnels affixes En kabyle, les pronoms personnels affixes, directs et indirects, se placent avant le verbe quand le verbe est précédé d'une particule préverbale (ad, a, ur, i, ), et se place après le verbe dans le cas contraire. 29 Voir le parler d'Abizar qui est représenté dans notre corpus 30 Forme relevée dans la région d'At Zmenzer (Kabylie occidentale) 31 Forme relevée dans la région de Tizi Ghennif (Kabylie extrême occidentale) ~ 86 ~ 3-La variation en berbère 3.3.4.7 Cas du morphème de négation La particule de négation se présente sous forme d'un morphème discontinu « ur + verbe + ara » dans la grande majorité des parlers kabyles. C'est la norme. En Kabylie extrême orientale, trois variantes sont attestées selon les parlers : « atḥa + verbe», « ul + verbe + ula », et « ul + verbe + ani ». 3.3.4.8 Cas des verbes de qualité Certains parlers kabyles ont perdu la conjugaison spécifique aux verbes de qualité. Ces derniers sont conjugués comme des verbes ordinaires (verbes d'action) dans ces parlers. Exemple : « zeggaɣit » (ils sont rouges) se dit « zeggaɣen » dans ces parlers. Cela concerne les parlers de la Kabylie extrême orientale ainsi que quelques parlers isolés dans les autres régions kabylophones. C'est le cas, par exemple de quelques parlers de la Kabylie maritime dans la région de Tigzirt32. 3.3.4.9 Cas des indices de personnes de l'impératif L'indice de la deuxième personne du pluriel masculin est « t » dans la plupart des parlers kabyles occidentaux (Kabylie du Djurdjura). Alors que ce dernier est « m » dans la plupart des parlers kabyles orientaux 33 (Kabylie de la Soummam). Exemple : « brut! » [vruθ] (lâchez!) se dit « brum » dans une grande partie des parlers de la vallée de la Soummam. Cet indice de personne se réalise « wt » quand le verbe se termine avec une consonne, dans les parlers d'At Abbas. (NAI 3.3.4.10 Cas de morphologie de l'intensif Le fait qu'il y a plusieurs façons de former l'intensif d'un thème donné, engendre une variation régionale de l'aoriste intensif de certains verbes. Par exemple, pour un même verbe, dans un parler, on forme l'aoriste par préfixation de « tt » et dans un autre, on le forme par la tension consonantique. Voici quelques exemples : « ɣli » (tomber) « gri » [gwri] (rester en dernier) a.i. forme 1 « ɣelli » « gerri » a.i. 3.3.4.11 Cas de la morphologie des emprunts Parfois, la distance linguistique vient du fait que le mot emprunté n'a pas pris la même forme dans tous les parlers. Nous avons recensé deux exemples : Tableau 26 : exemples de la variation liée à la morphologie des emprunts Forme A Forme B Aḥeddat [aħədːaθ]34 (fer à repasser) Leḥdid [ləħðið] Lmelḥ [lməlħ] (sel) Lemlaḥ [lemlaḥ] Awanes [awanəs] (le fait de tenir compagnie) lemwansa [ləmwansa] Aṭbib [atˁviv] (médecin) ṭbib [tˁviv] Tacǧurt [θaʃdʒurˁθ] (arbre) ṭṭejra [tˁːəjˁrˁɑ] Remarque : le plus souvent, cette différence morphologique est due au fait que l'emprunt a subi une intégration morphologique dans certains parlers (ajout du morphème du masculin ou du féminin) alors qu'il est resté tel qu'il est dans d'autres parlers. 3.3.4.12 Cas du morphème du nom d'action verbale : Pour former certains noms verbaux, certains parlers utilisent le procédé de redoublement consonantique et/ou l'alternance vocalique alors que d'autres parlers, pour les mêmes noms verbaux, ils ont recours au préfixe « an » en plus de l'alternance vocalique. Voici quelques exemples qui illustrent cette différence morphologique : Tableau 27 : exemples d'une variation morphosyntaxique (cas du morphène du nom d'action verbale) Le verbe Par redoublement Par préfixation et consonantique et/ou apophonie apophonie Kcem (entrer) Akeccum Anekcum Gzem (couper) Agezzum Anegzum Rfed (soulever) Arfad Anerfud Jmeɛ (regrouper Le mot « aḥeddat », bien que sa racine vient de l'arabe, du mot « ḥadid » qui signifie « fer », elle a subi un glissement sémantique, pour signifier en kabyle « fer à repasser » et non pas « le fer » (le métal). ~ 3-La variation en berbère Remarque : ce procédé de préfixation est très peu utilisé. Dans tous les cas recensés, la forme du verbe est toujours en « c1c2ec3 » (qu'est une racine trilitère). D'après notre enquête, la préfixation avec « an » concerne, dans la plupart des cas, les parlers de l'ouest de la Kabylie et elle est pratiquement inconnue Kabylie orientale. 4.1 4.1 Introduction Comme nous le savons, la langue « berbère » est une langue très dialectalisée, au point que certains berbérisants parlent des langues « berbères » 35 au pluriel, comme on parle des langues latines ou germaniques. Néanmoins, la plupart des spécialistes du berbère sont d'accord sur l'unité profonde de la langue et la diversité de surface qui est l'obstacle principal à l'intercompréhension.36 En général, on parle de trois niveaux de la langue : Le premier niveau est « la langue » qui est une branche de la famille linguistique, l'Afro-asiatique ou le chamito-sémitique, dans ce premier niveau l'intercompréhension est très limitée. Le deuxième niveau est « le dialecte », on ne dénombre pas moins d'une dizaine de dialectes qui peuvent être classés par groupe ou par famille. L'intercompréhension au niveau du dialecte est parfois partielle (par exemple l'intercompréhension d'un kabyle d'extrême-est de la Kabylie avec un kabyle de l'ouest de la Kabylie est très limitée). Mais elle peut aussi être totale dans certains dialectes homogènes, comme le Chleuh. Le troisième niveau linguistique est « le parler ». On peut compter des milliers de parlers à travers toute la berbérophonie. Généralement, l'entité géographique d'un parler est « le village », « la ville » ou « la commune ». L'intercompréhension est totale à ce niveau. Le rôle de la dialectométrie et de la dialectologie en générale, est de mesurer cette variation linguistique et de classer d'une manière objective ce foisonnement de variétés. A noter que « la classification des variétés du berbère a été constamment l'objet de l'attention des linguistes mais d'une manière, soit secondaire, soit partielle. » (NAIT-ZERRAD, 2004a, p. 390). A notre connaissance, peu de travaux scientifiques ont été consacrés à cette problématique, pourtant centrale pour la connaissance et l'aménagement du berbère. Voir à ce sujet un article de Lamara BOUGCHICHE : « Une ou des langues berbères ». In Langue berbères des origines : Bibliographie internationale. p. 25 36 Unité et diversité du , Actes de Colloque International , tome 1, Publication Agraw Adelsan Amazigh, 1991. 4.1-Introduction Cependant, certaines études ont été consacrées à la question, dont nous ferons l'écho ci-après, sans prétendre être exhaustif. Ici, nous parlerons de quelques études qui ont trait à la diversité linguistique berbère et sa mesure. Notamment celles qui concernent la kabylophonie. Dans ce chapitre, nous allons faire un tour d'horizon et dresser un historique des études comparatives berbères. Nous commencerons par les plus anciennes pour finir avec les plus récentes. Nous allons aussi les classer en plusieurs catégories, suivant le type de l'étude. Ces différentes études comparatives peuvent rentrer dans le champ de la géographie linguistique, c'est le cas des travaux de BASSET (1942) et (1929) ou encore du travail de MADOUI (1995). Elles peuvent aussi concerner le champ de la dialectométrie, à l'exemple des travaux de NAIT-ZERRAD (2009), (2006) et (2005), ainsi que le travail de LAFKIOUI sur les parlers rifains (2009a). Une autre catégorie d'études comparatives relève du champ de la linguistique contrastive. C'est le cas de l'étude de KIRECHE (2010) et de l'étude de LAFKIOUI (1995). Enfin, une dernière catégorie d'études, concerne les différents travaux de classification des parlers et dialectes berbères. Cela concerne les études de classifications connues, comme celles de WILLMS (1980) ou AIKHENVALD (1988) de ographie linguistique 4.2.1 L'étude d'André BASSET Sans doute, la plus ancienne étude qui aborde la diversité linguistique en Kabylie est (BASSET A., 1929). Cette étude compare 20 lexèmes issus du vocabulaire du corps humain à travers 219 localités, dans toute la Kabylie. Chacun de ces 20 lexèmes donne lieu à une carte géolinguistique avec des isoglosses. Voici par une carte linguistique du lexème « Mollet » : Figure 8: carte géolinguistique du mot "Mollet" en Kabylie (A. Basset, 1920) Les 219 points d'enquête pris par l'auteur sont répartis sur tout le territoire de la Kabylie. Chaque carte comporte une légende, en bas à droite. A première vue sur la carte, nous remarquons que ce lexème a trois ou quatre variantes dominantes, selon la région. Les autres variantes sont la particularité d'un nombre restreint de localités. Par exemple, la variante « tabellult » (représentée par un petit triangle avec un point au centre) est majoritaire, alors que la variante « tahabbirt uḍar » (représentée par une sorte de « E » renversé) est propre à un seul point dans la carte, situé à l'extrême ouest de la Kabylie. Ce travail précurseur de BASSET peut être considéré comme étant une ébauche à la réalisation d'un Atlas linguistique de la Kabylie. ~ ~ 4-Etat des lieux des études comparatives en berbère 4.2-Les études de géographie linguistique 4.2.2 Le travail de K. MADOUI Un travail plus récent et plus complet, est le travail de MADOUI (1995). Contrairement au travail d'A. BASSET qui englobe toute la Kabylie (219 points d'enquête), le travail de MADOUI est une étude de microdialectologie puisqu'il n'inclut uniquement six localités de Béjaïa. Les six localités ont été choisies de façon à toucher une bonne partie de la wilaya de Béjaïa de l'est à l'ouest et du nord au sud. Elles sont divisées en deux groupes. Chaque groupe comporte trois points d'enquête : - Le groupe de la Vallée de la Soummam : - Point 1 : Seddouk - Point 2 : Timezrit - Point 3 : Amizour - Le groupe du littoral Est de Bejaïa (Isaḥliyen): - Point 4 : Tichy - Point 5 : Aokas - Point 6 : Melbou Voici la localisation de ces points d'enquête sur une carte : Figure 9 : carte des points d'enquête de l'étude de MADOUI (1995) Les données utilisées par l'auteur concernent trois niveaux de la langue qui sont : le niveau lexical, le niveau phonético-phonologique et le niveau syntaxique. Et ~ 94 ~ 4-Etat des lieux des étud es comparativ es en berb ère 4.2 - Les étud es de géographie linguistique ont été choi sies selon le principe d'une divergence susceptible, ainsi l'affirme l'auteur : « les différents points d'étude présentés à chaque niveau sont, en grande partie, ceux où il peut, a priori, y avoir des divergences ». (MADOUI, 1996, p. 107) Au niveau phonético-phonologique, MADOUI a enquê sur des phénomènes comme : - La vocalisation de la semi-voyelle : [w] → [u], exemple : [Wːəθ] est réalisé [uθ] dans certaines localités. - Le traitement de la dentale [ðˁ] qui se réalise sourde occlusive [tˁ] dans certaines localités. Au niveau syntaxique, l'auteur traite des points comme : - La particule de négation verbale qui, selon la localité, se réalise : (Ur-----ara), (Aṭḥa-----), (ul-----ani), (ur-----wara), etc. - La particule d'aoriste « ad » qui devient « di » dans certains parlers. Enfin au niveau lexical l'auteur traite quelques termes du vocabulaire du corps humain ainsi, qu'une soixantaine de verbes. Les conclusions de l'auteur sur son enquête sont : « Il y a un regroupement des parlers étudiés en deux blocs séparés par une frontière assez nette résultant d'une convergence d'isoglosses : nous avons d'un côté ceux de la Soummam et de l'autre ceux du Littoral » (Id., p.115). Il affirme aussi que : « Les divergences entre les variétés du kabyle se situent à des degrés divers, au niveau de la morphologie, du lexique et de la phonétique [] Elles sont par contre, quasiment nulles au niveau de la syntaxe où les inventaires des paradigmes grammaticaux sont, à quelques exceptions près, presque identiques dans tous les points d'enquête ». (Idem). Le point fort de cette étude est son corpus. En effet, la grille d'enquête utilisée par MADOUI est très large et prend en considération toutes les composantes de la langue (composante syntaxique, composante phonétique, ). Son point faible est le nombre très restreint de points d'enquête. Car, six points d'enquête sont vraiment insuffisants pour tenter de classifier les parlers de la Kabylie orientale. On peut noter, par exemple que les parlers du sud-ouest de Béjaïa (Tazmalt, Akbou, Ighil Ali, ) ne sont pas représentés. 4.2.3 Le travail de BOUDJELLAL Un travail plus récent qui rentre dans le champ de la géographie linguistique est celui d'un étudiant de l'INALCO, BOUDJELLAL. Son travail porte sur le domaine chaoui et s'intitule « Contribution à la géographie linguistique du berbère Chaouïa » (mémoire de Master 2, soutenu en 2008, sous la direction de NAIT-ZERRAD). L'objectif de l'étude : Le but de son étude est de mettre en exergue la variation linguistique dans le domaine chaoui (la région des Aurès) et de répartir les parlers chaouis en groupes linguistiques plus ou moins homogènes. C'est ce que nous pouvons lire dans son travailː « évaluer les degrés d'unité et de diversité entre les divers parlers choisis et, ainsi, de prouver l'existence de lignes d'isoglosses et /ou une rupture entre certains parlers chaouis. » (p. 12) Les points d'enquête : Pour toucher l'ensemble du territoire des Aurès, BOUDJELLAL a choisi 13 points d'enquête selon leur localisation (nord, sud, ouest, est et centre). Ces points d'enquête sont pris dans les six wilayas (départements) qui forment le domaine chaoui. En l'occurrence, Batna, Biskra, Khenchla, Guelma, Souk-Ahras, et Om-elbouaghi. La wilaya de Batna est la région la plus représentée puisqu'elle comporte 6 points d'enquête sur 13. La méthode d'enquête : Les données de cette étude ont été recueillies à l'aide d'un questionnaire directe. Pour le parler des Ait Frah de Ain Zaatout, l'auteur a utilisé des références livresques (p. ). Pour chacun des autres points d'enquête, l'auteur a interrogé un informateur. Les questions ont été données en français. Les réponses dans le parler local, ont été enregistrées, à l'aide d'un dictaphone, sous un support audio d'une durée moyenne de 45 minutes. « Les informateurs choisis sont des personnes natives des localités prises comme points d'enquête et ils y ont toujours vécu. » (p. 14) Ils ont été aussi choisis selon leur ascendance. Sur la base de ce critère, l'auteur de cette étude a sélectionné uniquement les informateurs ayant des parents natifs de la localité en question. (Idem). Concernant l'enquêteur, il affirme qu'il est natif des Aurès et locuteur du dialecte chaoui, mais il n'a jamais vécu dans la région. Le questionnaire utilisé : ~ 96 ~ 4-Etat des lieux des études comparatives en berbère 4.2-Les études de géographie linguistique Le questionnaire utilisé par BOUDJELLAL compte trois composantes : La composante phonétique Dans cette partie du questionnaire, l'auteur enquête sur la variation qui concerne des phénomènes comme la labiovélarisation (exemple : /q/ > /qw/) ou l'assimilation dans la chaîne (exemple : réalisation de /n+ w/). La composante syntaxique Dans cette partie du questionnaire, l'auteur enquête sur la variation qui touche des éléments syntaxiques comme les paradigmes des affixes de nom (possessifs) et des verbes. La composante lexicale Dans cette dernière partie du questionnaire, l'auteur cible la variation lexicale en utilisant une liste établie par NAIT-ZERRAD (223 lexèmes). L'argument de l'auteur pour le choix de cette liste, est le fait qu'elle ne contienne que les lexèmes faisant partie du vocabulaire fondamental (exemples : boire, demain, habiter). Car ce dernier contient moins d'emprunts. Les résultats de l'étude : Dans un premier temps, dans la partie « analyse des matériaux », l'auteur analyse séparément les trois composantes de son corpus. C'est-à-dire, les données phonétiques, les données lexicales et enfin les données syntaxiques. Dans la partie phonétique, pour chaque phénomène ciblé par le questionnaire – exemple : passage du [g] > [j] –, l'auteur nous donne la variante attestée dans chaque point d'enquête. Dans la partie lexicale, l'auteur nous livre essentiellement une analyse statistique du lexique présent dans son corpus. Par exemple, il nous donne le pourcentage de convergence entre tous les parlers, qui est de 75 %. De même, pour chaque paire de parlers pris séparément. Enfin, dans l'analyse des matériaux grammaticaux, il nous fait état de convergence et de divergence entre les parlers, pour chaque paradigme grammatical présent dans sa grille d'enquête. Dans un second temps, l'auteur fait un essai de classification des parlers en groupes, en traçant des isoglosses à partir de quelques échantillons jugés « discriminants » par l'auteur. Pour le niveau syntaxique, BOUDJELLAL ne prend en compte qu'un seul élément syntaxique, qui est : le paradigme des affixes de noms (directs et indirects), de la deuxième personne du pluriel. Mais au final, pour la production des cartes géolinguistiques, BOUDJELLAL se limite à cinq éléments, quatre phonétiques et un grammatical, qui ont donné lieu à cinq cartes géolinguistiques. Les faisceaux d'isoglosses tirées de ces cinq cartes ont permis à l'auteur de produire une sixièmee carte qui constitue le résultat final. Cc'est-à-dire la classification des 13 parlers étudiés en différents groupes. Les six cartes sont données en annexe de son travail. Voici la carte qui représente la classification générale en trois groupes linguistiques : Figure 10 : carte des groupes linguistiques chaouis issus de l'étude de BOUDJELLAL Il y a d'abord un groupe de parlers orientaux, qui est visiblement majoritaire, puis deux groupes de taille à peu près équivalente, l'un constitue les parlers occidentaux (nord-ouest sur la carte) et l'autre regroupe les parlers du centre (centre ouest sur la carte). Pour conclure la présentation de ce travail de géolinguistique sur le domaine chaoui, nous dirions qu'il a le mérite d'être l'une des premières études géolinguistiques sur le chaoui. Un autre point positif, est sa grille d'enquête qui assez large. Par exemple, 223 entrées pour la partie lexicale. La critique que nous pouvons apporter à ce travail, porte essentiellement sur le fond, 'est-à-dire l'analyse géolinguistique. En effet, la partie analyse ne fait que quelques pages et elle est très sommaire. 4.3-Les études contrastives 4.3 Les études contrastives La linguistique contrastive est avant tout connue dans la comparaison de langues distinctes. Par exemple, comparer l'adjectif entre le français et l'anglais. Mais pour des langues aussi dialectalisées que le berbère, l'analyse contrastive inter ou intra dialectale peut s'avérer judicieuse pour avoir une meilleure connaissance sur la variation dialectale. Les études contrastives n'ont pas pour but la classification des variétés étudiées, puisqu'elles se limitent à deux ou trois variétés ou à un seul élément de grammaire, qui ne permet pas d'en tirer une classification. Pour les comparaisons interdialectales, nous pouvons citer le travail de LAFKIOUI (1995), le travail de ZOUAOUI (1996), l'étude de ACHOUR (2004), ou plus récemment encore, l'étude de NAHALI (2005) 4.3.1 Exemple d'une étude intradialectale du kabyle Ici, nous allons nous intéresser à une étude intradialectale d'une étudiante de l'université de Tizi Ouzou (département de langue et culture amazighes) en guise d'exemple, car elle touche directement à notre terrain d'enquête. Le travail que nous allons décrire ici est celui de KIRECHE (2010) L'étude est consacrée à la comparaison lexicale du kabyle parlé dans deux régions éloignées. L'une est la région de Sidi Ali Bounab (désormais S.A.B), située à l'extrême ouest de la Kabylie (dans la commune de Tadmaït, wilaya de Tizi Ouzou) et l'autre est la région de Souk El Tenine (désormais S.E.T), située à l'extrême-est de la Kabylie (commune qui porte le même nom, wilaya de Béjaïa). Voici une carte qui illustre la situation géographique des deux régions en question : ~ 100 ~ 4-Etat des lieux des études comparatives en berbère 4.3-Les études contrastives Figure 11 : carte de la Kabylie, points d'enquête de KIRECHE (représentés par les taches blanches ) Le corpus de l'étude : Le corpus a été recueilli sous forme d'enregistrement audio (des conversations avec les informateurs), trois informateurs dans la région de S.E.T et deux informateurs à S.A.B. Au total, le corpus compte environ quatre heures d'enregistrements et l'étudiante a dénombré 1872 termes différents. (KIRECHE, 2010, p. 12) Ensuite, pour sélectionner la liste de termes à retenir pour comparer les deux parlers, KIRECHE utilise une méthode statistique basée sur la fréquence des termes dans le corpus. Elle a retenu les termes les plus fréquents dans le corpus. Pour compléter cette liste, elle a constitué une liste de lexèmes qui intègrent des champs lexicaux usuels, comme le corps humain, la nourriture et les couleurs. Ainsi, ces termes usuels intègrent le corpus même s'ils apparaissent peu ou pas du tout dans le corpus enregistré. Dans ce dernier cas, l'étudiant a cherché l'expression de ces notions à l'aide d'un questionnaire directif. L'objectif étant de comparer principalement les lexèmes faisant partie du vocabulaire fondamental. Au total, selon l'auteur, le corpus retenu pour la comparaison compte 946 unités lexicales. Elle a constitué deux listes : une liste de noms et une liste de verbes. Les entrées sont numérotées. Chaque entrée comporte l'unité lexicale telle qu'elle existe dans le parler de S.A.B, accompagnée d'un ou de plusieurs synonymes quand ils existent, suivie de la signification en français et terminée par l'équivalent ou les équivalents dans le parler de S.E.T. Voici un exemple : ~ 101 ~ 4-Etat des lieux des études comparatives en berbère 4.3-Les études contrastives « 163 – nɣed, eẓd (S.A.B) « broyer, piler, moudre » / ẓed (S.E.T) » (KIRECHE, 2010, p. 172) Les différentes parties de l'étude : Cette étude de KIRECHE est divisée en trois parties : la première partie traite de la variation au niveau morphologique, la deuxième traite de la variation au niveau sémantique, et enfin la troisième et dernière partie aborde l'incidence de la variation lexicale (sémantique et morphologique) sur l'intercompréhension entre les locuteurs des deux variétés. Dans la partie « variation morphologique » elle les unités lexicales qui ont le même sens, mais dont la forme varie entre le parler de S.A.B et le parler de S.E.T. Ces variations morphologiques sont classées en deux principales catégories : Il y a d'abord les variantes dont la forme est partiellement différente. Dans ce cas de figure, l'apparenté entre les deux variantes est établie. Généralement, « la variation se réalise par un simple changement vocalique ou par altération de racines accompagnée ou non d'un changement vocalique. » (KIRECHE, 2010, p. 23) Un exemple concret de ce type de variation est le lexème « dent », réalisé [θuʁməsθ] « tuɣmest », à S.A.B et réalisé [θiʁməsθ] à S.E.T. Les deux variantes sont clairement apparentées et le passage de la première variante à la deuxième variante nécessite uniquement le changement de la première voyelle [u] en [i] et vice-versa. Puis, KIRECHE nous présente les variantes totalement différentes. - Nanna [nanːa] : signifie « ma tante paternelle » dans le parler de S.A.B et signifie « ma grand-mère » dans le parler de S.E.T. - Afrux [afruχ] : signifie « oiseau » à S.A.B et signifie « coq » à S.E.T. Enfin dans la troisième et dernière partie de son travail, elle étudie l'incidence de la variation, qu'elle soit morphologique ou sémantique, sur l'intercompréhension. 4.4 Les études de classification Quand on parle de variation, on parle souvent de classification. C'est particulièrement vrai pour les langues à forte hétérogénéité comme le berbère. La classification des variétés du berbère a souvent suscité de l'intérêt auprès des linguistes. Mais le problème a rarement été traité d'une manière sérieuse et complète. Ainsi, CHAKER écrivait, en 1982, dans son compte-rendu du livre d'A. WILLMS sur la classification des dialectes berbères : « Dans ce domaine, prévalaient généralement l'impressionnisme et des idées sommaires, le plus souvent sans fondements linguistiques, qui traînent dans la littérature depuis la fin du XIXe siècle (comme celle d'une opposition entre dialectes « zénètes » et « sanhadjas », directement issue de la littérature historique ». (CHAKER, 1982, p. 154) Ici, nous présenterons brièvement les principales études de classification des variétés du berbère. Nous les présenterons par ordre chronologique, des plus anciennes aux plus récentes. 4.4.1 La classification en parlers « zénètes » et « sanhadjas » : Les premières classifications des variété s du berbère trouvent leurs sources au moyen-âge , notamment dans les écrits de l'historien IBN KHALDOUN. La classification qui prédominait à l'époque était d'inspiration généalogique. La généalogie étant à la mode à cette époque, IBN KHALDOUN avait classé les Berbères et leurs variétés linguistiques selon leurs supposés ascendants. On divise alors les parlers berbères en deux grands groupes : les parlers « zénètes », et les parlers « sanhadjas ». Cette théorie a survécu jusqu'à l'époque moderne, que certains berbérisants continuent à parler de dialectes zénètes pour désigner un groupe de variétés dont fait partie le chaoui et le rifain, qui partagent un certain nombre de caractéristiques qui les opposent au reste des parlers berbères. Cependant, cette classification a été réfutée par plusieurs berbérisants.37 4.4.2 La classification de René Basset (dialecte fort, dialecte faible) (1887). R. BASSET a proposé dès 1887 dans son Manuel de langue berbère, une classification des variétés du berbère basée des critères purement phonétiques. 37 Voir (AMEUR, 1990, pp. 15-17) pour la critique de cette classification. Suivant cette classification, les dialectes berbères sont classés en trois groupes, selon le degré de spirantisation. Les parlers les plus occlusifs sont classés dans le groupe des dialectes forts. Les parlers où le processus de spirantisation est le plus avancé, sont classés dans le groupe des dialectes faibles. Entre les deux groupes, il y a les dialectes intermédiaires : Les dialectes forts : touareg du nord, zouara, chleuh, Ghadamès, Siouah, Ksour du Sud oranais, Béni Iznacen Les dialectes faibles : touareg des Aoulimiden, zénaga et probablement le guanche. Les dialectes intermédiaires : rifain, zénatia des Béni-Menacer, du Mzab, de Oued Righ, Chaouia (AMEUR, 1990, p. 17). C'est sur ce critère de spirantisme que plusieurs berbérisants contemporains, classent les dialectes berbères en deux grands groupes : les dialectes spirants au nord de la berbérophonie (kabyle, chaoui, rifain) et les dialectes occlusifs au sud de l'espace berbérophone (touareg, chleuh, ). Mais, il est évident qu'un seul trait linguistique, comme le spirantisme, ne permet pas de classer les dialectes en groupes. Deux variétés peuvent être très proches et ne pas partager ce trait phonétique et vice-versa. Classer dialectes en spirants et occlusifs, permet uniquement de localiser ce phénomène phonétique. 4.4.3 La classification de DESTAING (1920) DESTAING (1920) est le premier berbérisant à avoir tenté de classer les dialectes berbères sur des critères linguistiques multiples (phonétiques, morphologiques, syntaxiques et lexicaux). Son étude a abouti à la classification des parlers berbères du Maroc, en deux grands groupes : - Les parlers du nord : o le dialecte rifain : parlers des Aït Ourighel, Aït Ittelft, Temsaman, o les parlers des Béni Iznacen, des Aït Waraïn, des Aït Seghrouchen, Imermouchen, - Les parlers du sud : o les parlers chleuhs ~ 105 ~ 4-Etat des lieux des études comparatives en berbère o les parlers du tamazight de l'Atlas, avec distinction entre les parlers du sud de l'Atlas (Haut Atlas) et les parlers du nord de l'Atlas (Moyen Atlas). Cette classification n'est pas très différente, de la traditionnelle division des parlers marocains en trois dialectes, le chleuh au sud, le rifain au nord et le tamazight entre les deux zones, en formant un continuum linguistique, et une variation graduelle en passant des parlers rifains les plus au nord aux parlers chleuhs les plus au sud. - La grammaire : le paradigme des pronoms personnels. - Le paramètre de conservatisme et d'innovation. - Le taux d'emprunts à l'arabe. Cette grille d'enquête est jugée très élaborée par rapport à celles des classifications précédentes. Ainsi, on peut lire dans le compte-rendu de CHAKER, consacré à ce livre : « L'instrument de discrimination d'A. Willms est incomparablement plus élaboré, plus précis, et plus objectif que tout ce que l'on a pu utiliser comme critères d'identification et de classification des dialectes jusqu'à maintenant. » (CHAKER, 1982, p. 155) Cette grille d'enquête lui a permis de classer les différentes variétés du berbère en trois catégories : des langues, des dialectes et des parlers. Quatre groupes de variétés sont formés, dont le kabyle occupe un groupe à part et considéré comme une langue berbère à part entière, au même statut que le touareg : 38 du berbère ~ 106 ~ 4-Etat des lieux des études comparatives en berbère - Groupe 1 : Chleuh, Berabers du sud, Zayan et Zemmour, Ait Ndhir - Groupe 2 : Béni Iznacen, Sanhadja, Béni Snous, Rif - Groupe 2 : Mzab, Wargla, Nefoussa, Chaouia, Siwa et Touareg - Groupe 4 : Kabyle Cette classification a été très critiquée par plusieurs berbérisants. Notamment par CHAKER dans son compte rendu cité ci-dessus. Il est évident qu'à première vue des différents groupes formés, classer le chaoui et le touareg dans le même groupe et mettre le kabyle dans un groupe différent, semble plus que douteux. Car il est notoirement connu que le chaoui est plus proche du kabyle que du touareg. Et de toute évidence, l'intercompréhension, entre un kabylophone et un chaoui, est au moins partielle, alors que cette dernière est nulle s'agit d'un kabyle et d'un locuteur du touareg. 4.4.5 La classification d'AIKHENVALD (1988) La classification d'Alexandra AIKHENVALD, publiée sous forme d'un article (1988), s'est basée essentiellement sur des critères grammaticaux. Son étude a pris en compte 47 parlers (AMEUR, 1990, p. 22), répartis sur toute l'aire berbérophone. 4.4.6 La classification de DURAND (1992) Dans un article publié sous le titre ("L'enchevêtrement des parlers berbères", 1992), DURAND s'est démarqué des classifications précédentes, en proposant une classification des parlers berbères sur la base de critères sociolinguistiques et géographiques. Ainsi, DURAND aboutit à deux types de classification. Une classification purement géographique : - Berbère oriental (Siwa, Libye) - Berbère occidental (kabyle, chaoui, Maroc) - Berbère central (zénètes) Et une classification sociolinguistique : - Berbère nomade (touareg) - Berbère sédentaire - (Pré)-désertique - Véhiculaire : chleuh, Mzab, djebel Nefoussa, Zouara ; - Domestique : ghmara, ksours et oasis algériens, sud tunisien, Aoudjila, Siwa. - Montagnard : beraber Nord et Sud, rifain, chenoua, kabyle, chaoui. - Berbère « officiel » : kabyle, chleuh, touareg Comme on peut le voir, la classification de DURAND n'a rien d'une classification linguistique. Elle permet juste de classer les groupes berbérophones selon leur mode de vie (nomade, sédentaire), leur situation géographique par rapport l'Afrique du Nord (Est, Ouest, Centre), la topographie de leur milieu de vie (montagne, désert, ) et le statut social de leur langue (officiel, domestique, ). Il s'agit plus de l'attribution de caractéristiques sociolinguistiques et géographiques des différents groupes berbérophones et leurs idiomes, qu'une vraie classification linguistique qui permettra d'établir une filiation que entre les différentes variétés. Ainsi, le touareg par exemple, est décrit par DURAND comme étant un dialecte bénéficiant d'un statut social « officiel » et parlé par des locuteurs ayant un mode de vie « nomade ». Chose qui ne constitue pas une nouveauté et n'aide pas vraiment à avancer sur la question de la classification. 4.4.7 La classification de NAIT-ZERRAD (2001) Kamal NAIT-ZERRAD, dans un article publié en 2001 sous le titre de ("Esquisse d'une classification linguistique des parlers berbères"), puis republié en 2004 dans (NAIT-ZERRAD, 2004c), propose une classification des différentes variétés du berbère, sur la base d'un grille d'enquête qui prend en compte les différentes composantes de la langue, en l'occurrence : la phonologie, la morphosyntaxe et le lexique. Dans cette première étude , il a classé une trentaine de dialectes berbères (voir le tableau des variétés retenues, ci-après) selon 8 critères qui sont : 1. Les verbes de sch ème CC (sans voyelle pleine ) 2. La morphologie des déic tiques de proximité 3. La morphologie et la conjugaison des verbes de schème CCU/CCA 4. La présence ou l'absence de la voyelle initiale des noms 5. La réalisation des vélaires [k], [kː], [g] et [gː] 6. La réalisation de la consonne [n] 7. La présence de l'aoriste intensif négatif 8. Un échantillon de vocabulaire Ci-dessous les variétés que l'auteur a incluses dans sa classification : 1a Maroc 1b Rif Iznacen 6e 6f Kabylie Aurès 1c 7a Timimoune 2a 2b 2c Sanhadja (Srair) Seghrouchen Ndhir Izdeg 7b 7c 8a Mzab Ouargla Ahaggar 2d 2e Goulmima Tinghir 3a 3b 3c 3d 4a Semlal Imghid Ighrem Tata Figuig 5a Mauritanie Zenaga 6a Algérie Béni-Snous 9a Niger 9b Iwellemmeden (W) Aïr (Y) 10a Mali Taneslemt 11a Tunisie Djerba 12a Libye 12b 12c ~ 109 ~ Ghadamès Nefousa Foqaha 4-Etat des lieux des Les données recueillies par l'auteur sont placées dans des tableaux (un tableau pour chaque critère retenu). Dans ces tableaux, on retrouve les variétés concernées dans une colonne et les réalisations respectives dans la colonne d'en face. De cette façon, il est relativement facile de voir le degré de variation entre les dialectes. Cette classification a donné quatre groupes de dialectes. Chaque groupe se compose d'un ou de plusieurs sous-groupes : - Le premier groupe est composé de 5 sous-groupes : 1.1 MC (les parlers du Maroc Central : Ait Ndhir, Goulmima, Tinghir, Izdeg)/Sanhadja du Srair/CHL (les parlers du sud marocain : Tata, Ighrem, Semlal, Imghid)/Zenaga (ZEN)/Kabyle (Kab). - Le quatrième et dernier groupe est : 4.1 Ait-Seghrouchen (Sgh.)/ Figuig (Fig.)/ Béni Snous (SNS)/ Bissa/Mzab (Mzb)/ Ouargla (Oua.) 4.2 Iznacen (Izn)/Jerba (Jr) 4.3 Rif/Metmata (Met)/ Aurès (Aur) 4.4 Chenoua Ce classement est résumé dans le schéma suivant, élaboré par l'auteur : ~ 110 ~ 4-Etat des lieux des études comparatives en berbère Figure 12: classification des variétés du berbère proposée par NAIT-ZERRAD (2001) L'auteur divise les quatre groupes ci-dessus en deux grands ensembles. Le premier ensemble englobe les trois premiers groupes et le deuxième ensemble englobe le quatrième groupe. Ce quatrième groupe est appelé, traditionnellement, groupe « zénète » (NAIT-ZERRAD, 2004a, p. 410) 4.4.8 La classification R. BLENCH (2006) Dans une publication récente, dans la revue « ethnologue », Roger BLENCH propose une classification des variétés du berbère, dans le cadre d'une classification plus générale qui comprend toutes les variétés de la famille afro-asiatique, y compris les variétés éteintes. Voir (BLENCH, 2006). BLENCH n'est pas un spécialiste du berbère, ni un spécialiste des autres langues afro-asiatiques listées dans son document. Mais il a soumis son travail à des spécialistes de ces langues pour avoir des commentaires. Il a cité notamment Maarten KOSSMANN et Naïma LOUALI pour le berbère. Ci-dessous la classification qu'il a proposée pour le berbère : Tableau 28 : classification des variétés du berbère (Roger BLENCH) Famille Guanche Numidien oriental Berbère moderne Branche Sous-branche Oriental Langue Guanche Numidien oriental Siwa Awjila Sokna Ghadamès Zurg (Kufra) Fezzan Touareg ~ 111 ~ Tawellemet lecte Tmessa Al-Fojaha Abalagh (Est) 4-Etat des lieux des études comparatives en berbère (méridional) Tayirt Occidental Septentrional Tamsegrest Tafaghist Tahaggart Ghat Zenaga Ouest Ingal Gofat Azerori Chleuh Tamazight Kabyle Atlas Kabyle Groupe rifain Zenati Mzab-Ouargla Zenati oriental Chaoui Tidikelt Tuat Tarifit (rifain) Ghmara Tlemcen Bassin de chlef Gourara Mzab Ghardaïa Touggourt Serghouchen Figuig Sanhadja Iznacen Tmagourt Sened Djerba Tamezret Taoujjout Nefoussi Zraoua Comme on peut le voir sur le tableau ci-dessus, BLENCH part sur l'hypothèse de l'existence de trois branches principales du berbère. Le numidien de l'Est (ancien libyen) qui est une langue éteinte, le guanche qui est aussi une langue éteinte dont la parenté avec le berbère n'est pas totalement établie, et enfin la branche des variétés du berbère actuel . Comme on peut le voir sur le tableau précédent, BLENCH a classifié les variétés du berbère sur trois niveaux hiérarchiques : les branches ou sous-branches de langues berbères, les langues berbères, puis enfin les dialectes ou parlers berbères. Chaque branche peut contenir plusieurs langues, et chaque langue peut contenir plusieurs dialectes ou parlers. Les branches des langues représentées, répondent d'abord à la localisation géographique : - la branche orientale (Siwa, Awjila, Sokna, ) ; - la branche méridionale (les langues touarègues) ; - la branche occidentale (Zenaga) ; - la branche septentrionale qui est constituée de plusieurs sous-branches : - les langues de l'Atlas (chleuh, Tamazight) - la langue kabyle - les langues zénètes. Ce dernier groupe est constitué de 3 groupes de dialectes : o le groupe rifain (chaoui, rifain, Tidikelt) o le groupe Mzab-Ouargla (Mzab, Iznacen, Gourara, ) o le groupe zénète oriental (Djerba, Zouara, Nefoussa, ) Selon cette classification, certaines variétés ont le statut de langues à part entière, comme le kabyle et le zénaga. D'autres ne seraient que des dialectes d'une même langue, à l'exemple du groupe de dialectes du zénète oriental (Djerba, Zouara). Cette classification de BLENCH, a le mérite de proposer une classification d'un grand nombre de variétés du berbère. Cependant, elle n'échappe pas à la critique. Comme nous l'avons signalé au début de la présentation de cette classification, l'auteur n'est pas un berbérisant. Son travail ne se e pas uniquement sur les variétés du berbère, puisqu'il englobe toute la grande famille afro-asiatique. De plus, le statut de sa publication est provisoire. En effet, son papier est publié avec le statut de « circulation draft » (brouillon en circulation), pour permettre aux linguistes spécialistes de ces langues de le commenter. De plus, l'auteur ne fournit aucune grille d'enquête et ne donne aucune indication sur la méthode suivie pour établir sa classification.
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Chapitre III : Elaboration de films Cr-Al-C par HiPIMS à partir d'une cible céramique Figure III-36 : Evolution de la force tangentielle en fonction de la force normale appliquée au revêtement Cr-Al-C recuit à 500°C pendant 50 h, essai répété 4 fois. Cette bonne adhérence du revêtement Cr2AlC sur substrat base zirconium est également mentionnée par Zhang et al. [69]. Dans cette étude, Cr2AlC est synthétisé in situ par pulvérisation cathodique magnétron à 700°C, sur substrat Zy-4. Il est difficile de comparer nos résultats avec ceux de cette étude car un nombre trop élevé de paramètres sont susceptibles d'affecter les valeurs mesurées. Il faut notamment prendre en compte des paramètres à la fois relatifs au revêtement (microstructure, cristallinité, composition, épaisseur), mais aussi au procédé d'élaboration (température, pression, vitesse de croissan ce), au substrat et également à l'a ppareil lage de me sure (nature et charge appliquée sur l'indenteur, vitesse de chargement et de balayage). 3. Bilan de l'élaboration de revêtements Cr2AlC Les performances du réacteur semi-industriel HYBRIDE n'ont pas permis de synthétiser in situ des revêtements Cr2AlC. Une autre approche a donc été mise en oeuvre pour répondre à la problématique initiale. Les couches Cr-Al-C telles que déposées ont été traitées thermiquement sous air ou sous balayage d'argon à partir de 500°C. Les résultats associés à cette stratégie de synthèse en deux étapes ont montré qu'il est possible d'obtenir des films cristallins avec une structure fine, globulaire et sans pores, composé d'un mélange de solution solide désordonnée (Cr, Al)2Cx et de phase ordonnée Cr2AlC. De plus, cela conduit à la formation d'une zone de diffusion entre le revêtement et le substrat Zr702, ce qui permet d'obtenir une très bonne adhérence de la couche. Dans certains cas, et pour des températures supérieures à 600°C, le traitement thermique peut dégrader les performances initiales. L'étude a également confirmé les variations de concentration causées par des tensions de polarisation élevées observées dans le réacteur TUBE en raison de la haute teneur en ions métalliques du procédé HIPIMS qui conduit à une repulvérisation des atomes d'Al. Chapitre III : Elaboration de films Cr-Al-C par HiPIMS à partir d'une cible céramique C/ Conclusions Ce chapitre présente la pulvérisation magnétron en régime HiPIMS comme une alternative intéressante pour la synthèse de revêtement Cr2AlC à partir d'une cible céramique. Ce procédé a d'abord fait l'objet d'une étude, notamment sur sa capacité à fournir des espèces chargées à partir d'une cible céramique. Nous avons étudié l'effet de différents paramètres ton, f, P(Ar)) sur le courant magnétron et sur les ions créés dans la décharge. L'ensemble des résultats a permis de mettre en évidence le fort taux d'ionisation des atomes de Cr et Al pulvérisés mais aussi d'Ar comparativement à un procédé de pulvérisation cathodique magnétron conventionnel, quelles que soient les conditions de décharge. Ainsi, les couches déposées ont des caractéristiques adaptables en fonction des paramètres de dépôt. À P(Ar) faible, des couches denses se développent tandis qu'à plus forte P(Ar), les couches présentent une structure colonnaire. Par ailleurs, travailler à Vs élevée induit des défauts et des phénomènes de repulvérisation d'Al en raison du bombardement ionique intense. Il s'avère donc primordial de travailler à des valeurs de Vs comprises entre -100 et -50 V. Ces essais ont finalement confirmé de l'importance de chauffer le substrat pour obtenir un film cristallin. Chapitre III : Elaboration de films Cr-Al-C par HiPIMS à partir d'une cible céramique Enfin, dans le but d'obtenir des revêtements Cr2AlC in situ, il conviendrait d'optimiser le système de chauffage. Il faudrait notamment utiliser des radiants infrarouges avec un spectre d'émission électromagnétique émis proche du spectre d'absorption du matériau à traiter. De plus, le type d'émetteurs aura également son importance puisque des ondes courtes auront tendances à pénétrer profondément dans le matériau tandis que des ondes moyennes chaufferont plus la surface. Pour terminer, on peut se demander s'il est important d'avoir un matériau cristallin pour notre application de protection contre la corrosion haute température. En effet, cela rajoute une étape supplémentaire dans le procédé d'élaboration. La question de l'influence de la structure cristalline sur le comportement vis-à-vis de l'oxydation sera notamment étudiée dans le chapitre IV. Chapitre III : Elaboration de films Cr-Al-C par HiPIMS à partir d'une cible céramique Références bibliographiques du chapitre III [1] L.d. Poucques, J.-C. Imbert, C. Boisse-Laporte, J. Bretagne, M. Ganciu, L. Teulé-Gay, M. 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Des recuits seront effectués sur certains échantillons pour évaluer l'influence de la structure cristalline du revêtement sur le comportement à l'oxydation. Ces différentes expériences d'oxydation nous permettront de déterminer et mieux comprendre le comportement et les mécanismes physico-chimiques mis en jeu lors de l'oxydation des revêtements base Cr-Al-C à haute température. Il sera possible in fine d'optimiser le caractère protecteur de ces films. Des échantillons revêtus d'une couche de chrome métallique épaisse de 15 μm, fabriqués dans le cadre de ces travaux de thèse, ont également été élaborés, et leur résistance à la corrosion testée à titre de comparaison. De plus, il convient de préciser que compte tenu de l'objectif principal de cette étude, portant sur l'élaboration de revêtements résistant à l'oxydation haute température, les réactions à l'interface avec le substrat seront peu étudiées dans une première approche. A/ Etude du comportement sous air à 1100°C et résistance à la trempe Des substrats en Zr702 nus et revêtus ont subi un test d'oxydation isotherme dans l'air ant. Les échantillons sont introduits dans le four préchauffé à 1100°C pendant différentes durées puis trempés dans l'eau à température ambiante. 1. Prise de masse et observations macroscopiques Les prises de masses relevées après les différents temps d'oxydation sont présentées sur la Figure IV-1. Afin d'évaluer visuellement les effets de l'oxydation sur les éprouvettes, des photographies de l'état des substrats nus et revêtus pour chaque système sont également présentées. Tout d'abord, il est important de préciser qu'une oxydation localisée se produit au niveau des coins et bords des éprouvettes (voir aussi la Figure IV-3). Cette oxydation est liée aux effets de bord. Ces effets de bord sont également présents mais plus limités sur les éprouvettes revêtues de chrome, du fait d'une épaisseur plus importante du revêtement (15 μm) par rapport aux revêtements base Cr-Al-C (3 μm). De plus, on observe également une oxydation localisée au niveau du trou de suspension, moins bien recouvert, des éprouvettes. Ces défauts constituent un point d'entrée de l'oxygène dans le substrat et occasionnent par la suite une décohésion du revêtement qui se propage au fur et à mesure au reste de l'échantillon. Ainsi, pour des temps d'oxydation croissant, la prise de masse des éprouvettes revêtues par Cr-Al-C et Cr2AlC ne correspond pas seulement à l'oxydation du revêtement mais aussi à celle du substrat aux endroits dépourvus de protection, c'est-à-dire aux bords et à proximité du trou de suspension. Pour des temps courts (15 min), les gains de masses mesurés Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température des substrats revêtus par Cr-Al-C et Cr2AlC (environ 2 mg/cm2) sont du même ordre de grandeur que celui revêtu par Cr (0,6 mg/cm2) mais ils augmentent significativement après 30 min (8 contre 1 mg/cm2 respectivement). Néanmoins, on peut constater qu'à part une oxydation très localisée du substrat près des coins des éprouvettes, les faces principales ont bien résisté et ne sont visuellement pas dégradées. 60 Non revêtu Revêtement Cr (15 μm) Revêtement Cr-Al-C (3 μm) Revêtement Cr2AlC (3 μm) 50 Zr 40 30 Cr2AlC 20 10 CrAlC Cr 0 0 15 30 45 60 Temps de maintien (min) Figure IV-1 : Prises de masse et photographies après oxydation isotherme à 1100°C suivie d'une trempe des substrats Zr702 nus et revêtus par Cr-Al-C amorphe, Cr2AlC cristallin et chrome. Les coupons font 2 cm de côté. Finalement après 60 min d'oxydation, la protection offerte par les revêtements base Cr-Al-C paraît moins efficace que pour le chrome. Le substrat est partiellement oxydé sur les faces latérales à cause des effets de bords. Cependant, le rev êtement résiste à l'oxydation sur les faces principales et empêche la dégradation sérieuse constatée pour les coupons de Zr702 nus. 2. 2.1. Caractérisation des revêtements Cr-Al-C et Cr2AlC après 15 min Oxydation du substrat et du revêtement Après oxydation puis trempe, les revêtements Cr-Al-C et Cr2AlC sont toujours présents en surface des échantillons, avec quelques fissures visibles. Un exemple de la microstructure de leur surface est présenté en Figure IV-2. Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température Figure IV-2 : Image MEB en mode SE montrant l'état du revêtement Cr 2AlC cristallin après oxydation isotherme à 1100°C pendant 15 min puis trempe. Aucun phénomène d'écaillage ne se manifeste sur la surface des éprouvettes, démontrant la résistance au choc thermique des revêtements. On n'observe également pas d'oxydation sur les faces principales. Il convient cependant de signaler qu'une oxydation du substrat très localisée s'est produite dans les coins des éprouvettes (Figure IV-3). En effet, bien que le revêtement recouvre parfaitement toutes les aspérités de surface, il n'est pas homogène en épaisseur. Les effets de bords dans nos conditions de dépôt sont largement accentués sur des substrats de type plaquette : l'épaisseur est plus faible au niveau des coins et des bords. Par conséquent, l'oxydation localisée du substrat semble être liée à la présence de ces défauts. Néanmoins, malgré l'apparition de ces défauts, le revêtement joue un rôle protecteur et l'oxydation d'un substrat revêtu est bien moindre que celle d'une éprouvette nue. (a ) (b) Substrat revêtu double face Substrat oxydé 500 μm Figure IV-3 : Coupes MEB en mode BSE d'une plaquette en Zr702 revêtue par 3 μm de Cr-Al-C après oxydation isotherme à 1100°C pendant 15 min puis trempe révélant a) l'oxydation du substrat dans les coins et b) la conformité du revêtement sur les faces principales. La Figure IV-4 montre une vue en coupe après oxydation d'un tronçon de gaine de Zircaloy-4 (ou Zy-4) non revêtu en face interne et revêtu par Cr-Al-C en face externe. La face interne non protégée est fortement détériorée par l'oxydation et une couche poreuse épaisse d'environ 110 μm de ZrO2 s'est formée (Figure IV-4a). En revanche, sur la face externe, seul le revêtement est oxydé (Figure IV-4b). L'effet bénéfique du revêtement contre l'oxydation rapide du Zy-4 et du Zr702 ayant été mis en évidence, nous avons cherché à comparer les performances du revêtement Cr2AlC (cristallin) avec le revêtement Cr-Al-C (nanocristallin/amorphe). Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température ≈110 μm ZrO2 (a) 50 μm Revêtement Substrat oxydé (b) 10 μm Tronçon de gaine Zy-4 (c) 500 μm Figure IV-4 : Observations MEB en coupe après essai d'oxydation (1100°C pendant 15 min sous air sec) sur un tronçon de gaine Zy-4 revêtu Cr-Al-C en face externe au niveau a) de la face interne, b) de la face externe et c) vue globale du tronçon de gaine oxydé. 2.2. Morphologie des revêtements Les observations en coupe transverse et les cartographies EDX associées (Figure IV-5) permettent d'explorer la microstructure et la composition chimique des revêtements Cr-Al-C et Cr2AlC après oxydation. On constate que la structure initiale des revêtements est modifiée, en particulier avec la formation d'une couche d'oxyde continue en surface externe. Ainsi, les deux revêtements oxydés peuvent être représentés sous la forme d'une superposition de trois couches. Premièrement, une couche d'oxyde dense et continue recouvre la surface externe du revêtement. Ensuite, une couche intermédiaire non oxydée plus épaisse et poreuse, composée principalement de Cr et C, coïncide avec la position initiale du revêtement. Enfin, une couche d'interdiffusion est observée à l'interface revêtement-substrat. Les distributions spatiales en Al, Cr et O (Figure IV-5) montrent une couche d'oxyde riche en Al, Cr et O à la surface du revêtement Cr-Al-C oxydé, suggérant que des oxydes de Cr et d'Al se sont formés. Comparé au revêtement Cr-Al-C, la couche d'oxyde formée en surface du revêtement Cr2AlC apparaît un peu plus dense. Dans la couche intermédiaire légèrement oxydée, seule la contribution du Cr est détectée, indiquant un appauvrissement en Al au cours de l'oxydation. Néanmoins, bien que les oxydes formés en surface des deux revêtements soient de compositions chimiques différentes, le substrat Zr702 n'est pas oxydé. Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température Ces résultats démontrent l'effet protecteur des revêtements contre l'oxydation rapide du zirconium grâce à la formation d'une couche d'oxyde superficielle qui agit comme barrière de diffusion à O. Ce point étant établi, nous nous sommes és à la nature des espèces formées en surface et dans l'épaisseur des revêtements à ce stade de l'oxydation. Cr-Al-C Couche d'oxyde BSE Cr2AlC Couche Cr-C 2 μm Substrat Couche d'oxyde BSE Cr Cr Al Al O O Zr Zr Couche Cr-C 2 μm Substrat Figure IV-5 : Observations MEB-BSE et cartographies EDX associées (Cr, Al, O et Zr) de coupes transversales d'un revêtement Cr-Al-C de 3 μm sur Zr702 (gauche), d'un revêtement Cr2AlC de 3 μm sur Zr702 (droite) en après oxydation isotherme à 1100°C pendant 15 min sous air puis trempe. Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température 2.3. Nature des couches d'oxyde Des analyses DRX ont été effectuées en incidence rasante sur les revêtements amorphes et recuits après oxydation (Figure IV-6a). Trois contributions d'intensités différentes ont été identifiées dans les deux revêtements, correspondant à la chromine (Cr2O3), à l'alumine-α (α-Al2O3) et au carbure de Cr (Cr7C3). Ces phases ont été identifiées respectivement à partir des fiches JCPDS PDF-00-038-1479, PDF-00-0046-1212 et PDF-00-036-1482. Dans le revêtement Cr-Al-C, on constate que la couche d'oxyde est composée de Cr2O3 et d'alumine-α. La plus importante contribution DRX est cependant attribuée à la phase Cr7C3. En revanche, dans le revêtement Cr2AlC, on remarque que c'est l'alumine qui contribue majoritairement à la couche oxydée, sans participation de Cr2O3 (Figure IV-6a). De plus, aucun pic caractéristique de la phase Cr2AlC n'a pu être identifié, ce qui suggère que cette phase s'est décomposée pendant l'oxydation. Les résultats D montrent également la présence de Cr7C3. Les phases de la couche d'interdiffusion, observée en coupe transversale, n'ont pas pu être identifiées avec notre configuration DRX en raison peut-être de leur faible cristallinité ou de la profondeur limitée de pénétration des rayons X. Figure IV-6 : Identification des phases présentes en surface et dans les revêtements Cr-Al-C amorphe et Cr2AlC cristallin déposés sur substrat Zr702 après oxydation isotherme à 1100°C pendant 15 min puis trempe. (a) Diffractogrammes en incidence rasante (1°). (b) spectres μRaman, entre 350 et 800 cm-1 avec identification des phases Al2O3 (*), Cr2O3 (¤) et AlOOH (+). Les analyses Raman des deux revêtements (Figure IV-6b) confirment la formation d'alumine et de chromine après oxydation. Il convient de préciser que le volume analysé est difficilement évaluable, la profondeur de pénétration du faisceau incident étant dépendante du caractère photo-absorbant de l'échantillon. Toutefois, à l'aide du microscope confocal, la résolution spatiale est améliorée et peut être estimée à environ 1 μm. La contribution principale à 562 cm-1 provient de Cr2O3 pour le revêtement Cr-Al-C tandis que cinq bandes à 375, 415, 575, 645 et 748 cm-1 caractéristiques de l'alumine-α sont observées pour le revêtement Cr2AlC. Une bande à 490 cm-1 associée à la présence d'un oxyhydroxyde d'Al (boehmite ou γ-AlO(OH)) est également détectée. Ce composé s'est Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température probablement formé pendant la trempe à l'eau. Par ailleurs, ni le revêtement non oxydé ni le substrat ne sont détectés. Compte tenu des résultats de DRX, de spectroscopie Raman et des cartographies EDX, on peut en déduire qu'un oxyde mixte composé de Cr2O3 et Al2O3 s'est formé en surface du revêtement Cr-Al-C après 15 minutes. A l'inverse, la couche d'oxyde formée à la surface du revêtement Cr2AlC est composée d'alumine-α. Dans le but d'étudier l'influence de la structure cristalline sur le comportement à l'oxydation des revêtements Cr-Al-C et Cr2AlC, nous avons prolongé la durée d'oxydation pour atteindre des valeurs de 30 et 60 min. Nous nous sommes alors attachés à décrire l'évolution de la couche d'oxyde et de la micro des deux revêtements. Ces études permettent une évaluation des inconvénients et avantages de chaque revêtement, pour améliorer in fine la protection des gaines de combustible. 3. 3.1. Oxydation isotherme prolongée des revêtements Cr-Al-C et Cr2AlC Analyses SDL Une analyse en profondeur des différentes distributions élémentaires permettra de mieux cerner le comportement des revêtements contre l'oxydation, à la fois en surface mais aussi à l'interface revêtement/substrat. Par ailleurs, dans le but de mieux comprendre le rôle de la structure cristalline sur le comportement à l'oxydation du revêtement Cr 2AlC, nous chercherons à localiser l'Al dans les revêtements phase MAX oxydés. Des profils SDL ont été mesurés afin d'étudier la distribution en profondeur de O, mais également l'épaisseur de la couche d'oxyde et la distribution des différents éléments du revêtement après oxydation à 1100°C pendant 15, 30 et 60 min. La Figure IV-7 présente les profils de compositions élémentaires mesurés pour les revêtements Cr-Al-C (Figure IV-7a-c), Cr2AlC (Figure IV-7d-f) et chrome (Figure IV-7g-i). L'intersection de la courbe représentant le signal de O avec celle de Cr, Al et C permet de localiser l'interface oxyde/revêtement ; l'intersection des courbes pour Cr et Zr permet de localiser l'interface revêtement/substrat. Revêtements Cr-Al-C et Cr 2 AlC Concernant les revêtements de Cr-Al-C et de Cr2AlC d'épaisseur initiale 3 μm, quatre zones peuvent être observées après oxydation isotherme pendant 15 min (Figure IV-7a et d). La première zone (de 0,1 à 0,5 μm environ) correspond à un oxyde de surface pour les deux revêtements, de composition différant cependant d'un revêtement à l'autre. En effet, pour le revêtement Cr-Al-C, Cr et Al sont mesurés avec O. La composition de cet oxyde de surface évolue dans la profondeur : on constate à la fois une dé ce du Cr et une augmentation en Al. En revanche, l'oxyde formé en surface des revêtements Cr2AlC contient principalement Al avec une quantité mineure de Cr. Ensuite, en partant de cette première zone et en allant plus en profondeur, on observe une deuxième zone de transition (de 0,5 à 2,5 μm environ) où la concentration en O décroît rapidement tandis que celles de Cr et C augmentent. Cette couche de Cr-C a des teneurs moyennes de 28 % at. en C et 62 % at. en Cr, soit un rapport Cr/C de 2,2, proche de la composition des carbures Cr7C3 détectés par DRX. Il apparaît également que cette couche de Cr-C contient une teneur en Al d'environ 10 % at. À 30 min, les profils élémentaires changent peu par rapport à ceux mesurés à 15 min pour les deux revêtements. On observe (i) un oxyde en surface, (ii) une couche de carbure de Cr et (iii) une interface de diffusion avec le substrat. Enfin, après 60 minutes d'oxydation, plusieurs évolutions notables sont observées pour les deux revêtements. Tout d'abord, l'oxyde formé en surface du revêtement Cr-Al-C croît et contient principalement du Cr avec une quantité mineure d'Al tandis que la couche d'oxyde du revêtement Cr 2AlC contient Al et Cr. Il semble que l'épaisseur de couche de Cr-C a également diminué, suggérant la diffusion de Cr vers la surface. Il faut noter qu'un signal croissant d'O est observé dans le substrat sur la Figure IV-7c. Ce signal serait en fait un artéfact de mesure dû à une perte d'étanchéité entre l'échantillon et l'anode de la SDL, liée à l'érosion progressive de la surface. Ce signal d'O n'est pas observé sur les autres profils. Il ressort également des différents profils SDL que le substrat Zr702 en contact avec les revêtements est enrichi en Al, Cr et C, indiquant une diffusion de ces éléments dans l'alliage. L'épaisseur de la zone de diffusion est comparable pour les revêtements Cr-Al-C et Cr2AlC, et varie peu en fonction de la durée d'oxydation. L'essentiel de la diffusion à l'interface intervient donc dans les premiers instants de l'oxydation. Par ailleurs, il n'y a pas de différence significative dans l'épaisseur de la zone de diffusion formée entre les revêtements. Finalement, l'absence d'O dans le substrat Zr702 confirme que la dégradation observée du substrat autour des coins des éprouvettes lors des prises masse et observations présentées précédemment est bien liée aux effets de bord. En considérant les profils SDL mesurés pour des deux systèmes Cr-Al-C/Zr702 et Cr2AlC/Zr702, on constate que les compositions élémentaires des oxydes de surface diffèrent pour des temps d'oxydation courts mais convergent vers une composition comparable pour Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température des durées plus longues. L ' effet de la structure cristalline sur la nature des oxydes formés apparait donc essentiellement lors des premiers instants de l'oxydation. Revêtement chrome Pour les revêtements de chrome d'épaisseur initiale 15 μm, on observe également une succession de quatre zones après 15, 30 et 60 minutes d'oxydation (Figure IV-7g-i). Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température Figure IV-7 : Profils élémentaires en profondeur mesurés par SDL après oxydation isotherme à 1100°C pendant 15, 30 et 60 min puis trempe pour les échantillons revêtus de 3 μm de Cr-Al-C (a, b, c), de 3 μm de Cr2AlC (d, e, f) et de 15 μm de Cr (g, h i). Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température 3.2. Effet de la durée d'oxydation sur la nature de la couches d'oxyde Les diffractogrammes des échantillons de Zr702 revêtus Cr2AlC oxydés pendant 15, 30 ou 60 min à 1100°C puis trempés à l'eau sont présentés dans la Figure IV-8a. Comme détaillé précédemment, le revêtement oxydé est composé des phases α-Al2O3 et Cr7C3 après 15 min. La chromine ainsi que la zircone ZrO2 sont également détectées à 30 et 60 min. Compte tenu de l'augmentation de la contribution de ZrO2 de 30 à 60 minutes, il est certain que le substrat s'est partiellement oxydé. Toutefois, il faut rappeler qu'une oxydation localisée a lieu en coins des éprouvettes, là où l'épaisseur de dépôt est plus faible. Ce phénomène est également visible sur les bords du trou de suspension. Ces zones agissent clairement comme des points faibles à partir desquels se propage l'oxydation du substrat Zr702. On constate également une augmentation de la contribution de Cr2O3 parallèlement à la diminution de l'intensité des raies de diffraction de Cr7C3. Ce changement dans la nature des oxydes formés est également observé en spectroscopie Raman (Figure IV-8b). Cinq bandes, caractéristiques l'alumine αAl2O3, et une bande associée à la présence du composé oxyhydroxyde d'Al sont observées pour les revêtements oxydés 15 à 30 min. Enfin, Cr2O3 est détectée à 562 cm-1 après 60 min. Figure IV-8 : Caractérisation des revêtements Cr2AlC sur substrat Zr702 après oxydation isotherme à 1100°C pendant 15, 30 et 60 min puis trempe ; (a) Diffractogrammes en incidence rasante (1°) ; (b) Spectres μRaman, entre 350 et 800 cm-1 avec identification des phases Al2O3 (*), Cr2O3 (¤) et AlOOH (+). Compte tenu de la présence de chromine qui suggère que le Cr a diffusé vers la surface, il est probable que la teneur en Al dans le revêtement soit devenue trop faible après 15 min pour assurer la formation d'alumine. En conséquence, la couche superficielle d'oxyde perd ses propriétés de barrière de diffusion contre O. Les profils SDL mesurés précédemment après oxydation pendant 60 min confirment cette hypothèse en montrant que le revêtement appauvri en Al s'est partiellement oxydé. Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température 3.3. Evolution microstructurale des revêtements Revêtement Cr-Al-C et Cr 2 AlC Les coupes transversales décrivant l'évolution microstructurale à 15, 30 et 60 minutes des revêtements Cr-Al-C et Cr2AlC sont présentées dans la Figure IV-9. Pour le revêtement Cr-Al-C, on constate une légère augmentation de l'épaisseur de la couche d'oxyde superficielle et de la porosité de la couche de carbure de 15 à 30 minutes (Figure IV-9a,b). Néanmoins, l'architecture du revêtement Cr-Al-C oxydé à 15 et à 30 minutes est similaire. Ainsi à 30 min, le revêtement oxydé se compose (i) d'une couche d'oxyde d'environ 500 nm, (ii) d'une couche plus épaisse et poreuse (≈ 2 μm) et (iii) d'une couche d'interdiffusion dense d'environ 800 nm entre le revêtement et le substrat. Compte tenu des analyses DRX, Raman et SDL, la couche d'oxyde en surface est constituée d'un mélange d'alumine-α et de chromine. Le rapport Cr/C d'environ 2,9 mesuré par SDL dans la couche Cr-C, est proche de celui de la phase Cr7C3 détectée par DRX. À 60 min, on constate l'infiltration de Cr2O3 dans la sous-couche Cr-C, indiquant le vieillissement et le prolongement de l'oxydation du revêtement. Le profil SDL correspondant supporte cette hypothèse. Enfin, on n'observe pas d'oxydation du substrat sur les faces principales des éprouvettes, ce qui confirme que la teneur croissante en O dans la profondeur du substrat sur la Figure IV-7c est probablement liée à une fuite dans l'enceinte de mesure SDL. Cr-Al-C 15 min Cr-C 30 min Al2O3 + Cr2O 3 Cr-C 60 min Al2O3 + Cr2O 3 Interface de diffusion Cr-C Cr2O3 2 μm Zr702 Zr702 (a) Zr702 Pores (b) Al2O3 Cr2AlC Al2O3 + Cr2O3 Cr-C Al2O3 + Cr2O3 Al2O3 (c) Cr-C 1 μm (d) Interface de diffusion Cr-C Pores 2 μm Zr702 Zr702 Zr702 (e) Zr702 (f) Zr702 (g) 1 μm (h) Figure IV-9 : Comparaison des coupes MEB de substrats Zr702 revêtus par 3 μm de Cr-Al-C ou de Cr2AlC après oxydation isotherme à 1100°C pendant (a, e) 15 min, (b, f) 30 min et (c, d, g, h) 60 min puis trempe. Contrairement à Cr-Al-C, on n'observe pas d'augmentation significative de l'épaisseur de la couche d'Al2O3 de 15 à 30 minutes d'oxydation pour les revêtements Cr2AlC (Figure IV-9e,f). Cette couche d'oxyde est toujours adhérente et dense. En revanche, la porosité dans la couche de carbure augmente. Après 60 minutes (Figure IV-9g), l'architecture du revêtement Cr2AlC oxydé est similaire à celle observée à 30 min, c'est-à-dire (i) une fine couche externe d'oxyde dense et adhérente (≈ 500 nm), (ii) une couche épaisse et poreuse de carbure de Cr (≈ 2 μm), et (iii) une couche d'interdiffusion dense (Figure IV-9d) d'environ 800 nm près de la surface du substrat. Néanmoins, un changement significatif dans la composition de la couche d'oxyde se produit. Cette couche est à présent constituée d'un mélange d'alumine-α et de Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température chromine. D'après les profils SDL, la couche poreuse de Cr-C a des teneurs en Al, C et Cr respectivement d'environ 10, 28 et 62 % at., soit un rapport Cr/C de 2,2 très proche du rapport 2,3 pour la phase Cr7C3 détectée par DRX. Les cartographies EDX (Figure IV-10) montrent la répartition des éléments Cr, Al, O et Zr dans les deux revêtements après 60 minutes d'oxydation. Cr - Al-C Cr2AlC Revêtement oxydé SE Substrat 2 μm SE Cr Cr Al Al O O Zr Zr Substrat 2 μm Figure IV-10 : Observations MEB-SE en coupe transversale après oxydation isotherme à 1100°C pendant 60 min sous air puis trempe d'un revêtement Cr-Al-C de 3 μm déposé sur un substrat Zr702 (gauche), et d'un revêtement Cr2AlC de 3 μm déposé sur substrat Zr702 (droite). On remarque que la surface du revêtement est formée par une couche d'oxyde de composition Al-Cr-O, confirmant la formation d'un mélange d'oxydes Al2O3 et Cr2O3 en Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température surface. Un signal d'O est également détecté sous la couche d'oxyde, ce qui laisse supposer que la couche d'oxyde mixte formée est moins efficace pour bloquer la diffusion de O que celle formée en surface du revêtement Cr2AlC dans les mêmes conditions. En effet, le signal de O dans le revêtement phase MAX est plus faible. Enfin, ces observations MEB, EDX et les analyses SDL montrent l'absence d'oxydation du substrat sous ces couches adhérentes, suggérant que la contribution observée de ZrO2 dans les diffractogrammes DRX des revêtements Cr2AlC oxydés correspondrait à l'oxydation localisée du substrat en bords et coins des éprouvettes. Revêtement Cr On observe une succession de trois couches pour les revêtements Cr oxydés après 15, 30 et 60 minutes (Figure IV-11a-d). Au cours de l'oxydation, une couche d'oxyde de Cr dense et continue recouvre la surface du revêtement. Cette couche d'oxyde est toutefois plus fragile et moins adhérente que celles formées sur les revêtements Cr2AlC et Cr-Al-C. L'épaisseur de Cr2O3 formée augmente au fur et à mesure de l'oxydation aux dépens du revêtement de chrome. Après 60 min, il reste environ un tiers de l'épaisseur initiale de chrome. Enfin, on remarque une couche d'interdiffusion entre Zr et Cr. Cette interface est quatre fois plus épaisse que pour les revêtements Cr2AlC (Figure IV-11d). Les profils SDL avaient révélé cette diffusion prolongée de Cr dans le substrat. Ces observations confirment le fait que, lorsque le revêtement de est porté à haute température, deux processus sont en compétition : l'oxydation du Cr en surface, et sa diffusion dans le substrat. Enfin, et contrairement aux revêtements Cr-Al-C et Cr2AlC, l'oxydation du revêtement de chrome entraîne la formation d'une quantité limitée de porosité, concentrées à l'interface entre le chrome et la zone d'interdiffusion. On peut supposer que ces pores sont créés par effet « Kirkendall » [1] en raison de la forte différence de diffusivité des espèces chimiques (Cr et Zr) impliquées dans le processus d'interdiffusion. La zone d'interdiffusion semble composée de deux couches différentes. Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température 4. Influence de l'épaisseur sur la tenue haute température du revêtement Cr-Al-C Une étude similaire à la précédente a été effectuée, dans les mêmes conditions d'oxydation, sur un revêtement Cr-Al-C plus épais (7 μm), afin de minimiser les effets de bord. Il convient cependant de préciser que l'intérieur du trou de suspension n'était toujours qu'imparfaitement couvert. De plus, l'étape de recuit de ce dépôt (pour obtenir Cr2AlC) a généré des fissures en surface du revêtement. L'apparition de ces microfissures peut s'expliquer par la différence des coefficients de dilatation thermique entre les revêtements et le substrat (voir chapitre III). D'un point de vue chronologique, le dépôt de 7 μm a été fait avant celui de 3 μm pour des conditions non optimisées. Notamment, pour ces premiers essais de 7 μm, la température de recuit était de 600°C (contre 550°C pour les dépôts de 3 μm). 4.1. Prise de masse Les prises de masse constatées lors du test d'oxydation sont : - 1,2 mg/cm2 pour un temps d'oxydation de 15 min ; 2,6 mg/cm2 pour un temps d'oxydation de 30 min ; 19,6 mg/cm2 pour un temps d'oxydation de 60 min ; Il est important de préciser qu'une partie du revêtement de l'échantillon oxydé pendant 60 min s'est délaminée à cause de l'oxydation du substrat au niveau du trou de suspension. Cette délamination s'est propagée au reste de l'échantillon (Figure IV-12). La prise de masse représente donc non seulement l'oxydation du revêtement mais aussi (et surtout) celle du substrat. Néanmoins, on constate bien que les coins et bords ne sont pas aussi dégradés qu'observé précédemment. Les prises de masses mesurées à 15 puis 30 min sont comparables à celles du revêtement de chrome et sont inférieures à celles des revêtements de 3 μm. La protection du substrat est donc plus efficace avec un revêtement plus épais. Figure IV-12 : Etat de dégradation d'un substrat Zr702 revêtu par 7 μm de Cr2AlC après oxydation isotherme à 1100°C pendant 60 min suivi d'une trempe à l'eau. Analyse SDL Les profils élémentaires mesurés par SDL après 15, 30 et 60 min d'oxydation sont présentés en Figure IV-13. Il faut noter que l'analyse de l'échantillon oxydé pendant 60 min n'a pu être menée à son terme, notamment dans la profondeur du substrat, du fait d'une extinction prématurée du plasma d'érosion. Cinq zones sont distinguables sur chacun des profils et correspondent à (i) une zone oxydée en surface, (ii) une zone enrichie en Al sous l'oxyde formé en surface, (iii) le revêtement non oxydé riche en Cr et C, (iv) une interface de diffusion entre le revêtement et le substrat et (v) le substrat. Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température Globalement, les mesures SDL montrent que la pénétration de O dans le revêtement ne varie pas significativement avec l'augmentation de l'épaisseur du revêtement. Pour 15 min d'oxydation, le signal d'O disparait complètement à environ 1,5 μm de la surface, comme pour le revêtement d'épaisseur 3 μm. Cette similarité était attendu compte tenu des conditions d'oxydation identiques. Ensuite, on observe que l'augmentation de l'épaisseur initiale du revêtement Cr-Al-C conduit à la formation d'une couche de carbure de Cr plus épaisse et à une diffusion plus marquée des éléments du revêtement (Cr, Al et C) dans le substrat. Par exemple, la concentration en C présente dans le substrat à 8 μm de l'interface avec le revêtement est de 4 % at. Cette même concentration étant mesurée à 3 μm de profondeur dans le substrat pour un revêtement de 3 μm, la diffusion du C est plus importante après oxydation dans les mêmes conditions. Plus l'épaisseur du revêtement est importante, plus celle de la zone de diffusion est importante. Cette différence peut être due à la plus grande quantité disponible d'élément diffusant, ce qui maintient une concentration élevée. Cette concentration est la force motrice du phénomène de diffusion, comme observé avec le revêtement de chrome. Les compositions élémentaires des revêtements oxydés sont comparables à 15 et 30 min, et les profils de concentrations suivent les mêmes tendances. La surface oxydée (environ 500 nm) est riche en Al avec une quantité mineure de Cr, suggérant la formation d'une solution solide Al-Cr-O ou d'un mélange d'oxydes. En dessous de cette couche d'oxyde, on constate une nette accumulation d'Al (environ 30 % at.) sur environ 650 nm. Pourcentage atomique (% ) 15 min Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température Zr Cr C O Al 0 3 6 9 12 15 18 15 18 15 18 Pourcentage atomique (% ) 30 min Profondeur (μm) Zr Cr C O Al 0 3 6 9 12 Pourcentage atomique (% ) 60 min Profondeur (μm) Cr Zr Al O C 0 3 6 9 12 Profondeur (μm) Figure IV-13 : Profils élémentaires mesurés par SDL après oxydation isotherme à 1100°C pendant 15, 30 et 60 min puis trempe pour les échantillons revêtus de 7 μm de Cr-Al-C (pour une meilleure lisibilité, les inserts sont un agrandissement des 3 premiers μm). Chapitre IV : Comportement des revêtements en oxydation haute température 4.3. Nature de la couche d'oxyde Les analyses DRX et μRaman, présentées en Figure IV-14, donnent des résultats comparables aux précédents. Figure IV-14 : Caractérisation d'un substrat Zr702 revêtu par 7 μm de Cr-Al-C après oxydation isotherme à 1100°C pendant 15 et 60 min puis trempe. (a) Diffractogrammes en incidence rasante (1°) ; (b) Spectres μRaman, entre 350 et 800 cm-1 avec identification des phases Al2O3 (*), Cr2O3 (¤) et AlOOH (+). Les phases précédemment identifiées, c'est-à-dire α-Al2O3 , Cr 7 C 3 et Cr2O3 sont détectées à 15 min tandis que la contribution de Cr2O3 augmente au fur et à mesure de l'oxydation. Il convient de noter que la zircone ZrO2 est également détectée dès 15 min. Une faible contribution d'un oxyhydroxyde d'Al est également identifiée en μRaman. L'évolution de l'intensité relative de chromine suggère que Cr a diffusé vers la surface puis s'est oxydé. Les profils SDL mesurés précédemment après oxydation pendant 60 min confirment cette hypothèse en montrant que la couche Cr-C appauvrie en Al s'est partiellement oxydée sous la couche d'oxyde.
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Modèles et Algorithmes pour les Problèmes de Livraison du Dernier Kilomètre avec Plusieurs Options d'Expédition. Other [cs.OH]. Ecole Centrale de Lille, 2019. English. &#x27E8;NNT : 2019ECLI0011&#x27E9;. &#x27E8;tel-03229424&#x27E9;
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Les clients ne sont plus obligés de se rendre dans un magasin spécifique et de respecter les heures d’ouverture. Un sondage annuel mené par la société d’analyse comScore et UPS a révélé que les consommateurs américains achetaient plus d’articles en ligne qu’en magasin en 2016 (Farber, 2016). À la fin de l’année 2018, les ventes mondiales du commerce électronique atteignaient environ 2,8 milliards de dollars et devraient atteindre 4,5 milliards de dollars en 2021 (Wardini, 2018). La croissance très importante des ventes par le commerce électronique pose un énorme défi pour la livraison du dernier kilomètre, car les articles commandés doivent être livrés individuellement à chaque client. Il existe actuellement plusieurs services de livraison du dernier kilomètre permettant de livrer des colis aux clients. L’option de livraison la plus courante est la livraison à domicile ou au travail (Lowe & Rigby, 2014). Les clients attendent chez eux ou sur leur lieu de travail pour recevoir leurs colis. En outre, la livraison peut être effectuée à des points de collecte tels que des consignes (lockers) ou des magasins. Dans ce cas, les clients peuvent récupérer leurs colis après la livraison. Pour donner une idée, il existe plus de 2800 consignes Amazon situées aux États-Unis (Holsenbeck, 2018). Lorsque les clients achètent en ligne, ils peuvent choisir une consigne à proximité comme lieu de livraison. Cela réduit la fragmentation des livraisons sur le dernier kilomètre, contribuant ainsi à réduire les encombrements et la pollution de l’environnement causés par le transport de marchandise en milieu urbain (Morganti et al., 2014), ainsi que les coûts de livraison. Ces dernières années, un nouveau concept appelé livraison dans le coffre / dans la voiture a été proposé. Ici, les colis des clients peuvent être livrés directement dans les coffres des voitures. Volvo a lancé le premier service au monde de livraison dans les voitures en Suède en 2016 (Kirsten, 2016). Le livreur a un code 193 RÉSUMÉ ÉTENDU EN FRANÇAIS numérique unique pour accéder au coffre de la voiture. En avril 2018, Amazon a lancé le service en partenariat avec deux grands constructeurs, General Motors et Volvo. Ce service est disponible dans 37 villes aux États-Unis (Hawkins, 2018). La livraison dans le coffre diffère de la livraison à domicile ou au travail et des points de collecte, car la voiture se déplace et peut se trouver à différents endroits pendant différentes périodes. Par exemple, elle reste garée sur le lieu de travail le matin et sur le parking d’un centre commercial en fin d’après-midi. En conséquence, la synchronisation entre la voiture et le livreur est nécessaire pour effectuer la livraison. Tous ces services de livraison peuvent être combinés et, au lieu de choisir un seul lieu de livraison lors d’un achat en ligne, le client peut proposer un ensemble de lieux de livraison avec les contraintes de temps associées. Pour livrer un colis à un client donné, le livreur dit alors choisir l’un des emplacements fourni par le client. Dans cette thèse, notre objectif est de modéliser et de développer des méthodes de résolution efficaces des problèmes de tournées de véhicules dans le contexte de la livraison du dernier kilomètre offrant plusieurs options de livraison: à domicile, sur le lieu de travail, en points de collecte et dans le coffre de la voiture. La livraison du dernier kilomètre avec plusieurs options d’expédition permet aux clients de choisir plusieurs emplacements pour recevoir leurs colis. Cela offre aux clients plus de flexibilité en tenant compte de leur convenance. En outre, cela peut augmenter le taux de première livraison réussie et ainsi permettre de réduire les coûts de livraison. Au Royaume-Uni, par exemple, le coût des livraisons ayant échoué s’élève à près de 1,1 milliard de dollars pour les détaillants et les entreprises de commerce électronique sur un marché de 100 milliards de dollars (Honorato, 2016; Symonds, 2018). Offrir plus d’options de livraison peut être rentable (BringgTeam, 2019). Nous étudions les problèmes de livraison avec une flotte composée d’un seul véhicule, et avec une flotte composée de plusieurs véhicules, c’est-à-dire le problème du voyageur de commerce généralisé avec fenêtres de temps (GTSPTW) et le problème de tournées de véhicules généralisé avec fenêtres de temps (GVRPTW). Dans ces problèmes, les différents emplacements de livraison possibles associés à un même client sont regroupés au sein d’un cluster. Il est facile de constater que, dans les problèmes étudiés, il n’est pas nécessaire de visiter tous les lieux associés à un client, car le livreur n’a besoin de livrer le colis qu’à un seul des emplacements fournis par le client. Dans ce qui suit, nous résumons les travaux réalisés dans cette thèse. Dans le chapitre 1, nous présentons une classification des problèmes de routage non hamiltoniens (non-HRP), caractérisés par le fait que tous les sommets présents dans le graphe ne doivent pas nécessairement être visités pour qu’une solution soit réalisable. Laporte & Martín (2007) proposent une revue de la littérature sur cette thématique, limitée aux problèmes où la flotte est composée d’un seul véhicule, et couvrant les travaux publiés jusqu’en 2005. Nous proposons une revue de la littérature sur les progrès récents dans les non-HRPs avec un seul véhicule et avec plusieurs véhicules. Les problèmes concernant un seul véhicule incluent le Generalized Traveling Salesman Problem (GTSP), le Traveling Salesman Problem with Profits (TSPPs), le Covering Tour Problem (CTP), le Covering Salesman Problem (CSP), le Median Cycle Problem (MCP), le Ring Star Problem (RSP) et le Traveling Purchaser Problem (TPP). Les problèmes avec plusieurs véhicules incluent le Generalized Vehicle Routing Problem (GVRP), le Generalized Vehicle Routing Problem with Time Windows (GVRPTW), le Vehicle Routing Problem with Profits (VRPPs), le multi-vehicle CTP (mCTP), le capacitated multiple RSP (CmRSP) et le multi-vehicle TPP (mTPP). Pour chacun de ces problèmes, nous présentons sa définition, une formulation mathématique compacte, une revue de la littérature et certaines de leurs applications. Dans le chapitre 2, nous étudions le problème de la livraison du dernier kilomètre avec de multiples options de livraison dans le cas avec un seul véhicule. Ce problème est modélisé comme le problème du voyageur de commerce généralisé avec fenêtres de temps (GTSPTW). Le GTSPTW est défini sur un graphe orienté dans lequel l’ensemble des sommets est partitionné en clusters. Un des clusters ne contient que le dépôt. Chaque sommet est associé à une fenêtre de temps pendant laquelle la livraison doit avoir lieu si le sommet est visité. L’objectif est de trouver un circuit à coût minimum commençant et se terminant au dépôt, de sorte que chaque cluster soit visité une seule fois et que les contraintes de temps soient respectées, c’est-à-dire que, pour chaque cluster, un seul sommet est visité pendant sa fenêtre de temps. Dans ce chapitre, quatre programmes linéaires à variables mixtes pour le GTSPTW sont proposés et comparés. Les modèles diffèrent par la manière dont sont définies les variables de sélection des arcs et les variables temporelles: basées sur des sommets ou des clusters. Toutes les formulations sont compactes, ce qui signifie que le nombre de variables et de contraintes est polynomial par rapport à la taille de l’instance. Les relations de dominance entre les relaxations linéaires de ces formulations sont théoriquement établies. Nous avons également mené une étude expérimentale pour comparer la relaxation linéaire et les performances d’un algorithme de branch-and-bound pour les quatre formulations. Les résultats sur les relaxations linéaires montrent qu’en moyenne la formulation F1 est la meilleure, suivie de la formulation F2. Toutefois, lors de la résolution du GTSPTW avec l’algorithme de branch-and-bound de CPLEX, la formulation F2 est la plus efficace, en moyenne, suivie par la formulation F1. Par conséquent, nous recommandons d’utiliser les formulations F1 et F2 pour la résolution du GTSPTW. De plus, des inégalités super-valides sont proposées pour les formulations F1 et F2, ce qui permet d’améliorer les performances. Dans le chapitre 3, nous développons un algorithme de branch-and-cut pour le GTSPTW. Plusieurs familles d’inégalités valides sont proposées. Ces familles peuvent contenir un nombres de contraintes polynomial ou exponentiel. Ces familles de contraintes sont intégrées dans un algorithme de branch-and-cut via des procédures de séparation dédiées. L’algorithme de branch-and-cut comprend trois phases principales. La première phase est l’étape de pré-traitement visant à resserrer les fenêtres de temps de l’instance et à éliminer les arcs qui ne peuvent pas faire partie d’une solution réalisable. Ensuite, nous appliquons une heuristique efficace pour obtenir une solution réalisable et pour fournir une borne supérieure de la valeur optimale. Enfin, la phase principale consiste à résoudre le problème en utilisant un algorithme de branch-and-cut, basé sur le schéma standard de branch-and-cut fourni par le solveur commercial CPLEX 12.6.3. Le modèle initial est construit à partir du programme linéaire à variables mixtes F1 ou F2. La solution initiale obtenue par l’heuristique sert pour initialiser la procédure de branch-and-cut. Dans l’arbre de branch-and-bound, chaque fois qu’une solution fractionnaire est obtenue, les inégalités valides proposées sont vérifiées et celles violées par la solution courante sont ajoutées au modèle. Pour les inégalités valides avec un nombre polynomial de contraintes, nous les mémorisons toutes et parcourons l’ensemble pour rechercher toutes celles qui sont violées. Pour les familles de contraintes de taille exponentielle, des algorithmes de séparation sont appliqués pour détecter efficacement les inégalités violées et le nombre d’inégalités que nous avons choisi de séparer est limité. Nous testons l’algorithme sur trois groupes d’instance ayant des caractéristiques différentes. Les résultats démontrent clairement l’efficacité de l’algorithme de branch-and-cut proposé et la qualité de la formulation F2. L’algorithme de branch-and-cut basé sur la formulation F2 peut résoudre à l’optimum des instances d’environ 30 clusters en moins d’une heure de temps de calcul. Enfin, dans le chapitre 4, nous étudions le cas avec plusieurs véhicules, appelé problème de tournées de véhicules généralisé avec fenêtres de temps (GVRPTW). Le GVRPTW est défini sur un graphe orienté G = (V, A) où l’ensemble des sommets V est partitionné en clusters. Un des clusters ne contient que le dépôt, où se trouve une flotte homogène de véhicules, chacun avec une capacité limitée. Les autres clusters représentent les clients. Chaque cluster est associé à une demande. Dans un cluster, les sommets représentent les localisations possibles du client. Chaque sommet est associé à une fenêtre de temps pendant laquelle la visite doit avoir lieu si le sommet est visité. L’objectif est de trouver un ensemble de routes telles que le coût total de routage soit minimal, exactement un sommet par cluster soit visité, et toutes les contraintes de capacité et de temps soient respectées. Nous proposons une formulation en programme linéaire à variables mixtes et une formulation basée sur un problème de set covering pour le GVRPTW. Sur la base de la formulation de set covering, nous développons une heuristique basée sur la génération de colonnes pour le GVRPTW. Cette heuristique combine plusieurs composants, notamment une heuristique de construction, une procédure d’optimisation d’une route, un algorithme de recherche locale, et la génération de routes de coût réduit négatif. Les résultats expérimentaux sur des instances de la littérature montrent que l’algorithme proposé est très efficace et que des solutions sont de très bonne qualité et peuvent être obtenues dans des temps de très courts pour des instances comprenant jusqu’à 120 clusters. Les sujets abordés dans cette thèse permettent de fournir quelques remarques quant à la gestion de ces nouveaux services de livraison du dernier kilomètre avec plusieurs options d’expédition. Cependant, plusieurs pistes de recherche restent ouvertes. Nous listons ci-dessous celles qui, à notre avis, peuvent être intéressantes à développer. La première perspective est du point de vue méthodologique. Pour le GTSPTW, la procédure que nous avons développée pour obtenir une solution initiale est déjà efficace mais pourrait être améliorée pour obtenir des solutions de très grande qualité. Les mouvements de recherche locale ou les méta-heuristiques classiques pour les problèmes de routage pourraient être adaptés au GTSPTW. Pour l’heuristique basée sur la génération de colonnes que nous avons proposée pour GVRPTW, les opérateurs de recherche locale sont limités. Des opérateurs plus sophistiqués dédiés au GVRPTW pourraient être proposés. La génération de colonne est appliquée de manière heuristique et fournit de très bonnes bornes supérieures. Il semble intéressant de travailler sur le sous-problème et le calcul d’une borne inférieure. Dans cette thèse, nous avons supposé que les clients fournissaient plusieurs lieux de livraison possibles avec le même désir de recevoir le colis : les clients n’ont pas de préférence pour un lieu ou une période spécifique. Cependant, en réalité, les clients peuvent avoir des préférences différentes en ce qui concerne les lieux de livraison ou les périodes de livraison qu’ils indiquent. Pour prendre en compte cet aspect, nous pourrions associer chaque lieu de livraison à un facteur de satisfaction (profit). Ensuite, le nouveau problème pourrait être modélisé comme une variante du VRP avec profits lorsque les clients sont associés à plusieurs localisation ou, de la même manière, comme une variante du GVRP où les localisations sont associées à un profit. Le facteur de satisfaction (profit) peut apparaître dans la fonction objectif ou dans les contraintes. Ce problème est intéressant car de plus en plus d’entreprises se concentrent sur la satisfaction des clients afin de pouvoir les fidéliser. Dans cette thèse, les clients sont associés à plusieurs lieux de livraison pouvant représenter des consignes. Une consigne possède une capacité limitée que nous n’avons pas prise en compte. De ce fait, il est intéressant de travailler sur des problèmes de tournées de véhicules qui intègrent la gestion de la capacité associée aux emplacements de livraison. De plus, les colis livrés dans une consigne pourraient ne pas être récupérés par le client au cours de la même période de planification. Alors, la capacité de la consigne sera réduite tant que le colis n’aura pas été récupérés par le client. Par conséquent, des contraintes supplémentaires doivent être prises en compte dans les modèles et algorithmes lorsque la livraison dans des consignes est considérée. Une autre perspective de ce travail consiste à examiner la version dynamique des problèmes de tournées de véhicules dans le contexte que la livraison du dernier kilomètre avec plusieurs options d’expédition. Lorsque certains lieux ou certaines fenêtres de temps associées à un client changent au cours de l’horizon de planification, une nouvelle solution doit être recalculée. L’heuristique basée sur la génération de colonnes que nous proposons pour le GVRPTW pourrait être utilisée dans de tels cas, car elle implique plusieurs composants pour construire ou optimiser des solutions, et les temps de calcul sont courts. 198 Models and Algorithms for Last Mile Delivery Problems with Multiple Shipping Options Abstract In this thesis, we study routing problems that arise in the context of last mile delivery when multiple delivery options are proposed to the customers. The most common option to deliver packages is home/workplace delivery. Besides, the delivery can be made to pick-up points such as dedicated lockers or stores. In recent years, a new concept called trunk/in-car delivery has been proposed. Here, customers’ packages can be delivered to the trunks of cars. Our goal is to model and develop efficient solution approaches for routing problems in this context, in which each customer can have multiple shipping locations. First, we survey non-Hamiltonian routing problems. Then, we study the single-vehicle case in the considered context, which is modeled as a Generalized Traveling Salesman Problem with Time Windows (GTSPTW). Four mixed integer linear programming formulations and an efficient branch-and-cut algorithm are proposed. Finally, we study the multi-vehicle case which is denoted Generalized Vehicle Routing Problem with Time Windows (GVRPTW). An efficient column generation based heuristic is proposed to solve it. Keywords: last mile delivery; trunk/in-car delivery; generalized traveling salesman problem; generalized vehicle routing problem; time windows; branch-and-cut. Résumé Dans cette thèse, nous étudions les problèmes de tournées de véhicules dans le contexte de la livraison du dernier kilomètre lorsque plusieurs options de livraisons sont proposées aux clients. Le mode de livraison le plus commun est la livraison à domicile ou au travail. La livraison peut également être effectuée dans des points de collecte tels que des consignes ou des magasins. Ces dernières années, un nouveau concept appelé livraison dans le coffre / dans la voiture a été proposé. Avec ce mode de livraison, les colis des clients peuvent être livrés directement dans les coffres des voitures. Notre objectif est de modéliser et de développer des approches de résolution efficaces pour les problèmes de routage dans ce contexte, dans lequel chaque client peut disposer de plusieurs lieux potentiels de livraison. Premièrement, nous proposons un état de l’art sur les problèmes de routage non-Hamiltoniens. Ensuite, nous étudions le cas avec un seul véhicule, qui est modélisé comme un problème du voyageur de commerce généralisé avec fenêtres de temps (GTSPTW). Quatre formulations en programme linéaire à variables mixtes et un algorithme efficace de branch-and-cut sont proposés. Enfin, nous étudions le cas multi-véhicules, dénommé problème de tournées de véhicules généralisé avec fenêtres de temps (GVRPTW). Une heuristique efficace basée sur la génération de colonnes est proposée pour le résoudre. Mots clés : livraison du dernier kilomètre; livraison dans le coffre / dans la voiture; problème du voyageur de commerce généralisé; problème de tournées de véhicules généralisé; fenêtres de temps; branch-and-cut.
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Gestion des Boues de Vidange: Approche intégrée pour la mise en æuvre et l'exploitation
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290 Ingallinella A.M., Sanguinetti G., Koottatep T., Montangero A., Strauss M. (2002). The Challenge of Faecal Sludge Management in Urban Areas – Strategies, Regulations and Treatment Options. Water Science and Technology 46 (10), p. 285-294. Jeuland M., Koné D., Strauss M. (2004). Private Sector Management of Fecal Sludge: A Model for the Future? Focus on an Innovative Planning Experience in Bamako, Mali. Eawag, Dübendorf, Switzerland. Kebbede G. (2004). Living with Urban Environmental Health Risks: The Case of Ethiopia. Hants, England, Ashgate Publishing. Klingel F. (2001). Nam Dinh Urban Development Project: Septage Management Study. Eawag, Dübendorf, Switzerland. Koanda H. (2006). Vers un assainissement urbain durable en Afrique subsaharienne : Approche innovante de planification de la gestion des boues de vidange. Thèse de doctorat, École polytechnique fédérale de Lausanne. Koné D. (2010). 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Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 O R G A N I S AT I O N Strauss M., Montangero A. (2003). FS Management - Review of Practices, Problems and Initiatives. Engineering Knowledge and Research Project - R8056 Capacity Building for Effective Decentralised Wastewater Management. Eawag, Dübendorf, Switzerland. UNEP (2010). Africa Water Atlas. Department of Early Warning and Assessment (DEWA). Nairobi, Kenya, United Nation Environment Programme (UNEP). 291 Questions pour l’autoévaluation 1. Citer cinq aspects institutionnels importants jouant un rôle dans la gestion des boues de vidange et expliquer pourquoi ils sont importants. 2. Expliquer le besoin de mise en application des réglementations dans la gestion des boues de vidange. 3. Un schéma institutionnel possible consiste à avoir un opérateur pour la vidange et un autre pour le traitement. Dans quelles situations ce schéma est-il pertinent ? Quels sont les points qui peuvent poser problème ? Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 O R G A N I S AT I O N CHA P ITR E XI I I TRANSFERTS FINANCIERS ET RESPONSABILITÉS AU SEIN DE LA FILIÈRE GBV Elizabeth Tilley et Pierre-Henri Dodane Objectifs pédagogiques • Comprendre les relations financières entre les différentes parties prenantes de la chaîne de services. • Savoir quels types de transferts financiers sont en jeu dans la gestion des boues de vidange. • Être en mesure de décrire les modèles types de flux financiers pour la gestion des boues de vidange. • Comprendre la complexité de concevoir, mettre en œuvre, suivre et optimiser un système de gestion des boues de vidange en prenant en compte l’ensemble des intervenants et des interactions financières entre eux. 13.1 INTRODUCTION La complexité financière et politique de la gestion des boues de vidange (GBV) est l’une des raisons pour lesquelles elle reste peu développée au niveau mondial. Cela n’est pas seulement dû au nombre important de parties prenantes ayant un intérêt financier dans le système, mais aussi à la diversité de leurs intérêts. Contrairement à d’autres types d’infrastructures (par exemple l’électricité), où un seul fournisseur est généralement responsable de la production, de la livraison, de l’exploitation-maintenance et de la facturation, un système de gestion des boues de vidange est souvent constitué d’un ensemble d’intervenants en charge d’une partie différente de la filière. Par conséquent, un paiement doit être effectué à chaque fois que la responsabilité d’un service est transférée d’un intervenant à un autre. Seul un ensemble particulier de dispositions politiques et financières peut créer l’environnement nécessaire pour permettre à chaque partie prenante clef de jouer son rôle et à la chaîne de services d’exister dans son intégralité. Ce chapitre présente les différents flux financiers envisageables au sein de la filière GBV. Il illustre et discute les points clefs des transferts financiers et des responsabilités. Pour une meilleure compréhension globale du système GBV, ce chapitre commencera par préciser qui sont les différents intervenants et quels sont leurs rôles dans le système. Les différents types de transferts financiers seront caractérisés, avec une attention particulière accordée aux parties prenantes entre lesquelles ils sont effectués. Cinq modèles différents, c’est-à-dire différentes combinaisons de responsabilités et d’échanges financiers entre intervenants, sont présentés et analysés. Un court exercice est proposé pour appréhender le modèle économique des petits entrepreneurs de vidange, afin de donner un ordre de grandeur des montants échangés et de leur impact possible sur cette entité clef de la chaîne de services. Le chapitre se termine par une présentation des perspectives d’évolution de l’organisation financière du système GBV. Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 293 XIII - TRANSFERTS FINANCIERS ET RESPONSABILITÉS AU SEIN DE LA FILIÈRE GBV Figure 13.1 : Le service et la facturation dans les quartiers informels sont toujours difficiles, un problème exacerbé par une difficulté d’accès et un manque de titres fonciers (photo : Linda Strande). 13.2 MODÈLES FINANCIERS 13.2.1 Parties prenantes impliquées 294 Quasiment tous les intervenants dans le fonctionnement d’un système GBV sont liés par des interactions financières. Ces intervenants ou parties prenantes sont les personnes, les institutions ou les entreprises qui donnent ou reçoivent de l’argent en échange de la réalisation d’un ou plusieurs services dans la filière GBV. Les parties prenantes, ainsi que leurs responsabilités financières respectives, sont résumées (par ordre alphabétique) dans les paragraphes ci-dessous. Les autorités gouvernementales sont en charge des règles et réglementations auxquelles les entreprises privées et les services publics doivent se conformer. Les pouvoirs publics peuvent allouer des budgets et externaliser la réalisation des services, mais ils peuvent également planifier et opérer leurs propres services GBV en direct. Les autorités gouvernementales sont responsables de la perception des impôts afin de couvrir (complètement ou partiellement) leur budget. Ces autorités peuvent également être bénéficiaires de l’aide internationale, qui peut être utilisée pour la construction ou l’exploitation-maintenance des infrastructures publiques. Les entreprises privées sont des organisations qui opèrent en fournissant des biens ou des services en échange d’un paiement. Le fonctionnement des entreprises privées est encadré par les lois nationales. Elles peuvent le cas échéant accepter des contrats pour travailler pour l’État. Néanmoins, les entreprises privées ne sont pas sous tutelle des gouvernements et ne reçoivent pas de financement étatique garanti, bien qu’elles puissent demander des subventions, des prêts, etc. Les industries réutilisatrices constituent la partie prenante qui utilise soit les nutriments des boues de vidange (BV) traitées, soit leur potentiel énergétique, soit encore leur consistance en tant que matériau. Les industries réutilisatrices constituent un secteur relativement nouveau, mais en pleine expansion, de la chaîne GBV. Les possibilités de réutilisation des BV doivent être prises en compte lors de la conception de la chaîne de services GBV dans son ensemble afin d’assurer la mise en place des technologies de traitement adaptées, c’est-à-dire permettant de générer des matières traitées conformes à leur utilisation finale (Diener et al., 2014). Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 O R G A N I S AT I O N Avec un besoin croissant de nutriments à faible coût, d’origine locale et produits de manière durable, l’industrie agricole sera probablement une partie prenante de plus en plus importante dans le futur. Les BV sont aussi une source d’énergie durable prometteuse. À l’avenir, la nécessité financière et environnementale de la valorisation pourrait devenir le moteur de l’optimisation des filières GBV et considérablement influencer leur conception. La demande en boues, ainsi que le cadre législatif pour son application, auront un impact de plus en plus grand sur la façon dont les BV sont gérées tout au long de la chaîne de services. Le chapitre 10 présente une large gamme des industries et des produits en lien avec la valorisation des boues. Les opérateurs publics sont responsables de l’exploitation-maintenance des infrastructures publiques (par exemple de l’eau ou de l’électricité). Ils sont les extensions des pouvoirs publics et, à ce titre, sont financés par des budgets publics. Selon leur efficacité et le niveau de facturation aux utilisateurs, ces services publics peuvent fonctionner à perte. Les opérateurs publics offrent un service utile qui n’existerait pas autrement dans un marché pur, par exemple pour le traitement des boues. Ils sont souvent de type monopolistique. Néanmoins, les entreprises privées s’intéressent de plus en plus au potentiel financier des prestations des services publics qui, par conséquent, sont de moins en moins protégées de la concurrence. Les organisations non-gouvernementales (ONG) sont des entreprises qui fonctionnent sans but lucratif, mais qui ne sont ni financées ni pilotées directement par les gouvernements. Elles sont toutefois souvent utilisées par les gouvernements pour réaliser certaines activités. Les ONG offrent des services à caractère social là où les gouvernements et les entreprises privées ne veulent pas ou ne peuvent pas fonctionner efficacement. Les utilisateurs de toilettes au niveau domestique sont les personnes responsables d’évacuer les boues de vidange des habitations qu’ils possèdent ou qu’ils louent. Ces personnes utilisent des dispositifs d’assainissement domestiques qui nécessitent une vidange régulière des boues. Ces dispositifs sont notamment les fosses septiques, les latrines à fosse, les réacteurs anaérobies compartimentés (RAC, pour les regroupements d’habitations) ou d’autres dispositifs similaires de rétention et de stockage de boues. 13.2.2 Transferts financiers Dans la filière GBV, des échanges d’argent ont lieu pour les différentes activités (la vidange, le transport, le traitement…), avec des montants très variables, comme par exemple les faibles montants des petits services effectués ou le coût très élevé des constructions, et à des fréquences diverses (taxes annuelles, paiements quotidiens…). Un modèle économique financièrement durable implique la mise en place de certains transferts d’argent. Un bref aperçu des types de transferts les plus courants applicables à la filière GBV est présenté ci-dessous. L’aide budgétaire est le nom donné aux transferts de fonds entre les parties prenantes pour couvrir en partie ou en totalité le budget de fonctionnement de l’une d’elles. Typiquement, l’aide budgétaire est fournie par une autorité gouvernementale à un service public. Les gouvernements étrangers ou organismes internationaux (par exemple la Banque asiatique de développement) fournissent également une aide budgétaire aux différents ministères. La durée de l’aide budgétaire est généralement de long terme et non-conditionnée. En d’autres termes, elle n’est pas liée à une tâche ou à une production spécifique, mais plutôt à des besoins budgétaires identi- Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 295 XIII - TRANSFERTS FINANCIERS ET RESPONSABILITÉS AU SEIN DE LA FILIÈRE GBV fiés (les aides budgétaires conditionnées deviennent néanmoins de plus en plus intéressantes, puisqu’elles viennent en récompense de résultats tout en encourageant la transparence). Les coûts d’investissement sont payés une fois, au début du projet, pour couvrir toutes les dépenses de matériaux, de main-d’œuvre et des autres prestations nécessaires à la construction des installations et infrastructures associées. Les coûts d’investissement peuvent inclure l’acquisition de terrains pour la réalisation de lits de séchage, la conception et la construction d’une station de traitement, l’acquisition d’un camion de vidange pour la collecte et le transport des boues ou l’installation d’une fosse septique au niveau domestique. Chaque partie prenante listée au paragraphe précédent est susceptible de dépenses d’investissement. 296 Les redevances de dépotage sont demandées en échange de la possibilité de dépoter des boues de vidange dans une station de traitement. Le paiement de la redevance marque le transfert de la responsabilité des boues à un intervenant qui a la capacité juridique et technique de traiter et/ou de transférer sans risque ces boues à un autre intervenant. En théorie, toute entité propriétaire d’un terrain pourrait recevoir des boues contre de l’argent, même sans mettre en œuvre les mesures d’hygiène et de sécurité adaptées. Les redevances de dépotage officielles (en lien avec la réglementation en vigueur) doivent donc être telles qu’elles n’incitent pas les particuliers à facturer des services de dépotage de boues non-réglementés, qui concurrenceraient ainsi l’entité officielle en charge de recevoir les boues. On observe par ailleurs que la redevance de dépotage n’entraîne pas forcément une recrudescence des dépotages sauvages, certaines stations de traitement étant très fréquentées malgré des redevances pourtant élevées, comme le montre le tableau 13.1. Tableau 13.1 : Redevances de dépotage dans des sites de dépotage officiels en 2004 (adapté de Collignon, 2002, et Jeuland, 2004). VILLE COÛT PAR PROPORTION DES DÉPOTAGE (€) DÉPOTAGES TOTAUX NOMBRE DE DÉPOTAGES PAR AN TYPE DE SITE UTILISÉ Cotonou, Bénin 8,6 75 % 26 667 Station de traitement* Kampala, Ouganda 5,6 42 % 7 000 Station de traitement Dar es Salaam, Tanzanie 3,1 7% 100 000 Station de traitement Kumasi, Ghana 2,0 95 % - Station de traitement Dakar, Sénégal 1,2 74 % 67 525 Dépotage seul * Un traitement correct ne peut pas être garanti avec cette installation mal conçue et surchargée. Il n’existe probablement pas de moyen plus équitable ou plus rentable qu’un autre pour facturer une redevance de dépotage. La redevance peut être facturée proportionnellement au volume de boues dépotées (ce qui peut être difficile à mesurer et ne tient pas compte de la concentration des boues) ou par opération de dépotage quel que soit son volume (bien que la cuve du camion puisse être difficile à vider entièrement). Les deux possibilités ont pourtant des conséquences sur l’activité de collecte et de traitement et sur le fonctionnement financier de la station de traitement des boues de vidange. La facturation basée sur les opérations de dépotage sont en effet Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 O R G A N I S AT I O N susceptibles d’encourager les entreprises de vidange à maximiser le volume de boues dans les camions avant d’aller dépoter, ce qui se traduira alors par des dépotages moins fréquents mais plus volumineux. Figure 13.2 : Recouvrement d’une redevance de dépotage. Une bonne comptabilité est essentielle pour comprendre le bilan financier et l’améliorer (photo : Linda Strande). La prime au dépotage est l’opposée de la redevance de dépotage. Il s’agit d’une prime utilisée pour récompenser l’entreprise de vidange pour le dépotage des boues à l’endroit prévu et ainsi décourager le dépotage non-réglementé ou illégal. Payer une prime plutôt que de percevoir une redevance implique que la station de traitement ait d’autres recettes de fonctionnement, par exemple via une redevance d’assainissement. Une prime au dépotage de 5 USD par dépotage a été suggérée pour Ouagadougou, Burkina Faso, pour éviter les dépotages sauvages. Ce schéma n’a pas donné lieu à publication (Sandec, 2006). Les primes sont typiquement des paiements à verser à des personnes comme récompense pour des tâches socialement bénéfiques qu’elles ne pourraient pas assurer sans elles. Si le système de primes est controversé, notamment parce qu’on ne devrait pas être rémunéré pour faire ce qui est « juste », certains programmes ont efficacement atteint leurs objectifs en privilégiant l’approche « carotte » plutôt que l’approche « bâton » (Gertler et Boyce, 2001 ; Kakwani et al., 2005 ; Eldridge et Palmer, 2009 ; Banerjee et al., 2010). La licence de dépotage est un instrument financier utilisé pour contrôler le nombre et la qualité des entreprises de collecte et de transport qui sont autorisées à dépoter les boues de vidange dans la station. En théorie, la licence est octroyée pour un certain niveau de qualité du service fourni par son détenteur. Dans la pratique, cependant, c’est souvent un moyen pour l’entité émettrice des licences de générer des revenus ; et peu de demandes de licence font l’objet de refus. Depuis 1998, les vidangeurs de Nairobi paient leur licence annuelle entre 260 et 780 USD (pour, respectivement, des camions de moins de 3 m3 et de plus de 7 m3 de capacité). La licence permet aux entreprises de vidange de dépoter dans le réseau d’assainissement de la ville, ce qui réduit leur durée de transport pour effectuer des dépotages sauvages (Water and Sanitation Program Africa, 2005). Cependant, le système d’octroi de licences présente l’inconvénient de pouvoir exclure les entités les plus petites et les moins riches. Cela pourrait avoir comme conséquence, non-souhaitable, la création d’un système parallèle, type marché noir, de vidangeurs sans licence. Les frais de vidange sont les paiements facturés aux ménages pour vidanger la boue qui s’est accumulée dans leur dispositif d’assainissement domestique. En règle générale, la même entité Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 297 XIII - TRANSFERTS FINANCIERS ET RESPONSABILITÉS AU SEIN DE LA FILIÈRE GBV en charge de la vidange est également en charge de l’évacuation des boues en dehors du quartier, bien que certains vidangeurs manuels ne soient pas en mesure de transporter les boues et laissent la responsabilité de cette tâche aux ménages. Les membres du ménage peuvent également aider l’entreprise de vidange à effectuer l’extraction des boues pour réduire les frais. Les frais de vidange peuvent être payés une fois le service fourni. Cependant, ce modèle n’incite pas le ménage à réaliser des vidanges préventives et favorise la vidange de dernier moment (quand elle devient absolument nécessaire). Ce type de schéma, qui peut être totalement aléatoire ou saisonnier, crée une réelle incertitude pour les entreprises de vidange et de traitement. Certains ménages parmi les plus pauvres n’ont pas les moyens de vider la totalité des BV de leur fosse et pratiquent des vidanges partielles (par exemple, le mètre supérieur des boues dans la fosse). Les tarifs de vidange varient selon les pays, la région, le marché, le volume, l’état des routes et de nombreux autres paramètres. Par exemple, dans une zone d’habitat informel à Nairobi connue sous le nom de Kibera, vidanger 0,2 m3 de boues manuellement coûte 8 USD, alors qu’un camion de vidange demande 196 USD pour évacuer 3 m3 de boues (Water and Sanitation Program Africa, 2005). 298 L’amende est un outil utilisé par le gouvernement ou d’autres autorités officielles pour contrôler et décourager les comportements indésirables. Les amendes peuvent être utilisées pour empêcher les dépotages sauvages de boues et inciter à adopter un autre schéma de fonctionnement, comme payer une licence ou une redevance de dépotage. Cela n’est possible qu’avec des amendes suffisamment élevées et fréquemment appliquées, afin qu’elles soient ressenties comme une véritable menace pour les pratiques illégales ou informelles. Il convient toutefois de noter que l’amende n’est un outil équitable que lorsqu’il existe une autre option accessible à un coût raisonnable, comme par exemple l’accès à une station de traitement avec des horaires d’ouverture adaptés et une redevance de dépotage abordable. Le coût d’exploitation-maintenance est constitué des dépenses de fonctionnement pendant la durée de vie de l’infrastructure ou des équipements. Les équipements comme les pompes, les camions, les tuyaux, etc. s’useront avec le temps et selon l’intensité de leur utilisation. La fréquence de remplacement dépend des conditions d’utilisation et de la qualité de la maintenance. Bien que la durée de vie des équipements soit considérablement diminuée en l’absence de maintenance, les besoins les plus immédiats (comme par exemple le carburant) constituent souvent la priorité des dépenses. Les propriétaires de camions de vidange font face à des coûts d’exploitationmaintenance plus élevés en raison de l’usure dues aux matériaux non-fécaux contenus dans les boues (par exemple le sable, les ordures). De plus amples informations sur l’exploitationmaintenance sont présentées au chapitre 11. Le prix d’achat est le prix payé pour acquérir un produit . Des frais d’achat peuvent être payés à tout moment et à n’importe quelle fréquence, alors que les coûts d’investissement ou d’acquisition ne sont payés qu’au début d’un projet. Le prix d’achat dépend de l’offre, de la demande et des subventions éventuellement disponibles. L’industrie agricole, par exemple, peut payer un opérateur public pour acheter des boues de vidange traitées pour construire une serre, auquel cas ce sera classé comme un coût d’investissement, alors qu’un producteur de briques peut s’approvisionner chaque semaine en boues à usage de combustible, auquel cas l’achat sera considéré comme un coût de fonctionnement. Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 O R G A N I S AT I O N La redevance d’assainissement est un paiement perçu soit en une fois, soit à intervalles réguliers. Elle est payée en échange de services environnementaux comme le raccordement à l’adduction d’eau, au réseau d’égouts, voire à la vidange des boues, ou pour toute combinaison de ces services. L’avantage d’une redevance d’assainissement pour l’autorité publique est de constituer une ressource financière constante permettant une meilleure planification des activités de traitement et des mises à niveau. Néanmoins, dans la pratique, la redevance d’assainissement est parfois appliquée à des usagers desservis en eau potable mais qui ne bénéficient pas de service d’assainissement (non-raccordés au réseau d’égouts par exemple). Dans ce cas, le ménage est doublement facturé pour son assainissement : une première fois pour le paiement de la redevance d’assainissement, alors que le raccordement aux égouts est inexistant, et une seconde fois lorsqu’il paye la vidange de son dispositif d’assainissement domestique. Ce type de schéma peut donc avoir un effet négatif en faisant davantage payer les populations pauvres pour des services de moindre qualité. D’un autre côté, il peut aussi faciliter l’équilibre financier des services d’assainissement publics. Un aperçu de la mise en œuvre de redevances d’assainissement dans quatre villes des Philippines est rapporté par Robbins et al. (2012). Ils montrent comment une redevance d’assainissement payée à travers les factures d’eau ou les taxes foncières a été utilisée pour améliorer les systèmes GBV, en permettant de subventionner la collecte et le transport des boues de vidange des ménages. La redevance d’assainissement peut être conçue de telle sorte qu’elle profite aux plus pauvres et qu’elle contribue directement à l’amélioration du service reçu. Une redevance proportionnelle à la production de boues du ménage ou à sa consommation en eau permettrait en effet une contribution financière plus importante de ceux qui produisent le plus de boues ou consomment le plus d’eau, c’est-à-dire a priori les plus riches (Steiner et al., 2003). L’équilibre de l’ensemble des coûts d’un système GBV ne nécessite pas un apport financier très important (la valeur de 1 USD par personne et par an a été avancée dans une évaluation). Répartir les paiements des services d’assainissement dans le temps, par exemple sous forme de mensualités, pourrait sembler intéressant, en particulier pour les usagers à faibles revenus qui n’ont pas les moyens de régler en une seule fois le prix d’une vidange. Néanmoins, ce schéma de fonctionnement en mensualités implique des niveaux de transparence et d’organisation très élevés pour émettre la facture, la suivre et réceptionner les paiements. Les paiements, tant pour l’investissement que le fonctionnement, concernent un nombre important de fournisseurs de biens et de services (par exemple les mécaniciens, les fournisseurs, les banques) qu’il n’est pas possible d’énumérer ici. Une liste des principales charges d’une petite entreprise de vidange est présentée au paragraphe 13.4. 13.3 MODÈLES DE FLUX FINANCIERS Il n’y a pas de modèle GBV unique qui se révèlerait efficace dans toutes les situations. Les modèles de prestation de services sont d’ailleurs constamment modifiés et restructurés en fonction des conditions économiques, juridiques et environnementales. En outre, les responsabilités au sein de la filière sont en constante évolution et les transferts financiers entre les parties prenantes peuvent prendre plusieurs formes. Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 299 XIII - TRANSFERTS FINANCIERS ET RESPONSABILITÉS AU SEIN DE LA FILIÈRE GBV Différents modèles financiers pour la gestion des boues de vidange ont été proposés. Une large liste des configurations possibles est proposée par Steiner et al. (2003). Ce paragraphe présente une sélection de cinq modèles différents, basés sur des cas existants ou étant des modèles théoriques. Les modèles diffèrent en termes de parties prenantes, de responsabilités attribuées et de types de transferts financiers. Dans les schémas suivants (figures 13.3 à 13.7), les différentes composantes de la filière GBV sont représentées en bleu, sur la partie supérieure du schéma. La responsabilité associée est indiquée au niveau central en vert. Au-dessous, le type de flux financier est indiqué dans un ovale jaune. La direction de la flèche entre les parties prenantes indique la direction du paiement. Une ligne en pointillé indique un flux facultatif (qui peut avoir lieu ou pas). Flux des BV Flux financiers Dispositif d’assainissement à la parcelle Vidange Ménage Transport Entreprise de vidange Tarif de vidange Redevance de dépotage Traitement Destination finale Opérateur public Industrie réutilisatrice Prix d’achat Figure 13.3 : Modèle 1, organisation financière simple de la filière GBV, montrant le domaine de responsabilité de chaque intervenant et les échanges financiers correspondants. 300 La figure 13.3 illustre un modèle simple d’organisation des transferts financiers. Dans cet exemple, chacune des parties prenantes est responsable d’une unique composante de la filière et, par conséquent, on échange de l’argent à chaque transfert de responsabilité (la vidange et le transport sont assimilés ici à une seule et unique étape). Le ménage paie à une entreprise privée des frais de vidange pour extraire les boues, et l’entreprise devient alors responsable de la collecte et du transport de ces boues. Ce vidangeur se voit ensuite facturé une redevance de la part de l’opérateur public pour le dépotage et le traitement des boues. L’opérateur public reçoit également l’argent de la vente des produits issus du traitement (par exemple : boues traitées, fourrage…) à une industrie qui les réutilise. Dans ce modèle, l’opérateur public fonctionne indépendamment de l’autorité centrale et doit couvrir l’ensemble de ses coûts de fonctionnement avec les recettes des dépotages et de la vente des produits issus du traitement. Ce type de modèle peut potentiellement présenter deux inconvénients. Les entreprises de vidange, entreprises privées, vont répercuter les coûts supplémentaires engendrés par la redevance de dépotage sur l’ensemble de leurs clients, ce qui peut impacter l’accès des plus pauvres à la vidange. Ils peuvent aussi être tentés d’éviter de payer la redevance de dépotage en dépotant illégalement, mais gratuitement, dans un endroit non-prévu pour cela. Enfin, pour réduire son coût de fonctionnement et rester compétitif, le vidangeur pourrait être tenté d’économiser sur la maintenance (par exemple, l’entretien régulier du camion et de la pompe) et ainsi diminuer la durée de vie de son équipement et mettre en danger son entreprise. Par ailleurs, l’opérateur public qui ne serait pas contrôlé par l’autorité publique centrale pourrait ne pas respecter ses obligations en termes de traitement. Ce modèle simple est néanmoins un bon point d’entrée pour une évolution ultérieure de la filière avec, par exemple, un apport budgétaire de la part de l’autorité centrale dans le but de renforcer Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 O R G A N I S AT I O N la qualité du service et de diminuer la redevance de dépotage, participant ainsi à diminuer les dépotages sauvages. La figure 13.4 présente une variation de ce premier modèle. Flux des BV Flux financiers Dispositif d’assainissement à la parcelle Vidange Ménage Transport Destination finale Traitement Industrie réutilisatrice Entreprise de vidange Tarif de vidange Prix d’achat Figure 13.4 : Modèle 2, avec service intégré de collecte, transport et traitement. Le modèle représenté par la figure 13.4 est similaire au précédent, mais ses implications financières sont différentes. Dans le modèle 2, un seul opérateur de droit privé (qui peut être une ONG) est responsable de la vidange, du transport et du traitement des boues, ce qui supprime la nécessité d’une redevance de dépotage entre l’entité en charge de la vidange et celle en charge du traitement. Plusieurs conséquences en termes financiers et opérationnels en résultent : • L’entreprise est en charge de percevoir les paiements auprès des ménages, il peut donc répercuter ses coûts de fonctionnement directement sur l’utilisateur avec une économie d’échelle avantageuse pour ce dernier. • Le marché de la vidange peut alors évoluer de deux manières. L’une oriente vers un modèle de marché plus efficace, en permettant de bénéficier d’un effet d’échelle via l’assemblage des 2 activités, provoquant une réduction du nombre d’opérateurs de vidange ou en les renvoyant en marge du marché (par exemple dans des zones géographiques plus difficiles à desservir ou moins rentables). L’autre orienterait vers un marché moins efficace, en favorisant l’émergence de nouveaux opérateurs de vidange avec des tarifs plus compétitifs qui mettraient alors en danger l’entreprise effectuant la vidange et le traitement, et ce d’autant plus si ces nouveaux opérateurs réduisent leurs coûts en pratiquant la vidange sauvage (en particulier dans une situation où le cadre juridique n’est pas suffisamment efficace, notamment au plan coercitif, et ne permet pas l’application d’amendes. Une variante de ce modèle a été observée à Bamako, Mali (Collignon, 2002 ; Bolomey et al., 2003 ; Jeuland, 2004), où IE Sema Saniya, une ONG, possédait et exploitait deux camions de vidange et une station de traitement. Appliqué à cette échelle réduite, le modèle s’est avéré n’être pas durable parce que les coûts de fonctionnement étaient trop élevés pour pouvoir être équilibrés par la contribution des ménages. Il avait fallu recourir à d’autres stratégies de recouvrement des coûts pour assurer la viabilité financière du système. Dans le modèle présenté à la figure 13.5, une redevance d’assainissement est versée directement à l’autorité centrale par l’utilisateur des toilettes, à travers la facture d’eau, la facture du service assainissement s’il existe, ou encore la taxe foncière. L’opérateur public reçoit une aide budgétaire de la part de l’autorité centrale qui recueille cette redevance d’assainissement. Par conséquent, l’opérateur public n’a pas besoin d’équilibrer son fonctionnement uniquement sur les recettes procurées par la redevance de dépotage. Le montant de la redevance de dépotage Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 301 XIII - TRANSFERTS FINANCIERS ET RESPONSABILITÉS AU SEIN DE LA FILIÈRE GBV peut donc être réduit (par rapport au modèle 1), réduisant ainsi les charges de l’entreprise de vidange. Cette réduction peut in fine être répercutée sur le prix de vidange demandé aux ménages, leur rendant le service plus abordable, et contribuant ainsi à limiter le développement des pratiques de dépotage sauvage. Flux des BV Flux financiers Dispositif d’assainissement à la parcelle Vidange Ménage Traitement Destination finale Opérateur public Industrie réutilisatrice Transport Entreprise de vidange Tarif de vidange Redevance de dépotage Prix d’achat Aide budgétaire Autorité publique Redevance/taxe assainissement Figure 13.5 : Modèle 3, avec redevance de dépotage et redevance d’assainissement. 302 Ce modèle est néanmoins potentiellement propice aux pratiques de corruption et au manque d’efficacité, selon le niveau de compétence et de transparence de l’autorité centrale dans sa gestion financière. Sa stabilité financière est étroitement liée à la qualité du recouvrement de la redevance d’assainissement. La difficulté de la gestion foncière, la tenue imparfaite des registres, la corruption, les populations de passage sont autant de menaces pour la qualité du recouvrement au niveau des utilisateurs. Le recouvrement est un point faible pour de nombreuses autorités publiques, ce qui est fortement susceptible d’affecter la gestion pour l’opérateur public, avec une planification de l’exploitation-maintenance sur le long terme rendue plus difficile. Flux des BV Flux financiers Dispositif d’assainissement à la parcelle Vidange Ménage Transport Entreprise de vidange Traitement Destination finale Opérateur public Industrie réutilisatrice Tarif de vidange Prix d’achat Aide budgétaire Licence de dépotage Redevance/taxe assainissement Autorité publique Figure 13.6 : Modèle 4, avec redevance d’assainissement et licence. Dans ce modèle avec redevance d’assainissement associée à une licence (figure 13.6), le vidangeur en charge de la collecte et du transport ne se voit pas facturé pour chaque dépotage à la station. Il a l’accès illimité (ou semi-limité) à la station via l’octroi d’un permis de dépotage. Cette Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 O R G A N I S AT I O N formule est susceptible de réduire les dépotages sauvages des entreprises de vidange qui voudraient échapper à la redevance par dépotage. Le fait de devoir payer pour obtenir une licence de dépotage, quel que soit son montant, garantit à l’autorité publique un plus grand contrôle administratif sur les acteurs économiques. Les données sur le nombre de vidangeurs, les revenus générés, les distances parcourues, etc. peuvent en effet ainsi être collectées et utilisées pour orienter les politiques publiques. De plus, la licence contribue à la reconnaissance de l’entreprise de vidange par l’autorité publique, lui permettant en théorie de subir pendant son activité moins de nuisances comme les amendes, bakchichs et autres frais. C’est ce type de modèle qui a été mis en place à Kumasi, Ghana, où les entreprises de vidange doivent obtenir une licence d’activité qui peut être révoquée pour faute, notamment pour dépotage hors des installations de traitement officielles (Mensah, 2003). Le système de licence a également été mis en œuvre dans le quartier informel de Kibera à Nairobi, avec une fréquence de renouvellement annuelle (Water and Sanitation Program Africa, 2005) ainsi qu’à Da Nang, Vietnam, avec une fréquence de renouvellement mensuelle (Steiner et al., 2003). Comme présenté au chapitre 4, le secteur des entreprises de vidange est longtemps resté dans l’ombre. Son personnel est sujet à la discrimination, souvent obligé de travailler clandestinement ou de nuit, sous la pression sociale ou policière. Sa nature informelle a pour conséquence une non-application des règlements sur le travail et la santé, amenant les employés à subir parfois des conditions de travail dangereuses et humiliantes, sans application des droits fondamentaux accordés aux autres industries (Eales, 2005). Ainsi, si l’obtention de licences de dépotage présente l’inconvénient d’être coûteux et d’ouvrir potentiellement à la corruption, c’est l’une des étapes possibles vers la formalisation du secteur et vers son ouverture à plus de transparence et d’efficacité. L’octroi de licences est un mécanisme qui n’exclut pas les plus petits entrepreneurs (le fait de payer la licence leur offre un usage fréquent de la station) qui peut aider à améliorer les pratiques du secteur, les conditions de travail des ouvriers et la prestation de services pour ses usagers. Flux des BV Flux financiers Dispositif d’assainissement à la parcelle Vidange Ménage Transport Entreprise de vidange Tarif de vidange Traitement Destination finale Opérateur public Industrie réutilisatrice Prime au dépotage Prix d’achat Aide budgétaire Licence de dépotage Redevance/taxe assainissement Autorité publique Figure 13.7 : Modèle 5, avec incitation au dépotage. Le point clef du modèle présenté à la figure 13.7 est la direction du flux financier pour le traitement des boues, qui va de l’opérateur public vers le vidangeur. Ici, l’exploitant de la station paie une prime au dépotage au vidangeur pour recevoir ses boues dans la station. Un modèle financier avec des mesures incitatives au dépotage peut prendre des formes variées, raison pour laquelle Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 303 XIII - TRANSFERTS FINANCIERS ET RESPONSABILITÉS AU SEIN DE LA FILIÈRE GBV les flux représentant la licence et la redevance d’assainissement sur la figure 13.7 sont laissés en pointillé, indiquant qu’ils peuvent exister ou pas dans ce modèle, selon le contexte. Comme on l’a vu précédemment, des incitations financières peuvent être utilisées pour encourager les meilleurs comportements sociaux. Dans le cas des primes au dépotage, le paiement est utilisé pour encourager la collecte des boues et réduire les dépotages sauvages. Ce type de flux monétaire sous condition est encore relativement récent. Bien que les résultats soient prometteurs dans les programmes de santé et d’éducation, il existe peu de données pour démontrer leur utilité dans les programmes d’assainissement. Ce modèle repose sur le postulat que les entreprises de vidange n’ont pas les moyens de payer pour le traitement et ainsi cherchent à dépoter illégalement, avec les conséquences qui s’ensuivent sur la santé publique et l’environnement. Dans ce modèle, l’entreprise de vidange voit ses charges diminuer et ses recettes augmenter (prime au dépotage au lieu d’une redevance) ; c’est donc un gain que le marché est susceptible de répercuter sur les ménages avec, de fait, une possible augmentation du volume de boues vidangées et une diminution des dépotages sauvages, toutes deux profitables pour l’environnement et la collectivité. 304 Par contre, un tel modèle implique une augmentation des charges au niveau de l’opérateur de la station de traitement (primes à payer) et une diminution des recettes (absence de redevance de dépotage). Ce type de modèle ne peut donc fonctionner qu’avec un soutien significatif de l’autorité publique ou des bailleurs de fonds, qui peut être fluctuant, voire contradictoire, avec un risque de trous budgétaires au niveau de l’opérateur de la station. Pour éviter de telles défaillances, une redevance d’assainissement devrait couvrir les besoins financiers de la station de traitement. Le prix de la vidange pourrait alors être réduit, strictement réglementé ou même devenir gratuit. L’utilisateur des toilettes serait toujours redevable de la redevance d’assainissement, mais serait soulagé de la double charge financière constituée de la redevance d’assainissement et des coûts de vidange. Un des risques avec ce modèle est d’inciter les vidangeurs à venir dépoter dans la station des matières plus rentables à vidanger, comme des boues très peu concentrées ou d’autres types de liquides, plutôt que de dépenser du temps et du carburant pour vidanger correctement les dispositifs d’assainissement domestiques, ce qui est susceptible d’endommager le procédé de traitement et menacer sa viabilité financière. Pour contrôler le type et la qualité de la boue déversée dans la station, des procédures de contrôle qualité sont requises, en utilisant par exemple des fiches de suivi comme présentées au chapitre 11. Figure 13.8 : La densité du trafic urbain peut augmenter de façon significative les charges de carburant et de personnel des opérations de collecte et de transport de boues (photo : Linda Strande). Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 O R G A N I S AT I O N Une extension possible du modèle présenté à la figure 13.7 consisterait à l’enrichir par des mesures incitatives envers les propriétaires de toilettes dont les boues sont vidangées par un opérateur de services agréé. Ce modèle inciterait les propriétaires à ne pas attendre que leur dispositif d’assainissement domestique déborde, à ne pas solliciter des entreprises non-agréées ou encore à ne pas vidanger directement dans l’environnement pendant la saison des pluies. Aucun exemple de cette variante n’est connu. La logistique et l’administration d’un tel projet sont complexes, car il faudrait garantir le paiement des primes aux ménages et la réalisation ultérieure des vidanges, ce qui nécessiterait un grand changement de comportement et l’application de nouvelles réglementations. Une synthèse des avantages et des inconvénients de chacun des modèles est présentée dans le tableau 13.2. Tableau 13.2 : Synthèse des avantages et des inconvénients potentiels pour chacun des modèles financiers présentés. TYPE DE MODÈLE Modèle 1 : organisation financière simple de la filière GBV. Modèle 2 : avec service intégré de collecte, transport et traitement. Modèle 3 : avec redevance de dépotage et redevance d’assainissement. Modèle 4 : avec redevance d’assainissement et licence. Modèle 5 : avec incitation au dépotage. AVANTAGES INCONVÉNIENTS + Les ménages sont libres de choisir le prix le plus compétitif pour la vidange. + La programmation de la vidange est souple, elle peut être faite lorsque le budget le permet. + Le ménage n’est pas tenu à une redevance d’assainissement fixe. + Un opérateur unique permet d’optimiser le modèle financier. + Moins de risques de dépotages sauvages, l’entreprise s’occupant aussi du traitement. + Moindre coût pour les ménages pauvres non-connectés aux égouts. + Moindre redevance de dépotage pour les vidangeurs. + Plus grande couverture des zones de vidange. + Reconnaissance et contrôle des vidangeurs par le système de licence. + Amélioration des conditions de travail. + Forfait dépotage limitant les dépotages sauvages. + Prix de vidange réduits. + Extension de la couverture des zones vidangées. Downloaded from http://iwaponline.com/ebooks/book-pdf/502774/wio9781780409801.pdf by guest on 19 May 2024 - Les frais d’exploitationmaintenance de la station de traitement doivent être intégralement couverts par la redevance de dépotage. 305 - Des frais de vidange élevés pourraient être demandés aux ménages. Les vidangeurs pourraient chercher à dépoter illégalement pour éviter la redevance de dépotage. - La gestion globale de la filière peut s’avérer difficile. - Attention aux tricheries sur les matières dépotées à la station. - Budget conséquent nécessaire au niveau de l’exploitant de la station de traitement. XIII - TRANSFERTS FINANCIERS ET RESPONSABILITÉS AU SEIN DE LA FILIÈRE GBV Étude de cas 13.1 : Station de traitement des boues de vidange de Cambérène, Dakar, Sénégal. (Adapté de Mbéguéré et al., 2010, et Dodane et al., 2012). À Dakar (Sénégal), la station de traitement des boues de vidange de Cambérène est exploitée par l’Opérateur public national de l’assainissement (ONAS). L’installation de traitement est constituée d’une association entre bassins de décantation/épaississement et lits de séchage non-plantés, conçue pour une capacité de 100 m3/jour de boues de vidange, ce qui correspond à la desserte d’environ 41 500 personnes. La station reçoit des boues de fosses septiques vidangées par des camions exploités par des entreprises de vidange privées. Le modèle des flux financiers de Cambérène correspond au modèle 3, combinaison des redevances de dépotage et d’assainissement décrite plus haut (figure 13.5). Les ménages paient 50 USD aux entreprises de vidange pour une évacuation de 10 m3 de boues, ce qui correspond à environ 5 USD par personne et par an. En plus, les ménages paient une redevance d’assainissement à l’ONAS, indexée sur l’eau potable, qui s’élève à environ 2 USD par personne et par an. La contribution totale par personne à l’assainissement, soit 7 USD, correspond à environ 2 % du budget moyen des ménages de la population dakaroise. Les entreprises de vidange ont effectué d’importants investissements initiaux pour s’équiper en camions, ce qui doit être amorti dans le temps pour un montant estimé à 0,3 USD par personne desservie et par an. L’entreprise doit également s’acquitter d’une redevance de dépotage à la station de traitement dont le montant est d’environ 0,4 USD par personne desservie et par an. Le reste de l’argent facturé aux ménages par l’entreprise de vidange permet d’assurer les coûts de fonctionnement, notamment la rémunération du personnel, le carburant, les frais généraux, les réparations et l’entretien des camions. Ce coût de fonctionnement total doit rester inférieur à 4,3 USD pour que l’entreprise soit rentable. 306 L’ONAS a deux principales sources de revenus : la redevance d’assainissement payée par les ménages et la redevance de dépotage acquittée par les entreprises de vidange. Afin de générer davantage de recettes et optimiser la valorisation des nutriments en zone urbaine, l’ONAS vend les boues de vidange séchées en tant qu’amendement de sols à des entreprises de construction. Ceci génère environ 250 USD par an, ce qui, ramené à l’assiette considérée, correspond à 0,007 USD par personne desservie et par an.
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Un cinéma animé par la mer : regard écologique sur le cinéma d'animation à partir des films de Jean-François Laguionie. Art et histoire de l'art. 2022. &#x27E8;dumas-03978824&#x27E9;
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169Lire l'article de Peter SLOTERDIJK, « Etre né de l'écume / Sphère 3. Bonnes feuilles », dans Multitudes, n°19, Paris, Ed. Association Multitudes et Inculte, mai 2004, pp.187-196 [en ligne]. Lien : https://www.cairn.info/revue-multitudes-2004-5-page-187.htm#:~:text=L'%C3%A9cume%20ne%20met %20rien,le%20moins%20la%20plus%20m%C3%A9prisable (dernière consultation le 29/08/2022) 170Kimberley Peters et Philip Steinberg citent Stuart Elden pour décrire l'ontologie humide qu'ils cherchent à définir, dans Peters KIMBERLEY, Philip STEINBERG, « Wet ontologies, fluid spaces : giving depth to volume through oceanic thinking. », dans Environment and planning D : society and space, Vol.33, n°2, Santa Barbara, Ed. University of California Santa Barbara, 2015, p. 253. 86 perte d'habitus terrestre laisse place à un renouvellement maritime de la perception du monde : un passage se fait d'un monde à l'autre, du réel au fabuleux, de la vue à l'ouïe, de la surface à la profondeur, de la perception latérale à la perception volumétrique, de la fermeture à l'ouverture. Deuxième bilan Milieu A propos de la mer, Claude Lévy-Strauss écrit : « n'étant ni marin, ni pêcheur, je me sens lésé par cette eau qui dérobe la moitié de mon univers »171; « la diversité de la terre, il me semble seulement que la mer la détruit »172. Sa pensée sur la mer se rapproche de sa description des paysages vierges, dont la monotonie leur ferait perdre toute valeur significative173, pensée proche de celle de Roland Barthes qui écrit que la mer ne porte aucun message174. A l'opposé d'une telle vision terrestre du monde, ce moire porte l'idée que la mer dépasse de loin l'image d'une surface monotone et accablante. Au contraire, par son caractère fluide excessif, la mer déborde d'elle-même et influe tout ce qui entre en contact avec elle. Après avoir compris dans la première partie que la mer déborde de sa représentation visuelle vers les structures filmiques, cette deuxième partie a mis l'accent sur la manière dont elle déborde vers le sujet humain, en tant que corps percevant. La mer du littoral échange avec les corps à travers le mouvement, et la mer profonde discute avec les corps à travers le volume ; ensemble, corps et mer communiquent. Benjamin Thomas définit le milieu comme « la genèse réciproque d'un sujet et d'un lieu »175. Autrement dit, le lieu ne se réduit pas au sujet, et le sujet ne se réduit pas à la détermination du lieu, puisqu'ils échangent activement l'un avec l'autre, et que la nature de cet échange définit un milieu. Ce que le premier chapitre sur le mouvement a montré des films du corpus, c'est que « l'on voit des corps être ce qu'ils 171Claude LEVI-STRAUSS, Tristes Tropiques, Paris, ed. Pocket, collection Terre humaine poche, 1984, p.405. 172Ibid., p.405. 173Ibid., p.316. 174Roland BARTHES, Mythologies, Paris, Ed. Seuil, édition illustrée établie par Jacqueline Guittard, 2010, p.226. 175Benjamin THOMAS, Faire corps avec le monde. De l'espace cinématographique comme milieu, Belval, Ed. Circé, 2019, p.75. 87 sont parce qu'ils appartiennent à ce lieu, et un lieu qui achève de se définir parce que des corps y actualisent une manière de se déplacer plutôt qu'une autre »176. Chaque séquence déjà décrite, que celle-ci soit marche, danse, hallucination, rêve, met en avant la manière dont les corps s'inscrivent dans l'espace marin, et par cet acte même actualisent les possibilités que ce lieu renferme. Chaque séquence témoigne de la construction d'un milieu, à tel point qu'il semble que, si l'on reprend l'idée de Benjamin Thomas selon laquelle certains films se replient en tous points sur le mésographique [l'étude du milieu], les trois films étudiés de JeanFrançois Laguionie en font très certainement partie. A propos de l'expérience appareillée, Maurice Merleau-Ponty affirme que « mon corps effectif vient à coïncider avec le corps virtuel qui est exigé par le spectacle et le spectacle effectif avec le milieu que mon corps projette autour de lui. »177 En questionnant l'interaction d'un personnage avec le monde et en éclairant une certaine façon de percevoir, l'espace cinématographique échange aussi avec le sujet spectatoriel et actualise la manière dont celuici fait milieu. Ainsi, un milieu-mer met en lumière un certain mode d'interaction avec le monde et les choses, et donc un certain mode de perception du monde, que j'ai défini progressivement grâce à des notions de mouvement, fluidité, profondeur, volume. Enfin, la disponibilité de la mer pour faire milieu avec des corps s'inscrit dans sa nature même, en tant qu'ensemble flou qui pousse à l'éclaboussure, au débordement, à l'ouverture ; parce qu'elle épuise nécessairement les limites entre les mondes, la mer renouvelle la manière de penser le lien du corps à l'espace. Ce lien, situé dans la liquidité et la connexion, se différencie a priori des potentialités terrestres de solidité, fixité, stature. Pourtant, il ne s'agit pas d'affirmer ici une opposition absolue entre la terre et la mer, mais au contraire de déterminer une perception maritime de l'espace qui pourrait être appliquée à l'environnement terrestre. C'est ce que le premier chapitre, consacré à l'expérience de la mer sur les littoraux, a montré de la façon la plus évidente à travers la mise en mouvement perpétuelle du sujet ; mais une perception volumétrique transférée de l'univers aquatique à l'atmosphère terrestre est tout autant concevable. Finalement, la définition du milieu-mer ne fait que soulever plus radicalement un lien d'interdépendance du corps à l'espace envisageable aussi chez le vivant terrestre. Nous avons tendance à concevoir un espace qui nous est extérieur, quand rien ne peut être saisi en dehors du corps. Lorsque la caméra en prise de vue 176Ibid., p.22. 177Benjamin Thomas cite Maurice Merleau-Ponty, Ibid., p.198. 88 réelles échoue à capturer la mer telle que le corps la perçoit 178, le cinéma d'animation, en tant que procédé humain, retranscrit ce qui ne peut pas être enregistré. 178Pour rappel voir les sous-chapitres de cette deuxième partie sur la couleur et le volume : la couleur de la mer comme la profondeur de l'espace ne peuvent être saisis par la caméra de la même manière que notre œil les perçoit, si bien qu'un décalage est créé. TROISIÈME PARTIE LES PROPRIÉTÉS LIQUIDES DE L'ANIMATION : VERS UN MODÈLE ÉCOLOGIQUE Introduction Écocinéma L'écocinéma, notion apparue dans les années 1990, s'est développé ces dernières années dans les études cinématographiques pour atteindre une ampleur conséquente. Pour exemplifier cette ampleur, Paula Willoquet-Maricondi note la mise en place de plus en plus fréquente de festivals dédiés à des films engagés écologiquement179, dont le but est d'envisager les films comme des outils puissants capables d'apporter une prise de conscience environnementale et d'ouvrir des discussions sur les solutions à envisager, l'action politique qui devra en découler. Ce développement, d'abord au niveau international ces vingt dernières années, se remarque aussi en France depuis une dizaine d'années, jusqu'à la décision prise par le Festival de Cannes en 2021 de proposer une sélection de films sur l'environnement. Si se pose la question du possible greenwashing180 dans lequel s'est engagé l'un des plus grands 179Voir la préface du livre de Paula WILLOQUET-MARICONDI, Framing the world, Explorations in ecocriticism and film, Charlottesville, Ed. University of Virginia Press, 2010, p.XI. On peut noter à titre d'exemple parmi l'ensemble des festivals de cinéma dédiés à l'environnement certains en France, tels que le Festival International du Film d'Environnement FreDD « Actions! », organisé à Toulouse depuis 2010 avec des événements dans l'ensemble de la région Occitanie. On peut aussi citer le Festival Film Nature Environnement à Grenoble, ou encore le Greenpeace Film Festival en ligne, etc. Au niveau international, l'un des plus connus est aujourd'hui the Environmental Film Festival à Washington DC. 180La question du greenwashing est également l'une des problématiques de l'écocinéma, au -delà des festivals. Un exemple flagrant qui souligne ces contraditions, souvent repris en débat par les écocritiques, est celui des productions hollywoodiennes, coincées dans une logique de consommation dérangeante dans le domaine de l'écocinéma. Vaiana, La légende du bout du monde (2016, Ron Clements et John Musker), illustre efficacement ces contradictions : le film prend racine dans la mythologie polynésienne pour raconter les aventures de Vaiana, une jeune fille destinée à devenir cheffe des Maui, un peuple indigène dont l'histoire est profondément liée à la mer et à la navigation. « Au commencement, il n'y avait que l'océan. » Ces paroles introduisent le film, qui se fait témoin de la relation intense des Maui avec leur environnement et notamment l'océan. Le sujet du film et sa réutilisation par Disney ont évidemment provoqué de nombreuses réticences 90 festivals mondiaux de cinéma, cette sélection de dix documentaires, parfois appelés éco-films, est emblématique de la mise en lumière d'un cinéma dédié à l'environnement. Pour autant, si le lien entre cinéma et environnement se resserre, la définition de l'écocinéma reste souvent un débat dans les ouvrages consacrés à la question. Le terme prend racine dans l'écocritique, définie largement en tant que « l'étude de la relation entre la littérature et l'environnement physique, et l'évaluation de textes et d'idées en fonction de leur cohérence et de l'utilité qu'ils amènent en réponse à la crise environnementale »181. Regroupant des disciplines culturelles variées – la photographie, la musique, le cinéma, mais aussi les textes théoriques, les environnements virtuels –, l'écocritique elle-même suscite des réflexions et approches diverses (phénoménologiques, psychologiques, etc). Si certains auteurs affirment que sa définition est sans cesse renouvelée par l'écriture de nouveaux textes écocritiques, il semble que la cohérence du champ théorique se situe dans la proposition d'une nouvelle perception du monde et le repoussement des limites. L'écocritique se veut ouvrir le point de vue anthropocentré sur de nouvelles perspectives, dans lesquelles le monde nonhumain, non plus séparé du monde humain, est considéré pour ce qu'il est et non plus comme fond ou décor. Reconnaissant que l'intérêt humain n'est plus le seul intérêt signifiant, l'écocritique ouvre nécessairement sur une réflexion éthique concernant la responsabilité de l'humain envers son environnement naturel et le vivant qui l'entoure182. A partir de la définition de l'écocritique, l'écocinéma s'est développé en engageant dans sa définition une tension entre deux points de vue. Le premier consiste à appréhender l'écocinéma comme une grille de lecture, une stratégie d'interprétation qui oriente l'analyse d'un film. En mettant en lumière certains paramètres, l'analyse écocinématographique consisterait donc à insister sur la dimension écologique (ou non) d'un film. Par essence, une telle vision donne la possibilité à tous types de films de pouvoir susciter un intérêt chez les universitaires et politiques polynésiens, qui soulignent le mélange des cultures et des mythes auquel s'adonne Disney, ainsi que l'exotisation allant jusqu'au stéréotype. Selon eux, la a transformé un sujet qui résonne dans des débats autant anthropologiques, qu'écologiques et politiques, en un objet de simple divertissement occidental. 181D'après la définition proposée par Adrian IVAKHIV, An ecophilosophy of the moving image : cinema as anthrobiogeomorphic machine, dans Stephen RUST, Salma MOANI, and Sean CUBITT (Dir.), Ecocinema Theory and Practice, New York, Ed. Routledge, 2012, p.109. Traduction personnelle de l'anglais : « Ecocriticism has been defined as the study of the relationship between literature and the physical environment and the evaluation of texts and ideas in terms of their coherence and usefulness as responses to environmental crisis. » 182Voir les pages d'introduction concernant l'écocritique dans Paula WILLOQUET-MARICONDI, Op. Cit., pp.3-5, et notamment les critères définis par Lawrence Buel sur lequels revient l'auteure. 91 écocinématographique, si une analyse pertinente peut en être extraite. Le second point de vue consiste à concevoir l'écocinéma comme une pratique filmique consciente, qui se concentre sur l'environnement non-humain avec un engagement éthique voire politique. Ainsi, l'ensemble des films, souvent documentaires, dont le sujet est lié à l'environnement et a pour objecti f d'amener une prise de conscience sur la crise environnementale, formerait un corpus d'écofilms, dont la cohérence reposerait sur un appel commun à l'action politique. En prenant l'exemple du documentaire La Onzième Heure, Le dernier virage183, Paula Willoquet-Maricondi revient sur le témoignage de Roger Ebert, qui confit se trouver face à un documentaire clair mais peu inspirant. Si le documentaire fait appel à une cinquantaine d'experts confrontant leurs points de vue pour aboutir à un message d'urgence d'action face à la destruction de la planète, l'homme affirme que quelque chose manque. Les documentaires sur l'environnement, comme Demain184, ont un rôle éducatif clair, n'hésitant pas à avoir recours au pathos et à l'affect pour transmettre un message fort185, et participent à amener un changement de conscience sur les problèmes environnementaux. Cependant, ces documentaires, parce qu'ils se construisent à partir d'un message prédéfini, sous-entendent l'existence d'une forme d'art dans laquelle le message est communiqué sans ambiguité. Le manque identifié par Roger Ebert se joue dans le peu d'espace laissé à un sens polysémique, à un décodage. Parce qu'un « travail artistique ne parle pas directement à ses spectateurs, mais engage en eux un processus qui conduit à une perception, que ce soit une vérité, un idéal, ou une possibilité »186, il me semble aussi évident que l'écocinéma ne peut pas être uniquement appréhendé comme la somme de ces films. Situé au-delà de la volonté d'obtenir une prise de conscience directe, le champ de l'écocinéma consiste à étudier des films en posant la question suivante : de quelle manière ces objets peuvent-ils remettre en question notre relation au monde non-humain? Les films qui répondent à cette problématique disposent d'un potentiel que l'écoanalyse révèle : celui 183Nadia et Leila CONNERS, La Onzième Heure, Le dernier virage, 2007, Etats -Unis, produit par Léonardo di Caprio. 184Cyril DION et Mélanie LAURENT, Demain, 2015, France. 185Dans Demain, le couple de réalisateurs s'inscrit dans la démarche documentaire en revenant sur leur expérience personnelle et ce qui les a poussés à agir. La démarche subjective et affective est le moteur du message sur l'urgence climatique qu'ils souhaitent transmettre. Il s'agit d'un motif très récurrent dans le documentaire performatif, genre particulièrement représenté parmi les documentaires sur l'urgence climatique. D'après le cours de Jérémy HAMERS sur le documentaire contemporain, Université de Liège, 2020. 186David Ingram cite Tan dans « The aesthetics and ethics of eco-film criticism », in Ecocinema Theory and Practice, Op. Cit., p.64 [format Epub]. Traduction personnelle de l'anglais : « A work of art does not speak to its beholders directly, but rather involves them in a process that leads to insight, whether it is a question of a truth, an ideal, or a possibility. » 92 d'affecter notre vision du monde à travers de nouvelles perceptions, d'affecter notre mode de vie à travers la remise en question de notre relation au vivant. Un regard différent se pose sur l'environnement non-humain, qui apprécie l'ensemble des éléments naturels, et rompt ainsi avec une certaine routine spectatorielle187, dans laquelle la nature est un décor auquel peu d'importance est accordée, pour dessiner la possibilité d'une relation symbiotique avec la nature188. Ce mémoire a pris progressivement le sens d'une analyse écocinématographique, en repérant la manière dont la mer, en se diffusant dans les films du corpus, engendre un questionnement sur le milieu et la relation du sujet au monde qui l'entoure. En ouvrant plus largement au cinéma d'animation, cette troisième partie prolonge l'analyse écocritique qui a été faite jusque-là à partir des films de Jean-François Laguionie. Elle vise à confirmer une intuition : la cinéma d'animation constitue un support artistique idéal pour représenter un mode d'existence fluide. Le médium, du fait de ses caractéristiques liquides, facilite les échanges entre les corps et leur environnement. Je quitte donc, le temps de cette dernière partie, le domaine exclusif de la mer, pour me concentrer sur le mode d'existence fluide que j'ai repéré en observant l'élément naturel dans le corpus. Cependant, en comprenant de manière générale comment le cinéma d'animation est un médium fluide qui remodèle le vivant, des liens se tisseront progressivement entre les caractéristiques de la mer et celles du cinéma d'animation. Il est évidemment difficile d'étudier le temps d'une partie un médium artistique aussi large que celui du cinéma d'animation ; ce travail ouvre avant tout des pistes de réflexion. Différentes formes d'animation ont été sélectionnées pour former un éventail de techniques élargi, parmi lesquelles figurent celles utilisées par Jean-François Laguionie dans le corpus initial. L'analyse de ces films portera sur les techniques, les matières, l'acte d'animer, afin de 187Pour reprendre l'expression de Scott Ma cdonald dans son article « The ecocinema experience », dans Eco , . ., p.55 La théoricienne utilise cette expression pour qualifier ce qui a lieu dans la vidéo expérimentale de Andrej Zdravic's, Riverglass : A River Ballet in Four Seasons (1997), souvent évoquée comme modèle pour le champ d'étude de l'écocinéma. Le film de 41 minutes, dépourvu de personnages humains, se concentre sur la captation visuelle de la rivière Soča en Slovénie. En ayant pour unique fil conducteur la volonté de filmer chaque détail éphémère de la rivière dans son passage des saisons, avec un souci particulier accordé au son, le réalisateur dirige les sens du spectateur vers la nature. Une installation sur trois écrans de la vidéo à New Delhi, mettant en contrepoint les bruits, la vitesse de la circulation et l'écoulement de la rivière, éclaire particulièrement le changement d'état perceptif demandé au spectateur dans le passage d'un monde à l'autre, en redonnant à celui qui regarde et écoute la sensation de son environnement. Voir les photos et descriptions disponibles sur le site du réalisateur Andrej Zdravic's, rubrique « Public Art ». Lien : https://andrejzdravic.com/public-art (dernière consultation le 30/08/2022) 93 repérer une substance commune à ces différentes méthodes de création. Chapitre 1 La plasmaticité « Rien n'est jamais fini. » 189 Au cœur de ce chapitre sont interrogées les formes telles qu'elles naissent et se développent dans l'animation. En prenant appui sur les techniques d'animation des films du corpus (papier découpé pour La Demoiselle et le Violoncelliste ainsi que La Traversée de l'Atlantique à la rame, peinture à l'huile et 3D pour Louise en Hiver), mais aussi d'autres exemples tirés notamment de la sélection officielle de l'édition 2022 du festival d'Annecy, il s'agit de comprendre, au niveau plastique d'un film d'animation, ce qui se joue dans la création des formes, et comment la mer est engagée dans cette réflexion. 3.1.1. Tracé et traîné Cherchant à qualifier les différentes manières d'exister du trait dans les pratiques plasticiennes du cinéma d'animation, Patrick Barrès reprend les mots d'Hubert Damisch, qui repérait dans les drippings de Jackson Pollock un trait « moins tracé que traîné »190, pour différencier deux expressivités du trait. L'auteur définit le trait tracé comme la réunion de « deux modes de conduite créatrice »191 dont l'une prend le pas sur l'autre : le trait d'épure, qui prend sens géométriquement et renvoie à autre chose qu'à lui-même (l'objet dessiné), prend le pas sur le trait d'esquisse, qui a donné une impulsion, mais dont la matérialité s'efface derrière le modèle qui a pris forme. Le trait tracé n'existe donc déjà plus en tant que trait mais en tant que cette forme tracée, finie, qui le dépasse. Le trait traîné, quant à lui, correspond à la mise en exhibe du trait d'esquisse, qui occupe autant de place dans l'espace que dans la durée ; car le trait traîné « prend son temps »192, il se développe et se renferme, il dévoile son instabilité et 189Gilles DELEUZE et Félix GUATTARI, Op. Cit., p.607. 190Patrick BARRES, « Des pratiques du trait dans le cinéma d'animation », dans Débordements, revue de cinéma en ligne, mai 2012 [en ligne]. Lien : https://debordements.fr/Des-pratiques-du-trait-dans-le-cinema-danimation (dernière consultation le 30/08/2022) 191Ibid. 192Ibid. 94 donne à voir sa matérialité, et « demeure ainsi attaché aux marques du chantier »193. Selon Patrick Barrès, la dichotomie entre le trait traîné et le trait tracé se repère dans la relation qu'ils développent chacun avec le motif. L'auteur reprend notamment pour exemple la ligne ondulée de Kandinsky, créée à partir de paramètres géométriques et qui se rapporte à d'autres données qu'elle même, et la ligne d'inflexion de Paul Klee, qui n'est pas rattachée à un système de références et qui se définit uniquement à travers le geste impulsé qu'elle révèle. Fig.13 A gauche la ligne formelle de Kandinsky (trait tracé), à droite la ligne d'inflexion de Klee (trait traîné). D ' après Patrick Barrès, Art . Cit . De cette définition émerge le lien avec le cinéma d'animation « plasticien » auquel s'intéresse Patrick Barrès : « le cinéma d'animation, dans ses chantiers d'expériences plastiques, intègre cette dichotomie, entre épure et esquisse, ou entre trace et traîne. [...] L'espace se compose en référence à un système ou se construit de l'intérieur. »194 Le courtmétrage de Tal Kantor, Letter to a pig (2022) exemplifie très bien la dichotomie entre trait tracé et traîné, cette hésitation entre deux états d'expressivité du trait, notamment dans la composition des figures. Celles-ci sont en effet constituées à partir d'un ensemble hétérogène, qui réunit à la fois des traits d'esquisse qui se donnent à voir et des traits tracés qui prennent forme, le processus étant exagéré par la présence de morceaux de matière photographique qui dialoguent avec les traits dessinés pour tenter de créer une forme. « Tenter » seulement, car cette figure ne prend jamais forme, et n'est donc jamais pleinement figure ; elle est en perpétuelle formation, en cours de devenir, hésitant entre le développement et l'épuisement195. L'image perd en relation avec le système extérieur de modèle et de valeurs qu'elle tente de reproduire : elle fait apparaître le monde intérieur tel qu'il se construit. 193Ibid. 194Ibid . 195La démarche du cinéaste rappelle fortement celle de Robert Breer, lorsqu'il réalise A man and his dog out for air (1958), que Patrick Barrès cite dans son article pour mieux définir sa démarche dialectique : « pour moi, le cinéma est une forme d’expression fondée sur un arbitraire, à savoir qu’il doit reproduire l’illusion du mouvement naturel. Il faut alors briser cet arbitraire, s’attaquer aux matériaux de base, détruire le cinéma pour ainsi dire afin de découvrir ce qu’il peut encore nous donner. (...) J’aimerais que le public ne s’attende pas à découvrir dans mes films la notion conventionnelle de continuité. Au début de chaque bande, je tente de fournir au spectateur les éléments formels d’une nouvelle espèce de continuité à laquelle il n’est pas habitué. Ce peut parfois être de l’anti-continuité » Dans Patrick BARRES, Ibid. 95 Fig.14 Letter to a pig (Tal Kantor, 2022) : La retouche perpétuelle de la figure. Cependant, Letter to a pig exemplifie aussi la manière dont il est possible de compléter la proposition de Patrick Barrès en élargissant son propos. Celui-ci définit une dichotomie trait tracé/trait traîné qui semble a priori difficile à adapter à l'ensemble des techniques plasticiennes du cinéma d'animation, puisque cette dichotomie s'arrête à des techniques à la fois picturales et graphiques, dont l'origine du mouvement dépend d'un tracé. L'auteur choisit d'ailleurs de parler de manière générale des techniques plasticiennes du cinéma d'animation alors que ses exemples reposent essentiellement sur des techniques graphiques. Or, on observe que dans Letter to a pig, la matière photographique participe avec la matière picturale à la mise en avant de la matérialité de l'image sur ce qu'elle représente. Ensemble, elles participent à créer ce que Patrick Barrès définit comme une poïétique du chaos, dans laquelle l'expérience prend le pas sur le programme. Ainsi, il semble intéressant d'élargir l'étude du trait à l'étude des formes, pour mieux traduire le processus qui a lieu dans l'animation et la nature du chaos qui la constitue. Ce qui m'intéresse ici est notamment la conséquence du trait traîné sur la notion de contour, et donc de délimitation des formes. En prenant l'exemple du papier découpé, technique utilisée par Jean-François Laguionie et associée à l'immobilité plutôt qu'au mouvement, il est a priori plus difficile de repérer la présence du trait traîné, puisque les formes semblent tracées et définies. Dans cette technique plasticienne, le peintre ne redessine pas à chaque image les formes mais crée des marionettes en papier qu'il dispose sur un banc-titre devant une caméra fixe, et les déplace petit à petit en photographiant chaque étape du mouvement. Pour ce faire, chaque figure de 96 papier a un corps multiple, puisqu'il faut créer des corps sous différents angles de vue (face, derrière, profil droit, profil gauche, haut, bas). Dans ce contexte de création, comment repérer un trait traîné puisque la technique repose a priori sur des formes prédécoupées qui sont filmées sur un banc-titre et que l'animateur met en mouvement avec des fils et des aimants? Sans aucun doute, le trait traîné prend place dans le monde qui nous est donné à voir, si nous regardons de plus près la manière dont les formes évoluent au fil du temps, et dont leurs contours sont sans cesse soumis au remodelage de la même manière que dans le dessin animé. Dans le passage d'une vue à l'autre qui permet la mise en mouvement des choses, la marionette A est remplacée par la marionette B parce que le point de vue sur le corps a changé, si bien que la multiplicité du corps du personnage se révèle à l'image, chaque marionnette ne se rapportant jamais tout à fait à la précédente ; un décalage matériel est dévoilé, qui témoigne de la non-finitude des formes. Tout comme dans Letter to a pig, il est donc possible de repérer dans La Traversée de l'Atlantique à la rame, au niveau plastique, des figures à l'état de retouche permanente, qui d'une seconde à l'autre semblent changer au point de révéler leur inconsistance formelle. Fig.14 Deux exemples de situations à travers lesquelles se révèle l'inconsistance formelle du personnage d'Adélaïde à travers les changements de marionnettes de papier. A droite et au centre : Adélaïde lors d'une séquence dans laquelle les personnages rament. A droite : Adélaïde qui dort. Ainsi, la dichotomie du trait traîné/trait tracé peut être élargie à la dichotomie forme traînée/forme tracée. Si au niveau textuel de l'image, le spectateur comprend l'existence d'un personnage formé – grâce à un système de valeurs extérieures au film –, le niveau graphique de l'image révèle le chaos matériel dans lequel est pris la figure, dont l'état formel est toujours in-fini. Il en est de même pour d'autres techniques a priori éloignées du dessin animé, tel que le stop motion utilisant de la pâte à modeler (ou plasticine) ; l'animation de corps et d'objets en pâte en volume implique aussi nécessairement un remodelage perpétuel des formes. A l'inverse du cinéma en prise de vues réelles qui enregistre des formes qui préexistent dans un 97 système extérieur, l'essence de l'animation se situe précisément dans la genèse perpétuelle des formes dans le temps, en état de renaissance à chaque image, et ne pouvant exister hors du monde intérieur dans lequel elles s'inscrivent. Le raccordement d'un état de la forme à un autre n'est jamais défini, et offre des possibilités infinies ; l'animateur dans le travail entre chaque image transcende la fixité des formes. L'animation implique donc une vision proche : d'abord dans la création et transformation des formes, qui ne peut s'opérer que de proche en proche, ensuite dans le rapprochement visuel et tactile qu'elle impose au spectateur. Face à un monde filmique dont la matérialité se révèle sans cesse à travers l'instabilité des formes, la vision spectatorielle se rapproche, en se trouvant prise elle aussi dans la dichotomie tracé – traîné, dans le sens où elle se situe entre le monde extérieur que le film représente vision éloignée) et le monde intérieur textural qui le compose (vision rapprochée). Un monde matériel se donne à voir en création. En évoquant la vision rapprochée en opposition à la vision éloignée, je reprends explicitement une notion utilisée par Gilles Deleuze et Félix Guattari pour caractériser l'espace lisse (espace ouvert, nomade) en opposition à l'espace strié (espace fermé, sédentaire). En effet, dans l'objectif de traduire esthétiquement les notions d'espace lisse et strié, les philosophes proposent la définition d'un art nomade qui reprend les différentes caractéristiques de l'espace lisse, et qui me semble particulièrement intéressant à lier au cinéma d'animation. Trois grandes caractéristiques d'un art nomade sont notamment – l'espace haptique, dans lequel la perception n'est plus seulement optique, mais tout autant tactile, auditive, etc, la perception haptique étant définie comme celle qui fait appel aux affects, aux forces, aux intensités196, et non à des qualités visuelles mesurables. Cette perception qualifie bien celle du spectateur du cinéma d'animation qui perçoit le monde créé dans sa matérialité et ses textures ; – la vision rapprochée, découlant directement de l'espace haptique, qui se perd dans la matérialité plutôt que de se reculer des choses qu'elle perçoit. Les auteurs prennent l'exemple de Cézanne qui parlait de la vision rapprochée que le peintre doit prendre pour faire son tableau avant de le regarder de loin, « la nécessité de ne plus voir le champ de blé, d'en être trop proche, se perdre, sans repère, en espace lisse »197 ; 196Gilles DELEUZE et Félix GUATTARI, Op. Cit., p.598. 197Ibid., p.615. 98 et la ligne abstraite. Cette ligne s'oppose au figuratif, puisqu'elle « ne délimite rien, – [...] ne trace aucun contour »198. Elle correspond à la primauté du traîné sur tracé, et ne cherche pas à délimiter des formes et quadriller l'espace mais à se connecter à une matièreflux199. Des similarités se repèrent donc entre l'art nomade envisagé par Gilles Deleuze et Félix Guattari et le cinéma d'animation tel que cette sous-partie l'a envisagé, c'est-à-dire en tant qu'un art qui révèle sa matérialité, en exposant le remodelage perpétuel auquel sont soumises les formes d'un état à l'autre, celles-ci contenant en elle la possibilité d'évoluer de manières infinies, sans jamais pouvoir devenir pleinement figures. Or, une dernière caractérisitique émerge de l'art nomade : Le strié et le lisse ne s'opposent pas simplement comme le global et le local. Car, dans un cas, le global est encore relatif, tandis que dans l'autre le local est déjà l'absolu. Là où la vision est proche, l'espace n'est pas visuel, ou plutôt l'oeil luimême a une fonction haptique et non optique : aucune ligne ne sépare la terre et le ciel, qui sont de même substance ; il n'y a pas d'horizon, ni de fond, ni perspective, ni limite, ni contour ou forme, ni centre : il n'y a pas de distance intermédiaire, ou toute distance est intermédiaire.200 Il y a dans la définition de l'art nomade la volonté de penser la matérialité de l'espace lisse comme une substance unique qui se déploie et se renferme, qui serait de l'ordre de l'absolu d'après le terme utilisé par les auteurs. L'étude du fonctionnement des traits, contours, figures et formes dans le cinéma d'animation démontre la manière dont le passage d'une image à une autre dans cette forme de cinéma impose sans cesse le passage d'un état formel à un autre état qui le dépasse, si bien que les formes ne sont jamais fermées, détermin . Au contraire, l'animation met en exhibe la non-finitude des formes qui évoluent dans la multiplicité apparente, dans une matière-flux intérieure au système filmique qu'il reste à définir plus précisément. 198Ibid., p.621. 199Je reprends l'expression utilisée par Gilles Deleuze et Félix Guattari, Ibid., p.622. 200Ibid., p.616. 3.1.2. Le plasma En lien avec son projet de compréhension d'une méthode universelle de la créativité, liée aux lois de la pensée sensitive et prélogique, Serguei M. Eisenstein introduit dans les années 1930 le concept stucturel de plasmaticité, aux croisements de la biologie, l'anthropologie et l'esthétique – l'un de ses concepts qui sera le plus étudié 201. Naissant de l'étude des dessins animés de Walt Disney, la plasmaticité est définie par le théoricien à partir des caractéristiques de ces dessins, dont il rapproche les propriétés de celles de la matière plasmatique. Selon lui, le travail de Walt Disney est celui d'une véritable reconstruction du monde, qui impose aux formes le changement continu et la soumission à la fantaisie et l'arbitraire. Ainsi, « on s'égare comme dans un autre monde, où tout est autre, où l'on est libre de tout critère, où l'on peut plaisanter comme la nature elle-même plaisanta aux époques joyeuses de formation, quand elle inventait des curiosités dignes de Disney ».202 Eisenstein illustre cela au niveau plastique en repérant l'élasticité des figures dans les dessins animés : les cous s'étirent d'étonnement, les jambes s'allongent en courant, un poisson devient tigre et hurle comme un lion... En émerge Une faculté que je nommerais ‘plasmaticité’, puisque, ici, l’être reproduit dans le dessin, l’être de forme déterminée, l’être ayant atteint une certaine apparence se comporte à l’instar du protoplasme originel qui n’avait pas encore de forme ‘stabilisée’ mais était apte à en prendre une, n’importe laquelle, et, d’échelon en échelon, à évoluer jusqu’à se fixer dans n’importe quelles – dans toutes – formes d’existence animale.203 Les qualités pleinement plasmatiques des formes chez Walt Disney révèle ce qu'Eisenstein nomme l'appel du plasma (« plasma appeal ») dans le dessin animé, qui n'est autre que « l'omnipotence du plasma qui contient sous forme liquide toutes les possibilités des futures espèces et formes. »204, Mickey possédant la « plasmaticité par excellence »205. 201D'après Olga KATAEVA, Le statut du dessin dans l'oeuvre de Serguei M. Eisenstein. Mise en scène, montage, intermédialité, Thèse de Doctorat, Université Sorbonne Paris Cité et Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, 2018, p.172. 202Serguei M. EISENSTEIN, Walt Disney, Belval, Ed. Circé, 2013, p.14. 203Ibid., p.27. 204Arthur Péraud cite Murray Pomerance dans Imaginaire attractionnel des formes numériques dans le blockbuster contemporain (2008-2018), Mémoire de Master, Université de Rennes 2, 2020, p.137. 205Serguei M. EISENSTEIN, Op. Cit., p.93. Or, si Eisenstein ne parle que du dessin animé et non du cinéma d'animation, je me suis attachée dans la sous-partie précédente à montrer que l'élasticité des formes repérable dans le dessin animé peut être élargie à d'autres techniques du cinéma d'animation. De la même manière, comme le propose Cyril Lepot lorsqu'il s'intéresse à la plasmaticité dans le stop motion, il est possible d'opérer « un glissement du problème eisensteinien »206. Donner au stop motion les mêmes qualités plasmatiques que le dessin animé peut en effet poser question quand cette technique fonctionne sur la prise de vue d'un espace réel, et non pas d'un espace pictural comme dans la technique du papier découpé. Pourtant, tout comme pour le papier découpé, les qualités plasmatiques du stop motion prennent naissance dans le fait que, « à la différence de la prise de vue réelle, le procédé de prise de vue photographique rétrograde de sa fonction initiale d'enregistremment du cheminement effectif d'un objet, pour devenir avant tout un moyen de multiplier les versions de ce dernier (modulé ou remplacé) »207. Alors, le mouvement n’est plus un indice permettant de mieux identifier le statut d’un objet dans l’espace-temps (persistance et changements de position, de forme, de vitesse etc.) Plutôt, le processus d’animation induit, lors du visionnage, une réanimation du réel, qui ne repose pas tant sur le pouvoir démiurgique et absolu de l’animateur sur ce monde nouveau, que sur la production d’une fiction de la matière, par le biais de la virtualisation de la matérialité. La plasmaticité du cinéma d'animation est donc avant tout à penser dans la manipulation interimage qui a lieu, peu importe la technique : c'est grâce à cette manipulation et la production du mouvement qui en résulte que les objets et figures montrent des qualités de matière et de forme qu'ils ne possèdent pas dans l'espace réel. Tout comme dans le dessin animé, les formes dans le stop motion ne sont jamais stabilisées et varient continuellement dans leur texture et leur consistance. Eisenstein souhaite définir la plasmaticité comme un concept qui ne repose pas sur le mouvement mais sur des propriétés internes aux formes, puisque le cinéaste-théoricien repère notamment dans ses propres dessins l'appel du plasma, les corps déformés – ou peu formés – de ses bonhommes faisant appel au plasma originel. Or, le glissement eiseinsteinien que j'effectue est à la fois le passage du dessin animé au cinéma d'animation, et de la forme dans 206 Cyril LEPOT, Une nouvelle théorie de la plasticité filmique : spécificité du stop motion et épistémologie critique, Thèse de Doctorat, Université Panthéon-Sorbonne - Paris 1, 2021, p.330. 207Ibid., p. 320. 101 l'état dans laquelle elle se trouve à la forme dans sa mise en scène dynamique. Dans le cinéma d'animation, le mouvement est le moyen plastique qui permet d'exprimer à l'écran « des comportements inattendus de la matière »208, des « qualités plastiques que les matériaux ne possèdent pas »209 ; la plasmaticité se joue dans la mise en mouvement d'une matière dans son infinitude, et est à différencier de la plasticité dans les arts plastiques fixes tels que le dessin ou la peinture. Différencier la plasticité et la plasmaticité, c'est reprendre la définition de Dominique Chateau du plasma comme « un incessant courant de plasticité transformationnelle »210 : la plasmaticité, ou l'appel du plasma, correspond à un excès de plasticité donné par le mouvement dans le cinéma d'animation, qui révèle sa matérialité. Ainsi, si une définition générale du cinéma d'animation a souvent été compliquée à penser, du fait de la multiplicité des techniques qu'il englobe, au point que Dick Tomasovic affirme que « l'animation est en crise d'identité. Depuis toujours et probablement pour toujours »211, la plasmaticité a pourtant été peu entendue comme l'un des traits identitaires de cet art. De son côté, Sébastien Denis, pour donner matière à penser globalement le cinéma d'animation, au-delà de ses techniques et théories, nous dit que l'animation est le « devenir vivant du non-vivant [pensé] comme une opération normale »212. Pourtant, en 1995, Hevé Joubert-Laurencin écrivait que la métamorphose n'est pas « une forme, mais la forme du cinéma d'animation »213. Sans la nommer, l'auteur suggérait déjà une pensée globale sur le cinéma d'animation naissant de sa capacité à rendre toute matière plasmatique. Cette force plasmatique est le point de départ des potentialités créatives de cette forme de cinéma au niveau plastique, jouant volontiers avec « les frontières établies entre réel et imaginaire »214. 208Ibid., p.320. 209Ibid., p.323. 210C yril Lepot cite Dominique Chateau, Ibid., p.331. 211Sébastien DENIS cite Dick Tomasovic, dans Le cinéma d'animation : techniques, esthétiques, imaginaires, Malakoff, ed. Armand Colin, 2017 [2007], p.15 [format Epub]. 212Sébastien DENIS cite des propos qu'il avait co-écrits avec Jeremy STOLOW, Ibid., p.17 [format Epub]. 213Julia NUSSBAUMER cite Hervé Joubert-Laurencin dans « Métamorphoses des corps et ambivalence des êtres dans les contes cinématographiques d'Hayao Miyasaki », dans Synergies, n°7, Sylvains-lès Moulins, Ed. GERFLINT, 2010, p.118. ]. En revenant sur l'imaginaire infini ouvert par les différentes techniques du cinéma d'animation, le théoricien revient notamment sur la manière dont cette forme de cinéma ouvre des brèches entre le réel et l'imaginaire, en cherchant très souvent à ouvrire un dialogue entre les deux sans pour autant créer un système complètement détaché. «Dans tous [les] cas le réalisateur a fait appel à une technique particulière (il aurait pu en utiliser une autre) pour créer un rapport déphasé au réel. C’est toujours par un décalage avec les images que l’on sait appartenir au monde réel que les mondes parallèles de l’animation ouvrent des brèches, des passages. Il ne s’agit pas de mondes stérilement isolés, mais bien d'univers en discussion permanente avec celui du spectateur. ». Ibid., p.12. Si je n'ai jusque là pas évoqué les techniques informatiques, c'est bien la force plasmatique de l'imagerie de synthèse et l'imaginaire qu'elle ouvrait qui ont intéressé la prise de vue réelle : en comprenant rapidement l'exponentialité des capacités informatiques, le lien entre la prise de vue réelle et les effets spéciaux numériques s'est forgé sur la capacité de l'animation à ouvrir une brèche du réel vers l'imaginaire à travers sa puissance plasmatique – les potentialités formelles infinies qu'elle promettait. Ainsi, comme le remarque Arthur Péraud, l'image de synthèse offre la vision rapprochée qu'il manquait à la prise de vue réelle : « Chaque pixel composant une forme numérique est devenu modifiable au micromètre près, pour un million d’opération à la seconde. Chaque pixel possède maintenant son propre potentiel d’action. »215 Finalement, après avoir défini la manière dont le cinéma d'animation rend toute matière plasmatique, comprenons que l'écran animé est un écran de plasma. Le plasma, terme polysémique apparu en 1752 dans la langue française et issu du grec désignant « la chose façonnée »216, est intéressant à comprendre dans la définition scientifique du terme plutôt que dans son étymologie : d'abord utilisé en biologie pour définir « la partie liquide du sang contenant des éléments figurés en suspension »217, le terme a été repris dans le domaine de la physique par le physicien et chimiste Irvin Langmuir en 1928 pour décrire un état de la matière qui jusque là n'avait jamais été défini, composant pourtant plus de 99% de la matière visible de l'Univers. Tout état de la matière changeant en fonction de l'énergie qui lui est fournie – l'état solide passant au liquide lui-même passant au gazeux – , le plasma correspond à l'ultime état lorsqu'une énergie supplémentaire est fournie à un gaz ; il est un gaz ionisé, c'est-à-dire qui a perdu, du fait d'une forte énergie, un ou plusieurs électrons 218. Ses caractéristiques sont celles d'un état en suspension comme le gaz, mais dans lequel les particules (globalement neutres) interagissent les unes avec les autres, au contraire du gaz dans lequel les particules n'interagissent pas ou seulement sous la forme de chocs. Tandis que
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